réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

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BARRE Victoria Année scolaire : 2012-2013 REGION DES PAYS DE LA LOIRE Institut Régional de Formation aux Métiers de Rééducation et de Réadaptation Pays de Loire 54, rue de la Baugerie - 44230 St Sébastien Sur Loire Prise en charge en service de réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé, ventilé, présentant des troubles du décubitus Travail Ecrit de Fin d’Etudes En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat de Masseur-Kinésithérapeute

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BARRE Victoria

Année scolaire : 2012-2013

REGION DES PAYS DE LA LOIRE

Institut Régional de Formation aux Métiers de Rééducation et de Réadaptation

Pays de Loire

54, rue de la Baugerie - 44230 St Sébastien Sur Loire

Prise en charge en service de

réanimation d’un patient porteur

d’une BPCO, trachéotomisé,

ventilé, présentant des troubles du

décubitus

Travail Ecrit de Fin d’Etudes

En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat de Masseur-Kinésithérapeute

Page 2: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

Résumé

Ce travail écrit a pour sujet la prise en charge de J34 à J65 en service de réanimation

de Mr B, 57 ans, hospitalisé le 7 août 2012 pour hypokaliémie et automédication. Il présente

des antécédents de BPCO sévère GOLD III post-tabagique, des séquelles d’un AVC de 2009

et une escarre sacrée de stade IV évoluant depuis le 9 août. Il est trachéotomisé le 5

septembre après deux échecs d’extubation et un arrêt cardio-respiratoire. La prise en charge

kinésithérapique, s’adaptant à l’amélioration progressive de l’état respiratoire du patient, est

divisée en deux phases : une sous ventilation mécanique et une sous ventilation spontanée.

L’objectif principal de la prise en charge est d’obtenir une autonomie respiratoire et

fonctionnelle améliorant la qualité de vie du patient lui permettant ainsi à court terme

d’intégrer un centre de rééducation et à long terme d’envisager le retour au domicile.

Mots clés

Autonomie fonctionnelle

BPCO

Réanimation

Sevrage ventilatoire

Troubles du décubitus

Keywords

COPD

Functional autonomy

Intensive care unit

Supine disorder

Ventilatory weaning

Page 3: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

Sommaire

1. Introduction ........................................................................................................................ 1

2. Présentation du patient et de sa maladie ............................................................................. 3

2.1. Le patient ..................................................................................................................... 3

2.2. Histoire de la maladie .................................................................................................. 3

Evolution dans le service ............................................................................................. 4 2.3.

Antécédents et traitement médicamenteux .................................................................. 5 2.4.

3. Bilan kinésithérapique initial de J1 à J5 de la trachéotomie .............................................. 5

Etat des grandes fonctions le 06/09 ............................................................................. 6 3.1.

Bilan respiratoire le 06/09 ........................................................................................... 6 3.2.

Evaluation de la douleur le 06/09 ................................................................................ 6 3.3.

Etude des systèmes cutané, trophique et circulatoire le 06/09 .................................... 7 3.4.

Examen de la sensibilité le 07/09 ................................................................................ 7 3.5.

Quantification de la mobilité articulaire le 10/09 ........................................................ 7 3.6.

Evaluation musculaire le 10/09 ................................................................................... 8 3.7.

Evaluation des capacités fonctionnelles le 10/09 ........................................................ 8 3.8.

Etat psychologique du patient ...................................................................................... 8 3.9.

4. Bilan Diagnostic Masso-Kinésithérapique ......................................................................... 9

Le diagnostic kinésithérapique .................................................................................... 9 4.1.

Les objectifs de rééducation à J+5 de la trachéotomie ................................................ 9 4.2.

Les moyens ................................................................................................................ 10 4.3.

5. Le traitement Masso-kinésithérapique ............................................................................. 10

Les principes à J+5 de sa trachéotomie ..................................................................... 10 5.1.

Réévaluation du diagnostic kinésithérapique le 19/09 .............................................. 11 5.2.

Les techniques de rééducation ................................................................................... 12 5.3.

5.3.1. Les techniques en phase de ventilation mécanique ................................................ 12

5.3.2. Les techniques après sevrage de la ventilation mécanique .................................... 18

6. Bilan final de la prise en charge kinésithérapique ............................................................ 21

7. Discussion ........................................................................................................................ 23

8. Conclusion ........................................................................................................................ 26

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1. Introduction

Dans le cadre de mon stage de 3ème

année d’étude en masso-kinésithérapie du 03/09/2012

au 12/10/2012 en service de réanimation médecine polyvalente au CHU de Nantes, je suis

intervenue dans la prise en charge de Mr B pour aider au sevrage de la ventilation mécanique

tant au niveau respiratoire que fonctionnel. Son hospitalisation en réanimation date du

07/08/2012 et son motif est une hypokaliémie due à une non observance de son traitement

médicamenteux et une malnutrition. Ce sujet m’a intéressée pour la complexité et la diversité

de sa prise en charge avec ses antécédents et les complications de son hospitalisation.

« La réanimation est une discipline transversale particulière, prenant en charge des

patients associant la défaillance de plusieurs organes et dont les fonctions vitales doivent être

suppléées. » (1). La complexité des patients et leur fragilité imposent la présence d’un

masseur-kinésithérapeute (MK) avec des compétences particulières (2). En effet, l'article D

712-110 du Décret n°2002-466 du 5 Avril 2002 précisant les conditions d’activité des

services de réanimation stipule que « l'établissement de santé doit être en mesure de faire

intervenir en permanence un kinésithérapeute justifiant d'une expérience attestée en

réanimation. » (3). Depuis 2002, la profession de MK est donc reconnue comme

indispensable dans les services de réanimation. Dès lors, différentes études ont cherché à

définir le rôle et l’intérêt du MK dans les services de réanimation. Ces études ont amené à la

réalisation de revues de littérature couplées aux avis d’experts comme dans l’article de L.

Vignaux en 2004 (1) et du groupe de travail constitué par par l’European Respiratory Society

(ERS) et l’European Society of Intensive Care Medicine (ESICM) en 2008 (4). Ces deux

revues de littérature mettent en avant des différences de pratique d’un kinésithérapeute à

l’autre, d’un établissement à l’autre et d’un pays à l’autre mais se rejoignent sur la place

importante de la prise en charge globale du MK dans le parcours de soins des patients de

réanimation. Le kinésithérapeute, acteur au sein de l’équipe pluridisciplinaire, intervient aussi

bien sur le plan respiratoire, articulaire, neuromusculaire, que fonctionnel pour améliorer la

qualité des soins, diminuer la durée du séjour et donc le coût de l’hospitalisation des patients

(1) (5) . La SKR (Société de Kinésithérapie de Réanimation) et la SRLF (Société de

Réanimation de Langue Française) publient en 2011 un référentiel de compétences et

aptitudes du masseur-kinésithérapeute de réanimation en secteur adulte. (5) Le groupe de

travail d’experts en réanimation propose une définition précise du rôle du kinésithérapeute

avec l’énumération de ses connaissances et compétences dans la prise en charge du patient en

réanimation dans sa globalité, que ce soit au niveau respiratoire, cardio-vasculaire, digestif,

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neurologique, locomoteur, psychologique ou du point de vu de la sécurité et de la prise de

décision dans une équipe pluridisciplinaire.

A travers ces documents, j’ai pu me faire une idée concrète du rôle du MK dans un service

de réanimation, indispensable à mon investissement et mon autonomie tout au long de mon

stage ainsi qu’à la prise en charge de Mr B atteint de BPCO (Broncho-Pneumopathie

Chronique Obstructive).

La SPLF (Société de Pneumologie en Langue Française) définit la BPCO comme étant «

une maladie respiratoire chronique définie par une obstruction permanente et progressive des

voies aériennes. La cause la plus fréquente est le tabagisme. Cette obstruction est causée par

l’association, variable selon les patients, d’une diminution du calibre des bronchioles du fait

de modifications anatomiques (remodelage) et d’une destruction des alvéoles pulmonaires

(emphysème). Il s’y associe une réponse inflammatoire pulmonaire anormale à des toxiques

inhalés (tabac, polluants…) » (6). Cette pathologie est actuellement un vrai problème de santé

publique avec un taux de morbidité, de mortalité préoccupants auquel s’ajoute un

accroissement des dépenses de santé (6).

Au premier abord, Mr B est somnolent, très fatigable, dyspnéique avec des capacités

fonctionnelles réduites, et une dépendance à la ventilation mécanique. Le déficit de force

musculaire est global mais prédominant à gauche et au membre supérieur non utilisé. Sa prise

en charge en réanimation est très dense nécessitant beaucoup de soins infirmiers.

Ce cas amène à plusieurs interrogations : Comment aider au sevrage de la ventilation

mécanique pour ce patient après deux échecs et la nécessité d’une contrainte de posture ?

Quelle est la gravité de son escarre ? Est-elle réversible ou nécessite-t-elle un traitement

chirurgical ? Comment adapter le sevrage à sa BPCO ? Quel est son état fonctionnel et quels

sont donc ces déficits articulaires et musculaires exacts ? Quelles étaient ses capacités

antérieures avant son hospitalisation? Pourra-t-il les récupérer ? Si non, quel retentissement y

aura-t-il sur sa qualité de vie ? Quand insérer la prise en charge kinésithérapique en fonction

des autres soins ?

La question générale qui en ressort est : Comment optimiser la prise en charge respiratoire

et fonctionnelle, en service de réanimation, d’un patient BPCO, ventilé, trachéotomisé et

présentant des troubles du décubitus?

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2. Présentation du patient et de sa maladie

2.1. Le patient

Monsieur B, homme de 57 ans, 1m 69 et 63kg (IMC à 22), veuf, a deux enfants habitant à

proximité. Il est droitier, autonome dans les activités de la vie quotidienne et vit seul dans une

maison de plain pied. Il est en arrêt de travail depuis son accident vasculaire cérébral (AVC)

en 2009, il exerçait la profession de conducteur d’engin pour une entreprise de nivellement. Il

marche sans aide technique et conduit son automobile avec une manette adaptée. Il ne

bénéficie pas d’oxygénothérapie de longue durée, ne possède pas d’activité sociale

particulière et ses loisirs sont de type sédentaire.

2.2. Histoire de la maladie

Depuis le mois de juillet, Mr B présente une anorexie et à une perte de poids dues à une

observance imparfaite de son traitement médicamenteux avec automédication pour soulager

ses douleurs neuropathiques de l’épaule gauche. Le 7 août, alors chez son fils, il se présente

aux urgences pour une majoration de son asthénie et une faiblesse généralisée.

Arrivé aux urgences, le patient présente une hypertension artérielle à 180/70 mmHg, une

saturation en oxygène à 86% sous oxygénation par lunettes nasales à 8L/min. Il est

dyspnéique mais ne décrit pas de majoration de cette dyspnée par rapport à d’habitude et

présente une toux grasse. L’auscultation pulmonaire met en évidence la présence de ronchi

bilatéraux. Les examens biologiques montrent une hypokaliémie sévère, une insuffisance

rénale aiguë sur insuffisance rénale chronique. L’oxygénothérapie est augmentée devant la

persistance de la désaturation, Mr B est donc oxygéné au masque à haute concentration lui

permettant d’obtenir une saturation à 91%. Il est alors transféré en réanimation médicale pour

la prise en charge de cette hypokaliémie aiguë symptomatique.

Arrivé en réanimation, Mr B est conscient, la saturation est à 92% sous masque à haute

concentration, le patient ne se dit pas dyspnéique au repos et la fréquence respiratoire est à 20

cycles/min, l’auscultation retrouve toujours un encombrement bronchique bilatéral.

L’hémodynamique est conservée, la pression artérielle est à 165/73 mmHg, la fréquence

cardiaque à 78 battements par minute (bpm) et il n’y a pas de signe d’insuffisance circulatoire

périphérique. Un cathéter veineux central fémoral gauche est posé pour l’hypokaliémie et une

sonde urinaire.

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Evolution dans le service 2.3.

Sur le plan métabolique, Mr B est progressivement rechargé en potassium. Cependant, on

note une progression de l’insuffisance rénale.

Sur le plan rénal, devant la dégradation de la fonction rénale et la persistance d’une

oligurie, Mr B est dialysé du 11 au 21 août 2012. Ensuite, on observe une stagnation de la

créatinémie et de l’urée avec une diurèse satisfaisante sous Furosémide. Il est donc décidé

de retarder au maximum une nouvelle épuration extra-rénale.

Sur le plan respiratoire, son état se dégrade assez rapidement. Ainsi, le 8 août au matin, le

patient désature à 86% sous masque à oxygène à haute concentration et devient de plus en

plus somnolent. A l’auscultation, il y a une diminution du murmure vésiculaire des deux bases

prédominant à droite. Le bilan gazeux artériel met en évidence une hypercapnie à 8kPa et une

hypoxémie à 7,5 kPa. Un essai de ventilation non invasive est réalisé et se solde par un échec.

Le patient est alors intubé et reste très oxygénodépendant avec une Fi02 à 70%. Un scanner

thoracique est réalisé qui retrouve une atélectasie prédominant aux lobes moyen et inférieur

droits. Des sécrétions purulentes bilatérales mais prédominant à droite sont retrouvées à la

fibro-aspiration. Le 9 août, le patient devient fébrile à 38,4°C et la radiographie montre la

persistance de l’atélectasie base droite. Une nouvelle fibroscopie bronchique est pratiquée

avec réalisation d’un lavage broncho-alvéolaire qui s’avère être positif à Pneumocoque et

Klesbielle ocytoca. L’infection est traitée pendant 7 jours par Augmentin. Mr B est extubé le

30 août sous couvert de ventilation non invasive systématique. Dans la nuit, le patient

présente une désaturation profonde malgré la ventilation, il est finalement réintubé. Au

décours immédiat de l’intubation, il présente un arrêt cardiaque en asystolie pour lequel un

massage cardiaque est immédiatement commencé, il reçoit ensuite 3 fois 1mg d’adrénaline,

qui a pour effet la reprise d’un rythme cardiaque. Ensuite, une sédation est débutée par

Hypnovel et Sufentanyl, elle sera arrêtée dès le lendemain. Une trachéotomie est mise en

place le 5 septembre sur décision médicale avec accord du patient.

Sur le plan cutané, Mr B présente une escarre sacrée de 7cm de longueur, 4cm de largeur

et 3 cm de profondeur, évoluant depuis le 9 août.

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Antécédents et traitement médicamenteux 2.4.

Les antécédents médicaux et chirurgicaux de Mr B :

Hypertension artérielle

Diabète de type 2 : non insulino-dépendant (DNID)

BPCO stade III selon la classification GOLD (Annexe 4), Explorations

fonctionnelles respiratoires (EFR) en 2010: VEMS à 40% de sa théorique,

Tiffeneau inférieur à 70%, distension thoracique, Tabagisme non sevré à 40

paquets-année, Dyspnée stade II au repos, Asthme depuis l’enfance

Insuffisance rénale chronique sur une néphropathie interstitielle

AVC hémorragique en 2009 avec séquelles à type de déficit moteur distal et déficit

sensitif global du membre supérieur gauche, et douleurs neuropathiques à l’épaule

gauche

Reflux gastro-oesophagien traité chirurgicalement en 1999

Appendicectomie

Pneumopathie de base gauche en 1999.

Son traitement médicamenteux:

Pour l’hypertension artérielle EUPRESSYL, NEBILOX et FUROSEMIDE.

Pour l’insuffisance rénale chronique: COVERSYL et AMLOR.

Pour les douleurs: DOLIPRANE et LYRICA.

Pour la régulation du calcium: KAYEXALATE.

Pour le diabète de type II : METFORMINE.

Pour la BPCO et l’asthme: VENTOLINE (bronchodilatateur à action rapide et

de courte durée), PULMICORT (corticoïdes), OSLIF BREEZHAALER

(bronchodilatateur à action longue durée).

3. Bilan kinésithérapique initial de J1 à J5 de la trachéotomie

La prise en charge hospitalière pluridisciplinaire de Mr B nécessite un certain nombre de

soins, la communication est difficile et le patient très fatigable, ce bilan initial a été réalisé sur

3 jours du jeudi 06 au lundi 10 septembre.

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Etat des grandes fonctions le 06/09 3.1.

La fréquence cardiaque au repos est de 80 bpm (battements par minute), la tension à

145/79 mmHg, il présente une hyper-tension artérielle mais ne souffre pas de pathologie

cardiaque. La fréquence respiratoire est de 22 cycles/min, signant une légère polypnée, et la

saturation en oxygène à 93 % sous ventilation assistée contrôlée (VAC). Il est muni d'une

sonde naso-gastrique d'alimentation par entérale et d'une sonde urinaire pour le contrôle des

urines. La nutrition est riche en protéine pour la cicatrisation de l’escarre, hyposodée pour

l’hypertension artérielle et la teneur en sucre est surveillée pour le contrôle de sa glycémie.

La mise en place de la trachéotomie sans fenêtre et avec ballonnet gonflé, lui empêche toute

communication orale.

Bilan respiratoire le 06/09 3.2.

La respiration se fait sous VAC

(Figure 1) permettant le contrôle d’une

ventilation avec des paramètres fixes,

selon la prescription médicale, et le

déclenchement de cycles respiratoires

en plus par le patient. La fraction

inspirée en oxygène (FiO2) est réglée à

40%, un volume courant (Vc) à 500 mL,

une fréquence respiratoire (FR) à 15

cycles par minutes et une pression

expiratoire positive (PEP) de 5 cmH2O,

en prévention d’un collapsus bronchique précoce à l’expiration. A l’auscultation, on retrouve

des sibilants à la phase d’expiration, des ronchi bilatéraux diffus traduisant un encombrement

bronchique proximal et une diminution du murmure vésiculaire en base droite sans atélectasie

à la radiographie. Il n’y a pas de signes de détresse respiratoire. Les gaz du sang sont

stabilisés (Annexe 3). (7)

Evaluation de la douleur le 06/09 3.3.

Une douleur spontanée neuropathique cotée à 7 sur 10 à l’EVA (Echelle Visuelle

Analogique) est présente au niveau de l’épaule gauche, majorée à 8 sur 10 à la mobilisation.

Le retrait d’un cathéter fémoral a engendré un hématome au pli de l’aine entraînant une

douleur à 3 sur 10. Le patient se plaint également d’une douleur à 4 sur 10 au niveau sacré

due à la présence d’une escarre.

Figure 1: Ecran de la ventilation mécanique

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Etude des systèmes cutané, trophique et circulatoire le 06/09 3.4.

Sur le plan cutané, Mr B présente une escarre sacrée dite de stade IV, c’est-à-dire avec

contact osseux. Il possède par ailleurs deux cicatrices dues à une laparotomie et une incision

au niveau de l’hypogastre droit pour voie d’abord respective de traitement des reflux gastro-

œsophagiens et de l’appendicectomie.

Il n’est retrouvé aucun signe de thrombophlébite, des bas anti-thrombotiques sont mis en

place en prévention dès le début de son hospitalisation. La circulation périphérique est

assurée.

La présence d’un hématome au pli de l’aine gauche de 3cm de diamètre est due à la pose

puis au retrait du cathéter fémoral.

Examen de la sensibilité le 07/09 3.5.

Les tests de sensibilité, pique-touche et compresses mouillées chaude/ froide, montrent

une hypoesthésie au membre supérieur gauche avec une sensibilité « de protection », c’est-à-

dire algique et thermique, conservée. Cependant, la sensibilité discriminative et la sensibilité

profonde, testées par le pique-touche et le test des perceptions kinesthésiques, présentent des

troubles importants. En effet, le patient ne perçoit pas les pressions de faible intensité ni le

sens ou la direction du mouvement de son membre supérieur gauche. Le bilan du membre

inférieur droit montre une légère hypoesthésie au niveau du pied au pique-touche.

Quantification de la mobilité articulaire le 10/09 3.6.

Le sujet a une attitude spontanée allongée dite «en grenouille» c’est-à-dire une rotation

externe de hanche, légère flexion de genou et de hanche due à la douleur au pli de l’aine.

L’amyotrophie des quadriceps n’a pas pu être mesurée par manque de référence antérieure.

Les mesures goniométriques ont été effectuées à l’aide d’un goniomètre standard

(Annexe 1A). La goniométrie des membres inférieurs montre au niveau de la hanche une

différence de 10° de flexion à gauche comparativement au côté droit due à la douleur de

l’hématome. Il existe un déficit de rotations interne et externe de 5° à gauche en comparaison

au côté sain. Les flexions dorsales de cheville sont supérieures de 5° genou fléchi par rapport

à celles mesurées genou tendu objectivant une hypoextensibilité des gastroc-némiens. Il existe

également une hypo-extensibilité au niveau des ischio-jambiers quantifiables par un angle

poplité de 20° en bilatéral. Il n’y a donc pas de déficits articulaires importants aux membres

inférieurs.

Page 11: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

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La goniométrie des membres supérieurs met en évidence un déficit d’abduction d’épaule

de 20° à gauche par rapport au côté sain avec une réaction spastique du grand pectoral cotée à

1 selon l’échelle d’Ashworth (8). La flexion et la rotation externe d’épaules sont diminuées de

10° à gauche. Elle met également en évidence un déficit d’extension de coude à 10°, des

déficits de flexions palmaires et dorsales de 20° en bilatéral par rapport aux normes

physiologiques.

Evaluation musculaire le 10/09 3.7.

La force musculaire a été cotée selon le Testing International au niveau des deux membres

inférieurs et des deux membres supérieurs. (9)(Annexe 1B). Mr B présente une amyotrophie

générale de tout le corps. L’examen neurologique retrouve un déficit moteur global coté à 2

sur 5 au membre supérieur gauche en distal et 3 sur 5 en proximal et aux membres inférieurs

tandis que les membres supérieurs et inférieurs droits sont côtés à 4 sur 5. On note

particulièrement un déficit du quadriceps, grand fessier et triceps sural gauche à 2 sur 5.

La spasticité a été évaluée selon l’échelle d’Ashworth (8) au niveau des membres inférieur

et supérieur droit. On note la présence d’une légère augmentation du tonus à l’étirement vif du

grand pectoral et du tibial antérieur cotés à 1 sur 5. Celles-ci ne sont pas décrites comme

gênantes par le patient.

Evaluation des capacités fonctionnelles le 10/09 3.8.

Le patient est alité depuis le 7 août, il n’est autonome que pour les repas et aide dans les

transferts de retournements et de translations. Le passage du décubitus latéral à assis

s’effectue avec deux aides et le soutien postural assis est très précaire, avec quatre appuis des

membres supérieurs et inférieurs, et une légère latéro-pulsion du côté hémiplégique.

Etat psychologique du patient 3.9.

Mr B est hospitalisé en réanimation pour la gravité de ces carences dues à une mauvaise

alimentation et une observance imparfaite de son traitement médicamenteux. Cette négligence

laisse supposer un état dépressif débutant. De plus, il est somnolent la journée, ne dort pas

bien la nuit et est découragé par les difficultés de communication qu’impose la trachéotomie.

Il est anxieux, exigeant avec le personnel soignant et a des difficultés à accepter les

contraintes de soins. En effet, il ne respecte pas les décubitus latéraux alternés. Cependant, il

semble volontaire et motivé pour la rééducation fonctionnelle.

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4. Bilan Diagnostic Masso-Kinésithérapique

Le diagnostic kinésithérapique 4.1.

Mr B est hospitalisé en réanimation médicale au CHU de Nantes le 7 août 2012 pour une

hypokaliémie et insuffisance rénale aiguë sur insuffisance rénale chronique avec antécédents

de BPCO stade III selon GOLD avec un VEMS à 40%, VEMS/CV < à 70% et une distension

thoracique de 1,3L. Dans la nuit du 30 août, il est victime d’un arrêt cardio-respiratoire sur un

échec d’extubation, après 6 minutes de réanimation, il est réintubé. Ce deuxième échec de

sevrage nécessite la pose d’une trachéotomie le 5 septembre pour diminuer l’espace mort

anatomique et faciliter le sevrage ventilatoire (10). A J+5 de la trachéotomie et à J+ 34 de son

hospitalisation, le patient est dépendant de la ventilation mécanique sous ventilation assistée

contrôlée. Il présente une amyotrophie importante des membres inférieurs, un déficit moteur

global avec une majoration des séquelles de son AVC de 2009. Son alitement prolongé a

provoqué une escarre sacrée de stade IV avec contact osseux évoluant depuis le 9 août. Le

déficit plus marqué à l’hémicorps gauche, les troubles de la sensibilité du membre supérieur

gauche et la dyspnée limitent le sujet dans les activités de la vie quotidienne. Son déficit

musculaire plus important au niveau distal et ses troubles du tact discriminatif donnent lieu à

la négligence et la sous-utilisation du membre supérieur gauche. Ces déficits pourraient

expliquer ses douleurs neuropathiques à l’épaule gauche entrainant des limitations articulaires

d’épaule et du coude. Aussi les troubles du schéma corporel en latéro-pulsion gauche et

l’hypotonie modérée des muscles du tronc induisent un équilibre précaire de la station assise

en bord de lit. Il est donc dépendant de la ventilation mécanique, d’une tierce personne pour

les activités de la vie quotidienne et est très fatigable. Mr B souhaite à court terme et moyen

terme diminuer son déconditionnement à l’effort et intégrer le centre de rééducation de St

Jacques et à long terme retourner vivre chez lui de façon autonome. L’objectif

kinésithérapique principal est l’autonomie respiratoire et fonctionnelle et les objectifs

secondaires sont la récupération de ses capacités motrices et fonctionnelles antérieures, le

réentraînement à l’effort et la cicatrisation de son escarre.

Les objectifs de rééducation à J+5 de la trachéotomie 4.2.

Les objectifs de la rééducation doivent tenir compte de la prescription médicale, de l’état

antérieur du patient, de ses antécédents et de ses attentes. Ils ne devront pas être trop

ambitieux et seront mis à jour en fonction des résultats obtenus.

Page 13: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

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A J+5 de la trachéotomie les objectifs sont :

favoriser le sevrage de la ventilation mécanique

désencombrer les voies aériennes inférieures

lutter contre la dyspnée

lutter contre l’amyotrophie

limiter les troubles orthostatiques et les complications musculo-cutanées liées à

l’alitement prolongé

favoriser la cicatrisation de l’escarre sacrée

réadapter le patient à l’effort et stimuler le membre supérieur gauche pour permettre une

certaine autonomie dans les activités de la vie quotidienne (AVQ).

Les moyens 4.3.

Les moyens de prise en charge de Mr B sont dépendants du service de réanimation et donc

du matériel mis à disposition, de la présence ou non du masseur-kinésithérapeute du service et

la durée des séances quotidiennes du patient. Celles-ci sont très variables et dépendantes des

soins dispensées par les infirmières et aides-soignantes. Outre les moyens kinésithérapiques,

les moyens techniques utilisés sont : un appareil de spirométrie, un cycloergomètre, un

déambulateur, un marquage au sol, un chronomètre, un mètre-ruban, les outils usuels des

activités de vie quotidienne.

L’organisation type de la prise en charge pluridisciplinaire de Mr B. : visite du médecin

9h, toilette de 9h30 avec soins escarre jusqu’à 10h, 1ère

séance de kinésithérapie 10h15, soins

trachéotomie 10h45, ménage 11h45, 2ème

séance de kinésithérapie facultative 12h, 3ème

séance de kinésithérapie 14h30.

La rééducation est dépendante de l’environnement du patient avec la ventilation

mécanique et les capteurs de tension, de fréquences cardiaque, respiratoire et de saturation en

oxygène. Les techniques nécessitent donc un temps de préparation des câbles du monitorage

et de la ventilation et l’espace est limité à la chambre du patient lorsqu’il est sous ventilation

mécanique.

5. Le traitement Masso-kinésithérapique

Les principes à J+5 de sa trachéotomie 5.1.

Les principes de rééducation à J+5 de la pose de la trachéotomie sont :

Page 14: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

11

surveiller les constantes vitales, l’encombrement bronchique et l’apparition de

collapsus bronchique

respecter la prescription médicale et les précautions d’hygiène

respecter la douleur et la fatigabilité du patient

adapter le mode de ventilation aux signes cliniques de mauvaise tolérance sur avis

médical

surveiller le positionnement en alternance de décubitus latéraux et les points

d’appui, éviter le décubitus dorsal strict, pas de mise au fauteuil

stimuler le patient et fractionner les séances.

Réévaluation du diagnostic kinésithérapique le 19/09 5.2.

Ce nouveau bilan présente uniquement les éléments ayant évolué depuis le bilan initial.

Sur le plan respiratoire, Mr B. présente une ventilation spontanée sous 6L/min d’oxygène

au nez artificiel (NA) et une saturation en oxygène de 94%. Il ne présente pas de signes de

détresse respiratoire. A l’auscultation, on retrouve toujours un encombrement bronchique

diffus avec des ronchi bilatéraux. La dyspnée est évaluée au stade 3 sur l’échelle du MRC

(British Medical Research Council) (11) (Annexe 2). La mesure du volume inspiratoire

maximal à l’aide de l’appareil Voldyne avec un adaptateur pour la trachéotomie est de

1200 mL.

Sur le plan fonctionnel, les retournements et les translations sont réalisés de façon

autonome à l’aide d’une potence et des barres de lit. Le transfert du décubitus latéral à la

position assise se fait grâce à l’aide d’un soignant. L’équilibre postural assis est maintenu

sans appui postérieur, et lors d’une poussée déséquilibrante et lors de mouvements de la tête,

du tronc et des membres supérieurs.

Les nouveaux objectifs de rééducation sont :

favoriser le sevrage de l’oxygénation, désencombrer les voies aériennes inférieures

et lutter contre la dyspnée

lutter contre l’amyotrophie, limiter les troubles orthostatiques et les complications

musculo-cutanées liées à l’alitement prolongé

favoriser la cicatrisation de l’escarre sacrée

stimuler le membre supérieur gauche permettant une autonomie dans tous les

transferts

Page 15: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

12

obtenir un équilibre debout permettant la marche puis augmenter le périmètre de

marche

réadapter le patient à l’effort

améliorer la qualité de vie du patient.

Les techniques de rééducation 5.3.

5.3.1. Les techniques en phase de ventilation mécanique

Le désencombrement bronchique

Le respect des règles d’hygiène est primordial dans le service de réanimation : lavage

des mains, utilisation de gants spécifiques pour chaque tâche, port de masque et de tablier

plastique. (12)

D’après la 1ère

conférence de consensus en kinésithérapie respiratoire de 1994

(13) « L’encombrement bronchique a été défini comme une stagnation à l’intérieur des voies

aériennes du mucus bronchique en quantité et/ou qualité anormale ou pathologique. » Les

membres du jury précisent également que l’intervention du kinésithérapeute s’effectue au

niveau du territoire ventilé dans le but de le désencombrer. Chaque séance de

désencombrement de Mr B est précédée d’un bilan auscultatoire. L’auscultation permet

d’objectiver l’encombrement bronchique et est à la base du choix des techniques utilisées.

(14)

Le patient étant trachéotomisé, les techniques de désencombrement utilisées sont

l’aspiration endotrachéale (AET) et la modulation du flux expiratoire associée à des pressions

thoraciques. Ces techniques sont complétées par l’aérosolthérapie. (15)

L’AET (Figure 2) : (12) (16) Le but est de

libérer les voies aériennes des sécrétions

bronchiques pour assurer une hématose

correcte. Ce geste étant invasif et

potentiellement délétère, il convient donc de

respecter une procédure en service de

réanimation. Les risques infectieux,

traumatiques et hémodynamiques sont

prévenus par des modalités bien précises (15):

L’aspiration doit être précédée de techniques de drainage des sécrétions pour majorer

Figure 2: L'aspiration endotrachéale

Page 16: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

13

l’efficacité et éviter les aspirations à répétition. Les sondes doivent être stériles, à usage

unique avec un diamètre externe de 4,0 ou 4,7 mm. Elles sont en PVC, à bord émoussé et

multitrouées. La longueur des sondes pour les patients trachéotomisés ne doit pas dépasser 30

cm, la durée de l’aspiration doit être comprise entre 10 et 15 secondes et ne pas dépasser 30

secondes, la dépression employée doit être le plus faible possible et ne doit pas être au-delà de

200 mmHg. La préoxygénation par le réglage de la FiO2 à 100% une minute avant et pendant

l’aspiration prévient le risque de désaturation du patient. Le geste consiste à enfoncer

doucement la sonde dans la canule de la trachéotomie jusqu’à rencontrer une légère résistance

(arrivée à la carène : division de la trachée vers les deux poumons), puis de la retirer de 2 à 3

cm avant d’aspirer et la retirer simultanément en la tournant doucement sans va et vient. Il

faut enfin s’assurer de la stabilité hémodynamique et respiratoire du patient par l’observation

et la surveillance des constantes vitales. La position de Mr B pendant l’AET dépend de la

technique de désencombrement réalisée soit en position assise ou en décubitus latéral.

La modulation du flux expiratoire comprend plusieurs techniques dont l’augmentation du flux

expiratoire (AFE) et l’expiration lente, totale glotte ouverte, en infralatéral (ELTGOL). Ces

deux techniques jouent sur l’augmentation de pression de l’expiration et ont pour but de faire

remonter les sécrétions vers les zones tussigènes (14). De plus l’AFE est la technique de

référence pour le désencombrement chez les patients atteints de BPCO (7).

L’AFE est une technique d’expiration active, passive ou active-aidée à plus ou moins haut

volume pulmonaire (13) (17). Elle est réalisée de manière activopassive accompagnée d’une

pression thoracique exercée par le thérapeute pour aller jusqu’au volume résiduel (VR) ou en

fin de volume de réserve expiratoire (VRE) et une contre prise abdominale pour bloquer le

diaphragme en course interne, tout en respectant la cinétique respiratoire du patient. Les

positions semi-assise et décubitus dorsal incliné étant des contre-indications pour l’escarre

sacrée de Mr B, la plus adaptée est la position assise avec un coussin dans le haut du dos. Le

rythme de la technique dépend de la localisation des sécrétions bronchiques retrouvées à

l’auscultation et évolue au cours de sa réalisation en fonction de la mobilisation des

sécrétions. Si l’encombrement est distal, l’expiration sera effectuée lentement jusqu’au VR ou

en fin de VRE, s’il est plus proximal, elle peut être rapide. L’expiration sera d’autant plus

efficace que l’inspiration qui la précède sera au plus haut volume. Les consignes données au

patient sont « inspirez lentement et profondément puis expirez lentement le plus longtemps

possible comme pour faire de la buée sur une vitre » pour l’AFE réalisée lentement et

« expirez brutalement » pour l’augmentation rapide du flux expiratoire.

Page 17: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

14

L’ ELTGOL est une technique réalisée en décubitus latéral donc idéale pour la préservation

de l’état cutané du patient mais elle est difficilement supportée lorsqu’il est très encombré.

Elle est indiquée pour le désencombrement moyen à distal par déflation du poumon

infralatéral (14) (17). L’encombrement étant généralement diffus des deux poumons, la

technique est réalisée des deux côtés. La consigne est identique à celle de l’augmentation

lente du flux expiratoire, l’expiration part de la capacité résiduelle fonctionnelle et va

jusqu’au volume résiduel grâce aux pressions manuelles abdominales du MK. Le thérapeute

se place derrière le patient positionné en bord de lit. La main caudale du kinésithérapeute

empaume le flanc infralatéral avec l’avant-bras posé sur l’abdomen, la main et l’avant-bras

coté crânial exerce un contre prise sur le gril costal supralatéral. La main caudale accompagne

l’expiration en poussant l’abdomen vers l’arrière et le haut jusqu’à la déflation maximale du

poumon.

L’aide au sevrage de la ventilation mécanique

Mr B est en échec de sevrage, en

effet il est dépendant de la

ventilation mécanique depuis plus de

30 jours après le début de la

procédure de sevrage avec deux

échecs d’extubation. Sa BPCO est un

facteur prédictif de sevrage difficile.

La procédure de sevrage utilisée

pour ce patient est donc différente de

celle recommandée par la conférence

de consensus de Lyon 2001. (Figure

3) (10) Elle suit la même logique

mais les délais des épreuves en

ventilation spontanée avec aide

inspiratoire (VSAI) et en pièces en T

sont plus longs.

Figure 3: Procédure de sevrage de la ventilation mécanique

Page 18: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

15

La surveillance et le réglage de la ventilation mécanique sur décision médicale. Le

mode VSAI favorise le déclenchement de cycles inspiratoires par le patient grâce à une

augmentation de la pression inspiratoire. L’inspiration est déclenchée par un effort

inspiratoire du patient correspondant à une sensibilité préréglée appelée trigger. Cette

dépression volontaire entraine un cycle ventilatoire spontané du patient, il sera donc réglé au

plus bas (0,4 L/min) au départ, puis sera augmenté selon l’adaptation du patient. Il règne une

pression positive durant l’inspiration. L’aide inspiratoire est donc une pression assistée. Elle

sera réglée à 10cmH2O puis diminuée en fonction des signes de bonne tolérance du patient.

La fraction inspirée en oxygène est toujours réglée à 40% (Figure 4). Au moment de

l’expiration (passive), la pression rejoint la pression réglée par la machine, ici à 5cmH2O.

Cette pression appelée pression expiratoire positive (PEP) est supérieure à la pression

atmosphérique.

Figure 4: Ecran de la VM en mode VSAI support du feedback visuel

Le travail spirométrique : l’augmentation du volume courant avec stimulation auditive du

thérapeute et feedback visuel grâce à l’écran de l’appareil de ventilation mécanique permet un

travail lent, profond des muscles inspiratoires et expiratoires guidé par le thérapeute. Cette

technique est inspirée du principe de la spirométrie incitative. Le but est d’améliorer le

drainage bronchique et de solliciter le patient dans un effort d’inspiration. Le guidage du MK

est donc verbal et manuel pour contrôler la bonne synergie thoraco-abdominale selon le

principe de la ventilation dirigée abdomino-diaphragmatique.

Volume inspiratoire

et expiratoire en mL

Page 19: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

16

Le sevrage se poursuit sur décision médicale par deux épreuves de ventilation spontanée au

nez artificiel (NA) ou pièce en « T ». Ce dispositif est nommé ainsi car il humidifie et filtre

l’air inspiré. L’observation et la non-sollicitation du patient sont respectées lors de ces deux

épreuves d’une heure. Les épreuves de ventilation spontanée sont répétées, augmentées et

entrecoupées avec une VSAI et une VC la nuit jusqu’au sevrage total de la ventilation

mécanique (VM). (Annexe 3)

La verticalisation assis en bord de lit a pour but le changement de position du patient et le

début de la réhabilitation précoce. Au niveau physiologique, elle facilite le transit intestinal et

améliore les adaptations hémodynamiques du patient alité. Sur le plan fonctionnel, elle

permet l’intégration d’un schéma corporel correct avec des repères de verticalité et le travail

des transferts. Enfin, sur le plan psychologique, elle redonne de l’espoir au patient grâce à une

position active de participation. Cette verticalisation est possible avec l’aide du

kinésithérapeute du service. Elle nécessite un temps de préparation de l’environnement : les

câbles des monitorages et le tuyau de la ventilation mécanique et un temps d’explication de la

démarche au patient lui permettant un maximum de participation. Le transfert s’effectue à

partir du décubitus latéral droit toujours pour une plus grande participation du patient et avec

une prise derrière l’omoplate gauche pour ne pas déclencher de douleur sur le membre

hémiplégique. La surveillance des paramètres physiologiques du patient à l’aide du

monitorage sont indispensables lors de cet exercice. Les critères d’arrêt de la verticalisation et

des mobilisations sont : la FC supérieure à 130 bpm, la tension artérielle supérieure à 180/90

mmHg, la FR supérieure à 35 cycles par minute et la SPO2 inférieure à 88% (18). L’appui

doit être reparti le plus possible vers l’avant pour ne pas entraîner de pression sur l’escarre

sacré. La réhabilitation se poursuit par le travail de contrôle du tronc avec correction de

l’appui par des stimulations à gauche. La progression dépend de la durée de la verticalisation

et de la participation au transfert.

Page 20: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

17

La prévention des troubles du décubitus (2) (19)

Figure 5: Installation au lit en décubitus latéral

Installation au lit (Figure 5): sur un matelas à air pulsé dynamique anti-escarres en

alternance de décubitus latéraux avec une préférence à droite pour stimuler et protéger le

membre gauche. Un coussin est placé entre les deux membres inférieurs pour limiter les

appuis au niveau des genoux et des malléoles et deux coussins sont placés derrière le dos en

thoracique pour le soutien postural et éviter le retour en décubitus dorsal lorsque le patient

dort.

Massage : au niveau de la région lombaire à distance de l’escarre, c’est un massage lent, à

type d’effleurage, les manœuvres à éviter sont les torsions, cisaillements et frictions. Il est

recommandé de masser quinze minutes deux fois par jour (20). Un massage est réalisé par les

aides-soignantes et infirmières lors des soins et changements de pansements de l’escarre. Un

deuxième massage peut être réalisé autour du pansement lorsque le patient est fatigué à la fin

des séances de kinésithérapie.

Mobilisation active et active-aidée et l’apprentissage des retournements : (1) (2) (4) (18)

(21) Le but des mobilisations est de maintenir les amplitudes articulaires avec la nutrition du

cartilage et la prévention des rétractions musculo-tendineuses, de maintenir une bonne

trophicité en prévenant la stase veineuse et l’apparition d’œdème et de restaurer la masse et la

force musculaire après l’alitement. Les étirements passifs sont réalisés sur les muscles poly-

Page 21: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

18

articulaires et les muscles spastiques du membre hémiplégique : le tibial antérieur et le grand

pectoral. Au niveau des membres inférieurs, les mobilisations sont actives, globales et le plus

souvent intégrées à des AVQ comme le ponté pelvien pour la toilette et les transferts, le pas

simulé et les exercices de triple flexion et extension en décubitus supra-latéral. Les flexion-

extensions de cheville sont réalisés activement à type de pompe veineuse en prévention de la

stase veineuse et des œdèmes. Le membre supérieur gauche est mobilisé en actif aidé avec des

mouvements analytiques et globaux comme attraper la potence, la télécommande de la

télévision, passer la main dans les cheveux, mettre ses lunettes…

5.3.2. Les techniques après sevrage de la ventilation mécanique

Le désencombrement bronchique

Les techniques de désencombrement après le sevrage ventilatoire restent l’aspiration

endotrachéale et les techniques de modulations du flux expiratoire.

Le réentrainement à l’effort (dyspnée et

amyotrophie)

La spirométrie incitative dirigée (22), c’est-à-dire

guidée par le thérapeute, se base sur le feed-back visuel

des mouvements inspiratoires ou expiratoires du patient.

La spirométrie incitative inspiratoire vise à favoriser

l’expansion alvéolaire par augmentation du gradient de

pression intra-pulmonaire. La spirométrie incitative

expiratoire permet d’augmenter le temps expiratoire et le

volume expiré dans le but de favoriser la ventilation alvéolaire et aider au drainage

bronchique. Les variables mécaniques qui servent de support incitatif sont en général le débit

et/ou le volume. L’appareil volumétrique utilisé est le Voldyne. Il est utilisé deux fois par

jours en 3 séries de 10 cycles ventilatoires (15). La séance commence par l’explication du

fonctionnement de l’appareil à Mr B, puis les séries de cycle ventilatoire sont réalisées avec

un temps de pause entre chaque série. A l’inspiration, le piston blanc situé au bas de la

chambre volumétrique évolue le long d’une échelle graduée de 0 à 2500 ml correspondant au

volume inspiratoire. Nous plaçons la butée de calibrage au départ à 1000 ml pour que le

patient visualise et donc prenne conscience de son inspiration.

Figure 6: Appareil Voldyne

Page 22: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

19

En progression, le patient augmente ce volume tout en essayant de contrôler l’aspiration à

l’aide du flotteur jaune situé à droite de l’appareil.

La verticalisation : le transfert assis est effectué avec la diminution progressive de l’aide et

du guidage. Le transfert assis debout demande l’aide du kinésithérapeute avec un contrôle de

l’extension des deux genoux, car les quadriceps sont faibles, et deux appuis des membres

supérieurs. La progression joue sur la variation de l’aide, de la hauteur de lit et du contrôle du

verrouillage de genoux. La station debout est maintenue avec deux aides puis avec appui sur

un déambulateur pour enfin réaliser des exercices musculaires des membres inférieurs.

Renforcement analytique des muscles les plus faibles : les quadriceps et les grands et

moyens fessiers pour les membres inférieurs sont sollicités progressivement en station érigée.

Les exercices consistent en des triples flexions et extensions type squat pour la chaîne

antigravitaire et de fente avant gauche pour le contrôle du genou gauche déficitaire.

L’extension et l’abduction de hanche sont travaillées en décharge sur le membre gauche et

l’abduction en charge sur le membre droit pour la stabilisation du bassin.

Cycloergomètre : L’inconvénient de cet exercice est que le patient est en décubitus dorsal

mais il est recommandé et présente beaucoup d’intérêt pour la réhabilitation respiratoire

précoce. D’après une étude de P. Burtin et al. (2009) (21), la mobilisation sur cycloergomètre

au lit améliore le test de marche de six minutes, la force isométrique du quadriceps,

l’indépendance fonctionnelle et la qualité de vie. Cela consiste en un travail en endurance

progressif de 2 à 10 minutes par jour avec surveillance de la tolérance à l’effort. La résistance

du cycloergomètre est réglée au minimum pour Mr B.

Marche : fort pouvoir motivationnel du patient avec les exercices analytiques. Elle s’effectue

dans les couloirs du service de réanimation avec oxygénation au NA grâce à une bouteille

d’oxygène et avec contrôle de la saturation en oxygène grâce à une oxymétrie de pouls

(portatif). Elle nécessite la présence d’un autre soignant (aide-soignante ou kinésithérapeute

du service) pour disposer d’un fauteuil rapidement en cas de fatigue du patient. Notons que

les premières déambulations ont un impact psychologique très fort sur le patient qui voit son

autonomie augmenter avec l’observation et les félicitations du personnel soignant rencontré.

La progression est objectivée par l’augmentation du périmètre de marche et de l’endurance

avec la diminution des temps de pause et de l’aide technique.

Page 23: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

20

Autonomie fonctionnelle

Réintégration du membre supérieur gauche dans les AVQ : poursuite des mobilisations

actives aidées du membre supérieur gauche. Stimulation et augmentation de l’appui sur le

membre supérieur gauche lors des transferts et retournements au lit et lors du passage de la

position assise à debout. L’utilisation d’un déambulateur pour la marche nécessite également

l’appui au niveau du membre supérieur et la prise de la poignée pour le contrôle de la

direction. La reprise de l’alimentation favorise encore la sollicitation du membre gauche avec

des activités bimanuelles comme l’ouverture d’une compote, la stabilisation du pot lors de la

mise en bouche… En progression : diminution de l’aide du thérapeute dans toutes ces

activités

Travail d’équilibre et Amélioration du schéma de marche : travail du pas postérieur avec

travail analytique du grand fessier en charge, contrôle de la flexion du tronc, marche arrière,

travail du pas chassé pour le moyen fessier, travail de reprogrammation sensori-motrice sur

mousse pour contrôle du récurvatum de genou par la

co-contraction des ischio-jambiers et du quadriceps,

complété par des exercices de fente avant pour le

travail de mise en charge sur le membre inférieur

gauche. Le travail d’équilibration est débuté avec

l’augmentation de la longueur du pas, la stimulation

des réactions d’adaptation posturale de hanche et de

cheville et des réactions parachutes. La dernière

semaine, le patient a été autorisé à sortir du service

de réanimation pour disposer d’une salle de

rééducation où les exercices ont été poursuivis avec

plus de moyens (Figure 7).

Figure 7 : Exercice de pas postérieur sur la jambe

gauche avec contrôle de la flexion du tronc

Page 24: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

21

Reprise de l’alimentation : Un test fonctionnel de

déglutition type Bleeckx (23) est effectuée après la

recherche de pré-requis : élévation du cartilage thyroïde,

mouvement de la langue, tonus du plancher buccal, pas

de déviation du palais, capacité de courte apnée

respiratoire. Ce test a mis en évidence des troubles de la

déglutition aux liquides et à la salive. Le retrait de la

sonde naso-gastrique a donc été effectuée avec une

reprise alimentaire à base de plats hachés menus, de

compote, de crème hyperprotéinée et d’eau épaissie

(Figure 8). Un bilan est également effectué par la

nutritionniste pour vérifier l’apport quotidien de calories

suffisant à l’hypermétabolisme nécessaire à la guérison

de l’escarre et le réentrainement à l’effort.

6. Bilan final de la prise en charge kinésithérapique

Le 10/10/2012, à J+65 de son hospitalisation, Mr B ne dépend plus de la ventilation

mécanique, ni d’oxygénation mais reste encombré et dyspnéique à l’effort avec un score de

l’échelle du MRC de stade 3. (11) En effet, on retrouve toujours des ronchi bilatéraux à

l’auscultation. Son volume inspiratoire maximal mesuré à l’aide du Voldyne est de 1500 ml.

Le test de marche de 6 minutes (TDM6) est effectué avec une pause de 40 secondes, à cause

de la fatigabilité et la dyspnée du patient. La distance parcourue est de 190m sans aide

technique. La fréquence cardiaque (FC) étant de 80 bpm au repos et de 120 pendant le TDM6.

Les douleurs neuropathiques de l’épaule sont désormais cotées à 3 sur 10 à l’EVA, la

douleur de l’escarre sacrée à 2 et il n’y a plus de plainte quant à la douleur au pli de l’aine. On

observe un bourgeonnement important et une diminution de 1cm en largeur et en longueur de

l’escarre sacrée. Il n’y a plus de contact osseux donc passage en stade III.

La diminution des douleurs d’épaule permet un gain d’amplitude articulaire en flexion et

abduction (Annexe 1A). Malgré le déficit musculaire et les troubles de la sensibilité

persistants, le membre supérieur gauche est maintenant intégré dans les activités de la vie

Figure 8 : Petit-déjeuner: prise

d'une compote

Page 25: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

22

quotidienne comme les repas, la toilette et les transferts rendant le patient uniquement

dépendant pendant la toilette des membres inférieurs.

Le testing musculaire montre un gain de force au niveau du membre inférieur gauche avec

des quadriceps, grands fessiers et triceps cotés à 3 sur 5 (Annexe 1B). Cependant

l’amyotrophie reste généralisée. La spasticité du grand pectoral et du tibial antérieur sont

toujours cotées à 1 sur 5 et ne sont pas décrites comme gênantes par le patient.

Sur le plan fonctionnel, le passage de la position assise à la position debout seul est obtenu

avec l’aide des accoudoirs. L’équilibre bipodal est maintenu lors de déséquilibres intrinsèques

et les déséquilibres extrinsèques entrainent des réactions parachutes adaptées mais retardées à

gauche. Le Time Up and Go Test est réalisé sans aide technique en 22 secondes avec une FC

à 120 bpm. De plus, l’équilibre unipodal est inférieur à 5 secondes à gauche et inférieur à 10

secondes à droite. Le patient présente donc encore un risque de chute sans aide technique.

Les déficits des extenseurs de hanche et de genou sont marqués à la marche par une boiterie

en salutation et le manque de contrôle du genou lorsque le patient fatigue

Le retrait de la sonde naso-gastrique a été effectué le 24 septembre après un test

fonctionnel des capacités de déglutition de Bleeckx réalisé par la kinésithérapeute du service.

Le test met en évidence des troubles de la déglutition aux liquides. Le ballonnet reste donc

gonflé en dehors des repas pour prévenir les fausses routes à la salive. Une canule phonatoire

est mise en place le 03 octobre permettant la communication orale ce qui augmente de

manière considérablement la qualité de vie de Mr B. La présence de fausses routes à la salive

est toujours surveillée de plus la valve phonatoire entraine une résistance à l’expiration donc

augmente le travail respiratoire.

Page 26: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

23

7. Discussion

L’hospitalisation en service de réanimation de Mr B a débouché sur la mise en place d’une

trachéotomie consécutive aux échecs de sevrage de la ventilation mécanique et le

déconditionnement psychomoteur du patient. En effet, le premier mois de son séjour en

réanimation n’a été qu’une suite d’échecs et de complications avec une pneumopathie acquise

en réanimation, une escarre et un arrêt cardio-respiratoire. Les problèmes de communication

associés à l’aggravation de son état général, ont plongés Mr B dans une désadaptation

psychomotrice. Il était donc peu coopérant avec l’équipe soignante, démotivé pour la

rééducation et très fatigable. Tous ces paramètres ont complexifié la réadaptation de ce

patient, rendu difficile l’amélioration son état respiratoire sans négliger le versant fonctionnel

et psychologique. Le sevrage de la ventilation mécanique était urgent pour diminuer le risque

de récidive de pneumopathie, empêcher la dégradation des muscles respiratoires et des

membres inférieurs déjà atteints, favoriser la cicatrisation de l’escarre, améliorer le pronostic

de récupération fonctionnelle et le pronostic vital du patient. La prise en charge

kinésithérapique a nécessité une organisation de toute la prise en soins du service de

réanimation grâce à une équipe pluridisciplinaire. Elle a également nécessité de la patience et

la prise en compte de l’état psychologique du patient qui a été déterminant dans l’amélioration

de ses capacités fonctionnelles. L’arrêt de la ventilation mécanique, la reprise d’une activité

de marche, de l’alimentation et de la parole ont eu un impact psychologique fort pour le

patient. Les encouragements du personnel et sa propre motivation, augmentant au fur et à

mesure de la progression des capacités fonctionnelles, lui ont donné les moyens d’atteindre

son objectif d’intégrer l’hôpital St Jacques. La rééducation a eu pour effets une amélioration

du pronostic vital, de l’autonomie, de la tolérance à l’effort et de la qualité de vie du patient.

En effet, les douleurs neuropathiques et la sous-utilisation du membre hémiplégique ont

fortement diminué. Sur le plan fonctionnel, la reprise de la marche et des activités de la vie

quotidienne, la reprise d’une alimentation et d’une phonation ont été possibles grâce à

l’amélioration de l’état respiratoire, ces deux fonctions étant intimement liées. Sur le plan

respiratoire, le sevrage de la ventilation mécanique puis de l’oxygénation ont été favorisés par

le désencombrement bronchique et la spirométrie incitative. Il aurait été judicieux d’évaluer la

qualité de vie de Mr B. au début et à la fin de la prise en charge pour objectiver son

amélioration. Le pronostic vital du patient a été évalué à partir du calcul de l’index de BODE

(Annexe 4) (11) au début et à la fin de la prise en charge. Cet index, créé par B. R. Celli et al.

en 2004 (24), tient compte du syndrome obstructif et de son retentissement général. Il est plus

prédictif de la survie des patients BPCO que la seule valeur du VEMS (6). L’index de BODE

Page 27: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

24

du bilan initial de Mr B est de 7 sur 10, correspondant à un quartile 4 (Annexe 4), la survie à

52 semaines serait de 20% (24) (11). L’index de BODE du bilan final est de 6 sur 10 avec une

amélioration de la distance au TDM6. Le pronostic vital du patient est donc meilleur, il est

alors possible d’escompter un pourcentage de survie largement supérieur à 52 semaines. La

réhabilitation précoce en séjour de réanimation a donc une place prépondérante dans la prise

en charge des malades en réanimation pour améliorer le pronostic vital et limiter les

complications de l’alitement prolongé (18) (21). Les protocoles utilisés sont tous

essentiellement composés de mobilisations passives et actives, le bord de lit, la verticalisation,

le transfert lit-fauteuil et la déambulation (18). Dans une étude de 2009 (21), P. Burtin et al.

préconisent la mobilisation sur cycloergomètre associée à des mobilisations classiques pour

un meilleur résultat au TDM6, une meilleure force isométrique du quadriceps et une

amélioration de la qualité de vie. Il aurait été intéressant pendant la phase de ventilation

mécanique de proposer au patient de l’électrostimulation sur les quadriceps pour limiter

l’amyotrophie du quadriceps et permettre ainsi une reprise plus rapide de la marche. (24)

L’électrostimulation a été étudiée afin de savoir si cette thérapeutique pouvait être une

alternative efficace dans la réhabilitation classique du MK pour lutter contre le phénomène

d’amyotrophie du quadriceps et faciliter la reprise du réentrainement physique chez les

patients BPCO. Cette technique peut être mise en place de façon très précoce car elle ne

demande pas d’effort au patient et n’entraine pas de dyspnée. Il a été mis en évidence une

augmentation de la force et de l’endurance du quadriceps avec une modification structurelle

du muscle, une diminution de la dyspnée et une amélioration de la qualité de vie. Cependant,

le niveau de preuve des études réalisées sur l’électrostimulation chez les patients BPCO sont

insuffisants pour confirmer les bénéfices cliniques et fonctionnels de l’électrostimulation (24).

Le treshold inspiratoire (15) pour entrainements des muscles inspiratoires aurait peut-être

permis de diminuer la dyspnée de Mr B qui est restée du début à la fin de la prise en charge au

stade 3 de l’échelle MRC. La spirométrie incitative utilisée à l’aide de l’appareil Voldyne a

permis un suivi de l’inspiration maximale du patient mais n’est pas un outil fiable pour les

patients porteurs d’une BPCO. La SPLF recommande un entrainement des muscles

inspiratoires (EMI) pour la réhabilitation respiratoire des patients BPCO à l’aide d’un appareil

avec valve inspiratoire à seuil type IMT (6). Il est préconisé un entrainement de 10 à 15

minutes avec une pression inspiratoire (PI) d’une valeur minimum de 30% de la PI maximale

(PImax) du sujet. Dans une méta-analyse récente, de R. Gosselink et al. incluent les études

dont le protocole établit une valeur de PI minimum de 30% de la PImax (25). L’EMI associé à

une réhabilitation motrice générale est efficace chez les patients BPCO pour améliorer la

Page 28: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

25

force et l’endurance des muscles respiratoires, entrainant ainsi une diminution de la dyspnée,

une amélioration des capacités fonctionnelles et de la qualité de vie notamment chez les

patients dont la PImax est inférieure à 60 cm d’H2O (27) .Comme tout entrainement

musculaire, l’EMI montre une perte d’effet sur le long terme, c’est pourquoi il faut

encourager les patients à le continuer. Il est important de s’inquiéter du devenir du patient

après son hospitalisation, de la conservation des acquis de la rééducation. Dans cette optique

de maintien des acquis de la réadaptation motrice, il aurait été intéressant de mettre en place

une éducation thérapeutique du patient (ETP). En effet, l’ETP a fait ses preuves dans de

nombreuses maladies chroniques. C’est une stratégie de prévention des exacerbations chez les

patients porteurs d’une BPCO. Elle fait partie intégrante de la réhabilitation respiratoire (7).

L’efficacité de la réhabilitation respiratoire, avec le réentrainement à l’effort, l’ETP, le suivi

psychologique et le sevrage tabagique, a été démontrée en termes de dyspnée, de tolérance à

l’effort et d’amélioration de la qualité de vie chez le patient atteint BPCO. Elle a également

« un impact positif sur les dépenses de santé en réduisant les exacerbations, les consultations

en urgence et la durée des hospitalisations » (7). Un score de BODE supérieur à 4 indique la

nécessité d’un stage de réhabilitation respiratoire. Il est donc nécessaire que Mr B effectue un

stage de réhabilitation respiratoire avant d’envisager son retour à domicile pour que celui-ci se

passe dans des conditions optimales de sécurité.

Page 29: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

26

8. Conclusion

Après deux mois passés en réanimation, l’objectif commun de Mr B et de l’équipe

pluridisciplinaire a été atteint puisqu’il a été transféré dans un service de rééducation et

réadaptation fonctionnelle à l’hôpital St Jacques de Nantes à la fin de la prise en charge

kinésithérapique. Son évolution dans le service a été marquée par des complications mettant

en jeu son pronostic vital et rendant difficile le sevrage de la ventilation mécanique. Il était

donc impératif de prioriser les objectifs de soins pour permettre une autonomie à ce patient

atteint de plusieurs pathologies lourdes. La trachéotomie a facilité la procédure de sevrage de

la ventilation mécanique. En fractionnant les séances et en adaptant chaque technique au

patient, aux contraintes de posture et de l’environnement, la prise en charge kinésithérapique a

permis une autonomie sur le plan respiratoire et fonctionnel. Ce cas clinique a mis en

évidence l’importance de la volonté du patient, de la coordination d’une équipe

pluridisciplinaire et le fait que finalement rien n’est jamais perdu. Il a également permis

l’acquisition de connaissances sur la BPCO et l’importance de la qualité de vie du patient

avec une prise en charge globale. La découverte du rôle du MK en réanimation, de son

adaptation dans les différents champs de compétences et son intégration dans une équipe

pluridisciplinaire a été très enrichissante. En complément de la kinésithérapie respiratoire,

l’élaboration d’un programme de réadaptation motrice précoce devrait être une priorité dans

les services de réanimation dans la prévention des complications liées à l’alitement prolongé.

Page 30: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

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Page 32: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

ANNEXES

Annexe 1 : Goniométrie des membres (A) et Quantification de la force

musculaire (B)

Date de l’examen : 10/09/2012 Gain au 10/10/2012

Droit (A)

Gauche (A)

Droit (B)*

Gauche (B)*

HANCHE

FLEXION 100° 90° 4 3

EXTENSION 0° 0° 4 2 (3)

ABDUCTION 30° 30° 4 3

ADDUCTION 20° 20° 4 3

ROTATION EXTERNE 40° 35° 4 3

ROTATION INTERNE 25° 20° 4 3

GENOU

FLEXION 120° 120° 4 3

EXTENSION 0° 0° 4 3- (3+)

CHEVILLE

FLEXION DORSALE, genou tendu 10° 10° 4

3 FLEXION DORSALE, genou fléchi 15° 15°

FLEXION PLANTAIRE 40° 40° 4 2+ (3)

EPAULE

FLEXION 100° 90° (100°) 4 3

ABDUCTION 110° 90° (100°) 4 3

ROTATION EXTERNE 30° 20° 4 3

ROTATION INTERNE 30° 30° 4 3

COUDE

FLEXION 150° 150° 4 3

EXTENSION 0° -5° 4 2

POIGNET

FLEXION 60° 60° 4 2

EXTENSION 60° 60° 4 2

DOIGTS

FLEXION (MCP/IPP/IPD) 90°/100°/90° 90°/100°/90° 4 2

EXTENSION (MCP/IPP/IPD) 50°/10°/10° 50°/10°/10° 4 2

*Quantification de la force musculaire réalisée selon le testing international de Daniel et

Worthingham. (9)

Annexe 2: Échelle de la dyspnée du MRC (British Medical research Council)

(11)

Page 33: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

Annexe 3 : Suivi des gaz du sang

pH

HCO3-

(mol/L)

PaCO2 (mmHg)

PaO2 (mmHg)

SaO2 (%)

Mode de ventilation

06/09 7,4 33,3 48,8 78,8 92,7 VAC

07/09 7,5 35,1 45,3 80,1 95 VAC

08/09 7,4 33,1 47,5 83,3 97,5 VAC

09/09 7,4 33,3 47,3 86,2 94,1 VSAI+VC

10/09 7,5 34,3 45 88,8 95,6 VSAI+VC

11/09 7,4 33,1 48,4 79,3 94,3 VSAI + NA 6L (2*1h) + VAC (nuit)

12/09 7,4 31,9 47,5 83,3 96 VSAI + NA 6L (1h) + VAC (nuit)

13/09 7,4 33,3 48,2 81,7 93,8 VSAI + NA 6L (2*1h) + VAC (nuit)

14/09 7,4 32,8 47,5 84,0 95 VSAI + NA 6L (3*1h) + VAC (nuit)

15/09 7,5 34,7 45,1 93,4 96,1 NA 6L (5h) + VSAI

16/09 7,4 32 47 91,9 95 NA 6L (8h) + VSAI

17/09 7,4 32,4 48,2 78,2 94,6 NA 6L (10h) + VSAI (nuit)

18/09 7,3 30,5 49,1 70,9 93,3 NA 3L (10h) + VSAI (nuit)

19/09 7,4 32,1 47,9 80,3 95,2 NA 3L

Les normes (7) pH = 7,40 ± 0,02 HCO3- =22-26mol/L PaCO2=38-42mmHg PaO2=85-95mmHg SaO2=95-98%

VAC : Ventilation Assistée Contrôlée, VSAI : Ventilation Spontanée avec Aide Inspiratoire,

NA : Nez Artificiel

Annexe 4: Classification GOLD (6)

GOLD: Global Organisation for Lung Disease

VEMS: Volume Expiratoire Maximal en une Seconde

CVF : Capacité Vitale Forcée (après prise d’un bronchodilatateur)

Page 34: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

Annexe 4 : Indice de BODE (11) (25)

B : Body mass index : indice de masse corporelle (IMC) : poids/ (tailletaille)

O : Obstruction des voies aériennes évaluée par le VEMS

D : Dyspnée évaluée par l’échelle MRC

E : capacité à l’Effort évaluée par la distance du test de marche de 6 minutes

A partir de ce tableau B. R. Celli et al. ont classés la sévérité de la BPCO en quartiles :

– quartile 1, score de 0 à 2

– quartile 2, score de 3 ou 4

– quartile 3, score de 5 ou 6

– quartile 4, score de 7 à 10

Page 35: réanimation d’un patient porteur d’une BPCO, trachéotomisé,

Annexe 5 : Evolution de la prise en charge de Mr B. en service de réanimation