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REVUE PLURIDISCIPLINAIRE EN ONCOLOGIE Volume 4 • n° 28 • Mars 2012 • 8 • Cahier 1 d www.onko.fr DOSSIER (p.64) MISE AU POINT HPV et cancers des VADS Recherche clinique et prévention p. 57 Dr Sylvain Benzakin, Dr Mareva Simonnet ACTUALITÉS Femmes âgées atteintes d’un cancer du sein Enfin un essai clinique ! p. 80 ZOOM SUR... Acupuncture et symptômes au cours du cancer Doit-on préconiser les médecines complémentaires ? p. 81 Dr Mai Luu Dr Kader Chouahnia « Le risque de cancer était surtout net au cours des 6 premiers mois après le diagnostic de la maladie veineuse thromboembolique... » THROMBOSES ET CANCER Coordonné par le Pr Michel Pavic Quand et comment rechercher un cancer devant une maladie veineuse thromboembolique d’allure isolée ? Traitement de la maladie veineuse thromboembolique chez le patient atteint de cancer Thromboses et traitements antiangiogéniques en oncologie Thrombose veineuse sur dispositif intraveineux de longue durée en cancérologie

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R E V U E P L U R I D I S C I P L I N A I R E E N O N C O L O G I E

Volume 4 • n° 28 • Mars 2012 • 8 € • Cahier 1

d www.onko.fr

DOSSIER (p.64)

MISE AU POINT

HPV et cancers des VADSRecherche clinique et prévention p. 57

Dr Sylvain Benzakin, Dr Mareva Simonnet

ACTUALITÉS

Femmes âgées atteintesd’un cancer du seinEnfi n un essai clinique ! p. 80

ZOOM SUR...

Acupuncture et symptômes au cours du cancerDoit-on préconiser les médecines complémentaires ? p. 81

Dr Mai Luu Dr Kader Chouahnia « Le risque de cancer était surtout net au cours des 6 premiers mois après le diagnostic de la maladie veineuse thromboembolique... »

THROMBOSES ET CANCER Coordonné par le Pr Michel Pavic

� Quand et comment rechercher un cancer devant une maladie veineuse thromboembolique d’allure isolée ?

� Traitement de la maladie veineuse thromboembolique chez le patient atteint de cancer

� Thromboses et traitements antiangiogéniques en oncologie � Thrombose veineuse sur dispositif intraveineux de longue durée en cancérologie

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www.onko.fr Mars 2012 • Vol. 4 • N° 28 • Cahier 1Directeur de la publication : Dr Antoine LolivierCoordination scientifique : Dr Thierry BouilletChef du Service Rédaction : Odile Mathieu• Rédactrice : Laure Guiheneuf • Chef de Fabrication et de Production : Gracia Bejjani • Assistante de Production : Cécile Jeannin • Chef de studio : Laurent Flin • Maquette et Illustration : Elodie Lecomte et Antoine Orry • Chef de publicité : Catherine Colsenet • Service abonnements : Claire Lesaint • Impression : Imprimerie de Compiègne - 60205 Compiègne

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sommaire

Cette publication comporte 2 publications : cahier 1 (32 pages) et cahier 2 (20 pages)Assemblés à cette publication : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages).

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R e v u e p l u R i d i s c i p l i n a i R e e n O n c O l O g i e

n ActuAlitÉs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 80

n mise Au point HpV et cancers des VADs : recherche clinique et prévention . . . . . . . . p. 57 Dr Sylvain Benzakin et Dr Mareva Simonnet (Bobigny)

n Dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 64

tHromboses et cAncer Dossier coordonné par le Pr Michel Pavic (Lyon)

eDitoriAlthromboses et cancer : de nombreux défis…

Pr Michel Pavic (Lyon)

1 n. Quand et comment rechercher un cancer devant une maladie veineuse thromboembolique d’allure isolée ? Quelle attitude adopter ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 66

Pr Michel Pavic, Dr Florian Pasquet et Dr Alain Nibaud (Lyon)

2 n. traitement de la maladie veineuse thromboembolique

chez le patient atteint de cancer Les dernières recommandations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 70

Pr Lionel Védrine (Paris)

3 n. thromboses et traitements antiangiogéniques

en oncologie L’évaluation des risques… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 74

Dr Luis Teixeira (Paris)

4 n. thrombose veineuse sur dispositif intraveineux

de longue durée en cancérologie Un point sur les facteurs de risque et les traitements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 77

Dr Irène Kriegel et Dr Abdelmalek Ghimouz (Paris)

n Zoom sur... Acupuncture et symptômes au cours du cancer :

doit-on préconiser les médecines complémentaires ? . . . . . . . . . . . . . p. 81Dr Mai Luu (Paris), Dr Kader Chouahnia (Bobigny)

n bulletin D’Abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 72n errAtum . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 85

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Mise au point

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Les cancers de VADS HPV induits forment une entité particulière dont l’étiolo-

gie, la présentation clinique, le pronostic sont différents des car-cinomes épidermoïdes des VADS dus au tabac et à l’alcool, leur étude pourrait permettre une prise en charge plus spécifique.

* ORL et chirurgie cervico-faciale, hôpital Avicenne, Bobigny

Généralités à propos des papilloMavirus huMains (hpvs) Les infections à papillomavirus humain HPV dits oncogènes ou à haut risque sont suspectées de pouvoir induire un carcinome épidermoïde des VADS. Dès 1983, une étude évaluant 6 fragments biopsiques suggèrent que l’HPV peut être à l’origine de certains carcinomes cellulaires squameux

oraux en mettant en évidence des effets cytopathogènes spécifiques des papillomavirus et en montrant la présence d’antigènes d’HPV au niveau des noyaux des cellules de ces mêmes biopsies (1). Le papillomavirus appartient à la famille des Papillomaviridae, c’est une famille de virus icosaèdres, ubiquitaires, qui infectent les épi-théliums cutanés et muqueux.

Les cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS) regroupent les cancers de la cavité buccale, du pharynx et du larynx. En 2011, avec près de 14 000 nouveaux cas estimés dont plus de 70 % chez les hommes, les can-cers VADS se situent au 5e rang des cancers les plus fréquents en France et constituent la 7e cause de mortalité́ chez l’homme et la 18e chez la femme. Ces cancers connaissent une grande diversité histologique, pronostique et théra-peutique selon leur site de développement. Parmi ces facteurs pronostiques, le statut HPV revêt une importance croissante. Depuis le début des années 2000, de nombreux auteurs soulignent l’implication des HPV oncogènes dans la cancérogenèse des VADS et notamment dans les localisations oropharyngées, sans explication formelle quant à cette spécificité anatomique. L’infection à HPV représente la maladie sexuellement transmissible la plus fré-quente au monde et touche 75 à 80 % des personnes sexuellement actives. Les papillomavirus humains (HPV) sont des membres d’une grande famille de petits virus à acide désoxyribonucléotides (ADN). Ils sont à l’origine de deux types de tumeurs : les papillomes bénins et les tumeurs malignes. La plupart des recherches sur ces virus, au cours des 30 dernières années, a mis l’accent sur leurs propriétés oncogéniques dans les voies génitales et plus récemment dans les maladies des VADS. Les progrès dans la compréhension de la biologie de ces virus ont permis de développer de nouvelles approches pour prévenir, diagnostiquer et traiter les maladies provoquées par HPV.Les cancers HPV+ concernent des sujets plus jeunes (en moyenne de 5 ans) que les patients ayant un carcinome “classique” (induit par l’alcool ou le tabac) et le pourcentage de sujets éthylo-tabagiques est plus faible que pour les carci-nomes épidermoïdes des VADS HPV-. Comme pour les cancers de l’utérus liés à HPV, une relation entre l’activité sexuelle et les cancers des VADS HPV+ est démontrée.

Introduction

hpv et cancers des vadsRecherche clinique et préventionDr Sylvain Benzakin* et Dr Mareva Simonnet*

AbstractHead and squamous cell carcinoma (HNSCC) is the fifth leading cause of cancer in France and the sixth worldwide. Since the year 2000, a specific etiology, cancer induced by human papillomavirus (HPV), is of particular interest. Serotypes 16 and 18 (with high risk of cancer) are most frequently implicated. Infec-tion of basal cells of the mucosa of the upper aerodigestive tract by HPV 16 or 18 causes genetic altera-tions that induce cancerous phe-notype. Among these alterations, inactivation of p53 and pRb has a major role. The physiopathological mechanisms are different from those of more conventional head and neck cancers, related to smo-king. This probably explains the differences in semiological presen-tation (clinical, radiological, biolo-gical) and prognosis. The study of this viral etiology is experiencing a new interest about a more specific treatment and could also be suf-ficient to develop new anticancer therapies, particularly with regard to vaccination.

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Plus de 100 génotypes ont été en-tièrement caractérisés et séquen-cés. Ce sont des virus nus, donc résistants aux conditions environ-nementales.

L’infection à HPV est la mala-die sexuellement transmissible la plus fréquente au monde et touche plus de 75 % des personnes sexuellement actives. Les princi-paux facteurs de risque d’infec-tion à HPV sont liés aux pratiques sexuelles (2) : le grand nombre de partenaires sexuels, une acti-vité sexuelle précoce, un nouveau partenaire sexuel, un partenaire sexuel ayant eu de nombreux partenaires et la pratique de rap-ports orogénitaux ou anaux, pour le sujet receveur. Il est également démontré une augmentation d’in-cidence chez les hommes dont la femme est atteinte d’un cancer du col de l’utérus, la présence de condylomes génitaux ou un cancer anal lié au HPV.Le génome des HPVs est constitué d’un ADN circulaire double brin de 7 900 paires de bases (pb) divisé en trois portions : • une région de ± 4 000 pb codant

pour des protéines précoces (early proteins), appelées E1, E2, E4, E5, E6 et E7 ; celles-ci sont impliquées dans la réplication de l’ADN viral et la transformation cellulaire ; • une région de ± 3 000 pb codant pour les protéines tardives (late proteins), correspondant aux pro-téines L1 et L2 qui interviennent dans l’organisation structurelle du virus en formant la capside. Les qualitatifs early et late sont attri-bués aux protéines en fonction de leur apparition dans le cycle de ré-plication virale ;• enfin, il y a une région non co-dante appelée également Long Control Region (LCR) de 1 000 pb qui contient l’origine de réplica-tion de l’ADN viral, le promoteur (protéine P97) et les éléments transcriptionnels régulateurs (Fig. 1 

et 2).

La capacité des HPVs à transfor-mer les cellules épithéliales per-met la distinction entre deux caté-gories• les HPVs à bas risque ou non on-cogéniques ;• les HPVs à haut risque ou onco-géniques (sérotype 16-18-31).

On considère que les HPVs onco-géniques, notamment le HPV 16, sont responsables de 10 % des car-cinomes de l’œsophage et de 30 % des carcinomes des VADS (3).

MécanisMes de pénétration et d’intéGration du GénoMe viral Ces mécanismes ne sont pas en-core clairement élucidés. Le virus infecte les cellules épithéliales à travers des microlésions et pé-nètre jusqu’aux cellules basales. L’internalisation du virus se fait par endocytose, après fixation à un récepteur cellulaire diffèrent selon le type d’HPV. Les protéines du cytosquelette (microtubules, microfilaments) véhiculent en-suite l’ADN viral au noyau. La régulation du cycle du virus dépend étroitement de la différen-ciation des épithéliums squameux stratifiés infectés et de la machine-rie de réplication de la cellule hôte. Dans la couche cellulaire basale contenant les cellules en division, la multiplication du génome vi-ral sous forme épisomale (ADN

Figure 1 – hpv au microscope. Figure 2 – structure génomique de hpv.

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circulaire capable de se répliquer de manière autonome ou de s’in-tégrer dans un chromosome) est faible et se fait sous le contrôle des protéines E1 et E2. L’intégration du virus se fait préférentiellement dans des régions de grande insta-bilité génomique encore appelée Common Fragile Sites (CFS) et suit un mécanisme précis où les gènes codant pour les protéines E6 et E7 sont toujours conservés et fonctionnels, alors que la plupart des autres séquences codantes virales sont supprimées ou non fonctionnelles. Les oncoprotéines virales E6 et E7 induisent l’entrée en phase S des cellules basales des épitheliums pluristratifi és des voies génitales et aérodigestives supérieures en perturbant les voies régulatrices du cycle cellu-laire (notamment p53 et rétino-blastome).

voies de siGnalisation iMpliquées dans la cancéroGenÈse induite par hpv (Fig. 3)

La protéine p53 est la protéine gardien du génome, activée en réaction à la présence de dom-mages dans l’ADN. Elle se com-porte comme un facteur de trans-cription. Elle permet le blocage du cycle cellulaire en G1 pour réparer l’anomalie, ou induire l’apoptose.Les cancers HPV positifs présen-tent des altérations génétiques spécifi ques liées aux oncopro-téines virales (E6 et E7). L’onco-protéine E6 inactive le gène sup-presseur de tumeur p53. Alors que les mutations de p53 sont fréquentes dans les cancers HPV négatifs et dans les cancers asso-ciés à la nicotine et à l’alcool, l’on-coprotéine p53 de type sauvage est généralement retrouvée dans les tumeurs HPV positives. L’onco-protéine E7 se lie à la protéine du

rétinoblastome (pRb), qui est alors inactivée. L’inactivation fonction-nelle de la pRb par E7 conduit à une surexpression de la protéine p16, qui devient dès lors un mar-queur des tumeurs induites par l’HPV. Ces altérations génétiques moléculaires permettent de clai-rement distinguer deux catégories de cancers dans la région de la tête et du cou : ceux induits par l’HPV et ceux induits par des substances toxiques. Par ailleurs, l’inactiva-tion de p53 et de pRb facilite la survenue de cancers induits par le tabac. On considère que chez les patients alcoolotabagiques, HPV se conduit comme un cocarcino-gène (4).Les oncogènes E6 et E7 permet-tent ainsi l’immortalisation et la transformation cellulaire indis-pensables à la genèse d’un cancer. Une étude prospective sur 10 ans (5) a montré que les individus ayant une sérologie mettant en évi-dence des anticorps antiHPV16L1 (anticorps antiprotéine de capside L1, du HPV de sérotype 16) présen-taient un risque 2 fois plus élevé de développer un cancer des VADS et

un risque augmenté de 10 fois par rapport à la population générale de développer un cancer amygda-lien. Cette relation entre la détec-tion de p16 et les cancers des VADS nous incite à étudier spécifi que-ment l’épidémiologie des cancers des VADS et le statut HPV.

epidéMioloGie des carcinoMes épiderMoÏdes des vads (6)Le tabac et l’alcool sont les deux principaux facteurs de risque de ces cancers, l’action de l’alcool po-tentialisant les méfaits du tabac.La survenue de ces cancers est tar-dive : près de 90 % des nouveaux cas sont âgés de 50 ans et plus. L’âge moyen au diagnostic était estimé à 63 ans en 2005 (il est un peu plus tardif pour les cancers du larynx chez la femme). Les évolutions favorables de l’in-cidence chez l’homme, ces der-nières années, sont en grande partie expliquées par la baisse de la consommation d’alcool ob-servée en France depuis le début

Figure 3 - voies de signalisation impliquées dans la cancérogenèse induite par hpv.

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Ainsi, la relation de cause a effet entre les cancers des VADS et l’infection par HPV est fortement suggérée par :• la nature épithéliotrope de HPV ;• le pouvoir oncogénique connu des HPV dits à hauts risque (HR) ;• la similarité des épithéliums du col de l’utérus et des amygdales.

des années 1960, mais qui reste néanmoins l’une des plus élevée au monde (12,3 litres d’alcool pur, par an, par habitant âgé de 15 ans et plus, en 2008). Chez la femme, l’augmentation de l’incidence est liée à l’augmentation de la consommation de tabac. D’autres facteurs comme l’augmentation des infections par des virus du type HPV, dont le rôle semble se confirmer, pourraient également être en cause dans la persistance de ces types de cancers.

epidéMioloGie des cancers des vads induits par hpvLes études concernant la préva-lence et l’incidence des cancers des VADS induits par HPV sont récentes, il s’agit le plus souvent d’études rétrospectives (7, 8). Les différents auteurs s’accordent à dire que l’oropharynx est le site le plus souvent atteint, particulière-ment la région amygdalienne. L’étude EDITH VI (9) menée en France confirme cette particula-rité : publiée en 2011, réalisée dans 12 centres portant sur 314 biopsies de carcinomes oropharyngés et 209 biopsies de carcinomes de la cavité orale, l’étude retrouve une prévalence de près de 50 % de can-cers de l’oropharynx HPV positifs contre 10 % pour les cancers de la cavité orale, ce qui confirme la lo-calisation préférentielle de l’HPV au niveau de l’oropharynx.Ces chiffres sont à but informa-tif, il existe une grande disparité des infections par HPV mise en évidence dans les cancers des VADS en fonction des différentes études, mais la plupart s’accordent à retrouver une prévalence accrue pour la région amygdalienne. Par exemple, une revue colligeant dif-férentes séries révèle un cancer HPV positif (10) dans 45 à 100 %

des cancers de l’oropharynx, 8 % des cancers du nasopharynx, 18 à 50 % des cancers de l’hypopharynx et 4 à 54 % des cancers du larynx.Cette grande disparité peut être mise en relation avec les biais im-putables aux différentes méthodes de détection. Les sensibilités et les spécificités varient en fonction des méthodes utilisées. Ainsi, la détec-tion par polymérisation en chaîne (PCR) conduit probablement à une surestimation en raison des contaminations et des colonisa-tions. Les autres techniques uti-lisées sont : hybridation in situ, southern blot, immunohistochi-mie. Egalement, l’origine variée des échantillons et des méthodes de prélèvements peut expliquer ces disparités.

Des études épidémiologiques amé-ricaines ont montré que l’incidence annuelle des cancers tonsillaires était en augmentation, dans la po-pulation jeune (moins de 50 ans), d’environ 3 % ces 30 dernières années, alors que l’incidence des cancers du larynx a diminué pa-

rallèlement à la diminution de la consommation du tabac (7). En Suède, on a observé, en 30 ans, une augmentation de l’incidence des cancers tonsillaires de près de 3 fois (18). Le diagramme suivant illustre l’évolution des cancers amygdaliens en Suède en fonction du statut HPV (Fig. 4).

Une méta-analyse récente (2005) met en évidence la présence d’ADN viral détectée par PCR dans environ 30 % des carcinomes épi-dermoïdes des VADS, toutes loca-lisations confondues (3).L’oropharynx englobe le voile du palais, les amygdales, la base de la langue et les parois pharyngées dé-limitées en haut par le cavum et en bas par le repli pharyngo-épiglot-tique. La base de la langue est his-tologiquement reliée à l’amygdale, ces deux entités appartiennent à une aire lymphoïde (anneau de Waldeyer) qui fait partie du sys-tème immunitaire et intervient dans les phénomènes inflamma-toires et infectieux du locaux. Un épithélium malpighien recouvre

Figure 4 - evolution du statut hpv des carcinomes épidermoïdes de l’oropharynx en

suède, d’après dahlstrand (18).

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ces tissus lymphoïdes et s’invagine pour former des cryptes, comme dans le col de l’utérus. Ces zones de faiblesse mécaniques sont connues pour favoriser la réten-tion de particules virales et la cap-ture d’antigènes qui facilitent éga-lement l’accès du virus aux cellules basales (11).L’association épithélium malpi-ghien-épithélium pavimenteux donne aux amygdales des caractères histologiques proches de ceux du col de l’utérus au niveau de la zone de jonction endocol-exocol qui est, elle aussi, une zone de fragilité mé-canique. Cette similitude entre col de l’utérus et oropharynx peut ex-pliquer la localisation préférentielle des papillomavirus à ce niveau. De plus, les épithéliums du col utérin et de l’oropharynx dérivent du même feuillet embryonnaire.

Ainsi, la relation de cause à ef-fet entre les cancers des VADS et l’infection par HPV est fortement suggérée par :• la nature épithéliotrope de HPV ;• le pouvoir oncogénique connu des HPV dits “à haut risque” (HR) ;• la similarité des épithéliums du col de l’utérus et des amygdales.

La diminution de la consomma-tion de tabac et d’alcool amorcée ces 30 dernières années et l’intérêt croissant porté au statut HPV de ces tumeurs peuvent en partie ex-pliquer l’augmentation de la détec-tion de ces cancers. La progression de l’incidence des cancers de l’oro-pharynx HPV+ serait donc liée à différents phénomènes, qu’ils soient artificiels, augmentation du rapport des cancers HPV+/HPV- par la diminution de l’éthylo-taba-gisme ; ou par le fait plus fréquent de nos jours de déterminer le sta-tut HPV de ces carcinomes car il revêt un intérêt récent. D’autres facteurs sont le plus souvent mis

en avant, notamment la modifica-tion des comportements sexuels (12).Par ailleurs, la présence d’ADN de HPV dans les cellules tumorales est insuffisante pour établir un lien de causalité entre le virus et le cancer des VADS (14).

caractéristiques des cancers hpv induits Les cancers des VADS HPV+ ont des caractéristiques différentes des cancers HPV- (2). Les pa-tients atteints de cancers HPV+ sont souvent diagnostiqués à un stade tardif, avec de volumineux ganglions lymphatiques cervicaux de nature kystique malgré une tu-meur souvent moins volumineuse. Les cellules tumorales sont moins différenciées en microscopie op-tique. Les patients sont également plus jeunes et avec une exposition au tabac et à l’alcool moindre que dans les cancers des VADS HPV-(13). Malgré cela, les cancers HPV+ ont un meilleur pronostic, notamment en termes de survie globale.

L’ensemble des études s’accorde à dire que les patients atteints de cancers induits par HPV semblent avoir une réponse significative-ment meilleure à la chimiothéra-pie et la radiothérapie par rapport aux cancers HPV- et ces patients semblent aussi avoir un risque moins important de récidive. Par exemple, une méta-analyse sur le sujet confirme que le risque de décès par cancer de l’oropharynx diminue de 28 % quand le cancer des VADS est HPV+ (14).Selon cette même étude, l’aug-mentation de l’efficacité du traite-ment pourrait être dûe à :• l’instabilité génomique des cel-lules cancéreuses HPV+ ;• les cellules HPV+ souffrent plus

de l’hypoxie et donc sont plus faci-lement combattues par les traite-ments ;• le rôle de l’immunité locale diri-gée contre HPV qui est favorisée par le traitement.

L’infection à HPV a une valeur pronostique favorable dans les cancers de l’oropharynx, indépen-dante du stade de la tumeur, de l’âge du patient et du grade de dif-férenciation (10).Parmi les autres raisons poten-tielles expliquant le meilleur pro-nostic figurent le nombre plus faible de mutations irréversibles, le risque plus faible de cancéri-sation en champ avec une plus faible probabilité de formation de tumeurs secondaires, ainsi que les comorbidités moindres en raison d’une plus faible consommation de tabac et d’alcool. Par ailleurs, une réponse immunologique à la tumeur HPV+ pourrait également être coresponsable du meilleur pronostic. Ainsi, des lympho-cytes T spécifiques dirigés contre HPV16E7 ont pu être mis en évi-dence chez les patients avec tu-meur HPV+ (10).

Ces cancers HPV+ ont également le plus souvent une faible propor-tion de récepteurs du facteur de croissance épithélial (15) et sont donc “EGFR-”. On sait que le sta-tut EGFR+ est un facteur de mau-vais pronostic des carcinomes des VADS. Ce récepteur tyrosine ki-nase est fortement impliqué dans le phénotype tumoral en affectant l’apoptose, l’angiogénèse, la moti-lité cellulaire et concourt donc au caractère envahissant et métasta-tique de ces cancers. Ainsi, la plu-part des études s’accordent à dire qu’il existe une meilleure réponse thérapeutique pour les cancers HPV induits (qui ont de faibles taux d’expression de l’EGFR).

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Mise au point

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Dans cette même méta-analyse, le sexe féminin et la poursuite du tabagisme sont assimilés à une baisse de l’efficacité des traite-ments.

vaccination contre hpv

Un axe de développement poUr la rechercheLa vaccination contre les HPV on-cogènes est un axe de recherche important, le but serait préventif et également curatif dans le cadre des cancers des VADS induits par HPV. Cet axe de recherche est en-couragé par l’approbation de la Food and Drug Association et la commercialisation, depuis 2006, d’un vaccin préventif contre le cancer du col de l’utérus et les in-fections bénignes dues à HPV chez la femme et plus récemment de la prévention des infections bé-nignes chez l’homme. Les cancers HPV induits étant responsables de 15 % des cancers humains (16) (in-cluant les cancers du col de l’uté-rus, de la vulve, de l’anus, du vagin et des VADS, notamment de l’oro-pharynx), sa prise en charge en fait un problème de santé publique.

principe d’actionLa vaccination préventive est diri-gée contre les antigènes de la cap-side L1 et L2 du HPV. Pour être ef-fectif en curatif d’une infection en cours, le vaccin doit cibler une pro-téine importante dans le pouvoir oncogène et dans la pérennisation du virus au sein de l’organisme. Ces vaccins doivent donc cibler les protéines oncogéniques (E6 et E7) qui jouent un rôle important dans l’induction et le maintien de la transformation cellulaire. Ces protéines sont stables dans les vi-rus oncogènes. Les buts du vaccin thérapeutique sont d’induire une

réponse immunitaire cellulaire (CD4+ et CD8+) qui peut prévenir l’infection et provoquer la régres-sion des lésions néoplasiques ins-tallées. Ces vaccins thérapeutiques sont au stade préclinique (essai sur l’animal) et ciblent toutes les protéines E6 et/ou E7. Plusieurs vaccins sont actuellement à l’essai. Des résultats précliniques encou-rageants montrant une immuni-sation des souris testées par dif-férentes stratégies de vaccination sont à l’origine du développement d’essais cliniques (16).

les vaccins sUr le marchéActuellement, deux vaccins an-ti-HPV à but prophylactique sont disponibles dans le commerce : le vaccin Cervarix® (GSK), bivalent (HPV16/18) et le vaccin tétrava-lent (HPV6/11/16/18) Gardasil® (Merck). Ces deux vaccins connais-sent de grandes attentes en ma-tière de prévention des infections et des tumeurs induites par des HPV. Théoriquement, il n’y a pas de raison pour que ces vaccins ne travaillent pas contre ces mêmes virus sur des sites anatomiques différents. Si c’était prouvé, cela re-présenterait une avancée majeure dans la prévention de ces mala-dies, mais aussi cela permettrait de conclure à l’imputabilité de façon définitive de l’étiologie de ces tu-meurs HPV induites.

etats des lieUx de la vaccination dans le mondeEn France, la vaccination contre HPV en prévention du cancer du col de l’utérus, fait partie du ca-lendrier vaccinal depuis 2007, pour les jeunes filles de 14 ans, avec 3 doses selon le schéma 0,1 ou 2,6 mois afin de les immuni-ser avant qu’elles ne soient expo-sées au risque d’infection à HPV. La vaccination est recommandée également en rattrapage chez les

jeunes femmes entre 15 et 23 ans n’ayant pas eu de rapports sexuels ou au plus tard dans l’année sui-vant le début de leur vie sexuelle (19).

Aux Etats-Unis, l’ACIP (Advisory Committee on Immunization Prac-tices) recommande, depuis 2006, la vaccination des jeunes filles de 11 et 12 ans, selon également un schéma à 3 doses, ainsi que la vac-cination des jeunes filles entre 13 et 26 ans non vaccinées ou n’ayant pas eu un schéma complet de vac-cination, idéalement avant leur premier rapport sexuel. Depuis octobre 2011, l’ACIP recommande également la vaccination des gar-çons de 11 et 12 ans avec le vaccin tétravalent. De plus, la vaccination est recom-mandée chez les homosexuels, bi-sexuels, immunodéficients (VIH inclus), jusqu’à l’âge de 26 ans, non vaccinés ou n’ayant pas eu un schéma complet de vaccination.L’objectif est la prévention de la survenue de cancer de la marge anale (20).

préventionNous voyons donc que les indica-tions de cette vaccination se déve-loppent, la question de la préven-tion de la survenue des cancers des VADS par le vaccin quadrivalent est donc d’actualité et doit être un objectif pour le futur proche.La mise en place de vaccins cura-tifs peut être vue selon deux ap-proches : une première visant à la fois à prévenir la survenue de lésions néoplasiques et à induire leur régression. Il s’agirait d’une immunothérapie antigen-speci-fic, stimulant les lymphocytes T contre des antigènes HPV expri-més par les cellules tumorales, comme E6 et E7.Une autre approche cherche à combiner prophylaxie et théra-

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HPV et cAnceRs des VAds

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peutique, afin de couvrir les indi-vidus nouvellement exposés aux virus à haut risque, et ceux avec infections ou dysplasies.Différents vaccins thérapeutiques ont été testés, en administrant E6 ou E7 dans différents vecteurs. D’après l’analyse de modèles ani-maux (21), il semblerait que les vaccins thérapeutiques soient plus efficaces en systémique qu’en trai-tement local intratumoraux, sur des tumeurs de petit volume, donc les orientations thérapeutiques concernent à première vue les pa-tients ayant eu une diminution du volume tumoral (post-chirurgical ou post-irradiation) en traitement adjuvant pour stimuler une ré-ponse immunologique contre la maladie microscopique résiduelle.

conclusionLa connaissance de cette étiologie des cancers des VADS a permis de mettre en avant une entité parti-culière de cancer des VADS. Ces cancers HPV induits sont préfé-rentiellement localisés à la région amygdalienne, ont une étiologie

différente, une présentation cli-nique particulière, une sensibilité au traitement et donc un pronos-tic plus avantageux que les can-cers des VADS HPV-, sans que ces particularités soient parfaitement comprises. L’approfondissement des connaissances théoriques est indispensable, en étudiant le pro-cessus oncogénique, les voies de signalisation, pour permettre une implication thérapeutique.

Les raisons de la présentation sé-miologique différente des cancers HPV induits et du meilleur pro-nostic ne sont actuellement pas clairement élucidées. Les études disponibles ont souvent de nom-breux biais, notamment de faibles effectifs et des études le plus sou-vent rétrospectives. Par ailleurs, les techniques de révélation de HPV sont souvent différentes, ren-dant difficiles les comparaisons entre études. Des études complé-mentaires, au mieux prospectives, sur de plus grandes cohortes, sont indispensables pour mieux mettre en évidence et expliquer les diffé-rences entre ces deux entités.

Cela pourrait permettre une nou-velle prise en charge plus spéci-fique et donc probablement plus adaptée à ce type de cancers. Ces tumeurs ayant un meilleur pronos-tic, la question se pose concernant la déflation thérapeutique, le but étant de limiter la toxicité voire des thérapies anticancéreuses sans gréver le pronostic. Ces questions sont déjà d’actualité et pourraient être applicables à court ou moyen terme (17). Le développement de nouvelles armes thérapeutiques et notamment de la vaccination pré-ventive et/ou curative sont égale-ment des orientations d’actualité. n

1. Syrjänen K, Syrjänen S, Lamberg M et al. Morphological and immunohisto-chemical evidence suggesting human papillomavirus (HPV) involvement in oral squamous cell carcinogenesis. Int J Oral Surg 1983 ; 12 : 418-24.2. Dayyani F, Etzel CJ, Liu M et al. Meta-analysis of the impact of human papillomavirus (HPV) on cancer risk and overall survival in head and neck squamous cell carcinomas (HNSCC). Head Neck Oncol 2010 ; 2 : 15.3. Kreimer AR, Clifford GM, Boyle P, Franceschi S. Human papillomavirus types in head and neck squamous cell carcinomas worldwide: a systema-tic review. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 2005 ; 14 : 467-75.4. Smith EM, Rubenstein LM, Haugen TH et al. Tobacco and alcohol use increases the risk of both HPV-associated and HPV-independent head and neck cancers. Cancer Causes Control 2010 ; 21 : 1369-78.5. Mork J, Lie AK, Glattre E et al. Human papillomavirus infection as a risk factor for squamous-cell carcinoma of the head and neck. N Engl J Med 2001 ; 344 : 1125-31.6. Institut national du cancer. Les données. [En ligne] Disponible sur : <lesdonnees.e-cancer.fr> (Consulté le 12/03/2012).7. Sturgis EM, Cinciripini PM. Trends in head and neck cancer incidence in relation to smoking prevalence: an emerging epidemic of human papillo-mavirus-associated cancers? Cancer 2007 ; 110 : 1429-35.8. Syrjänen S. Human papillomavirus (HPV) in head and neck cancer. J Clin Virol 2005 ; 32 : S59-66.9. St Guily JL, Jacquard A, Prétet J et al. Human papillomavirus genotype distribution in oropharynx and oral cavity cancer in France--The EDiTH VI study. J Clin Virol 2011 ; 51 : 100-4.10. Neufcoeur PE, Arafa M, Delvenne P, Saussez S. Involvement of human papillomavirus in upper aero-digestive tracts cancers. Bull Cancer 2009 ; 96 : 941-50.

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BiBliographie

mots-clés : carcinomes épidermoïdes des vads,

hpv, epidémiologie, pronostic,

vaccination

Keywords: hnscc, hpv, epidemiology,

prognosis, vaccination

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Les liens entre thromboses et cancers sont connus depuis près de 150 ans. Pourtant, la ma-ladie thromboembolique veineuse (MVTE) as-

sociée aux cancers pose encore, en 2012, de nombreux défis…

DéfIS DanS lE DOmaInE DE la cOmpRéhEnSIOn phySIOpathOlOgIquE… Chez le patient cancéreux, tous les éléments de la triade de Virchow sont réunis. Tout d’abord la stase veineuse (immobilisation, impotence fonctionnelle, compression…) contribue à l’accumulation de fac-teurs procoagulants et à la diminution de la clairance de certains facteurs antithrombotiques. Ensuite, des lésions endothéliales sont presque constantes en cas de cancer (cathétérismes centraux, effractions vascu-laires d’origine tumorale, agressions vasculaires liées aux chimiothérapies, aux antiangiogéniques…). L’hy-percoagulabilité enfin est l’une des caractéristiques du cancer du fait de nombreux mécanismes (cytokines proinflammatoires, chimiothérapies…). C’est dans ce domaine de l’hypercoagulabilité que les avancées sont les plus remarquables, avec une meilleure compré-

* Service de médecine interne oncologie, HIA Desgenettes, Lyon

hension des mécanismes : déséquilibre de la balance homéostatique en rapport avec le syndrome inflam-matoire, production de facteurs procoagulants (en priorité le facteur tissulaire sécrété par l’endothélium vasculaire en réponse aux agressions par les cellules tumorales), déséquilibre de la fibrinolyse au profit d’un état prothrombotique, hypercoagulabilité iatro-gène (traitements anti-angiogéniques par exemple)…

DéfIS DanS lE DOmaInE Du DIagnOStIc…Alors que la survenue d’une thrombose est un mode fréquent de révélation d’un cancer (en général de mauvais pronostic), aucune stratégie diagnostique ne permet aujourd’hui d’identifier précisément les patients chez qui la thrombose révèle un cancer oc-culte. Ainsi l’examen clinique et l’interrogatoire arri-vent largement en tête pour diagnostiquer un cancer devant ces thromboses inaugurales. La réalisation d’examens complémentaires à large spectre permet de découvrir un peu plus de cancers (par rapport à une attitude attentiste) sans toutefois pouvoir modifier leur pronostic. Certaines situations doivent alerter le clinicien : altération de l’état général, thrombose de siège atypique ou bilatérale, thrombose récidivante sous anticoagulant…

éDItORIalpr michel pavic*

De nombreux défis…

1 quand et comment rechercher un cancer devant

une maladie veineuse thromboembolique d’allure isolée ? � � � � p� 662 traitement de la maladie veineuse thromboembolique

chez le patient atteint de cancer � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � p� 703 thromboses et traitements antiangiogéniques

en oncologie � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � p� 744 thrombose veineuse sur dispositif intraveineux

de longue durée en cancérologie � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � p� 77

thROmbOSES Et cancER

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DéfIS En tERmES DE pROnOStIc… La MVTE associée au cancer augmente le risque de décès par 4 et constitue la deuxième cause de morta-lité au cours du cancer. Les thromboses sont en effet associées le plus souvent à des cancers graves et rapi-dement évolutifs (pancréas par exemple). La prise en compte de cette gravité peut influencer la stratégie thérapeutique et inciter à réaliser des traitements plus incisifs, mais en réalité souvent difficiles à entre-prendre devant un état général souvent compromis.

DéfIS En tERmES DE SItuatIOnS nOuvEllES à RISquE… L’arrivée des antiangiogéniques au cours de ces dix dernières années (bévacizumab, thalidomide, lénali-domide…) a permis d’élargir l’éventail des thérapeu-tiques antinéoplasiques et d’améliorer le pronostic de nombreuses pathologies. Ces nouveaux traitements ont rapidement démontré leur potentiel thrombo-gène, ce qui oblige actuellement, pour certains traite-ments, à la mise en place d’une prophylaxie antithrom-botique. La généralisation d’abords veineux centraux pour administrer les traitements chimiothérapiques a aussi fait émerger le risque de thromboses sur cathé-ter avec une prévalence non négligeable (de l’ordre de 10 %). La plupart des facteurs de risque de thrombose sur cathéter sont désormais bien connus (et notam-ment l’expérience du poseur), imposant le respect d’un certains nombre de règles pour limiter cette compli-cation (temps de pose, pose privilégiée du côté droit, positionnement de l’extrémité du cathéter…). Bien que non parfaitement consensuelle, la stratégie de prise en charge de ces thromboses est également mieux définie actuellement.

DéfIS DanS lE DOmaInE théRapEutIquE… C’est avec la publication des SOR (Standard Option Recommandation) “Thrombose et cancer”, en 2008, que la prise de conscience des spécificités de la MVTE associée au cancer s’est faite dans l’ensemble de la communauté oncologique. Le traitement des thromboses chez le patient atteint de cancer par hé-parine de bas poids moléculaire (HBPM) est désor-mais une pratique généralisée et les antivitamines K ne sont plus réservés qu’aux malades ne pouvant recevoir d’HBPM ou ne les tolérant plus. L’arrivée des nouveaux anticoagulants pourraient une nou-velle fois, dans un avenir proche, bousculer nos pratiques. Les bénéfices seront sans doute non pas

tellement en termes d’amélioration de l’efficacité antithrombotique ou de diminution de l’incidence des complications hémorragiques, mais surtout en termes d’amélioration du confort des malades en permettant (grâce à une prise orale) d’éviter l’incon-fort des injections des HBPM.

DéfIS EnfIn En tERmES DE pROphylaxIE…Les essais testant les HBPM en prévention primaire des thromboses en cas de cancer n’ont pas permis, jusqu’à présent, de convaincre d’un quelconque inté-rêt clinique. Le bénéfice de l’utilisation d’une héparine d’ultra-bas poids moléculaire (semuloparin) vient récemment d’être rapporté en prévention primaire des thromboses chez les patients porteurs d’un can-cer métastatique ou localement avancé, débutant une chimiothérapie (1). Sous ce traitement, l’incidence des thromboses à 3,5 mois passe de 3,4 à 1,2 % sans majo-ration des complications hémorragiques. Néanmoins, même si la survenue d’une MVTE est un élément de gravité, l’administration sous-cutanée du traitement et le grand nombre de patients devant être traités pour éviter quelques cas de thrombose rendra certainement difficile la généralisation de ce traitement préventif.

Nous le voyons, la prise en charge de la MVTE associée au cancer pose des problèmes spéci-fiques. Elle ne peut donc pas être appréhendée de la même façon que la MVTE survenant en dehors de tout cancer et ne tolère aucun amateurisme. L’Association Francophone des Soins Oncolo-giques de Support (AFSOS) et le Groupe Franco-phone Thrombose et Cancer (GFTC) émettent régulièrement, sur leur site Internet, les résultats de leurs travaux et recommandations facilement accessibles. La lecture des différents articles de ce numéro thématique de la revue vous permettra, nous l’espérons, d’actualiser vos connaissances en matière de thromboses chez le patients atteints de cancer et d’appliquer aux patients, pour la plupart des situations, des traitements le plus souvent ba-sés sur l’Evidence Based Medicine ou à défaut des re-commandations d’experts. n

1. agnelli G, George DJ, Kakkar aK et al. semuloparin for thromboprophy-laxis in patients receiving chemotherapy for cancer. n engl J med 2012 ; 366 : 601-9.

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La MVT est considérée comme idiopathique quand elle survient chez un pa-

tient sans histoire connue de can-cer, sans antécédent de chirurgie récente, de traumatisme ou d’im-mobilisation, de trouble connu de la coagulation, de traitement oes-trogénique ou de grossesse (4). Un cancer occulte concomitant à la MVT est défini comme un cancer inconnu au moment de l’accident

* Service de médecine interne oncologie, HIA Desgenettes, Lyon

thromboembolique veineux et dé-couvert par des examens de routine après le diagnostic de MVT.

DOnnéES épIDémIOlOgIquESL’existence d’un cancer multiplie par quatre le risque de thrombose par rapport à la population géné-rale et par six en cas de chimio-thérapie associée (5). Plusieurs études rétrospectives permettent d’apprécier les liens qui existent entre MVT et cancer (6).

Dans une étude danoise portant sur 26 653 cas de MVT inaugu-rale (15 348 thromboses veineuses profondes, 11 305 embolies pul-monaires), conduite de 1977 à 1992, Sorensen et al. ont observé une augmentation du risque de cancers par rapport au nombre de cancers attendus dans une même population (7). Dans le groupe thrombose veineuse pro-fonde, on observait une augmen-tation du risque relatif de cancer de 1,3 (intervalle de confiance à 95 % entre 1,22 et 1,33), soit 1 737 cas de cancer contre 1 372 attendus dans une population ajustée pour l’âge. Parmi les patients ayant pré-senté une embolie pulmonaire, l’augmentation du risque était identique (1,3 avec un intervalle de confiance [IC] à 95 % entre 1,22 et 1,41). Le risque de cancer était surtout net au cours des 6 pre-miers mois après le diagnostic de MVT, puis diminuait rapidement ensuite pour devenir égal à celui de la population générale au bout de un an. Parmi les patients chez qui un cancer avait été diagnos-tiqué dans l’année après la MVT, 40 % présentaient déjà des métastases à distance, rendant le plus souvent illusoire tout traitement curatif. Les cancers les plus fréquemment en cause étaient les cancers du pancréas, de l’ovaire, les hépatocarcinomes

xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx

L’association entre la maladie veineuse thromboembolique (MVT) et le cancer est connue depuis plus d’un siècle et demi. Trousseau fut le premier, en 1865, à rapporter cette association dont il fut lui-même, deux ans plus tard, victime (1). Au cours du cancer, tous les éléments de la triade de Virchow sont réunis pour favoriser la survenue de thromboses (immobilité, hypercoagulabilité, agression endothéliale). D’autres phénomènes concourent à l’activation de la coagula-tion en cas de cancer (2). Ainsi, environ 10 % des patients atteints de cancer présenteront au moins un accident veineux thromboembolique en lien avec la maladie néoplasique et/ou les traitements (3). Environ 20 % de l’ensemble des thromboses sont en rapport avec un cancer dont la MVT peut être le mode de révélation. Les accidents veineux thromboemboliques peuvent en effet être la première manifestation d’un cancer par ailleurs complètement silencieux. Dès lors, face à une MVT survenant chez un patient sans cancer connu, le clinicien peut se poser plusieurs questions. Faut-il réaliser une recherche de cancer en cas de thrombose d’allure idiopathique ? Si oui, quel bilan étiologique préconi-ser ? Pour quels patients ? Pour quel bénéfice ?

Introduction

1 quand et comment rechercher un cancer devant une maladie veineuse thromboembolique d’allure isolée ?Quelle attitude adopter ?Pr michel Pavic *, Dr Florian Pasquet * et Dr alain nibaud*

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et les tumeurs cérébrales. Le tra-vail de Nordstrom avait également montré qu’au-delà de six mois, le risque de développer un cancer apparaissait identique à celui d’âge identique mais sans MVT (8).

Une autre étude d’origine suédoise a étudié l’incidence des cancers au sein d’une population de 61 998 pa-tients (sans cancer préalable) admis pour une MVT entre 1965 et 1983 (9). Les résultats ont été compa-rés à l’incidence des cancers au sein d’une population équivalente. Durant la première année de suivi après diagnostic de MVT, 2 509 cas de cancers (4 %) ont été diagnosti-qués (soit un risque relatif de 4,4 ; intervalle de confiance 95 % : 4,2-4,9). Ce risque était surtout net

pathique comparativement aux patients présentant une throm-bose secondaire (11-18). L’inci-dence de cancer en cas de MVT secondaire apparaît identique à la population générale (2 à 3 %) alors qu’il approche un taux de 10 % en cas de MVT idiopathique, ce qui représente une augmentation du risque relatif de 3 à 19 par rapport à la population générale (4). Les cancers les plus fréquemment diagnostiqués dans cette situation sont les cancers du pancréas, de l’ovaire, du foie, et du cerveau.

gRavIté DE l’aSSOcIatIOn mvt Et cancER OccultECette gravité est appréciée par le

beaucoup plus important dans ce groupe de patients avec cancer oc-culte.

Un autre travail a étudié la gra-vité de l’association d’une MVT et d’un cancer à partir d’un registre californien de 235 149 patients atteints de cancer (20). Parmi ces patients, 3 775 (1,6 %) présen-taient une MVT dans les 2 ans après le diagnostic de cancer dont 463 (12 %) au diagnostic du can-cer incluant une majorité de pa-tients métastatiques. La surve-nue d’une MVT était un facteur prédictif significatif de diminu-tion de la survie durant la pre-mière année pour tous les types de cancer (hazard ratios, 1,6-4,2 ; p < 0,01). White et al. ont étudié l’incidence de la MVT dans l’année qui précède le diagnostic de cancer chez 528 693 adultes et retrouvé 596 (0,11 %) cas contre 443 atten-dus (RR = 1,3 ; IC 95 % = 1,2-1,5 ; p < 0,001) (11). Dans cette étude également, il s’agissait de patients presque exclusivement métasta-tiques signant la gravité de l’asso-ciation MVT et cancer.

Impact DE la REchERchE DE cancER En caS DE mvt D’alluRE IDIOpathIquEL’objectif théorique d’un dépis-tage précoce d’un cancer révélé par une MVT est une augmenta-tion de la survie de ces cancers. Jusqu’à présent, cela n’a jamais été démontré même en cas de recherche “exhaustive” de can-cer, peut-être en raison des faibles effectifs étudiés (3, 21, 22). Dans une étude prospective randomisée (SOMIT : extensive screening for oc-cult malignant disease in idiopathic venous thromboembolism) publiée en 2004, Piccioli et al. ont étudié l’intérêt d’une recherche approfon-die de cancer en cas de MVT symp-tomatique idiopathique (3). Les pa-

chez les patients âgés de moins de 65 ans avec pour ces patients un risque relatif (RR) de 6,7 (IC : 6,2-7,2). Le RR était également très augmenté pour la polyglobulie de Vaquez (RR = 12,9 ; IC : 8,6-18,7) mais aussi pour le cancer du foie, du pancréas, de l’ovaire, les tu-meurs cérébrales et la maladie de Hodgkin (RR autour de 5).

Une étude prospective califor-nienne plus récente a étudié un registre de 528 693 patients at-teints de cancer et retrouvé une incidence de MVT, dans l’année précédent le diagnostic de cancer, légèrement supérieure au nombre de cas attendu (10).

Plusieurs auteurs ont étudié l’in-cidence de cancers diagnostiqués durant la première année, chez les patients présentant une MVT idio-

registre prospectif international (Espagne, France, Italie, Argen-tine) RIETE (Registro informati-zado de enfermedad thromboem-bolica) étudiant pendant 3 mois les patients présentant une MVTE confirmée (19). Le registre comp-tait, en 2007, 17 475 patients dont 2 856 (16 %) avec cancer connu au diagnostic de MVT. Durant les trois mois de suivi, un cancer “oc-culte” était diagnostiqué devant des symptômes chez 178 patients (1,2 %) des 14 623 patients ini-tialement sans cancer connu. Il s’agissait principalement (67 %) de cancer du poumon, de la prostate, du côlon ou du rectum, d’origine hématologique, du pancréas ou d’origine inconnue. La moitié de ces patients était métastatique. Le risque de récidive thromboembo-lique sous traitement, de saigne-ment majeur, et de mortalité était

Le risque de cancer était surtout net au cours des 6 premiers mois après le diagnostic de MVT puis diminuait rapidement pour devenir égal à celui de la population générale au bout de un an.

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tients porteurs d’une MVT (n = 201) étaient randomisés en 2 groupes : recherche approfondie de cancer (n = 99) et absence d’investigation complémentaire (n = 102), ce groupe constituant un groupe contrôle. Tous les patients étaient suivis pen-dant 2 ans. Un cancer était identifié chez 13 (13,1 %) patients du groupe “recherche approfondie” et dans ce groupe un seul autre cas (1 %) de cancer était diagnostiqué au cours du suivi. Dans le groupe contrôle, un total de 10 cancers (9,8 %) était révélé au cours du suivi (RR : 9,7 ; IC 95 % : 1,3-36,8 ; p < 0,01). Les cancers identifiés dans le groupe “recherche approfondie” était diagnostiqués à un stade plus pré-coce et le délai moyen pour le dia-gnostic était réduit de 11,6 à 1 mois (p < 0,001). Durant les 2 années du suivi, 2 patients (2 %) décédaient de leur cancer dans le groupe “recherche approfondie” contre 4 (3,9 %) dans le groupe contrôle (différence ab-solue : 1,9 %, IC à 95 % : -5,5-10,9). Les auteurs concluent que la re-cherche approfondie de cancer en cas de MVT permet de rac-courcir le délai diagnostique du cancer, cela s’accompagnant de façon non significative d’une augmentation de la survie et d’une amélioration du pronostic. Même si des études avec de plus larges effectifs pourraient permettre de montrer une amélioration signifi-cative du pronostic, ce gain serait sans doute modeste.Un essai plus récent a étudié l’in-térêt d’une recherche approfon-die de cancer chez 630 patients hospitalisés pour MVT idiopa-thique (342 malades réalisant un bilan exhaustif et 288 malades ne le réalisant pas) et retrouve des résultats similaires. Ce bilan ne permettait de découvrir que 6 cas supplémentaires de cancer et il n’y avait entre les deux groupes ni dif-férence de mortalité ni différence de fréquence de survenue ulté-rieure de cancer (22).

Enfin, une revue de littérature analysant les données de 15 études (soit 4 378 patients) confirme qu’une stratégie exhaustive avec notamment tomodensitométrie permet d’augmenter le nombre de cancers diagnostiqués lors de la découverte d’une MVT. Cepen-dant, cette revue n’apporte aucune donnée tangible évaluant l’impact de cette plus-value diagnostique en termes de morbidité ou morta-lité liée au cancer (23).

chEz quI pOuSSER pluS lOIn lES ExamEnS ?L’incidence des cancers occultes en cas de MVT secondaire à un facteur déclenchant connu étant à peu près identique à celle de la population ne présentant pas de MVT, la recherche active d’un cancer n’apparaît justifiée qu’en cas de point d’appel cli-nique (altération de l’état général, signes fonctionnels particuliers…) (4). Lorsque la MVT est idiopa-thique, l’essai SOMIT et l’étude de Van Doormaal n’ont pas retrouvé de bénéfice en termes de gain de survie en faveur de la recherche systématique d’un cancer (3, 22). Aussi la pratique d’examens com-plémentaires systématiques non ciblés recherchant un cancer oc-culte en cas de MVT ne peut être aujourd’hui recommandée, l’im-pact médico-économique n’étant pas négligeable. En outre, comme décrit plus haut, plusieurs études ont montré que la majorité des thromboses veineuses en rapport avec un cancer concernent des maladies d’emblée métastatique donc incurables.

Certains signes cliniques doi-vent attirer l’attention du clini-cien et incitent à la réalisation d’un bilan complémentaire : baisse de l’état général inexpli-quée, antécédent de cancer, signes cliniques d’orientation vers telle

ou telle atteinte d’organe. Dans ce cas, l’interrogatoire et l’examen clinique vont permettre d’orienter les investigations. En l’absence d’anomalie clinique, certaines caractéristiques de la MVT doivent représenter des signes d’alerte incitant à rechercher de façon plus attentive un cancer : thrombose de siège atypique (thrombose d’un membre supé-rieur, thrombose intra-abdomi-nale, thrombose cave…), throm-bose profonde associée à une thrombose veineuse superfi-cielle non contigüe, ou encore thrombose bilatérale. Bura et al. ont ainsi démontré, dans un essai multicentrique prospectif regroupant 101 patients atteints de thrombose veineuse bilatérale, que la probabilité d’association à un cancer était significative-ment plus importante qu’en cas de thrombose unilatérale : décou-verte de 18 cancers (17,8 %) aux-quels doivent être ajoutés 26 can-cers connus (25,7 %) (24). L’étude de Rance et al. (rétrospective) avait également retrouvé une pré-valence importante de cancer en cas de thromboses bilatérales (15,6 vs 2,1 %) (25). La récidive d’une thrombose sous traitement an-tivitamine K (AVK) doit égale-ment faire rechercher une néo-plasie. En effet, Prandoni et al. ont retrouvé, en cas de thrombose ré-cidivant sous AVK, dans une étude de cohorte, qu’un cancer était pré-sent dans 14,3 % des cas en cas de cancer versus 3,8 % des cas en l’ab-sence de cancer (26). Les mêmes auteurs avaient montré quelques années plus tôt dans un autre travail que le risque relatif de cancer était multiplié par 9,8 en cas de thrombose veineuse récidivante (12). Enfin, certaines caractéristiques échographiques peuvent également attirer l’atten-tion, comme le caractère suspen-du ou anéchogène de la thrombose (6).

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quEl bIlan mInImal pROpOSER ?L’absence de bénéfice, en termes de survie, à diagnostiquer certains cancers plus tôt devant une MVT idiopathique incite à réaliser des examens de façon raisonnée et en nombre limité. Un interrogatoire complet à la recherche d’une alté-ration de l’état général, de signes fonctionnels focalisés, un examen clinique complet comprenant les touchers pelviens et la pal-pation mammaire semblent représenter un minimum chez tous les malades se présentant avec une MVT idiopathique ou secondaire. En outre une bio-logie “standard” comprenant un hémogramme, la recherche d’un syndrome inflammatoire, l’analyse des paramètres hépa-tiques et rénaux, et le dosage du PSA chez l’homme sont des éléments simples et indispen-sables du bilan initial. Enfin, le cliché thoracique de face (chez les fumeurs) apparaît également nécessaire chez tous les malades

atteints de MVT. Ces différents éléments constituent, dans les différentes études (dont l’étude SOMITE), le tronc commun pour tous les malades (que ce soit pour les recherches limitées ou les re-cherches “exhaustives” de cancer devant une MVT idiopathique) et permet de détecter 90 % des cancers occultes (4). La réalisa-tion d’autres explorations appa-raît beaucoup plus discutable et devrait probablement être réser-vée aux patients les plus suspects de cancer (thrombose veineuse bilatérale, récidivante ou de siège insolite ou point d’appel clinique). Certains auteurs plaident pour la réalisation systématique d’une imagerie abdominale (scanner ou échographie), voire thoracoabdo-minopelvienne systématique par tomodensitométrie, arguant le fait que dans l’étude SOMIT l’écho-graphie abdominale permit de découvrir le cancer 5 fois sur 13, le scanner thoracoabdominopelvien 10 fois sur 13 alors que les autres explorations (mammographie, co-

loscopie, cytologie urinaire) seule-ment 1 fois sur 13 (27).

cOncluSIOnSLa MVT idiopathique est en rap-port avec l’existence d’un cancer occulte dans environ 10 % des cas. Le plus souvent les cancers en cause sont d’emblée métasta-tiques et de pronostic réservé, ce qui explique probablement que le bénéfice d’une recherche exhaus-tive d’un cancer dans cette situa-tion n’apporte aucun bénéfice in-dividuel en termes de survie. Par conséquent, les recommandations actuelles sont en faveur d’un bi-lan raisonné principalement axé sur les points d’appel cliniques et certains critères d’alarme d’une thrombose veineuse (caractère bilatéral, récidivant ou encore de siège insolite). n

Mots-clés : thrombose veineuse profonde,

Risque de cancer, Diagnostic

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TRaITEmEnT cuRaTIf au lOng cOuRSCes recommandations sont basées sur les résultats de l’étude CLOT, une étude déjà ancienne publiée en 2003 mais trop souvent mé-connue (1). Cette étude multicen-

* Service d’oncologie, hôpital du Val-de-Grâce, Paris

trique randomisée compare l’uti-lisation des anticoagulants oraux (antivitamines K) à une HBPM (la daltéparine) chez plus de 600 patients porteurs d’un cancer évolutif et présentant une phlé-bite ou une embolie pulmonaire symptomatique. Dans cette étude, l’HBPM est utilisée en une injec-tion sous-cutanée quotidienne à la dose initiale de 200 UI/kg le premier mois puis 150 UI/kg du 2e au 6e mois. Les deux bras de l’étude sont équilibrés en termes d’âge, de sex-ratio et d’indice de perfor-mance. La moitié des patients est ambulatoire dans chaque groupe et les deux tiers reçoivent un trai-tement spécifique anticancéreux au moment de la survenue de l’événement thromboembolique veineux. Comparé aux AVK, le traitement par HBPM entraîne à six mois une réduction hautement significative de 52 % du risque de récidive thromboembolique sans majoration du risque de saigne-ment ni effet délétère sur la survie globale des patients.Désormais, le standard de traite-ment de la maladie thromboembo-lique veineuse au long cours, chez le patient atteint de cancer, repose donc sur l’utilisation d’HBPM à visée curative pour une durée d’au moins trois mois, idéalement six mois (2). Trois HBPM sont recom-mandées dans cette situation :

• la daltéparine à raison de 200 UI/kg au premier mois puis 150 UI/kg en une injection quotidienne ;• la tinzaparine à raison de 175 UI/kg en une injection quotidienne ;• l’enoxaparine à raison de 150 UI/kg en une injection quotidienne.

Il est à noter qu’à ce jour, seule la daltéparine a obtenu en France une AMM dans cette in-dication.

Dans le cas particulier d’insuffi-sance rénale sévère avec clai-rance de la créatinine inférieure à 30 ml/min, contre-indiquant les HBPM, le traitement doit reposer sur l’utilisation d’héparine non fractionnée avec un relais précoce dès J1 par les AVK. C’est finale-ment l’une des rares situations où les AVK trouvent encore une place dans le traitement de la thrombose veineuse du patient cancéreux.La question de la poursuite du traitement anti-thrombotique après 6 mois reste débattue. Les recommandations sont d’arrêter ce traitement en cas d’événement thromboembolique inaugural et de cancer en rémission sans traitement spécifique en cours. Dans tous les cas contraires, il est recommandé de poursuivre le traitement anti-thrombotique, ce qui expose aux difficultés d’ac-ceptabilité du traitement avec les

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La maladie thromboembolique vei-neuse est un événement fréquent et grave chez le patient atteint de can-cer et pourtant parfois négligé. Le traitement de la maladie veineuse thromboembolique chez ces patients fait désormais l’objet de recomman-dations spécifiques publiées en 2008 par l’Institut National du Can-cer (INCa) et diffusées par un certain nombre de sociétés savantes. Ces recommandations ont permis de cristalliser les travaux de recherche menés jusqu’alors et d’homogénéi-ser des pratiques disparates et préju-diciables aux patients. Comme nous allons le voir, ces recommandations reposent en substance sur l’utilisa-tion préférentielle des héparines de bas poids moléculaire (HBPM) en situation curative ainsi qu’en prophy-laxie primaire.

Introduction

2 Traitement de la maladie veineuse thromboembolique chez le patient atteint de cancerLes dernières recommandationsPr Lionel Védrine*

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contraintes des injections quoti-diennes. Le choix d’un relais par AVK peut alors se discuter la main forcée.

TRaITEmEnT cuRaTIf InITIalA la phase initiale des dix premiers jours de traitement curatif, il n’y a pas de spécificité pour le patient cancéreux et toutes les molécules ayant l’AMM peuvent être utilisées (2) : HBPM, héparine non fraction-née, pentasaccharides, danaparoïde. La présence d’une insuffisance rénale sévère avec clairance de la créatinine inférieure à 30 ml/min,

patient porteur d’une tumeur cé-rébrale, les indications du traite-ment initial et au long cours sont les mêmes (4).

PROPhylaxIE PRImaIRE En mIlIEu chIRuRgIcalLes patients atteints de cancer hos-pitalisés en milieu chirurgical re-lèvent d’une prévention primaire par HBPM à doses préventives et compression veineuse (5). La du-rée de ce traitement fait débat. Un traitement de courte durée corres-pondant à la période d’hospitalisa-tion peut être proposé en cas d’in-tervention chirurgicale brève, en

à doses préventives et de la com-pression veineuse avec les mêmes réserves que précédemment dans le cas d’insuffisance rénale sévère.

A noter que les patients cancéreux ambulatoires recevant des traite-ments anti-tumoraux par chimio-thérapies, hormonothérapies ou thérapies moléculaires ciblées ne relèvent d’aucune recommanda-tion de prévention primaire sys-tématique de la maladie thrombo-embolique veineuse hormis, à ce jour, le seul cadre, très particulier, des patients atteints de myélome et traités en première ligne par thalidomide ou dérivés en associa-tion à une polychimiothérapie ou à une corticothérapie à forte dose (schémas MPT, REV-DEX…). Ces patients doivent alors recevoir des HBPM à doses préventives pour une durée de 3 mois. Par ailleurs, des essais de prophylaxie primaire sont en cours en fonction de la localisation tumorale primitive notamment pancréatique, pulmo-naire ou cérébrale.

caS PaRTIculIER DE la ThROmbOSE SuR caThéTERLes thromboses veineuses sur ca-théter avérées relèvent des mêmes modalités de traitement anticoa-gulant curatif en phase initiale et au long cours que les thromboses veineuses des autres sites anato-miques (2). La question du retrait du cathéter est régulièrement po-sée. Ce retrait s’impose si le cathé-ter est mal positionné, s’il est in-fecté, s’il n’est plus fonctionnel et a fortiori s’il n’est plus utile (cancer en rémission). Dans les autres cas, le cathéter peut être conservé et utilisé en parallèle à la mise route du traitement anticoagulant.Il n’existe pas de recommandation de traitement médicamenteux

L’analyse de nos pratiques montre que l’estimation de la clairance est souvent négligée avec les risques que l’on sait de surdosage en HBPM chez l’insuffisant rénal et in fine de complications hémorragiques.

contre-indiquant les HBPM, né-cessite évidemment, comme nous l’avons vu plus haut, l’utilisation d’héparine non fractionnée avec un relais précoce dès J1 par les AVK. Ce point est important à rappeler car l’analyse de nos pratiques montre que l’estimation de la clairance est souvent négligée avec les risques que l’on sait de surdosage en HBPM chez l’insuffisant rénal et, in fine, de complications hémorragiques.

En cas de contre-indication à un traitement anticoagulant ou de récidive sous un traitement an-ticoagulant bien conduit, la pose d’un filtre cave doit être discu-tée. De même, en cas d’embolie pulmonaire grave avec défaillance circulatoire, les indications et les modalités de la thrombolyse sont les mêmes que chez un patient non cancéreux (3). Enfin, en cas de survenue de maladie throm-boembolique veineuse chez un

pratique inférieure à 45 minutes. En cas de chirurgie carcinologique de plus de 45 minutes, ce qui est le cas le plus fréquent, le traite-ment par HBPM et compression veineuse est prolongé un mois. En cas d’insuffisance rénale sévère, l’héparine non fractionnée est re-commandée à la dose de 5 000 UI toutes les 8 heures associée à une compression veineuse.

PROPhylaxIE PRImaIRE En mIlIEu méDIcalIl n’existe pas de recommanda-tions spécifiques au patient cancé-reux pour la prophylaxie primaire de la thrombose veineuse pour les séjours en médecine (5). Les indications sont celles du cadre plus général des patients souffrant d’une affection chronique et hospi-talisés pour un événement aigu in-tercurrent. La prophylaxie repose alors sur l’utilisation des HBPM

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préventif de la thrombose sur ca-théter et les “héparinisations” de chambres implantables inutili-sées appartiennent au passé. La meilleure prévention consiste à veiller à un positionnement op-timal de l’extrémité du cathéter, idéalement située à deux centi-mètres au-dessus de l’abouche-ment de la veine cave supérieure dans l’oreillette droite. Un posi-tionnement trop court du cathéter reste en effet le principal facteur de risque de thrombose (6).

cOncluSIOnEn définitive, le traitement des thromboses veineuses chez le pa-tient cancéreux ne doit plus être laissé pour compte mais nécessite une prise en charge à part entière répondant à des recommanda-tions précises privilégiant l’utili-sation des HBPM. L’identification de facteurs prédictifs de survenue de thrombose veineuse et l’avè-nement de nouvelles classes thé-rapeutiques antithrombotiques devraient permettre à l’avenir

d’optimiser encore la prévention et le traitement de cette complica-tion redoutable du cancer qu’est la maladie thromboembolique vei-neuse. n

Mots-clés : Thromboses veineuses profondes,

Traitement, Recommandations,

hbPm, anticoagulant

1. Lee aY, Levine mn, baker rI et al. Low-molecular-weight heparin versus a coumarin for the prevention of recurrent venous thromboembolism in patients with cancer. n engl J med 2003 ; 349 : 146-53.2. Institut national du Cancer. Thrombose et cancer : traitement curatif de la maladie veineuse thromboembolique ; prévention et traitement des thromboses veineuses sur cathéter. recommandations de l’Institut natio-nal du Cancer, septembre 2008.3. akl ea, Vasireddi sr, Gunukula s et al. anticoagulation for the initial treatment of venous thromboembolism in patients with cancer. Cochrane

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On distingue principale-ment les anticorps mo-noclonaux tels que le

bévacizumab ciblant le vascular en-dothelial growth factor-A (VEGF), et plus récemment l’aflibercept, qui est composé de deux domaines fusionnés de VEGFR1 et 2 avec une région constante IgG1 (4). L’afli-bercept neutralisant les formes solubles de VEGFA, VEGFB et in-hibant également le PIGF (4).Il existe également des inhibi-teurs de tyrosine kinase bloquant les récepteurs du VEGF, et le plus souvent d’autres cibles. Les plus utilisés, pour lesquels on dispose de plus de recul sont le sunitinib (Sutent®) et le sorafenib (Nexa-var®). Cette classe thérapeutique est en augmentation constante, on en compte plus d’une dizaine en cours d’essais cliniques tels que le pazopanib, l’axitinib, le cediranib, le regorafenib (liste non limitative)...

* Hôpital Saint-Antoine, Paris

LE bévacIzumabLe bévacizumab (Avastin®), anti-corps monoclonal dirigé contre le VEGF, est le plus ancien des antian-giogéniques. Ces indications sont multiples mais il est principale-ment utilisé dans le traitement du cancer colorectal, du cancer bron-chique non à petites cellules, du cancer du rein, du glioblastome, du sein et plus récemment de l’ovaire.Si la survenue de thromboses arté-rielles sous bévacizumab est claire-ment établie, celle de thromboses veineuses est plus débattue.L’incidence de thromboses arté-rielles sous bévacizumab est de l’ordre de 1 à 6 % selon les études, avec principalement des épisodes d’accidents vasculaires isché-miques cérébraux, et d’infarctus du myocarde (Tab. 1). Ces données ont été confirmées par plusieurs méta-analyses portant sur plusieurs mil-liers de patients (5, 6).S’agissant de la survenue de throm-boses veineuses sous bévacizumab, l’estimation de ce risque est plus

difficile, les données étant contra-dictoires. Ainsi, dans une méta-analyse reprenant 15 essais rando-misés ayant inclus 7 956 patients, mais ne portant pas sur les données individuelles, Nalluri et al. (7) ont rapporté une incidence de compli-cations thromboemboliques vei-neuses de tous grades de 11,9 % (IC 95 % : 6,8 %-19,9 %), et un risque relatif estimé à 1,33 (IC 95 % : 1,13-1,56 ; p = 0,001). A noter que cet excès de risque se retrouvait quel que soit le dosage de bévacizumab, différent selon les protocoles de chimiothérapie.

Une autre méta-analyse, financée par l’industrie, reprenant 1 795 patients inclus dans 5 essais, ne retrouve pas de risque majoré de thromboses veineuses sous bé-vacizumab, mais confirme bien l’augmentation de la survenue de thromboses artérielles (8). Enfin, Hurwitz et al. (9), dans une méta-analyse portant sur des données in-dividuelles de 6 055 patients inclus dans 10 essais randomisés, n’ont pas retrouvé d’augmentation de thromboses veineuses sous bévaci-zumab (10,9 % vs 9,8 % , odds ratio 1,14 ; IC 95 % : 0,96-1,35 ; p = 0,13). Cette méta-analyse montre égale-ment qu’il n’y a pas plus d’hémorra-gies chez les patients sous anticoa-gulants pour thrombose veineuse et recevant du bévacizumab.

Plus récemment, l’étude SAiL (10), phase IV concernant 2 212 patients

L’incidence des thromboses au cours du cancer est augmentée (1). Elle est variable selon les études, les pathologies tumorales, les stades et les traite-ments employés. Ainsi, chez les femmes atteintes d’un cancer du sein, l’inci-dence est estimée de 0,1 % en cas de stade I sans traitement complémentaire, à 17 % dans le cas de stades avancés sous chimiothérapie (2, 3). En plus des cytotoxiques dits “classiques”, l’arsenal thérapeutique s’est enrichi de thérapies dites “ciblées” dont les traitements antiangiogéniques.

Introduction

3 Thromboses et traitements antiangiogéniques en oncologieL’évaluation des risques…Dr Luis Teixeira*

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traités par bévacizumab pour can-cer bronchique non à petites cel-lules, a permis de relativiser ces données en observant un événe-ment thromboembolique clinique-ment significatif dans 8 % des cas, dont 1 % d’embolies pulmonaires et 1 % de thromboses veineuses profondes. Dans cette étude, 15 % des patients étaient sous anti-coagulants, il n’y a pas eu plus de récidives thromboemboliques ou de saignements signalés sous bé-vacizumab.Ces données sont globalement rassurantes concernant l‘adminis-tration de bévacizumab chez un patient sous traitement anticoagu-lant pour une complication throm-boembolique veineuse.

L’afLIbERcEpTCe VEGF Trap, d’apparition plus récente, semble avoir les toxicités communes à cette classe thérapeu-tique, voire plus fréquentes concer-nant la survenue d’une hyperten-sion et d’une protéinurie, que sous bévacizumab. Il a été rapporté une incidence de thromboses veineuses de 7 % dans le cancer de l’ovaire (11). Avec l’extension de ces indications ce risque devrait être mieux évalué.

LES InhIbITEuRS DE TyROSInE kInaSE (TkI)Les inhibiteurs de tyrosine kinase ciblant le récepteur du VEGF ont également été associés à un risque accru de thromboses artérielles. On

dispose d’un recul suffisant pour le sunitinib et le sorafenib qui ont été les premiers utilisés. Une mé-ta-analyse récente, portant sur 10 255 patients, a ainsi rapporté une incidence d’événements thrombo-tiques artériels de 1,4 % (IC 95 % : 1,2-1,6) (12). Le risque relatif de développer une thrombose arté-rielle étant de 3 (IC 95 % : 1,25-7,37 ; p = 0,015). A noter qu’il n’y avait pas de différences de survenues des thromboses artérielles selon le type de cancer (rénal vs non rénal) et le type de TKI (sorafenib vs suni-tinib). Le risque de thromboses vei-neuses est beaucoup plus faible, la survenue de celles-ci semblant être liées à l’association d’une chimio-thérapie (Tab. 2).

Tableau 1 - fréquence des événements thromboemboliques avec le bévacizumab en association avec la chimiothérapie.

Traitement nombre de patients

Type de cancer

Throm-boses sans précision

Throm-boses

veineuses

Thromboses artérielles

Réf.

bévacizumab 46 Col de l’uterus

11 % (14)

chimiothérapie + bévacizumab5 mg/kg10 mg/kgcontrôles

102 Cancer colorectal 23 %

6 % 6 %

3 % 6 % 3 %

(15)

chimiothérapie + bévacizumabvs placebo

813 Cancer colorectal 19,4 %

16,2 %

(16)

chimiothérapie + bévacizumab vs placebo

204 Cancer colorectal 8 %

11 %10 %5 %

(17)

chimiothérapie + bévacizumab vs placebo

829 Cancer colorectal 16,3 %

9,2 % 0,9 %0,4 %

(18)

chimiothérapie+ bévacizumab

76 Cancer gastrique

22 % 11 % (19)

chimiothérapie+ bévacizumabvs placebo

444 Cancer du sein 3 %

3 %

(20)

Ifn alpha+ bévacizumabvs placebo

732 Cancer du rein

2 % 1 % (21)

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Mots-clés : Traitement antiangiogénique,

Thrombose, bévacizumab, afliber-

cept, Inhibiteurs de tyrosine kinase

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BiBliographie

Concernant les inhibiteurs de mTOR, il n’a pas été décrit d’aug-mentation du risque de throm-boses artérielles ou veineuses (13). Le développement des thé-

rapies ciblées et surtout leurs as-sociations devraient logiquement voir des toxicités nouvelles mais également augmenter certaines déjà connues. n

Tableau 2 - fréquence des événements thromboemboliques avec le Sunitinib et le Sorafenib.

Traitement nombre de patients

Type de cancer Thromboses veineuses

Thromboses artérielles

Réf.

Sunitinib (Sutent) 28 Tumeurs solides avancées 4 % 0 (22)

207 GIsT 0 0 (23)

375 Cancer rénal 0 0 (24)

84 Cancer colorectal métas-tatique

<10 % <10 % (25)

63 Cancer bronchique non à petite cellules

0 0 (26)

Sorafenib(nexavar)

202 Cancer rénal 0 0 (27)

+ doxorubicine

+ gemcitabine

137 ChC 0 0 (28)

451 Cancer rénal 0 3 % (vs <1 %) (29)

34 Tumeurs solides avancées 0 0 (30)

42 Tumeurs solides avancées 12 % 1 décès (31)

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La thrombose veineuse sur dispositif intraveineux de longue durée représente

un problème clinique émergent, comme en témoigne une étude prospective sur registre de Joffe et al (1) : cette étude multicentrique a concerné 5 451 patients présen-tant une thrombose aigüe, recrutés dans 183 centres. Onze pour cent (592 patients) présentaient une

* Institut Curie, Paris

thrombose du système cave supé-rieur. La présence d’un cathéter (324 patients) a été le principal facteur de risque indépendant de survenue d’une thrombose du sys-tème cave supérieur.

La thrombose veineuse sur dis-positif intraveineux de longue durée se définit comme le déve-loppement d’une obstruction cruorique dans la lumière de la veine, soit à partir du cathé-

ter (thrombus en manchon), soit à partir de la paroi veineuse (thrombus mural). Elle est à diffé-rencier, d’une part des manchons de fibrine, causes de dysfonc-tionnement des cathéters, quasi constants dès 24 heures après la pose et source permanente de colonisation, et d’autre part des occlusions fibrino-cruoriques ou médicamenteuses de la lumière interne du cathéter qui relèvent d’un traitement fibrinolytique et d’une prévention obsessionnelle par des stratégies de rinçage. La place des verrous et en particulier de l’activité antimicrobienne de la taurolidine par un effet sur le bio-film reste débattue en oncologie.

ASpEctS clInIquESLorsque la thrombose est com-plète, la symptomatologie clinique est évidente, associant fébricule à 38°, œdème cervical, gros bras douloureux, comblement du creux sus-claviculaire, circulation collatérale, voire syndrome cave supérieur. Ailleurs, la thrombose est suspectée sur un simple mais évocateur dysfonctionnement du cathéter. Les caractéristiques d’un thrombus cave supérieur sont d’être localisé, non extensif, et non occlusif dans 85 % des cas (2), ren-dant compte de l’hétérogénéité clinique. Bien que trop souvent

Le diagnostic clinique des thromboses veineuses sur dispositif intraveineux n’est pas toujours facile et la thrombose sur cathéter reste probablement sous-estimée. La thrombose doit être évoquée devant tout dysfonctionnement de cathéter. La prévention primaire par anticoagulants n’est actuellement pas re-commandée. Cependant, les facteurs de risque spécifiques de thrombose sont mieux connus. Les poseurs doivent en être informés pour limiter et prévenir le risque. Pour d’autres facteurs, des études complémentaires s’appuyant sur ces facteurs de risque sont nécessaires pour préciser l’intérêt éventuel d’une pré-vention primaire (timing, durée, dose et agents).L’impact médical et économique de ces thromboses est loin d’être négligeable. Si le traitement de ces thromboses est actuellement mieux codifié (HBPM au long cours), l’observance réelle tant médicale que patient laisse probablement des marges d’amélioration importantes. Néanmoins, de plus en plus de throm-boses (veineuses et thrombus de l’oreillette droite) sont découvertes lors d’exa-mens systématiques (scanner, échographie). Le traitement de ces thromboses asymptomatiques est mal codifié. Enfin, l’existence de nouveaux dispositifs (PICC [peripherally inserted central catheter] en particulier) impose la poursuite d’études notamment médico-économiques pour en préciser la place en cancé-rologie.

Introduction

4 thrombose veineuse sur dispositif intraveineux de longue durée en cancérologieUn point sur les facteurs de risque et les traitementsDr Irène Kriegel* et Dr abdelmalek Ghimouz *

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sous-estimé, le risque embolique existe et ce quel que soit le tableau clinique de la thrombose sur dis-positif intraveineux. L’embolie pulmonaire peut être inaugurale. Elle est souvent de petite taille, symptomatique dans 6 à 10 % des cas chez l’enfant comme chez l’adulte, mais retrouvée dans 15 à 30 % des cas quand elle est recher-chée de manière systématique. La surmortalité est réelle, estimée à 2,2 % des enfants dans l’étude de Monagle et al (3).

DIAgnOStIcL’échodoppler est l’examen de référence et doit être utilisé dès la suspicion clinique (4). Si sa spécifi-cité est de 94 à 100 %, sa sensibilité plus médiocre varie selon la topo-graphie de la thrombose : près de 100 % en jugulaire, moins de 10 % dans la veine cave supérieure, d’où l’intérêt de la tomodensitométrie (5). Cet examen est indispensable en cas de suspicion de thrombose cave supérieure ou de pathologie médiastinale préexistante et en cas de nécessité de repose d’un ca-théter. Par contre, il existe une très faible sensibilité de l’ordre de 30 % de l’échodoppler pour le dépistage des thromboses asymptomatiques (6). La validation d’autres examens que la phlébographie, quasi aban-donnée, est un préalable indispen-sable à toute étude sur la thrombose asymptomatique. L’angiographie par IRM pourrait être dans l’avenir le Gold Standard de l’évaluation de l’anatomie des veines thoraciques (7). Elle est particulièrement inté-ressante chez l’enfant (pas d’expo-sition aux radiations ionisantes). De plus, quel que soit le tableau clinique, une radiographie de thorax standard doit être faite car elle permet d’iden-tifier rapidement un cathéter trop court, en boucle ou en “fausse route”, imposant alors son retrait.

DOnnéES épIDémIOlOgIquESUne revue récente de la littérature a colligé les résultats de 51 études, dont 6 en pédiatrie sur les throm-boses sur dispositifs intraveineux de longue durée chez les patients cancéreux (8) : le taux de throm-bose symptomatique varie de 0,3 à 28,3 %. Les chiffres les plus élevés ont été rapportés dans les études les plus anciennes. Deux de ces études ont étayé les propositions d’anticoagulation systématique préventive rarement mise en œuvre. Des données plus récentes et l’impression clinique quoti-dienne suggèrent que l’incidence des thromboses symptomatiques serait plus faible, de l’ordre de 4 %, soit de 0,2 à 0,3 thromboses/1 000 jours de cathétérisme (9-13). Ces mêmes études n’arrivent pas à montrer de bénéfice à l’utilisation en prévention primaire des anti-vitamines K ou des héparines de bas poids moléculaire. Il en est de même chez l’enfant : pas de béné-fice à une prévention primaire par de la warfarine (14). L’incidence des thromboses symptomatiques sur PICC varie dans la littérature de 2,4 % (15) à 7,8 % (16).

FActEuRS DE RISquE DE thROmbOSE SuR cAthétER vEInEux cEntRAl

Facteurs liés à la maladie cancéreuseLa maladie veineuse thromboem-bolique est une complication fré-quente des tumeurs malignes dont la prévalence attendue est de 15 %. Les publications sont abondantes, mettant en lumière de nombreux facteurs de risque : la maladie cancéreuse elle-même, le type de cancer, le stade de la maladie, le type de chimiothérapie utilisé, les

traitements hormonaux, le traite-ment chirurgical, l’hyperplaquet-tose, une diminution des taux de protéines C et S, une résistance à la protéine C activée, la mutation du facteur V Leiden, homo ou hé-térozygote, ou la présence d’une anomalie génétique ou acquise de la coagulation, l’existence d’une masse médiastinale gênant le re-tour veineux…(17) Facteurs liés aux cathétersLe facteur principal mis en évi-dence est la position de l’extrémité distale du cathéter qui, idéale-ment, doit être située à la jonction oreillette droite/veine cave supé-rieure (OD/VCS) (18). Ainsi, tout cathéter trop court, en fausse route, en boucle ou à contre-courant doit être replacé.La notion de blessure veineuse endothéliale, lors des ponctions itératives, explique l’intérêt sus-cité par les techniques d’abord veineux sous repérage échogra-phique (19), et l’engouement ac-tuel pour les poses en jugulaire. Ainsi, de très nombreuses études souvent contradictoires ont cher-ché à mettre en évidence la su-périorité de la voie jugulaire par rapport à la voie sous-clavière ou inversement. La réponse pourrait être : ponction unique et extrémité OD/VCS ce qui, pour des raisons anatomiques, est souvent plus fa-cile à réaliser pour les sites droits.

Les autres facteurs de risque sont le matériau utilisé avec abandon des chlorures de polyvinyle et de polyé-thylène au profit de la silicone et du polyuréthane moins thrombogène, le nombre de lumières (augmenta-tion du risque avec augmentation du nombre de lumières), le dia-mètre du cathéter (augmentation du risque pour les diamètres éle-vés), l’insertion par voie fémorale (multiplie le risque par un facteur 6

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et justifie la mise systématique sous traitement prophylactique) (12). La notion de cathéter antérieur, jusque-là controversée, justifie la pratique d’échographie voire d’une tomodensitométrie pré-pose. Une étude récente de Lee montre une augmentation du risque de thrombose par un fac-teur 3,8 en cas de repose sur ca-théter antérieur (13). Cette même étude insiste sur la rareté du syn-drome post-phlébitique clinique. Ces deux résultats sont retrouvés par Ruud et al. chez l’enfant : fré-quence des séquelles thrombo-tiques locales et pauvreté des ma-nifestations cliniques (20). Une méta-analyse récente retrouve les facteurs de risque suivants : pose d’un PICC, notion de cathéter an-térieur, ponction sous-clavière et malposition de l’extrémité distale. (21). Enfin, de façon identique, les facteurs de risque identifiés de thrombose sur PICC sont un PICC antérieur, une pose d’une durée supérieure à une heure et un dia-mètre de cathéter élevé (22).

Ces facteurs de risque rendent compte des deux pics de fréquence observés dans la survenue des thromboses : 50 % des thromboses surviennent précocement dans les 6 semaines qui suivent l’implan-tation, liées à la blessure veineuse endothéliale, à la position de l’ex-trémité distale du cathéter et à des facteurs patients ; 50 % sur-viennent plus tardivement, sont peu étudiées dans la littérature, notamment en ce qui concerne les études de prévention primaire, et sont liées aux facteurs patients et à l’avancée dans la maladie cancé-reuse.

tRAItEmEnt cuRAtIFIl n’est ni consensuel, ni standar-disé.

traitementIl comporte dans tous les cas un traitement anticoagulant d’au moins 6 mois ou indéfiniment aussi longtemps que le cancer est actif. Les HBPM présentent des avantages certains en raison de la simplicité d’administration, de la surveillance, du risque hémor-ragique et des interactions médi-camenteuses. Il est recommandé d’utiliser l’héparine non fraction-née en cas d’insuffisance rénale sévère, avec relais précoce par an-tivitamines K. Les antivitamines K sont de maniements difficiles, avec un risque de saignement ou de ré-cidive lié à la difficulté d’avoir un équilibre constant (dénutrition, vomissements, hypo protidémie, infection, interactions médica-menteuses notamment avec la chimiothérapie, altérations de la fonction hépatique). Les deux HBPM qui ont montré leur supério-rité dans cette indication sont la dal-téparine 200 UI/kg/j d’anti-Xa pen-dant 1 mois, puis 150 UI/Kg/j et la tinzaparine 175 UI/Kg/j d’antiXa. Enfin, il est possible que les HBPM réduisent la mortalité des patients non métastatiques (23-25).

maintien du cathéterLe succès du traitement anticoagu-lant est indépendant du retrait ou du maintien du cathéter. Il y a ac-tuellement un consensus entre les équipes préconisant le maintien du dispositif intraveineux sous réserve d’une étroite surveillance clinique. Le bénéfice pour le pa-tient est important, tant en termes de confort physique que de sécu-rité. Les bénéfices du traitement conservateur sont une préserva-tion du capital veineux, une durée de vie des cathéters thrombosés ou non comparables et une fréquence des complications identiques, no-tamment d’embolie pulmonaire. Ces protocoles conservateurs ne

se conçoivent qu’en cas de cathé-ters fonctionnels et nécessaires, de longueur adéquate, en l’absence de pathologie infectieuse associée, et surtout que si les signes cliniques s’amendent en 48 à 72 heures sous anticoagulants.

retrait du cathéterEn cas de retrait du cathéter, il n’y a pas d’attitude standard ni sur les modalités (anticoagulation préa-lable au retrait ou retrait avant an-ticoagulation) ni sur le délai d’an-ticoagulation à respecter avant le retrait si décision d’anticoagula-tion première. Il n’y a pas non plus de données sur la durée optimale du traitement anticoagulant en cas d’ablation du cathéter.

autres solutionsDans certains cas, des options thérapeutiques plus invasives in-cluant thrombolytiques, throm-boaspiration, dilatation et/ou pose de stent ont pu être proposées. Des contre-indications classiques li-mitent souvent leur emploi en onco-hématologie (chirurgie ré-cente, saignements digestifs, lo-calisations cérébrales…). Ils sont donc réservés aux patients dont le pronostic à long terme est bon ou lors des syndromes caves supé-rieurs mal tolérés.

cOncluSIOnIl est nécessaire de poursuivre les études permettant le ciblage des populations à risque pouvant éventuellement bénéficier d’une prophylaxie primaire, tout en pré-cisant la place des nouveaux trai-tements antithrombotiques.

Enfin, l’organisation d’équipes spécialisées dans la mise en place et l’entretien des dispositifs intra-veineux de longue durée ainsi que l’utilisation plus large de référen-

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tiels et de check-lists pourraient réduire l’incidence des throm-boses sur cathéter et permettre

une évaluation précise par centre de l’incidence des thromboses symptomatiques. n

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BiBliographie

mots-clés : thrombose veineuse,

cathéter, Facteur de risque, traitement

Oncogériatrie

Femmes âgées atteintes de cancer du sein : enfin un essai clinique !L’ essai ASTER70s est le premier essai théra-

peutique basé sur l’analyse d’un biomar-queur pronostique, en l’occurrence le grade géno-mique, chez des personnes de plus de 70 ans. L’essai, devant inclure 2 000 patientes, devra explorer l’intérêt d’une chimiothérapie adjuvante post-opératoire chez la femme de 70 ans et plus, présentant un cancer du sein hormonosensible et sans surexpression de l’oncogène/récepteur HER2. Suite à l’analyse du biomarqueur pronos-

tique, les patientes se verront proposer soit le traitement de référence (une hormonothérapie prolongée sur 5 ans) soit une chimiothérapie com-plémentaire (chimiothérapie courte sur 3 mois dont la composition sera choisie par le médecin parmi 3 possibilités) suivie d’une hormonothérapie pro-longée sur 5 ans. Cette étude sera coordonnée par le Dr Etienne Brain de l’Institut Curie et promu par UNICANCER. ß

Pour en savoir plus : www.curie.fr

EN BREFUn noUveaU test poUr le dépistage dU cancer colorectalA l’occasion du mois de Mars bleu, Nora Berra a annoncé la mise en place d’un nouveau test de dépistage du cancer colorectal pour 2013. Ce test immunologique pourrait bien remplacer progressive-ment le test Hemocult…

ActuAlItéS

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Si l’acupuncture est large-ment utilisée en Orient comme médecine à part en-

tière associée aux autres aspects de la médecine traditionnelle chinoise, en Occident, les pa-tients y ont recours surtout pour la douleur. Parmi les autres de-mandes des patients, l’anxiété et les troubles du sommeil fi gurent

* unité mobile d’Accompagnement et de soins palliatifs, Hôpital européen Georges pompidou, paris** service d’oncologie médicale, Hôpital Avicenne, Bobigny

en bonne place. L’acupuncture se révèle également effi cace dans d’autres indications retenues lors de la conférence de consensus du NIH (National Institut of Health) américain (1) et par l’OMS comme les nausées et vomissements post-opératoires et en rapport avec la chimiothérapie, l’addiction (anti-tabac) et l’asthme. Le but de cet article était, d’une part, de rechercher dans la litté-rature (PubMed) quels étaient les principaux symptômes au cours de la maladie cancéreuse pour les-quels un traitement par acupunc-ture avait été proposé et, d’autre part, d’appréhender l’opinion des patients sur l’acupuncture et son introduction dans les centres de cancérologie et dans les unités de soins palliatives.

Les sYmptÔmes La littérature concernant le trai-tement par acupuncture de symp-tômes retrouvés au cours du can-cer est peu abondante et récente avec beaucoup d’études de cas. La plupart des études contrôlées randomisées portent sur un pe-tit nombre de patients et sont de faible qualité méthodologique.

DouLeurLes douleurs retrouvées au cours du cancer ont fait l’objet de très peu d’études malgré leur fréquence.

Dans la revue systématique de Lee et al. (2), les études retenues concernent une population hété-rogène de patients cancéreux et des douleurs de localisations et de mécanismes divers. Seule l’étude d’Alimi et al. (3) présente une bonne qualité méthodologique. Elle montre des eff ets supé-rieurs de l’auriculothérapie par rapport à deux placebos chez des patients cancéreux présentant des douleurs neuropathiques et/ou nociceptives. Pour Lee et al. (2), les résultats de ces études, variables, ne permettent pas de conclure sur l’effi cacité de l’acupuncture. Une seule étude (étude de cas) a concerné spécifi quement les dou-leurs de métastases osseuses (4),

Tout au long de la maladie cancé-reuse y compris dans le cas où elle guérit, le patient peut être confron-té à de nombreux symptômes qui vont altérer sa qualité de vie. Ces symptômes sont en rapport avec la maladie elle-même, les traitements ou sans rapport. Ils peuvent s’amé-liorer ou disparaître avec les traite-ments spécifi ques et/ou symptoma-tiques qui constituent le champ des soins de support. Dans certains cas, ces traitements sont insuffi sants ou ineffi caces ou à l’origine d’effets se-condaires délétères. Des patients, et plus récemment des équipes de cancérologie, se sont alors tournés vers les médecines complémen-taires (MC) dont l’acupuncture.

Introduction

acupuncture et symptômes au cours du cancerDoit-on préconiser les médecines complémentaires ?Dr Mai Luu*, Dr Kader Chouahnia**

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alors qu’elles constituent l’une des premières causes de douleur chez le patient cancéreux. Paley et al. (5) n’ont pas retrouvé dans la littéra-ture d’études de bonne qualité met-tant en évidence l’efficacité de l’acu-puncture dans ce type de douleur. Concernant les douleurs post-opératoires, Deng et al. (6) ont testé sans succès une forme d’acu-puncture (implantation d’aiguilles semi-permanentes) en préventif des douleurs post-thoracotomie. En revanche, les douleurs post-mammectomie avec curage gan-glionnaire axillaire semblent ré-pondre à l’acupuncture (7). Les résultats concernant les dou-leurs musculo-articulaires en rapport avec les anti-aromatases chez les patientes ménopausées présentant un cancer du sein sont beaucoup plus probants. Crew et al. (8) ont montré l’efficacité de l’acupuncture comparativement au placebo non seulement sur l’in-tensité de ces douleurs mais éga-lement sur la mobilité et la sensa-tion de bien-être.

DyspnéeL’utilisation de l’acupuncture pour les troubles respiratoires a surtout concerné l’asthme et la broncho-pneumopathie chronique obstruc-tive. Dans une revue concernant les interventions non médicamen-teuses dans la dyspnée au cours de la phase avancée de maladies malignes ou pas, Bausewein et al. (9) n’a pas retrouvé d’efficacité de l’acupuncture ni de l’acupressure. Si Filshie et al. (10) retrouvent une efficacité de l’acupuncture dans la dyspnée au cours du cancer bron-chique ou des métastases pulmo-naires ce n’est pas le cas pour Vic-kers et al. (11) dans la dyspnée du cancer du poumon et du sein avec une acupuncture particulière : im-plantation d’aiguilles semi-perma-nentes.

Les nausées et vomissementsLes nausées et vomissements pro-voqués par la chimiothérapie consti-tuent une indication classique de l’acupuncture qui a été retenue par le NIH (1). La revue de la littérature d’Ezzo et al. (12) conclut à partir de quelques études de bonne qualité méthodologique que l’acupuncture réduit la proportion de patients présentant des nausées et vomis-sements aigus chimio-induits mais non leur sévérité. En re-vanche, elle ne paraît pas avoir d’in-fluence démontrée sur les épisodes retardés. Les effets varient suivant le type d’acupuncture, l’électro-acu-puncture étant plus efficace que la digipuncture. Dans leur revue de la littérature, Chao et al. (13) re-trouvent des études récentes dé-montrant les effets bénéfiques de l’acupressure dans les nausées et vomissements chimio-induits chez les patientes présentant un cancer du sein. Néanmoins, les études bien conduites ne retrouvent pas toutes des effets positifs comme celle conduite par Streitberger et al. (14) qui ne montre pas d’effet préven-tif supplémentaire de l’association acupuncture-ondansétron compa-rativement à l’anti émétique seul sur les nausées et vomissements aigus d’une chimiothérapie à haute dose avant greffe de cellules autologues.

FatigueDans l’étude de Vickers et al. (15), chez des patients ayant terminé leur traitement par chimiothé-rapie depuis plus de deux ans et présentant une fatigue persistante avec un score élevé au Brief Fati-gue Inventory, la moyenne d’amé-lioration du niveau de fatigue a été de 31,1 %, l’âge étant néanmoins associé à des résultats moins bons. Molassiotis et al. (16) retrouvent des résultats comparables avec une moyenne d’amélioration de 36 % dans le groupe acupuncture, 19 %

dans le groupe acupressure et 0,6 % dans le groupe acupuncture place-bo à la fin d’un traitement sur deux semaines. Cette amélioration concerne la fatigue générale et physique, l’activité et la motiva-tion. Les résultats sont moins bons deux semaines après l’arrêt du trai-tement ce qui implique la nécessi-té d’un traitement plus prolongé pour le maintien dans le temps de l’effet de l’acupuncture.Johnston et al. (17) ont intégré l’acu-puncture à un programme de prise en charge de la fatigue chronique chez des patientes en rémission d’un cancer du sein. Malgré un effec-tif réduit, ils retrouvent une amélio-ration supérieure de la fatigue chro-nique dans le groupe expérimental.

La xérostomieLa xérostomie est un effet secon-daire fréquent et habituellement irréversible de la radiothérapie ob-servé chez les patients traités pour un cancer ORL.Blom et al. (18) retrouvent une augmentation du flux salivaire à la fin du traitement (acupuncture vrai  ; acupuncture superficielle utilisée comme placebo) dans les deux groupes de patients ayant reçu une radiothérapie supérieure à 50 Gy. A un an, cette augmenta-tion est toujours présente chez 68 % des patients du groupe acu-puncture vrai et 50 % du groupe placebo. Cinquante pour cent des patients de chaque groupe dont le flux salivaire avait augmenté avaient eu une irradiation de toutes leurs glandes salivaires. De-vant l’absence de différence signi-ficative entre les deux groupes, les auteurs recommandent de ne pas utiliser l’acupuncture superficielle comme placebo. Cho et al. (19) retrouvent aussi une augmentation du flux salivaire spontané et une amélioration de la sensation de bouche sèche plus

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Acupuncture et symptômes Au cours du cAncer

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importante dans le groupe acu-puncture que dans le groupe pla-cebo. En revanche, le flux salivaire est peu augmenté après stimula-tion quel que soit le groupe. Pour les auteurs, l’acupuncture amé-liore essentiellement la sensa-tion subjective de bouche sèche contribuant à l’amélioration de la qualité de vie de ces patients. Une étude pilote conduite par Gar-cia et al. (20) retrouve également une amélioration de la sensation de bouche sèche et de la qualité de vie qui apparaît progressivement au cours des huit semaines de trai-tement. Wong et al. (21) retrou-vent également une amélioration de la qualité de vie en rapport avec la xérostomie avec une technique particulière d’acupuncture utili-sant la stimulation transcutanée.

Plus de 70 % des patients atteints de cancer en fin de vie souffrent de xérostomie et de ses conséquences (difficultés à mâcher, avaler et parler). Meidell et al. (22) ont re-trouvé une amélioration de ces symptômes chez tous les patients bien que peu d’entre eux aient fini l’étude qui comportait 10 séances d’acupuncture sur 5 semaines.

Les bouFFées De chaLeurLes bouffées de chaleur font partie des effets secondaires fréquents des thérapeutiques utilisées chez les femmes présentant un cancer du sein. Porzio et al. (23) retrouvent une amélioration des symptômes de la ménopause (anxiété, dépression, symptômes somatiques et vasomo-teur) provoqués par le tamoxifène. De même, Nedstrand et al. (24) re-trouvent un effet bénéfique com-parable de l’acupuncture et de la relaxation avec un recul de six mois sur les bouffées de chaleur mais éga-lement sur la sensation de bien-être. En revanche, dans l’étude de Deng et al. (25), si l’acupuncture réduit la

fréquence des bouffées de chaleur, cette réduction n’atteint pas la si-gnificativité comparativement au placebo. Frisk et al. (26) ont com-paré l’acupuncture et l’hormono-thérapie. L’acupuncture diminue la fréquence des bouffées de cha-leur mais de façon moindre que l’hormonothérapie. En revanche, Walker et al. (27) retrouvent une amélioration des symptômes va-somoteurs sous acupuncture com-parable à celle obtenue sous venla-faxine mais sans effet secondaire et durable dans le temps.Chez l’homme, Hammar et al. (28) retrouvent également un effet po-sitif de l’acupuncture sur des bouf-fées de chaleur après castration dans le cancer de la prostate.

Les troubLes psychiquesSi les effets psychologiques de l’acu-puncture chez les patients cancé-reux ne semblent pas avoir été spé-cifiquement étudiés, on retrouve dans les études sur les autres symp-tômes, une amélioration conjointe de l’état psychologique et une sen-sation de bien-être (8, 19, 20, 21, 27). Les études réalisées sur l’acupunc-ture et dépression, anxiété et in-somnie peuvent apporter des élé-ments de réponse sur son efficacité sur ces symptômes.Dans une étude multicentrique, Luo et al. (29) ont comparé l’électro-acupuncture associée à un placebo et l’amitriptyline chez deux groupes de patients déprimés. Les effets sur les troubles dépressifs ont été comparables. L’électro-acupuncture a eu des effets su-périeurs sur la somatisation anxieuse et la perturbation des processus cognitifs et beaucoup moins d’effets secondaires.Dans une revue de la littérature sur l’anxiété, Pilkington et al. (30) retrouvent une efficacité de l’acupuncture dans les troubles anxieux généralisés. L’anxiété pé-

ri-opératoire répond bien surtout à l’auriculothérapie avec une ef-ficacité supérieure au placebo et un effet identique aux traitements habituellement prescrits.Concernant l’insomnie, Spence et al. (31) retrouvent dans une étude ouverte une augmentation de la mélatonine endogène noc-turne, une amélioration des me-sures en polysomnographie, une diminution de l’anxiété, et un ef-fet relaxant de l’acupuncture. Les auteurs concluent à l’intérêt de l’acupuncture pour les insom-nies chez les patients anxieux. Dans la revue systématique de Ka-lavapalli et al. (32), l’acupuncture semble améliorer l’insomnie dans des contextes variés. Suivant les études, les patients présentent des comorbidités différentes, psychia-triques (dépression, anxiété) ou conditions médicales particulières (hémodialyse, AVC, grossesse).

Les patients cancéreux et Les mcPlusieurs études ont cherché à savoir la proportion de patients qui avait recours aux MC, leur motivation et l’efficacité de ces thérapeutiques. Aux USA, Mansky et al. (33) retrouvent une préva-lence d’utilisation des MC variant entre 7 à 54 % des patients can-céreux suivant le lieu, le sexe et le type de cancer diagnostiqué. Les principales motivations ont été : stimuler le système immunitaire, soulager la douleur, contrôler les effets secondaires de la maladie et des traitements. Certains patients y avaient recours dans une inten-tion curative. L’acupuncture était surtout utilisée pour la fatigue et les nausées et vomissements in-duits par la chimiothérapie et l’au-riculothérapie pour la douleur. En France, Simon et al. (34) ont réa-lisé une enquête sur deux hôpitaux

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publics et une clinique privée. Ils ont interrogé 244 patients sous chimiothérapie. Vingt-huit pour cent d’entre eux utilisent une ou plusieurs MC, essentiellement l’ho-méopathie et peu l’acupuncture. Leurs motivations étaient com-parables à celles retrouvées dans l’étude de Mansky et al. (33) : aug-menter ses propres défenses, aug-menter sa tolérance aux traitements et, pour 27 % d’entre eux, traiter leur cancer. La majorité des patients a été satisfait de ces thérapeutiques avec un bon effet subjectif sur l’état général, la fatigue et les nausées et vomissements. Il est à noter que la plupart de ces patients n’utilisaient pas de MC avant leur cancer et qu’ils étaient 30 % à ne pas en avoir informé leur oncologue. Malgré son efficacité et sa bonne sécurité, les patients cancéreux recourent peu à l’acu-puncture comparativement aux d’autres MC. Sa fréquence d’utili-sation rapportée dans la littérature varie entre 1,7 et 4,9 % avec une ex-ception à 31 % (35). Deux raisons principales sont invoquées : le non-remboursement des séances et le peu de cliniciens qui adressent leurs patients à un acupuncteur (35).

intégration de L’acupuncture en oncoLogie et en soins paLLiatifsDepuis quelques années, les MC, dont l’acupuncture, commencent à être proposées et pratiquées dans des centres anti cancéreux (35) et dans des unités de soins palliatifs (36).

L’acupuncture : recommanDée par Les patientsJohnstone et al. (37) ont proposé à des patients en cours de traitement anti-cancéreux un traitement pal-

liatif de leurs symptômes par l’acu-puncture, cette discipline étant intégrée dans un Centre d’Onco-logie Médical et de Radiothérapie. Quatre-vingt-neuf patients ont été traités par acupuncture entre jan-vier et avril 2000 avec un total de 444 séances. Soixante-dix-neuf ont répondu à un questionnaire adres-sé 2 mois plus tard. Les principaux motifs de traitement par acupunc-ture ont été la douleur, les bouffées de chaleur, les nausées et les pertes d’appétit. Soixante pour cent des patients ont été améliorés de 30 % ou plus de leurs symptômes ; 1/3 n’a pas eu de changement. Aucun effet indésirable n’a été observé. Quelle que soit la réponse au traitement, 86 % des patients ont considéré l’acupuncture comme très impor-tante et 90 % ont recommandé qu’elle continue à être proposée dans le centre.

traitement paLLiatiF par acupuncture : intérêt et FaisabiLitéDean-Clower et al. (38) ont réa-lisé une étude pilote afin de dé-terminer l’intérêt et la faisabilité d’un traitement palliatif par acu-puncture chez des patientes am-bulatoires présentant un cancer du sein ou de l’ovaire en phase avancée. Sur les 40 patientes in-cluses, 8 n’ont pas commencé le traitement et 26 ont terminé les 12 séances d’acupuncture qui s’étalaient sur 8 semaines. Les symptômes qui se sont amélio-rés ont été : l’anxiété, la fatigue, la douleur et la dépression. Il en a été de même pour la qualité de vie. Ces améliorations étaient en-core présentes à 12 semaines.

connaissance De L’acupuncture par Les patientsUne enquête a été réalisée en unité de soins palliatifs portant sur

50 patients afin de déterminer leur connaissance de l’acupuncture, son utilisation et son intérêt. Cinquante-quatre pour cent des patients avaient une bonne connaissance de ce qu’est l’acupuncture. Bien que 30 % l’aient utilisé avant d’avoir un cancer et 10 % pour des symptômes en rapport avec le cancer, 80 % des patients étaient intéressés pour rencontrer un acu-puncteur dans l’unité de soins pallia-tifs (36).

concLusionDes études contrôlées de bonne qualité sont nécessaires pour bien repérer les symptômes pour les-quels l’acupuncture pourrait ap-porter un bénéfice. Ce n’est pas sans poser des problèmes pratiques, ceux inhérent à l’acupuncture elle-même : le choix du placebo, la durée du traitement, le type d’acupunc-ture (auriculothérapie, acupres-sure, aiguilles semi-permanentes, électro-acupuncture)… mais égale-ment la variabilité des symptômes et les problèmes éthiques. S’il n’y a pas de preuve convaincante que l’acupuncture prolonge la survie, les patients y trouvent un bénéfice quel que soit le stade de la maladie cancéreuse. Celle-ci a peu d’effets secondaires (39) et pas de véritable contre-indication bien que, dans certaines circonstances, il est plus prudent de ne pas l’utiliser (throm-bocytopénie ; traitement anti coa-gulant). D’autres techniques appa-rentées peuvent alors être utilisées (digipuncture, auriculothérapie). n

mots-clés : acupuncture, soins palliatifs,

nausées, Vomissement, fatigue,

douleur, médecines complémentaires

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Acupuncture et symptômes Au cours du cAncer

onko + • Mars 2012 • vol. 4 • numéro 28 85

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BiBliographie

100 %

90 %

80 %

70 %

60 %

50 %

40 %

30 %

20 %

10 %

■ > 1h■ 30 à 60 min■ 15 à moins de 30 min■ < 15 min

0 %FENTANYL

(n = 120)

7,65

38,7

48,7

MORPHINE(n = 176)

6,4

27,5

3,80

28,1

OXYCODONE(n = 165)

11,8

31,1

40,4

16,8

Autre(n = 10)

55,6

33,3

11,1

figure 2 - délai moyen de soulagement après prise du traitement de l’adp en fonction

du traitement pris en première intention (“registre”).

erratum

dossier « accès douloureux paroxystiques en 2012 : ce qu’il faut savoir, ce qu’il faudrait faire »

Nous tenions à rectifier une erreur survenue dans la légende de la figure 2 du premier article du dossier de Onko+27 (p.39) : « epidémiolo-gie, caractéristiques et prise en charge des adp en france – résultats de l’étude adepi ». Le graphique ci-contre indique que le fentanyl soulage, en moins de 15 min, 48,7 % des pa-tients versus 28,1 % pour la morphine et 16,8% pour l’oxycodone.retrouvez la totalité du dossier sur : www.onko.fr

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