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N°26 juillet 2015 LA FRANCOPHONIE CRÉATIVE

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N°26juillet 2015

La francophonie créative

� juillet 2015 / Francophonie 3�2���Francophonie /juillet 2015�

Sommaire N°26 juillet 2015

14el SeeD

Calligraphiteur

13nteKo Premier album

P2 MichaËLLe Jean EditoP4 DoMiniQUe DeSaUnaY eBookooP5 phiLippe SUinen Forum de LiègeP6 MaMaDoU SaLL Contes de MauritanieP7 KoSSi DoLaGBenoU TICS au TopP8 JoSé Marinho Biennale de VeniseP9 JennY MeZiLe Rue PrincesseP10 aLain nteff GiftedMomP11 M. MBoUGar Sarr FrancophonieP12 r. JacKSon nKoWa Mondoblog

LIèGE 2015 : LE « COUP DE JEUNE » DE LA FRANCOPHONIE !

édito

Les deux mille participants du 1er Forum mondial de la langue française, qui s’était déroulé à Québec en 2012, avaient souhaité se retrouver régulièrement pour éprouver de nouveau la force et la joie que leur confère le partage de cette langue parlée sur les 5 continents. La Fédération Wallonie-Bruxelles

et l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) ont répondu à leur appel et décidé de mobiliser les jeunes franco-phones du monde entier afin qu’ils viennent en Wallonie cet été présenter des projets et des idées innovants, débattre de leur vision de l’avenir et se produire sur scène et dans les rues de la ville autour du thème de « la francophonie créative ».

Jeunesse, innovation, créativité, diversité… comme vous le voyez, les enjeux de cette 2ème édition du Forum mondial de la langue française sont de portée universelle et constituent le cœur de la contribution que la Francophonie veut apporter à la construction d’un monde pacifique, solidaire et préservé des atteintes à l’environnement. La Francophonie institutionnelle s’est donné des objectifs ambitieux en adoptant, lors de ses deux derniers Sommets (Kinshasa et Dakar), plusieurs stra-tégies à moyen terme dans des domaines clés prioritaires : la langue française, la jeunesse, le numérique, l’économie. Elle poursuit également son combat pour la démocratie, les droits de l’Homme, les libertés et le développement durable.Mais nos actions, pour être utiles et efficaces, doivent corres-pondre aux aspirations et s’articuler aux initiatives des citoyens, des militants associatifs, des acteurs des secteurs privés et col-laboratifs, des collectifs de tous ordres ! C’est l’objectif principal de ce 2ème rendez-vous des « sociétés civiles francophones » qui abordera 5 thèmes essentiels : éducation, langue et créa-tivité, économie, culture et industries culturelles et participation citoyenne. Je serai personnellement à l’écoute des témoi-gnages, présentations, questionnements, voire revendications ou interpellations qui émaneront des participants.

C’est aussi sous la pression de la jeunesse que nous y parvien-drons : la Francophonie compte 245 millions de jeunes entre 15 et 35 ans qui ont besoin que nous soyons à leur écoute et qui souhaitent faire partie des solutions d’aujourd’hui, ici et maintenant, sans attendre demain. Je suis très fière parce que la Francophonie, qui confère à la société civile un statut officiel et permanent, est sans doute la seule organisation intergouvernementale qui associe aussi étroitement acteurs gouvernementaux et non gouvernemen-taux. Je me félicite enfin que cette deuxième édition du Forum mondial de la langue française soit, pendant trois jours, à Liège, la vitrine internationale du bouillonnement créatif francophone.

Michaëlle JEAN Secrétaire générale de la Francophonie

P15 J.D. ehUi Jeune entrepreneurP16 roSeMarY naLDen BuskaidP17 KeKeLi tenGUe HackathonP18 JacQUeLine KaLiMUnDa CinémaP19 Ma GLoire BoLUnDa TACCEMSP20 Le cLin D’ŒiL De céLine achoUr

Le Forum Mondial de la Francophonie qui se tiendra à Liège du 20 au 23 juillet prochain aura pour théma-tique « La francophonie créative ». Ce grand rassem-blement de participation citoyenne s’organise selon 5 axes : l’éducation, l’économie, la culture et les industries culturelles, la participation citoyenne et la relation entre langue et créativité. Ce numéro de Francophonie soutient cette rencontre et vous propose un sommaire varié, reflet du bouillonnement créatif au sein de l’espace francophone.

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La plus récente de ces plateformes se nomme eBookoo, littéralement « livre électronique » en lingala, l'une des langues nationales de la République du Congo. Maha Lee Cassy, son créateur, a enrichi cette bibliothèque virtuelle de centaines d’ouvrages principalement libres

de droits. L’internaute peut consulter gratuitement des manuels scolaires, des romans, de la poésie, des essais littéraires mais aussi des bandes dessinées. Le site vous invite également à la conversation : eBookoo est le premier réseau social du continent où l’on discute de ses lectures. Ce jeune entrepreneur du Web prévoit que bientôt « les Africains auront tous un livre électronique en poche ». Il envisage de produire des livres augmentés, «dans lesquels une voix audio ou une vidéo enrichissent la lecture » Quant au modèle économique de la plate-

MAINTENANT, nous ne vivons pas une époque de changement, mais un chan-gement d'époque : le monde commu-nicationnellement atteignable en temps réel, avec cette prodigieuse possibilité de création ou d'intégration dans des

réseaux porteurs de partages d'excellence et d'effet multiplicateur basé sur les différences et donc complé-mentarités entre ses acteurs. MAINTENANT, la créati-vité et son ingrédient majeur, la diversité (en cultures, disciplines, secteurs, formations, etc...) sont facilement atteints grâce aux connections de pair à pair (Michel Bauwens) et à cette plasticité chronologique qui nous fait emprunter des "bifurcations" (Michel Serres) auxquelles nous ne nous attendions pas à l'origine.

FORUM MONDIAL DE LA LANGUE FRANCAISE

EBOOkOO, BIBLIOTHèQUE VIRTUELLE ET RéSEAU SOCIAL

Prendre la créativité comme thème unique revient à susciter des questions et pourrait paraître surprenant. Ici et maintenant, c'est en fait tout le contraire. ICI, c'est Liège, cap Nord de la francophonie et capitale économique, cette région titrée en 2013 comme "District européen de Créativité". ICI, c'est aussi la francophonie qui fait partie de notre identité plurielle, porteuse de valeurs et dépositaire de moyens pour contribuer à les concrétiser (droits de l'homme, état de droit, diversité culturelle, éducation pour tous, démocratie numérique, la créativité comme vecteur important de développement).

Malgré ici ou là, des problèmes de coupures de courant intempestives ou un prix de connexion prohibitif, l’espace numérique de l’Afrique s’enrichit de nouvelles plates-formes qui se consacrent exclusivement à la littérature africaine. Elles permettent aux auteurs de sortir de l’anonymat en diffusant leurs ouvrages auprès d’un large public directement sur la Toile ou sur les tablettes et les smartphones des internautes.

La créativité devient ainsi l'élément décisif en termes de meilleure réponse donnée aux besoins de société, notamment de développement et de dignité, mais aussi, sans nier la liaison, en termes de compétitivité. Et le partage du français, langue de clarté, nous donne un levier exceptionnel dans ce cadre : on sait que le par-tage d'une langue commune amène à faire ensemble en affaires au moins 65% de plus que dans le cas inverse (Jacques Attali). Si la langue française permet de mieux développer les échanges et l'activité scientifique et éco-nomique, cette dernière développe ensuite cette même langue selon le fameux effet "gagnant-gagnant". Avec l'OIF et beaucoup d'autres opérateurs, la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Wallonie présentent un Forum, espace actif et convivial, suscitant et valorisant la créa-tivité ("Créactivez vous!") autour des 5 axes de travail que tout réunit et que rien ne doit séparer: éducation, économie, culture et industries culturelles, langue fran-çaise et créativité, participation citoyenne. Durant la quinzaine précédente, un accélérateur de développe-ment aura renforcé plusieurs projets de jeunes pousses et les entreprises francophones seront mises en contact à l'occasion de Francollia, le 22 juillet. Le Village de l'Innovation favorisera, plus largement, les rencontres

improbables et la formule déjà bien connue de l'hac-katon sera déclinée sous le titre "HackXplor" au

niveau des applications dans l'audiovisuel. Sans oublier la globalisation des modes

d'expression artistique dans le programme culturel. C'est du 20 au 23 juillet et nous

vous attendons déjà à Liège avec l'impatience de l'ami.

Philippe SUINEN Commissaire Général

forme ? « Il sera défini à mesure que l'on verra les choses évoluer » ajoute-t-il.

eBookoo n’est pas la seule initiative du genre en Afrique. Digitalback Books, un site en langue anglaise qui pro-pose, moyennant un abonnement mensuel, la consulta-tion illimitée d’ouvrages numérisés traitant exclusivement de sujets africains. Et Snapplify, un distributeur de livres électroniques sud-africain a lancé la SnappBox, qui permet aux écoles rurales d’accéder à des milliers de manuels, sans passer par Internet, grâce à un réseau Wi-Fi localisé dans un établissement scolaire.

RFI- Dominique DESAUNAY rfi.frwww.ebookoo.fr

� juillet 2015 / Francophonie 7�6���Francophonie /juillet 2015�

LES TIC AU TOP

Je suis un vrai adepte et passionné des TIC*. Très jeune, au cours élémentaire, je bidouillais déjà des appareils électroménagers. En 2011, je me suis intéressé aux énergies renouvelables, guidé par ma formation universitaire la géographie.

Juste après, j’ai suivi un stage en installation et mainte-nance de module solaire afin d’assouvir cette nouvelle passion. Depuis Novembre 2012, j’ai participé à beau-coup d’évènements TIC dans mon pays, ce qui m’a permis de découvrir des mordus du numérique avec qui j’ai partagé et continue de partager mes compétences. Aujourd’hui, à travers mon projet “Energy for People”, je m’implique activement dans la communauté Minodoo qui s’est donnée pour mission d’introduire les nouvelles technologies dans le quotidien de chaque ménage au Togo. Elle regroupe des jeunes autour des valeurs du travail collaboratif, du partage, de l'engagement citoyen mais aussi de l’entrepreneuriat jeune. Nous défendons un mode de travail horizontal et transparent. Ainsi, nous organisons des ateliers itinérants dans les villes, les vil-lages et hameaux du Togo, en apportant la philosophie des logiciels libres et l’esprit “Maker”, tout en impliquant les populations locales dans la résolution des problèmes qu’elles rencontrent au quotidien. Et ce, avec des approches technologiques innovantes et novatrices.

En bref, nous faisons ce qu'il convient de nommer ici de “la technologie porte-à-porte”. Aujourd’hui une dizaine de ‘“makers” porte des projets entrepreneu-riaux dont Yeevii (Agence web pour la conversation digitale), SocialGIS (spécialisée dans la géomatique, dans la production de solutions basées sur la carto-graphie), Energy for People (Energie renouvelable pour tous en Afrique) et notre vision pour ces Startup est de les voir se concrétiser en entreprises..

Kossi DolAgbENoUwww.minodoo.com

*TIC : Technologies de l’Information et de la Communication

Minodoo ("mi no dou" signifie « soyons ensemble », en langue vernaculaire éwé), est une fabrique d’innovations sociales, un tiers-lieu nomade au Togo. Formée de jeunes étudiants à la fibre d’entrepreneurs, ils se sont rencon-trés et partagent la même philosophie imprégnée de la culture du libre et animés par la même préoccupation, diffuser la technologie à tous, convaincus que la jeunesse togolaise doit être impliquée dans la construction de son pays. Biologiste, géographe, cartographe, économiste, environnementaliste, ils sont devenus au fil du temps codeurs confirmés et travaillent avec des outils collaboratifs en ligne, en composant avec un handicap majeur : la connexion Internet. « Notre ambition est de créer un réseau national et de déceler dans chaque ville des ambas-sadeurs de la philosophie Minodoo qui pourront continuer à transmettre et à partager les savoirs ».

JE CONTE, TU CONTES … IL NOUS RACONTEMamadou Sall vient en France pour nous faire découvrir la Mauritanie dans sa diversité. Il aime partager avec le public des histoires entendues depuis son enfance. Chaque retour dans son pays lui permet decollecter et de préserver ce patrimoine. Avec une gestuelle élégante, il conte au rythme du carone (cajon) et des chants pour nous transmettre son désert et ses traditions.

Je suis conteur professionnel et auteur de plusieurs livres pour enfants. Originaire de Mauritanie, je raconte depuis plusieurs années les histoires de mon pays et plus largement de l'Afrique de l'Ouest. Régulièrement je rentre chez moi, à la fois pour recueillir des contes

mais aussi pour raconter des histoires dans les écoles et les centres culturels. Je suis aussi invité dans des festivals de contes ou des Salons du livre en Afrique et au Maghreb et je parcours la France et le monde pour faire connaître ma culture, à travers mes histoires, mes chansons et ma musique, une manière pour moi de participer aussi au rayonnement de la langue française. J’ai d’abord suivi des études d’économie et j’ai com-mencé le théâtre à l'école dans mon village, Keur-Mour au sud de la Mauritanie. Puis, en tant que directeur artistique d’une troupe théâtrale, j’ai écrit et mis en scène en 1997 Un homme qui cherche sa foi, en 1998, Le mariage en pays wolof. En 1999, je me suis mis au conte et perfectionné aux côtés de conteurs profession-nels français comme Marie-France Marbakh, Amédée Bricolo et Claude Alrank. Après plusieurs stages et formations, je me suis professionnalisé et installé en France. Depuis, j’ai créé plusieurs spectacles de contes dont Sur la piste de l'eau, C'est le chameau qui me l'a

dit, Veillée sous l'acacia, Murmures du désert, Kadou Ousmane, La Cuillère sale, Le Miel et l'aiguillon, etc… J’ai aussi exploré d'autres formes artistiques telles les marionnettes et les ombres chinoises et publié plusieurs albums de contes et des documentaires dont La femme poisson, La Fleur, Diakhère, Mauritanie, Quatre balade en Mauritanie, Fatacoumba et les contes de Mauritanie et Ndey Botou. Je travaille actuellement avec le comédien et marion-nettiste Jean-Louis Ouvrard sur un nouveau projet : un spectacle de contes avec des ombres chinoises sur le thème du Racisme, de l'Exclusion et de l'Acceptation de l'autre destiné aux enfants et qui sortira en septembre prochain. A Saint-Nazaire, je travaille depuis l'année dernière avec la maison de quartier Avalix sur un projet qui consiste à aider les personnes immigrées à parler le français, en passant par le conte et la chanson. Un des objectifs de ce travail est de permettre à ces personnes de faire connaître les cultures de leurs pays d'origine. Un recueil de contes et de chansons sera édité à l'issue de ce travail, avec, pour assurer la promotion et la diffusion de ce travail en France.

Mamadou SAll C’est-à-dire

Ateliers nomades organisés par Minidoo

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L’ART SANS FRONTIèRES

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La Rue Princesse » est un spectacle né en 2011 sur lequel nous avons beaucoup travaillé. Dès 2008, Massidi et moi avons commencé à sentir

que quelque chose était en train de se passer à Abidjan. La jeunesse locale, animée d’un désir de vivre et de ne pas se laisser apitoyer malgré les problèmes politiques et la guerre, a créé de nouveaux mouvements. La sape est arrivée, puis le coupé-décalé. Je me positionne comme une artiste engagée, je veux dénoncer ! L’habit et l’argent servent de refuge à la pauvreté. Même si les gens n’ont rien, ils vont se saper en allant dans les friperies, coudre des logos de marque sur leurs habits pour montrer qu’eux aussi peuvent porter du Chanel, du Vuitton, etc.. Tu ne cherches même pas à savoir si c’est du vrai ou du faux : le mec est bien sapé, il est là, il existe. Il résiste à sa manière. En tant qu’auteurs, nous avons conçu le spectacle pour montrer cette révolution et pour que tout le monde sache qu’on en a marre de cette Afrique qui pleure !

Quand le nouveau gouvernement a détruit la rue Princesse, de nombreuses autres rues Princesse ont vu le jour, un phénomène qui montre la frustration des popula-tions. Nous avons constaté que beaucoup de spectacles africains se résument très souvent au malheur. Nous, nous voulons montrer une Afrique qui se révolte et qui se bat en créant de nouvelles formes de résistance. Nous touchons les gens en Europe car ils voient une Afrique qu’ils connaissent peu. On se tue, on se brise sur scène

Evénement interna-tional majeur de l'art contempo-rain, la Biennale de Venise 2015, qui a accueilli pour sa

56ème édition 89 pays, était plus africaine que jamais. Si le pavillon de la France a mis un coup de projecteur à Céleste Boursier-Mougenot et son incroyable installation sonore Rêvolutions qui fait « danser les arbres », cette année pourrait bien être la Biennale pour le continent noir. Sur les 136 artistes invi-tés, 35 sont africains et pour la première fois, le commis-saire de la Biennale de Venise est un Africain lui aussi, né en 1963, à Calabar, au Nigeria. Son nom : Okwui Enwezor. Réputé pour sa vision post-coloniale impitoyable, cet intellectuel de 51 ans a déjà montré sa capacité à réveiller les consciences d’un milieu sous perfusion, notamment à la tête de la direction artis-

tique de la Documenta de Kassel en 2002.

Pour Venise, il a pris comme thème Tous les futurs du monde. Une performance qui se veut épique, fera entendre au public pendant six mois des lectures à haute voix de l'ouvrage majeur de Karl Marx, Le Capital. Tout un symbole, marqué par la pré-sence inédite de ces artistes africains sur la cité lagu-naire. Ils s'appellent Sammy Baloji, Fatou Kandé Senghor ou Barthélémy Tuogo. Ils débarquent du Cameroun, du Sénégal ou de la RDC. Leurs créations souvent sati-riques visent les soubresauts de nos sociétés et se jouent des tensions identitaires à l’échelle planétaire. Elles sont au centre de la double expo-sition à l'Arsenal et au pavillon international des Giardini. Moins connu, mais tout aussi engagé, le collectif nigérian The Invisible Borders explore à travers la vidéo la notion de frontière et son impact sur l'histoire de l'Afrique. Pour le commissaire nigérian, il est question de mettre en pers-pective une esthétique afri-caine en pleine mutation.

RFI- José MARINHo rfi.frBiennale de Venise jusqu’au 22 novembre 2015

« La rue Princesse » est un spectacle de la compagnie N’soleh chorégra-phié par Jenny Mezile et Massidi Adiatou, qui recrée l’ambiance énergique et décalée d’un « maquis », ces bars populaires qui font vibrer les nuits d’Abidjan. Jenny Mezile, originaire d’Haïti, revient sur la naissance de ce projet et sur son engagement en tant que chorégraphe contemporaine.

en dansant. Avant de partir en tournée, je dis toujours aux danseurs : « On part en guerre ! ».

Une compagnie de 13 danseurs dont 12 issus de milieux défavorisés parmi lesquels certains n’ont pas été à l’école et que nous essayons de scolariser. La compagnie ne les rémunère pas car nous ne sommes pas subventionnés. Pourtant, ils sont là, ils croient en nous, et ils s’engagent. Ce spectacle surprend, même en Afrique. Mes amis chorégraphes ont le réflexe de créer ce que l’Europe attend d’eux. Moi, j’ai dit : « Les gars, non ! On ne pourra jamais faire du Pina plus que Pina, jamais faire du Alvin Ailey plus qu’Alvin Ailey ! Ne subissons pas : réagissons ! » Nous avons vraiment l’impression de lancer un mouvement, de permettre aux Africains de danser comme ils ont envie de danser, et non comme on leur dit de danser.

Je suis née en Haïti, un pays qui a une histoire très forte. Nous sommes le premier peuple noir indépendant et les seuls à n’avoir jamais perdu cette indépendance. C’est une petite fierté pour beaucoup d’Haïtiens et pour moi-même. Je sais qu’aujourd’hui Haïti peut s’en sortir, face à un Occident très puissant, par le biais de belles créations. J’ai grandi avec un « besoin d’Afrique » depuis toute petite. Je me suis mise en quête de mes racines dès mon arrivé en France en 1990. Je parle d’Haïti, je marche avec Haïti mais je me considère avant tout comme une noire, une négresse. Et j’en suis fière ! ».

Entretien RFI : Mb avec Jenny MEZIlE

LA RUE PRINCESSE

La Biennale de Venise, fondation italienne créée en 1893, organise différentes manifestation d'art contemporain, de danse, de musique, d'architecture et de cinéma, et attribue des Lions d'or pour chaque manifestation. La Biennale d’art contemporain a ainsi remis un Lion d’or à l'artiste ghanéen El Anatsui. Après le photographe malien Malick Sidibé en 2007, il est le deuxième Africain à être récompensé pour l'ensemble de sa carrière. Ses tapisseries métal-liques tricotées de capsules aplaties qui peuvent atteindre 16 mètres de haut, lui ont permis d’acquérir une notoriété internationale, sans quitter l’Afrique.

Céleste Boursier

Mougenot

Barthélémy Tuogo

Samy Baloji

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POUR UNE FRANCOPHONIE DéCENTRéE

GIFTEDMOM

Lors d’une visite de courtoisie à l’un de mes amis médecins dans un centre de santé à Bambalang, petit village situé dans la région du nord-ouest, j’ai constaté que la mortalité maternelle et infantile

existaient encore dans notre société où les femmes enceintes et les mamans ignoraient les ressources médicales mises à leur disposition (vaccins gratuits, moustiquaires gratuites…) pendant la grossesse et après l’accouchement. J’ai décidé avec lui, d’allier les nouvelles technologies à la médecine pour sauver des vies en créant une application pour sensibiliser, éduquer, informer et accompagner les femmes enceintes et les mamans. Le projet a pris forme en novembre 2013 sous le nom de GIFTEDMOM, une entreprise sociale qui développe des technologies à moindre coût pour améliorer la santé maternelle au Cameroun, en particulier celle des femmes deszones rurales, avec les risques liés aux grossesses non suivies mais aussi celle des enfants en rappelant l’importance des vaccins de 0 à 5 ans ou l’offre de ressources médicales. Les femmes de la région du Nord-Ouest, Bambalang, Nschang, Bafut … en ont fait l’expérience.

Notre projet utilise un SMS automatisé et un service vocal qui envoie gratuitement des messages d’éducation, d’information et des rappels aux femmes enceintes sur la prochaine date de leur visite prénatale ou celle de la vaccination de leurs enfants. Ces messages

Qu’on (se) le rappelle : la Francophonie donnera la pleine mesure de sa formi-dable énergie lorsqu’on en cherchera – en vain – le centre. Evidemment,

l’épithète de « francophone » est problématique. Elle semble de plus en plus désigner, implicitement, tous les locuteurs francophones non-français. Il y aurait ainsi, d’un côté, la France, et, de l’autre (mais lequel ?), la Francophonie. Ce hiatus n’est pas seulement absurde, il est aussi dangereux. Car de cette sépa-ration tacite dont les justifications m’échappent, me paraissent naître deux dangers majeurs qui pourraient menacer la Francophonie : l’arrogance et le ressentiment. Arrogance, d’abord, d’une France qui, au centre de la Francophonie, distribuant en son sein les bons et les mauvais points, ne se rendrait pas compte qu’elle aurait depuis longtemps perdu la vibration de la collectivité ; et ressentiment, ensuite, des populations d’ « autres espaces francophones » qui, rejetées malgré elles dans une sorte de périphérie, ressasseraient, dans un mal-heureux réflexe, les vieux démons d’une Francophonie-instrument-néo-impérialiste-de-la-France, d’une langue française tueuse de leurs langues nationales. Nul n’y gagne. Il se peut qu’à une époque les choses fussent ainsi, et que la France apparût comme l’unique cœur d’une Francophonie qu’elle dirigeait sur tous les fronts, mais à laquelle, paradoxalement, elle n’appartenait pas vrai-ment. Une telle logique, qu’elle ait prévalu ou qu’elle vaille encore, n’est en tout cas plus possible: la Francophonie

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Inscription mères-enfants au district de santé de Bambalang

Alain Nteff et son équipe

Mohamed Mbougar Sarr, jeune Sénégalais de 24 ans, est le lauréat cette année du prix Ahmadou-Kourouma, décerné le 1er mai à Genève, pour son livre "Terre Ceinte". Ce roman se déroule dans un pays inconnu que l’on devine être le Sahel. « Bien sûr, le Mali est frontalier de mon pays. J'ai toujours eu peur des frontières poreuses au Sahel. C'est, selon moi, un problème majeur pour la stabilité en Afrique de l’Ouest ». Mohamed avait déjà reçu en 2014, le Prix Stéphane Hessel de la Jeune écriture francophone, créé à l’initiative de RFI et de l’Alliance francophone pour sa nouvelle « La cale ». Il vient éga-lement d’être classé 4ème au Top 30 des talents d’avenir bâtisseurs d’Afrique francophone par le magazine Forbes Afrique.

Alain Nteff est un jeune entrepreneur camerounais, originaire du nord-ouest du pays, sorti de l’Ecole Nationale Supérieure Polytechnique de Yaoundé et diplômé en télécommunications. Il a su trouver dessolutions au problème de mortalité maternelle et infantile en créant une application mobile de santé. Cette appli, sortie le 29 janvier dernier propose un suivi prénatal et postanatal couplée avec une hotline.

a des centaines de cœurs, dont celui de la France. Et chacun de ces cœurs possède un rythme différent, une pulsation singulière; chacun d’eux crée et recrée en permanence la Francophonie, lui donne vie - et sens. La dialectique du centre et de la périphérie n’est plus possible. Et si la Francophonie doit être un cercle, que chaque pays francophone en soit le centre potentiel. Francophonie : expérience centrifuge. Sans centre. Avec un centre partout.Qu’est-ce pour toi, ami francophone, que la langue fran-çaise et la Francophonie ? La voilà, l’étrange beauté de la Francophonie : une question et des milliers de réponses possibles. Qu’une seule d’entre elles vienne à nous manquer, et c’est toute la Francophonie qui s’en trouvera dépeuplée.

Mohamed Mbougar SARR Ecrivain.

sont écrits en français, anglais, pidgin et en fufuldé et enregistrés en langue maternelle, selon la zone dans laquelle elles se trouvent, pour celles qui ne savent pas lire ou écrire dans les langues officielles. Pour souscrire, il faut envoyer MOM au 8006. Elles peuvent aussi poser des questions relatives à leurs problèmes de santé en envoyant par SMS, MOM, suivi de la question au 8006 et recevoir l’avis d’un médecin. En moins de 2 ans, GiftedMom a eu un impact sur la vie de plus de 2800 femmes enceintes et nouveau-nés dans 15 villages des régions du sud-ouest, nord-ouest et du centre, en augmentant de 20% en moyenne le taux de visites prénatales dans les zones concernées. Nous avons formé plus de 200 élèves, médecins et travailleurs volontaires en collaboration avec 70 centres de santé sur une période d’un an. Nous venons de lancer une campagne visant à atteindre plus de 50 000 femmes en milieu rural en réponse aux objectifs du Millénaire des Nations Unies pour le Développement fin 2015. Nous prévoyons de traduire nos messages dans les langues traditionnelles et notre but est d’atteindre plus de 5 M d’abonnées dans les pays d’Afrique centrale où le taux de mortalité maternelle et infantile reste le plus élevé du continent. Enfin, nous avons mis sur pied une stratégie de partenariat avec l’OMS, “Master Card Foundation” et la “Mobile Alliance for Maternal Action” , afin de faire de notre rêve une réalité. Nous avons besoin de ressources financières de plus de 250 000 dollars pour étendre le projet à toutes les régions du Cameroun. Nous croyons enfin que nos idées et nos technologies vont complé-ter les efforts mis en place par le gouvernement camerounais et la communauté internationale pour réduire le taux alarmant de mortalité en Afrique et dans le monde »

Alain NTEFF (GiftedMom récompensée en 2014 par Anzisha Prize et “Master Card Foundation). www.giftedMom.org

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NTEkO « LA SOURCE »

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Je chante ma vie et ma culture parce que je suis fière de mes origines. Et ma sincérité a su toucher le public. Ici sur le continent mais aussi en Europe où j’ai

fait une tournée en France et en Allemagne. Je me disais, ils ne me connaissent pas, ils ne comprennent pas la langue dans laquelle je chante. Mais comme par magie, quand j’arrive sur scène, le public essaie de capter le message que j’essaie transmettre. Il est très chaleureux, et je sens que le courant passe entre nous. A Berlin, où ils ne comprenaient pas le français et comme moi je ne parlais pas l’anglais, je suis des-cendue de la scène et après plusieurs rappels, je suis remontée et j’ai chanté à capella pour leur faire plaisir.

Nteko vient de terminer son premier album. Pour le réaliser, elle a fait appel à la générosité de ses admirateurs en utilisant la production participa-tive pour récolter assez d’argent pour faire un CD, « Le fruit d’un travail bien mérité Je l’ai appelé Le cri, un cri de bonheur, un cri de joie, parce que j’ai réussi en trois ans ce que d’autres artistes afri-cains n’osent même pas espérer en 10 ou 15 ans. Moi, après avoir chanté sur scène quelques années, j’envoie une maquette à RFI et je suis sélectionnée à mon grand étonnement. C’est mon manager qui m’a poussée à concourir et je me suis retrouvée finaliste du concours Découvertes 2013, j’ai reçu un TamTam d’or, je fais une tournée en Afrique et voici mon album terminé. Je vais toujours un peu plus vite ! » Mon nom signifie la source, et la source, c’est l’eau, la vie, l’espoir, l’amour. Avec ma petite taille et ma forte voix, ils se disent qu’ils ont envie de boire cette eau pour vivre mieux. Je chante en lari, en lingala, en français, demain peut-être en anglais pour que ma musique soit entendue partout … !

Entretien RFI : VS avec Nteko Nteko est présente dans le CD 2 « Nouveaux sons » de l’OIF

Nteko écrit ses textes et ses musiques, ce qui n’est pas si courant pour une chanteuse africaine. Originaire du Congo, c’est là qu’elle vit et qu’elle compose. C’est là aussi qu’elle trouve son inspiration : dans sa vie de tous les jours, dans la tradition et dans l’histoire de son pays.

Mon blog porte un nom atypique pour un espace d'expression essentiellement francophone. Il s'intitule "From Douala With Love". Sur ce blog que je tiens depuis bientôt cinq années, je rédige des chroniques qui peuvent avoir un lien avec tous les sujets, partant de la vie quotidienne au

sport, en passant par la politique, la religion, la culture et l'actualité internationale. Mais la plupart du temps, les sujets traités sur ce blog tournent autour de la ville de Douala, dont je veux être l'un des ambassadeurs. J’y utilise un langage caustique et plein d'humour tout en traitant de sujets parfois graves.

L'utilisation de la langue française permet à ce blog d'avoir une portée universelle car il est lu sur tous les continents. Le français n'est toutefois pas la seule langue qui y est présente. J'y introduis quelques fois le "camfranglais", qui désigne le jargon urbain très largement utilisé dans mon pays, le Cameroun. Le camfranglais dans son utilisation met ensemble des termes du français, de l'anglais et des langues vernaculaires. Ce saupoudrage permet au blog d'avoir sa propre identité.

Cet espace d’expression a révélé chez moi des talents d’écriture et d’analyse dont je n’avais pas forcément conscience. En étant héber-gé sur la plateforme Mondoblog de RFI, ce blog m’a permis d’ac-quérir une certaine visibilité et m’a ouvert des opportunités. Grâce

à lui j’ai pu voyager. Il m’a aussi offert le privilège de travailler avec l’OIF lors des VIIe Jeux de la francophonie. Pour finir, il m’a permis de m’insérer dans le microcosme encore en développement des acteurs du web à Douala.

Au-delà du blog, je nourris plusieurs initiatives. Par exemple, je tra-vaille sur un projet d’outil web qui améliorera l’accès des étudiants de l’Université de Douala aux informations académiques. J’ai aussi le désir de publier un ouvrage dont le personnage principal sera la ville de Douala.

René Jackson NKoWA Ziad Maalouf présente sur RFI l’Atelier des médias, une émission de radio et un réseau social traitant des évolutions et révolutions dans le monde des médias : Marie-Catherine Beuth du blog Etreintes digitales pour analyser l'actualité des médias, Francis Pisani qui porte son regard savant sur l'évolution du monde numérique et enfin, avec la commu-nauté des blogueurs francophone et Mondoblog, et les com-munautés de blogueurs arabophones Libyablog et Arablog.http://atelier.rfi.fr/

Diffusions le samedi à 08h10 TU et 23h10 TU vers le monde et Paris (sauf Afrique), et 14h10 TU vers l'Afrique

DOUALA ET MOI

Ziad Maalouf avec les participants et amis

de Mondoblog, l’émission de RFI

14���Francophonie /juillet 2015�

“LE CALLIGRAFITEUR”

Que ce soit dans les rues de Melbourne ou de New-York, que ce soit sur les toits de Mykonos ou sur les ponts de Paris, la pratique du calligraffiti a fait de moi le spectateur et l’acteur privilégié de fabuleuses histoires humaines. Malgré

les stéréotypes dont il est affublé, mon art a toujours eu pour vocation de rapprocher ceux qui s’opposent de par leurs cultures, leurs âges ou leurs croyances. Je suis né et j’ai grandi à Paris. À 18 ans, guidé par le désir de me réapproprier mes origines, j’ai décidé d’apprendre l’arabe. De là, le choix inconditionnel de ne peindre qu’en arabe s’est imposé de lui-même. D’ailleurs, les réactions que suscite mon parti pris me confortent dans ce choix. Même si, à priori, certains y voient un rejet de l’autre, je pense qu’on peut apprécier une calligraphie arabe sans pouvoir la déchiffrer. Au même titre qu’on peut apprécier une musique en langue étrangère. Cette démarche est en fait une invitation à découvrir ma langue, ma culture et mon art.

C’est à Rio de Janeiro que j’ai traduit et peint un poème de Gabriella Torres Barbosa afin de rendre hommage aux

Mon aventure avec l’informatique com-mence très tôt en classe de 2nde scienti-fique où j’apprenais le langage Turbo Pascal

avec un professeur de mathématiques français. Une fois le Bac scientifique en poche, je me suis naturellement orienté vers une filière informatique. Après un BTS en informatique de gestion, je décroche mon diplôme d’ingénieur en sciences informatiques. Je découvre alors le monde rural à travers un projet sur lequel je suis chargé de la collecte et de l’analyse de données ; je travaille 3 ans sur des projets agricoles où je développe des solutions pour accompagner la réali-sation des projets. Je découvre ainsi les populations du monde rural avec leurs joies et surtout leurs problèmes.

Je décide donc en 2014, après la crise post-électorale de mon pays, de me lancer dans l’entrepreneuriat web. Je choisis les TIC au service du dévelop-pement en milieu rural et je réfléchis à mettre en œuvre des solutions desti-nées à résoudre les problèmes de ces populations. Les débuts sont difficiles, plus de salaire, plus d’amis, plus de sorties, plus de maison… Avec foi, passion et détermination, je continue à m’investir et à me former. Je rencontre des personnes au sein des associations comme Akendewa (ONG pour l’ému-lation des TIC en Afrique), je participe à des rencontres comme le Barcamp, les matinées Kacou Ananzé où on débat sur des thèmes liés au TIC.

Je sors en 2012, Môh Ni Bah (Félicitation pour le bébé), une plate-forme de déclaration des naissances

en milieu rural via SMS pour lutter contre le fort taux d’enfants non décla-rés à la naissance. Avec ce projet, je remporte ma première distinction, le Carrefour des Possibles Afrique à Dakar, suivie d’invitations pour des conférences et des rencontres à tra-vers le monde. Môh Ni Bah est lau-réate en 2014 du prix Startup lors du Forum Investir en Côte d’Ivoire organi-sé par le CEPICI (Centre de promotion des Investissements en Côte d’Ivoire). Il bénéficiera d’un accompagnement pour son implémentation.

En avril 2014, je sors le prototype de Lôr Bouôr (Excellente plantation) une plateforme de solutions au ser-vice d’une agriculture moderne et efficace ; il est couronné par le prix FIRE Africa organisé par AFRINIC, l’autorité de gestion des ressources Internet en Afrique. Lôr Bouôr va donc bénéficier d’un accompagne-ment en accélération de projet au sein du Fab du groupe Orange en Côte d’Ivoire. Avec un bilan plus que positif, nous sommes devenus une startup en pleine expansion avec une équipe de jeunes gens dynamiques qui travaillent jour et nuit pour produire des innova-tions propres à l’Afrique. Je crois en l’Afrique, je crois en l’Entrepreneuriat et pour moi, la question de l’emploi jeune et de l’évolution de nos pays passe aussi par la mise en place d’un environnement propice au développe-ment et à l’émergence d’une nouvelle classe de jeunes entrepreneurs avec des solutions propres et adaptées aux réalités de nos populations.

Jean-Delmas EHUI www.ict4dev.ci www.lorbouor.org

� juillet 2015 / Francophonie 15�

eL Seed, ( ce surnom provient d’un tag qu’il écrit quand il a 16 ans et étudie le Cid) né de parents tunisiens, est un graffiteur français mélangeant la calligraphie arabe et le graffiti. Ses fresques expriment « le besoin de vivre en paix tout en respectant les autres ». En septembre 2012, il est invité à peindre sur une face du minaret de la mos-quée principale de Gabès un graffiti reprenant un verset du Coran sur l'enseignement de la tolérance.

habitants de la favela de Vidigal. En même temps que je peignais dans une langue que seul moi pouvais com-prendre, je pouvais sentir derrière moi les regards inter-rogateurs. Mais lorsque j’en ai expliqué le sens, le doute s’est dissipé et a laissé place à de la reconnaissance. Les habitants ont pu alors s’approprier le message. J’ai aussi eu l’opportunité de peindre sur le seul mur de brique d’un bidonville de Cape Town, celui de l’école primaire. J’y ai inscrit une citation de Nelson Mandela : “Cela semble toujours impossible, jusqu’à ce qu’on le fasse.” Un homme de la communauté de Philippi m’a demandé pourquoi je ne peignais pas en anglais. Je lui répondis que j’aurai trouvé sa question plus pertinente s’il m’avait demandé pourquoi je ne peignais pas en Xhosa. Ces multiples expériences m’ont convaincu que la calligraphie, de par sa beauté intrinsèque, n’a pas besoin d’être traduite pour toucher l’autre. Elle nous renvoie à ce qu’il y a de plus humain en nous. À chaque fois que je peins dans un nouveau lieu, j’adopte la même méthodologie rigoureuse. Je m’im-prègne de la culture locale. Je lis sa poésie. J’écoute ce que ses grands hommes ont pu en dire. Puis je tire de ce patrimoine local ce qu’il y a de plus universel, afin de tou-cher le plus grand nombre. Mon art n’est qu’un prétexte à la rencontre. Bien que ce soit moi qui m’invite chez eux pour y laisser une trace de mon passage, chaque mur que je peins est le souvenir gravé dans ma mémoire d’une rencontre aussi intense qu’éphémère. Chaque courbe que je trace est la continuité d’un trait de visage, d’un sourire, d’une main tendue vers moi.

el SEEDelseed-art.com

LES TIC DANS LE MONDE AGRICOLEPlus connu dans la "webosphère" ivoirienne sous le pseudo de Delmo ou Delmo225, cet ingénieur informaticien, entre-preneur social, développeur web et mobile, Internet Strategist, Consultant formateur en TIC et développement rural a fait ses preuves, récompensé par de nombreux prix et toujours au service de son pays, la Côte d’Ivoire

Jean-Delmas Ehui, lauréat et conférencier

Ruelle de Djerba

Douz aux portes du

Sahara

Mur abandonné sur la plage

� juillet 2015 / Francophonie 17�16���Francophonie /juillet 2015�

UN AIR DE VIOLON à SOWETOEn Afrique du Sud, dans la banlieue de Johannesburg, le « Buskaid Soweto » est une école de musique qui enseigne le violon à des jeunes au cœur du ghetto. Cette info nourrit un exercice d’écoute proposé par le site de RFI Langue française aux professeurs qui enseignent le français. à l’aide d’une documentation multimé-dia, accompagnée de suggestions pédagogiques et d'exercices, des parcours progressifs de compréhension orale sont proposés pour se familiariser avec le français parlé. Un court reportage autour de l'actualité culturelle forme le point de départ d'un jeu de pistes sonore allant du repérage à la compréhension du sens. Et pourquoi pas au travers de la musique, la musique n’est-elle pas un langage universel, et de la musique classique en particulier, avec ce reportage de la correspondante de RFI en Afrique du Sud.

Cette expérience lancée au 1er Forum de la langue française a fait le pari de proposer à des jeunes d'innover pour faciliter la coproduction et la diffusion audiovisuelles. Et ce, afin de mettre au point une application audiovisuelle dans le domaine de l’éducation, de la fiction, du documentaire et du jeu. Le Festival hackXplor constitue la rencontre entre jeunes de 18 à 35 ans, développeurs, concepteurs, réalisateurs, graphistes... et mentors/professionnels de l’audiovisuel. L’occasion de confronter les meilleurs développeurs originaires de la francophonie, de montrer leur potentiel aux professionnels de l’audiovisuel, aux entreprises et institutions internationales présentes et de les faire connaître à travers le monde.

C’est un orchestre qui se produit comme tous les orchestres, dans une salle et devant un public. Mais la salle n’est pas conforme aux normes puisque c’est l’école de musique du ghetto et le public n’est pas vraiment connaisseur des grandes œuvres

du répertoire. Peu importe, ces concerts proposent une évasion face à la misère, au sida et à la violence. Ce sont 90 jeunes parmi les moins privilégiés qui viennent ici apprendre le violon, l’alto, le violoncelle ou la contrebasse. « Quand j’écoute cette musique, je peux me détendre » confie une des jeunes élèves, « et quand je joue, je res-sens une immense joie et une certaine sérénité ». A l’origine de cette initiative, Rosemary Nalden, une altiste anglaise qui a créé Buskaid en abandonnant sa carrière dans un grand orchestre européen pour venir enseigner à Soweto. « Ce qui m’a fait rester en Afrique du Sud, c’est que j’ai détecté ici un immense appétit pour la musique classique qui donne lieu à des interprétations telle-ment intenses que j’en ai parfois les larmes aux yeux ». Les élèves les plus brillants quittent le pays et trouvent J

e me présente, je suis auto-entrepreneur, co-fondateur de GDCOMMS, une jeune entreprise spé-cialisée dans les pres-tations de services en

communication audiovisuelle. Pour ma participation au Forum, je tra-vaille en binôme avec Elodie Ebo Akotossode. Fervents de la culture collaborative, nous croyons forte-ment que, de la combinaison des talents et des compétences, naissent de nouvelles idées susceptibles de connaître un développement industriel et/ou commercial.

Le HackXplor de Dakar a été l’oc-casion d’une première collabora-tion et elle se poursuit aujourd’hui avec la volonté manifeste de tra-

une place dans des conservatoires huppés en Europe, comme ce jeune homme de 20 ans qui se démène pour trouver des fonds et aller étudier en Angleterre : « Ce qui compte pour moi, c’est de partir à Londres où je viens d’être accepté à la Royal Academy of Music. J’ai tellement travaillé pour ça, je joue au moins 4h par jour ! » Le Buskaid effectue aujourd’hui des tournées dans le monde entier et a déjà enregistré plusieurs CD de musique baroque. Mais ces jeunes s’inspirent aussi de leur musique, celle des townships : « Pour jouer juste avec nos émotions au regard du monde qui nous entoure, avec la musique de la kwela qui vient de la lutte pour la liberté à Soweto et qui nous a vu grandir ». Selon le Gramophone Magazine, titre de référence de la musique classique, le Buskaid a été désigné comme l’un des 10 orchestres les plus « enthousiasmants » au monde !

RFI- Vicky SoMMETRfi.fr / Onglet Langue françaiseBuskaid.org.za/

vailler en accélérateur de projet dans le cadre de la rencontre de Liège. Mon projet est dénommé « Imagotext », une application destinée, d’une part, à la production d’infogra-phies pour une communication attrac-tive et, d’autre part, à l’enseignement de la langue française par l’utilisa-tion des images. J’ai eu l’occasion de le "pitcher" pour la première fois à Dakar. Le projet consiste à développer un programme capable de générer de façon intuitive des images/infographies à partir de textes. L’utilisateur pourra le faire à partir d’un simple clic et avec des textes qu’il aura insérés dans une zone de texte. Concrètement, il s’agira pour l’utilisateur d’insé-rer dans l’application une phrase qui sera automatisée en illustration.

Le programme fera donc appel à des ressources graphiques dans une base de données pour réaliser l’illustration. L’idée essentielle est de partir de mots pour aboutir de façon automatique à des images et les textes seront interprétés graphique-ment par le programme. En tant qu’initiateur du projet « Imagotext », mon rôle consis-tera d’une part à profiter de l’accé-lérateur de projet, c'est-à-dire de bénéficier de son environnement collaboratif pour approfondir et vali-der nos idées, de travailler sur la communication autour du projet et sur la détection d’opportunités et de créneaux porteurs.

germain Kekeli TENgUE

HackXplor

� juillet 2015 / Francophonie 19�

DIREcTIoN DE lA coMMUNIcATIoN OIF - Isabelle Finkelstein - France Médias Monde - Françoise Hollman réDaction en chef Vicky Sommet assistée de Maud Busson créDitS-photo Gettyimages / Cyril Bailleul - OIF / Wilfrid Massamba / eLSeed / Graham de Lacy / Rémy Haubert /Cathy Sutcal / Minodoo / José Marinho - RFI / Dieter Hartwig / GiftedMom /Jackson Nkowa /Manon Mella / Daouda Coulibaly / Annabelle Lourenço / Christian Lutz / TACCEMScontact [email protected] réaLiSation Didier Gustin iMpreSSion éOLE La Station graphique - 93165 Noisy-le-Grand cedex

18���Francophonie /juillet 2015�

LE TACCEMS, UN THéATRE PORTE-PAROLE

L’AFRIQUE SUR GRAND éCRAN

J'ai commencé par une expérience formidable. Une société sud-africaine m’a recrutée après avoir vu mon premier documentaire historique, Homeland, une réalisation qui est le résultat de

8 ans de recherches dans les archives de mon pays. Engagée pour fabriquer une série TV, Imagine Africa, avec des partenaires africains et américains, sera dif-fusée très largement (35 chaînes publiques africaines) et m’a vraiment mis le pied à l’étrier, à cheval entre documentaire, jeu, télé-réalité et traduit en zulu, anglais, français, swahili et kinyarwanda. Un travail très ancré dans les réalités africaines et avec un regard aigu sur la jeunesse.

Après les courts-métrages, les documentaires, les séries, le montage, la suite logique ce serait les récompenses, les prix, les participations aux festivals et des diffusions à l’international. Avec toujours en toile de fond le Rwanda?Mon choix, c’est de tourner beaucoup, si possible chaque année. Je n’y arrive pas encore mais je m’efforce d’y parvenir malgré les contraintes financières, artis-tiques, scénaristiques, le choix des acteurs, des décors, des costumes. C’est la troisième fois que je tourne au Rwanda, et ici, je suis à ma place. je suis rwandaise

Jacqueline kalimunda a fait des études de gestion au Rwanda avant de s’en éloigner. Francophone, parlant plusieurs langues et avec un attachement particulier à la culture française, elle est passionnée de culture, de musique, de théâtre mais c’est le cinéma qui l’attire quand elle découvre comment on fabrique un film. Après avoir vu Shining à l’Institut français de kigali, elle continue son travail d’écriture commencé déjà à l’adolescence et trouve que le 7ème art allie à la fois travail et plaisir.

TACCEMS signifie Centre de création, d’échanges et de montage des spectacles. Créé en 1995 sous l’impulsion de deux jeunes comédiens, l’objectif était de promouvoir le théâtre. Le groupe s’engage dans un théâtre offensif qui dénonce les maux de la société, avec des spectacles comme Héritage, Demain, un autre jour, Six jours après. En 2000, le groupe est suspendu sur toute l’étendue du pays occupée par le Rassemblement Congolais pour la Démocratie car cette dernière pièce dénonce sans complaisance les méfaits de la rébellion sur la vie sociale.

et l’histoire du Rwanda est prégnante… moi je peux la raconter mieux que quiconque. J’ai une approche émo-tionnelle qui m’est très personnelle.

Aujourd’hui, vous êtes à Kigali, que tournez-vous ?Je travaille sur un projet transmédia, documentaire, web-docu et tablettes, sur le Rwanda au 21ème siècle. Avec Celib Rwandais, je vais montrer comment de nouvelles générations prennent leur destin en main en utilisant les outils de notre temps, malgré le poids du passé et les défis du présent. Parler d'amour au Rwanda c'est la possibilité de raconter des histoires proches des gens en posant une question : comment s'aime-t-on après un génocide ? Les Africains ont investi les nouvelles technologies, il faut que les créateurs et les producteurs d'histoires africains investissent aussi ce domaine. Ils se plaignent souvent qu'on ne parle que de maladie et de pauvreté dans les médias occidentaux. Ce projet, qui sera vu partout dans le monde est l'occasion de soute-nir une nouvelle vision moderne, belle et émouvante de mon continent ».

Entretien RFI – VS et Jacqueline KAlIMUNDA

Deux ans après la réunification du pays, le groupe reprend ses activités avec une grande ambi-tion, la professionnalisation du métier, en étant convaincu qu’il est possible, dans un pays où le théâtre est relégué au dernier plan, de vivre

de son métier. En 2005, la Belgique lance le programme YAMBI Congo pour amener 150 artistes en Belgique. Alors que tout le monde se bat pour se rendre en Europe, le Groupe TACCEMS Asbl surprend les délégués du Centre Wallonie-Bruxelles, en proposant d’acquérir et de réhabili-ter un bâtiment pour en faire un lieu culturel. Le projet est accepté et c’est la création de l’Espace Culturel NGOMA à Kisangani. Commence alors un véritable épanouissement des activités du groupe avec séminaires, ateliers et forma-tions pour la mise à niveau des artistes de la ville. Le Groupe TACCEMS Asbl a exécuté plusieurs projets culturels, créé plusieurs spectacles - 80 % de ses créations sont écrites et mises en scène par ses membres - et ses textes traitent du vécu quotidien de la population, de Bras tendu en 1996 à Serment d’hypocrites en 2012. Un théâtre qui se veut militant avec un regard critique sur la société, Un enfant, c’est pas sorcier avec l’appui du théâtre de poche de Bruxelles (Campagne contre le phénomène enfant sor-cier en 2008) Tous en scène pour la paix avec l’appui du

théâtre de Bruxelles (Campagne contre l’enrôlement des enfants dans les groupes armés en 2005), MONUC et la paix en question (Vulgarisation du mandat de la MONUC en 2000), Résolution des conflits par le théâtre (Avec l’appui de l’Ambassade de Grande-Bretagne en RDC en 2009), Implication des femmes dans la gestion de la chose publique et violences faites aux femmes (Projet exécuté sur le fleuve Congo en 2007). En 2008, le groupe lance le concept de décentralisation culturelle en mettant en place son projet de pôle culturel pour l’est de la région. Depuis 2009, le Groupe TACCEMS asbl est soutenu par Africalia Asbl, une asbl belge et reçoit également les appuis de la WBI. Enfin, le festival NGOMA créé en 2010 et destiné en priorité aux compagnies de l’est de la RDC, du Rwanda et du Burundi, est un moment privilégié qui permet aux diffé-rentes compagnies culturelles de se retrouver, d’échanger et de présenter leurs œuvres. .

Ma gloire bolUNDAGroupe TACCEMS Asbl

Les membres de TACCEMs

Les artistes en plein travail

LE CLIN D’ŒIL DE CéLINE ACHOUR *

Céline Achour est artiste-peintre. Après des études de gestion, une première carrière dans la protection sociale et une reconversion en architecte d’intérieur, elle se décide enfin en 2013 à vivre pleinement sa passion. Auteure d’illustrations, c’est à la peinture qu’elle consacre maintenant l’essentiel de son temps. www.facebook.com/c.achour.peintre

« C’est par le français que j’ai parcouru le monde ». Dany Laferrière

Dany Laferrière, écrivain et scénariste d’origine haïtienne, a été élu à l’Académie française le 12 décembre 2013