Gobages.com la revue N°8

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1 Avril 2013 Numéro 8 Avril 2013

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webzine de pêche à la mouche gratuit. French free flyfishing webzine.

Transcript of Gobages.com la revue N°8

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1Avril 2013

Les truites du boutdu monde

Gobages.com

Numéro

8

Avril 2013

Retour dessalons 2013

L'efficience enpêche à vue.

Test billesnoires JMC.

Relâchez vos rêves. . .

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58.

Couverture : Landes du bout du monde photos d' Alexis Gante

Gobages.com la revue est un webzine destiné à être lu en l igne et partagé en ligne. Vous pouvez

l 'imprimer dans le cadre d'un usage personnel, ne pas jeter ou distribuer sur la voie publique. Ce

webzine est produit quand nous en avons le temps et l 'envie, i l rentre dans l 'objet de notre association qui consiste à faire la promotion de la pêche à

la mouche et la remise à l 'eau des poissons.

4. Concours montageet casting Paris 2013par Auversasoie

5. Salon de St Etiennele mot du président parP. FAURE

15. 2012 en 12 moispar gobages.com

80. Jacky BOILEAUpar Patrick FAURE

40. Opération zérodéchet sur les Nivespar Cédric SIMONET

A la poursuite des truites du bout du mondepar Alexis GANTE.

6. Efficience en pêcheà vue par F. ROUILLON

8. Technique photo ladésaturation par P.FAURE

10. Test de fils de pêchepar Lucien 86

12. Salon des pêchessportives (Paris) parP.FAURE

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3Avril 2013

Que la magie opère ànouveau.I mmanquablement, tous les ans au plus profond de l'hiver, la passion de lamouche se fait de plus en plus pressante. Certains occupent le temps en faisantquelques sorties en réservoir, en se promenant dans les allées des salons.D'autres montent des mouches ou refont le monde sur les forums.

Mais comme rien ne vaut la pêche en rivière, on jubile tous à l'idée de revenirtaquiner les truites dès l'ouverture avec la poignée de son fouet en main. A derares exceptions près, plus particulièrement cette année où les eaux sont froideset hautes, les pêches d'ouverture sont rarement bonnes. Mais quelques mouchesaperçues, au mieux quelques heures d'activité suffisent à notre ravissement pourcalmer notre impatience.

Avril n'est en général pas un bon mois pour la pêche à la mouche. Hormis pourceux qui ont accès à des rivières de piémont épargnées par la fonte, nombreuxsont ceux qui sont condamnés à regarder passer des m3 d'eau aussi verdâtre quefroide. Qu'ils se rassurent. Leur première prise une fois les eaux en ordreannulera la déprime des semaines de disette : c'est la magie de la mouche. Unseul gobage, un seul posé couronné de succès remet tous les compteurs à zéroet donne suffisamment d'énergie pour surmonter bien des obstacles.

En attendant ce moment magique comme le feu d'artifice des mois de mai etjuin, nous vous proposons cette nouvelle revue. Issue comme à son habituded'un travail bénévole et coopératif nous espérons qu'elle saura vous divertir.

Bonne lecture et bonne saison 2013

Fredéric Serre

83. La Dame de SaintUrsanne(Partie 2) unenouvelle de Bleuvague

82. Montage billesnoires par Spent82

87. Eloge du minimalismepar Alexis GANTE

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par Au ver à soieRetour sur une des animations du salon 2013

Concours montageet casting à ParisLes sociétés, JMC, Le Danica, lesSources d’Eclimont, Dumont Rod,PetitJean, Pêche Mouche et Au Ver àSoie / Pêche à Soie ont organisé àl’occasion du Salon de la PêcheSportive de Paris , un concours demontage de mouche.

Le jury composé de Messieurs MarcPetitjean, Bruno Pimpanini et de MichelRigault a eu bien du mal à départagerles candidats.

Le podium :

1­ Monsieur Calavia (404 points) gagnedeux soies naturelles « Pêche à Soie(PP#5 et WF#4). Vainqueur pour ladeuxième année consécutive.2­ Monsieur Rainaud (389 points)gagne une paire de lunettes JMCWatersun Missions3­ Monsieur Jegou (377 points) gagneune mouche Victorienne encadréemontée par Bruno Pimpanini, monteurinternational français

Alexandre Serouge, le plus jeunecompétiteur, gagne un prix spécialjeune : un abonnement à PêcheMouche magazine.

Les autres compétiteurs gagnent unabonnement d’un an à Pêche MouchemagazineConcours de lancer.Résultat du concours de lancer surcible, organisé par Pêche à soie avec leconcours de l’ACBB Pêches Sportives.Malgré la difficulté pour organiser ceconcours et le mauvais temps pourpimenter le tout, il y avait une vingtainede participants dont un junior.Le concours s’est déroulé avec une canneDumond Rod ICT 9p soie de 4 (canneappréciée par tous les compétiteurs). 5postes de lancer à différentes distances, 2lancers par poste.

Cible d’Arenberg , 10, 8 et 6 points, 100points maximum.1­ Monsieur Lalligan (84 points) gagneune canne Dumont Rod Soie #32­ Monsieur Lesalle (82 points) gagneune paire de lunettes JMC Cristamax et1 abonnement à Pêche Mouchemagazine3­ Monsieur Caillau (76 points) gagneune soie naturelle ST#4 Pêche à SoieLe plus jeune : Maxime Delestre gagneun prix spécial jeune : 1 abonnement àPêche Mouche magazineLes 4éme et 5éme gagnent unabonnement d’un an à Pêche Mouchemagazine.

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5Avril 2013

par Au ver à soie

Salon de Saint-Etienne : le motdu président.

par Patrick FAURE

Je remercie Jean­Luc Cometti de m'avoir accordéquelques minutes à la fin du salon pour faire unpoint « à chaud » sur cette 18 ème édition duSANAMA.

Gobages : Le salon va fermer ses portes dansquelques minutes. Quels bilans quantitatif etqualitatif pouvez­vous faire ?JLC : D'un point quantitatif, le samedi nous avons euune fréquentation très importante. Le dimanche,bien qu'intéressant au niveau du nombre devisiteurs, a été plus calme, sûrement en raison desconditions atmosphériques.En ce qui concerne l'aspect qualitatif, j'ai le sourire.Je viens de faire le tour des stands et je n'ai vu quedes exposants ravis. Tous m'ont dit : « ne changezrien », ce que nous ne ferons pas, bien sûr, car il fauttoujours chercher à s'améliorer.J'ai aussi discuté avec des visiteurs, ils étaient enchantés.

65 exposants étaient présents. Je regrette que l'on nepuisse pas en accueillir davantage mais « on ne peutpas pousser les murs ».

Ce qui fait la qualité de ce salon, ce sont les aires delancer et nous souhaitons garder ces espaces chersaux exposants pour qu'ils puissent faire essayer leurmatériel, ce qui hélas, nous prive de standssupplémentaires.

Un autre signe de la « bonne santé » du salon, denombreux monteurs de renommée internationalenous ont contactés pour venir spontanément réaliserdes démonstrations de montage de mouche.

Le salon, c'est une équipe de 90 personnes sur leweek­end où chacun a son rôle : montage,déroulement du salon, démontage, intendance.Il s'agit de personnes motivées et lorsque, à laréunion préparatoire, je pose la question pour savoirqui viendra « donner un coup de main » denombreuses mains se lèvent.

Gobages : Le mot de la fin ?JLC : A l'heure qu'il est, je suis heureux pour tousceux qui ont travaillé pour la réussite de ce salon et… rendez­vous dans deux ans.

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En quoi cela nous concerne­t­il, nous, pauvrespêcheurs ? Voici deux exemples qui vont vous aider àcomprendre où je veux en venir :Vous êtes planqués sous votre arbre depuis une heureà l’attendre, cette grosse truite qui fait son tour parici. L’air bruisse, le temps se tend et se déforme etsoudain, vous la voyez. C’est là que ça se joue, maisvous n’avez pas vu que votre fil était passé juste audessus d’une branchette. Il s’y emmêle évidemmentet vous empêche d’effectuer votre lancer arbalète. Latruite passe, broute tout ce quelle trouve au fondtandis que vous pestez et ragez contre cette putain debranche, et/ou (selon votre personnalité) contre vous­même, pensant même à l’auto flagellation avec la ditetige végétale…

Seconde situation : sur un flat breton, vos yeuxpiquent à force de scruter les scintillements del’estuaire à la recherche d’un bar en maraude.Soudain, à quinze mètres, un mouvement sur votregauche. Ce gros poisson nage et vous n’avez qu’unlancer, à effectuer rapidement, pour lui présentervotre crevette. Vous commencez à fouetter, mais dèsle second faux­lancer, vous vous apercevez que votresoie intermédiaire est sortie de son panier et qu’elleest emmêlée dans le crochet de vos guêtres dewading, interdisant tout allongement et donc

annihilant vos espoirs de présenter à ce poisson sirare votre imitation amoureusement montée durantl’hiver. Encore rageant comme situation, non ?En plus d’exiger une réactivité constante, la pêche àvue demande d’être toujours prêt. Et ceci implique deminimiser les erreurs et les situationsd’emmerdement. Tout doit être vérifié plusieurs foisdurant une partie de pêche. Cela touche bien sûr àtoutes les vérifications matérielles : la confection desnœuds et leurs tests, le préréglage du frein, le bonemboîtement des éléments de la canne…etc. Maisaussi à l’étude approfondie de notre environnement.En effet, lors de l’arrivée sur un poste, et non par LaPoste, les bons pêcheurs analysent d’embléel’environnement et se posent les bonnesquestions concernant les fenêtres de lancers, lesarrivées et les couloirs de circulation probables despoissons, les obstacles à éviter et l’entrée dans l’eaulors du combat…

J’ajouterai qu’il faut régulièrement avoir un œil parterre afin d’éviter de marcher sur la branche mortequi va sinistrement craquer, et qu’avant tout on doitsavoir où se placer.

Ceci est évidemment valable quand on pêche du borden milieu encombré comme c’est le cas lorsqu’ontraque la truite en bordure en nymphe à vue.

Ensuite, en action de pêche, je pense qu’il est capitald’être toujours prêt à lancer. Ayez bien en tête quevous pouvez voir surgir un poisson à n’importe quelmoment et (presque) n’importe où, et que parconséquent il faut optimiser votre tempsd’opérationnalité. Réduisez votre temps d’hésitationquand au choix d’une mouche, faites vos nœuds plusvite et évitez de changer votre imitation toutes les 3minutes… Déplacez­vous avec la nymphe entre lesdoigts, prêt à "arbaléter". En wading, ayez un oudeux mètres de soie déjà sortis en bout de canne,cela vous fera peut­être gagner deux ou troissecondes nécessaires à une bonne présentation surun poisson en maraude.

En fait, essayez constamment d’anticiper l’apparitiond’un poisson dans votre champ de vision et certainesquestions vous viendront naturellement.Être prêt et réactif implique aussi d’être en forme.N’allez pas faire des pompes avant d’enfiler vos wadersmais buvez un coup et mangez un morceau, ça vousévitera peut­être le petit coup de mou qui tombe aumauvais moment. J’ai toujours une barre aux céréalesou une petite compote en « gourde » dans une poche.J’en connais qui ont le camelbak dans le dos du gilet.

Ne soyez pas pressés au bord de l’eau, ne vousprécipitez pas, concentrez vous avant d’arriver sur laberge pour, encore une fois, anticiper la rencontreavec un poisson. La lenteur des déplacements a undouble avantage : on passe plus de temps surles postes, donc on maximise nos chancesde repérer un poisson ; et il est évidentque plus on est lent dans nosmouvements, plus on est discretset moins on a de risque de fairefuir un poisson qu’on n’auraitpas encore vu.La concentration extrême

requise pour être performant en pêche à vue estassez fatigante, car il est nécessaire de s’user les yeuxet de farfouiller le fond de l’eau à la recherche dumoindre mouvement qui pourrait trahir ledéplacement d’un poisson. Cette constante attentionvisuelle peut entraîner des maux de tête, et le fait deglisser quelques comprimés d’aspirine dans le giletde pêche peut éviter des parties de pêche écourtéespar ces terribles douleurs oculaires engendrées parune trop grande sollicitation des yeux.

Les réflexions qui précèdent sont issues de ma trèshumble expérience en matière de pêche à vue. Jesuis très loin d’être un grand pêcheur, mais ces idéessont le produit de situations qui me sont arrivées, etqui continueront de m’arriver encore. C’est en çaque la pêche à la mouche est si passionnante : laNature et les poissons nous rappellent régulièrementque nous avons toujours quelque chose à travaillerpour nous améliorer.

En résumé, soyons dans vos waders comme dans nosshorts de scouts : toujours prêts !

L’efficience en pêche à vue, oul’importance d’être toujours prêt.

L'efficience, c’ est, selon le Larousse, la capacité d'un individu ou d'un système d'obtenir debonnes performances dans un type de tâche donné. Autrement dit, c’ est la qualité d'unrendement permettant de réaliser un objectif avec l'optimisation des moyens engagés (BenoîtPigé, Management et contrôle de gestion, Nathan, 2008, p. 9. )

C’est pas la classe ça dans un article de pêche à la mouche ?! Non mais !

par François Rouillon

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7Avril 2013

Ensuite, en action de pêche, je pense qu’il est capitald’être toujours prêt à lancer. Ayez bien en tête quevous pouvez voir surgir un poisson à n’importe quelmoment et (presque) n’importe où, et que parconséquent il faut optimiser votre tempsd’opérationnalité. Réduisez votre temps d’hésitationquand au choix d’une mouche, faites vos nœuds plusvite et évitez de changer votre imitation toutes les 3minutes… Déplacez­vous avec la nymphe entre lesdoigts, prêt à "arbaléter". En wading, ayez un oudeux mètres de soie déjà sortis en bout de canne,cela vous fera peut­être gagner deux ou troissecondes nécessaires à une bonne présentation surun poisson en maraude.

En fait, essayez constamment d’anticiper l’apparitiond’un poisson dans votre champ de vision et certainesquestions vous viendront naturellement.Être prêt et réactif implique aussi d’être en forme.N’allez pas faire des pompes avant d’enfiler vos wadersmais buvez un coup et mangez un morceau, ça vousévitera peut­être le petit coup de mou qui tombe aumauvais moment. J’ai toujours une barre aux céréalesou une petite compote en « gourde » dans une poche.J’en connais qui ont le camelbak dans le dos du gilet.

Ne soyez pas pressés au bord de l’eau, ne vousprécipitez pas, concentrez vous avant d’arriver sur laberge pour, encore une fois, anticiper la rencontreavec un poisson. La lenteur des déplacements a undouble avantage : on passe plus de temps surles postes, donc on maximise nos chancesde repérer un poisson ; et il est évidentque plus on est lent dans nosmouvements, plus on est discretset moins on a de risque de fairefuir un poisson qu’on n’auraitpas encore vu.La concentration extrême

requise pour être performant en pêche à vue estassez fatigante, car il est nécessaire de s’user les yeuxet de farfouiller le fond de l’eau à la recherche dumoindre mouvement qui pourrait trahir ledéplacement d’un poisson. Cette constante attentionvisuelle peut entraîner des maux de tête, et le fait deglisser quelques comprimés d’aspirine dans le giletde pêche peut éviter des parties de pêche écourtéespar ces terribles douleurs oculaires engendrées parune trop grande sollicitation des yeux.

Les réflexions qui précèdent sont issues de ma trèshumble expérience en matière de pêche à vue. Jesuis très loin d’être un grand pêcheur, mais ces idéessont le produit de situations qui me sont arrivées, etqui continueront de m’arriver encore. C’est en çaque la pêche à la mouche est si passionnante : laNature et les poissons nous rappellent régulièrementque nous avons toujours quelque chose à travaillerpour nous améliorer.

En résumé, soyons dans vos waders comme dans nosshorts de scouts : toujours prêts !

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Si je vous dis : « Est­ce que vous connaissez ladésaturation ? », il est probable que vous meregardiez avec de grands yeux étonnés.Si j'ajoute « vous savez, les photos noir et blanc où ilne reste plus qu'une petite partie en couleur », celava beaucoup plus vous parler.Et si je vous propose de réaliser facilement « en troisclics » vos désaturations, je suis sûr que ça vousintéresse.

Pour pouvoir réaliser cet effet, vous allez avoir besoind'un logiciel photo. Inutile d'aller en chercher unsophistiqué, je vous en conseille un gratuit et simpled'utilisation. Il s'agit de « Photofiltre ». Si vous nel'avez pas encore installé, vous pouvez le téléchargersur :http://www.01net.com/telecharger/windows/Multimedia/photo_numerique/fiches/telecharger­21756.html

Avant de voir les différentes étapes, voici quelquesconseils :

Prenez une photo où des éléments « claquent ». Jecrains qu'une photo d'une rivière prise en hiver dansle brouillard ne convienne pas… Cet effet n'est pasune recette miracle, ça se saurait. Une « mauvaise »photo ne sera pas rattrapée par une désaturation.Comme pour tous les effets, une photo désaturéepeut être agréable à regarder (c'est même le but)mais il ne faut pas en abuser.

Voyons comment procéder.

La photo de « base » ouverte avec photofiltre : unetruite ayant « succombé » au charme d'un boobyorange.

Dans la barre de titre, cliquer sur « Edition » puisdans le menu affiché, cliquer sur « Utiliser comme

motif »Passer l'image en « niveaux de gris » soit en passantpar Filtre > Couleur > Niveaux de gris soit encliquant sur le bouton :

Technique photo :la désaturation.

par Patrick FAURE.

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9Avril 2013

Utiliser « l'outil Tampon » à droiteCela vous ouvrira une boîte de dialogue. Cocher la case « Motif » puis choisir le « Rayon ». Plus il sera« petit », plus vous serez précis mais plus il vous faudra de temps pour passer sur les zones « à colorier ». Lemieux est de « jouer » avec le rayon et d'en prendre un grand lorsque la surface est importante et de lemodifier pour « faire les finitions ».

Dernière étape : avec la souris, passer sur les zones à « coloriser ».Pour être plus précis, n'hésitez pas à zoomer votre photo à l'écran.

Il existe d'autres façons de procéder. Par exemple en sélectionnant la zone que l'on veut garder en couleur,en inversant la sélection et en passant cette nouvelle sélection en noir et blanc. La méthode que je vous aimontrée est à mon avis suffisamment simple et performante pour débuter.

A vous de jouer.

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Test de fils de pêche : les résultats.

par Lucien86.

Voici enfin comme promis les résultats des tests desnylons de pêche que vous m'avez envoyés. Mercid'avoir pu me permettre de réaliser ces tests.Cela m'a pris du temps, que j'ai dû répartir sur unterme assez long, mais, assez parlé !

Mon idée :

Au début je m'étais mis en tête de tester lesrésistances aux noeuds, cependant j'ai viteabandonné, car je n'avais jamais assez de fils poureffectuer une moyenne cohérente.Pour la résistance il n'y a donc que la résistancelinéaire qui est testée.Je pars du principe qu'avant de vouloir un nyloncostaud pour les noeuds, il doit avant tout être solideà l'état brut !

Conseils et explications :

Rien n'empêche après avoir trouvé 3, 4 voire 5 bonsnylons, de les tester chacun plus dans le détail, ceque je me suis promis de faire. Je pense à des testscomme l’élasticité, la résistance aux nœuds, laflottabilité par exemple.Comme vous pouvez le voir, les nylons sont classéspar couleur, les cellules vertes sont pour moi lesmeilleurs ensuite les jaunes et pour finir les rougesqui n'ont pas retenu mon attention.

Sur ces douze nylons, trois d’entre eux se sontdémarqués par des qualités parfois nettement au­dessus de certains autres nylons. Certaines marquesqui ont plutôt la cote chez nous pêcheurs, voirecompétiteurs, se sont retrouvés en bas duclassement, voire tout en bas...J'ai aussi donné une note à l'aspect du nylon, je tiensà préciser que cela est purement subjectif. Je les aisimplement observés sur l'eau, sous l'eau, avec de lalumière, sans etc... Cela s'est donc fait à l'oeil.

Conclusion :

J'ai pris du plaisir à réaliser ces tests même si parfoisce n'était pas facile de se motiver. Je continuerai àtester des fils.Mais s'il n'y avait que ça ! Les cannes, les moulinets,les soies, les mouches, les hameçons (tests encours !), les noeuds et bien d'autres choses sont dansmes projets futurs. Maintenant vous savez commenttester un nylon, vous en avez une douzaine, je vouslaisse maintenant vous mettre à l'atelier ;)Je pense que, plus tard et si gobages.com me lepermet je referai ce genre de test.J'espère que cela vous a plu et pourra vous servirdans le choix de vos « bobines ».

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11Avril 2013

Nous ne reviendrons pas sur la méthode qui a été présentée dans cet article( http://www.gobages.com/peche-mouche/test-de-nylons-de-peche-2659.html)

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Comme tous les ans, je me suis rendu cette annéeau salon de Paris. Il avait lieu, comme l'an dernier auParc Floral les 1er et 2 février. En ce qui meconcerne, je n'y suis resté que le vendredi.Je remercie l'organisation qui m'avait, cette annéeencore, accordé une « accréditation Presse ».

La première chose qui m'a frappé en pénétrant dansle hall, c'est la diminution du nombre d'exposants.Je n'ai, bien sûr, pas tous les éléments pourl'expliquer mais en discutant quelques semaines plustard à Saint­Etienne avec des marques qui avaient« fait l'impasse » sur Paris, le coût d'un tel salon pourun exposant était souvent rédhibitoire.

J'en profite pour dire que je n'ai nullementl'intention de comparer et encore moins d'opposerles deux salons tant ils sont différents. Saint­Etienneest organisé tous les deux ans par un groupe debénévoles dans une salle qui est prêtée auxorganisateurs (ce qui n'enlève rien à sa qualité – voirnotre compte­rendu si vous en doutez) ;

Le salon de Paris est organisé au Parc Floral deVincennes par des professionnels.

Deuxième constat, et les photos sont là pourl'appuyer, beaucoup moins de visiteurs que lesannées précédentes. Je rappelle que je n'y étais quele vendredi et je n'ai pas demandé les statistiquesdéfinitives du nombre de visiteurs.

Vue du le stand de Marc Petitjean cette année et lemême stand « pris d'assaut » l'an dernier.

Peu de monde dans les allées

Salon de la pêche sportive (Paris) .

par Patrick FAURE.

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Conclusion :J'ai entendu tout et son contraire pendant le salon.Je n'ai aucune information quant à sa pérennité. Laseule chose que je peux dire, c'est que Nousmoucheurs, avons tout intérêt à ce qu'un salon aitlieu tous les ans à Paris.

Son absence serait malheureusement révélatrice dumarasme dans lequel plonge notre passion.A méditer …

Une note d'optimisme : j'ai depuis discuté avecplusieurs professionnels ayant exposé à Paris. Tousme disaient avoir « très bien travaillé » sur le salon.

La baisse des visiteurs serait­elle due à la crise, quifait que les gens ne payent plus une entréeuniquement pour voir du matériel mais que ceux quiviennent ont déjà prévu leurs achats et viennent lesconcrétiser ?

Rencontre avec Bruno Pimpanini, monteur demouches à saumon. Bruno a commencé le montageil y a 20 ans à l'APNLE. Il débute, avec Jean­PaulDessaigne, le montage des mouches victoriennes il ya 7 ans.Bruno ne pêche pas le saumon, mais pêche la truiteet monte ses mouches.Il a participé à différents concours aux Etats­Unis etest membre du Fly Tying Forum dont il a gagné leconcours en 2006.

Une tête qui n'est pas inconnue de Gobages pour laprésentation du tenkara par Maxime Miquel.

Un stand de matériel de montage bien fourni avecTOF.

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Nos amis du club des saumoniers. Leur slogan parlede lui­même.

Le stand Jacky Boileau. Impossible d'imaginer que ceserait son dernier salon.

Une marque qui fait l'effort de présenter une grandediversité de matériel.

Le stand partagé par Dumont Rod et Pêche à soie.Inutile de les présenter.

Certainement le prix du plus beau stand pourVincent alias Mouche Guy Plas.

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15Avril 2013

Nos amis du club des saumoniers. Leur slogan parlede lui­même.

Le stand Jacky Boileau. Impossible d'imaginer que ceserait son dernier salon.

Une marque qui fait l'effort de présenter une grandediversité de matériel.

Le stand partagé par Dumont Rod et Pêche à soie.Inutile de les présenter.

Certainement le prix du plus beau stand pourVincent alias Mouche Guy Plas.

Jean­Paul Dessaigne, toujours disponible pourdonner des informations sur le stand Ardent.

Boom sur le stand Euro­Fly

Une association qui a redémarré il y a peu de temps.

Le calendrier Gobages.com

Bien souvent nous sommes sollicités surle pourquoi nous ne montrons pas àl'avance les photos du calendrier. C'esten fait un choix pour préservermystère et plaisir lors de la découvertedes photos de l'année.

Dans les pages suivantes vous pourrezvisionner les photos du calendrier 2012.

Si vous souhaitez participer sachez quenous demandons que les photos n'aientpas été publiées. Alors gardez au chaudune ou deux jolies photos, pour pouvoirparticiper.

La magnifique photo de couverture del'édition 2012 est l'œuvre de YannABDALLAH.Merci aux contributeurs d'accompagnernotre année.Jean‐Yves.

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Calendrier 2012 :Un dernier regard ~ (Damien Brouste)

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Calendrier 2012 :Fish eye ~ (Damien Brouste)

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Calendrier 2012 :Fragile bataillon ~ (Adrien VIGNOLLET)

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Calendrier 2012 :Fragile bataillon ~ (Adrien VIGNOLLET)

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Calendrier 2012 :Relâchez vos rêves ~ (Adrien VIGNOLLET)

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Page 27: Gobages.com la revue N°8

Calendrier 2012 :Rendez‐vous même lieu même heure ~(Adrien VIGNOLLET)

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Calendrier 2012 :Force rouge ~ (Adrien VIGNOLLET)

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Calendrier 2012 :Se faire mener par le bout du nez ~(François BONTEMPS)

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Calendrier 2012 :Rapidité et précision ~ (Gérard Piquard)

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Page 34: Gobages.com la revue N°8

Calendrier 2012 :Légendes d'Automne ~ (Gérard Piquard)

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Page 36: Gobages.com la revue N°8

Calendrier 2012 :Pêche complice ~ (Jean‐Louis Suarez)

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Calendrier 2012 :Brumeuse Sana ~ (Yann ABDALLAH)

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Opération zéro déchetsur les Nives

Pour la quatrième année consécutive, la journée de nettoyagedes berges de la Grande Nive s’est déroulée sous un soleilradieux et dans une excellente ambiance. Une nouvelle saisonhalieutique va démarrer sur les Nives et avant de profiter 6 moisde l’année de nos chères rivières, il est bon de leur consacrersimplement une journée en retour….ne pas être un simpleconsommateur.La forte mobilisation des bénévoles récompense le gros travail enamont du Syndicat Mixte du Bassin versant de la Nive , de sespartenaires : le SMUN (Syndicat mixte de l’usine de la Nive) etBil Ta Garbi (acteur local en charge de la valorisation et dutraitement des déchets ménagers et assimilés et l’associationd’insertion professionnelle Lagun.Grâce à l’implication des sociétés de sport d’eaux vives de la vallée,riverains, pêcheurs et amoureux des Nives se sont retrouvés sur lemême bateau pour participer à cette journée de nettoyage.Depuis la première édition, les membres de l’AAPPMA de la Niveparticipent activement à cette journée de nettoyage poursensibiliser au maximum sur l’avenir de nos rivières au PaysBasque.

Avec 110 bénévoles qui ont répondu présent, ce ne sont pasmoins de 500 kg de plastique, 1T de ferraille, 500 kg de pneus,30 kg de verre pour seulement 2 kilomètres de rivière nettoyés…

Triste bilan pour notre Grande Nive ... il est vraiment temps queles gens se rendent compte de la chance d’avoir de tels « joyaux »qui coulent au cœur de nos montagnes, de nos villages.

Mot du président de l’Aappma de la Nive :

"Un premier contact avec la Grande Nive après six mois deléthargie...Un rendez vous désormais incontournable et un tempsfort pour l'AAPPMA de la Nive !

La Grande Nive et ses habitantes ont été choyées, elles sontmaintenant prêtes à nous recevoir pour la saison 2013 !Bonne pêche au Pays Basque !"

Didier MINVIELLE­DEBATPrésident de l'AAPPMA de la Nive

par Cédric SIMONET

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Pourquoi une telle initiative ?« L’objectif est de sensibiliser la population à la dégradation denos cours d’eau », explique Maxime Diribarne, technicien derivière du Syndicat mixte du bassin versant de la Nive. « Cetteannée sera la quatrième édition de cette journée … et au vudu nombre de décharges sauvages répertoriées sur la Nive, çane sera pas non plus la dernière ! ». L’an dernier, plus de 70bénévoles se sont mobilisés autour de ce projet pour nettoyer1500 mètres de rivière. 200 kilos de pneus et autant dedéchets plastiques et de ferrailles ont été enlevé.

3 Organisateurs:Le Syndicat mixte du bassin versant de la Nive:

Regroupant 46 communes du bassin de la Nive et lacommunauté d’agglomération Côte Basque­Adour, le Syndicatmixte du bassin versant de la Nive met en œuvre le contrat debassin, outil de gestion intégrée de l’eau, structure le bassin enterme d’entretien des rivières et est opérateur de la démarcheNatura 2000 sur la Nive. Plus d’infos sur www.bassin­versant­nive.com

Le Syndicat Mixte de l’Usine de la Nive (Smun):Le Smun est un syndicat en charge de la production d’eaupotable pour 26 communes du Pays Basque et du sud Landes.Il capte l’eau de la Nive à Ustaritz pour ensuite la traiter et larendre potable grâce à ses installations implantées sur Anglet.Produisant environ 10 millions de mètres cubes par an, ilalimente un large bassin de vie : 190 000 personnes en hiver etjusqu’à 400 000 en été. Plus d’infos sur www.smun.fr

Bil ta Garbi: Bil Ta Garbi est un acteur public local en chargede la valorisation et du traitement des déchets ménagers etassimilés. Il regroupe 12 communautés de communes et 1communauté d’agglomération rassemblant 202 communes etplus de 270 000 habitants d’une grande partie de l’Ouest dudépartement des Pyrénées­Atlantiques

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A la poursuite des truitesdu bout du monde

par Alexis GANTE

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« un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas »Lao Tse

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Je reviens de l’Hémisphère Sud, d’une île perdue parmi les milliers de confettis quijalonnent l’océan dans cette partie du monde. Ce voyage trouve son origine dans un rêvede gosse, celui de partir seul, sac sur le dos, dans le but de me confronter à la natureoriginelle et dans l’espoir de débusquer quelques truites rageuses, qui n’auraient pastrop connu le piquant des hameçons.

Nul doute que ce voyage m’a donné entière satisfaction ! Mais maintenant, j’ai le plusgrand mal à trouver le ton juste pour décrire cette aventure, car ce périple en solitairem’a fait riche de souvenirs qui isolent. L’expédition aux franges du monde connu que jem’étais bricolé s’est également transformée en voyage introspectif, en prise deconscience de mes propres limites.Au cours de ces dix jours sur place, j’ai pleuré d’être perdu, ri du chant d’un oiseau,hurlé de solitude. J’ai erré dans la tourbière, hypnotisé par l’immensité, malmené par levent.

Cela a­t­il encore à voir avec un récit halieutique ? Je pense que oui, car si ce voyage alargement dépassé la sphère de la pêche à la mouche, c’est ma passion pour cettedernière qui m’a fait franchir la ligne rouge et trouver parfaitement légitime etdéfendable de partir seul, avec l’aide de cartes bricolées maison sur un GPS fraîchementacquis. Je vous propose un condensé de cette aventure, qui restera gravée à jamais dansma mémoire comme ma première confrontation avec la nature dans ses atours les plussauvages.

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L’île, lieu idéal pour agacer les ima­ginaires. La géographie a parléd’elle­même, quelques cailloux etpuis plus rien, seulement la mer quia refusé le passage à tellement demarins… Après des mois à avoirfantasmé ce périple, sur le quai, j’ailes entrailles serrées par la trouillede l’inconnu. Abruti par le vol et lanuit dans une auberge de jeunessesordide, je n’ai qu’une hâte, quitterla caricature de ville dans laquellej’ai atterri la veille, m’enfuir de ceFar West du tourisme.Avant d’accoster sur une jetée prête

à s’effondrer, il a fallu patienter faceà la nonchalance de quelquesdouaniers, puis subir le roulis d’unbateau minuscule au regard deshumeurs de l’océan.Pour se rendre sur la seule ville del’île, il faut encore affronter dans unvan à bout de souffle quarante kilo­mètres d’une piste coincée entreune forêt impénétrable qui dégrin­gole de la montagne et un trait decôte tout en fractures. Collé à la fe­nêtre, j’observe la mer sans cesseparcourue d’un frisson où se dé­clinent toutes les nuances de l’acier,

tour à tour griffée par le vent,balayée par la lumière ou par lesgrains qui enflent à l’horizon.Quelques témoignages de l’occupa­tion humaine ponctuent le chemin,un petit chalutier aux couleurs fanéesou quelques vaches ou chevaux s’en­fuyant mollement à l’approche du véhi­cule, mais la plupart des constructionssont abandonnées. Missionnaires etchercheurs d’or, privés d’âmes àconvertir et de métal précieux, ont lâ­ché prise au début du siècle dernier,et seuls s’accrochent encore quelqueséleveurs et pêcheurs.

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« La mer [...] balayée par la lumière ou par les grains qui enflent àl'horizon »

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Avant l’homme blanc, trente mille Yagans,navigateurs et nomades se déplaçant d’îles en îles,illuminaient la mer et les côtes de ce bout dumonde, faisant ronfler un feu permanent entretenujusque dans les canots. On raconte que devant cettevision les premiers explorateurs européensnommèrent cette partie du monde « Terre de Feu ».

Ce peuple qui faisait briller la côte s’est éteint, terrassépar les maladies importées du Vieux Continent, etrapidement privé de sa principale ressourcealimentaire et vestimentaire, le lion de mer.

Aujourd’hui Il reste moins de trente témoins de cettecivilisation, malaise devant un minuscule cimetièreperdu que les herbes dévorent.Seul l’intérêt géostratégique de l’île justifie encore uneprésence humaine.La Ville se résume à quelques dizaines de maisons debois sommaires jetées le long de rues gravillonnées,trois ou quatre bâtiments administratifs, et unpimpant quartier militaire, maisons blanches bienalignées, église en surplomb des navires de guerre etcanons pointés vers l’océan. Je tourne le dos à tout ça,et m’enfonce dans la forêt.

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65Avril 2013

J’avais prévu deux jours de marche plein sud, parun sentier apparemment balisé, pour rejoindre uncabanon construit au bord d’un lac, où plusieursrivières convergent à moins de quelques kilomètresl’une de l’autre. Ensuite, je m’étais imaginé capablede rallier, en dehors de toute trace humaine, unesection de rivière entre le lac et la mer, où je pensaisles truites grosses et grasses de leurs allers­retoursfréquents avec l’océan. Ça, c’était vu depuis monordinateur, la réalité a été un peu différente.

Dès le début, je me perds complètement, refusantde croire mon GPS et suivant une vague trace quim’aura emmené dans une forêt impénétrable. Jerebrousse chemin. J’aurai perdu quatre heures avantde trouver le départ du bon sentier. Epuisé, j’installeun camp de fortune dans un fond de valléedétrempé, à cinq kilomètres de mon point dedépart. L’humidité m’empêche de lancer un feu, jesuis mouillé, couvert de boue, et le moral en a prisun sérieux coup.

Le lendemain, je comprends que la journéeprécédente n’a été qu’un vague aperçu de la réalitédes lieux. Je me suis fixé pour objectif de rallier lacabane, pour ça je dois passer un col de montagne,et couvrir près de dix­sept km.

Sous une pluie régulière, puis sur les hauteurs, sousla neige et les grêlons, je m’engage dans ce quis’avère être un parfait parcours du combattant.

Pour cause de castors, le chemin est unenchevêtrement de troncs, au­dessus ou en dessousdesquels il faut passer avec le sac de plus de 20 kg.Bien évidemment les divins rongeurs n’ont pasépargné les arbres avec les signes du sentier, que jeperdrai des dizaines de fois, errant, de l’eau aux

genoux ou dans des sous­bois inextricables à larecherche du moindre signe pouvant m’indiquer lebon chemin.

Je marche tour à tour dans de profondes forêts oùrésonne le ricanement diabolique du Pic deMagellan, le long des dizaines d’ouvrages de castors,dans des plaines inondées, sur les rives de lacs demontagnes aux eaux glacées, dominés par les crocsenneigés de la Cordillère de Darwin.

L’eau partout, en ruisseau grondant, en rigole, enétang, gorgeant le sol, suintant de la moindrepierre, gouttant du moindre arbre.Dans le ciel, le bleu est trop vite balayé par les

nuages de pluie qui semblent tapis derrière chaquemontagne, chaque crête, prêts à foncer sur moipoussés par le vent hurlant qui me mord les mainset le visage.

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Un des nombreux lacs qui constellent la montagne.

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Après ce qui m’a paru comme un interminablecalvaire, la vallée s’élargit et je pressens le lac toutau fond. Pour en terminer, je traverse une immensetourbière de plus de deux km de long, que jeparcours dans un état presque second, titubant,tombant, me relevant couvert de boue et à moitiéfou, épuisé, le regard embué par des larmesd’impuissance face à une nature qui semblem’aspirer en son sein.Enfin, je longe les méandres d’une rivière, et blotticontre une colline, cerné d’arbres, le doux refuge.Quelques planches de travers, des plaques de tôleen guise de toit, mais un merveilleux, un superbe,un inespéré poêle à bois !

J’ai trouvé mon Hermitage, tant pis pour la sectionde rivière entre le lac et la mer, pour laquelle ilaurait fallu repartir pour plusieurs jours de bivouac.Je prospecterai autour de ma douce cabane, ayantpris la mesure de l’âpreté de la nature quim’entoure. Je m’effondre pour dix heures desommeil après m’être vêtu, « oh bonheur

suprême ! », de vêtements secs.

Après avoir dégringolé les montagnes enbouillonnant, les rivières paraissent à l’approche dulac, semblant regretter de s’y jeter. Elles méandrenten immenses boucles au milieu d’un paysage detourbières, de barrages de castors et d’arbres morts.Le lac, lui, est immense, rythmé par des chapeletsd’îles couvertes de forêts.De ma cabane, je pouvais rejoindre trois rivières àmoins de deux heures de marche. Toutesprésentaient des estuaires bien dégagés, propices àla pêche, tandis qu’en les remontant, les arbresmorts, la végétation rivulaire et les ouvrages decastors rendaient cette dernière beaucoup plustechnique et difficile.

Une de ces rivières drainait une vallée merveilleuseoù je n’aurais pas été étonné de croiser quelquesdinosaures tant l’amplitude du paysage, laluxuriance de la végétation et la violence des truitesramenaient aux temps premiers.

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69Avril 2013

J’ai touché trois espèces de poissons dans ces eaux :

­ des truites arc en ciel, une souche superbe et trèscolorée. Toutes avaient un point orange sur le hautde la dorsale, certaines étaient presque bronze,voire olive.

­ des saumons de fontaine, poisson à la robe somp­tueuse, le dos sombre et marbré, les flancsvermillon, des ocelles bleues et jaunes, d’énormesnageoires ourlées de blancs et surtout cette gueuleet ces yeux noirs d’encre qui leur donnent un airrageur et furieux.

­ des peladillas (Aplochiton Taeniatus), poissons en­démiques d’Amérique du Sud, au corps gris bleu etentièrement lisse, morphologiquement pas trèséloigné du hareng. Pas bien gros mais très bagar­reurs.

Les poissons faisaient entre 35 et 50 cm, peut­êtreun peu plus pour certains spécimens, les peladillasne dépassaient pas les 25 cm. J’ai pris quelques ju­véniles en remontant les rivières. De toute évi­dence, il doit y avoir de plus gros sujets quiremontent du lac à l’automne, et j’en aurais trèscertainement rencontrés sur le secteur à l’aval dulac si j’avais eu le courage de m’y rendre.

Les deux tiers des poissons que j’ai touchés l’ontété en pêchant au streamer.

En lac, je pêchais avec de grosses imitations (hame­çon 4 voire 2) et une pointe plongeante, en privilé­giant les zones potentielles de passage despoissons, les enrochements, les cassures.En rivière j’ai mis un peu de temps à comprendreles tenues des truites. Je me suis d’abord focalisésur les berges, avant de réaliser que les poissonsétaient sous les herbiers et regardaient plutôt versle milieu de la rivière.

Sur les portions rapides, je pêchais un peu commeen roulette, en conduisant de petits streamers trèsplombés dans les veines d’eau, le long desobstacles, dans l’attente de la décharge qui allaitm’arracher la soie ou d’un simple arrêt de la dérive.De manière générale, les attaques étaient francheset violentes. Malgré cela, j’ai loupé ou décroché unnombre incalculable de poissons, surtout sur lesportions rapides.

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Bijou du bout du monde.

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Salmonicus fontinalis la beauté brute.

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A noter qu’arcs et saumons ont des défenses trèsdistinctes. Les arcs n’hésitent pas à bondir plusieursfois hors de l’eau, et enchaînent les accélérationssoudaines. En revanche, les saumons de fontaineoffrent une résistance toute en puissance, tentant àtout prix de garder le fond. Quelle que soit l’espèce,les poissons m’ont proposé une défense sauvage etpuissante, à croire que l’isolement ne leur a pas ap­pris les bonnes manières !J’ai également pu pêcher presque tous les jours ensèche, ce à quoi je ne m’attendais pas forcément. Jeme suis mordu les doigts de ne pas avoir pris maboîte de mouches pour les rivières françaises. Tcher­nobyl, sauterelles et autres cigales étaient horsd’échelle au vu des éclosions.En rivière, de tout petits éphémères sombres dé­rivaient lorsque les fins de journée étaient calmes etlourdes, mais ne semblaient pas intéresser les pois­sons. De temps en temps, j’observais un gobagesporadique, et en général, un gros criquet n’étaitpas refusé. Lorsque je relis mes notes, je me rendscompte que je n’ai quasiment pas pu sortir un pois­son de la rivière en sèche_! Tous les poissons ainsipris étaient des arcs qui m’ont offert un véritablefestival de cabrioles en tout genre, clos presquesystématiquement par un décroché.En lac, le matin, lorsque le vent n’était pas encorelevé, j’avais de bonnes chances d’assister à des re­tombées massives de bibios. Le lac était alors cou­vert de gobages. Presque systématiquement il

s’agissait de saumons de fontaine. Les poissonsétaient parfois à moins d’un mètre du bord, danstrente cm d’eau !J’ai passé quelques moments exaltants, dans l’eauau­dessus de la ceinture, à plus de cent mètres de larive (les berges étaient la plupart du temps en pentedouce et sablonneuses), entouré de gobages, à ten­ter de leurrer avec des imitations de sauterelles despoissons marsouinant sur des petites mouchesnoires! J’ai connu quelques échecs cuisants maisquel bonheur lorsque l’imitation disparaissait dansun remous…Chaque poisson pris m’apparaissait comme un tré­sor, un don de ce bout du monde isolé de tout.Lorsque j’étais lassé de la pêche, que le vent gron­dait trop, je me couchais parmi les fleurs et lesmousses, attentif à ne pas perdre une miette desmoments uniques que je vivais.

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Parfois, le vent façonnait un arbre à la façon d’uneestampe japonaise, d’autre fois, je me perdais dansl’observation du couvert végétal de la tourbière.Mousses, lichens, fougères, fleurs, rivalisant d’abon­dance et de beauté pour couvrir le sol d’un manteauorganique, tapis mouvant sous le pied du marcheur.Partout autour de moi, les oiseaux, petits canardssiffleurs, toujours soucieux de leur portée, grèbes etgrands cormorans, concurrents sur les meilleurs

coins de pêche, saluant mon arrivée de leur lourdeenvolée ou d’un cri rauque, et des centaines de pas­sereaux, multicolores et vifs, dont le gazouillis mar­quait l’arrivée du soir.Un matin, j’ai tourné le dos au lac, ajusté mon sac, etsuis parti vers la montagne. Longtemps j’ai regardéen arrière, jusqu’à voir au loin l’Archipel du CapHorn, comme un appel à aller encore plus loin laprochaine fois.

C’est de retour en France, en serrant ma femmedans mes bras à l’aéroport, en écoutant les amis, lescollègues, dont certains pensaient assez sérieuse­ment ne pas me revoir, que j’ai pris la mesure del’aspect un peu fou de ce périple. Pourtant, jamais jene me suis senti en danger. J’ai franchi un cap, celuide la prise de conscience qu’il est relativement facilede rompre les amarres et de partir au gré du vent.Mais je dois reconnaître que l’exercice de la solitudea été particulièrement éprouvant, sans doute le prixà payer pour contempler le spectacle de la beautédu monde.

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Estampe japonaise.

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Jacky Boileau.

par Patrick FAURE.

Cet article était prévu de longue date. Enpréparant mes questions, il y a quelquessemaines, je ne pensais pas le réaliserdans ces conditions.

Nous devions évoquer la proche retraite de Jacky(en juillet de cette année) et le passage de relais quiétait en train de s'opérer entre lui et Christophe. LeDestin en a décidé autrement. Jacky est décédé le17 février d'une crise cardiaque.

La veille, en plaisantant , il avait demandé àChristophe la « permission » d'aller à la pêche. Cettesortie au réservoir avec Daniel, fut hélas, la dernièrede sa vie.

Tout le monde connaît les cannes qui ont fait saréputation, beaucoup ignorent quel pêcheurexceptionnel il a été.

J'ai commencé à pêcher avec lui dans les années 90.Je me souviens encore de ces coups du soir sur la

Vienne où tous les trois (avec Alain avec qui ilpartageait ses « sessions saumon »), nous nousinstallions sur le même plat en attendant que lesombres montrent le bout du nez.Malheur à qui loupait un poisson, car « çachambrait dur ».

Le plus impressionnant est que c'était un pêcheurcomplètement éclectique. Le saumon était sagrande passion mais il faut voir le plaisir qu'ilprenait à leurrer les truites du Plateau ou duréservoir, les ombres, les aloses ou encore lesmulets.

Voici quelques photos en souvenir de lui. Sûr queplus d'un pêcheur pensera à lui en arpentant lesrives des rivières Limousines.

La plus belle phrase qui puisse nous rester enmémoire est celle de son épouse et de ses filles :« le malheur de l'avoir perdu ne doit pas nousfaire oublier le plaisir de l'avoir connu ».

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La reprise du flambeau

Depuis quelques mois, Christophe a repris l'activité deJacky. Certains on déjà fait sa connaissance car ils étaientensemble au salon de Paris.

Depuis un an environ, Jacky lui transmettait son savoir.Christophe avait déjà monté des cannes mais il lui fallaitconnaître les particularités de chaque modèle de lagamme Boileau.

Les blanks sont là :

Les cannes en cours demontage ou réparation (Christophe effectue aussi lesréparations de toutes sortes de cannes) sont sur lerâtelier.

L'oeil est aguerri, le geste est sûr .

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Ces billes laiton existent en 3coloris : noir / cuivre /chrome.

8 tailles sont disponibles : 1mm /1.4mm / 1.7mm / 2.5mm / 3mm / 4mm/ 4.5mm / 5.5mm Le test porte sur lesbilles de couleur noires en taille 2.5 et3mm.Le produit présenté sous pochette plastique, estcomposé de 10 billes usinées dans la masse, évaséesd'un côté et échancrées de l'autre.

UTILISATIONS :Produit parfaitement calibré, ces billes permettent demonter des nymphes assez légères, sur des hameçonsH14 et H16 standards ou courbés.

Le perçage des billes est bien adapté aux tailles deshameçons « forts de fer ».L’échancrure à la base de la bille permet un blocage aiséavec la soie de montage. La brillance des billes noiresest intéressante pour relever des montages sombres.

Les billes sont homogènes, régulières, que ce soit encoloris, en diamètre extérieur ou en diamètre deperçage. Les perçages sont réalisés bienperpendiculairement à l’usinage de la collerette. Lesdiamètres et le poids sont conformes aux taillesannoncées.Les possibilités de montage restent classiques,cependant, je trouve que le coloris noir donne unepalette supplémentaire de montage par rapport auxcouleurs « standard » des billes laitons.

CONCLUSIONS :

Il s’agit là d’un produit bien adapté et bienproportionné pour le montage des nymphes sur deshameçons H14 et H16.Le poids des billes permet de faire des nymphes à lacoulée assez rapide.Il aurait peut­être été judicieux de penser à une autrepossibilité de conditionnement. 10 billes par sachet,pour certains monteurs « fous », ça fait un peu juste…

Les + du produit:­ La gamme de couleur et de taille permet de couvrirtoutes les situations.­ La régularité de l’usinage, des diamètres, des perçages.­ Utilisation et mise en œuvre a la portée de tous.

Les moins du produit:­ le nombre de billes (10) par pochette. Uniqueconditionnement.

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Billes nymphe noirespar Spent82.

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L’apéritif fut mené grand train, vin jauneChâteau­Chalon cuvée de l’abbé, planchettegarnie d’une Pachon au marc du Jura rele­vée à l’ail des ours, une gentillesse pour se

mettre en bouche ! Marcel finit de se présenter, ilpêchait depuis l’aube de ses temps. Entre deux ron­delles de Pachon, il confessa même avoir mené àl’épuisette sa première carpe bien avant l’abandondes couches. Il était un pêcheur né comme avant luison père, son grand­père et tous ses nobles aïeux.Ces gens­là savaient attraper du poisson depuis lacréation du bambou et, à écouter Marcel, c’étaiteux, les Jovignot, qui l’avaient inventée : la pêche.Sauf que, d’aussi loin que remontait cette illustre li­gnée, elle avait été l’innocente victime d’une ter­rible malédiction.–– Comme je vous le dis ! Mais juste entre nous,avait avoué Marcel tout haletant, le doigt pointévers le ciel pour prendre à témoins Dieu et tous sesSaints, jamais, au grand Diable jamais encore, unJovignot n’avait « chopé » d’ombre ! Le mauvais œil,rien d’autre, avait­il lâché avant d’être interrompupar l’arrivée de la serveuse. Elle déposa devant noustrois assiettes où trônaient majestueuses, troissaucisses de Morteau toutes fumantes, accompa­gnées d’un charmant gratin de pommes de terre auComté et de quelques petits légumes pour fairebonne figure, rien de tel pour oublier « malédic­tion », «mauvais œil » et je ne sais quoi encore… !Durant le repas, on parla : repas ! Bertrand a tou­jours eu l’art de discourir d’un unique sujet lors­qu’il mange : la nourriture. Non content de sesuffire à l’absorber, il aime en disserter. En Casano­va des fourneaux, il livre, impudique et sans com­plexe ses nombreuses expériences. Il en va d’unhaut de cuisse rôti à la braise, en passant par lesdessous d’une tarte farcie de fruits exotiques. Sansoublier, bien entendu, ses moules normandes quel’on caresse de crème et peut­être aussi, ses petitespoires voluptueuses fermes au toucher, mais si sa­voureuses quand elles vous fondent dans la bouche.Des histoires comme celles­là Bertrand doit enavoir, en réserve, une pour chacun des repas qu’il

lui reste à faire et que le ciel m’en soit témoin, cethomme­là finira vieux, très vieux !Bertrand nous raconta, ou plus précisément énu­méra, les innombrables manières d’accompagnerdignement une saucisse de Morteau : avec des len­tilles, avec des pommes cuites au four, avec du lard,avec… Marcel entre deux bouchées buvait libérale­ment les paroles de Bertrand et moi, tout simple­ment je savourais l’instant !Puis vient le tour du dessert ! Pas grand­chose, justetrois tartes aux pommes mariées à une glace vanillefaite maison, un pur délice. Une fois le dessert en­glouti pour certains, dégusté pour d’autres, leschoses sérieuses purent reprendre.Bertrand nous envoya chercher nos boîtes àmouches, histoire de dresser un état des lieux.Comme deux gamins désireux de satisfaire leurmaître d’école, Marcel et moi avons bondi sur nosgilets de pêche pour y cueillir nos trésors secrets.Ouvertes en grand sur la table entre les cafés et lespetits verres d’Armagnac (cadeau du patron), cinqboîtes remplies à ras bord de mouches subissaientl’examen de passage par l’œil averti d’un Bertranddevenu subitement aussi sérieux qu’un apothicaire.Après un silence de funérailles, le verdict tombaaussi sec que la guillotine :–– Aucune chance Messieurs ! Ce que vous avez làpeut éventuellement tromper une truite, mais il estquestion ici de Thymallus thymallus et avec ça… Ildésigna les boîtes à mouche d’un rapide mouve­ment du menton, attitude de dédain qu’il accompa­gna d’un profond soupir, avant de répéterlaconique :–– Aucune chance ! Même avec un spécimen engrève de la faim depuis trois saisons, vous n’aurezpas le moindre petit début de chance !Marcel parut complètement dépité, à l’image d’uncondamné venant d’apprendre l’heure de sa sen­tence. Connaissant Bertrand et la manière toutepersonnelle qu’il avait d’exagérer les choses, j’es­sayais de sonder ses yeux pour en apprendred’avantage. Mais leur bleu glace ne reflétait qu’unechose : la vérité.

Les confessions romancées d’un pêcheurmythomane

La Dame de Saint UrsannePartie 2

par BleuVague.

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J’avais passé des soirées entières crispé sur monétau, mais sans l’ombre d’un doute, j’avais échoué !Etait­ce cela l’inconnue de mon équation, unesimple question de mouche ?Bertrand semblait réfléchir. Alors ni Marcel, ni moin’osions prendre la parole, nous nous regardionsen coin attendant que l’un ou l’autre prenne l’ini­tiative.–– Allons bon Messieurs, vous n’allez tout demême pas vous mettre à pleurer ! Vous avez desmouches à truites, qu’à cela ne tienne, un petit tourdu côté de Saint Ursanne et vous aurez desmouches à ombre.–– C’est qui c’te Sainte Ursanne ? Une nonne ?J’aime pas bien trop les couvents moi, mais si lareligieuse a le pouvoir de transformer lesmouches… Lâcha Marcel qui, mû par la curiosité,venait de rompre notre mutisme.–– Pas qui mais où ! Corrigea Bertrand. Saint Ur­sanne est une petite bourgade sur la rive suisse et ily a là­bas un détaillant d’articles de pêche ou de­vrais­je dire un orfèvre en la matière. Chez les Hel­vètes, ce type est un mythe, une sorte d’oraclequ’on vient consulter quand plus rien ne marche, etje vous promets qu’on vient de très loin. Il faut levoir pour le croire… S’il t’a à la bonne, quand il tedit « Aujourd’hui c’est cette mouche ! » en temontrant une espèce d’imitation que tu ne verrasjamais ailleurs, ne te pose alors plus aucune autrequestion. Tu noues à ton bas de ligne laditemouche, et de la Goule à la borne frontière de Bré­moncourt, tu vas taper à en avoir des crampes aupoignet. Le plus incroyable dans l’histoire, c’estqu’en aval de cette borne, plus rien ! Les poissonsrefusent la mouche, comme si l’enchantements’évaporait, dilué dans l’eau. En résumé, le pouvoirdu type est certain, mais géographiquement locali­sé ! De surcroît, Messieurs, vous allez vous réjouirau moment où je vais vous annoncer le plus beau :en plus d’être médium, le sorcier de Saint Ur­sanne est un spécialiste incontesté et incontestabledans l’art et la manière de pêcher l’ombre.

Marcel ouvrait de grands yeux dont les pupilless’étaient dilatées, sorte de réponse hypnotique auxpropos de Bertrand.–– C’est loin d’ici ce bled ? Faut l’VISA pour la Suisse ?–– Non l’ami, une MASTERCARD suffira, réponditBertrand tout sourire. Remballez vos affaires on yva, conclut­il en se levant d’un bond.

Sur les 35 kilomètres qui nous séparaient de la villepromise et de son mage, Bertrand nous en révélaun peu plus sur cet « imprévisible » des rivières. Se­lon lui, l’ombre avait ses goûts et ses couleurs, unpeu à la manière d’une femme, impossible de lui re­filer du toc, il préférait de loin l’ostentatoire audoux plaisir de la simplicité. Il nous raconta mêmequ’au siècle passé, dans les années quatre­vingt­dix,un type avait créé une collection de nymphes« haute couture » rien que pour l’ombre et croyez­moi si vous le voulez mais ces petits bijoux étaientcoulés dans du métal précieux, de l’or aux dires deBertrand. Je n’ose imaginer le prix de la chose !

–– Et ça marchait, ces bidules en or ? DemandaMarcel qui m’ôta littéralement les mots de labouche !–– Cela dépend pour qui ! Répondit Bertrandamusé ! Au début, les ombres ont trouvé ça marrantqu’on les gave à coup d’or 18 carats, mais très viteils ont fini par juger ça trop dur à avaler ! Pour lesmarchands de monts et merveilles l’affaire a été ju­teuse. Ils ont entretenu la légende un bon bout detemps, histoire de faire tinter le tiroir­caisse. Ils ontchanté à qui voulait l’entendre qu’on avait décou­vert l’aimant à ombre, une formidable arme dedestruction massive ! Tenez, ajouta­t­il, je mesouviens même d’un article paru à cette époque,dans une revue halieutique des plus sérieuses et si­gné d’une grande plume. Un plaidoyer sincèrecondamnant avec véhémence ce nouveau fléaupour l’ombre. L’effet fût immédiat ! Plus possible detrouver la moindre nymphe en or.

–– Belle prise de conscience, dis­je !–– Gros naïf, me rétorqua Bertrand moqueur ! Lestiroirs caisses ont sonné comme jamais, j’en ai en­core les oreilles qui sifflent… Pensez­donc, tous lesviandards de l’hexagone se sont rués sur la mitraille,question d’arroser l’ombre en bonne et due forme !Plus besoin même d’un fouet ! Une bonne canne enfibre de verre montée pour le brochet, un grosplomb et l’affaire devait se faire ! Sauf qu’un ombrea un peu plus de jugeote que le viandard moyen. Jeles entends encore rire d’ici nos chers Thymallusthymallus en voyant toutes ces richesses leur pleu­voir sur la gueule.Jusqu’alors on les appelait les poissons d’argent, etvoilà qu’ils venaient par miracle de prendre de la va­leur. Un vrai délit d’initié…

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Marcel riait de bon cœur. Moi, j’imaginais la scène enme demandant s’il serait lucratif de ratisser le fonddes rivières à la recherche de tout cet or endéshérence ?On entre dans Saint Ursanne en passant un pont àquatre arches qui enjambe fièrement le Doubs. Sil’idée vous prend de vous arrêter en son milieuvous y remarquerez assurément deux choses. Pourles plus pieux d’entre vous, dont je suis certainqu’ils sont fort nombreux : la statue de Saint­JeanNépomucène protecteur du lieu. Pour les autres, lesindisciplinés, ceux pour qui la vue d’une rivière estsynonyme de jouissance, et qui, pauvres pêcheurs,ne peuvent résister à la tentation d’y jeter un œilconcupiscent « au cas où… » : une bande de che­vesnes remarquables tant par le nombre que par lataille des spécimens qui la composent. Cette coloca­tion de poissons a élu domicile à l’année légère­ment en amont de la deuxième arche.–– Nom de Diou, ne put s’empêcher Marcel aupassage du pont. Et croyez­moi ce n’est pas la ren­contre avec la statue de l’homme d’église qui arra­cha son blasphème à notre nouvel ami ; statue qu’iln’avait du reste, très clairement pas dû apercevoir.Mais c’est à notre bande de chevesnes qu’il avait dé­dié son juron !–– Z’avez vu les monstres ? Ils les nourrissent augrain ou quoi… ? C’est pas bien catholique desbêtes pareilles ! Il me tira par la manche pour meprendre à témoin. Non mais regarde, je te juremême en Dombes on n’en a pas de comme ceux­là !

Je fus dans l’obligation de pousser Marcel qui, plan­té sur place comme envoûté, donnait l’illusion dene plus jamais vouloir bouger d’un pouce. Quant àBertrand, en habitué du coin, il était passé sanssourciller, et s’engageait déjà dans la ville.Une fois le pont franchi, vous faites face à une im­pressionnante porte, qu’il faut traverser pour péné­trer dans la cité fortifiée. D’un coup le XXIèmesiècle s’oublie quelque part dans les arcanes dutemps, vous voici plongé en plein Moyen­Age. Sur lagauche, pointe une collégiale où se marient lesstyles roman et gothique. Lui faisant face, sur votredroite, une rangée de maisons typiquement médié­vales, dont une abrite un café­restaurant à la ter­rasse de charme. Puis, la rue principale amorce unvirage et se prolonge pour finir par buter contreune autre porte marquant la fin de la Saint Ursannehistorique.Bertrand s’était arrêté entre les deux portes de la

ville, à une centaine de mètres des murs de la collé­giale devant une échoppe où étaient parquées deuxgrosses berlines allemandes. Il nous fit signe de lamain. Je m’étonnais de le savoir amateur de puis­santes cylindrées, lui qui demandait principalementà une voiture d’être capable de l’emmener à lapêche quel que soit le terrain et, chose ô combienimportante, d’être assez longue pour recevoir une 9pieds entièrement déployée. Je pressais le pas pourle rejoindre. Derrière moi, Marcel suivait tant bienque mal, tout en marmonnant dans sa moustache.Je percevais çà et là quelques bribes de phrasesdont le sujet récurrent était la taille des chevesnesqui pataugeaient sous le pont.Arrivé à la hauteur de Bertrand, intrigué, j’exami­nais les plaques minéralogiques des deux véhiculesoù je lus immédiatement un D majuscule pourDeutschland, suivi d’une série de trois lettres : OAL.–– Dans l’Ostallgäu à la frontière du Tyrol ! Quandje vous disais qu’on venait de loin… Ponctua Ber­trand à notre adresse.Au­dessus de nous, se balançait doucement en grin­çant une vieille enseigne en fer forgé représentantun poisson que de mémoire je n’avais encore jamaisvu.–– C’est le roi du Doubs, ou l’arpon si vous pré­férez. Un poisson devenu tellement rare que d’enapercevoir un est le présage de bonne fortune ! Ex­pliqua Bertrand.–– Ils sont vraiment mystiques dans la région ouc’est juste une impression ! Ne pus­je m’empêcherde constater.–– Et tu n’as encore rien vu mon ami… Ils ont étélongtemps isolés par ici, alors ceci explique certai­nement cela.A côté de la porte, une fenêtre en arc, au travers delaquelle on devinait un établi où régnait un im­mense chaos. Attiré, je m’approchai pour mieuxvoir. Là, juste derrière la vitre se tenait un vieilhomme perdu dans un brouillard de fumée, enpleine discussion. Il me vit et me sourit avec cha­leur.Bertrand poussa la lourde porte en bois massif puisentra, suivi de Marcel et moi qui fermais la marche.

Un voyage ! Nous venions de glisser vers une di­mension inattendue, bien loin du monde réel.Certes, l’endroit était sombre et démesurément pe­tit mais n’importe quel pêcheur à la mouche auraitdeviné sur le champ qu’il venait d’atterrir auparadis. Marcel ne savait plus où donner de la tête.

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Quant à moi, j’avais le vertige tellement il y avait dechoses à voir. Nous étions devenus deux gosses in­vités dans la salle de jeux du Père Noël.Dans les boutiques que j’avais jusqu’alors fréquen­tées, hormis peut­être celle de L’ami du Moucheur(lire le kit Décathlon), tout y était ordre, disciplineet rigueur, rien jamais ne devait dépasser, même pasd’un poil de chevreuil. On y pensait « marketing »,« packaging », « merchandising » bref, des tas de« things » en « ing »… On vous vendait la peau desfesses, un pauvre bout de peau de chamois. C’esttout juste si vous deviez payez le cul­de­canard à lapièce. Et je ne m’explique pas encore pourquoi lesqueues de faisans devaient systématiquement subird’horribles mutilations avant d’être mises en rayondans des paquets toujours trop petits.

Ici, tout avait un autre goût. Les matériaux destinésau montage des mouches parsemaient le moindreespace libre. Dans cette caverne d’Ali baba, on avaittout jeté pêle­mêle pour le seul et unique plaisirdes fouineurs. Quand le propriétaire vous cédaitune peau de chamois, il s’agissait de la bête dansson entier, de quoi monter des mouches en cervidépour le reste d’une vie.

Les Jurassiens ont inventé les imitations en crou­pion de canard, la preuve formelle de cette affirma­tion était scellée entre ces murs. Il y avait en effetici, un choix quasi infini en matière de cul­de­ca­nard, de la taille de la plume, en passant par l’épais­seur de son rachis, sans oublier bien entendu lamultitude de ses coloris. Les emballages fourrés decul­de­canard pouvaient dépasser allègrement les50 grammes autant dire un nombre colossal deplumes.Exit les queues de faisans ayant été victimes d’uneamputation mercantile. Dans cette cour des mi­racles, les plumes quelles qu’elles soient avaientleur taille d’origine. Voici qu’au hasard d’un monti­cule, je vis pour la première fois de ma vie des cousde coq entiers «Whiting Farms Gold » et qui plusest dans des teintes que je n’avais même pas encoreosé rêver. Et, au beau milieu de la montagne d’à cô­té, c’était des lancettes longues comme l’avant­bras.Perdu sur une étagère, un cou du Léon accompagnéd’une valise débordant de plumes de « pardo ». Au­cune indication de prix ! Pour cela, il fallait s’adres­ser au maître de ce royaume qui fixait le cours desvaleurs à la sympathie qu’il vous portait.

A partir de ce jour­là, je suis retourné fréquemmentdans cet Eden du moucheur et toujours avec unplaisir tout enfantin.Il y a deux ans, une liste de fournitures de plusieurspages en poche, j’arrivai au pied de la boutique toutexcité. Ma surprise fut à la taille de ma déception :immense. A la place du marchand de Graal se tenaitune boutique de bijoux. De vous à moi, j’en ai pleu­ré et c’est encore le cœur gros que j’y repense au­jourd’hui !–– Bonjours Hans ! Lança Bertrand interrompantsans gêne la conversation que le vieil homme entre­tenait avec deux grands gaillards blonds comme lesblés.–– Ach… Bertrand mein freund , quel bon ventt’amène à moi ? Répliqua Hans avec un accent auxconsonances teutonnes. Je prends congé de mesdeux visiteurs venus de loin et je suis à toi… Jeveux dire à vous ! Ajouta­t­il en nous regardant Mar­cel et moi.Il continua à parler dans un allemand parfait enmême temps qu’il encaissait les deux hommes char­gés comme des mules.Au vu des billets passant d’une main à l’autre, j’aipensé que Hans venait de faire son mois…Il raccompagna les deux clients vers la sortie et lessalua amicalement d’une tape dans le dos.–– Ach, ces Allemands, il faut toujours qu’ilsfoutent leurs voitures au beau milieu de la rue, au­cun sens civique, vous ne trouvez pas ?–– Ha ça m’sieur, pour sûr, affirma Marcel enétouffant un début de fou­rire. Chez nous, les Fran­çais, le sens civique c’est notre seconde nature.–– T’es pas Allemand Hans ? Je l’aurais pourtantjuré ! S’étonna Bertrand.–– Gott Nein, nein ! Et ne jure pas mécréant ! Jesuis né dans le canton d’Obwald, mais ma mèreétait Alsacienne.–– C’est tout comme le petit­là, et il me désigna dudoigt, moitié Munster moitié Gruyère, une drôle defondue.–– Et tu as fait tout ce chemin pour me parler fro­mage ?–– Bien sûr que non …

Bertrand nous présenta tous deux à Hans et lui ex­posa la raison de notre venue. Dès qu’il prononçale mot ombre, le vieil homme devint plus attentif etfinit par s’asseoir devant un étau qu’il avait dû fabri­quer lui­même.

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Je restai là, l’observant, fasciné par le travail de sesdoigts qui se jouaient des fils et des plumes decroupion de canard avec la grâce d’un violoniste àson archet. Le mouvement était rapide et sûr sansque jamais la moindre hésitation ne vienne gâcherl’harmonie. De ses gestes, transpirait toute l’expé­rience des longues années passées, le dos plié surson établi faisant face à la fenêtre, répétant inlassa­blement ses gammes pour se rapprocher au­jourd’hui de l’excellence. Peu à peu naissait entreses mains une œuvre d’art. Il me la tendit. Je la pris,presque hésitant, tâchant d’être le plus doux pos­sible par peur de l’abîmer.Il devina ma réserve et me dit rassurant toujoursavec cet accent guttural :–– Faut y aller, c’est du solide ! Même une fois reti­rée de la bouche d’un ombre, elle te servira des tasde fois encore. Ce genre de mouche n’a qu’un en­nemi : les branches d’arbres.Je la fis tourner entre mes doigts, la contemplantavec tout le respect que l’on doit à une créationd’artiste.–– Quel nom donnez­vous à cette merveille ?–– Eh bien, mon gars, répondit­il en s’amusant dema question, une mouche à ombre, tout simple­ment !–– Mais elle n’a pas un « petit » nom de baptême,insistai­je ?Il haussa les épaules, pour toute réponse.

Baissant les yeux, je continuai à regarder ce magni­fique bijou. Il s’en dégageait quelque chose deféminin, une pureté, une sensualité à la limite del’érotisme. La générosité de ses formes était bienloin des standards actuels. Cette mouche était unefemme mûre consciente de ses charmes et em­prunte de sagesse. De ces maîtresses qui offrent auxhommes bien plus que de chastes baisers, de cellesqui peuplent vos souvenirs pour une vie entière.Alors comme soulevé par une révélation, je lâchaid’un trait :–– La Dame de Saint Ursanne.Tout se résumait là, dans ces quelques mots.D’abord songeur, je vis se dessiner sur le visage duvieil homme un sourire d’approbation.Le plus incroyable allait venir, il réussit l’impossibleexploit de refaire à l’identique sept fois la mêmemouche, sans qu’il fut possible d’y distinguer lamoindre différence entre la mère et toute sadescendance.

Imaginez un peu Picasso faire sept copies, si par­faites, de ses baigneuses que même un expert nepuisse y voir que du feu. Inimaginable pour quel­qu’un comme moi qui est tout bonnement inca­pable de faire deux mouches avec, ne serait­ce, lemoindre petit embryon de ressemblance.

Il plaça, dans une petite boîte transparente, la di­zaine de mouches qu’il venait de terminer en mesoufflant :–– Ce sont les mouches qu’il vous faut jusqu’à de­main soir. Des Dames de Saint Ursanne commevous le dites si bien ! Un large sourire, laissantentrevoir le piteux état de sa dentition, vint sepeindre sur son visage buriné.

Sur le mur, derrière Hans, une photographie enca­drée attira mon attention. Je reconnus sans peinel’endroit, il s’agissait du Pré Bourassin à Goumois.Sur l’image prise d’assez près, je remarquai la pré­sence d’un cygne blanc. La bête me troubla, commelors d’un sentiment de déjà vécu. Cet animal res­semblait étrangement à celui que j’avais aperçuquelques heures auparavant ! (voir partie 1 gobre­vue n° 7) Certes, rien ne correspond plus à unecygne blanc qu’un autre cygne blanc. Mais celui­làavait quelque chose dans sa physionomie qui luiétait propre ! Son apparence peut­être, qui parais­sait plus fière encore qu’un cygne commun, uneallure de prince.

Si ce n’étaient les couleurs jaunies, délavées par letemps, j’aurais pu parier que cette photo avait étéprise pas plus tard qu’hier !–– De quand date cette photo ?–– Pourquoi ?–– Je ne sais… pas ! Je suis juste intrigué par lecygne !Marcel regarda la photographie et marmonna :–– Il est pas bien gras le volatile. Puis se détournatant il était absorbé à admirer tout ce qui l’entou­rait.–– 1985…!Hans surprit mon étonnement et il me fit un clind’œil comme si nous partagions un grand secret.Au même instant, j’eus l’incroyable sensation que lecygne sur la photographie me fixait du regard. Fal­lait­il y voir l’écho d’une promesse ?

Fin de la 2ème partie

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Les différents forums de Gobages voient passerrégulièrement les mêmes questions, qui tournentautour du souhait de connaître la mouche quimarche, au bon moment, au bon endroit. Dans lemême temps, je constate le trouble des débutants,qui se manifeste soit par des questions existentiellessur la composition d’une bonne boîte pourdémarrer, soit par une tendance compulsive àmonter toutes sortes de modèles divers et variés,avec comme traduction fréquente au bord de l’eaule sentiment frustrant de ne jamais disposer de labonne mouche, malgré des boîtes bien garnies. Onsent parfois poindre une réelle angoisse chezcertains, au point de considérer que faute deréponses de la part des autres gobnautes, la réussitede leur prochaine partie de pêche ou de leur séjourpourrait en être altérée !Il ne faut surtout pas perdre de vue qu’une mouchene pêche jamais aussi bien que sur ou dans l’eau, etque rien ne remplacera la phase d’observationpréalable à toute partie de pêche, l’analyse deséclosions, de la microfaune sous les pierres, et ducomportement alimentaire des poissons.Cette réponse un peu facile aux angoisses de mesconfrères moucheurs ayant été énoncée, il n’enreste pas moins légitime que ces questionsressurgissent régulièrement, surtout quand ellessont le fait de personnes débutant la pratique de lapêche à la mouche.L’abondance d’informations disponibles rapidementgrâce à Internet, rend paradoxalement trèscomplexe la constitution d’une boîte « de base ».L’évolution de la société et des moyensd’information mis à notre disposition amène à uneculture du zapping qui nous éloigne parfois duconseil avisé des gens rencontrés au bord de l’eau,dans les clubs ou chez les guides. Et puis en matièrede « mouches qui marchent », chacun a sa petiteidée sur la question et la lecture d’une mêmediscussion sur un forum amène souvent à constaterqu’en matière de pêche à la mouche, tout et soncontraire peut être affirmé avec le plus grandsérieux et la plus intime conviction ! J’y vois pourma part une bonne nouvelle, il n’existe pas devérité universelle et c’est tant mieux !

Le texte qui va suivre n’a donc absolument pasl’ambition de valoir force de loi. Il se base sur unepratique empirique, la mienne en l’occurrence, et leconstat que je souhaite adresser comme un signed’espoir aux débutants qui peuvent nous lire (il fautm’imaginer asséner cette phrase une pipe à la main,devant un feu de cheminée, ça donne plus de corpsà l’histoire) :« Plus les années passent, et plus la diversité demouches présentes dans ma boîte à diminué, alorsque dans un mouvement inversementproportionnel, le nombre et la qualité de mes prisesont augmenté ».Mon postulat est le suivant :Avec trois mouches sèches et trois nymphes,déclinées en différentes tailles et couleurs, il estpossible de faire face à 90% des situations de pêche.Il est entendu que ce postulat s’entend pour lesespèces les plus couramment recherchées à lamouche, à savoir les salmonidés et les cyprinsd’eaux vives. Les carnassiers méritent qu’on yconsacre d’autres articles, même si je vous faisd’emblée cet aveu, je ne pêche sieur Esox qu’avecdeux modèles de mouches …

Avant de rentrer dans le vif du sujet et de livrer àvos pupilles dilatées par la curiosité les six modèlesen question, je tiens ici à préciser que je ne me faisle héraut d’aucune école. J’ai le plus profondrespect pour les acharnés de l’étau, les défenseursde la mouche ultra réaliste ou les passionnés dediversité (si vous souhaitez disposer de mouches àtarpon dans votre boîte quand vous allez pêcher latruite, et si ça vous rassure, je n’y vois absolumentrien à redire). Je suis d’ailleurs un grandconsommateur des blogs et sites de passionnés demontage, et je m’inspire régulièrement des idées dechacun. Il reste de toute manière dans mon postulat10% des situations de pêche pour que vous puissiezlaisser libre cours à votre créativité débordante ou àvotre don pour reproduire ce que vous avez pu voirà droite et à gauche, ou bien encore pour montern’importe quoi en priant je ne sais quelle divinitéqu’un poisson s’y intéresse (on est parfois trèssurpris du résultat).

Eloge du minimalisme, tentativepour rassurer les débutantspar Alexis GANTE.

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L’air de rien, cet exercice de synthèse a nécessitédes choix et des arbitrages forts, j’ai dû écarter desclassiques, et j’entends déjà la toux courroucée decertains lorsqu’ils constateront, effarés, que je n’aipas retenu le Palmer, la Peute ou l’Araignée dansma short­liste. Comme je le disais, il ne s’agit qued’un retour d’expérience personnelle, je pêche desrivières aux eaux claires, subissant une très fortepression de pêche, peuplées de poissons éduqués.

De fait, ma boîte contient principalement desmodèles aux couleurs neutres, à la flottaison basselorsqu’il s’agit de mouches sèches. J’ai aussiéliminé des modèles que j’apprécie ou qui sontcensés être très efficaces, comme les parachutes oules nymphes à billes, parce que je constate que cesmouches sont moins souvent prises que d’autresmodèles, et comme je vais à la pêche aussi pourprendre du poisson, je les laisse peu à peus’endormir au fond de ma boîte. Je note égalementque, lorsque je visite d’autres rivières, les mouchesqui ont mes faveurs d’ordinaire marchent là aussiplutôt bien, ce qui tend à prouver l’efficacitégénérale de quelques bons montages bien pensés.Par ailleurs, cette liste n’est pas figée, l’évolutiondes cours d’eau, la pression de pêche, l’apportd’autres monteurs ou de nouveaux matériauxpourraient faire tomber de leur piédestal les sixmouches que je vais vous présenter. Cette liste estégalement le fruit d’une certaine pratique de lapêche à la mouche, en sèche et en nymphe à vue,et de fait, un pratiquant assidu de la roulette ou dela pêche en noyée n’y trouverait pas forcément soncompte.

Voici un aperçu de mes boîtes, une pour les sèches,l’autre pour les nymphes, derrière la diversité descouleurs et tailles, vous noterez la rémanence dequelques modèles. Parmi eux, mes six fétiches, lessix mouches que je privilégie dans l’écrasantemajorité des cas.

Amateurs de scoops ou d’innovations techniques,passez votre chemin, il s’agit de modèles trèsclassiques, parfois avec une touche depersonnalisation parce que j’ai mes petitespréférences et maniaqueries. Pour les mouchessèches comme pour les nymphes je vous présenteles modèles par ordre de préférence.

Les mouches sèches

Trois critères doivent guider vos choix lorsque vousapercevez les premiers gobages. Plutôt que le nomlatin de l’éphémère du moment, intéressez­vous àla taille, pour moi le critère prépondérant, lacouleur, et le stade d’émergence. Une abondantelittérature existe sur la question et je n’ai pas laprétention de m’y substituer. Toujours est­ilqu’avec les trois modèles présentés ci­après, j’airarement été pris en défaut.

L’Emergente Chevreuil

En sèche, c’est la mouche qui termine ma pointedans les trois quarts des situations de pêche. Je luitrouve énormément de vertus, sur les lisses, face àdes poissons méfiants, elle reste très sobre, il estpossible d’enlever quelques fibres, de modifierl’inclinaison des ailes, pour faire face à denombreuses situations et obtenir quelque chose dedépouillé. Sur une eau un peu chahutée, elle al’immense avantage de rester flottante trèslongtemps.

C’est primordial pour moi, qui déteste passer dutemps à sécher puis tartiner de différents onguentsmes mouches. En plus, cela permet de pêcher avecdes montages discrets ou des petites mouchesmême lorsque les eaux sont turbulentes, ce qui estun réel plus lorsqu’on doit faire face à des poissonsdifficiles.

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Je monte cette mouche du 10 ou 12 (mouche demai, march­brown) au 20 (petits éphémères,moucherons), et je la destine aux truites et auxombres, car contrairement à une idée reçue, lechevreuil peut très bien marcher avec ces derniers.J’ai la chance de disposer d’une peau de chevreuilrécupérée au Québec, le poil est très fin, ce qui mepermet de descendre dans les tailles d’hameçon.Avec un carré de peau du commerce c’est plusdifficile. Si vous avez des amis chasseurs,demandez­leur de vous réserver la fin du dos, ledébut des cuisses (le haut), vous trouverez despoils fins de même nature.

Le corps peut être monté en fil, en soie polyfloss(ma préférence), avec du substitut de condor, outout ce qui vous passe à l’esprit. J’entoure mon ailed’un dubbing de lièvre bien aéré pour donner unpeu de mouvement à la partie immergée.Je dispose dans ma boîte d’une variante sanscerques et avec un hameçon caddis, elle simulel’émergence de sedge.Il s’agit tout simplement de ma mouche fétiche.Sur hameçon droit ou caddis, cette mouche m’apermis d’en finir avec la malédiction des capots surle no­kill de la Bienne et d’être un des deuxpêcheurs, sur la vingtaine présents sur la Henry’sFork un jour d’août 2011 au niveau du HarrimanState Park, à ne pas prendre une pilule1, et rienque pour ça je compte financer un musée à sagloire.

L’Ecureuil

Il y a deux ans, j’ai découvert ce matériau un peupar hasard. Le poil, plus raide que le lièvre, estparticulièrement adapté aux montages typeAraignée, et permet de réaliser de petites mouchessobres, flottantes (en tout cas plus que le lièvre), et

très visibles sur l’eau.Cette mouche est excellente l’été ou pour les

pêches urbaines, lorsque les truites s’alimententrégulièrement de chironomes. Je la monte avec descorps en fil beige, gris ou noir. En blanc et en trèspetite taille elle est redoutable, particulièrementpendant les éclosions de caenis. Elle a lapréférence des truites, les ombres me paraissentmoins réceptifs.

Le Voilier en Cul de Canard

Ce n’est pas la peine que je présente cette mouche,un incontournable dans le monde entier.Personnellement, je ne saute pas sur cette moucheen ouvrant ma boîte, la perspective de passer montemps à sécher mes imitations ne m’emballantpas… Toutefois, dès que dérivent des imagos bienformés, ailes fièrement pointées vers le ciel, jen’hésite pas trop longtemps. Cette mouche a pourelle son extrême discrétion, elle se pose tel unflocon de neige, et un grand choix de coloris quipermet de couvrir un large spectre d’imitations.

Je privilégie les teintes que j’ai du mal à retrouveravec les deux imitations précédentes, pourrépondre présent pendant les éclosions d’olives oude sulfures, ou bien encore pour disposer decoloris appétissants pour les ombres fantasques.Pour ces derniers, je vous invite à essayer lemodèle en photo : un corps en matériau blancbrillant (type Z­Lon), une aile en cdc rose, undubbing de lièvre foncé pour l’abdomen, je choisiscette mouche dès que je me retrouve face à deséclosions multiples, ou devant des ombres« intordables », leur curiosité étant leur pire défaut,il y en a toujours un qui finit par craquer pour

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cette petite bouchée aux couleurs acidulées.En matière de montage, je privilégie le twistagedes fibres, rabattues ensuite vers le haut pourobtenir un voilier.

Les nymphes

Le choix pour les nymphes a été moins évident,j’ai décidé de mettre de côté deux grandsclassiques qui méritent tout de même que vousleur consacriez un peu de temps à l’étau, lapheasant tail et la vautour, toutes deux trèsefficaces. Là encore j’ai privilégié les modèles quim’ont le plus réussi.

La pêche en nymphe est extrêmement exigeante,les paramètres sont tellement nombreux que je nepeux pas m’empêcher de penser que la mouchecompte au final pour assez peu. Les poissons sontopportunistes, reste à leur présenter le plusnaturellement possible une larve qui dérive. Danscette pêche, la maîtrise de la troisième dimension,la profondeur, est un des éléments clefs, de mêmeque l’absence de dragage, très dur à percevoir. Lesmodèles proposés peuvent être montés avec plusou moins de plomb (le champ du possible estplus limité pour la « Toute Fine »), à vous detrouver la meilleure équation courant / poids /volume / résistance / diamètre du fil / âge ducapitaine !

La Chamois

Lorsqu’il s’agit de remonter une bordure à l’affûtde quelques truites en vadrouille, c’estsystématiquement la nymphe que je choisis.

Le montage est simple, la matière première peuonéreuse, une peau de chamois pour le lustragedes voitures, qu’on trouve à peu de frais dans lesmagasins automobiles. Hors de l’eau, l’aspect estpeu engageant et le matériau semble trop clair,mais une fois mouillée, la peau de chamois revêtune teinte très naturelle.Je privilégie les montages avec quelques fibres deperdrix et un peu de dubbing en tête, pourdonner de la vie à l’ensemble. Les tailles et formesd’hameçons, les lestages, vous permettent decouvrir une large gamme de situations de pêche.

Cette imitation est particulièrement prenantelorsque les truites picorent sur le fond des porte­bois. Accessoirement, elle remplira trèshonnêtement le rôle de mouche de pointe sur untrain de noyées. Ce montage peut égalementaccueillir des billes en tête et conviendra alorsparfaitement pour les pêches à la roulette.

Le Gammare

Difficile dans les rivières calcaires tout au moins,de ne pas disposer d’imitations de gammares.Ces petits crustacés d’eau douce composent unelarge part du menu des truites, et au printemps,lorsqu’ils se rassemblent sur les bordures, leszébrées ne sont jamais loin, opérant parfois desrazzias gueules ouvertes dans les bancs decrevettes, à la manière des baleines, scènestoujours très impressionnantes.Les formules de montage sont légion. J’ai pour mapart beaucoup tâtonné, je ne suis toujours pas sûrd’avoir trouvé le modèle absolu. Je conseille dedisposer de deux montages très différents et de cefait complémentaires.

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Un premier modèle, non lesté, est à réaliser en culde canard, avec un dos en faisan ou matériauplastique. Il servira pour les pêches en nymphe àvue, dans peu d’eau ou dans le cas d’un courantfaible, à destination de poissons méfiants. En effet,le gammare a une fâcheuse tendance, celle de faireun gros « ploc » en tombant dans l’eau, le gammareen cdc (mouillez le au préalable !) est au contrairetrès discret lorsqu’il touche l’eau.

Le second est lesté, je vous livre un montage quej’aime bien, un peu personnalisé, mais il en existedes dizaines d’autres. De manière générale, essayezles plombs plats ou les superpositions de fils deplombs, qui permettent de confectionner unesilhouette proche de celle de la petite bête.J’ai pas mal testé de matériaux pour la carapace, lesmatériaux plastiques ont pour eux le réalisme,mais je trouve que ça occasionne des montagesparfois un peu longuets (gardez à l’esprit que jesuis un flemmard et que le temps consacré à lapêche, je préfère le passer au bord de l’eau plutôtque devant l’étau). L’époxy est un matériauséduisant mais je trouve sa mise en œuvre un peufastidieuse. C’est pourquoi je généralisedorénavant des montages avec de la soie polyfloss,une fois mouillée, elle prend une teinte quis’approche vraiment de la couleur des petitscrustacés.Bien plombée, cette mouche pourra par ailleursservir à la pêche au fil ou à la roulette au besoin.

La « Toute Fine »

Le dernier montage que je vous propose est unemouche qui s’est construite « au fil de l’eau », si jepeux me permettre cette expression, ce montageest le résultat de pas mal de tâtonnements, avec le

souci de disposer d’une nymphe qui puisse réunirplusieurs qualités, parfois en contradiction. Jesouhaitais en effet une mouche discrète, qui coulerapidement mais sans faire « ploc », et qui puisseêtre vivante.Le modèle que je vous propose ressemble un peuà la Absolut No Refuse (que j’ai découvert après jevous promets !), du moins l’esprit en est­il assezproche, un corps fin, peu de lestage, un peu deperdrix pour amener de la vie. Cette mouche doitêtre associée à une pointe fine pour bien couler,donc gare au ferrage ! J’ai perdu beaucoup depoissons (et de mouches !) à cause d’un ferragetrop appuyé.

C’est une nymphe à privilégier sur les lisses, pareaux basses, idéale pour les pêches estivales.Malgré son côté discret, les ombres l’apprécient.Sur une longue pointe, et à condition de poserdétendu, vous serez étonné de la profondeurqu’elle atteint rapidement.

En conclusion, j’espère vous avoir convaincu quequelques modèles simples mais auxquels on croitsont de bons garants d’une partie de pêcheréussie, et qu’il est important de disposer demodèles dans lesquels on a confiance. Je suisd’ailleurs assez persuadé qu’une grande part dusuccès réside dans l’état d’esprit du pêcheur. Plusvous doutez, moins bien vous pêchez, et le choixdes mouches participe activement à faire naître cedoute.

Go fishing !