Le Sentier, par J. Krishnamurti

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    j . KR1SHNAMURT1

    mnh S *

    Traduit J e VAnglais

    1926

    LES DITIONS .DYAR

    PARIS

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    J . KR1SHNAMURT1

    Le SentierTraduit de l Anglais

    1926

    LES DITIONS ADYAR

    PARIS

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    LE SENTIERpar J. KRISHNAMURT!

    PREMIRE PARTIE

    Pas un nuage au cie, pas un souffledans les airs; inexorablement, le soleilverse ses rayons de feu> Et je metrouve seul sur la route. A Fentour, de#

    plaines qui stendent au loin jusqulhorizon. Pas un brin dherbe, pasune fleur ne respirent sur ce sol dsol. Tout y est fltri, brl et parleavec angoisse de la douleur inexprime et inexprimable des sicles rvolus'. Dans ces vastes tendues, pas unarbre l ombre duquel une tendrefleurette puisse gaiement spanouir,insoucieuse des; rayons meurtriers dusoleil. Le sol mme sentrouvre dses

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    prment. Le ciel a perdu son azurdlicat; il a pris une teinte de plombdue la chaleur torride de tous lessicles traverss.

    Ce ciel, pourtant, doit avoir panchune pluie bienfaisante; cette terre doitlavoir absorbe, ces plantes mortes,ces touffes jetes l ple-mle, cesbrins dherbe desschs, jadis, doivent avoir tanch leur soif. Et ilssont tous tnorts, prsent, morts sansespoir de renouveau possible. Combiende sicles y a-t-il donc que la bonne

    pluie est tombe? Je ne saurais le dire.Ces pierres brlantes non plus ne sesouviennent pas du temps o ellestaient heureuses sous la pluie, nonplus que ces brins dherbe desschs,du temps o ils taient humides derose. Tout a pri, pri sans espoir.Pas un son. Seul rgne un silence terrible, angoissant, coup, par intervalles, par le gmissement de limmense douleur ambiante; alors, la

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    terre craque et une poussire sansvie tourbillonne. Pas un tre vivantne respire cet air asphyxiant; tout cequi vivait jadis a succomb. A ct de

    la route, le large fleuve est tari, qui,aux premiers ges du monde coulaitsi gament, apportant, dans ses flotslimpides, joie et fracheur; et son litne se souvient plus mme davoircharri des ondes bienfaisantes onageaient des poissons aux couleursdiapres. Les dlicats squelettes blancsdes poissons morts gisent l aujour

    dhui exposs la lumire aveuglante.Les plaines sont jonches de tous cesvestiges des cratures vivantes auxsicles passs, et jamais plus lheureuse pulsation de la vie ne pourrasy faire sentir encore. Tout est fini,tout est consomm; la mort a saisidans sa serre cruelle tous les tresvivants, oui, tous, except moi.

    Je suis tout seul sur la route; personne devant moi; peut-tre y a-t-il

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    beaucoup de plerins derrire moi;mais je ne dsire pas porter mes regards en arrire, ni voir l'horreur dessouffrances du pass. De chaque ct

    de ce sentier, le sentier de ma vie, quime parat interminable, une tristefigure, une figure de dsolation, mesupplie sans cesse de massocier samisrable vie de quitude illusoireDevant moi, le Sentier stend, lieuesur lieue, anne sur anne, sicle sursicle, tout blanc dans la lumire dusoleil impitoyable; le chemin monte

    toujours dune faon insensible. Lclatde ce sentier tuant sous le soleil tincelant, maveugle, et je cherche oreposer mes yeux fatigus. Mais rienque cet immense brasier de lumireblouissante I Le soleil ne se couche

    jamais; il dverse implacablement sachaleur torride. La route nest pas

    gale; et l il y a des partie aussiunies que la surface dun lac par unjour calme et serein. Ce triste sentier

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    est alors propice an marcheur, maissoudain, comme un orage contenu quitout coup claterait triomphant dansson uvre de destruction, la route

    seffondre et devient impraticable auxpieds dj saignants du plerin. Jene puis dire quand elle redeviendradouce et clmente; peut-tre sera-ceau dtour prochain ou seulementaprs bien des annes de tourmenteset dpreuves! Le chemin abrupt nese soucie gure, lui, sil cause de ladouleur ou de la joie; il est l pour

    que je le gravisse, de gr ou de "force.Qui a trac ce chemin de malheur?J e ne le sais. Et le chemin ne peutdire son nom. I l existe depuis des sicles sans nombre ou plutt depuis desmillnaires. Nul autre que moi ne lagravi; il a t trac pour moi, afinque jy marche seul. J ai eu nagure

    des compagnons, des amis, des frres,des surs, des pres, des mres, maissur ce fatal chemin, ils ne peuvent

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    nitude : rien ne le touche. H sait bienque je ne puis le quitter, ce Sentiercaptivant, et quil ne peut se sparerde mon Soi accabl de tristesse.

    Nous sommes insparables; il ne peutexister sans moi, ni moi sans lui. Nousne faisons quun, bien que je sois diffrent de lui. Parfois, comme le sourire dun doux matin de printemps,le Sentier minvite le parcourir, etdautres fois, comme lOcan irrit etperfide, il me leurre dans mes bonheurs passagers. Quand je tombe, il

    me relve par une amicale treinte,me faisant oublier lamertume et lessouffrances du pass, membrassantcomme une mre tendre et aimantedont la seule pense est de protgerson enfant; mais lorsque jentre dansun tat dinconscience heureuse ouque je me perds dans des rveries,

    comme si j eusse bu longs traits la fontaine du bonheur suprme, dunchoc brusque, il me rveille de mon

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    rve heureux et phmre et me remet rudement sur mes pieds meurtris.

    11 est cruel et charmant, mon ami

    solitaire, mon amant Quoiquil metraite tantt avec sa tyrannie cotita-mire, tantt avec un amour sans pareil, il reste mon seul compagnon, et

    je nen dsire point dautre. Le soleilme brle et le Sentier me blesse. Mespas ne laissent pas dempreinte surle dur chemin et je my aperois pasnon plus la trace daucun tre humain.

    Ainsi, voyant que je suis le seul amantde mon Sentier, je vais dans mon exclusivit et dans ma sparaiivit, meglorifiant en mon me de ce privilge. Je souffre plus que personne;

    j exulte plus que personne et mon obstination laimer est diffrente detout ce que le monde a jamais connu.

    Dans mon adoration, le souffle memanque et aucun amant ne pourra jamais lui offrir ses sacrifices avec un

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    enthousiasme plus dlirant que lemien. Ses cruauts mmes me poussent le chrir davantage et sa tendresse mattache plus troitement lui pour lternit. Nous vivons lunpour dauire; seul je puis entrevoirson cher visage et lui baiser la main.II na dautre amant ni dautre ami quemoi- Tel loiselet qui, pour jouir dela libert du vaste monde slance dunid avant que ses ailes soient prouves, tel je me suis prcipit dans ceSentier pour jouir de la douceur de

    son amour, dans la solitude et loinde tous les regards.

    Les vents de saisons innombrablesmont fait tournoyer comme la feuillemorte, jete de-ci, de-I, par les rafales dautomne, et cependant mes. paserrants ont toujours retrouv le sduisant Sentier. Comme la vague qui

    danse dans la splendeur infinie et radieuse du Soleil, ainsi j ai dans dansla fureur des vents dchans; comme

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    le dsert qui nest limit par aucunechane de montagnes, ainsi jai texpos au Soleil.

    Telles furent mes vies. Jamais les

    dlices dun paisible repos na rassrn mon me, na pntr jusqumon Etre vritable, et jamais je nait rconfort. Pas un sourire naapais mon impatience, pas un visageaimant na apport un baume moncur endolori; jamais une douce parole nest venue allger mon indicibleangoisse. J amais lamour dune mre,

    dune femme ou dun enfant na tanch lardeur de ma soif daimer, tousse sont dtourns de moi, et moi, jeles ai tous abandonns. Sans quon meplaignt, jai err seul, tel un lpreux.La douleur et lamertume ont t mescompagnes ternelles et insparables.Comme une ombre, ma peine me sui

    vait, et dans cette douleur sans trve,j ai vers bien des larmes amres. Souvent jaspirais la mort et au nant,

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    mais ni lautre ne mtaient accords.Bien des fois, jai vu la face hideusede la mort qui me dchirait le curet jaccueillais bras ouverts celle

    qui tait la terreur de tant dhommes,mais alors elle me souriait et me bnissait. Fatigu de dsirer la mort, jetournais mes regards et mes pas versles autels de lamour et de ladoration,mais jy trouvais peu de rconfort.Bien des fois je suis demeur plongdans une adoration muette; mais,comme le parfum dlicat dune fleur,mon adoration traversait les sicleset je restais inapais sur mes genouxdouloureux. Que de fois jai dposdes fleurs odorifrantes aux pieds desidoles rvres, sans recevoir une bndiction. Que de fois jai sacrifi auxnombreux Dieux de tous les pays etde toutes les races, et les dieux sont

    toujours rests muets, leurs regardsdtourns de moi. Bien des fois jai tleur prtre, dans les temples sacrs,

    S

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    mais ma robe blanche tombait de mespaules et je restais nu au soleil. Quede fois, avec adoration, jai bais leSaint Lotus du Temple, mais le lotusse fltrissait; dans ma main. Que defois jai t payer mon tribut dadoration aux autels que le monde avaitdresss, mais je men retournais silencieux et la tte courbe. Que decrmonies jaii clbres, sans que jamais mes aspirations ne fussent' satisfaites. De combien de rites jai fait

    mes dlices sans que jn aie ressentijoie ou esprance. Dans combien detemples ai-je t consacr, sans que

    j'en aie obtenu aucune allgeance!Combien de livres sacrs jai lus, etla Connaissance mtait toujours refuse. Gombien.de vieat n?ai-je pas passes dans l saintet! Mais ces vies

    taient sans clant. Combien de foisjai inteiTrog les toiles! Mais toujours ellfes; teignaient sans me- communiquer- leur sagesse; profonde. Sou

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    vent, je veillais,, sonciamt le nant,cherchant la lumire; mais les tnbres,, les paisses;tnbres continuaient rgner. Dans bien des vies, jai dlibrment suivi, tantt en aveugle, tantt clair dj1, les leons des modestes. instituteurs des villages retirs;mais leurs enseignements me laissaient au; pied de la eoine solitaire.

    J ai' vcu; noblement et travaill laborieusement). J e me suis domin et jaiaussi, men une vie effrene. Souvent,

    afflig et vensamt des larmes amres, jesuppliais la mai divine de me guider,mai* aucune main ne me guidait. J eluttais ardemment contre lhumanitpour obtenu la lumire, mais je perdais- 1a; teia et la lumire et lhumanit. Les; yeux fixs vers le butJ, contrlant toutes mes- motions, cherchantla vrit; je mditais, mais rien nemta) rvl; Que de fois jf'ai tentde mcarter de mes frres bruyants,pour chapper leurs penses igro-

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    bles et mesquines, leurs querelles, leurs vaines ou grossires passions, leurs chagrins et aux petites misresquils staient cres eux-mmes, leur haine iroce et leur piti enfantine, leurs affections puriles et leur inconsistante compassion, leurs bavardages, leur amiti passionne et goste, leurs aigres querelles et leurs rjouissances bruyantes; leur colre vindicative, leursfades amours, leurs causeries sur les

    grands problmes quils ignoraient et leur science des choses secondaires, leur vanit ou leur ddain, leursflatteries grossires et leur insolence; leurs dsirs damour et leursaversions injustifies; enfin tout cequi tait humain. Et jaspirais toutce qui est grand, noble et divin. Mais

    dans quelque lie que je sois all ouque jallasse, toujours lhumanit mepoursuivait du spectacle de ses agoniessans nom et de ses cris de dsespoir.

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    Souvent jallais chercher une retraite dans la solitude des clairiresde la fort profonde et paisible, mais

    je les trouvais peuples de mes penses et hantes par ma misre. Sou

    vent je tressaillais au spectacle de labeaut du monde, la vie du douxprintemps et du rude hiver, du soleilcouchant, pacifique et splendide, desastres scintillants des cieux, du rveil du matin, et du soir mourant, dela tendre lune la ple clart, dusoleil impitoyable et des tnbres sansfond, de lherbe verdoyante, desfeuillages velouts, du tigre froce, dudaim paisible, du hideux reptile, dellphant plein de majest, de la magnificence des montagnes, des mersimptueuses. J ai got dans leur plnitude les beauts que la nature peutdonner mais je nai pas trouv lapaisement en elles. J ai err dans les val

    les ombreuses et escalad les monts

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    escarps. J ai tout explor en vain etdans la dsolation.

    A maintes reprises, dans sombre devies, j ai pratiqu la Yoga par lesprivations, par la torture -physique,

    par labngation, mais je nai pasrencontr Je L>ieu vivant J ai tu eumai les dsirs et les fausses motions,

    jai vcu, purement selon les prceptesdes saints livres de bien des peuples,

    jai accompli bien ides actions noblesau regard des hommes, qui mont couvert de gloire. J e nai jamais donnaccs dans mon me douloureuse la dsesprance ai la (tentation; j aientrepris sur ,1a iterre des plerinagesaux saints lieux, mais jamais Ulepart, je mai trouv le rconfort vr.aiet durable. J ai -eu .des visions dans lestemples de NLaive, de Babylone,dEgypte fit dans les temples sacrsde lInde bni. J ai ador leurs dieux,

    reni le .banheur terrestre, renonc mon pre, ma mre, ma femme,

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    mes erfants, offrant des sacrificesgrands et petits, nobles et purils, sacrifiant mon icorps e*t mon me elle-ifflme pour que la lumire me guidt;le contentement ma t refus dans

    toutes les choses que jai faites. J ait imprgn cT-eTAuves divines, j aiaspir tre dlivr de ce monde dedouleur. J ai aid beaucoup de frres,aiors que javais tant besoin dtreaid; j en ai guri beaucoup, alors que

    javais tant besoin dtre guri; jenai guid beaucoup, alors que j'avais

    tant besoin dtre guid; jen ai rconfort beaucoup, alors que javaistant besoin dtre rconfort moi-mme. Plong dans une angoisse sansnom, jai su sourire; tant joyeux, jaisu pleurer. Je restais beureux tout enperdant et misrable tout en gagnant,et toujours je continuais chrir monDieu. Et cependant, mon me demeurait plonge dans le plus grand chaosjtais encore un aveugle digne de

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    piti, entour dobscurit et dirrel.La pure lumire mtait encore refuse et je nobtenais toujours pas lallgement qui gurit. La paix du curmtait encore dnie ; pour moi, point

    de bonheur nulle part. Je restais seul,toujours seul, comme le juste errantdans le ciel. J tais seul avec moi-mme.

    Las enfin dadorer et de respecter,puis de solitude, las de chercher etdaspirer au bonheur divin, las dessacrifices et des mortifications, las

    de chercher la lumire et la vrit,las dtre noble et altruiste, las delutter et de gravir les hauteurs, je meplongeai alors violemment dans lesmonde matriel, esprant ainsi atteindre linaccessible et limpntrable. J e devins jeune et plein desant, beau et passionn, libre et

    joyeux, ne pensant aucunement au

    lendemain, libre et insoucieux. Jemappliquai systmatiquement me

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    divertir follement, avec gosme, nerecherchant que les plaisirs des senset les entretiens mondains. J e pris larsolution de faire toutes les expriences possibles dans les milieux que

    pouvait moffrir le monde ici-bas.Rien ne devait mtre refus; le plaisir souverain devint mon but unique.Souvent je naquis riche; je dormaisdans le giron de la volupt, berc deflatteries. J avais pour moi la jeunesseet la beaut. Avec ces deux atouts, lemonde et ses grossiers plaisirs mtait

    accessible. Je fus bientt au premierrang dans tout ce qui tait bruyant etturbulent. Entour dune jeunesse licencieuse, je madonnai aux plaisirsinavouables du matin au soir et mme

    jusqu laube. J tais le premier danstous les divertissements; personne nepouvait rivaliser avec moi dans mesfolies. Les plaisirs de la brillante Ni-nive, de la fastueuse Babylone, de lamerveilleuse Egypte et celle de l Inde

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    au soleil le -feu, iaient toujours mes ODres. Partout, jtais combldioimeurs, de louanges, de flattenies.

    Je buvais longs traits la fontainede.la gaiet at des jouissances. J*avais

    de nombreux esclaves et serviteurs edpoint -de matre. Mes dsirs naissaientcomme les fleurs luxuriantes du printemps et taient aussitt satisfaiteNul frein mes folies, mes caprices.Quand me venait une nouvelle fantaisie de luxe, elle tait ralise aumoment le (plus favorable. Lamoursous toutes ses formes tait ma porte : rien ntait sacr pour moi. Jeprofanais tout, me moquant des dieuxles plus vnrs et traitant a>vc mpris les rhammes .des classes infrieures. Les vins les plus gnreux etles plus fins taient toujours ma disposition, avec un esclave pour me lesprsenter. Satin de toutes les dlices

    que ;pt rver un .homme civilis faisant partie des nations et des races

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    les plus 'raffines du globe, je voulusalors mincarner comme femme, afinde goter au ravissement dlicat dtreaime par des hommes passicums.

    J ai eu d'innombrables adorateurs

    sous ma croise, mais jamais je ne mesentais satisfaite de lamour insipidede mes soupirants. J e passais ma vie,languissante au sein de lamour mmeet rclamant toujours davantage. J aiexpriment toutes les souffranoes ettoutes les joies de porter un enfantdans mon sein et de Lui donner le

    jour; jai connu aie chagrin de le per

    dre, les douleurs et les dchances dela vieillesse, la .ngligence et lindiffrence de mes premiers amants; j aipassionnment t attache des souvenirs du pass et dplor labandondamants disparus depuis longtemps.

    Lasse .enfin de mener une vie drgle, je devins une femme vertueuse

    et obtins les -dlices de lamour pur.J e mis au monde dans la joie et sans

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    que mon cur ft, comme jadis, tourment par la rancune de souffrir parles autres, alors que jenfantais untre innocent.

    J ai connu la tendresse et les sou

    rires ingnus des petits enfants quisattachent vous de tout leur cur,jai got leurs chers et purs baisers,leurs dlicates treintes et jai t pntre de cette douceur. J ai t unefemme aimante, une mre tendre, glorieuse dans son amour.

    Aprs avoir fait lexprience de lamaternit, je redevins une fois encoreun homme libre, domin par des passions fortes et brutales. Les dsirsenflammant mon cur, je me suislivr la luxure, oubliant la tristesseet la souffrance, sans piti pour lesmaux dont je suis cause : Ma vie esttissue de joies gostes, riche en expriences viles et en plaisirs violents

    et le monde matriel ne peut rien merefuser. Mais je nprouve ni satis

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    faction, ni bonheur vrai, et mon curreste aussi vide et aussi dsol quele dsert aride o pas une craturequi procure beaut et joie ne peut vi

    vre. Aprs avoir got aux richesses,je devins un indigent, un pauvre hre,allant de maison en maison, rebutet maudit, malpropre, harass, hideux mes propres yeux, hu et montr dudoigt, affam, sans pre, ni mre, nifemme qui ost me toucher; pitoyable,rong par des maladies connues et

    inconnues, les pieds saignants:, lespaules couvertes dun sac de toilegrossire en guise de vtement lesjours de fte et qui me tenait lieu decouverture quand soufflait la bise etde coiffure quand lardeur du soleilme brlait sans piti. Un vieux bton la main, jai err travers les citfastueuses et inhospitalires de biendes pays. Les marchands me poursuivaient de leurs maldictions et jtaischass coups de pied par les hom

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    mes et mordu par les chiens furieux.Les gens sedtournaient de moi et merefusaient le peu, de secours qoiis au>-raient pu me donner. Les villes; et les

    vidages taient tous semblables, jeveux dire*. sans piti, et partout leshommes me regardaient passer, tecur dur.

    Je mabritais, pour la nuit, dansdes endroits dsols et cartts, o nihomme ni bte nosaient saventurer,repousss par lair mphitique quon

    y respirait. La faim rongeait sanscesse mes entrailles;: tantt la chaleurdu soleil* nue grillait,, tantt le ventgiadal! dut nord me transissait ; la geleme desschait; je grelottais de livreefc de langueur.

    Et jai err ainsi sur la terre entiresans rencontrer jamais un sourire, uneparole fraternelle, un regard ami. Leschiens taient plus heureux que moipuisquils taient nourris et caressset qnem prenait soin deux; mais ltes

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    cliieus. eux-mmes aboyaient, aprsmoi. Nulle maison ne souvrait pourmoi. et les, prtres mmes me chassaient des temples sacrs. Les enfants

    frapps d'horreur i mon aspect, sarrtaient de pleurer. A ma vue, lesmnes. rappelaient leurs enfants et lestaisaient en hte nentrer dans les; maisons. Je paraissais rpandre la pesteet le malheur et assombrir la lumiredu jour.. Les rivires o je voulaistancher ma soif se desschaient, mon approche, les: arbres.- me refusaient leurs fruits, la terre tremblaitsousi mes pas, les toiles se voilaient la vue de mon tre infortun et labenote pluie ne tombait point surmoi paar me laver de mes impurets.Ainsi,, pendant bien des gnrations,parmi maint peuples et maintes nation, seul et malheureux comme un

    nuage isol chass par le vent sur lesvaes>et les collines, jai err, misrable et abhorr. Pendant des sicles,

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    je nai pas connu de bien-tre : puis,lamentable, repouss comme un animal immonde, je cherchais un asile,mais hlas I la solitude et la misre

    demeuraient toujours mon lot. Telleune feuille morte foule aux pieds

    jai cruellement pti dans ma prisonde chair, pauvre et dguenill, sanshaine comlme sans amour, devenu indiffrent linfortune comme la douleur, vide dintelligence, affam etassoiff : toutes les nobles motions

    qui jadis gonflaient mon cur tantmortes depuis longtemps en moi.Pourtant, quoique dsesprant de

    mon existence, fuyant les hommes eten butte aux railleries de la jeunesse,au sein de cette agonie et de cettedtresse infinies, dans cette torturephysique, ces privations de lme,dans lhorreur de cette ignominie et

    de cette douleur sans fin, je continuais chercher la lumire et le bonheurqui mavaient toujours t refuss car

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    LE SENTIER 33

    jamais encore je navais trouv lapaix intrieure, que je fusse plongdans un luxe hont et vautr dansdes jouissances gostes, ne recher

    chant que les plaisirs malsains, oubien que jessayasse de mener une vienoble et pure, dtestant la turpitude etrecherchant partout la vrit...

    Quelle lumire merveilleuse brillaitalors autour de moi cependant, maisquelles profondes et lugubres tnbres en moi ! J aimais dun amour pur,nobles taient mes dsirs, je frisson

    nais au seul nom de Dieu. Pourtant,dans les asiles de la pit et de linnocence, je ne trouvais jamais le bonheur...

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    DEUXIME PARTIE

    Nombreuses et varies, furent mesexpriences, mes penses et mes motions; innombrables, mes passionsbestiales ou nobles, mes sympathiessubtiles et mes grandes amours, dsintresses ou gostes. Que de nuances dans mes satisfactions et dansmes sentiments nobles et glorieux!Combien jen ai possdes de grandesintelligences et de ruses basses, le

    long des sicles sans nombre! J aipass par des races et des nations diverses, avec des capacits multiples,acqurant la connaissance que lemonde peut donner celui qui cherche et qui souffre.

    Cependant, o est cette lumire queles Sages ont aperue, me disais-je,

    cette vrit suprieure toutes lesnon-ralits; cette misricorde quisoulage toutes les peines, cette paix

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    US SENTIER 35

    intrieure qui apporte lternel bonheur- lme frappe de douleur etcette Sagesse qui guide lhumanitsouffrante?

    En quelque lieu que je sois all, oque jaie cherch ttons, mur, jesuis revenu les mains vides et lme inquite. Comme un enfant indisciplin,qui scarte de sa mre bien-aime, jeme suis gar dans ls abmes dudsespoir et de lirrel', cherchant tou

    jours he grande Ralit. Loin du sentier solitaire, je suis parti, pouss parcette invincible aspiration et par cettesoif inextinguible, mais jai t brlpar langoisse et je suis revenu, lefront courb. Parmi les humains, enlutte les uns arec les autres, pas plusque parmi ceux qui vivent loin desfoules insenses, je nai trouv ni joie,ni satisfaction.

    Heureux ou malheureux aux yeuxdtes hommes, honor ou dgrad, dans

    a peine comme dans le plaisir, fou-

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    36 LE SENTIER

    jours je sentais en moi un vide affreuxque rien ne pouvait combler, un dsirimmense et inassouvi. Las, jai errcomme un aveugle, demandant tous

    les passants le baume qui pt gurirmon cur endolori : chacun donnaitce quil pouvait, avec un doux sourireet une bndiction, mais sans rsoudre le problme qui me hantait.

    O est cette lumire, o se trouvece bonheur sans borne? J e suis las;las des courses errantes que jai faitesdurant tant de sicles. Je suis puiset sans force pour lutter et combattreencore. J e trbuche chaque pas, jepuis peine me traner. J ai pour ainsidire perdu la vue tant je me suis usles yeux. J e suis chenu, hagard et dcrpt. L orgueil de la vie et la jeunesse mont quitt. Je suis doublement courb sous le faix des sicles

    et sous celui de la douleur. La beautdont je me glorifiais la face dumonde sest fltrie et je suis devenu

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    LE SENTIER 37

    un tre monstrueux. Ce qui sest pass,ce qui a t form durant ces longueset terribles annes dpreuve, sesteffac de ma mmoire et mon indiff

    rence pour tout est absolue. J e suis prsent sans dsirs; nulle passionna plus prise sur moi, nulle affectionne me trouble; les motions ont perduleur influence, jadis toute puissantesur moi. Lamour est derrire moi,perdu dans le lointain; livressejoyeuse de laction est abolie en moi;lambition qui peronne tant dtreshumains en leur apportant soit jlagloire, soit la honte, est enfouie dansle pass. Lorgueil qui fait marcherhaut la tte dans le tumulte des actions nobles ou indignes, a disparu jamais; la crainte qui accable etasservit, est anantie; la mort, ce compagnon terrible et impartial de tous

    les hommes, ne meffraye plus de sonregard menaant.

    Cependant, le mcontentement int

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    38 LE SENTIER

    rieur et lternelle aspiration linaccessible laissent en moi un vide profond. A tteindrai-je jamais la plnitude de la joie et saisirai-je jamais lesuprme bonheur?

    0 Etres Puissants, ayez piii duvoyageur solitaire qui a vogu surtant de mers houleuses, travers tantde contres ei subi tant dpreuves!

    Je suis seul, venez mon aide, Vous,qui tes toute piti, Vous, les bienheureux! Vous que jai honors, adors, Vous qui j ai offert de si nom

    breux sacrifices, vous pour qui jaitant souffert afin de devenir digne debaiser les pieds sacrs. Rconfortez-moi, Matres de la Sagesse, par vosregards damour et de bont. Quai-jefait .ei que dois-je faire encore pouratteindre la gloire et la grandeur?Combien de temps encore cette pi

    toyable condition devra-t-elle durer?Quand, Matre, pourrai-je contempler Ta beaut sacre? Devrai-je mar

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    ILE SENTIER 39

    cher longtemps encore dans ce longsentier solitaire? Y aura-t-il un terme cette interminable agonie o je meconsume dAmour pour Toi? Pour

    quoi as-tu dtourn de moi Ta facedorable? O est Ton divin sourire quicalme toutes les souffrances? Avechumilit et angoisse, jai servi lesGrands Etres, et les gens les plusdshrits de ce monde; jai aimaveugl nient toutes choses, petites etgrandes, et jai bu toutes les sourcesde la sagesse terrestre. Mais jamais je

    nai pu arriver toucher Tes pieds.Telle urne belle fleur qui, en se fanant,perd son parfum, sa beaut et soncharme, ou un arbre dessch qui nedonne plus dombrage au voyageurharass, telle est mon existence mlancolique eft dsole. J ai tout donn sansrestriction et suis demeur dnu et

    sans espoir. J ai soutenu lafflig etmen laveugle, alors que jtais moi-mme afflig et aveugle. Pourquoi

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    40 L E SENTIER

    nas-tu pas tndu Ta main secourablevers moi quand je trbuchais? Je suislas dimplorer, je nai plus desprance; tout parat mort et la plusgrande obscurit rgne autour de moi.Mes larmes sont taries et cependant

    je crie toujours vers Toi dans- ma dtresse infinie... Nul passant ne peutme venir en aide dans ltat lamentable o je me trouve, car je suis seuldans ce long, long sentier qui se prolonge comme un puissant fleuve sanscommencement ni fin. Comme un in

    sens, jerre, ne sachant o aller, insoucieux de ce qui doit marriver. J esuis dessch jusquaux moelles : lesoleil ne pourrait me brler davantage. Lblouissante blancheur quimenvironne est comme un ocan sanslimite o je puis peine distinguerle sentier qui conduit au bonheur su

    prme. Tout est rest en arrire; mescompagnons, mes amis, mon amour.Je suis dsesprment seul.

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    LE SENTIER 11

    0 Matre de Compassion, viens mon secours et conduis-moi de cetteprofonde obscurit la pure lumireque quelques Grands Etres ont su atteindre. J e cherche le Grand Librateur qui me dlivrera de la roue de lanaissance et de la mort. J e cherchele Frre qui partagera avec moi sadivine sagesse; lAim qui me rconfortera et me guidera; je cherche reposer ma tte lasse sur le cur dela misricorde : Je cherche un refugedans la lumire...

    Mais le Sentier ne rpond point mon appel dsespr, les cieux ferms me regardent avec une indiffrence cruelle. Nul cho compatissantdans les lamentations lugubres duvent. Le profond silence nest interrompu que par le bruit monotonedune respiration lente et le glissement de pieds fatigus. Pas de paix :des milliers dtres invisibles tourbillonnent autour de moi comme sils

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    42 LE SENTIER

    voulaient railler la souffrance du pauvre solitaire. Le moment de silencequi prcde lorage est mon seul apaisement Seul, l'engloutissement dessicles rpond mes instances continuelles; mon isolement est complet etatroce.

    Depuis longtemps le Sentier ne meparle plus comme jadis quand il mem-eignait discerner le juste de linjuste, le vrai du faux, le rel de lirrel, la grandeur de la petitesse. Maintenant, il est muet comme la tombe.

    Il ma indiqu une partie du cheminmais le reste, je {lois le dcouvrir moi-mme; avant de pouvoir l abandonner et mengager dans un sentier pluslarge et plus lumineux. Il ne peut yentrer sans moi, il ne peut plus mefaire signe comme autrefois. Il fautque la seule notion de sa direction me

    suffise, pendant de longues priodes, travers bien des temptes, jusqu ceque jaborde au havre ternel.

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    LE SMfTIER 43

    Le sentier qui soffre ma vuemonte insensiblement, sans raideur niobstacle, tel un serpent gigantesquedont la tte et la queue ne pourraientse rejoindre et qui ne pourrait me

    surer sa propre longueur : couchdans le sable brlant, repu de carnages, il gt endormi et satisfait, pleinde yjujitude. Mais soudain, voil quele soleil m'inonde de ses rayons defeu et chasse toute pense de mon cerveau. J e nai pius quun dsir : trouver une ombre dlicieuse o je jyuis.se

    tendre un moment mon corps extnu. Cependant une force irrsistible me pousse en avant, sans rpiteft me fait marcher pas hsitants. Jene puis lui nsister. Quoique faible etpuis, jobis cet appel ternel etsouverain. J e fai* un pas, je chancelleet tombe, comme loiseau rapide frapp par la flche cruelle. J e me dbatset je me perds dans linconscience.

    Lentement, avec accablement, je

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    44 LE SENTIER

    reviens moi et regarde le cieQ dcouvert et lumineux et je dsiremtendre nouveau et demeurer o

    j tais. Mais la mme force me remetdebout et, comme jadis, je suis irrsistiblement contraint de suivre linterminable Sentier.

    Au loin, slve un arbre solitaire,dont lombrage dlicieux me souhaitela bienvenue. Ses feuilles sont douces, fraches et veloutes, comme sile souffle bienfaisant du printempsavait soudain veill la vie joyeuse

    ses branches mortes et son feuillagedun vert morbide. Son ombre estpaisse et protge le passant contreles ardeurs du soleil. Les senteurs delherbe frache et larbre protecteursemblent me sourire et minviter partager leur ivresse. Une multitudedoiseaux sappellent en gazouillant.

    Sans force, je tchai pourtant de mettre profit laubaine inespre queles dieux m'envoyaient. J approchai

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    LE SENTIER 45

    pniblement; larbre tout entier seploya pour me faire accueil, me donnant un peu de sa force vitale. J e meglissai sous son ombrage parfum et

    contemplai sa verte frondaison. Lesommeil et lpuisement triomphrentde moi et je mendormis, berc parle bruissement des feuilles et le ramage des oiseaux.

    Ces moments fortuns, ces momentsdabsence complte de toute angoisseet de toute souffrance, me dlassaientdu mal des nombreux ges vcus. J es

    prais demeurer toujours baign danscette lumire ineffable, berc par ledoux murmure des choses vivantes,pacifi aprs tant dorages intrieurset extrieurs. Ah! quil serait doux derester ternellement dans ce dlicieuxrepos!

    Hlas, le Soleil inexorable, jaloux

    de mon fugitif bonheur, me brle nouveau de ses rayons de feu. O estmon arbre bien-aim? O sont les oi

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    46 LE SENTIER

    seaux gazouillants? Je regarde de touscts : nulle trace de larbre tutlaire.Je suis seul une fois de plus. Etait-cedonc un rve? Etait-ce l?ancienne il

    lusion qui avait pris une forme tangible? Etait-ce la piti dun dieu se-courabie ou Men le jeu cruel dun diemmalin? EtaM-ce la grande promesseannonce ou bien une preuve offerte ma patience?

    Combien jen avais suivi, de cesralits mensongres, qui mchappaient toujours quand je croyais les

    saisir! Cette fois-ci pourtant, javaisbien cru chapper leur perfide influence, leur perscution cruelle,tant javais mis d'e sincrit rechercher le rel, 1 durable.

    Lillusion mavait donc leurr jusquedans ce lieu cart et solitaire! Avecune prudence infinie javais pourtant

    appris dmler le rel de liritel etmaintenant que j pensais avoir acqaaiscet art suprme, art difficile entre

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    LE SENTIER 47

    tous, voil que je devais reprendre lapnible ascension.

    De TiL'irie quau dbut du Sentier,raine ardeur nouvelle vient animer mes

    pas, un nouvel enthousiasme nat enmoi et, comme jadis, devant les souffrances et les chagrins, je me sens au

    jourdhui plein dardeur en face delinconnu, impatient dessayer nouveau mes forces sur linflexible Sentier. Lardeur de la lutte me transporte et je pars la conqute du bonheur souverain et immortel. Le Sen

    tier ne doit plus mentraner; sanstrbucher, je cours prsent sur lechemin. Je ne reste plus en arrire;

    je suis devenu le Matre du Sentier.I l nest plus ncessaire de me stimuler pour que jagisse, car je suis devenu moi-mme l action. Je veux, etje marche librement. Le Sentier

    stend, mille mille, sicle sicle,plus escarp, plus abrupt, plus troitque jamais; il serpente entre des pr

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    48 LE SENTIER

    cipices, laissant en arrire tout lepass.

    Tout l-bas, au-dessous de moi,stend le monde de la dsolation et

    de linfinie tristesse o lIllusion, soustoutes ses formes, sous toutes les apparences possibles, rgit les Forcesdchanes.

    A cette altitude, rgne un silenceabsolu et accueillant; cependant,comime j'avance sans cesse sur le chemin abrupt, la joie nouvelle meurt denouveau en moi, mes pieds fatigus

    se font hsitants comme nagure etjaspire retrouver larbre aim quimavait fait partager son ombre heureuse et les chants joyeux de ses oiseaux; cet arbre fantme ne mavaitdonn quun moment de fugitif bonheur, il est vrai, maisi cette joie toutphmre quelle ft, mavait soulag.

    Je prie les dieux propices de me rendre cet ombrage, ce chant, ce compagnon pour bercer mon cur tour

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    LE SENTIER 49

    ment. Qui que tu sois, Mirage glorieux et chri, souviens-toi du voyageur fatigu qui sest blotti une heuredans tes bras et accueille-le encore

    une fois afin quil oublie et se retrempe nouveau dans ton repos dlicieuxbien quillusoire.

    Exauce-moi, une fois encore, et jete bnirai jamais! J e suis las, viens mon aide, Beaut passagre! Endors-moi par tes faux murmures, encourage-moi par tes flatteries perfides!J e suis puis de fatigue et de supplications et accabl par la dsesprance.

    Au loin, un bouquet darbres entoure une maison riante, au jardinfrais et plein de senteurs. Je prendspart la joie et aux rires de sduisantes beauts. Leurs douces voix etleur musique enchanteresse mapaisent. Cest nouveau la tranquillit,

    le calme, loubli complet. Je me sensheureux, car dans cette demeure, j aitrouv le bonheur poursuivi durant

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    50 LE SENITIER

    des ges innombrablesjai enfin saisila r.aL. Mais, sais-je vraiment satisfait? Naide pas tout ce.que je dsirais? Pourquoi alors souffrir >en-care? Pourquoi lutter encore ? I l y aici un lixir pour le cur malaile, unrconfort pour le malheureux.

    Combien de jonrs .ou de sicles -snis-je rest dans cette phmre demeure;je ne pourrais le -dire; .pourrais-je jamais, en vrit, .valuer les momentsheureux vcus l?

    Mais de nouveau rinextinguible d

    sir reprend vie : dans les replis demon cur il sest .rveill et me torture. Je ne puis demeurer plus longtemps dans .cette maison joyeuse; jeny ai pas trouv le contentementquehe me promettait; il ny a ni bonheur, ni paix pour moi sous -oe tait.J ai t le jouet des illusions. Je me

    suis nourri de mensonges. J avais tattir par la lumire de la fausse rai

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    BE 'SENTIER 51

    son et, comme jadis, j'ai adon dans.un temple de tnbres.

    Ainsi, aprs tant de millnaires,,pris tant defforts, je imtais leurrmoi-mme, et une Jois encore, j avais

    t victime des dieu moqueurs. Devais-je continuer mar cher plus avant,devais-je lenaore affronter linflexibleSentier?

    Une fois de plus, me voil pntrant dans un rayonnement blouissant; une fois de plus, je me sens laforce dentreprendre le long voyage.

    Un nouvel enthousiasme et de nouveaux espoirs me soulvent; mon courage est n nouveau. Le vieux Sentier des sicles sans nombre me souritencore une fois et il promet de memener la Lumire.

    Il me semble que je suis un grandarbre qui, courb par les autans, seredresse quand il est apais et qui,la tte haute, fixe nouveau les cieuxinsondables et dfie le soleil blouis

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    52 LE SENTIER

    sant. Une fois de plus lorgueil delisolement qui mcarte des vainsplaisirs de la foule banale, fait vibrer tout mon tre. La solitude danslaquelle je suis plong est comme un

    vent frais venant de la montagne. Unefois de plus jaspire ardemment triompher de la tristesse et atteindre la libration glorieuse. Heureuxcelui qui lutte!

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    LE SENTIER 53

    TROISIME PARTIE

    Le sentier long et sinueux se droule devant moi sur le chemin dsert, rien ne vit, rien, si ce nest levoyageur. Mon ceur palpite danslattente dune nouvelle victoire, jesuis intrpide comme un conqurantentrant firement dans une ville prisedassaut. J aspire des batailles plus

    srieuses et plus difficiles, et je regrette quelles me fassent dfaut. Soudain un calme solennel et grave obscurcit ma joie et mtreint le cur.

    J e suis comme cras par limmensitet les cieux impitoyables; la gloire etlorgueil de la victoire nexistent plus mes yeux et la terrible solitudemaccable de plus en plus. Mais le

    dsir invincible datteindre au butpersiste toujours en moi, avec la volont indomptable de russir. Depuis

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    I iE SENTIE

    combien de sicles suis-je en route?Ma mmoire obscurcie se refuse ensupporter le nombre;

    Le Sentier est aussi las que celui

    qui le gnaviti et tous deux aspirent auterme, mais la volont' de celui quiconduit est aussi- fier.me que1celle decelui qui est conduit. De chaque ctdu chemin,, ; intervalles, irrguliers,slvent desr. arbres- majestueux quibalancent leur cime angento au soleil, oubliant quils- furent eux-mmes

    jadis, semblables: aux plantes. Des aisseaux de toute espce;, de toute couleur, de toute grandeur y habitent :leurs-, cris joyeux ou plaintifs1nsonrnent mes oreilles qui, depuis delongs; 'gesj- nontl ou: que- le beuit monotone' de- mes pas.

    mon approche, ces joyeuses cratures se sont effarouches; mais elles

    continuent chanter en me regardantavec une suprme indiffrence. SousL'ombrage redout, lherbe se balance

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    HE SENTIER 55

    au rythme du vent jouant parmi lesfeuilles. Larbre vigoureux, les charmante oiseaux, Fherbe' tendre, toutmaC'Cueille et promet de bercer mon

    sommeil. Tout cela est si secret, siparfum, si apaisant pour ma vue fa*-ligue; que je suis sur le point de cder 1la tentation. Mais alors en moisvoque le souvenir dautres arbres,d'autres oiseaux, cP&atres ombrages,aussi' accueillants et dlicieux, maiscombien dcevants-!' Etonn) mon Sentier bien-aim- sourit; observant mes

    faits et gestes pour savoir si-, nouveau, jopterai pour la jouissance; Oh!la fracheur de cet arbre, le dlice deces chants dbiseaux, Ote doux bruissement? d ces feuilles! Ob! laissez-moi me dlasser, ft-ce un instant,avant de reprendre mon chemin!

    Le solei est si; chaudi, et je suis si

    las, et mon coeur est si meurtri parce Ibng voyage! Lombre frache nepeut me faire de mai. O sentier inexo

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    56 LE SENTIER

    rable, accorde-moi cette seconde heureuse! Depuis des sicles jai connutant de nuits sans sommeil; menvies-tu ou me dnies-tu ce moment de repos? Ne peux-tu moctroyer cette faveur unique et digne dintrt? O afui ton amour, ta sympathie infinie?

    J e te supplie, non pas de tloignerde moi, mais dexaucer ma prire.

    Un profond silence rgne. Le venta cess de foltrer dans les feuilles.Les oiseaux sont muets, muets commela mort, et le grand arbre est dans

    une profonde songerie. Lombre sestpaissie, il rgne un plus grand calme et une plus grande fracheur.Lherbe tendre me regarde dun airinterrogateur et cherche, avec ses petites penses la cause de mon hsitation insolite, et chacun de ses brinssusurre un encouragement mon

    adresse. Le Sentier des nombreusesexpriences et de la haute connaissance sourit mes hsitations et mes

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    LE SENTIER 57

    luttes; et dans ce sourire il ny a niencouragement, ni satisfaction. Cestle sourire neutre de la sagesse et dela connaissance, qui me dit : Fais

    ce que bon te semble, mais le repentirest l qui te guette . Mon choix estfait. Tel le brouillard matinal, doucement dissip par les premiersrayons du soleil levant, ainsi le belarbre de la jouissance svanouit graduellement ma vue, les oiseaux chantants prennent leur vole comme lapproche dun lointain orage et

    lherbe verte se dessche aux rayonsardents du soleil. Il ne reste plusquun seul vestige du pass, cest leSentier. I l se prolonge et je le suishumblement. A intervalles irrguliers,le long du chemin soffrent des arbresqui minvitent goter leurs fruitsaromatiques et savoureux et men

    dlecter. Ils adouciraient ma gorgedessche et tancheraient ma soifardente. Mais mon Sentier est rigou

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    58 L E S E N T I R

    reux, et je passer Plus loin, de splendides palais, lieux de plaisirs et dedlices, aux portes toujours grandesouvertes) invitant le plerin fatigu

    entrer. Un sicle, bien des vies mesparent de ces demeures, le voyageurfatigu va*4:-i tre encore une foisvictime de leurs appts? Sans me lasser de leur hospitalit trompeuse quede fois jfavais- hsit leur seuil, ypntrant quelquefois, en sortant avechonte, heureux de marcher nouveaupar le Sentier brl de soleil. J entraisdans cette- maison des passions violentes et gostes, des jouissancesgrossires, des ignominies et je mydlectais de tou* ce quelle pouvaitmoffrir. Souvent aussi, ' pas hsiLtants je passais devant cette demeuredes ombres vaines, devant celle de lasatit, au fugitif bonheur, celle de'

    la flatterie et celle de renseignement*o la connaissance des faits passaigers et faux contente lignorant.

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    LE SENTIER 5

    J tais attir dans la maison deFamour qui limite, qui est goste etmchant', qui oublie tout, except soi-mme, de lamour qui se passionne,

    qui dsire, de lamour limit du pre,de ilft mre, de la; sur, du frre etde* lnfant; de Famour qui' consumelentement et sans piti les plus noblessentiments, de>lamour qui se contente de choses mesquines; Bien desfois- jarvais franchi le seuii de lignorance heureuse, le seuil; brillant de lavaine flatterie; le triste seuil de lanoire haine et de la ruse- trompeuse

    Que de foi javais succomb auxtentations de lintolrance toujoursrenaissante, du patriotisme bruyantqui engendre la haine venimeuse etbelliqueuse, de lorgueil solitaire etglac qui demeure inaccessible^J avaissjourn au1logis de lamiti exclu

    sive et jalouse au logis du vicecach et attrayant, de la fausse sagesse; intransigeante pour tout sauf

  • 7/30/2019 Le Sentier, par J. Krishnamurti

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    GO LE SENTIER

    pour sa propre philosophie mesquine au logis de lenseignement troitqui siait peu de chose, mais qui condamne avec clat tout ce qui est au-

    dessus de sa porte.J avais pntr dans les sanctuairesde bien des religions qui vivent entreleurs murs troits, entachs de superstitions obscures, adorant de fauxdieux, sacrifiant dinnocentes cratures sur leurs autels, sengageant dansdes guerres religieuses futiles et ordonnant datroces perscutions. Errantdans des maisons obscures, jy avaischerch la lumire, je navais fait quemgarer comme un aveugle, hilas !

    Seul, le cher bon Sentier me comprend toujours, alors que la tte basseet la honte au cur, je reviens lui;il maccueille et mie promet dtremon guide et mon ternel ami.

    De chaque ct du long chemin,peuvent surgir des nombreuses tentations sans nombre, sous les formes

  • 7/30/2019 Le Sentier, par J. Krishnamurti

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    LE SENTIER 61

    les plus attirantes. J e ny veux plussuccomber; que dautres se laissentsduire, je veux, moi, suivre mon sentier. Je nprouve plus quun seul dsir, cest celui de me dlasser, de boire

    longs traits la source promise depuis si longtemps et dtancher masoif la fontaine, dans lombre.Mais aussi loin que mon regard seporte, il est retenu par des objetstrompeurs. Une seule fois jai t capable de parler tranquillement et longuement avec mon compagnon soli

    taire, le Sentier; mais il est redevenumuet, touff par le bruit dalentour.Une seule fois a rgn la paix absolue,mais depuis, le silence sacr ne mestplus audible, cause du langage profane de la foule. Cependant, au traversdu tumulte du monde et des bavardages incessants, mon Sentier mentrane toujours, et je le suis sans plusde tergiversations.

    J e ne puis dire pendant combien de

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    62 LE SENTIER

    temps jai voyag dans le :pays de Jafantaisie; un jour pourtant, dans unlan de rsolution virile, ,jai ; enfinadhr mon Sentier. Il .monte tou

    jours, dsesprment, .et moi, les mem

    bres jompus, je continue Je gravir,sans plus m?en carter, ,pe>ur (retournerdans la valle tnbreuse.

    Rendant des sicles jai lutt, rsistant aux .inclinations et aux plaisirspassagers; pourtant sans rtrve .et tou

    jours, surgissent .devant moi, jour ?mesduire, de nouvelles et multiples .for

    mes de tentations. Il est aertain queje ne prtends plus jamais .tre leurvictime, et cependant... 0 dieux-cruels,ny aurait-il jamais une fin cettemisre, cette .dloyaut, t ces dsirs phmres? Depuis combien desicles suis-je en route sur ice Sentierde justice, dont on naperoit pas encore le bout? Le seuil but atteindre

    serait-il donc de mettre mon endurance lpreuve? Non, cela ne peut

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    LB SENTIER

    tre, car autrefois, dans un tempsMen lointain dj, j ai entrevu le commet de lillumination. Mais pendantcombien dincarnations encore devrai-

    je errer dans le chagrin et les tribu

    lations avant datteindre au portailde la Flicit? Sans plainte et sianscuriosit, je sud contraint de (continuer pendant un nouveau sicle -encore gravir le Sentier. Je suis las,mon -cur saigne de toute la misre,de toutes les souffrances que j ai endures.

    Les vains espoirs et les fallacieusespromesses mavaient soutenu, lternel avait pourtant t lobjet de tousmes dsirs; mes ttonnements aveugles pour trouver la vrit avaient tpersvrants et mon enthousiasme ardent et inextinguible. Mon bien-aimSentier ne pourrait-il me mener ausommet de la montagne, comme il mel a toujours promis?

    Aprs une si douloureuse attente, le

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    64 I SENTIER

    Sentier me conduit donc encore lIllusion? Pourquoi? Quai-je fait,quai-je donc omis de faire? Quellesvtilles ai-je ngliges, quels sacrifices devrai-je encore offrir, quellesplus grandes agonies aurai-je supporter? A quelles purifications plusgrandes dois-je encore tre soumis etquelle est lexprience de plus grandes tortures qui mest rserve avantque jatteigne la demeure bnie dela pure Connaissance et du Bonheursacr?

    La mre qui ma port ne savait certes pas ce quelle faisait. Ah! si ellelavait su, le lait dont elle me nourrissait avec tant damour se seraitchang en poison, et maurait pargnces tortures interminables. J e seraisheureux dy mettre fin lheure ducrpuscule; mais nest-il pas enfantin

    de se lamenter contre linvitable?Ma mre bien-aime fut sans reproche, et il est insens de se rvolter

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    LE SENTIER 65

    contre les preuves de lvolution.Cette lutte doit prendre fin, car laporte de la connaissance peut tre atteinte et cest l que doit luire la Lu

    mire qui guide, la Vrit qui apaise,lenseignement qui donne le bonheurparfait sans mlange.

    Oh! je ne puis gmir davantage,mon corps est trop dbilit pour rsister plus longtemps au chagrin, maforce va dclinant peu peu, montre entier se rebelle contre ce vide

    cruel. Dieu ne peut-il jeter un regardcompatissant sur le voyageur solitaire et puis?

    Matre de la Sagesse, prenez-le enpiti, dispensez-lui de cette grce infinie qui seuie peut gurir et apporter la lumire celui qui titube dansles tnbres. O vous, nuits fraches,obligez le soleil ardent sloigner

    dici et vous, sombres nuages, voilezses: rayons brlants. O sont, la fortemain qui pourrait me conduire et me

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    66 LE SENTIER

    soutenir, la voix qui saurait me rconforter et m'encourager, le baiserque me ferait oublier? Suis-je doncabandonn? Et dune voix mourante

    je jette un appel suprme.Le silence absolu seul me rpond.Mon Sentier bien-aim me sourit

    avec piti, et partout, mme dans lesmaisons bruyantes, rgne le calmeinquitant dume nuit o se perptrerait un crime, ou lorsque les mchoires pesantes des tombes sentrou-vrent en un billement forc.

    A bout de force, je chancelle. La finde mon existence est proche. Dansma pense jai la vision dun ciel orgnerait la paix parfaite, dun gtedlicieux pour le voyageur fatigu.Pendant combien de sicles encoredevrai-je endurer cette douleur dansmon mental, cette mare continuelle

    de mcontentement, ces reliquats dupass, ces souffrances dans mon corps?Hlas! je ne saurais le prvoir...

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    LE SENTIER 67

    Aussi loin que ma vue peut aller jenaperois que des choses illusoires.A chaque pas grandit pourtant en moila conviction que le terme du long

    voyage se fait plus proche; tel unbateau prs dui havre. Puissent lesdivinits qui nous guident me pousser vers ma destination!

    Soudain latmosphre est devenuecalme, sans un souffle comme dansun moment de solennelle attente, etle silence rgne, pareil celui qui

    suit an beau coucher de soleil, alorsque le monde entier est plong dansune muette adoration.

    Cest un silence profond pareil celui dane nuit toile lorsque lestoiles distantes senvoient des baisers travers l'immensit. Il rgneune aocataie inusite pareille unebrusque fin dorage; on prouve une

    paix immense, comme si lon taitdans le parvis dun temple sacr.

    En moi, la douleur et la tristesse du

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    pass sont en partie endormies, etcomme mes yeux se ferment, un murmure lger et doux flotte dans lesairs. Toutes les choses animes et

    inanimes se reposent de leur labeur.Le monde entier est plong dans unrve pacifique. Le soleiil, dont les.rayons brasillants mont impitoyablement brl durant tant de sicles, estsoudain pitoyable, et une fracheurpareille celle des profondes fortsstablit alentour. La Divinit a prisforme au dedans de moi. Toutefois le

    Sentier est devenu beaucoup plus escarp, et pniblement jen continuelascension ardue. Tandis que je gravis cette colline, les demeures innombrables de la concupiscence et cellesdes passions svanouissent; les arbres verts se font de plus en plus rares et comme jatteins au sommet, les

    attraits du monde disparaissent sansretour...Le Sentier monte toujours en droite

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    LE SENTIER 69

    ligne, mais lair est devenu plus frais,lascension plus aise. Une force immense emplit mon tre, et javanceavec un enthousiasme croissant.

    Au loin, l-bas, mon Sentier se

    montre moi au travers dun bosquet. J e nose regarder en arrire, nide ct, car le Sentier est devenudangereusement troit.J e franchis ce pas prilleux comme

    dans un songe, les yeux fixs sur lavision lointaine, regardant peine oje marche. J e suis dans une extase

    indicible, car la vision voile quibrille devant moi, emplit mon medun ultime et immense espoir. Dunpas lger, je prcipite ma marche,craignant que lheureuse vision ne sedissipe et ne mchappe comme celamest arriv tant de fois dj...

    Il ny a pas dautre plerin devantmoi, et pourtant le Sentier est doux,uni et pour ainsi dire us par lesmilliers de pas qui lont foul pendant

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    des ges innombrables; il brillecomme un miroir. Il est glissajai. Jele gravis comme en songe, craignantde me rveiller de mensongresralits. La vision reste claire et se

    fait plus nette mesure que japproche avec rapidit.Les dieux pitoyables oat enfin r

    pondu lappel que, dans ma solitude,je leur avais fait. Ma longae et tristeodysse touche sa fin et 1 glorieusetape est proche.

    Bien loin eo avant, souvrent dautres sentiers et dautres portes o jefrapperai dun cur joyeux et avecplus dassurance. De cet endroit, jepuis dnombrer tous les Sentiers quise droulent devant moi. Ils convergent tous vers un mme point* bienquils soient spars par de grandesdistances : nombreux sont les plerins en marche sur ces sentiers soli

    taires. et chacun deux se sent fier de

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    sa solitude aveugle et de sa sparati-vit insense.

    Comme moi, ils se sont fourvoysdans, leur petit sentier personnel,abandonnant et repoussant la grand

    route.Bans leur ignorance ils luttent

    laveuglette, marchant dans leur propre ombre, sattachant leurs petitesvrits qu'ils appellent opinitrementla Grande Vrit. Mon Sentier, quima guid travers les contres hrisses de montagnes, reste mes cts.

    En versant des larmes de bonheur, jecontemple ces voyageurs harasss.Mon bien-aim, mon cur est bris cette vue cruelle, car je ne puis redescendre pour leur dispenser le breuvage divin qui seul tancherait leursoif dvorante.

    Cest par eux-mmes quils doiventdcouvrir la source ternelle. Mais, Biecix damour, ne pourrai-j au moinsrendre leur sentier plus doux et all

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    ger les souffrances et la tristesse quilsse sont cres eux-mmes par leurinconscience et leur indolence?

    Venez tous, vous qui tes affligs,et entrez avec moi dans le Temple de

    la Connaissance et dans les oasis delimmortalit. Contemplons la lumireternelle, la lumire qui pand lapaix, la lumire qui purifie. La radieuse vrit brille, resplendissante,et nous ne pouvons pas demeureraveugls plus longtemps, ni continuer marcher ttons dans les rgions

    tnbreuses. Notre soif alors seratanche jamais car nous puiserons la fontaine de la Sagesse.

    Je suis fort, je nhsite plus. La divine tincelle a jailli en moi. Dansun rve lucide, jai contempl le Matre de toutes choses et je rayonne desa joie ternelle. Je plonge mon regard dans l Ocan sans fond de laConnaissance et jen contemple tousles reflets. J e suis une pierre du tem-

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    pie Sacr. J e suis lhumible brin dherbe fauch et foul aux pieds. Je suislarbre grand et droit qui fait sa couraux cieux. Je suis lanimal pourchass.

    Je suis le criminel honni de tous. Je

    suis le noble honor par tous. J e suisla tristesse, le dsespoir, le plaisirdune heure, les passions, les jouissances, la rancune amre et la compassion infinie et tout la fois le pch et le pcheur. J e suis lamant etle vritable amour lui-mme. Je suislamour mme. Je suis le saint, lado

    rateur et le croyant. Je suis Dieu.J . Kr ishna mur t i.

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    H y m n e d e t i n i t i T r i o m p h a n t

    J ai demeur en Ta sainte prsence,J ai vu la splendeur de ta Face,Je me prosterne Tes pieds sacrs,Je baise le bord de Ton vtement,J ai isenti la gloire de Ta beaut,J ai vu Ton regard serein.

    Ta sagesse a ouvert mes yeux ferms,Ta paix ternelle ma transfigur,Ta tendresse, la tendresse dune mre

    pour son enfant, dun matre pourson lve, je lai sentie.Ta compassion pour toute chose, vi

    vante et non vivante, anime etinanime,, je rai sentie.

    Ta joie, indescriptible, ma fait tressaillir,

    Ta voix ma fait entendre de nom

    breuses voix,Ton toucher a veill mon cur,

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    76 LE SENTIER

    Tes yeux ont ouvert les miens,Ta gloire a fait briller la gloire en moi.

    0 Matre des Matres, jai ardemmentaspir cette heure' bienheureuse

    o je serais en Ta sainte prsence,Et elle ma t enfin donne.

    Je suis heureux,Je suis paisible, paisible comme le

    fond dun lac bleu;Calmle comme le sommet vtu de neige

    au-dessus des nuages orageux.J ai ardemment aspir cette heure :

    elle est venue.Je suivrai humblement la trace de Tes

    pas le long de ce sentier que Tespieds sacrs ont foul.

    J e servirai humblement le monde, cemonde pour lequel Tu as souffertet pein, pour lequel Tu tes sacrifi.

    Je lui apporterai Ta paix.

    J ai ardemment aspir cette heure :elle est venue.

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    LE SENTIER 77

    Ton image est dans mon cur.Ta compassion brle en moi.Ta sagesse me guide.Ta paix millumine.

    Ta tendresse ma donn le pouvoir dusacrifice.

    Ton amour ma donn la force.Ta gloire pntre mon tre tout entier.J ai soupir aprs ce moment : il est

    venu dans toute la splendeur dunglorieux printemps.

    Je suis jeune comme le plus jeune,

    Vieux comme le plus vieux.J e suis heureux comme un amant

    perdu, car jai trouv mon amour.

    J ai vu.J e ne pourrai jamais tre aveugle,

    mme aprs des milliers dannes.J ai vu Ta divine face partout, dans

    la pierre et le brin dherbe, dans

    les pins gants de la fort, dans lereptile et le lion, dans le criminelet le saint.

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    78 LE SENTIER

    J ai ardenaaaoeni aspir ce momentmerveilksax : il est ven>a et je laisaisi.

    J ai demeur en Ta prsence.J ai va la splendeur de Ta face.Je me prosterne Tes pieds sacrs.Je baise le bord de Ton vtement.

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    RENSEIGNEMENTS

    La Socit thosophique est un orga-nisme compos dtudiants appartenant,ou non, lune quelconque des religionsayant cours dans le monde. Tous sesmembres ont approuv, en y entrant, lestrois buts qui font son objet; tous sontunis par le mme dsir de supprimer leshames de religions, de grouper les hom-mes de bonne volomt, quelles que soient

    leurs opinions,

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    80 RENSEIGNEMENTS

    Us tendent la tolrance tous, mmeaux intolrants, estimant que cette vertjiest une chose que lon doit chacun etnon un privilge que lon peut accorder au petit nombre. I ls ne veulent point pu-nir lignorance, mais la dtruire. I ls con-

    sidrent les religions diverses comme desexpressions incompltes de la Divine Sa-gesse et, au lieu de les condamner, i lsles tudient.

    L eur devise est Paix; leur bannireVrit.

    La Thosophie peut tre dfinie commel ensemble des vrits qui forment la basede toutes les religions. Elle prouve quenulle de ces vrit ne peut tre revendi-que comme proprit exclusive duneglise. Elle offre une philosophie qui rendla vie comprhensible et dmontre que la

    justice et lamour guident lvolution dumonde.' E lle envisage la mort son vri-table point de vue, comme un incidentpriodique dans une existence sans fin etprsente ainsi la vie sous un aspect mi-nemment grandiose. Elle vient, en ra-lit, rendre au monde lantique scienceperdue, la Science de lAme, et apprend lhomme que lme cest luimme, tan-

    dis que le mental et le corps physique nesont que ses instruments et ses serviteurs.Elle claire les Ecritures sacres de toutesles religions, en rvle de sens cach, et

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    RENSEIGNEMENTS 81

    les justifie aux yeux de la raison comme ceijx de lintuition.

    Tous les membres de la Socit thosophique tudient ces vrits, et ceux

    dentre eux qui veulent devenir Thosophes, au sens vritable du mot, sef-forcent de les vivre.

    Toute personne dsireuse dacqurir lesavoir, de pratiquer la tolrance et dat-teindre un haut idal, est accueillie avec

    joie comme membre de la Socit thosophique.

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    SOCIETE THBOSOPHIQUEQuartier gnral: Adyar (Madras), Indes.

    Prsidente : Atiliie B ss j ln .

    SIEGE DE LA SOCIETE THEOSOPHIQUE

    DE FRANCE4, square Rapp, Paris (V //B).

    BUTS OE LA SOCIT

    1 Former nu noyau le fraternit danslhumanit, sans distinction de sexe, derace, de rang ou de croyance ;

    2 Encourager l tude des religions com-pares, de la philosophie et de la science;

    3 Etudier les lois inexpliques de lanature et les pouvoirs latents danslhomme.

    Ladhsion au premier de ces buts estseule exige de ceux qui veulent fairepartie de la Socit.

    Pour tous renseignements sadresser auSecrtaire gnral, au Sige de la Socit,tous les jours de 3 6 heures, sauf ledimanche.

    COURS CONFERENCESBIBLIOTHEQUE LIBRAIRIE

    Au Sige de la Socit : 4, square Rapp.Le Sige de la Socit est ouvert tous

    les jours de la semaine de 3 6 heures.Prire de sy adresser pour tous rensei-gnements.

    SOCIETE THEOSOPHIQUE BELGE45, rue de Luxum, Bruxelles (Belgique).

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    LA FAMILLE TOSOPHIQUE S. A.

    4, Square Rapp, Paris (7)

    ETUDE GtfUDUEE

    de lBnseignement Thosophique

    E x t r a i t d u Ca t a l o g u e

    Ouvrages lmentaires

    Annie B esant. Introduction la Thosophie...................

    La Ncessit de la Rin-carnation ......................................

    G. C h e v r i e r. - La Thosophie,ses origines et ses loi fonda-mentales. ....................................

    C. W. L eadbeateh. Une Es-quisse de la Thosophie.

    Prcis de Thosophie.........Docteur Th. Pas c a l . La Tho-

    sophie en quelques chapitres.Aime B l ec h . A ceux qui souf-

    frent ...............................................L e C l e r c . L a T hosoph ie en

    25 leons ......................................I . C o o p e r . I :a R i n c arn a ti on . .

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    Ouvrages dinstruction gnrale

    J .C. C h a tte r j i . La Philoso-phie sotrique de lI nde.........

    Annie B esant. La Sagesse an tique ....................................

    Avenir imminent ............... Le Christianisme sot-

    rique .................................... LHomme et ses cor ps... Le Pouvoir de la pense.. La Vie occulte de lHomme

    A.P. S innet t . Le Bouddhismesotrique .........................

    Le Monde occulte .............C. W. L eadbeater . LOccul-

    tisme dans la Nature...

    Les Matres et le Sentier.C. J i n ah ajadasa . LEvolution

    occulte de lHumanit..t Les Premiers enseigne-ments des Matres ...................

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    Annie B esant. La Mort et lAudel ....................................

    La Rincarnation ............. Le K arma ............................ Le Monde de demain........ Le Pouvoir de la Pense.. Les Matres et luvre

    thosophique ................... Etude sur la conscience.. Evolution de la vie et de

    la forme .......................... La gnalogie de lhomme. Des Religions de lI nde...

    C. W. L eadbbater . Le Planastral ..................................

    Les Aides invisibles........... Lautre ct de la Mort.. De la clairvoyance............. Echappes sur lOccultisme Le Monde cleste ............. Le Plan mental ................. Le Credo chrtien............... L. R evei.. Vers la fra-

    ternit des R eligions...H. P . B l av a ts k y . Doctrine se-

    crte (6 vol.)................... Abrg de la Doctrine se-

    crte .................................... Premiers pas sur le che-

    min de lOccultisme....

    Ouvrages dinstruction spciale

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    Ouvrages dordre thique

    Annie B esant. Vers, le Temple. Le Sentier d Disciple...

    A l cy o ne. A ux pied d* Matre.H. P. Bl avat sxy.. L* Voix du

    Silence ......................................M. C. L a Lumire smr le SentierLa Bhagavad Glt ........................Neuf Upanisbads ............................

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    CATALOGUE GNRAL

    contenant les vn1Heurs ouvrages sur :

    L Esotrisme.

    La Littrature Orientale.

    Le Mysticisme.

    LOccultisme.sLes Philosophies.

    Le Psychisme.

    Les Religions.

    La Sociologie.La Thosophie, etc., etc.

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