Approche comparative Hegel-Husserl

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  • Revue Philosophique de Louvain

    Phnomnologie husserlienne et phnomnologie hglienneAlphonse De Waelhens

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    De Waelhens Alphonse. Phnomnologie husserlienne et phnomnologie hglienne. In: Revue Philosophique de Louvain.Troisime srie, tome 52, n34, 1954. pp. 234-249.

    doi : 10.3406/phlou.1954.4491

    http://www.persee.fr/doc/phlou_0035-3841_1954_num_52_34_4491

    Document gnr le 24/09/2015

  • Phnomnologie husserlienne

    et Phnomnologie hglienne0

    A premire vue, il ne manque pas de raisons de penser qu'une tude compare de la notion de phnomnologie chez Hegel et chez Husserl ne se fonde que sur de simples analogies verbales. Rien, en effet, ne parat s'opposer plus radicalement que ces deux philosophies, tant par leurs thses, que par leurs mthodes ou l'esprit qui les inspire. Plus prcisment, aucun livre ne ressemble moins un crit de Husserl que la fameuse Phnomnologie de l'Esprit.

    Les diffrences sont si clatantes, si totales, qu'il n'est mme pas besoin de les considrer une une. D'une part, une pense ttonnante, incertaine de son cours, trs pntre certains gards des difficults que la situation du philosophe pose l'laboration de la philosophie et nullement d'autres, sur bien des points insoucieuse de l'histoire, fort porte croire que le problme de la connaissance, convenablement pos et rsolu (ce qui dans l'esprit de Husserl quivaut un refus pur et simple de toute la tradition philosophique qui le prcde immdiatement) fournit la clef de toute la philosophie, enfin et surtout l'ide que la philosophie est affaire de rflexion personnelle d'un esprit individuel auquel cette rflexion ne confre pas de ralit nouvelle mais seulement un savoir nouveau, qui n'a pas besoin pour russir dans sa tche de se mettre en continuit avec l'histoire du monde et devra seulement se mettre au contact du reste naturel des choses.

    D'autre part, une doctrine ferme et systmatique, dtermine par sa fin en chacun de ses moments, affirmant que le philosophe surgit de l'histoire en quelque sorte comme le savoir d'une action

    (*> Communication faite la Socit Philosophique de Louvain, le 19 mars 1954.

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    surgit de cette action, niant avec dtermination la porte relle ultime du problme de la connaissance, tenu seulement pour caractristique d'une phase de l'volution ou du devenir du savoir ; proclamant que le savoir philosophique rvle l'Esprit absolu lui- mme et assure sa totale perfection.

    Ces oppositions, que nous prsentons ici sous la forme gnrale qu'impose une premire lflexion, paraissent dj suffire ruiner notre dessein. 11 y a plus encore. Husserl s'est bien des fois et trs explicitement insurg contre toute conception dialectique de la philosophie et il n'est pas douteux que par cette hostilit, c'est Hegel qu'il entendait viser. Avant d'examiner ces critiques, je voudrais pourtant faire deux remarques.

    C'est, d'abord, que Husserl n'est aucunement un historien de la philosophie. Manifestement, sa connaissance de l'histoire de la philosophie est toujours lacunaire et souvent inexacte. Pourquoi s'en tonner: Husserl est en philosophie un autodidacte, venu cette forme du savoir par besoin de rsoudre certains problmes ns pour lui d'une rflexion sur une discipline scientifique particulire, les mathmatiques, auxquelles d'abord il se destine. Originellement, Husserl ne s'est pas intress la philosophie pour elle-mme, mais pour recevoir d'elle, propos du statut rel de l'tre mathmatique, une connaissance qu'il croit pouvoir en obtenir sans autres formes de procs. C'est la dception encourue l'examen des solutions proposes qui lui impose une vocation philosophique, si cette expression n'est pas contradictoire. On ne doit donc pas prouver de surprise constater le caractre peu systmatique, incomplet et parfois farfelu des connaissances de Husserl en matire d'histoire de la philosophie. En fait, celle-ci ne lui sert jamais que d'illustration ou de repoussoir. Il dcore d'un nom les thses qu'il veut rfuter ou, plus rarement (car il a une vive conscience de son originalit), dfendre. Du reste, il se rend parfaitement compte de cette situation puisqu'il lui arrivera un jour de baptiser meine Romane ses rfrences et ses allusions l'histoire de la philosophie.

    Tel est particulirement le cas pour Hegel. N'oublions pas que Husserl commence sa carrire un moment o le discrdit de la philosophie hglienne est profond et gnral. Et, circonstance importante, ce discrdit est tout spcialement marqu dans le milieu scientifique, qui est, l'origine, le sien. On raconte ce sujet je crois tenir l'anecdote de Frau Husserl mais sans plus pouvoir

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    l'affirmer une histoire fort plaisante et tout fait significative. Le mathmaticien Weierstrass qui fut le matre de Husserl avait pous une fille de Hegel. Aussi, soucieux de se garder de ses amis et de ses visiteurs, avait-il plac bien en vue au mur de son bureau un petit criteau : Hier soil man Hegel nicht beschimpfen , on est pri ici de ne pas conspuer Hegel .

    Les raisons de cette totale dsaffection sont parfaitement trangres une apprciation correcte de la philosophie hglienne. En vrit, elle procde d'une interprtation errone de la philosophie hglienne de la nature. On jugeait, et d'une certaine faon rien n'est plus vident, que le dveloppement de la science au cours du XIXe sicle avait radicalement contredit la Naturphlosophie. Il se rptait ainsi pour Hegel ce qui la Renaissance s'tait produit pour Aristote : l'croulement, au regard des progrs de la science positive, d'une philosophie de la nature, entrane la chute de l'difice philosophique tout entier. Or, il y avait dans le cas de Hegel pour ne point parler de l'autre exemple un immense malentendu. Bien sr, la Naturphilosaphie fourmille d'affirmations inexactes et que la science future devait controuver. Mais on se trompe absolument si on pense comme on l'a pens que la cosmologie hglienne se proposait simplement d'anticiper la marche de la science positive, attendant d'elle une confirmation ou une condamnation, c'est--dire, au mieux, un verdict d'acquittement. Hegel sait fort bien, et il le dit, que science et philosophie poursuivent d'autres fins, construisent une autre forme de connaissance. Il ne s'est donc jamais livr la besogne assez vaine et sans espoir de succs qui consisterait inventer d'avance et par les seules forces de la raison un savoir qui relve par nature de l'observation empirique. Toute philosophie mise part, Hegel a prouv plus d'une fois n'tre pas un mauvais tacticien et, comme il n'a jamais cess de traiter ses collgues philosophes et savants le plus durement du monde, on imagine sans peine qu'il ne s'est pas fourr dans un aussi mauvais cas en leur offrant en quelque sorte volontairement la quasi-certitude d'une totale revanche et cela sans aucune contrepartie possible pour la philosophie hglienne.

    Le sens de la cosmologie hglienne est donc tout autre. Hegel entend avec elle fournir une explication de la nature et de la vie telles qu'elles s'offrent nous dans l'exprience non-scientifique, et cette explication consiste la fois analyser et constituer le sens que l'une et l'autre manifestent pour nous dans cette exp-

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    rience non-scientifique. La critique qui s'efforce de rfuter, voire de ridiculiser la Natunphilosophie par rfrence aux dveloppements de la science positive du XIXe sicle (ou de n'importe quelle autre) ne fait donc que la preuve de sa propre incomprhension.

    Je voudrais retenir de ces considrations une double consquence. L'attitude prise par Husserl l'gard de la philosophie hglienne tait, dans le contexte donn, pratiquement invitable et, en second lieu, elle ne saurait tenir lieu de mise au point relle et valable des rapports entre la phnomnologie de Hegel et celle de Husserl.

    Une autre objection notre propos, mais d'une toute autre nature, nous mne au cur de notre sujet. L'opposition entre les deux phnomnologies considres est, dira-t-on, totale, ne laisse place aucune conciliation ou mme comparaison possible, puisque l'une implique une conception de la phnomnologie qui rduit celle-ci une description des choses elles-mmes, au lieu que l'autre retrace les pripties ncessaires du devenir de l'Esprit dans l'histoire, pripties qui sont imposes au philosophe comme la ralit par la nature de l'esprit lui-mme avec lequel le philosophe se trouve en connivence absolue. Il s'agit donc, dans ce dernier cas, non d'une description mais, si l'on veut, d'une cration ou en tout cas d'une constitution.

    On peut, en effet, prsenter de cette faon les lments de notre problme. Il reste alors comprendre exactement ces lments et comment les thses que nous venons d'avancer doivent tre interprtes. Si nous russissons dans cette interprtation nous aurons entirement clairci notre propros. Mais alors aussi apparatra, je me risque le prdire, une image des rapports entre l'une et l'autre phnomnologie trs diffrente de celle que l'on prsente d'ordinaire, du moins si l'on se soucie d'un tel objet. Essayons donc de fournir les linaments de cette interprtation.

    Il est vrai que la philosophie de Husserl s'inspire entirement de l'intention de faire retour aux choses elles-mme9 : zurtick zu den Sachen selbst. Elle juge ce projet possible parce qu'elle conoit la conscience du philosophe et avec elle toute conscience comme tant exhaustivement dfinie par l'intentionnalit. La nature de la conscience n'est pas d'tre reprsentative, de possder des contenus immanents qu'on suppose relatifs une extriorit, la chose, sans qu'videmment on puisse se former aucune raison dcisive de l'exactitude, de l'exacte conformit de cette reprsen-

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    tation. Si, au contraire, la conscience est exhaustivement conscience de ce qui lui apparat, si, la source de toute exprience et se maintenant travers elle, s'tablit par nature un contact immdiat de la conscience et de la chose, il devient concevable (en mme temps que disparat tout fondement la distinction du phnomne et de la chose en soi, du moins au sens classique) que la conscience dise ce que les choses sont. Bien entendu ceci ne suffit pas liquider toutes les difficults de la connaissance, mais seulement les transformer radicalement. Avant d'examiner cette transformation, notons que tant la prface que l'introduction de la Phnomnologie de l'Esprit, font, en des termes certes fort diffrents, des considrations quant leurs consquences assez semblables. La difficult centrale de l'pistmologie, crit Hegel, prsuppose prcisment des reprsentations de la connaissance comme d'un instrument et d'un milieu, elle prsuppose aussi une diffrence entre nous-mme et cette connaissance ; surtout, elle prsuppose que l'absolu se trouve d'un ct, et elle prsuppose que la connaissance se trouvant d'un autre ct, pour soi et spare de l'absolu, est pourtant quelque chose de rel. En d'autres termes, elle prsuppose que la connaissance, laquelle tant en dehors de l'absolu, est certainement aussi en dehors de la vrit, est pourtant encore vridique, admission par laquelle ce qui se nomme crainte de l'erreur se fait plutt soi-mme connatre, comme crainte de la vrit. Cette conclusion rsulte du fait que l'absolu seul est vrai ou que le vrai seul est absolu (1).

    Ce texte essentiel fournit notre mditation une premire matire, car il montre parfaitement ce qui unit et ce qui spare nos deux philosophes. Hegel pense donc que la connaissance ne peut pas tre conue comme un pont entre la conscience et ce qui n'est pas elle. Une telle manire de voir est contradictoire en elle- mme, parce qu'elle tient la connaissance pour simplement diffrente de soi-mme. Or c'est ce que veut dire aussi la thse de l'intentionnalit de la conscience. Selon celle-ci, la conscience est vise des choses et si donc elle est par l ncessairement diffrente des choses (car on ne peut viser que ce que l'on n'est pas), elle est aussi par l ncessairement non-diffrente de la connaissance (qui est cette vise mme), ou plutt, si on donne la notion de

    *

    (l> Phnomnologie de V Esprit, traduction Hyppolite, I, pp. 66-67.

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    connaissance un largissement qui n'est contraire ni son sens phnomnologique ni son sens hglien, la conscience n'est pas diffrente oie son tre-auprs-des-choses.

    Cette dernire expression nous invite faire un pas de plus. Le refus de l' illusion d'immanence , c'est--dire d'une conscience possdant des contenus, revient considrer la conscience comme tant essentiellement une intriorit qui s'extriorise, comme comportant essentiellement une dimension d'extriorit, comme, autrement dit, tant la fois et insparablement pour soi et pour l'autre. Arrtons-nous un instant cette vue. Ce langage, dira-t-on, s'il est 'hglien, n'est pas husserlien. J'en tombe d'accord mais je dis qu'il est phnomnologique parce que toute phnomnologie {et, pareillement, toute la philosophie de Hegel) - consiste comprendre que les notions du manifeste et du simplement pour moi sont antinomiques : manifeste est une ngation du simplement pour moi . C'est ce qu'on comprend mieux si l'on songe, et je parle cette fois le langage husserlien le plus constant, que l'vidence est pour la conscience insparable d'une Leibhaftigkeit, d'une prsence relle.

    Nous avons donc quant prsent tabli un point commun entre les deux penses que nous tudions. Ds la perception, la conscience se rvle comme une intriorit ekstatique, c'est--dire comme une intriorit qui est (et non pas qui a) un mouvement vers l'autre que soi. Il est vrai, si nous nous en rfrons au texte cit et l'ensemble de ce que nous savons de la philosophie hglienne, que Hegel fournit de ce fait une explication (le terme n'est gure hglien) fort diffrente de celle que pourrait donner Husserl, qui, en ralit, se borne voir que les choses sont ainsi. C'est que pour Hegel la conscience est mouvement vers un absolu, dfini comme possession pure de soi, dans la rciprocit de l'intrieur et de l'extrieur, dans la rciprocit de la matire et de l'esprit, qu'elle n'est pas d'emble, mais dont elle n'est pas non plus, le texte nous l'a dit, simplement spare. Elle n'en est pas spare parce que cet absolu est en fin de compte elle-mme, en sorte que le mouvement qui parat la mener hors d'elle-mme est en ralit ralisation d'elle-mme. Mais cette ralisation, ce dveloppement de toutes les mdiations dont la conscience est grosse, parce qu'il est fond la fois sur le fait de l'inadquation et la ncessit de l'adquation entre ce que la conscience vise et ce qu'elle exprimente, comporte une srie de stades et de figures,

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    au cours desquels la conscience se transforme elle-mme progressivement, qui dfinit justement la Phnomnologie de l'Esprit. Hegel, on le sait, a d'abord voulu donner son livre le titre gnral de Wissenschaft der Erfahrung des Bewusstseins .

    Il n'y a rien de tel chez Husserl, pour qui la phnomnologie, nous verrons pourquoi, ne comporte pas d'ontologie de la conscience. Pour Husserl, et je crois pour toute phnomnologie non hglienne, l'ordination de la conscience l'autre constitue le fait premier et indpassable absolument, qui permettra du reste ses successeurs d'lever la Geworfenheit et la facticit au rang d'lments constitutifs de l'existence humaine. L est mon avis la seule mais radicale opposition entre les deux sens du mot phnomnologie.

    Car les explications que nous venons de donner nous fournissent de nouveaux points de comparaison. Nous avons constat que l'une et l'autre phnomnologie partent de la vise d'un donn prsent, dont la prsence est radicalement incontestable. Mais l'une et l'autre aussi vont tre amenes dire que cette vise, si elle prend conscience d'elle-mme, doit se transformer et se dpasser. Cette transformation consiste passer de la vise d'un donn la perception d'une chose. Il est mme trs remarquable que le moteur de ce mouvement ou, si vous prfrez, la raison de ce passage est chez nos deux philosophes profondment semblable. A chaque fois, c'est le sens rel vcu et exerc de la vise et de ce qui est vis qui aboutit changer et la conception que la conscience se fait de son acte et le corrlat de cet acte, passer, pour l'acte, du viser au percevoir et, pour le corrlat, du donn la chose .

    A partir de ce moment la marche des deux uvres va devenir totalement divergente et la raison de cette divergence est l'opposition fondamentale que nous avons signale. L'uvre de Husserl est centre sur l'explication d'une conscience qui demeure, en dernire analyse, un surgissement irrcuprable, c'est--dire qui conserve un tre-l comme tel insurpassable en dpit de toutes ses transformations. La pense de Hegel, au contraire, s'efforce de rcuprer cet tre-l de moi-mme, en entranant la conscience, par un mouvement qui doit englober toute l'histoire, vers une figure finale qui est ralisation d'un* Esprit absolu, savoir absolu de lui-mme dans la parfaite rciprocit de la conscience et de la nature, du pour-soi et de l'en-soi.

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    Pourtant, en de de cette radicale oppositon, ces deux phnomnologies peuvent continuer de s'clairer l'une par l'autre. Ce que nous avons dit nous mne en effet contester l'opposition un peu simpliste qu'ordinairement on se hte de placer entre description et dialectique. La phnomnologie de Husserl dcrit , celle de Hegel construit dialectiquement . Ces expressions, considres comme fort claires, sont en ralit tout fait superficielles. Essayons d'abord de comprendre ce qu'est la description husserienne. A notre avis, si on la prend la racine, on voit qu'elle repose entirement sur l'opposition dialectique du sens et de la prsence. Cette manire de voir peut paratre choquante, expliquons-la donc.

    Bon nombre de commentateurs de Husserl croient devoir rompre ies meilleures lances de leur arsenal dans l'inpuisable controverse qui met aux prises partisans de l'idalisme et partisans du ralisme husserliens. Si on regarde ce furieux combat en spectateur impartial et distant, ce qui, je le voudrais du moins, est notre cas, on est aussitt amen d'tranges constatations. Pratiquement, aucun des deux camps ne parat en posture de remporter une victoire dcisive, la controverse renaissant sans cesse. Cette indcision ne parat pas tenir l'absence ou la faiblesse des arguments des deux partis. Au contraire, et paradoxalement, les adversaires sont l'un et l'autre munis de textes nombreux, clairs et formels, qui semblent chaque fois suffisants, jusqu'au moment o la parole est donne l'opposant, dont l'argumentation ne parat pas moins convaincante. Ainsi donc voil un philosophe de premire importance et qui s'est exprim longuement propos de l'un des problmes tenus par ses contemporains et par lui-mme pour les plus importants, sans que l'on puisse savoir avec certitude quelle solution il lui donnait, alors que pourtant, de l'avis d'une longue et unanime tradition, ce problme ne pouvait recevoir qu'une rponse choisir parmi deux possibilits strictement antinomiques. Comment ne pas penser qu'il y a l-dessous quelque capital malentendu ? Notre intrt sera encore suscit si l'on songe que dans une certaine mesure la mme situation s'est produite propos de Hegel.

    La clef du mystre est, justement, cette oscillation que j'annonais, chez Husserl, entre le sens et la prsence et, selon qu'on pousse cette philosophie, mais l'opration est illgitime dans ses deux directions, souligner l'un ou l'autre, on aboutit la com-

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    prendre comme idalisme ou comme ralisme. Illgitime, dis-je, car la vraie porte de l'effort husserlien est de faire progresser l'exprience et par consquent la description, par le perptuel renvoi de l'un l'autre. Et c'est pourquoi la philosophie de Husserl est une philosophie qui dfinit la ralit comme rencontre, si l'on veut bien entendre ce dernier mot au sens le plus tendu possible.

    Mais ceci pose plus de difficults qu'il n'en rsout. Car toute la question est de savoir comment le sens et la prsence peuvent s'changer et comment une description peut s'accomplir sans faire renatre le mme mouvement, c'est--dire sans prolonger la vie de ce qu'elle dcrit, au lieu de la restituer purement et simplement.

    Il me parat incontestable que sous cette forme ces problmes ne sont point parvenus la claire conscience de Husserl, et qu'il les a laisss irrsolus. Or l encore, on peut croire que la rfrence Hegel est clairante.

    On pourrait cette difficult fournir une rponse superficielle et dire que si Husserl semble n'avoir nul souci du problme que pose proprement l'change du sens et de la prsence, c'est qu'il pratique la rduction phnomnologique, la mise entre parenthses de l'existence. Nous ne saurions entrer ici dans la thorie fort complique des rductions, mais il est vident que la rduction n'est pas ici en question.

    Car Husserl parle constamment d'une Leibhaftigkeit rduite ; il s'agit avec elle d'une exprience non exerce de la prsence. Ceci veut dire que le phnomnologue se place devant la chose prsente et en vit la prsence distance, c'est--dire sans accomplir jusqu'au bout le mouvement spontan qui nous porte vers la chose comme existante, mas tout en cherchant dcrire mme ce mouvement-l.

    Il n'est certes ,pas facile de saisir en quoi consiste exactement l'change d'un sens et d'une prsence. Commenons donc par ce qu'il y a dans cette relation de plus indubitable. Et c'est d'abord qu'une telle relation est insparable, elle aussi, d'un mouvement. Le sens est dans la chose, et la prsence le fournit, mais il n'apparat que grce une activit de la conscience. Ce dernier point est particulirement net dans la phnomnologie husserlienne, plus net mme que dans toute phnomnologie subsquente, puisque Husserl admet et dcrit la formation de significations vides, l'intuition d'une prsence prenant pour lui le caractre d'une Erfiillung,

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    d'un remplissement (ou d'un non-remplissement si le donn ne vient pas recouvrir la signification d'abord pro-pose). Mais il est clair, si l'on rflchit aux conditions de ce procs, que l'attitude du sujet l'gard de ce qui est pour lui objet (pour reprendre les expressions classiques) est susceptible de prendre des modalits trs diverses voire opposes. Il y a, autrement dit, et pour parler le langage phnomnologique, une variation possible dans l'intention- nalit de la conscience. Et tout compte fait, on doit se demander si tout le procs ne doit pas se rduire une telle variation.

    En effet, lorsque la conscience construit des significations, elle se laisse mener non pas certes par la seule spontanit de son activit, mais celle-ci, au contraire, se trouve comme conduite par une sorte de ncessit qui est immanente ses produits. Ainsi apparat un premier caractre du sens qui est de s'appeler et de se dvelopper sans cesse par ses seules forces, d'tre la fois expansif et rfrentiel, si toutefois l'esprit consent entrer dans le mouvement qu'il bauche. La position propre de la conscience l'gard de ce qu'on pourrait appeler le devenir de la signification est donc suprmement ambigu. Elle se prsente la fois comme constituante et comme tmoin.

    J'arrte ici un instant mon effort d'interprtation pour revenir Hegel et constater que la manire dont se comporte la conscience chacun des stades de la Phnomnologie de l'Esprit (et quels que soient ces stades, que la conscience y soit sensible, dsirante , raison ou esprit) est simplement la mme. La conscience y apparat comme le tmoin, boulevers il est vrai, d'un procs qui se droule en elle, qu'elle ne peut matriser mais qui, pourtant, attend d'elle son accomplissement. Ce mystre d'une conscience la fois agissante et agie, et agie par ses propres the mata ( penses ne serait pas suffisant), est fondamental dans toute la Phnomnologie de l'Esprit, comme dans la phnomnologie husserlienne. Il est, d'ailleurs, plus facile comprendre, malgr certaines apparences, chez Hegel que chez Husserl, puisque chez Hegel il est d'emble admis que la conscience doit devenir ce qu'elle n'est pas encore, en l'tant pourtant dj d'une certaine manire. Au contraire, le point difficile de la phnomnologie husserlienne, je l'ai dj signal et nous y reviendrons encore, est que la conscience, en mme temps qu'intentionnelle, est cense reposer absolument sur elle-mme. L'antinomie que je viens d'noncer nourrit toutes les quivoques sur la notion husserlienne de constitution.

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    Reprenons notre analyse et voyons si elle confirme les possibilits de comparaison et d'claircissement quelle nous a dj offertes.

    Selon le Husserl classique, la signification n'a valeur de connaissance et de vrit que si elle est erfullt , remplie, et dans la stricte mesure o elle l'est. C'est la prsence, et la prsence seule, qui a la facult et le privilge de remplir. Toute prsence n'est pas perceptive, mais toute prsence se fonde en dernire- analyse sur une prsence perceptive. Mai qu'est-ce en rigueur de termes qu'une Erf'llung, qu'un remplissement ? Comment une prsence peut-elle remplir un sens ? Cela n'est possible, de toute vidence, que par un changement d'intentionnalit l'gard du sens lui-mme. En d'autres termes, ou la prsence ne comble rien, ou elle est encore un sens mais qui est vis autrement. Au lieu que la signification vienne elle-mme par le droulement d'une ncessit immanente que la conscience sous-tend et auquel elle prte une efficace sans laquelle il ne serait point, le sens est livr maintenant d'un coup, s'imposant et contraignant, investissant la conscience et la sollicitant d'une manire cette fois pour elle irrsistible. Tout ce qu'on peut dire de la prsence dans une perspective comme celle de Husserl, est qu'il s'agit avec elle de l'apparition d'un sens l'gard duquel ou de laquelle la conscience, sans qu'elle le choisisse et tout en le choisissant, adopte une attitude purement rceptive, une attitude de hinnehmen pur. Toute autre dfinition de la prsence est dans une perspective husser- lienne irrecevable. Or cette dfinition est une dfinition par l'in- tentionnalit. En dfinitive si l'on cherche savoir ce qui caractrise proprement un sens prsent, on est renvoy vers une certaine attitude de la conscience, laquelle correspond du reste, en vertu de la corrlation ncessaire du nome et de la nose, une modification de l'objet qui, maintenant, s'impose absolument moi.

    Rflchissant la porte de ces analyses, il s'en dgage une conclusion de toute premire importance, que sans doute Husserl n'a pas clairement aperue. Cette conclusion est qu'une opposition pure et simple du sens et de la prsence est insoutenable. La prsence est une signification autrement apprhende que ne l'est la signification non prsente et simplement vise. Ce qu'on peut encore exprimer en disant que l'existence est elle-mme un sens, et non point ce qui se borne remplir un sens.

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    Or cette vrit est, encore une fois, au centre de la phnomnologie hglienne. Elle nous apprend qu'une simple mise en prsence lune de l'autre, de la conscience et de son objet, est totalement inacceptable. L'exprience n'est pas une vie de la conscience propos des choses. L'exprience est devenir de la conscience dans les choses et elle est aussi venue des choses elles-mmes dans la conscience et par la conscience. Parmi les trs graves consquences d'une telle vue, il faut en premier lieu retenir celle-ci : tout moment la relation qui s'tablit dans l'exprience entre le sujet et l'objet est autre que celle qui s'tablissait d'abord lorsque cette relation n'tait encore que simplement vise ou pense. Cette thse, qui est vidente pour les sentiments, car personne n'a jamais dout qu'aimer ce n'est pas simplement entrer dans un rapport dont on sait l'avance tout ce qu'il sera et qu'on aurait accepter ou refuser, mais que c'est transformer et tre transform, cette thse doit tre tendue toutes les modalits de la conscience. Et davantage, une phnomnologie de la conscience, convenablement accomplie, montre qu'une phnomnologie de la conscience comme impie intriorit vcue s' opposant une ralit regarde, est elle-mme un non-sens. Que donc la phnomnologie doit tre une anthropologie phnomnologique, c'est ce qu'ont compris mieux que Husserl ceux qui ont aprs lui repris le flambeau, ce que lui- mme peut-tre a fait plus qu'entrevoir dans ses dernires annes. Ce que Hegel, enfin, savait d'emble. Encore qu'ici nous retombions sur la divergence fondamentale que nous signalions en commenant. Pour Hegel, l'anthropologie phnomnologique est une phnomnologie de l'Esprit, c'est--dire que pour lui le devenir de la conscience dans l'homme et le devenir de l'homme dans le monde ne peuvent se concevoir que comme ralisation d'une totalit absolue.

    Or c'est l une affirmation qui, semble-t-il, n'est susceptible d'acqurir son plein dveloppement dialectique que pour autant que soit reni le fait fondamental de toute l'anthropologie phnomnologique, savoir que l'exprience est rencontre et coexistence. Nous l'avons assez dit : cette rencontre et cette coexistence transforment, entranent dans un devenir d'eux-mmes, et l'homme et les choses. Mais aucune exprience, l'ide est contradictoire en rigueur, ne me prsente une totalit o je serais moi-mme surmont, ou la rencontre cesserait d'exister. L'objection la plus radicale contre toute phnomnologie de l'esprit de type hglien

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    est qu'elle tend se rendre oublieuse de ses propres origines. Il y a dans toute exprience un irrcuprable absolu, qui fait chec toute philosophie de la totalit, du moins si cette philosophie prtend tre phnomnologique : et c'est que cette exprience a t et demeure constamment facticit. Or ceci fait obstacle tout passage exhaustif du (particulier l'universel.

    On ne peut pas se dissimuler que ces considrations placent le commentateur tant de Husserl que de Hegel dans une position difficile. Car, rsumes sommairement, elles reviennent reprocher Husserl de n'avoir pas t assez hglien (ou, du moins, de ne l'avoir pas su), et Hegel l'impossibilit du hglianisme. On ne peut videmment tenter ici de rpondre cette difficult majeure qui nous mnerait au del des cadres d'un sujet dj trop vaste. Qu'il me soit pourtant permis d'indiquer d'un mot la ligne de ce qui me semble tre une solution possible. Celle-ci consisterait voir que, si la notion de totalit ne peut pas tre phnomnolo- giquement constitue, cette totalit peut nous tre cependant accorde. Il faudrait alors chercher dans la direction de la philosophie 'heideggerienne de l'tre, et se demander si elle n'apporte pas un espoir de solution aux difficults de la phnomnologie, mais c'est l un tout autre dbat.

    Je voudrais, en terminant, examiner un dernier point de comparaison entre Husserl et Hegel, qui rserve lui aussi des constatations intressantes.

    Ce point concerne la situation du phnomnologue l'gard de sa description. Originellement, ce point n'a gure retenu l'attention de Husserl qui demeure, si l'on ose dire, naf , vis--vis de sa propre description, pensant, sans trop y rflchir du moins au dbut, que cette description se fait du point de vue d'un spectateur qui n'est pas partie , le fameux unbeteiligter Zuschauer , et que l'accession un tel point de vue ne pose pas de problme spcial, alors que tout au contraire elle nous semble accumuler les difficults. Chez Hegel, et justement parce que la Phnomnologie de l'Esprit tend consciemment vers la constitution dune totalit absolue, les problmes tenant la position du phnomnologue ne sont aucun moment perdus de vue, ce qui ne veut pas dire qu'ils soient simples. Ils apparaissent presque toujours dans les fameuses phrases qui commencent par fur uns aber , mais pour nous . Car, enfin, toute phnomnologie suppose forcment un phnomnologue qui en ait plus long que le je ou la con-

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    science qu'il dcrit. Mais alors que signifie ce sur-savoir , quelle est sa lgitimit ? Comment imaginer qu'il ne se rpercute pas sur ce qu'il dcrit et rend ainsi circulaire la notion mme de phnomnologie ? Car en ce cas toute description phnomnologique est oriente par un savoir ou une exprience qui ne sont pas ceux qu'il dcrit. Ce problme est particulirement grave chez le premier Husserl, qui prtend constituer Y alter ego, dcrire une subjectivit qui n'est ipas encore positivement inter-subjective, et circonscrire dans la perception! un noyau fondamental qui ne comporte encore aucune rfrence autrui. Or, ces descriptions ne peuvent s'accomplir sans langage, il est peine besoin d'noncer une telle banalit. Comment alors dcrire par le langage, qui est par nature un phnomne ressortissant la couche intersubjective de l'exprience, un domaine prtendument antrieur par sa signification toute intersubjectivit. L'objection n'aurait peut-tre pas l'urgence que nous lui reconnaissons, si elle s'adressait un philosophe classique.

    Celui-ci rpondrait aussitt que l'exprience dcrire est en elle-mme complte et acheve avant d'tre traduite dans le langage parl, qui ne pose qu'un problme de transmission soluble son rang. Mais une philosophie de l'intentionnalit et qui lutte contre l'illusion d'immanence ne peut pas croire que le langage traduise une exprience venue sans lui sa pleine ralit, son plein accomplissement ? De plus, cette difficult manifeste que la notion d'une phnomnologie absolument voraussetzungslos, qui ne supposerait absolument rien son dpart, ide chre entre toutes Husserl et dont peut-tre il ne s'est jamais entirement dgag, est simplement mythique.

    De tout cela, il faut bien le dire, Husserl n'a quasi rien souponn, au lieu que cette mme difficult est prsente l'esprit de Hegel, dans toute son ampleur, avant mme qu'il ait crit la premire phrase de son livre. Il sait lui que la description n'arrive- lait mme pas commencer s'il n'y avait quelqu'un qui connaissait dj les desseins pour elle encore secrets de cette conscience encore ingnue. Hegel sait que le fur uns aber est indispensable l'entreprise et que, ds lors, le statut de celui qui parle doit tre lucid. Le malheur pour nous est que la solution hglienne n'est pas acceptable, puisque sa possibilit est directement solidaire des thses hgliennes que nous avons rejetes. Car Hegel admet que la Phnomnologie est crite dtt point de vue d'un savoir absolu

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    dj constitu et qui rflchit sur l'histoire relle de son apparition. Or, Husserl ni aucun phniomnologue ne croient une totalit de l'esprit au sens hglien, ni, a fortiori, une totalit dj constitue et absolument consciente d'elle-mme (cette dernire condition allant, du reste, de soi, car une totalit absolue ne peut tre qu'absolument consciente d'elle-mme). Alors, comment dans une /perspective husserlienne, pourvoir le phnomnologue de ce statut ontologique dont nous venons de voir la radicale ncessit ? Ici encore, nous nous contenterons de quelques indications lmentaires puisque, encore une fois, notre but n'est pas en ce moment, admettant que nous en soyons capables, d'esquisser une solution aux difficults de la phnomnologie au sens moderne.

    U nous semble que touchant ces indications, la dernire volution de Husserl montre une direction) utile, mais qui n'a pas t entirement dveloppe. Tout d'abord, l'ide de faire reposer l'ensemble de l'exprience sur la perception doit comporter deux consquences. D'abord que cette perception demeurant de fait insparable du langage et de la relation autrui, il est impossible de prtendre reprer en elle une couche originelle qui ne serait pas encore, au moins virtuellement, exprience d'une intersubjectivit. En second lieu, le sens de la rduction phnomnologique doit tre encore une fois modifi. En fait une simple mise entre parenthses de l'existence, comme Husserl l'explique d'abord, n'est acceptable que si l'existence n'a pas de signification, si l'opposition entre le sens et l'existence est telle qu'il n'y a jamais change entre eux. Or, le dveloppement de la phnomnologie a montr que cette thse est intenable. Faut-il en conclure que la rduction est devenue sans objet ? Nullement. Mais elle doit avoir pour fin de ramener l'exprience telle que nous la vivons dans le courant de la vie, sa couche perceptive originelle, c'est--dire ce qui est vraimemt premier et non encore contamin par l'adjonction ou la superposition de donnes ou de savoirs subsquents qui sont, en fait, construits sur la couche perceptive mais ne la dterminent pas. Concrtement, la science se fonde sur la perception mais ne la fonde pas, la supposant ncessairement. La rduction de notre exprience ordinaire l'exprience perceptive originelle doit donc consister dpouiller cette exprience ordinaire de l'acquis scientifique qui la transforme.

    La rduction de l'exprience au monde naturel originel, notre avis plus complexe et plus riche que ce que Husserl nomme la

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    u lebendige Strmung der Gegenwart sous son aspect le plus restreint, transforme compltement le problme du statut du ph- nomnologue. Elle liquide la prtention de la Philosophie als strenge Wissenschajt , elle liquide, en fournissant du rel une dfinition diffrente de celle de l'objectivit au sens traditionnel, l'idal du phnomnologue comme unbeteiligter Zuschauer ; elle retire la phnomnologie toute possibilit de se prsenter jamais comme rflexion complte et exhaustive du sujet et du phnomnologue, ur lui-mme. Mais en tablissant la liaison et la continuit radicale en vertu de l'intentionna'Ut du pr- rflexif et du rflchi, et, dans le prrflexif, du reflt et du refltant, on tablit aussi la possibilit d'une restitution d'abord (inexhaustive il est vrai), d'une interprtation ensuite, de l'exprience.

    Mais ceci est une autre histoire et nous ne pouvons dvelopper ces points. Nous voudrions seulement conclure ces rflexions en esprant avoir montr que, tout en faisant pleinement droit l'originalit tant de Hegel que de Husserl, aux deux sens qu'ils dfinissent de la phnomnologie, le problme de leurs rapports pose une difficult profonde et essentielle. Si ces considrations encore fort gnrales et qui ne font qu'amorcer le travail, pouvaient mener son examen systmatique, je me sentirai pay de mes peines.

    A. De Waelhens.

    Louvain.

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