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Texte proposé par le pôle des réformateurs Poursuivre dans la voie de la réforme Paris, le 25 mai 2014 Avec une croissance nulle en France et faible en zone euro au premier trimestre, la reprise espérée, même progressive, n’est pas au rendez-vous. Sans l’expliquer totalement, cette atonie de l’activité n’est sans doute pas étrangère au triste résultat des élections européennes marquées par une abstention record, la poussée des populismes et le recul des partis de gouvernement, le tout sur fond de découragement et parfois de colère. Ce contexte va, sans nul doute, raviver le débat sur la politique économique française et compliquer singulièrement la poursuite, si elle a lieu, de la construction européenne. Nous sommes donc à un moment crucial du débat politique dans lequel nous voulons nous inscrire en faisant valoir notre part de vérité. Sur le plan intérieur, il est probable que les Cassandre de tous poils vont redoubler de critiques : une générosité coupable à l’égard des entreprises, mal orientée de surcroît comme en témoignerait le CICE présenté comme insuffisamment sélectif dans la baisse sectorielle des charges. C’est là oublier qu’en ne réservant pas le CICE aux branches exposées à la concurrence internationale, notre gouvernement à fait le choix de l’emploi, tant il est vrai que c’est sur les bas salaires que les diminutions de charges sont les plus efficaces. Une politique économique déséquilibrée, trop restrictive dans ses choix budgétaires, faisant la part trop belle à l’offre au détriment de la demande… Bref, pour les contempteurs de la politique suivie, le salut viendrait, pour les plus modérés, d’un rééquilibrage significatif du dosage 1

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Texte proposé par le pôle des réformateurs

Poursuivre dans la voie de la réforme

Paris, le 25 mai 2014

Avec une croissance nulle en France et faible en zone euro au premier trimestre, la reprise espérée, même progressive, n’est pas au rendez-vous. Sans l’expliquer totalement, cette atonie de l’activité n’est sans doute pas étrangère au triste résultat des élections européennes marquées par une abstention record, la poussée des populismes et le recul des partis de gouvernement, le tout sur fond de découragement et parfois de colère. Ce contexte va, sans nul doute, raviver le débat sur la politique économique française et compliquer singulièrement la poursuite, si elle a lieu, de la construction européenne. Nous sommes donc à un moment crucial du débat politique dans lequel nous voulons nous inscrire en faisant valoir notre part de vérité.

Sur le plan intérieur, il est probable que les Cassandre de tous poils vont redoubler de critiques : une générosité coupable à l’égard des entreprises, mal orientée de surcroît comme en témoignerait le CICE présenté comme insuffisamment sélectif dans la baisse sectorielle des charges. C’est là oublier qu’en ne réservant pas le CICE aux branches exposées à la concurrence internationale, notre gouvernement à fait le choix de l’emploi, tant il est vrai que c’est sur les bas salaires que les diminutions de charges sont les plus efficaces. Une politique économique déséquilibrée, trop restrictive dans ses choix budgétaires, faisant la part trop belle à l’offre au détriment de la demande… Bref, pour les contempteurs de la politique suivie, le salut viendrait, pour les plus modérés, d’un rééquilibrage significatif du dosage macroéconomique en faveur des ménages et pour les plus radicaux, d’un abandon des efforts de réduction des déficits assorti d’une relance keynésienne classique comme au bon vieux temps des économies fermées.

Ce serait à coup sûr une faute funeste fondée sur une erreur de diagnostic. Car la réalité, c’est que la France risque de décrocher économiquement et socialement dans le concert des pays européens si elle ne maitrise pas sa dette et ne rétablit pas rapidement une offre compétitive de son appareil productif passablement délabré à l’exception de quelques secteurs. Bref si elle ne se réforme pas. Une relance par la consommation aurait les mêmes effets qu’en 1981 : un creusement de nos déficits extérieurs, budgétaires et sociaux déjà importants mais sans possibilité, pour y remédier, de recourir à la dévaluation comme ce fut le cas à trois reprises entre octobre 1981 et mars 1983.

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Si nous soutenons résolument le choix du gouvernement, nous savons aussi que les résultats viendront avec le temps et que nous devons l’assumer devant les Français. Mais pour autant, abandonner la politique de réduction des déficits publics, revenir sur notre engagement en faveur de la reconstitution d’une offre performante et durable ruinerait plus certainement les chances de la France de sortir de la situation dans laquelle elle se trouve. Car ne nous y trompons pas, la France ne vit pas une crise, mais une mutation. Et notre pays n’a pas d’autre choix que de s’inscrire dans la mondialisation qui s’accélère, non seulement pour éviter de décrocher mais également pour en profiter pleinement. Ce n’est pas en organisant une sorte de ligne Maginot face à la mondialisation que nous défendrons les intérêts de la France et des Français. C’est en assumant notre place et notre spécificité, en étant offensifs et entreprenants et en nous adaptant à un monde qui change que nous redresserons le pays. C’est pourquoi il ne saurait être question de remettre en cause les équilibres du Pacte de responsabilité.

Pour autant, nous ne sommes insensibles ni à la justice sociale ni à la conjoncture.

S’agissant de la justice, nous faisons totalement nôtres les mesures du pacte de solidarité auxquelles se sont ajoutées plus récemment la préservation du pouvoir d’achat des pensions de moins de 1200 euros et des minimas sociaux ainsi que les réductions d’impôt dont vont bénéficier plus de trois millions de nos concitoyens. Remarquons au passage que ces mesures qui auront pour conséquence de créer une demande additionnelle se feront sur fonds publics. Mais aller beaucoup plus loin dans la solvabilisation d’une demande supplémentaire des ménages qui ne l’est pas actuellement mettrait en péril nos efforts de rétablissements de nos comptes publics. C’est pourquoi, nous préférons améliorer la croissance par l’aide sélective à l’activité de certains secteurs et la création directe d’emplois par ces derniers plutôt que de recourir massivement à l’augmentation des prestations sociales ou la baisse des impôts, ce dont nous n’avons plus les moyens.

Quant au soin porté aux évolutions conjoncturelles de notre économie, il est clair que ce sera un impératif dans les mois et années à venir. Si la croissance s’avérait plus faible que prévue, sans doute, faudra-t-il procéder alors à des stimulations de l’activité. Sans prétendre à l’exhaustivité, il nous semble que le secteur du logement devrait bénéficier de toute notre attention. Pour des raisons objectives, car jamais depuis longtemps, le nombre de mises en chantier en logements neufs n’a été aussi faible. Pour des raisons d’opportunité également car le logement est un secteur largement abrité et fortement pourvoyeur d’emplois (un logement construit équivaut à deux emplois créés). Différentes mesures peuvent être envisagées : accélération de la mise à la disposition du foncier de l’Etat ou des entreprises publiques qui tarde beaucoup trop à être mis en œuvre, simplification des normes et des procédures de construction qui renchérissent les coûts, mesures fiscales incitatives dès lors qu’elles sont compensées budgétairement : pourquoi, par exemple, ne pas réfléchir à une baisse de la TVA sur la construction de logements neufs compensée par une augmentation de cette taxe sur les autres produits ?

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Par ailleurs, la France bénéficie d’un taux d’épargne important. Une partie de cette épargne dite réglementée est centralisée au fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignation. Or il s’avère qu’en raison du relèvement des plafonds du Livret A et du Livret de développement durable ce fonds dispose d’une capacité de prêts excédentaires de l’ordre de 30 à 40 milliards et que tout indique que cette situation est appelée à durer. Cette manne d’épargne stérilisée, en quelque sorte, pourrait être affectée à des projets d’investissement d’avenir sans mettre en péril le financement du logement social.

Mais soyons clair. La France ne pourra pas revenir dans le peloton de tête des nations européennes et donc peser dans la réorientation d’une Europe en panne de projet depuis trop longtemps si elle ne remet pas en cause certaines rigidités structurelles qui la pénalisent et entravent son dynamisme économique. Affirmer que notre pays est resté immobile depuis deux ans serait profondément injuste. En deux ans, le gouvernement a engagé des réformes substantielles : la priorité donnée à l’éducation avec la réforme des rythmes scolaires, celle des retraites qui, à défaut d’être systémique, règle le problème du financement du régime général pour les années à venir, celle de la formation professionnelle en recentrant ses moyens sur ceux qui en ont le plus besoin, les accords « salaires ou temps de travail en échange du maintien de l’ emploi » de l’ANI, même si ce dernier s’est avéré décevant dans ses résultats en raison du faible nombre d’accords d’entreprises signés, la simplification de l’organisation territoriale de la République à venir dans les prochains mois. Ces mesures porteront leurs fruits dans les années à venir mais nous sommes convaincus qu’en matière de réformes structurelles, il faudrait aller plus loin, plus vite et plus fort. Il ne saurait être question ici de livrer un programme détaillé « clefs en main » de ce qu’il reste à accomplir.

Nous nous contenterons donc de plaider pour un agenda de la réforme et d’évoquer quelques pistes :

Celle de la réforme de notre protection sociale déjà engagée pour le risque maladie avec la stratégie nationale de santé et le développement de la chirurgie ambulatoire. Ne conviendrait-il également pas de repenser, dans la concertation, notre système de retraites pour aboutir à une réforme véritablement systémique ainsi que celui de l’assurance chômage ? Qu’on nous comprenne bien. Il ne s’agit aucunement de s’attaquer à des acquis sociaux mais de réformer, pour le pérenniser, un édifice de protection sociale à bout de souffle qui a accumulé de 2002 à 2012 près de 160 milliards de dette. Comment dans ces conditions croire que nous pourrions ouvrir de nouveaux droits à nos concitoyens si nous sommes durablement incapables d’honorer financièrement ceux qui existent déjà ?

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Celle du marché du travail en assouplissant certaines rigidités comme l’existence des seuils sociaux qui pénalisent l’emploi ou en mettant en place un système qui réconcilie flexibilité d’embauche et de licenciement pour les entreprises dès lors qu’elle se combine à une sécurité des revenus et une formation professionnelle efficace. De ce point de vue, nous souhaitons que le Parlement se saisisse de ces questions à travers la création d’une mission d’évaluation à l’instar de celle qui sera mise en place sur le CICE.

Celle de faciliter les vie des citoyens et des entreprises en accélérant le choc de simplification. C'est là une condition majeure pour mettre un terme à la lenteur des procédures qui, chaque année, coûte beaucoup aux entreprises ainsi qu'à l'Etat lui-même (inefficacité de l'argent public et usages débordés par les contraintes...). Il est urgent d'agir.

Celle de l’ouverture d’un certain nombre de professions réglementées ou fermées qui constituent autant de rentes pour ceux qui les exercent.

Reste l’avenir de l’Europe, indissociable de celui de la France. Aujourd’hui affaiblie économiquement, la France peine à jouer son rôle historique de moteur, avec l’Allemagne, de la construction européenne. Et pourtant, à défaut d’un engagement français clair et déterminé, c’est toute l’aventure européenne qui risque le délitement voire la dislocation. Alors que faire ?

Schématiquement deux voies sont possibles :

Celle du statu quo, d’une Europe au fil de l’eau, telle que nous la connaissons, centrée sur des questions de marché intérieur et de concurrence, rétive à une intégration plus poussée mais en même temps, capable, hélas avec retard, de prendre la mesure des dangers qui la guettent et d’y réagir comme ce fut le cas lors de la crise des dettes souveraines et de l’euro de 2010-2012. Cette Europe-là, défensive face aux marchés, n’est sans doute pas viable sur le long terme, car dépourvue de projet politique, de récit collectif et incapable d’assurer aux peuples la prospérité à laquelle ils aspirent légitimement.

Celle d’une Europe capable d’évoluer comme une puissance publique supplémentaire prolongeant celle des Etats et à ce titre en mesure de peser dans le monde. Pour nous, cette voie passe tout d’abord par la consolidation et l’intégration de la zone euro.

Car il faut bien admettre qu’en dehors des erreurs de pilotage de la monnaie commune, sa construction repose sur un défaut de conception majeur : celui de ne pas être assorti d’un pilier budgétaire et de ne pas avoir procédé à un minimum d’harmonisation fiscale entre ses pays membres.

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La France a d’ores et déjà mis sur la table un certain nombre de propositions notamment, celle de la création d’une capacité budgétaire propre à la zone euro.

Après le choc des élections européennes, nous attendons de la France et de l’Allemagne qu’elles prennent une initiative commune afin de doter la zone euro d’une gouvernance démocratique renforcée et d’un pilier budgétaire permettant de mener des actions d’investissement significative et mettant fin au défaut originel de construction de l’euro.

La France est aujourd’hui à la croisée des chemins et doit opérer des choix clairs pour se redresser. Ce n’est qu’à cette condition qu’elle retrouvera la confiance en elle-même.

Luc BELOT Député du Maine et LoireJean BESSON Sénateur de la DrômeJean-Pierre CAFFET Sénateur de ParisAlain CALMETTE Député du CantalChristophe CARESCHE député de ParisJean-David CIOT député des Bouches du RhôneFrançoise DESCAMPS-CROSNIER députée des YvelinesSophie ERRANTE Députée de Loire AtlantiqueAlain FAURE Député de l’AriègeHugues FOURAGE Député de VendéeJean-Louis GAGNAIRE Député de la LoireMarc GOUA Député du Maine et LoireJean GRELLIER Député des Deux SèvresDavid HABIB Député des Pyrénées AtlantiquesBernadette LACLAIS députée de SavoieAnne-Christine LANG Députée de ParisPierre-Yves Le BORGN’ Député des français de l’étrangerOdile SAUGUES Députée du Puy de DômeGilles SAVARY Député de GirondePascal TERRASSE Député de l’ArdèchePatrick VIGNAL Député de l’Hérault

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