L'universitarisation de la formation infirmière

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AVERTISSEMENT Ce document est le fruit d'un long travail approuvé par le jury de soutenance et mis à disposition de l'ensemble de la communauté universitaire élargie. Il est soumis à la propriété intellectuelle de l'auteur. Ceci implique une obligation de citation et de référencement lors de l’utilisation de ce document. D'autre part, toute contrefaçon, plagiat, reproduction illicite encourt une poursuite pénale. Contact : [email protected] LIENS Code de la Propriété Intellectuelle. articles L 122. 4 Code de la Propriété Intellectuelle. articles L 335.2- L 335.10 http://www.cfcopies.com/V2/leg/leg_droi.php http://www.culture.gouv.fr/culture/infos-pratiques/droits/protection.htm

Transcript of L'universitarisation de la formation infirmière

  • AVERTISSEMENT

    Ce document est le fruit d'un long travail approuv par le jury de soutenance et mis disposition de l'ensemble de la communaut universitaire largie. Il est soumis la proprit intellectuelle de l'auteur. Ceci implique une obligation de citation et de rfrencement lors de lutilisation de ce document. D'autre part, toute contrefaon, plagiat, reproduction illicite encourt une poursuite pnale. Contact : [email protected]

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  • Universit de Lorraine

    cole doctorale Stanislas

    LISEC EA 2310

    Laboratoire Interuniversitaire

    des sciences de lducation et de la communication

    Thse prsente en vue de lobtention du doctorat

    de lUniversit de Lorraine

    par Zuia Concepcion (Conchita) pouse Szyba

    Luniversitarisation de la formation inirmireRadiographie dune rforme dans les IFSI Publics lorrains

    Thse soutenue le 1er juin 2016

    Sous la direction du Professeur Eirick PRAIRAT

    Jury :

    Professeur Pierre-Philippe BUGNARD : Universit de Fribourg Suisse Prsident du Jury

    Professeure France JUTRAS : Universit de Sherbrooke Ca-nada Rapporteure

    Matre de confrences Andr PACHOD HDR Universit de Strasbourg France Rapporteur

    Professeur Eirick PRAIRAT : Universit de Lorraine Directeur de thse

  • Tout est changement, non pour ne plus tre,

    mais pour devenir ce qui nest pas encore

    pictte

  • - I -

    Remerciements

    Je tiens exprimer ici toute ma gratitude envers Monsieur le Professeur Eirick Prairat pour ses conseils clairs tout au long de ce travail de recherche, pour les moments de rlexion partags et pour la coniance quil ma accorde.

    Tous mes remerciements vont galement aux membres du jury qui ont accep-t dexaminer ce travail, cest pour moi un vritable honneur.

    Je tiens exprimer toute ma gratitude aux directeurs du laboratoire LISEC (Madame Houot dabord puis Monsieur Paivandi) ainsi quaux membres de lquipe du LISEC et en particulier lquipe Normes et Valeurs qui a bien voulu maccueillir. Jai t trs sensible votre accueil, merci pour les moments et rlexions partags qui mont permis de cheminer.

    Je remercie galement les secrtaires du LISEC de lcole Doctorale Stanis-las (Monika Sanins et Fabienne Dumont) pour leur disponibilit concernant les d-marches administratives, leur aide ma permis un gain de temps apprciable.

    Marilou et Christiane, soyez remercies ici pour votre aide concernant la re-lecture de ce travail.

    Je tiens remercier galement Aurlie et Lydie pour leur aide au niveau de la recherche documentaire.

    Un grand merci tous les tuteurs/maitres de stage, Directions/cadres sup-rieurs et formateurs des IFSI publics lorrains ainsi quaux universitaires et jeunes di-plms LMD pour mavoir accueillie avec bienveillance lors des entretiens et pour vos

    retours de rcits par courriel, sans vous ce travail naurait pu aboutirUn remerciement tout particulier Claudine et Grard pour leur profession-

    nalisme dans la mise en page de ce travail ainsi qu Thierry et Guy pour leur aide si prcieuse.

    tous ceux qui mont encourage de prs ou de loin

    mon conjoint et mon ils pour leur soutien tout au long de ces annes de recherche.

  • - II -

    Abrviations et sigles

    2C2P : Commission coordination partenariat pdagogiqueAERES : Agence dvaluation de la recherche et de lenseignement suprieurAPP : analyse de pratique professionnelleARS : agence rgionale de santCAC : Commission dattribution des crdits europens (ECTS)CEFIEC : Comit dentente des formations inirmires et cadresDGOS : Direction gnrale de loffre de soinsDRJSCS : direction rgionale de la jeunesse, des sports et de la cohsion socialeEHESP : cole des hautes tudes en sant publiqueEHPAD : tablissement hospitalier pour personne ge dpendanteGCS : groupement de coopration sanitaireHAD : hospitalisation domicileHAS : Haute Autorit de santHCERES : haut Conseil de lvaluation de la recherche et de lenseignement suprieur

    (va remplacer lAERES)HPST : loi Hpital, patients, sant et territoireIFAS : institut de formation aide-soignanteIFCS : institut de formation des cadres de santIFSI : institut de formation en soins inirmiersIGANR : Inspection gnrale de ladministration de lducation nationale et de la

    recherche

    IGAS : Inspection gnrale des affaires socialesLMD : licence, master, doctoratMSP : mise en situation professionnelleSSR : soins de suite et de radaptationTD : travaux dirigsTPG : travail personnel guidUE : unit denseignementUI : unit intgrative

  • - III -

    Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .I

    Abrviations et sigles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . II

    Sommaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .III

    Introduction gense de la recherche. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

    Premire partie de lhistoire de la profession inirmire lobjet de notre recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

    Introduction de la premire partie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

    Chapitre 1 : histoire de la profession et de la formation inirmire . . . . . . . . . . . . . . 61.1De la garde malade linirmire diplme dtat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

    1.1.1Histoire de la profession inirmire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61.1.2Histoire de la formation inirmire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

    1.2Du gardien de fous linirmire de secteur psychiatrique . . . . . . . . . . . 101.2.1Historique de la profession dInirmire de secteur psychiatrique . . . . . . 101.2.2Historique de la formation de linirmire de secteur psychiatrique . . . . . 11

    Chapitre 2 : les deux derniers programmes de la formation inirmire . . . . . . . . . . 142.1Le curriculum de 1992 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142.2Luniversitarisation des tudes inirmires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

    2.2.1Gnralits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172.2.2Gense de la mise en forme des contenus du rfrentiel 2009 . . . . . . . 192.2.3Ingnierie des rfrentiels 2009 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

    2.2.3.1Le rfrentiel de comptences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 202.2.3.2Le rfrentiel dactivits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262.2.3.3Le rfrentiel de formation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

    Chapitre 3 : le rfrentiel de 2009 et les concepts introduits par ce programme . . 303.1Introduction - analyse du programme de 2009 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 303.2Concept de comptence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313.3Actes professionnels et techniques de soin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 373.4La posture rlexive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

    Chapitre 4 : mthodologie et objet de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 474.1Rlexions et hypothses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 474.2Mthodologie pour la collecte des donnes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

    4.2.1Constitution de la collecte de donnes sous forme de schma . . . . . . . . 504.2.2Les projets pdagogiques : premire phase de recherche . . . . . . . . . . . 504.2.3Les entretiens des tuteurs/maitres de stage : deuxime phase de la re-

    cherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 534.2.3.1Choix de lchantillon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 544.2.3.2Le logiciel Alceste (analyse des lexmes cooccurrents dans un en-

    semble de segments de texte) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

    Sommaire

  • - IV -

    4.2.4Entretiens des directions et formateurs des IFSI publics lorrains : troi-sime phase de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

    4.2.4.1Le choix des interviews . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 634.2.4.2Mthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

    4.2.5Les premiers diplms LMD : quatrime phase de la recherche . . . . . . 664.2.5.1Choix de lchantillon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 664.2.5.2Mthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

    4.2.6Les formateurs non interviews des IFSI publics lorrains : cinquime phase de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

    4.2.6.1Choix de lchantillon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 684.2.6.2Mthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

    4.2.7Les intervenants universitaires : sixime et dernire phase de la re-cherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69

    4.2.7.1Choix de lchantillon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 694.2.7.2Mthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

    4.3Analyse qualitative du corpus concernant les entretiens et rcits . . . . . . . . . 70

    Deuxime partie analyse et interprtations des projets pdagogiques et des entretiens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73

    Chapitre 5 : examens des projets pdagogiques des IFSI publics lorrains . . . . . . 74

    Chapitre 6 : analyse et interprtations des entretiens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1026.1Introduction - tuteurs et maitres de stage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1026.2Analyse et synthse des 13 entretiens tuteurs/maitres de stage . . . . . . . . 104

    Troisime partie les professionnels rencontrs dans les IFSI publics lorrains . . 143

    Chapitre 7 : directeurs et formateurs interviews dans les IFSI publics lorrains . 1447.1Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1447.2Analyse des rsultats du traitement par Alceste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1447.3Analyse et synthse concernant les 15 directeurs/cadres suprieurs . . . . 1707.4Analyse et synthse concernant les 16 formateurs dIFSI . . . . . . . . . . . . . 204

    Quatrime partie analyse et interprtation des rcits de vie . . . . . . . . . . . . . . . . 267

    Chapitre 8 : les jeunes professionnels diplms premire promotion LMD . . . . . 268

    Chapitre 9 : les formateurs non interviews des IFSI publics lorrains et les universi-taires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 286

    Synthse gnrale et retour aux hypothses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 308

    Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 315

    Rfrences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 322

    Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 328

    Table des matires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 329

  • - 1 -

    Introduction

  • - 2 -

    Introduction - gense de la rechercheNous attendions, au sein des IFSI, une rforme de la formation en soins inir-

    miers, rforme dj qualiie denvergure par madame la Ministre de la Sant en 20081.

    Nous tions informs que la volont politique tait de faire en sorte que les

    universits intgrent les formations paramdicales. Dans cette mouvance, nous tions donc avertis, depuis 2005, quune universitarisation2 des tudes en soins inirmiers tait en prparation.

    En juillet 2009, le texte lgislatif concernant lingnierie des tudes en soins inirmiers a t publi avec obligation de le mettre en application pour la rentre de septembre 2009. Avec cette universitarisation des tudes, nous avions conscience que la formation inirmire tait un tournant important de son histoire.

    Ce changement de programme, bien quattendu au sein des instituts de for-mation inirmire, a cr un vritable bouleversement en introduisant les rfrentiels de comptences, dactes et dactivits ainsi que la notion de posture rlexive et la recherche. Nous ntions pas vraiment prpars un tel changement touchant la for-mation tant au niveau des apprentissages didactiques que pratiques.

    Nous avons fait partie de lquipe oprationnalisant ce programme LMD du-rant tout un cursus de formation cest--dire durant les trois premires annes de cette

    rforme dans notre IFSI dappartenance. Les dbats engendrs par le rfrentiel au sein de notre quipe ont t parfois trs anims, chacun apportant sa propre interpr-tation des textes. Nous avions, durant cette priode, un directeur dIFSI universitaire qui a pu nous apporter certains clairages sur le sens de cette rforme en lien avec luniversit. Notre propre cursus universitaire nous a galement t dune grande aide. En effet, nous avions dj, cette priode, obtenu une licence, une maitrise ainsi quun master 2 (2005/2006) en sciences de lducation. Les apports didactiques du-rant ces tudes universitaires nous ont permis dtre rapidement oprationnelle. Ainsi nous avons pu mettre nos acquis au service de lquipe en place.

    Rapidement, nous avons port un regard interrogatif sur les diffrentes inter-prtations possibles de ce rfrentiel 2009. Notre questionnement de dpart est n du constat suivant : si nous avons pu, pour notre part, recueillir des clairages par notre direction de lpoque et par notre cursus universitaire personnel, quen tait-il

    1 Discours prononc par Madame Roselyne Bachelot, ministre de la Sant, lors de linauguration du salon Inirmier en novembre 2008 Paris.

    2 Universitarisation : nologisme apparu en 2000, rgulirement employ dans les documents oficiels

  • - 3 -

    pour les autres IFSI de la rgion? Nous savions que trs peu dquipes pdagogiques se composaient de cadres de sant ayant suivi une formation universitaire et aucun autre directeur dIFSI navait de statut universitaire. Le point de dpart de cette thse rsulte donc de rlexions issues de lquipe dont nous faisions partie. Lide daller la rencontre des autres instituts publics lorrains est apparue peu peu tout comme

    celle deffectuer une recherche sur linterprtation et la mise en place de ce rfrentiel

    LMD dans ces mmes IFSI publics lorrains. Il nous a sembl important de poursuivre ce travail de rlexivit et dapprofondissement dune pratique naissante : celle dun praticien non plus dans une approche transmissive, mais base sur la posture dun praticien rlexif.

    De plus, la recherche, pierre angulaire introduite dans ce rfrentiel 2009, a fait germer lide dentrer nous-mmes en immersion, de nous confronter un vri-table travail de recherche sur le terrain. Cela allait nous permettre de poursuivre notre rlexion concernant ce programme LMD et danalyser notre pratique en y apportant un regard de chercheur.

    Une question nous a cependant proccupe : notre activit de formatrice en IFSI allait-elle tre compatible avec un travail de recherche? Comment concilier notre activit de formatrice celle de chercheure sans nuire lanalyse de nos donnes? Pour reprendre limage de Sherlock Holmes de Weisser (2014), nous allions nous transformer en une sorte de dtective tentant de trouver rponse nos questions Mais parler de sa propre pratique est-ce tenir un propos scientiique? (Weisser, 2014, 23). Allions-nous pouvoir interprter nos recueils de donnes sans le iltre du praticien que nous tions? Ces questions ont conditionn les mthodologies utilises pour lanalyse de notre recherche.

    Il tait important, pour nous, de rencontrer les diffrents acteurs concerns par larrive de ce programme LMD. Cette recherche a ainsi t construite partir de phases exploratoires allant de lanalyse des projets pdagogiques des IFSI publics lorrains la rencontre de ces diffrents acteurs : les tuteurs/matres de stage, les directeurs/cadres suprieurs des IFSI publics lorrains, les universitaires intervenants dans les instituts de formation pour terminer par les premiers professionnels diplms

    dtat avec un grade licence issus de ce programme LMD. Cette thse allait nous permettre non seulement daller au-del de notre pra-

    tique professionnelle, mais galement de faire un bilan au niveau de la rgion Lorraine sur la dimension universitaire qui caractrise dsormais le cursus de la formation en

  • - 4 -

    soins inirmiers. Ainsi nous souhaitions axer notre recherche sur la lecture et la mise en place du nouveau rfrentiel de formation dans les diffrents IFSI de Lorraine.

    Pour tenter de rpondre notre questionnement, nous avons structur notre thse en quatre parties.

    Dans une premire partie, nous abordons lhistoire de la profession et de la forma-tion inirmire de manire synthtique ainsi que le programme de 1992 prcdant larrive du rfrentiel 2009. Nous dcrivons, galement dans cette premire par-tie, lanalyse du programme LMD ainsi que lapproche thorique la rencontre des concepts introduits par ce programme. Nous terminons cette premire partie par la prsentation des diffrentes mthodologies utilises pour le recueil et lanalyse des donnes ainsi que la prsentation de nos rlexions et hypothses de recherche. Les mthodes utilises sont varies, allant de lutilisation dun logiciel, lanalyse des diffrents projets pdagogiques, aux entretiens auprs des diffrents acteurs concerns par la rforme des tudes en soins inirmiers pour terminer par lanalyse de rcits de vie des premiers diplmes LMD, des formateurs non interviews en IFSI et des universitaires.

    La deuxime partie est consacre lanalyse des projets pdagogiques et des en-tretiens effectus auprs des professionnels de terrain. Ce travail danalyse nous a permis de dmontrer que lhistoire de linstitut de formation pouvait avoir un impact

    sur la formation des tudiants.

    Dans la troisime partie, nous prsentons lanalyse des entretiens effectus auprs des Directions et formateurs des IFSI publics lorrains.

    Une dernire partie est consacre lanalyse des rcits de vie de la premire pro-motion diplme LMD jusquaux universitaires en passant par les formateurs non interviews en IFSI. Cette partie nous permet de radiographier limpact de cette rforme de la formation inirmire sur les diffrents partenaires concerns.

    Aprs une synthse gnrale, nous exposons notre bilan au niveau des IFSI publics lorrains en le comparant au bilan national effectu en 2013 et rendu public en

    2014.

  • - 5 -

    Premire partie De lhistoire de la profession inirmire

    lobjet de notre recherche

  • - 6 -

    Introduction de la premire partieDans cette partie, il nous semble indispensable de faire un dtour par le pass

    ain dexpliciter notre objet de recherche. En effet, pour le comprendre, nous aborde-rons une esquisse historique de la profession et de la formation inirmire en France ain de mettre en exergue les concepts en tension dans cette volution notamment avec larrive du nouveau rfrentiel de 2009 transformant le cursus inirmier en une formation universitaire.

    Chapitre 1 : histoire de la profession et de la formation inir-mire

    1.1De la garde malade linirmire diplme dtat

    1.1.1Histoire de la profession inirmire

    Connatre le pass dune profession nous permet davoir des cls de lec-

    ture de lvolution de la profession actuelle. Lactivit soignante est une standar-disation dancienne tradition, en effet, au xviiie sicle, la servante prenait soin de (nous retrouvons ce concept du prendre soin de dans les crits de Collire (2008) cest--dire que la soignante effectuait les tches domestiques du quotidien. Puis le prendre soin tel quon le connat aujourdhui apparat. Les soignants prennent en compte lHomme pour assurer sa survie et sa scurit : le gte, le couvert, la protec-tion. Fabienne Brugre, dans un entretien mis en ligne en 2011, prcise que le point commun entre les tches domestiques et les professions du care est la notion de ser-

    vice, service domestique ou service aux personnes. Le service est la place dsigne

    des femmes, dans les faits, dans lhistoire des ides . Puis le prendre soin ordinaire, domestique, devient un prendre soin institutionnalis. Des lieux du prendre soin apparaissent, les hpitaux voient le jour. Les activits soignantes dans ces lieux ins-titutionnaliss imitent, au dbut, les activits domestiques. Puis ces activits vont se distinguer pour dpendre du contexte de laction, de ces rgles qui vont progressive-ment apparatre : rglements, procdures, droits, devoirs, normes professionnelles (Charles, 1984.) Dautres auteurs tels que Fabienne Brugre (2011) prcisent que le prendre soin ou concept du care , terme de la vie ordinaire renvoie la di-mension du souci, se soucier de, de lattention aux autres et dune dimension dun

  • - 7 -

    prendre soin [] Dun point de vue philosophique, le care renoue avec la question du corps et la question du sensible, grande question philosophique depuis Aristote et Pla-

    ton [] Cette question reste contemporaine avec ce concept du care . Cette question du care a t toutefois afine en tenant lieu du contexte actuel. Des auteurs tels que Laugier (2010) renvoient ce concept une utilisation socioconomique, car Il ne sagit pas de prconiser une ide dun soin mutuel, mais plutt de questionner qui

    fait quoi et comment. La socit du bien-tre ne pourra faire lconomie des conlits et des tensions que suscitent ces interrogations, et plus largement dune rlexion sur la politique du care

    Lentre dans le xxe sicle verra plusieurs courants polmiques saffronter et

    se succder au sein de la profession : de la religieuse voue corps et me aux souffrants la femme laque au moment de la sparation de lglise et de ltat;de la femme soumise au corps mdical la femme mancipe;de linirmire auxiliaire du mdecin linirmire autonome qui le mde-cin va dlguer certaines fonctions et par l mme lui reconnatre certaines comptences.Cette autonomie inirmire nest pas rcente, elle a galement une trace dans

    le pass historique de la profession (Nadot, 2012). Depuis la in du xviiie sicle, le corps mdical va devoir dlguer son auxiliaire certaines fonctions, car lvolution des dcouvertes mdicales alourdit la charge de travail du mdecin, il ne peut tout faire seul (Charles, 1984).

    Une culture inirmire faite de connaissances et didologie voit le jour, des bons soins nous allons passer, peu peu, une vritable discipline en soins inir-miers. En plus des activits lies au prendre soin , la soignante, garde-malade, va se retrouver dans une nouvelle posture : tre au service du mdecin ain dappliquer les prescriptions mdicales. Cette nouvelle posture impose bien vite des connaissances acqurir ain dtre comptente et seconder eficacement le mdecin. Le corps m-dical, conscient de limportance de cette dlgation, met en place des cours lusage des soignantes partir douvrages de mdecine, et ce ds 1842 (Collire et Diebolt, 1988). Chaque Institution hospitalire sorganise en vase clos selon le bon vouloir des mdecins responsables et des administrateurs des hpitaux, rien nest impos un niveau national. De plus, il faut se rappeler que laccs lcriture tait peu cou-rant et les soignantes taient condamnes observer, faire comme le lui indiquait le corps mdical sans avoir leur mot dire, leur savoir restait empirique (Moal, 2007).

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    La soignante tait l pour seconder le mdecin au niveau des soins techniques sans avoir exprimer un avis sur ce quelle faisait. Leurs comptences taient simplement mobilises dans les activits quotidiennes au service du malade et de son entourage (Collire et Diebolt, in collectif cahier AMIEC, 1988).

    Les pratiques soignantes vont ensuite se diversiier confrontes aux contraintes des organisations de sant et les comptences rclames par lactivit vont gale-ment dpendre de lvolution socitale (exemple des pratiques dhygine collective, des pratiques relationnelles). Cependant, mme si le dveloppement technologique et socioculturel du xixe et xxe sicle multiplie les pratiques soignantes, les anciennes pratiques (soumission au corps mdical, hritage dun lourd pass religieux) resteront encore bien ancres dans la profession soignante et ce, malgr le dveloppement de la recherche en soins inirmiers surtout en Angleterre, Canada et aux tats-Unis (Charles, 1984), car la mmoire est un des piliers identitaires du groupe social des soignants (Nadot, 2012, 20).

    1.1.2Histoire de la formation inirmire

    En ce qui concerne la formation des soignantes, les mdecins hospitaliers vont continuer prendre en charge lenseignement dans les coles situes lintrieur des institutions hospitalires. la tte des coles il y aura, ds le dbut du xxe sicle, des directrices inirmires, nous pouvons donc situer lvolution du mtier cette poque, volution qui verra un essor lors de la Seconde Guerre mondiale (Diebolt dans collectif 1988).

    Au dbut galement du xxe sicle, Florence Nightingale, inirmire britannique et pionnire dans les soins inirmiers, considre comme la premire inirmire-cher-cheuse [] [a] laiss un hritage considrable aux soins inirmiers, car a contribu une meilleure distinction entre les soins inirmiers et la mdecine (Jovic et Lecordier, 2014). Ce nest quen 1922, grce la mobilisation de Lonie Chaptal (1864-1937), directrice dune cole dinirmires, quapparat un premier dcret instituant un diplme de capacit professionnelle permettant de porter, soit le titre dinirmire diplme de ltat franais, soit le titre dinirmire visiteuse dhygine sociale, de la tuberculose et de lenfance. Ces premiers diplmes donnent au mtier dinirmire une reconnais-sance oficielle en devenant une profession (Collire, 2008). Ce premier programme national denseignement donnant accs ces diplmes est dune dure de vingt-deux mois. Lenseignement vise essentiellement les soins aux malades incluant le mnage, la cuisine et la tenue de la maison (et non un regard sur la clinique encore rserve au corps mdical). La formation tait dj en alternance avec de longs stages en milieux

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    de patients contagieux (laux de lpoque). Entre 1923 et 1924, quarante-trois coles dinirmires, en France, reoivent un agrment (ibid.)

    Cest galement sous limpulsion de Lonie Chaptal sassociant au professeur Calmette (mdecin et bactriologiste franais, 1863-1933), que naissent les premiers crits professionnels, marquant ainsi le passage dun mtier une profession avec une production de connaissances propres. Ensemble ils crent la premire revue na-tionale pour les inirmires ainsi quune collection douvrages qui serviront de manuels pour la formation des soignants jusquen 1940 (ibid.)

    Un dcret de 1938 spare les diplmes dinirmire et dassistante du service social (auparavant les inirmires visiteuses faisaient fonction dassistante sociale). La formation est toujours de deux ans pour les inirmires hospitalires et de trois ans pour les assistantes sociales, la premire anne dtude est commune aux deux ilires. Ce mme dcret prvoit un diplme suprieur dinirmire permettant lenca-drement et lenseignement dans les coles dinirmires. Cette possibilit denseigner, pour une inirmire, sonne galement le dbut de la professionnalisation. Lenseigne-ment tait auparavant laffaire des mdecins (Charles, 1984).

    Depuis cette date, quelques programmes vont se succder introduisant les soins inirmiers notamment celui de 1961 qui va donner naissance linirmire techni-cienne et sparer dinitivement la formation dinirmire de celle dassistante sociale. Il est prcis, dans ce programme de 1961, que lenseignement doit permettre linirmire de comprendre la valeur et la raison des gestes quelle accomplit et de les situer dans lensemble de la thrapeutique de participer intelligemment la surveil-

    lance du malade pour dpister les complications de dcider et deffectuer certains

    soins durgence avant larrive du mdecin . (Duboys-Fresney et Perrin, 1996, 41). Pour la premire fois, la comptence rlexive et lautonomie possible de linirmire sont reconnues sans pour autant parler encore du rle propre inirmier .

    Le programme suivant de 1972 a eu son importance dans la profession, car il a introduit la notion de responsabilit professionnelle ainsi que la dimension holistique

    dans la prise en charge du patient (Charles, 1984).Quant la dinition mme de linirmire, il faudra attendre la loi de 1978 pour

    la voir voluer (inluence par les accords europens de 1967). Cette loi apporte des prcisions sur les fonctions dindpendance possible de linirmire notamment en ce qui concerne les dimensions ducative et relationnelle et met en place la dlivrance

    dun diplme dtat inirmier (ibid.)

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    Un dcret en 1984 dcline les actes professionnels et lexercice de la profes-sion dinirmire et insiste sur la ncessit du maintien ou la rinsertion dans le milieu de vie des patients (art. R4311-1 R4311-15 du code de la sant publique)

    En ce qui concerne le domaine de la psychiatrie, lhistoire de la formation des professionnels en sant mentale a suivi galement une volution parallle celle des professionnels en soins gnraux.

    1.2Du gardien de fous linirmire de secteur psychiatrique

    1.2.1Historique de la profession dInirmire de secteur psychiatrique

    Lvolution de cette profession est troitement lie laccroissement de las-

    sistance aux malades mentaux jusqu ce que la mdicalisation de la folie sallie une conception holistique de la personne, le fou init par tre reconnu comme une personne part entire et la folie comme une pathologie.

    Dans lhistorique de la folie, nous passons du possd une perversion des humeurs (selon Hippocrate). Au xiiie sicle, Thomas dAquin considre que la d-mence naturelle na rien voir avec le pch puis, nouvelle priode historique (xive et xv

    e sicle) o lanormal appartient de nouveau au pch, les fous sont brls, car responsables des guerres et des pidmies. Par la suite (in du xve et xvie sicle), la prise en charge des fous dpend du milieu dans lequel ils voluent : les fous restent en famille en milieu rural, ils y sont protgs, mais, en ville, les fous sont expulss, car ils drangent la socit ou sont incarcrs au mme titre que les malfai-teurs, criminels, prostitues, alcooliques, vagabonds (Bender, 2009.)

    Une re nouvelle, quant la prise en charge de la folie, voit le jour lors de lapparition des hpitaux o les fous sont enferms, enchans et clotrs dans un mme lieu au sein de lhpital sous la responsabilit de gardiens des fous , enfer-ms galement, souvent illettrs et recruts chez danciens malades. Avec lvolution de la mdecine, les progrs et dcouvertes, certains mdecins vont sintresser la souffrance de ces malades.

    Au xixe sicle, lasile devient hospice et des mdecins alinistes tels que les docteurs Pinel et Esquirol vont se pencher sur la folie quils considrent comme une

    vritable nigme mdicale. Pinel et le gardien de fous Pussin vont travailler en-semble et librer ces fous des chanes. Cest partir des observations de Pus-sin que se situe une prise en charge diffrente de la folie, les chanes entrainaient lagitation selon ce gardien. Leur enlever ces chanes et les considrer comme des

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    humains part entire, malades, et non plus comme des rebuts de la socit allait les apaiser. partir de cette collaboration entre mdecins et gardiens nat lide dun personnel qualii pour prendre en charge ces malades (ibid.)

    Une loi importante va marquer le monde de la maladie mentale : celle de 1838, sous Louis Napolon, relative lhospitalisation sous contrainte des malades mentaux. Cette loi oblige chaque dpartement ouvrir des tablissements spcialiss, appels asiles dalins (qui deviendront des hpitaux psychiatriques en 1937), placs sous lautorit publique. Le fou tait un hors-la-loi avant que la folie ne soit reconnue comme tant une maladie part entire. La prise en charge de ces malades mentaux va aboutir lapparition dun personnel spciique en sant mentale. partir de 1882, pour travailler dans ces tablissements, une instruction primaire devient obligatoire (il fallait tout dabord apprendre lire et crire surtout aux femmes qui navaient pas

    accs cette instruction).Au xxe sicle, paralllement au mouvement psychanalytique, de nouveaux

    traitements pharmacologiques, mdicaux et chirurgicaux apparaissent : cure de Sakel (coma diabtique provoqu) en 1933, sismothrapie en 1958 (dcouverte de Cerletti), lobotomie (dcouverte que les lobes frontaux jouent un rle dans les grands tats dangoisse et seraient la localisation de la zone de lagressivit) et larrive de traite-ments spciiques lagitation en 1952 tels que des neuroleptiques sdatifs : Haldop-ridol, Largactyl (collectif, 1988).

    Les mdecins travaillant dans ces tablissements sont, en premier lieu, des mdecins alinistes puis des neuropsychiatres (la psychiatrie ne deviendra une sp-cialit part entire que vers 1960), mais il persiste encore une sparation entre les dtenteurs du savoir mdical et le personnel, simples excutants, ayant toujours une mission de surveillance ntant toutefois plus recruts parmi les anciens alins.

    En ce qui concerne le personnel soignant, son statut sest adapt galement en fonction de lvolution de la reprsentation socitale de la folie. Les religieuses en-vahissent aussi le monde de la maladie mentale, elles sont charges de recruter les femmes et les surveillants recrutent les hommes originaires souvent du milieu rural en qute de travail. Le personnel est tenu au clibat et doit vivre sur place, dans ltablis-sement. Des familles entires sont recrutes, et ce, sur plusieurs gnrations (ibid.)

    1.2.2Historique de la formation de linirmire de secteur psychiatrique

    Cest sous limpulsion du docteur Bourneville, en 1877, aliniste et neurologue franais (1840-1909), que souvre la premire cole dinirmiers dasile en France, la Salptrire et Bictre (ce genre dcoles existait dj dans dautres pays dEurope).

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    Bourneville souhaite que le personnel ait des connaissances sur les pathologies men-tales. Un certiicat daptitude professionnelle (diplme dcole), sur un an, en cours du soir, voit le jour. Il sagit l du dbut de la professionnalisation de linirmire de secteur psychiatrique. Bourneville adapte un manuel pour lenseignement et la formation est valide par lassiduit aux cours et lobtention de la moyenne trois contrles.

    Entre 1880 et 1930, linirmier psychiatrique amorce la conqute dun statut professionnel, car il est toujours considr socialement comme gardien de fous (Bender, 2012).

    Ce nest quen 1902 quune circulaire rend obligatoire louverture dcoles un niveau national avec la cration dun diplme dinirmire de psychiatrie dpartemental (premire trace rglementaire de la profession). La formation se droule sur trois ans. En 1912 est dit le premier grand manuel de psychiatrie servant de rfrence dans les coles dinirmires de psychiatrie (ibid.)

    Avec lvolution des thrapeutiques, de la mdecine et lapparition de la psy-chanalyse, linirmire se doit dapprofondir ses connaissances non seulement en ce qui concerne les pathologies, la smiologie, mais galement la pharmacologie. En effet, la connaissance du fonctionnement psychique, cognitif, est indispensable pour lanalyse de la problmatique du patient. cette mme poque, lapprentissage de la relation soignant/soign se dveloppe, la parole sert de mdiation thrapeutique, car en psychiatrie le soin passe par ltre et par le dire , le symptme est un moyen de communication pour le patient. En 1930 la formation (encore facultative) se droule sur cinq ans avec 57 cours thoriques et des stages de mdecine. Lexamen inal donne le titre dinirmire des asiles dalins diplms dtat franais. Linirmire psychiatrique peut prendre alors des initiatives et renoncer ainsi son rle de simple excutante. Le rle propre dans le domaine inirmier psychiatrique est reconnu ds 1945 lors de lapparition de la psychothrapie institutionnelle. Tout acte de la vie cou-rante est thrapeutique, linirmire est cadre unique cest--dire quelle intervient non seulement au niveau des soins, mais galement dans les actes de la vie courante (mnage, cuisine). Le personnel ne pouvait travailler que dans ltablissement o il avait t form (ibid.)

    Cette reconnaissance du statut dinirmire psychiatrique va tre lobjet de controverse : la formation nest pas encore obligatoire lgalement malgr la cration dcoles, elle est propose sous forme de cours facultatifs toujours en dehors des heures de travail. Chaque tablissement possde sa propre cole et la formation d-pend de la volont de chaque mdecin enseignant. Ce nest quen 1955 que la forma-

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    tion devient obligatoire, avec un programme datant de 1949, propos par le professeur P. Bernard. Ce programme est identique dans tous les tablissements franais de psy-chiatrie. Les tudes se droulent sur deux ans avec un enseignement de la mdecine, de la chirurgie, de la pharmacologie, de lhygine, de lanatomie, de la physiologie, des soins aux malades mentaux, dadministration et de morale professionnelle. La formation seffectue sur le lieu de travail et le personnel ne peut toujours pas changer dtablissement.

    Avec les grandes dcouvertes pharmaceutiques des annes cinquante, la pratique inirmire en psychiatrie va se modiier. Lagitation, les dlires peuvent tre dornavant rduits chimiquement. Ces dcouvertes vont contribuer la reconver-sion des asiles en hpitaux psychiatriques et exiger un personnel soignant qualii (Derabours, s.d.). La femme dans cette profession y trouve une place avec lintroduc-tion de notions de maternage dans les soins qui remplacent celles de gardiennages encore bien ancres socialement, et ce, malgr lextension des savoirs savants intro-duits par la formation.

    Avec la loi sur la sectorisation de 1960 et la psychothrapie institutionnelle initie par le docteur Tosquelles (ibid.), la dconcentration des lieux thrapeu-tiques et la rduction des temps dhospitalisation, de nouvelles professions en lien avec la psychiatrie font leur apparition et vont contribuer changer les pratiques en place en imposant de nouvelles exigences en matire de formation du personnel (ibid.) Cette pluriprofessionnalit oblige linirmire psychiatrique travailler avec des psychologues, psychomotriciens, assistantes sociales, ducateurs, pdopsychiatres, instituteurs spcialiss, orthophonistes La mise en place de runions de synthse permet chacun de sexprimer, la parole est partage. Larrive de la psychiatrie de secteur a permis la folie de sortir des murs de lhpital. En 1969 les inirmiers des hpitaux psychiatriques deviennent des inirmiers de secteur psychiatrique et cest en 1970 quest cr le certiicat de moniteur de formation professionnelle et du person-nel soignant de secteur psychiatrique. Linirmire pouvait donc maintenant enseigner (seuls les neuropsychiatres puis les psychiatres enseignaient dans les coles). Les directeurs des coles psychiatriques pouvaient tre alors danciens professionnels de terrain et le projet pdagogique propre chaque cole a fait son apparition marquant ainsi une autonomisation de ces coles.

    cette mme poque, la formation continue sorganise et les inirmires de secteur psychiatrique se mobilisent, car le systme de soins psychiatriques reste en-core asilaire malgr tout. En 1973 le programme dtudes se droule sur 28 mois

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    (1580 heures de cours et 2900 heures de stage), avec, la cl, toujours un diplme dinirmire de secteur psychiatrique et non pas un diplme dtat comme les inir-mires en soins gnraux. Avec ce programme de 1973, des stages deviennent obli-gatoires en psychiatrie pour les inirmires diplmes dtat et en soins gnraux pour les inirmires de secteur psychiatrique (Derabours, s.d.). Les coles deviennent des centres de formation avec des plein-temps de cours et une alternance temps plein en

    stage, les lves sont dtachs des services (auparavant, les lves faisaient partie des quipes et travaillaient avec une alternance journalire : le matin en service et laprs-midi lcole). Pour attirer le personnel vers cette spcialit dificile, les lves percevaient un salaire durant leurs tudes.

    Lanne 1979 marque un tournant important dans le rapprochement des i-lires dinirmires de soins gnraux et celles dinirmires de secteur psychiatrique. La formation passe trente-trois mois avec une premire anne commune (tude de lhomme sain avec 400 heures de cours en soins gnraux, 880 heures de cours en psychiatrie et 1680 heures de stage en psychiatrie). Des stages en hpital gnral pour les lves en psychiatrie sont obligatoires (400 heures de stage), mais linirmire de secteur psychiatrique ne peut exercer quen hpital psychiatrique et, dans lesprit du milieu mdical, limage du gardien de fous est toujours bien prsente. Ce pro-gramme correspond une priode de dsinstitutionnalisation des patients et un dveloppement des prises en charge ambulatoires ce qui a entrain un dveloppe-ment et une diversiication des comptences.

    En 1992 avec larrive du statut dinirmire polyvalente, la formation spci-ique la psychiatrie disparat.

    Chapitre 2 : les deux derniers programmes de la formation inirmire

    2.1Le curriculum de 1992

    En 1992 un nouveau curriculum fusionne symboliquement la psych et le soma. Les lieux denseignement fusionnent galement, les coles dinirmires deviennent des Instituts de formation en soins inirmiers, les lves des tudiants. Le programme spciique pour les inirmires de secteur psychiatrique disparat pour cder la place un curriculum unique prnant la polyvalence du professionnel, Gori (2011) ajoutera que ce nest pas quune spcialit qui disparat, mais aussi le concept de folie que

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    lon veut gommer Ce programme marque la in dune formation spciique ainsi que le salariat des lves inirmiers psychiatrique. Les tudiants diplms, partir de ce programme, peuvent trouver un emploi dans toutes les disciplines hospitalires. La formation durait 36 mois. Ce curriculum sinscrivait dj dans un contexte europen dquivalence des diplmes et devait permettre linirmire de rpondre lensemble des problmes de sant dun individu ou dun groupe dans le domaine prventif, cura-tif, de radaptation et rhabilitation. Ce programme a introduit oficiellement la notion dthique professionnelle et a positionn ltudiant au centre du processus de forma-

    tion.Larrt du 23 mars 1992 dtaille les objectifs gnraux des enseignements : Dterminer, mettre en uvre et valuer les actions relevant du rle propre

    de linirmier [], effectuer, seul ou en collaboration avec dautres soignants, les pres-criptions mdicales prparer, organiser, planiier et excuter les prescriptions, dter-miner, planiier et exercer la surveillance des personnes soignes, participer au sein dune quipe thrapeutique aux techniques psychothrapiques, individuelles ou de

    groupe, rendre compte aux responsables du service de soins des ractions des per-

    sonnes soignes, de lvolution de leur comportement, des incidents et des accidents

    pouvant survenir. Identiier une situation durgence ou daggravation de ltat dune personne soigne [], organiser le travail inirmier (annexe I, 38-39).

    Ce curriculum se compose de 2240 heures denseignements thoriques r-partis en modules par champs disciplinaires appels modules ixes ainsi que deux mo-dules optionnels ( Metz, ces modules optionnels se sont organiss inter IFSI ain de permettre un plus large choix dapprofondissements thmatiques aux tudiants). Ces modules sont suivis de soins inirmiers en rapport avec les pathologies et de modules transverses que lon retrouve de la premire anne jusqu la in des tudes : lgisla-tion, thique, dontologie, responsabilit, organisation du travail, sciences humaines, anatomie, physiologie et pharmacologie, sant publique et soins inirmiers. Les stages cliniques ont une dure de 2380 heures et un suivi pdagogique de 140 heures est inclus dans ce programme. Certaines disciplines sont obligatoires en stage : chirurgie, mdecine, sant mentale ou psychiatrie, pdiatrie ou pdopsychiatrie, griatrie ou g-rontopsychiatrie, ranimation, urgence, soins intensifs et bloc opratoire (ces quatre dernires spciicits forment une seule discipline obligatoire).

    Ce programme de 1992 insiste sur le concept de polyvalence de linirmire, lui permettant ainsi de travailler dans toutes les disciplines (mdecine, chirurgie, psy-chiatrie). Les principes pdagogiques de ce programme visent le dveloppement

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    de la crativit et de la facult dadaptation en adquation avec la diversit des lieux

    dexercice, ainsi que sur larticulation entre connaissances et aptitudes profession-

    nelles (ibid., 32). Laccent est mis galement sur une pdagogie active base tant sur le questionnement que sur le contenu (ibid., 32) et centr sur ltudiant. Une importance est accorde la responsabilisation de ltudiant pour lui permettre, tout

    au long du cursus des tudes, dlaborer son projet professionnel (ibid., 32).Chaque quipe pdagogique enseignante doit mettre en uvre le programme

    de formation et dtermine, sur la dure de la scolarit, les modalits dorganisation de lenseignement et le dcoupage des modules.

    Chaque institut de formation en soins inirmiers se retrouve avec un projet p-dagogique, un rglement intrieur et une organisation modulaire qui lui est propre sous la responsabilit dun directeur. Ces organisations dIFSI ont pos des problmes. Lorsquun tudiant voulait muter par exemple, il se retrouvait avec des diffrences de contenus denseignements lui permettant dificilement de changer dtablissement.

    Chaque projet pdagogique dcline les axes de formation qui lui sont priori-taires, laccent est parfois mis, par exemple, sur la psychopathologie, la psychana-lyse, la psychologie, la relation daide, la supervision clinique... par les ex-coles de psychiatrie , la technicit, lasepsie, la dontologie... pour les ex-coles de soins gnraux . Le rglement intrieur insiste sur le respect dautrui, des locaux et du ma-triel ainsi que sur le sens des absences (70 heures dabsence autorises durant la formation dans le programme de 1992).

    Dans ce programme, des mises en situation professionnelle (MSP) permettent aux enseignants, accompagns par un professionnel de terrain, dvaluer les tudiants sur leurs lieux de pratique raison de deux MSP par anne dtudes. Ces valuations sont notes conjointement par le formateur de lIFSI et le professionnel du service.

    Pour passer dune anne lautre, les tudiants doivent obtenir la moyenne aux modules (avec une possibilit de compensation entre les modules sans avoir plus de deux notes infrieures 8/20), la moyenne aux deux mises en situation profession-nelle et aux stages avec, l aussi, une compensation possible sans avoir plus de deux notes en stages infrieures 8/20 et pas de note infrieure 8/20 en mise en situation professionnelle.

    Durant ce programme, deux dcrets parus en 1993 ixent le cadre profession-nel et juridique des inirmires (embryon dune dontologie professionnelle) : le dcret du 16/02/1993 relatif aux rgles professionnelles des inirmiers et inirmires et le d-cret du 15/03/1993 relatif aux actes professionnels et lexercice de la profession in-

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    irmire. Ces dcrets (complts par un dcret du 11 fvrier 2002) prcisent les actes inirmiers et leurs conditions de ralisation dans le respect des rgles professionnelles (Villeneuve, 2002, 41-43). Ce dcret de 2002 dinit les actes accomplis par linirmire dans le cadre de son rle propre (soins visant identiier les risques et assurer le confort et lautonomie des patients) et de ceux qui sont accomplis sur prescription et sur dlgation mdicale.

    Cest en juillet 2009 quun nouveau rfrentiel apparat, bouleversant la lo-gique dapprentissage des prcdents programmes.

    2.2Luniversitarisation des tudes inirmires

    2.2.1Gnralits

    Aprs dix-sept ans de formation avec le programme de 1992, une rforme des tudes dinirmires voit le jour en juillet 2009.

    Avec ce programme de 2009, la formation inirmire se trouve un tournant important de son histoire, car elle sinscrit dornavant dans un contexte de mondiali-sation des changes et, de plus, prpare les futurs professionnels la possibilit de poursuivre des tudes suprieures : master (dj en cours luniversit de Marseille, Paris, Metz et Nancy par exemple) et doctorat. Ce programme devrait promouvoir la recherche en soins inirmiers. Les IFSI agrs par ltat et dpendant du ministre de la Sant, se retrouvent aujourdhui galement sous la tutelle du ministre de lEnsei-gnement suprieur et de la Recherche depuis larrt du 31 juillet 2009. noter que les IFSI sont inancs par le Conseil rgional depuis 2005.

    Ces tudes suprieures vont permettre aux nouveaux diplms daccder

    des postes en projet lheure actuelle : cration de nouveaux postes dans le domaine de la sant bass sur trois critres de comptences : la consultation, la prescription et le diagnostic. Concrtement, des postes dinirmires expertes dans un champ dacti-vits spciiques aux soins inirmiers, dinirmires coordinatrices au sein de maisons de sant (en cration galement) voient le jour (Hnart, Berland, & Cadet, 2011). Il est important de souligner que ces jeunes professionnels issus de la formation LMD auront un statut ainsi que des responsabilits suprieures aux personnels dj en poste. La licence est exclusivement dcerne par les universits et les tablissements publics

    denseignement suprieur. Le prfet de rgion dlivre ce diplme dtat. La Direction rgionale de la jeunesse, des sports et de la cohsion sociale (DRJSCS) est charge de la certiication des professions paramdicales. Il est noter que, dans certains pays

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    comme lAngleterre, il existe dj trois catgories dinirmires reconnues lgalement : les inirmires spcialises en sant publique, celles spcialises en soins de sant mre/enfant et les inirmires diagnosticiennes pouvant prescrire certains traitements spciiques (rapport Les mtiers en 2022, 2014).

    Ce nouveau curriculum aborde la thorie travers une posture rlexive de ltudiant ain de lui permettre de comprendre les liens entre thorie/pratique et pra-tique/thorie sopposant ainsi au programme de 1992 articul en modules denseigne-ments ciblant des pathologies au travers de systmes organiques (module cardiologie, pneumologie, psychiatrie). Cette dmarche rlexive modiie le rapport thorie/pra-tique, elle opre un changement radical dans la hirarchie cognitive prcdente et les reprsentations du savoir, lenseignement modulaire disparat pour laisser place des processus disciplinaires.

    Ce programme a vu le jour la suite des accords de Bologne de 1999, d-clencheurs de ce changement. Vingt-neuf pays, dont la France, signent ces accords dans le but de privilgier la mobilit des tudiants durant leurs tudes dabord puis un niveau professionnel ensuite. Le systme LMD (licence, master, doctorat) devient commun aux universits dEurope et chaque formation est comptabilise en ECTS

    (european credit transfert system) ou crdits europens permettant ainsi une lisibilit europenne. Les tudiants sont diplms inirmiers avec un total de 180 crdits eu-ropens sur six semestres (annexe II : rfrentiel 2009). Ce systme dECTS permet soit une possibilit de changement dorientation par le biais de passerelles possibles, ainsi un tudiant inirmier peut poursuivre en psychologie, par exemple, en ayant dj des ECTS son actif, soit la poursuite des tudes universitaires en pratiques avan-ces en lien avec le cursus inirmier et son projet professionnel. Il est important de si-gnaler que ce programme survient dans un contexte socioconomique dificile o lon demande chaque professionnel une certaine rentabilit, contexte aussi de rformes hospitalires o les pouvoirs publics mutualisent les services, les plateaux techniques et prochainement les IFSI publics. Actuellement lhpital est gr comme une vritable entreprise.

    Les crdits europens reposent, comme pour les universits, non seulement sur des contenus et stages valider, mais galement sur une charge de travail nces-saire ltudiant pour atteindre les rsultats indispensables ain dtre diplm dtat.

    Larrt du 31 juillet 2009 relatif au programme LMD (annexe II) met en vi-dence un changement de logique de formation, il introduit la posture rlexive chez ltudiant, il est labor partir de trois rfrentiels : celui de comptences, dactivits

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    et de formation. La posture rlexive et lacquisition de comptences professionnelles sont portes par des valeurs professionnelles, composantes importantes de lidentit professionnelle inirmire. Ricur disait que la valeur nexiste que si on y adhre 1 et nous retrouverons justement des valeurs communes aux diffrents IFSI publics lor-rains dans lanalyse que nous ferons de leurs projets pdagogiques. Initie lIFSI, cette identit professionnelle se dveloppe et se poursuit avec le temps et lexprience

    professionnelle.

    2.2.2Gense de la mise en forme des contenus du rfrentiel 2009

    Cette ingnierie de la formation inirmire a pour objectif de rnover les di-plmes des professions de sant et le contenu des formations paramdicales pour

    rendre compte tant des volutions du contexte de soins : mises disposition des sa-

    voirs, informatisation, modiication des technologies que de lvolution des besoins en sant (Marsala, 2013, tome 1, 83) que nous avons dtaills auparavant tel que le vieillissement de la population les besoins en sant ayant volu dans la socit actuelle.

    Depuis 2005 nous avions entendu parler de rformes dans les IFSI. Il tait question, au dpart, de faire intgrer le cursus de formation inirmire au sein des uni-versits de mdecine comme lont t les cursus des kinsithrapeutes et des sages-femmes (mise en place du PACES). Ce projet a t abandonn en ce qui concerne le cursus inirmier en raison du nombre important dtudiants intgrer (en Lorraine cela aurait reprsent 16 IFSI publics Lorrains pour deux centres universitaires de mde-cine). En 2006, la dcision dinscrire les formations paramdicales dans le schma licence-master-doctorat a t prise ds dcembre 2006 par les ministres chargs de

    la sant et de lenseignement suprieur (ibid., 3)Les travaux dingnierie de la formation en soins inirmiers concernant les

    contenus des enseignements thoriques et lorganisation des stages ont dbut en 2008. Des instances telles que LIGAS, lIGAENR, lIGF et le CGES ont t saisis dune mission interministrielle sur la reconnaissance des diplmes dtat profession-nels paramdicaux et de sages-femmes par rfrence au schma universitaire euro-

    pen licence-master-doctorat (IGAS, 2008, 3). Puis les travaux se sont poursuivis la suite dune rlexion conjointe des

    deux ministres concerns, celui de lducation nationale (DGES) et celui de la Sant (DGS, puis DHOS), sest ainsi engage ain dtudier les pistes qui permettraient ces

    1 Propos issus dune journe de travail avec lquipe Normes et valeurs du LISEC, intervention de Prairat E., dbat sur la question de la valeur.

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    tudiants dobtenir, grce la validation denseignements complmentaires dispen-

    ss par lUniversit, des diplmes de niveau licence, voire master . Paralllement, le cabinet du ministre de la Sant de lpoque a organis deux sries dentretiens approfondis (automne 2005 et printemps 2006) avec les reprsentants de lensemble des professions paramdicales, organiss par groupes de travail, avec pour vise denvisager la perspective du passage au dispositif LMD (IGAS, 2008, 22).

    Luniversit se retrouve avec la responsabilit dune partie des contenus de

    la formation thorique et de leurs valuations en partenariat avec les IFSI induisant une complexit dans la gouvernance du dispositif de formation avec une multiplici-

    t dacteurs (ibid., 4), dans le cursus et la gestion de la formation. Une convention tripartite devait tre signe entre lUniversit de Lorraine, la rgion et les IFSI. Cette question concernant la convention nest pas rsolue ce jour pour les IFSI loigns des centres universitaires tout comme la question inancire (frais des interventions des universitaires). Des crdits pour ajuster la compensation des charges par ltat ont t seulement verss aux rgions en 2013 (ibid., 4). Ain que chaque IFSI puisse obtenir la signature dune convention, il a t prvu que les tablissements publics de sant, supports dun IFSI, crent un groupement de coopration sanitaire (GCS) pour faciliter cette signature tripartite. En Lorraine, la mise en place et les runions du GCS ont dbut en 2012, bien aprs lapplication du programme LMD.

    Lorganisation du calendrier de la ringnierie de la profession inirmire : le travail sur le rfrentiel activits-comptences a dbut au printemps 2006, un groupe de supervision a eu lieu en dcembre 2008. Le travail sur le rfrentiel de formation a lui, dbut in 2007 avec un groupe de supervision en janvier 2009 (Mar-sala, tome 1, 21). Larrt ixant le programme LMD a t sign en juillet 2009 pour tre appliqu en septembre 2009 aussi bien dans les IFSI que par les universits qui devaient, de leur ct, non seulement participer certains contenus denseignement, mais galement aux commissions pdagogiques des IFSI, aux valuations de leurs enseignements ainsi quaux commissions dattribution des ECTS (CAC).

    2.2.3Ingnierie des rfrentiels 2009

    2.2.3.1Le rfrentiel de comptences

    La formation se dcline en dix comptences acqurir sur six semestres : Les comptences dtailles requises pour lexercice de la profession inir-

    mire sont les suivantes (annexe II, 21-29).

  • - 21 -

    1) valuer une situation clinique et tablir un diagnostic dans le domaine inir-mier

    valuer les besoins de sant et les attentes dune personne ou dun groupe de personnes en utilisant un raisonnement clinique;

    Rechercher et slectionner les informations utiles la prise en charge de la personne dans le respect des droits du patient (dossier, outils de soins);

    Identiier les signes et symptmes lis la pathologie, ltat de sant de la personne et leur volution;

    Conduire un entretien de recueil de donnes; Reprer les ressources et les potentialits dune personne ou dun groupe,

    notamment dans la prise en charge de sa sant; Analyser une situation de sant et de soins et poser des hypothses inter-

    prtatives; laborer un diagnostic de situation clinique et/ou un diagnostic inirmier

    partir des ractions aux problmes de sant dune personne, dun groupe ou

    dune collectivit et identiier les interventions inirmires ncessaires; valuer les risques dans une situation durgence, de violence, de maltrai-

    tance ou daggravation et dterminer les mesures prioritaires.

    2) Concevoir et conduire un projet de soins inirmiers laborer un projet de soins dans un contexte de pluriprofessionnalit; Hirarchiser et planiier les objectifs et les activits de soins en fonction

    des paramtres du contexte et de lurgence des situations; Mettre en uvre des soins en appliquant les rgles, les procdures et les

    outils de qualit, de la scurit (hygine, asepsie, vigilances) et de la traa-bilit;

    Adapter les soins et les protocoles de soins inirmiers aux personnes, aux situations et aux contextes, anticiper les modiications dans lorganisation des soins et ragir avec eficacit en prenant des mesures adaptes;

    Organiser et rpartir les activits avec et dans lquipe de soins en fonction des comptences des collaborateurs et du contexte quotidien;

    Accompagner et guider la personne dans son parcours de soins; Identiier les risques lis aux situations de soin et dterminer les mesures

    prventives et/ou correctives adaptes;

  • - 22 -

    Prvoir et mettre en uvre les mesures appropries en situation durgence ou de crises en rfrence aux protocoles existants;

    Argumenter le projet de soins et la dmarche clinique lors de runions professionnelles et interprofessionnelles (transmission, staff professionnel);

    valuer la mise en uvre du projet de soins avec la personne et son en-tourage et identiier les rajustements ncessaires.

    3) Accompagner une personne dans la ralisation de ses soins quotidiens Apprcier la capacit de la personne raliser les activits de la vie quo-

    tidienne et laccompagner dans les soins en favorisant sa participation et celle

    de son entourage; Adapter les soins quotidiens aux besoins de la personne, en tenant compte

    de ses ressources, ses diciences ou ses handicaps; valuer, anticiper et prvenir les risques lis la diminution ou la perte de

    lautonomie et laltration de la mobilit; Adapter et scuriser lenvironnement de la personne; Identiier des activits contribuant mobiliser les ressources de la per-

    sonne en vue damliorer ou de maintenir son tat physique et psychique; valuer lvolution de la personne dans sa capacit raliser ses soins.

    4) Mettre en uvre des actions vise diagnostique et thrapeutique Analyser les lments de la prescription mdicale en reprant les interac-

    tions et toute anomalie manifeste; Prparer et mettre en uvre les thrapeutiques mdicamenteuses et les

    examens selon les rgles de scurit, dhygine et dasepsie; Organiser ladministration des mdicaments selon la prescription mdi-

    cale, en veillant lobservance et la continuit des traitements; Mettre en uvre les protocoles thrapeutiques adapts la situation cli-

    nique dune personne; Initier et adapter ladministration des antalgiques dans le cadre des proto-

    coles mdicaux; Conduire une relation daide thrapeutique; Utiliser, dans le cadre dune quipe pluridisciplinaire, des techniques vi-

    ses thrapeutique et psychothrapique;

  • - 23 -

    Prvoir, installer et utiliser les appareils et dispositifs mdicaux opration-nels ncessaires aux soins et au confort de la personne;

    Anticiper et accompagner les gestes mdicaux dans les situations daide technique;

    Prescrire des dispositifs mdicaux selon les rgles de bonnes pratiques; Identiier les risques lis aux thrapeutiques et aux examens et dterminer

    les mesures prventives et/ou correctives adaptes; Synthtiser les informations ain den assurer la traabilit sur les diffrents

    outils appropris (dossier de soins, rsum de soins, comptes rendus inir-miers, transmissions).

    5) Initier et mettre en uvre des soins ducatifs et prventifs Reprer les besoins et les demandes des personnes et des populations en

    lien avec les problmatiques de sant publique; Accompagner une personne, ou un groupe de personnes, dans un proces-

    sus dapprentissage pour la prise en charge de sa sant et de son traitement; Accompagner une personne dans un processus dcisionnel concernant sa

    sant : consentement aux soins, comportement vis--vis de la sant; Concevoir et mettre en uvre des actions de conseil, de promotion de la

    sant et de prvention rpondant aux besoins de populations cibles; Conduire une dmarche dducation pour la sant et de prvention par des

    actions pdagogiques individuelles et collectives; Concevoir, formaliser et mettre en uvre une dmarche et un projet ddu-

    cation thrapeutique pour une ou plusieurs personnes; Choisir et utiliser des techniques et des outils pdagogiques qui facilitent

    et soutiennent lacquisition des comptences en ducation et prvention pour

    les patients.

    6) Communiquer et conduire une relation dans un contexte de soins Dinir, tablir et crer les conditions et les modalits de la communication

    propices lintervention soignante et tenant compte du niveau de la compr-

    hension de la personne; Accueillir et couter une personne en situation de demande de sant ou de

    soin en prenant en compte son histoire de vie et son contexte;

  • - 24 -

    Instaurer et maintenir une communication verbale et non verbale avec les personnes en tenant compte des altrations de communication;

    Rechercher et instaurer un climat de coniance avec la personne soigne et son entourage en vue dune alliance thrapeutique;

    Informer une personne sur les soins en recherchant son consentement; Identiier les besoins spciiques de relation et de communication en si-

    tuation de dtresse, de in de vie, de deuil, de dni, de refus, conlits et agres-sivit;

    Conduire une dmarche de communication adapte aux personnes et leur entourage en fonction des situations identiies.

    7) Analyser la qualit des soins et amliorer sa pratique professionnelle Observer, formaliser et expliciter les lments de sa pratique profession-

    nelle; Confronter sa pratique celle de ses pairs ou dautres professionnels; valuer les soins, les prestations et la mise en uvre des protocoles de

    soins inirmiers au regard des valeurs professionnelles, des principes de qua-lit, de scurit, dergonomie, et de satisfaction de la personne soigne;

    Analyser et adapter sa pratique professionnelle au regard de la rglemen-tation, de la dontologie, de lthique, et de lvolution des sciences et des

    techniques; valuer lapplication des rgles de traabilit et des rgles lies aux cir-

    cuits dentre et de sortie des matriels et dispositifs mdicaux (strilisation, gestion des stocks, circuits des dchets, circulation des personnes) et iden-tiier toute non-conformit;

    Apprcier la fonctionnalit des dispositifs mdicaux utiliss dans les soins et dans lurgence;

    Identiier les amliorations possibles et les mesures de rajustement de sa pratique.

    8) Rechercher et traiter des donnes professionnelles et scientiiques Questionner, traiter, analyser des donnes scientiiques et/ou profession-

    nelles; Identiier une problmatique professionnelle et formuler un questionne-

    ment;

  • - 25 -

    Identiier les ressources documentaires, les travaux de recherche et utiliser des bases de donnes actualises;

    Utiliser les donnes contenues dans des publications scientiiques et/ou professionnelles;

    Choisir des mthodes et des outils dinvestissement adapts au sujet tu-di et les mettre en uvre;

    Rdiger et prsenter des documents professionnels en vue de communi-cation orale ou crite.

    9) Organiser et coordonner des interventions soignantes Identiier les acteurs intervenants auprs des personnes (sant, social,

    mdico-social, associatif); Organiser ses interventions en tenant compte des limites de son champ

    professionnel et de ses responsabilits, veiller la continuit des soins en

    faisant appel dautres comptences; Choisir les outils de transmission de linformation adapts aux partenaires

    et aux situations et en assurer la mise en place et leficacit; Coordonner les actions et les soins auprs de la personne soigne avec

    les diffrents acteurs de la sant, du social et de laide domicile; Cooprer au sein dune quipe pluriprofessionnelle dans un souci doptimi-

    sation de la prise en charge sanitaire et mdico-sociale; Coordonner le traitement des informations apportes par les diffrents ac-

    teurs ain dassurer la continuit et la scurit des soins; Instaurer et maintenir des liaisons avec les acteurs, rseaux et structures

    intervenant auprs des personnes; Organiser son travail dans les diffrents modes dexercice inirmier, notam-

    ment dans le secteur libral.

    10) Informer et former des professionnels et des personnes en formation Organiser laccueil et linformation dun stagiaire et dun nouvel arrivant

    professionnel dans le service, la structure ou le cabinet de soins; Organiser et superviser les activits dapprentissage des tudiants; valuer les connaissances et les savoir-faire mis en uvre par les sta-

    giaires en lien avec les objectifs de stage;

  • - 26 -

    Superviser et valuer les actions des aides-soignants, auxiliaires de pu-riculture et aides mdico-psychologiques en tenant compte de leur niveau de

    comptences et des contextes dintervention dans le cadre de la collaboration; Transfrer son savoir-faire et ses connaissances aux stagiaires et autres

    professionnels de sant par des conseils, des dmonstrations, des explica-

    tions et de lanalyse commente de la pratique; Animer des sances dinformation et des rlexions sur la sant, la prise en

    charge des personnes et lorganisation des soins auprs dacteurs de la sant.

    Chaque comptence est complte par des critres dvaluation et dindica-

    teurs (annexe II, 21-29)Nous remarquerons que, dans ce rfrentiel 2009, la comptence thique nest

    pas explicitement nomme comme cela est le cas pour les mdecins avec le serment

    dHippocrate ou pour les enseignants. Bien quimplicite dans toutes les comptences, lthique professionnelle napparat que dans un des items de la comptence 7.

    Un rfrentiel des activits considres comme essentielles lexercice de la

    profession inirmire ce quAnglique del Rey (2013, 31) nomme le socle commun des indispensables vient sajouter ce rfrentiel de comptences.

    2.2.3.2Le rfrentiel dactivits

    Dans larrt du 31 juillet 2009, les activits sont rdiges en termes de ca-pacits devant tre matrises par lobtention du diplme dtat (annexe II, 13-20)

    Les neuf activits dtailles dans ce programme sont les suivantes :Observation et recueil de donnes cliniques : observation de ltat de sant

    dune personne ou dun groupe, observation du comportement relationnel et social de la personne, mesure des paramtres, mesure du degr dautonomie ou de la d-pendance de la personne, mesure de la douleur, recueil de donnes portant sur la connaissance de la personne ou du groupe, recueil de donnes pidmiologiques.

    Soins de confort et de bien-tre : Ralisation de soins et dactivits lis lhy-gine corporelle, ralisation de soins et dactivits lis lalimentation, ralisation de soins et dactivits lis llimination, ralisation de soins et dactivits lis au repos et au sommeil, ralisation de soins et dactivits lis la mobilisation, ralisation de soins et dactivits lis la conscience et ltat dveil, ralisation de soins visant le bien-tre et le soulagement de la souffrance physique et psychologique, ralisation dactivits occupationnelles et/ou de mdiation.

  • - 27 -

    Information et ducation de la personne, de son entourage et dun groupe

    de personnes : Accueil de la personne soigne et de son entourage, coute de la personne et de son entourage, information et conseils sur la sant en direction dune personne ou dun groupe de personnes, information et ducation dun groupe de per-sonnes.

    Surveillance de lvolution de ltat de sant des personnes : surveillance des fonctions vitales, surveillance de personnes ayant bnici de soins dexamens ou dappareillage, surveillance de personnes en situation potentielle de risque pour elles-mmes ou pour autrui, surveillance de personnes au cours de situations spciiques lies au cycle de la vie.

    Soins et activits vise diagnostique ou thrapeutique : Ralisation de soins vise prventive, ralisation de soins vise diagnostique, ralisation de soins vise thrapeutique, ralisation de soins visant la sant psychologique ou mentale, ralisation de soins visant au soulagement de la souffrance, ralisation de soins en situation spciique (urgence).

    Coordination et organisation des activits et des soins : Organisation de soins et dactivits, coordination des activits et suivi des parcours de soins, enregistre-ment des donnes sur le dossier du patient et les diffrents supports de soins, suivi et traabilit doprations visant la qualit et la scurit, actualisation des documents dorganisation des soins, transmission dinformations, interventions en runion institu-tionnelle.

    Contrle et gestion de matriels, dispositifs mdicaux et produits : Prparation et remise en tat de matriel ou de locaux, ralisation et contrle des oprations de dsinfection et de strilisation, conduite doprations de contrle de la qualit en hy-gine, conduite dopration dlimination des dchets, commande de matriel, range-ment et gestion des stocks, contrle de la iabilit des matriels et des produits.

    Formation et information des nouveaux personnels et des stagiaires : Accueil de stagiaire ou de nouveau personnel, conseil et formation dans lquipe de travail, ralisation de prestation de formation, contrle des prestations des stagiaires de di-verses origines.

    Veille professionnelle et recherche : relation avec des rseaux professionnels,

    rdaction de documents professionnels de recherche, bilan sur les pratiques profes-

    sionnelles.

    Dans ce rfrentiel chaque activit est dtaille, dcline en actes acqurir, actes considrs comme indispensables la profession inirmire.

  • - 28 -

    la suite du rfrentiel de comptences et dactivits, le programme 2009 prcise le rfrentiel de formation.

    2.2.3.3Le rfrentiel de formation

    Le rfrentiel de formation a pour objet de professionnaliser le parcours de

    ltudiant, lequel construit progressivement les lments de sa comptence travers

    lacquisition de savoirs et savoir-faire, attitudes et comportements [] Ltudiant est amen devenir un praticien autonome, responsable et rlexif [] Ltudiant dve-loppe des ressources en savoirs thoriques et mthodologiques, en habilets ges-

    tuelles et en capacits relationnelles [] Il apprend reconnatre ses motions et les utiliser avec la distance professionnelle qui simpose [] ltudiant dveloppe une thique professionnelle lui permettant de prendre des dcisions claires et dagir

    avec autonomie et responsabilit dans le champ de sa fonction (ibid., 30).

    Ce nouveau programme est structur autour de ltude de situations, don-nant aux tudiants loccasion de travailler trois paliers dapprentissage : comprendre

    [] agir [] transfrer , avec la conservation dune alternance de la formation (ibid., 30).

    De modules, ce programme se dcline en units denseignements (UE) en lien les unes avec les autres et contribuant lacquisition des comptences. Six champs sont reprsents :

    1 Les sciences humaines, sociales et le droit;2 Les sciences biologiques et mdicales;3 Les sciences techniques inirmires, fondements et mthodes;4 Les sciences techniques inirmires, interventions;5 Lintgration des savoirs et posture professionnelle inirmire;6 La mthode de travail.Les champs 3, 4 et 5 sont appels cur de mtier, car reprsentent les sa-

    voirs faire du professionnel, partie professionnalisante, et ils sont essentiellement pris en charge par les cadres enseignants des IFSI et des professionnels de sant vaca-taires. Les champs 1, 2 et 6 correspondent des enseignements fondamentaux de nature universitaire, telle que la biologie fondamentale par exemple.

    La partie professionnalisante de la formation reprsente 27,3 % de cours ma-gistraux et 76,2 % des travaux dirigs (Marsala, tome 1, 27).

    Ces trois ans dtudes comptent 36 contenus denseignement rpartis en 59 units denseignements. Ces units denseignement se divisent en cours magis-

  • - 29 -

    traux, travaux dirigs et travail personnel guid. Dans le programme, les objectifs, les lments de contenu, les recommandations pdagogiques, les modalits et critres dvaluation sont prciss pour chaque UE.

    En ce qui concerne les stages, dans le programme de 1992 ils taient indexs des disciplines relatives aux sciences mdicales : mdecine, chirurgie, pdiatrie, psychiatrie et ranimation. Ces disciplines taient obligatoires et la dure de chacun de ces stages tait identique : 4 semaines. Dans le rfrentiel de 2009 seuls, quatre types de stages deviennent obligatoires. La dure de ces stages est variable selon le semestre :

    Semestre Dure en semaines

    1er 5

    2 5 10

    6 15

    Le stage du semestre 6 est considr comme un stage prprofessionnel. Les quatre types de stage obligatoires sont :les stages en soins de courte dure (mdecine, chirurgie, hpitaux de jour);les stages en sant mentale et psychiatrie;les stages en soins de longue dure, soins de suite et de radaptation;les stages en soins individuels ou collectifs sur des lieux de vie (domicile, pompiers, maisons de retraite).Le nombre total de semaines de stages dans ce programme a t rduit : de

    68 semaines dans le programme prcdent, ce programme propose 60 semaines sur lensemble du cursus. Mais ltudiant va pouvoir cependant largir son domaine de comptences des structures extra hospitalires ainsi quau domicile des patients. Cette diversiication des lieux de pratique va permettre au futur inirmier de construire galement son projet professionnel en dehors du milieu hospitalier.

  • - 30 -

    Chapitre 3 : le rfrentiel de 2009 et les concepts introduits par ce programme

    3.1Introduction - analyse du programme de 2009

    Si le programme de 1992 tait dj centr sur ltudiant, ce programme 2009 insiste sur la ncessit dtre acteur part entire de sa formation favoris par lmer-

    gence dune posture rlexive. Cest ltudiant de construire, durant son cursus, ses comptences en transfrant les connaissances thoriques, acquises lIFSI, sur le terrain, danalyser sa pratique partir de recherches, de questionnement amenant ltudiant une analyse rlexive rtrospective (Perrenoud, 2001, 35). Ce pro-gramme 2009 recentre galement les connaissances sur la clinique inirmire. Les enseignements des UE cur de mtier sont bass sur la rsolution de situations cli-niques complexes. Les tudiants accompagns par des formateurs en groupes de TD restreint travaillent sur ces situations issues de dossiers provenant du terrain.

    En ce qui concerne les stages, de juxtapositive, lalternance devient plus in-tgrative responsabilisant les professionnels de terrain devenu oficiellement, par ce programme, tuteurs (professionnels volontaires et expriments ayant une fonction pdagogique) et matres de stage (professionnels, en principe volontaires et expri-ments, le plus souvent cadre de sant reprsentant la fonction organisationnelle et institutionnelle du stage). Les tuteurs accompagnent les tudiants durant leur appren-tissage et restent en contact avec les formateurs de lIFSI par le biais :

    dune charte dencadrement entre ltablissement daccueil et les IFSI;de la mise en place dun livret daccueil et dencadrement spciique chaque lieu de stage;de ltablissement dune convention tripartite entre lIFSI, ltablissement daccueil et ltudiant.

    Le matre de stage, quant lui, organise le stage de ltudiant lintrieur de linstitution hospitalire.

    Les contraintes conomiques actuelles psent dans tous les domaines y com-pris sur celui de la sant. Nous rejoignons ici Anglique del Rey qui met en vidence, dans son ouvrage lcole des comptences , une critique dune formation par comptences. En effet, les institutions hospitalires demandent avoir des profes-sionnels autonomes, performants ain dtre plus rentables pour pouvoir concilier

  • - 31 -

    une qualit de soins moindre cot rduisant ainsi lhomme ntre plus que la ressource dune croissance conomique (del Rey, 2013). Dune logique de moyens, notre socit est passe une logique de rsultats y compris dans le domaine mdi-cal o la dure moyenne de sjour est devenue un saint Graal et la comptence professionnelle est devenue le matre mot de la gestion des ressources humaines.

    Ain de permettre lanalyse de ce programme dclin en comptences, il nous semble important de dvelopper ici ce concept de comptence.

    3.2Concept de comptence

    Si lorigine de ce concept de comptence est apparue en France dans le voca-bulaire courant au dbut des annes 1980, il nen reste pas moins que la dinition de ce concept reste problmatique, car complexe comme nous le prcise Crahay (2006, 1). Ce concept a merg dans les entreprises ain de sortir de la crise conomique des annes 1970, concept issu du courant behavioriste. Le terme mme de comptence renvoie dans son sens premier une notion juridique. Dans son deuxime sens, il renvoie au domaine dactivit dun mtier et ses exigences propres. Il est galement utilis pour parler de la comptence dun malade (ses ressources propres).

    Daprs le Petit Robert, la comptence est une connaissance, une exp-rience quune personne a acquise dans un domaine et qui lui donne qualit pour bien

    juger . Le dictionnaire consult en ligne en donne la dinition suivante : Habilet reconnue dans certaines matires et qui donne un droit de dcider .

    Le dictionnaire des racines latines (Bouffartigue et Delrieu, 1996, 300) donne cette dinition du mot comptent : de competens : appropri, accord , qui se rend au mme endroit . La notion de convergence est intressante dans cette dinition.

    La dinition quen donne Guy Le Boterf insiste, non seulement sur les notions de savoir et daction, mais galement sur limportance dun partage avec lenvironne-ment et du processus combinatoire que cela impose. Il articule le fait dtre comp-tent : cest tre capable dagir et de russir avec pertinence et comptence dans une situation de travail en mobilisant une combinatoire approprie de ressources et avoir des comptences quil dinit comme avoir des ressources pour agir avec comptences (Le Boterf, 2010). Lenvironnement a son importance dans les soins inirmiers, car le professionnel va devoir sappuyer sur cet environnement pour mener bien un projet de soins et va devoir utiliser les ressources ncessaires la fois tho-riques, pratiques et environnementales.

  • - 32 -

    Une comptence est aussi une mise en exercice professionnel des capaci-

    ts dun individu. Cest un processus par lequel une personne produit rgulirement

    une performance professionnelle ajuste au contexte (Raffy, 2010, 17) et la lo-gique de la comptence apparat comme tant incontournable partir du moment o la question de la performance de laction se pose2. Pour un tudiant inirmier, lajuste-ment contextuel est continuel dans le domaine du soin, car chaque situation de soin est unique.

    Pour poursuivre sur les rlexions et dinitions du concept de comptence, nous citerons Le Boterf (2011, 63) pour qui tre comptent signiie plutt savoir agir et ragir. Dans ces circonstances, tre comptent cest alors savoir quoi faire et quand.

    Face aux imprvus et aux alas, face la complexit des systmes et des logiques

    daction, le professionnel devra savoir prendre des initiatives et des dcisions, ngo-

    cier et arbitrer, faire des choix, prendre des risques [] Pour tre reconnu comme comptent, il ne sufit plus dtre capable dexcuter le prescrit, mais daller au-del du prescrit . Cette dinition est intressante, car complte et recouvre ce que lon attend aujourdhui dun professionnel de sant : tre autonome, rlexif, responsable de ses actes donc comptent et aller au-del de ce qui est prescrit cest--dire de dpasser

    la fonction de simple excutant en prenant des initiatives et en donnant du sens ses

    actes dans le cadre de son rle propre.Mais quest-ce qutre un tudiant comptent, matre mot de la gestion des

    ressources humaines aujourdhui dans le milieu (entre autres) de la sant? Selon Rey (2014), un individu est comptent [] lorsquil est capable de dcider par lui-mme quelles oprations il y a lieu de mettre en uvre pour rpondre une situation ven-

    tuellement non routinire rejoignant ici lautonomie de penser, de dcider que lon attend dun professionnel de soin.

    Nous pouvons constater que la notion de comptence est effectivement com-

    plexe et a donn lieu de nombreux dbats dans le milieu de lducation. del Rey (2013), dans son ouvrage lcole des comptences, page 35, nous fait part dune critique fort intressante concernant cette notion de comptence : Une comptence est dinie comme un savoir-agir fond sur la mobilisation et lutilisation eficace dun ensemble de ressources, lesdites ressources tant leur tour dinie comme len-semble des acquis scolaires de llve, mais aussi ses expriences, ses habilits, ses

    intrts tout en prcisant que cette dinition a subi un petit essorage sman-

    2 Rlexions partir de la confrence CEFIEIC, intervention de Vilatte J.-C., 2009 Du plan psychia-trique et sant mentale vers un professionnalisme conirm .

  • - 33 -

    tique La mention des connaissances parmi les comptences, celle de la complexit

    dune comptence ainsi que sa ncessaire mise en contexte (une comptence nest pas gnralisable toute situation) ont disparu . Cette rlexion sur la notion de com-ptence dans le milieu de lducation mene par del Rey peut tout fait se transposer dans le milieu de la formation en soins inirmiers.

    En formation initiale, les tudiants possdent un portfolio (annexe IIIa, 99-138), outil dauto-valuation, sur lequel sont dclines les dix comptences acqurir ain de pouvoir se prsenter devant le jury inal et dobtenir leur diplme dtat ainsi que le grade de licence. Les comptences sont dclines en 37 items, chaque item possde une case cocher et quatre colonnes : NP (non pratiqu), NA (non acquis), AA ( am-liorer), A (acquis). Le tuteur ou le matre de stage remplit ces cases, dans un document identique celui du portfolio de ltudiant, en in de stage au regard des actes et activi-ts effectues par ltudiant, du comportement dont il a fait preuve et de ses connais-sances mises en pratique. Lvolution de ces petites croix , au il des stages, est une des composantes permettant au formateur pdagogique de ltudiant de valider, ou pas, le stage. Les comptences renvoient bien des connaissances gnrales ac-quises lIFSI, un savoir agir et des connaissances techniques acquises en clinique, sur le terrain, ainsi qu la capacit de les mobiliser dans une action, une situation prcise et surtout de pouvoir transfrer toutes ces connaissances acquises (savoir, savoir-faire, savoir-tre et savoir agir (Schn, 1994) lors de nouvelles situations de stage (ce que Vygotsky nomme le transfert rlchi et volontaire) (Britt, 1994, 170). tre comptent suppose un investissement des connaissances dans laction et une

    formalisation des savoirs issus de la pratique (Audigier et Tutiaux-Guillon, 2008, 32), nous sommes bien ici dans un schma cognitif rlexif allant dun lieu dapprentissage un autre. tre comptent implique galement une notion de responsabilit ce qui entraine une permanence dans le besoin de formation, car on ne peut tre comptent sans une mise jour des volutions dautant plus que, dans le milieu de la sant, lenvironnement du professionnel est en perptuelle mutation (apparition de nouveaux traitements, matriels). Il est donc amen exercer dans des contextes de plus en plus complexes et diversiis (del Rey, 2013).

    Ces futurs professionnels vont exercer en milieux hospitaliers pour la plupart, milieu hospitalier gr aujourdhui comme une entreprise o lactivit est comptabi-lise, rpertorie, classiie dans de petites cases cocher galement. De ces cases vont dpendre les inances de ces lieux dexercice, il est donc impratif, budg-tairement parlant, de pouvoir recruter des professionnels correspondant des proils

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    de poste prcis, avec des comptences correspondant la discipline concerne par le service recruteur. Une fois embauch, le professionnel va poursuivre bien souvent des formations internes proposes par lInstitution hospitalire ain de devenir po-lycomptent et pouvoir ainsi avoir une sorte de retour sur investissement (del Rey, 2013). Cela va permettre au professionnel une mobilit inter disciplinaire dans lInsti-tution, une adaptabilit rapide en adquation avec la diversit des lieux dexercice et chaque professionnel pourra tre ainsi remplac en cas de besoin. Nous rejoignons, dans ce contexte actuel, ce que Clot dit du management moderne : En cernant la comptence, le management moderne croit pouvoir capter le potentiel impalpable

    et anonyme o prend racine la productivit que la qualiication formelle recouvre (cit par Vilatte en 2009). Le professionnel devient, son embauche, un professionnel potentiellement performant donc conomiquement intressant pour lInstitution. Il y a ici un paradoxe, car identiier les comptences acquises exige de sintresser lin-dividu or linstitution a une vision conomiste, l