LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

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UNIVERSITE D’ANTANANARIVO Faculté de Droit, d’Economie, de Gestion et de Sociologie Département DROIT DEA DROIT DES AFFAIRES Année Universitaire 2010 2012 Mémoire portant sur : Présenté par : RABESAOTRA Dominique Mamy Nirina Date de Soutenance : 12 Mars 2012 LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

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UNIVERSITE D’ANTANANARIVO

Faculté de Droit, d’Economie, de Gestion et de Sociologie

Département DROIT

DEA – DROIT DES AFFAIRES

Année Universitaire 2010 – 2012

Mémoire portant sur :

Présenté par :

RABESAOTRA Dominique Mamy Nirina Date de Soutenance : 12 Mars 2012

LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

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3

SOMMAIRE

INTRODUCTION …………………………………………………………………………........ 1

Titre Premier : La vente d’immeuble permettant de concilier les intérêts des différentes

parties en cause ………………………………………………………………………………… 4

Chapitre I : La conclusion en amont de contrats préparatoires, gage de réussite de l’opération ...4

Section 1ère

: Le rôle accru de la volonté des parties dans le choix d’un avant-contrat ……….....4

Section 2 : L’utilité des conventions auxiliaires à la vente immobilière …………………….….19

Chapitre II. La conclusion en aval de l’acte authentique de vente, gage de sécurité juridique....43

Section 1ère

: Questions de fond et traduction de la conception juridique de la substance de la

vente immobilière …………………………………………………………………………….... 43

Section 2 : Le rôle du formalisme dans le cadre de la sécurisation des transactions

immobilières.................................................................................................................................68

Titre Deuxième : Les aspects illégitimes de la vente immobilière ……………………….… 73

Chapitre I : Appréhension des difficultés de l’opération au niveau des acteurs de la vente

immobilière ……………………………………………………………………………………...73

Section 1ère

: Controverses sur le statut des intermédiaires professionnels ……………….. …...74

Section 2 : La protection relative des parties à un contrat de prêt immobilier en droit positif

malgache …………………………………………………………………………………….…..87

Chapitre II : Appréhension des difficultés de l’opération au niveau du contrat de vente ………94

Section 1ère

: Les difficultés d’ordre général ……………………………………………………95

Section 2 : Les difficultés particulières …………………………………………………….......107

CONCLUSION …………………………………………………………………………..…....113

TABLE DES MATIERES

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INTRODUCTION

« La propriété demeure l’un des piliers fondamental de notre droit »1. Elle est un atout

fondamental de liberté reconnu par tous les Etats, même de régime socialiste ; sa mise en œuvre

est garantie par des textes internationaux et par la loi fondamentale de chaque Etat2. Mais mise à

part cela, selon une approche plus privatiste, « La propriété est le droit de jouir et de disposer des

choses de la manière la plus absolue »3. Le droit de propriété est l’essence même des droits réels

principaux, droit donnant un pouvoir direct et immédiat sur une chose. Ainsi, il en ressort trois

attributs : l’usus ou le droit d’user de la chose ; le fructus ou le droit d’en percevoir les fruits ; et

enfin l’abusus ou le droit d’en disposer. Par la même occasion, il conviendrait de s’attarder sur

ce dernier attribut du droit de propriété. En effet, le propriétaire d’un bien peut procéder à un acte

de disposition, tel que la vente, l’échange, la donation … ; le bien pouvant être un meuble ou un

immeuble. Dans le même ordre d’idée, notre étude se focalisera sur la vente d’immeuble.

La vente immobilière peut être définie comme un contrat par lequel une personne

physique ou morale transfert la propriété d’un bien immobilier à une autre, qui lui payera le prix

en contrepartie. Si la définition semble relever du simple bon sens, la mise en œuvre de la vente

immobilière n’est pourtant pas chose aisée. En effet, le droit immobilier est un droit relativement

nouveau à Madagascar, un droit plus pratique que théorique, car ce sont des opérations conclues

par des professionnels pour le compte des parties au contrat. Pourtant, c’est un contrat original,

puisque les parties seront emmenées à conclure ce genre d’acte de disposition qu’une ou deux

fois dans leur vie, et engageront un budget assez conséquent. Par ailleurs, le monde de

l’immobilier est vaste, car il existe, d’une part, une diversification de la nature de l’immeuble :

immeuble bâti c’est-à-dire déjà édifié, pouvant être subdivisé en maison individuelle ou en lot de

copropriété d’appartement ; immeuble non bâti, c’est-à-dire des terrains urbains ou ruraux. ; et

terrains à construire s’inscrivant dans le cadre de lotissements. D’autre part, une diversification

1 Jean Carbonnier, Flexible droit, 10

e édition, LGDJ

2 DUDH article 17, Convention européenne des droits de l’homme ; article Ier du protocole additionnel n°1 ; article

34 de la Constitution révisée de 2007 3 Article 544 du code civil

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de la qualité des parties au contrat : elles peuvent être des particuliers – simples consommateurs-,

ou bien des professionnels, souvent des marchands de bien.4

A la lumière des enseignements tirés du contexte économique mondial, le secteur

immobilier a connu dans le monde –du moins dans les pays développés- en 2008 un véritable

« krach »5. La crise des subprimes, causée par les prêts hypothécaires à taux très élevés opérés

par la Federal Reserve Bank, et ayant organisé l’insolvabilité des emprunteurs, reste inoubliable.

Cette crise a entraîné l’explosion des prix de l’immobilier, qui en aval, entraîne, à son tour la

baisse du volume des ventes, puis l’effondrement du marché immobilier. Le pouvoir d’achat des

ménages s’effrita et certaines sociétés civiles immobilières firent l’objet de procédure collective

d’apurement du passif. 2010 vit un redressement du marché immobilier, notamment grâce à la

baisse des taux d’intérêt du crédit immobilier, et, à la relance de la construction. A Madagascar,

depuis des décennies, le secteur immobilier n’a jamais connu de récession malgré les crises

politiques de 2002 et de 2009. Cela s’explique en partie, par le fait, notamment que l’immobilier

est une valeur sûre, et même en période de crise, le marché est disponible, l’offre pouvant

répondre rationnellement à la demande.

Aussi serait-il intéressant de démontrer les enjeux que suscite le sujet ; en effet, les

intérêts de la question sont multiples mais aussi capitaux. Sur la plan juridique, la vente

immobilière se présente comme une série d’opérations conclues en amont et en aval : en amont,

la conclusion de contrats préparatoires à la vente permettrait le succès de l’opération ; en aval, la

conclusion définitive de la vente obéissant à un certain formalisme, assurerait la sécurité

juridique de la transaction. Selon une approche consumériste, il faut noter que le logement est

une préoccupation des ménages, juste derrière l’emploi. On pourrait donc conclure, que le

logement serait un important poste de dépense des ménages. Dans le même ordre d’idée, l’enjeu

de l’immobilier à Madagascar est de taille : Le législateur, conscient de la réussite des nouvelles

réformes foncières, projette de mettre en place une législation ayant pour objectif de faciliter

l’accès des malgaches au logement6. Ainsi, il instituera des crédits bancaires immobiliers dont

les taux et les conditions de remboursement seront avantageux. Sur le plan économique,

4 Société ayant pour objet social, la vente, l’achat, la location d’immeuble ou de fonds de commerce

5 Michel Aglietta, crise bancaire : l’échec de la déréglementation financière, in L’état du monde 2009, édition La

découverte 6 Conseil Supérieur du Notariat, mission d’audit du foncier à Madagascar, 17 au 21 Mai 2010

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l’immobilier est un secteur en pleine expansion. En effet, il permet aux acteurs économiques,

notamment aux investisseurs étrangers et nationaux de réaliser d’importants bénéfices en raison

d’important volume de vente. Par la même occasion, l’Etat collecterait des impôts et taxes à

travers l’opération, pour ainsi gonfler les recettes du Trésor Public. Ainsi, cela permettrait à notre

pays d’augmenter sa croissance économique en termes de développement. Enfin, en ce qui

concerne particulièrement l’immobilier d’entreprise, on relève que ce type de bien, dans le

patrimoine d’une société, conserve toute son importance : le bien figurant dans l’actif prend ou

perd exponentiellement de valeur en raison de sa situation juridique et technique (par exemple

lors de la conclusion d’un bail ou d’une cession).

Maintenant que l’on a décelé les intérêts d’une telle question, il conviendrait de poser la

problématique suivante: la vente immobilière, peut-elle en droit, répondre à l’attente des parties

au contrat, désireuses de conclure des transactions immobilières ? Toutes ces idées nous

emmènerons à appréhender que la vente d’immeuble permet de concilier les intérêts des parties

au contrat (Titre Premier), avant d’envisager les problèmes engendrés par l’opération (Titre

Deuxième).

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TITRE PREMIER : LA VENTE D’IMMEUBLE, PERMETTANT DE

CONCILIER LES INTERETS DES DIFFERENTES PARTIES EN CAUSE

La formation du contrat de vente d’immeuble obéit au régime de droit commun, bien

quelle soit assortie de spécificités, propres au droit immobilier. La convergence des intérêts

patrimoniaux des parties au contrat s’appréhende d’abord, par le biais de la conclusion de

contrats préparatoires à la vente elle-même (Chapitre I), puis par la conclusion de l’acte définitif

de vente (Chapitre II).

Chapitre I : La conclusion en amont de contrats préparatoires, gage de réussite de

l’opération

Pour que les parties puissent aboutir à un accord sur le bien à vendre, elles peuvent opter,

soit pour un avant-contrat (Section I), sorte de pourparlers contractuels en vue de préparer la

conclusion d’un contrat définitif ; soit opter pour des conventions accessoires mais utiles aux

parties, répondant à des besoins spécifiques (Section II).

Section 1ère : Le rôle accru de la volonté des parties dans le choix d’un avant-

contrat

Il conviendrait tout d’abord, avant de se pencher sur la question, d’évoquer que le contrat

se forme progressivement. En effet, à la lumière des enseignements tirés de la doctrine, le contrat

se forme par « couches successives », ou encore « point par point »7 sur tels éléments de la

convention. Ainsi, la vente obéirait préalablement à la rencontre d’une offre et d’une acceptation,

seulement ni l’offre, ni l’acceptation sont des avant-contrats. A cet égard, les articles 81 et

7 A.Rieg : « La punctation, contribution à l’étude de la formation progressive du contrat », in mélanges Jauffret,

LGDJ 1974.

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5

suivants de la loi sur la Théorie Générale des Obligations régissent cette question. Mais il

faudrait dépasser le simple cadre du droit commun pour révéler certaines spécificités du droit

immobilier. Pour illustrer le propos, il existe une offre de vente, où le vendeur propose à une

personne déterminée ou indéterminée, en faisant paraître dans un journal le bien à vendre ; ou

encore en recourant au service d’un professionnel de l’immobilier. Bien que l’offre soit en

principe rétractable (tant qu’elle n’est pas acceptée), elle ne l’est plus si l’offrant s’est engagé à

la maintenir dans un certain délai8. Aussi, le bien, objet de la vente, et son prix doivent être

déterminés ou déterminables. Dans le même ordre d’idée, l’offre d’achat est un pourparler

contradictoire : l’acquéreur propose une offre de prix au vendeur. Elle obéit au même régime

que l’offre de vente, mais s’en différencie par son contenu moins exhaustif. Après ce préalable

non négligeable et nécessaire, il nous faudrait s’attarder sur les promesses de contrat, qui

permettront aux parties d’exprimer leur volonté afin d’aller de l’avant dans cette phase

contractuelle.

§1- Promesse unilatérale d’Achat : flexibilité du choix d’un acquéreur

par le vendeur

Avant d’examiner le bien fondé de cet avant-contrat par rapport à l’opération, il nous

semble nécessaire d’évoquer son fondement, son contenu et son régime.

A. Appréhension de la notion de promesse unilatérale d’achat

par le prisme du droit commun des contrats

1. Fondement

Curieusement, la loi sur la TGO n’envisage pas les promesses de contrat, car l’intention

du législateur malgache était de limiter la sphère d’autonomie dont pourrait disposer les parties

quant à la faculté d’exprimer leur choix, sur tel ou tel avant-contrat qui leur conviendrait le plus,

8 Civ, 3

e, 25 mai 2005 Bull civ III, n°117

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6

et ce, afin d’éviter éventuellement une trop grande complexité des opérations contractuelles.

Ainsi, il faudrait se référer à certains articles du code civil français.

La promesse unilatérale d’achat est un contrat par lequel, le promettant s’engage à

acquérir un bien ; le propriétaire vendeur disposera alors d’un certain délai, et la discrétion de lui

vendre la chose. Cette définition fait transparaître que la promesse est un véritable contrat, car

faisant naître des obligations, dont le non respect, serait source de responsabilité. Dans le même

ordre d’idée, dans ce contexte, une seule partie s’oblige tandis que l’autre conserve toute latitude

pour s’engager ou non. Ainsi appliquée à la vente immobilière, le promettant acheteur s’engage à

acquérir le bien, tandis que le propriétaire vendeur dispose d’un certain délai pour se prononcer

sur la vente.

2. Eléments du contrat

La promesse unilatérale d’achat, bien qu’elle soit un contrat, n’en demeure pas moins

unilatérale, car seul le promettant-acquéreur s’oblige à acquérir, tandis que le propriétaire

bénéficie d’un droit d’option à l’issu duquel il doit se prononcer.

2.1. Accord des parties : traduction de l’autonomie de la

volonté

Par la force de l’autonomie de la volonté, le promettant-acquéreur s’engage à acquérir le

bien. Sur ce point, deux précisions méritent d’être évoquées : d’une part, la partie qui s’engage

doit avoir la capacité requise. Ainsi, le domaine de l’incapacité, en général, recouvre :

l’incapacité de protection, qui protège certaines personnes présumées incompétentes, en raison

de leur âge (mineur) ou de leur faculté (aliéné). Le mineur ne pourra pas s’engager à acquérir ;

l’incapacité de jouissance9 qui prive l’incapable de certains droits ou de certaines activités

juridiques, interdit par voie de conséquence, tout acte d’administration sur ses biens ; l’incapacité

9 Article 1123 et suivants du code civil

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d’exercice, par contre, prive l’incapable d’agir. Cette impossibilité n’interdit cependant pas la

mise en œuvre de ce droit, mais impose, pour reconnaître sa validité, la représentation de

l’incapable dans certains actes. D’autre part, le promettant-acquéreur disposerait – du moins en

droit français- d’un droit de rétractation ou d’un délai de réflexion10

. Le droit de rétractation, est

le droit absolu pour le promettant de remettre en cause le contrat, et de revenir sur sa décision de

s’engager à acquérir. Cette prérogative, ne peut cependant être utilisée qu’une seule fois : Pour

illustrer le propos, si dans le cadre d’une promesse unilatérale d’achat sous seing privée, le

promettant exerce son droit de rétractation, il ne peut plus l’exercer dans l’acte authentique de

vente. Par ailleurs, si le promettant s’est rétracté, il ne peut plus revenir sur sa rétractation11

, et

s’il souhaite toujours acquérir le bien, il doit conclure une nouvelle promesse. Aussi, la mise en

œuvre de ce droit, suppose logiquement la notification du contrat à l’acquéreur, et le promettant

exercera son droit dans un délai de 7 jours. Notons que le bénéficiaire de la promesse doit être

informé de cette décision. Parallèlement, on remarque une certaine analogie entre le délai de

réflexion et le droit de rétractation ; cependant, le délai de réflexion s’opère avant la signature de

l’acte définitif de vente. Mais, si un droit de rétractation a été déjà exercé au stade de la promesse

unilatérale, le délai de réflexion ne peut plus être exercé au stade du contrat définitif. C’est dire

que ces deux prérogatives du promettant-acquéreur ne peuvent jouer cumulativement.

2.2.Le droit d’option du bénéficiaire vendeur

Cette prérogative du bénéficiaire s’exerce, soit à travers la levée d’option où le vendeur

accepte la vente ; soit à travers la renonciation à la vente. Il conviendrait d’envisager

distinctement ces deux hypothèses. D’une part, si le bénéficiaire lève l’option, la promesse

unilatérale devient synallagmatique. L’option n’obéit pas à des conditions de formes particulières

et se peut se prouver par tout moyen. D’autre part, si le bénéficiaire ne lève pas l’option, la

promesse devient caduque. Il faudrait noter qu’à travers la position de la jurisprudence12

, que la

levée d’option irrégulière ou non conforme aux stipulations contractuelles ne rend pas la

promesse caduque, si ce délai d’option n’est pas expiré. Cette position nous semble justifiée, car

10

Loi française n° 2006-872 du 13/07/2006, et Loi ENL (Engagement National pour le Logement) 11

Civ. 3e, 13 février 2008, Bull civ III n°29 D.2008, observations Dagorne-Labbe

12 Civ 1

er , 26 octobre 1964, bull civ I, n°470

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8

le juge voulant préserver l’économie du contrat, en évitant tout litige éventuel sur le

remboursement des sommes d’argent versées (à titre de garantie au profit du promettant

acquéreur). Quant au délai d’option, le rôle de l’autonomie de la volonté13

y trouve son compte,

car ce délai peut être conventionnellement fixé par les parties. On préconise souvent qu’il ne peut

être supérieur à 18 mois, car un délai d’option supérieur à 18 mois, serait jugé trop long et

inopportun. Il faut noter, que le droit malgache et le droit français adoptent la même limite

temporelle, quant à la durée de l’exercice de l’option. Par ailleurs, si les parties n’arrivent pas

d’un commun accord à fixer le délai d’option, la jurisprudence permet au bénéficiaire d’opter

dans un délai raisonnable que le juge détermine14

. Mais ne serait-ce pas trop excessif de confier

cette prérogative au bénéficiaire vendeur (s’il est un professionnel) face à un acquéreur (non

professionnel) en position de faiblesse ? Enfin, le point de départ de l’option coïncide souvent

avec la date de conclusion de la promesse unilatérale.

3. Régime juridique

Dans le cadre d’une promesse unilatérale d’achat, le promettant acquéreur a le privilège

de recevoir une somme d’argent versée par le bénéficiaire vendeur à l’occasion de l’exécution de

la promesse. Il s’agit d’un « dépôt de garantie ». Sur cette question, il conviendrait de nuancer les

positions divergentes entre le droit malgache et le droit français. En effet, le droit malgache

conserve toujours l’application de ce dépôt de garantie, et même, si le bénéficiaire ne lève pas

l’option, le promettant conserve les sommes en numéraire versées. Alors que le droit français,

soucieux d’un certain ordre public de protection et voulant préserver un certain équilibre

contractuel pécuniaire, a supprimé cette pratique depuis 200015

. Le nouveau code civil français y

va dans le même sens : notamment, l’article 1589-1 stipule : « est frappé de nullité tout

engagement unilatéral souscrit en vue de l’acquisition d’un bien ou d’un droit immobilier pour

lequel il est exigé ou reçu de celui qui s’engage un versement, quelle qu’en soit la cause et la

forme ». Le champ d’application de cet article semble étendu, car touche tout type de bien

immeuble, quel qu’en soit la destination ou la qualité des parties (professionnels ou particuliers).

13

Article 123 LTGO 14

Civ 3ème

, 24 avril 1970, Bull civ III, n° 279 15

Loi française n° 2000-1208 du 13/12/00, relative à la solidarité et au renouvellement urbain

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Outre ces questions, qu’en est-il de l’exécution de la promesse ? Nous avons déjà évoqué

un peu plus haut, que la promesse unilatérale se transforme en promesse synallagmatique lors de

la levée d’option. Il semble logique que les parties prennent respectivement la qualité de vendeur

et d’acquéreur. Par ailleurs, certaines difficultés peuvent surgir : si le promettant acquéreur ne

respecte pas son engagement avant la levée d’option, il engage sa responsabilité et allouera des

dommages et intérêts. Après la levée d’option, il devra s’exécuter en nature ou par équivalent.

D’autres difficultés peuvent apparaître quant à l’application de la théorie des risques et à la

disparition de l’immeuble. En effet, on applique la règle res perit domino : les risques sont

supportés par le propriétaire de l’immeuble ; si ce dernier venait à disparaître à la suite d’un

événement de force majeure, le propriétaire doit en supporter la perte. Appliquée à la promesse

unilatérale, si l’immeuble est détruit, la promesse devient alors caduque.

A la lumière de ces propos, il conviendrait d’analyser le bien fondé d’ordre pratique de

cette promesse, qui conditionnera le succès de la vente immobilière

B. Appréhension de la raison d’être de la promesse unilatérale

d’achat par le prisme de la pratique immobilière

La promesse unilatérale d’achat permet au bénéficiaire vendeur de choisir

discrétionnairement son cocontractant. Ainsi, le vendeur dispose de la faculté de vendre ou ne

pas vendre le bien immobilier au promettant acquéreur engagé par la promesse. Pour ce faire, le

bénéficiaire n’aura qu’à ne pas lever l’option, si par exemple, la marge financière dont dispose

l’acquéreur pour le financement du bien laisse douter.

Dans le même ordre d’idée, le bénéficiaire vendeur peut rechercher d’autres candidats à

l’acquisition de l’immeuble en proposant d’autres promesses unilatérales d’achat. Ces promesses

seront d’autant plus intéressantes pour lui, car il pourra conclure, à des conditions plus

intéressantes en termes de prix ou de modalité de paiement. Pour illustrer le propos, le vendeur

pourra déceler le candidat offrant le meilleur prix, ou encore le candidat présentant le plus de

solvabilité (celui qui détient des fonds directement disponibles sans recourir à un emprunt pour

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10

l’acquisition…). Le vendeur n’aura qu’à choisir le candidat qui lui convient le mieux en levant

l’option sur la promesse d’achat alléchante correspondante.

Ainsi, cette flexibilité de choix d’un candidat acquéreur par le vendeur par le biais de

cette promesse, pourra légitimement répondre aux intérêts pécuniaires du vendeur. Mais qu’en

est-il de la promesse unilatérale de vente et de la promesse synallagmatique de vente ?

§2. Opportunité du choix par les parties d’une promesse unilatérale de vente

ou d’une promesse synallagmatique de vente

Avant d’apporter des éléments de réponse à une telle question, il serait préalablement

nécessaire de rappeler de manière pragmatique les principes et modalités régissant les promesses

de ventes.

A. Rappel préalable des principes et modalités d’exécution relatifs

aux promesses de vente

A cet égard, nous envisagerons d’une part, la promesse unilatérale de vente, puis dans un

second temps, la promesse synallagmatique de vente.

1. Promesse unilatérale de vente : engagement unilatéral

Cette promesse peut être définie comme un contrat par lequel, une personne appelée

promettant, s’engage à vendre un bien déterminé, à une autre personne dénommée le

bénéficiaire. Ce dernier dispose d’un droit d’option lui permettant d’acquérir ou de ne pas

acquérir le bien en question, à l’issu d’un certain délai convenu par les parties. A travers cette

définition, nous pouvons relever qu’une seule des parties s’engage (en l’occurrence le vendeur) ;

l’autre conserve la faculté de ne pas s’engager. Par ailleurs, la chose et le prix doivent être

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déterminés ou déterminables, sinon la promesse sera sanctionnée par la nullité relative16

, car

s’agissant de la protection d’un intérêt privé.

1.1.Portée de l’engagement du promettant

Pour pouvoir légalement s’engager, le promettant doit être capable d’aliéner le bien. A la

lumière des enseignements tirés de la jurisprudence française, la Cour de Cassation affirme que

« la folie ou le décès du promettant survenu entre la conclusion de la promesse et la levée

d’option ne remet pas en cause le contrat de promesse, ni la réalisation du contrat définitif de

vente »17

. En interprétant cet attendu principal, on constate que la position de la haute juridiction

semble justifiée en voulant toujours faire produire à la promesse des effets juridiques, malgré le

décès du promettant ; puisque ladite promesse unilatérale est transmissible à cause de mort, les

héritiers de celui-ci demeurent tenus de l’engagement contracté par leur auteur vendeur. Et c’est

à cette occasion que l’on remarque la flagrante distinction entre la promesse unilatérale et l’offre,

puisque dans cette dernière, la transmission par décès de la promesse ne joue pas.

1.2. Le droit d’option du bénéficiaire

Le bénéficiaire conserve toute latitude pour acquérir le bien : il dispose d’un droit

d’option. S’il renonce à acquérir, il n’aura qu’à ne pas lever l’option ou exercera un droit de

rétractation18

. Le régime du droit d’option de la promesse unilatérale de vente est similaire à

celui de la promesse unilatérale d’achat, quant aux effets juridiques lors de la levée ou non de

l’option, quant au délai relatif à l’option, ainsi que son point de départ.

16

Com 13 janvier 1971, Bull civ IV n°13 17

Civ 3ème

, 7 janvier 1982, RTD civ 1982, observations Chabas Civ 3

ème, 10 décembre 1997, Bull civ III n° 223

18 Op.cit

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1.3.Difficultés relatives à la qualification et à la validité

de l’indemnité d’immobilisation

L’indemnité d’immobilisation peut être analysée comme une somme d’argent versée par

le bénéficiaire de la promesse (Acquéreur) au profit du promettant (vendeur), pour le service

rendu par le promettant qui s’est engagé à ne pas vendre le bien durant le délai d’option. Si le

bénéficiaire lève l’option, cette indemnité s’impute sur le prix de vente ; dans le cas contraire,

s’il ne lève pas l’option, elle est réputée acquise au promettant. Cependant, elle tend à se

confondre avec d’autres mécanismes juridiques, dont il convient d’en délimiter les contours. En

effet, elle ne doit pas être confondue avec le dédit : dans le cadre de l’indemnité

d’immobilisation , le bénéficiaire dispose d’une faculté, d’une discrétion pour acquérir ou non

par le biais du droit d’option ; alors que dans le cadre d’un dédit, l’acquéreur est déjà obligé,

engagé à acheter d’où la maxime « pour se dédire (se désengager), il faut avoir dit ( s’être

engagé) » ! Ainsi le dédit suppose qu’un engagement préalable d’acquérir ait été pris. Par

ailleurs, l’indemnité ne doit pas être également confondue avec la clause pénale. Une définition

de cette dernière a été proposée par D .Mazeaud : « elle est la disposition par laquelle les auteurs

d’un acte juridique créateur d’obligations prévoient l’application d’une sanction civile

déterminée à l’avance en cas d’inexécution de ces obligations »19

. A travers cette définition, on

peut appréhender que la clause pénale a la nature d’une sanction, alors que l’indemnité, même si

le bénéficiaire n’achète pas, il ne contrevient à aucune obligation et ne peut faire l’objet de

sanction civile. Dans une autre optique, ne pourrait-on pas penser que la promesse unilatérale de

vente ne se transforme-t-elle pas en promesse synallagmatique si le bénéficiaire verse une

indemnité d’immobilisation ? Puisque l’on rencontre deux obligations réciproques, l’une

touchant le promettant qui s’engage à ne pas vendre le bien à un tiers, l’autre touchant le

bénéficiaire qui s’engage à payer l’indemnité. Sur cette question, certains auteurs considèrent

qu’on est en présence d’une « convention synallagmatique » (existence de deux obligations

réciproques) « contenant une promesse unilatérale de vente » (une seule des parties s’est

engagée à conclure la vente définitive)20

. D’autres courants doctrinaux21

et une certaine

19

D. Mazeaud, la notion de clause pénale, thèse Paris XII, édition 1992 n° 343 et suivants 20

Collart-Dutilleul, les contrats préparatoires à la vente d’immeubles, thèse Tours, 1983 21

J.F Luseau, Des problèmes actuels posés par la promesse unilatérale de vente immobilière, RTD civ, 1977, 483 et suivants

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13

jurisprudence 22

en revanche vont en sens contraire : si le montant de l’indemnité est d’un

montant très élevé et que l’acquéreur serait, à son insu, obligé d’acheter, cela transforme la

promesse unilatérale en une promesse synallagmatique – ce qui a fait l’objet de vives critiques

doctrinales car remet en cause la liberté d’acquérir ou non du bénéficiaire-.

Outre cette question relative à la qualification de l’indemnité, il est temps à présent

d’examiner sa validité sous l’angle du droit malgache, d’une part, et sous l’angle du droit

français présentant certaines spécificités, d’autre part. Au regard du droit malgache, les parties

peuvent, en vertu du principe de l’autonomie de la volonté, la prévoir, et serait liquidée dès la

signature de la promesse unilatérale de vente. Cependant, la pratique démontre que, sont rares les

promesses unilatérales de vente prévoyant une telle indemnité, car cela poserait des difficultés

pratiques relatives à son remboursement en cas de non levée d’option. Au regard du droit

français, cette indemnité était systématiquement prévue dans la promesse, jusqu’à la loi SRU de

200023

, qui stipule que « lorsque la promesse porte sur un immeuble à usage d’habitation

(logement), et que le bénéficiaire acquéreur est un non professionnel, tout versement d’argent

était interdit ». Cette disposition inspirée du droit de la consommation intervient légitimement

pour protéger le contractant en position de faiblesse, en l’occurrence l’acheteur consommateur. Il

faut noter qu’en pratique, cette indemnité varie entre 5 à 10 % du prix de vente de l’immeuble

bâti, mais dépend également de la durée du délai d’option.

Enfin, il serait néanmoins intéressant d’évoquer le système de restitution de cette

indemnité. Il faut considérer le principe de base que l’indemnité s’impute sur le prix en cas de

levée d’option ; mais elle reste acquise au promettant en cas d’option non levée. Or diverses

situations peuvent se présenter et profiter au bénéficiaire. En effet, si la non-levée de l’option est

due par un tiers24

, ou résulte même du fait du promettant25

, l’indemnité est restituée au

bénéficiaire. Dans le même ordre d’idée, le droit français26

permet au bénéficiaire la restitution

de l’indemnité en cas de non-levée d’option lorsque la promesse a été conclue sous condition

22

Com 20 novembre 1962, D 1963 23

Op.cit 24

Pour illustration, un tiers exerce un droit de préemption (coindivisaires, cohéritiers, locataire) et demeure prioritaire à l’acquisition du bien immeuble 25

Fait négligent du vendeur promettant : par exemple une inscription hypothécaire non radiée, une servitude non révélée, existence de vices cachés inhérent à la chose, dol … 26

Article L 312-16 du code de la consommation

Page 17: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

14

suspensive de l’obtention d’un prêt, et bien évidemment, si cette condition défaille, car n’ayant

pas obtenu un crédit.

1.4.Régime juridique

Préalablement, s’agissant d’un droit réel, la promesse unilatérale, pouvant être sous seing

privée ou authentique, doit faire l’objet d’une formalité fiscale d’enregistrement. Si cette

formalité substantielle n’est pas respectée, la sanction varie suivant que l’on applique le droit

malgache ou le droit français. En effet, dans notre droit positif, tout droit réel immobilier n’existe

à l’égard des tiers que s’il a été rendu public dans les formes.27

La sanction serait donc

l’inopposabilité mais l’acte demeure valable inter partes. Différemment, le droit français

sanctionne ce défaut de publicité par la nullité absolue de la promesse28

, car le législateur estime

qu’il s’agit d’une exigence fiscale auquel tout contribuable ne peut se soustraire29

.

Il faudrait rappeler que l’exécution de la promesse unilatérale de vente la transforme en

promesse synallagmatique de vente. Seulement, certaines difficultés tendent à se dessiner à

travers la question de la force obligatoire de l’engagement contracté par le promettant. Avant la

levée d’option, le promettant peut se rétracter. Le bénéficiaire ne peut le contraindre à une

exécution forcée en nature, mais la jurisprudence prévoit le cas d’indemnisation de dommages et

intérêts, car s’agissant d’une obligation de faire. Seulement, les parties peuvent

contractuellement écarter ce droit de rétractation, et par voie de conséquence obliger le

promettant à s’exécuter, en insérant une clause d’exécution forcée dans la promesse. Après la

levée d’option, l’exécution forcée en nature demeure possible si le bénéficiaire prend la décision

d’acquérir. Enfin, les règles relatives à la théorie des risques prévues pour la promesse unilatérale

d’achat sont également applicables à la promesse unilatérale de vente.

27

Article 27 de la Loi 2005-019 du 17/10/05 fixant les principes régissant le statut des terres à Madagascar 28

Article 1589 alinéa 2 du code civil 29

A Madagascar, le délai d’enregistrement de la promesse de vente est de 15 jours (voir article 02.01.11 du Code Général des Impôts suivant Loi de finances 2010

Page 18: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

15

2. Promesse synallagmatique de vente : engagements

réciproques

2.1 Notion

Elle peut être définie comme un contrat par lequel une personne s’engage à vendre un

bien déterminé, pour un prix déterminé, à une autre personne qui s’engage à acquérir. Ainsi, elle

comprend un double consentement, soit deux obligations réciproques, ce qui la distingue

fondamentalement de la promesse unilatérale. On la rencontre parfois sous la dénomination de

« compromis de vente » ; ce dernier peut s’analyser comme un acte sous seing privé constatant

une promesse synallagmatique de vente immobilière, puis se matérialise ensuite par un acte

authentique. Par ailleurs, l’article 1589 du code civil dispose : « La promesse de vente vaut

vente, lorsqu’il y a consentement réciproque sur la chose et sur le prix ». C’est dire qu’elle est

une sorte de vente mal qualifiée. Mais elle ne vaut pas vente (n’est pas assimilable à un contrat

de vente) si la formation du contrat définitif est subordonnée à l’accomplissement d’une

formalité (publicité) ou à la réalisation d’un événement (condition suspensive d’obtention d’un

prêt).

2.2 Condition de fond, condition de forme

Par rapport au fond, la question du consentement et de la capacité n’échappe pas à la

promesse synallagmatique. A ce sujet, la jurisprudence dispose que « l’incapacité du promettant

postérieure à la promesse n’empêche pas la réalisation forcée de la vente »30

. Ensuite, comme le

précise l’article 1589 du code civil, la chose et le prix doivent être déterminés ou être

déterminables.

Quant à la forme, la promesse synallagmatique de vente doit être obligatoirement

notariée, si l’acte constitutif ou translatif de droits réels immobiliers dépasse une valeur de

30

Civ 1ère

, 20 février 2007 et Civ 1ère

, 11 juin 2008

Page 19: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

16

15.000.000 d’Ariary.31

Par ailleurs, l’article 02.01.11 du CGI stipule qu’elle doit être enregistrée

dans un délai de 15 jours à compter de la date de conclusion.32

2.3. Effets de droit

Elle ne produit pas les mêmes effets qu’une vente, bien qu’elle s’en rapproche à certains

égards. Il incombe à l’acquéreur une obligation de verser une somme d’argent représentant une

partie du prix dénommée « dépôt de garantie », mais dont la nature peut être amendée

conventionnellement par les parties. En effet, les parties peuvent verser, soit des arrhes, soit un

dédit. Les arrhes peuvent être appréhendées comme une somme d’argent versée à l’avance par

l’une parties à un contrat et offrant aux contractants une faculté de dédit, c’est-à-dire la

possibilité de se rétracter. A cet égard, l’article 1590 du code civil dispose que : « si une

promesse de vente a été faite avec des arrhes, chacun des contractants est maître de s’en départir.

Celui qui les a données, en les perdant, celui qui les a reçues, en restituant le double ». Or, il faut

également envisager l’hypothèse inverse par laquelle, si l’acquéreur ne peut se rétracter, la

somme versée pourra prendre la nature d’une clause pénale33

, si celui-ci n’exécute pas son

engagement découlant de la promesse synallagmatique. Par ailleurs, la nature du dédit le fait

rapprocher des arrhes, qui offrent la faculté de se désengager, mais s’en distingue par le fait que

la faculté de dédit n’appartient en principe qu’à un seul contractant34

. Alors que les arrhes

confèrent aux deux parties la faculté de revenir sur leur consentement.

Outre cette question relative au « dépôt de garantie », il faudrait envisager lors de

l’exécution de la promesse, la portée de celle-ci par rapport à la signature de l’acte authentique

de vente : Souvent, les parties refusent de signer la promesse ; ce refus pouvant se justifier par

des moyens de droit, dont la faculté de se désengager (arrhes ou dédit), ou encore l’exercice d’un

31

Article 82 de la loi 2007-026 du 12/12/07 portant statut du notariat à Madagascar. La signification du terme acte étant large, le champ d’application de cette disposition touche, aussi bien les promesses synallagmatiques que le contrat de vente définitif. Seulement en ce qui concerne les VEFA ou Vente en l’Etat Futur d’Achèvement, les contrats de réservation (sorte de compromis de vente) sont souvent passés en la forme sous seing privée quelle qu’en soit la valeur de l’immeuble. 32

Op.cit 33

Op.cit 34

Le contractant (l’acquéreur) qui se dédit doit exercer son droit de bonne foi.

Page 20: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

17

droit de rétractation ou d’un délai de réflexion. Hormis ces cas légaux, les parties ne peuvent se

soustraire à cette formalité. A la lumière des enseignements tirés de la jurisprudence française, la

cour de cassation française décide que la vente doit être considérée comme conclue (et doit être

matérialisée par un acte authentique), en fonction de « la valeur que les parties entendaient

conférer à l’acte notarié »35

. Si l’acte authentique est déterminant de la volonté des parties, la

vente ne peut pas être formée, les parties peuvent se soustraire à la réitération de l’acte devant

notaire. Cela s’explique notamment par le fait que les parties avaient tenu pour substantielle au

consentement la forme authentique. Par contre, si l’acte authentique n’est pas déterminant de leur

consentement (car ce qui importe pour les parties, c’est le prix ou les caractéristiques de

l’immeuble), la vente est réputée conclue, puisque la promesse de vente vaut vente lorsqu’il y a

accord sur la chose et sur le prix.

Il est temps à présent de clôturer ces propos préalables mais nécessaires, pour pouvoir

aborder la question de l’opportunité du choix d’un avant-contrat, formule qui conviendra le

mieux aux parties et à l’opération envisagée.

B. Le choix d’un avant-contrat en fonction de divers paramètres

La question du choix pragmatique d’un avant-contrat ne doit pas être appréhendée dans

une perspective de recherche de profit en adoptant telle ou telle promesse. En effet, la sélection

d’une promesse unilatérale ou la promesse synallagmatique de vente obéit à l’intensité de la

volonté de l’une des parties de s’engager ou obéit à certains facteurs affectant l’opération. A cet

égard, le rédacteur de l’acte devra pouvoir conseiller aux parties l’avant-contrat adéquat à

l’opération envisagée.

35

Civ 3ème

, 20 décembre 1994, JCP 1995 II.22491, note Larroumet

Page 21: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

18

1. Intensité de la volonté de l’une des parties d’acquérir

Le choix d’une promesse sera guidé en fonction du degré de la volonté de l’acquéreur

d’acquérir le bien en question. D’une part, si l’acquéreur est réellement déterminé à acquérir en

disposant d’une capacité financière suffisante36

, soit en disposant de suite les fonds nécessaires,

soit en recourant à un prêt bancaire qu’il est quasi-sûr d’obtenir, la promesse synallagmatique

conviendrait le mieux aux parties. On sera quasi-certain que les deux obligations des parties (en

l’occurrence celle de s’obliger à vendre pour le promettant vendeur, et corrélativement celle de

s’obliger à acheter pour le promettant acquéreur) seront exécutées et préservera l’économie de la

convention. D’autre part, si le futur acquéreur semble encore hésiter à acquérir l’immeuble, ou

encore, si le financement à l’acquisition laisse à douter, il faudrait adopter une promesse

unilatérale de vente. Pour appuyer le propos, l’acquéreur dispose ainsi de la liberté de s’engager

ou non en levant l’option à l’issu d’un bref délai. Le vendeur y trouve également son compte, car

il retrouve sa liberté de rechercher rapidement un autre candidat acquéreur si l’ancien n’a pas

levé l’option d’achat.

2. L’existence d’une condition dépendant d’un événement

ultérieur

La condition est définie comme « un événement futur et incertain à la réalisation duquel

est suspendue la naissance ou la disparition d’une obligation » ; elle est prévue par les articles 5 à

17 de la LTGO. Parfois, les ventes immobilières sont subordonnées à la survenance

d’événements qui suspendent l’exécution de l’obligation de l’acquéreur. Si un tel cas venait à se

présenter, il serait opportun d’opter pour une promesse unilatérale de vente : L’exécution de

l’obligation de l’acquéreur dans une promesse synallagmatique serait compromise si la condition

défaille (non obtention d’un prêt, non obtention d’un permis de construire dans le cadre d’une

vente en l’état futur d’achèvement …). Pose également problématique, l’interprétation par les

36

L’appréciation de la capacité financière est une question de fait qui laisse transparaître la solvabilité de l’acquéreur. Cela pourrait être discrétionnairement apprécié par le notaire, juge de fait du non-contentieux, par certains éléments (situation professionnelle, revenus, valeur du bien vendu…).

Page 22: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

19

parties de la réalisation de la condition dans une promesse synallagmatique : la condition est-elle

réalisée, si par exemple, l’obtention d’un prêt bancaire est assortie d’une sûreté ?, ou encore

qu’en est-il si une mention substantielle fait défaut dans le permis de construire ? Toutes ces

difficultés seront source de litige et conduiront à s’orienter vers une promesse unilatérale. A

cette occasion, l’acquéreur peut lever l’option selon sa discrétion, et le vendeur, peut en principe

garder l’indemnité d’immobilisation en cas de non levée d’option.

A travers ce flux d’idées, on peut en déduire que la promesse synallagmatique

conviendrait aux parties s’il y a peu ou pas de conditions stipulées. C’est dire que la volonté de

l’acquéreur est réelle et définitive lorsque son obligation n’est pas conditionnée. Avant de

conclure, selon une enquête pratique effectuée auprès d’un office notarial, la pratique

immobilière démontre qu’il y bien plus de promesses synallagmatiques de vente que de

promesses unilatérales de vente. En effet, durant une période déterminée (2005 à 2010), sur un

nombre total de promesses de nature toute confondues, les promesses synallagmatiques

représentent une majorité importante avec 93%, alors que les promesses unilatérales de vente ne

représentent que 7% ! Cela s’explique notamment, par le fait que la promesse unilatérale ne fait

naître qu’une obligation à l’égard d’une seule partie (le promettant vendeur), alors que dans la

promesse synallagmatique, s’imposent deux obligations, tant à l’égard du promettant acquéreur

que du promettant vendeur. Cette réciprocité des engagements assurera plus de sécurité juridique

pour les parties, et la vente aura plus de chance de se réaliser (car le droit d’option dans une

promesse unilatérale, s’il n’est pas levé, mettra un terme à la vente projetée). Hormis cette

question des avant-contrats, qu’en est t-il des autres contrats préparatoires à la vente ?

Section II- L’utilité des conventions auxiliaires à la vente immobilière

Hormis les avant-contrats, les parties désirant conclure une transaction immobilière, sont

souvent emmenées à contracter d’autres conventions parallèles à la vente. Souvent, il s’agira

d’un contrat de mandat, convention conclue entre le vendeur et un agent immobilier, dont l’objet

est de proposer de vendre le bien immobilier pour le compte du vendeur. Par ailleurs, certains

acquéreurs ne disposant pas de moyens de financement nécessaire à l’acquisition, ont recours à

Page 23: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

20

un emprunt (souvent désigné dans la pratique bancaire « crédit immobilier »). A cet égard,

actuellement, les banques malgaches proposent un large éventail de crédit immobilier, qui

pourra, en partie, satisfaire les besoins de trésorerie de l’acquéreur.

§1. Le contrat de mandat : efficacité et rapidité de la vente

Près de la moitié des vendeurs non professionnels souhaitent vendre leur logement par

l’intermédiaire d’un agent immobilier ; cette prétention se concrétise par la conclusion d’un

mandat qui dispense le vendeur de passer des annonces, de recevoir le candidat acquéreur et

surtout, de négocier le prix du bien immeuble. Il faudrait également relever que l’autre moitié

des transactions immobilières n’ayant pas recours à un agent immobilier, met à la tâche du

vendeur de publier lui-même les annonces, ou de trouver un acquéreur – qu’il connaîtrait

personnellement-. A Madagascar, jusqu’à présent, il n’existe pas encore de statut de l’agent

immobilier, mais le contrat de mandat, les droits et devoirs de l’agent sont régis par les

dispositions du droit français. Ainsi, il conviendra préalablement dans un premier temps, de

déterminer le faisceau de règles juridiques régissant le mandat ; puis dans un second temps,

démontrer le rôle actif de l’agent immobilier dans la réalisation effective de la vente.

A. Existence de règles juridiques propres régissant la matière

Le contrat de mandat obéit à un ensemble de règles particulières dérogatoires du droit

commun du mandat. L’objet du contrat étant de publier une offre de contracter, dans le but de

trouver un acquéreur afin de rapprocher les parties au contrat de vente. Pareillement, toute

proposition d’offre est subordonnée à un mandat écrit émanant du client vendeur. L’agent

immobilier ne dispose d’aucun pouvoir pour vendre le bien immobilier, ni de représenter le

vendeur pour conclure l’acte définitif de vente ; il est selon la jurisprudence, investi d’un simple

« mandat de recherche »37

. Mais le mandant, quant à lui, dispose du libre choix du candidat

acquéreur.

37

Civ 1ère

, 6 mars 1996, n° 93-19.262, Bull civ I, n° 114 p81

Page 24: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

21

1. Les différents types de contrat conclu dans l’intérêt

du client vendeur

Le mandat, peut, selon la discrétion du vendeur, être un mandat simple ou ordinaire, ou

un mandat exclusif.

1.1. Le mandat simple ou mandat ordinaire

Une définition peut être proposée : « le mandat simple résulte d’un contrat passé entre le

potentiel vendeur ou le potentiel acquéreur, et l’agent immobilier sous forme d’un acte écrit sous

signatures privées »38

. En analysant cette définition, le mandat confié à l’agent immobilier est un

mandat de rechercher soit un acquéreur, soit un vendeur, mais dans la majorité des cas, il s’agit

souvent d’un mandat de rechercher un acquéreur ; quant à la forme, il obéira toujours aux

formalités prévues par la LTGO, car étant un acte sous seing privé, il est astreint à la formalité du

double.

a) Teneur du contrat : modalités et durée

Préalablement, l’écrit doit mentionner que le mandat est donné en vue de la vente

envisagée ; à ce sujet, les parties doivent expressément prévoir la nature, la description du bien

immobilier vendu, le prix et ses modalités d’acquittement, ainsi que les conditions de transfert de

propriété et de transfert de jouissance. Mise à part cela, la pratique malgache dispense à l’agent

immobilier de procéder aux démarches de vérification des diagnostiques techniques (amiante,

plomb …)

Des observations doivent êtres avancées quant à la durée du mandat. En effet, cette durée

est d’ordre public, et doit être déterminée dans le temps : Dans la pratique malgache, cette durée

peut être stipulée pour 3 à 6 mois ; à l’échéance, le mandat peut être renouvelé par tacite

38

Gestion immobilière, Bulletin 2004, p 2425

Page 25: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

22

reconduction, mais les parties doivent avoir la diligence de préciser la durée. Ainsi, toute durée

non expressément stipulée dans la première période (durée initiale) ou dans le renouvellement,

est frappée de nullité absolue.

Quant à la portée du contrat, il faudrait savoir, que dans un mandat simple, la vente peut

être confiée à plusieurs agents immobiliers car il n’y a pas d’exclusivité. Ainsi il multiplierait les

chances de trouver un acquéreur39

. Mais les professionnels français conseillent deux ou trois

agences au maximum, car au-delà de ce nombre, le bien se dévaloriserait aux yeux des candidats

acquéreurs, et plus on aura d’offres, le prix proposé s’orienterait vers la baisse.

b) Droits et obligations de l’agent

immobilier

L’intermédiaire professionnel est créancier d’une somme d’argent appelée commission,

précisément déterminée dans le contrat. Il nous paraît opportun de traiter cette question délicate

dans un prochain paragraphe. Quant à ses obligations, il serait intéressant d’évoquer deux

observations à ce sujet. L’agent est investi d’une mission, dont laquelle il doit la remplir avec

toute diligence et professionnalisme. Sa mission est donc juridiquement encadrée, puisqu’il doit

effectuer toutes les formalités nécessaires afin de trouver un éventuel acquéreur. A la lumière de

ces propos, on pourrait en déduire que l’intermédiaire est tenu dans un mandat simple d’une

obligation de moyen. Ainsi, une faute de l’agent pourrait être invoquée lorsqu’il n’a pas eu la

diligence de procéder à des formalités de publicité, ou encore, s’il s’est abstenu de faire visiter

les lieux en temps voulu40

. Pour engager la responsabilité du professionnel sur le terrain

contractuel, le client vendeur doit apporter la preuve de l’inexécution de l’obligation qui lui a

causé un préjudice41

. Dans le même ordre d’idée, l’agent étant professionnel, est tenu d’une

obligation de conseil, d’information envers sa clientèle non professionnelle : il est tenu

d’informer son client sur tout élément du contrat, de renseigner sur les avantages et

inconvénients de l’opération ; il doit ainsi faire comprendre au client la portée de leurs droits et

39

Le mandat simple est peu usité à Madagascar, alors qu’il est utilisé dans 80 % des cas en France 40

C. Biguenet- Maurel « La responsabilité civile de l’agent immobilier » BPIM 2007, page 3 41

Traduction de la locution latine actor incumbit probatio

Page 26: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

23

obligations. A titre d’illustration, l’agent est tenu d’informer son client de la qualité de

l’emplacement géographique du logement, critère déterminant pour la vente. Ou encore, il

appréciera le montant des impôts acquittés par le vendeur42

, et qui sera un critère crucial pour un

acheteur éventuel. Cette obligation de conseil est également étendue envers sa clientèle

professionnelle et envers ses collaborateurs. Sur ce dernier point, l’agent doit fournir au notaire

tous les renseignements nécessaires pour la conclusion de l’acte de vente définitif.

1.2. Le mandat exclusif

Il peut être défini comme étant un contrat passé entre le mandant (souvent le client

vendeur) et le mandataire (agent immobilier) dont l’objet est la recherche d’un acquéreur afin de

le mettre en relation avec le vendeur sur fond de négociation. Le client vendeur est tenu d’une

clause d’exclusivité qui l’interdit de confier la vente à une autre agence immobilière ou de

trouver soi même un acheteur en principe. Seulement, en ce qui concerne cette interdiction de

principe de trouver soi même un acquéreur, rien n’empêche le vendeur – par l’autonomie de la

volonté – de convenir avec son agent, qu’il se réserve, malgré l’exclusivité, le droit de s’entendre

directement avec un potentiel acheteur. Mais il doit préalablement en aviser son agent : on parle

alors, de mandat « semi-exclusif »43

. Ainsi la pratique immobilière à Madagascar démontre que

les clients vendeurs s’orientent vers un mandat exclusif en raison de sa flexibilité…

a) Régime juridique à double face : avantageux

mais également contraignant

Bien que la pratique malgache s’inspire du droit français, elle demeure formaliste : les

précisions relatives au bien ou à la vente doivent être expressément formulées dans le mandat.

Prioritairement, la dénomination en caractère apparent « Mandat exclusif de vente », le type de

bien à vendre, le prix, les conditions du mandat … Quelques observations doivent être avancées

42

Notamment l’impôt foncier sur la propriété bâtie 43

Transaction immobilière 2006, p 9567

Page 27: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

24

quant à l’exclusivité et la durée du mandat. L’exclusivité évince les autres agents immobiliers

quant à la vente projetée par le vendeur. Seulement, selon une logique tangible, il nous paraît

nécessaire qu’en contrepartie de cette exclusivité, l’agent devrait indiquer dans le contrat les

moyens qu’il usera pour vendre le bien (nombre et périodicité des annonces, supports matériels

ou dématérialisés employés, compte rendu des visites…) Il s’agirait donc d’une obligation de

transparence au profit du client (tenu de l’exclusivité), et permettrait de concilier les intérêts des

parties au mandat. Quant à la durée, elle doit être limitée dans le temps comme dans un mandat

ordinaire. Ce mandat peut cependant faire l’objet d’une révocation par chacune des parties après

un délai passé, en principe de 3 mois. Un préavis est cependant nécessaire avant révocation44

.

Enfin, à la différence du mandat simple, l’agent immobilier est tenu d’une obligation de

résultat, assez contraignante, à travers la mission qui lui a été confiée dans ce mandat exclusif.

Ainsi, il commet une faute contractuelle en ne trouvant pas d’acquéreur. Comme corolaire, il

engage sa responsabilité sans que le client vendeur n’ait à prouver la faute de l’agent, car la faute

de celui-ci est présumée dans ce cas. Cette défaillance de l’intermédiaire lui prive également en

principe de toute rémunération.

b) Préférence du mandat exclusif par rapport

au mandat simple

Bien que le l’exclusivité restreigne la concurrence entre agences immobilières (car le

client ne confiera la vente qu’à un seul intermédiaire dans un mandat exclusif), elle présente

dorénavant quelques aspects légitimes, qui orienteront le client à opter pour ce type de mandat.

En effet, l’agent titulaire de ce mandat exclusif, assurant toutes les démarches qu’il effectuera et

étant chargé de négocier la vente, mettra en œuvre plus de moyens, et sera d’autant plus efficace.

De plus, étant débiteur d’une obligation de résultat45

, ce mandat offre plus de garantie au

mandant client.

44

Un préavis de 15 jours semble suffisant dans ce contrat de courte durée. 45

Le mandat exclusif en droit malgache met également à la charge de l’agent une obligation de résultat

Page 28: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

25

Par ailleurs, le mandat exclusif peut s’avérer être un bon rendement pour le vendeur s’il

fixe la durée du mandat en dessous de la durée minimale (3 mois) : L’agent devra trouver un

acquéreur, par exemple en trois semaines, si le mandant a exigé un mandat exclusif limité à un

mois au lieu des trois mois pratiqué. Enfin, l’exclusivité a pour conséquence arithmétique de

fixer une commission moins élevée si l’agent trouve un acquéreur demandant une réduction du

prix du bien immeuble. Somme toute, le mandant vendeur dispose ainsi plus de chance pour

vendre son bien.

2. La commission de l’agent due par le vendeur

Il conviendrait d’appréhender à travers cette question les conditions de jure qui donnent

droit à l’agent immobilier une quelconque somme qui rémunère sa prestation –objet du mandat-.

La commission dans un mandat exclusif et les éventuelles clauses pénales, obéissent à un régime

général ; sauf le cas particulier de la commission dans un mandat simple, qui est source de litige

entre plusieurs agents immobiliers et le vendeur. Heureusement, la jurisprudence a, à ce sujet

apporté des solutions pragmatiques.

2.1. Commission, clause pénale : les aspects

pécuniaires du mandat

La rémunération de l’intermédiaire doit être expressément déterminée dans le mandat,

elle doit être précisée si elle due par le vendeur ou l’acquéreur, ou le cas échéant, partagée entre

les deux ; le contrat détermine également les modalités, ainsi que les conditions de paiement. La

commission, plus précisément son montant est librement débattu par les parties ; elle est souvent

basée sur le prix de vente, mais varie selon la nature du bien (logement neuf, logement ancien,

lot de copropriété …). A Madagascar, la pratique démontre que l’agent immobilier prélève entre

5 à 8% de la valeur du bien immeuble46

; a ce titre il faudrait distinguer les immeubles anciens,

ayant déjà été occupés, et disponibles en l’état ; et les immeubles neufs, n’ayant jamais été

46

« Agent immobilier, un métier lucratif » in Tribune de Madagascar du 25/09/2008

Page 29: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

26

occupés ou ayant fait l’objet d’une restructuration. Par ailleurs, l’agent doit également afficher

ses tarifs à travers la vitrine de son agence, pour qu’ils puissent être connus du public, et doivent

être affichés dans les locaux à la connaissance de la clientèle.47

Dans le même ordre d’idée, la commission étant un droit pour l’agent, il faudrait savoir à

quelles conditions il puisse s’en prévaloir ? Théoriquement, plusieurs conditions cumulatives

sont requises. Préalablement, il est toujours important de rappeler que le mandat doit contenir

toutes les mentions obligatoires, mais l’agent doit également justifier d’un mandat écrit. L’écrit

étant exigé ad validatem et fait transparaître la preuve des obligations des parties. Désormais,

l’agent est privé de sa commission, si la durée du mandat n’est pas déterminée ou limitée dans le

temps. Par ailleurs, l’intermédiaire doit avoir mis en relation l’acquéreur et le vendeur. La

jurisprudence précise à ce sujet que l’agent immobilier ayant fait visiter le bien immeuble, ne

saurait satisfaire à l’objet du contrat du mandat, et ne donnera lieu à aucune commission48

. Ainsi,

l’agent doit être parvenu à négocier la vente, à mettre les parties (vendeur et acquéreur) d’accord

sur le bien et sur le prix. Il faudrait donc une réelle rencontre physique des cocontractants, ainsi

qu’une rencontre des consentements. Ensuite, les démarches entreprises par l’intermédiaire

doivent se concrétiser par la conclusion d’un acte juridique, acte qui prendra soit la forme d’une

promesse unilatérale ou synallagmatique, soit la forme d’un acte de vente définitif. A cet instant,

l’agent immobilier est en droit de percevoir sa commission49

. Cependant, il peut y avoir une

contradiction entre le contrat de mandat et la promesse/contrat de vente, au sujet de la personne

désignée comme débitrice de la rémunération de l’agent immobilier. En effet, le mandat peut

désigner comme débiteur de la commission le vendeur, alors que l’acte de vente désigne comme

tel, au contraire l’acquéreur. Dans un tel cas, une ébauche de solution peut être envisagée :

préférence est donnée au mandat. Seule la personne désignée comme débitrice de la

rémunération dans le mandat sera tenue. Il existe également des situations particulières, où le

mandat stipule que l’acquéreur sera tenu de la commission du professionnel d’une part, mais

qu’un autre acquéreur exerce légalement un droit de préemption sur l’immeuble à vendre d’autre

part (coïndivisaire, cohéritier, locataire). La substitution de l’acquéreur initial par un autre

exerçant un droit de préemption importe peu : l’agent demeure toujours en droit de percevoir sa

47

Article L 113-3 du code de la consommation français 48

CA Paris, 12 mars 1991, Rd imm 1991, p 359 49

L’agent immobilier demeure cependant créancier chirographaire et ne dispose à cet effet d’aucun privilège

Page 30: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

27

commission prévue conventionnellement, et due par l’acquéreur initial50

. Ce droit de préemption

s’exerçant que dans la vente définitive ultérieure, les parties dans le mandat doivent respecter les

termes dudit contrat de mandat (conformément à l’article 1134 du code civil). Ce qui semble

pénalisant pour l’acquéreur initial évincé de la vente, qui devra malgré tout s’acquitter de la

dette envers l’agent immobilier. Enfin, lorsque la commission est due par le vendeur, celle-ci

doit être versée à l’agent immobilier malgré l’exercice d’un droit de préemption d’un acquéreur.

En ce qui concerne la rémunération à caractère indemnitaire de l’agent immobilier, le

contrat de mandat peut prévoir une clause pénale visant principalement à préserver le droit de

l’agent à sa commission. En effet, elle intervient afin de réparer le préjudice subi par l’agent,

lorsque durant la durée du mandat (3 à 6 mois), son contractant (le vendeur) ne respecte pas ses

obligations. Par exemple, le vendeur traite avec un autre acquéreur qui n’a pas été présenté par

l’agent lui-même, et par conséquent, dépasse l’objet du mandat. Une autre hypothèse peut être

envisagée lorsque le vendeur met fin au mandat sans en aviser l’agent immobilier. Il serait

louable pour le vendeur de prévenir l’agent, dès qu’il a conclu la vente avec l’acquéreur

(recherché, proposé par l’agent) pour éviter les risques de litige. Il est également nécessaire

d’aviser l’agent, au moins quinze jours à l’avance, si le vendeur compte mettre fin au mandat.

Notons que la clause pénale doit être expressément stipulée en caractères apparents dans le

mandat. Or, cette clause, traduction de l’autonomie de la volonté, joue automatiquement ;

seulement selon l’article 1152 du code civil, les juges ont le pouvoir d’en aménager le montant,

en appréciant souverainement le préjudice subi par l’agent immobilier.

2.2 La commission dans le cadre d’un mandat

simple, et le concours entres plusieurs

agences immobilières

Le mandat simple permet au vendeur de confier à plusieurs agences immobilières la

recherche d’un potentiel acquéreur. Il n’existe pas de clause d’exclusivité, le vendeur pouvant

confier la vente de son bien immobilier à deux ou plusieurs agents immobiliers. Ce qui n’est pas

50

Civ, 3ème

, 26 septembre 2007 n° 06-17337, Bull civ III, n° 158

Page 31: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

28

sans difficulté, car à qui sera attribuée la commission en cas de concours de plusieurs agences ?

Un arrêt de principe tranche le litige51

: en l’espèce, un vendeur désirait vendre son logement ; à

cet effet, il confia la vente à plusieurs agences en concluant plusieurs mandats simples. Le

premier agent se chargeait de faire visiter la maison à un potentiel acquéreur, mais le deuxième a

cependant, effectivement conclu la vente, et a de ce fait touché sa commission. C’est ainsi que le

premier agent intente une action en responsabilité contractuelle contre le vendeur, car s’estimant

lésé. La cour de cassation rejette son pourvoi, car selon elle : «en cas de mandats non exclusifs,

le vendeur n’est tenu de verser la commission qu’au professionnel qui a effectivement mené à

bien l’opération ». Il en va ainsi même si l’acheteur a présenté au vendeur un autre agent

immobilier. L’avis de la cour de cassation est partagé par de nombreux professionnels, car le

raisonnement se fait en deux temps : la condition de base étant que l’intermédiaire ne touchera sa

commission que si la vente soit passée, négociée par lui ; ainsi si plusieurs mandats simples ont

été contractés (donc avec plusieurs agents), celui qui a conclu l’affaire avec l’acheteur a droit a

sa rémunération. La solution proposée par la haute juridiction nous semble à bon droit, tout à fait

logique, mais pour éviter toute source de conflits entre les intéressés en présence (agents

immobiliers, vendeur et acquéreur), il conviendrait d’opter pour un mandat exclusif. En effet,

l’exclusivité interdit confier la vente à un autre agent immobilier ; et c’est d’ailleurs la raison

pour laquelle à Madagascar qu’on s’oriente vers le mandat exclusif.

B. Le rôle actif de l’agent immobilier dans la réalisation

effective de la vente immobilière

L’agent immobilier joue un rôle économique non négligeable : il gère l’offre et la

demande, il opère un collationnement entre les deux ; il doit veiller à ce que l’offre soit suffisante

pour répondre à la demande, et ceux afin d’éviter une inflation du marché immobilier. Hormis

cette considération d’ordre économique, il joue un rôle juridique crucial, car sa tâche est de

vendre vite et bien l’immeuble –objet de la vente-, en fonction de divers paramètres spécifiques.

51

Cass.civ 1ère

du 09/07/2002 arrêt n° 00-13.410

Page 32: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

29

En outre, il participe à la sécurisation des transactions immobilières en tenant compte de l’intérêt

patrimonial des parties.

1. Vendre vite et bien en fonction de divers paramètres

Pour qu’un vendeur puisse trouver un acquéreur à son immeuble, la vente obéit à quatre

critères, pour qu’elle soit effective. Les quatre critères pris en compte par l’agent immobilier

dans la vente envisagée sont :

- le prix du bien, aspect financier de la vente

- l’emplacement géographique, aspect géographique

- Les papiers et documents nécessaires, aspect administratif

- La personnalité des futurs contractants, aspect moral

En ce qui concerne la question du prix, elle sera abordée en long et en large,

ultérieurement suivant une approche plus technique. Mais ce qui semble nous intéresser est

l’évaluation du bien : en effet l’immeuble peut être aisément évalué par l’agent immobilier52

. Le

prix du bien sera évalué suivant, soit sa valeur vénale, soit sa valeur locative. La valeur vénale

peut être définie comme « le prix auquel un droit de propriété pourrait raisonnablement être

vendu sur le marché à l’amiable au moment de l’expertise »53

; quant à la valeur locative, elle

« représente la contrepartie financière annuelle susceptible d’être obtenue sur le marché de

l’usage d’un bien immobilier dans le cadre d’un contrat de location »54

. Ainsi la valeur vénale

serait le prix réel du bien sur un marché donné alors que la valeur locative correspondrait au

loyer annuel du marché, d’un type de bien déterminé (dans une localité donnée) faisant l’objet

d’un bail. Dans le cadre d’un bien déterminé suivant sa valeur vénale, l’agent immobilier se

réfère à une base de données permettant de rechercher des biens similaires vendus dans le

52

Rien n’empêche cependant que le vendeur fasse lui-même l’évaluation en demandant des informations, soit au centre fiscal (à Madagascar) ; soit à un cabinet d’expertise immobilière ou à un notaire (en France). 53

Charte de l’expertise en évaluation immobilière, 3éme édition 2006 54

Op.cit note de bas de page n° 53

Page 33: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

30

voisinage, ou se réfère au prix du mettre carré (m²) pratiqué. Afin de bien vendre son bien,

l’agent conseille de surcoter légèrement le prix du bien (inférieur à 5%), de manière à essuyer

aucune perte financière car le vendeur consent souvent un rabais (3 à 4%) à l’acquéreur au

moment de la conclusion de la vente. Dans le même ordre d’idée, dans le but de vendre vite le

bien, l’agent doit conseiller au vendeur d’être ferme sur le prix afin d’éviter de trop longues

négociations et éviter de discuter le prix. L’agent doit démontrer à l’acquéreur que le prix est

juste.

L’emplacement géographique de la maison à vendre est un critère déterminant pour la

passation de la vente. En effet, de fait, les candidats acquéreurs recherchent prioritairement

l’accessibilité à la propriété ; une maison qui ne saurait être accessible par la voie publique ne

trouvera pas d’acquéreurs. De plus, la fonctionnalité de la maison demeure un point

fondamental : l’existence d’électricité, d’eau, de gaz et d’autres types d’équipements

domestiques. Cependant le critère de standing est déterminant pour une certaine clientèle : une

entreprise achètera souvent un immeuble d’exploitation dans un quartier d’affaire en centre

ville ; ou encore certains particuliers choisiront une maison située dans un quartier résidentiel.

Par ailleurs, les documents administratifs ou papiers55

en vue de la vente demeurent un

paramètre crucial pour la vente projetée et demeure le fondement juridique de l’opération. En

pratique, ces divers documents retracent la description juridique (en tant que droit réel

immobilier) et matérielle de l’immeuble. Ces formalités sont d’autant nécessaires puisqu’elles

sont la substance même de la vente.

55

L’agent immobilier malgache demandera au vendeur de fournir : - Un certificat de situation juridique du terrain où se situe l’immeuble bâti : c’est un document administratif

attestant la propriété de l’immeuble ainsi que le résumé du titre, l’origine de l’immeuble, ses charges (sûretés, prénotation, prescription acquisitive…) et ses servitudes

- Un plan topographique retraçant la superficie du terrain où seront rattachés les immeubles bâtis - Le titre de propriété du terrain auquel est rattachée la maison : le titre permettant d’identifier

juridiquement l’immeuble - Les prescriptions d’urbanisme ou autorisation de transaction : document administratif délivré par le

Ministère de l’aménagement du territoire et de décentralisation, autorisant l’opération suivant les règles d’urbanisme en vigueur

Notons qu’en France, qu’en plus, il est demandé un avis de taxe foncière et de taxe d’habitation : le niveau de ces impôts fonciers sur la propriété bâtie et sur la propriété non bâtie est un critère que les acheteurs tiennent compte. Est également requis un permis de construire pour attester que les travaux de constructions ont été régulièrement autorisés. Enfin, un Dossier de Diagnostic Technique dit DTT est obligatoire en France : il s’agit en fait d’informations relatives à la situation sanitaire et environnementale de l’immeuble. Il touche essentiellement un DTT contre les termites, le plomb et l’amiante.

Page 34: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

31

En dernier lieu, la personnalité du vendeur est un critère non négligeable. En effet, il

existe des situations juridiques qui exigent le consentement d’autres personnes liées au vendeur,

avant qu’il ne projette d’opérer la vente immobilière. Tel est le cas de l’époux vendeur commun

en bien, ou séparé en bien. La vente du logement familial par l’un des époux doit être soumise au

consentement préalable de l’autre peu importe le régime matrimonial adopté. Cette disposition

est issue du code civil français56

, mais notre droit positif ne l’applique que partiellement, car le

consentement de l’autre époux à la vente n’est requis que pour les époux mariés sous un régime

communautaire. Une autre illustration peut être arguée lors d’une indivision successorale :

l’indivisaire désirant vendre le bien indivis devra obtenir le consentement unanime de tous les

coïndivisaires.

2. Sécuriser rationnellement les parties à travers la

transaction immobilière

L’agent immobilier ne doit pas agir dans son propre intérêt personnel ; l’intérêt du client

prime toujours le sien. Il se doit ainsi de défendre les intérêts des deux parties, en l’occurrence le

vendeur et l’acquéreur, et opérer un juste équilibre d’ordre pécuniaire entre les deux, afin qu’une

partie ne soit pas lésée dans l’opération. Pour ce faire, l’intermédiaire est tenu d’une obligation

de conseil : d’une part, envers le vendeur, il doit évaluer le prix du bien à vendre d’une manière

assez précise en évitant de trop surcoter ou, au contraire de sous estimer la valeur de l’immeuble.

A cet égard, étant un professionnel du marché immobilier, il dispose d’un éventail

d’informations sur la tendance du prix de ce marché. Il a également dans la même optique, le

devoir d’assister le vendeur dans les démarches administratives, et ce, afin d’accélérer et faciliter

le déroulement de la vente. D’autre part, envers l’acquéreur, il doit proposer une offre en arguant

à l’acquéreur que le prix de vente est juste, et surtout, de le convaincre que son acquisition

immobilière sera amortie dans les dix à venir par exemple. Par ailleurs, afin de mieux sécuriser

l’opération, l’agent doit vérifier la situation financière de l’acquéreur, si ce dernier est solvable,

notamment en demandant le cas échéant, si un prêt à été contracté pour le financement de

l’acquisition ; ou encore l’agent doit assortir la vente d’une sûreté… On peut relever que le

56

Article 215 alinéa 3 du code civil

Page 35: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

32

domaine du contrat de mandat conclu entre l’agent immobilier et le vendeur est étendu dans la

mesure où l’agent est tenu de certaines obligations envers l’acquéreur, alors que ce dernier n’est

pas partie au mandat. Cela tient à la nature du mandat de vendre où l’intermédiaire doit mettre

en relation deux personnes pour parvenir à la conclusion d’un acte de vente. Cette pluralité

d’obligations de l’agent envers le vendeur-client et l’acquéreur-tiers, contribuera ainsi non

seulement à sécuriser l’opération immobilière, mais également à converger les intérêts des

différentes personnes en cause.

§2- Le contrat de crédit immobilier : financement de l’acquisition

Propos introductifs : le prêt immobilier, adapté aux capacités financières de

l’acquéreur- client

Une définition générique peut être proposée quant à la notion de crédit bancaire : « il est

l’acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la

disposition d’une autre personne, ou prend dans l’intérêt de celle-ci un engagement par

signature »57

. A travers cette définition, la notion de crédit laisse transparaître qu’il s’agit d’un

contrat conclu intuitu personae, et que la confiance est un paramètre que doit prendre en compte

le banquier prêteur. Il se caractérise par une avance de fonds (remise d’une chose de genre),

suivie de la rémunération du prêteur (par le biais des intérêts légaux), et se finalise par la

restitution de ces sommes à la charge de l’emprunteur. Or, ses caractéristiques le font d’avantage

ressembler à la définition du prêt proposée par le code civil français58

. Finalement d’un point de

vue théorique, le crédit ou prêt est dit « immobilier » lorsque sa cause a pour fondement

l’acquisition singulière d’un bien immeuble.

L’acquisition d’un bien immobilier soulève souvent la problématique de son

financement ; étant donné qu’un immeuble bâti ou un immeuble à bâtir est un bien de grande

57

Art 5 de la Loi n° 95 030 du 22/02/96 relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit 58

Articles 1874 et suivants du code civil

Page 36: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

33

valeur que tout le monde ne peut se permettre d’acheter. En effet, certains particuliers, et souvent

les Petites et Moyennes Entreprises (PME) ne disposant pas de trésorerie suffisante à une

éventuelle acquisition immobilière. Face à cette lacune, la pratique bancaire est intervenue en

instaurant le système des crédits immobiliers adaptés aux facultés financières de chacun. Ainsi,

si les revenus ou si le compte bancaire de l’emprunteur présentent une marge financière

suffisante, le délai de remboursement dudit prêt sera plus bref.

Dans le même ordre d’idée, il faudrait souligner que le crédit immobilier est un crédit à

moyen terme, c’est-à-dire, dont la durée est comprise entre deux à sept ans, ce qui est

relativement assez long, car cela permettrait à son bénéficiaire d’avoir largement le temps de

rembourser le crédit octroyé. Par ailleurs, c’est un crédit en espèce, car l’établissement bancaire

prêteur décaisse des fonds à son client emprunteur. Mais, il pourrait être un crédit par caisse,

puisque la banque s’offre la faculté de débiter le compte de son débiteur (si ce dernier est

titulaire d’un compte dans l’établissement prêteur). Enfin, ce type de prêt peut être, soit un crédit

personnel, en raison de la confiance qu’a le banquier envers la solvabilité de son client (revenus

stables, compte suffisamment approvisionné d’une personne physique, ou encore si le capital

social d’une personne morale présente une garantie suffisante puisque celui-ci constitue le droit

de gage général des créanciers). Soit un crédit réel, lorsque le banquier exige des sûretés en

l’occurrence une affectation hypothécaire si la solvabilité du client laisse douter. La pratique

bancaire malgache démontre que préférence est donnée envers le crédit réel : hypothéquer un

immeuble à titre de remboursement du prêt présente plus de sécurité pour le banquier, car la

sûreté réelle portant sur un immeuble (ayant une grande valeur patrimoniale) sera plus crédible

qu’une sûreté personnelle (cautionnement d’un tiers par exemple).

A. Panorama de la pratique bancaire malgache

Avant d’octroyer un prêt immobilier, l’établissement bancaire requiert à son client-

emprunteur diverses conditions dont ce dernier est tenu d’accepter ; le banquier impose ainsi un

faisceau de modalités dont le contenu ne peut être discuté par l’emprunteur (futur acquéreur d’un

bien immeuble si le prêt lui est accordé). Ce qui tend d’ailleurs à relativiser la notion théorique

d’autonomie de la volonté, puisque le client se trouve ainsi régit par un contrat d’adhésion.

Page 37: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

34

1. Conditions préalables en vue de la mise à disposition des fonds à

l’emprunteur

La condition sine qua non exigée par les banques malgaches est la constitution de

garanties personnelles (cautionnement) ou réelles (hypothèque). Mais comme on l’a déjà évoqué

par incidence, les banques optent pour les sûretés réelles puisqu’elles confèrent pécuniairement

plus de garantie. Ainsi, le débiteur constituant devra obligatoirement hypothéquer un bien

immeuble de son patrimoine. Parallèlement, les établissements bancaires exigent que

l’emprunteur souscrive une assurance décès-invalidité dont le montant correspond au capital

prêté. Il semble donc logique que pour domicilier ses revenus au profit du prêteur, l’emprunteur

devra être titulaire d’un compte au sein de l’établissement prêteur afin de faciliter les opérations

de caisse. Par ailleurs, l’emprunteur déclare sur l’honneur qu’il ne fait l’objet d’aucune poursuite

judiciaire ou pénale, d’aucune procédure collective d’apurement du passif, car celles-ci seraient

susceptibles d’altérer la substance même du contrat ; et qu’il ne fait pas l’objet d’inscription aux

fichiers de la Banque Centrale de Madagascar : c’est-à-dire qu’il n’est pas interdit bancaire. ; il

doit également affirmer avec solennité que le projet d’achat financé grâce au prêt n’a donné lieu

à aucun acte de corruption.

Le contrat de prêt semble présenter des liens juridiques avec le contrat de vente. En effet,

l’emprunteur doit accepter de maintenir le contrat de vente nécessitant le financement : c’est-à-

dire qu’il doit exécuter ses obligations, notamment payer le prix stipulé dans la vente. Dans le

même ordre d’idée, il doit accepter de ne pas utiliser les fonds à d’autre destination que celle

prévue par le contrat de prêt (acquisition d’un immeuble). Et c’est d’ailleurs ce qui caractérise

l’objet du prêt immobilier, puisque l’emprunteur déclare affecter les fonds découlant du prêt à

l’acquisition d’une propriété.

Page 38: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

35

2. Vers un régime se rapprochant d’un contrat d’adhésion mettant

des obligations exclusivement à la charge de l’emprunteur

2.1. Des modalités financières imposées par le banquier

a) La question du montant, de la durée, du taux d’intérêt et

du remboursement du prêt

Le montant du prêt accordé par le banquier correspondra souvent au montant du prix du

bien immeuble que le client envisage d’acquérir. Mais, le prêteur dispose de toute latitude pour

mettre à la disposition de l’emprunteur les fonds, que si ce dernier remplisse les conditions sus-

imposées. Cette faculté est la traduction du principe du libre choix de son client-emprunteur par

le banquier, ce qui pourrait léser le client ; or aucune disposition légale ou entité œuvrant dans la

protection des emprunteurs-consommateurs, n’a encore été mise en place à Madagascar.

Quant à la durée du prêt, elle ne pose pas de problème puisque le prêt immobilier –

rappelons-le- est un prêt à moyen terme, compris entre deux et sept ans. Seulement, les banques

malgaches prévoient une durée de sept ans (84 mois), afin de permettre un échelonnement plus

lointain de la dette, ce qui facilitera le remboursement du prêt, car tient en compte des facultés

financières du client. D’ailleurs, c’est dans cette optique que le prêt est légitimé, dans la mesure

où l’obtention du prêt conditionnera la conclusion de la vente, et permettra de converger les

intérêts, d’une part du prêteur (qui obtiendra remboursement avec taux d’intérêt) et de

l’emprunteur-acquéreur (qui aura obtenu les fonds), et d’autre part, celui de l’acquéreur et du

vendeur (qui obtiendra paiement du prix de l’immeuble vendu).

Le taux d’intérêt peut être analysé comme une rémunération légale du banquier pour

avoir prêté un capital à son client ; il doit être stipulé par écrit dans le contrat de prêt. Dans la

pratique, il est déterminé par référence à un taux de base bancaire, qui est actuellement de

14,90%59

. Ainsi, pour un établissement bancaire sis à Antananarivo, le taux d’intérêt applicable

est de 17% l’année. Pour une autre banque, le taux d’intérêt est de 5,5 % l’année. Le client-

emprunteur contractera avec la banque qui présente le taux d’intérêt conventionnel le plus

intéressant. Il nous semble donc évident que les banques doivent proposer un taux assez bas pour

faciliter l’accès de tous à un crédit immobilier afin de pouvoir acquérir une propriété. Si le taux

59

Le taux de base bancaire est établit par la banque Centrale de Madagascar

Page 39: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

36

conventionnel n’est pas stipulé dans le contrat, on se réfère au taux légal. Ce dernier est fixé par

décret pour la durée d’une année civile. Si le taux de base bancaire connaît une variation de 5

points durant la validité du contrat, le taux d’intérêt variera également vers la hausse. A cet effet,

le prêteur doit informer l’emprunteur de cette hausse survenue par le biais des « avenants

contractuels ». Mais le taux d’intérêt prévu dans le prêt ne doit pas être usuraire : est considéré

comme prêt usuraire tout prêt consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est

consenti, de plus du tiers le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les

établissements de crédit pour les opérations de même nature comportant des risques analogues.

Le domaine de cette disposition ne touche cependant que les particuliers et non les

professionnels (emprunteurs professionnels de l’immobilier, promoteurs, commerçants…)

Par ailleurs, le contrat prévoit des modalités de décompte et de perception des intérêts :

pour illustrer le propos, prenons un cas concret :

- Soit un prêt immobilier conclu pour sept ans soit quatre vingt quatre mois, dont est

appliqué un taux d’intérêt annuel de 17% ;

- supposons que le capital emprunté est de 75.000.000 Ariary,

- le total des intérêts, frais et accessoires seront évalués à la somme de :

= 75.000.000 x 17 /100 = 12.750.000 Ariary, soit 151.786 Ariary par mois (12.750.000 / 84

mois).

Hormis cette question du taux d’intérêt, quelques observations sont à émettre quant au

remboursement du prêt. En effet, les mensualités comprennent la somme nécessaire au

remboursement qui inclut le principal (ou capital), les intérêts, et éventuellement une Taxe sur la

Valeur Ajoutée. Chaque mois et durant toute la durée du prêt, l’emprunteur sera débiteur de ces

Intérêts= Montant du capital x taux d’intérêt

___________________________

100

Page 40: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

37

sommes. Dans le cas ci-précédemment abordé, il remboursera le prêt en sept ans, soit quatre

vingt quatre mensualités consécutives. Il faudrait noter que la première période mensuelle

commence à la date du premier quantième arrêté (date des échéances de remboursement), suivant

la date de décaissement des fonds prêtés : Ainsi, la date de remboursement de la première

mensualité se rapproche de la date de décaissement. Pour mieux comprendre le propos, prenons

pour exemple, un contrat de prêt conclu le 15 janvier de l’année n. Supposons que les fonds ont

été obtenus – à moins d’un mois- le 14 février. Le quantième du mois arrêté est donc le 14.

L’échéance de la première mensualité sera donc le 14 mars ; souvent en pratique, les mensualités

se régleront par prélèvement bancaire sur le compte bancaire de l’emprunteur.

b) Cas particulier d’une exigibilité anticipée du

remboursement

Cette exigibilité anticipée du remboursement est de plein droit dans certains cas stipulés

expressément dans la convention de prêt. Le prêteur pourra ainsi exiger le remboursement du

capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Quelles en sont les causes, et

quelles en sont en les incidences juridiques ?

Suivant une logique tangible, la première cause d’exigibilité anticipée serait le non

paiement à son échéance d’une mensualité. Le prêteur aura, à cette occasion la diligence de

notifier l’emprunteur de cette clause d’exigibilité anticipée par lettre recommandée avec accusé

de réception. Est par ailleurs une autre cause d’exigibilité la défaillance des garanties exigées

(sûretés personnelles ou réelles, assurance …) de l’emprunteur. Ainsi, si une hypothèque a été

souscrite par le constituant au profit du banquier à l’occasion de l’obtention du prêt immobilier ;

et que ladite sûreté fait l’objet d’une main levée (en raison d’une purge de l’hypothèque

notamment), l’emprunteur devra rembourser immédiatement les mensualités restantes. Il est

intéressant de savoir que si l’emprunteur fait l’objet d’une voie d’exécution, en l’occurrence

d’une saisie exécution ou d’une saisie conservatoire, ou encore d’une saisie attribution (saisie

arrêt sur compte bancaire), ladite clause s’applique. Parallèlement, s’il fait l’objet d’une

Page 41: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

38

procédure collective d’apurement du passif (redressement judiciaire ou liquidation des biens)60

,

ou est en déconfiture, l’exigibilité anticipée est de rigueur. Une autre observation nécessite d’être

apportée, en cas de décès de l’emprunteur : l’exigibilité anticipée se répercutera sur ses héritiers,

la dette sera due par ces derniers, car l’obligation est indivisible. Finalement, il existe d’autres

cas mineurs prévus par une telle clause mais n’appelant aucune observation particulière et que

nous nous contenterons de les passer en revue : la non réception des revenus domiciliés ;

l’inexécution par l’emprunteur de ses obligations (emploi des fonds prêtés à une finalité

différente de l’objet défini par le contrat) ; l’inexactitude des déclarations effectuées ; les

événements ayant pour effet de diminuer la valeur du bien que l’emprunteur envisage d’acquérir

(acte de disposition : vente, donation, apport en société, a fortiori une expropriation pour cause

d’utilité publique, ou encore une destruction totale ou partielle du bien immeuble).

Enfin, cette exigibilité anticipée engendre des conséquences importantes. En effet, elle

entraînera la résiliation de plein droit du contrat de prêt ; pour ce faire, un solde de résiliation dû

par l’emprunteur sera établi. Cette question du solde fera l’objet de développements dans un

prochain paragraphe. En outre, une indemnité sera due par l’emprunteur, égale à 5% du principal

restant dû, à la date d’envoi d’une lettre recommandée.

2.2 Des obligations contraignantes nées du contrat

L’emprunteur est généralement tenu de trois séries d’obligations principales, imposées

discrétionnairement par son cocontractant, mais contrebalancées par un droit légitime du client-

emprunteur.

La première obligation est un devoir d’information à la charge du client-emprunteur ; en

effet, celui-ci doit informer le prêteur dans un délai de quinze jours de tout fait susceptible de

diminuer la valeur des garanties : ces dernières sont des « pares feux » qui protégeront le

banquier d’une éventuelle insolvabilité de son client. Ainsi tout acte ou tout fait juridique

affectant ladite sûreté doit lui être communiqué (telle la constitution d’un droit réel principal :

60

Lors d’une PCAP, le créancier (établissement prêteur) doit inscrire sa créance dans un délai de deux mois selon l’article 77 de la loi n° 2003-042 du 03/09/04 sur les PCAP. Notons par ailleurs, qu’en droit malgache que le prêteur de deniers ne dispose d’aucun privilège spécial.

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39

droit d’usage, droit d’usufruit, servitudes actives … sur l’immeuble hypothéqué ; ou encore dans

le cadre d’un emprunt solidaire entre les époux si ces derniers venaient à divorcer). Le débiteur

doit également informer son créancier de tout fait susceptible d’affecter sensiblement la valeur

de son patrimoine, car en contractant d’autres dettes, son actif ne saurait satisfaire le

remboursement de son prêt immobilier.

Dans le même horizon, et comme nous l’avons déjà invoqué par incidence, l’emprunteur

doit souscrire à titre de garantie du remboursement du prêt, soit un emprunt conjoint ou solidaire

entre les époux, soit une hypothèque. En complément, une assurance décès-invalidité sera par la

force des choses exigée. Mais un virement permanent mensuel à partir d’un compte ouvert dans

l’établissement bancaire prêteur, équivalent à la mensualité du prêt, devra être effectué par

l’emprunteur.

Enfin, une obligation d’ordre fiscal est à sa charge : il devra s’acquitter de la Taxe sur la

Valeur Ajoutée (TVA) qui s’imputera sur le prêt. L’impôt dû sera acquitté, soit par retenue à la

source, soit par prélèvement de quelque nature que ce soit61

.

Malgré ses devoirs rigoureux, l’emprunteur dispose tout de même en contrepartie, du

droit de rembourser par anticipation son prêt de son propre gré. Afin de se libérer de sa dette, il

pourra se libérer du capital restant dû, soit en totalité, soit partiellement. Dans les deux cas,

l’emprunteur doit aviser, au moins un mois à l’avance le prêteur de son intention d’effectuer un

remboursement anticipé. Mais son droit est purement relatif, puisque même s’il se libère, il sera

débiteur d’une « pénalité de remboursement anticipé »62

.Mais qu’en est t-il de la validité d’une

telle clause d’indemnité de remboursement anticipé ? Selon une vue de l’esprit, dans le rapport

entre un professionnel et un simple particulier, une telle clause est réputée abusive ; mais dans

les rapports entre un banquier et un contractant qui demande un prêt dans le cadre de son activité

professionnelle, les dispositions protectrices du droit de la consommation ne s’appliquent pas, et

la clause demeure parfaitement valable63

. Il faut remarquer que la pratique bancaire utilise la

terminologie « pénalité », pourtant à notre avis, elle devrait être requalifiée d’indemnité, comme

61

L’emprunteur devra par ailleurs s’acquitter de plusieurs droits : frais de dossier (selon nos informations, ces frais de dossier s’élèvent à 300.000 Ariary que le prêt soit accordé ou non) à l’issue de la négociation du prêt ; des droits d’enregistrement du contrat de prêt doivent être également liquidés. 62

Cette pénalité de remboursement anticipé s’élève en pratique à 3% du capital restant dû ; 63

Cassation, civ 1ère

, 27 septembre 2005, Affaire Fédération française d’athlétisme

Page 43: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

40

le suggère la jurisprudence. Souvent, cette indemnité trouve son fondement et sa légitimité dans

la mesure où elle joue un rôle de compensation, puisque à ce moment, le client n’étant plus

débiteur des intérêts restant dus. En d’autres termes, cette indemnité trouve sa cause dans le fait

qu’elle s’appréhende comme la compensation du manque à gagner du prêteur, car son

emprunteur ne remboursera pas les intérêts restant à échoir. Suivant une autre analyse, elle peut

être appréciée comme une indemnité conventionnelle (dommages et intérêts) quant à une

résiliation unilatérale anticipée du contrat.

A l’occasion, un solde de résiliation sera établi par le prêteur, qui sera égal au capital

restant dû à la date de résiliation anticipé du contrat, diminué le cas échéant de la partie des

intérêts déjà échus, et restant à courir de la date de résiliation à la première date d’échéance qui

suit, augmenté de la pénalité de remboursement anticipé. En pratique, l’établissement de ce solde

est sujet à contestation de la part de l’emprunteur qui argue d’une « non transparence » des

modalités de calcul des intérêts ; et trouve illégitime l’application d’une telle pénalité, car

comment le banquier peut-il l’exiger alors que l’emprunteur dispose des fonds pour rembourser

par anticipation les mensualités restantes ? Mais le client n’a pas son mot à dire, car le banquier

propriétaire du capital prêté est en position contractuelle dominante, son client doit se soumettre

à toutes ses exigences, puisqu’ayant contracté un contrat d’adhésion.

B. Vers un lien de droit entre vente et prêt : la vente conclue sous condition

suspensive d’obtention du prêt prévue en droit français

Le droit français permet de rallier le contrat de vente immobilière au contrat de prêt.

L’acquéreur qui recourt à un crédit immobilier stipule dès la conclusion d’une promesse de vente

une condition suspensive, qui permet de suspendre l’exécution de la vente tant que la condition,

en l’occurrence l’obtention d’un crédit, ne s’est pas encore réalisée. On retrouvera ladite

condition, souvent dans les promesses synallagmatiques de vente, bien qu’elle soit peu usitée en

droit immobilier malgache. Par ailleurs, malgré certains atouts indéniables qu’elle présente, sa

mise en œuvre reste assez délicate.

Page 44: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

41

1. Intérêts capitaux d’une telle stipulation

La condition suspensive présente deux intérêts majeurs. En effet, d’une part, dans le

cadre des promesses synallagmatiques de vente, elle permet de paralyser l’application directe de

l’article 1590 du code civil français relatif aux arrhes. Cet article, rappelons-le dispose que si la

promesse de vendre a été faite avec des arrhes, chacun des contractants est maître de s’en

départir, celui qui les a données (l’acquéreur), en les perdant, et celui qui les a reçues (le

vendeur) en restitue le double. L’acquéreur n’ayant pas obtenu son prêt immobilier est libre de

pouvoir se dégager du contrat conclu avec le vendeur ; il ne perdra donc pas les arrhes qu’il a

avancées à son cocontractant. D’autre part, et comme corollaire, le vendeur doit restituer à

l’acquéreur toute somme avancée lors de la conclusion de l’avant-contrat si la condition

défaille64

. A la lumière de ce propos, il faut relever donc que cette fameuse condition suspensive

est protectrice de l’acquéreur-emprunteur, puisque cette protection légale du droit français

permet à l’acquéreur de ne pas être lésé à l’occasion d’un achat immobilier dont les conditions de

son financement ont été remises en question.

2. Mise en œuvre de son régime juridique

En principe, la condition suspensive doit être stipulée dans un avant-contrat, c’est-à-dire

dès la conclusion d’une promesse ; mais il peut en aller différemment, puisque elle peut être

stipulée dans l’acte définitif de vente si le prix de vente est payable à terme. Tel est le cas

exceptionnel des opérations de vente d’immeuble à construire (Vente en l’état futur

d’achèvement en l’occurrence). La mise en œuvre de cette condition semble assez délicate,

puisqu’elle est présumée si l’acquéreur décide de recourir à un prêt : l’écrit n’est donc pas exigé

ad validatem pour sa stipulation. Par contre – et c’est ce qui semble assez curieux -, la

renonciation à une telle clause doit faire l’objet d’une mention manuscrite, ce qui permettra

64

Article L 312-16 alinéa 2 du code de la consommation : « Lorsque la condition suspensive prévue au premier alinéa du présent article n’est pas réalisée, toute somme versée d’avance par l’acquéreur à l’autre partie ou pour le compte de cette dernière est immédiatement et intégralement remboursable sans retenue ni indemnité à quelque titre que ce soit. A compter du quinzième jour suivant la demande de remboursement, cette somme est productive d’intérêts au taux légal majoré de moitié ».

Page 45: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

42

d’éviter son application65

. Cette renonciation devra également être apposée dans la promesse de

vente lorsque que le prix est payable au comptant ; et être apposée dans l’acte définitif si le prix

est payable à terme. A la lumière de ces idées sus exposées, la condition suspensive a ainsi pour

objet l’obtention du financement afin d’acquérir l’immeuble (prix de vente et frais accessoires).

Or, le champ d’application de l’objet semble restreint, car il ne s’étend pas aux travaux de

construction-rénovation. Quant à sa durée, sa durée minimale est de un mois ; sa durée maximale

peut être plus longue et devrait correspondre à la durée maximale d’une promesse unilatérale (18

mois). Par conséquent, si le prêt est obtenu à l’issue de ce délai, la condition est réalisée et

l’acquéreur sera définitivement tenu dans la vente.

En outre, une autre problématique semble se poser : à quel moment peut-on considérer

que le prêt soit obtenu ?, a fortiori, à quel moment la condition s’est-elle réalisée ? La solution a

été dégagée par la jurisprudence qui affirme que « la condition est satisfaite lorsque l’acquéreur a

l’assurance de disposer des sommes nécessaires au financement de l’acquisition, ce qui est

réalisé dès que le prêteur lui fait une offre complète, ferme et sans réserve »66

. Ainsi, on peut en

déduire de par cette position jurisprudentielle que le prêt est considéré comme obtenu lorsque le

banquier remet – suivant un certain formalisme- une offre de prêt à son client ; l’acceptation de

l’offre, la signature du prêt, la remise effective des fonds ne sont pas prises en compte par la

haute juridiction. Comme corollaire, si la condition défaille, la promesse devient caduque, les

parties peuvent alors se libérer, et toute somme versée par l’acquéreur doit lui être intégralement

restituée par le vendeur67

. Pareillement, la défaillance de la condition peut être à l’origine du fait

de l’acquéreur-emprunteur lui-même : ce dernier commet ainsi une faute lorsqu’il demande un

prêt dont le montant est supérieur à celui prévu au contrat68

, ou encore refuse sciemment de

constituer une garantie (assurance, sûretés…) exigée par le banquier prêteur de deniers.

L’acquéreur fautif perdra le bénéfice de la protection légale, et le vendeur pourra conserver les

arrhes.

65

Article L 312-15 et L 312-17 du code de la consommation 66

Civ 3ème

, 24 septembre 2003, n° 02-11.815, Bull civ III n° 164 67

Op. cit note bas de page n° 64 68

Civ 1ère

, 16 juillet 1992, Contrat, concurrence, consommation, décembre 1992, page 7 observation Leveneur

Page 46: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

43

Le succès de l’opération immobilière projetée est tributaire de la conclusion antérieure de

contrats préparatoires, dont d’une part, les promesses qui permettent de mettre en œuvre

l’autonomie de la volonté des parties ; d’autre part, les conventions auxiliaires, dont y figure le

contrat de mandat – assurant efficacité et célérité de la vente-, et le contrat de prêt immobilier –

qui financera l’acquisition envisagée-. Postérieurement, les parties signeront l’acte final de vente,

ayant plus de force et de portée juridique, garantissant la sécurité juridique des transactions

immobilières, et leur permettront d’atteindre leur objectif.

Chapitre II. La conclusion en aval de l’acte authentique de vente, gage de sécurité

juridique

A travers l’étude des avant-contrats, nous avons pu constater que le recours à ces derniers

s’avère un préalable important. La vente se concluant par étape, et après avoir opté pour une

promesse de vente, l’étape ultime demeure la conclusion définitive du contrat de vente. Pour ce

faire, des exigences de fond doivent être réunies afin de protéger les parties, pour que leur accord

concrétisant la vente puisse produire pleinement effet (Section I) ; mais le formalisme y trouve

également sa place, puisque qu’ayant une double casquette : il conditionne la validité de l’acte en

optimisant la sécurité des transactions, et préserve à certains égards les intérêts des tiers (Section

II).

Section I. Questions de fond et traduction de la conception juridique de la

substance de la vente immobilière

Le premier reflexe naturel juridique de toute personne physique ou morale désirant

conclure un contrat, est de donner son consentement pour que l’acte soit conclu, et puisse

valablement produire effet. La notion capitale de consentement en droit commun des obligations,

ne retiendra pas trop notre attention, car son analyse demeure superficielle, puisqu’elle a été déjà

débattue lors de l’étude des promesses synallagmatiques de vente. D’ailleurs à ce sujet, l’article

1589 du code civil dispose : « La promesse de vente vaut vente, lorsqu’il y a consentement sur

Page 47: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

44

la chose et sur le prix ». Seulement cette considération reste purement d’ordre théorique. En

outre, le consentement sera protégé par la théorie classique des vices du consentement en cas

d’erreur, de dol, de violence, ou encore de lésion (point particulier que l’on abordera

ultérieurement). Il conviendrait donc d’apprécier ces questions de fond touchant le cœur même

de la vente immobilière à travers le prisme de la formation (§1) et de l’exécution (§2) de la

vente.

§1- Formation de la vente

A. Capacité et pouvoir : protection élémentaire des parties

1. Les incapacités générales du droit commun

En droit commun, les incapacités sont de deux ordres : soit une incapacité d’exercice, où

la personne protégée par la loi ne peut agir que par l’intermédiaire d’un représentant ; soit une

incapacité de jouissance qui prive l’individu de tout droit. Ainsi appliquées à la vente, ces

incapacités ont pour fondement la protection de l’incapable dans sa sécurité, sa santé et sa

moralité, d’assurer son éducation et de permettre son développement, dans le respect du à sa

personne. On veut donc protéger un incapable qui voudrait vendre ou acheter un bien immeuble.

L’acte effectué par un incapable sera privé d’effet, le contrat sera vidé de toute sa substance car

risquant de provoquer un enrichissement sans cause de l’autre partie, si par exemple l’incapable

n’avait pas une faculté de discernement suffisante et rationnelle.

1.1 Incapacité de protection : mineurs et majeurs

protégés

Le mineur non émancipé de moins de 21 ans ne peut disposer ou acquérir seul un bien

immobilier ; il doit être représenté par ses administrateurs légaux (si ses deux parents exercent en

commun l’autorité parentale et s’ils sont toujours vivants) ; ou doit être représenté par son tuteur

si les deux parents sont décédés. Mais le mineur émancipé (par mariage ou par acte

d’émancipation) peut valablement conclure seul un contrat de vente. Notre droit positif préconise

que, s’agissant du mineur émancipé par ses parents, l’acte d’émancipation doit être homologué

Page 48: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

45

par le juge des tutelles. Seulement, le mineur émancipé, qui ne peut être commerçant, ne peut

effectuer un achat pour revendre puisque cet acte est réputé « acte de commerce » par nature.

Le droit français va plus loin et organise un système de protection légale du mineur (non

émancipé) plus optimale. En effet, la vente d’immeuble d’un mineur doit se faire en principe par

licitation : l’acte de disposition doit se faire publiquement aux enchères en suivant les

dispositions du code de procédure civile69

. Mais à titre de tempérament, rien n’interdit la vente

amiable après avoir obtenu l’accord du juge des tutelles. Dans le même ordre d’idée, une

obligation de remploi du prix est à la charge du représentant du mineur. Ainsi, en cas

d’aliénation d’un bien appartenant à un mineur, son représentant légal a l’obligation de

remployer le prix revenant à l’enfant70

. En analysant cette disposition, il paraît opportun de

remployer le prix (en achetant un nouveau bien immeuble par le produit obtenu de la vente

antérieure), et ce, afin d’éviter que le représentant séquestre les fonds et les remettent qu’à la

majorité de l’enfant, car on craindrait une éventuelle dilapidation des fonds.

Quant aux majeurs protégés, leur protection trouve fondement dans le fait, qu’en raison

de troubles dans leurs facultés intellectuelles, ils ne peuvent se rendre compte de la portée de leur

engagement. Ce propos se justifie dans la mesure où « leur prodigalité, leur intempérance les

exposent à tomber dans le besoin ou à compromettre l’exécution de ses obligations

familiales71

». Il existe trois types de régime de protection : la tutelle, la curatelle, et enfin la

sauvegarde de justice (inexistant en droit malgache). En ce qui concerne la tutelle, l’incapable

majeur ne peut ni aliéner, ni acquérir un immeuble, sans l’intermédiaire de son tuteur. Ce dernier

doit être autorisé par le juge des tutelles pour effectuer ledit acte de disposition, et doit être, par

ailleurs, être muni d’une autorisation du conseil de famille. A la différence du régime de tutelle,

la curatelle – incapacité moins grave – ne nécessite pas une représentation, mais uniquement une

assistance du curateur pour procéder à une vente ou à un achat immobilier. Enfin, la sauvegarde

de justice, régime plus souple, permet au majeur protégé de procéder seul et librement à l’acte

d’aliénation ou d’acquisition. Seulement, l’acte passé est rescindable en cas de lésion, ou réduit

en cas d’excès.

69

Article 1271 et suivants du code de procédure civil français 70

Article 458 du code civil français 71

Article 488 du code civil français

Page 49: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

46

1.2. Incapacité de jouissance

Elles se rencontrent rarement en matière immobilière. L’article 36 alinéa1er

du code pénal

malgache dispose que les personnes physiques condamnées à une peine afflictive et infamante

perdent leurs droits. A fortiori, elles ne peuvent ni acquérir, ni vendre un bien immeuble. Mais

qu’en est-il des personnes morales ? En arguant d’un raisonnement par analogie, et en vertu du

principe de la condamnation des personnes morales, une société frappée de diverses interdictions

en raison d’une infraction commise, serait privée du droit d’accomplir certains actes graves.

2. Influence de certaines incapacités spéciales affectant le

pouvoir de certaines personnes

On appréhende souvent les termes « pouvoir » et « capacité » comme ayant la même

signification, mais suivant une approche plus nuancée, le pouvoir est une faculté qui s’exerce sur

un bien, alors qu’en revanche, la capacité est relative à l’aptitude intellectuelle d’une personne.

Ce paragraphe se focalisera sur la question de « pouvoir », mais restreint dorénavant la capacité

de certaines catégories de personnes particulières (personne physique ou morale) voulant

acquérir ou vendre un immeuble.

2.1. Sous l’aspect du droit civil

a) En matière de régimes matrimoniaux

Il arrive souvent que vendeur d’un bien immeuble ait adopté un mode de conjugalité, en

l’occurrence le mariage ou le concubinage, du moins en droit malgache. Ce qui laisse

transparaître des conséquences patrimoniales par rapport à une vente, plus particulièrement sur la

manière de disposer un bien. En effet, lorsqu’un époux commun en bien voudrait disposer d’un

bien commun, la loi n° 2007-022 sur le mariage et les régimes matrimoniaux, en son article 118

alinéa 2 dispose que chacun des époux ne peut sans le consentement de l’autre, aliéner ou grever

Page 50: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

47

de droits réels un immeuble appartenant à la communauté. Ainsi, si l’un des époux outrepasse

ses pouvoirs, l’autre peut en demander l’annulation de l’acte litigieux. L’action en nullité est

ouverte pendant un délai de trois mois à partir du jour où l’autre époux en a eu connaissance.72

Deux réserves sont cependant énoncées par la loi : l’action est irrecevable si elle intentée plus

d’une année après la dissolution de la communauté ; et par ailleurs, elle ne doit pas préjudicier

aux droits des tiers73

. Or, la jurisprudence française navigue à contre sens, puisqu’elle admet que

la nullité est opposable à l’acquéreur-contractant, même de bonne foi. Ce qui pourrait léser

l’acquéreur, et pourrait même engager la responsabilité du rédacteur de l’acte qui n’aurait pas eu

la diligence de vérifier les pouvoirs de l’époux vendeur.

Le droit français, soucieux de la protection de la famille et du patrimoine des époux a

instauré une disposition pertinente sur la capacité des époux. En effet, le code civil dispose que

«les époux ne peuvent l’un sans l’autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de

la famille »74

. La résidence dont il est fait référence est la résidence principale des époux et de

leurs enfants. On observera donc, que si l’un des époux n’a pas donné son consentement à l’acte,

il peut agir sur la base de la nullité relative dans le délai d’un an à partir du jour où il a eu

connaissance de l’acte, sans pouvoir être intentée plus d’un an après la dissolution du régime.

L’originalité de cette disposition réside dans son champ d’application extensif, car touche non

seulement les époux mariés sous un régime communautaire, mais également, ceux mariés sous

un régime séparatiste. Notre droit positif est moins complexe car n’ayant pas acquis cette vision

protectionniste des intérêts de la famille. Par conséquent, dans un régime de séparation des biens,

l’époux dispose d’une autonomie patrimoniale et de pouvoirs propres, et peut disposer de son

bien immobilier sans le consentement de l’autre époux.

72

Article 125 de la loi 2007-022 du 20/10/07 73

L’acquéreur peut être également considéré comme tiers 74

Article 215 du code civil français

Page 51: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

48

b) En matière de succession : le régime de

l’indivision

L’état d’indivision successoral peut influencer les pouvoirs d’un coïndivisaire désirant

procéder à un acte de disposition. Il conviendrait de nuancer la vente d’une quote-part de

l’intéressé d’une part, et la vente du bien indivis lui-même d’autre part.

En ce qui concerne la vente d’une quote-part abstraite d’un coïndivisaire, celle-ci peut

être librement cédée par voie de vente. Seulement, cette règle théorique est souvent dépassée,

contredite par la pratique foncière, car dans certaines communes, certains services de la

conservation foncière et des domaines exigent l’accord écrit des autres coïndivisaires pour que

l’acte de vente immobilière soit valable en termes de publicité foncière. En outre, une autre

restriction vient fragiliser la vente de cette quote-part indivise, car celle-ci peut être paralysée par

le droit de préemption que peut exercer un autre coïndivisaire 75

.

Mais qu’en est-il de la vente du bien indivis ? Un coïndivisaire peut-il accomplir un acte

de disposition sur tel ou tel bien ? A première vue, la réponse de principe est négative, car la loi

requiert le consentement unanime de tous les autres coïndivisaires. Mais qu’en advient-il de la

validité de l’acte de disposition, si le vendeur- coïndivisaire a fait fi de cette règle légale ?

L’efficacité de cet acte est conditionnelle76

: si le bien est mis dans le lot de l’intéressé (lot

résultant du partage successoral), l’acte est parfaitement efficace puisque le coïndivisaire est

réputé avoir été le seul propriétaire dès l’indivision ; par contre, si le bien est mis dans le lot d’un

autre coïndivisaire, l’acte est inefficace car son auteur n’a jamais été censé être propriétaire. La

nullité qu’encourt l’acte trouve son fondement d’ailleurs dans l’interdiction de la vente de la

chose d’autrui. Ainsi, par ce contre-mécanisme, il est fait application de l’effet déclaratif fictif du

partage au profit du vendeur.

75

Article 14 et suivants de la Loi 60.146 du 03/10/60 relative à l’immatriculation 76

Article 883 et suivants du code civil

Page 52: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

49

c) les autres états altérant la capacité d’acheter ou

de vendre

Certaines incapacités propres au droit immobilier frappent certaines catégories de

personnes physiques. Nous exposerons brièvement ces différentes incapacités.

Depuis la troisième République, les étrangers résidants à Madagascar ne pouvaient

acquérir par contrat de vente des immeubles non bâtis (terrains)77

, d’ailleurs, dans le même

esprit, le code des investissements de 200778

consacre cette incapacité frappant les étrangers en

son article 18-b en rappelant que les personnes physiques ne peuvent accéder directement à la

propriété foncière. L’esprit du législateur et la politique du Ministère de l’Aménagement du

territoire et de la Décentralisation, étant de conserver les biens immeubles entre nationaux, et

afin de promouvoir l’exploitation des ressources naturelles par les Malgaches. La seule

alternative pour les étrangers étant la possibilité de contracter un bail emphytéotique79

.

Par ailleurs, certaines incapacités non prévues par notre droit positif sont consignées dans

le code civil français en son article 1596 : en effet, en matière de tutelle, le tuteur ne peut pas

acheter les biens des personnes dont il a la tutelle. C’est une incapacité de protection, d’ordre

moral visant à préserver l’intégrité du patrimoine actif du mineur ou du majeur protégé. En

matière de mandat, le mandataire d’une personne protégée, ne peut pas acquérir le bien qu’il est

chargé de vendre. Ensuite, dans le cadre de la fonction publique, les administrateurs publics

(maires, adjoints, conseillers municipaux) ne peuvent pas acquérir les immeubles des personnes

morales de droit public. Parallèlement, l’article 1597 institue certaines interdictions dans le

sillage des professions judiciaires et des professions libérales : interdiction est faite aux

magistrats (du siège ou du parquet), aux greffiers, aux huissiers, aux avocats et aux notaires de

devenir cessionnaires des droits et actions litigieux qui sont de la compétence du tribunal dans le

ressort duquel ils exercent leur fonction. C’est dire que si ces personnes ont jugé, aidé, ou

procédé à une vente aux enchères publiques d’un immeuble, elles ne peuvent pas acquérir ledit

bien à titre d’adjudicataire, et ce, pour des raisons de déontologie, de moralité et d’impartialité.

77

Loi 95-030 précitée 78

Loi 2007-036 du 14/01/08 sur les investissements à Madagascar 79

Voir loi 62.064 du 27/09/62 et 96.016 du 13/08/93 sur le bail emphytéotique

Page 53: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

50

2.2 Sous l’aspect du droit des sociétés

Une société commerciale ne dispose de pouvoirs que si elle dispose de la personnalité

morale. Cette dernière n’est acquise qu’à partir de l’immatriculation de la société au Registre du

Commerce et des Sociétés80

. Tant que cette formalité substantielle n’a été opérée, la

jurisprudence considère qu’elle ne peut conclure aucun acte juridique81

. Mais, malgré l’existence

de cette personnalité morale, il existe certaines incapacités tendant à restreindre la vente ou

l’acquisition d’un immeuble.

a) Sociétés étrangères

En principe, les personnes morales de nationalité étrangère ne peuvent acquérir une

propriété foncière à Madagascar. Le code des investissements ne semble pas faire de différence

entre société commerciale et société civile. Mais à ce principe s’allie un tempérament prévu par

l’article 18 alinéa a de la loi 2007-036. En effet, le code tend à dissocier les personnes morales

étrangères, des sociétés de droit malgache dirigées par des étrangers. Ces dernières, dont la

gestion est placée sous le contrôle d’étrangers (et dont le siège social se trouve à Madagascar,

selon une logique tangible, pour jouir de tout droit reconnu aux Malgaches82

) sont autorisées à

procéder à une acquisition sous quelques réserves :

D’une part, ladite société doit obtenir une autorisation d’acquisition foncière auprès de

l’EDBM83

(organisme agissant pour le compte du Ministère chargé des domaines).

D’autre part, les biens immobiliers qu’elle projette d’acquérir doivent être affectés à

l’exercice continu et exclusif d’une activité commerciale. Seulement, à la lecture de ce texte,

cette disposition ne peut profiter aux sociétés civiles immobilières (SCI) de droit malgache

80

Voir décret n° 2008-440 relatif au Registre de Commerce et des Sociétés 81

Civ, 3ème

, 28 octobre 1992, n° 90.16.388, JCP 1993, II, p 279 82

Article 22 loi 62.041 du 19/09/62 relative aux dispositions générales de droit interne et de droit international 83

Economic Development Board of Madagascar

Page 54: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

51

contrôlées par des étrangers, car même si elles peuvent accéder à la propriété immobilière, la loi

leur interdit d’effectuer une activité commerciale consistant dans l’acquisition de l’immeuble en

vue de sa revente en l’état ou après transformation. Or, les SCI ont pour objet social courant

d’acquérir des immeubles d’exploitation pour les revendre à leurs clients (professionnels ou

particuliers). Cette disposition légale ignore le sort des SCI, secteur en plein essor actuellement à

Madagascar.

Enfin, la pratique exige en sus une condition supplémentaire implicite quant à la

possibilité d’acquisition par les sociétés dirigées par des étrangers : la majorité en nombre des

associés –personnes physiques –, doivent être de nationalité malgache.

b) Représentation de la société et pouvoir du dirigeant

La société, personne morale est de jure représentée par une personne physique. Quelque

soi le type de société, la loi confère à cette personne physique la mission de la représenter dans

les rapports avec les tiers. En vertu de l’article 349 de la loi 2003-036 sur les sociétés

commerciales, le gérant est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir, donc d’effectuer des

actes au nom de la société, et cela dans les rapports avec les tiers84

. Dans le même enchainement

d’idées, les pouvoirs du représentant doivent être cantonnés au sein de l’objet social ; si la vente

dépasse l’objet social circonscrit dans les statuts, la vente est frappée de nullité.

Afin d’effectuer un acte de disposition, en l’occurrence une vente d’immeuble

d’exploitation, le dirigeant doit avoir obtenu l’assentiment de la collectivité des associés à

l’occasion d’une assemblée générale ordinaire85

; les associés disposeront par la même occasion

d’un droit de vote86

. La décision collective sera consignée dans un procès-verbal, qui constatera

par la force des choses l’autorisation du dirigeant à effectuer l’acte de disposition en question.

84

Article 461 de la même loi, pour les dispositions intéressant la société anonyme 85

Article 369 de la loi précitée 86

Article 371 de la loi précitée, mais le dirigeant ne dispose pas de droit de vote

Page 55: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

52

c) Procédure collective d’apurement du passif

Une société dont l’exploitation ou la santé financière semble compromise fera l’objet

d’une procédure collective (PCAP) à partir du jugement d’ouverture qui constatera et fixera la

cessation des paiements. Le tribunal de commerce dispose d’une autre option : soit d’une part, il

prononce le redressement judiciaire, pour essayer de sauver l’entreprise – entité économique- ;

soit d’autre part, prononce la liquidation des biens où le patrimoine du débiteur servira à

désintéresser les créanciers impayés. A l’issue de cette procédure, une incapacité touche certains

organes judiciaires ou non judiciaires. En effet, l’article 41 de la loi malgache sur les procédures

collectives87

dispose formellement que le syndic ne peut se rendre acquéreur pour son compte,

directement ou indirectement des biens du débiteur88

, car ayant participé à la procédure. Cette

règle trouve son fondement dans des considérations d’ordre moral, et semble s’inspirer du code

civil français89

, notamment par le fait que les magistrats et les auxiliaires de justice ne peuvent

pas se rendre cessionnaires de droits et actions litigieux.

B. Le prix : la raison d’être de l’engagement des parties

1. Régime juridique général : application stricto sensu du

droit des contrats

Le contrat de vente est un contrat synallagmatique, dont l’objet étant pour l’une des

parties de payer une somme d’argent. Cette dernière est dénommée prix, contrepartie financière

de la disposition d’un bien immeuble. Le prix est la raison d’être de l’engagement des parties,

puisque c’est en considération de celui-ci que va se former la vente. A cet égard, deux

observations sont à émettre : l’une relative à la qualification de « vente » en fonction de la

stipulation d’un prix, l’autre relative à sa fixation90

.

87

Loi 2003-042 précitée sur les PCAP 88

Touche l’actif mobilier ou immobilier. 89

Voir article 1597 du code civil 90

L’autonomie de la volonté y joue un rôle assez important, mais doit être évité un prix lésionnaire.

Page 56: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

53

Une difficulté particulière se pose pour qualifier un contrat de « vente ». Le prix est

d’ailleurs l’un des critères de qualification d’une vente. Pour qu’il y ait vente, la nécessité de la

stipulation d’un prix est fondamentale. Seulement, l’absence de ce critère ne conduit pas

automatiquement à qualifier le contrat de donation puisque l’intention libérale du propriétaire du

bien peut faire défaut. Par conséquent, le contrat est nul, ne vaut ni comme vente, ni comme

donation. Mais qu’en est-il des contrats innommés, a fortiori sui generis, portant sur un bien

immeuble ? Peuvent-ils être qualifiés de vente ? Tel est le cas d’une « pseudo-vente » d’un

terrain pour une somme symbolique, mais à charge pour le « pseudo-acquéreur » d’effectuer une

prestation91

. Mais la Cour de cassation n’a retenu ni la qualification de vente (car il n’y a pas de

stipulation d’un prix), ni la qualification de donation avec charge (en raison de l’absence

d’intention libérale), le contrat demeurant simplement un contrat innommé. Par ailleurs, le prix

doit être stipulé en argent. Ce qui différencie le contrat de vente d’autres contrats. En effet, dans

un contrat d’échange92

, la contrepartie n’est pas financière, elle demeure en nature, et le contrat

ne saurait être qualifié de vente. Cependant, la jurisprudence admet que le juge peut requalifier la

convention en vente, si l’une des parties venait à verser une soulte importante. Cette dernière

deviendrait une obligation substantielle pour elle93

. Cette position nous semble convenable, car

l’une des parties se voit obligée de verser une soulte si importante, qu’elle s’y trouve contrainte

d’y acheter. Dans le même ordre d’idée, la vente peut se rapprocher de la dation en paiement.

Cette dernière peut être définie comme un acte par lequel le débiteur remet à son créancier une

autre chose que celle qui avait été prévue. Pour ce faire, le débiteur d’une somme d’argent

transfert la propriété d’un bien en nature (à la place du prix) à son créancier. Son régime

juridique suit celui de la vente, tant au niveau de l’extinction de la dette de somme d’argent, tant

au niveau du transfert de propriété, tant au niveau des obligations du vendeur…

Outre cette qualification, il s’avère important de procéder à la fixation du prix. En effet,

l’article 88 de la LTGO stipule que les obligations d’un contrat peuvent consister en une

prestation, et que celle-ci doit être déterminée ou déterminable. Par comparaison, le code civil

français, en son article 1591 semble plus explicite, en alléguant que le prix de la vente doit être

déterminé par les parties. Le prix peut être librement déterminé par les parties, ce qui consacre

91

Civ 3ème, 17 mars 1981: Il s’agissait en l’espèce pour l’acquéreur de payer l’immeuble à prix symbolique de 1 FF. 92

C’est un contrat par lequel les parties se donnent respectivement une chose contre une autre 93

Civ 3ème

, 26 juin 1973 n° 72-12.489, Bull civ III, n° 436

Page 57: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

54

pleinement le rôle de l’autonomie de la volonté et empêche le juge de fixer et d’ajuster le prix à

la réalité du bien vendu94

. Ainsi, si le prix est indéterminé, ou encore repose sur une condition

potestative (dépendant de la seule volonté d’une partie), la vente est nulle. Non seulement, le prix

doit être déterminé, mais il doit être également « réel ». Le prix réel n’est ni un prix fictif, ni un

prix simulé. Envisageons les hypothèses de la donation déguisée et de la donation indirecte. Dans

la première, les parties conviennent d’un certain prix dans l’acte apparent, mais conviennent dans

une contre lettre -occulte- que le prix ne sera pas payé. L’acte ostensible s’apparente à une vente,

mais l’acte caché (où se situe la véritable intention des parties) s’apparente quant à elle à une

donation. Sous l’angle du droit commun des obligations, la contre-lettre encourt la nullité, mais

l’acte apparent demeure valable afin de protéger les tiers. Le droit notarial est plus nuancé : la

donation déguisée (contre lettre) est nulle, car la donation étant un acte solennel, elle doit être

obligatoirement passée en la forme authentique, or, souvent, la contre lettre est un écrit sous

seing privé dont l’existence n’est connue que par les parties. Quant à la donation indirecte95

, où

le prix n’est ni réel ni sérieux96

, la vente est en principe frappée de nullité absolue, car, par

analogie, le prix est indéterminé.

L’autonomie de la volonté des parties dans la fixation du prix trouve sa faille lorsque le

prix est lésionnaire. La lésion est le préjudice que subi une personne passant un acte juridique, en

raison de l’inégalité entre l’avantage qu’elle obtient et le sacrifice qu’elle consent : Pour mieux

saisir le propos, elle résulte du défaut d’équivalence entre les prestations de l’acheteur et du

vendeur lors de la formation du contrat. L’enseignement tiré de la jurisprudence traditionnelle

démontre que la lésion est « en elle-même et à elle seule cause de rescision indépendamment des

circonstances (contrainte morale subie par le demandeur) qui ont pu l’accompagner »97

. Ainsi, le

demandeur lésé n’a pas à faire la preuve d’une contrainte morale subie par lui. La lésion

constituant en soi une cause de rescision en dehors de tout vice de consentement. En outre, il

faudrait visualiser le domaine, les conditions et effets de la lésion. Cette dernière recouvre tous

les contrats translatifs de propriété, dont la vente immobilière. Seulement, certaines ventes

94

Des tempéraments existent cependant : soit lorsque le prix de vente est fixé par référence à un indice, et que ce dernier venait à disparaître ou venait à être désuet, le juge peut alors substituer un nouvel indice ; soit lorsque le prix est lésionnaire, le vendeur peut saisir le tribunal et le juge doit ainsi s’immiscer pour prononcer une rescision. 95

Pour illustration : renonciation par un légataire au profit d’un autre, remise de dette, stipulation pour autrui. 96

Seulement, les parties n’opèrent pas de simulation du prix. 97

Chambre des Requêtes, 28 décembre 1932, arrêt Société économique de Rennes contre Pailleret et consorts

Page 58: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

55

échappent à la lésion : en l’occurrence, les ventes avec rente viagère, puisque c’est un contrat

aléatoire (dépendant de la vie d’une partie), d’autant plus que l’aléa chasse la lésion ; et les

ventes aux enchères (saisie, expropriation). L’action est ouverte uniquement au vendeur et non à

l’acquéreur, car selon les auteurs, si l’on est contraint de vendre, on n’est jamais contraint

d’acheter. Le vendeur dispose d’un délai de deux ans à compter du jour de la vente98

. Il doit

établir que le prix de vente équivaut à moins des 5/12ème

de la valeur réelle de l’immeuble, mais

que le manque à gagner est égal à 7/12ème

de cette valeur99

. Les juges disposent de toute latitude

pour établir une méthode d’évaluation100

. Enfin, au niveau des effets, l’acte lésionnaire est

sanctionné par la rescision (proche de la nullité relative avec effet rétroactif au niveau des

restitutions). Mais pour préserver les droits de l’acquéreur, et éviter la rescision de la vente,

l’acheteur peut proposer la révision du prix en offrant un supplément de prix adéquat, une sorte

de capital complémentaire déterminé par le juge.

98

Notons qu’il est fait référence au droit français car le droit malgache ne prévoit aucune disposition sur la lésion. 99

Application pratique Soit la valeur vénale de l’immeuble : 1500 F Soit la valeur stipulée dans le contrat : 500 F Si 1500 correspond à 12/12

ème

500 -------- X ? X = 500 x 12/12

ème

_________ 1500 X= 0,33 Or, il y a lésion si 5/12 = 0,41 Si 1500 correspond à 12/12

ème

Lésion (L) ? ------ ------ 5/12ème

L= 5/12

ème x 1500

____________ 12/12

ème

L= 615 F Ainsi le prix stipulé ne doit pas être inférieur à 615 F, sinon il est lésionnaire, or en l’espèce 500 F est inférieur à 615 F, la preuve de la lésion incombe au vendeur. Corrélativement, le manque à gagner est de : Si 1500 correspond à 12/12

ème

Y ? ------------------ 7/12ème

Y= 7/12

ème x 1500

____________ 12/12

ème

Y= environ 875 F 100

Voir Gazette du Palais 1985, observations Piedelièvre

Page 59: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

56

2. Evaluation du prix : approche technique et pratique

2.1.Immeuble à usage d’habitation

D’un point de vue financier, sans pour autant quitter la sphère juridique, le prix

représente un paramètre important pour l’acheteur, qui en fonction de ce prix va acquérir ou non.

L’acquisition d’un immeuble étant un acte peu courant dans la vie d’un acquéreur, il devra

débourser un budget assez conséquent, mais en considération d’un meilleur rapport qualité-prix.

Le prix est donc, de part et d’autre, un élément déterminant de la volonté de l’acheteur, qui lui

conduira par un fil directeur à accepter l’offre de vente et à former le contrat. Dans la pratique, le

prix d’un immeuble à usage d’habitation est souvent fixé par référence au prix du mètre carré

(m²) dans un quartier déterminé. Il s’avère très élevé en centre ville101

, et demeure moins élevé

en banlieue. Le prix du m² sera multiplié par la surface du bien pour obtenir sa valeur vénale ou

prix réel sur le marché.

2.2.Immeuble d’exploitation

Un immeuble d’exploitation est un élément d’actif d’une entreprise. L’immeuble pouvant

être détenu en pleine propriété ou en bail, figure dans l’actif immobilier de la personne morale.

Cet actif peut prendre une augmentation exponentielle de sa valeur, et sert à être investi afin de

permettre une gestion dynamique du patrimoine immobilier. Nous nous focaliserons point à

développer les règles financières relatives à l’immobilier d’entreprise, mais nous nous limiterons

à l’évaluation du prix à partir de différents indices.

Pour ce faire, une formule communément admise a été adoptée par la pratique102

:

101

Estimation du prix du m² dans le premier arrondissement d’Antananarivo : 2.200.000 Ariary 102

Approche bimodale dans le cadre de la valorisation d’un bien immobilier.

Page 60: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

57

Avec VE pour la valeur du bien immeuble ;

CF pour le loyer locatif diminué des frais de gestion ;

R pour le taux d’intérêt ;

G pour le taux moyen d’augmentation des loyers de bureau ;

Afin de mieux illustrer le propos, faisant application d’un cas d’un immeuble à usage

professionnel d’un loyer annuel de 120.000.000 Ar ; sont imputés des frais de gestion élevés à

12.000.000 Ar. Le taux d’intérêt de l’argent sans risque est supposons de 5%, et le taux

d’augmentation des loyaux professionnels est de 2%.

VE = (120.000.000 – 12.000.000) / (5% - 2%)

VE = 3.600.000.000 Ar

La valeur de l’immobilier de bureau est de 3.600.000.000 Ariary. Cette valeur s’entend de la

valeur locative représentant la contrepartie financière annuelle susceptible d’être obtenue sur le

marché de l’usage d’un bien immobilier dans le cadre d’un bail commercial. L’approche utilisée

afin de déterminer le prix est légitimée dans la mesure où elle permet de préciser les éléments

constitutifs de la valeur de l’immeuble (loyer annuel, frais de gestion, taux d’intérêt, taux

d’inflation des loyers), et permet de comparer les immeubles de même caractéristique entre eux.

VE= CF

____

R - G

Page 61: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

58

§2- Exécution de la vente et connaissance des parties de l’étendue de

leurs obligations

Lors de la conclusion d’un contrat, les parties doivent connaître quelles sont leurs

obligations, quand la convention produira ses effets juridiques, et quelle en est la portée ?

L’acquéreur et le vendeur doivent être conscients de ce que à quoi ils s’engagent : une obligation

de donner, de faire ou de ne pas faire ?, ou encore une obligation de moyen, ou plus lourdement

d’une obligation de résultat ? Cette connaissance des obligations par les contractants permettra

d’opérer un équilibre dans les rapports contractuels, car la vente – contrat synallagmatique - met

d’une part, plusieurs obligations à la charge du vendeur ; et d’autre part en contrepartie, une série

d’obligations également à la charge de l’acquéreur. Elle permet de garantir l’une des parties que

l’inexécution de ses obligations par l’autre est source de responsabilité. Somme toute, cela

engendrerait ainsi une sécurité des relations contractuelles.

A. Les obligations de l’acheteur : vers un régime simplifié

1. Obligation principale : le paiement du prix

L’objet du paiement est le prix convenu par les parties dans la convention. On peut,

certes, prévoir l’indexation du prix103

qui doit être ancré dans le domaine de l’immobilier (coût

de la construction, valeur des loyers commerciaux trimestriels …). Or qu’en est-il si le prix est

indexé sur un indice illicite ? (cours de l’or par exemple). Les avis semblent partagés car, force

est de constater que s’agissant d’une règle d’ordre public, la sanction encourue serait la nullité

absolue du contrat. Pourtant, la jurisprudence104

en voulant préserver l’économie du contrat,

répute non écrite uniquement la clause d’indexation.

Quant aux modalités de paiement, elles constituent une source de complexité. Celui qui

est débiteur du paiement est l’acquéreur ; en cas de décès de celui-ci, ce sont les héritiers qui sont

103

Ce qui est pratiquement rare, pourtant elle permettrait de se prémunir contre une dépréciation monétaire surtout lorsque le prix est payable à terme. 104

Com, 3 novembre 1988 RTD civil 1989, 302

Page 62: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

59

solidairement tenus du paiement. Suivant une certaine symétrie, celui qui reçoit le paiement est

le vendeur. Seulement, à l’occasion de la vente d’un immeuble hypothéqué, les créanciers

hypothécaires peuvent convenir avec le vendeur que le prix sera affecté au paiement de leur

créance. En outre, le paiement du prix peut se faire suivant la convenance des parties (afin de

mieux répondre à leurs intérêts pécuniaires), soit au comptant, soit à terme. La première modalité

ne pose guère de difficultés car le prix sera intégralement payé lors de la délivrance de

l’immeuble. Dans l’autre, quelques observations doivent êtres avancées : Il est vrai que le prix

stipulé à terme sera payé suivant un certain délai. Les parties conviennent alors dans le contrat

des échéances de la dette de l’acquéreur. A cet égard, elles doivent avec précision déterminer la

date du paiement ; force est d’observer que dans une vente stipulée avec une rente viagère105

, la

fixation de la date du paiement demeure impossible car on s’insère dans un contrat aléatoire

dépendant de la vie du crédirentier. A fortiori, déterminer l’extinction de la dette de l’acquéreur

par le décès du vendeur constituerait un pacte sur succession future, et est prohibé par la loi.

Par ailleurs, l’acquéreur peut, lorsque le prix est payable à terme, se libérer par

anticipation. A ce sujet, l’acheteur réglera en totalité le solde du prix à payer, à condition

d’avertir quelques mois à l’avance le vendeur. Cependant, le contrat peut expressément prévoir

qu’en cas de paiement anticipé, l’acquéreur devra verser une indemnité de remboursement

anticipé106

. Dans la même optique, la convention peut également prévoir que le prix payable à

terme soit productif d’intérêts. Elle doit avec prévision indiquer le point de départ des intérêts,

leur taux107

sous réserve de l’usure. D’ailleurs, l’autonomie de la volonté est si intense, que les

parties peuvent même – arbitrairement – prévoir par écrit, que les intérêts non échus pour une

année entière produiront eux même des intérêts108

. La plus grande souplesse est ici de mise, la

volonté des parties y trouve son terrain de prédilection.

Reste, enfin, à préciser qu’en matière de preuve du paiement en droit immobilier, la

quittance du prix donnée par le vendeur dans l’acte de vente authentique prouve que le paiement

a été effectivement acquitté par l’acquéreur.

105

Vente par laquelle le crédirentier (vendeur-propriétaire) vend un immeuble au débirentier (acquéreur) en contrepartie d’une rente payable jusqu’à la fin de la vie du crédirentier. 106

Comme en matière de crédit immobilier ! 107

Si le taux n’est pas conventionnellement fixé par les parties, il est fait application du taux légal. 108

Article 1154 du code civil relatif à l’anatocisme. Ce dernier peut être mis en œuvre même dans les rapports entre particuliers (non professionnels) mais il doit être expressément stipulé.

Page 63: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

60

Il convient ensuite de s’interroger sur un éventuel défaut de paiement. Le droit commun

solutionne la problématique par la résolution de la vente. Cette sanction civile peut être d’origine

judiciaire (action résolutoire) ou d’origine conventionnelle (clause résolutoire prévoyant dans le

contrat que si le prix n’est pas payé à la date convenue, la vente sera résolue de plein droit). La

résolution a un effet rétroactif : l’acquéreur doit restituer l’immeuble ; il peut même être obligé

d’indemniser le vendeur pour la dépréciation subie par l’immeuble. Quant au vendeur, il doit

restituer les acomptes et avances qu’il a reçus. Le retour au statu quo ante considère que la vente

n’a jamais eu lieu, et que l’acquéreur n’a jamais été propriétaire. Cette résolution semble d’une

manière pragmatique, la mieux adaptée pour les parties que l’exécution forcée, car cette dernière

étant « dramatique ». En définitive, opérer des saisies suivies d’une vente aux enchères des biens

du débiteur prendrait trop de temps.

2. Les autres obligations

Certaines obligations de second ordre sont à la charge de l’acquéreur. On notera que dans

la pratique, l’acquéreur est tenu de s’acquitter de tous les frais (frais de dossier, provision), des

droits d’enregistrement de l’acte définitif de vente109

, et les honoraires du rédacteur d’acte. Cela

semblerait lourd financièrement pour l’acquéreur, pourtant la législation malgache opère un juste

équilibre dans les relations contractuelles, car en contrepartie la loi met exclusivement à la

charge du vendeur l’Impôt sur la Plus - Value Immobilière (IPVI)110

. Ce qui met à la charge de

chacune des parties des obligations pécuniaires de même valeur financière et les placent sur un

même pied d’égalité. Compte tenu des observations qui précèdent, ces obligations réciproques

assurent aux parties une indéniable sérénité juridique et permet par la force des choses de

concilier les intérêts en présence.

109

La vente immobilière est imposée à un taux de 6% de la valeur de l’immeuble (suivant CGI). 110

Taux suivant CGI 2011 : 22 %

Page 64: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

61

B- Les obligations du vendeur

1. Les obligations substantielles

Des obligations de premier ordre incombent au vendeur ; ces obligations découlent

naturellement des effets de la relation contractuelle qui l’unit à l’acheteur. Elles sont ainsi

qualifiées de « substantielles », puisque fondamentales, car si l’aliénateur du bien immeuble ne

respecte pas ses engagements, la vente ne pourra pas être exécutée.

1.1.Le transfert de propriété et ses incidences

Le droit commun érige en principe général, que le transfert de propriété est opéré au

profit de l’acquéreur lorsque les parties, par l’échange de leur consentement111

, se sont accordées

sur l’objet de la vente et sur son prix. Le transfert intervient donc automatiquement, en principe,

même si, par des faits, la propriété n’est pas réellement transmise à l’acquéreur, ou le prix n’étant

pas intégralement payé. Dans la pratique, le transfert se concrétisera par la signature de l’acte

authentique de vente. Seulement, certaines atténuations existent : pour les choses de genre, le

transfert de propriété peut être reporté à l’individualisation de la chose (par exemple, vente d’une

surface de terrain à morceler). Par ailleurs, dans le cadre d’une Vente en l’Etat Futur

d’Achèvement (VEFA), le transfert ne pourra intervenir qu’au fur et à mesure de la réalisation et

de l’achèvement des travaux. Dans la même mesure, certains aménagements contractuels

peuvent être opérés par des techniques contractuelles. En effet, les parties peuvent insérer dans le

contrat un terme suspensif (événement futur dont la réalisation est certaine). Le terme est ainsi

stipulé afin de retarder le transfert de propriété au profit du vendeur. L’évènement futur et certain

en question étant le complet paiement du prix. Ainsi, cela correspondrait dans la pratique à la

clause de réserve de propriété qui réserve à titre de sûreté la propriété du bien au vendeur tant

qu’il n’a pas été intégralement payé par l’acheteur. En outre, la condition suspensive (événement

futur mais incertain), par exemple, la vente conclue sous condition suspensive d’obtention d’un

prêt, entraîne un report du transfert de propriété, puisque ce dernier ne s’opérera que si la

111

Application stricte du principe du consensualisme

Page 65: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

62

condition se réalise. A la lumière de ces idées, le transfert de propriété ne concerne

principalement que les contractants, pourtant le transfert ne pourra être opposable aux tiers que

s’il a été régulièrement publié à la Conservation Foncière et service des Domaines.

Le transfert de propriété a pour corollaire le transfert des risques de l’immeuble. Ces

risques sont transférés à l’acquéreur en principe, mais ils peuvent être à la charge du vendeur

dans deux hypothèses précises : Lors d’une vente stipulée avec un terme suspensif112

d’une part,

et lors d’une vente conclue sous une condition suspensive113

d’autre part, jusqu’à la réalisation

de l’événement.

En principe, si l’immeuble venait à disparaître entre la date de l’acquisition de la

propriété et celle de la délivrance du bien, la perte en est pour l’acquéreur en raison du transfert

de propriété. En conséquence, il devra payer le prix malgré l’incendie de l’immeuble survenu par

exemple. Mais, on pourrait conventionnellement se prémunir de cette fatalité en retardant le

transfert de propriété à la délivrance de l’immeuble ; ou régler le problème ayant déjà pris

naissance, en transférant la police d’assurance du vendeur à l’acquéreur, ou que ce dernier

souscrive lui-même une nouvelle assurance.

En définitive, tous ces aménagements conventionnels sont légitimés dans la mesure où ils

permettent aux parties de moduler à certains égards les obligations et les effets du contrat à leur

guise afin de préserver leurs intérêts patrimoniaux.

1.2.Transfert de jouissance

En principe, le transfert de jouissance a lieu le jour du transfert de propriété. L’entrée en

jouissance correspond à la prise en possession réelle et matérielle de l’immeuble par l’acquéreur.

En revanche, les parties peuvent par voie de clauses contractuelles déroger à ce principe :

Soit d’une part, opter pour une jouissance anticipée de l’acquéreur, c’est-à-dire

l’acquéreur entre en jouissance avant le transfert juridique de propriété. Seulement, l’occupation

112

Op cit 113

Op cit

Page 66: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

63

anticipée est soumise à certaines conditions de fond114

. Puisque le transfert de propriété n’a pas

encore eu lieu dans cette hypothèse, force est de constater que l’acquéreur jouit d’un titre locatif

gratuit qui s’apparente au prêt à usage ou commodat.

Soit d’autre part, opter à l’inverse, pour une jouissance différée, c’est-à-dire que le

vendeur jouit toujours de l’immeuble même si le transfert de propriété a été déjà opéré. A ce

sujet, la jurisprudence allègue que le vendeur, dans cette situation, n’est plus propriétaire, ni a

fortiori locataire115

. Si l’occupation est gratuite, il s’agit d’un commodat ; au contraire, si elle est

rémunérée, on s’insère dans le cadre d’une convention d’occupation précaire116

.

1.3. Obligation de délivrance

Deux questions peuvent être élucidées sur ce point : En quoi consiste la délivrance ?, et

quelles en seraient les conséquences en cas d’inexécution de cette obligation par le vendeur ?

Selon l’article 1604 du code civil, « la délivrance est le transport de la chose vendue en la

puissance et possession de l’acheteur ». On peut d’ailleurs trouver un point de convergence entre

la délivrance et la jouissance, puisque la délivrance entraîne « brevatis causa » le transfert de la

jouissance de l’immeuble. Cette obligation inscrite dans une clause du contrat de vente, stipule

que la chose est remise dans l’état actuel où elle se trouve au moment de la vente, mais tant que

la chose n’est pas délivrée, le vendeur se doit de conserver la chose en évitant sa dévaluation117

.

En outre, les accessoires de l’immeuble doivent être délivrés, qu’ils soient matériels (clefs,

servitude active ou passive, immeuble par destination…) ou administratifs (titre de propriété,

certificat d’urbanisme, permis de construire…).

114

L’acquéreur doit être en mesure de payer le prix de la vente, mais il lui sera fait interdiction d’effectuer des travaux dans ou sur l’immeuble. 115

CA de Montpellier, 26 mai 1952, D.1952 116

Il est pratiquement nécessaire de fixer une date de libération des lieux par le vendeur pour éviter tout litige relatif à une expulsion ; 117

Exemple jurisprudentiel : terrain boisé ayant subi une importante coupe de bois depuis la vente.

Page 67: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

64

Un autre point mérite également notre attention : l’immeuble délivré doit être conforme à

celui désigné dans le contrat de vente. Ainsi en cas de « non conformité révélée »118

, le vendeur a

ipso facto failli à son obligation de délivrance.

En cas d’inexécution de la délivrance de l’immeuble, l’acquéreur peut opter, soit pour

l’expectio non adimplenti contractus ou exception d’inexécution, en refusant de payer le prix à la

date de l’échéance convenue ; soit pour la résolution rétroactive de la vente en intentant une

action résolutoire devant le tribunal d’instance. Mais, seule nous paraît efficace la résolution, car

du point de vue procédural, l’obligation de délivrance étant une obligation de résultat,

l’acquéreur n’a pas à prouver la faute d’inexécution du vendeur, et surtout, il pourra demander

des dommages et intérêts pour le préjudice subi.

2. Les obligations subsidiaires

Elles sont de deux ordres : l’obligation de garantie, et l’obligation d’information.

2.1. L’obligation de garantie

Elle a essentiellement pour rôle de protéger l’acquéreur, surtout lorsque le vendeur est un

professionnel de l’immobilier (SCI). Elle se décline, soit en une obligation de garantir l’éviction,

soit en une obligation de garantir les vices cachés.

Par rapport à la garantie d’éviction, elle consiste légalement pour le vendeur de garantir

l’acquéreur de « la possession paisible de la chose »119

vendue. Elle a donc pour fondement, le

respect du droit de propriété et vise à réprimer les atteintes illégitimes à la propriété.

Cette obligation légale sert à se prémunir, d’une part, contre le fait personnel du vendeur.

En effet, le vendeur doit s’abstenir de causer tout trouble de droit ou de fait à son cocontractant.

L’aliénateur commet un trouble de droit lorsqu’il invoque un droit sur la chose. A cet égard, le

vendeur peut être éventuellement titulaire d’un droit personnel sur l’immeuble, en l’occurrence

118

Différence notable entre la chose livrée et les indications précises du contrat de vente 119

Article 1625 du code civil

Page 68: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

65

un bail (à usage d’habitation, à usage professionnel, commercial, emphytéotique, rural …). Ce

qui risque de nuire au droit de jouissance de l’acquéreur. Le vendeur peut être également titulaire

d’un droit réel, notamment un démembrement du droit de propriété (usufruit) ou lorsqu’il

prétend redevenir propriétaire en invoquant une prescription acquisitive120

. Par contre, un trouble

de fait n’est fondé sur aucun droit du vendeur, ce dernier provocant personnellement un trouble

de fait (déranger périodiquement l’acquéreur…). Cette garantie du fait personnel a un caractère

d’ordre public, les parties ne peuvent pas l’écarter par une quelconque clause du contrat.

D’autre part, l’obligation de garantir l’éviction permet par ailleurs de se prémunir contre

le fait d’un tiers. Cette garantie du fait d’un tiers repose essentiellement sur un trouble de droit121

,

le tiers invoquant un droit sur l’immeuble vendu. Elle trouve d’ailleurs son originalité (par

rapport à la garantie du fait personnel du vendeur) dans son mécanisme d’indemnisation de

l’acquéreur victime de l’éviction. Cependant l’action de ce dernier contre le vendeur est

subordonnée à de conditions strictes : l’existence d’une « contestation de droit antérieure »,

c’est-à-dire qu’il préexiste un litige, une action intentée par un tiers contre l’acquéreur122

. En

outre, pour pouvoir bénéficier de cette garantie, l’acquéreur doit être de bonne foi : il ne doit pas

être au courant de la cause d’éviction. Si ces conditions sont remplies, l’acquéreur évincé par le

tiers intente l’action en garantie principale contre son vendeur. A l’issue de cette action, il pourra

alors demander restitution du prix, et demander dommages et intérêts pour le préjudice subi. Ce

qui suppose, suivant une logique tangible, l’anéantissement rétroactif de la vente immobilière.

Par rapport à la garantie des vices cachés, cette obligation légale est prévue par l’article

1641 du code civil : « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose

vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine… que l’acheteur ne l’aurait pas

acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ». La jurisprudence fait

une application nuancée de cette disposition : pour elle, il y a défaillance de l’obligation de

garantie des vices cachés par le vendeur, si d’une part, ce dernier connaissait l’existence de ce

120

Civ 3ème

, 20 octobre 1981, n° 80-10.660, bull civ III n°168. Difficulté de qualification de trouble de droit ou de fait. 121

Ce qui exclut les troubles de fait ! 122

Un coÏndivisaire invoque son droit de propriété sur le bien indivis car n’ayant pas donné son consentement à la vente (or le consentement unanime étant requis). Ou encore lorsque le vendeur vend la chose d’autrui ; ou tout simplement lorsqu’un tiers est titulaire d’un droit réel immobilier (usufruit, usage, habitation) ou d’une sûreté (hypothèque) sans que l’acquéreur ait été prévenu. On parle ainsi d’éviction totale.

Page 69: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

66

vice, et d’autre part, corrélativement, si l’acquéreur ne pouvait pas les déceler lors de la vente.

Pour illustrer le propos, un arrêt français du 23 janvier 1979123

démontre la situation juridique

problématique. En l’espèce, un acquéreur intente une action en responsabilité contractuelle

contre une SCI venderesse. Le litige puise sa source dans une vente immobilière d’un pavillon,

où le vendeur avait promis une « intimité totale », or ce ne fut pas le cas, car un grand hôtel de

plusieurs étages avait été construit à proximité, ce qui portait atteinte à l’intimité de l’acquéreur.

Les juges estiment qu’il y avait un vice caché en raison de la « vue plongeante » depuis l’hôtel,

que l’acquéreur n’aurait pas pu avoir connaissance ; alors que le vendeur, lui, de par son

professionnalisme et, par plusieurs faits (plan d’urbanisme, prescription d’urbanisme…) ne

pouvait pas ignorer les conséquences futures de l’édification de cet hôtel par rapport aux

pavillons voisins lors de la conclusion de la vente. A la lumière des dispositions législatives, on

en déduit qu’il y a vice caché : lorsque le vice affecte l’immeuble – objet de la vente -, c’est-à-

dire qu’il est inhérent à la chose vendue ; lorsqu’il rend l’immeuble impropre à l’usage auquel on

le destine ; seulement l’existence de ce vice doit être antérieure à la vente. Or, la jurisprudence124

démontre, en y apportant quelques correctifs, que le vice peut dorénavant être extérieur à

l’immeuble vendu, et peut, ne pas être antérieur à la vente. Le vendeur devant envisager les

conséquences futures du trouble d’usage. En conséquence, l’acquéreur pourra exercer une action

en garantie des vices cachés le jour où il aura découvert l’existence du vice ; en pratique ce

dernier sera constaté par une expertise. A cette occasion, l’acquéreur détient comme moyen

d’action, soit une action estimatoire qui consiste à garder la chose mais à en aménager le prix125

(en le diminuant en raison du vice affectant l’immeuble) ; soit une action rédhibitoire, qui, quant

à elle anéantit rétroactivement la vente avec son mécanisme de restitution réciproque. En sus, si

le vendeur est de mauvaise foi (s’il connaissait sciemment l’existence du vice), et s’il est un

professionnel, il devra allouer à titre de compensation du préjudice subi des dommages-intérêts à

l’acquéreur.

123

Civ 3ème

cassation SCI Rhône- Isère c/ Simonin in Jurisclasseur (979 II -1924) 124

Op cit note de bas de page n°123 125

On parle également de réfaction du contrat

Page 70: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

67

2.2. Obligation d’information

Est une obligation de second ordre à la charge du vendeur, très usitée dans la pratique.

Inspirée du droit des obligations, et initialement appliquée dans les rapports entre professionnel-

consommateur126

, elle s’est étendue dans les rapports entre simples particuliers. Sa justification

trouve fondement dans la maxime « celui qui sait doit informer celui qui ne sait pas ». Dans la

pratique malgache, l’obligation se focalise au niveau d’une clause spécifique du contrat de

vente127

qui indique toutes les informations relatives au bien à vendre. L’inexécution de cette

obligation est sanctionnée à divers degré par la nullité de la vente en raison de la réticence

dolosive du vendeur. Mais peut être également envisagée la résolution rétroactive du contrat de

vente immobilière.

3. Les obligations fiscales

Au terme de la loi fiscale128

, le vendeur est imposable de l’impôt sur la Plus Value

Immobilière (IPVI). Notre législation vise à taxer les plus values immobilières réalisées, source

de recettes publiques conséquentes. En ce qui concerne l’assiette dudit impôt, le fait générateur

correspond au transfert de propriété. Seulement, si la vente est conclue sous condition

suspensive, c’est la réalisation de la condition qui constitue le fait générateur. Quant à la question

de la détermination de la plus value, elle est constituée par la différence entre le prix de cession

et le prix de revient. Ce dernier comprend le prix d’achat effectif, frais d’acquisition, réparations

locatives, de construction et les intérêts d’emprunt. Ainsi déterminée, la plus value est imposée à

un taux de 22%129

. Il serait intéressant en outre de s’interroger sur la question d’un éventuel

régime d’exonération ou d’abattement fiscal. Suivant le CGI malgache, seule l’aliénation d’un

bien immeuble de l’Etat et l’expropriation pour cause d’utilité publique, sont exonérées de

126

La personne qui achète un logement est généralement, en France, un consommateur en position de faiblesse contractuelle en raison de la complexité des contrats. 127

Clause dite « désignation du bien » : indique le nom de la propriété immobilière, le numéro du titre, la localisation géographique, la superficie … Le droit français y ajoute d’autres faisceaux d’informations supplémentaires : le DDT ou Dossier de Diagnostic Technique relatif à l’amiante, les parasites et le plomb. 128

Code Général des impôts suivant loi de finances 2011, article 01.05.01 et suivants 129

Article 01.05.07 : rappelons que ce taux est proportionnel.

Page 71: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

68

l’IPVI. Mais suivant une étude comparée en droit français, la maison d’habitation principale130

,

ainsi qu’une vente dont le prix de cession est inférieur à un certain montant131

, ou encore la

cession à certaines catégories de personnes physiques (titulaires de pension vieillesse ou de carte

d’invalidité sous certaines conditions) ou de personnes morales (organismes sociaux ou HLM)…

En définitive, au niveau du recouvrement dudit impôt, l’IPVI est dû par le vendeur lui-même,

mais la pratique simplifie la procédure. En effet, il peut charger le notaire de liquider l’impôt

(c’est-à-dire procéder à son recouvrement) moyennant une provision. Finalement, il incombe au

receveur des impôts de l’encaisser et de le porter aux recettes publiques.

Section II. Le rôle du formalisme dans le cadre de la sécurisation des

transactions immobilières

Traditionnellement dans la genèse du droit continental, le consensualisme occupait une

place prépondérante dans le droit des contrats : le contrat se formait par le simple échange de

consentements. Mais depuis peu, on assiste à la renaissance du formalisme. Ancré dans les

contrats mettant en jeu des intérêts pécuniaires importants, le formalisme régule la sécurité des

relations contractuelles. Appliqué à la vente immobilière, il se traduit par deux formalités

fondamentales : au niveau de l’authenticité de l’acte juridique d’une part (§1), et au niveau de la

publicité au profit des tiers d’autre part (§2).

130

La notion de résidence principale correspond à la résidence habituelle et effective du vendeur au jour de la cession. 131

Prix de cession inférieur à 15.000 euros.

Page 72: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

69

§1. Authenticité : vers une sécurisation juridique renforcée

A. Authenticité obligatoire dans le cadre d’une vente

immobilière

Préalablement, nous vient à l’esprit la définition et le contenu de la notion d’acte

authentique. Selon l’article 259 de la LTGO132

: « l’acte authentique est l’acte reçu par une

autorité publique compétente dans les formes prescrites par la loi ». L’authenticité conférée à un

acte juridique est heureuse, puisque l’acte aura la force équivalente et obligatoire d’une loi

d’Etat. Plus concrètement, l’authenticité est l’attestation d’un fait par une autorité publique dont

la déclaration fait foi jusqu’à inscription de faux. Elle est conférée par un officier public

détenteur d’une parcelle de puissance publique, et demeure attachée à l’instrumentum de

l’acte133

. L’acte authentique dispose de deux attributs fondamentaux : Force probante et force

exécutoire.

En premier lieu, la force probante134

est l’attribut par lequel celui qui produit un acte dont

l’apparence est régulière n’a pas à en prouver la véracité ; c’est donc à celui qui conteste l’acte

authentique qu’incombe d’intenter une action en inscription de faux135

, afin de démontrer la

fausseté de l’acte ou certains faits erronés issus de la convention.

En second lieu, la force exécutoire, procédé original, touchant principalement les contrats

contenant une obligation de faire (soit donc une obligation de payer une somme d’argent), qui

permet de procéder à l’exécution forcée de l’acte, sans avoir à passer par un tribunal. Pour ce

faire, le notaire délivre une grosse136

qu’il remet à un huissier chargé de procéder aux voies

d’exécutions.

Cette authenticité demeure obligatoire aux termes de l’article 82 alinéa I de la loi 2007-

026 relative au statut du notariat à Madagascar, car « sont obligatoirement notariés les actes

constitutifs ou translatifs de droits réels immobiliers d’une valeur supérieur à 15.000.000

132

L’article 1317 du code civil propose une définition similaire. 133

Moyen de preuve : date certaine, date à laquelle le notaire appose sa signature 134

Caractère que l’on retrouve également dans l’acte sous seing privé. 135

Article 300 et suivants du code de procédure civil malgache, diamétralement opposée à l’action en vérification d’écriture des actes SSP. 136

Formule exécutoire, voir l’article 466.1 du code de procédure civil malgache.

Page 73: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

70

Ariary ». La volonté du législateur étant de paramétrer les transactions immobilières afin de

garantir une sécurité juridique optimale. En effet, l’acte authentique, demeure l’acte du plus haut

rang, contrairement à l’acte sous seing privé dénué de force exécutoire. Mais surtout,

l’authenticité est source de sécurité pour les relations contractuelles, puisque celui qui conteste

l’acte doit recourir à une procédure complexe d’inscription de faux. Or, l’établissement de ce

faux demeure néanmoins difficile à prouver en faits ; la loi voulant préserver l’intégrité de l’acte.

Par ailleurs, la force exécutoire de l’acte authentique de vente est un atout indéniable, car il

permet un gain considérable de temps (éviter toute instance judiciaire), or les transactions

immobilières obéissent au principe de célérité des affaires et doivent être conclues dans un bref

délai.

B. L’officier authentificateur : devoirs et garanties offertes

par le recours à un notaire

Lors de la conclusion d’une vente immobilière, le notaire traduit juridiquement la volonté

des parties, en leur faisant connaître l’étendue de leurs obligations. Il fait respecter l’application

de la loi, afin d’établir un certain équilibre contractuel. Parfois il est peut être chargé de procéder

à l’inscription d’un droit réel immobilier au Service de la Conservation Foncière et des

Domaines, et ce afin de préserver les droits des tiers. L’officier public contribue ainsi réellement

à la sécurité juridique de la conclusion de la vente immobilière.

Dans le même ordre d’idée, le notaire est garant de la conservation de la minute de

l’acte : il doit y apporter tous les soins d’un bon père de famille quant à sa conservation et son

archivage. Mais surtout, le notaire concourt à la sécurité juridique en étant astreint à un devoir de

conseil137

. Cette obligation trouve son fondement dans la jurisprudence française138

: il est le

« conseiller désintéressé des parties », « l’arbitre impartial des parties ». Il est tenu non

seulement de faire respecter la loi, mais il offre conseils opportuns aux parties. Dans cette

optique, il œuvre pour l’intérêt exclusif des parties afin de proposer les meilleures modalités

137

In exposé des motifs de la loi du 25 ventôse an XI ; et article 3 alinéa 2 et article 81 de la loi 2007-026. 138

Cass, civ, 21 juillet 1921: “les notaires ont pour mission de renseigner leurs clients sur les conséquences des engagements qu’ils contractent".

Page 74: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

71

financières ou fiscales lors de passation d’un contrat de vente d’immeuble. En définitive, il se

doit de conseiller sur le fond du droit lors de la constitution du dossier préparatif et préalable à la

vente : ainsi il doit aviser le client vendeur, à la vue du titre foncier ou d’un certificat juridique,

que l’immeuble est grevé d’une hypothèque par exemple139

. Si le rédacteur d’acte authentique

défaille à son devoir, il encourt sa responsabilité civile140

.

§2. Publicité foncière : l’opposabilité aux tiers

La publicité foncière résulte historiquement à Madagascar de la loi royale du 9 mars 1896

sur la conservation foncière, en son article 3 alinéa 4, et qui soumet toute mutation d’un droit réel

immobilier à publicité. Puis depuis l’indépendance en 1960, de la loi n° 60.146 sur

l’immatriculation, complétée par le décret d’application n° 60.529. En effet, l’article 9 de ladite

loi, ainsi que les articles 30 et 31 dudit décret, disposent que tout droit réel immobilier n’existe à

l’égard des tiers qu’autant qu’il a été rendu public dans les formes. La publicité doit être

effectuée dans un délai de six mois à compter de la date constatant le droit réel immobilier en

question. Ces dispositions sont collationnées dans l’article 27 de récente loi n° 2005-019

régissant le statut des terres à Madagascar. Malgré l’évolution des différentes législations au gré

du temps et des circonstances politico-économiques, malgré l’apparition de nouveaux statuts des

terres (propriété privée non titrée en l’occurrence), l’esprit demeure le même. Ainsi la finalité de

cette formalité est de rendre opposable la mutation aux tiers. A l’égard des tiers, la propriété

immobilière cesse d’appartenir au vendeur pour devenir celle de l’acquéreur. La publicité

préserve ainsi la sécurité juridique des tiers, puisqu’un créancier hypothécaire pourra notamment

sauvegarder son droit sur l’immeuble, en étant informé en temps réel sur les mutations subies par

l’immeuble hypothéqué.

139

Cass, civ 1ère

, 21 avril 1971 et cass, civ, 1ère

, 21 février 2006 : vente d’un immeuble grevé de treize inscriptions hypothécaires ! 140

Est également une source de garantie pour le client car le notaire engage sa responsabilité civile via l’assurance collective.

Page 75: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

72

Suscite réflexions la problématique suivante : qu’advient-il de la vente s’il y a défaut de

publicité ? La jurisprudence française est constante141

, le défaut de publicité au Bureau des

Hypothèques n’entraîne point la nullité de la vente : le contrat demeure valable entre les parties.

Seulement, l’acte est inopposable aux tiers. Ces derniers peuvent alors faire abstraction de la

vente non publiée. Mais qu’en est –il de la position des juges malgaches sur cette question du

défaut de publicité ? Le contentieux foncier y est abondant ; un arrêt de la Cour Suprême de

Madagascar du 24 février 2004142

rappelle de manière formelle que toute convention portant sur

un immeuble doit être publiée à la Conservation Foncière et service des Domaines pour être

opposable aux tiers. Mais, c’est un arrêt du 18 mars 2005143

qui envisage les sanctions du défaut

de publicité. En l’espèce, une dame est coïndivisaire sur un immeuble résultant d’une succession.

Cet immeuble fait l’objet d’une vente entre un autre coïndivisaire et un tiers acquéreur. La dame

s’oppose à la vente argumentant qu’elle n’a pas été notifiée, et n’a pas pu par la même occasion

exercer son droit de préemption. Mais la demanderesse se focalise essentiellement sur le fait que

l’acte soit nul, car n’a pas fait l’objet de publicité. La position de la Cour d’Appel et de la Cour

Suprême s’allie dans la mesure où le non respect d’une formalité de publicité n’est pas une cause

de nullité de l’acte ; ce dernier demeure seulement inopposable aux tiers. Dans la pratique, la

publicité s’opère par une mutation entre vifs de la vente dans le titre foncier144

. Elle est opérée

par les soins du Conservateur sur réquisition du notaire.

A travers tout ce long développement, on appréhende que la vente est un compromis pour

les deux parties vendeur et acquéreur, elle permet de converger les intérêts du vendeur et de

l’acquéreur. Elle permet, par étapes de conclure préalablement une série d’avant-contrats et de

contrats accessoires, qui conditionnent l’efficacité de la vente projetée. Puis, vient l’acte définitif

de vente qui offre une sécurité juridique, tant sur le fond, tant sur la forme. Seulement, malgré

cette apparence parfaite, la vente immobilière peut se heurter à certains obstacles.

141

Civ 3ème

, 11 décembre 1969, JCP N 1970. 142

Arrêt n° 25 du 24 février 2004 in Bulletin des arrêts de la Cour Suprême de Madagascar, 2004, page 6. 143

Arrêt n° 66 du 18 mars 2005 in Bulletin des arrêts de la Cour de Madagascar, 2005, page 75. 144

Dans la section « mutation totale » et dans le bordereau analytique.

Page 76: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

73

TITRE DEUXIEME : LES ASPECTS ILLEGITIMES DE LA VENTE

IMMOBILIERE

Le déroulement de la vente immobilière n’est pas un long fleuve tranquille. Son

mécanisme peut être happé par plusieurs faits « néfastes » pouvant remettre en cause le

fondement même de l’opération. Penser que la vente s’opère sans embûches serait une utopie.

Les difficultés peuvent se focaliser dès la préparation de la vente, c’est-à-dire dès les contrats

préparatoires, mais surtout, au niveau de la vente définitive. Elles peuvent prendre également la

forme d’une situation de fait ou d’une situation de droit. L’objet de cette deuxième partie est de

mettre en exergue les aspects illégitimes de la vente, en d’autres termes les inconvénients, les

obstacles à la conclusion du contrat de vente d’immeuble. Ce développement fera l’objet d’une

approche critique objective par rapport à certains points de droit ci-précédemment exposés. Mais

face à ces différentes difficultés, il nous semble nécessaire de proposer, si cela s’avère possible,

quelques solutions. Ainsi, l’objet de notre d’étude se fera en deux temps : en premier lieu, il

convient d’apprécier ces difficultés au niveau des parties contractantes et des intermédiaires

professionnels (Chapitre I) ; puis dans un deuxième temps, au niveau de l’acte juridique lui-

même (Chapitre II).

Chapitre I. Appréhension des difficultés de l’opération au niveau des acteurs de la

vente immobilière

Ces difficultés se situent principalement au niveau de la préparation de la vente dans le

cadre des contrats auxiliaires à la vente (contrat de mandat, contrat de prêt immobilier …), et

touchent en cascade les intermédiaires professionnels à la vente (Section 1ère

), mais surtout

l’acquéreur en position de faiblesse contractuelle face à un prêteur de deniers (Section 2ème

).

Page 77: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

74

Section 1ère. Controverses sur le statut des intermédiaires professionnels

La conclusion d’un contrat de vente, dans la majeure partie des cas, recours en principe à

une intervention notariale, et le cas échéant, recours à un agent immobilier si le vendeur est dans

l’expectative de rechercher un potentiel candidat acquéreur. Seulement, la première institution

semble souffrir de la méconnaissance du grand public. Ce qui impliquerait une faible fréquence

de l’intervention notariale. Dans la deuxième institution, une toute autre problématique se pose :

d’ordre pragmatique (organisation, rapidité et efficacité de la vente) et d’ordre financière

(commission des agents immobiliers).

§1. Ignorance du public de la profession de notaire et de son rôle dans

les transactions immobilières

Si l’on devait s’en tenir à une définition étroite, le notaire est un officier public chargé de

conférer le caractère authentique aux actes. Etant un officier public, il garantit à la clientèle la

sécurité dans les rapports contractuels. Cela semble sécurisant, seulement cette profession est

généralement mal connue, combien même « totalement mystérieuse » selon certains auteurs. En

effet, à Madagascar, il n’existe, pour l’instant, que quelques treize notaires exerçant leur activité

dans toute l’île. A titre de comparaison, il existe en France 9000 notaires en 2011. Mais quelles

en sont les causes, les incidences de cette méconnaissance, et quelles solutions peuvent être

proposées pour la promouvoir ?

Un premier facteur est d’ordre institutionnel : en effet, les étudiants ayant obtenu leur

maîtrise en droit s’orientent vers les carrières judiciaires et juridiques les plus prisées (celles de

magistrat, d’avocat, d’huissier, greffier). Ce qui implique que les étudiants eux mêmes ne

connaissent réellement l’ambition de la profession, et parallèlement entraîne la méconnaissance

du large public.

Un autre facteur est d’ordre géographique : il n’a pas été opéré jusqu’à présent un parfait

maillage du territoire en termes de création d’office notarial. En effet, la plupart des offices sont

Page 78: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

75

concentrés au sein de la capitale, car c’est à Antananarivo que s’effectuent la majorité des

transactions immobilières. Ailleurs, il y a peu (en province)145

, ou pas (dans les régions reculées

de Madagascar et dans les communes rurales)146

de notaires. Les habitants de ces régions ne

sauront inéluctablement qu’est qu’un notaire, et quel est son rôle. Pourtant, certaines régions

possèdent un énorme potentiel foncier (terrains, rizières), qui nécessiterait une intervention

notariale afin de préserver la sécurité juridique de la relation contractuelle (vente).

Dans le même ordre d’idée, les milieux ruraux et certains milieux urbains recourent

rarement à l’acte notarié, pour des raisons de simplicité et d’économie. Pour ce faire, lors d’une

vente immobilière, les parties optent sciemment pour un acte sous seing privé ou a fortiori pour

un acte établi par un officier de l’Etat civil d’une commune. L’acte sous seing privé pose le

problème de son efficacité relative en cas d’inexécution de ses obligations par l’une des parties

(car il est dépourvu de force exécutoire). De plus, il peut survenir un défaut de conservation

quant à l’acte sous seing privé (perte par exemple). L’acte authentique établi par l’OEC fait

concurrence à l’acte notarié ; on révèle à ce sujet que les actes de l’OEC ne respectent pas

certaines dispositions législatives, tant sur le fond, tant sur la forme de la vente d’immeuble…

Par ailleurs, cette méconnaissance résulte notamment d’un manque de communication de

la profession. Cette communication incombe à la Chambre Nationale des Notaires de

Madagascar, qui représente les intérêts de la profession, car les notaires ne peuvent

personnellement effectuer de publicité de leur service.

Enfin, un dernier facteur d’ordre politique intervient : c’est en partie un défaut de

considération de la profession par le pouvoir exécutif qui minimisait les intérêts d’une telle

profession…

A tout maux, existe un remède dit-on ! La promotion de la profession à Madagascar

résulte notamment de la coopération internationale avec le notariat français, puis de la

coopération interne avec le pouvoir exécutif, législatif et judiciaire. Ainsi, les efforts conjugués

de toutes les institutions internes ou étrangères conduiront à la notoriété du notariat. En effet, il

sera institué vers 2015 plus de cent notaires dans notre Etat, et qui auront pour vocation un rôle

145

Quelques offices ont été crées à Diégo-Suarez, Tamatave, Fianarantsoa et Majunga. 146

Lorsqu’il n’existe pas de notaire, c’est le greffier notaire qui en prend en charge le rôle d’instrumenter.

Page 79: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

76

juridique et social plus important. A cette occasion, le notaire sera institué « juriste de

proximité », car il sera ainsi procédé à un maillage du territoire. Les régions décentralisées

disposeront alors du service du notariat. Par ailleurs, une compétence juridique des notaires sera

renforcée, en l’occurrence par la formation des apprentis notaires, ainsi qu’en proposant dans la

même foulée un module « droit notarial » à l’université. Le notariat devra assurer son utilité

sociale : Le notaire est magistrat de l’amiable, il prévient les conflits entre les parties

contractantes. Mais surtout, il est tenu d’une obligation de résultat, ce qui semble être une source

de sécurité pour le client, en engageant l’assurance responsabilité civile collective de la

profession. Cet officier public est également instituteur de la loi, il fait respecter la loi par les

parties, et assure un équilibre certain de la convention. D’ailleurs, l’authenticité qu’il confère aux

actes passés par devant lui assure la sécurité juridique des relations contractuelles. Enfin, des

efforts soutenus de communication seront institués par voie de presse et médias nationaux. La

Chambre Nationale des Notaires de Madagascar assurera des ateliers- portes ouvertes, et

descentes sur terrain afin de promouvoir effectivement le notariat malgache147

.

Après s’être étendu sur la question générale de la méconnaissance du notariat, il convient

à présent d’appréhender les questions particulières suivantes : Pour quelles raisons les parties à

une vente immobilière ne passent t- elles souvent pas par un notaire ? Est-ce une perpétuelle

méconnaissance de son rôle dans les transactions contractuelles ? Et quelles peuvent en être les

conséquences ?

A. Le non respect des formalités légales imposant l’authenticité

obligatoire de la vente immobilière

La loi entendue dans un sens strict a un caractère général et impersonnel. Elle s’impose à

tous et doit être respectée. D’ailleurs, suivant l’adage « nul n’est censé ignorer la loi », la loi doit

être connue par tout citoyen par voie de publication ou d’affichage. Pour mieux cerner la

147

Un projet commun de promotion de toutes les professions libérales judiciaires est en cours : la création de la Maison du droit, regroupant les avocats et les notaires. Ces derniers pourront renseigner le public de la profession et assurer à l’occasion un service public gratuit.

Page 80: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

77

problématique, une loi sur le notariat contenant des dispositions d’ordre public148

, impose

l’adoption obligatoire de la forme notariée pour tout acte translatif de droits réels immobiliers

supérieur à 15.000.000 ariary. C’est alors là qu’un vent nouveau souffle dans le monde des

transactions immobilières, et qui assurerait par le biais de l’authenticité la sécurité juridique des

contractants à une vente immobilière. Seulement, jusqu’à présent, cette disposition législative

trouve peine à se faire respecter. En effet, les parties à une vente (vendeur et acquéreur)

contournent la législation pour deux raisons majeures.

Soit, les parties conviennent délibérément de ne pas recourir à l’intervention notariale

pour des raisons financières, ou de simplicité. Soit, elles ignorent l’existence de la législation, et

parfois de l’existence même de l’institution du notariat qui authentifie l’acte. Cela s’explique

souvent en fait, parce qu’elles résident dans un coin reculé du territoire où la communication de

la profession et du rôle du notaire n’y est pas parvenue. Pour ce faire, les contractants disposent

dans la pratique de deux outils juridiques pour conclure une vente immobilière. D’une part, ils

concluent un acte de vente en la forme sous seing privée même si la valeur du bien immeuble

dépasse allégrement le seuil où la loi impose un acte notarié. D’autre part, ils peuvent passer par

une commune (urbaine ou rurale) par le biais d’un officier public (Officier de l’état civil, adjoint

au maire) tout en faisant fi des seuils légaux fixés. Mais ces pratiques tant décriées se heurtent à

un obstacle imposant un formalisme particulier : celui de la publicité foncière. En échappant à la

forme notariée obligatoire, les parties sont rattrapées par les contraintes imposées par la

publication d’un droit réel immobilier au Service de la Conservation Foncière et des Domaines.

En effet, l’administration publique refuse systématiquement de transcrire un droit réel

immobilier à titre de publicité, si l’acte n’a pas été régulièrement passé en la forme notariée. Cela

entraîne ipso facto l’inopposabilité de la vente aux tiers : aux yeux de ces derniers, l’acquéreur

n’est pas le nouveau propriétaire du bien immeuble. Mais le contrat reste tout de même valable

entre les parties. De plus suivant une logique tangible, si le droit réel n’est pas publié, la mutation

de la propriété entre vifs au nom de l’acquéreur ne pourra pas être opérée. En cascade, cela

risque inéluctablement de se répercuter négativement sur les prochaines mutations à intervenir

car on ne saurait se fixer à un moment précis qui est le véritable propriétaire du bien. Ce qui

148

Article 82 de la loi 2007-026 du 12/12/07

Page 81: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

78

risquerait de remettre en cause l’ordonnancement juridique en portant atteinte à l’équilibre

contractuel de la vente, et à la sécurité des tiers.

Ce mal persiste toujours à l’heure actuelle, mais ne restera pas incurable. La seule

solution qui nous semble envisageable est de promouvoir rationnellement l’institution du

notariat, et de faire connaître l’enjeu capital de l’article 82 de la loi 2007-026 (signification,

interprétation, portée), sur toute l’étendue de la Grande île afin de sécuriser les transactions

immobilières. Cette communication ne sera plus destinée exclusivement aux urbains, aux

investisseurs … mais profitera par voie de démocratisation à tous !

B. Lourdeur des frais honoraires engagés dans un acte notarié de

vente immobilière

La conclusion d’une promesse de vente ou de l’acte définitif en la forme notariée engage

d’importants frais honoraires ou émoluments149

. Suivant une clause d’ordre public du contrat, ils

sont à la charge exclusive de l’acquéreur. Ce qui n’est pas sans difficultés, car l’acquéreur étant

déjà débiteur du prix de vente de l’immeuble envers le vendeur, est redevable légalement des

droits d’enregistrement envers l’administration fiscale150

. La question des frais honoraires du

rédacteur d’acte authentique demeure toujours d’actualité et est sujet à controverses.

Juridiquement, les frais honoraires sont représentés par les émoluments pouvant être fixes pour

un acte déterminé, ou variables (notamment dans une vente) en tenant compte de la valeur vénale

de l’immeuble. Certes, il est incontestable que l’émolument prenne référence sur la valeur du

bien, mais le pourcentage pris en compte à titre d’honoraire pouvait être excessif car aucune

limite précise n’a été fixée avant 2011. Si ce pourcentage semblait par le passé exagéré, les

parties abandonnaient l’intervention notariale. Ainsi analysé, le problème s’était posé en termes

de transparence des honoraires puisqu’avant aucune disposition réglementaire ne cernait avec

précision les limites tarifaires. L’arrivée en novembre 2011 de l’arrêté n° 30.286/2011 relatif aux

149

Voir articles 2 et 3 de l’arrêté n° 30.286/2011 fixant le tarif des notaires de Madagascar. 150

Quantitativement, les droits d’enregistrement sont toujours supérieurs aux honoraires du notaire.

Page 82: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

79

tarifs du notaire est heureuse, puisque met en exergue la transparence des frais honoraires151

. Ils

sont nettement revus à la baisse, car prenant en ligne de compte l’intérêt patrimonial du client, et

vise à rendre plus accessible à tous le service public de l’intervention notariale. Pour illustration,

en ce qui concerne la vente d’immeuble, plus la valeur vénale de l’immeuble est grande, plus le

pourcentage à titre d’émolument diminue progressivement. D’ailleurs, pour les ventes

d’immeubles situés dans les collectivités territoriales décentralisées (CTD) et usant des

certificats fonciers152

, les honoraires sont presque divisés de moitié.

Une autre difficulté majeure semble se dresser à l’horizon, et, par contre coups pourrait

discréditer le choix d’un acte en la forme notarié : le coût de l’acte, plus précisément les

honoraires que doivent acquitter les parties. Mais ici, le problème ne se pose pas exactement en

termes de transparence, mais en termes de pouvoir d’achat ou de faculté financière de chacun. En

effet, toute personne, qu’elle soit aisée ou non, peut être à la tête d’un patrimoine comprenant un

bien immobilier (acquis à titre gratuit ou à titre onéreux), et qu’elle pourra être emmenée à

disposer. Seulement, certaines personnes avec un pouvoir d’achat limité ne peuvent supporter les

frais honoraires engendrés par l’acte de disposition. Et là encore, le clou s’enfonce, car les parties

abandonnant l’intervention notariale, recourent à un acte sous seing privé par exemple, et font

abstraction de la loi d’ordre public imposant la forme notariée au dessus d’un certain montant

dans le cadre d’une vente. Ce qui engendrera un cercle vicieux pour les parties, ainsi qu’une

insécurité juridique pour les tiers. Par rapport à ce dernier point, rappelons que l’acte de vente

des parties ne respectant pas les dispositions législatives relatives aux formes, ne pourra faire

l’objet d’inscription à titre de publicité foncière.

Sur cette deuxième difficulté et ses corolaires, aucune solution n’a pas encore pu être

avancée ni par l’organisme représentatif de la profession, ni par les institutions étatiques.

151

Voir article 20 et tableaux annexes dudit arrêté. 152

Voir loi 2006-031 du 24/11/06 fixant le régime juridique de la propriété foncière privée non titrée.

Page 83: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

80

§2- Différends occasionnés par le recours à un agent immobilier

L’agent immobilier à Madagascar n’est pas encore soumis à un statut formel. La

profession s’inspire et applique les dispositions du droit immobilier français153

. Mais en

l’absence de dispositions réglementant leur activité, il s’avère difficile de cerner les droits et

devoirs de l’agent immobilier. Ce qui risquerait de générer une situation de profit au détriment

du client ayant confié à l’agent un mandat de vente. Et si cette situation venait à être souvent

pratiquée, cela entraînerait la méfiance du public et à discréditer la profession. Suivant une

définition empruntée à la loi française dite « Hoguet », l’agent immobilier est un intermédiaire

dans la vente de biens immobiliers pour le compte d’un client, le mandant ; il en devient le

mandataire en concluant un mandat. Ce mandat écrit est imposé à l’agent, titulaire de la carte

professionnelle154

.Cet agent n’a pas d’obligation de résultat, mais une obligation de moyen à

mettre en œuvre pour aboutir à la vente.

En s’imprégnant de la loi française, on appréhende que l’obligation de moyen nous

semble assez légère et peu sécurisante pour le mandant. En effet, l’agent étant un professionnel

de l’immobilier disposant de toute information sur un bien immobilier particulier, de tout moyen

technique et juridique pour trouver un candidat acquéreur. En cas de litige, notamment en cas

d’inexécution ou de défaillance de l’obligation du mandataire, il s’avèrera difficile pour le client-

mandant de prouver une faute imputable à l’agent immobilier. Ce dernier se contentant de

rechercher un potentiel candidat acquéreur pour le compte du vendeur. Comment prouver que

l’agent n’a pas dûment exécuté son mandat de vente alors qu’il a mis en œuvre, au moins, tous

les moyens nécessaires pour rechercher un acquéreur ? Sur le plan procédural, cela défavorise le

mandant qui ne bénéficie pas de la présomption de faute du contractant (présomption issue d’une

obligation de résultat).

153

Loi Hoguet du 2 janvier 1970 et son décret d’application du 20 juillet 1972 154

Article 72 de la loi Hoguet

Page 84: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

81

Heureusement, la pratique malgache tend à s’affiner en optant essentiellement pour le

mandat exclusif155

(pour des raisons de commodité et de sécurité juridique) et mettant ainsi une

obligation de résultat à la charge de l’agent immobilier.

Ce ne sont que quelques aspects problématiques, qui démontrent la partie émergente de

l’iceberg. Mais, les problèmes majeurs abordés seront consécutifs : à l’organisation des agents

immobiliers dans le cadre de la vente, à la concurrence avec d’autres organismes, et enfin à la

commission du mandataire.

A. Problématique d’ordre organisationnelle

1. Aptitude professionnelle

Tout agent immobilier à Madagascar doit disposer d’une carte professionnelle afin

d’exercer l’activité d’agent immobilier. Certes, il est envisageable que certaines personnes

obtiennent le « sésame » alors qu’elles ne présentent pas l’aptitude professionnelle requise par la

profession (diplôme d’Etat général : licence ou maîtrise, formation professionnelle en économie,

en droit ou en commerce). Ces personnes ne font que jouer leur expérience dans l’immobilier ;

pourtant ces lacunes dans l’aptitude risquent de mettre en cause le professionnalisme de l’agent,

et de rendre peu effectif le conseil prodigué par le mandataire à son client. Pour illustrer le

propos, un agent immobilier n’ayant pas eu de formation juridique ne tiendra pas compte de la

personnalité de son client, en l’occurrence, par exemple lorsque le vendeur est un couple marié

sous le régime de la communauté des biens, ou lorsque l’aliénateur est en indivision. Or, dans

ces situations, l’agent immobilier doit impérativement savoir que le consentement des tiers

(l’autre époux commun en biens, les autres coïndivisaires) est nécessaire avant de vendre le bien

immobilier. L’obligation de conseil consiste à déterminer avec précision le prix du bien vendu, à

assister le vendeur dans les démarches juridiques et administratives, à vérifier la situation

financière du vendeur. Si le conseil s’avère insuffisant, le client risque d’être lésé, la transaction

n’étant plus sécurisée, et la vente se vouera inéluctablement à l’échec.

155

Pour rappel, l’agent sera le seul à présenter le bien immobilier sur le marché.

Page 85: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

82

2. Lenteur de la réalisation de la vente

Deux principaux facteurs sont à l’origine, dans la pratique, de la lenteur de l’opération

diligentée par l’agent immobilier.

L’un est d’origine juridique : si l’agent s’est engagé en vertu de son obligation de

conseil, plus précisément dans le cadre de l’assistance du vendeur (dans les démarches

administratives), il sera chargé de délivrer certaines pièces nécessaires à la vente pour le compte

du vendeur. Il s’agira notamment d’un certificat de situation juridique, d’un plan topographique

et d’un duplicata d’un titre foncier. Or, les démarches relatives à l’obtention du titre ou à la

mutation du droit réel immobilier156

au nom du vendeur prennent énormément de temps157

. Ce

qui est contraire à l’intérêt de recourir à un agent immobilier, qui se doit de vendre avec célérité

le bien confié à lui. La source du mal provient de la lenteur administrative des services

concernés. En effet, ladite administration est saturée, surbookée, car traite des milliers de

dossiers ; elle est souvent confrontée à une recherche d’informations foncières contenues dans

les documents détériorés ou délabrés (ce qui retarde encore plus !). Ainsi, cela est blâmable pour

le vendeur, qui par exemple, voudrait remployer dans un bref délai un bien immobilier issu de la

communauté ; le produit de la vente servirait ainsi à une autre acquisition. La faute n’est pas

imputable à l’agent immobilier mais à l’administration. Des perspectives ont été tout de même

proposées pour éradiquer cette lenteur administrative. Il a été préconisé une restructuration

administrative à long terme, et une modernisation par voie numérique158

des services concernés.

Grâce à ces axes stratégiques, les procédures administratives seront accélérées ; l’agent

immobilier agissant pour le compte du vendeur sera ainsi mieux déchargé de son obligation

d’assistance dans les papiers administratifs.

L’autre facteur est d’origine extra-juridique : il s’agirait de faits que l’on rencontre

souvent dans la vie courante. L’agent mettra du temps à vendre une maison si elle présente un

mauvais emplacement. L’emplacement est un paramètre primordial conditionnant la vente

156

Mutation après décès en vertu d’une succession ; mutation entre vifs en vertu d’une donation, d’un bail emphytéotique ou d’une précédente vente. 157

L’administration des services de la conservation foncière et des domaines met en moyenne entre 6 mois à 6 ans pour délivrer un titre foncier, et plusieurs mois pour inscrire un droit réel immobilier. 158

MCA : Millenium Challenge Account. MLM : Madagascar Land Management, logiciel d’information foncière.

Page 86: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

83

effective d’un immeuble. Pour illustration, est située dans un mauvais emplacement une maison

qui ne donne pas un accès direct à la voie publique. Par ailleurs, l’aspect intérieur du logement

est un critère non négligeable : une maison présentant une certaine fonctionnalité et offrant un

certain espace trouvera vite un acquéreur. Souvent, la modernité et le design ne sont pris en

compte que subsidiairement. Mais si la maison à vendre venait à présenter certains

disfonctionnements (murs et matériels sanitaires défaillants, présence d’humidité …), l’agent

immobilier doit enjoindre à son client vendeur de procéder préalablement aux réparations

urgentes du logement, sinon il ne trouvera aucun acquéreur. Seulement, même si ces travaux de

remise en état seront effectués, la vente de l’immeuble risque de prendre un peu plus de temps.

Par contre, si ces travaux n’ont pas été réalisés, et que l’immeuble venait à être « insalubre »,

l’administration (en l’occurrence le maire) peut faire sortir un arrêté d’insalubrité ou de

démolition, après qu’un comité d’hygiène et de salubrité ait dressé un procès-verbal. En

conséquence, puisque interdite, la vente du logement ne pourra plus avoir lieu.

B. Concurrence avec d’autres organismes ?

Dans le cadre d’un mandat de vente, le vendeur peut confier la recherche d’un futur

acquéreur, soit à un notaire, dans le cadre d’une négociation immobilière159

, soit à un

« mpanera », institution originale à Madagascar, très proche de l’agent immobilier. Nous vient

donc à l’esprit la question suivante : les notaires et les « mpanera » n’engendrent t-ils pas

concurrence néfaste au détriment des agents immobiliers ?

159

Ce dispositif n’est pas encore bien connu du droit malgache, ni usité dans la pratique. Cependant l’article 13 de l’arrêté malgache n° 30.286/2011 fixant le tarif des notaires dispose : « il y a négociation lorsque le notaire agissant en vertu d’un mandat écrit que lui a donné à cette fin l’une des parties, recherche un cocontractant, le découvre et le met en relation avec son mandant, soit directement, soit par l’intermédiaire du représentant du cocontractant, reçoit l’acte ou participe à sa réception ».

Page 87: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

84

1. Droit comparé : la négociation immobilière par notaire

Elle est largement consacrée par le droit français et demeure encore peu connue dans

notre droit positif. Elle consiste dans le fait que le notaire négocie une vente : il met ainsi en

relation le vendeur et l’acquéreur. Une rémunération à la charge des parties est due à l’officier

public à cette occasion. Sauf dispositions contraires, elle est à la charge de celle des parties qui

supporte les frais de l’acte (acquéreur)160

. Le notaire affiche ainsi les biens à vendre en vitrine

extérieure de l’étude. Mais face à ce procédé, n’y a-t-il pas concurrence avec l’agent

immobilier ? La réponse nous semble indubitablement négative. En effet, en France, les

commissions sont réglementées : elles sont légèrement plus faibles pour le notaire (entre 2,50% à

5%), alors que celles de l’agent immobilier sont plus élevées (entre 5% à 8%). De plus, cette

activité doit rester accessoire dans l’étude, contrairement à l’agent immobilier qui en fait

principalement sa profession.

2. Le statut informel des « mpanera »

Il s’agit d’intermédiaires informels, n’ayant pas, à la différence des agents immobiliers

une carte professionnelle. On retrouve souvent leur « petit commerce » à chaque coin de rue, et

parfois même ils offrent leur service de manière ambulante en centre ville. Ils ont pour mission

de rechercher pour le compte du vendeur un acquéreur. Cela se concrétise par un contrat de

mandat, souvent verbal. Dans la pratique, ces intermédiaires n’ont pas de compétences

juridiques. Le client-vendeur n’ayant pas les moyens financiers de passer par un agent

immobilier, recours à cette institution souvent plus abordable, rentable, et joue sur la rapidité ;

bien que la réalité démontre qu’une personne sur trois ait été victime d’escroquerie ! Même si

cette activité entre dans le cadre de statut informel, elle n’engendre pas de concurrence illégitime

avec les agents immobiliers. En effet, ces derniers disposent selon les dires d’un agent

immobilier à Madagascar, de connaissances juridiques et techniques dans le domaine de

l’immobilier, de moyens logistiques aboutis, et de méthodes de marketing satisfaisantes. Ce

propos nous semble d’ailleurs crédible : force est de constater qu’il ne peut y avoir concurrence

160

Article 13 alinéa 2

Page 88: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

85

entre « Mpanera » et agents immobiliers, car les deux types de service s’adressent à deux types

de clientèle bien distincte.

C. La problématique d’ordre pécuniaire sur les commissions prélevées par

des agents immobiliers

La rémunération du mandataire est strictement encadrée afin d’éviter tout abus éventuel

de la part d’un agent immobilier qui n’aurait pas accompli avec diligence sa mission dans la

recherche d’un acquéreur. Pour faire court sur cette question, l’agent n’aura droit à sa

rémunération que s’il aura effectivement mis en relation juridique le vendeur et l’acquéreur. Ces

derniers doivent avoir exprimé leur consentement sur la chose et sur le prix. Pragmatiquement,

c’est donc à la signature de la promesse, ou directement lors de la signature de l’acte définitif de

vente, que l’agent percevra sa commission. Le cœur du problème se situe néanmoins, non pas à

ce stade, mais préalablement au niveau de la conclusion d’un mandat dit « simple », et en outre,

globalement d’ordre quantitatif au niveau des tarifs des agents.

1. Rappel : réglementation de la commission des agents dans le cadre d’un

mandat simple de vente

Traditionnellement, une source de litige s’élevait entre plusieurs agents immobiliers au

sujet de leur commission due par leur client vendeur. En effet, dans le cadre d’un mandat dit

« simple », le vendeur confiait un mandat de vendre à plusieurs agences en concours afin de

vendre plus vite le bien immobilier. Cela n’était pas sans désagrément pour le vendeur, à qui tous

les agents réclamaient leur « part de gâteau », car chacun ayant au moins recherché un potentiel

candidat acquéreur. Par conséquent, le client-vendeur était dans une situation inconfortable,

puisqu’il devenait débiteur de plusieurs agences immobilières.

Pour mettre fin à cette pratique, la jurisprudence française est intervenue en imposant

que la commission ne sera due qu’à un seul agent, à celui qui aura effectivement conclu la vente.

Page 89: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

86

Or à Madagascar, seule se pratique le mandat dit « exclusif », dans lequel le vendeur confie

l’exclusivité de la vente de son bien à un seul agent immobilier. Cela offre un semblant de

sécurité pour le vendeur, car l’agent effectuera toutes les formalités nécessaires à la vente, et

mettra en œuvre plus de moyen. Mais surtout le « mandataire exclusif » est débiteur d’une

obligation de résultat ; et donc, en cas d’inexécution, l’agent sera sanctionné civilement.

Seulement, ce mandat exclusif est contraire au principe de la liberté de la concurrence dans la

mesure où elle restreint la concurrence entres agences immobilières. Certaines agences

détiendront alors un certain monopôle sur le marché immobilier.

2. Litiges occasionnés par le tarif des agents immobiliers

Les agents immobiliers perçoivent à chaque opération en principe une commission

oscillant entre 5% à 8%. Mais certaines agences font varier leur tarif en fonction de la valeur du

bien immobilier161

. Peu importe le mode de tarification, ces tarifs semblent peu transparents,

puisque ne faisant l’objet de publicité effective, même si en principe, les tarifs doivent être

affichés en agence à la vue du grand public.

Un autre obstacle semble s’élever lors du recours à l’intervention d’un agent immobilier :

celui de la faculté financière du vendeur-client. En effet, le tarif du mandataire n’est pas donné,

puisque les commissions des agents sont plus élevées que les honoraires du notaire rédacteur de

l’acte de vente. Prenons une illustration assez carrée : une maison à vendre dont la valeur vénale

est évaluée à 100.000.000 Ariary. Si l’agent perçoit une commission de 8%, les frais à régler à

l’agent s’élèvent à 8.000.000 Ariary. Ce qui n’est pas toujours à la portée de tous. Par

conséquent, les vendeurs n’auront souvent pas recours à une agence immobilière, et préféreront

faire appel au service informel des « Mpanera ».

La seule solution envisageable en vue de rendre accessible à tous le recours à un agent

immobilier serait préalablement de formaliser les statuts de la profession, et de décréter sur leurs

tarifs afin de les rendre plus transparents. Néanmoins, la question de la révision des tarifs semble

161

Tranche comprise de 50.000.000 à 500.000.000 Fmg 800.000.000 à 1.000.000.000 Fmg Supérieur à 1.000.000.000 Fmg

Page 90: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

87

difficile puisque les pourcentages (entre 5% à 8%) sont empruntés à la législation française. Il

serait intéressant de les réviser légèrement à la baisse en tenant compte des réalités sociales et

économiques malgaches.

Section 2. La protection relative des parties à un contrat de prêt immobilier en droit

positif malgache

Le projet d’acquisition d’un immeuble demeure pour certaines personnes un acte

juridique qui se présente rarement au cours de leur vie. C’est un acte financièrement important

qui nécessite un investissement assez conséquent. Pour disposer de ces fonds, l’acquéreur peut,

pour des raisons de commodité et de liquidité, recourir à un emprunt bancaire, qu’il remboursera

sur plusieurs échéances en fonction de ses capacités financières.

A Madagascar, les grands établissements de crédit se sont déjà lancés dans le crédit

immobilier, en rivalisant de concurrence, et en proposant plusieurs taux d’intérêts différents mais

toujours intéressants. Seulement, la conclusion de ce contrat présente des aspects illégitimes, non

seulement au niveau de l’acquéreur-emprunteur (particulier), mais également à l’endroit du

banquier-prêteur (professionnel). Après avoir présenté les aspects problématiques de la question,

il conviendrait d’en proposer des solutions empruntées du droit français de la consommation.

§1. Position du problème

A. Au niveau de l’acquéreur –emprunteur

La pratique bancaire à Madagascar révèle ses disfonctionnements dans le domaine du

crédit immobilier. Le professionnel du crédit se trouve dans une position contractuelle

avantageuse par rapport à l’emprunteur. En effet, en l’absence de dispositions protectrices issues

du droit français de la consommation, l’emprunteur, dans l’exécution du contrat, risque d’être

confronté à divers obstacles juridiques ou financiers qui risquent de mettre en péril le projet

Page 91: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

88

d’acquisition. Et surtout risque de s’enliser dans une situation indélicate par rapport à son

créancier, car risque de se sur endetter et de perdre des éléments actifs de son patrimoine (argent,

biens immobiliers…). Ainsi le problème appréhendé, l’acquéreur qui conclu un prêt immobilier

auprès d’un banquier sera lésé dans le contrat de vente, car si le prêt n’est pas octroyé, il ne

bénéficiera pas du jeu des conditions suspensives dans la vente162

. L’acquéreur est également

perdant dans la mesure où, pour toute cause quelconque il n’arriverait pas à rembourser son

prêteur, car il sera sanctionné pécuniairement.

1. Inexistence de la vente conclue sous condition suspensive

d’obtention d’un prêt à Madagascar

Prêt et vente ne sont pas étrangers, ils tendent souvent à se compléter, puisque certaines

personnes recourent à un crédit immobilier afin de financer leur projet d’acquisition. Souvent,

l’acquéreur conclura simultanément un contrat de prêt et une promesse synallagmatique de

vente. Seulement, la pratique combinée du droit bancaire et du droit immobilier démontre qu’il

n’existe jusqu’à présent aucune clause du contrat de vente pouvant mettre en suspension

l’exécution de la vente si le prêt n’est pas octroyé par le banquier à l’acquéreur-emprunteur. Il

s’agit de la condition suspensive issue du droit comparé qui protège l’acquéreur en cas

défaillance de la condition (obtention du prêt). A l’occasion de la conclusion de la promesse

synallagmatique, l’acquéreur est tenu de verser un dépôt de garantie qui sera acquis au vendeur

en cas d’inexécution des obligations de l’acquéreur163

. Cette inexécution consistera notamment

dans le fait où l’acquéreur se désiste car n’aurait pas obtenu le prêt bancaire. Ce qui semble

dommageable pour l’acquéreur qui s’est vu essuyé sa demande de prêt, et qui, en cascade, perd

également les arrhes164

versées lors de la confection de la promesse synallagmatique de vente.

Ces faits se produisent souvent à Madagascar, l’acquéreur ne disposant d’aucun recours contre le

vendeur pour pouvoir obtenir un quelconque remboursement, encore moins contre le banquier.

162

La vente conclue sous condition suspensive d’obtention du prêt ne se pratique pas à Madagascar. 163

Article 1590 du code civil français applicable en droit malgache des obligations : « si la promesse de vendre a été faite avec des arrhes, chacun des contractants est maître de s’en départir. Celui qui les a donnés, en les perdant, et celui qui les a reçues, en restituant le double ». 164

Le cas serait différent si c’est le vendeur qui commet un faux pas : il devra verser à l’acquéreur le double de la somme versée initialement par son cocontractant.

Page 92: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

89

Toutes ces situations inconfortables à l’endroit de l’acquéreur-emprunteur sont dues

notamment à l’absence de dispositions consuméristes protectrices de cet individu placé en

position de faiblesse contractuelle165

. En effet, en droit français, dans le cadre d’une promesse de

vente conclue sous condition suspensive d’obtention d’un prêt, les arrhes versées par l’acquéreur

au vendeur doivent être restituées au promettant-acquéreur si la condition défaille (si le crédit

immobilier est refusé). A cet égard l’article L312-16 alinéa 2 du code de la consommation

française dispose : « Lorsque la condition suspensive n’est pas réalisée, toute somme versée

d’avance par l’acquéreur à l’autre partie ou pour le compte de cette dernière est immédiatement

et intégralement remboursable sans retenue, ni indemnité à quelque titre que ce soit. A compter

du quinzième jour suivant la demande de remboursement, cette somme est productive d’intérêts

au taux légal majoré de moitié ». La protection qu’offre le droit français est optimale, impérative,

puisque le vendeur y est contraint de s’y conformer. Bien que la promesse de vente soit caduque

en raison de la défaillance de la condition, l’acquéreur est libéré de tout engagement à l’égard du

vendeur. En analysant cette disposition, cette dernière, offre à l’acquéreur-emprunteur une

double protection : l’acquéreur peut d’une part, se délier de l’avant-contrat, puis d’autre part, il a

droit au remboursement du dépôt de garantie (arrhes). La protection légale a pour fondement de

protéger « gratuitement » l’acquéreur en évitant qu’il perde de l’argent s’il n’arrive pas à

acquérir le bien immobilier envisagé, en raison d’un fait qui ne lui est pas imputable166

. Quant à

la portée de cet article, il nous semble évident que cette faveur ne jouera pas au profit de

l’acquéreur-emprunteur, si ce dernier est manifestement de mauvaise foi en rendant

volontairement la condition défaillante. Selon le professeur Pierre Yves Gautier, la mauvaise foi

peut se définir comme "la conscience, chez un sujet de droit, qu’il se place par son action dans

une situation illicite, de nature à porter atteinte à une valeur sociale ou à causer un dommage à

autrui. C’est une notion psychologique, qui repose dans le for intérieur de la personne à laquelle

on l’impute, de sorte que pour en administrer la preuve, s’agissant d’un fait juridique, le

demandeur est en droit d’utiliser tous les éléments probatoires pertinents, au premier rang

desquels les indices et présomptions". Cette mauvaise foi s’interprète donc en une connaissance

165

La notion de protection du consommateur est apparue aux Etats Unis sous l'impulsion en particulier du mouvement consumériste dirigé par Ralph Nader. Il doit être souligné que la protection de la loyauté dans les contrats comme les règles de bonne foi qui traduisaient aux Etats Unis l'influence de la notion de contrat d'adhésion se traduisait par des règles concernant ces exigences qui régissaient l'ensemble des contrats commerciaux. Il en est ainsi en particulier du régime des clauses dites "odieuses" 166

Il est fait ici référence à la condition, événement futur et incertain

Page 93: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

90

par le promettant-acquéreur du caractère abusif de l’acte qu’il a commis ou qu’il s’est

délibérément abstenu de faire. Ainsi l’acquéreur est de mauvaise foi lorsque le prêt est refusé, car

il s’est sciemment abstenu de constituer une garantie au profit du banquier (telle une assurance

et/ou une sûreté réelle). En conséquence, il ne pourra demander une quelconque répétition au

vendeur.

2. Litiges occasionnés en cas de non remboursement du prêt

Le contrat de prêt met à la charge des parties deux obligations réciproques : pour le

banquier prêteur de deniers, de prêter des fonds à son client ; pour l’emprunteur, rembourser le

capital prêté ainsi que les intérêts échus. Le crédit immobilier aura pour finalité l’acquisition

d’un bien immobilier. Seulement, en cours d’exécution du contrat, il peut arriver que

l’emprunteur soit insolvable et ne puisse rembourser les mensualités restantes.

Les sources de ces litiges entre banquier et emprunteur en sont diverses. Elles peuvent

être extérieures à l’emprunteur, ou au contraire endogènes, c’est-à-dire inhérentes à la personne

de l’emprunteur. En premier lieu, les causes en sont extérieures lorsqu’elles ne proviennent pas

du fait de l’emprunteur : telle une crise financière167

et politique qui a sévi récemment l’Etat

malagasy, entraînant une baisse du pouvoir d’achat, et conduisant inéluctablement à

l’insolvabilité de la personne physique ; taux d’intérêts élevés168

voire usuraires que

167

L’hypothèse de la crise internationale des subprimes est à écarter puisqu’elle n’a pas eu d’incidences sur le marché immobilier et sur le crédit malgache. Voir « Economie de crise, une introduction à la finance du futur » de N. Roubini et S. Mihm, édition J.C Lattès. 168

Début 2012, la France perd la notation AAA, ce qui risque d’influer sur le taux d’intérêt du crédit immobilier. Mais qu’est que la notation AAA ? Et quelles sont ses incidences sur le crédit immobilier ? C’est la notation la plus élevée attribuée par une agence de notation américaine, dont la Moody’s Investors Service, la Fitch Ratings, et la Standard & Poor’s .D’une part, la notation est attribuée à des produits financiers émis par une banque, en l’occurrence lorsqu’une banque émet des obligations à l’occasion d’un prêt hypothécaire (en d’autres termes lorsqu’une banque transforme le prêt hypothécaire en obligation). Ainsi, dès les années 1980, les banques d’affaires transformèrent ces prêts consentis en obligations dites CDO ou mortgage-backed securities. D’autre part, ces notations sont attribuées aux dettes publiques des Etats. Ces notes reflètent la solvabilité des emprunteurs, et jouent un rôle crucial dans la manière dont les marchés financiers évaluent le risque. Si les obligations émises sont sûres et sécurisantes, les agences privées leur attribuent la note AAA ; dans le cas contraire, on retrouve une notation BBB ou AA+. Par rapport à un emprunt d’Etat (France), la perte de la meilleure notation augmente les taux d’intérêts de l’Etat lorsque la dette publique sera exigible. Ce qui se répercutera sur les ménages dans la mesure où si l’Etat verse des taux d’intérêts plus élevés pour se financer ; accéder à un crédit immobilier coûtera aussi plus cher. Car les taux

Page 94: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

91

l’emprunteur ne pourra rembourser au fur et à mesure des échéances ; ou la cessation des

paiements de la personne morale. En second lieu, les facteurs endogènes sont les plus

fréquemment rencontrés : perte d’emploi, invalidité … Les conséquences pécuniaires en sont très

graves, puisque emmène au surendettement du particulier-emprunteur consommateur169

et à la

disparition d’éléments d’actifs du patrimoine de celui-ci. En effet, tout banquier-prêteur diligent

aura pris une garantie en cas de non remboursement du prêt (telle une hypothèque). Le banquier,

créancier hypothécaire procèdera alors à la réalisation de l’hypothèque ; le produit de la vente

aux enchères servira alors à le désintéresser. C’est une situation dramatique pour l’emprunteur,

puisqu’il verra disparaître cet actif immobilier de son patrimoine. Par ailleurs, il est souvent

stipulé dans les contrats de prêt qu’en cas de non remboursement du capital prêté et des intérêts,

l’emprunteur requis d’une exigibilité, sera tenu de payer une indemnité à titre de sanction170

, et

éventuellement des intérêts de retard. Et parfois, comme on l’à déjà souligné dans nos précédents

paragraphes, il pourrait être même sanctionné (par le biais d’indemnité) pour avoir remboursé

par anticipation son banquier. Ces sommes exigibles sont légitimes dans la mesure où elles

préservent les droits du banquier, car perdant le remboursement des intérêts restants dus.

B. Au niveau du banquier-prêteur

Le banquier prêteur de deniers, partie au contrat semble être dans de beaux draps,

pourtant l’efficacité de son droit de préférence (en cas de réalisation d’une hypothèque grevant

l’immeuble et garantissant le remboursement du prêt) peut être remis en question. En effet, le

classement des créanciers171

sur les immeubles le place derrière les créanciers titulaires de

privilèges généraux (frais de justice), de superprivilèges (en cas de procédure collective

d’apurement du passif). Ce qui restreint l’étendue et le montant de son droit de préférence. Dans

le même ordre d’idée, en cas de conflit entre deux créanciers hypothécaires, le droit réel de celui

qui est publié en premier par ordre chronologique est priorisé172

. Ainsi si le banquier négligent ne

des obligations d’Etat sont une base de calcul essentielle pour tous les autres types d’emprunts. En conséquence, le particulier emprunteur risque de ne pas être en mesure de rembourser son emprunt. 169

Consommateur d’un prêt de consommation (en l’occurrence le crédit immobilier). 170

Environ égale à 5% du principal restant dû. 171

Voir loi 2003-041 du 03/09/04 sur les sûretés, et loi 2003-042 du 03/09/04 en son article 195 sur les PCAP. 172

« prior tempore, potior jure ».

Page 95: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

92

procède pas à temps aux formalités de publicité, alors qu’un autre créancier hypothécaire y a

inscrit son droit réel avant lui, son droit de préférence est paralysé.

§2. Perspectives proposées empruntées au droit français

A. Vers une protection adéquate de l’acquéreur-emprunteur

Pour mieux protéger l’acquéreur-emprunteur lorsqu’il conclut simultanément un prêt et

une promesse de vente, les banquiers et les notaires malgaches devraient insérer, dans les

contrats concernés, le jeu des clauses suspensives, afin de libérer l’acquéreur, et surtout, afin

qu’il obtienne remboursement des sommes avancées au vendeur, en cas de non obtention du

crédit immobilier. Ces clauses doivent être écrites et doivent expressément prévoir qu’en cas de

non obtention du prêt, les sommes avancées par l’acquéreur au vendeur doivent être restituées.

Ce qui conduirait à une nouvelle rédaction de l’avant-contrat et de ses principales clauses

puisque la clause relative aux arrhes (faisant référence à l’article 1590 du code civil français) doit

ne plus avoir sa raison d’être. Seulement, le vendeur risque de ne pas être rassuré car

n’obtiendrait pas la garantie de l’exécution de l’obligation du promettant-acquéreur, ni la

réparation pécuniaire de l’inexécution de la promesse d’acheter. Cette méfiance se traduirait par

la non concrétisation de la promesse synallagmatique de vente, car le promettant vendeur ne

signerait pas l’avant-contrat.

Par ailleurs, l’établissement d’une commission ou d’une association de consommateurs173

(relative au crédit immobilier) serait la bienvenue, afin de mieux protéger les droits du

consommateur et afin de mieux rétablir l’équilibre contractuel. Cette association mettrait en

exergue les risques de difficultés de paiement des emprunteurs modestes ayant souscrit de tels

prêts immobiliers. Elle informerait de l’impact d’une variation du taux d’intérêt, de l’étendue des

obligations que l’emprunteur a souscrit, notamment les conditions d’offre et les modalités de

remboursement du capital ainsi que le paiement des intérêts. Animée d’un esprit de solidarité

entre consommateurs, elle pourrait proposer les bons tuyaux (comparaison des taux d’intérêts

173

En France, l’association UFC Que choisir œuvre même dans le domaine du crédit immobilier.

Page 96: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

93

des banques, et proposition de celles qui offrent le taux le plus intéressant, avertissement des

pratiques abusives des banques). Ainsi constituées, ces associations pourront demander devant le

tribunal civil que ces clauses abusives174

du contrat de prêt conférant un avantage excessif au

banquier soient réputées non écrites. Seulement, la garantie de ces droits reste utopique si

l’exercice de ces derniers ne sont pas encadrés par des textes spécifiques (loi, règlements ou code

de la consommation). La première action serait donc de légiférer sur la protection des

consommateurs en général, puis de l’étendre aux prêts immobiliers.

Par rapport à la capacité financière de l’emprunteur à rembourser, les institutions

financières et les établissements bancaires devraient faciliter l’accès au crédit mais surtout en

faciliter le remboursement, en plus de l’aide du gouvernement. A Madagascar, on proposerait

soit un emprunt étalé sur de très longues années, soit un emprunt avec un taux d’intérêt très

faible pour ceux qui n’ont pas les moyens (à condition de le prouver : par exemple, attestation de

chômage, jugement de divorce, carte de retraite, certificat de célibat …).D’ailleurs en France, il a

été institué un prêt spécifique avec un taux d’intérêt à 0%175

pour l’acquisition d’un bien

immobilier. Il s’agit de prêts aidés par l’Etat, des prêts conventionnés privés ou des prêts

bancaires. Le remboursement est plus aisé, car tient compte des ressources, de la zone, de la

situation familiale (célibataire, retraité, famille nombreuse …) de l’emprunteur.

B. Vers une amélioration du rang du créancier hypothécaire/ banquier-

prêteur

Le sort du créancier hypothécaire est amélioré en droit continental par rapport aux autres

créanciers de privilèges, car il est institué à son profit un privilège dit de « prêteur de

deniers »176

. Ce privilège existe au profit du banquier qui a prêté à l’acquéreur des fonds, afin

174

Les clauses abusives sont : « les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». Dans la pratique, elles concernent souvent trois catégories de clauses relatives à :

- Frais divers - Variation du taux d’intérêt - Compétence territoriale des tribunaux

175 « Le prêt à taux zéro en 2011 », Top’actuel, droit de l’immobilier 2011/2012, édition Hachette, page 24.

176 Voir article 2374 2°) du code civil français

Page 97: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

94

que ce dernier puisse acquérir l’immeuble ; pourtant son effet est théoriquement relatif puisqu’il

est un privilège spécial. Or en matière de classement des créanciers dans le cadre de la vente

d’un immeuble, les privilèges généraux priment les privilèges spéciaux, sauf si l’on applique

exceptionnellement la règle de la subsidiarité177

. Cette dernière permet aux titulaires de

privilèges spéciaux d’écarter le rang prioritaire des titulaires de privilèges généraux.

Après avoir diagnostiqué les problèmes que pose la vente immobilière par rapport aux

intermédiaires professionnels, et aux parties à un contrat de prêt immobilier, il conviendrait dans

un second temps, d’appréhender ces difficultés sous un autre angle au cœur de la vente elle-

même.

Chapitre II. Appréhension des difficultés de l’opération au niveau du contrat de

vente

Le contrat de vente soulève à lui seul des difficultés, qui peuvent remettre en cause

l’exécution de la vente, en termes d’efficacité, d’effectivité et de sécurité juridique. Ces entraves

peuvent être d’ordre général ou d’ordre particulier. Elles peuvent être qualifiées de « générales »,

lorsqu’elles touchent globalement la vente immobilière, tant au niveau de la formation, tant au

niveau de l’exécution du contrat. Elles sont cependant qualifiées de « particulières » lorsqu’elles

touchent un élément particulier de la vente, à un stade précis de l’opération.

Les difficultés générales rencontrées lors d’une vente sont propres à notre droit positif ;

or dans les systèmes juridiques avancés, ces obstacles ont été déjà levés. Il s’agit principalement

à Madagascar, de l’absence de cadre légal réglementant précisément et spécifiquement la vente

immobilière. Mais de part et d’autre, du mal incurable affectant gravement la sécurité juridique

des transactions immobilières et l’équilibre contractuel : les « double ventes ».

177

Voir article 2376 du code civil (cas particulier aux procédures collectives)

Page 98: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

95

Enfin, les difficultés particulières peuvent être relatives à la détermination du prix du bien

immobilier, ou encore peuvent concerner la fiscalité de la vente, en l’occurrence au niveau du

recouvrement des droits et taxes. Par souci de cohésion, nous aborderons dans un premier temps,

l’appréhension des difficultés d’ordre général (Section 1ère

), puis dans un second temps, celle des

difficultés particulières (Section 2ème

).

Section 1ère. Les difficultés d’ordre général

§1. L’absence de cadre légal règlementant la vente immobilière

Un handicap majeur frappe le contrat de vente immobilière à Madagascar : celui de

l’absence de textes spécifiques à la vente d’immeuble. On se demande éperdument pourquoi le

législateur à l’aube de l’indépendance et jusqu’à l’heure actuelle des investissements, n’a-t-il pas

légiférer sur les transactions immobilières ? Pourtant l’immobilier178

constitue pour les

malgaches une source de richesse179

; et pour l’Etat un poumon économique puisque les

transactions immobilières génèrent des recettes fiscales pouvant être comptabilisées au budget du

pays. Faut t-il rappeler qu’a travers une vente immobilière, les droits et taxes principaux à

liquider au profit de l’Etat sont les droits d’enregistrement, l’impôt sur la plus value immobilière,

les droits de mutation entre vifs, et parfois certains droits aux services topographiques. En

France, les transactions immobilières des sociétés commerciales ou civiles sont taxées de la Taxe

sur la Valeur Ajoutée (TVA), mais elle n’existe pas à Madagascar, car le législateur voulait

promouvoir l’entreprenariat par voie de défiscalisation des entreprises.

Force est de constater, qu’à travers l’évolution législative du droit civil malgache,

d’autres contrats spéciaux ont eu droit à une législation taillée sur mesure : les baux, les contrats

de crédit-bail, les sûretés… Cette absence de législation ou de codification actuelle est peut être

due à la longue période de transition politique actuelle, qui empêche rationnellement les

parlementaires de légiférer en droit privé. Car ceux-ci préfèrent se focaliser sur les textes de droit

178

Pris au sens de la terre 179

Selon un artiste afro-américain d’origine africaine : « la terre est l’essence même de toute richesse dans le monde, car c’est celle qui augmentera toujours de valeur ».

Page 99: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

96

public … Cela n’est pas sans incidence car cette lacune pèse sur l’ordonnancement juridique. Les

parties ne sauront être protégées par la loi, car elles ne sauront pas à quoi elles engagent, ni

l’étendue de leurs engagements contractuels. Dans le même ordre d’idée, la pratique risque de

contourner « ce qui doit être » en imposant des pratiques incohérentes, et usages sans bases

juridiques. En effet, la pratique immobilière démontre qu’en l’absence de dispositions propres à

la vente immobilière, certaines administrations (en l’occurrence l’administration des services de

la conservation foncière et des domaines) tendent à instaurer une pratique, qui est la leur. Pour

illustrer le propos, le code des investissements à Madagascar de 2007180

prévoit par incidence, au

sujet de la capacité des personnes morales à acquérir un bien immeuble, que ces sociétés

contrôlées par des étrangers doivent être de droit malgache. Telle est la base théorique d’une

disposition éparse relative à la vente ; or, une pratique incohérente tend à imposer, que pour

pouvoir acquérir, ces sociétés dont la gestion est contrôlée par des étrangers doit en sus, avoir

une majorité d’associés malgaches. On relève une certaine incohérence des dires, car les sociétés

d’investissement de droit malgache (dont le siège social est à Madagascar) dirigées par des

étrangers comprennent que peu d’actionnaires malgaches ! Certes, l’administration œuvre pour

une politique visant à restreindre la disposition de propriétés aux étrangers, mais l’incohérence

des textes et de la pratique semble nocive. D’où l’intérêt d’avoir une législation cohérente,

dédiée à la vente d’immeuble à Madagascar.

La loi joue un rôle crucial au sein de l’ordonnancement juridique. Stricto sensu, elle est la

règle de droit votée par le parlement, mais suivant une définition assez large, elle est une

disposition normative dont l’application est garantie par la contrainte étatique. Parallèlement, un

code est un recueil de textes écrits (lois, règlements) régissant une matière spécifique. Ainsi

législation ou codification présente un intérêt capital, puisqu’elle règle les rapports entre

citoyens. Désormais, la loi enserre l’individu dans un système de règlementation. Une loi

normalement constituée doit être à la hauteur de son prestige en présentant : une élégance de son

style appréciée par la doctrine, la jurisprudence, et les autres professionnels du droit (en d’autres

termes les praticiens du droit) ; une audace de la pensée porteuse des spécificités des réalités

historiques, sociales et économiques ; elle doit convaincre de sa perfection technique et du

progrès qu’elle apporte dans le droit positif. La loi peut reposer sur une conception du droit

180

Loi 2007-036 précitée

Page 100: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

97

réformateur de la société, unificateur de la nation et facteur d’égalité (la loi s’applique

indifféremment à tous les citoyens). En effet, elle supprime les us et coutumes181

afin que les

citoyens soient soumis à une seule loi étatique. En outre, une loi régulièrement publiée apparaît

comme un facteur de transparence politique et économique dans la vie des citoyens. Cela se

concrétisera par la publication dans un journal officiel facile à se procurer, par voie d’affichage

dans les services ou administrations concernées, ou encore par voie de médias. Ainsi mise à la

connaissance des citoyens, nul n’est censé ignorer la loi. En définitive, la législation, de par ses

principes et fondements, illustre la recherche de sécurité juridique qui anime les acteurs

économiques dans les échanges nationaux, voire même internationaux.

Tel est le rôle de la loi dans la vie des citoyens. Pourtant, en droit malgache, en l’absence

de loi spécifique régissant la vente immobilière, comment arriverait-on à concilier, protéger les

intérêts des parties contractantes ?

Bien que notre droit positif n’ait pour l’instant de législation propre à la vente

d’immeuble, le droit immobilier malgache puise son fondement juridique à travers deux sources :

D’une part, à travers des dispositions législatives ou réglementaires malgaches éparses.

En effet, la vente d’immeuble se réfère pour chaque question de droit particulière à un texte

particulier. Ainsi nous citerons de manière didactique les lois éparses :

- En matière de formation et d’exécution des obligations, on se réfère à la loi sur la Théorie

Générale des Obligations (loi n°66.003 du 02/07/66).

- En matière de publicité foncière : + Loi relative à l’immatriculation (loi n°60.146 du

03/10/60),

+ Loi portant statut des terres à Madagascar (loi

n°2005-019 du 17/10/05),

+ Loi fixant le régime juridique de la propriété

privée non titrée (loi n°2006.031 du 24/11/06),

181

Au sens de « traditions »

Page 101: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

98

+ Loi relative au domaine privé de l’Etat (loi n°

2008.014 du 23/07/08)

- En matière d’urbanisme : + Loi n° 60.167 du 03/10/60 relative à

l’urbanisme

+ Loi n° 92.033 du 17/07/92 modifiant la loi

n°60.167

+ Code malgache de la santé publique

- En matière de capacité des personnes physiques :

+ Loi sur les successions notamment sur la question

de l’indivision (loi n°68.012 du 04/07/68) ;

+ Loi sur les régimes matrimoniaux (loi n°

2007.022 du 20/08/07) ;

+ Loi sur les procédures collectives d’apurement du

passif (loi n°2003.042 du 03/09/04)

- En matière de capacité des personnes morales :

+ Loi sur les sociétés commerciales (loi n° 2003-

036 du 30/01/04),

+ Code des investissements à Madagascar (loi n°

2007.036 du 14/01/08),

+ Loi sur les associations (loi n° 60.133 du

03/10/60).

- En matière de forme : référence à loi notariale (loi n° 2007.026 du 12/12/07)

- En matière fiscale : référence au Code Général des Impôts (CGI suivant loi de finance

2011) ; par rapport aux frais de la vente : arrêté n° 30.286/2011 fixant le tarif des notaires

à Madagascar.

D’autre part, on s’inspire ou plutôt on emprunte des dispositions issues du code civil français.

Ainsi, pour illustrer le propos, dans une promesse de vente, on applique le régime du dépôt de

garantie, plus précisément des arrhes, prévu par l’article 1590 dudit code. Ou encore, pour

survoler les effets de la vente, on emprunte généralement le mécanisme de garantie des vices

cachés issus des articles 1641 et suivants.

Page 102: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

99

Ce mécanisme d’emprunt à des dispositions éparses est sujet à critiques. En effet, du point

de vue de la forme, certaines d’entre elles peuvent paraître incohérentes ; et pour l’harmonie de

tout cet arsenal de dispositions différentes, on devrait procéder à l’unification de ces règles en un

seul texte de loi. De plus, la référence à d’autres textes épars de notre droit positif s’avère

insuffisant : le champ d’application de la vente immobilière est si vaste qu’il faudra se référer

sans cesse à une multitude de textes, parfois inexistants. Pour illustration, il n’existe pas en droit

malgache des dispositions consuméristes protectrices de l’acquéreur (tel le délai de rétractation

par rapport à une offre de vente, ou encore le mécanisme de restitution des sommes avancées par

l’acquéreur en cas de non obtention d’un prêt immobilier). Dans le même courant d’idée, le

système d’emprunt des règles issues des codes français cadre parfois mal avec les réalités

historiques, sociales et économiques malgaches. Tel est le cas de la clause de réserve de

propriété182

(CRP) prévue par le code de commerce français183

. Cette disposition ne présente

aucune originalité particulière dans notre droit immobilier, puisque peu de malgaches recourent

au crédit immobilier afin de financer leur acquisition. Contrairement aux français (véritable

société de consommation, friands de crédit à la consommation), les malgaches, eux, préfèrent

payer au comptant, d’où l’inutilité d’une CRP.

Force est d’observer que, si le droit malgache de la vente immobilière puise essentiellement

sa source dans les lois auxiliaires éparses ou dans des lois de grands systèmes juridiques

étrangers, la référence éventuelle à la jurisprudence malgache s’avère insuffisante pour former

un droit uniforme. La raison principale en est que notre jurisprudence est trop jeune ; les

décisions relatives à un litige immobilier sont peu nombreuses mais également peu publiées.

En définitive, l’absence de loi autonome relative à la vente immobilière à Madagascar est une

grande lacune juridique. Les conséquences en sont d’autant graves, puisqu’en l’absence de cadre

juridique spécifique à cette matière, les parties au contrat ne savent pas clairement quelle est la

portée de leurs droits et obligations réciproques. L’acte notarié ne révèle pas avec précision

toutes les dispositions législatives relatives à la vente envisagée. Ainsi, les parties risquent de ne

pas respecter leurs engagements, en arguant en amont, que telle ou telle obligation n’a pas été

prévue au contrat, ou tout ou plus qu’elle ne relève pas de leur volonté. Puis en aval, que

182

Clause d’un contrat de vente ayant pour effet de retarder le transfert de propriété de la chose, tant que le prix n’ait pas été intégralement payé. 183

Article L621-122 à L621-124

Page 103: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

100

l’inexécution n’est pas sanctionnée, puisqu’aucune loi autonome relative à la vente n’existe sur

la scène juridique interne. Prenons le cas d’une vente dont l’acquéreur est débiteur du prix. Si

celui-ci décède, ses héritiers contesteront le paiement du prix puisque tel cas particulier n’est

souvent pas prévu dans un contrat de vente malgache. Ces ayant-causes rechigneront également

à payer la dette de leur auteur, car aucun texte malgache spécifique à la vente ne prévoit

expressément le paiement du passif de l’acquéreur décédé par ses héritiers. On ne pourra pas

donner tort au rédacteur du contrat puisque ces dispositions n’existent pas. Mais au moins, aurait

t-il eu la diligence d’exposer des éléments de solution en se référant aux lois relatives aux

successions ? Par ailleurs, l’absence de législation entraînera une position de domination de la

partie la plus forte, affectant ainsi l’équilibre contractuel de la vente. Il s’agira souvent d’un

professionnel de l’immobilier (un marchand de bien, notamment constitué sous la forme d’une

société civile immobilière), face à un acquéreur non professionnel (particulier ou simple

consommateur).

Les seules solutions envisageables pour combler cette lacune juridique seraient d’encourager

les acteurs juridiques (agents immobiliers, notaires, géomètres), ainsi que les agents

économiques privés locaux (établissement de crédit, investisseurs) à se concerter avec le

gouvernement (notamment le ministère de la justice, le ministère de l’aménagement du territoire

et de la décentralisation) afin de légiférer sur une loi propre à la vente immobilière à

Madagascar. En outre, la coopération internationale serait également la bienvenue. En effet, la

coopération française à Madagascar qui œuvre pour l’Etat de droit travaillerait en étroite

collaboration avec le Ministère de la justice afin de pouvoir légiférer sur de nouvelles lois de

droit privé.

§2. Les doubles ventes ou vente successive d’un même bien : un désastre

juridique

La vente immobilière se concrétise par l’échange de consentements des parties. Il arrive

parfois qu’un vendeur d’un bien immobilier donné vende le bien immobilier une première fois à

un premier acquéreur, puis dans un proche instant, le vend une deuxième fois à un second

Page 104: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

101

acquéreur. Le but étant, pour certains vendeurs peu scrupuleux, de tromper par voie

d’escroquerie le premier acquéreur, et de percevoir à deux reprises, deux prix résultant de la

vente du même immeuble. Ce qui engendre une source de conflit palpable entre deux acquéreurs

successifs du même bien immobilier. Parfois, l’histoire se corse encore plus, puisqu’un éventuel

sous-acquéreur du second acquéreur peut entrer sur la scène du théâtre dramatique des multiples

ventes.

La sécurité juridique des contractants au contrat de vente peut ainsi donc être remise en

cause, puisque vis-à-vis des tiers, il y aura une confusion sur le titre, la qualité des acquéreurs

(les tiers se questionneront sur qui est le véritable propriétaire du bien ?) ; mais surtout, au niveau

de l’acquéreur victime (souvent le premier acquéreur). Ce dernier subira un éternel préjudice, car

étant évincé et ayant indûment perdu l’immeuble (en plus des fonds ayant servi à son

acquisition).

L’acquéreur évincé, victime de cette pratique peu orthodoxe, aura pour reflexe naturel

d’intenter une action en justice contre son vendeur dans le but d’obtenir la résolution de vente,

ainsi que des dommages et intérêts. Certaines personnes profondément affectées par un tel

comportement du vendeur intenteront une action pénale en se constituant partie civile, afin

d’obtenir dans un même temps, la condamnation pénale du vendeur, et l’obtention effective de

dommages et intérêts.

Nous appréhenderons ce mécanisme « pervers » de la double vente, d’une part sous son

aspect purement théorique, puis d’autre part sous son aspect pratique. Il faut remarquer qu’il sera

utile dans ce paragraphe de mettre en rapport cette notion avec les règles traditionnelles de la

publicité foncière et de l’opposabilité aux tiers

A. Approche théorique

Préalablement, il convient de scinder deux situations distinctes : soit l’acte de vente ait

fait l’objet d’une publicité foncière, soit il ne l’a pas fait. Dans la première hypothèse, si la

publication du droit réel immobilier a été diligentée (pour l’une ou les deux ventes successives),

Page 105: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

102

la préférence est donnée, selon la locution latine « prior tempore, potior jure », à l’acquéreur

ayant effectué en premier la formalité de publicité. Peu importe la date de la conclusion du

contrat de vente, l’ordre d’inscription dans les registres fonciers détermine ainsi l’ordre de

préférence. C’est d’ailleurs une conséquence de l’effet de la publicité. Ce principe de droit

fondamental n’est cependant pas expressément relaté par la législation malgache184

; il est donc

fait référence aux dispositions de droit français185

et à la jurisprudence française. Il en résulte de

la règle précédente que le second acquéreur peut évincer le premier acquéreur avec une facilité

déconcertante, en publiant chronologiquement en premier son droit réel immobilier.

En poussant plus loin l’analyse de la problématique, on pourrait penser que la deuxième

vente au profit du second acquéreur serait entachée de nullité relative, puisque le vendeur n’étant

plus à l’occasion de la première vente juridiquement propriétaire de l’immeuble (lorsque les

parties se sont convenues sur la chose et sur le prix, et que le transfert de propriété ait été opéré).

Et qu’il y aurait même vente de la chose d’autrui, puisque le vendeur a vendu à une tierce

personne une chose qui n’est plus théoriquement la sienne. L’article 1599 affirme d’ailleurs a

sujet que « la vente de la chose d’autrui est nulle : elle peut donner lieu à des dommages-intérêts

lorsque l’acheteur a ignoré que la chose fût à autrui » ; peu importe donc que l’acheteur soit de

bonne ou de mauvaise foi. Pourtant, la règle de l’antériorité de la publication l’emporte, et de ce

fait, couvre, purge le vice de nullité qui entache la seconde vente. Ce qui semble à notre avis

critiquable, puisque le second acquéreur, de connivence avec le vendeur, s’empressera de publier

au prix de la course (au plus vite) son droit réel immobilier, avant celui du premier acquéreur.

C’est le moyen, peu scrupuleux, afin d’éliminer le premier acquéreur.

Heureusement, la jurisprudence française a établi des pare-feux en sanctionnant les abus,

et par la même occasion, à minimisé l’application de la règle de l’inopposabilité des actes non

publiés aux tiers, dans cette situation particulière. Initialement, la Cour de cassation française

qualifiait cette entente frauduleuse entre le vendeur et le second acquéreur de « fraude », puis

dans un second temps, de « mauvaise foi »186

. Est ainsi de mauvaise foi, le second acquéreur qui

a fait publier son titre en premier, alors qu’il connaissait sciemment l’existence de la première

184

La loi 60.146 et la loi 2005.019 (précitées) prévoient seulement que tout droit réel doit être publié pour être opposable aux tiers. 185

Décret n° 55-22 du 04 janvier 1955 article 30.1 186

Civ 3ème

, 22 mars 1968, D.1968, jurisclasseur 412, observations J. Mazeaud

Page 106: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

103

vente. Cette connaissance résulte souvent même de la communication par le vendeur de

l’existence de cette première vente, ou encore par d’autres éléments (contrat de vente enregistré

au service des enregistrements, communication par des tiers…). Comme corollaire, cette seconde

vente n’est pas opposable au premier acquéreur victime de la double vente. Par contre, il n’y a

point de mauvaise foi du second acquéreur, lorsque ce dernier ignorait l’existence de la première

vente lors de la conclusion du contrat, et ayant procédé aux formalités de publicité après en être

informé. Mais qu’en est-il du sous-acquéreur ? Cas particulier, où le second acquéreur, au

courant de l’existence de la première vente, vend à son tour à un tiers sous acquéreur. La

jurisprudence française est clémente vis-à-vis de ce dernier, s’il est de bonne foi, c’est-à-dire s’il

n’a pas eu connaissance de la première vente. Ainsi, on peut donc affirmer que la mauvaise foi

du second acquéreur ne se répercute pas ipso facto sur la tête du sous-acquéreur. La même

solution de principe s’appliquerait également si le sous-acquéreur venait encore à vendre

immédiatement le bien à une autre personne. En effet, il arrive parfois que certains « mpanera » à

la recherche de profit et de spéculation se vendent entre eux des immeubles187

. Appliqué à notre

cas de double-vente, l’immeuble, provenant de la vente initiale risque de se retrouver entre les

mains d’un énième sous-acquéreur… En définitive, pour pouvoir obtenir réparation du préjudice,

il suffira pour l’acquéreur évincé d’apporter une mauvaise foi du second acquéreur. Mais

apparemment, il n’est nullement question de résolution des actes de vente passés.

Enfin, dans une seconde hypothèse, n’appelant que quelques observations, l’acte n’ayant

pas fait l’objet de publicité foncière. La solution du conflit entre deux acquéreurs du même bien

immeuble se résout en faveur de la date du contrat de vente conclu le plus antérieurement dans le

temps. La solution nous semble logique puisque qu’aucun droit réel immobilier n’a été publié et

qu’on ne fait pas application de la règle « celui qui a inscrit son droit en premier l’emporte ».

Seulement, force est de constater que par rapport à la date de conclusion du contrat, ce dernier

n’acquiert date certaine que s’il a été enregistré188

. Ce qui signifierait que si l’acte de vente n’a

pas été tout simplement enregistré, ou s’il n’a pas été enregistré dans les délais légaux (deux

mois à compter de la signature du contrat de vente)189

, il ne peut déployer ses effets juridiques.

On ne pourrait donc pas dans ce cas appliquer la règle suivant laquelle la préférence est donnée

187

Ces spéculations répétées affectent également la valeur vénale de l’immeuble. 188

En outre, l’enregistrement confère à l’acte (authentique) sa force exécutoire. 189

Article 02.01.11 du CGI suivant loi de finances 2011

Page 107: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

104

à la date du contrat conclu le plus antérieurement. Cela se justifie, puisque, supposons une

première vente conclue le 15 janvier mais non enregistrée ; par ailleurs supposons une deuxième

vente conclue le 17 janvier mais enregistrée : préférence est donnée au deuxième contrat de

vente (puisqu’ayant été enregistré et ayant acquis date certaine).

B. Approche pratique contentieuse à Madagascar

La pratique du contentieux immobilier malgache envisage à la fois l’aspect civil et pénal

de la double vente ou vente successive d’un même bien.

Dans un premier temps, la Cour Suprême de Madagascar frappait la deuxième vente de la

nullité relative. Ainsi dans une affaire contentieuse, un vendeur (V) vendait une première fois

l’immeuble à un premier acquéreur (A1), mais vendait en même temps une seconde fois à un

second acquéreur (A2). Ensuite, ce dernier (A2) aliénait à un autre tiers acquéreur (A3).

L’acquéreur A1 évincé (car n’ayant pas publié son droit réel immobilier avant celui de A2),

demandait l’annulation de la deuxième vente conclue entre V et A2. Seulement, la haute

juridiction alléguait qu’A1 est tiers par rapport à la deuxième vente ; et qu’indubitablement, en

vertu de l’effet relatif du contrat prévu par la loi sur la théorie générale des obligations, le contrat

litigieux ne pouvait être annulé. La situation d’A1 s’aggravait encore plus, puisqu’en l’espèce A2

vendait l’immeuble litigieux à A3 (un tiers détenteur de l’autorité publique). Ce dernier arguait

de sa bonne foi, car n’étant pas au courant de toutes les opérations antérieures. Par la même

occasion, A3 demandait au juge des référés l’expulsion d’A1. Le juge faisait droit à sa demande

au détriment du véritable propriétaire (A1). Cette solution traditionnelle fut très critiquée car

réalisait une sorte d’expropriation pour cause d’intérêt privé, et méconnaissait le droit de

propriété de l’acquéreur initial.

Heureusement, la jurisprudence récente malgache190

a dépassé cette solution incohérente

et illégitime, en posant deux principes fondamentaux :

190

Arrêt n° 75 de la Cour Suprême de Madagascar : affaire Raveloson Laurent contre Rakotovao et consorts.

Page 108: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

105

D’une part, lorsqu’il n’y a pas de textes régissant la matière191

, il est fait application du

code civil français (à la condition qu’il n’y ait pas de contradiction avec le droit malgache). En

effet, la cour suprême se base en matière de vente, sur l’interdiction de la vente de la chose

d’autrui, et, frappe cet acte de nullité absolue. Par conséquent, toute personne intéressée peut

intenter cette action en nullité. Ainsi, en reprenant le cas précédent, A1 peut demander la nullité

de la deuxième vente conclue entre V et A2. En aval, tous les actes postérieurs seront annulés

(contrat de vente entre A2 et A3), même si ces autres acquéreurs sont de bonne foi. Cette

nouvelle solution ne peut être qu’appréciée, puisqu’elle est conservatrice des droits de

l’acquéreur évincé, victime de la double vente.

Par ailleurs, la vente entre le vendeur et le deuxième acquéreur est sanctionnée

pénalement par le délit de Stellionat192

, proche de l’escroquerie. L’arrêt entreprend un lien entre

le droit civil et le droit pénal, car invoque la maxime « fraus omnia corrumpit » (la fraude

corrompt tout), ce qui, par voie de conséquence annulera les autres contrats conclus en cascade

(contrat avec A3). Force est de remarquer que l’action en nullité est prescrite au bout d’un délai

de 10 ans193

.

§3. Litiges occasionnés par la vente à réméré

En droit français, le réméré est une faculté de rachat stipulée dans un contrat de vente

permettant au vendeur de reprendre la chose vendue moyennant le remboursement du prix et de

certains frais dans un certain délai. Souvent, cette faculté de rachat est limitée à un délai de cinq

ans. Le terme est la volonté des parties, et ne peut être ni prolongé, ni révisé par le juge. Quand à

l’obligation principale du vendeur, il doit rembourser non seulement le prix principal, mais

encore les frais et coûts accessoires de la vente, les réparations nécessaires, et celles qui ont

augmenté la valeur de l’immeuble jusqu'à concurrence de cette plus value. Il ne peut donc entrer

en possession qu’après avoir exécuter ces obligations pécuniaires. Par ailleurs, lorsque le

191

La LTGO n’expose pas de points de droit spécifiques et détaillés, car se contente d’énoncer des principes généraux du droit des obligations. 192

Le stellionat est puni de 2 ans d’emprisonnement 193

Article 122 de la loi 60.146 précitée

Page 109: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

106

vendeur use de sa faculté de rachat (pour redevenir propriétaire), il reprend l’immeuble exempt

de toute charge (servitude active ou passive), et de toute sûreté (hypothèque) dont l’acquéreur

l’aurait grevé. Cependant une condition de forme est de rigueur : celle de la publicité au bureau

des hypothèques de la vente avec faculté de rachat avant la publication desdites charges et

hypothèque. Enfin, si un bail a été contracté auparavant par l’acquéreur, ce bail est opposable au

vendeur.

Seulement, en droit foncier malgache, on appréhende autrement cette notion, car on use

de cette faculté de rachat offerte à un débiteur (propriétaire d’un immeuble et également

vendeur) dans le cadre de sûreté réelle immobilière: un créancier détient une créance de somme

d’argent contre un débiteur, et ce dernier met en sûreté un immeuble pour garantir le paiement de

sa dette.

Préalablement, se pose d’abord un problème de qualification : s’agit t-il d’une vente à

réméré ou d’un contrat de fehivava ? Pour distinguer les deux contrats, d’une part, il faudrait

analyser leurs effets juridiques. En effet, dans le contrat de fehivava, le créancier fehivaviste

s’établit sur l’immeuble (ce qui engendre une dépossession matérielle) jusqu’au remboursement,

en usant durant ce laps de temps des fruits produits par le terrain à vocation rizicole par

exemple. La perception de ces produits constitue les intérêts ; il ne restera donc qu’à payer le

capital à l’échéance. Or, on ne retrouve pas ce mécanisme dans la vente à réméré. D’autre part, la

jurisprudence malgache a le mérite de différencier les deux contrats en appliquant le principe

fondamental de la « différence de l’équivalence des prestations ». Pour une illustration carrée : si

la valeur vénale de l’immeuble vaut 100.000.000 ariary et que la créance vaut 30.000.000 ariary ;

le tribunal qualifie le contrat de fehivava. Par contre, si la valeur de la créance se rapproche de la

valeur du terrain, il s’agit d’une vente à réméré.

En outre, dans la pratique, les parties stipulent par le biais de l’autonomie de la volonté,

qu’en cas de non remboursement à l’échéance, la vente devient parfaite, et le créancier devient

propriétaire de l’immeuble. Or, la dure réalité démontre de tristes évènements : bien que le

débiteur soit solvable et soit prêt à rembourser sa dette à l’échéance prévue, le créancier de

mauvaise foi s’absente volontairement à cette échéance. Par conséquent, le débiteur n’ayant pas

pu s’honorer de sa dette à l’échéance, et n’ayant pas pu faire de rachat. En définitive, le

créancier, par ces différents artifices utilisés à mauvais escient, devient illégitimement

Page 110: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

107

propriétaire. Ce qui importe pour le créancier, c’est de s’attribuer l’immeuble en pleine propriété

par voie de justice privée, et non le recouvrement de sa créance. Ce créancier peu scrupuleux

procède alors rapidement à la publication de son droit réel immobilier. Au vu des tiers, il

demeure ainsi le véritable propriétaire. Une solution empruntée au droit français propose au

débiteur lésé d’intenter une action pour rescision prévue par l’article 1674 du code civil. Pourtant

elle demeure peu effective, car le droit malgache (article 39 de la loi 60.146) prévoit que les

actions en nullité pour vice de forme, ou lésion de plus du un quart sont irrecevables pour les

immeubles immatriculés. Ainsi, la seule solution viable en pratique a été proposée par la

jurisprudence malgache qui préconise que le juge pourra proroger la date d’échéance (c'est-à-dire

octroyer des délais de grâce194

) en cas de mauvaise foi ou fraude du créancier. Celle solution

prône la justice, mais déroge néanmoins au droit français qui interdit toute prorogation du terme.

En effet, l’article 1661 du code civil énonce expressément que le terme fixé est de rigueur et ne

peut être prolongé par le juge. Mais nous préférons légitimer la solution dégagée par la haute

juridiction, car dans notre pays, ces pratiques tendent à priver inconstitutionnellement le débiteur

de son droit fondamental qu’est la propriété195

. On parle d’ailleurs en quelque sorte

d’expropriation pour cause d’intérêt privé. Somme toute, par cette prorogation de l’échéance, le

débiteur sera effectivement mieux protégé ; par la même occasion, il pourra payer sa dette et

exercer également sa faculté de rachat.

Section 2ème. Les difficultés particulières

§1. La question financière de l’évaluation du prix d’un immeuble

Le prix d’un bien immobilier dans le cadre de sa vente, est un élément clef, déterminant

pour un candidat acquéreur. Si le prix est surévalué, le candidat risque de se rétracter et de

194

Article 52 de la LTGO : les juges peuvent accorder exceptionnellement des délais de grâce au débiteur dans la limite d’un an. En droit français, ils peuvent être accordés dans la limite de deux ans (article 1244 du code civil). Le débiteur doit être de bonne foi et doit justifier de circonstances spécifiques. En conséquence, si le délai de grâce est accordé par le juge civil, ou par le juge des référés, le débiteur pourra payer au-delà de l’échéance. En d’autres termes, l’exigibilité de l’obligation sera retardée. 195

DUDH article 17, Convention européenne des droits de l’homme ; article Ier du protocole additionnel n°1 ; article 34 de la Constitution révisée de 2007

Page 111: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

108

« chercher ailleurs », ou au contraire, s’il est sous évalué, il engendrerait des pénalités d’ordre

fiscal à l’égard de l’une des parties. En effet, le prix peut être parfois gonflé afin qu’un

professionnel (en l’occurrence une Société Civile Immobilière ou une société commerciale)

puisse réaliser une marge bénéficiaire. Mais c’est là que le bât blesse, puisqu’ en France, une

énorme plus value réalisée par la différence entre le prix de revient (achat de l’actif immobilier à

un prix intéressant) et le prix de revente ou de cession (vente à un prix plus élevé), est fortement

taxée par l’impôt sur la plus value immobilière (IPVI). Heureusement qu’à Madagascar, dans le

cadre de la promotion de l’entreprenariat, toute société est exonérée de l’IPVI. Ce champ

d’application de cette disposition pratique est large, puisqu’elle touche les sociétés ayant leur

siège social à Madagascar, sans préciser que ladite personne morale soit contrôlée par des

étrangers ou non. En outre, cette règle s’applique non seulement aux sociétés commerciales, mais

concerne également les sociétés civiles (SCI). Suivant une logique tangible, sont exclues de ce

champ d’application les sociétés en formation, les sociétés de participation et les sociétés créées

de fait, puisqu’elles sont dépourvues de personnalité morale, et à fortiori de patrimoine actif.

Nous pouvons donc remarquer qu’il existe souvent un lien réel entre évaluation du prix et

recouvrement d’un impôt ou d’une taxe quelconque.

En ce qui concerne l’évaluation objective de la valeur d’un immeuble d’entreprise196

, la

méthode d’évaluation technique inspirée des systèmes romano-germaniques semble peu adaptée

aux réalités malgaches. En effet, préalablement son champ d’application est restreint, puisqu’elle

n’est compatible qu’avec des biens immeubles bâtis (immeuble abritant un siège social d’une

entreprise, logement ou lot de copropriété d’un appartement vendu par une SCI…) et ne

concerne donc pas les immeubles nus ou à bâtir (terrains, lotissements…). Or à Madagascar, la

majorité des transactions repose sur les immeubles non bâtis. Par ailleurs, certaines entités

privées sont réticentes quant à l’utilisation de ces méthodes et formules mathématiques, car

jugées trop complexes. En pratique, les entreprises délaissent ce mode de détermination de prix,

en optant pour la méthode traditionnelle. Cette dernière consiste plus simplement à se référer au

prix du mètre carré dans un secteur déterminé, puis multiplier ce prix par la surface de

l’immeuble. Mais elles peuvent encore se référer au prix pratiqué dans le voisinage pour telle

catégorie d’immeuble. Seulement cette méthode est imprécise, la valeur vénale risque d’être

196

Op cit note de bas de page n° 102

Page 112: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

109

légèrement sous évaluée. Dans la même pensée, la méthode d’évaluation technique ne peut être

appliquée rationnellement à Madagascar, puisqu’il existe peu (ou pas) d’indice de référence (tel

le loyer locatif annuel, le taux moyen de l’augmentation des loyers de bureau, les taux d’intérêts

légaux sont peu diffusés ou communiqués…).

Enfin, en ce qui concerne les particuliers, ils sont souvent tentés de sous évaluer le prix

du bien à vendre. Sur ce point, on peut distinguer deux prix stipulés : d’une part, le prix réel qui

correspond à la valeur vénale de l’immeuble ; et d’autre part, le prix déclaré, prix souvent minoré

au détriment de l’administration fiscale. Ce prix déclaré dans le contrat de vente est souvent

minoré jusqu'à – 50% de la véritable valeur de l’immeuble. Mais comment sous évaluer le prix

du bien et quelles en sont les conséquences ? Pour répondre à la première question, il suffit pour

le vendeur (ou avec l’acquéreur) de minorer le prix du mètre carré, de manière à obtenir un prix

déclaré sous évalué. Les conséquences en sont d’ordre fiscal, puisque l’une des parties sera

redevable d’une lourde pénalité fiscale. D’ailleurs, un paragraphe sera ultérieurement plus

amplement développé à ce sujet. Ainsi, telles sont les difficultés que peuvent rencontrer les

parties tant au niveau de l’objet du contrat (détermination et évaluation du prix), tant au niveau

de l’exécution de leurs obligations fiscales.

§2. La question fiscale du recouvrement des impôts et taxes

L’IPVI et les droits d’enregistrement sont les principaux impôts et taxes que doivent

s’acquitter les parties à une vente immobilière. Ces dits impôts d’Etat et taxes locales jouent un

rôle important dans les transactions immobilières, puisque régissent légalement la vente

d’immeuble bâti et d’immeuble non bâti. Leur cadre légal est régi par le Code Général des

Impôts suivant Loi de finances 2011. 197

Leur raison d’être est de taxer les plus values immobilières réalisées (quant à l’IPVI), et

de donner date certaine à l’acte de vente, et en rendant effective la force exécutoire du contrat

197

L’IPVI est régi par les articles 01.05.01 et suivants du CGI ; Les droits d’enregistrement sont régis par les articles 02.01.03 et suivants du CGI.

Page 113: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

110

conclu en la forme authentique198

. Ils sont source de recettes publiques conséquentes pour l’Etat,

qui pourra les affecter à des dépenses d’intérêt public (telles que l’aménagement rationnel ou

l’informatisation des données des centres fiscaux, notamment le paiement des droits

d’enregistrement en ligne sur un site web dédié199

).

Force est d’observer qu’à Madagascar, contrairement en France, les transactions

immobilières effectuées par des professionnels ne sont pas taxées de la TVA. Ce qui semble

regrettable, puisque cette taxe serait source supplémentaire de recettes publiques. Mais le

législateur en a légiférer ainsi pour permettre aux entreprises malgaches de se créer plus

aisément, ou de fonctionner en diminuant les charges fiscales par voie de défiscalisation ou

d’exemption. Mais qu’en est-il principalement de la question du recouvrement de ces impôts et

taxes ? C’est un véritable casse tête pour les parties à un contrat de vente, puisque leur montant

est souvent très onéreux, et parfois certaines personnes physiques ou morales ne peuvent pas s’en

acquitter. D’où la tentation de frauder l’administration fiscale en modifiant la valeur du bien

immobilier par différents mécanismes juridiques. Ces montages concernent essentiellement en

fiscalité immobilière, les dissimulations et l’insuffisance de prix. Il faut remarquer que

l’insuffisance de prix ne touche uniquement que les droits d’enregistrement.

A. La dissimulation

Le prix, objet du contrat doit être un prix réel. Ce dernier s’oppose donc à un prix simulé.

Les parties conviennent dans une contre-lettre (celle qui exprime leur véritable volonté) la

stipulation du prix réel, et dans un acte apparent (qui n’exprime pas la réalité de la dette de

l’acquéreur) un prix stipulé. Ce montage correspond classiquement à la pratique des « dessous de

table » où les parties conviennent par un acte apparent au vu des tiers (en l’occurrence

l’administration fiscale) d’un prix minoré, et en contrepartie conviennent par une contre-lettre

d’un prix majoré.

198

L’acte authentique doit être obligatoirement enregistré dans un délai de deux mois. Tant que l’acte n’est pas enregistré, le créancier d’une obligation de faire ne peut demander une grosse ou copie exécutoire. 199

Cette démarche a été déjà mise en place pour le paiement et la régularisation de certains impôts des sociétés commerciales par le biais de la « NIF on line ».

Page 114: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

111

Pour mieux illustrer la définition et la description du mécanisme, prenons un cas :

l’acquéreur et le vendeur fixent dans l’acte apparent un prix de 100.000, et conviennent dans

l’acte caché un prix de 120.000. Ce montage se justifie à tort pour des raisons purement fiscales,

puisque les droits fiscaux étant proportionnels200

au montant du prix. Donc, si le prix apparent est

minoré, les droits et taxes correspondants seront moins élevés. Cela semble conforme aux

intérêts privés et personnels du vendeur (débiteur redevable de l’IPVI), et de l’acquéreur

(débiteur redevable des droits d’enregistrement).

Face à cette pratique nuisible au fisc, voire même à l’Etat, le législateur a sanctionné ce

montage fiscal en frappant de nullité absolue la contre-lettre. La nullité étant absolue, tout

intéressé peut invoquer la contre lettre litigieuse. Ainsi l’administration fiscale lésée par la perte

de ses recettes fiscales peut invoquer la nullité, mais également le vendeur ou l’acquéreur lui-

même. Seulement, si le juge prononce la nullité, elle ne frappera que la seule contre-lettre,

puisque l’acte apparent reste valable. L’acquéreur n’étant tenu de payer que le prix sus exprimé.

Mais invoquer la nullité ne saurait combler le préjudice pécuniaire subi par le fisc, car si l’acte

apparent demeure valable, les droits d’enregistrement correspondants seront néanmoins sous

évalués. Pour parer à cette lacune, notre Code Général des Impôts frappe lourdement les parties

contrevenantes de pénalité fiscale : elle est de 40%, et frappe la différence exprimée entre le prix

majoré (contre-lettre) et le prix minoré (acte apparent).

B. L’insuffisance de prix

Ce montage se rapproche de la dissimulation, mais s’en différencie par le fait qu’il

n’existe pas de contre-lettre. Il n’y a qu’un seul acte, mais les parties peuvent convenir d’un prix

déclaré (souvent en dessous du prix réel ou valeur vénale de l’immeuble). Dans la pratique

immobilière, lorsque les parties concluent une promesse synallagmatique de vente, elles doivent

toujours exprimer le prix réel ; mais dans l’acte définitif de vente, elles peuvent exprimer un prix

déclaré. Souvent, le vendeur (propriétaire du bien immeuble) et l’acquéreur (redevable des droits

d’enregistrement) se mettent d’accord pour diminuer encore plus le prix déclaré jusqu’à – 50%

200

Taux IPVI : 22% ; droit d’enregistrement : 6%

Page 115: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

112

de la valeur vénale de l’immeuble. Le prix réel est déterminé traditionnellement par le prix du

mètre carré dans une zone géographique ou administrative déterminée, suivant un barème établi

par l’administration des domaines. Parfois, les parties ont sciemment conscience de la sous

évaluation de l’immeuble, mais s’obstinent encore puisque le vendeur est sous pression. En effet,

si les droits d’enregistrement sont très élevés, l’acquéreur risque de se rétracter de la vente s’il

n’a pas encore contracté. C’est un véritable obstacle à la vente immobilière, car nombreux sont

en pratique les acquéreurs qui se retirent brusquement de la vente lorsque les droits

d’enregistrement ne peuvent être revus à la baisse par le mécanisme du prix déclaré.

En conséquence, en cas d’insuffisance de prix, l’acte de vente reste intact, mais une

pénalité fiscale doit être supportée par l’acquéreur seul : 40% établi sur la différence entre le prix

réel et le prix déclaré. Ce redressement peut intervenir même après avoir liquidé les droits

d’enregistrement la première fois sur la base du prix déclaré (insuffisant).

La conclusion de la vente est un parcours du combattant, jonché d’embûches. Ces

difficultés peuvent provenir des intermédiaires à la vente, du rédacteur de l’acte authentique,

mais proviennent essentiellement de l’absence de cadre légal, car le droit immobilier malgache

est un droit relativement nouveau. De nombreux litiges fonciers évoquent le désarroi des

acquéreurs victimes de la très décriée pratique des « doubles ventes ». S’ajoute à ce paysage

morose les montages juridiques qui font perdre au fisc des millions, voire même des milliards

d’Ariary. L’équilibre de la vente est si fragile, car si un obstacle se présente au niveau des

acteurs de la vente, ou au niveau du contrat (exécution des obligations), l’opération est vouée à

l’échec. Face à cette série de difficultés qui peuvent remettre en cause la vente, des solutions ont

pu toutefois être avancées par le concert du gouvernement, du législateur, du juge, des notaires…

Mais il faudra encore un peu patienter pour savoir, si elles seront effectives.

Page 116: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

113

CONCLUSION

A travers le prisme du droit immobilier (branche relativement nouvelle dans notre

système juridique) qui met en exergue les aspects juridiques de la vente immobilière, nous avons

pu déceler les enjeux que suscite la vente d’immeuble à Madagascar.

La conclusion d’un tel contrat nécessite préalablement de conclure un avant-contrat

tenant compte de la volonté des parties pour mieux répondre à leur attente et à leur situation

patrimoniale. Auxiliairement, les parties peuvent recourir à un crédit immobilier pour pouvoir

financer plus facilement leur acquisition. Mais surtout, elles pourront faire appel à un agent

immobilier dans le but de vendre vite et bien l’immeuble.

En aval, se réalisera la vente définitive par acte authentique qui garantira la sécurité

juridique des parties ; puisque le notaire, de par ses obligations professionnelles contribue à la

sécurisation des transactions immobilières. Dans le même ordre d’idée, le formalisme se

manifeste également à travers la publicité destinée à protéger les intérêts des tiers.

Seulement, l’opération immobilière peut se heurter à d’inéluctables obstacles pouvant la

remettre en cause. La vente est illégitime dans la mesure où parfois les parties émettent des

réserves sur le statut des intermédiaires professionnels. Sous l’aspect du droit de la

consommation, on estime que l’acquéreur recourant à un prêt immobilier est souvent

relativement peu protégé, ce qui par incidence affecte indubitablement l’équilibre de la

convention.

Parce que le droit immobilier est un droit relativement nouveau dans notre droit positif, il

existe un certain vide juridique en raison de l’absence de cadre légal régissant spécifiquement la

matière. Recourir à des dispositions éparses ne saurait être suffisant car une telle lacune juridique

induit inéluctablement à une insécurité.

Par ailleurs, la vente d’immeuble fait l’objet à l’heure actuelle de nombreux contentieux,

dus notamment à la mauvaise intention du vendeur qui procède à la vente successive du même

bien à un tiers, et au détriment de l’acquéreur initial. A cela s’ajoute des litiges administratifs

quant au recouvrement de certains impôts, droits et taxes, puisque les parties tendent à fausser ou

à sous évaluer le prix du bien, et qui se répercute sur leur assiette et leur montant.

Page 117: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

114

Malgré ses quelques imperfections, la vente immobilière revêt une importance

fondamentale pour notre droit positif, et répond effectivement à l’attente des parties désireuses

de conclure des transactions immobilières.

Page 118: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

115

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES GENERAUX

- Andrier Thierry, « Les sociétés civiles immobilières », Litec 2004.

- Antonmattei, Raynard, « Droit civil : contrats spéciaux », Litec,

- Cabrillac Remy, « Dictionnaire du vocabulaire juridique », 2ème

édition, Litec.

- Calais-Auloy Jean, « Droit de la consommation », Dalloz, 1986.

- Collart-Dutilleul François, Delebecque Philippe, « Contrats civils et commerciaux », 4ème

édition, Précis Dalloz.

- Collart-Dutilleul François, Magois Bernard, Blond Carole, Laurent Philippe, « Achat ou

vente d’un bien immobilier, 5ème édition, Delmas, 2009/2010.

- Dekeuwer-Défossez Françoise, « Droit commercial, activité commerciale, commerçants,

fond de commerce, concurrence, consommation », 8ème

édition, Montchrestien, 2005.

- Lefebvre Francis, « Mémento pratique fiscal », 1995.

- Porchy-simon Stéphanie, « droit civil : les obligations », Dalloz, 3ème

édition.

- Roubini, Mihm, « Economie de crise : une introduction à la finance du futur », JC Lattès,

2010.

- Voirin Pierre, Goubeaux, « Droit civil, droit privé notarial, régimes matrimoniaux,

successions, libéralités », LGDJ.

REVUES, PERIODIQUES ET DOCUMENTS

- Actes pratiques et stratégie patrimoniale (droit et fiscalité du patrimoine privé et

professionnel, Revues Jurisclasseur), « Audit juridique et financier d’un bien immobilier :

vers une méthode unifiée»

- La revue fiscale notariale, Revues Jurisclasseur, Juin 2010, « Précisions apportées par

l’administration pour le calcul de la TVA sur la marge »»

- La semaine juridique notariale et immobilière, Mai 2010, « L’acquisition par les couples

non mariés : modalités et conséquences»

- Conseils des notaires, Mai 2010, « Un marché en cours de stabilisation »

- Le particulier, Magasine d’avril 2006 « Immobilier : est-ce le bon moment pour acheter

son logement ? »

Page 119: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

116

- « Couples, patrimoines : les défis de la vie à 2 », 106ème

Congrès des notaires de France,

ACNF, 2010.

- Institut de l’Epargne immobilière et foncière : « Le marché immobilier français : les

chiffres et les sources, Economica, 1994.

- Top’ Actuel, « Droit de l’immobilier 2011/2012 », « Le crédit à taux zéro », Hachette.

JURISPRUDENCE

JURISPRUDENCE MALGACHE

o Arrêt n°25 du 24 février 2004, Bulletin des arrêts de la Cour Suprême de

Madagascar de 2004.

o Arrêt n°36 du 8 février 2005, Bulletin des arrêts de la Cour Suprême de

Madagascar de 2005.

o Arrêt n°66 du 18 mars 2005, Bulletin des arrêts de la Cour Suprême de

Madagascar de 2005

o Arrêt n°75 de la Cour Suprême de Madagascar, Affaire « Raveloson Laurent

contre Rakotovao et consorts ».

JURISPRUDENCE FRANCAISE

o Civ. 3e, 13 février 2008, Bull civ III n°29 D.2008, observations Dagorne-Labbe

o Civ 1er

, 26 octobre 1964, bull civ I, n°470

o Civ, 3e, 25 mai 2005 Bull civ III, n°117

o Civ 1er

, 26 octobre 1964, bull civ I, n°470

o Civ 3ème

, 24 avril 1970, Bull civ III, n° 279

o Com 13 janvier 1971, Bull civ IV n°13

o Civ 3ème

, 7 janvier 1982, RTD civ 1982, observations Chabas

o Civ 3ème

, 10 décembre 1997, Bull civ III n° 223

o Com 20 novembre 1962, D 1963

o Civ 1ère

, 20 février 2007 et Civ 1ère

, 11 juin 2008

o Civ 3ème

, 20 décembre 1994, JCP 1995 II.22491, note Larroumet

o Civ 1ère

, 6 mars 1996, n° 93-19.262, Bull civ I, n° 114 p81

Page 120: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

117

o CA Paris, 12 mars 1991, Rd imm 1991, p 359

o Civ, 3ème

, 26 septembre 2007 n° 06-17337, Bull civ III, n° 158

o Cass.civ 1ère

du 09/07/2002 arrêt n° 00-13.410

o Cassation, civ 1ère

, 27 septembre 2005, Affaire Fédération française d’athlétisme

o Civ 3ème

, 24 septembre 2003, n° 02-11.815, Bull civ III n° 164

o Civ 1ère

, 16 juillet 1992, Contrat, concurrence, consommation, décembre 1992,

page 7 observation Leveneur

o Civ, 3ème

, 28 octobre 1992, n° 90.16.388, JCP 1993, II, p 279

o Civ 3ème

, 26 juin 1973 n° 72-12.489, Bull civ III, n° 436

o Com, 3 novembre 1988 RTD civil 1989, 302

o CA de Montpellier, 26 mai 1952, D.1952

o Civ 3ème

, 20 octobre 1981, n° 80-10.660, bull civ III n°168

o Civ 3ème

cassation SCI Rhône- Isère c/ Simonin in Jurisclasseur (979 II -1924)

o Cass, civ, 21 juillet 1921

o Cass, civ 1ère

, 21 avril 1971 et cass, civ, 1ère

, 21 février 2006

o Civ 3ème

, 11 décembre 1969, JCP N 1970.

o Civ 3ème

, 22 mars 1968, D.1968, jurisclasseur 412, observations J. Mazeaud

TEXTES ET CODES

- Loi n° 60.146 du 03/10/60 relative à l’immatriculation

- Loi n° 60-167 du modifiée par la loi n°92.033 du 03/10/60 relative à l’urbanisme

- Loi n° 66.003 du 02/07/66 relative à la Théorie générale des obligations

- Loi n° 2005-019 du 17/10/05 relative au statut des terres à Madagascar

- Loi n° 2007-026 du 12/12/07 relative au statut du notariat à Madagascar

- Loi n° 2007-036 du 14/01/08 portant code des investissements à Madagascar

- Code civil, édition Prat/Europa

- Code de l’urbanisme, Dalloz

- Code de la consommation, Dalloz

Page 121: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

118

SITES INTERNET

http://fr.wikipedia.org/wiki/vente_immobili%C3%A8re: “Vente immobilière”, Creatives

Commons

- www.legifrance;gouv.fr: “La réforme de la publicité foncière”

- http://www.jurisprudentes.org/bdd/actu_article.php?id_article=3660: « L’acte sous signature

juridique », Pierre Redoutey

Page 122: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

1

TABLE DES MATIERES

SOMMAIRE

INTRODUCTION …………………………………………………………………………...... 1

TITRE PREMIER : LA VENTE D’IMMEUBLE PERMETTANT DE CONCILIER LES

DIFFERENTS INTERETS DES PARTIES EN CAUSE………………………… .…………4

Chapitre I : La conclusion en amont de contrats préparatoires, gage de réussite de

l’opération ………………………………………………………………………………………4

Section 1ère

: Le rôle accru de la volonté des parties dans le choix d’un avant-contrat ………....4

§1- Promesse unilatérale d’Achat : flexibilité du choix d’un acquéreur par le vendeur…….…...5

A. Appréhension de la notion de promesse unilatérale d’achat par le prisme du droit

commun des

contrats…………………………………………………………………………...………..5

1. Fondement .........................................................................................................................5

2. Eléments du contrat ...........................................................................................................6

2.1 Accord des parties : traduction de l’autonomie de la volonté ……………………….6

2.2 Le droit d’option du bénéficiaire vendeur …………………………………………...7

3. Régime juridique …………………………………………………………………………8

B. Appréhension de la raison d’être de la promesse unilatérale d’achat par le prisme de la

pratique immobilière……………………………………………………………………...9

§2. Opportunité du choix par les parties d’une promesse unilatérale de vente ou d’une promesse

synallagmatique de vente ………………………………………………………………………....9

A. Rappel préalable des principes et modalités d’exécution relatifs aux promesses de

vente10

1. Promesse unilatérale de vente : engagement unilatéral …………………………………10

1.1 Portée de l’engagement du promettant ……………………………………………...11

1.2 Le droit d’option du bénéficiaire ……………………………………………………11

Page 123: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

2

1.3 Difficultés relatives à la qualification et à la validité de l’indemnité

d’immobilisation……………………………………………………………………. 12

1.4 Régime juridique …………………………………………………………………….14

2. Promesse synallagmatique de vente : engagements réciproques ……………………….15

2.1 Notion ……………………………………………………………………………….15

2.2. Condition de fond, condition de forme ………………………………………….....15

2.3. Effets de droit ……………………………………………………………………….16

B. Le choix d’un avant-contrat en fonction de divers paramètres ………………………………17

1. Intensité de la volonté de l’une des parties d’acquérir ………………………………………..18

2 .L’existence d’une condition dépendant d’un événement ultérieur ...........................................18

Section 2 : L’utilité des conventions auxiliaires à la vente immobilière ………………….…….19

§1. Le contrat de mandat : efficacité et rapidité de la vente ………………...…………..………20

A. Existence de règles juridiques propres régissant la matière …..…………..……..……...20

1. Les différents types de contrat conclu dans l’intérêt du client vendeur …………………21

1.1. Le mandat simple ou mandat ordinaire ………..……………………….………21

a) Teneur du contrat : modalités et durée ………………………………….……….21

Droits et obligations de l’agent immobilier ……………………………………..22

1.2. Le mandat exclusif …………………………………………………..………….23

a) Régime juridique à double face : avantageux mais également contraignant…….23

b) Préférence du mandat exclusif par rapport au mandat simple …………………..24

2. La commission de l’agent due par le vendeur …………………………………………...25

2.1.Commission, clause pénale : les aspects pécuniaires du mandat …………….…25

2.2. La commission dans le cadre d’un mandat simple, et le concours entres plusieurs

agences immobilières ……………………………………………………..……..27

B. Le rôle actif de l’agent immobilier dans la réalisation effective de la vente immobilière

……………………………………………………………………………...…………….28

1. Vendre vite et bien en fonction de divers paramètres …………..…………………...29

Page 124: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

3

2. Sécuriser rationnellement les parties à travers la transaction immobilière ……….....31

§2- Le contrat de crédit immobilier : financement de l’acquisition …………………………….32

Propos introductifs : le prêt immobilier, adapté aux capacités financières de

l’acquéreur – client ……………………………………………………………….....32

A. Panorama de la pratique bancaire malgache …………………………….…………...….33

1. Conditions préalables en vue de la mise à disposition des fonds à l’emprunteur. …..…... ..34

2. Vers un régime se rapprochant d’un contrat d’adhésion mettant des obligations

exclusivement à la charge de l’emprunteur …………………………………… ….35

2.1 Des modalités financières imposées par le banquier ………...……………….35

a) La question du montant, de la durée, du taux d’intérêt et du remboursement du

prêt ……………………………………………………………………………....35

b) Cas particulier d’une exigibilité anticipée du remboursement ………...………..37

2.2 Des obligations contraignantes nées du contrat ……………………….………...38

B. Vers un lien de droit entre vente et prêt : la vente conclue sous condition suspensive

d’obtention du prêt prévue en droit français ………………………………..…………...40

1. Intérêts capitaux d’une telle stipulation ………………………………….………….41

2. Mise en œuvre de son régime juridique ……………………………………………..41

Chapitre II. La conclusion en aval de l’acte authentique de vente, gage de sécurité

juridique

……………………………………………………………………………………………………43

Section 1ère

: Questions de fond et traduction de la conception juridique de la substance de la

vente immobilière …………………………………………………………………………….... 43

§1- Formation de la vente .............................................................................................................44

A. Capacité et pouvoir : protection élémentaire des parties ………………………..………44

1. Les incapacités générales du droit commun .....................................................................44

1.1 Incapacité de protection : mineurs et majeurs protégés ……………………...……...44

1.2. Incapacité de jouissance ………………………………………………...…………..46

Page 125: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

4

2. Influence de certaines incapacités spéciales affectant le pouvoir de certaines personnes .

……...…………………………………………………………………………………………….46

2.1.Sous l’aspect du droit civil …………………………………………………………..46

a) En matière de régimes matrimoniaux …………………………………………..46

b) En matière de succession : le régime de l’indivision …………………….……..48

c) les autres états altérant la capacité d’acheter ou de vendre ……………………..49

2.2 Sous l’aspect du droit des sociétés ………………………………………………….50

a) Sociétés étrangères …………………………………………………...………….50

b) Représentation de la société et pouvoir du dirigeant …………………..………..51

c) Procédure collective d’apurement du passif ……………………………………52

B. Le prix : la raison d’être de l’engagement des parties …………………………..………52

1. Régime juridique général : application stricto sensu du droit des contrats ……………..52

2. Evaluation du prix : approche technique et pratique ........................................................56

2.1 Immeuble à usage d’habitation ……………………………………………………...56

2.2 Immeuble d’exploitation ………………………………………………...…………..56

§2- Exécution de la vente et connaissance des parties de l’étendue de leurs obligations ……….58

A. Les obligations de l’acheteur : vers un régime simplifié …………………………….….58

1. Obligation principale : le paiement du prix ………………………………………….….58

2. Les autres obligations ……………………………………………………………..…….60

B- Les obligations du vendeur ………………………………………………………...…….61

1. Les obligations substantielles …………………………………………………………...61

1.1 Le transfert de propriété et ses incidences ……………………………………....61

1.2 Transfert de jouissance ……………………………………………………..…...62

1.3 Obligation de délivrance …………………………………………………..…….63

2. Les obligations subsidiaires …………………………………………………..…………64

2.1 L’obligation de garantie …………………………………………………......64

3. Obligation d’information ………………………………………………....................…67

4. Les obligations fiscales ………………………………………………………………….67

Page 126: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

5

Section 2 : Le rôle du formalisme dans le cadre de la sécurisation des transactions

immobilières..................................................................................................................................68

§1. Authenticité : vers une sécurisation juridique renforcée …………………………………....69

A. Authenticité obligatoire dans le cadre d’une vente immobilière …………………..……69

B. L’officier authentificateur : devoirs et garanties offertes par le recours à un

notaire………………………………………………………………………………..…..70

§2. Publicité foncière : l’opposabilité aux tiers …………………………………………………71

TITRE DEUXIEME : LES ASPECTS ILLEGITIMES DE LA VENTE

IMMOBILIERE…………………………………………..……………………………..…… 73

Chapitre I : Appréhension des difficultés de l’opération au niveau des acteurs de la vente

immobilière …………………………………………………………………………………….73

Section 1ère

: Controverses sur le statut des intermédiaires professionnels ……………….. …...74

§1. Ignorance du public de la profession de notaire et de son rôle dans les transactions

immobilières ……………………………………………………………………………………74

A. Le non respect des formalités légales imposant l’authenticité obligatoire de la vente

immobilière …………………………………………………………………………….76

B. Lourdeur des frais honoraires engagés dans un acte notarié de vente immobilière……..78

§2- Différends occasionnés par le recours à un agent immobilier ……………………………....80

A. Problématique d’ordre organisationnelle ………………………………………………..81

1. Aptitude professionnelle ………………………………………………………………….81

2. Lenteur de la réalisation de la vente …………………………………………………..….82

B. Concurrence avec d’autres organismes ? ………………………………………….…….83

1. Droit comparé : la négociation immobilière par notaire ………………………..……….84

2. Le statut informel des « mpanera » ……………………………………………………...84

Page 127: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

6

C. La problématique d’ordre pécuniaire sur les commissions prélevées par des agents

immobiliers……………………………………………………………….……………...85

1. Rappel : réglementation de la commission des agents dans le cadre d’un mandat simple

de vente ……………………………………………………………………….…………85

2. Litiges occasionnés par le tarif des agents immobiliers ………………………………...86

Section 2 : La protection relative des parties à un contrat de prêt immobilier en droit positif

malgache ………………………………………………………………………………………..87

§1. Position du problème …………………………………………………………..…………...87

A. Au niveau de l’acquéreur –emprunteur ……………………………………..………….87

1. Inexistence de la vente conclue sous condition suspensive d’obtention d’un prêt à

Madagascar ……………………………………………………………………..……....88

2. Litiges occasionnés en cas de non remboursement du prêt ………………...………….90

B. Au niveau du banquier-prêteur ……………………………………………….....…….. 91

§2. Perspectives proposées empruntées au droit français …………………………….………...92

A. Vers une protection adéquate de l’acquéreur-emprunteur ……………………...………92

B. Vers une amélioration du rang du créancier hypothécaire/ banquier-prêteur …….…….93

Chapitre II : Appréhension des difficultés de l’opération au niveau du contrat de vente

……………………………………………………………………………………………………94

Section 1ère

: Les difficultés d’ordre général ……………………………………………………95

§1. L’absence de cadre légal règlementant la vente immobilière …………………..…………..95

§2. Les doubles ventes ou vente successive d’un même bien : un désastre juridique ……...…100

A. Approche théorique ……………………………………………………………..…...…101

B. Approche pratique contentieuse à Madagascar …………………………………..…….104

§3. Litiges occasionnés par la vente à réméré ………………………………………………….105

Section 2 : Les difficultés particulières …………………………………………………….......107

Page 128: LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE

7

§1. La question financière de l’évaluation du prix d’un immeuble ……………………… ...…107

§2. La question fiscale du recouvrement des impôts et taxes …………………………………109

A. La dissimulation …………………………………………………………………..……110

B. L’insuffisancede prix …………………………………………………………..………111

CONCLUSION

………………...………………………………………………………………………………...113

BIBLIOGRAPHIE ……..…………………………………………………………………….115