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depuis les accords de paix de 1996 4 . Mais s’il y a consensus sur le modèle à appliquer et les secteurs à développer (tourisme, mégaprojets d’infrastruc- tures, palme africaine, pétrole, mines, commerce...), le secteur privé guatémaltèque n’en constitue pas moins un groupe hétérogène où il existe des disputes pour la répartition des richesses. En ce sens, la candidate du parti au pouvoir (UNE), Mme Sandra Torrés, représentait un danger pour l’oligarchie traditionnelle puisque le gouver- nement de son ex-mari, M. Alvaro Colom, avait favorisé l’émergence de nouveaux entrepreneurs, notamment dans les secteurs des transports, de la construction et des fertilisants… Bénéficiant d’un réel soutien populaire dans les zones rurales, où elle dirigeait les programmes de cohésion sociale, Mme Torrés a été frappée d’une interdiction de se présenter aux élections à la suite d’une intense campagne médiatique 5 . Le 8 octobre 2010, lors du programme télévisuel Libre Encuentro, M. Dioniso Guttierez, l’un des patrons les plus puissants du Guatemala, n’hésita pas à accuser le couple présidentiel d’être à l’origine des menaces de mort qu’il recevait. Cet exemple n’est pas sans rappeler l’affaire Rodrigo Rosenberg, cet entrepreneur guatémal- tèque assassiné le 10 mai 2009 après avoir enre- gistré une vidéo dans laquelle il expliquait que s’il devait lui arriver malheur, il faudrait en tenir responsables M. Colom et sa femme. Finalement, une enquête de la Commission Internationale Contre l’Impunité (CICIG), chargée d’aider au démantèlement des pouvoirs illicites, prouva que Rosenberg avait orchestré sa propre mort dans le but de déstabiliser le gouvernement. Pour le journaliste Andrés Cabanas, cet épisode révèle un modèle « néo-autoritariste » à travers lequel les élites guatémaltèques intègrent la violence à leur boîte à outils politique : « Celle-ci se voit légitimée si le projet hégémonique de l’oligarchie est menacé. » L’enquête autour du suicide de Rosenberg a également démontré l’existence de liens entre le secteur économique et le crime organisé. Depuis la fin du conflit armé, le pays est devenu l’un des principaux lieux de transit de la drogue vers le Mexique et les Etats-Unis. Le Guatemala hébergerait sept cartels particulièrement actifs dans les départements du Péten, d’Alta Verapaz, la n° 196 octobre-novembre 2011 Sommaire Édito p. 1 Guatemala, le pays où la droite est reine par Grégory Lassalle Actualités p. 4 Procès pour Génocide : la justice avance, les défenseurs de l’impunité lui opposent des obstacles par Marine pezet Nettoyage social: un phénomène lié à la violence de la guerre civile par Amandine Grandjean et Vanessa Góngora Activités p. 8 Projet vidéo du Collectif Guatemala : retour sur les circuits de diffusion communautaires et le festival de documentaires organisé à Guatemala Ciudad par Amandine Grandjean Brèves p. 9 Bloc Notes p. 11 Collectif Guatemala p. 12 Collectif Guatemala 21 ter, rue Voltaire 75011 Paris - France Tel/Fax : + 33 (0)1.43.73.49.60 [email protected] http://collectif-guatemala.chez-alice.fr/ Permanence : Du lundi au vendredi 10h-18h Directrice de publication : Isabelle Tauty Chamale ISSN 1277 51 69 Ont participé à ce numéro : Amandine Grandjean, Vanessa Gongora, Marine Pezet, Grégory Lassalle, Isabelle Tauty, Louise Levayer. O n estime parfois que la multipli- cation de candidats issus du même bord politique fragilise leur camp. Pas au Guatemala. Le deuxième tour de l’élection présidentielle, qui s’est tenu le 6 novembre, a vu s’affronter deux candidats de droite : le général Otto Pérez Molina, du Parti Patriote (PP), et M. Manuel Baldizón, du parti Lider (Liberté démocratique rénovée). Lors du premier tour, le 11 septembre, le duo arrivé en tête — avec respectivement 31,8% et 20% des suffrages — a devancé un trio lui disputant la radicalité conservatrice : le libéral pro-militariste Eduardo Suger, du parti Compromis, Rénovation et Ordre (CREO), l’entrepreneur Mario Amilcar Estrada, de l’Union du Changement Nationaliste (UCN), et le pasteur évangélique Haroldo Caballeros, du parti Vision et Valeurs (Viva). Portée par le Front Large, issu d’une alliance entre l’Union Révolutionnaire Nationale Guatémaltèque (URNG) 1 , et le parti indigéniste Winaq 2 , l’unique candidate de gauche — l’ancien prix Nobel de la paix Rigoberta Menchú — n’a re- cueilli que 2,8% des voix. Ni le renouvellement de l’Assemblée, ni celui des mairies, le même jour, n’ont inversé la tendance. Sur 158 députés, deux se revendiquent de gauche. Ce n’est le cas que de cinq maires, sur 333. Dans un contexte d’exacerbation de la violence (17 homicides par jour en moyenne) et de géné- ralisation de l’impunité (le taux de résolution des crimes ne dépasse pas 6%), le processus électoral s’est caractérisé par une surenchère dans les promesses de fermeté sur les questions de sécurité 3 . Les candidats arrivés en tête sont d’ailleurs ceux qui proposaient les solutions les plus radicales : rétablissement de la peine de mort, militarisation du pays, intervention d’entreprises privées, tolérance zéro… Pourtant, ce vote, que certains pourraient interpréter comme une réponse à la violence, légitime paradoxalement des partis financés par les acteurs à l’origine de celle-ci : le secteur privé et le crime organisé. Selon le chercheur Fernando Solis, « sur dix candidats, sept sont des entrepreneurs ou des représentants du secteur privé ». Tous proposent de maintenir la « recette néolibérale » instaurée 1 Guatem Solidarité Lettre des adhérents du Collectif Guatemala Bimestriel Solidarité Guatemala n°196 oct - nov 2011 Guatemala, le pays où la droite est reine par Grégory Lassalle

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Édito: Guatemala, le pays où la droite est reine Actualités: Procès pour Génocide / “Nettoyage social” Activités: Projet vidéo du Collectif Guatemala

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depuis les accords de paix de 19964. Mais s’il y a consensus sur le modèle à appliquer et les secteurs à développer (tourisme, mégaprojets d’infrastruc-tures, palme africaine, pétrole, mines, commerce...), le secteur privé guatémaltèque n’en constitue pas moins un groupe hétérogène où il existe des disputes pour la répartition des richesses. En ce sens, la candidate du parti au pouvoir (UNE), Mme Sandra Torrés, représentait un danger pour l’oligarchie traditionnelle puisque le gouver-nement de son ex-mari, M. Alvaro Colom, avait favorisé l’émergence de nouveaux entrepreneurs, notamment dans les secteurs des transports, de la construction et des fertilisants… Bénéficiant d’un réel soutien populaire dans les zones rurales, où elle dirigeait les programmes de cohésion sociale, Mme Torrés a été frappée d’une interdiction de se présenter aux élections à la suite d’une intense campagne médiatique5. Le 8 octobre 2010, lors du programme télévisuel Libre Encuentro, M. Dioniso Guttierez, l’un des patrons les plus puissants du Guatemala, n’hésita pas à accuser le couple présidentiel d’être à l’origine des menaces de mort qu’il recevait.

Cet exemple n’est pas sans rappeler l’affaire Rodrigo Rosenberg, cet entrepreneur guatémal-tèque assassiné le 10 mai 2009 après avoir enre-gistré une vidéo dans laquelle il expliquait que s’il devait lui arriver malheur, il faudrait en tenir responsables M. Colom et sa femme. Finalement, une enquête de la Commission Internationale Contre l’Impunité (CICIG), chargée d’aider au démantèlement des pouvoirs illicites, prouva que Rosenberg avait orchestré sa propre mort dans le but de déstabiliser le gouvernement. Pour le journaliste Andrés Cabanas, cet épisode révèle un modèle « néo-autoritariste » à travers lequel les élites guatémaltèques intègrent la violence à leur boîte à outils politique : « Celle-ci se voit légitimée si le projet hégémonique de l’oligarchie est menacé. »

L’enquête autour du suicide de Rosenberg a également démontré l’existence de liens entre le secteur économique et le crime organisé. Depuis la fin du conflit armé, le pays est devenu l’un des principaux lieux de transit de la drogue vers le Mexique et les Etats-Unis. Le Guatemala hébergerait sept cartels particulièrement actifs dans les départements du Péten, d’Alta Verapaz,

la n° 196 octobre-novembre 2011

Sommaire

Édito p. 1

Guatemala, le pays où la droite est reine par Grégory Lassalle

Actualités p. 4

Procès pour Génocide : la justice avance, les défenseurs de l’impunité lui opposent des obstacles par Marine pezet

“Nettoyage social” : un phénomène lié à la violence de la guerre civile par Amandine Grandjean et Vanessa Góngora

Activités p. 8

Projet vidéo du Collectif Guatemala : retour sur les circuits de diffusion communautaires et le festival de documentaires organisé à Guatemala Ciudad par Amandine Grandjean

Brèves p. 9

Bloc Notes p. 11

Collectif Guatemala p. 12

Collectif Guatemala 21 ter, rue Voltaire

75011 Paris - France Tel/Fax : + 33

(0)1.43.73.49.60 [email protected]

http://collectif-guatemala.chez-alice.fr/

Permanence : Du lundi au vendredi 10h-18h Directrice de publication : Isabelle Tauty Chamale ISSN 1277 51 69

Ont participé à ce numéro : Amandine Grandjean, Vanessa Gongora, Marine Pezet, Grégory Lassalle, Isabelle Tauty, Louise Levayer.

O n estime parfois que la multipli-cation de candidats issus du même bord politique fragilise leur camp. Pas au Guatemala.

Le deuxième tour de l’élection présidentielle, qui s’est tenu le 6 novembre, a vu s’affronter deux candidats de droite : le général Otto Pérez Molina, du Parti Patriote (PP), et M. Manuel Baldizón, du parti Lider (Liberté démocratique rénovée). Lors du premier tour, le 11 septembre, le duo arrivé en tête — avec respectivement 31,8% et 20% des suffrages — a devancé un trio lui disputant la radicalité conservatrice : le libéral pro-militariste Eduardo Suger, du parti Compromis, Rénovation et Ordre (CREO), l’entrepreneur Mario Amilcar Estrada, de l’Union du Changement Nationaliste (UCN), et le pasteur évangélique Haroldo Caballeros, du parti Vision et Valeurs (Viva).

Portée par le Front Large, issu d’une alliance entre l’Union Révolutionnaire Nationale Guatémaltèque (URNG)1, et le parti indigéniste Winaq2, l’unique candidate de gauche — l’ancien prix Nobel de la paix Rigoberta Menchú — n’a re-cueilli que 2,8% des voix. Ni le renouvellement de l’Assemblée, ni celui des mairies, le même jour, n’ont inversé la tendance. Sur 158 députés, deux se revendiquent de gauche. Ce n’est le cas que de cinq maires, sur 333.

Dans un contexte d’exacerbation de la violence (17 homicides par jour en moyenne) et de géné-ralisation de l’impunité (le taux de résolution des crimes ne dépasse pas 6%), le processus électoral s’est caractérisé par une surenchère dans les promesses de fermeté sur les questions de sécurité3. Les candidats arrivés en tête sont d’ailleurs ceux qui proposaient les solutions les plus radicales : rétablissement de la peine de mort, militarisation du pays, intervention d’entreprises privées, tolérance zéro… Pourtant, ce vote, que certains pourraient interpréter comme une réponse à la violence, légitime paradoxalement des partis financés par les acteurs à l’origine de celle-ci : le secteur privé et le crime organisé.

Selon le chercheur Fernando Solis, « sur dix candidats, sept sont des entrepreneurs ou des représentants du secteur privé ». Tous proposent de maintenir la « recette néolibérale » instaurée

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Guatem Solidarité

Lettre des adhérents du Collectif Guatemala Bimestriel

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Guatemala, le pays où la droite est reine

par Grégory Lassalle

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Edito

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violer les droits environnementaux du pays, finance l’armée dans sa zone d’exploitation ; d’Union Fenosa, entreprise espagnole de distribution d’électricité qui serait à l’origine de nombreux assassinats de syndicalistes dans le sud du San Marcos ; ou encore d’Holcim, entreprise suisse de ciment qui ferme les yeux sur les stratégies de répression et de criminalisation de son partenaire local, Cementos Progreso.

C’est dans ce contexte d’exacerbation de la violence que le discours de fermeté du général Pérez Molina semble avoir convaincu l’électorat. Chef de l’intelligence militaire en 1992, de l’état-major de l’armée en 1994 et membre de la commission de paix du gouvernement en 1996, M. Pérez Molina joue de son statut d’ancien militaire pour incarner une solution répressive à ce qu’il dénonce comme une simple « délinquance ». Un câble diplomatique diffusé par WikiLeaks (et publié par le journal en ligne Plaza Pública), révèle que M. Pérez Molina aurait reçu, lors des élections de 2007, des financements de la part des familles Castillo, Novella, Herrera

et Gutiérrez, toutes membres de l’oligarchie nationale9. Si, en ce qui concerne les élections qui viennent de se tenir, les bailleurs de fonds du PP préféraient la discrétion (« afin de ne pas être victimes d’extorsions »), M. Pérez Molina faisait figure de « candidat préféré de l’oligarchie10 ».

Discret sur ses sources de financement, M. Pérez Molina l’est également au sujet de sa participation aux campagnes militaires

menées, en 1982, dans la zone de l’Ixil, l’une des plus touchées par la répression selon la Commission d’éclaircissement historique (CEH) des Nations unies. Deux documents, le plan de campagne militaire dit « plan Sofia » (1982) et le film Titular de hoy : Guatemala11, montrent M. Pérez Molina agissant en tant que responsable d’unités militaires d’interven-tions dans les communautés de la région. Connu en temps de guerre sous le nom de « commandant Tito » et de « Capitán Fosforito » (« Capitaine Allumette ») pour sa disposition à brûler les maisons dans les villages qu’il rasait, M. Pérez Molina nie : « Il n’y a pas eu de massacres. Quand j’étais là-bas, au contraire, les gens ont retrouvé le moral. Ma présence a changé la situation de la guerre en Ixil12. »

Liens avec le crime organisé

Discret, M. Pérez Molina l’est enfin sur ses liens avec le crime organisé. Issu de la promotion 1973 de l’Ecole polytechnique d’où a surgi « le syndicat » — une orga-nisation accusée d’activités criminelles de contrebande et de trafics en tout genre —, il en serait l’un des membres actifs, selon les Archives de la sécurité nationale (NSA), un centre de recherche basé à Washington. Dans le cercle proche de M. Pérez Molina ainsi qu’au sein du PP, on compte nombre de per-sonnalités accusées de participer à des structures criminelles. C’est le cas du chef de campagne de l’ancien militaire, le lieutenant Héctor Lopez Bonilla, proche de feu Jose Luis Ligorria, lui-même accusé d’être l’un des dirigeants du groupe de narcotrafiquants Zetas13. C’est également le cas de M. Jorge Hernandez, ancien membre des services de renseignement militaire (où il œuvrait sous les ordres de M. Pérez Molina), responsable présumé d’une vague d’assassinats de chauffeurs de bus, en 2008, laquelle avait permis la promotion du message sécuritaire de M. Pérez Molina. Ce dernier assure ne pas vouloir « négocier avec les narcos14 » et ne recevoir aucun financement issu d’activités crimi-nelles. Pourtant, dans le câble diplomatique précité, M. Pérez Molina reconnaît être en contact avec l’une des plus importantes familles du narcotrafic : les Mendoza. Mais seulement avec le « petit frère Mendoza, le plus honnête15 »…

de Huehuetenango et de San Marcos. L’écrivain Dario Villaseñor a montré que le crime organisé investissait directement dans le pays en « achetant des propriétés agricoles, à travers le système bancaire, en investissant dans toutes sortes d’entreprises6 ».

Par ailleurs, le blanchiment d’argent aurait trouvé dans la coûteuse campagne électo-rale une niche idéale. Un rapport de l’orga-nisation non gouvernementale Insight Crime sur les groupes de pouvoir sis dans le département du Péten (principale zone du narcotrafic) souligne que les principaux partis politiques sont intimement liés à des groupes de narcotrafiquants. C’est le cas des deux partis qui disputeront le second tour, en novembre7. Pour M. Francisco Dell’Anese, représentant de la CICIG au Guatemala, « on ne peut pas encore parler de narco-Etat. (…) Mais il y a des secteurs et territoires où l’Etat n’a pas le monopole de la violence8 ». Une violence généralisée qui s’est con-vertie en un cauchemar quotidien pour la population guatémaltèque.

Les multinationales, alliées avec le secteur privé national et les gouvernements successifs, sont également productrices de violence. C’est le cas de Goldcorp Inc, entreprise minière canadienne qui méconnaît les décisions de la Cour intera-méricaine des droits de l’homme, lui imposant de suspendre ses activités ; de Perenco, une entreprise franco-anglaise du secteur pétrolier qui, non contente de

Un garde de sécurité privé se tient devant les affiches de campagnes du second tour dans les rues de Guatemala Ciudad, le 5 novembre 2011. (AP photo / Rodrigo Abd)

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M. Baldizón, son opposant au second tour, siège depuis 2004 comme député pour le département du Péten, devenu stratégique tant pour les multinationales que pour les trafiquants de drogue. Réélu sous les couleurs de l’UNE, qu’il quitte en 2009 pour fonder Lider, dont il est l’actuel secrétaire général, M. Baldizón propose lui aussi une réponse « dure » à la violence. A commencer par le rétablis-sement de la peine de mort. Il promet néanmoins de maintenir les programmes sociaux inaugurés par l’actuel président. Il a par ailleurs défendu, en 2004, la « loi des seniors » qui permet aux personnes de plus de 65 ans de toucher une pension de retraite. Sa communication, massive, récupère volontiers la rhétorique révolu-tionnaire : « seul le peuple peut sauver le peuple », ou encore « Faisons la révolu-tion ». Il n’en demeure pas moins tout aussi proche du secteur privé que son adversaire du PP…

En 2004, M. Baldizón représente le Congrès pour la négociation des controversés accords de libre-échange avec les Etats-Unis. En 2008, il fait voter la « loi Fonpetrol », qui permet à l’entreprise Perenco de renouveler pour quinze ans un contrat d’exploitation de pétrole marqué par de nombreuses irrégularités. Selon Insight Crime, M. Baldizón ferait partie de la « liga mayor » au Péten, c’est-à-dire de ces « groupes régionaux disposant d’une représentation législative, qui ont bénéficié - à travers leurs ONG ou par le biais d’entreprises - de fonds publics16 ».

Avocat, chrétien convaincu, M. Baldizón est issu d’une fa-mille dont la for-tune provient, toujours selon Insight Crime, du commerce illégal de pièces archéologiques. Aujourd’hui, il dirige le groupe Balvar, présent dans le transport, le commerce, l’énergie, la construction, l’hôtellerie, les télécommunica-

tions. Le journal en ligne 5to Poder estime que certaines de ses entreprises — à la rentabilité très faible — pourraient être uti-lisées comme des sociétés écrans destinées au blanchiment d’argent. Enfin, un câble diplomatique révélé par WikiLeaks indique que Lider aurait acheté ses députés au prix de 61 000 dollars chacun17.

Si M. Pérez Molina, qui avait fait alliance avec le parti Viva, faisait figure de favori du second tour, M. Baldizón misait sur le soutien des populations rurales, auxquelles il a promis de fournir des fertilisants gratuits ainsi que de nouvelles aides sociales18. D’autre part, M. Baldizón disposait de l’appui de l’UCN (7,68% au premier tour), du parti de la Grande Alliance Nationale (parti au pouvoir entre 2004 et 2008), de certains secteurs de l’UNE, tout comme de celui de Winaq, qui souhaitait avant tout éviter qu’un militaire ayant participé à un génocide ne devienne président.

Rien ne laisse anticiper un changement substantiel de la politique menée par les différents gouvernements depuis les accords de paix de 1996. Concernant la violence qui déchire le pays, les liens qui semblent unir MM. Baldizón et Pérez Molina avec le crime organisé et le secteur privé font craindre à Fernando Solis que la stratégie de l’un ou de l’autre ne se résume, une fois élu, à « favoriser tel ou tel cartel et maintenir la violence à des niveaux acceptables afin qu’elle n’affecte pas le climat des affaires19 ». ■

1 L’URNG est le parti de l’ancienne guérilla, active entre 1960 et 1996. Le conflit armé guaté-maltèque a provoqué la mort de 250 000 personnes. Selon la Commission pour l’éclaircissement historique (CEH) des Nations Unies, l’armée guatémaltèque est responsable de 85 % des violations des droits humains perpétrées pendant ce conflit. 2 Winaq est un parti fondé par Mme Rigoberta Menchú et diverses personnalités du mouvement indigéniste maya guatémaltèque (« Winaq » signi-fie « être humain intégral, complet »). 3 Données de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG). 4 Sauf mention contraire, les citations sont tirées d’entretiens avec l’auteur. 5 Sentence du 8 août 2011, Cour suprême de jus-tice, en référence à l’article 186 de la Constitution de la République. 6 Dario Villaseñor, « El narcotrafico », Rebelión, mars 2010. 7 « Grupos de Poder en Petén : territorio, política y negocios », El Periodico, Guatemala ciudad, 1er août 2011. 8 Sandra Weiss, « Dell’Anese. La lucha contra la impunidad inicia con intocables », ContraPunto, août 2011. 9 « Otto Pérez : financistas, alianzas, Nebaj y los Mendoza », Plaza Pùblica, août 2011. 10 Enfoque electoral 3, « ¿Elecciones. Democracia, al servicio de quién ? », El Observador, Guatema-la ciudad, septembre 2011. 11 Le « plan Sofia » est un document de cam-pagnes militaires daté d’août 1982, rendu public récemment. Titular de hoy : Guatemala a pour sa part été tourné par le journaliste Mikael Wahlforss en 1982. 12 Rogelio Nuñez, « Otto Pérez Molina, mucho más que “mano dura” », Infobae.com América, septembre 2011. 13 Sylvia Gereda, « Edelberto Torres : “En la medida en que la “Sandrofobia” se sitúa como mayor problema, se dejan de ver otros” », El Pe-riodico, Guatemala Ciudad, décembre 2010. 14 « Otto Pérez Molina, mucho más que “mano dura” », op. cit. 15 « Otto Pérez : financistas, alianzas, Nebaj y los Mendoza », op. cit. 16 « Grupos de Poder en Petén : territorio, política y negocios », op. cit. 17 « Los poderes ocultos estan en el congreso », La Hora, Guatemala Ciudad, Septembre 2011. 18 Rolando Miranda, « Baldizon reitera a retaltecos ofrecimiento del bono 15 », Prensa Libre, Guate-mala Ciudad, septembre 2011. 19 Crosby Giron, « Entrevista con Fernando Solìs, coordinador de El Observador : “La derecha no tiene un candidato que pueda disputarle a Sandra Torres la próxima elección” », Albedrío, no-vembre 2010.

Tract du Parti Patriote, promettant qu’une houe, un jet à fertilisant et 5 quintaux de fertilisant seront offerts avec ce bon au cours du premier mois de gouvernement d’Otto

Pérez Molina.

Résultats du second tour (06/11/11) Otto Perez Molina (PP) : 53.74% Manuel Baldizon (Lider) : 46.26%

Sur le total des votes exprimés : Nuls : 2.80% Blancs : 1.30% Participation : 60,83% (source: TSE)

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D es avancées historiques pour la lutte contre l’impunité Plusieurs procès pour juger des crimes du passé sont en

cours. Hector Rafael Bol de la Cruz, ancien directeur de la Police Nationale (PN) de 1983 à 1985, et Jorge Alberto Gómez López, ancien directeur du quatrième corps de la PN, sont en processus de jugement pour la disparition for-cée en 1984 de Edgar Fernando García, étudiant et leader syndical, époux de Nineth Montenegro, une des fondatrices du Groupe d’Appui Mutuel (GAM)3. Par ailleurs, début 2012 vont commencer les débats publics en vue de juger Pedro Pimentel Ríos, ancien militaire accusé d’avoir participé au mas-sacre de Las Dos Erres, ainsi que Pedro García Arredondo, ancien chef du Commando 6 de la PN, accusé entre autres de la disparition forcée de l’étudiant Édgar Sáenz Calito. Enfin, quatre anciens pa-trouilleurs d’autodéfense civile (PAC) et un ancien comisionado militaire vont prochainement être jugés pour leur participation pré-sumée au massacre de Plan de Sánchez (département de Baja Verapaz) le 18 juillet 1982, durant lequel 268 personnes ont péri. Mais surtout, c’est l’arrestation le 17 juin dernier de Hector Mario López Fuentes, chef de l’Etat-Major de l’Armée en 1982-83, qui a permis de réactiver enfin la plainte pour génocide. Le 10 octobre, les autorités judiciaires ont émis trois mandats d’arrêt à l’encontre de José Mauricio Rodríguez Sánchez, Directeur des services secrets (G2) de l’Etat-Major, Oscar Humberto Mejía Víctores, Ministre de la défense de Efraín Ríos Montt et chef d'Etat entre août 1983 à janvier 1986, et Luis Mendoza García, Directeur des

Actualités

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Opérations (G3) de l'État-Major. José Mauricio Rodriguez Sanchez a été arrêté le 12 octobre et se trouve actuellement en prison préventive, en attente de l’ouverture de son procès. Luis Mendoza García est introuvable, déclaré fugitif. Quant à Oscar Humberto Mejía Víctores, il s’est rendu à la justice le 25 octobre.

Ces arrestations ont pu se réaliser notamment grâce à la ténacité de Claudia Paz y Paz, Procureur Générale à la tête du Ministère Public (MP) depuis décembre 2010. Celles-ci représentent des avancées considérables pour la justice transitionnelle et une lueur d’espoir pour tous les défen-seurs des droits humains. Toutefois, les partisans de la droite contre-

insurrectionnelle et de l’impunité ne se sont pas fait attendre pour riposter.

La stratégie de la défense des accusés Depuis ces arrestations, les avocats des inculpés pour génocide déploient tout un arsenal judiciaire à l’encontre des procu-reurs du MP et des plaignants, afin d’em-

pêcher la tenue d´un procès.

Les audiences prévues afin d’ouvrir le procès de López Fuentes ont plusieurs fois été reportées notamment en raison de son état de santé, la défense ayant présenté un rapport de l’Institut National des Sciences Légistes (INACIF) indiquant qu’il n’était pas en mesure de se présenter au tribunal. L’ouverture du procès a donc été suspendue, dans l’attente d’un autre avis médical. Comme lui, Mejía Víctores a été transféré à l’hôpital militaire. Le 31 octobre, l’INACIF a constaté que celui-ci n’était mentale-ment et physiquement pas en mesure de faire face à un éventuel procès. Il aurait récemment souffert d'un AVC lui paralysant le corps et l’empêchant de pouvoir s’exprimer. La défense a donc demandé à ce que le procès soit définitivement clos. Toutefois, le MP s’y oppose fermement et a sollicité une seconde expertise médicale indépendante, demande acceptée par le Juge. Les résultats devraient bientôt être rendus publics. Enfin, le 23 novembre dernier, la Cour d’appel en matière pénale a donné raison à la défense de López

Fuentes, qui avait présenté un recours afin de récuser la juge Patricia Flores en charge du cas de génocide. Ses avocats lui reprochent d’avoir émis des opinions personnelles, mettant en doute sa partialité. Le Centre d’Action Légale pour les Droits de l'Homme (CALDH) et l’AJR ont donc désormais trente jours pour présenter un recours contre cette décision auprès de

Procès pour Génocide : la justice avance, les défenseurs de l’impunité lui opposent des obstacles

Par Marine Pezet

L’année 2011 a marqué un grand tournant pour ceux qui luttent contre l'impunité et pour la justice au Guatemala. Plusieurs responsables de crimes contre l’humanité arrêtés, une sentence historique pour le massacre de las Dos Erres1, mais surtout, pour la première fois depuis le dépôt de la plainte de l'Association pour la Justice et la Réconciliation (AJR) en 20012, l’arrestation de trois anciens hauts responsables de l’armée durant le gouvernement de Ríos Montt, accusés de crimes contre l'humanité et de crime de génocide contre le peuple Maya Ixil, dans le département du Quiché. Ces procès emblématiques représentent un enjeu considérable pour le Guatemala et suscitent des réactions hostiles parmi les proches de militaires.

« Alerte : Des groupes parlementaires complices de l impunité tentent de protéger des génocidaires / Parce que le génocide ne peut rester impuni ! ».

Source : http://www.caldh.org/

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Actualités

1 Quatre anciens militaires ont été condamnés en juillet dernier, voir la Lettre à l´adhérent 195. 2 En 2001, l'Association pour la Justice et la Réconcilia-tion (AJR), fondée par des témoins du génocide prove-nant de cinq régions du pays, a déposé une plainte auprès du Ministère Public contre le Haut Mandat militaire d’Efraín Ríos Montt pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis durant son mandat en tant que chef d'Etat de mars 1982 à août 1983, dans le cadre de la politique militaire de « terre brûlée ». 3 Dans le cadre de ce procès, deux anciens agents de la PN ont été condamnés à 40 ans de prison en 2010, voir article (en espagnol) de novembre 2010 sur le site d´ACOGUATE : http://acoguate.blogspot.com/2010/11/sentencia-en-caso-de-desaparicion.html 4 Guatemala: Tapar el genocidio con un dedo, Carlos Figueroa Ibarra, http://connuestraamerica.blogspot.c om/2011/11/guatemala-tapar-el-genocidio-con-un.html , 26 novembre 2011 5 "Nuestra Voz, Nuestra Memora: El genocidio en Guate-mala.", disponible en intégralité sur http://paraqueseconozca.blogspot.com/ 6 Convention pour la prévention et sanction du crime de

génocide (1948). Article II : « (...)La mort de membres d’un groupe, une atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe; la soumission intention-nelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; des mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe; le transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe.»

la Cour Suprême de Justice. Si cette dernière confirmait la décision, la juge serait définitivement remplacée. Ainsi, la défense des inculpés use et abuse de tous les outils juridiques dont elle dispose afin de retarder au maximum l’ouver-ture du procès, stra-tégie dilatoire bien connue des tribu-naux guatémal-tèques en matière de droits humains. Des craintes ravivées chez les défenseurs des droits humains avec l’élection d’Otto Pérez Molina. La victoire d’Otto Pérez Molina aux élections présidentielles du 6 novembre dernier a encouragé les familles de militaires à agir. Seulement quelques jours après le résultat des élections, le 13 novembre, la nouvelle association Familias (Familles et Amis de Militaires Agissant Solidairement) s’est rassemblée dans les rues pour exiger le retrait immédiat des charges pesant contre les membres de l’armée accusés de crimes commis durant le conflit armé. Sur les pancartes brandies par les mani-festants, on pouvait lire par exemple : « Grâce aux soldats et non aux poètes, nous pouvons parler en public » ou encore « Grâce aux soldats et non aux politiques, nous pouvons voter ». Cette manifestation s’inscrit dans le sillage d’une campagne médiatique agressive qui a débuté le 31 octobre dernier avec la publication dans la presse nationale d’un communiqué de l’Association des Vétérans Militaires du Guatemala (AVEMILGUA ) demandant aux tribunaux que « cesse la persécution

judiciaire » à l’en-contre de ses membres accusés de crimes de génocide et contre l’humanité. AVEMILGUA , qui regroupe des mili-taires à la retraite considérés de ligne dure, affirme que les plans de cam-pagne militaire sur lesquels s’appuie le MP pour fonder son accusation, « à aucun moment n’ordon-nent les massacres

ou l'extermination d’un groupe ethnique en particulier ». Par ailleurs, selon l’association, « on est en train de juger du personnel militaire dans des tribunaux qui ne sont pas compétents ». AVEMILGUA conclut ce communiqué par un véritable appel à la lutte en lançant à tous les vétérans militaires un « appel d’alerte à l’unité pour affronter cette nouvelle menace ». Cette faction de la droite contre-insurrectionnelle tente de déstabiliser les succès du MP, dirigé par Claudia Paz y Paz, qui a surmonté d’innombrables obs-tacles pour parvenir à instruire ces procès. Preuve en est la plainte déposée en novembre par Ricardo Méndez-Ruiz Valdez, fils de l’ancien Ministre de l’Intérieur Ricardo Mendez Ruiz durant le gouvernement de Rios Montt, contre 26 prétendus "ex-guerilleros" (parmi les-quelles une victime de disparition forcée et des personnes décédées) qu’il accuse de son enlèvement en juin 1982. Parmi les 26 accusés, il nomme deux cousines de Claudia Paz y Paz et une sœur du Président Colom. L’analyse de cette plainte et de la liste de ses 26 prétendus ravisseurs démontre que le dossier est faible en termes juridiques

et factuels : pour Carlos Figueroa Ibarra, il est clair que l’objectif de cette demande n’est pas la recherche de la justice, mais plutôt « le début de la guerre qu’opposera le prochain gouvernement à Claudia Paz y Paz »4. Cela est confirmé par un entretien dans le journal El Periódico du 29 novembre, dans lequel Ricardo Méndez-Ruiz affirme que son action est dirigée contre cette dernière, qui aurait « décidé de lancer une chasse contre les soldats ». Il ajoute que sa plainte ne fut en « aucun cas impro-visée : nous l'avons travaillée ensemble avec des officiers des services secrets à la retraite et d’autres services toujours en activité ». Enfin, le même jour, on a également appris qu’une autre plainte avait été déposée par Estela de Mata contre 36 prétendus anciens guérilleros, dont le propre père de Claudia Paz y Paz. Elle les accuse d’être responsables de 125 actes de terrorisme et de l’assassinat de son mari le Colonel Furlán en 1992. Figueroa conclut dans son article que « l’intention de tout ceci va bien au-delà de cet intérêt conjoncturel. Cela est lié à la lutte entre la mémoire et l’oubli des crimes contre l’humanité commis fondamentalement par les agents de l’Etat guatémaltèque de cette époque. Présenter les guérillas et l’État comme deux démons également pervers, ou la contre-insurrection comme une victime, ce n’est autre chose que de fermer les yeux sur le génocide » . ■

Présentation du documentaire de CALDH sur le génocide C’est dans une salle comble qu’a été présenté le 9 novembre dernier, dans la ville de Guatemala,

le documentaire “Notre voix, notre mémoire: le génocide au Guatemala” .5

Étaient présents des membres de la AJR et de CALDH, ainsi que de nombreux représentants de la société civile nationale et internationale. A travers des images d’archives et des témoignages

d’experts et de survivants du génocide, le documentaire démontre que les atrocités commises par l’armée du Guatemala contre les populations Mayas correspondent aux éléments

constitutifs du crime de génocide, selon sa définition juridique6. Ce documentaire a été réalisé pour CALDH par l’association Luciérnaga, qui depuis 2000 développe un projet

ayant pour objectif la récupération, la préservation, et la diffusion des archives visuelles historiques qui relatent l’histoire guatémaltèque récente. Il a été conçu comme un outil

éducatif pour sensibiliser en particulier les jeunes, qui pour la plupart ignorent qu’un génocide a été perpétré dans leur pays.

Autre point alarmant : le 22 novembre, le Congrès a entamé un débat concernant le projet de loi numéro 3711 visant à modifier le code pénal. Le texte initial envisageait que les condamnés âgés de plus de 80 ans, ou souffrant d’une maladie incurable, puissent purger leur peine dans leur domicile et non

en prison, à l’exception de personnes condamnées pour des crimes contre l’humanité.

Les députés du Parti Patriote mettent la pression pour que cette exception soit retirée du texte de loi. Si cette nouvelle version de la loi était approuvée, elle serait synonyme

d’amnistie pour les responsables de violations des droits humains durant le

conflit armé.

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Actualités

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“ Nettoyage social” : un phénomène lié à la violence de la guerre civile

par Vanessa Góngora et Amandine Grandjean

Au Guatemala, on entend souvent parler de “limpieza social” ou nettoyage social. Selon Claudia Samayoa, militante et directrice de l’Unité de protection aux défenseur-es des droits humains (UDEFEGUA), cette expression mal utilisée dissimule en réalité une véritable politique d’exécutions extrajudiciaires. Grâce à quelques extraits d’une de ses analyses sur le sujet, nous en expliquerons ici ses origines et implications avant de présenter des exemples de cas qui ont récemment fait écho.

C oncept et apparition d'une nouvelle politique de terreur

Dans une analyse parue en 2007 dans El Observador1, C. Samayoa montrait comment se développait, sous le gouvernement d’Oscar Berger (2004-08), le concept de nettoyage social ou exécutions extrajudiciaires, dont une partie est direc-tement liée à des institutions de l’Etat, telles que la police: « A l’intérieur même de la structure des appareils de sécurité de l’Etat, opèrent des appareils clandestins et paramilitaires qui, par des pratiques datant de la guerre et de l’époque de répression contre-insurrectionnelle ouverte, exécutent une politique de “nettoyage social”, prolongeant un contrôle social ». Ces actions de répression et ces pratiques héritées de la guerre civile visent à con-trôler la population par la terreur (assassinats, souvent précédés de torture).

Dans cet article d’analyse, elle rappelait que c’est « en 2005, [qu’]ont commencé à apparaitre dans les médias les caractéris-tiques des gangs de jeunes, les identifiant comme des groupes qui se consacrent au satanisme, construisant de cette façon un imaginaire social qui devient la base du besoin d’“éliminer”, quel qu'en soit le coût, ce “fléau social”. »

En effet, le bureau du Procureur des Droits de l’Homme (PDH) confirmait (2006) de « claires évidences d’exécutions extra-judiciaires envers des jeunes, stig-matisés, dont certaines liées à la Police Nationale Civile (PNC). »

A la même époque, il y avait, toujours selon C. Samayoa, « une campagne publique de soutien au nettoyage social. »

Selon une enquête –citée dans la même analyse– réalisée sur cette situation par les organisations de défense des droits humains, « il existe de véritables certitudes sur l’origine de ce phénomène : la crimi-nalisation construite historiquement et renforcée par l’État […]. Les assassinats

sont perpétrés par des groupes identifiés par les gens comme des membres de la police ou des personnes qui agissent avec la complicité de ces derniers. Enfin, la PNC et le Ministère Public (MP) ne réa-lisent pas d’enquêtes au moment de trouver les corps, puisque d’après leur apparence, ils décident qu’il s’agit de délinquants et sont traités comme des citoyens de seconde catégorie, l’apparition de leurs cadavres générant par la même occasion la peur au sein de la communauté. »

En absence de l'État, la loi du talion règne

La violence générée pendant le conflit armé est donc aujourd'hui devenue struc-turelle au Guatemala. Le Fond pour la Paix2 définit un État défaillant comme « un État qui ne parvient pas à assurer ses missions essentielles » et élabore annuellement un Indice mondial des États défaillants construit à partir de 12 indicateurs3. Bien souvent, ce type d’indica-teur ne parvient pas à aborder la complexité des défaillances structurelles d’un pays, néanmoins ils sont à l'origine de la mise en œuvre d’une politique de sécurité au détriment d’une autre. Cette année, le Guatemala se trouve 72ème -sur 177- à égalité avec la Chine, entre le Lesotho et le Bénin.

Cependant, les analystes refusent l’appli-cation du terme “État défaillant” car ici, l’État brille tout simplement par son absence. Déjà en 1999 la Commission pour la vérité historique soulignait la dynamique de rupture du monopole de l’État dans l’usage de la violence au détriment d’un monopole local et segmenté : « pendant les années de l’affrontement armé, l’incapacité de l’État guatémal-tèque pour apporter des réponses aux légitimes demandes et revendications sociales déboucha sur la formation d’un réseau inextricable d’appareils parallèles de répression qui supplantèrent l’action judiciaire des tribunaux, usurpant ses fonctions et ses prérogatives. On installa

de fait, un système punitif illégal et sou-terrain, orchestré et dirigé par les structures de l'intelligence militaire. »4

Encore aujourd’hui, les citoyens se re-trouvent d’une part, devant un État faible en terme de prévention du délit, qui ne protège pas –volontairement ou par omission– les droits à la vie et à l’intégrité de la personne, et d’autre part un État fort (répressif) qui use de politiques de sécurité réactives et sélectives pour faire face au nouvel “ennemi interne” : le crime organisé5. Comme le souligne Luis Solano à propos du gouvernement d’Oscar Berger, « combattre l’insécurité citoyenne en général ne faisait pas partie des plans » au contraire de celle « qui s’attaque au système de la propriété »6 et porte préjudice aux intérêts privées (entreprises, investis-sements étrangers, etc.).

C. Samayoa conclut que « le maintien du modèle de l’ennemi interne recréé par les figures du terroriste/défenseur des droits humains et du trafiquant de drogue/jeune criminalisé, permet à plusieurs acteurs de satisfaire divers intérêts, à savoir : 1) Assurer le contrôle d’une population, appauvrie par les politiques économiques et les changements dans le modèle de production, par la violence et la peur de l’autre développée par les medias. 2) Détourner l’attention des réseaux du crime organisé et mettre la pression sociale pour le combat contre la délinquance commune.

3) Affaiblir les instances de sécurité publique par la corruption et en les im-pliquant dans des activités telles que les exécutions extrajudiciaires 4) Inciter les citoyens à recourir à des réponses individuelles et violentes face à l’insécurité, en oubliant les réponses communautaires et solidaires 5) Rendre impossible l’action sociale collective par la terreur générée à diffé-rentes échelles : individuelle (défenseur-es des droits humains) et nationale ». ■

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Actualités

Trois affaires différentes synonymes d’une même réalité

Les « Encapuchados » (cagoulés) de Panajachel

Au lendemain du passage de la tempête Agatha, les habitants de Panajachel –petite ville au bord du lac Atitlán, département de Sololá- organisent un Comité de Sécurité afin de réaliser des patrouilles pour la prévention de la délinquance. Mais, très vite, le projet dérive et se transforme en un “véritable escadron de nettoyage social”7. Le 19 octobre, la journaliste et résidente de Panajachel, Lucía Escobar, dénonçait ouver-tement dans le quotidien El Periódico8 les principaux dirigeants du Comité de Sécurité, « représentants et défenseurs des Encapuchados ». Le journaliste indépendant Alberto Arce identifie “ les cagoulés” comme « un groupe paramilitaire chargé de “faire justice” contre tous ceux qui altèrent l’ordre publique. » Le lac Atitlán est l’un des principaux lieux touristiques du Guatemala et c’est pour protéger cette manne économique que les ennemis déclarés du Comité sont les hippies, les rockers, les jeunes aux cheveux longs, prétendus responsables de tous les maux9. Suite à la publication de son article, L. Escobar a reçu des menaces de mort directes de la part de membres du Comité et a dû abandonner son lieu de résidence. Reporters Sans Frontières a exigé à l’Etat guatémaltèque la protection de la journaliste et l’ouverture d'une enquête10. Deux personnes, liées au maire de la ville, ont déjà été arrêtées pour les menaces contre la journaliste, cependant, de nombreux sympathisants du Comité continuent de les soutenir, jusqu’aux portes du centre de détention de Sololá.

Le meurtre de Lisandro Guarcax (25 août 2010)

C’est à la suite d’une longue enquête de la division contre le crime organisé du Ministère Public, que la bande des Pujujiles a été désarticulée et certains de ses membres arrêtés et mis en examen. Les détenus sont les auteurs présumés d’une trentaine d’enlèvements autour de la ville de Sololá, dont celui de l’artiste Maya Kaq’chiqel Lisandro Guarcax11. Un des membres de la bande, aujourd’hui devenu témoin protégé, aurait confirmé que les Pujujiles avaient effectivement enlevé Lisandro, demandé une rançon exorbitante à sa famille, puis l’aurait torturé et exécuté car le jeune artiste avait identifié ses ravisseurs12. L’enquête spéci-fique sur l’affaire de Lisandro a elle été très lente à cause du changement constant des juges en charge du dossier et la volonté à peine cachée des autorités locales de faire passer ce crime contre un défenseur des droits culturels des peuples indigènes, comme un délit commun. La Commission Internationale Contre l’Impunité au Guatemala (CICIG) a réalisé une reconstruction des faits afin de vérifier que l’attaque de Lisandro n’était pas due au hasard. L’auteur matériel de l’enlèvement, Andrés Ramos Pérez, a été appré-hendé au début du mois de novembre et son procès commencera en décembre pour les délits de meurtre, enlèvement, conspiration et association illicite. Ses trois autres complices sont encore en liberté.

Le lynchage de San Juan Cotzal 13

C’est sans doute l’une des affaires les plus complexes, dans laquelle sont poursuivis les auteurs du lynchage de Pedro Ródriguez Toma, en octobre 2009, dans la ville de San Juan Cotzal, située dans la région Ixil, une des zones les plus fortement touchées par le conflit armé (département du Quiché). Cette affaire rassemble plusieurs actes criminels, parmi lesquels: - La détention illégale et torture d’un mineur à cause de son apparence physique, et soupçonné pour cela d’appartenir à un gang. - La torture et exécution extrajudiciaire d’un agent de la Police Nationale Civile, père du jeune homme cherchant à défendre son fils de la criminalisation et de l’humiliation publique. - Blessures graves contre un témoin oculaire des faits, membre de l’Équipe d'Études Communau-taires et d’Action Psychosociale (ECAP). Les images recueillies par Diego Zambrano sur son téléphone sont à l’origine de l’enquête sur le maire de la ville José Pérez Chen. Zambrano a dû changer de domicile et de région de travail suite aux menaces proférées contre lui et sa famille par l’entourage du maire. - Enlèvement, détention illégale et torture d’un soldat à cause de son apparence physique (entre janvier et février 2010). Le maire est resté presque un an “en cavale ”, caché chez lui et protégé par ses voisins. Le début de son procès est programmé pour le mois de mars, pour les délits suivants : détention illégale, abus de pouvoir, dissimulation, association illicite de personnes armées, discrimination, exécution extrajudiciaire et incitation à la violence. Ses gardes du corps, son comité de sécurité –comptant entre ses rangs de nombreux ex-PAC– et des agents de la police municipale sont impliqués depuis le mois de juillet dans divers procès.

1 Claudia Samayoa, ¿Qué modelo de seguridad impula Óscar Berger?, El Observador nº5, avril 2007. 2 Le Fund for Peace est une ONG qui travaille dans la prévention de conflits et la promotion d'un système de sécuri-té durable. 3 Indicateurs sociaux: pression démo-graphique, déplacés/réfugiés internes, legs des groupes violents, migration chronique et soutenue. Indicateurs économiques: développement écono-mique inachevé, dćclin écnomique sévère. Indicateurs policiers et mili-taires: criminalisation ou délégitima-tion de l'État, dégradation progressive des services publics, application arbi-traire de la loi et violation des droits humains, forces de sécurité comme « un État dans l'État », montée des oligarchies, intervention d'autres États. 4 Commission pour la vérité historique, Guatemala: Memoria del silencio. Chapitre 3: Effets et conséquences de l'affrontement armé. Paragraphe 116. 1999. 5 International Crisis Group soulignait dans son rapport d'octobre 2011, Gua-temala: Narcotráfico y Violencia, qu'un montant significatif de l'aide multilaté-rale reçue par le Guatemala est dévolue au renforcement du système de sécuri-té, dans le cadre régional de la lutte contre le crime organisé. 6 Luis Solano, Política de limpieza social y marco ideológico subyacente, El Observador nº5, avril 2007.

7 Juan Luís Font, Terror en Panajachel,

El Periódico, 31 Octobre 2011. 8 Lucía Escobar, Cuervos, ojos y demo-nios, El Periódico, 19 Octobre 2011. 9 Alberto Arce, La impunidad de los encapuchados de Panajachel, Plaza Pública, 30 Octobre 2011. Alberto Arce, La impunidad (que si-gue) en Panajachel, Plaza Pública, 11 Novembre 2011. 10 Une journaliste menacée et accusée de consommer de la drogue par un comité de sécurité locale sur une chaîne de télévision, Reporter Sans Frontières, 31 Octobre 2011. 11 Voir brève dans LA 191.

12 Presuntos plagiarios vinculados en

muerte de líder indígena, El Periódico, 25 février 2011. 13

Résumé de l'affaire par UDEFEGUA disponible sur: http://www.youtube.com/watch?v=cF44d9vI2Go. Voir également l'arti-cle, San Juan Cotzal: crónica de un linchamiento, El Periódico, 28 août 2011.

Quelques manifestations de ce “nettoyage social” Le lynchage : Action collective ayant pour but d’infliger un châtiment exemplaire à un délinquant présumé. 234 lynchages dans le pays (entre janvier et octobre 2011), principalement dans les départements de Huehuetenango, Quetzaltenango, Guatemala, Quiché et San Marcos, les plus touchés par le conflit armé. (Source: Communiqué de presse du Haut Représentant des Nations Unies pour les Droits Humains au Guatemala (OACNUDH), 30 Octobre 2011). Les Comités de Sécurité : Commencent à apparaître en 2007 sous formes de patrouilles. Majoritairement présents dans les départements de Guatemala, Sololá et Quiché. Selon les estimations des autorités, cela représente environ 1400 personnes organisées. Intérêts politico-économiques et de réaménagement du territoire sous-jacents. (Source : Investigan acciones de comités de seguridad, El Periódico, 3 Novembre 2010).

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La vidéo, outil pédagogique alternatif « Les vidéos étant réalisées à partir de la réalité, ces moyens de communication locaux sont un instrument important. Grâce à cette méthodologie nous pouvons éduquer toutes les tranches d’âge et catégories de la popu-lation : adultes, jeunes, enfants, femmes et anciens, démocratisant et socialisant les thématiques de la réalité que nous vivons chaque jour », reportait une réalisatrice de l’association de femmes Mayas NUTZIJ, spé-cialisée dans la communication sociale et basée à Sololá. Cette année, elle faisait partie des groupes ou personnes individuelles qui ont organisé des circuits de diffusion dans les communautés de leurs régions respectives. Grâce au travail des réalisa-teurs/rices, une vingtaine de projections ont été organisées dans les départements de Chimaltenango, Sololá, Quiché et Huehuetenango (municipios de Nentón et Barillas), et au total, près de 1300 personnes y ont participé. La réalisation de ces circuits autonomes de distribution et de diffusion des docu-mentaires -déjà réalisés et à venir- dans les régions géographiquement éloignées et traditionnellement exclues permet de démocratiser l’accès à l’information, pour les communautés rurales et/ou autochtones.

L ors de cette soirée, nous avons présenté le travail de réalisateurs et réalisatrices de plusieurs départements, avec

une sélection de sept courts-métrages. Ces matériels audiovisuels ont été produits au cours du projet d’ateliers vidéo organisés par le Collectif en lien avec des organisations et/ou dirigeants communautaires locaux, des organisations de femmes et/ou des organisations autochtones Mayas. La présentation a eu lieu sous forme de ciné-débat avec la participation de Santa Ana et Ereidy de l’organisation de femmes Mamá Maquín (département de Huehue-tenango), Aleida de l’organisation Maya Uk’ux’ b’e (Chimaltenango) et Marcos de San Miguel Ixtahuacán (San Marcos). Projections entre émotions et débats Les projections ont suscité d’intéres-santes discussions. Les échanges avec le public ont porté tant sur la réalisation des productions audiovisuelles communautaires, et leur utilisation dans le travail des orga-nisations comme outil éducatif, que sur les sujets abordés dans les documentaires: les luttes des populations rurales et autochtones Mayas, les problématiques qu’elles rencontrent, les traditions cultu-relles, etc., permettant ainsi de montrer les réalités du monde rural Maya à une population principalement urbaine et métisse. « Cette soirée de ciné commu-nautaire n’est pas un spectacle, mais UN CRI ! », commentait Jessica, communica-trice sociale, qui animait l’activité. Un cri, des luttes, des images et des voix auxquelles ont pu avoir accès les participants citadins, une soixantaine de personnes au total. Selon quelques retours, les thèmes abordés, complétés des interventions des invité-es ont marqué les esprits. Avec l’aide de contacts à la capitale et de réseaux de communication alternative, il pourrait être envisagé, au vu des demandes suscitées, de réaliser un cycle ou d’autres diffusions ponctuelles par le prêt des matériels audiovisuels à des associations.

Activités

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« Cela donne accès à des connaissances sur des thèmes précis, c’est un contenu très important qui permet de prendre conscience de ce qui se passe près de chez nous, ainsi que de la réalité vécue par d’autres communautés. Si les gens pouvaient voir plus souvent ce qui se passe ainsi, il serait plus difficile de les tromper ». C’est ce que nous commentait Mario Rolando, réalisateur et promoteur d’un circuit de diffusion dans le Quiché. La sélection des documentaires qu’il a diffusée dans sa région était orientée sur les thèmes de défense du territoire, les luttes contre les méga-projets extractifs au Guatemala -tels que la mine d’or Marlin ou la cimenterie de Cementos Progreso- et les luttes pour le respect des droits des peuples autochtones. Véritable outil de

lutte social, des documentaires portant sur ces thèmes sont égale-ment utilisés dans les processus de consultations communautaires, lors des réunions d’informations. Valorisation de la culture Maya A Chimaltenango, les promotrices des diffusions nous ont fait part de quelques réactions du public, après la projection de courts-métrages sur la valorisation de la culture et des traditions autochtones Mayas: « Le respect de nos racines et de nos coutumes est important, les jeunes et les enfants doivent être

Projet vidéo du Collectif Guatemala : retour sur les circuits de diffusion communautaires et le festival de documentaires organisé à Guatemala Ciudad

par Amandine Grandjean

Le 10 novembre dernier, le Collectif Guatemala présentait un mini-festival de documentaires dans le centre de la capitale, en présence de participant-es aux ateliers vidéo soutenus par notre association dans différentes zones rurales du pays depuis cinq ans.

DVD et diffusion en France Le Collectif Guatemala a produit 3 supports DVD différents, regroupant chacun plusieurs films portant sur des thèmes

similaires: 1) Lutte pour la défense du territoire et droits humains

(Terre Mère) 2) Défense, récupération et promotion des cultures

autochtones Mayas (Culture Maya) 3) Lutte contre les discriminations et autres thèmes à

visée éducative (Visages du Guatemala). Certains films existent déjà en version sous-titrée française et sont disponibles pour diffusion dans le cadre d’activités

de promotion des cultures et luttes autochtones latino-américaines. D’autres films pourraient éventuellement

être traduits sur demande.

Public d’une diffusion communautaire organisée par l’organisation Uk’Ux b’e, Chimaltenango (Photo : Uk’Ux b’e, 2011)

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9 Solidarité Guatemala

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Brèves

Célébration de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes

Le 25 novembre, à l’occasion de cette Journée, une marche a rassemblé plusieurs centaines de femmes dans la capitale. Une des principales demandes était que les institutions responsables de garantir la vie et la sécurité des femmes répondent de manière

effective au mandat qui leur a été confié par les conventions internationales ratifiées par l’Etat et les lois en vigueur, en particulier la Loi contre le Féminicide et les autres formes de violences faites aux femmes. A ce sujet, les manifestantes ont exigé devant la Cour Constitutionnelle que les magistrats déclarent un non-lieu concernant une demande d’inconstitutionnalité présentée par un groupe d’avocats. Ces derniers font valoir que cette loi viole le droit à la vie privée, la question des violences conjugales devant rester dans le cercle familial. Arguments qualifiés sans fondements par de nombreux avocats, notamment Maria Castellanos, selon laquelle « cette loi a donné aux femmes des armes pour sortir du silence et de la peur » (Prensa Libre, 25 oc-tobre 2011). Lors de cette marche, un hommage a été rendu aux 646 femmes qui ont succombé à ces violences cette année. Ont également été soulignées le peu d’avancées dans les enquêtes pour féminicides, comme par exemple dans le cas de la sociologue Emilia Quan Staackmann (voir LA 192) . A l’occasion du premier anniversaire de sa mort, une pétition de ses amis circule sur Internet. Elle sera remise au Ministère Public afin d’exiger que soient identifiés, jugés et condamnés les responsables de sa mort.

Plus d’information, voir : L'interminable cauchemar de la violence contre la femme, La Hora 24 Novembre, 2011 http://www.lahora.com.gt/index.php/nacional/guatemala/reportajes-y-entrevista s/148161-la-denuncia-es-vital . Bientôt disponible en français sur le blog.

Emilia, la journée contre les violences faites aux femmes, le 25 novembre 2010,

une semaine avant sa tragique disparition. (Source : Prensa Libre)

Premières identifications de victimes figurant dans le Diario militar La Fondation d’Anthropologie Légiste (FAFG) et les familles des victimes de disparition forcée ont rendu publiques, le 22 novembre dernier, les deux premières identifications de personnes disparues fichées dans le Diario militar. Ce sont deux des 183 victimes figurant dans cet archive militaire (contenant des données entre 1983 et 1985) déclassifiée par les Etats-Unis en 1999 et qui est une preuve de la persécution et répression individuelles de l’Etat, parallèlement aux mécanismes de terreur massifs (massacres, génocide) du conflit armé interne. Il s’agit d’Armancio Samuel Villatoro, dirigeant syndicaliste fondateur de la Centrale Nationale des Travailleurs (CNT), séquestré le 30 janvier 1984 à Guatemala Ciudad, torturé, et assassiné le 29 mars 1984, selon l’archive. L’autre victime est Sergio Saúl Linares, dirigeant étudiant de l’Université San Carlos, séquestré le 23 février 1984 à Guatemala Ciudad et assassiné le 29 mars de la même année. Ces identifications sont un soulagement pour les familles des victimes qui vivent depuis 27 années sans connaitre la destinée de leurs proches. Elles constituent un élément supplémentaire dans leur lutte pour la justice, et un espoir pour les autres familles. Ces résultats ont été obtenus grâce aux analyses ADN réalisés par la FAFG depuis 2008, en recoupant les profils génétiques de parents de victimes et ceux obtenus à partir des ossements exhumés, complétés d’entretiens avec les familles. Les restes de Villatoro et Linares avaient été localisés dans la fosse commune d’un ancien détachement militaire à Comalapa (Chimaltenango), où se situent 53 autres fosses contenant les restes de 220 per-sonnes. 18 autres victimes dont les restes ont été exhumés des fosses communes de Comalapa sont en processus de confirmation d’identification.

Personnel de la FAFG travaillant sur les identifications. Au fond des photos de victimes. (Photo : El Periódico)

BRÈVES

conscients de leur valeur », ou « le res-pect des personnes âgées est fondamen-tal dans notre vie au quotidien et dans notre culture, il est important que les jeunes valorisent les apprentissages des anciens ». Patrimoine culturel Maya et luttes des peuples autochtones pour le respect de leurs droits fondamentaux ont également fait écho dans d’autres pays, par le biais de ces documentaires réalisés

au Guatemala. En effet, certains ont été présentés en France lors de festivals comme les Journées Amérindiennes d’Amnesty International en avril à Paris, dans le cadre de la campagne « Exigeons la dignité », et au festival « La plume à l’écran » à Nantes, en septembre. Marcos, qui travaille depuis déjà plu-sieurs années à documenter

par l’image les violations de droits humains autour du cas de la Mine Marlin, a vu deux de ses films sélectionnés dans la catégorie Documentaires du festival Icaro, organisée à l’échelle de l’Amérique centrale. ■

Le projet vidéo a été financé au Guatemala grâce au soutien de l’Agence Française pour le Développement (AFD), la

Fondation Un Monde par Tous et Non-Violence 21.

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Brèves

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Justice et émotions avec nos amis de Nueva Linda Le 21 Novembre, environ 70 familles se sont rassemblées dans l’espace de réunion de l’Association Projustice Nueva Linda, sous le conacaste -le grand arbre- centenaire de leur campement en bord de route, afin de se diriger vers le port de Champerico pour signer les titres de propriétés de leurs futures terres, situées dans le département de Santa Rosa. Le Secrétariat des Affaires Agraires ayant gracieusement offert de faire le déplacement, nos amis ont préféré les recevoir près du port, à cause de la nuisance sonore et de la poussière soulevée par le passage constant des camions -de 12 mètres de long- transportant la canne à sucre, à cette époque de l’année. Les leaders de Nueva Linda ont fait des appels à la solidarité et à l’unité du groupe qui cette dernière année a connu quelques différends internes. Il y a d’une part les tensions et frustrations générées par huit ans de lutte sans une réelle volonté de la part des institutions de résoudre l’Affaire Nueva Linda, mais également le besoin essentiel des familles de travailler et de ce fait de diminuer leur présence au bord de la route. Cette réunion était donc chargée de beaucoup d’émotions et d’un peu de nervosité puisqu’après trois ans de négociations, des dizaines de réunions et deux interpellations parlementaires avec les institutions impliquées, la quasi totalité du groupe (il restera encore quinze familles en attente) a enfin signé les titres de propriété. Pour la plupart d’entre eux ce sera la première fois qu’ils pourront travailler leurs propres terres. L’acte officiel de remise des terres est prévu pour la première quinzaine du mois de décembre. L’heure est donc aux préparatifs, les compañeros devront abandonner après huit années leurs ranchos au bord de la route, avec tout de même un pincement au cœur...

Expulsions violentes, malheureusement toujours d'actualité Contrôle et exploitation de la terre - Le 23 août dernier, un troisième département a été touché par des expulsions violentes, le Petén, terre de pétrole, à la suite des expulsions de la Vallée du Polochic en Alta Verapaz, terre de palmier à huile, et Retalhuleu, terre de canne à sucre. Le troisième refuge - Les 300 habitants de la communauté de Nueva Esperanza -située à l’intérieur de la zone protégée Sierra del Lacandón- ont tout perdu, leur toit et leurs réserves de grains (maïs et haricots), suite à l’expulsion menée par les forces de la Police Nationale Civile et de l’armée. Un groupe d’ONG locales soutient et apporte des vivres aux familles expulsées, maintenant réfugiées de l’autre côté de la frontière, au Mexique. Le Haut Représentant des Nations Unies pour les Réfugiés a visité le campement des familles pour recueillir leurs témoignages. Les réactions… et réparations ??? - Très peu d’information a été relayée - et souvent tardivement- par la presse et les grandes organi-sations paysannes, au sujet de la communauté du Petén, contrairement à la situation du Polochic, largement diffusée dans les médias. À ce sujet (voir Brèves LA 195), la Commission Présidentielle pour les Droits Humains (COPREDEH) a timidement commencé à appliquer -5 mois plus tard- une partie des mesures de protection dictées par la CIDH. Le programme de Cohésion Sociale a donné une Bolsa Solidaria (vivres du gouvernement) à chaque famille expulsée, ce qui permet d’assurer leur alimentation pendant environ 3 jours....

Pour plus d’information, voir : Bienestarina Azucarada en el Valle del Polochic, Plaza Pública sur http://plazapublica.com.gt/content/bienestarina-azucarada-en-el-valle-del-polochic. Bientôt disponible version française sur le blog.

Voir également : http://www.chretiente.info/201112011324/mexique-un-pretre-denonce-la-tragedie-de-68-familles-de-refugies-guatemalteques-abandonnees-de-tous/

Plus de trois mois d’occupation pacifique pour l’adoption d’une loi sur le logement Un véritable campement s’est installé en face du Congrès dans lequel se relaient jour et nuit des habitants de zones marginalisées de la capitale et des alentours, comme moyen de pression envers le législatif pour l’acceptation d’une loi sur le logement. Ces groupes d’habitants organisés manifestent pacifiquement depuis plus de trois mois, et luttent « pour leur droit à un logement digne, approprié, pour une vie saine ». En août 2008, plusieurs mouvements d’habitants1 déposaient la proposition de loi 3869, qui est depuis bloquée au Congrès et aujourd’hui en phase de relecture article par article, mesure considérée comme dilatoire. Une plainte contre les manifestants a été transmise aux autorités prétextant la protection des enfants présents dans la rue avec leurs familles, alors que ceux-ci courent un bien plus grand danger dans leurs logements au sein de quartiers parfois installés à flanc de colline, qui sont ainsi les plus affectés lors d’intempéries produisant glissements de terrain. Depuis le 22 novembre, six personnes ont commencé une grève de la faim. 1 Conjointement avec la Table Intersecteurs du Logement, la Fédération d’Organisations pour le Développement du Logement Social et les Coopératives d’autogestion populaire. Pour en savoir plus : http://noticiascomunicarte.blogspot.com/2011/11/guatemala-ley-de-vivienda-popularizada.html

« Nous exigeons un logement digne », «Projet de loi 3869 », « Méritons-nous de vivre comme des sardines ? »

(Source : Comunicarte)

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Bloc notes

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AGENDA

Des nouvelles du terrain - Amandine Grandjean, accompagnatrice pendant 2 ans avec le Collectif Guatemala a repris la coordination terrain jusqu’à la fin de l’année, un processus de recrutement est en cours pour 2012. Le poste sera alors financé grâce aux dons et cotisations, et grâce au soutien de Non-Violence 21 et du SCD pour le statut de volontaire. - Les trois accompagnateurs du Collectif Guatemala partis pour un volontariat de 6 mois au sein du projet Acoguate dans le cadre du Service Volontaire Européen sont rentrés en France. Après une évaluation de leur période d’accompagnement avec le CG et l’agence française du Programme Européen Jeunesse en Action ayant financé une partie de leur mission, ils réviseront, prépareront et animeront le prochain week-end de formation au départ qui se tiendra fin janvier à Paris. - Le projet d’accompagnement au Guatemala s’apprête à mettre en ligne un nouveau site internet qui permettra de suivre la situation des droits humains dans le pays ainsi que les cas suivis et activités du projet. Vous pourrez le consulter sur : www.acoguate.org - Le blog des accos du Collectif est lui toujours mis à jour par Marine Pezet ! Visitez-le: www.accoscollectif.blogspot.com - Vanessa Góngora, ancienne accompagnatrice du Collectif Guatemala continue d’assurer des tâches importantes au sein du projet Acoguate et sera de retour en décembre.

Fin du service volontaire de Cynthia Benoist, coordinatrice terrain du Collectif Guatemala depuis 2 ans Cynthia Benoist est de retour en France après une longue période d’investissement intense au sein du Collectif pour les droits humains et la justice au Guatemala. Cynthia milite activement dans l’association depuis près de 4 ans. Elle décide de partir pour le Guatemala en janvier 2009 où elle sera dans un premier temps accompagnatrice pour assumer ensuite le rôle de coordinatrice terrain, prenant la suite de Grégory Lassalle. Au cours de ces deux années, Cynthia a développé et renforcé les liens avec les organisations du mouvement social guatémaltèque, organisé la tenue d’ateliers vidéo, soutenu les initiatives de diffusion communautaire, accompagné activement les camarades de Nueva Linda, créé des liens avec les communautés isolées du Petén où elle s’est rendue à plusieurs reprises, recueilli leurs témoignages, enquêté et rédigé le rapport « Perenco, exploiter le pétrole coûte que coûte », écrit de nombreux articles, participé à plusieurs tournées en France et développé les liens avec l’ambassade de France au Guatemala… Au sein d’Acoguate, elle a assuré la coordination de la région de Huehuetenango - San Marcos avec brio, encadré et formé les accompagnateurs, renforcé les règles de sécurité internes du projet et participé à la rédaction de rapports sur la situation des droits humains. L’année 2011 a été particulièrement difficile avec d’abord l’assassinat d’un ami proche, Victor, surnommé « el Mono », puis la détérioration croissante des conditions de sécurité et l’arrivée au pouvoir du général Otto Pérez Molina... Mais paradoxale-ment, cette année a également vu l’accès à la terre pour quasiment l’ensemble des familles de Nueva Linda, l’arrivée de Claudia Paz y Paz au poste de Procureur Général, l’ouverture d’un procès pour génocide, les premières condamnations de militaires pour le massacre de Dos Erres : évènements historiques et fondamentaux pour le Guatemala, résultats de près de 30 ans de lutte des organisations guatémaltèques. Cynthia a également participé à ces processus et y a apporté sa pierre. Nous tenons à la remercier profondément pour tout le travail qu’elle a mené au cours de ces deux années et pour son investissement exemplaire malgré les conditions souvent difficiles et précaires. Nous continuerons avec conviction ce travail, grâce à tout ce qu’elle a construit là-bas et tout ce qu’elle nous a transmis.

Bonne continuation Cynthia dans tes futurs projets et merci !

Cynthia en janvier 2011 à la casa Mango (Acoguate)

Les personnes intéressées par un volontariat d’accompagnement en 2012 peuvent nous envoyer leur candidature (CV et lettre de motivation)

dès maintenant à l’adresse [email protected] !

Journée d’initiation de Peace Brigades International - France le samedi 17 décembre à Toulouse, 10h-18h

Cette journée vise à accueillir et orienter les personnes intéressées par la non-violence, la prise de décision au consensus, l’accompagnement international et la protection des droits humains. Elle est gratuite et ouverte à toute personne intéressée par ces thématiques. L’approche de PBI de l’accompagnement peut différer légèrement de celle du Collectif Guatemala et il est toujours enrichissant de pouvoir connaître ces visions différentes. Plus d’informations et inscriptions: [email protected]

Soirée de solidarité avec les centres de soins zapatistes Dimanche 18 décembre 2011 - 17 heures

Projection et débat, tables de presse et concert avec :

MAD IDEA (poison idea covers - Groeningen, Hollande) LOS TRES PUNTOS (ska-punk -Paris) THE DICTRACY LORDS (rock’n’roll energy - Paris)

De 17 à 22h précises. P.A.F. : 5 euros Lieu : CICP - 21ter rue Voltaire - 75011 Paris Métro : Rue des Boulets - L9

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Le Collectif Guatemala Qui sommes-nous ? Fondé en 1979 par des réfugiés guatémaltèques et des militants français, le Collectif Guatemala est une association 1901 de solidarité internationale. Il est composé d’associations et de particuliers, dont une bonne dizaine de membres actifs, sur lesquels repose la vie de l’association. Depuis octobre 2002, l’équipe s’est étoffée avec l’arrivée d’une permanente, passée à temps-plein en 2011. Depuis mars 2006, l’association a ouvert un bureau de coordination pour ses activités au Guatemala (accompagnement international et campagne de soutien aux militants luttant contre le pillage de leurs ressources naturelles).

Les activités du Collectif au Guatemala ● L’accompagnement international √ des populations indigènes victimes du conflit armé impliquées dans des procès contre les responsables de violations massives des droits de l'Homme, √ des personnes menacées du fait de leurs activités militantes.

Comment ?

√ à la demande des groupes ou personnes menacées, √ en recherchant et en préparant des volontaires qui resteront au minimum 6 mois sur le terrain.

Pourquoi ?

√ pour établir une présence dissuasive, √ pour avoir un rôle d'observateur, √ pour relayer l'information. Les accompagnateurs/trices sont des volontaires majeurs, de tous hori-zons, désirant s’engager pour une durée minimum de 6 mois. Des ses-sions d’information et de préparation ont lieu en France avant le départ. Au Guatemala, les accompagnateurs sont intégré au projet international d’accompagnement ACOGUATE.

● L’outil vidéo √ organisation d’ateliers vidéo destinés aux membres d’organisa-tions communautaires pour la réalisation documentaire

√ soutien à la diffusion de ces films à la capitale et dans les com-munautés

√ réalisation de film-documentaires comme outil de campagne et de sensibilisation en France

Les activités du Collectif en France

● L'appui aux organisations de la société civile guatémal-tèque qui luttent pour plus de justice et de démocratie √ en relayant des dénonciations de violations des droits de l'Homme, √ en organisant des campagnes pour soutenir leurs revendica-tions, √ en recherchant des financements pour soutenir leurs projets, √ en recevant en France et en Europe des représentants de dif-férentes organisations pour leur permettre de rencontrer des décideurs politiques et financiers.

● L’information et la sensibilisation du public français

Sur quoi ?

√ la situation politique et sociale au Guatemala, √ la situation des droits de l'Homme, √ l'action des organisations populaires, indiennes et paysannes.

Comment ?

√ par la diffusion d’une lettre à l’adhérent bimensuelle, √ par l'organisation ou la participation à des conférences, dé-bats, réunions, projections documentaires √ par des réunions mensuelles ouvertes à toute personne inté-ressée.

● Le travail en réseau avec différents types de partenaires présents au Guatemala √ associatifs, √ institutionnels. Contact: [email protected]

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ADHÉSION / ABONNEMENT Le Collectif Guatemala vous propose plusieurs formules de soutien :

� Adhésion au Collectif , permettant de recevoir la Lettre à l’Adhérent 23 €

� Adhésion à tarif réduit (étudiants, chômeurs etc. joindre justificatif) 15 €

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