REFLEXIONS SUR LE DEVELOPPEMENT - AGON...

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AGON Achidi Valentin REFLEXIONS SUR LE DEVELOPPEMENT Essai d’analyses et de réponses aux questions relatives à l’industrialisation, à la problématique du développement durable et au renforcement des capacités et de résilience des PMA Préfaces de : Monsieur Marcel de Souza, Ministre du développement (Bénin) Professeur Honorat Aguessy, Président COMOPA (Bénin) Chroniqueur Jérôme Carlos, Historien Journaliste (Bénin) Monsieur Gouba Alain, Socio-agronome (Burkina Faso) Monsieur Hamar Fall Diagne, Ecrivain et Homme de Culture (Mauritanie) Edition Afrique-Emergence 2012 Cotonou Bénin

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  • AGON Achidi Valentin

    REFLEXIONS SUR LE

    DEVELOPPEMENT

    Essai danalyses et de rponses aux questions relatives lindustrialisation, la problmatique du

    dveloppement durable et au renforcement des capacits et de rsilience des PMA

    Prfaces de :

    Monsieur Marcel de Souza, Ministre du dveloppement (Bnin)Professeur Honorat Aguessy, Prsident COMOPA (Bnin)Chroniqueur Jrme Carlos, Historien Journaliste (Bnin)

    Monsieur Gouba Alain, Socio-agronome (Burkina Faso)Monsieur Hamar Fall Diagne, Ecrivain et Homme de Culture (Mauritanie)

    Edition Afrique-Emergence

    2012

    Cotonou Bnin

  • API-PALU

    ANpIPALUDIQU E100% naturel

    Il fait objet de brevet dinvention dont les auteurs sont Clestin KINNOUDO et Valentin AGON

    Pour toute commande de API-PALU crivez ladresse mail : [email protected]

    API- PALU est objet de plusieurs prix et distinctions.Il se vend dans toutes les pharmacies au Bnin et

    bientt partout en Afrique.API- PALU EST PLUS QUUN MEDICAMENT, IL EST UN

    FACTEUR DE DEVELOPPEMENT

    (Pour plus de dtail visitez : www.apipalu.com )

    Adresse postale: 10 PB 546 COTONOU- HOUEYIHO Bnin

    Contacts de Valentin AGONEmail : [email protected] yahoo.fr

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    _____________________________ DU MME AUTEUR

    POURQUOI LAFRIQUE RESTE EN RETARD

    POUR SON DEVELOPPEMENT ?

    Quarante ra isons pour exp l iquer le re tard des pays afr ica ins .

    Edition Afrique-Emergence, juin 2008.

    Tlchargeable sur www.agonvalentin.com

    LA RUPTUREMa lettre au BENIN et lAFRIQUE pour oprer la rupture pour notre

    dveloppement: le cri du c ur du cinquantenaire.

    Edition Afrique-Emergence, dcembre 2010.

    Tlchargeable sur www.agonvalentin.com

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    AGON Achidi Valentin

    REFLEXIONS SUR LE

    DEVELOPPEMENT

    Essai danalyses et de rponses aux questions relatives lindustrialisation, la problmatique du

    dveloppement durable et au renforcement des capacits et de rsilience des PMA

    Prfaces de :

    Monsieur Marcel de Souza, Ministre du dveloppement (Bnin)Professeur Honorat Aguessy, Prsident COMOPA (Bnin)Chroniqueur Jrme Carlos, Historien Journaliste (Bnin)

    Monsieur Gouba Alain, Socio-agronome (Burkina Faso)Monsieur Hamar Fall Diagne, Ecrivain et Homme de Culture (Mauritanie)

    Edition : Afrique-Emergence

    10 BP 546 COTONOU-HOUEYIHO BENIN

    Site web: www.afrique-emergence.com

    Dpt lgal N 6498 Quatrime trimestre 2012 Bibliothque nationale

    ISBN 978-99919-1-202-8

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    Ddicace

    Je ddie ce livre tous mes compagnons de route et de vie, tous mes tlspectateurs,

    tous mes fidles invits aux confrences que jorganise et principalement mes

    collaborateurs pour le rveil de lAfrique, tous les membres de la Cooprative de Rflexion,

    dInvention et dAction pour le Dveloppement Industriel de lAfrique (CRIADI-Afrique), aux

    membres de la Fondation le Bnin industrialis et tous les tudiants qui ont pris

    linitiative de fonder lassociation Gnration Agon Valentin , en abrg, la GAV.

    Je pense notre hro Nelson Mandela qui a consacr sa vie et sest battu pour la dignit de

    lHomme noir, cet icne de lAfrique demeurera pour toujours notre commune rfrence en

    Afrique, il est un martyr vivant pour la cause de lAfrique, jinvite lAfrique garder ses propos

    inoubliables Nulle part au monde il ny a de voie facile vers lindpendance et beaucoup

    dentre nous auront marcher travers la valle de lombre de la mort encore et encore

    avant que nous natteignions le sommet de la montagne de nos dsirs .

    Jai une forte pense pour la famille de Kwame Nkrumah, homme politique visionnaire,

    prophte de lintgration africaine, disparu il y 40 ans. Jai aussi une forte pense pour la

    famille du Prsident Thomas Sankara, illustre figure du combat pour lmergence africaine,

    hros trop tt et outrageusement disparu depuis dj 25 ans. Mon combat pour le

    dveloppement de lHomme noir est le prolongement de leur vision, de leur action et de leur

    espoir pour une Afrique debout et en marche, dans la libert et la dignit. Cest avec leurs

    lumires que je souhaite avancer.

    Ma bataille contre le sous-dveloppement de notre Pays et de notre continent tout entier se

    justifie par le fait que, paradoxalement, nous autres Africains, bien que les plus riches du

    monde, nous avons malheureusement et depuis fort longtemps, accept dtre considrs

    par plus malins que nous, comme les pauvres, les misrables et les dmunis, les damns

    de la terre , rduits au statut de ncessiteux aux yeux du monde, condamns laide, la

    dpendance et lassistance. Cependant, jamais une aide en vue de lindustrialisation de

    lconomie dun pays africain na t accorde par un quelconque bailleur depuis les

    indpendances. Laide octroye est toujours conditionne par louverture des marchs pour

    une conomie oriente vers lextrieur, fonde sur limportation des produits des pays des

    donateurs et lexportation des matires premires pour les industries des pays des mmes

    bailleurs. De ce fait, largent prtendument donn dans le cadre de laide retourne aux

    donateurs par lachat sur le march local des produits imports de chez eux. Nous autres

    Africains ne pouvons pas continuer de simuler de navoir pas compris ce systme

    savamment organis pour nous tourner en rond, et poursuivre lentreprise coloniale

    dhumiliation. Thomas Sankara nous avait pourtant prvenus, alerts, lui qui pensait que

    laide nous bloque et nous installe dans la dpendance, lui qui avait trouv comme solution

    limpratif stratgique de produire ce que nous consommons et consommer ce que

    nous produisons! . Avant lheure, Sankara le visionnaire ntait-il pas en lui-mme, la

    solution au phnomne de mondialisation qui embarque nos Etats et nos socits dans une

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    turbulence sans nom, dans une tragdie sans fin ? Malheureusement ces vives Lumires

    noires, ces grands Esprits dAfrique nont jamais dur assez longtemps parmi nous pour

    clairer le continent sur son destin ! A quand le vritable rveil collectif des Africains?

    Chers compagnons de combat pour le dveloppement, je rsumerai ma vision en ces

    termes: mettre le feu au cerveau des Africains pour quils se rveillent enfin dune

    somnolence qui na que trop dur. Je veux mengager et mimpliquer dans une durable

    entreprise de communication sur lessentiel et, avec votre appui, agir trois niveaux dans

    la conscience des Africains : susciter et dvelopper leur capacit tre curieux , leur

    capacit devenir crateurs et leur capacit entreprendre mme limpossible pour

    prendre leur destin en main. Mes convictions les plus profondes qui, je lespre, seront

    entendues et comprises par le plus grand nombre comme des leviers pour une action

    commune et concerte sont les suivantes:

    Un pays qui n'duque pas l'industrialisation, n'innove pas !

    Un pays dont les citoyens ninventent pas, ne se dveloppe pas !

    Un pays qui n'innove pas, ne produit pas !

    Un pays qui ne produit pas, ne progresse pas !

    Un pays qui ne consomme que les produits des autres les dveloppe et se prcarise !

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    Remerciement

    Jadresse mes remerciements particuliers ma Directrice de thse, Madame Christiane Gagnon sans laquelle je

    naurais pas pu entreprendre ce travail danalyse du dveloppement. Je noublie pas toutes nos riches rencontres

    Qubec, comme Rimouski et Chicoutimi. Nos changes sur skype mauront t dun grand apport. Merci tout

    simplement!

    Je remercie les autres membres de mon jury, en loccurrence Jean-Philippe Waaub de UQAM (Universit de Qubec A

    Montral) et Steve Plante de UQAR (Universit de Qubec Rimouski) qui mont beaucoup apport par leurs

    observations et remarques.

    Je remercie tous mes professeurs de UQAR et de UQAC pour leurs apports, en particulier les Professeures Marie-Jos

    Fortin, Suzanne Tremblay et les Professeurs Yann Fournis, Camil Girard, Jean-Franois Moreau et Marc-Urbain

    Proulx, nomm actuellement au poste de sous-ministre associ aux Rgions au ministre qubcois des Affaires

    municipales, des Rgions et de l'Occupation du territoire (MAMROT). Flicitations Monsieur le Ministre!

    Je remercie particulirement mon pouse Colette qui assume lentire responsabilit de la famille lors de mes

    absences. Merci mes enfants de me comprendre chaque fois que je dois reprendre lavion et partir l o le devoir

    mappelle.

    Je remercie naturellement mon adjoint la direction de notre industrie pharmaceutique API-BENIN International,

    Monsieur Clestin Kinnoudo, lincomparable compagnon du dveloppement qui se bat jour et nuit pour que

    lentreprise ne souffre aucunement de mon absence.

    Un merci particulier au Professeur Albert Tvodjr, Mdiateur de la Rpublique du Bnin, Citoyen du monde, avec

    qui, depuis 2008, jai lhonneur de partager une solide amiti, et qui comme un vrai pre, me prodigue des conseils

    aviss mencourageant dans mon combat pour le dveloppement. Encore MERCI pour tout le soutien en faveur de

    lmergence de linvention API-PALU. Papa Tvodjr, je vous dois beaucoup! Puissiez-vous nous accompagner

    encore longtemps et plus loin!

    Je remercie le Professeur Honorat Aguessy, Prsident du COMOPA, pour son soutien paternel permanent. Il est le

    baobab panafricaniste au pied duquel nous nous runissons dans lesprance dune vie meilleure pour les Africains.

    Merci Papa pour votre loquente et convaincante prface ce document. Merci pour tout le soutien que jai de votre

    part pour ce doctorat en dveloppement rgional que je fais. Recevez lexpression de ma filiale et profonde gratitude

    pour lhonneur que vous mavez souvent fait de maccueillir au salon dhonneur de laroport de Cotonou lors de mes

    retours de voyage, fier avec et pour moi des mdailles dor et autres distinctions internationales. Papa, je vous dois

    beaucoup et ma reconnaissance envers vous moblige minvestir encore plus et mieux pour notre cause commune:

    lAfrique!

    Je remercie en particulier le Ministre du dveloppement du Bnin Monsieur Marcel de Souza pour linsigne honneur

    quil ma fait en crivant une prface ce document. Merci Monsieur le Ministre ! Votre gouvernement, celui du

    Docteur Yayi T. Boni, ma beaucoup apport: soutien moral permanent, dcoration dans lordre national, lvation au

    grade de commandeur de lordre national du Bnin, intgration de ma modeste personne au Conseil National de la

    Proprit Intellectuelle (CNPI) en tant que membre reprsentant les chercheurs inventeurs, Autorisation de Mise sur le

    March (AMM) accorde au mdicament antipaludique API-PALU (invention brevete), etc. Merci au Ministre de la

    sant Professeur Kinde Gazard pour son engagement nos cts. Merci Son Excellence Monsieur le Prsident Yayi

    Boni qui ma fait lhonneur pour avoir parl de API-PALU lUNESCO.

    Je remercie trs particulirement Monsieur Jrme Carlos, fidle patriote, producteur permanent dides sur le

    dveloppement dans tous ses aspects. Merci pour la vivante collaboration entre nous ! Merci pour votre prface!

    Je remercie mon frre Hamar Diagne pour son combat pour lAfrique et la prface quil a bien voulu crire pour ce

    document.

    Je remercie tous mes collaborateurs et amis Antoine Kanlinta, Moussa Oudraogo, Alain Gouba (auteur dune des

    prfaces de cet ouvrage) et mes collaboratrices et amies, Florentine Houdnou et en particulier Alix Tonoukouen,

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    pour leur accompagnement et la relecture de ce travail. Je noublie pas tout le travail abattu au Bnin comme au

    Burkina.

    Je remercie tous mes compagnons du dveloppement et principalement les membres de la Cooprative de Rflexion,

    dInvention et dAction pour le Dveloppement Industriel de lAfrique (CRIADI-Afrique), les membres de la Fondation

    le Bnin industrialis et les tudiants membres fondateurs de lassociation la Gnration Agon Valentin .

    Je dis Grand merci au Professeur Jacques Nanma de luniversit de Ouagadougou qui ma toujours soutenu et qui a,

    malgr ses nombreuses proccupations, a pu relire et corriger les premires pages de ce document.

    Par-dessus tout, je remercie Dieu pour sa grce particulire et la sant quIl maccorde pour mener mes recherches

    doctorales et poursuivre mes actions dans le domaine du dveloppement.

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    AVANT-PROPOS

    Ce document a t ralis dans le cadre de mon examen doctoral lUniversit de Qubec Rimouski au Canada.

    Ce travail a t soumis au jury de lexamen doctoral compos de Jean-Philippe WAAUB de UQAM (Universit de

    Qubec A Montral), de Steve Plante de UQAR (Universit de Qubec Rimouski) et de Christiane Gagnon de

    UQAC (Universit de Qubec Chicoutimi).

    Lexamen doctoral constitue la sixime des sept tapes sur le chemin du doctorat en dveloppement rgional, un

    programme conjoint excut par UQAC et UQAR. Ltudiant est soumis trois preuves dont les sujets sont en

    rapport avec les questions relatives lconomie, la socit et lenvironnement. Dans notre cas lindustrialisation

    est laspect de lconomie, le renforcement des capacits et de rsilience des PMA est relatif la socit et la

    problmatique du dveloppement durable en rapport avec lenvironnement.

    Admis cet examen doctoral, je suis autoris poursuivre ma thse qui sera soutenue dans quelques mois lUQAR

    au Canada. Dans ce cadre, je travaille sur la question dindustrialisation des pays du Sud et en particulier mon pays le

    Bnin. Avec le soutien de ma Directrice de thse Christiane Gagnon, je poursuis inlassablement ce travail que je

    traduis dans la pratique pour le dveloppement de lAfrique en gnral et du Bnin en particulier.

    Cette tude me donne de lexpertise pour mieux apprhender le dveloppement et surtout y prendre activement part de

    deux manires. Minvestir dans la production intellectuelle pour apporter ma petite pierre ldifice que constitue la

    construction de lAfrique, et transmettre mon savoir-faire dans le cadre de la formation ducation au dveloppement

    et l'industrialisation de l'Afrique .

    En effet nous avons choisi de participer au dveloppement et l'industrialisation de l'Afrique par la cration de la

    richesse et la formation des Africains la cration de richesses. Nous donnons publiquement des confrences via la

    tlvision. Et cest pour mieux atteindre notre but que nous crons l'UDI-Afrique, l'Universit pour le Dveloppement et

    l'Industrialisation de l'Afrique, en vue daccompagner consquemment ceux qui sy engagent dans linnovation, la

    cration et lentrepreneuriat. En effet, selon notre perception des choses, un pays qui nduque pas lindustrialisation,

    ninnove pas ; un pays qui ninnove pas ne produit pas ; un pays qui ne produit pas ne progresse pas et un pays qui ne

    consomme que la production des autres les dveloppe et se prcarise. Cest dans ce mme registre que J-M Ayrault

    Premier ministre Franais disait en automne pass devant lassemble nationale franaise que Un pays qui na pas

    dindustrie est un pays qui na pas davenir . Le contexte africain nous oblige une uvre de rveil.

    En effet la dcolonisation, lcole laisse par le colonisateur, na pas vraiment choisi la voie de lindustrialisation de

    lAfrique. La preuve, lAfrique nest pas industrialise malgr les grandes rserves de ressources dont elle dispose. Le

    dfaut majeur est que les systmes ducatifs ne rendent pas les Africains curieux, crateurs, entreprenants. Lcole

    daujourdhui comme celle du colon continue de former pour servir ladministration et non le dveloppement.

    La rupture que nous voulons oprer dans lducation se situe deux niveaux: rendre les apprenants curieux, crateurs

    et entreprenants, dune part; et dautre part, ouvrir lcole tout le monde. Ainsi, donnons-nous publiquement des

    confrences ducatives via la tlvision. En outre, nous crons UDI-AFRIQUE pour rendre les Africains capables

    dtre capables . Notre vision est de mettre le feu au cerveau des Africains cest--dire enflammer ou allumer

    leur cerveau pour veiller et construire leur capacit tre capables de rflchir et dagir efficacement pour prendre

    leur destin en main. Et notre stratgie consiste apprendre entreprendre, entreprendre apprendre . A

    lUDI-Afrique, nous voulons former les Africains sexercer linvention, la cration et lentrepreneuriat linstar

    de linnovation API-PALU qui a donn lieu lindustrie API-BENIN. En retour chacun ira former dautres, et ainsi de

    suite. Cest comme dans une course de relais. A terme, lAfrique sera remplie dindustriels pour raliser son

    dveloppement. Telle est lambition qui nous occupe et qui nous motive pour cette recherche doctorale. Notre ambition

    sinstruit naturellement de ce que dautres ont dj fait et surtout de la manire dont ils ont procd, tout en

    rflchissant aussi sur les cueils de lindustrialisation.

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    Prface de M. Marcel de Souza Ministre du dveloppement du Bnin

    Les chefs d'tat africains, par le biais du Nouveau Partenariat pour le Dveloppement de l'Afrique(NEPAD), ont adopt une vision commune de l'avenir et la conviction partage qu'ils ont l'obligationd'liminer la pauvret et de mettre les pays africains, tant individuellement que collectivement, sur lavoie d'une forte croissance et d'un dveloppement durable, tout en les faisant participer activement l'conomie mondiale et la prise des dcisions au niveau politique.

    L'ducation, la sant, les moyens de subsistance, la nutrition, l'hygine et le logement sont autantd'lments importants pour lutter contre la pauvret. Toutefois, il existe un autre lment dont on s'estpeu proccup ces dernires annes, le rle de l'industrialisation dans l'limination de la pauvret.

    L'industrie cre assez de valeurs ajoutes sur les produits agricoles, favorise le dveloppement de latechnologie et ouvre de bonnes perspectives conomiques. De plus, elle offre beaucoup d'opportunitsd'emplois aux populations, accrot leurs revenus ainsi que les recettes de l'Etat. Ainsi donc, l'industrieconstitue un instrument pour rduire de faon significative la pauvret.

    Considre comme l'un des moteurs du dveloppement conomique, l'industrialisation en Afrique estencore la trane. Selon un rapport publi le 11 juillet 2011 par la Confrence des Nations Unies pour leCommerce et le Dveloppement (CNUCED), le continent africain ne reprsente plus d'un pour centenviron de la production manufacturire mondiale. Sa contribution actuelle rduire la pauvret estfaible et les gouvernements ont l'imprieux devoir de prendre des mesures efficaces pour dvelopper cesecteur conomique.

    En effet, la politique industrielle implique un ensemble d'interventions stratgiques pour dynamisercertains secteurs ou activits, des interventions fonctionnelles pour amliorer le fonctionnement desmarchs, et des interventions horizontales pour promouvoir certaines activits intersectorielles. Leprsent document qui fait l'analyse et qui rpond aux questions relatives l'industrialisation, laproblmatique du dveloppement durable et au renforcement des capacits et de rsilience des PMApourrait clairer et nourrir les consciences qui s'veillent en vue de l'apprhension du rle crucial quel'industrialisation devra jouer, tant au plan quantitatif que qualitatif, dans le processus de transformationdes socits africaines et des Pays les Moins Avancs, la cration d'emplois et de richesses etl'limination de la pauvret.

    La conciliation des objectifs d'industrialisation de l'conomie des Pays les Moins Avancs (PMA) et la

    durabilit environnementale de leurs ressources dveloppe par l'auteur ainsi que la clarification du

    concept de renforcement des capacits sont autant d'lments prendre en compte pour l'auto-

    dveloppement des pays africains en particulier et des PMA en gnral.

    M. Marcel de SouzaEconomiste

    Actuel Ministre du dveloppement du Bnin

    Ancien Directeur de la BCEAO pour le Bnin

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    Prface du Professeur Honorat Aguessy

    Les stratgies de dveloppement que les gouvernements africains appliquent depuis lindpendance sont,

    elles-mmes, dorigine trangre, puisquelles ont t conues durant les priodes coloniales et nocoloniales

    pour rationaliser la structure de production coloniale en Afrique . Addji Adbayo Colloque de Monrovia

    septembre 1970.

    ...Le dveloppement peut sassimiler la phase la plus rcente - prenant souvent le relai dun processus

    visant restaurer dans lensemble du monde une manire dtre et dagir centre sur les valeurs

    universalistes et individualistes propres lOccident moderne . Berthoud in "Le Dveloppement entre

    limpasse et le mirage".

    LAfrique est riche ; mais beaucoup dAfricains sont pauvres et un nombre de plus en plus grand sombre

    dans la misre Joseph Ki-Zerbo.

    Pour accompagner ce beau travail de lminent chercheur et spcialiste du dveloppement, jetons un rapide

    coup d il sur les interpellations auxquelles ont donn lieu les conceptions la Pnelope du dveloppement.

    Pourquoi le pessimisme exprim par beaucoup dcrits sur le dveloppement?

    Pourquoi le pessimisme exprim par beaucoup dcrits sur le dveloppement?

    Pourquoi le constat de risque de confusion entre le dveloppement et la croissance dans la pratique de

    nombreux pays?

    Pourquoi en vient-on assimiler le dveloppement une idologie de domination ou de volont de

    puissance?

    Toutes les implications de ces questions ne sauraient tre exactement apprhendes dans cette Prface.

    Contentons-nous dinsister sur:

    - le cadre du pessimisme exprim par beaucoup dauteurs propos du dveloppement ne serait-ce quen

    Afrique;

    - les tentatives et efforts de nombreuses Agences de lOrganisation des Nations Unies pour lucider

    lacception du concept de dveloppement;

    - la comdie du Dveloppement;

    - linterrogation sur la notion de modle de dveloppement.

    Commenons par le pessimisme propos du dveloppement. Cest pour rappeler certaines publications de

    chercheurs mticuleux.

    En effet, rappelons-nous des titres significatifs et percutants tels que :

    - lAfrique Noire est mal partie, du Professeur Ren Dumont;

    - lAfrique dsenchante, de G. Gosselin ;

    - lAfrique en panne, de J. Giri ;

    - lAfrique extravertie et subissant des ponctions cruelles, de linfatigable Chercheur Samir Amin, etc.

    Quelle considration nodale relative au dveloppement, est mise en exergue dans lvocation dun tel

    pessimisme?

    Cest certainement la non prise en compte des valeurs de rfrence et des reprsentations culturelles

    africaines. Cest la situation de domination subie par les Africains qui y est souligne; de sorte que, dans

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    linterdpendance des socits, les socits africaines subissent plus quelles ne contribuent positivement dans

    les changes quimplique linterdpendance. Cest alors la pense de Singleton qui claire cette situation:

    notre projet, cest le dveloppement... Il est impossible quil puisse y avoir un dveloppement qui ne soit pas

    situ culturellement enracin dans une histoire - le dveloppement est synonyme dOccident - cest le projet

    occidental. Ne nous leurrons pas : qui parle de "dveloppement" parle doccidentalisation .1

    Sagissant des efforts dlucidation de lacception du concept de dveloppement par les diffrentes Agences

    du Systme des Nations Unies (UNESCO, OMS, PNUD, FNUAP, OMC, UNICEF...) il convient dy ajouter

    les tentatives dlucidation entreprises par les Institutions de Bretton Woods (Banque Mondiale, Fonds

    Montaire International).

    LONU assure la paternit de linsistance sur trois aspects du dveloppement, savoir:

    i. lapproche, lanalyse et la planification du dveloppement unifi, global, quilibr et intgr

    ii. le dveloppement autonome et autoconfiant

    iii. le dveloppement plantaire.

    LOIT sest rendue clbre en mettant en relief, dune part le dveloppement bas sur la "stratgie des

    besoins essentiels", et dautre part le dveloppement partir de la base.

    Nous pouvons galement rappeler les contributions du PNUD, du FNUAP, etc. Mais, dans cette Prface,

    cest la contribution considrable de lUNESCO quil est impratif de souligner. Pour ce faire, trois textes

    fondamentaux retiendront notre attention:

    - le plan moyen terme de 1976 1980

    - le monde en devenir: rflexion sur le nouvel ordre conomique international

    - comprendre pour agir, 1974

    Le premier texte insiste sur ce rappel incontournable :

    Le dveloppement nest pas conu comme devant tre une simple course de rattrapage sur le plan

    conomique des nations plus favorises, conception qui a prvalu jusqu un pass rcent, mais

    bien comme mise en uvre des potentialits propres des socits en dveloppement, en plus dune

    exigence de rpartition plus juste des richesses au niveau national et international. Cest pour cette

    double action, en effet, que le dveloppement intgr dbouche sur le droit et lexpression des

    valeurs des civilisations issues de lhistoire et des situations sociales spcifiques des socits

    mergentes. Sans que soient renis les apports fcondants issus dautres aires culturelles et en

    particulier la science et la technique, de mieux que les modes dorganisation rationnelles, identit

    culturelle et certaines formes dauthenticit sont dsormais revendiques comme des facteurs de

    dveloppement.

    Le deuxime texte de lUNESCO prcise :

    Ds quil est conu comme global, le dveloppement ne peut plus tre lextension directe au monde

    entier des connaissances, mode de pense, mode de vie ou exprience propre une seule rgion du

    globe. Il faut mettre chaque dveloppement local en relation avec ses valeurs et sa culture propre. Il

    ne suffit pas de transfrer dans les pays en voie de dveloppement, le stock de connaissances

    disponibles dans les pays dvelopps ; un tel processus exclut toute authentique implantation de la

    science et de la technologie dans les pays daccueil...Il conviendrait que les savants conduisent leurs

    recherches en puisant leurs motivations et leurs inspirations dans leurs propres environnements.

    1 In La Cooprative est un miroir, le ntre (Culture et Dveloppement. 1992)

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    Le troisime texte souligne les caractres intgrs, globaux, quitables et endognes du dveloppement:

    Le dveloppement doit se vouloir la fois intgr cest--dire ne pas se rduire la seule croissance

    conomique, tant entendu quconomie, culture, ducation, science, technologie et communication des

    aspects particuliers, mais complmentaires dun dveloppement vritable, global, revtant donc un

    caractre plantaire par lequel le projet des moins favoriss est li lvolution des groupes les plus

    prospres quitables, car il ne peut y avoir dveloppement si la croissance accentue les ingalits entre

    nations et entre groupes de populations lintrieur des nations, endogne, cest--dire impliquant que

    les diverses socits doivent rester elles-mmes en puisant leurs forces dans les formes de pense et

    daction qui leur sont propres et en se donnant des fins accordes des valeurs comme aux besoins

    quelles ressentent et aux ressources dont elles disposent.

    Qui ne voit que les caractristiques du dveloppement mises en vidence pour ces trois textes de lUNESCO

    corrigent de nombreuses drives lies la mallabilit du concept du dveloppement?

    Lendognit mise en exergue ne couvre-t-elle pas les rquisits essentiels du dveloppement?

    Aprs ces efforts dlucidation de lacception du concept, notamment les caractristiques rvles par

    lUNESCO, comment comprendre lpisode qui suit, sinon comme comdie du dveloppement en tant que

    dveloppement dcrt?

    Lanecdote en question se prsente comme suit Un PDG dune firme de chaussure occidentale se rendit en

    Afrique pour explorer les potentialits du march. Grande fut sa joie de dcouvrir un village o nul individu

    ne portait et ne possdait une paire de chaussures. Une occasion rve de dvelopper une activit profitable.

    Toutes les tudes conomiques confirmaient les impressions du PDG. La firme fut installe dans le village et

    lon mit sur le march les premires marques de chaussures (en jugeant des diffrents gots possibles).

    Mais les jours, semaines et mois se suivirent sans enregistrement dune seule vente de chaussure. Pour les

    experts de la firme, une telle situation est due la chert du prix de vente.

    Il fut procd la rduction du prix de vente, mais rien ny fit.

    Ds lors, la trouvaille est: "appter dabord, faire ainsi natre le besoin et, par la suite, le profit serait

    inestimable". Il fut dcid doffrir aux populations les premires fabrications, mais nul ne se prsentait un

    quelconque point de vente pour bnficie dune telle assistance. Pour le PDG, qui dt fermer sa firme, "ces

    gens ne veulent pas tre dvelopps.

    Heureusement que le PDG en question a utilis, en terminant une expression significative "ces gens ne

    veulent pas tre dvelopps". Effectivement on nest pas dvelopp par autrui mais on se dveloppe.

    Joseph Ki-Zerbo sy retrouve : on ne dveloppe pas on se dveloppe .

    Examinons, enfin notre dernier point: y-a-t-il un modle de dveloppement copier ou singer?

    Une bonne relecture des trois textes de lUNESCO rappels plus haut nous amne rpondre non .

    A cet appui de lUNESCO sajoutent les appuis quapportent les travaux dminents chercheurs spcialistes

    du dveloppement: Pierre Mass2, Henri Lefebvre3, Franois Perroux4, le Pre LEBRET5 pour ne citer que

    ces quatre spcialistes.

    2 In Crise du Dveloppement3 In Manifeste diffrentialiste4 Institut5 LInstitut International de Recherche et de Formation en vue du dveloppement

  • 1 8

    Ces travaux nous orientent sur lindication de linexistence de modle.

    Les mots utiliss par Henri Lefebvre traduisent bien la position nuance des quatre spcialistes : la voie

    soppose au modle. Fortement. Il ny a pas un modle (ou le modle, sovitique ou autre), plus des voies

    particulires (celle de la France, de lItalie, etc.) vers ce modle pour le raliser. Il ny a pas davantage un

    modle tchque, yougoslave ou franais ou italien. Spcifique, diffrente, la voie se discerne, se construit

    dans une perptuelle et quotidienne invention. Elle se met en forme, en concept, en thorie par une incessante

    recherche. Mettre fin lincertitude dans laquelle on se tient devant les modles abattus sans oser prendre la

    voie. Le modle, dress, sur le chemin, le bouche. Il prtend contraindre par le terrorisme, par la force. Il

    engendre la servitude et la routine, puis le pourrissement mortel (mme si ce service funbre est bien

    organis, vite et mieux)... Le modle se veut identique pour tous. Il impose lidentit ou la simulation. Il

    manipule les gens et permet de les intimider. La voie nimpose pas, elle propose. Les voies diffrent; la voie,

    cest celle de la diffrence 6.

    Le dveloppement considr comme une voie dvolution de la socit et non un modle est, juste titre

    considr comme lautre nom, le nouveau nom de la paix par le Pape Paul VI.

    Professeur Honorat AGUESSY

    Ancien Directeur National de la Recherche Scientifique et Technique (Bnin)

    Ancien Chercheur au CNRS (Paris)

    Ancien Administrateur Principal du Programme UNESCO dEnseignement

    Suprieur pour lAfrique

    Prsident Directeur de lInstitut de Dveloppement et dEchanges Endognes

    Prsident du Conseil Mondial du Panafricanisme.

    6 Manifeste du Diffrentialisme

  • 1 9

    Prface de lhistorien journaliste chroniqueur Jrme Carlos

    Dveloppement. Voil le refrain qui rythme les jours et les nuits de tous les pays sous-dvelopps de la terre. Le

    dveloppement est ainsi devenu la terre promise vers laquelle marchent tous les "damns de la terre". Il est envisag,

    dans

    les ttes et dans les esprits, comme une ligne d'arrive victorieusement franchie au terme d'une course longue et

    harassante. On comprend que ce soit le mot le plus usit sous nos latitudes dshrites. Mais force d'tre mis

    toutes les sauces, tel un arme magique destin relever indistinctement tous les mets, le dveloppement s'use, au

    sens propre et au sens figur. Le mot n'a plus de sens prcis. Il se prte tous les usages. Il sert couvrir tous les

    simulacres.

    Nous n'avons pas la prtention de faire dire au dveloppement ce qu'il veut dire. Nous n'en avons point les moyens.

    Mais nous pouvons essayer de dire ce que le dveloppement n'est pas, ce que le dveloppement ne saurait tre ni

    ici ni ailleurs. Et c'est peut tre en explorant ce versant-l du mot que l'autre versant pourrait se rvler et nous faire

    ainsi dcouvrir ce que le dveloppement est, ce qu'il doit tendre devenir. Nous avons retenu trois paramtres pour

    soutenir notre dmonstration.

    Premier paramtre. Le dveloppement n'est pas la juxtaposition de groupes sociaux que tout pousserait se har et

    se combattre. D'un ct, une poigne de nantis n'ayant que des droits. De l'autre, une masse de dshrits n'ayant

    que des devoirs. Des nantis qui bnficient d'un statut social avantageux et qui jouissent de relations privilgies. Des

    dshrits pauvres comme Job, taillables et corvables merci. Ils n'ont plus qu' se soumettre ou qu' se dmettre,

    plus prcisment qu' se suicider.

    L'Afrique du Sud de l'apartheid a incarn un tel modle de socit jusqu' la caricature. Une minorit gourmande et

    l'apptit vorace, blanche de surcrot, s'tait accapare toutes les richesses du pays. Aprs qu'elle eut relgu la

    majorit autochtone noire dans les cachots ciel ouvert des bantoustans. Les immenses ressources du sol et du

    sous-sol de l'Afrique du Sud n'ont ni promu cette minorit blanche ni assur celle-ci un pouvoir politique fort et

    stable. L'injustice l' uvre a touff dans l' uf tout espoir de dveloppement. Comme si le pays s'tait condamn

    l'avance. Comme si le pays portait en lui les germes de son propre anantissement.

    Deuxime paramtre. Le dveloppement n'est pas la ftichisation de l'argent rig en mesure de toute chose,

    opposable, comme tel, tout, mme une vie humaine. Voil o nous ont conduit les excs et les outrances d'un

    capitalisme sauvage qui ne se reconnat aucune limite. Dans des socits capitalistes, alors regardes comme

    dveloppes et nanties, l'argent tait le rgulateur, le mtronome de la socit. Tout se vendait. Tout s'achetait. Tout

    avait un prix.

    Mais comme l'indique la sagesse des nations: "Tant va la cruche l'eau qu' la fin elle se casse". La rcession

    frappe de plein fouet la plupart des pays dvelopps. Des faillites retentissantes et en cascades ont fini de plonger la

    socit dans le trou noir, sans qu'on sache d'o viendra le salut. L'Etat est en cessation de paiement, multipliant des

    plans d'austrit qui ne font qu'aggraver le mal. Ce dsordre mortel n'est pas arriv par hasard. Il signe la faillite d'un

    modle de dveloppement. Les populations, la base, paient de leur sueur, de leur sang, si ce n'est de leur vie la

    gourmandise des bouffe-tout. Ceux-ci ont fait de l'argent leur dieu. Ils lui vouent un culte, chaque jour, en son

    sanctuaire la Bourse de New York, de Londres ou de Paris. Ce sont des milliards de dollars virtuels qui transitent de

    compte en compte, favorisant toutes les triches, encourageant toutes les arnaques.

    Troisime paramtre. Le dveloppement n'obit point qu'aux seules lois du march. Parce que le dveloppement est

    d'abord et avant tout une initiative humaine dont les fins ultimes doivent servir l'homme. Or, comme on le sait, l'homme

    ne vit pas que de pain. Mme si, dans ses prtentions technicistes et hgmonistes, l'Occident capitaliste a pouss

    l'outrecuidance jusqu' proclamer, comme l'a fait Nietzsche, la mort de Dieu. Un modle de dveloppement sans la

    crainte de Dieu, donc sans rfrence aux lois de la nature, donne la priorit la courbe des intrts, au gain et au profit.

    En somme, chacun s'assied et le capital le pousse. Rappelons Joseph Ki-Zerbo, pour nous rappeler son mot

  • 2 0

    clbre: "On ne dveloppe pas, on se dveloppe". Pour dire que dans tout dveloppement, l'homme est premier. Mieux, il est

    l'alpha et l'omga de tout dveloppement.

    Jrme Carlos

    JOURNALISTE ECRIVAIN

    Bnin

  • 2 1

    Prface de Alain Gouba

    LAfrique peut-elle sindustrialiser? LAfrique doit-elle sindustrialiser? LAfrique va-t-elle sindustrialiser? Ces trois

    questions mritent dtre poses au regard des problmes de dveloppement dans lesquels elle est englue et qui

    font penser un pige sans fin dans lequel elle se dbat. Qu cela ne tienne, je dis que la rponse ces trois

    questions est oui. Premirement lAfrique peut sindustrialiser au regard de son potentiel en ressources humaines

    et conomiques. Deuximement, lAfrique doit sindustrialiser car non seulement elle ne peut indfiniment rester en

    marge des standards dveloppementaux dans un contexte mondial globalis mais en plus elle est appele

    prendre le relais face lessoufflement des systmes de production des pays industrialiss. Troisimement

    lAfrique va sindustrialiser parce quelle possde des fils et des intellectuels qui se proccupent de la question, y

    investissent leur temps, leur rflexion et surtout leurs finances. Sont de ceux-ci mon ami et frre Valentin AGON qui

    nous propose dans cet essai, une partie de ses nombreuses rflexions sur le dveloppement de lAfrique au moyen

    de lindustrialisation.

    Au moment o les Etats africains dcrtent lmergence au lieu de la penser, o lmergence est plus un slogan

    politiquement correct quune construction socio-conomique, o les institutions internationales classent lAfrique

    comme la dernire de la classe. Ce qui, soit dit en passant, nempche pas les Africains de se disputer les rangs de ce

    classement tout comme sil y a une diffrence ou un honneur dans une classe de mdiocres tre le premier ou le

    dernier. Pendant que la quasi-totalit des dirigeants africains russissent la prouesse dune croissance sans

    dveloppement dans leurs micros Etats. Valentin AGON nous invite rflchir sur les voies et les conditions durables

    du processus dindustrialisation de lAfrique partir des expriences de pays moins nantis que ceux dAfrique mais qui

    sont parvenus sindustrialiser. Je perois pour ma part ces rflexions comme une lumire qui claire les sentiers

    obscurs du sous-dveloppement des Etats Unis dAfrique en lieu et place de cette lampe que trainent les politiques

    africains, lampe ou plutt lueur dont le faible rayonnement ne saurait les gurir du nombrilisme qui les caractrise et

    qui gangrne le dveloppement industriel de lAfrique.

    Non lindustrialisation de lAfrique nest ni un phantasme ni un leurre encore moins un simple sujet de thse. Cest une

    conviction, mieux une tape dautant plus inluctable quelle se lgitime et se nourrit de limmense frustration des

    peuples africains spolis matriellement et humilis moralement depuis le XVIe sicle. Que les contempteurs de

    lessor conomique de lAfrique ne se mprenne gure; les bourrasques de cette tape ne les pargneront pas.

    Ce livre nest donc pas un livre de plus, mais un livre pour plus : plus de rflexion pour que le dveloppement

    industriel de lAfrique vite les chemins de travers quont connus les autres continents. Plus dengagement, plus de

    foi en soi et plus daction afin de russir le moulage du renforcement des capacits et la rsilience des pays africains

    dans la matrice du dveloppement durable gage dune industrialisation soutenable elle-mme facteur dun

    dveloppement russi pour lAfrique. Valentin AGON lance ici tous les peuples dAfrique un vritable appel ce

    que jappelle : linsurrection dveloppementaliste .

    Alain GOUBA.

    Socio-agronome

    Burkina Faso

  • 2 2

  • 2 3

    Prface de Hamar Fall Diagne

    S'industrialiser comme pour manifester une volont relle de rendre une activit manuelle et/ou artisanale

    industrielle. Si l'on peut admettre que l'industrialisation n'est rien d'autre qu'une marche consciente et sincre vers

    l'amlioration qualitative et quantitative des activits jusqu'ici menes, tout pays et/ou tout continent a le droit,

    mieux, le devoir inconditionnel de s'industrialiser pour se dvelopper durablement et dignement.

    Les pays dits industrialiss n'ont fait que s'engager fermement et consciemment dans cette marche peut-tre en

    chantant: A c ur vaillant, rien d'impossible. En fait, l'on peut penser que c'est simple une affaire de bon

    sens . Or, comme l'enseignait dj R. DESCARTES, La diversit de nos opinions ne vient pas de ce que les uns

    sont plus raisonnables que les autres...mais de ce que nous conduisons nos penses par diverses voies et ne

    considrons pas les mmes choses... . Le bon sens tant la chose du monde la mieux partage.

    Hlas! Il faut simplement dire ici, que ceux qui se sont industrialiss depuis plusieurs sicles ne sont pas du tout

    plus raisonnables ni plus intelligents que les Africains. L'histoire est l pour le prouver. O rside donc le MAL des

    pays africains qui sont toujours la traine en matire d'industrialisation et de dveloppement durable nonobstant les

    richesses naturelles et culturelles incalculables?

    A mon humble avis, c'est une telle question si pertinente qui fait appel la fois une rflexion consciente et un

    partage sincre des points de vue des uns et des autres qui a inspir notre frre de combat convaincu, Monsieur

    Valentin AGON cette noble initiative?

    CONVAINCU! L notre sens tout le MAL de l'Afrique d'aujourd'hui. En fait, on peut le penser. S'industrialiser, c'est

    de croire en soi, c'est tre convaincu de ses capacits et de son pouvoir de raliser les mmes choses que n'importe

    quel individu est mme de raliser en termes d'intellectualisme et de cration technique et scientifique. Sur ce plan,

    de nombreux Africains ont fait leur preuve et depuis fort longtemps. Le Mal serait alors ailleurs. Oui; le Mal accept ou

    non, se situe au niveau du POLITIQUE .

    En effet, du constat, le pouvoir politique africain ayant visiblement comme principale FINALITE l' AVOIR a

    touff l'action des intellectuels et chercheurs poussant un grand nombre s'expatrier et en absorbant les autres dans

    la politique politicienne .

    Une telle situation si grave, si choquante et si inquitante donne largement raison notre frre Valentin AGON

    d'entreprendre un travail si fondamental dans la problmatique de l'industrialisation et le dveloppement de notre cher

    Continent. De ce que je pense profondment, ce travail doit prioritairement dclencher deux actions: une Action visant

    contraindre nos gouvernants faire revenir dans le continent nos intellectuels et chercheurs en leur garantissant

    des conditions d'une vie digne leur statut. L'industrialisation du continent n'est pas possible avec des incultes . Et

    une Action visant la reconversion relle des mentalits des populations. Le dveloppement c'est d'abord et ensuite

    une affaire de mentalit. C'est certes difficile, voire, trs difficile mais il est croire que difficile n'est pas

    IMPOSSIBLE . Bravo donc mon frre Valentin AGON d'avoir pens une si salutaire initiative.

    Hamar Fall DIAGNE

    Ecrivain et Homme de Culture

    Mauritanie

  • 2 4

  • 2 5

    Premire partie

    LE DEVELOPPEMENT, TRIBUTAIRE DE LINDUSTRIALISATION

    Analyse des facteurs de succs et de dclin du processus dindustrialisation

  • 2 6

  • 2 7

    Introduction

    La rvolution industrielle dbute en Angleterre sest tendue dans le temps ses voisins, aux tats-Unis

    dAmrique, au Japon, etc. Les pays avancs restent tributaires de lindustrialisation de leur conomie pour

    leur dveloppement. Sindustrialiser est le rve de la plupart des pays pour atteindre des niveaux de

    dveloppement linstar des pays avancs. Percer le secret de lindustrialisation serait pour la plupart des

    pays qui dsirent sindustrialiser de rechercher les facteurs du succs du processus dindustrialisation. Une

    autre proccupation serait de rechercher les facteurs du dclin de lindustrialisation des conomies

    industrialises. Les sciences rgionales ont tudi les disparits constates au niveau des rgions, mais elles

    scrutent aussi les raisons qui fondent le dveloppement des unes, et le mal dveloppement des autres, le

    dclin des unes et la restructuration des autres.

    Dans ce travail nous tudierons les facteurs du succs du processus dindustrialisation des pays avancs et les

    facteurs du dclin de lindustrialisation. Pour cela, nous dfinirons le concept du processus

    dindustrialisation. Des penseurs comme Rostow et Gerschenkron ont labor chacun une thorie sur le

    succs de lindustrialisation. Nous nous servirons de lanalyse de leurs thories pour tudier les facteurs du

    succs du processus dindustrialisation. Nous analyserons dans un premier temps les facteurs du succs du

    processus dindustrialisation des pays avancs comme la Grande-Bretagne, la France, le Japon, etc. suivis

    des cas de pays mergents comme la Chine, le Brsil, etc. la lumire des facteurs de succs du processus

    dindustrialisation selon Rostow. Dans un deuxime temps cette mme analyse sera faite la lumire des

    facteurs du succs du processus dindustrialisation selon Gerschenkron. Nous ferons une synthse de ces

    analyses suivie dune discussion dans un troisime temps. Nous tendrons dans un quatrime temps notre

    tude aux facteurs de dclin de lindustrialisation de certains pays avancs comme lAngleterre, la France et

    le Japon suivis des cas de quelques pays mergents comme le Brsil et la Core du Sud. Enfin nous ferons

    sommairement une synthse de ltude des facteurs de dclin suivie dune brve discussion.

  • 2 8

    Le processus dindustrialisation

    Le processus dindustrialisation est un phnomne complexe compte tenu des diffrents espaces dans

    lesquels il sest produit travers le temps. Nous laborderons selon des thories et des modles explicatifs

    diffrents lchelle de certains pays avancs et de quelques pays mergents. Ces pays avancs sont la

    Grande-Bretagne, lAllemagne, les Etats-Unis dAmrique, la France et le Japon. Les pays mergents que

    nous avons retenus sont la Chine, le Brsil et la Core du Sud. Mais avant toute analyse des facteurs de

    succs et de dclin du processus dindustrialisation, il importe de dfinir ce concept.

    I. La dfinition du concept du processus dindustrialisation

    Nous analyserons des dfinitions du concept dindustrialisation sous plusieurs angles.

    I.1. Lindustrialisation : une transition entre une socit agricole et une socit industrielle

    Le concept de processus d'industrialisation correspond une transition entre une socit agricole et une

    socit industrielle, associe une tendance la hausse du revenu par habitant et du niveau de productivit

    (Encarta, 2009)7. Cette dfinition, dun caractre holistique selon nous, ne met pas en relief toutes les

    transformations tant en amont quen aval des socits agricoles. Elle reste muette sur les mutations sociales,

    culturelles, politiques, techniques et technologiques quinduit le phnomne dindustrialisation. Par ailleurs,

    cette dfinition de lencyclopdie Encarta sinspire de la thorie du dcollage de Rostow (1960). Ce dernier

    a construit sa thorie de dcollage par tapes en tudiant lindustrialisation et principalement celle de la

    Grande-Bretagne ainsi que les expriences d'industrialisation qui ont suivi celle des Britanniques. Cette

    thorie et celle du retard relatif de Gerschenkron nous intresseront un peu plus loin dans ce travail pour

    mieux apprhender le processus dindustrialisation. Leur choix repose sur leur spcificit traiter du

    processus dindustrialisation.

    I.2 Lindustrialisation : une gnralisation de la mcanisation, lanalyse tymologique du concept

    Dfinir lindustrialisation sans traiter de la mcanisation, de la manufacture et des usines, serait une

    insuffisance parce que lindustrialisation reprsente la gnralisation de la mcanisation et une forte

    augmentation du travail en manufacture et en usine (la bibliothque virtuelle Allo Prof, 2010)8. Cette

    approche dfinitionnelle introduit les trois principaux lments ou paramtres de lindustrialisation: la

    mcanisation, la manufacture et lusine. Cependant, cette dfinition reste encore moins explicite sur

    lindustrialisation. Le Tourpictionnaire9 (2010) part dabord du sens tymologique du latin industria qui

    signifie activit pour dfinir ensuite le verbe industrialiser. Ce verbe signifie produire ou exploiter selon

    les mthodes ou techniques industrielles. Il a pour synonyme le verbe mcaniser. Ce dictionnaire ajoute par

    ailleurs quindustrialiser, c'est quiper un lieu en industrie, tendre et intensifier les activits industrielles. En

    dautres termes, le Tourpictionnaire (2010) prcise que:

    7 Encarta est une encyclopdie lectronique sans pagination.8 La bibliothque virtuelle Allo Prof est accessible par internet et na pas de pagination.9 Tourpictionnaire est aussi lectronique et accessible par internet et na pas de pagination.

  • 2 9

    lindustrialisation est l'ensemble du processus de fabrication de produits manufacturs, allant du prototype

    la srie en recherchant une forte productivit du travail. Elle permet de remplacer le systme artisanal ou

    manuel de production dans des lieux disperss, par une production centralise, en grandes sries, utilisant des

    machines, appliquant des normes ou standards pour obtenir des produits de qualit homogne. Dans le

    dveloppement conomique d'un pays, l'industrialisation est la phase durant laquelle l'industrie crot plus vite

    que l'agriculture et dtient peu peu le rle moteur de l'conomie (Tourpictionnaire, 2010).

    Cette dernire dfinition de lindustrialisation plus complte et apparemment plus explicite soulve

    nanmoins notre avis quelques questions pertinentes. Quelle place accorde-t-elle lagriculture ?

    Lindustrie joue-t-elle toujours le rle moteur de lconomie dun pays? Dans cette dfinition, lagriculture

    nest voque qu la fin pour sa comparaison avec lindustrialisation. Or, lindustrialisation ne pourrait avoir

    lieu que quand la production agricole est optimale et devient une source certaine de matires premires pour

    faire tourner plein rgime lindustrie. Cette dfinition indique que lindustrie doit crotre plus vite que

    lagriculture et dtenir peu peu le rle moteur de lconomie nationale. Cette vision du phnomne

    industriel nous apparatrait spatialement et temporellement relative. Sil est vrai que le march et la demande

    des produits industriels font que lindustrie prenne plus dampleur que lagriculture, cette dernire est aussi

    propulse par lindustrie.

    I.3. Lindustrialisation : le rsultat de la cration dune conomie de march

    Lindustrialisation notre avis, sinscrit dans une suite dynamique de production ou dachat de matires

    premires, de leur transformation et de leur commercialisation en produits semi-finis ou finis sur un march

    intrieur ou extrieur. Lagriculture et lindustrie doivent rester dans un quilibre dfini par le march,

    comme laffirme Brasseul (1998) qui, sappuyant sur Polanyi (1944), pense que les facteurs qui sont

    l'origine de l'industrialisation rsident dans le systme autorgulateur du march ou lconomie de march

    (Brasseul, 1998 : 10). Et se rfrant Polanyi, il ajoute que nous avanons l'ide que la rvolution

    industrielle et toutes les transformations qui l'ont accompagne, taient simplement le rsultat d'un unique

    changement fondamental, la cration d'une conomie de march (Brasseul, 1998 : 10)10. Si la rvolution

    industrielle na de facteur de succs que lunique conomie du march, nous le prendrons avec des pincettes,

    car nous estimons que les facteurs sont divers et multiples, et font lobjet de notre prsent travail. Quant au

    rle moteur attribu lindustrie, la ralit contemporaine lattesterait moins. Car, malgr la place importante

    de lindustrie dans lconomie des pays avancs, ce sont les activits tertiaires qui jouent le rle moteur nos

    jours : elles11 fournissent aujourdhui plus de 55% des emplois dans les pays industrialiss, 70% aux Etats-

    Unis. Grce la recherche fondamentale et applique, il y a une efficacit de plus en plus grande du travail

    productif, de la gestion des affaires, et mme des administrations (Marseille, 2001 : 4). De nos jours des

    pans entiers de lconomie sont dynamiss par les activits tertiaires, les pays comme la Suisse et lle

    Maurice dveloppent respectivement leur conomie par la vente des services financiers et le tourisme. Avant

    de proposer notre dfinition de lindustrialisation, nous voquerons les dfinitions de

    10 Citant (Polanyi, 1944 : 68).11 Les activits tertiaires.

  • 3 0

    quelques auteurs classiques tels que Perroux (1961), Brasseul (1993), Crouzet et Poussou (2000) pour

    approfondir le sens de ce concept dindustrialisation.

    I.4 Lindustrialisation : un ensemble social influenc par un complexe coordonn de machines

    Pour Perroux (1961), lindustrialisation constitue un processus, plus prcisment la structuration de tout un

    ensemble social sous linfluence dun complexe coordonn de machine (Perroux, 1961 in Boudjenah, 2002

    : 26).

    Perroux reconnat que lindustrialisation est dabord un processus, ce qui signifierait notre avis un

    cheminement, un tat en cours, mais il ajoute avec ladverbe prcisment que cest un ensemble social

    influenc par un complexe de machine. Il ne suffirait pas davoir quelques machines ou quelques industries

    pour prtendre lindustrialisation mais tout un complexe de machine. Perroux trahirait la dfinition de

    lindustrialisation, sil nvoquait pas le complexe de machine qui est en fait au c ur du processus

    dindustrialisation. Toutefois, Perroux (1961) semble moins approfondir, notre avis, la dfinition du

    concept. Cest pour cela que nous aimerions analyser la dfinition de Brasseul, un auteur consacr lanalyse

    historique de lindustrialisation.

    I.5 Lindustrialisation : la secondarisation de lconomie

    Aprs une analyse de lhistoire de lindustrialisation, Brasseul (1993) propose que lindustrialisation peut

    tre dfinie comme le processus au cours duquel lindustrie, et plus particulirement les industries

    manufacturires, voient leur importance augmenter dans le produit intrieur brut, tandis que les emplois

    industriels occupent une part croissante de la population active (Brasseul, 1993, in Boudjenah, 2002 : 26).

    Brasseul (1993) considre, selon nous, les industries manufacturires comme le c ur de lindustrialisation et

    laugmentation du PIB et la part croissante des emplois industriels comme les effets de lindustrialisation.

    Cette vrit industrielle serait dune poque donne, mais comme nous lavons soulign ci-dessus, les

    industries crent moins demplois nos jours et lemploi mesurerait moins limpact du processus

    dindustrialisation dun pays. Dautres auteurs comme Crouzet et Poussou (2000) vont dans le mme sens

    que Brasseul mais avec un dveloppement exceptionnel du concept quand ils proposent que:

    lindustrialisation est la secondarisation de lconomie, cest--dire lexpansion, non seulement absolue, mais

    relative du secteur secondaire ou, en dautres termes, laccroissement de la part de lindustrie au dtriment de

    celle de lagriculture, du double point de vue de la main-d uvre employe et de la contribution au produit

    national. Elle implique donc dune part, une croissance de lindustrie plus rapide que celle de lagriculture,

    dautre part, un redploiement, un transfert de ressources du secteur primaire au secteur secondaire, un

    changementfondamental de la structure de lconomie (Crouzet et Poussou, 2000 : 11).

    Crouzet et Poussou (2000) nous donnent une dfinition qui dtaille le contenu du concept en question car

    sils taient rests sur lindustrialisation est la secondarisation de lconomie , ils nous auraient laiss une

    dfinition en bloc cest--dire sans entrer dans les dtails. Mieux, le rapport de lindustrie lagriculture

    quils mettent en relief, nous fait revenir sur nos propos antrieurs concernant la croissance de lindustrie au

    dtriment de lagriculture. Ils lexplicitent plus loin par le fait que grce aux normes gains de productivit

  • 3 1

    raliss de faon presque ininterrompue, dans le secteur manufacturier depuis la perce technologique de la

    fin du XVIIIe sicle le march sest continuellement largi et la demande des articles manufacturs est

    devenue lastique. Au dbut de la premire rvolution industrielle, lagriculture tait plus dveloppe que

    lindustrie car cette dernire tait naissante, mais au fur et mesure que la demande des produits industriels

    augmentait, lindustrie se dveloppait plus pour satisfaire la demande, cest en cela que lindustrie crot plus

    vite que lagriculture. Le problme est que quand la production agricole du pays concern nest plus

    suffisante pour alimenter les industries, ces dernires se tournent vers limportation des matires premires et

    limpact se fait sentir sur les prix des produits manufacturs.

    Aprs cette consultation de dictionnaires et dauteurs anciens comme nouveaux au sujet de

    lindustrialisation, la dernire dfinition, celle de Crouzet et Poussou (2000) nous parat la plus complte

    pour les raisons que nous venons dvoquer ci-dessus. Nanmoins, nous aimerions pousser encore un peu

    plus loin la rflexion. Mais avant dvoluer, nous proposerons notre tentative de dfinition du concept

    dindustrialisation.

    En nous appuyant sur la richesse de toutes les dfinitions prcdentes, nous pensons que dune manire

    holistique, lindustrialisation est, selon nous, le rsultat de la logique de la production ou de limportation de

    matires premires suivies des transformations mcanises grande chelle pour une commercialisation de

    produits semi-finis ou finis selon lampleur des besoins du march.

    I.6. Lindustrialisation : les facteurs de localisation des industries

    Une industrie sinstalle-t-elle par hasard dans un pays? Autrement dit, quels sont les facteurs motivant

    limplantation dune industrie? Avant dnumrer ces facteurs, voquons dabord les principes auxquels ils

    tiennent.

    Mrenne-Schoumaker (1996 dans Ajabid et al., 2002 :17) propose quatre principes relatifs la localisation:

    1 - un facteur ne peut lui seul expliquer une localisation; mme la prsence d'une matire premire

    ne peut tre la seule cause d'une implantation;

    2 - un mme facteur peut exercer des influences diverses; ainsi la prsence d'une main-d uvre

    qualifie peut attirer certaines entreprises et en repousser d'autres;

    3 - le choix d'une localisation est la rsultante d'un nombre plus ou moins grand de facteurs dont le

    poids et la diversit varient fortement d'une situation l'autre;

    4 - la slection finale d'une localisation est toujours une question de compromis et d'options.

    Le dernier principe sinspire, notre avis, de la pense de Muther (1966) qui affirme quil est rare de

    trouver un emplacement parfait, permettant une implantation parfaite pour un prix parfait. Les dirigeants

    choisissent ce qui convient le mieux partir de ce qu'ils veulent et en fonction de ce qui est disponible

    (Muther 1966 : 192). Le choix dun lieu dimplantation dentreprise reste une proccupation majeure pour

    lentrepreneur car son succs ou son chec en dpend. Un tel choix comporte toujours un risque car

    lentrepreneur ne matrise pas les phnomnes tels quun changement politique, des alas climatiques, etc.

  • 3 2

    qui pourraient bouleverser lordre des choses du milieu dimplantation. Entreprendre est dj un risque. De

    mme, tous les choix inhrents aux activits sont galement des risques mesurs selon les avantages viss par

    lentrepreneur. Malgr la vision un peu obscure de lavenir, le choix est toujours fait selon des facteurs qui

    varient suivant les territoires et les types dentreprise ou dindustrie.

    Par facteur de localisation, Mrenne-Schoumaker (1996 dans Ajabid et al., 2002 :17) entend tout

    phnomne susceptible d'influer d'une manire ou d'une autre sur le choix d'une implantation dindustrie .

    Ainsi, limplantation dindustrie ou dentreprise rsulte de deux grands types de facteurs : ceux caractrisant

    les territoires et ceux dsignant les entreprises et les tablissements. Selon Ajabid et al. (2002), au niveau des

    grands espaces conomiques et des pays, ces facteurs sont: 1) la situation gographique; 2) le march; 3) les

    avantages comparatifs ; 4) la politique des pouvoirs publics. Mais au niveau des rgions, des localits et des

    terrains, les facteurs dimplantation dindustries et dentreprises sont : la situation gographique, le march,

    les transports, les matires premires, l'eau et l'nergie, les disponibilits en terrains et btiments, les aspects

    quantitatifs et qualitatifs de la main-d uvre, l'environnement conomique, les proccupations et les

    contraintes d'environnement, le cadre de vie, l'intervention des pouvoirs publics (Ajabid et al., 2002 :17).

    Les facteurs prsents ci-dessus, bien que nombreux, ne sont pas exhaustifs car dautres dterminants comme

    le taux de chmage du milieu, les divers impts, etc. pourraient motiver le choix. En somme, nous pouvons

    constater que les facteurs de localisation des industries et des entreprises, pourraient influencer le

    dveloppement du tissu industriel du territoire dimplantation. Ces facteurs pourraient tre compts dune

    manire ou dune autre comme des facteurs de succs du processus dindustrialisation du milieu, car plus un

    territoire est attractif aux industries, plus il sindustrialise. Cest pourquoi nous analyserons principalement

    les facteurs de succs du processus dindustrialisation lchelle nationale selon les thories de Rostow et de

    Gerschenkron et sommairement ceux de dclin de lindustrialisation.

  • 3 3

    II. Lanalyse du processus dindustrialisation la lumire des thories dudveloppement

    Dans ce travail, notre analyse du processus dindustrialisation se fera lchelle nationale.

    Lindustrialisation, bien quelle commence dans un territoire donn, est denvergure nationale voire

    internationale car une industrie ou une chane dindustries produit pour satisfaire des besoins au-del de son

    territoire dimplantation.

    Face la pluralit des thories du dveloppement, nous nous limiterons celles qui ont trait spcifiquement

    du processus dindustrialisation telles que la thorie du dcollage de Rostow et la thorie du retard relatif de

    Gerschenkron.

    II.1. Lanalyse des thories de dcollage de Rostow et du retard relatif de Gerschenkron

    La thorie de dcollage de Rostow et celle de retard relatif de Gerschenkron proposent selon chacun des

    auteurs, des stratgies qui peuvent permettre lindustrialisation dune nation. Ces diffrentes stratgies

    vhiculent des facteurs de succs du processus dindustrialisation.

    I1.1-1. La thorie de dcollage de Rostow

    Rostow (1960) a analys l'industrialisation de la Grande-Bretagne et dautres expriences d'industrialisation

    telles que celles de la France, de lAllemagne, etc. De cette tude, il a bti la thorie de dcollage selon

    laquelle le dveloppement est un processus qui se droule en suivant ncessairement cinq tapes:

    la socit traditionnelle : lactivit est surtout agricole, et seffectue dans le cadre familial avec des

    techniques traditionnelles et une faible productivit;

    les conditions pralables au dcollage: lpargne et linvestissement se dveloppent, ce qui

    permet une augmentation de la production dans lagriculture et lindustrie naissante; le dcollage

    ou le tack-off: il sagit de la phase dcisive dune socit o la croissance devient un phnomne

    normal. Le tack-off est rendu possible par une augmentation du taux dinvestissement de 5 10%

    du revenu national, qui permet aux industries nouvelles de jouer un rle moteur; la marche vers

    la maturit: elle prolonge les effets du tack-off, le taux dinvestissement slve 20% du revenu

    national, alors les progrs techniques se gnralisent;

    lre de la consommation de masse: les besoins fondamentaux de la consommation sont satisfaits, et

    lindustrie a atteint sa maturit. Le secteur des services se dveloppe trs rapidement (Conte, 2003 : 1-

    6)12.

    Selon cette thorie rostowienne, le dveloppement suit un processus historique linaire dcompos en

    cinq tapes distinctes.

    12 Conte (2003) a cit Rostow (1970 : 15).

  • 3 4

    II.1-2. La thorie du retard relatif de Gerschenkron

    Mais Gerschenkron voit autrement les stratgies mettre en uvre pour lindustrialisation dun pays.

    Jacquet (2010) prcise que dans un essai qui a fait date, Gerschenkron prend le contre-pied des thses

    marxistes et de l'approche de Rostow en disant que:

    Selon lui, l'industrialisation des pays sous-dvelopps s'carte du modle des pays industrialiss et ne suit pas

    des tapes systmatiques sur un chemin prdtermin. Il relve d'importantes diffrences dans

    l'industrialisation des pays d'Europe (notamment orientale) en retard par rapport au Royaume-Uni. Alexander

    Gerschenkron met l'accent sur deux instruments dans l'mergence de ces processus: les banques et l'Etat.

    L'accumulation progressive de capital a pu financer l'industrialisation britannique sans besoin de crer des

    institutions bancaires spcifiques. A l'inverse, le crdit mobilier a jou un rle dterminant dans

    l'industrialisation de la France, et les banques universelles dans celle de l'Allemagne. L'intervention de l'Etat

    est d'autant plus dterminante que le retard initial est marqu, d'o l'importance des politiques publiques, en

    particulier dans les pays pauvres (Jacquet, 2010).

    Pour complter la thse de Gerschenkron, Encarta (2009) rapporte quil rejette lhistoricisme de Rostow, et

    postule que le dernier pays industrialis prsentera les caractristiques suivantes:

    - importance accorde aux industries et usines de grandes tailles;

    - recours aux transferts de technologie et dans certains cas laide de ltranger;

    - importance de lEtat comme promoteur du dveloppement industriel;

    - rle passif de lagriculture notamment dans la croissance de la productivit et comme source de

    demande pour la production du secteur industriel, etc.

    II.1-3. Analyse sommaire des thories de Rostow et de Gerschenkron

    En confrontant les deux thories, nous constatons la divergence entre elles, et surtout leurs diffrents points

    de vue en matire de facteurs de succs du processus dindustrialisation.

    Pour Rostow, le dveloppement dun pays suit une trajectoire linaire et les pays en retard doivent

    sappliquer cette thorie pour connatre un essor industriel linstar des premiers pays industrialiss. La

    ralit du dveloppement, un demi-sicle aprs cette thorie, prouve ses limites. La trajectoire du

    dveloppement dun pays ou dune rgion nest pas linaire. Il y a des stagnations, des reculs, des

    blocages causs par des chocs extrieurs inattendus ou par la faiblesse ou labsence de conditions internes

    de dveloppement (Proulx, 2009 : 232). Par ailleurs, les tapes selon Rostow, se suivent et seffectuent

    par ruptures plus ou moins radicales (Proulx, 2009 : 205). Lanalyse de lhistoire conomique des systmes

    dvelopps du monde occidental selon Proulx (2009), montre que chaque tape ne commence pas au mme

    moment. Lindustrialisation na pas dbut en mme temps dans tous les pays. Et toutes les conomies ne

    sont videmment pas rendues la mme tape la mme priode de leur volution (Proulx 2009 : 205).

    En consquence, le dveloppement ne suit pas radicalement des tapes rostowiennes et nvolue pas de

    faon linaire dans le temps et dans lespace.

    Malgr les limites du modle rostowien, les facteurs du processus dindustrialisation quil a mis en relief

    nous semblent pertinents pour ltude dudit processus. Les trois principaux facteurs du succs du processus

  • 3 5

    dindustrialisation de tout pays selon lui sont: la haute productivit dans le secteur agricole, lexistence de

    marchs et la stabilit du gouvernement.

    Mais pour Gerschenkron, les principaux facteurs de succs du processus dindustrialisation sont ltat

    entrepreneur, le transfert de technologie et de fonds trangers, linstallation de grandes industries.

    Lagriculture, selon lui, joue un rle passif contrairement la place dterminante que lui attribue Rostow.

    Ces diffrents facteurs de succs du processus dindustrialisation mritent dtre tudis.

    II.2. Les facteurs de succs du processus dindustrialisation selon Rostow

    Dans son analyse de lindustrialisation, Rostow (1960) identifie trois conditions pralables et ncessaires

    aux diffrents pays pour russir leur processus dindustrialisation. Ces trois facteurs de succs du processus

    dindustrialisation sont : la haute productivit dans le secteur agricole, lexistence de marchs et la stabilit

    du gouvernement du pays. En analysant les facteurs de succs du processus dindustrialisation selon

    Rostow, nous mettrons en relief la manire dont ils ont favoris le processus dindustrialisation de certains

    pays industrialiss comme la Grande-Bretagne, lAllemagne, la France, le Japon ainsi que certains pays

    mergents tels que la Chine, le Brsil, la Core du Sud, etc. Nous confronterons ces ralits industrielles

    avec les facteurs de succs du processus dindustrialisation selon lanalyse de la thorie du retard relatif de

    Gerschenkron.

    II.2-1. La haute productivit dans le secteur agricole

    La question qui se pose ici est de savoir quelle place occupe lagriculture dans le processus

    dindustrialisation dun pays? Selon Brasseul (1998), pour des auteurs comme Marx, Bairoch ou

    Rostow, la modernisation agricole est souvent tenue pour la condition indispensable l'essor industriel.

    La cl de l'industrialisation rside dans l'augmentation des rendements (hausse de la production) et de la

    productivit agricole (libration de travail) (Brasseul, 1998 : 23).

    Lagriculture joue ce rle de facteur dterminant du processus dindustrialisation parce quelle nourrit le

    peuple et les travailleurs dune part et fournit les matires premires aux industries dautre part. Le

    fonctionnement des industries dpendrait de la production agricole. Cest ce qui ressort de lanalyse de

    Brasseul (1998) quand il rapporte, en citant Senghaas (1982), que:

    la leon tirer de toutes les expriences positives ou ngatives de dveloppement est vidente : le

    dveloppement industriel n'a nulle part atteint l'tape de croissance auto-entretenue, moins

    qu'une augmentation de la productivit agricole n'ait prcd ou accompagn l'industrialisation.

    En d'autres termes, une tentative d'industrialisation sans modernisation agricole est destine

    finir en dveloppement bloqu (Brasseul, 1998 : 23).

    Si pour Senghaas (1982 in Brasseul, 1998 :23) toute tentative dindustrialisation sans modernisation de

    lagriculture est voue lchec quil traduit par le dveloppement bloqu, cela explique la place

    indispensable de lagriculture dans le dveloppement dun pays. Cette thse se justifie, notre avis par le fait

    que lagriculture, dans son dveloppement travers la mcanisation, son intensification, ses meilleurs

    rendements dus lutilisation des engrais, etc. se destine prparer le terrain lindustrialisation.

  • 3 6

    Au Japon, lagriculture a jou aussi un rle dterminant pour lindustrialisation comme le tmoignent

    Montouss et al., (2008) : la croissance industrielle rsulte en partie des transformations de lagriculture. La

    production agricole saccroit sous leffet de la hausse des rendements de la terre du fait de lusage des engrais

    naturels et de lirrigation (Montouss et al., 2008 : 18).

    En outre, le dveloppement de lagriculture, en dehors des rles prcdemment soulevs, a favoris aussi le

    dveloppement de lpargne pour linvestissement dans lindustrie en Grande Bretagne comme dans les

    premires nations industrialises. Cest ce que dmontrent Dwight et al., (2008 : 702) : le secteur agricole

    peut galement constituer une source majeure de capitaux pour une croissance conomique moderne

    (Dwight et al., 2008 : 702).

    Le secteur agricole comme source majeure de capitaux en faveur dune conomie se vrifie par le fait que le

    pays producteur, en exportant ses produits agricoles comme matires premires vers dautres pays, engrange

    dimportantes devises trangres. Ces devises lui permettent en retour dimporter des quipements ou

    dautres besoins pour son dveloppement industriel. Cette thse se confirme par le rle que lagriculture a

    jou dans le processus dindustrialisation de lAmrique comme lattestent Montouss et al., (2008 : 14)13

    en ces termes:

    la modernisation de lagriculture amricaine se traduit par un niveau de productivit par agriculteur plus

    lev quen Grande-Bretagne. La hausse des revenus qui en dcoulent dope la demande, en particulier celle

    des produits manufacturs. De plus, laugmentation de la production agricole alimente un courant

    dexportation vers la Grande-Bretagne (coton notamment) qui permet dimporter les biens dquipement

    (Montouss, 2008 : 14).

    Nous notons ici que la rvolution agricole prcderait lmergence industrielle. Lagriculture, grce sa

    productivit aurait servi de levier pour le succs du processus dindustrialisation britannique comme

    Montouss et al., (2008) lont affirm:

    la rvolution agricole britannique intervient entre 1700 et 1750 : elle est donc antrieure la rvolution

    industrielle. Elle se traduit par plusieurs transformations (suppression de la jachre, extension de lusage de

    la charrue attele, fumure des terres...) qui provoquent laugmentation de la demande de produits industriels

    (outillage, par exemple). En outre, la distribution de revenus dans les campagnes induit une consommation

    croissante de produits manufacturs. Enfin lexode rural rpond aux besoins de main-d uvre de lindustrie

    (Montouss et al., 2008 :9).

    La place de lagriculture aurait t dterminante dans le processus dindustrialisation et aurait vari dune

    nation une autre. Par exemple en France selon Montouss et al.,(2008), le poids de lagriculture reste lev

    dans lindustrialisation de la France: les agriculteurs reprsentent encore la moiti de la population active

    (22% en Grande-Bretagne). Lactivit intrieure dpend davantage en Grande-Bretagne de lagriculture, et en

    particulier de lvolution et du niveau des revenus des paysans (Montouss et al., 2008 : 9).

    Si nous considrons la part de lagriculture dans lmergence du Brsil, elle a un poids trs important. En

    rsumant Rouqui (2008), nous pouvons dire du Brsil: avec une frontire agricole de quelques 90

    13 Ces auteurs sont plusieurs fois cits dans ce travail parce quils nous apparaissent plus prolifiques en matiredindustrialisation.

  • 3 7

    millions dhectares nonobstant les forts, une recherche agronomique performante, le Brsil a pu devenir

    lune des premires puissances agricoles mondiales. Premier producteur et le premier exportateur de caf qui

    reprsentait jusqu 70 % de ses exportations entre 1880 et 1929, le Brsil reste le premier mme si le caf ne

    reprsente aujourdhui quune part trs modeste de son commerce. Le pays se classe galement en tte ou

    aux premiers rangs pour la production et lexportation dun grand nombre de produits agricoles : le sucre, le

    soja, les agrumes, le jus dorange, la viande bovine, le mas, le tabac, le coton, la cellulose. Considrant tout

    ce poids de la production agricole, nous pouvons dire que le Brsil sans lagriculture ne serait pas un pays

    mergent de nos jours.

    Le rle moteur de lagriculture dans le processus dindustrialisation est un facteur dterminant selon la

    thorie de Rostow. Par contre, la thorie de Gerschenkron considre que lagriculture joue un rle passif dans

    lindustrialisation dun pays, Inoubli (1998) dit de Gerschenkron qu il propose que, dans le cas dun pays

    en retard de dveloppement, le secteur industriel reoive plus de ressources que le secteur agricole car le

    secteur industriel est plus productif (Inoubli, 1998 : 6).

    En somme, sans une rvolution agricole, le processus dindustrialisation naurait pas connu le rsultat

    tangible quest lessor industriel des diffrents pays avancs comme la Grande-Bretagne, lAllemagne, les

    Etats-Unis dAmrique, la France, le Japon, etc.

    Mais malgr lhistorique rle spectaculaire et dterminant de lagriculture dans le processus

    dindustrialisation des premiers pays industrialiss, nos recherches nous montrent quelle nest pas un

    facteur isol. Cest en synergie avec dautres facteurs tels que le capital humain, lducation technique,

    lindustrie que lagriculture aurait jou son rle moteur dans le processus dindustrialisation. Comme

    exemple de synergie, lducation technique en Grande-Bretagne a permis linvention des outils fabriqus

    en industrie pour la mcanisation agricole. Lindustrie produit aussi des engrais, qui en retour favorisent

    une meilleure production agricole. Elle est dune part, une source de matires premires pour lindustrie et

    dautre part, une source de gains financiers pour les producteurs agricoles, dont leurs pargnes dopent le

    capital des banques dinvestissement industriel. Lagriculture, grce ses rendements importants, rgle les

    problmes alimentaires, diminue en consquence le taux de mortalit et permet la croissance

    dmographique. Cette forte natalit dveloppe le march intrieur dun tat. Ce succs naurait lieu que

    quand ltat reste stable et entrepreneur et quand le climat du march est favorable la croissance de

    lconomie.

  • 3 8

    II.2-2. Ltat, le march

    La prsence de ltat dans le processus dindustrialisation est diffremment perue par Rostow et

    Gerschenkron, les thoriciens de lindustrialisation. Limportance de ltat selon Rostow est sa stabilit;

    tandis que Gerschenkron considre le caractre entrepreneur de ltat dans le processus dindustrialisation.

    II.2.2-1. Un tat stable, un tat entrepreneur: gage de lindustrialisation

    Rostow soutient dans sa thorie de dcollage que la stabilit du gouvernement dun pays est lun des facteurs

    de succs de son processus dindustrialisation. Linterprtation que Brasseul (1998) fait de la thorie de

    Rostow, montre que la stabilit politique de lAngleterre, depuis la glorieuse rvolution de 1689 qui a vu la

    mise en place dune monarchie parlementaire, est videmment un lment favorable au dveloppement

    conomique (Brasseul, 1998 : 44).

    Pour nous, si la Grande-Bretagne vivait dans une instabilit politique, elle aurait dploy lessentiel de ses

    nergies la recherche de la paix et de la stabilit, et aurait rat son dcollage industriel. En effet, tout

    processus de dveloppement sarrterait ou salinerait ds lors que le gouvernement du pays rentre dans une

    phase dinstabilit. La stabilit de ltat, et le caractre entrepreneur, comme facteurs de succs du processus

    dindustrialisation, ont t illustrs par le cas de la Core du Sud. Ce pays a t le laboratoire de lapplication

    de la thorie de Rostow qui sy est rendu pour exposer publiquement sa thorie devenue par la suite, la

    source dinspiration pour les dirigeants dalors. Comme le souligne Park (2006) :

    Bien quil y ait eu de nombreuses critiques contre la thorie de Rostow, le concept de take-off devenait un

    thme majeur des discours dans la socit sud-corenne. Du Prsident lhomme de la rue, take-off, en

    coren doyak devenait un symbole de la croissance conomique du pays. Il ny avait pas un examen

    dentre qui nait pas comport une question sur la thorie du take-off la fin des annes 1960 celle des

    annes 1970 (Park, 2006 : 288).

    Les dirigeants de la Core du Sud se sont inspir de la thorie rostowienne pour planifier le processus

    dindustrialisation du pays. Cependant, les sud-corens nont pas tard glaner certaines recettes de

    Gerschenkron pour ensuite dcider leur industrialisation sur la base des stratgies dindustrialisation par

    substitution dimportation (ISI). Cette thorie classique considre que lindustrie est dterminante dans le

    dveloppement conomique. Elle vhicule le protectionnisme et se fonde principalement sur le

    thorme de Prebisch - Singer, thoriciens structuralistes de la Commission conomique Pour l'Amrique

    Latine (CEPAL) (De la Taille, 1999 : 6). Ltat joue un rle de premier plan dans la mise en uvre de

    cette thorie.

    En effet, la Core du Sud, engage dans une politique dindustrialisation par substitution dimportation haute

    intensit capitalistique qui selon Albert et Crener (1982 : 236), a fait passer la part de lindustrie lourde dans

    son industrie manufacturire de 25% en 1962 55% en 1979. Cependant, lassassinat du Prsident de ce pays

    en octobre 1979 aurait port un coup darrt cette politique. Une instabilit au niveau de la direction du pays

    sest instaure. Les nouveaux dirigeants ont accord moins dimportance la politique industrielle du pays et

    la conjoncture conomique internationale cause des problmes politiques internes.

  • 3 9

    Pour nous, cest lorsquun pays est en paix et que ses conditions financires, techniques, sociales, etc. le lui

    permettent quil met le dveloppement en priorit.

    Shaopeng (2006) voque le rle majeur que joue la paix dans le processus du dveloppement de la Chine. Il

    affirme que: la paix est la condition pralable du dveloppement, en revanche, le dveloppement donne des

    assurances matrielles la paix (Shaopeng, 2006 : 6). Il en dcoule selon nous que la stabilit et la paix

    dfiniraient le contexte favorable au dveloppement dun pays. Nanmoins un gouvernement, notre avis,

    peut tre stable et inefficace pour travailler activement lindustrialisation de son pays. La stabilit serait un

    facteur de succs du processus dindustrialisation dans la mesure o elle saccompagne de lefficacit, de

    lambition, de la vision et dun programme axs sur lindustrialisation et le dveloppement. Cest cette

    insuffisance que Gerschenkron relve dans sa thorie lorsquil dit que ltat doit tre entrepreneur et

    acteur cest--dire quil doit tre au premier rang du processus dindustrialisation pour le dfinir,

    limpulser et le raliser. Dans cette optique, Bergre (1981) tente de circonscrire le rle de ltat dans les

    pays en retard selon Gerschenkron en ces termes:

    Gerschenkron a montr l'importance du rle jou par ltat dans les pays tardivement venus

    l'industrialisation o la pauvret du march rural limite la demande des consommateurs comme la fourniture

    des capitaux. Mme si certaines expriences de dveloppement modernes - celle de Taiwan, par exemple -

    remettent en question la ncessit, pour ltat, d'assurer le rle d'entrepreneur, son intervention demeure

    essentielle pour fixer les priorits d'investissements et crer un cadre institutionnel adapt aux nouveaux

    besoins de l'activit conomique (Bergre, 1981 : 473).

    De cette analyse de la thorie de Gerschenkron faite par Bergre (1981), il ressort que ltat, mme sil

    nest pas entrepreneur, doit orienter les investissements dans les secteurs cls et prioritaires pour

    lindustrialisation. En plus, il mettra en place les dispositifs favorables au dveloppement des activits

    conomiques. Par exemple, ltat devrait prendre des mesures incitatives en faveur de linvestissement

    industriel. Ces mesures pourraient tre: lexonration fiscale pour les industries naissantes, les crdits

    fiscaux, la souplesse des lgislations dans le processus de cration dindustries dans un secteur bien dfini,

    etc.

    Parlant de Gerschenkron, Shin (2002) rapporte que selon sa thorie, la conscience dtre en retard pour

    lindustrialisation, doit motiver ltat crer un cadre convenable pour le dveloppement industriel et le

    promouvoir directement (Shin, 2002 : 7). Ltat devrait tre exigeant pour quune pression soit exerce sur

    le niveau de consommation des populations afin daugmenter laccumulation des capitaux pour lpargne, ce

    qui pourrait crer des tensions sociales et politiques. Ltat devrait tre en position dintervenir pour calmer

    dventuels conflits que pourrait faire natre le processus dindustrialisation. Pour Biasutti (2009 : 5), ce rle

    actif de ltat se traduit par son intervention croissante dans le processus dindustrialisation car pour ltat

    lconomie doit tre perue comme un moyen de la puissance et non comme une fin en soi. Ensuite, il devrait

    tre capable d uvrer dans la mobilisation force de lpargne pour linvestissement industriel des banques.

    Enfin, il devrait pouvoir exercer une forte contrainte sociale, par exemple des prlvements en guise de taxes

    ou impts sur diverses productions. Lexemple de la taxe foncire japonaise et les

  • 4 0

    exportations agricoles massives de la Russie dans leur processus dindustrialisation ont servi dappuis

    Gerschenkron pour le rle de ltat quil dfinit dans sa thorie.

    II.2.2-2. Ltat protecteur, ltat dveloppeur

    En dehors des prlvements des taxes pour financer en partie lindustrialisation, ltat est lacteur premier

    dans le protectionnisme de lconomie du pays. Cest le cas dans le processus dindustrialisation de

    lAllemagne, o lintgration politique de lempire allemand le conduisit abolir les barrires douanires au

    sein de lunion des tats allemands et adopter une monnaie commune14. Lintgration conomique tant

    complte, la croissance de la demande est favorise et, lindustrie naissante est protge de la concurrence de

    la Grande-Bretagne et de la France. A ce sujet, pour Montouss et al. (2008) : linterventionnisme de ltat

    est particulirement prsent dans le processus dindustrialisation de lAllemagne (Montouss et al., 2008 :

    16). linstar de lAllemagne, les autres pays avancs, particulirement les tats-Unis dAmrique, ont

    galement pratiqu linterventionnisme de ltat dans leur processus dindustrialisation. Les propos suivants

    de Biasutti (2010) illustrent si besoin en tait lampleur du phnomne aux tats-Unis dAmrique:

    le penchant protectionniste amricain, renforc aprs la guerre de Scession, trouve son origine trs tt avec

    Alexander Hamilton, premier secrtaire au trsor en 1789 qui est considr comme le pre de

    lindustrialisation amricaine. En 1890, le tarif Mc Kingley passe une moyenne de 50% sur les produits

    manufacturs. Les mots de Mc Kingley lui mme sont explicites: Nous menons le monde dans lagriculture,

    dans les mines, dans lindustrie; voil les trophes de plusieurs dcennies de protectionnisme (Biasutti, 2010: 27).

    Le protectionnisme amricain se traduit par lengagement des dirigeants tasuniens privilgier et protger

    les productions locales au dtriment des produits trangers. Le sens de cet engagement de ltat fdral est

    exprim par le Prsident Abraham Lincoln lui-mme lorsquil dclarerait : Je ne connais pas grand-

    chose aux droits de douane, mais je sais une chose, cest que lorsque nous achetons des biens

    manufacturs lextrieur, nous avons les biens et les trangers ont largent, mais lorsque nous

    achetons des biens chez nous, nous avons la fois les biens et largent 15. Le Prsident Mac Kinley

    renchrit en dclarant solennellement que chaque produit import est une insulte lAmrique 16. Ces

    propos qui seraient des Prsidents amricains eux-mmes prou