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    SOURCES ET PRINCIPES DU DROIT:

    Titre I. La cration de la loi

    Chapitre 1. Les facteurs la base de la cration de la loi

    Section 1. 1er temps: Le relev des divers facteurs de cration de la loi

    La loi civile, dans les rgimes dmocratiques, se veut neutre et objective. Mais la loicivile est influnce par nombre de facteurs. On distingue gnralement les fateursconomiques, sociologiques, religieux, historiques et technologiques. En ralit, lesfacteurs qui influencent la loi ne dictent pas la loi. Le gislateur prend en compte cesdivers facteurs mais n'est pas forc de suivre les prescrits de leurs experts respectifs.

    1. Le facteur religieux (le Bien)

    Dans les premires socits humaines, les normes qui ont rgi les hommes taient desprceptes religieux. Ce fut le cas l'aube de l'Antiquit. L'influence du christiannisme etdu droit canonique sur le droit des civilisations occidentale, pendant des sicles, a modelles institutions et domin le droit de la famille, fond sur l'insolubilit du mariage. Lesdroits des pays islamiques et le droit canonique marquent encore, dans une grande partiedu monde, l'empreinte de la religion sur le droit positif. Ainsi, la morale chrtienne, parexmple, a t transpose dans la lgislation civile. La lacisaion du droit civil, c'est--direl'limination de l'influence de la religion dans la cration du droit, date en France de laRvolution, s'est maintenue dans le Code civil et s'est prolonge en 1905 par la sparationde l'Eglise et de l'Etat.

    La rupture de la Rvolution a par exemple amen la dissolubilit du mariage, qui est prcepte attach la religion, pour obtenir une loi neutre. Aujourd'hui, le mariagehomosexuel fait dbat. Pour certains,l'htrosexualit, qui est un prcepte religieux, doitdisparatre dans un but de neutralit. La monogamie est aussi emprute la religion. Dansle mme sens, le dossier de l'inceste est en train de s'ouvrir, certans considrent en effetqu'il s'agi d'un rcepte religieux carter de la loi civile. En ralit, selon certains lelgislateur n'carterait pas tous les prceptes religieux, il n'carterait que ceux quil'arrangent et cela vient perturber la neuralit de la loi civile.

    2. Les facteurs conomiques (l'Intrt)

    L'influence des facteurs conomiques est plus flagrante encore. Ainsi, l'apparitiond'insdustries lourdes amena des rflexions relatives la scurit physique destravailleurs et a certainement particip une prise de conscience quant la ncessit

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    d'assurer les travailleurs contre les accidents du travail. Des lois ont t adoptes en cesens, qui garantissent au travailleur une indemnit lorsqu'il es bless au travail ou sur lechemin du travail. On peut multiplier les exemples. La lutte contre l'inflation a engendrla rglementation des prix et les lois liant salaires et index. L'importance d'un marchconcurrentiel lgitime les rgles sur la publicit comparative, la rglementation des

    O.P.A., ...3. Les facteurs sociologiques

    Le lien entre l'volution des faits sociaux et celle du droit est tout aussi vident. Laprogression de nombre de divorces a conduit le lgislateur libraliser celui-ci et pnaliser certaines causes de divorce.

    4. Les facteurs techniques (le Possible) et scientifiques (le Vrai)

    Le progrs des techniques a renouvel sans cesse les aspirations et les conditions de vie

    de l'homme. Le droit a d s'y adapter et rgir les nouveaux domaines et les nouvellesformes de l'activit humaine pour les promouvoir ou pour les limiter, selon les cas. Lesystme juridique ne peut ignorer les consquences des rvolutions technologiques dumonde moderne. Mais il ne saurait en subir les inlctables effets pervers, sans ragir. Il adonc pour fonction de dominer et d'encadrer les volutions qu'engendrent les progrstechniques.

    Les exemples des moyens de transport, des nouvelles techniques de communication, de labiologie et de la mdecine sont probants. Au dveopement de l'aviation, le droita rpondu par le droit arien; aux reisques engendrs par le machinisme, il a oppos laresponsabilit objective et les techniques de l'assurace. De l'informatique, le droit a retirdes fruits prcieux pour amliorer la technique juridque ele-mme et ses propresrecherches, tout en brandissant ls liberts indivduelles contre les dangers que cettetechnologie peut receler. De la biologie, il a retir de nouveaux moyens de preuve enmatire pna, dans le domaine de la filiation ou dans celui de la responsabilit civile. Desnouvelles technologies de communication on surgi, et d'innombrabes possibilits d'abus,de mfaits, de responsabilits ... qu'il appatient au droit de traiter. Une nouvelle brnche dudroit, le droit de l'Internet et plus largement le droit des nouvelles technologies, est entrain de nare autour des questions particulires de droit civil, de droit des affaires, de droitpnal, de proprit intellesctuelle, de droit de la concurrence ou de la consommation, etc.qu'elles rclent.Le progrs de la mdecine ont conduit le droit franais reconnatre et rgir les transplantations d'organes mais rejeter, du moins pour le moment, toute banalisation de transsexualisme ou les associaions de mres porteuses. Le droitinternational et les droits internes condamnent heureusement le clonage reproductif destres humains et protget le gnome humain. En Europe, la Convention d'Oviedo pourla protection des droits de l'homme et de la dignit de l'tre humain l'gard desappications de la biologie et de la mdecin interdit le clonage d'tres humains et proscritles expriences sur l'homme. L'mergence contemporaine d'un vritble droit de labiomdecine rpond au boulversemet des nouvelles technologies et l'acclration desprogrs de la biologie et de mdecine, notamment dans le domaine des techniques de

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    reproduction, fonction de considrations fondamentales d'thique.

    5. Les facteurs historiques et politiques (le Juste social)

    Les facteurs historiques et politiques expliquent certaines avances du droit.

    Ex: Au fil du temps, en droit romain, on est pass du dydtme trs formaliste de la

    mancipatio propre une socit agricole o les transactions sont rares un systmede traditio plus souple, correspondant aux bsoins d'une socit de commerants.

    Le vote de lois assurant le respect de la vie prive s'explique, en Europe, par le faitque la Shoah et l'Holocauste ont t notamment rendus possibles par une

    catgoisation systmatique des gens en fonction de leur race ou de leur religion.Aprs la seconde guerre mondiale, il a t jug indispensable de garantir le droit lavie prive pour viter que l'on puisse retomber dans de telles catgorisations.

    A l'inverse, on constate que les U.S.A. N'ont pas t marqus par cette ralithistoriqu, ce qui explique le fait qu'ils ne soient pas dots d'une lgisation aussiprotectrice que la nre dans cette matire de la vie prive.

    Section 2. 2me temps: Le "dterminisme juridique"

    Selon les partisans du "dterminisme juridique", les solutions juridiques s'expliqueraiententirement par le donn social et conomique du contexte dans lequel les rgles

    juridiques ont s'inscrire. La thse du "dterminisme de la loi" prtend en effet rduire lecontenu des lois la seule traduction des forces conomiques et sociales. De telles thsesdterministes ont t particulirement dfendues par deux coles: celle, d'une part, de lasociologie juridique, d'origine europenne, en particulier l'cole de Durkheim, et celle,d'autre part, de l'analyse conomique du Droit, d'origine amricaine, hritire des travauxde Posner.

    I. La sociologie du droit

    Lecture, J.C. Bergel, op. Cit., p. 179. Voir texte

    A. Les concepts de base: Phnomne et Systme

    La sociologie juridique tudie le droit non dans sa logique intrinsque, de production de"normes" et d'application de celles-ci mais recherche les causes de ce qui lui apparat treun "phnomne", c'est--dire qui apparat un moment donn sous la pousse d'unedemande sociale, dont il importe de mesurer la ralit par des mthodes empiriquescomme l'observation de masse ou l'exprimentation.

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    En effet, le phnomne que constitue la norme juridique n'a de sens et d'effectivit que s'ilest en lien troit avec la ralit sociale.

    Ainsi, les sociologues du droit proposent des mhodes pour constater les dcalages du

    droit dogmatique (celui des textes) et du droit rel (celui pratiqu) et ce afin derconcilier les deux.

    On songe aux statistiques, aux interviews, aux enqutes cibles, la mthode historico-comparative autant de mhodes de la disciplne "sociologique" indispensable au droit.

    Au-del de ces recherches sur telle ou telle norme, le sociologue du droit cherche comprendre les interrelations entre les phnomnes que constituent les normes juridiques.Il s'agit de montrer que c'est un contexte social ressenti comme "unique" qui permet decomprendre une diversit de phnomne. Ainsi, on expliquera qu' l'poque de larvolution franaise, la crainte de la socit bourgeoise de voir se disperser le patrimoine

    des familles "embourgeoises" se reflte dans des normes disparates du Code civi: ainsi,l'exclusion des femmes de tout pouvoir de disposer et la mise 'cart des enfants naturelsde la succession voire de la donation. Bref, chaqu norme en tant que phnomne originalne se conoit pas sans l'existence d'un "systme juridique", reflet d'une "structure sociale"qui permet de relier tous les phnomne juridiques "qui se situent dans un mme espaceet un mme temps de la socit". Ainsi, les normes ne sont pas des phnomnes isolsmais se cnoivent comme les multiples facults d'une ralit culturelle et sociale unique.Ceci explique la radicale originalit de chaqu droit nationa.

    B. L'apport de la sociologie juridique

    L'apport de la sociologie juridique au droit est incontestable au-del des thsesdterministes que cette thorie vhicule souvent. Perrin les numre comme suit:

    n La sociologie du droit identifie les divers intrts (des acteurs sociaux) quel'auteur du pouvoir normatif doit peser. Ainsi, toute norme reprsente uncompromis entre intrts sociaux.La loi franaise des 35 heures est, aux dires des patrons franais, un beau contreexemple dans la mesure o le souci lgitime de protection des intrts destravailleurs l'a mport sur les ncessits de la concurrence, les besoins sectorielsparticuliers et les difficults rencontres par les P.M.E.

    n

    La sociologie empirique du droit fournit les moyens scentifiques d'une valuationdes effets d'un dispositif normatif. Ainsi, on s'interroge sur les "effets pervers"d'une loi.Le systme de la prpension dans la mesure o il reprsente financirement unavantage financier non ngligable par rapport la pension normale peut avoir uneffet dissuasif par rapport la volont de poursuivre le travail et reprsenter pourles entreprises une manire aise de remplacer un personnel a coteux par unpersonnel jeune moins onreux.

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    n Le contact avec les faits sociaux poursuit la rflexion concernant les solutions de"lege ferenda".Prenons un exemple cent en Suisse. On s'y interrogeait sur la ncessit de confierau beau-pe (souvent le second mari de la mre) l'autorit parentale sur l'enfant.Aprs une enqute sociologique, il s'est avr que c'tait une mauvaise ide car on

    a u conclure que le beau-fils ne fait que trs rarement confiance au beau-pre.

    C. Les postulats de la sociologie du droit

    On souligne 4 postulats.

    1. La relativit du droit

    Le droit tel que le connaissent nos socits occidentales modernes n'est qu'un typeparticulier de droit, parmi d'autres possibles et existants. Les typologies de Max Weber

    sont encore utilises ou cites par les sociologues du droit. De mme, la place qu'occupele droit dans les socits occidentales modernes n'est pas ncessairement celle qu'iloccupe dans toute socit. Ces socits ont hypertrophi le pouvoir et le prestige d'un Etatdont la lgitimit se veut avant tout juridique, hypertrophiant du mme coup le pouvoir etle prestige du droit. Bien sr, l'histoire du droit et les tudes de droit compar ont djlargement tabli ces faits, et l'anthropologie est vnue rcemment les confirmer enlargissant les bases de comparaison avec des socits qui ne prennent place ni dansl'histoire du droit ni en droit compar.

    2. L'autonomie et la dpendance du droit

    Le droit jouit d'une certaine autonomie, dans la mesure o son laboration et soninterprtation reposent sur une rationalit, une logique, un raisonnement qui lui sont propres. Mais cette autonomie est relative, car l'laboration, l'interprtation etl'application du droit s'inscrivent aussi dans des processus o s'exercent des stratgies depouvoir, des jeux d'intrt, des prssions, inspirs par les attitudes, les idologies, lesvaleurs de ous ceux qui participent ces processus un titre ou un autre. Ces diversesinfluences se font sentir au moment de l'laboration de lois, car le lgilateur n'est pas leseul faire la loi. Au surplus, les tudes qui ont port sur la mise en oeuvre du droit, surle droit en action, montrent abondamment que le droit qui est effectivement appliqu peutdiverger du droit formul par le lgislateur, sous l'influence de ces stratgies et jeux depouvoir et d'intrt.

    3. L'analyse interne et l'analyse externe du droit

    Le droit est expliqu et interprt par les juristes, selon n mode d'analyse interne du droit,c'est--dire selon des rgles d'interprtation et des modes de raisonnement qui leurpermettent d'arriver conclure sur ce que veut vraiment dire le droit. Mais il est aussipossible d'exliquer et interprtr le droit selon un mode d'analyse externe. Prenant alors ledroit tel qu'il est dit, suivant les interprtations des juristes, l'analyse externe tente de le

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    comprendre par ses rapports aux structures conomiques, politiques sociales, auxidologies, aux valeurs. C'est ce type d'analyse du droit que font les conomistes, des politologues, ds sociologues, des anthropologues, des psychologues. Elle estcomplmentaire de celle des juristes.

    4. La fonction critique de l'analyse externe

    De sa nature mme, l'analyse extene a un caractre critique du droit, car lle est toujoursdmystificatrice de certains mythes qui entourent le droit, tels: le droit manant dulgislateur, l'impermabilit de la rationalt juridique toute considration et influence, ledroit quivalent la justice, l'galit de tous les citoyens devant le droitet la justice, ...Cette fonction critique a videmment t accentue par ls sociologues du droitd'inspiration marxiste ou no-marxiste. Leur analyse du droit des socits capitalistes avoulu mettre en lumire les rapports occults entre droit et classes dominantes, droit etidologies des classes dominantes, le rle du droit dans le mantin de la fausse conscienceet la lgitimation de l'ordre (ou du dsordre) tabli.

    Tels sont, parmi d'autres cependant, ceux qu'on peut considrer comme 4 principauxpostulats sur lesquels repose la sociologie du droit actuelle.

    II. L'analyse conomique du droit

    Le droit poursuit le bien social, l'ntrt commun tandis que l'conomie prtendcomprendre la socit en maximisant les conflits d'intrts. Il y a l une sorte de conflit.

    L'conomie estime que le droit doit tenir compte des cots de l'laboration des normes.

    A. Diversit dans l'analyse conomique du droit

    La science conomique s'est toujours interresse au droit et, plus largement, auxinstruments de rgulations sociale.

    Toutefois, au dbut des annes 1960, s'est dvelopp aux U.S.A. Un mouvement derecherche qui a cnnu un important essor grce la publication, en 1972, de la premiredition du clbre ouvrage de Richard Posner intitul "Economic a nalysis of law ".Par la suite, le mouvement, souvnt appel "law and economics", s'est enrichi denombreux travaux et s'est progressivement impos dans les grands facults de droitamricaines: non seulement un cours de law and economics y est organis mais cette

    dmarche imprgne l'enseinement et la recherche dans de nombreux domaines du droit,par exemple en droit des socits.

    Il importe d'observer que, comme c'est le cas pour toute dmarche scientifique, l'analyseconomique du droit n'est pas neutre. Elle est gnralemet influence par la penseconomique trs librale de l'"Ecole de Chicago" (reprsente par des auteurs comme R.Posner ou l'conomiste monaire Milton Friedman). Ce mouvement n'incarne donc pas, lui seul, les approches cnomiques du droit.

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    Ainsi, le courant de la Nouvelle Economie Institutionnelle fond, dans les annes 1980,par l'conomiste de Berkeley O.E. Williamson prsente le droit comme un des piliers desa dmarche de recherche mais se dmarque nettement de l'approche des "chicagoans".

    B. Les deux aspects d'une analyse conomique du droit

    Mme si ce n'est pas toujours ais, il faut distinguer 2 types d'analyse: l'une positive;l'autre normative. Cette distinction s'applique l'analyse conomique du droit en gnral.

    L'analyse positive tudie l'effet des rgles juridiques existantes ou en projet sur lecomportement des individus.

    L'analyse normative identifie les rgles juridiques qui permettent d'orienter les conduitessociales vers une allocation optimale des ressources. Pour dsigner ce qui est optimal, lesconomistes parlent aussi de l'efficience et, parfois, de l'efficacit.

    Les critres de l'efficience ou de l'optimalit sont dfinis par les conomistes de faon fortabstraite et difficile comprendre pour le juriste. Ainsi en va-t-il du critre le plusrpandu, l'optimum de Pareto dont le caractre oprationnel, pour un lgislateur confront des choix, est difficilement discernable.

    Vu la difficult au regard des critres de l'efficience, il est frquent que les propositions

    normatives des conomistes se situent dans le prolongement de l'analyse positive desrgles exstantes ou en projet: si les effets de ces rgles sont jugs favorables pour le bien-tre des individus ou le dveloppement conomique, elles sont approuves et prconisesdans le cas inverse, elles sont critiques et il est sugggr de les abandonner ou de lesmodifier.

    C. Comment la science onomique met-elle en vidence les comportementsinduits par les rgles juridiques?

    Comme le sociologue, l'conomiste utilise, quand c'est possible, des donnes statistiques.Il tente de les interprter ou de les "faire parler" en les soumettant aux mthodes de

    l'conomtrie.

    Certains conomistes recourent galement aux donnes empiriques fournies par destravaux historiques ou des enqutes sociologiques.

    Mais lorsque l'observation n'est pas possible, notamment parce que trop coteuse, ou nefournit pas siffisamment d'explication, l'conomiste n'est pas, la diffrence dusociologue, pris de court. Il dispose, en effet, d'un paradigme propos de comportement

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    humain. A partir de l, l'conomiste ose prdire les comportements induits par la rgle dedroit existante ou en projet.

    En ce qui concerne le comportement humain, le paradigme de l'conomiste repose surdeux grandes hypothses.

    n Selon la premire hypothse, on suppose que toute action prsente un bnfice etun cot. Les conomistes ne peroivent l'action humaine qu' travers une analysecot-bnfice. Par exemple, l'achat d'un pain procure un bnfice car il augmentela satisfaction, appele utilit, de l'ndividu. Mais cet achat entrane videmmentun cot, le prix payer pour avoir le pain. De mme, la commission d'uneinfraction entrane un bnfice: si c'est un vol, le bnfic est gal au montant pris;si c'est un crime passionnel il est gal la satisfacion de tuer l'amant de sa femme.Mais cette infraction gnre un cot qui est la peine prvue par le Code pnalmultipli par la probabilit d'tre condamn.En outre, l'conomie suppose que l'individu a toujours le choix de poser l'action

    ou de ne pas le faire. Elle voit donc le comportement humain comme unesuccession de choix.Enfin, elle suppose que l'individu a toujours une connaissance parfaite desbnfices et des cots de chacune de ses actions.

    n Selon la seconde hypothse, les conomistes suposent que l'individu agit demanire rationnelle. Il va comparer les bnfices et les cots de caque acte, ft-cenconsciemment et il ne choisira de poser l'acte que si l bnfice est suprieur aucot. En procdant ainsi pour chacune de ses actions, il obtiendra la plus grandeutilit que ses moyens lui permettaient, c'est--dire qu'il fera du mieux qu'il peut.

    D. Un exemple d'analyse normative mise au service de l'idologie libraleCet exemple permet de mieux comprendre l'imortance attache, dans la vision libralequi dominait au XIXe sicle, deux piliers du Code civil: la proprit prive et la libertcontractuelle.

    Diverses analyses cherchent dmontrer que la proprit prive couple avec la libert deschanges (libert contractuelle) constitue le meilleur mode d'organisation conomique etsociale pour la production des richesses. Au dpart du paradigme selon lequel l'individucherche maximiser son profit, ces conomistes estiment donc que celui qui a lapossibilit de profiter, titre excusif, des fruits de sa proprit s'orientera, grce la

    libert contractuelle, vers la solution la plus rentable pour lui et la collectivit.A ce propos, voici un bref extrait tir d'un ouvrage de vulgarisation d Henri Lepage.Cet conomiste adhre aux a priori libraux de l'"Ecole de Chicago".

    Voir texte

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    Il faut encore noter que, dans la foule du raisonnement expos ci-dessus, lesconomistes d'inspiration librale mettent souvent de srieuses rserves l'endroit deslgislations qui portent atteinte la proprit prive (notamment, par l'impt) ou lalibert contractuelle (par le dveloppement de lois impratives). On observera, cepropos, qu'en Belgique, ni le droit fiscal ni le droit de conrats ne semblent, pour le

    moment, tenir compte de ces rserves.

    Section 3. 3me temps: L'autonomie radicale du droit face aux facteursexplicatifs

    Les experts qui ont tudi sociologiquement, conomiquement ou psychologiquement lasocit, estiment que le lgislateur est un ignorant qui ne comprend pas ce qu'il produitou qui produit des normes contre-producives et ils estiment que la socit doit tre menepar rapport aux rsultats de leurs expertises.

    Les deux mouvements de l'cole sociologique et de l'analyse conomique, dans leursaffirmations les plus radicales du moins, affirment que le droit n'est et ne doit tre que latraduction des faits sociaux ou des forces conomiques. En d'autres termes, le contenumatriel de la norme juridique est dict par le contexte. Le lgislateur est simplementinvit dcouvrir ce donn et dans un cas comme dans l'autre y dceler les intrtsconflctuels qui s'y jouent afin de procder une simple balance de ceux-ci.

    A cette thse, nombre d'auteurs ont ragi pour proclamer la radicale autonomie du droitqui, nonobstant certes l'influence dterminante des faits conomiques et sociaux, ne serduit pas ce donn extrieur au droit mais, confront celui-ci, "se construit" selon ses

    rgles propres et son systme juridique et labore la rponse qu'il estime adquate cesfaits.

    Le droit ne se contente pas d'accueillir le donn social ou conomique mais travers sapropre alchimie, son mode particulier de raisonnement, les concepts propres qu'il s'estforgs historiquement, accueille ce donn pour tantt lui confrer une ralit juridiquepropre, tantt lui refuser cette ralit. Ce mode de reconnaissance par le droit n'est pasneutre ni gratuit dans la mesure o, suivant les choix oprs, les consquences, le rgimejuridique que le droit attachera ce donn, n seront pas les mmes.

    L'exemple de la reonnaissance par le droit du "phnomne" de la garantie bancaire dite

    premire demande illustre bien cela.

    La garantie bancaire " premire demande" s'est dveloppe historiquement dans lescontrats dits la grosse exportation. Il s'agissait pour les banques de fournir desimportateus, souvent des Etats de pays lointains, une garantie de la bonne excution parl'exportateur, une ntreprise du pays ou la banque, de l'ensemble des prestations promises:la construcion d'un aroport, d'une usine, d'hpitaux, ... Ces contrats d'exportation sontsouvent rdigs "clefs en main", voire "produits en main", ce qui signifie que l'exportateur

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    Le pays importateur se montrera videmment mcontent de la solution apporte auproblme par la Cour d'appel de Paris: il escomptait, en mettant en oeuvre une garantie premire demande, bnficier d'une garantie sans possibilit d'exception.Conclusion: l'approche franaise consacre ainsi une certaine rigidit du droit au point quecelui-ci n'accueille pas la pratique et va jusqu' nier l'originalit de la garantie premire

    demande.n La garantie premire demande en droit allemand

    Nous sommes en 1970, devant le Landsgericht de Francfort, saisi d'un problme similaireavec un pays du Moyen-Orient.L'exportateur ne peut livrer car il y a ds problmes dans lepays qui ont motiv un embargo.

    Un autre concept est utilis par le tribunal allemand: celui de la librt contractuelle. Ils'agit d'un principe fondamental, n de l'volution du droit romain, en vertu duquel onpeut crer de nouveaux types de contrat ct de ceux du Code civil. Dans cette

    perspective, il n'y a aucun obstacle ce que l'on puisse crer d'autres formes de garantie.Or, il parat clair que la garantie premire demande est diffrente du cautionnement carelle prvoit un paiement immdiat et ce mme si celui-ci ne serait pas d en raison dejustifications valables. Il s'agit donc d'un autre contrat cr par les parties, dans le cadrede leur libert contractuelle.

    La spcificit de ce contrat n'te toutefois pas l'exigence du respect de l'excution del'obligation d'excution de bonne foi des conventions. En l'espce, le juge allemand sedemanda si l'importateur qatari, qui demandait l'excution de la garantie premiredemande, tait de bonne foi. S'il existe une prsomption de bonne foi, celle-ci peutcependant tre renverse dans les faits. Dans le cas prsent, l'Emir du Quatar, sachantqu'il y avait la guerre aurait d attendre avant de faire appel la garantie premiredemande. En n'adoptant pas cette attitude, il n'a pas eu un comportemet de bonne foi etl'excution de la garantie peut tre refuse.

    Conclusion: l'approche allemande permet de constater que la garanie premire demandeest apprhende et intgre dans le droit d'une manire autre que celle du droit franais.

    Bien que le droit soit en dialogue avec la pratique, le droit franais et le droit allemandragissent diffremmet face au mme donn. Cette diffrence s'explique par les carts quisubsistent enre les traditions juridiques de chaque pays. Ainsi, en Allemagne, c'est ds1877 que, s'agissant du cautionnement d'un mineur, un juge avait dclar que celui-citait valable car les gens sont libres de contracter et de prvoir d'autres clauses que cellesprvues par les droit. Cette vieille jursrudence a influenc le juge allemand cent ansplustard, dans le cas de la garantie premire demande.

    La rflexion mene jusqu'ici permet de dgager quelques principes qui tmoignent de laradicale htrognit de la discipline juridique face au "donn" que rvlent la

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    sociologie ou l'conomie.

    n Le "donn" social ou le "fait" conomique, pour pntrer le droit, doivent passerpar des "concepts juridiques"

    Le "cautionnement" dit accessoire dans la premire jurisprudence franais; la "libertcontractuelle" en droit allemand;

    n ... et subir les consquences de ce choix

    Le donn, une fois le concept juridique d'accueil choisi, subit de ce fait les consquencesde ce choix. Ainsi, le droit franais, ayant choisi le concept "cautionnement", va dduireque la garantie premire demande ne peut tre paye si l'exportateur dmontre que sadette principale n'existe pas ou n'est pas exigible. A l'inverse, le juge allemand, au nom dela libert contractuelle, affirmera que le banquier ne peut se prvaloir d'aucune desexceptions mises en avant par l'exportateur pour justifier son propre non-

    accomplissement de ces obligtations.n Le droit peut aller jusqu' nier le donn au nom d'un simple dogmatisme juridique

    ou au nom de valeurs.

    2 exemples peuvent tre relevs.

    1 D'une part, le droit franais a t jusqu' nier la particularit de la garantie premiredemande.2 D'autre part, un autre exemple peut tre trouv dans le droit dit des nouvellestechnologies de l'information et de la communication. Aujourd'hui, on cre normmentde bases de donnes (annuaire tlphonique, catalogues de publications on line, ...). AvecInternet, il est facile de copier, de coller, de manipuler ces donnes et de les mettreensuite en ligne soi-mme afin de les exploiter.

    Que dirait lconomiste? Il mettrait en vidence le fait quil est ncessaire de protger lesgens qui crent des bases de donnes car ils ont fait des efforts et ont engags des fraispour les constituer.

    Deux ractions sont en fait possible:

    1 soit le droit entend ces producteurs de bases de donnes et cde leur demandes( ce qui a t la raction europenne): les intrts conomiques sont tels quil faut unedirective pour protger les bases de donnes. Le droit se met donc au service des intrtsconomiques des entreprises et invente pour la protection de ces investissementsconomiques une protection sui generis permettant ces bases de donnes de pouvoirviter le recopiage total ou partiel.

    2 soit le droit refuse de protger ces entreprises et ne reconnat pas la demande de lapratique (ce qui a t la raction amricaine): au nom dun argument juridique, on ne peut

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    protger quune uvre originale par le droit dauteur.A contrario, il ny a pas doriginalit dans la mise en uvre de certaines bases dedonnes, qui ne constituent pas des crations originales. Le droit dauteur ne peut doncpas accueillir cette pratique: dans la mesure o le droit na admis dexceptions la libertde circulation des ides que pour telles uvres originales, il ne doit ds lors pas accueillir

    des donnes non originales. La valeur libre circulation des ides lemporte surlintrt conomique des producteurs de bases de donnes.

    Le droit peut faire voluer le donn social ou conomique

    On dit souvent que le droit est en retard sur les faits. Cependant, le droit peut bel et bientre un moteur pour la pratique. Il peut faire voluer les choses en consacrant desconcepts.

    Loi sur la protection de la vie prive de 1992:

    En vertu de cette loi, chacun peut demander daccder aux donnes que le collecteur dedonnes ( par exemple la banque) possde sur lui. Cette loi a oblig les banques a ajoutercette mention dans dans les conditions gnrales de crdit. De plus, il a fallu organiser cetaccs aux donnes, en crant dans chaque banque un service spcifiquement attach cetaspect. Ds lors, lon constate que le droit a influenc lorganisation mme de la banque.

    De mme, cette loi a impos la mise en place de mesures de scurit relatives auxdonnes collectes: les banques ont alors adopt des rglements disant qui a accs auxdonnes et comment ( codes dacces,)

    Cest ainsi quau travers dune phrase de la loi de 1992, on a donn une impulsion touteune srie de rglementation ou dinnovations technologiques dans la pratique: cest ledroit qui a impuls toutes ces modifications pratiques.

    Enfin, le droit slectionne, par ses concepts, des faits relevant dans le donn social.Lexemple de la lgislation de protection des donnes caractre personnel peut servir icigalement. Il est intressant en effet de montrer qu partir dune dfinition conceptuellelgale unique,les diffrents droits peuvent cependant amener des prcisons qui vontmodifier leur apprhension de la ralit sociale. La directive europenne dont sont issuestant les lois anglaises que belges en matire de protection des donnes caractrepersonnel impose aux deux lgislations la mme dfinition de ce type de donnes.

    Hypothse: un proprio de parking relve systmatiquement les plaques dimmatriculationdes voitures rentrant dans laire quil met disposition.

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    Il est clair que le seul numro de plaque ne rvle pas directement le nom de celui quiconduit, ni du proprio de la voiture. Lidentification de ce dernier ne serait possible que sinotre propritaire du parking tait en relation avec ladministration qui dlivre lesnumros de plaques. Par rapport ce donn semblable, deux raisonnements sontpossibles, celui de la Belgique estime que la possibilit didentifier le proprio existe en

    soi mme si en ralit, elle nest pas sollicit et donc quil y a donne caractrepersonnel , lidentifiabilit tant suffisante.Par contre, au royaume uni, le raisonnement exclu lapplication de la loi dans la mesureo, dans la ralit, le proprio du parking ne dispose pas de cette possibilit et ne peut parlui-mme identifier la personne propritaire du vhicule.Bref, le mme concept didentifiabilit est interprt diffremment et conduit le droit aprendre en considration diffremment les lments que rvle le donn social.Le droit nest donc pas passif par rapport aux faits. Confront eux, il entre en dialogueavec eux, les conceptualise, les slectionne et leur attribue une porte diffrente.

    Chapitre 2. De l'opportunit de lgifrer

    Section 1. Les vertus de la loi

    La loi a certaines vertus et la dcision de lgifrer mettre en exergue l'une ou l'autre deces vertus, voire l'ensemble de celles-ci.

    Les dbats lors du vote de la loi des 35 heures sous le prcdent gouvernement franaisillustrent merveille les diverses justifications d'une intervention de la loi. Pour faire bref, les arguments avancs par le lgislateur s'appuyaient autour des considrationssuivantes:

    Les 35 heures permettent de consacrer le progrs social et donner au travailleur lacontrepartie de la meilleure productivit qu'assurent l'utilisation des technologiesmodernes de production et une meilleure organisation du travail. Il s'agit dans lemme ordre d'ides d'une avance sociale consacrant le droit de chacun auxloisirs.

    Les 35 heures permettent de rduire le chmage. Les 35 heures vitent les abus des employeurs en matire d'heures

    supplmentaires. Enfin, ils correspondent la volont d'un gouvernement alors socialiste de se

    dpartir de la politique de leurs prdcesseurs et reprsentent cet gard un

    "slogan lectoral".

    En d'autres termes, 4 vertus caractrisent l'intervention lgislative.

    1. La loi, facteur de changement conomique et social

    La loi est un facteur de changement social ou conomique et permet de modifier des

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    fondements de notre socit (notons que cette valeur s'oppose la vision dterministe dudroit qui veut que le droit soit en retard sur les faits et suit ceux-ci).

    Dans cette acception, le facteur de changement social ou conomique consacre une vertuprogressiste de la loi.

    2. La loi a une porte unificatrice Egalit dans la loi, Egalit devant la loi

    La loi a une valeur unificatrice et permet de faire en sorte que les diffrentes situationssoient abordes et apprhendes de la mme manire.

    La loi permet donc de mettre fin des disparits prsentent dans la pratique. De fait,parfois le texte de loi est interprt ou appliqu de manire diffrente (exemple: il peut yavoir une attitude diffrente entre le Parquet de Tongres et celui de Huy au regard deslgers excs de vitesse, le premier se montrant moins tolrant que le second).

    Le droit peut-il supporter des applications diffrentes d'un mme texte? Une tellesituation n'est pas tenable et il convient de mettre fin des disparits d'application.

    La vertu unificatrice de la loi est galement utile au moment o la population nes'accorde plus facilement sur les conduites sociales suivre. Le droit se substitue alorsaux autres modes de rgulation sociale (ex: le fait de fumer dans les restaurants).

    3. La loi apporte la "scurit juridique" Le droit est susceptible d'anticipation

    La loi assure la scurit juridique. Elle permet de scuriser une situation pouvant trersolue par la pratique judiciaire de manire imparfaite ou bancale.

    Par exemple, avant la loi des 35 heures, l'employ ne savait pas trop ce qu'il tait tenud'accepter par rapport aux exigences horaires de son employeur.La loi des 35 heures apporte une rponse claire qui renforce la scurit juridique: toutemploy peut dornavant apprhender au mieux le fait que sa situation soit ou nonconforme au droit, alors qu'avant le texte tait flou et engendrait une incertitude.

    Un autre exemple est tout aussi parlant: celui de la signature lectronique.Cette signature correspond-elle celle du Code civil et est-elle valable lorsqu'on introduit

    un code de carte bancaire ou lorsqu'on clique simplement sur OK lorsque l'on se trouvesur Internet?Compte tenu du fait qu'il y avait des incertitudes (et des divergences d'opinion) quant ceque ces types de comportements quivalent une signature au sens du Code civil, uneintervention lgislative a permis de clarifier la question et de dterminer lgalement ceque l'on entend par signature lectronique.

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    4. La valeur symbolique de la loi

    La loi traduit des valeurs symboliques. Si l'on reprend l'exemple de la loi des 35 heures,on se rend compte que cette annonce a cr un dclic dans la socit et qu'elle a consacrla valeur du bien-tre des travailleurs.

    Lorsqu'elle tait Ministre la Rgion wallonne, Mme Onkelinx a pris un dcret danslequel elle affirme que lorsque les logements sont inoccups, le bourgmestre a le droit derquisitionner ces immeubles pour les affecter au logement des sans-abri ou au profit depersonnes margeant au C.P.A.S.La valeur symbolique de cette loi est norme et a permis un effet d'annonce importantpour le parti politique de la ministre.Cependant, depuis 7 ans, aucune rquisition n'a t faite parce que les bourgmestreshsitet prendre une telle disposition.Cette situation pose la question suivante: lorsque la loi est d'abord symbolique, sera-t-ellerellement effective, ou restera-t-elle cantonne au rle de loi spectacle?

    Section 2. De l'inflation lgislative quelques principes limitant

    l'intervention du lgislateur

    1. L'inflation lgislative

    Depuis quelques dcennies, nous assistons une multiplication des instrumentsjuridiques. Ce qui accrot considrablement l'inflation juridique, c'est la superpositiond'une loi nouvelle une loi ancienne portant sur un objet analogue, sans que ne soit vote

    expressment une abrogation; et comme notre systme de droit ne connat pasl'abrogation tacite, on assiste une perte en effectivit de la loi ancienne.Deux explications peuvent tre mises en vidence pour expliquer ce phnomne:

    L'interventionnisme forcen du lgislateur en matire conomique et sociale La "loi-spectacle":

    Le simple fait de prendre une dcision remplit en soi un rle politique, dans la mesure ocette dcision capte l'attention gnrale, ce qui provoque un impact psychologiquecertain. L'diction de la norme par le pouvoir lgislatif se suffit elle-mme, ce quiexplique le vote et la promulgation de nombreuses lois, alors que les moyens de leurapplication sont le plus souvent trs insuffisants, voire inexistants. La sparation ainsitablie entre l'diction de la norme et son application justifie l'expression de "loi-spectacle".

    Un autre aspect de la loi-spectacle tient l'lectoralisme. Il arrive en effet qu'une loi soitvote essentiellement en fonction de rsultat positif escompt sur l'opinion publique.

    Ainsi, le temps de la loi s'acclre et les textes se superposent, se tlescopent, sestratifient un rythme croissant sans que le citoyen ne puisse les assimiler et sans que les

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    moyens de les mettre en uvre ne soient pris ou n'aient la possibilit de dmontrer le bienfond de l'intervention lgislative.

    On conoit la consquence de ce phnomne qui entrane coup sr une dvalorisationde la rgle de droit. L'inflation lgislative entrane de nombreuses consquences:

    Les difficults rencontres appliquer des rgles toujours plus nombreuses et donc laperte de leur force contraignante.A cela s'ajoute l'ignorance de plus en plus constate auprs des citoyens de leur existenceet donc leur irrespect.Au-del, plus grave, la dvalorisation de la rgle de droit a pour effet d'accrotre lephnomne de dsorganisation de l'ensemble du systme juridique; on ne saurait nierl'effet de contagion provoqu par la non-application d'une rgle de droit, par exempledans les relations commerciales ou dans le monde du travail. La gnralisation de la non-effectivit risque alors de remettre en cause l'ensemble de notre systme juridique.C'est pourquoi, la prolifration des normes de droit entrane des consquences quidpassent de loin la simple technique, pour s'attaquer aux fondements mmes de

    l'organisation sociale.Devant l'impossibilit matrielle d'assurer le respect de l'ensemble de ces normes, et demaintenir par consquent leur force contraignante, il serait raisonnable de revenir enarrire, c'est--dire d'tre plus restrictif dans la cration et plus prsent dans l'application.

    2. Les remdes

    S'il apparat vident que la mise en uvre d'un processus de cration d'une loi constitueune tche ambitieuse et exaltante, il n'empche que "l'enfer peut tre pav de bonnes

    intentions" et que "le mieux peut tre l'ennemi du bien": des limites doivent donc treposes la cration de la loi.

    Ces limites sont le principe de proportionnalit et le principe de subsidiarit.

    Le principe de proportionnalit

    Selon ce principe, une loi ne peut tre prise que dans la mesure o elle apparat ncessaire l'obtention d'un objectif d'intrt public.

    Ce principe limite les comptences des institutions europennes: En vertu du principe de

    proportionnalit, le contenu et la forme de l'action de l'union n'excdent pas ce qui estncessaire pour atteindre les objectifs de la Constitution.L'application de ce principe comme celui de subsidiarit fait dsormais l'objet d'unprotocole annex au projet de Constitution. Il s'agit par un avis motiv, de dmontrer quela voie lgislative emprunte et son contenu sont "appropris" rsoudre le problmerencontr. En d'autres termes, que les moyens proposs par la lgislation pour rsoudre leproblme socitaire sont adquats, pertinents et non excessifs par rapport l'objectif vis.

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    Le principe de subsidiarit

    Ce principe affirm au niveau europen est double. La subsidiarit de l'action lgislativeeuropenne exige d'abord qu'il soit dmontr que les objectifs de l'action envisage nepeuvent tre atteints de manire suffisante par les Etats membres, tant au niveau central

    qu'au niveau rgional et local, mais peuvent l'tre mieux, en raison des dimension ou deseffets de l'action envisage, au niveau de l'union.Bref, il s'agit ici de savoir qui de l'Union europenne ou des Etats membres voire desrgions est comptent par rapport une question dtermine. A nouveau, le protocoledj cit exige sur ce point une motivation et prvoit des recours de la part des parlementsnationaux devant le Parlement europen ou la Cour de justice.

    Le principe de subsidiarit reoit dans l'accord interinstitutionnel europen "Mieuxlgifrer" une seconde signification dont la premire partie se faisait dj cho.

    Selon ce principe, la loi doit rester exceptionnelle. Indpendamment de l'intervention

    lgislative, il existe d'autres modes de rgulation sociale pour apporter une solution auproblme pos.

    L'une de ces voies est de laisser faire, en priorit, les acteurs sociaux. Pour en revenir notre exemple de la diminution du temps de travail, l'on constate que la Belgique aboutit une telle diminution en utilisant la concertation sociale entre employeurs et syndicats,ce qui est une forme de "corgulation". La France a quant elle recouru la clbre loiimposant les 35 heures de travail hebdomadaire.

    L'intervention lgislative franaise respecte-t-elle le principe de subsidiarit, pris cettefois dans son second sens. Ce n'est point vident lorsqu'on lit le point 16 de l'accord

    interinstitutionnel europen:Les trois institutions rappellent que la Communaut ne lgifre que dans la mesurencessaire, conformment au protocole sur l'application des principes de subsidiarit et deproportionnalit. Elles reconnaissent l'utilit de recourir, dans les cas appropris, lorsquele trait CE n'impose pas spcifiquement le recours un instrument juridique, desmcanismes de rgulation alternatifs.

    Comme on le voit, l'autorgulation et la corgulation sont ds lors prnes. Certes, ilslaissent aux lgislateurs le soin de fixer les objectifs essentiels de la rgulation et le cadredans lesquels l'autorgulation et la corgulation pourraient s'exprimer et apporter leur

    valeur ajoute aux principes dgags par l'acte lgislatif.Exemple de l'application du principe de subsidiarit: Jusqu'en 2004, le lgislateur franaislaissait aux tablissements scolaires le choix de l'autorisation ou non du port du voile. En2004, aprs avoir essay le principe de subsidiarit, le lgislateur a estim qu'il taitinefficace: la rgle au niveau local a t source de problmes. Le lgislateur a doncdcid d'dicter une loi au niveau national.

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    Chapitre 3. La validit de la norme juridique

    Le concept de validit est assurment polysmique en ce sens qu'il renvoie plusieursides. Pour les dcouvrir, une approche linguistique et tymologique est sans aucun douted'un grand intrt.

    L'origine latine du mot "validit" se retrouve dans le terme VELERE dont on peutdgager en latin 3 sens:

    "valere" signifie d'abord "tre en bonne sant", "avoir la force" (de loi); "valere" prend galement le sens "tre en vigueur"; "valere", dans une perspective plus littrale, signifie galement "avoir de la

    valeur, au sens moral du mot".Le dgagement tymologique de ces 3 sens correspond 3 critres permettant de cernerla notion de validit:

    "valere" au sens "d'avoir force" correspond au critre de lgalit "valere" au sens "d'tre en vigueur" renvoie au critre d'effectivit "valere" au sens "d'avoir de la valeur" donne plutt un contenu thique la notion

    de validit en renvoyant un concept de lgitimit.

    Il est important de diffrencier la dmarche d'valuation d'une loi de l'analyse formelle,puis empirique et enfin axiologique de la validit d'une norme juridique. validit valuation

    En effet, les angles d'approches sont totalement diffrents et les rponses y recherches

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    aussi.

    Le processus d'valuation de la loi s'inscrit dans une perspective chronologique:il s'agit en effet de procder divers moments de l'existence d'une norme (avant dedcider de se lancer dans le processus lgislatif, ensuite, au cours de celui-ci et bien

    sr dans le cadre de l'application de la norme ainsi cre), l'valuation de celle-ci.

    1 L'valuation de la loi ex ante, appele aussi valuation prospective

    Il est possible de procder une valuation de la loi avant de dmarrer le processuslgislatif. Par exemple, un lobby, une socit, des partis, , dclarent qu'ils souhaitenttelle rglementation. Dans cette perspective, on va se demander s'il est opportun delgifrer.

    2 L'valuationau momentde la rdaction du texte de loi

    Au moment de la rdaction de la loi, on choisira la meilleure faon de rdiger la loi(dtermination de concepts, du contenu, ). Il s'agira du deuxime moment del'valuation de la loi.

    3 L'valuation de la loi ex post, appele aussi valuation rtrospective

    Aprs l'adoption de la loi, on va se demander si elle remplit effectivement ses objectifs, sielle est applique, si elle correspond bien la mentalit de la socit, L'tude de lavie de la loi et son suivi constituent le troisime moment de l'valuation de la loi.

    L'analyse de la validit d'une norme uniquement ne s'inscrit pas dans une perspective

    chronologique: il s'agit davantage de dgager divers critres faisant appel desmthodes diffrentes (mthode classique du juriste, dmarche pratique dusociologue, dmarche spculative du moraliste) qui permettront de reconnatre sioui ou non, une norme donne satisfait aux conditions requises pour produire leseffets juridiques que ses auteurs lui attribuent.

    I. Les prsupposs pistmologiques de la dmarche: pluralit,gradualit et rcursivit

    Pour dgager les critres de validit d'une norme, F. Ost et M. van Kerkhove ont mis enuvre des dmarches pistmologiques. L'approche des auteurs peut tre associe auxtrois ides de pluralit, de relativit et de rcursivit.

    F. Ost et M. van Kerkhove font appel une mthode plurielle en ce sens qu'elle combineune analyse chre au juriste, une approche sociologique et enfin moraliste.

    Ils insistent aussi que les diffrents critres de validit se comportent de manire relative

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    et graduelle.

    Enfin, ils prconisent une approche du systme juridique et des diffrentes normes qui lecomposent comme tant un rseau, l'intrieur duquel les normes se meuvent en"boucles tranges".

    A. PLURALITE

    Les auteurs abordent la question de la validit de manire plurielle en ce sens qu'ils fontappel trois mthodes diffrentes et combinables.

    A partir de l'analyse d'une loi, le juriste positiviste se posera la question de savalidit en tant que sa conformit toutes les exigences formelles et de contenu l'intrieur mme d'un systme juridique: cette loi n'est-elle pas en contradiction avecd'autres lois? Le processus d'laboration de la loi tel que prvu par ce systme

    juridique a-t-il t respect? Telle est la mthode classiquement suivie par le juristequi s'interroge sur la validit d'une norme juridique;

    Le juriste sociologue, lui, s'approprie cette interrogation sous un autre axe: la loiexistant sur papier, est-elle rellement mise en uvre? Et cela dans deux sens: lesautorits publiques se sont-elles dotes des moyens d'assurer le respect de cette loi?Et les citoyens, respectent-ils la loi en question en ayant notamment le sentiment qu'ils'agit d'une obligation qui s'impose eux? Mme souci concernant la validit de lanorme mais autre mthode d'approche de la question.

    Le juriste moraliste, propos de la mme question validera une norme en lajustifiant par l'identification de bonnes raisons thiques d'en faire application; cette loiest lgitime eu gard aux valeurs que la socit partage, et ces valeurs peuventvoluer dans le temps.

    En conclusion, on remarque que les auteurs rattachent la validit trois dimensionssimultanment et cela "contrairement la majorit des auteurs qui considrent que lavalidit des normes et systmes relve d'un seul ple exclusivement (la lgalit formelledans le camp positiviste, l'effectivit pratique pour les courants raliste et sociologique etla lgitimit axiologique aux yeux des iusnaturalistes)". La dmarche pistmologiqueutilise par F. Ost et M. van Kerkhove est donc inscrite dans une perspective

    interdisciplinaire et plurielle. Elle ne fait pas uniquement appel au pluralismemthodologique mais aussi au pluralisme juridique, en ce sens qu'il existe une pluralitd'ordres juridiques en vigueur simultanment pour les mmes individus.

    B. GRADUALITE = RELATIVITE

    Les auteurs prsentent leur thorie de la validit en insistant aussi sur son caractre

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    graduel: en effet, la validit d'une norme dcoulant de plusieurs critres (formel,empirique, axiologique), ceux-ci se comportent de manire graduelle, relative en ce sensqu'ils sont susceptibles de degrs et qu'ils n'atteindront jamais un pourcentage absolu:aucune rgle ne peut prtendre tre 100% lgale, 100% effective et 100% lgitime.

    La gradualit des critres dcoule aussi de la validit de la norme, relative dans letemps (ratione temporis, on distinguera 3 phases: norme peu connue, norme reconnue etnorme dsute), relative dans l'espace (ratione loci, il y a des pays de droit crit etd'autres qui sont davantage de droit coutumier) et galement relative quant auxpersonnes (ratione personae, la rception d'une mme rgle peut varier selon les groupessociaux, les professions, les classes d'ge, de sexe).

    Enfin, on se persuadera encore de la gradualit de la validit juridique en se souvenantqu' toute proposition juridique ne s'attache pas la mme intensit normative: ct desinterdictions formelles du Code pnal, combien de normes simplement dissuasives ouincitatives, combien de recommandations de normes simplement programmatoires,

    d'affirmations symboliques, domaine immense du soft law, dont les prtentions s'imposer s'assortissent de nombreuses conditions et mnagements. La rglejurisprudentielle aujourd'hui reconnue comme vritable source de droit illustregalement cette gradualit. C'est que sa force obligatoire n'est pas absolument niinconditionnellement contraignante. Elle est en effet tributaire la fois de l'autorit quiest reconnue la juridiction dont elle mane et de l'adhsion que lui tmoignent les autresjuridictions.

    En conclusion, on voit que les auteurs dgagent de leur thorie de la validit une qualit:la relativit, qu'elle soit relative dans le temps, dans l'espace, relative aux personnes, queles normes ont un degr d'imprativit variable, qu'il s'agisse des normes de droit pnal,desoft law ou de rgles jurisprudentielles.

    C. RECURSIVITE (proprit de ce qui peut tre rpt de faon indfinie,raisonnement en boucle)

    Le dernier prsuppos pistmologique analys par Ost et van de Kerchove est que leraisonnement de validit est un raisonnement en boucles.

    Les thories classiques de la validit prsentent toujours l'opration de validation desnormes comme rsultant d'un mouvement unilatral: soit, dans une perspective

    positiviste, c'est la norme suprieure qui valide la norme infrieure, soit, pour les tenantsd'une thorie iusnaturaliste, ce sont les dcisions du juge qui valident les normessuprieures (on conclut, dans cette perspective, la validit des normes suprieures dufait de leur application systmatique par les cours et tribunaux). Quelle que soit la thoriedogmatique en question, on constatera que le jugement de validation est en tout casunilatral. Nos auteurs proposent une approche base sur la rcursivit, c'est--dire surun raisonnement en boucle. Il s'agit de prendre au srieux l'ide que chaque maillon dela chane juridique, du Constituant l'huissier de justice, de la Commission des

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    Communauts europennes au contractant priv, contribue, selon sa position dans lechamp juridique, la rception des rgles qui leur parviennent des divers points du rseaujuridique.On est ainsi conduit accepter toute une srie de thses htrodoxes au regard desenseignements de la dogmatique classique et notamment accepter que tous les acteurs

    concourent, sans doute avec une autorit et un bonheur variables, au maillage du rseaujuridique et que leur intervention ne se limite pas l'attitude linaire de l'obissanceou de la rsistance.

    Les consquences de cette approche rcursive sont que les normes juridiques ne limitentpas l'action, elles sont un ensemble de ressources pour d'autres normes. De plus, lasensibilit de rgulation par le bas augmente puisque les administrations, par exemple,s'approprient davantage les domaines juridiques.

    Enfin, l'application d'une loi nouvelle est plus qu'une simple mise en uvre mcanique.Elle participera en amont et en aval toute la vie du rseau juridique.

    II. Prsentation analytique des critres de validit

    La validit d'une norme peut tre tablie en rfrence trois critres distincts:

    La validit formelle, relative un ordre juridique donn; c'est ce qu'onappelle le ple de la LEGALITE, domaine par excellence des juristes.

    La validit empirique, relative aux attitudes, comportements, reprsentationsdes autorits et des sujets de droit; c'est ce qu'on appelle le ple del'EFFECTIVIT, champ d'tude des sociologues.

    La validit axiologique, relative ce qu'on appelle des valeurs mtapositives,c'est--dire morales; c'est ce qu'on appelle le ple de la LEGITIMITE; ce

    dbat a lieu classiquement entre moralistes ou iusnaturalistes.

    Il faut, de plus, remarquer qu'il s'agit l non de trois critres qui se juxtaposentsimplement mais qui interagissent entre eux. Il ne suffit pas, en effet, de considrer que lavalidit rsulte de l'addition un brevet de lgalit d'une certaine dose d'effectivit et delgitimit, mais de comprendre qu'il est impossible de mettre en uvre chacun des troiscritres considrs isolment sans mobiliser implicitement ou explicitement les deuxautres. Il s'agit d'une "validit en rseau".

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    La validit, nous dit F. Ost, est une qualit de la norme distribue entre trois plesdiffrents, une qualit qui se produit selon trois modes diffrents, ces trois ples tantchacun privilgi par chacune des trois grandes thories du droit.

    A. Le ple de la LEGALITE, mode formel, champ d'tude privilgi de lapense iuspositiviste conformit aux rgles internes du systme juridique danslequel on se trouve

    Respect des normes secondaires Cohrence des contenus

    La question pose ici est celle de l'appartenance de la norme un systme juridique derfrence: Est valide, dit Hart, la rgle qui prsente les signes extrieurs d'appartenance,les critres d'identification que retiennent les rgles de reconnaissance propres ausystme. Et dans ce cas, la loi est valide en ce sens qu'elle est conforme toutes les

    exigences du systme juridique et qu'elle ne reclera pas de contradiction avec d'autreslois.

    Le premier problme est de savoir si l'laboration de la loi a correctement suivi leparcours obligatoire sa cration, tel que prvu par la Constitution, par exemple: on ydcle une question de respect des normes secondaires, de comptence, de procdure.

    Le deuxime problme est la cohrence de la norme dont la validit est analyse avec lesautres lois (sensu lato). Cette absence de cohrence peut tre sanctionne par la Courd'arbitrage, la Cour europenne des droits de l'Homme. C'est ici une question decohrence des contenus.

    On peut encore ajouter que ce travail de validation d'une norme semble treessentiellement l'uvre des juristes. De plus, si l'on veut de manire traditionnellerattacher le phnomne de la lgalit une thorie classique du droit, ce sera assurment la philosophie iuspositiviste que l'on pensera en ce qu'elle privilgie ce mode forme etmarginalise trs fortement les autres axes.

    En effet, dans sa version extrme, elle soutient que la lgalit d'une rgle ou lacomptence d'un pouvoir est une condition ncessaire et suffisante de validit. La lgalitemporte prsomption irrfragable de validit.

    On tient ici montrer les limites du formalisme: le test positiviste de Kelsen conduit unobstacle de taille: si on se trouve au sommet de la pyramide, c'est--dire la Constitutionde 1830, et que l'on se pose la question de sa validit, elle qui valide(rait) toutes lesnormes infrieures, quelle norme se rapporte cette Constitution? C'est l tout leparadoxe du fondement du positivisme et de la norme fondamentale: le positivismerepose sur une norme non positiviste. Kelsen suppose qu'il y a une "Grund norme",suprieure la Constitution puisque chaque norme doit tre habilite par une normesuprieure.

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    B. Le ple de l'EFFECTIVIT, mode empirique, pragmatique, champd'tude privilgi de la pense sociologique

    Mme si ce critre est issu de la sociologie, aujourd'hui, on peut grce la monte enpuissance de l'Etat-Providence, lui reconnatre un statut juridique: on veut qu'une normeatteigne certains objectifs concrets.

    Ce critre est galement complexe en ce sens qu'il mesure la relle mise en vigueur de lanorme. L'effectivit dtermine le comportement de ses destinataires. Encore faut-ildistinguer deux types de destinataires.

    Les destinataires primaires ( comportement du public), c'est--dire les hommeset les femmes de la rue, dont le lgislateur souhaite orienter les attitudes (soit pardes rgles impratives, qui demandent tre obies, soit par des rgles

    suppltives, qui ne demandent qu' tre utilises). Les destinataires secondaires ( application puis sanction par l'administrateur),

    c'est--dire toutes les autorits comptentes pour valuer l'application etsanctionner les infractions (on pense aux juges, assistants sociaux, aux diffrentscorps de police): il s'agit donc des autorits administratives et rpressivescharges de mettre en uvre et sanctionner les rgles s'adressant aux destinatairesprimaires.

    F. Ost et M. van Kerkhove vont plus loin dans le dveloppement de cette ide. D'une part,ils constatent qu'une rgle effective l'gard des uns (beaucoup de poursuites sontexerces et les condamnations sont lourdes et systmatiques), n'est pas ncessairement

    effective l'gard des autres. Cette distinction en entrane un autre: effectivit des normes(entendues comme normes primaires de comportement), et effectivit des sanctions(entendues comme normes secondaires de sanction: les infraction sont-elles dtecteset signales? Sont-elles poursuivies? Sont-elles sanctionnes?)

    D'autre part, les auteurs insistent sur le fait que l'effectivit se mesure par rapport l'ensemble des effets (prvus, imprcis, pervers, d'une norme. On peut distinguer lesnotions suivantes:

    L'effectivit d'une norme, c'est--dire le degr de conformisation de sesdestinataires primaires et secondaires.

    L'efficacit d'une norme: on se demande alors si elle atteint les objectifspoursuivis.

    L'efficience d'une norme qui est un concept davantage conomique qui pose laquestion du rapport "cot/bnfice". N'y aurait-il pas une autre possibilitd'atteindre les mmes objectifs, mais de manire moins onreuse.

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    On peut ici faire un lien avec 2 notions vues prcdemment: "subsidiarit" et proportionnalit. En effet, il semble que l'on demande de plus en plus souvent aulgislateur de prouver l'effectivit, l'efficacit et l'efficience des normes qu'il veutpromouvoir. Or, cette exigence, qui met mal le postulat de rationalit du lgislateur,rencontre d'une part le test de subsidiarit. On s'interroge sur la pertinence du moyen

    choisi par le lgislateur en vue d'atteindre l'objectif vis: il s'agit bien l de la notiond'efficacit d'une norme. D'autre part, le test de proportionnalit des normes prsupposeune analyse de l'effectivit et de l'efficience (rgle efficace au moindre cot).

    Enfin, F. Ost introduit une distinction entre l'effectivit simplement extrieure,comportementale ou encore effectivit matrielle d'une effectivit symbolique,entendue comme l'aptitude de la norme marquer les reprsentations de ses destinataires,en offrant des modles de sens, en diffusant des valeurs collectives, en crdibilisant desfictions fondatrices, c'est--dire en reconnaissant par-l au droit son rle le plusfondamental, au-del de sa capacit diriger des conduites.

    En ce sens, la loi influence les comportements (effectivit matrielle) mais galement lesreprsentations des sujets de droit, les valeurs qu'ils ont de la socit et qui constituentdes repres qui instituent l'ordre social. Il s'agit-l de l'effectivit symbolique.

    On peut faire une dissociation, toujours symbolique, entre les gouverns et lesgouvernants.

    Chez les gouverns (les sujets de droit), on observe

    a. que les dlinquants enfreignent l'effectivit matrielle de la norme (ilsdsobissent et donc, dans leur chef, la norme est non effective), alors qu'ilsrespectent l'effectivit symbolique de cette mme norme en cherchant laclandestinit pour chapper la sanction mais galement pour ne pas chercher se vanter de l'infraction commise. Ces dlinquants admettent ainsi, avec unecertaine (mauvaise) conscience le bien-fond de la norme qu'ils ont nanmoinstransgresse. Le dlinquant est bien conscient qu'il a viol une norme.

    b. alors que la figure du rebelle, du rvolt, est tout autre: il proclame haut et fortsa dsobissance civile et reconnat de la sorte un rejet de l'effectivit symboliquede la loi en plus de l'avoir rendue ineffective matriellement.

    De mme, les deux formes d'effectivit peuvent se dissocier dans l'intention dulgislateur. F. Ost prend pour exemple l'attitude des gouvernants face la problmatiquede l'interruption volontaire de grossesse; en apparence, l'Etat franais en 1970 nedpnalisait pas l'IVG, affirmait son attachement l'effectivit symbolique de la normequi ne dpnalisait pas l'IVG, mais en poursuivant trs peu les auteurs de ces infractions,

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    l'Etat, de manire schizophrnique, rendait cette norme ineffective pratiquement.

    Traditionnellement, on peut rattacher le mode empirique la pense sociologique (oupense juridique) qui dans sa version extrme soutient que l'effectivit d'une rgle ou laforce d'un pouvoir est une condition ncessaire et suffisante de validit: prsomption

    irrfragable de validit. La seule manire raliste de parler de validit d'une rgle, c'est desoutenir qu'elle prsente une certaine probabilit d'tre appliques par les tribunaux.

    C. Le ple de la LEGITIMITE, mode axiologique, champ d'tude privilgide la pense iusnaturaliste

    Le dbat sur la validit de la norme se porte ici sur les valeurs mtapositives poursuiviespar la loi: les objectifs suprieurs que la norme tente d'atteindre peuvent tre d'ordrereligieux, thique, humanitaire, la question pose dans le cadre de ce ple de lgitimitse formule de la manire suivante: la loi est-elle conforme aux valeurs auxquelles nous

    tenons? il n'existe pas encore de test de lgitimit qui permettrait d'amliorer la politiquegnrale sous-tendant l'adoption de lois nouvelles. Il n'empche que ce ple fort inspirde la pense iusnaturaliste (appele aussi philosophie de droit naturel) est sous-jacent auxdeux autres.

    Ici, on peut dire que, dans sa version extrme, la philosophie naturaliste soutient que lalgitimit d'une rgle ou l'autorit d'un pouvoir est une condition ncessaire et suffisantede leur validit irrfragable et suffisante de validit.

    III. L'interaction dynamique entre les ples

    A. INTERACTION

    Les trois ples de validit interagissent ncessairement sans pour autant se recouvrirtotalement.

    F. Ost a reprsent, ds 1984, les diffrents axes sous forme de cercles scants,interagissant:

    LEGALITE EFFECTIVITE

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    LEGITIMITE

    Sollen juridique

    Cette grille partir de laquelle on peut jauger la validit d'une norme appelle lescommentaires suivants:

    Si on trouve une norme au centre des 3 cercles, on peut croire en une validitmaximale.

    Si on trouve une norme au centre de 2 cercles, sa validit est certaine mais pas

    garantie. Si la prsence de la norme ne se trouve que dans 1 seul cercle, sa validit est

    douteuse. Si on trouve une norme en dehors des 3 cercles, on peut conclure qu'elle est

    invalide par rapport ce systme juridique-ci, mais peut-tre pas par rapport unautre.

    B. DYNAMIQUE

    Cette grille n'est toutefois pas statique: elle est agite de mouvements centrifuges etcentriptes, ce qui rend l'interaction entre les cercles dynamique.

    Mouvements centrifuges

    Ex: la perte progressive de la validit de la norme qui pnalisait l'IVG en France et enBelgique, ce qui a amen cette norme une situation de dsutude avant celled'abrogation pure et simple.

    Rem: Il suffit qu'un agent de l'ordre juridique dcide de la relancer pour qu'une loi sortede la dsutude. Exemple: en 2006, la ministre de la Justice a rappel l'existence del'article 268 du Code pnal.

    Mouvements centriptes

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    Ex: certaines pratiques commerciales coutumires pouvant acqurir un jour un statut denorme lgale.Souvent, on reconnat, aprs un certain temps, ce qui tait inacceptable auparavant. C'estce phnomne qu'illustrent les 2 citations suivantes.

    Les lois se tiennent en crdit non parce qu'elles sont justes mais parce qu'elles sont lois.(Montaigne)

    A dfaut de faire que ce qui fut juste soit fort, on a fait ce qui est fort soit juste. (Pascal)

    C. Variation des cercles

    Y a-t-il ncessit ce que les cercles soient scants?

    a. Recouvrement total

    LEGALITEEFFECTIVITE

    LEGITIMITE

    Ce cas semble idal mais, heureusement, n'existe pas. Formalisme dans un code, parexemple, pratique chez les destinataires primaires et secondaires et idal atteint ne serecouvrent jamais 100%. Mme, supposer que cette hypothse puisse exister, elle neparat pas humaine (et donc pas lgitime) puisque la libert y serait mise en pril; quand il

    n'y a aucun cart entre rgle et pratique, on entre dans la figure de l'Etat totalitaire.De mme, quand on comprend la thorie de l'abus de droit, on prend conscience quel'esprit de justice ne peut tolrer que le lgal prenne le pas sur le lgitime.

    b. Dsimplication des cercles

    LEGALITE EFFECTIVITE LEGITIMITE

    Ce modle de l'anomie est celui de l'anarchie (ce qui ne signifie pas "absence de loi"mais "la loi du plus fort" ou "la loi de la jungle"). Cette situation est heureusement trsrare et trs courte dans l'histoire.

    Le recouvrement partiel et dynamique (allant de la prcarit la dsutude d'une norme)semble le modle qui convient le mieux notre socit.

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    IV. Rflexions dictes par la mise en vidence de tel ou tel critrede validit

    La validit des normes a t tudie en recourant 3 critres: la lgalit, l'effectivit et lalgitimit.

    On se demande, pour chacun des critres, quelle qualit ou quelle discipline fait-onappel.

    Cela revient galement se demander quel type de critre dpend du droit et est prsenten arrire-plan.

    A. Mise en vidence du critre de la LEGALITE

    a. le raisonnement adopt

    Lorsqu'on met en vidence le critre de la lgalit, on adopte un raisonnement de juristeet l'on se situe dans une thorie positiviste du droit: le fondement du droit est trouverdans le droit lui-mme et l'on ne se pose pas la question des valeurs poursuivies par la loi.

    Ds lors que l'on s'attache une vrification formelle, les seules questions que l'on sepose pour vrifier la validit d'une loi sont les suivantes:

    Est-ce que l'autorit ayant adopt la loi tait comptente? Cette autorit a-t-elle respect la procdure d'adoption? Cette autorit a-t-elle vrifi que la norme tait conforme l'ensemble des autres

    normes s'imposant elle (ex: droit international)?

    Dans cette acception, le fondement de la validit de la norme se trouve l'intrieur dusystme juridique.Ce systme est dfendu par Kelsen, qui voit le droit comme une pyramide.Dans cette pyramide, chaque disposition prise un tage doit tre conforme aux rgles del'tage suprieur.

    Il existe plusieurs rgles pour palier aux problmes d'incohrence: La norme la plus rcente l'emporte et abroge la loi antrieure (abrogation

    implicite) La norme suprieure de la hirarchie des normes l'emporte

    Paradoxe kelsnien: monisme/ pluralisme des systmes juridiques Qui prime de laConstitution et de la loi internationale?

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    b. la dimension du pouvoir si le critre de la lgalit est mis en vidence

    Le pouvoir trouve sa dimension essentielle dans la comptence adopter tellerglementation: le pouvoir a-t-il la comptence d'adopter cette loi?

    c. L'instrument mis en uvre

    Ici, il s'agit de la norme elle-mme, dans toute la prcision (article un tel, ) de sonexpression crite.

    B. Mise en vidence du critre de l'EFFECTIVIT

    a. Le raisonnement adopt

    Dans cette approche, le droit n'est rien d'autre que la traduction, un moment donn,des besoins sociaux. Cette approche se veut pragmatique. Le droit n'a de sens que dans lamesure o il permet de traduire des besoins sociaux.

    Exemple: si la socit devient plus librale, on va permettre l'avortement; si la socitveut une plus grande libert des travailleurs, on va adopter la loi des 35 heures.

    b. La dimension du pouvoir si le critre de l'efficacit est mis en vidence

    Dans cette hypothse, le pouvoir est li sa capacit de pouvoir s'assurer de la mise en

    uvre de la loi adopte. Le pouvoir est li la force qu'il peut dployer dans l'exercice deses fonctions.

    c. L'instrument mis en uvre

    Ici, ce sont prioritairement les faits qui retiennent l'attention. Ces faits correspondent-ils la norme? La norme peut-elle rencontrer des faits prsents ou futurs qui dmontreraientque la norme est effective?

    C. Mise en vidence du critre de la LEGITIMITE

    a. Le raisonnement adopt

    Lorsque l'on met en vidence le critre de la lgitimit, on adopte un comportement demoraliste: on considre que le droit doit tre valu selon des valeurs et on se situe dans

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    une vision iusnaturaliste du droit.

    Dans cette perspective, il y a lieu d'examiner s'il y a plusieurs valeurs poursuivies et dedterminer dans quelle mesure elles fondent le droit. A cet gard, les lois doiventtranscrire les rgles qui existent dans la nature des choses et qui contiennent les valeurs

    pour lesquelles la socit existe.Cette faon de procder est-elle dangereuse?

    L'exemple du communisme est, cet effet, clairant. le communisme se fonde sur unsystme iusnaturaliste, en vertu duquel on essaye de traduire la valeur de l'galit desgens. Ds lors, les textes de droit sont inspirs par cette seule cause et les auteurs de la loisont les seuls pouvoir apprcier comment on peut servir cette valeur. On a vu quelserrements une telle faon de procder a pu aboutir.

    b. La dimension du pouvoir si le critre de la lgitimit est mis en vidence

    Dans cette hypothse, le pouvoir est li au bien et le bien renvoie l'autorit (au sens latindu terme "auctoritas", qui renvoie l'ide d'"auctor": celui qui fait grandir. La loi faitdonc grandir la socit et la fait accder quelque chose de mieux.

    c. l'instrument mis en uvre

    Ici, la discussion porte sur des valeurs.

    Conclusion

    Dans les faits, l'on constate que le droit est un mlange des 3 approches. L'important estde pouvoir situer une loi par rapport ces diffrents critres et de pouvoir dterminer quelcritre a le plus de poids (la loi est-elle plus dicte par les valeurs, ou l'est-elle par desconsidrations d'opportunit, )

    CHAPITRE 4: LA REDACTION DE LA LOI

    Tant la rdaction des textes rglementaires que leur mise en uvre reposent sur un certainnombre dinstruments qui permettent au juristes dorganiser, de comprendre, dappliquervoire, la cas chant, de faire voluer le droit.

    Parmi ces instruments, on relve en particulier les concepts , il sagit de llment debase par lequel le juriste nomme les lments de la ralit partir de caractristiques quipermettent dembrasser nombre de faits . Ces concepts rentrent dans des catgoriesen fonction dun ou plusieurs traits communs ces concepts. Enfin, le langage du droit a

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    quelques particularits par rapport au langage commun.Ces diffrents instruments sont important pour le travail de fond que le juriste doitaccomplir. Cest travers ces instruments quil accueille les faits, leur donne unesignification et en dduit le rgime juridique quil souhaite leur appliquer ou leurapplique: ainsi se dfinit lopration de qualification.

    Le propos sappuie principalement sur les dveloppements de Bergel ( attention, il estfranais, signification diffrente en France et en Belgique). Nombre dexemple sont tirsde la loi belge du 8 dcembre 1992 relative la protection de la vie prive lgard destraitements de donnes caractre personnel.

    SECTION 1: LES CONCEPTS

    1.NOTIONS ET ROLES DES CONCEPTS

    Le dictionnaire Robert dfinit le concept comme la reprsentation mentale gnrale etabstraite des objets . Il sagit de con-capere ( prendre ensemble) des faits ou desobjets isols et de les nommer. Le concept, notait dj Kant, est la base mme delentendement, cd de notre capacit la fois de comprendre le rel et de pouvoircommuniquer en bonne intelligence avec autrui.

    Le langage du droit opre de mme. Il utilise des concepts qui lui permettent de cerner laralit sociale. Ainsi, larticle 1 de la loi de 1992 pour dfinir le concept de donne caractre personnel renvoi nombres de concepts de base: les conceptsd information , de personne physique , d identifiabilit directe ou indirecte ,etc.

    Dans quelle mesure, le concept en droit se distingue t-il du concept dfinit de maniregnrale? Jestaz insiste sur le fait quen droit, le concept un sens fonctionnel bienprcis qui est celui daider relier une ralit un rgime juridiqueprvu pour lacatgorie laquelle le concept se rattache. Ainsi, la notion d identifiabilit permet enconjonction avec la prsence des autres notions de faire entrer une information dans lacatgorie des donnes caractre personnel et de dclencher lapplication du rgimeprvu par la loi. (voir texte page 41)

    Le rle des concepts est donc double: il sagit la fois dassurer la prvisibilitjuridiquepour celui qui doit obir ou souhaite profiter de la loi. Il peut mieux connatreles enjeux juridiques de la situation dans laquelle il se meut sil peut reprer dans cettesituation les lments du concept et, dans le mme temps, pour celui qui doit appliquer laloi, dviter la discrimination puisquil est tenu dappliquer le mme rgime si la situationrelve du mme concept, par dfinition abstrait et indpendant de la spcificit hic etnunc des phnomnes sociaux.

    Qui labore les concepts juridiques?

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    Sans doute, dans notre culture juridique du moins est-ce au lgislateur de crer oudsigner les concepts. Mais on note que le juge peut galement intervenir, soit enprcisant la signification dun concept, soit en crant de nouveaux concepts dits alorssui generis , lorsque le juge ne peut se contenter des concepts existants, il cre partir

    dautres concepts, un concept nouveau ( voir supra 27 Allemagne).Ltude de la qualification des faits et du travail dinterprtation par le juge rvleralimportance du rle du juge dans la comprhension voire de la cration des concepts.

    Enfin, on note que les concepts peuvent tre tiroir; un concept comme celui de donnes caractre personnel renvoi dautres concepts, qui ncessitent chacundtre analyss, ainsi, celui de donnes , didentifiabilit , dindividus .

    2. LA DEFINITION DES CONCEPTS

    La dfinition reprsente lart de donner le sens du mot en relevant les lments qui le

    caractrisent. A cet gard, relevons demble les liens qui existent entre la comprhensiondun concept et son extension.Lanalyse des lments de la dfinition: la comprhension du concept permet dedterminer lextension de celui-ci. Par exemple, ladresse dune socit nest pas unedonne caractre personnel car la dfinition se rfre une personne physique. Leslments de la dfinition permettent dexclure certaines ralits sociales qui ne vrifientpas les lments du concept.

    A linverse, cest confront la ralit sociale, la ncessit de fixer lextension dunconcept juridique pour dcider de lapplication ou non de tel rgime juridique, que lejuriste va sinterroger sur lexacte comprhension de celui-ci.La loi contient des dfinitions par comprhension , dautres par extension .

    A. classification selon laspect substantielDistinction entre concepts dits prcis et objectifs laissant peu de marge de manuvre linterprtation du juge et des concepts plus flous laissant linterprte une large libertdapprciation. Ainsi, une lgislation sur lurbanisme permettra la constructiondimmeubles tages de 50 mtres dans un primtre par ailleurs dfini alors que larticle1 paragraphe 8 e la loi de 1992 dfinira le consentement, comme une manifestation devolont, libre, spcifique et informe , chacun des lments renvoyant la ncessitpour le juge ou lautorit administrative de dcoder chacun des lments de cettedfinition.

    Lutilisation de telles notions floues est susceptible dinterprtation volutive etsubjective et reprsente une dlgation normative aux juges.

    Parmi ces notions caractre flou, on pointe, en particulier, des notions qui se rfrent des comportements humains et impliquent une comparaison avec la ralit normale.CEst-ce que les anglo-saxons dsignent par le terme de standards . On en trouve,

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    semble-t-il, dans tous les systmes de droit. Les standards , concept plus troit quecelui de notion souple, correspond des critres fonds sur ce qui parait normal etacceptable dans la socit au moment o les faits doivent tre apprcis. ce sont des instruments de mesure des comportements et des situations, mis en uvre par devritables rgles de droit qui permettent dintgrer dans lordre juridique, des ralits et

    des valeurs sociales du moment et de moduler ainsi la port de la rgle de droit. Ainsi ,les concepts de BPF, de rgles de lart , de bonne foi , etc

    De manire gnrale, le droit romano-germanique apprcie les concepts flous (ordrepublic, bonne murs, bonne foi,etc.) qui laissent place une interprtation volutive dudroit, et ce en fonction dun contexte social qui peut changer. Bergel numre diffrentsintrts lutilisation de tels concepts.

    Ces concepts lastiques sont indispensable au droit qui, institu pour discipliner lamatire vivante, est tenu dpouser la plasticit de la vie et qui ne peut le faire que grce lexistence de dfinitions larges, non de notions indfinies comme on le dit parfois.

    Ces notions sont ds lors utiles pour maintenir lquilibre entre lordre juridique et lemilieu social .

    Les concepts vitent la fracture que lvolution des ralits ne manquerait pas deprovoquer dans un ordre juridique compltement rigide.

    Enfin, ils permettent dintroduire des principes correcteurs cot des principes directeursqui dominent tout ordre juridique: la bonne foi permet dinflchir la rigueur de leffetobligatoire du contrat; la conformit aux bonnes murs et lordre public limite leprincipe de lautonomie de la volont

    B. classification selon laspect formelCornu distingue ce propos les dfinitions relles et celle terminologiques ,suivant que le concept se rfre la substance mme des lments et attributs spcifiquesdu concept envisag ou, au contraire, ne se conoit que par rapport ce cadre lgislatifdonn et na de valeur que dans ce cadre et pour lapplication de celui-ci.

    Ainsi, larticle 1582 CC dfinit la vente . Ce faisant, il entend donn un dfinitionvalable peu importe le domaine juridique dapplication choisi. Lorsque le juge aura qualifier une transaction pour les besoins de lapplication de la loi fiscale, il se rfrera cette notion. Tout autre est la dfinition de larticle 1 paragraphe 1 de la notion de donnes caractre personnel , cette dfinition sentend au sens de la prsente loi .En dautres termes, lorsque dans le cadre dune autre loi, par exemple la loi daccs auxdocuments administratifs, une disposition interdit laccs aux donnes ditesconfidentielles, le juge ne pourra pas se servir de la dfinition de la loi de 1992, pourdfinir ce quil entend pat donnes confidentielles .

    Si Bergel note que cette technique de la dfinition terminologique relve plutt dumodle lgislatif anglo-saxon o la loi, tant duvre dexception, doit commencer par

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    dfinir son extension, on doit bien noter que les lois rcentes mme dans nos payscommencent galement souvent par des dfinitions. (voir texte page 45)

    SECTION 2: LES CATEGORIES JURIDIQUES

    1. LA NOTION DE CATEGORIE

    La catgorie juridique regroupe un ou plusieurs concepts selon les lmentsfdrateurs qui permettent de les dissocier dautres concepts et de leur appliquer alorsdes rgimes juridiques distincts. Sans doute, les catgories peuvent se situer diffrentsniveaux.La catgorie est plus encore que le concept, une notion fonctionnelle, la ressemblance oula dissemblance qui fdrent ou au contraire sparent les concepts sopre au regarddune finalit: lapplication dun rgime juridique. ( voir texte page 45)

    La catgorie juridique permet la qualification. la qualification consiste rattacher unfait, un phnomne juridique une catgorie juridique en principe existante enfonction de la nature des lments qui caractrisent cette catgorie. il sagit dedcouvrir la ou les catgories dont relve tel phnomne et dexclure la prsence dautrescatgories.

    2. LA DERTERMINATION DES CATEGORIESUne catgorie se caractrise la fois par ce qui unit les concepts relevant dune mmecatgorie (les critres de liaison) et ce qui les distingue des lments dautres catgories(les critres de dissociation).

    Ce qui unit tous les concepts de la catgorie donne caractre personnel , lesdonnes de sant, les donnes judiciaires, le donnes de crdit, cest le fait quil sagitdinformations permettant lidentification dune personne physique. De tels critres deliaisons permettent en creux de rvler les critres de dissociation. Est exclue du rgimede la catgorie des donnes caractre personnel toute information laquelle manque unde ces lments soit quelle ne concerne pas une personne physique, soit quelle nenautorise pas lidentification.

    La flexibilit des catgories permet leur adaptation des situations nouvelles. Cetteadaptation est souvent ralise par le fait quune des deux catgories tant rsiduelle peutaccueillir tous les lments ne correspondant pas la catgorie ferme.

    Des catgories formes dun seul concept ont clat en multiples catgories. Ainsi, lacatgorie sret personnelles , longtemps identifi au concept de cautionnement, aclat en sous-catgories: sret personnelle accessoire et sret personnelle nonaccessoire lorsquil a fallu reconnatre de nouvelles formes de srets personnellescomme la garantie premire demande.

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    3. LA TYPOLOGIE DES CATEGORIES

    Les catgories peuvent entre elles entretenir des relations diffrentes. Selon le type derelations, quelques rgles sappliqueront quant au rgime juridique des faits auxquels cescatgories sappliquent.

    I. catgories cumulatives et catgories alternativesLappartenance dun fait une catgorie peut ne pas exclure son appartenance une autrecatgorie dans la mesure o cette autre catgorie relve dun tout autre critre de liaisonnullement exclusif de celui qui unit la premire catgorie. Ainsi une vache peut trequalifie la fois de meuble (catgorie 1), de chose fructifre (catgorie 2) et de choseindivisible (catgorie 3). Il sagit alors de catgorie cumulative . A linverse, il estexclu que la vache soit la fois meuble et immeuble car le critre de liaison qui unitchacune de ces deux catgories est exclusif de lappartenance lautre catgorie: lescatgories sont alors dites alternatives.

    II. Catgories quivalentes et catgories hirarchisesSi les critres de liaison qui unissent deux catgories sont placer sur le mme pied,prenant en considration des lments totalement diffrents, on parle de catgoriesquivalentes. Ainsi, la donne relative mon collgue et nanmoins ami publie dans unjournal relve de deux catgories totalement diffrentes: la donne est caractrepersonnel et soumise la loi de 1992, mais elle est galement information journalistiqueet en tant que telle soumise la loi sur la presse et par exemple entrane la responsabilitde ldition.A linverse, les catgories peuvent se prsenter de manire hirarchises. Ainsi, larticle 8de la loi de 1992 traite des donnes relatives la sant. Il est clair que cette catgorie estsous-catgorie de la catgorie plus vaste des donnes caractre personnel.

    III. Consquences des catgories sur le rgime juridique des faits relevant deplusieurs catgories.Lorsquune situation (ou un phnomne) tombe sous plusieurs catgories les rglessuivantes sappliquent:Il faut premirement distinguer selon que les catgories en cause sont alternatives oucumulatives. Lorsquil sagit de catgories alternatives, quivalentes entre elles, ou dontlune est une sous catgorie de la catgorie oppos de lautre, le principe est que laqualification dans lune des catgories exclut lapplication de lautre et celles des rglesqui lui sont propres. Il faut donc choisir entre lune ou lautre.

    Sil advient quune situation se rattache nanmoins aux deux catgories la fois,

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    autrement dit sil sagit dun hybride (tel que la proprit littraire et artistique parexemple) il faut tenir compte des lments disparates qui la constituent.

    Trois types de solutions sont alors concevables:

    Soit, procdant par dissection, on spare les lments de nature oppose, pourappliquer chacun, de manire distributive, le rgime propre la catgorie laquelle ilappartient: ex=>le droit moral de lauteur sera incessible et insaisissable; son droitpatrimonial sera cessible et saisissable.

    soit, par une approche globale, on cons