Le Choco, l'autre Colombie - Numero 1 - Mars 09

8/9/2019 Le Choco, l'autre Colombie - Numero 1 - Mars 09

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ditorialPar Olivier LAGARDE

Lobjet de ce bulletin virtuel est de faire connatre, travers mon exprience devolontariat, les conditions de vie de cette rgion si particulire de Colombie.

En France, bien peu de personnes connaissent le Choc, et moi-mme naurait pule situer sur une carte avant de travailler ici!Cest pourquoi lide est avant tout de raconter, simplement raconter uneexprience auprs de vous, donateurs ou sympathisants, voire de diffuser un peuplus largement linformation.

Ce bulletin sera dsormais rgulier, autant que faire se peut, et sera intgr moyenterme au sein dun outil de communication plus labor, savoir la cration dunsite Internet complet ddi au Comit de soutien aux populations du Bas Atrato.

Dans les futures ditions galement, quelques rubriques apparatront au fur et mesure de mes expriences, comme pourquoi pas des portraits dhabitants oudacteurs communautaires, des aspects plus culturels, voire la divulgation du secretde quelques recettes localesvos suggestions sont aussi les bienvenues

Bonne lecture.

B u l l e t i nd in format ionsaux donateurs etsympathisants duC o m i t d es o u t i e n a u xpopulations duBas Atrato.

LE CHOC: LAUTRE COLOMBIE

Numro1-Mar

s2009


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En arrivant sur ce territoire pour la

premire fois, une chose qui frappeest ltendue de la fort. Et ce

dautant plus que lunique moyen, ou

presque, de voyager entre Bogot et

le Choc est lavion. Ds lors, on

comprend limportance de la place

de la nature dans cette rgion avant

mme dy avoir pos le pied!Le Choc est recouvert en quasi-

totalit dune fort plus ou moins

dense selon les endroits, stalant de

la frontire avec le Panama au Nord

jusquau dpartement du Valle delCauca au Sud, en longeant lOcan

Pacifique lOuest et en bordant la

rgion dAntioquia lEst.

Cette fort, la selva , estl i ttralement creuse par de

nombreux fleuves, qui eux-mmes

jettent leurs bras au plus profond du

territoire, pour former un espace

aquatique tentaculaire. Le Choc est

une des rgions au monde qui

d i s po s e de l a p l u s g ra n de

biodiversit naturelle, cest aussi

lune des rgions les plus arroses.

L e s d p l a c e m e n t s s e f o n tessentiellement en longues barques

moteurs, qui sillonnent les rivires

et pntrent dans les affluents

lintrieur de la fort. Les populations

vivant soit le long du fleuve, soit

dans des endroits plus difficiles

daccs, mais dans tous les cas en

pleine adquation avec leau et la

nature.

Malgr sa beaut, la rgion semble

parfois assez inhospitalire, surtout

en pr iode de fortes plu ies.Riosucio, municipalit de lAtrato et

site bien connu du Comit, est

inond une bonne partie de lanne.

Les habitants ayant apprivois

depuis dj bien longtemps le fleuve,

un systme de planches (plus ou

moins larges et solides) permet de

circuler dans la petite ville, au

dessus de leau. Le tout est dy aller

doucement au dbut et de respecter

le code de circulation tacite, savoir de laisser passer les

personnes charges et, pour ma part

en tous cas, pas plus de 2 sur lamme planche sous peine de perte

dquilibre ! Au-del de faire rire lesplus avertis, la chute peut tre

douloureuse!Malgr tout, et malgr des

conditions de vie imposes, en

partie du moins, par la rigueur du

climat, le fait de voyager chaque

mois dans cette rgion est trs

rafrachissant, et je ne pense pas

exagrer beaucoup en disant quil

sagit rellement dune autreColombie.

Forts et rivires...aux confins du Choc

La selva, est littralement creuse par de nombreux fleuves,qui eux-mmes jettent leurs bras au plus profond du territoire, pourformer un espace aquatique tentaculaire.

LECHOCL

AUTRECOLOMBIE


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Une finca , en Colombie, est un terme trs utilis et trs large de sens : cela peutdsigner une maison secondaire dans la campagne mais aussi une ferme traditionnelle ou

tout autre terrain ddi llevage et/ou lagriculture.

ASCOBA, qui regroupe une cinquantaine de Conseils communautaires du Bas Atrato,

est en train dexprimenter une forme de production respectueuse de lenvironnement et quiprofiterait, terme, la collectivit des villages avoisinants.

Sur une petit terrain lintrieur de la foret, dans la Communaut de Mancilla, ASCOBA

possde un levage dune vingtaine de vaches pturant librement, quelques poules et

cochons, mais aussi une parcelle pour cultiver le platano et le riz.

Lide serait dintgrer cela une rserve de poissons, mais cela demande beaucoup

dentretien et une certaine connaissance technique.

Ceci est un exemple de projet productif dvelopp par ASCOBA, dans le but de se

rapproprier la terre en tant que mre nourricire, et que cela profite aux Communauts.

La Finca exprimentale dASCOBA

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Champs de Palme


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LECHOCL

AUTRECOLOMBIE Le manque de moyens

face aux situationsdurgences.

Les conditions naturelles, la

pauvret, ou encore le conflit

rendent la vie gnralement difficile

au Choc.

Lors de mes premires visites,

jai pu me rendre compte assez

rapidement quen cas de situations

rclamant des soins particuliers ou

importants, tout cela rend le malade

extrmement vulnrable.

Cest notamment le cas pour

les femmes enceintes. Il y a un

centre de sant Riosucio mais qui

dispose de bien peu de moyens.Pour une chographie par exemple,

il faut aller jusqu Turbo,

lembouchure du Golfe dUraba et

porte de sortie vers les Carabes.

Or, dj en temps normal, le voyage

nest pas toujours agrable. Dans le

Golfe, le bateau claque sur leau, le

courant est souvent fort pour ces

frles embarcations, et surtout il est

difficile dtre laise quand on voit

quel point il est rempli. Sachantquil faut compter 3h de navigation

entre Riosucio et Turbo, le voyage

est souvent un enfer pour les

femmes enceintes, et peut entraner

des complications, le terme ntant

qu quelques semaines.

Autre exemple, plus extrme,

est une situation vcue lorsque lon

revenait vers Riosucio, en Fvrier,

alors que nous tions dans une

communaut.

N o u s t i o n s d a n s l a

panga (petit bateau rapide,

ut i l is notamment pour les

transports publics), la nuit taiten train de tomber, quand nous

avons aperu au bord du fleuve un

attroupement de villageois nous

faisant signe de nous arrter, ce

que nous avons fait. L, un homme

tait allong dans une barque,

bless gravement, un arbre lui tait

tomb dessus en travail lant,

laccident stait produit le matin

dans la foret. Il avait une jambe

littralement tranche au niveau du

haut du tibia. Nous lavons donc

transport jusquau village suivant

o, par chance, il y avait un

mdecin (un volontaire du SCD

galement, que je connais et qui

travaille Riosucio!). A la lueur

dune simple lampe torche et mme le bateau, il lui a prodigu

les premiers soins pour calmer la

douleur et surtout viter une

infection, qui aurait pu lui tre

fatale. Aprs 45 minutes environ de

soins, par des t ransfu sions

n o t a mme n t , l h o mme t a i t

calm , et nous avons pureprendre le fleuve pour le

transporter au centre de soins de

Riosucio, do il allait partir lelendemain pour Turbo, pour un

t ra i t emen t p lus spc i fique ,

impossible dispenser l o nous

tions.

Il ne sagit pas ici de faire dans

le sensationnalisme (ce nest pas le

bu t de c e bu l l e t i n ) , ma i s

simplement raconter une histoire

v c u e , e t q u i r e fl t e

dramatiquement les conditions

extrmes engendres par une

situation durgence.

Sachant quil fautcompter 3h denavigation entreRiosucio et Turbo, levoyage est souvent unenfer pour les femmesenceintes, et peut

entraner descomplications, le termentant qu quelquessemaines.


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LECHOCLAUTRECOLOMBIE La restitution des terres, un dfi

primordial pour le ChocQue lon parle de conflit arm ou de conflit social, la

terre en tant que telle est llment central des

problmatiques du Choc.

De nombreux terrains, proprits des communauts

noires, indignes ou mtisses de la rgion, ont t

vols ces derniers par les acteurs du conflit des

fins conomiques et/ou stratgiques, provoquant uneviolat ion des droits fondamentaux et des

dplacements forcs massifs.

En Fvrier dernier, alors que nous tions Riosucio,

nous avons t appel afin dassister une restitution

de terres dans les Communauts de Cetino et

Caracoli, 2h de panga environ. Il sagissait duneremise officielle de terres leurs propritaireslgaux, aprs des annes dusurpation et un

dplacement forc par une entreprise de culture de la

palme africaine (un des principaux flaux de la

rgion). Cette entreprise ayant coul quelques mois

plus tt, les populations vont pouvoir reprendre leursterres.

Etaient prsents sur place des membres des

ministres de lAgriculture (dont une quipe

communication), de lIntrieur, des leaders

communautaires de la zone, les villageois bien sr,

des ONG ou associations travaillant auprs des

communautset seul au monde le reprsentant de

lentreprise charg dtre prsent, et qui avait de plus

2 ha de terrain qui taient lui dans le lot. Aprs lecture de lacte officiel de restitution par les

reprsentants de lEtat, une discussion a eu lieu entre

les participants et ladministrateur. Ce dernier a tent

de sauver sa part, avec tout le culot quon peut lui

reconnatre pour le coup, en sapitoyant sur le fait que

si on lui enlevait a, il ne lui resterait plus rien pour

vivre avec sa famille. Os lorsque lon sait quil tait

face des personnes dplaces avec violences

quelques annes plus ttLEtat, dans ce cas et via

ses reprsentants, a jou le rle minimum

dentremetteur mais se refuse tre arbitre dans la

conciliation. Lacte indique dailleurs que la

Communaut nest pas en droit de demander des

rparations au titre de la spoliation, mais quelle peutrcuprer ces terresla nuance est importante.

Le fait de laisser entrepreneurs et villageois rgler la

situation postrieure la restitution peut engendrer

des pressions ou des menaces sur ces derniers.

Preuve en est, le lendemain, alors que nous

assistions une autre remise de terres un peu plus

loin, nous avons (et les reprsentants de lEtat par la

mme occasion) t tmoins de ce genre de

menaces dont les Communauts se plaignent si

souvent. Alors que lon commenait les mesures par

GPS du terrain restituer, 2 hommes (dont le

grant

dun levage dont nous venions detraverser le pturage, terrain lui appartenant selon lui)

se sont approchs du groupe en le filmant, ce qui

constitue une menace relle pour les habitants de la

zone inquiets de reprsailles. Larme, travers

quelques soldats posts l pour surveiller la zone en

temps normal, na pas boug. Devant linsistance de

ladministrateur et malgr les parlementassions entre

lui et les reprsentants de lEtat, le groupe est

retourn au village, laissant les seuls technicienspoursuivre le travail de mesures. Ce genre de

menaces, de provocations comme disent les

habitants est frquent selon eux, et dmontre le

caractre pesant de cette prsence illgale.


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