Perspectives n°18

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C hacun, comme à chaque fois que l'his- toire fait irruption et surgit avec sa violence impré- visible, et que l'on sort de l'ordinaire, se souviendra où il était et ce qu'il faisait lorsqu'il découvrit l'horreur de ce mas- sacre perpétré envers la rédac- tion d'un journal satirique, des policiers en fonction et les clients d'un supermarché juif. Quand la tragédie fait irrup- tion sur la scène de l'histoire nous surprenant dans la bana- lité du quotidien ! L a tradition philosophique s'est toujours construite en marge ou contre la pensée religieuse. Chez les Grecs, l'affirmation du logos, la raison, se fait au détriment du mythos, le mythe, l'histoire que l'on ra- conte afin de donner un sens à la naissance de l'univers, au scandale de la maladie de la mort, du tragique de la condi- tion humaine … c'est le para- doxe pascalien de la grandeur de l'homme qui découvre sa petitesse ; du haut de sa force, il se connaît dans son extrême faiblesse … Mais la force de la raison, c'est, par un long travail de Sisyphe, d'accé- der à la vérité et de construire un monde de savoir. La con- naissance s'oppose à la croyance. Pour les artisans de la pensée rationnelle, scienti- fiques ou philosophes, juristes ou techniciens, la religion est une illusion qui peut s'avérer dangereuse dès lors qu'elle prétend se substituer à l'activi- té de la connaissance ration- nelle. Le philosophe Ludwig Feuerbach affirmait que c'est sa propre essence que l'homme projette en Dieu. Après avoir été conçu comme étant à l'image de Dieu, c'est Dieu qui devient à l'image de l'homme ! Et lorsque Marx écrit ". La religion est le soupir de la créature opprimée, l'âme d'un monde sans cœur, comme elle est l'esprit des conditions sociales d'où l'esprit est exclu. Elle est l'opium du peuple.", il cerne avec exacti- tude l'impact et le rôle du phénomène religieux. La Ré- volution française en procla- mant l'existence d'une huma- nité universelle promeut l'uni- té du genre humain. Les reli- gions se sont progressivement orientées vers un humanisme altruiste. Il demeure que les groupes humains, à travers leur culture, leurs pratiques sociales, les contradictions d'un capitalisme en crise qui utilise guerres et conflits comme outil de régénéres- cence … génèrent les pires Résistez! N°18 – 21 JANV. 2015 P erspectives « L’Humanité » Journal fondé par Jean Jaurès – 18/04/1904 inquiétudes. C 'est une grande victoire de l'Esprit humain que de pouvoir transgresser des fron- tières, celles qu'imposent les dictatures de quelque ordre qu'elles soient. Tuer les dessi- nateurs de Charlie-Hebdo, c'est vouloir abolir l'art qui dévoile une réalité qu'il rend visible. Quoi de plus vain ! I l est un magnifique rêve de Grenade, celui d'Aragon, lorsqu'il évoque dans Le Fou d'Elsa l'Andalousie des trois religions monothéistes réconci- liées. Mais le rêve s'achève dans le cauchemar d'une Inquisition victorieuse. " Et puis je sens se dessécher Ces mots de moi dans ma salive C'est là le malheur pas le mien Le malheur qui nous est commun Épouvantes des autres hommes Et qui donc t'eut donné la main Étant donné ce que nous sommes" Jean Knauf, Président des Amis de l'Humanité MEILLEURS VŒUX « Que règne la liberté. Car jamais le soleil ne s’est couché sur réalisa- tion humaine plus glo- rieuse. » N. Mandela Ce que nous espérons pour cette nouvelle an- née. Les Amis de l'Huma. BP 14 63018 Clermont-Ferrand cedex 2 [email protected] http://amishuma63.over-blog.com Tel : 06 75 95 59 01 06 26 43 19 65 CCP : Amis de l’Huma n°07525668R024 J.O : 23.07.2011 n°947/3387

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Bulletin d'information del'association des Amis de L'Humanité du Puy-de-Dôme. Au programme : les attentats contre la liberté d'expression, le dernier livre de Jeremy Rifkins et un hommage à René Vautier

Transcript of Perspectives n°18

Page 1: Perspectives n°18

C hacun, comme à

chaque fois que l'his-

toire fait irruption et

surgit avec sa violence impré-

visible, et que l'on sort de

l'ordinaire, se souviendra où il

était et ce qu'il faisait lorsqu'il

découvrit l'horreur de ce mas-

sacre perpétré envers la rédac-

tion d'un journal satirique, des

policiers en fonction et les

clients d'un supermarché juif.

Quand la tragédie fait irrup-

tion sur la scène de l'histoire

nous surprenant dans la bana-

lité du quotidien !

L a tradition philosophique

s'est toujours construite

en marge ou contre la pensée

religieuse. Chez les Grecs,

l'affirmation du logos, la raison,

se fait au détriment du mythos,

le mythe, l'histoire que l'on ra-

conte afin de donner un sens

à la naissance de l'univers, au

scandale de la maladie de la

mort, du tragique de la condi-

tion humaine … c'est le para-

doxe pascalien de la grandeur

de l'homme qui découvre sa

petitesse ; du haut de sa

force, il se connaît dans son

extrême faiblesse … Mais la

force de la raison, c'est, par un

long travail de Sisyphe, d'accé-

der à la vérité et de construire

un monde de savoir. La con-

naissance s'oppose à la

croyance. Pour les artisans de

la pensée rationnelle, scienti-

fiques ou philosophes, juristes

ou techniciens, la religion est

une illusion qui peut s'avérer

dangereuse dès lors qu'elle

prétend se substituer à l'activi-

té de la connaissance ration-

nelle. Le philosophe Ludwig

Feuerbach affirmait que c'est

sa propre essence que

l'homme projette en Dieu.

Après avoir été conçu comme

étant à l'image de Dieu, c'est

Dieu qui devient à l'image de

l'homme ! Et lorsque Marx

écrit ". La religion est le soupir de

la créature opprimée, l'âme d'un

monde sans cœur, comme elle est

l'esprit des conditions sociales d'où

l'esprit est exclu. Elle est l'opium

du peuple.", il cerne avec exacti-

tude l'impact et le rôle du

phénomène religieux. La Ré-

volution française en procla-

mant l'existence d'une huma-

nité universelle promeut l'uni-

té du genre humain. Les reli-

gions se sont progressivement

orientées vers un humanisme

altruiste. Il demeure que les

groupes humains, à travers

leur culture, leurs pratiques

sociales, les contradictions

d'un capitalisme en crise qui

utilise guerres et conflits

comme outil de régénéres-

cence … génèrent les pires

Résistez!

N ° 1 8 – 2 1 J A N V . 2 0 1 5

Perspectives « L’Humanité » Journal fondé par Jean Jaurès – 18/04/1904

inquiétudes.

C 'est une grande victoire de

l'Esprit humain que de

pouvoir transgresser des fron-

tières, celles qu'imposent les

dictatures de quelque ordre

qu'elles soient. Tuer les dessi-

nateurs de Charlie-Hebdo, c'est

vouloir abolir l'art qui dévoile

une réalité qu'il rend visible.

Quoi de plus vain !

I l est un magnifique rêve de

Grenade, celui d'Aragon,

lorsqu'il évoque dans Le Fou

d'Elsa l'Andalousie des trois

religions monothéistes réconci-

liées. Mais le rêve s'achève dans

le cauchemar d'une Inquisition

victorieuse.

" Et puis je sens se dessécher

Ces mots de moi dans ma salive

C'est là le malheur pas le mien

Le malheur qui nous est commun

Épouvantes des autres hommes

Et qui donc t'eut donné la main

Étant donné ce que nous sommes"

Jean Knauf,

Président des Amis de l'Humanité

MEILLEURS VŒUX

« Que règne la liberté.

Car jamais le soleil ne

s’est couché sur réalisa-

tion humaine plus glo-

rieuse. » N. Mandela

Ce que nous espérons

pour cette nouvelle an-

née.

Les Amis de l'Huma.

BP 14 63018 Clermont-Ferrand cedex

2

[email protected]

http://amishuma63.over-blog.com

Tel : 06 75 95 59 01 06 26 43 19 65

CCP : Amis de l’Huma n°07525668R024

J.O : 23.07.2011 n°947/3387

Page 2: Perspectives n°18

Jeudi 12 février - 20h. Fac de Lettres — Fac de Lettres, Amphi 2 — Laurent Lamoine, Historien. "Le monde romain de 70 av. J.

-C. à 73 ap. J.-C.". Cet ouvrage traite d’un siècle et demi de l’histoire de Rome que l’historiographie traditionnelle sépare généralement en deux pé-

riodes distinctes : la fin de la République, jusqu’en 30 ou 27 av. J.-C., et le début de l’Empire.

Jeudi 26 février - 20H. Faculté de Lettres - Amphi 2. Gilles Plum, Historien de l’art "Paris, architecture de la Belle-Epoque".

Jeudi 05 mars - 20H. Faculté de Lettres - Amphi 2. Thomas PORCHER et Frédéric FARAB "Tafta, l’accord du plus fort".

Aujourd’hui à Bruxelles et aux États-Unis, se joue la signature d’un traité qui risque de changer radicalement la vie de centaines de mil-

lions de citoyens américains et européens.

Plus d'infos sur le site de l'association : https://amistempsdescerises.wordpress.com

J eremy Rifkin est de retour avec “La Nouvelle Société du coût marginal zéro”. Dans ce livre, l’essayiste américain

prédit un changement de paradigme de notre époque. Le pas-sage de la verticalité de l’ère charbon-pétrole à l’horizontalité de l’ère internet qui pourrait nous mener vers un monde plus écologique, plus durable et plus démocratique.

S ous ce long titre La nouvelle société du coût marginal zéro. L'internet des objets, l'émergence des communaux collaboratifs et l'éclipse du capitalisme

(Paris, LLL, 2014) le dernier livre de Jeremy Rifkin rassemble un certain nombre d'idées intéressantes, qui avaient été pour la plupart présentées dans ses précédents ouvrages (notamment La Troisième révolution industrielle).

Pour les tenants de la dialectique matérialiste que nous sommes, la thèse principale de Rifkin attire forcément l'attention. L'auteur insiste sur une contradiction inhérente au capitalisme que les marxistes n'ont pas forcément soulignée. En s'appuyant sur la théorie marginaliste de la valeur (à savoir que le prix d'un bien dépend de son utilité marginale, autrement dit que la valeur n'est pas dépendante de la quantité de travail mais de l'utilité qu'on peut retirer de la pro-duction d'une unité supplémentaire d'un bien parti-culier), Rifkin dévoile un des mécanismes qui mine de l'intérieur le système capitaliste. En effet, si l'on pousse la logique capitaliste à son terme, comme les néo-libéraux le font actuellement, on constate que les gains de productivité permis par l'innovation et l'introduction de nouvelles technologies font sans cesse décroître les coûts de production jusqu'à at-teindre un coût marginal quasiment nul, menaçant de fait l'essence même du capitalisme : la quête du pro-fit. Or aujourd'hui, ce que Rifkin dénomme la Troi-sième Révolution industrielle et dont on observe encore que les premiers balbutiements, combinant l'exploitation des énergies renouvelables et la connexion en réseau de milliards d'êtres humains et bientôt de tous les objets de notre quotidien, permet de supplanter la logique mercantile au profit de pratique de mise en partage des savoirs et des biens. Ainsi assiste-t-on, pour l'auteur, à la création de « communaux collaboratifs » (en référence aux commu-naux de l'époque pré-capitaliste) qui in fine peuvent faire exploser la captation des richesses par une minorité d'individus, en passant d'une logique de la propriété à une logique de l'accès (partager un service ou un bien plutôt que l'acheter et en jouir individuellement).

E t le deuxième intérêt de ce livre est d'illustrer cette évolution dans plusieurs domaines (les énergies renouvelables, l'im-

pression 3D, l'enseignement, la création de nouveaux logiciels, l'accès à la culture, etc...) ce qui ne manque pas de soulever un réel enthousiasme. Rifkin démontre parfaitement comment les nouvelles technologies vont nous permettre dans un futur assez proche, vraisemblablement une trentaine d'années au rythme où court désormais l'innovation, (et cette perspective n'a rien d'illu-soire quand on regarde la vitesse avec laquelle Internet et la micro-informatique se sont développés depuis 1990) de produire nous mêmes nos propres objets grâce au développement spectaculaire de l'impression en 3D, et sans doute aussi nos propres énergies en profitant du prix de plus en plus bas des cellules photovol-taïques. Rifkin dessine les contours d'un monde possible où les « prosommateurs » (c'est-à dire les consommateurs qui produi-sent eux-mêmes leurs objets) collaborent à l'élaboration de nou-veaux outils et de nouveaux produits, les utilisent de manière plus

intelligente, et les partagent grâce à la mise en réseau sur Internet. L'auteur place ainsi une confiance pleine ( et aveugle?) en la génération du Millénaire – cette généra-tion née dans les deux décennies 1980 et 1990 – qu'il pense acquise à la culture de la gratuité et du partage.

S ans doute y-a-t-il bien des objections à faire aux thèses avancées dans ce livre. On peut notamment

lui reprocher un déterminisme excessif. Du reste plu-sieurs questions sont en suspens. Les gains de producti-vité qui sont en effet permis par les nouvelles technolo-gies seront-ils vraiment mis à profit par le plus grand nombre ou bien seront-ils captés par l'oligarchie ? Qui aura la main sur la gestion d'Internet et comment sera géré le Big Data, cette immense base de données qui offre des perspectives incroyables et représente le grand défi de l’informatique des décennies 2010-2020? Trop

souvent l'auteur ignore la notion de rapport de force dans l'émer-gence du monde qu'il nous annonce. On le sait, le capitalisme possède une capacité de résilience impressionnante que vient encore de démontrer la crise qui se déroule sous nos yeux. Il n'en est pas pour autant éternel et ce livre soulève indubitablement l'espoir : les évolutions en cours peuvent nous permettre de nous débarrasser des structures du capitalisme. A nous de nous en saisir !

Jonathan BOUDET

Page 3: Perspectives n°18

René VAUTIER, « le petit breton à la caméra

rouge » nous a quittés

N é le 15 janvier 1928 d’un père ouvrier d’usine et d’une mère institutrice, René Vau-tier est mort chez lui à Cancale le 4 janvier 2015. Membre des Eclaireurs de France, il mène sa première activité militante au sein de la Résistance en 1943, alors âgé de

15 ans, ce qui lui vaut la Croix de Guerre à 16 ans et une citation à l’Ordre de la Nation par le général de Gaulle en 1944 pour faits de Résistance. Après des études secondaires, il entre en 1948 à l’Institut des Hautes Etudes Cinématographiques (IDHEC) d’où il sort diplômé . Militant du Parti Communiste, il réalise en 1950 son premier film « Afrique 50 », chef-d’œuvre du cinéma engagé . Interdit pendant plus de 40 ans, ce film lui vaudra 13 inculpa-tions et une condamnation à un an de prison pour violation d’un décret datant de 1934 si-gné Pierre Laval. Il est incarcéré à la prison militaire de St-Maixent, puis en zone occupée en

Allemagne, d’où il sort en 1952 . En 1955, il réalise « Une nation : l’Algérie », histoire de la colonisation, qui lui vaudra d’être pour-suivi pour atteinte à la sûreté de l’Etat. Entre 1957 et 1958, il tourne dans les maquis des Aurès , au péril de sa vie (il sera blessé 3 fois) , un film superbe : « Algérie en flammes » . Après l’indépendance , il est nommé directeur du Centre Audiovisuel d’Alger où il donne des cours pour former les algériens à l’image et leur permettre de réaliser eux-mêmes leurs films. De retour en France, c’est en 1972 qu’il est révélé au grand public grâce au film « Avoir 20 ans dans les Aurès » pour lequel il a obtenu à Cannes le prix de la critique internationale. Toute sa vie, caméra citoyenne et indignée au poing, René Vautier n’a cessé de s’engager contre le capitalisme , le patronat , le ra-cisme. D’où tournages difficiles, montages clandestins, négatifs confisqués, commissions de censure, inculpations, condamnations, emprisonnements, grève de la faim, dégradation ou destruction des copies, séances de diffusion menacées, attentat . Voilà les actes qui ont accompagné le cinéaste et son œuvre, riche d’une cinquantaine de films ou documentaires et d’un livre : « Caméra citoyenne - Mémoires ». Avec l’aide de sa fille Moïra, elle-même cinéaste, une petite coopérative audiovisuelle a édité un coffret regroupant 15 films , dont « Avoir 20 ans dans les Aurès » en version restaurée. Préserver son œuvre est un devoir de mémoire car elle est un témoin précieux des luttes et des évènements de notre histoire récente. Malgré son âge et des problèmes de santé, René avait accepté plusieurs fois de faire le voyage jusqu’à Clermont pour présenter ses films et animer des débats . On garde de lui le souvenir d’un homme de conviction, courageux, simple et chaleureux , un camarade. Un hommage lui sera rendu au cinéma Le Rio le 2 février à 20H avec une présentation de cinq documentaires, en présence de Mi-chel Le Thomas , cinéaste et ami de René.

Gilbert BEAUMONT

Nos conférences

Jeudi 29 janvier à 20h

Stéphane VEYER

« Faire société :

le choix des coopératives » Une réflexion sur la manière d’organiser le travail aujourd’hui et de

promouvoir le modèle des coopératives ouvrière.

Stéphane Veyer est ancien dirigeant de la

société coopérative Coopaname

Amphi 2 — Fac de Lettre — Entrée libre

Jeudi 19 février à 20h

Benoît Schneckenburger

« L’intelligence du

matérialisme » Alor que nous assistons à un retour du religieux, faisons un effort de

réflexion pour remonter aux sources du matérialismes afin d’en explo-

rer toute la richesse analytique

Benoît Schneckenburger est agrégé et docteur en philosophie

Salle multimédia — Espace Georges Conchon

7 Rue Léo Lagrange

Page 4: Perspectives n°18

ADHESION 2015

L'Humanité et l'Humanité Di-

manche sont en grand danger. Des

difficultés de trésorerie les menacent grave-

ment. Pour faire face à cette situation, l'Hu-

manité et ses équipes font appel à leurs lec-

trices et lecteurs, aux organisations progres-

sistes et démocratiques, à toutes les per-

sonnes attachées au pluralisme des idées et de

la presse.

Conférence des Ami(e)s de la Commune

Véronique FAU-VINCENTI et Josiane GARNOTEL

« Soirée Louise MICHEL»

Vendredi 06 mars — 20h à 22h30

Salle multimédia — Espace G. Conchon — 7, rue Léo Lagrange