Le cliché anthropométrique, une construction photographique de l'inhumain
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Le clicheanthropométrique,Une construction photographique
de l’inhumain.
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Comment une photo peut-elle déshumanisercelui qu’elle représente ?
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Guide pour l’analyse d’image
Qui est représenté ? Comment le définir ?
Est-ce que cette image nous en rappelle d’autres ? (intericonicité)
Ou, quand, comment et pourquoi cette photo a été prise ?
Est-ce que la personne a pris la pose ?
Ou est-ce que la photo a été prise sur le vif ? (instant décisif d’Henri cartier-bresson)
Quel est le role du photographe ? Au nom de qui agit-il ?
Quelles sont les caractéristiques de la photo (cadrage, luminosité, netteté) ?
Quelle est la place du spectateur ? Quel est le destinataire de l’image ?
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image a analyser
analyse de l’image
Ou ?
Dans des locaux de police, image policiere/judiciaire
Quand ?
Photo en noir et blanc d’une personne qui ne porte pas des habits contemporains
Photo ancienne
Mais le fond neutre témoigne d’un protocole visant une décontextualisation
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LA PRÉSOMPTION DE CULPABILITÉ
qui ? Pourquoi ?
Une personne qui a été arretée, soupconnée d’un crime ou d’un délit
Connotation stigmatisante
intericonicité ?
Référence a l’imagerie des films américains
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LA photo anthropométrique
Le voleur a la tire, fiche anthropométrique vers 1875
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Le portrait robot, autre figure prototypiquedu coupable
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Jouer au coupable
Sur internet, on peut faire son propre portrait robot
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La dépersonnalisation induite par le portraitrobot
Le visage est morcelé, disséqué.
Lieu de l’individuation et de la personnalité (le regard comme miroir de l’ame), le visage est mis amal.
Le sujet est réduit a son apparence physique.
Il est considéré comme un objet (objectivé).
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Retour au cliché anthropométrique
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La pose du modele
Il n’est pas pris sur le vif.
La pose de face et de profil permet d’appréhender le suspect sous différentes facettes.
Le visage est inexpressif pour viser une hypothétique neutralité.
Le modele n’est pas en interaction avec le photographe (pas d’adresse visuelle ni gestuelle, aucunemarque d’interlocution).
Le corps est instrumentalité (le dos est maintenu, sans doute par une chaise).
Ce protocole exerce une contrainte sur le corps photographié.
Le numéro d’identification contribue a la déshumanisation.
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La chaise anthropométrique
Chaise anthropométrique, vers 1890
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Le photographe, un simple opérateur
Ici, le photographe se contente de faire fonctionner la machine photographique suivant unprotocole imposé :
- Cadrage centré
- Luminosité neutre
- Netteté
- Frontalité
- Appareil tenu a hauteur de regard (pas de plongée ni contre-plongée)
- Distance par rapport au sujet
- Fixité de l’appareil comme du photographe
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Photographier au nom de la justice et de lavérité
On peut utiliser deux notions pour décrire ce protocole :
- Beat munch parle d’une série de « conventions d’objectivité ».
- Henri boyer parle lui d’un « principe de scription » impliquant un degré minimal d’engagement del’énonciateur.
Le photographe se contente de remplir un formulaire rpet-a-photographier.
Il produit un compte-rendu photographique.
Il rédige en image un rapport, un constat clinique.
Le photographe agit ici au nom d’un collectif porté par une volonté de justice et de vérité.
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L’effacement énonciatif
Meme si l’image est anthropocentrée, le corps du photographe est forclos, il est hors champ,contrairement a ce qui se passe sur cette photo ou apparait sa main :
Libération du 5 janvier 2007, Crédit photo jean-francois marin
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désengagement du photographe
Aucun effet de style ne permet au photographe d’affirmer son regard d’auteur, son engagement, son« concernement » (christian caujolle).
Dans cette image regne l’Anonymat, la dépersonnalisation, le nobody’s point of view, ou encore lenobody’s shot (slogan de CBS news dans les années 80).
Seule la reconnaissance de ce qui est photographié (l’imprégnant) compte.
Le photographe est censé etre un pur intermédiaire, un témoin, un relais transparent.
Il n’endosse aucun role réflexif ou médiateur.
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Une photographie sans personne
« c’est ainsi au prix d’une dépersonnalisation délibérée du sujet (et du photographe réduit àl’anonymat d’un appareil fixe et mécanique de prise de vue), qu’on objectivise les traits
distinctifs d’une physionomie. » (eric landowski, 2007)
« cette restitution neutre de la ressemblance physique engendre ses propres déformations etsurtout suscite une forme spécifique de conformation de l’expression individuelle aux exigencesprésumées du dispositif, une rétractation de l’air personnel, de l’intimité psychologique, pour
laisser affleurer uniquement les caractéristiques physiques du visage. A force de vouloir imposerla vérité d’une photographie sans portrait, on en est arrivé pour ainsi dire a une photographie
sans personne. » (sylvain maresca, 1998)
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La place du spectateur
cette photo est faite par et pour l’institution policiere et judiciaire.
Aucune place ne nous est ménagée : ni le photographe ni le modele ne s’adressent a nous.
Nous portons donc un regard intrusif sur ce dispositif dépersonnalisant et déshumanisant.
Conclusion :
Un corps présumé coupable est soumis par l’institution judiciaire a l’examen d’un appareilphotographique.
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Gare au fake !
Pourtant, il ne s’agit que d’un simulacre. Voici la légende qui accompagne cette photo :« alexandre lacassagne, fiche de l’identité judiciaire et photographies face/profil selon laméthode d’alphonse bertillon, paris, 9 mai 1891 (coll. Part.). Spécimen sans doute amicalement
réalisé par bertillon lui-meme. »
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La photo comme preuve, vraiment ?
Comme l’explique philippe dubois, la photographie est seulement une preuve d’existence.
elle ne peut etre une preuve de sens.
Preuve d’existence : un homme s’est bien tenu la, devant l’appareil photo
La photo ne peut attester de la véracité d’un énoncé :-la police prend un cliché d’un présumé coupable (un examen judiciaire, pour de vrai)
-alexandre lacassagne se prete au jeu (entre amis, pour de faux)
Pour ces 2 affirmations, cette photo est seulement une illustration plausible.
Elle peut prouver le faire semblant comme son contraire.
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Alexandre lacassagne 1843-1924
Élu au début des années 1880 professeur de médecine légale a la faculté de médecine, il développependant plus de 40 ans, a lyon, des recherches sur la criminalite qui font de lui l’une des
principales figures de l’anthropologie criminelle.
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Alphonse bertillon
Le travail d’alexandre lacassagne se nourrit de l’anthropométrie développée par son ami alphonsebertillon a partir des années 1880 au sein des services de la préfecture de police de paris.
La photographie naissante est vue comme un outil d’identification imparable.
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L’anthropométrie criminelle
But : produire une fiche signalétique complete des individus condamnés, pour permettre, a partir dufichier rassemblant tous les signalements, de croiser les données et d’identifier les auteurs de
crimes et délits.
Procédé ; mesure du corps (écartement des yeux, largeur du front, taille des membres, etc.)
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Le laboratoire de bertillon
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bibliographie
artieres philippe et corneloup gérard, le médecin et le criminel, alexandre lacassagne 1843-1924.Bibliotheque municipale de lyon, 2004. Catalogue d’expo
Boyer henri, « scription et écriture dans la communication journalistique », in charaudeaupatrick (dir.), la presse, produit, production, réception. Paris, 1988.
Dubois philippe, l’acte photographique et autres essais. paris, nathan, 1990.
Landowski eric, « flagrants délits et portraits », in semprini andrea (dir.), analyser lacommunication 2. Paris, l’harmattan, 2007.
Maresca sylvain, « les apparences de la vérité ou les reves d’objectivité du portraitphotographique », in terrain, mars 1998, numéro 30.
Munch beat, les constructions référentielles dans les actualités télévisées. Berne, Peter lang,1992.