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L’ESSENTIEL Le spectre de la déflation Les prix ont diminué de 0,6% en janvier dans la zone euro FRANCE P.2-3 La loi Macron passe par la petite porte n Avec seulement 234 voix sur les 289 néces- saires, la motion de censure de l’UMP-UDI a été rejetée jeudi à l’As- semblée. Frénésie antisémite pour cinq ados n Les cinqs présumés auteurs de la profana- tion du cimetière juif de Sarre-Union ont été mis en examen. INTERNATIONAL P.4 L’Ukraine demande le renfort de l’UE n Après l’attaque de Debaltsevo, Porochen- ko réclame vainement l’aide de ses alliés eu- ropéens. ECONOMIE P.6 Berlin dit non à Athènes n L’Allemagne rejette formellement la de- mande d’extension de prêt à la Grèce. L’eurogroupe doit se réunir vendredi afin de prendre une déci- sion sur cette requête. CULTURE P.8 Coup de grâce pour la Hune n En grave difficultés financières, la librairie historique du quartier Saint-Germain-des- Prés fermera courant 2015. EXPRESSO QUOTIDIEN DU MASTER DE JOURNALISME DE L’ INSTITUT FRANÇAIS DE PRESSE - PROMO 2016 # 03 20 02 2015 n Pour la première fois depuis 2009, les prix à la consommation ont baissé en janvier de 1% en France. Chute du prix du pétrole et soldes d’hiver expliquent en grande partie ce phé- nomène qui avantage le consomma- teur en allégeant certains postes de dépenses fixes. Pourtant, les écono- mistes restent préoccupés. Dans toute l’Europe, les prix ont tendance à dimi- nuer, alimentant le spectre de la défla- tion. PAGE 6

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Le quotidien-école des M1 de l'école de journalisme de l'Institut Français de Presse.

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L’ESSENTIEL

Le spectre de la déflation

Les prix ont diminué de 0,6% en janvier dans la zone euroFRANCE P.2-3La loi Macron passe par la petite porte

n Avec seulement 234 voix sur les 289 néces-saires, la motion de censure de l’UMP-UDI a été rejetée jeudi à l’As-semblée.

Frénésie antisémite pour cinq adosn Les cinqs présumés auteurs de la profana-tion du cimetière juif de Sarre-Union ont été mis en examen.

INTERNATIONAL P.4L’Ukraine demande le renfort de l’UEn Après l’attaque de Debaltsevo, Porochen-ko réclame vainement l’aide de ses alliés eu-ropéens.

ECONOMIE P.6Berlin dit non à Athènesn L’Allemagne rejette formellement la de-mande d’extension de prêt à la Grèce. L’eurogroupe doit se réunir vendredi afin de prendre une déci-sion sur cette requête.

CULTURE P.8Coup de grâce pour la Hune

n En grave difficultés financières, la librairie historique du quartier Saint-Germain-des-Prés fermera courant 2015.

EXPRESSOQUOTIDIEN DU MASTER DE JOURNALISME DE L’ INSTITUT FRANÇAIS DE PRESSE - PROMO 2016

# 0320 02 2015

n Pour la première fois depuis 2009, les prix à la consommation ont baissé en janvier de 1% en France. Chute du prix du pétrole et soldes d’hiver expliquent en grande partie ce phé-nomène qui avantage le consomma-

teur en allégeant certains postes de dépenses fixes. Pourtant, les écono-mistes restent préoccupés. Dans toute l’Europe, les prix ont tendance à dimi-nuer, alimentant le spectre de la défla-tion. PAGE 6

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FRANCEPOLITIQUE Avec 234 voix pour, la motion de censure a été rejetée à l’Assemblée nationale

La loi Macron échappe à la censure

Nicolas Sarkozy dénonce « les mensonges » de Hollande

02 - EXPRESSO - JEUDI 19 FEVRIER

n Il n’est pas député et ne pou-vait donc défendre la motion de censure déposée par l’opposition. Nicolas Sarkozy s’est donc invité jeudi matin au micro d’Europe 1 pour poursuivre l’offensive contre François Hollande. Le président de l’UMP n’a pas maché ses mots, estimant que l’utilisation du 49-3 était « la conséquence des mensonges répétés de François Hollande ». « Quand on a expliqué pen-dant toute une campagne qu’on

ferait une politique de gauche, qu’il n’y avait pas de crise dans le pays, que tout était dû à un certain Nicolas Sarkozy, on crée les conditions de la révolte », a-t-il asséné Selon lui la « toute petite loi Macron » ne fera pas baisser le chômage. « Il y aura à la fin 2015 beaucoup plus de chômeurs en France » a- t -il prédit .L’ex président de la République n’a pas limité ses critiques au seul champ économique. Un mois

après les attentats terroristes, il a dénoncé le « silence assour-dissant » de la Garde des sceaux Christiane Taubira , devenue la cible privilégiée de la droite pour sa politique pénale. « Est-elle tou-jours ministre de la Justice ? » a-t-il lancé.

Menace d’exclusionInterrogé sur les prochaines échéances électorales, le pré-sident de l’UMP a répété qu’il n’y aurait pas d’alliance avec le

Front national, menaçant « d’ex-clusion » tout responsable qui s’y risquerait. Sur RTL, Jean-Marie Le Pen s’est, quant à lui, déclaré favorable à des alliances « au cas par cas » pour les départemen-tales de mars.Nicoloas Sarkozy a ajouté que sa candidature à l’élection présiden-tielle de 2017 n’était « pas obli-gatoire », façon de confirmer la compétition de plus en plus vive avec Alain Juppé.

W. Z.

n « Tout ça pour ça », les mots du président du groupe PS, Bruno le Roux, résument parfaitement l’état d’esprit qui régnait à l’Assemblée nationale jeudi soir après le rejet de la motion de censure. Le texte n’a obtenu que 234 voix, alors qu’il en fallait 289 pour atteindre la majorité absolue. Conséquence: le projet de loi Macron est adopté, au terme d’une rocam-bolesque séquence politique, débutée mardi avec l’annonce du recours à l’article 49-3 pour passer outre les divisions de la gauche.

Règlements de comptes à l’Assemblée nationaleC’est avec une dizaine de mi-nutes de retard et dans un hémi-cycle clairsemé que Christian Jacob, le président du groupe UMP, ouvre le feu. Le député de Seine-et-Marne reprend les termes énoncés le matin même par Nicolas Sarkozy au micro d’Europe 1 (voir article ci-dessous). Pour lui, le recours à l’article 49.3 à propos de la « petite loi Macron », qui se situerait « entre pas grand-chose et rien du tout », signe davantage l’aveu de faiblesse du chef de gouvernement qu’une marque d’autorité. Constamment Christian Jacob cible la personne de Manuel Valls, coupable à ses yeux de se comporter comme un commu-nicant, « un président de la IVe République, contraint de mar-chander et de boursicoter ». Philippe Vigier, le président du groupe UDI, monte à son tour à la tribune. Son groupe a tan-gué. Certains centristes étaient prêts à voter la loi Macron, puis

se sont brusquement rétractés. « Vous êtes toujours prison-niers du mensonge sur lequel s’est construite la majorité de 2012 », accuse le centriste, qui pointe la faiblesse de Manuel Valls : « Vous ne disposez pas de la majorité nécessaire pour conduire vos engagements ». Il encourage les frondeurs à prendre jusqu’au bout leurs responsabilités, en « renver-sant la table autour de laquelle ils sont confortablement instal-lés ». « Un mur d’immobilisme n’a jamais fait un projet de société »Manuel Valls répond dans un discours d’une demi-heure. Le premier Ministre conteste l’affaiblissement de l’exécu-

tif et affirme sa volonté de réformes : « Ma responsabilité c’est de faire avancer le pays, de le réformer ». Il promet de poursuivre les réformes « dans le dialogue » bien sûr, mais surtout « avec l’autorité qui s’impose », mais « sans se lais-ser impressionner ». L’agenda des réformes est néanmoins li-mité : logement, santé, et fin de vie. Manuel Valls insiste aussi sur l’esprit du 11 janvier qu’il continue de défendre en dépit des divisions de la majorité : « L’esprit du 11 janvier c’est l’exigence d’être à la hauteur, une exigence qui nous grandit tous collectivement ». L’in-verse de ce qui s’est déroulé au cours de cette folle semaine.

o William Zinck

« Faire avancer notre pays et le réformer avec détermination », a déclaré Manuel Valls jeudi à l’Assemblée Nationale. Charles Platiau / Reuteurs

A 55 voix prèsPour être adoptée, la motion de censure devait réunir 289 voix. Mais 234 députés seu-lement ont voté pour. Parmi eux, on dénombre les dépu-tés de l’UMP, les députés centristes de l’UDI.Quelques élus du Front de Gauche y ont également joint leur voix ainsi que les deux députés du Front national. Les députés du groupe PS ont, quant à eux, voté le rejet de cette motion, de même que ceux des radi-caux de gauche et des éco-logistes. Les “frondeurs” du PS n’ont pas voté la cen-sure.

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n Dix ans après le vote de la loi Handicap, destinée à améliorer la situation des personnes han-dicapées, la France a encore des efforts à réaliser. C’est l’une des conclusions du rapport du Com-missaire européen aux droits de l’homme Nils Muižnieks, rendu public mardi.Faute d’outils d’évaluation adap-tés, personne ne sait précisément quel est le nombre de personnes handicapées en France. Plus grave, ces mauvaises évalua-tions entraînent de nombreux placements dans des institutions spécialisées de personnes qui pourraient vivre accompagnées dans un milieu classique. En conséquence, environ 6.000 per-sonnes handicapées sont actuel-lement en Belgique, faute d’avoir pu trouver une situation qui leur convient en France. Le recours à l’hospitalisation forcée est égale-ment critiqué par le commissaire européen, tout comme l’utilisa-tion de la contention ou de l’iso-lement comme punition dans les établissements psychiatriques.

L’accès à l’emploi ou à l’édu-cation sont également pointés du doigt. Près de 20.000 enfants handicapés ne seraient pas sco-larisés, notamment en raison du manque de formation des ensei-

gnants. Le rapport s’inquiète en particulier de la situation des en-fants autistes, dont une très faible proportion est scolarisée dans des établissements classiques.

o Olivier Bories

Demande de levée de l’immunité de P. Balkany

nLes juges d’instruction Re-naud Van Ruymbeke et Patri-cia Simon ont transmis au parquet national financier une demande de levée de l’immu-nité parlementaire du député UMP Patrick Balkany. Mis en examen pour « corruption » et « blanchiment de fraude fiscale », le député de Leval-lois-Perret aurait dissimulé au fisc la possession d’une villa au Maroc grâce à des sociétés écran. Il aurait également uti-lisé des moyens mis à sa dis-position en tant qu’élu à des fins personnelles.

Gleeden attaqué par des associations catholiques

n Dans une tribune publiée par Gleeden, le site de ren-contres extra-conjugales, est aujourd’hui assigné en justice devant le tribunal de Grande Instance de Paris par les Associations fami-liales catholiques (AFC). Ces organisations conservatrices accusent le site de promou-voir l’infidélité en violation du code civil. Si l’infidélité n’est plus une faute pénale depuis 1975, le code civil explicite que « les époux se doivent mutuellement respect, fidé-lité, secours, assistance ». De son côté, le site Gleeden crie à la « censure » et affirme être dans son bon droit. Il compte plus d’un million d’inscrits en France.

La directrice de Vulcania retrouvée morte n Le corps de Catherine Damesin a été retrouvé mer-credi soir au pied d’une fa-laise, dans le Puy-de-Dôme. La directrice du parc d’attrac-tion Vulcania était portée dis-parue depuis dimanche matin. Elle était partie faire une ran-donnée seule, comme elle en avait l’habitude. L’autopsie a eu lieu aujourd’hui, et per-mettra d’en savoir plus sur les causes de sa mort. Cathe-rine Damesin avait repris la direction de Vulcania, alors en graves difficultés financières, en 2007.

PROFANATION Le mobile antisémite apparaît « clairement » selon le parquet

A Sarre-Union, frénésie collective pour des gamins sans histoire

Tout est parti d’un post sur Facebook. Mardi 10 février, à 15h55, l’un des cinq adoles-cents écrit sous un

pseudonyme : « Bon les gens, je compte organiser dans pas long-temps un petit groupe afin d’aller explorer quelques endroits aban-donnés (Maisons, Manoirs, Châ-teaux, Gares, etc...) Qui serait partant ? Faites aussi parvenir quelques une de vos idées, si vous en avez ». Un message révélé lun-di par le quotidien local, les Der-nières Nouvelles d’Alsace. Deux jours plus tard, jeudi 12 février, la bande des cinq saccage le cime-tière juif de Sarre-Union dans le Bas-Rhin. Tout semble être « parti d’un jeu, jeu qui a dérapé », explique le procureur de Saverne, Philippe Vannier. Un premier acte qui a déclenché une « sorte de frénésie collective ». Un pre-mier acte, suivi d’autres. Au to-tal, quelque 250 sépultures ainsi qu’un monument aux victimes de la Shoah ont été dégradés. Mercredi soir, après leur présenta-tion devant le juge d’instruction, les cinq mineurs, qui ont tous reconnu leur implication, ont été mis en examen pour « profana-

tion ou violation » de sépultures « en raison de l’appartenance des défunts à une religion ». Le mobile antisémite apparaît donc « clairement » selon le parquet, et ce « malgré les dénégations des intéressés », a précisé mardi le procureur. Lors des auditions, les cinq adolescents ont décrit des « saluts nazis », des crachats sur des étoiles de David, ou encore des insultes comme « sales juifs » ou « sale race ».

Un meneurÂgés de 15 à 17 ans, les auteurs présumés sont des gamins sans histoire, ni antécédent judi-ciaire, d’une bourgade de 3 000 âmes. Le maire de Sarre-Union, Marc Séné, parle de jeunes qui n’étaient pas issus de « familles qui posaient des problèmes par-ticuliers ». Cinq ados, visible-ment quatre « suiveurs » et un « meneur ». Selon le procureur, l’un d’entre eux avait « une aura» vis-à-vis des autres. Même son de cloche devant le lycée polyva-lent Georges Imbert, à deux pas du centre du village alsacien, où sont scolarisés trois des cinq mis en garde à vue parmi 600 autres élèves. « C’est quelqu’un qui

arrive à manipuler les autres », raconte une élève à L’Obs, à pro-pos du cinquième, habitant de Sarre-Union mais élève en termi-nale à Sarrebourg, à une trentaine de kilomètres de là. D’autres as-surent l’avoir déjà entendu tenir des propos racistes.Si l’enquête se poursuit pour établir les res-ponsabilités de chacun, le procu-reur de la République de Saverne a rappelé que les adolescents ris-quaient sept ans de prison.

o Thomas Porlon

EN BREF

FRANCE

JEUDI 19 FEVRIER- EXPRESSO - 03

DISCRIMINATION Le Conseil d’Europe signale des défaillances

La France à la traîne sur le handicap

Les sites chrétiens premiers visésEn marge de l’affaire, deux cimetières chrétiens dans des villages du Calvados et de la Haute-Garonne ont été dégradés mardi et mercredi. S’il existe peu de chiffres récents sur la profanation des cimetières, un rapport d’étude parlementaire daté de 2011 s’inquiétait déjà de la banalisation de ce fléau. Cette année là, 434 actes de dégradation avaient été signalés dans les sites chré-tiens, 41 sur les sites musul-mans et 34 sur les sites juifs.

Patrick Balkany, Maxpp

Environ 20% des personnes handicapées sont au chômage. Maxppp

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04 - EXPRESSO - JEUDI 19 FEVRIER

INTERNATIONALTERRORISME Les Etats discutent depuis trois jours de la question islamiste

Réunion contre l’extrémisme à Washington

Lutter plus efficace-ment contre « l’ex-trémisme violent ». Tel est l’objectif du sommet réunissant

les représentants de 60 pays et qui se tient jusqu’à vendredi à Washington. Etat Islamique, Al-Qaida, Boko Haram… Les menaces sont multiples. Les participants veulent améliorer leur réponse face à l’islamisme radical, sans user de moyens militaires. Initiée par les Etats-Unis à la suite des attentats de Paris, la réunion a aussi pour but de prévenir la radicalisation religieuse. Aujourd’hui, plus de 3000 occidentaux combat-traient dans les rangs de l’Etat Islamique. Les participants ont échangé sur les « bonnes pra-tiques » jusque-là menées en matière de déradicalisation. Le secrétaire d’Etat américain à la Sécurité Nationale, Jeh

Johnson, a ainsi souligné le succès des programmes menés dans les villes de Boston, Los Angeles et Minneapolis.L’accent a été mis sur la néces-sité d’agir sur Internet, devenu un outil de recrutement majeur pour les organisations ter-roristes. La propagande des groupes extrémistes passe au-jourd’hui largement par le Web et les réseaux sociaux. Un domaine dans lequel les Etats ont pris un sérieux re-tard. 90 000 tweets et autres messages d’endoctrinement seraient chaque jour postés sur la toile d’après de hauts res-ponsables américains.

Obama refuse les amalgames Autres enjeux de la rencontre, le partage d’informations entre les gouvernements, mais aussi la collaboration avec le secteur privé. « Nous voulons organi-ser un vaste réseau pour com-

battre l’extrémisme violent », a expliqué un haut responsable américain.« Nous ne sommes pas en guerre avec l’islam, nous sommes en guerre avec des gens qui ont perverti l’islam » a déclaré Ba-rack Obama qui a ainsi appelé à « discréditer les idéologies haineuses ».

Le président américain a par ailleurs encouragé les leaders religieux à prendre davantage la parole contre l’islamisme ra-dical. Selon lui, la démocratie, l’égalité homme-femme et la lutte contre la corruption sont les meilleurs remparts contre le terrorisme.

o Lucas de Villepin

n La foule était silencieuse et unie derrière la banderole « Hommage au procureur Al-berto Nisman ». Quatre cent mille manifestants sont descendus dans les rues de Buenos Aires quelques se-maines après la mort du procu-reur pour demander que justice soit faite.A l’origine de ces protestations monstres, l’attentat antisé-mite de Buenos Aires de 1994 qui avait fait 85 morts et 300 blessés. Aucun coupable n’est connu à ce jour. En charge de l’affaire depuis 2004, le procu-reur Nisman, qui accusait l’Iran d’avoir commandité l’attentat, avait pourtant une idée très pré-cise de la cause de cet échec judiciaire. En effet, il accusait la Présidente et plusieurs hauts

fonctionnaires d’avoir couvert, en échange d’accords commer-ciaux, les responsables iraniens de l’attentat.

Cette version des faits est contestée par les partisans du gouvernement. Ils accusent M. Nisman d’avoir voulu nuire in-

tentionnellement à la présidente en impliquant le pays dans le conflit au Moyen-Orient.

Une mort suspecteLe 18 janvier dernier, M. Nis-man a été retrouvé dans sa salle de bain, la porte verrouillée de l’intérieur, une balle dans la tête et une arme à portée de main. Il devait présenter quelques heures plus tard la preuve de ses affirmations devant le Congrès. L’enquête sur sa mort s’oriente pour le moment vers un sui-cide, ce qui laisse dubitatifs une immense majorité d’Argentins descendus dans la rue.Vendredi 13 février, le procu-reur Gerardo Pollicita a repris le dossier de Nisman et a annoncé qu’il poursuivait son enquête.

o Maureen Suignard

ARGENTINE Après la mort suspecte d’un procureur, la rue exprime son indignation

La présidente Kirchner face à la suspicion populaire

Le gouvernement a qualifié la manifestation d’hier, réunissant 400 000 personnes, de « putschiste ». AFP

Barack Obama incite à ne pas commettre d’amalgame à l’encontre des musulmans. Kevin Lamarque, Reuters

n Pour la première fois depuis le début du conflit ukrainien, Petro Porochenko a demandé l’envoi d’une mission policière de l’Union Européenne dans le pays. C’est selon lui la seule solution pour maintenir la paix dans l’est pro-russe, menacée depuis la prise par les rebelles de

la ville de Debaltsevo mercredi. Cette déclaration a été reçue avec hostilité par Moscou. L’ambassadeur russe à l’ONU Vitali Tchourkine a affirmé que le président ukrainien voulait « détruire les accords de Minsk » conclus le 12 février. Lors d’un entretien télépho-

nique ce matin, François Hol-lande, Angela Merkel, Petro Porochenko et Vladimir Poutine ont dénoncé les ruptures de ces-sez-le-feu et réaffirmé la néces-sité « d’appliquer avec rigueur l’accord de Minsk ». Sans toute-fois répondre explicitement à la demande ukrainienne.

Pas de soutien militaireLes ministres des Affaires étrangères espagnol et britan-nique se sont quant à eux pro-noncés contre un soutien mili-taire aux forces ukrainiennes et ont privilégié la « solution du dialogue ».

o Lauriane Clément

UKRAINE Kiev appelle à une intervention des forces européennes

Pas de réponses concrètes à la requête de Porochenko

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JEUDI 19 FEVRIER - EXPRESSO - 05

INTERNATIONAL

Yingluck Shinawatra mise en examen

n La Première ministre thaï-landaise déchue Yingluck Shinawatra a été mise en exa-men et inculpée pour « man-quement à son devoir ». Elle risque jusqu’à dix ans de pri-son pour négligence, dans le dossier relatif au programme de subvention du riz mis en place pendant son mandat. Un ancien ministre conservateur grec élu président

n L’ex-ministre conserva-teur Prokopis Pavlopoulos, 64 ans, a été élu mercredi président de la République hellénique par le parlement grec. Un poste au rôle hono-rifique, mais fédérateur dans un pays en crise.

Le train de vie excessif de Benjamin Netanyahu

n Benjamin Netanyahu, en pleine campagne électorale, a été visé mardi par un rap-port du contrôleur général des comptes, dénonçant des dépenses excessives dans la gestion de résidences pu-bliques et privées. Le Premier ministre est présenté dans les sondages comme favori pour conserver son poste.

90 soldats ukrainiens prisonniers des pro-russes

n Au moins 90 soldats ont été faits prisonniers et 82 portés disparus à Debaltseve après le retrait des troupes ukrai-niennes de la ville, a annoncé aujourd’hui l’armée ukrai-nienne. Kiev a sollicité l’aide e l’OSCE.

EN BREFMAGHREB Le pays cherche à contrer l’avancée de l’EI

SYRIE Sur le terrain, Damas prend l’avantage avant l’arrêt des combats

Bachar al-Assad fait feu sur Alepn Reprendre l’avantage, avant de figer la situation. C’est la stratégie de Bachar el-Assad, président syrien, dans le conflit qui l’oppose depuis bientôt cinq ans aux rebelles. Mardi, le régime a lancé une importante offensive armée sur Alep, l’un des derniers bastions de l’opposition. Une attaque meurtrière qui a coûté la vie à 158 personnes.

Alep, une ville stratégique Si l’objectif du régime était d’encercler la vieille cité d’Alep, capitale économique du pays, il n’est parvenu qu’à couper la principale route d’approvision-nement des rebelles. Cette voie relie Alep à la Turquie, princi-pal appui logistique des rebelles syriens. L’offensive syrienne tombe à point nommé. Au moment des

combats, le médiateur de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistu-ra, annonçait à New York que le régime syrien acceptait le gel des combats pendant six semaines à Alep. Un cessez-le-feu qui n’entrera en vigueur « qu’à partir d’une date qui sera annoncée à Damas, dès que possible ». De quoi laisser l’avantage au président syrien.

o Solène Gripon

La Libye réclame la levée rapidede son embargon « Nous ne recevons pas la même attention que la Syrie ou l’Irak ». Le ministre des affaires étrangères libyen a demandé à l’ONU mercredi 18 février la levée de l’embargo sur les armes qui frappe son pays, en vigueur depuis février 2011. Le pays est en proie à des at-taques de plus en plus fréquentes de l’Etat Islamique (EI). Cette sanction « limite » l’équipement de l’armée du pays, qui manque, toujours selon le gouvernement libyen, de munitions et d’armes lourdes pour contrer l’avancée de l’EI. La demande a de faibles chances d’aboutir, les diplo-mates du Conseil de Sécurité craignant que les armes tombent dans de mauvaises mains.

Désaccord entre la Libye et l’EgypteDepuis le 15 février dernier, la Libye et l’Egypte connaissent également un fort désaccord, après la diffusion d’une vidéo montrant l’exécution de 21 coptes égyptiens par un groupe libyen affilié à l’EI.La réaction du Caire ne s’est pas faite attendre : des frappes aé-riennes ont eu lieu le lendemain à Derna, berceau du djihadisme dans l’est de la Libye, où se seraient produit les assassinats. Ne s’arrêtant pas aux frappes, l’Egypte a de plus réclamé une coalition internationale anti-EI en Libye avant de se rétracter.

Un pays divisé En plus de l’expansion de l’EI, la Libye est également en proie à un important conflit interne. Le pays compte en effet deux gouvernements. D’un côté, le groupe révolutionnaire Fajr Libya (« Aube de la Libye ») basé à Tripoli et issu de l’ancien

parlement, le Congrès général national (CGN). Élu en 2012, le CGN marquait le début d’un nouvel espoir de stabilité suite à la chute de Mouammar Kadhafi. Fajr Libya est composé de forces islamiques, notamment celle des Frères musulmans, soutenus, financés et armés par la Turquie et le Qatar. De l’autre côté, les « libéraux » issus de l’assemblée constituante élue en juin 2014, mais déclarée illégale par la Cour constitution-nelle du pays. À la tête de ce gouvernement, le militaire Kha-lifa Haftar, reconnu par la com-munauté internationale, notam-ment par l’Égypte et les Émirats Arabes Unis. Au-delà de ce conflit, les auto-rités sont totalement dépassées par la forte présence de milices armées. Triste anniversaire pour la Libye:

quatre ans après l’historique 17 février 2011, le « jour de rage » qui marqua la chute du général Mouammar Kadhafi, le pays est toujours en proie à de fortes ten-sions, internes et régionales.

o Marie-Caroline Cabut

Des membres de l’armée libyenne sur un tank, le 23 décembre 2014. Abdullah Doma, AFP

Le Qatar peut compter sur ses amis Les monarchies du Golf ont exprimé leur soutien jeudi 19 février au Qatar, actuellement en querelle avec l’Egypte. Doha, qui a dénoncé les raids aériens du gouvernement d’Al-Sissi en Libye, s’est vu accusé par ce même gouvernement de « soutenir le terrorisme ». En signe de protestation, le Qatar a rappelé son ambas-sadeur au Caire.

Le Premier ministre Israélien. AFP

Yingluck Shinawatra en 2012. Saeed Khan, AFP

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ECO / CONSO

n A Athènes la nouvelle fait l’effet d’une douche froide. Berlin vient de balayer du revers de la main la demande d’extension de prêt de la Grèce. La zone euro débattait ce jeudi pour trouver un compromis sur la poursuite du financement du pays. Le gouvernement d’Alexis Tsipras avait envoyé ce matin à la présidence de l’Eurogroupe sa demande d’ex-tension de son prêt à six mois. Pour Berlin, « le courrier ne remplit pas les critères défi-nis lundi par l’Eurogroupe» affirme le Ministre des fi-nances allemand Wolfgang Schäuble dans un communiqué.Angela Merkel exige de la Grèce que des réformes soient réalisées. Parmi celles-ci de-vraient figurer l’engagement à rembourser les créanciers et à ne pas initier de nou-velles dépenses qui pèseraient sur les finances publiques grecques. Pour la chancelle-rie la requête ne présente pas « une solution susbtantielle ». Le gouvernement grec a réa-

git sur le ton de la défensive à l’annonce allemande. Un porte-parole de l’exécutif a es-timé que la réunion de vendredi « laissera apparaître qui veut une solution et qui n’en veut pas ». A Bruxelles, le commissaire

européen aux affaires écono-miques, Pierre Moscovici qui se pose avec M.Juncker en média-teur, se dit certain qu’il existe des « marges de manoeuvre ». Le nouveau Premier ministre Alexis Tsipras qui certifie

depuis dix jours vouloir se détacher des mesures d’aus-térité imposées par la Troïka doit à présent accepter une supervision de ses créanciers.

Réactions des pays membresEn France, l’ex-Président Va-léry Giscard d’Estaing s’est exprimé en faveur d’une sortie de la Grèce de la zone euro. « La Grèce ne peut régler ses problèmes aujourd’hui que si elle retrouve une mon-naie dévaluable. Il faut donc envisager ce scénario de sor-tie très calmement, à froid » explique t-il. Celui qui fut l’un des pères de la monnaie unique était opposé à une entrée du pays dans la zone euro en 2001. L’eurogroupe doit se réunir vendredi afin de prendre une décision sur cette requête.De son côté , Manuel Valls a annoncé son soutien à la Grèce. «La France agira jusqu’au bout pour que la Grèce conserve sa place dans cette Europe».

o Pauline Renoir

CROISSANCE La Banque centrale européenne va injecter 1100 milliards d’euros

La déflation plane sur la France

Bruxelles arbitre le bras de fer entre Berlin et Athènes

Cela ne s’était pas produit depuis sep-tembre 2009. En janvier, les prix à la consommation

ont diminué de 1% en France, selon les chiffres communiqués jeudi 19 février par l’Institut national de la statistique et des études économiques (l’Insee). Calculée sur un an, la chute est de 0,4 %.La baisse des prix paraît être une très bonne nou-velle pour les consommateurs qui voient le coût de leurs dé-penses se réduire. En janvier,

ce sont les soldes d’hiver qui ont poussés les prix à la baisse, le prix des produits manufac-turés a ainsi diminué de 3,2 % sur un mois et pour l’habille-ment, la chute a atteint 16, 5 %. L’autre phénomène notable a été la poursuite de la chute des prix de l’énergie (– 7,1 % sur un an grâce à l’effondrement des prix du pétrole). Ce phénomène devrait pousser à la consommation, notamment parce que la chute de l’infla-tion n’est guère favorable à l’épargne. Pourtant, on sent

depuis plusieurs mois, une in-quiétude latente en Europe. Ce phénomène se caractérise par la baisse des prix et des salaires sur une durée de plusieurs mois. Il s’installe lorsque les consom-mateurs préfèrent attendre pour faire leurs achats.

Le cercle vicieux japonaisLes entreprises produisent alors moins, baissent leurs prix, et réduisent leurs salaires ou licen-cient. C’est le cercle vicieux qu’a connu le Japon ses quinze dernières années.Les prix ont

diminué de 0,6 % en janvier dans la zone euro après avoir baissé de 0,2 % en décembre selon les statistiques Eurostat. Conscient du risque, Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne (BCE), a annoncé début janvier l’injec-tion d’au moins 1 100 milliards d’euros dans la zone euro. Elle espère ainsi maintenir l’infla-tion à 1, 3 % en 2016, ce qui resterait inférieur à celle prévue dans ses objectifs, c’est-à-dire, 2%.

o Marc Taubert

GRECE La place de la Grèce dans la zone euro menacée par l’Allemagne

Le ministre allemand des finances Wolfgang Schaüble (à g.) et son homologue grec, Yani Varoufakis. AP

Guillaume Plantin est profes-seur d’économie à Sciences-Po Paris

Peut-on considérer qu’il un risque de déflation en France et en Europe ?GP : A court terme, on peut l’exclure : la baisse des prix en France et en Europe résulteessentiellement de la baisse des prix du pétrole. Je pense que l’on va rester dans une

situation de croissance et d’in-flation faible autour de 0% pendant pas mal de trimestres.Ce qui veut dire que la banque centrale européenne ne res-pectera pas son objectif de1,3% augmentation des prix en 2016.

Est-ce que la politique moné-taire de Mario Draghi est suf-fisamment accommodante ?Il s’inspire à l’évidence de la

politique monétaire pratiquée par la FED américaine. Maisje ne pense pas que cela serve à grand-chose. Les taux d’inté-rêts sont en effet très bas enFrance comme en Europe.Qu’est-ce qui peut être fait pour ramener la croissance en Europe?La réforme du marché du travail va dans le bon sens, de même que les réformes

structurelles, mais cela ne suf-fira pas. Sans doute aurait-il fallu rééchelonner la dette decertains pays.

Etes-vous inquiet pour l’avenir Grèce ?La Grèce n’est pas si impor-tante, sauf évidemment pour les Grecs. Ce qu’il faut surtout sur-veiller, c’est l’Italie.

o Propos recueillispar M. Taubert

Guillaume Plantin : « La BCE ne respectera pas son objectif »

06 - EXPRESSO - JEUDI 19 FEVRIER

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ECO/CONSO

La mode se met à l’underground pour la fashion week de New York. Des mannequins andro-gynes au teint blafard, cheveux mouillés et grosses compensées cloutées, voilà le look qu’il fau-dra adopter à l’automne prochain. C’est en tout cas ce que prédit le chouchou de la sphère fashion américaine, Alexander Wang.

n Fleuron des PME technolo-giques françaises, l’entreprise de service d’aide à la conduite Coyote a su flairer le bon filon en commercialisant en France les « dashcam » (abréviation de l’anglais dashboard, qui signi-fie tableau de bord), ces camé-ras embarquées que les utilisa-teurs fixent sur le pare-brise de leur voiture. Le gadget permet ainsi de filmer la route lorsque l’on conduit. En cas d’incident ou de choc, la caméra garde en mémoire les dix dernières minutes filmées. L’objectif ? Permettre au conducteur de prouver sa bonne foi lors d’un li-tige ou d’un accident de la route.Le phénomène prend pro-gressivement de l’ampleur dans l’hexagone. Une aubaine pour Coyote, qui peut comp-ter sur l’essor des caméras embarquées pour maintenir sa croissance à deux chiffres. Selon Alban de Renty, res-

ponsable développement chez Coyote, l’entreprise a multiplié par dix ses ventes de dashcam ces trois dernières années, qui ont dépassé le seuil des 300.000 unités en 2014. Si la start-up française peut se targuer d’un chiffre d’affaires record de 105 millions d’euros, elle est de plus en plus soumise à la concurrence dans son cœur de métier, la localisation de zones dangereuses et de radars, où les applications de trafic et de na-vigation gratuites comme Waze connaissent un succès croissant.

Un produit en phase avec son tempsFace à la nécessité de diver-sifier ses activités, la PME a signé début 2015 un partena-riat avec les assureurs Allianz et Amaguiz, qui légitime le recours aux caméras embar-quées Coyote pour exploiter la vidéo en cas d’accident auto-

mobile. Le monde de l’assu-rance semble déjà convaincu de l’émergence prochaine de la « dashcam » : selon M. de Renty, Coyote devrait pro-chainement conclure des ac-cords avec d’autres assureurs. L’entreprise est d’autant plus sûre de son succès que son produit est dans l’air du temps. Quand les applications de partages de vidéos ama-teurs comme Vine et Snapchat fédèrent des millions d’utili-sateurs, la caméra embarquée surfe sur une tendance: se filmer en continu puis par-tager ses vidéos sur le web. L’usage récréatif de la ca-méra embarquée est déjà un phénomène viral en Rus-sie. Les internautes russes mettent chaque semaine des centaines de vidéos en ligne pour exhiber les bizarreries de leurs vies de conducteurs.

o Adrien Candau

EN BREF

SCIENCE Services, biens, animaux, le réseau de transport américain se diversifie

Uber à l’assaut de nouveaux marchés

Pour grandir, Coyote mise sur la "Dashcam"

L’entreprise de trans-port urbain vient d’annoncer le mon-tant de sa dernière levée de fond, à 2,8

milliards de dollars. D’après une source proche du dossier, ce montant inclut 1,2 milliard de dollars de financements obtenus en décembre auprès de plusieurs investisseurs, ainsi qu’une prise de participation stratégique du groupe internet chinois Baidu le même mois pour 600 millions de dollars. Preuve que le géant américain sous la coupe de Travis Kala-nick n’a pas que des ennemis, cette forte participation «sou-ligne la confiance des inves-tisseurs dans la croissance d’Uber» selon un communi-qué. La valorisation totale de la startup s’élève à plus de 41 milliards de dollars.

Développement de l’offre de service à venirProfitant de cette manne excep-tionnelle, la société califor-nienne fondée en 2009 tisse sa toile sur les routes du monde en-tier. Elle est désormais implantée dans 54 pays et 200 villes et la société connue pour son applica-tion mobile de location de véhi-cules avec chauffeur ne compte pas en rester là. Le transport de personne ne serait qu’une étape dans son développement expo-nentiel.Depuis août 2014, elle s’essaie à la livraison de biens, s’imis-sant sur le marché occupé par les grandes surfaces. Plus ré-cemment, la société s’est lan-cée dans la livraison de repas à Barcelone par le biais du service UberEATS. Aux Etats-Unis et en Australie, c’est sur un autre créneau, animalier cette fois,

que s’est lancé l’entreprise. Il est désormais possible de se faire livrer un chaton au bureau pour une séance de « ronronthéra-pie ». Une expansion inexorable est entravée en France par les litiges de Uber avec la justice. Depuis le 1er janvier 2015 , plus de 110 automobilistes ayant uti-lisés l’application UberPop pour transporter contre rémunération des passagers ont été verbali-sés à Paris, a annoncé mercredi le porte-parole du ministère de

l’Intérieur. La contre-offensive de Uber face aux restrictions imposées par le gouvernement ne s’est pas fait attendre. L’amé-ricain a une nouvelle fois déposé une plainte contre Paris auprès de la Commission européenne de Bruxelles. L’objectif pour la société étant de contrer la loi vi-sant à interdire le service Uber-Pop, la jugeant non conforme à la Constitution sur la liberté d’entreprendre.

o Morane Aubert

Fondée en 2009, la société Uber est présente dans 54 pays AFP

Les anti-Uber se font entendreLa riposte des chauffeurs contre Uber s’organise à travers le monde.Ce mardi, à Turin en Italie, des centaines de chauffeurs de taxis venus de toute l’Italie ont manifesté. Ils accusent le ser-vice américain de représenter une « concurrence déloyale ». De l’autre côté de l’Atlantique la ville d’Ottawa poursuit son offensive. Cette semaine, 18 contraventions aux règlements municipaux du taxi ont été données à neuf chauffeurs de l’application Uber.

Une des créations d’Alexander Wang AFP Photo/Jewel Samad

HIGH-TECH La caméra embarquée se démocratise en France

JEUDI 19 FEVRIER- EXPRESSO - 07

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CULTURELIVRES En graves difficultés financières, la célèbre librairie annonce sa fermeture

Coup de grâce pour la Hune

Il est 10h45, Agnès attend que le rideau de fer de la librairie la Hune se lève. Cette conceptrice-édi-trice de 56 ans est venue

chercher un livre sur le com-positeur Felix Mendelssohn. « J’aurais pu trouver ce livre facilement sur Amazon, mais je n’ai pas envie de leur donner du fric », explique-t-elle. Cette cliente, une fidèle de trente ans, s’inquiète auprès d’une libraire de l’avenir de la Hune. « C’est triste, le quartier est pris en otage par les incultes du luxe. Ils s’achètent Saint-Germain », peste-t-elle. Une

autre femme d’une soixantaine d’années débouledans la bou-tique : « Ce matin, j’ai lu une chose terrible dans le jour-nal ». Sa crainte est confirmée par un libraire aux petites lu-nettes rondes et à l’air sévère.La sentence est tombée ven-dredi 13 février : Madrigall, le groupe auquel appartient la Hune, a annoncé la fermeture de la librairie courant 2015. En cause la chute du chiffre d’af-faires, passé de 3,5 millions d’euros en 2010 à 2,3 millions d’euros aujourd’hui, soit une baisse de 35 %. Mais aussi l’augmentation des loyers dans

le quartier de SaintGermain-des-Prés. En 2012, le rachat de l’emplacement de la Hune par Louis Vuitton l’avait déjà obli-gée à quitter le siège historique et symbolique du 170 bou-levard Saint Germain, entre le Café de Flore et les Deux Magots. En regardant à travers la vitrine de la Hune, on voit aujourd’hui l’enseigne marron et doré de la marque de luxe.

L’invasion du luxe« C’est triste pour le sixième arrondissement », confie Re-becca, responsable de la librai-rie Assouline rue Bonaparte.

La fermeture de la Hune est révélatrice de la transforma-tion d’un quartier intellectuel aujourd’hui envahi par les marques de luxe. Spécialisée dans les sciences humaines, la littérature et les beaux arts, la librairie avait vu défi-ler des grandes figures de la littérature du XXème siècle, comme le surréaliste André Breton. Les clients croisés ce jour craignent la disparition des librairies. Françoise, 67 ans, passe en caisse avec cinq romans. « Je n’ai pas forcé-ment besoin de conseils, mais j’aime bien trifouiller », sou-rit-elle. Après quarante ans de fidélité à la Hune, elle ne se résoud pas à acheter ses livres sur Internet. « Ce n’est pas de ma génération », ex-plique-t-elle. JeanHugues, lui aussi, ressort de la librairie avec un sac rempli. A 50 ans, il vient ici depuis ses études d’architecture, « Moi c’est l’odeur du livre que j’aime ».Du côté des employés, c’est la démoralisation. Après avoir répondu «non» à un client qui se renseignait sur la disponibilité d’une revue, une libraire lâche à son col-lègue : « Oh et puis flûte, on s’en fiche maintenant ». Quand le rideau de fer sera définitivement fermé, une galerie de photographies de-vrait prendre la place.

oAmandine Réaux

La libraire Hune a vu chuter son chiffre d’affaires entre 2010 et 2015 Amandine Réaux

n Au pays des Ayatollahs, toute œuvre faisant réfé-rence à l’amour entre deux personnes de même sexe est censurée par les autorités. La poétesse, Sepide Jodeyri, en a fait les frais. De son lieu de résidence, à Prague, la féministe a pris l’initiative de traduire « Le bleu est une couleur chaude » de Julie Maroh, la BD qui a inspirée le film « La Vie d’Adèle » d’Abdellatif Kechiche, palme d’or en 2013. L’auteure est désormais menacée de mort : « Au-jourd’hui ma plume est in-terdite, mon nom est banni », a-t-elle confiée au site Mad-moizelle.

L’éditeur, basé à Paris, est interdit de publication en Iran. Il craint lui aussi pour sa vie.

La promotion de l’homosexualitéLa polémique a démarré lorsque Sepide Jodeyri a voulu faire la promotion de son recueil de poème dans un musée d’Etat, en Iran. Les médias conservateurs se sont emparés de l’affaire, l’accusant de faire la pro-motion de l’homosexualité grâce aux financements du gouvernement. L’auteure de la BD, Julie Maroh, s’est saisie de l’his-toire pour alerter l’opinion sur son site : « C’est une at-

teinte de plus à notre liberté d’écrire, de lire, de commu-niquer, et par-dessus tout d’aimer ».En 2013, le secrétaire du haut conseil pour les Droits de l’Homme de l’Iran avait déclaré : « Nous considérons que l’homosexualité est une maladie qui doit être gué-rie ». L’affaire révèle encore une fois la condition des per-sonnes LGBT en Iran, un pays où la communauté homosexuelle doit vivre cachée sous peine de rece-voir au mieux cent coups de fouet, au pire d’être exécu-tée.

o Pauline Louvet

n La ministre de la culture et de la communication Fleur Pellerin a annoncé qu’Ama-zon devrait « se mettre en conformité avec la loi » d’ici trois mois. Son service « Kindle Unli-mited », qui propose un accès illimité à une biblio-thèque numérique pour seu-lement 9,99 euros par mois, a été jugé non conforme à la loi française. Selon un rapport fourni par la médiatrice du livre Lau-rence Engel, l’impossibilité pour l’éditeur de fixer lui-même le prix de son offre numérique est contraire à la loi.

o Pauline Forgue

Amazon sanctionné

Menacée de mort pour avoir traduit «La Vie d’Adèle»

LITTERATURE L’Iran censure la BD sulfureuse et sa traductrice

08 - EXPRESSO - VENDREDI 20 FEVRIER

NUMERIQUE

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SPORTFOOT Un rival peu menaçant pour Joseph Blatter

Luis Figo, chevalier trop blanc pour la course à la FIFA

n Dans l’affrontement pour la présidence de la Fédération internationale de football asso-ciation (FIFA), l’icône portu-gaise se positionne en candidat valeureux, prêt à rompre avec les combines des instances de la planète foot. Des tons chauds de bel Hidalgo, un visage large et viril avec un sourire habitué aux médias. Luis Figo a tout du prince mé-diterranéen. Il adopte en plus aujourd’hui un discours de jus-ticier du foot pour faire contre-poids à l’image peu « clean » de son rival Joseph Blatter.Quatre candidats officiels concourent aujourd’hui à la tête de la FIFA (Fédération interna-tionale de football association). Quand le suisse Jospeh Blatter, indéboulonnable, se présente à 79 ans à sa propre succession, que le prince Ali tient un dis-cours offensif et que Michael van Praag est inconnu du grand public, Luis Figo fait figure de

candidat rassurant. Dans un communiqué paru jeu-di 19 février, l’ex-ballon d’or parle de restaurer « la crédi-bilité et de la confiance » dans le monde du foot. Son compte Twitter où l’on trouve des pho-tos très posées, dont une, main dans la main avec le géant Pelé, ne laisse pas de doute. La star est en campagne, celle pour un nouveau style de leadership à la FIFA. « Je suis prêt à apporter l’avènement d’une ère beau-coup plus positive pour la fédé-ration et chacune de ses asso-ciations membres » assurait-il lors de sa conférence de presse à Wembley, jeudi 19 février au matin.

« Une image de probité » Luis Figo est sorti du bois le 28 janvier, juste avant la fermeture des candidatures pour la prési-dence de la FIFA. Personne ne l’attendait. Fort de son image de marque d’ex-

ballon d’or, il incarne ce que le journaliste sportif du « Monde » Rémi Dupré appelle une « mage de probité ». « Il a toujours eu le rôle du bon coéquipier, loyal et chacun reconnaît ses bons choix de carrière. On peut dire que son projet consiste à rendre le football aux footballeurs » explique Rémi Dupré. A l’in-verse de Joseph Blatter, il est un joueur d’expérience qui connaît les règles du jeu et il veut mieux répartir l’argent de la FIFA sur les fédérations. Pourquoi est-il alors peu mena-çant pour l’actuel président ? Dans les coulisses du ballon rond, beaucoup estiment que la fédération est si « verrouillée » qu’aucun des trois candidats n’a véritablement ses chances. « Ce ne sont pas les amateurs de foot qui votent mais les présidents des 209 fédérations » explique laconiquement un journaliste sportif. Verdict au moi de mai.

o Véra Lou Dérid

Le portugais Luis Figo, ancien joueur du Real Madrid est candidat à la tête de la FIFA DR

L’homme victime de propos racistes dans le métro témoigne

n Alors que Souleymane S, jeune Franco-Mauritanien de 33 ans, empruntait le métro pour rentrer chez lui dans le Val d’Oise, une bande de supporters de Chelsea l’a empêché de pénétrer dans un wagon avant de l’insulter : « J’ai bien compris qu’ils s’en prenaient à moi à cause de la couleur de ma peau. Vous savez, je vis avec le racisme, je n’étais pas vraiment surpris de ce qui m’arrivait même si c’était une première dans le métro ». Une enquête pour « violences volontaires en rai-son de la race » a été ouverte.

Décès de l’ancien champion du monde Claude Criquielion

n Agé de 58 ans, l’ancien cycliste, qui avait remporté le championnat du monde sur route en 1984 à Barcelone, est décédé d’un accident vascu-laire cérébral (AVC) à l’hôpital belge d’Alost où il avait été pris en charge dans la nuit de dimanche à lundi. Il est sur-tout connu pour avoir été pro-jeté sans ménagement contre les balustrades de la piste de Renaix par le Canadien Steve Bauer lors du sprint final du championnat du monde 1988.

Mondial 2022 : les travailleurs migrants enfin payés

n Au Qatar, une loi va per-mettre de régulariser les salaires des travailleurs migrants, notamment ceux employés sur les chantiers du Mondial de football de 2022. Le nonpaiement des salaires avait suscité de nombreuses critiques parmi les organisa-tions de défense des Droits de l’Homme. La date d’entrée en vigueur de la mesure n’a néanmoins pas été précisée.

Le verdict est tombé pour Papé

n Le deuxième ligne du XV de France a été suspendu dix semaines jeudi 19 février pour son coup de genou dans le dos de l’irlandais Jamie Heas-lip. Le tournoi est fini pour lui, à moins qu’il ne décide de faire appel.

VENDREDI 20 FEVRIER- EXPRESSO - 09

EN BREF

n Ils pensaient obtenir la médaille d’argent. C’est un relais prématuré de la part de l’équipe néo-zélandaise qui a permis aux Français de se qualifier à la première place de la compétition, mercredi, au vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines. Le trio, composé de Gré-gory Baugé, Kévin Sireau et Michael d’Almeida, est ainsi devenu champion du monde en vitesse par équipes. En cause, la demi-roue

d’avance du néo-zélandais Sam Webster sur son coéqui-pier Ethan Mitchell à la fin du premier tour, jugée non conforme au règlement.

«C’est exceptionnel»Les Néo-Zélandais avait beau devancer l’équipe fran-çaise de 32 centièmes de seconde au terme des trois tours de piste, cette faute leur a couté la première place. C’est un très bon commen-

cement pour l’équipe de France au premier jour de la compétition. David Lappar-tient, président de la Fédé-ration française de cyclisme (FFC), s’est félicité : « Un record de France dès le dé-but, c’est exceptionnel ». Il s’agit de la meilleure performance du trio fran-çais depuis les JO 2012, où ils avaient raté le titre d’un millième de seconde face à l’Australie.

o Pauline Forgue

Une médaille d’or surprise pour l’équipe française de cyclisme sur piste

CYCLISME La France victorieuse grâce à une faute néo-zélandaise

EXPRESSO QUOTIDIENInstitut Français de Presse, Paris IIQuotidien M1. Février 2015.

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EXPRESSO20 02 2014 # 03

L’aristo ami des romanosPORTRAIT Louis de Gouyon Matignon s’érige en porte-parole des tsiganes

Louis de Gouyon Ma-tignon, regard vif, souriant, consulte son téléphone pour répondre à ses nom-

breuses sollicitations. Fièrement, il montre le bilan : trois appels manqués, plusieurs notifica-tions et messages reçus en cinq minutes. A 23 ans cet étudiant en droit a un emploi du temps plus proche de celui d’un ministre que d’un jeune homme. « J’ai une vie personnelle très austère. J’ai peu d’amis et je n’ai jamais eu de petite amie. Mais cela ne me gêne pas. Je vis pour ce que je fais. » Et ce qu’il fait, c’est dé-fendre la communauté des gens du voyage.

Un passionné de la gratteIssu d’une vieille famille aristo-cratique française, Louis de Gou-yon Matignon a toujours voulu se démarquer. « Quand j’étais enfant, je savais que j’allais faire quelque chose de spécial. Je pensais juste que ce serait dans la musique. » A 13 ans, il commence la guitare, à 16 ans, il découvre le jazz manouche avec Django Reinhardt et là, c’est le déclic. Il se passionne pour la culture tsigane et commence à les fréquenter. « D’abord dans des cafés, puis des festivals et enfin je passe du temps chez eux sur des aires d’accueil. » Il apprend leur culture, leur langue. Peu à peu, la passion pour la musique vire à l’engagement politique. Il devient l’ami des tsiganes, leur défenseur. Une cause qui peut

sembler originale pour un jeune homme issu de son milieu, mais en cohérence avec ses racines se-lon lui. « La noblesse d’épée au début du Moyen-Age avait pour rôle de protéger les vilains. » Il vit son engagement comme une destinée familiale.

«Gens du voyage, je vous aime»Pour défendre les tsiganes, il sou-haite leur donner de la visibilité pour créer une proximité avec eux. Le principe est simple : plus on connaît une chose, plus on l’accepte. « Plus tu auras de livres sur l’homosexualité, moins il y aura d’homophobie.» Pour changer l’image des gens du voyage, il écrit sur eux. A son actif déjà : un pamphlet de dé-fense de la culture tsigane Gens du voyage, je vous aime, un dic-tionnaire de langue tsigane, une méthode, et un ouvrage sur le jazz manouche. « Actuellement j’ai encore trois projets en cours pour la cause tsigane, et dès que je les aurai achevés, je consi-dérerai ma mission terminée. » Louis de Gouyon Matignon sou-haite à présent s’engager pour l’Europe, une Europe fédérale pour défendre des « petits en-sembles » dans des « plus grands ensembles ». Il a la foi. Il croit en ses projets et en son potentiel. « J’ai beaucoup de force en moi, je suis original, j’ai une grande gueule. » Et quand on s’étonne de le voir passer d’un engage-ment à l’autre, il répond : « Per-sonne ne fera ce que j’ai fait ». o Natacha Delmotte

Louis de Gouyon Matignon, 23 ans, est fan de Django Reinhardt.DR.

EXPRESSO INSOLITEUn ado opéré pour cause de pénis surdimensionnén Un rêve pour certains hommes, le cauchemar d’un adolescent. Aux Etats-Unis, un jeune homme de 17 ans a subi une opération inédite : la réduction de sa verge de 25 centimètres de circonfé-rence, qui d’après les médecins avait la forme d’un ballon de football américain. Un soulagement pour l’infortuné, qui ne pouvait jusqu’alors pas pratiquer de sport, ni avoir de relations sexuelles. Il souffrait aussi de priapisme, qui se traduisait par de longues érections spontanées. « Le patient nous a dit que cette opération avait changé sa vie », a rapporté Rafael Carrion, le médecin responsable de l'opération.

Après les villes fleuries, les villes Internetn A côté des fleurs, v o u s p o u r r e z peut-être apercevoir bientôt des arobases sur le pan-neau posté à l’entrée de votre ville. Un label lancé par l’association « Villes In-ternet », qui récompense les initiatives numériques menées par les communes.

«Plus tard, je veux devenir une sirène» n Toute vocation a son apprentissage, même les plus extravagantes. Origi-naire des Etats-Unis, les écoles de « mermaiding » commencent à faire leur apparition aux quatre coins du monde. On apprend à nager comme Ariel, sans couler, avec une queue de poisson comme l’héroine du dessin animé. En Europe, ces établissements n’existent pour l’instant qu’en Allemagne, où la première école a vu le jour près de Stuttgart. Reste à savoir si le costume est fourni.

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