Droit constitutionnel - CJBL

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Conférence du Jeune Barreau de Luxembourg Bulletin d’information sur la jurisprudence - 2004 49 Conférence du Jeune Barreau de Luxembourg N° 3/2004 (Mars 2004) Droit constitutionnel Cour constitutionnelle 30 Janvier 2004 Constitution - Article 14 de la Constitution - Principe de légalité des peines Considérant que l'article 14 de la Constitution énonce que «nulle peine ne peut être établie ni appliquée qu'en vertu de la loi» ; Considérant que l'article 36, 5° de la loi modifiée du 27 juillet 1936 concernant la comptabilité de l'Etat dispose que «Les cahiers des charges peuvent avoir des clauses pénales adaptées à la nature et à l'importance des marchés. Ces clauses peuvent comprendre des amendes et des astreintes, la résiliation du marché ainsi que l'exclusion à temps de la participation aux marchés publics. Au même titre des primes d'achèvement des travaux avant terme peuvent être prévues.» ; Considérant que les clauses pénales sont des accords sur des indemnisations forfaitaires en cas d'inexécution d'obligations principales; qu'exprimées sous forme d'astreinte ou d'amende conventionnelle, elles sont de nature purement civile et ne constituent pas des peines au sens de l'article 14 de la Constitution; Considérant que la résiliation du marché n'est pas une pénalité en soi mais une décision de rupture des liens contractuels entre parties; Considérant par contre que l'exclusion même à temps de la participation aux marchés publics n'est pas un mode de réparation du préjudice subi par l'inobservation des conditions du cahier des charges mais une peine au sens de l'article 14 de la Constitution qui est dès lors quant à cette mesure applicable à l'article 36,5° de la loi précitée; Considérant qu'une telle peine ne peut faire l'objet d'un engagement contractuel mais doit être établie par la loi; qu'il s'ensuit que l'article 36, 5° de la loi modifiée du 27 juillet 1936 concernant la comptabilité de l'Etat prévoyant, par le biais de cahiers des charges, l'exclusion de la participation aux marchés publics est à déclarer non conforme à l'article 14 de la Constitution. Cour constitutionnelle - 30.01.2004 - Arrêt n° 19/04 – N° 00019 du registre Droit civil Cour d'appel 6 Novembre 2003 Transaction – Annulation si une partie abandonne ses droits pour une contrepartie pratiquement inexistante Si, en règle générale, il n'est pas nécessaire que, pour qu'il soit satisfait à l'exigence de la réciprocité des concessions dans la transaction, les concessions faites par l'une des parties aient la même importance que celles faites par l'autre des parties, il n'y a pas transaction lorsqu'une partie abandonne

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Conférence du Jeune Barreau de Luxembourg

Bulletin d’information sur la jurisprudence - 2004 49

Conférence du Jeune Barreau de Luxembourg N° 3/2004 (Mars 2004)

Droit constitutionnel

Cour constitutionnelle30 Janvier 2004

Constitution - Article 14 de laConstitution - Principe de légalité despeines

Considérant que l'article 14 de laConstitution énonce que «nulle peine ne peutêtre établie ni appliquée qu'en vertu de laloi» ;

Considérant que l'article 36, 5° de la loimodifiée du 27 juillet 1936 concernant lacomptabilité de l'Etat dispose que «Lescahiers des charges peuvent avoir des clausespénales adaptées à la nature et à l'importancedes marchés. Ces clauses peuvent comprendredes amendes et des astreintes, la résiliationdu marché ainsi que l'exclusion à temps de laparticipation aux marchés publics. Au mêmetitre des primes d'achèvement des travauxavant terme peuvent être prévues.» ;

Considérant que les clauses pénales sont desaccords sur des indemnisations forfaitaires encas d'inexécution d'obligations principales;qu'exprimées sous forme d'astreinte oud'amende conventionnelle, elles sont denature purement civile et ne constituent pasdes peines au sens de l'article 14 de laConstitution;

Considérant que la résiliation du marchén'est pas une pénalité en soi mais unedécision de rupture des liens contractuelsentre parties;

Considérant par contre que l'exclusion mêmeà temps de la participation aux marchéspublics n'est pas un mode de réparation dupréjudice subi par l'inobservation desconditions du cahier des charges mais unepeine au sens de l'article 14 de laConstitution qui est dès lors quant à cettemesure applicable à l'article 36,5° de la loiprécitée;

Considérant qu'une telle peine ne peut fairel'objet d'un engagement contractuel mais doitêtre établie par la loi;

qu'il s'ensuit que l'article 36, 5° de la loimodifiée du 27 juillet 1936 concernant lacomptabilité de l'Etat prévoyant, par le biaisde cahiers des charges, l'exclusion de laparticipation aux marchés publics est àdéclarer non conforme à l'article 14 de laConstitution.

Cour constitutionnelle - 30.01.2004 - Arrêt n°19/04 – N° 00019 du registre

Droit civil

Cour d'appel6 Novembre 2003

Transaction – Annulation si une partieabandonne ses droits pour unecontrepartie pratiquement inexistante

Si, en règle générale, il n'est pas nécessaireque, pour qu'il soit satisfait à l'exigence de laréciprocité des concessions dans latransaction, les concessions faites par l'unedes parties aient la même importance quecelles faites par l'autre des parties, il n'y apas transaction lorsqu'une partie abandonne

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ses droits pour une contrepartie si faiblequ'elle est pratiquement inexistante (cf. Cass.fr. 1ère civ., 4 mai 1976, Bull. Civ. I, n° 157, p.124).

Au début du siècle dernier, par un arrêt du 26novembre 1902, la Cour avait déjà décidéqu'est "nulle pour défaut de cause latransaction où l'une des parties contractantesn'a fait aucune espèce de sacrifice".

Les premiers juges ont dès lors à juste titreannulé la transaction du 10 octobre 1996 endisant que la concession faite par A., eu égardà l'importance de ses blessures et du préjudicesubi suite à l'accident, était dérisoire, voireinexistante par rapport à celle faite par B. etil y a lieu de confirmer le premier jugementsur ce point.

Cour d'appel – 6.11.2003 – 9e Chambre –Arrêt civil – N° 26759 du rôle

Cour d'appel26 Novembre 2003

1. Prescription acquisitive – Usucapion– Une société peut invoquer laprescription acquisitive à l'encontrede ses associés

2. Régimes matrimoniaux – Récompense– Cours des intérêts

3. Régimes matrimoniaux – Achat departs sociales – Biens communs s'ilsne sont pas acquis par exercice d'undroit de souscription préférentielrattaché à des parts sociales quel'époux détient en propre

1. Admettre que la société A. ne pourrait pasprescrire contre X. et Y. serait méconnaître leprincipe essentiel en droit que la sociétécommerciale consti tue une entitéjuridiquement différente des associés, que sonpatrimoine ne se confond pas avec celui desassociés, qu’elle a des intérêts propres qui sontparfois aux antipodes de ceux de ses associés,que les intérêts d’une société ne se résumentpas à la somme des intérêts des associés maissont aussi ceux des créanciers de la société quiont un intérêt à ce que le patrimoine social dela société soit le plus solide possible.

(...)

La prescription court contre toutes personnes,à moins qu’elles ne soient dans quelqueexception établie par la loi. Aux termes del’article 2253 du Code civil, elle ne court pointentre époux.

L’article 2253 ne protège les époux que dansleurs rapports mutuels et ne joue que contre

les personnes à l’égard desquelles la loil’accorde (J. Cl. C. art. 2251-2259 fasc 70 n°42).

La prescription acquisitive trentenaire estinvoquée par la s.e.c.s. A. contre les époux etanciens époux X. et Y. La société (...) étant unepersonnalité juridique distincte de lapersonne de X., l’exception de la suspension dela prescription entre époux n’est pasapplicable et le fait que X. (détenait) 99,5 %des parts sociales ne permet pas d’assimiler lasociété au conjoint X., aucune confusion despatrimoines n’étant alléguée.

(...)

C’est à bon droit et pour de justes motifs quela Cour déclare adopter que les juges depremière instance ont retenu que la possessionexercée par la société A. sur la parcelle (...)comportait l’élément matériel, c’est-à-dire lamainmise sur la chose et l’élémentintentionnel, c’est-à-dire la volonté d’agircomme propriétaire et que la possessionexercée par la société à partir de l’année 1965réunissait les conditions nécessaires à laprescription acquisitive. C’est notamment àjuste titre qu’ils ont rejeté l’existence d’un viced’équivoque opposé par l’appelante. Ils ontencore correctement dit qu’il n’y avait pas lieuà application des articles 553 et 555 du Codecivil.

2. La règle de l’article 1473 du Code civil, qui,il est vrai, n’est pas en harmonie avec l’article1469, alinéa 4, du Code civil, règle selonlaquelle les intérêts légaux courent du jour dela dissolution de la communauté, ne doit être

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appliquée que dans les cas où la récompensese limite à la somme nominale dont il a ététiré profit.

Les intérêts ne peuvent courir de plein droitqu’à partir du jour où le profit subsistant estconstaté par l’évaluation qui en est faite(Cass. fr. 17 juillet 1984, D 1984, 477, noteMorin).

Le point de départ des intérêts est dès lors lejour de la liquidation lorsque la récompenseest égale au profit subsistant.

Conformément à l’article 1469, alinéa 3, duCode civil, la récompense est une dette devaleur. Le patrimoine qui a contribué à unedépense d’investissement au profit d’un autrepatrimoine doit profiter de l’enrichissementprocuré à ce patrimoine. Mais le profitsubsistant, qui est l’avantage réellementprocuré au fonds emprunteur au jour durèglement de la récompense, représenteseulement la plus-value procurée aupatrimoine emprunteur par la dépense et nonpar une autre cause (Ph. Malaurie, L. Aynès,Droit civil, Les régimes matrimoniaux, n°622).

C’est dès lors à bon droit que X. soutient queseules les plus-values qui n’entraînent pas demodification de la consistance de la société aujour de la dissolution de la communauté,c’est-à-dire les plus-values imputables àl’évolution économique de la société et à unegestion courante de celle-ci, doivent profiterau créancier de la récompense et être prises encompte pour la réévaluation. Les plus-valueséventuellement dues à des apports de fondspersonnels du débiteur de la récompense ou àses actes de gestion dépassant une gestioncourante pendant l’indivision ne doivent pasêtre prises en compte pour la réévaluation dela récompense.

3. Le tribunal a dit à juste titre et pour desmotifs que la Cour fait siens que les nouvellesparts sociales de la s.e.c.s., acquises le 13juillet 1967 par X. au prix de 559.300.-francs, payable par des mensualités de 5.408.-francs, ne constituent pas des biens proprespar accessoire tels que visés par l’article 1406du Code civil. En effet, ces parts n’ont pas été

acquises grâce à un droit préférentiel desouscription propre attaché aux parts propresde X. (Les sociétés et le patrimoine familialBruylant, 1996; Le statut des parts et actionsde société par H. Michel, p. 76).

(...)

La valeur patrimoniale de ces parts acquisesau cours de la communauté moyennant desfonds communs constitue un bien entré encommunauté et fait partie de la masse àpartager (Cass. fr. civ. 10 février 1998,Defrénois, 1998, art. 36866, note O.Milhac).

Si on doit tenir compte de la consistance desparts sociales au jour de la dissolution de lacommunauté, l’estimation de la valeurpatrimoniale des parts doit se faire au jour dela jouissance divise, c’est-à-dire au jour leplus proche du partage effectif. Les moins-values comme les plus-values qui seproduisent au cours de l’indivisionpostcommunautaire nuisent ou profitent auxindivisaires.

(...)

L’article 815-10 du Code civil stipule que lesrevenus produits par l’exploitation du bienindivis accroissent à l’indivision et aux termesde l’article 815-12 l’indivisaire-exploitantpeut prétendre à une indemnité destinée àrémunérer son activité. Ces règles nepermettent pas de faire une distinctionsuivant l’origine de la plus-value accrue aubien commun qui a conservé sonindividualité. La plus-value qui provient del’activité de l’indivisaire-gérant accroît àl’indivision.

(4) Conformément à l’article 815-10, 2°,aucune recherche relative aux fruits etrevenus n’est toutefois recevable plus de cinqans après la date à laquelle ils sont perçus ouauraient pu l’être.

La prescription extinctive établie par ce texte,prescription applicable d’ailleurs aussi à lademande en attribution d’une indemnité dejouissance de l’article 815-9, alinéa 2 du Codecivil, n’est interrompue que par une demandede l’indivision dirigée contre un indivisaire

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ou par une demande de l’indivisaire contrel’indivision portant expressément sur laremise ou l’attribution des bénéfices (Cass.civ. fr. 10 février 1998 précitée).

Cour d'appel – 26.11.2003 – 1re Chambre -Arrêt civil – N° 27235 du rôle

Cour d'appel26 Novembre 2003

Régimes matrimoniaux – Époux mariéssous le régime de la séparation de biens– Époux ayant contracté un empruntpour l'achat d'un bien revenant à l'autreépoux – Présomption de libéralité –Révocation de la libéralité – Demandede remboursement – Cours des intérêts

L’appelante réclame le paiement du montantde 799.728.- francs, soit 19.824,74 euros,qu’elle avait emprunté en vue du financementd’une voiture acquise par l’intimé.

Dans l’hypothèse où le solvens a sciemmentpayé la dette d'autrui, la jurisprudenceétablit une présomption simple de libéralité

(Cass. 1re civ., 2 juin 1992, Bull. civ. 1, n°167).

Comme l’appelante a révoqué cette libéralité,sa demande en restitution est à déclarerfondée. Les intérêts légaux sont dus à partirdu jour de la demande en justice, l’appelantene prouvant pas avoir mis l’intimé endemeure avant cette date. En outre, le procès-verbal de difficultés n’est pas versé, de sorteque la Cour d'appel ne peut pas vérifier sicette demande y figure.

Cour d'appel – 26.11.2003 – 1re Chambre –Arrêt civil – N° 27959 du rôle

Observation: Il résulte de l'arrêt que les partiesétaient mariées sous le régime de la séparation debiens.

Justice de paix de Luxembourg27 Novembre 2003

Médiation – Qualification juridique del'accord obtenu à l'issue d'unemédiation – Contrat liant les parties(oui) – Contrat pouvant être invoquécomme fondement d'un procèsjudiciaire

C'est à tort que A. dénie toute valeurjuridique à l'écrit signé par les deux partiesen date du 12 février 2001. Il est exact, et B.l'a relevé dès sa citation du 10 octobre 2002,que cet écrit a été signé dans le cadre d'unemédiation. Il résulte encore de cet écrit et desexplications fournies par les parties que lesdiscussions ayant conduit à la signature decet écrit ont eu lieu au Centre de médiation.Le mécanisme de la médiation ne se trouvetoutefois régi à l'heure actuelle par aucuneréglementation publique, de sorte qu'iln'existe aucune disposition, ni légale niréglementaire, interdisant aux parties de faire

état, après achèvement d'une médiation, del'aboutissement de ces discussions. A. reste demême en défaut d'établir que les parties seseraient mutuellement engagées, avant, aucours ou après les discussions de médiation, àne pas dévoiler l'aboutissement de leursdiscussions ou de ne pas en faire état devantquiconque.

Il en résulte que B. est libre d'invoquer l'écritsigné en date du 12 février 2001 devant laprésente juridiction, à laquelle il appartientde se prononcer sur sa qualification et savaleur juridique.

Or, c'est à bon droit que B. emploie à l'égardde cet écrit la qualification de convention.Abstraction faite de ce que cet écrit porte cettemention en intitulé, donnant aux parties etaux tiers l'apparence d'un engagementcontractuel, il faut constater que cet écritcomporte tous les éléments constitutifs d'uncontrat. A. et B., clairement identifiés, ydonnent leur consentement libre et éclairé,

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sans qu'il ne soit actuellement allégué que leconsentement de l'un ou de l'autre aurait étévicié par erreur, violence ou dol. Les deuxparties, majeures et libres de leurs droits, onteu la capacité de s'engager. L'écrit porte surun objet au sujet duquel les parties pouvaients'engager, à savoir l'aménagement de leursdroits et obligations en tant que parentsnaturels de l'enfant N. en ce qui concerne lesdroits de visite et d'hébergement et leursparticipations aux frais d'éducation etd'entretien. Les aménagements convenus danscet écrit trouvent finalement leur cause dans

les droits et obligations respectifs des partieset leur volonté de les aménagerconventionnellement.

Il résulte de ce qui précède que l'écrit signépar A. et B. en date du 12 février 2001 vautengagement contractuel de leur part au sujetdes points qui s'y trouvent réglés.

Justice de paix de Luxembourg – 27.11.2003– Jugement civil n° 4794/03

Bail à loyer

Tribunal d'arrondissementde Luxembourg31 Octobre 2003

Bail à loyer – Délivrance des lieux enbon état – Obligation de restitution dansle même état – Obligation de résultat –Notion d’usure normale

Le locataire ayant reçu les lieux en bon état,voire en état de parfait entretien locatif, il luiincombe de restituer les lieux loués dans lemême état. Cette obligation étant uneobligation de résultat, il s'ensuit que lebailleur n'a qu'à prouver le fait matériel de ladégradation pour que la présomptiond'inexécution fautive de l'obligationd'entretien existe à charge du locataire.

Le preneur n'est cependant pas responsabledes dégradations et de l'usure provenant dusimple usage normal et légitime de la chose,ou bien de la vétusté (cf. Les Novelles, Droitcivil, t. VI. vol. 1, n° 886).

La seule dégradation reconnue par [lelocataire] est la décoration du plafond aumoyen d'autocollants. A part le montant de3.800.- francs hors TVA, retenu parl'architecte de ce chef, il conteste toutes les

autres dégradations constatées par l'huissier,qui auraient été soit préexistantes, soitrelèveraient de l'usure normale.

L'huissier de justice note essentiellement undéfraîchissement de la peinture, des tachessur les murs et des trous provenantd'éléments de fixation.

Il constate encore que le plafond de la salle debains est sale et que la moquette présente destaches.

Il ne résulte pas de ce constat, ni des photosannexées que ces dégradations excéderaientl'usure normale, compte tenu d'uneoccupation de plus de cinq ans.

Tribunal d'arrondissement de Luxembourg –31.10.2003 – 3e Chambre – Jugement de bailà loyer n° 74/2003 – N° 81109 du rôle

Observation: On notera avec intérêt – car laquestion est souvent débattue – que le fait depercer les murs d’un logement locatif pour pouvoiry accrocher des tableaux est considéré par letribunal comme une usure normale, ne donnantpas lieu à remise en état, dans le cas d’uneoccupation de plus de cinq ans.

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Tribunal d'arrondissementde Luxembourg28 Novembre 2003

Bail à loyer – Obligation de jouissancepaisible – Existence d'une obligation derapports courtois (Oui) – Injures entrepropriétaire et locataire – Résiliationaux torts réciproques

Par contrat du 21 août 1996, A. a donné àbail aux époux B. un appartement sis àDudelange moyennant paiement d'un loyermensuel de [...].

Il soutient que depuis un problème de dégâtsdes eaux que sa compagnie d'assurancesaurait refusé d'indemniser, et l'installationd'un piquet sur le passage donnant accès àson garage, B. manifesterait un comportementagressif et insultant à son égard.

Les époux B. contestent les faits reprochés, etsoutiennent que ce serait au contraire A. quiproférerait des propos racistes et insultants àl'égard de B., ce dont le premier juge auraitomis de tenir compte.

Aux termes de l'article 1728 du code civil, lelocataire doit user de la chose louée en luiapportant les soins que lui donnerait toutindividu normalement conscient et prudent.

Il a dès lors l'obligation de jouir paisiblementde la chose et ne saurait occasionner desperturbations au bailleur.

Le bail implique certains rapports decourtoisie (cf. Les Novelles, tome VI, Le louagede choses, Les baux en général, n° 799).

Il résulte du jugement du tribunal de policed'Esch-sur-Alzette du 28 novembre 2002 que,

sur base de dépositions de témoins, B. a étécondamné du chef d'injures à l'encontre de A.au paiement d'une amende de 250.- euros etque A. a été condamné du chef d'injures àl'encontre de B. au paiement d'une amende de250.- euros, et que les deux parties ont étécondamnés à se payer mutuellement lemontant de un euro.

Il se dégage encore tant des procès-verbaux depolice des 9 et 26 juillet 2002, que de l'exposédes faits à l'audience, que le comportementdes parties ne se limite pas à un incidentunique, mais que la situation conflictuelleperdure.

La résolution peut être prononcée aux tortsréciproques de chacune des parties, si toutesles deux ont manqué à leurs engagementscontractuels (idem, n° 399bis).

Les comportements et voies de fait imputablesaux parties peuvent justifier la résolutionfautive, dès lors que les manquements rendentles rapports entre parties tendus au point decraindre la survenance d'incidents plusgraves (idem, n° 388ter).

Au vu de la situation conflictuelle entreparties, habitant des immeubles voisins, larésiliation du bail est justifiée, et cenonobstant le comportement passif de[Madame] B.

Il y a dès lors lieu de confirmer le jugemententrepris en ce qu'il a résilié le bail, sauf àdire que le bail est résilié aux tortsréciproques des parties.

Tribunal d'arrondissement de Luxembourg –28.11.2003 – 3e Chambre – Jugement de bailà loyer n° 84/2003 – N° 83.741 du rôle

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Procédure civile et commerciale

Cour d'appel26 Novembre 2003

Procédure civile et commerciale –Incidence de l'irrecevabilité de l'appelprincipal sur l'appel incident

Il importe de relever que la tardiveté del'appel principal est sans incidence sur larecevabilité de l'appel incident, qui peut êtrerelevé en tout état de cause.

Cour d'appel – 26.11.2003 – Arrêt civil – 7e

Chambre – N° 27152 du rôle

Note: Un jugement du tribunal d’arrondissementdu 3 juillet 2002 est signifié à la partiedéfenderesse de 1ère instance en date du 1er août2002 et à son avocat constitué le 9 août 2002. Elleforme appel par exploit d’huissier du 17septembre 2002. La partie intimée soulèvel’irrecevabilité de l’appel, d’abord pour absence demotivation de l’acte d’appel, ensuite pour avoirété interjeté plus de 40 jours après la significationdu 1er août 2002. Par conclusions du 8 janvier2003, la partie intimée interjette en outre appelincident.

1) La Cour d’appel tranche les moyensd’irrecevabilité de l’appel principal dans l’ordredans lequel ils ont été soulevés, alors qu’on auraitpu penser que le moyen tiré de l’inobservation dudélai d’appel aurait pu être examiné en premierlieu en raison du caractère d’ordre public quis’attache au respect des délais pour exercer lesvoies de recours (Cour d’appel 9 mars 1993, P 29,89; Cour d’appel 16 mars 1993, P. 29, 93).

2) Sur le moyen tiré du défaut de motivation del’acte d’appel, basé sur les articles 154, 584 et 585du Nouveau Code de procédure civile, la Courd’appel répond par une appréciation qui devraitentre-temps être de connaissance notoire pourrésulter d’un arrêt de la Cour de cassation publié(Cour de cassation, 11 janvier 2001, P 32, 166) etcommenté (voir notre chronique à la Pasicrisie 31,page 424): le manque de motivation de l’acted’appel constitue une irrégularité de forme qui nepeut être sanctionnée par la nullité de l’acted’appel que si les conditions de l’article 264 duNouveau Code de procédure civile (le moyen doitêtre soulevé in limine litis et celui qui le soulèvedoit avoir subi un préjudice) sont cumulativementremplies.

Par rapport à la seconde de ces conditions, laCour de cassation a encore précisé qu’ilappartient à la partie qui soulève le moyen defaire concrètement état d’un préjudice (Cour decassation 25 octobre 2001, N° 50/01; Cour decassation, 7 mars 2002, n° 16/02). Logiquement, illui appartient en sus de l’établir concrètement.C’est en ce sens que se prononce la jurisprudencefrançaise (Cour de cassation française, 2e

chambre civile, deux arrêts du 12 juillet 2001,JCP 2001-IV-2680 et 2681).

Sur base de ces exigences, le moyen est facilementécarté en l’espèce par le double constat que lapartie alléguée n’a invoqué aucun préjudice, etqu’elle n’en a pas subi alors qu’elle a amplementconclu au fond.

3) Pour échapper au moyen tiré de l’expiration dudélai d’appel, l’appelante prétend qu’il faudraittenir compte au titre du point de départ pour lecalcul du délai d’appel de la signification à avocatconstitué du 9 août 2002.

La Cour d’appel ne pouvait faire autrement quede faire une application, sans toutefois lenommer, de l’article 571 du Nouveau Code deprocédure civile aux termes duquel le délai pourinterjeter appel court pour les jugementscontradictoires à partir du jour de la significationà personne ou domicile. Le délai de 40 jours adonc bien commencé à courir le 1er août 2002, desorte qu’il était expiré le 17 septembre 2002.

Une confusion pouvait naître des articles 250 etsuivants du Nouveau Code de procédure civile,qui prévoient la délivrance de la grosse desjugements rendus en matière civile sur base desqualités à signifier par avocat constitué à avocatconstitué et l’exigence de la signification dujugement à avocat constitué pour pouvoirprocéder à son exécution. Mais cette confusiondoit être rapidement dissipée par une lectureattentive des dispositions légales respectives,alors que l’article 255 traite de l’exécution forcée,tandis que l’article 571 traite du délai pourinterjeter appel, qui seul était en cause dans laprésente espèce.

4) Sur un dernier point finalement, la Courd’appel adopte une position peu orthodoxe. Saisied’un appel principal irrecevable pour être horsdélai et d’un appel incident présenté en coursd’instance, elle retient que «la tardiveté de l’appel

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principal est sans incidence sur la recevabilité del’appel incident, qui peut être relevé en tout état decause», citant là encore l’article 571 du NouveauCode de procédure civile sans le nommer.

Cette position peut étonner compte tenu desnombreuses décisions passées qui ontrégulièrement considéré que l’appel incidentdevait nécessairement suivre le sort de l’appelprincipal (Cour d’appel 28 juin 2000, N° 21697 durôle) et ce parce qu’il n’était que l’accessoire del’appel principal (Cour d’appel 5 juillet 2000, Nos

22702, 23154 et 23558 du rôle) et ne pouvait doncavoir d’existence autonome (Cour d’appel 26octobre 1994, N° 15590 du rôle; Cour d’appel 25juin 2003, N° 24337 du rôle) ou parce que, étantcausé par la contestation par l’adversaire de ladécision de première instance que l’intimé étaitinitialement disposée à accepter, il n’a plus decause lorsque l’appel principal vient à disparaîtrepar suite de son irrecevabilité (Cour d’appel 4juillet 2000, N° 24275 du rôle). Dans le mêmesens, on peut citer des décisions plus anciennes,publiées (T.A. Diekirch, P. 9, 43; Conseil arbitraldes assurances sociales 31 mars 1965, P 19, 581).

L’arrêt rapporté prend le contre-pied de cetteconception en citant les termes de l’article 571 duNouveau Code de procédure civile selon lequell’appel incident peut être relevé en tout état decause, auquel il donne dès lors une significationextensive. Il n’est toutefois pas certain que la

formule « en tout état de cause », au-delà de l’idéeque l’appel incident peut être formé à n’importequel moment de la procédure d’appel, sous réserveque les débats ne soient pas clos, signifie en outreque l’appel incident peut être formé dansn’importe quelles conditions, c’est-à-dire sanségard aux moindres règles procédurales.

Il est certes exact que d’après une ancienneopinion, la recevabilité de l’appel incident dépendde l’existence, et non pas de la recevabilité d’unappel principal (T.A. Diekirch 7 avril 1937, P 14,159; Dalloz, Codes annotés, Nouveau Code deprocédure civile, 1911, art. 443, N° 1293 etsuivants; c’est d’ailleurs une hypothèse envisagéeà toutes fins utiles par l’arrêt cité du 26 octobre1994 pour néanmoins écarter l’appel incidentpour avoir été interjeté en dehors du délaid’appel). Mais aucune des décisions récentesn’adopte cette approche, et elle n’était pasdéfendue de façon unanime par la doctrineancienne (Dalloz, Codes annotés, Nouveau Codede procédure civile, 1911, art. 443, N° 1287 etsuivants), ni n’est-elle adoptée par la doctrinemoderne (L. Cadiet, Droit judiciaire privé, Litec,9e édition, N° 1591). Actuellement, le sort del’appel incident est toujours lié à celui de l’appelprincipal. Il semble donc qu’en bouleversant desnotions admises, une motivation plus exhaustiveaurait servi la compréhension de la démarche dela Cour. – Thierry HOSCHEIT.

Cour d'appel4 Décembre 2003

Procédure civile – Libellé obscur –Acceptation sans réserves d'unecommunication de pièces – Forclusion àinvoquer l'exception du libellé obscur(non)

La seule acceptation sans réserves d'unecommunication de pièces par une partie nerend pas celle-ci forclose à invoquer

l'exception du libellé obscur, aucun débatn'ayant à ce moment été engagé.

Cour d'appel – 4.12.2003 – 3e Chambre –Appel en matière de droit du travail – N°27348 du rôle

Observation: Nous renvoyons nos lecteurs àl’étude de M. Jean-Claude WIWINIUS,«L'exceptio obscuri libelli», in : Mélanges dédiés àMichel DELVAUX, page 287).

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Bulletin d’information sur la jurisprudence - 2004 57

Droit pénal et procédure pénale

Tribunal d’arrondissementde Luxembourg

6 juillet 1999

Droit pénal – Non-assistance à personneen danger – Éléments constitutifs del’infraction

L’infraction à l'article 410-1 du Code pénalprésuppose la réunion de 4 élémentsconstitutifs:

1) L'existence d'un péril grave, élément quidoit être apprécié objectivement et qui estévidemment établi en l'espèce au vu del'issue fatale pour la victime;

2) L'intervention ne doit pas comporter derisques sérieux pour l'intervenant ou pourautrui. Cet élément est également établi enl'espèce, étant donné que la crainte duprévenu de voir constater sa propreinfraction à la loi du 19 février 1973 et lerisque de poursuites judiciaires n'est pasde ceux que le législateur a entenduadmettre pour justifier l'absenced'intervention. Le secours est obligatoirequand bien même il risque de révéler undélit antérieurement commis par celui quiy est astreint, comme il est dû encorelorsque l'état de péril a été causé par sapropre faute pénale (Jurisclasseur pénal,v° abstentions délictueuses, n° 167).

3) La qualité de l'intervention: l'aide dontl'omission est punissable doit consister soitdans une action personnelle (venir enaide), soit dans un appel au secours(procurer une aide). (...)

Le législateur a par ailleurs estimé peusouhaitable d'apporter personnellementune aide à quelqu'un si la personnesecourante n'est pas en mesure d'apprécier

l'utilité de secours à apporter (T.P. 2171,rapport de la commission juridique, p. 4).

La loi exige une volonté réelle de coopérersérieusement au secours nécessaire. Si nuln'est tenu à l'impossible, en revanche, desmesures dilatoires équivaudraient à uneabstention (Jurisclasseur pénal, v°abstentions délictueuses, n° 158).

Si la loi oblige celui qui est en état de lefaire, à prêter assistance à une personne enpéril, soit par son action personnelle, soiten provoquant un secours, elle n'a pasentendu lui laisser une option arbitraleentre deux modes d'assistance, dontl'efficacité selon la nature et lescirconstances du péril peut être différente.Elle lui fait au contraire le devoird'intervenir par celui de ces deux modesque la nécessité commande et même, s'il lefaut, par leur emploi cumulatif (Cass.crim. fr. 26.7.1954, JCP 1954, II, 8320).

L'infraction est par ailleurs établie mêmesi l'importance des lésions était telle qu'ilne soit plus possible, médicalementparlant, d'empêcher que mort s'en suive. Ilest de même indifférent que la durée desurvie soit plus ou moins brève (R.P.D.B.,v° abstentions coupables, n° 16; JCL pénal,v° cité, n° 155). Il n'est donc point besoind'établir si ou jusqu'à quand une aidemédicale aurait pu sauver la victime.

4) L'abstention de porter secours doit êtrevolontaire. Le délit d'abstention requiert laconnaissance du péril et la nécessitéd'intervention médicale.

Tribunal d'Arrondissement de Luxembourg –6.7.2004 – 9e Chambre – Jugementcorrectionnel n° 1450/99 – confirmé en appelpar Cour d'appel –- 18.12.2001 – 5e Chambre– Arrêt n° 464/01 V

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58 Bulletin d’information sur la jurisprudence - 2004

Cour d'appel21 Décembre 2001

Procédure pénale – Nullité d’un appelrelevé par un avocat, assisté d'un avocatà la Cour

Par acte du greffe du tribunald'arrondissement de Luxembourg du 5décembre 2001, "Maître A., avocat, enremplacement de Maître B., avocat à la Cour,assisté de Maître C., avocat à la Cour, lesdeux demeurant à Luxembourg" a déclarérelever appel au nom et pour compte de ...d'une ordonnance rendue le 4 décembre 2001par la chambre du conseil du tribunald'arrondissement de Luxembourg ayant rejetéune demande de mise en liberté provisoire del'appelant.

Conformément aux articles 133, 203 et 204 ducode d'instruction criminelle, l'acte d'appel nepourra être posé que par l'appelant lui-même,un avoué ou tout autre fondé de pouvoirspécial.

Selon l'article 9 de la loi du 10 août 1991 surla profession d'avocat, les avocats inscrits sur

la liste I du tableau des avocats sont seulshabilités à accomplir les actes pour lesquelsles lois et règlements prescrivent le ministèred'avoué.

Les énonciations dressées par l'officier publicdans l'acte en cause ne renseignent pas que ledéclarant présente la qualité requise auregard des formalités prescrites et qui sontsubstantielles comme découlant d'une règlefondamentale tenant à l'organisationjudiciaire.

Il s'ensuit que le recours est entaché de nullitéet qu'il est partant irrecevable.

Cour d'appel – 21.12.2001 – Chambre duConseil – Arrêt n° 437/01

Observation : L’arrêt rappelle qu'en matièrepénale, l'appel peut uniquement être relevé parun avocat à la Cour. En conséquence, ladéclaration d'appel ne peut être faite par unavocat, même si ce dernier est assisté par unavocat à la Cour. L'appel doit donc être fait parl'avocat à la Cour, le cas échéant assisté del’avocat.

Protection de la Jeunesse

Tribunal de la Jeunesse et des Tutelles11 Février 2004

Droit civil – Tutelle – Demande enattribution de l'autorité parentaleexclusive sur un enfant naturel enprésence d'un jugement du juge de lajeunesse coulé en force jugée – Demandeirrecevable (oui)

Par une requête déposée le 17 avril 2003, A.demande au juge de la jeunesse de rendre unedécision déchargeant ses parents du droit degarde de leur petit-fils et de la lui attribuer,conformément à une requête qu'il a déposéeensemble avec ses parents le 29 mars 2001.

Par un jugement rendu contradictoirement encause le 30 septembre 2003, le placement dumineur auprès de ses grands-parents

paternels a été maintenu et il a été soumis aurégime de l'assistance éducative pour unedurée indéterminée. Un droit de visite a étéaccordé à B.

Ce jugement, qui n'a pas été entrepris, estcoulé en force de chose jugée sous réserve de lafaculté de révision ouverte par la loi du 10août 1992 relative à la protection de lajeunesse.

Suivant l'article 11 de la susdite loi, si lemineur est placé hors du domicile de sesparents, ceux-ci conservent uniquement undroit de visite et de correspondance dont letribunal ou le juge de la jeunesse fixe lesmodalités, tandis que tous les autres attributsde l'autorité parentale relatifs à la personnedu mineur sont transférés à la personne ou àl'établissement à qui le mineur est confié, à

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Bulletin d’information sur la jurisprudence - 2004 59

l'exception du droit de consentir à l'adoptionet au mariage du mineur.

Aux termes de l'article 19 de la loi du 10 août1992, les dispositions concernant lespoursuites en matière répressive sontapplicables à toutes les procédures visées parla présente loi, sauf les dérogations qu'elleétablit (Cour d'appel, 3.3.1999, n° 22448 durôle et 8.12.1999, n° 21686 du rôle).

La demande formulée par A. tendant à se voirattribuer l'autorité parentale exclusive du

mineur X. se heurte partant à l'autorité de lachose jugée dont est revêtue la décision dutribunal de la jeunesse du 30 septembre 2003qui s'impose au juge des tutelles.

Il s'ensuit que la demande formée par A.tendant à se voir attribuer l'autoritéparentale exclusive de l'enfant naturel mineurX. est irrecevable.

Tribunal de la Jeunesse et des Tutelles –11.02.2004 – Tutelle n° 212/99 – Jugement n°13/04

Droit fiscal

Tribunal d'arrondissementde Luxembourg17 Novembre 2003

Impôts – Recouvrement de l'impôt –Contrainte – Copie conforme de lacontrainte ne porte pas de signature dureceveur et du directeur – Existence dela contrainte non établie –Commandement nul

L’article 1er de la loi modifiée du 27 novembre1933 sur le recouvrement des contributionsdirectes dispose que le Trésor a, pour lerecouvrement des contributions directes, ledroi t d ’ exécut ion sur contrainteadministrative.

L’article 12, paragraphe 1er de la loi citéedispose que l’exécution pour les créances duTrésor prévues par cette loi sera exercée aumoyen d’une contrainte décernée par lereceveur et rendue exécutoire par le directeurdes contributions ou son délégué.

En l’espèce, la copie de la contrainte necomporte ni la signature manuscrite dureceveur ni celle du directeur ou de sondélégué. La copie contient seulement lamention «Signé A., Inspecteur de direction 1er

en rang», en dessous du texte «Le directeurdes contributions, p.d. » et la mention «SignéB», en dessous du texte «Le préposé».

Le tribunal relève que l’agent chargé despoursuites certifie la copie conforme àl’original. Suivant l’attestation de l’agent despoursuites, l’original de la contrainteporterait dès lors ces deux mentions. L’agentne précise pas que la contrainte esteffectivement signée du préposé et du déléguédu directeur. L’agent des poursuites certifieseulement que la copie de la contrainteconstituerait une reproduction conforme àl’original. Il ne précise pas qu’il s’agit d’unecopie partielle et que les signatures apposéessur l’original auraient été enlevées de la copie.

Le receveur ne comparant pas, l’original de lacontrainte, qui n’est par définition pas auxmains du contribuable, n’est pas versé encause.

Il n’est dès lors pas établi que l’original de lacontrainte a été signé du receveur et que ledélégué du directeur ou le directeur lui-mêmea apposé sa signature afin de rendre lacontrainte exécutoire.

Étant donné qu’il n’est pas établi que lereceveur a effectivement émis la contrainte etque le directeur ou son délégué l’a rendueexécutoire, le commandement signifié sur based’une contrainte dont l’existence n’est pasprouvée est nul.

Tribunal d'arrondissement de Luxembourg –17.11.2003 – Jugement civil n° 372/2003 – 1re

Chambre – N° 82474 du rôle

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60 Bulletin d’information sur la jurisprudence - 2004

Droit du travail et droit de la sécurité sociale

Cour d'appel30 Octobre 2003

Droit du travail – Utilisation abusive dutéléphone professionnel par le salariépour passer des communicationsprivées – Faute grave (oui) – Actevolontaire ayant causé un préjudice àl'employeur au sens de l'article 47 de laloi du 24 mai 1989 sur le contrat detravail (oui)

Tel que l'ont retenu à bon droit les juges depremière instance, le fait par l'appelanted'avoir abusé du téléphone professionnel misà sa disposition par son employeur pour ypasser ses communications privées constitue,compte tenu de l'envergure extraordinaire del'abus commis (des communicationsinternationales privées vers le Mexique pourun montant total de 156.794,- francs suivant

le relevé détaillé des factures invoquées dedécembre 1999 à février 2000 qui s'élèvent entout à 191.172,- francs), une faute grave ausens de l'article 27(2) de la loi sur le contratde travail, de sorte que le jugement déféré està confirmer en ce qu'il a déclaré lelicenciement régulier et débouté l'appelante deses demandes afférentes.

Tel que l'ont encore retenu à juste titre lesjuges du premier degré, l'abus du téléphoneprofessionnel à des fins privées parl'appelante constitue un acte volontaire ayantcausé un préjudice à l'employeur et engageantde ce fait la responsabilité de l'appelante surbase de l'article 47 de la loi sur le contrat detravail.

Cour d'appel – 30.10.2003 – 8e Chambre –Appel en matière de droit du travail – n°25692 du rôle

Cour d'appel6 Novembre 2003

Droit du travail – Droit pourl'employeur de faire passer au candidatdes tests ou essais professionnels pourvérifier son aptitude et sesconnaissances – Nécessité pourl'employeur de réaliser lui-même lecontrôle des aptitudes

S'il est vrai que l'employeur peut faire passerau candidat de véritables tests ou essaisprofessionnels pour vérifier son aptitude et sesconnaissances, il se trouve toutefois qu'enl'espèce [le salarié] n'a pas subi une épreuvequi serait à qualifier de test préalable.

Il se dégage en effet de l'attestation versée encause par [l’employeur] et établie par uncertain A. que ce dernier a accompagnél'intimé pendant deux journées sur satournée.

Le test professionnel présupposant le contrôledes aptitudes du postulant au poste de travail

proposé par l'employeur lui-même, l'on nesaurait en l'espèce parler d'un test parl'employeur, le contrôle ayant été effectué parA. postulant le même travail.

Dès lors l'offre de preuve formulée parl'employeur est à rejeter pour ne pas êtrepertinente ni concluante. Elle est d'ores etdéjà contredite par les affirmations de A. Eneffet, ce dernier n'était nullement un employéde l'entreprise [...] et n'avait donc aucunpouvoir de contrôler [le salarié]. En plus,l'offre de preuve ne mentionne pas quellescapacités ou aptitudes [du salarié] étaient àcontrôler.

Cour d'appel – 6.11.2003 – 8e Chambre –Appel en matière de droit du travail – N°27774 du rôle

Observation : L’arrêt reproduit par extraits està rapprocher d’un arrêt de la même chambre de laCour du 27 juin 2002 (B.I.J., n° 1/2002, p. 14),d’après lequel «l'employeur peut faire passer aucandidat de véritables tests ou essaisprofessionnels pour vérifier son aptitude et ses

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Bulletin d’information sur la jurisprudence - 2004 61

connaissances. Ces épreuves, préalables à laconclusion du contrat de travail, ne se confondentpas avec la période d'essai qui peut suivre cetteconclusion. L'essai professionnel, par nature decourte durée, s'apparente à un examen, jugé parl'employeur qui reste libre de la décision

d'embaucher. L'essai professionnel ne doit pas êtreun moyen détourné de faire travailler l'intéressé.Une prestation de travail, sous les conditions"salariales" (travail productif et subordonné),ferait requalifier la situation.»

Cour d'appel29 Janvier 2004

Droit du travail – Licenciement aveceffet immédiat – Absence injustifiéed'une journée – Faute grave (oui) –Exigence pour l'employeur d'invoquerune perturbation du service (non) –Perturbation du service inhérente àtoute absence

L'employeur a, par lettre recommandée du 23décembre 2002, licencié A. avec effet immédiatpour faute grave dans les termes suivants:«Vous n'êtes pas venu vous présenter à votrelieu de travail en date du 23.12.2002 à 6.00heures, suivant les instructions et explicationsdu Dr. X. (médecin de contrôle) qui vous aécrit apte de travailler à partir de ce jour...»

Force est d'abord de constater que A. a étélicencié le 23 décembre 2002 sans quel'employeur ait su que le salarié – que ledocteur X. a pourtant déclaré apte à travaillerà partir du 23 décembre 2002 – continuait àêtre incapable de travailler. L'employeur n'apas été averti et le certificat du docteur Y. du21 décembre 2002 relatant que «l'état de santéde [A.] ... nécessite un arrêt de travail avecsorties autorisées aux horaires prévus par lescaisses d'assurance maladie jusqu'au 21janvier 2003, date à laquelle il sera nécessairede réévaluer la situation» n'est, bienqu'expédié le 21 décembre 2002, parvenu quele 24 décembre 2002 à l'employeur.

Le salarié ne bénéficiait donc pas de laprotection de l'article 35 de la loi du 24 mai1989 sur le contrat de travail au moment deson congédiement.

L'employeur a dans la lettre de licenciementinvoqué un motif précis, conforme auxexigences de l'article 27(3) de la loi du 24 mai1989 sur le contrat de travail, à savoirl'absence injustifiée de la salariée à partir de

6 heures du matin dudit 23 décembre 2002.Toute absence d'un salarié étantnécessairement cause de problèmes et de gênepour l'employeur, il s'avère inutile de fournirdavantage de détails à ce sujet.

A. devait, après une longue période d'absencepour cause de maladie, selon les prévisions dudocteur X. du 19 décembre 2002 (cf. certificatmédical du même jour), en principe reprendrele travail le lundi 23 décembre 2002).

Il est allé consulter le docteur Y. le samedi 21décembre 2002, qui lui établit un nouveaucertificat de maladie. Le salarié se contentade le remettre à la poste en France le mêmejour aux fins d'être envoyé à l'employeur.Devant pourtant savoir que l'employeurattendait son retour pour le 23 décembre 2002et que le certificat de maladie du 21 décembrene pourrait lui être parvenu pour cette date,A. ne s'est pas présenté à son travail, sansdaigner informer son employeur de la raisonde son absence.

Il a laissé l'employeur dans l'ignorance laplus complète de sa situation et dansl'incertitude quant à l'avenir – il incombe ausalarié d'informer l'employeur des raisons deson absence et non pas à ce dernier de s'enenquérir auprès du salarié –. A. a ainsinécessairement perturbé ou du moins gêné lefonctionnement normal de l'entreprise.

Il a dans ces circonstances, la maladie et sonancienneté – fût-elle avérée – n'y changeantrien, commis une faute grave justifiant sonrenvoi immédiat.

Cour d'appel – 29.01.2004 – Appel en matièrede droit du travail – 3e Chambre – N° 28049du rôle

Note : En cas d'incapacité de travail du salariépour cause de maladie ou d'accident, l'article 35de la loi du 24 mai 1989 sur le contrat de travailfait naître à l'égard du salarié successivement une

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62 Bulletin d’information sur la jurisprudence - 2004

obligation et un droit: d'une part, les paragraphes1er et 2 obligent le salarié malade à informerl'employeur de son incapacité de travail, d'autrepart, le paragraphe 3 confère au salarié malade ledroit de ne pas être licencié pendant la périoded'incapacité de travail. Mais le salarié malade nepourra se prévaloir de ce droit que lorsqu'il aaverti l'employeur dès le premier jour de sonempêchement et lui a soumis le troisième jour deson absence au plus tard un certificat médicalattestant son incapacité de travail et sa duréeprévisible. Cette double obligation [doit] êtreremplie en toutes circonstances, qu'il s'agisse dela survenance de la maladie ou de saprolongation, l'échéance de chaque certificat demaladie faisant présumer pour l'employeurl'aptitude du salarié à reprendre son travail »(Cour d'appel, 15 mai 2003, B.I.J., 2003, p. 199).Rien n'empêche cependant le salarié malade deremplir cette double obligation par un seul acte,en remettant à l'employeur dès le premier jour deson incapacité de travail un certificat médicalattestant cette incapacité et sa durée prévisible.

C'est précisément ce qu'avait essayé de faire lasalariée en l'espèce. Après avoir fait constater laprolongation de son incapacité de travail par unmédecin, elle avait envoyé le certificat médical àson employeur. Mais bien que le certificat fûtenvoyé deux jours avant la fin de la premièrepériode d'incapacité de travail, il n'arriva chezl'employeur que le lendemain du jour prévu pourla reprise du travail. Le jour où l'employeurcomptait sur le retour de sa salariée, il ignoraitdonc la prolongation de l'incapacité de celle-ci. Ledroit de ne pas être licencié en période de maladieayant pris fin avec l'échéance du premiercertificat médical et la nouvelle période deprotection n'étant pas encore née, le licenciementavec effet immédiat prononcé à ce moment-là nepouvait violer l'article 35(3) de la loi du 24 mai1989. Toutefois, pour que le licenciement ne fûtpas abusif, il fallait encore qu'il soit fondé sur unmotif suffisamment grave pour rendre« immédiatement et définitivement impossible lemaintien des relations de travail », selonl'expression consacrée par l'article 27(2) de la loidu 24 mai 1989.

En l'occurrence, la seule faute reprochée à lasalariée était celle de ne pas s'être présentée àson lieu de travail le jour prévu pour la reprise.Quant à la lettre de licenciement, elle ne faisaitétat d'aucune circonstance particulière de natureà conférer à cette absence le caractère d'une fautegrave. Nul doute que le licenciement était abusif!Pourtant, et contrairement aux juges de premièreinstance, la Cour d'appel a décidé que le

licenciement était justifié. La solution estcritiquable: la faute de la salariée n'existait pasencore au moment du licenciement (1) et, àsupposer que faute il y avait, son caractère gravefaisait défaut (2).

1. Ni l'arrêt ni le jugement de première instance(Trib. trav. Lux., 15 juillet 2003, n° 3458/03) nementionnent l'heure précise du licenciement,mais il semble que l'employeur avait procédé aulicenciement dès qu'il avait constaté que lasalariée ne s'était pas présentée à son lieu detravail. Ceci a amené les juges de premièreinstance à dire le licenciement abusif pour avoirété prononcé prématurément (v. jugement, p. 7:«il n'est pas dit dans la loi que le salarié doitinformer son employeur dans la première minutede son empêchement, mais dans la journée»).L'arrêt reste muet sur cette question qui revêtaitpourtant une importance décisive. A cet égard, ilconvient de rappeler que pour vérifier la validitéd'un licenciement, les juges doivent se placer aumoment où la décision de licencier a été prise,étant donné que c'est à ce moment-là quel'employeur a lui-même jugé que les faits dont ilavait connaissance devaient être sanctionnés parle renvoi du salarié. Une faute qui ne seproduirait que postérieurement au licenciementserait insusceptible de suppléer une inexistencede faute au moment du licenciement. La cause(faute) ne saurait être postérieure à son effet(licenciement)!

En l'espèce, le défaut d'avertissement était-ilfautif au moment du licenciement? Non, car la loioblige le salarié seulement à effectuerl'avertissement «le jour même de l'empêchement»(art. 35(1) de la loi du 24 mai 1989). Elle ne luiimpose pas d'avertir son employeur dans les cinqminutes de l'empêchement ou endéans tout autrebref délai. D'ailleurs, lors de l'élaboration de la loidu 24 mai 1989, la Chambre des métiers avaitsouhaité que l'avertissement soit effectué « le jourmême de l'empêchement et dès le commencementdu travail » (v. Doc. parl. n° 32221, p. 18), mais saproposition n'avait pas été retenue.Malheureusement, les travaux préparatoires nerenseignent pas sur le sens exact que lelégislateur a voulu accorder aux termes «le jourmême de l'empêchement» qui ne sont pas exemptsde toute difficulté d'interprétation.

A priori, le salarié aurait donc toute la journéepour respecter l'obligation légale d'avertissement.Il n'en reste pas moins que permettre au salariéd'effectuer l'avertissement jusqu'à minuit seraitpeu conforme à l'objectif du texte. Une autreinterprétation des termes légaux qui consisterait

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Bulletin d’information sur la jurisprudence - 2004 63

à assimiler à l'horaire de travail du salariéconcerné le délai pour avertir l'employeur estégalement à rejeter, car elle aboutirait à desdifférences injustifiées de régime entre lessalariés: un salarié qui n'aurait été engagé quepour travailler le matin serait soumis à un délaibien plus court pour informer l'employeur de sonincapacité de travail qu'un salarié travaillant àplein temps. La solution qui associerait au mieuxl'esprit de la loi (qui se veut protectrice du salarié)à la finalité du texte serait de permettre ausalarié d'effectuer l'avertissement jusqu'à lafermeture normale de l'entreprise. En effet, lafinalité de l'avertissement dès le premier jour del'empêchement n'est autre que de lever auprès del'employeur toute incertitude quant à la cause del'absence du salarié afin de permettre uneréorganisation de l'entreprise pour les jours àvenir. Ce qui compte, c'est que l'avertissementparvienne à l'employeur avant la fin de lapremière journée de l'empêchement. Or, cetobjectif pourra être atteint tant que l'employeursera réputé être dans l'entreprise, c'est-à-direjusqu'à la fermeture normale de celle-ci.

Il s'ensuit que le salarié n'aura manqué à sonobligation légale que si au moment de lafermeture de l'entreprise, il n'aura toujours pasaverti l'employeur de son incapacité de travail. Enl'espèce, cette faute n'était pas (encore) certaineau moment du licenciement. Le contenu de lalettre de licenciement suffit pour s'en convaincre:l'employeur reproche uniquement à la salariée dene pas s'être présentée « à votre lieu de travail endate du [jour de la reprise] à 6.00 heures », sanslui reprocher une absence injustifiée pendanttoute cette journée. Le licenciement aurait dû êtredéclaré abusif, car l'employeur n'avait pas le droitde sanctionner  sa salariée pour l'inexécutiond'une obligation légale aussi longtemps que la loielle-même rendait possible l'exécution de cetteobligation.

2. Certes, le manquement à son obligationd'avertissement constitue le salarié en faute. Maisce manquement n'est jamais en soi une fautegrave (v. Cour d'appel, 25 avril 1996, Pas. 30, 79:«Le fait par le salarié de méconnaître lesobligations d'information de l'employeur en casd'incapacité de travail, figurant aux paragraphes1 et 2 de l'article 35 de la loi sur le contrat detravail, prive le salarié de la protection spécialecontre le licenciement, mais ne constitue pas en soiune faute grave privative du préavis légal.»; dansle même sens: Cour d'appel, 16 juin 1994, n°14937; Cour d'appel, 2 juin 1994, n° 13559; Courd'appel, 23 déc. 1993, n° 14287, décisions citées inDroit du Travail au Grand-Duché de

Luxembourg, M. Feyereisen, éd. Promoculture,mise à jour oct. 2003, sub art. 35). Donc, même àsupposer que l'employeur ait résilié le contrat detravail à un moment où la faute de la salariée setrouvait définitivement établie, c'est-à-dire aprèsl'heure de fermeture normale de l'entreprise, cettefaute ne pouvait suffire à justifier un licenciementavec effet immédiat.

La validation du licenciement par la Cour d'appelest d'autant plus surprenante que la lettre del i cenc iement ne ment ionne aucunecirconstance particulière (perturbation du service,antécédents professionnels de la salariée,...) quiaurait été éventuellement  susceptible de justifierle renvoi immédiat de la salariée. Pour la Cour, lemotif invoqué se suffit néanmoins à lui-même, car«toute absence d'un salarié étant nécessairementcause de problèmes et de gêne pour l'employeur, ils'avère inutile de fournir davantage de détails à cesujet». L'affirmation est tellement générale qu'ellerevient à autoriser tout licenciement avec effetimmédiat fondé sur une absence injustifiée d'uneseule journée. En effet, il suffira dès lors àl'employeur de rapporter la preuve d'une telleabsence pour que le licenciement avec effetimmédiat soit justifié, la perturbation duservice étant établie du même coup.

La solution n'est pas conforme aux exigences de laloi, parce qu'elle anéantit l'obligation légale selonlaquelle la lettre de licenciement doit énoncer lescirconstances qui sont de nature à attribuer aufait reproché le caractère d'un motif grave (v. art.27(3) de la loi du 24 mai 1989). Par conséquent, lamarge de manœuvre des juges dans l'appréciationdu motif grave sera inexistante, et le contrôlejudiciaire se limitera à la réalité de l'absenceinjustifiée. Cette solution, si elle étaitmaintenue, remettrait également en cause unejurisprudence constante qui exige de l'employeurqu'il précise (dans la lettre de licenciement) enquoi une absence injustifiée d'une seule journéeest constitutive d'une faute grave motivant lerenvoi immédiat du salarié (v. Cour d'appel, 25avril 1996, préc., et les décisions citées in Droit duTravail au Grand-Duché de Luxembourg, op. cit.,sub art. 27, notamment: Cour d'appel 19 janv.1995, n° 15734; Cour d'appel 14 juillet 1994, n°15288). Il ressort d'autres décisions que l'absenceinjustifiée du salarié ne devient par elle-mêmefaute grave – sans que l'employeur ait besoind'invoquer des circonstances particulières – quelorsque cette absence se prolonge dans le temps(v. Cour d'appel 30 mars 1995, n° 14992; Courd'appel 7 juillet 1994, n° 15165, in Droit duTravail au Grand-Duché de Luxembourg, op. cit.,sub art. 27).

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64 Bulletin d’information sur la jurisprudence - 2004

La 3e chambre de la Cour d'appel s'orienterait-ellevers une interprétation plus large de la fautegrave du salarié? La généralité de la motivationretenue par l'arrêt obligerait presque à répondrepar l'affirmative, du moins lorsque la fauteinvoquée consiste en une absenceinjustifiée. Pareille constatation s'imposeraitd'autant plus que les faits étaient par ailleursdéfavorables à l'employeur: la salariée avait uneancienneté de plus de dix ans et le manquementqui lui était reproché ne constituait qu'un acteisolé.

Mais peut-être que la Cour a simplement voulusanctionner un malade imaginaire: en effet, avant

de se faire prolonger son incapacité de travail parun médecin établi à l'étranger, la salariée avaitété déclarée apte à travailler par le médecin decontrôle. Si une telle appréciation subjective de lasituation devait être l'explication de la sévéritéadoptée par la Cour à l'égard de la salariée, lasolution n'en serait pas moins injustifiée, car elleméconnaîtrait le principe dégagé par lajurisprudence selon lequel l'avis du médecin-conseil du Contrôle médical ne l'emporte pas surles attestations du médecin traitant (v. Courd'appel, 8 fév. 2001, n° 24714, in Droit du Travailau Grand-Duché de Luxembourg, op. cit., sub art.35; Cour d'appel, 14 juillet 1983, Pas. 26, 93). -–A.E.

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