La Russie d'Aujourd'hui

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Ce supplément est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta (Moscou, Russie) qui assume seule l'entière responsabilité de son contenu Distribué avec Mardi 28 juin 2011 L’appel du vert Les Russes plébiscitent plus que jamais leur datchas, ces modestes résidences secondaires traditionnelles. P. 8 Récits des îles Solovki : victimes et bourreaux Un récit sur l’ancien goulag met côte à côte les souvenirs des occupants de ce lieu de légende. P. 7 Il faut décentraliser, arracher le pouvoir et les affaires des pattes des bureaucrates, estime Dmitri Medvedev. Mais le président russe avoue n’être pas certain de pouvoir atteindre ce but. Mission impossible ? PAGE 2 PAGE 5 Survivre à Gazprom L’ethnie des Nénètses a résisté au froid et à l’assimilation forcée par les autorités sovié- tiques. Aujourd’hui, elle tente d’exister malgré l’extension de l’exploitation gazière. Moscou pousse trois projets d’appareils destinés à relancer l’aviation civile russe, dont le pre- mier est déjà commercialisé. Quitte à défier les géants internatio- naux Boeing et AIrbus. Défi aéronautique PAGE 4 Un activiste écolo part en guerre contre le plastique PAGE 8 LAISSEZ-NOUS VOUS PRÉSENTER LA RUSSIE ! 28 Juin/ 26 Juillet www.larussiedaujourdhui.be tous les derniers mardis du mois dans Le Soir © ALAMY/LEGION MEDIA SUITE EN PAGE 2 Champion du recyclage dans un pays qui le pratique peu, Roman Sablin s’est rendu célèbre à Moscou en transformant son ap- partement du centre-ville en vi- trine d’un mode de vie radica- lement vert. La visite est ouverte à tous les Moscovites soucieux de l’environnement. Le championne russe de plon- gée en apnée Natalia Avseïenko se prépare à plonger dans l’Arc- tique pour une nage avec deux PHOTO DU MOIS La nageuse nue et les Bélougas Le miracle russe vient à la dernière minute Strelka, une ancienne friche in- dustrielle reconvertie en galeries d’art très courues ; la foire d’art contemporain Art Moscow. Deux grands groupes internationaux ont passé de gros contrats avec BOOMBOOM, ce qui a donné le Lexus Hybrid Art Festival et une série d’événements pour le pro- ducteur de tabac Parliament. Aujourd’hui, BOOMBOOM, ce sont huit employés, plus quelques travailleurs indépendants. « Nous créons un poste environ tous les six mois », explique Sandra. Fin juillet, ils préparent une ex- position photo dans un centre de design tout juste inauguré. L’ex- position sera consacrée aux cli- chés africains du photographe italien Gianni Giansanti. L’agence du couple belge se spé- cialise dans les segments de l’art contemporain, de la mode et de l’événementiel.Trois ans après ses débuts, BOOMBOOM aligne déjà une impressionnante liste de gros clients. EMMANUEL GRYNSZPAN LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI Sandra Vermuyten et Bruno Stoefs sont un couple au bureau et à la ville. Tous deux originaires d’Anvers, ils ont monté il y a trois ans à Moscou l’agence de communication BOOMBOOM. Communication Rencontre avec une agence qui monte SUITE EN PAGE 3 bélougas. Natalia ôte tous ses vêtements en dépit du fait que la température de l’eau n’est que de 1,5 degré Celsius. PAGE 6 Revue de presse : drôle d’embargo OPINIONS LOISIRS Face à l’embargo sur tous les fruits et légumes importés d’Europe après la crise de la bactérie E. coli, la presse russe s’interroge sur les véritables motifs du Kremlin, au-delà des considérations sanitaires. Il est temps de dire non à l’homophobie L’éditorialiste Stanislav Minine plaide pour un engagement des responsables politiques sur les droits des « gays », jugeant la société russe réceptive aux mi- norités, y compris en matière d’orientation sexuelle. « Nous avons démarré au plus fort de la crise », se souvient Sandra. Rien d’étonnant, car les écono- mistes soulignent que toute crise crée de formidables opportuni- tés. « Les employés étaient moins gourmands question salaires, le loyer moins cher » et surtout, cu- rieusement, « plusieurs concur- rents ont choisi ce moment pour faire un long break et partir en vacances plusieurs mois. Du coup, nous avons récupéré leurs clients ! » En 2009, l’agence a dé- marré fort avec plusieurs gros évé- nements comme l’ouverture de Les nouveaux prolétaires eurasiens Ils sont des millions à venir cher- cher du travail dans la capitale russe. Des millions affluant des anciens pays satellites de l’URSS : Kirghizstan, Kazakhstan, Ouzbékis- tan, Turkménistan, Tadjikistan. Ils travaillent comme taxi, éboueurs, nettoyeurs, manoeuvres sur les chantiers. Leurs salaires sont mi- sérables, mais c’est toujours mieux qu’à domicile. Ils vivent à dix dans des appartements de deux pièces. Ce sont eux qui ont changé le visa- ge de Moscou. © IVAN AFANASIEV © URY KOZYREV © LORI/LEGION MEDIA © REUTERS/VOSTOCK-PHOTO © REUTERS/VOSTOCK-PHOTO © VIKTOR LYAGUSHKIN

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La Russie d'Aujourd'hui est une source d'informations politiques, économiques et culturelles internationalement reconnue. Elle propose une couverture médiatique réalisée sur le terrain par des journalistes possédant une connaissance en profondeur du pays, ainsi que des analystes et un vaste éventail d'opinions sur les événements actuels.

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Page 1: La Russie d'Aujourd'hui

Ce supplément est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta (Moscou, Russie) qui assume seule l'entière responsabilité de son contenu

Distribué avec

Mardi 28 juin 2011

L’appel du vertLes Russes plébiscitent plus que jamais leur datchas, ces modestes résidences secondaires traditionnelles.

P. 8

Récits des îles Solovki : victimes et bourreauxUn récit sur l’ancien goulag met côte à côte les souvenirs des occupants de ce lieu de légende.

P. 7

Il faut décentraliser, arracher le pouvoir et les affaires des pattes des bureaucrates, estime Dmitri Medvedev. Mais le président russe avoue n’être pas certain de pouvoir atteindre ce but.

Mission impossible ?

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Survivre à Gazprom

L’ethnie des Nénètses a résisté au froid et à l’assimilation forcée par les autorités sovié-tiques. Aujourd’hui, elle tente d’exister malgré l’extension de l’exploitation gazière.

Moscou pousse trois projets d’appareils destinés à relancer l’aviation civile russe, dont le pre-mier est déjà commercialisé. Quitte à défier les géants internatio-naux Boeing et AIrbus.

Défi aéronautique

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Un activiste écolo part en guerre contre le plastique

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LAISSEZ-NOUS VOUS PRÉSENTER LA RUSSIE !28 Juin/ 26 Juillet

www.larussiedaujourdhui.be tous les derniers mardis du mois dans Le Soir

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SUITE EN PAGE 2

Champion du recyclage dans un pays qui le pratique peu, Roman Sablin s’est rendu célèbre à Moscou en transformant son ap-partement du centre-ville en vi-trine d’un mode de vie radica-lement vert. La visite est ouverte à tous les Moscovites soucieux de l’environnement.

Le championne russe de plon-

gée en apnée Natalia Avseïenko

se prépare à plonger dans l’Arc-

tique pour une nage avec deux

PHOTO DU MOIS

La nageuse nue et les Bélougas Le miracle russe vient à la dernière minute

Strelka, une ancienne friche in-dustrielle reconvertie en galeries d’art très courues ; la foire d’art contemporain Art Moscow. Deux grands groupes internationaux ont passé de gros contrats avec BOOMBOOM, ce qui a donné le Lexus Hybrid Art Festival et une série d’événements pour le pro-ducteur de tabac Parliament. Aujourd’hui, BOOMBOOM, ce sont huit employés, plus quelques travailleurs indépendants. « Nous créons un poste environ tous les six mois », explique Sandra. Fin juillet, ils préparent une ex-position photo dans un centre de design tout juste inauguré. L’ex-position sera consacrée aux cli-chés africains du photographe italien Gianni Giansanti.

L’agence du couple belge se spé-cialise dans les segments de l’art contemporain, de la mode et de l’événementiel. Trois ans après ses débuts, BOOMBOOM aligne déjà une impressionnante liste de gros clients.

EMMANUEL GRYNSZPANLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Sandra Vermuyten et Bruno Stoefs sont un couple au bureau et à la ville. Tous deux originaires d’Anvers, ils ont monté il y a trois ans à Moscou l’agence de communication BOOMBOOM.

Communication Rencontre avec une agence qui monte

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bélougas. Natalia ôte tous ses

vêtements en dépit du fait que la

température de l’eau n’est que

de 1,5 degré Celsius. PAGE 6

Revue de presse : drôle d’embargo

OPINIONS

LOISIRS

Face à l’embargo sur tous les fruits et légumes importés d’Europe après la crise de la bactérie E. coli, la presse russe s’interroge sur les véritables motifs du Kremlin, au-delà des considérations sanitaires.

Il est temps de dire non à l’homophobie

L’éditorialiste Stanislav Minine plaide pour un engagement des responsables politiques sur les droits des « gays », jugeant la société russe réceptive aux mi-norités, y compris en matière d’orientation sexuelle.

« Nous avons démarré au plus fort de la crise », se souvient Sandra. Rien d’étonnant, car les écono-mistes soulignent que toute crise crée de formidables opportuni-tés. « Les employés étaient moins gourmands question salaires, le loyer moins cher » et surtout, cu-rieusement, « plusieurs concur-rents ont choisi ce moment pour faire un long break et partir en vacances plusieurs mois. Du coup, nous avons récupéré leurs clients ! » En 2009, l’agence a dé-marré fort avec plusieurs gros évé-nements comme l’ouverture de

Les nouveaux prolétaires eurasiens

Ils sont des millions à venir cher-cher du travail dans la capitale russe. Des millions affluant des anciens pays satellites de l’URSS :

Kirghizstan, Kazakhstan, Ouzbékis-tan, Turkménistan, Tadjikistan. Ils travaillent comme taxi, éboueurs, nettoyeurs, manoeuvres sur les

chantiers. Leurs salaires sont mi-sérables, mais c’est toujours mieux qu’à domicile. Ils vivent à dix dans des appartements de deux pièces.

Ce sont eux qui ont changé le visa-ge de Moscou.

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ET DISTRIBUÉ AVEC Politique & Société

Ce prolétariat eurasien qui fait tourner Moscou

un groupe de soutien. « Sans les immigrés, le mètre carré [d’im-mobilier] coûterait le triple, les routes, le double », a-t-il précisé lors d’une conférence de presse au mois de mai, ajoutant que « 10% du PIB sont générés par les migrants ». Plus tôt dans l’année, le FMS a annoncé ses projets de simplifi -cation des processus d’immigra-tion en augmentant le nombre de résidents légaux autorisés et en facilitant l’accès à la citoyenneté pour ceux qui voudraient s’ins-taller défi nitivement en Russie. Konstantin Romodanovsky, pré-sident de l’agence des migrations, a également déclaré qu’il voulait éliminer la corruption qui oblige souvent les immigrés à payer des pots-de-vin pour se frayer un che-min à travers la jungle bureau-cratique et légaliser leur statut. « C’est compliqué de franchir cha-que étape sans payer un pot-de-vin », confi rme Grafova. Malgré la crise démographique, ces mesures ne font pas l’unani-mité. Selon un sondage de l’agen-ce Politex, 86% des Moscovites veulent un contrôle plus strict de l’immigration. Olga Kirsanova, 52 ans, une femme de ménage dans un hôtel de la capitale, ex-prime une hostilité assez typique. « La criminalité augmente et ils nous prennent tout notre travail, dit-elle. On ne peut pas vraiment fermer les frontières, mais il faut des restrictions ».

Attrapez un de ces taxis sauva-ges qui sillonnent les rues de Mos-cou, il y a de fortes chances que le conducteur soit un jeune d’Asie centrale, peut-être un Moldave fraîchement débarqué à qui vous devrez vous-même indiquer la route, même pour aller sur la Place Rouge ! Les migrants des anciennes républiques soviétiques n’ont pas besoin de visas et se ruent vers Moscou pour y cher-cher du travail, et les entreprises russes embauchent volontiers une main d’œuvre bon marché.Le Service fédéral des migrations (FMS) estime qu’environ 1,7 mil-lion d’étrangers entreront en Rus-sie pour travailler légalement en 2011, alors que trois à quatre mil-lions de sans-papiers sont déjà présents dans le pays.Ils déblayent la neige et ramas-sent les ordures, construisent les tours de verre et d’acier de la ca-pitale. Elles vendent sur les mar-chés, nettoient les toilettes et les passages souterrains, et sortent les poussettes dans les parcs.Bakhyd Asilbekulu, 21 ans, est arrivé de Osh, au Kirghizstan, pour travailler comme nettoyeur sur un marché de Moscou, pour 15 000 roubles (370 euros) par mois. Dans un foyer non loin de là, il partage une chambre avec plus d’une douzaine de ses com-patriotes. Bakhyd, qui a russifi é son nom en Boria, prévoit de ren-trer au Kirghizstan en décembre, mais « s’il n’y a pas d’argent, je reviendrai à Moscou ». L’immigration en provenance des anciennes républiques soviétiques, surtout d’Asie centrale, est géné-rée par le contraste entre la pau-vreté de leurs pays d’origine et une Russie en plein essor qui man-que de main d’œuvre. La popu-lation russe, actuellement de 143 millions, pourrait baisser de 40 millions d’ici à 2050, selon les dé-mographes. « Tous les ans, la Rus-sie perd un million de citoyens en bonne santé », explique Lidia Grafova, conseillère à la commis-sion d'Etat sur les migrations. En 2030, l’économie russe aura besoin de 30 millions d’immigrés supplémentaires, estime Viatches-lav Postavnine, ancien directeur-adjoint du FMS et président du fonds Migration du XXIe siècle,

Les travailleurs immigrés produisent 10% du PIB russe mais sont souvent exclus des emplois légaux.

Quels emplois occupent les immigrés ?

La mégapole du travail clandestin

Moscou est de loin la ville la plus peuplée d’Europe, avec un chif-fre officiel de 11,5 millions d’habi-tants. Les autorités concèdent tou-tefois que le nombre réel est bien supérieur, quelque part entre 13 et 17 millions. L’absence de statisti-ques fiables sur le nombre d’im-migrés résidant de manière illégale constitue un gros problème pour les autorités municipales. En toute logi-que, les habitants clandestins n’ont

pas du tout participé au recense-ment de 2010. Ces dernières se-maines, la police a découvert plu-sieurs campements importants de travailleurs illégaux. Un village sou-terrain a même été découvert sur le site d’une usine militaire. Plu-sieurs centaines de clandestins y ont construit des habitations sou-terraines, avec électricité, eau cou-rante et même un petit élevage de chèvres...

Immigration Ils sont des millions à venir d’Asie Centrale pour travailler

Réformes Le Kremlin réalise qu'il a concentré trop de pouvoir à Moscou et entre les mains d'une administration inefficace

GALINA MASTEROVALA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

MAXIME GLINKINE, NATALIA KOSTENKOVEDOMOSTI

Du déneigement aux chantiers de gratte-ciels, les ressortissants des anciennes républiques socialistes occupent tous les emplois pénibles à cause du déficit de main d'oeuvre.

Dmitri Medvedev veut opérer une rotation des hauts fonctionnaires et transférer les administrations hors de Moscou. Mais il ignore s'il mettra lui-même en œuvre ce programme.

Dégonfler la bureaucratie et décentraliser : mission impossible ?

Lors du Forum économique de Saint-Pétersbourg, le président russe a présenté le programme de développement du pays pour les prochaines années. Le système d'administration d'État en vigueur ces dix dernières années, où l'on ne bouge qu'au signal du Kremlin, Medvedev à Saint-Pétersbourg.

n'est pas viable, et doit être rem-placé au plus vite, estime Dmitri Medvedev : derrière la fameuse "stabilité" se cache la stagnation.Medvedev a annoncé une politi-que de décentralisation du pou-voir et de transfert d'une partie des fonctions aux régions et aux municipalités. Dans un premier temps, il faut apporter des cor-rections dans la sphère de la fi s-calité et au sein des relations in-ter-budgétaires.Or, la planifi cation quinquenna-le constituera l'épine dorsale du programme électoral du Front Po-pulaire Panrusse (FPP) de Vladi-

mir Poutine (censé rassembler les sans-parti autour du parti du pou-voir Russie Unie, ndlr), a indiqué son concepteur Nikolaï Fedorov. Medvedev, quant à lui, compte li-moger les fonctionnaires et repré-sentants des forces de l'ordre cor-rompus et recouvrer les sommes détournées. Le président a l'in-tention de réduire considérable-ment, de 20%, les effectifs de l'ap-pareil d'État et du ministère de l'Intérieur. Rien que la diminu-tion du nombre de bureaucrates, comme l'a indiqué le vice-Pre-mier ministre Alexeï Koudrine lors du forum, permettra d'éco-

CLARE NUTTALLLA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

Le processus d'assimilation de la minorité russe s'accélère au Kazakhstan. Sans heurts, mais certains Russes vivent cependant avec leurs valises toutes prêtes. Au cas où...

Absorption inéluctable au Kazakhstan

Ex-URSS La minorité russe se dissout

sation », depuis 2001, accroissent l’utilisation du kazakh comme lan-gue principale du gouvernement , indique un rapport du Groupe in-ternational du droit des minorités (MRGI). « C’est un obstacle pour accéder à l’éducation et à l’emploi dans la fonction publique pour une partie signifi cative de la minorité russe ». Inversement, tandis que la culture russe a imprégné le Kazakhstan durant les trois derniers siècles, les Russes d’Asie centrale ont égale-ment absorbé les coutumes loca-les telles que l’hospitalité généreu-

se et l’habitude de boire le thé dans des « pilouchki » (des petits bols). « Nous ne sommes plus des Rus-ses, mais pas encore des Kazakhs », dit Nadejda. Alors que le Kazakhstan se porte mieux économiquement que le reste de l’Asie centrale, les Russes ont des raisons de rester. Les pers-pectives d'emploi sont meilleures à Almaty que dans les villes sibé-riennes dans lesquelles on encou-rage les Russes à s’installer. Tou-tefois, la situation démographique du Kazakhstan évolue. Le déclin de la population russe et la domi-nation croissante de la langue ka-zakhe indiquent que la question se réglera sans intervention des autorités. Les Russes qui restent au Kazakhstan sont voués à l'ab-sorption.

À Almaty, le parc Panfi lov est un endroit de prédilection pour pas-ser un après-midi d’été. À l’ombre de la cathédrale de Jenkov, la deuxième plus haute construction en bois au monde, des foules d’ado-lescents et de jeunes familles ka-zakhes chantent au karaoké, man-gent des glaces et tentent leur chance aux attractions foraines. Les femmes qui entrent dans la cathédrale en nouant un foulard autour de leur tête sont majoritai-rement issues de la population russe vieillissante. La composition ethnique du Ka-zakhstan a changé drastiquement depuis l’indépendance. Les Ka-zakhs étaient alors minoritaires dans leur propre pays. Deux dé-cennies plus tard, la population du Kazakhstan est composée de 63,1% de Kazakhs et seulement 23,7% de Russes. L’exode était massif durant les an-nées 1990. Il se poursuit, mais à un rythme désormais très lent. La population russe est vieillissante, leur natalité est moindre que celle des Kazakhs. Le Kazakhstan était un cas à part au sein de l’ex-URSS. Avant qu’une frontière ne soit établie entre la Russie et le Kazakhstan, presque rien ne distinguait le nord de la république et la Sibérie méridio-nale.Les libertés politiques sont certes limitées au Kazakhstan mais la nécessité de maintenir la paix s’est soldée par une politique des na-tionalités qui, sans contenter tout le monde, est reconnue pour être sensée et tournée vers l’avenir. Na-dejda, professeure de russe à Al-maty, assure que les Russes et les Kazakhs vivent en paix. « Mais les politiques ont changé », ajoute-t-elle. « Avant, les Russes étaient le grand frère qui aidait le frère cadet. Aujourd’hui tout est renversé ». Néanmoins, quelques Russes oc-cupent de hautes fonctions gou-vernementales, notamment le pre-mier ministre Karim Massimov (d'ethnie Ouïghoure) et le gouver-neur de la banque centrale Gri-gori Martchenko (d'origine ukrai-nienne). « Bien que la constitution place le russe à égalité avec le kazakh, les lois et programmes de la « kazakhi-

Les Russes représentent 23% de

la population du Kazakhstan

nomiser un milliard d'euros dans le budget triennal.Le président a coupé l'herbe sous le pied des fonctionnaires fédé-raux en annonçant le transfert des institutions d'État hors des limites de Moscou. Le chef ad-joint de l'appareil de la Douma, Iouri Chouvalov, a déclaré que les députés et sénateurs pourraient eux aussi quitter le centre de Mos-cou avec les fonctionnaires fédé-raux, afi n de s'installer dans un nouveau centre parlementaire.Mais les paroles de Medvedev lais-sent transparaître qu'il n'est pas certain que ce sera lui qui mettra en œuvre ces initiatives. Le pro-gramme doit fonctionner indé-pendamment des personnes qui seront aux commandes du pays ces prochaines années.D'après les déclarations du pré-sident et de son personnel, il res-sort que la conception de nom-breuses initiatives n'a pas été

totalement achevée. Dans un pre-mier temps, Medvedev a annon-cé que le Centre fi nancier inter-national pourrait être hébergé au coeur de Moscou, dans des lo-caux libérés par les institutions étatiques, mais le président de Sberbank Guerman Gref lui a proposé de le transférer au-delà du périphérique, ce qui a été ap-prouvé.Le programme de Dmitri Med-vedev ne signifi e pas la destruc-tion du système actuel. En réa-lité, ces projets n'ont une chance de réussir que si la verticale du pouvoir est maintenue, affirme l'analyste politique Dmitri Orlov. La différence entre la rhétorique du Front populaire de Poutine et celle de Medvedev peut être aussi expliquée par des cibles différen-tes : les soldats du "front" s'adres-sent à l'électorat, Medvedev émet des signaux vers les élites et les investisseurs étrangers.

La domination de la langue kazakhe montre que la question russe se réglera sans intervention forcée

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Miracle... au tout dernier momentcomme Lexus ou Parliament leur a appris qu’il existait souvent un grand défi cit de communication au sein des sociétés russes. « La direction est en général com-posée d’expatriés internationaux tandis que le mid management est russe. Souvent il existe de vraies barrières culturelles et lin-guistiques qui doivent être fran-chies pour mener à bien les pro-jets », souligne Sandra, qui imagine des programmes de sen-

sibilisation à l’art contemporain pour les cadres moyens au sein d’entreprises qui se lancent dans des programmes de mécénat. « Notre approche vise à amélio-rer la communication interne d’une entreprise et à créer une culture propre à chaque société », résume Bruno.La communication d’entreprise serait-elle en retard en Russie ? « Pas dans des secteurs comme le BTP ou la fi nance », répond Sandra. « Ils seraient même plu-

« Notre activité connaît une crois-sance rapide ». Leur démarrage rapide s’explique aussi par le fait que Sandra travaille en Russie depuis 1998. Après avoir travaillé auprès de la représentation de l’ONU à Moscou et au sein d’une agence russe, elle s’était déjà créé un gros carnet d’adresses aussi bien en Belgique qu’à Moscou et dans la sphère diplomatique. « À un moment donné, nous avons compris qu’on avait constitué un carnet suffisamment important pour travailler seuls ». « Nous avions déjà une réputation à Mos-cou » raconte Bruno, qui s’y est installé pour de bon en 2008. « Nos services étaient et sont com-pétitifs car nous sommes une pe-tite structure avec des prix plus abordables que les grosses agen-ces, qui ont tout de suite des gros coûts de fonctionnement ». BOOMBOOM réalise 40% de son chiffre d’affaires dans la mode, tandis que ses deux autres acti-vités, l’art contemporain et l’évé-nementiel représentent 30% cha-cun. « Dans le futur, nous allons dé-velopper une quatrième activité, celle du design », précise Bruno, qui rappelle que l’opération autour [du designer anglo-égyp-tien] Karim Rashid et du lance-ment de son projet MOD Design a été un très gros succès. « Nos activités vont aussi sortir du cadre de la communication proprement dite pour aller vers la formation », poursuit Bruno. Leur expérience avec de grandes compagnies

tôt en avance, surtout en termes d'organisation. Mais, suivant les secteurs, il existe de fortes dispa-rités, comme en Belgique, d’ailleurs ». Quant au déficit d’image du pays en général, San-dra comme Bruno le trouvent to-talement injustifi é. « Les médias sont largement responsables de cette mauvaise image », estime Sandra. « Notre rôle est d’amé-liorer la coopération pour qu’on se comprenne mieux ». « Tout le monde a peur de la Rus-sie », constate Bruno « et c’est parce qu’ils ne comprennent pas ou ne savent pas ce qui se passe ici. Les étrangers qui viennent pour la première fois sont tou-jours surpris positivement par la réalité russe. Il faut juste faire at-tention à ne pas tomber sur le mauvais guide ». Auraient-ils chaussés des lunet-tes roses ? Non. « Il y a des cho-ses qui ne vont pas » convient Bruno : « Si la poste et l’admi-nistration russes travaillaient mieux… ». Sandra enchaîne « et la connaissance des langues étran-gères est largement insuffisante… peut mieux faire ! » Un point qui ne laisse pas d’étonner le duo belge, c’est la facilité avec laquel-le les Russes supportent le stress dans la préparation d’un événe-ment. « Les préparatifs sont trop souvent achevés à la dernière mi-nute !» s’exclame Sandra. Confrontés à cette situation, les Européens ont tendance à céder à la panique. « Et pourtant, au tout dernier moment, les choses fonctionnent. Le miracle russe se réalise ! » sourit Sandra. Sandra et Bruno travaillent ensemble à Moscou depuis 2008.

SUITE DE LA PREMIÈRE PAGE

« La communication d'entreprise n'est pas en retard ici, elle est même en avance dans certains secteurs »

« La connaissance des langues étrangère est largement insuffisante en Russie. Peut mieux faire ! »

EN BREF

Les autorités de la capitale russe envisagent de verser plus de 1.500 milliards de roubles (plus de 37 millions d'euros) au cours des cinq ans à venir pour le dé-veloppement de l'éducation, a annoncé le maire de Moscou Ser-gueï Sobianine.« Nous envisageons une hausse des investissements dans l'édu-cation à l'horizon 2016 », a dit Sobianine. « L'amélioration de la qualité de l'éducation est l'ob-jectif clé du programme », a in-sisté le maire, qui a ajouté que plusieurs établissements seraient rénovés.

Un juge de Moscou a déclaré le défenseur des droits de l'hom-me Oleg Orlov non coupable de diffamation à l'encontre du leader Tchétchène Ramzan Ka-dyrov. Orlov, directeur de l'ONG Memorial était accusé de dif-famation pour avoir accusé Ka-dyrov d'avoir organisé le meur-tre de l'activiste Natalia Estemirova en 2009. Peu avant le crime, Kadyrov avait quali-fi é Estemirova de « femme sans honneur ». Estemirova criti-quait sévèrement la politique de Kadyrov en Tchétchènie et enquêtait sur ses exactions pré-sumées.

Moscou investit 37M d'euros dans l'éducation

Revers judiciaire pour le leader Tchétchène

Article publié dansKommersant

La Russie est un des cinq pays comptant le plus de milliardaires. Mais en terme de millionnaires, le résultat est beaucoup moins bon.

Pas assez de millionnaires, trop de milliardairesFortunes Les disparités dans la répartition des richesses s'observent à tous les niveaux

la Suisse, les États-Unis et Is-raël. La spécifi cité russe réside dans la concentration de « très riches » à Moscou. D’un certain côté, le défi cit des « riches », observé dans les provinces de Russie, réduit les disparités sociales. Mais dans les pays développés ou les économies en plein essor comme la Suisse, Taïwan et Hong-Kong, la strati-fi cation sociale est compensée par le haut niveau de développement des marchés et des technologies.

net BCG. Les fortunes privées des ressortissants des pays d’Europe de l’Est, Russie incluse, sont im-pressionnantes, mais représentent moins de 5% des capitaux accu-mulés dans les paradis fi scaux en Suisse, au Luxembourg, en Gran-de-Bretagne, à Hong-Kong ou Singapour, et n’exercent quasi-ment aucune influence sur la conjoncture fi nancière de ces pays. C’est Dubaï qui concentre le plus de capitaux russes avec 8% de ses investissements étrangers. La plupart des activités fi nanciè-res des sociétés contrôlées par les Russes sont associées à la Grande-Bretagne et à la Suisse. Puis viennent le Luxembourg et l’Allemagne. Selon les estimations de la Banque Centrale de Russie, c’est précisément via ces pays que transitent la plupart des capitaux russes.

Selon le rapport Global Wealth 2011, plus de 560 foyers russes disposent d’une fortune dépas-sant les 100 millions de dollars. Malgré ces chiffres, la Russie ne fait pas partie du top-15 des pays qui comptent le plus grand nom-bre de grosses fortunes par habi-tant. En outre, l’étude montre que l’écart entre les plus riches, les moins riches et la classe moyen-ne est abyssal. Le pays connaît un défi cit de « millionnaires or-dinaires », à la tête d’une fortune d’au moins 1 million de dollars. Selon les estimations de BCG, ces ménages représentent moins de 1% de la population russe. Le lea-der mondial ? Singapour et son « miracle économique ». Il est le pays qui concentre le plus grand nombre de millionnaires, suivi par

Pour les provinces russes, c’est l’inverse. Trop peu nombreux, les millionnaires ne permettent pas de favoriser la croissance et le dé-veloppement des infrastructures dans les régions. Pourtant, pour le directeur de l’ins-titut d’économie sociale auprès de l’Académie des sciences de Russie RAN Alexandre Rubinstein, une telle disparité n’est pas choquan-te : « La Russie est véritablement unique en ce sens que 2 à 2,5% de sa population concentre entre 70 et 80% de la richesse du pays ». Alexandre Rubinstein est persua-dé qu’un tel écart ne représente aucun danger pour la stabilité du pays. Selon lui, l’État ne serait pas menacé. « Le principal est que les milliardaires n’exhibent pas leurs richesses pour ne pas ulcérer la po-pulation ». La fréquentation des zones offs-hore à l’étranger reste un indica-teur essentiel des « très riches », rapportent les analystes du cabi-2,5% de la population possèdent 80% de la richesse du pays.

IRINA POULIA LA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

Un miracle rendu possible grâce au programme de mères porteuses. Mais l'état-civil russe refuse d'enregistrer les enfants.

Quatre jumeaux viennent au monde trois ans après le décès de leur père

Procréation artificielle Evénement sensationnel dans une maternité moscovite

soin de cette « crèche » : Lamara elle-même, sa sœur cadette et une nourrice. Lamara savoure d'avan-ce la façon dont elle apprendra les langues aux enfants, elle qui parle anglais, français, géorgien, turc et grec. Et elle ne doute pas un instant de pouvoir apporter aux enfants tout ce dont ils ont besoin. Elle possède assez d'ar-gent et suffisamment de force malgré ses 57 ans, assure-t-elle.Seul problème : les enfants ont déjà presque cinq mois, et ne pos-sèdent toujours pas d’actes de naissance. L'office d'état-civil russe a refusé de les enregistrer, sous le prétexte que seuls les cou-ples mariés pouvaient recourir aux services des mères porteuses. Un défi légal se dresse désormais devant Lamara...

grand-mère Lamara Kelecheva. Une leucémie aiguë a été dépis-tée en mai 2005 chez le fils de Lamara, Mikhaïl. Le terrible dia-gnostic est tombé à 23 ans. Avant la chimiothérapie, on a proposé au jeune homme, de faire un don de sperme afi n de procéder à sa cryoconservation. Devenir père était un souhait ardent de Mikhaïl, qui n'a malheureusement pas sur-vécu à la leucémie. Seule l'idée qu'elle pouvait réa-liser le rêve de son fi ls en prolon-

Les trois garçons posent tout sou-rire devant l'objectif, et la qua-trième, la petite Maria, se met même à chanter. « Mon fi ls vou-lait une fi lle. C'est lui qui a choi-si son nom, Maria, en l'honneur de la Sainte Vierge », raconte la

geant la famille aida Lamara à surmonter son chagrin. Il fallait absolument trouver deux fem-mes : l'une qui accepte de faire don de ses cellules, et une mère porteuse, prête à porter un en-fant. Lamara a tenté le destin dans une clinique ukrainienne. Pour augmenter les chances, il a été convenu qu'il y aurait deux mères porteuses.La grossesse intervint à la pre-mière tentative pour les deux mères porteuses, fait extrêmement

rare. En outre, l'échographie a ré-vélé que chacune d'elles portait des jumeaux. Le 6 janvier 2011, Ioannis et Feoharis naissaient dans une maternité de Moscou, suivis deux jours plus tard par Mikhaïl et Maria. Lamara mon-tre deux photos : sur chacune d'el-les on croirait voir un seul et même visage. « Ce sont deux Mikhaïl : père et fils », dit-elle avec un grand sourire. « La res-semblance est étonnante ».Six mains attentives prennent

Lamara est devenue quatre fois

grand-mère d'un coup à 57 ans.

Plus de 560 foyers russes dispo-sent d'une fortune dépassant les 100 millions de dollars.

560CHIFFRE CLÉ

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PAUL DUVERNETLA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

Trois nouveaux appareils, dont un est déjà en phase de commercialisation, doivent dans les prochaines années renouveler complètement la gamme de l'industrie aéronautique russe.

Trois défis lancés aux deux géantsAéronautique Le gouvernement relance son industrie civile russe pour s’attaquer au monopole de Boeing et d'Airbus

100 places fait actuellement l’ob-jet de 150 commandes. Mais son lancement a été quel-que peu terni en avril par les pro-pos du ministre des Transports Igor Levitine, selon lesquels

lorsqu’un vétéran de l’industrie, Oleg Smirnov, s’en est pris « à tous ces banquiers qui dirigent aujourd’hui notre industrie », pique envoyée au PDG d’Aerofl ot Vitali Saveliev et à Alexandre Le-bedev, actionnaire de plusieurs compagnies aériennes. La logique industrielle consistant à concentrer la production dans un cluster s’oppose à la logique politique qui veut maintenir l’em-ploi sur des sites éparpillés (l’usi-ne réalisant l’assemblage fi nal du Superjet est située à Komso-molsk-sur-Amour, à 7 000 km à l’est de Moscou). Enfi n, la logique fi nancière des compagnies aériennes les pousse vers les appareils étrangers beau-coup moins coûteux à l’exploita-tion. Les fabricants russes doi-vent encore progresser s'ils veulent prouver leur compétitivité.

L’avenir immédiat de l’industrie aéronautique est suspendu au sort de deux appareils, le Superjet 100 de Soukhoï et le Tupolev 204 : tel est l’enseignement tiré du premier Forum aéronautique d’Oulia -novsk, qui s’est tenu en avril der-nier. Le Superjet, premier avion russe conçu dans la période post-soviétique et le premier aussi à intégrer de nombreux composants étrangers (dont un moteur fran-çais), a fait un bond en avant en effectuant le mois dernier ses pre-miers vols commerciaux avec la compagnie aérienne Armavia. Le second appareil, le Tu 204, qui a volé pour la première fois en 1989, tente difficilement une seconde carrière alors que seuls 69 exem-plaires en ont été construits en 20 ans.L’exploitation commerciale du Superjet de Soukhoï devrait per-mettre aux acheteurs potentiels de vérifi er les paramètres de l’avi-on et de convaincre de futurs clients. Cet appareil régional de

Aerofl ot, principal client avec 30 commandes, pourrait demander des dédommagements à Soukhoï pour les retards répétés de livrai-son et pour une efficacité éner-gétique moindre que celle annon-

cée. L’attitude d’Aerofl ot, qui est contrôlé par le gouvernement russe, envers le Superjet, un pro-jet également fi nancé en très large majorité par des fonds publics, « diminue l’attrait du produit aux

yeux des acheteurs potentiels, au risque que l’argent de l’État soit dépensé en vain », estime Maxi-me Piadouchkine, spécialiste du transport aérien. Pour le Tu-204, un moyen-courrier de 210 places, la situation est encore moins fa-vorable. La commande qui devait ranimer sa production, c’est-à-dire 44 appareils par la compa-gnie Red Wings, semble depuis la fi n avril restée dans les limbes. Mais le gouvernement voit plus loin, avec un plan de relance de l’indus-trie aéronautique basé sur trois ap-pareils. Le premier est le Superjet. Le deuxième, le MS-21, est un moyen-courrier de 150 à 210 pas-sagers en phase de conception et basé en partie sur le Tu-204. Sa commercialisation est prévue pour 2016. Le troisième, un avion de 300 places visant le segment « low-cost », se nomme Samolet 2020.Partenaires clés dans le Superjet (dont le groupe Safran, maison mère du liégeois Techspace Aero, a réalisé les moteurs), les Fran-çais sont restés à l’écart du pro-jet MS-21. Une source chez Sa-fran glisse qu’il est « logique que les Russes cherchent à voir si les Américains sont prêts à fournir davantage de technologies que les Européens ». Plusieurs lignes de conflit ont surgi durant le forum, notamment

Un appareil Tu-204 en chaîne d’assemblage dans la gigantesque usine AviaStar d’Oulianovsk.

à un grand investisseur étranger ou les vendre par l'intermédiaire d'introductions en bourse par morceaux avec émission ultérieu-re d'actions.

Certaines de ces entreprises sont très chères. N'y a-t-il pas là un ris-que d'inonder le marché avec des actions, alors que celui-ci n'a qu'une capacité limitée d'absorption des offres de cette envergure ?La valorisation de certaines de ces entreprises est très élevée et nous ne pouvons pas les vendre toutes à la fois. Nous comprenons également que le programme de privatisation de la Russie est en concurrence avec les programmes de privatisation d'autres pays, qui vendent également des entrepri-ses dans le but de lever des fonds pour leurs budgets. Cependant, nous croyons qu'il est possible de lever 25 milliards de dollars au cours des trois prochaines an-nées.

Le gouvernement a fait volte-face en incluant des sociétés dites "stra-tégiques" dont les capitaux étran-gers sont exclus par une loi datant de 2008. Existera-t-il un mécanis-me particulier pour la mise en vente de ces entreprises ?Les groupes stratégiques seront également accessibles aux étran-gers, après examen d'une com-mission d'État, qui devrait à coup sûr autoriser les transactions.

Combien de compagnies sont en vente et combien comptez-vous lever de fonds ?Il y a un programme sur trois ans. La liste des privatisations comp-te plus de 1300 compagnies, dont plus de 90% sont des PME. Seu-les 10% des principales compa-gnies de la liste auront un intérêt pour les étrangers. Nous allons commencer à les vendre à partir de 2013, en encaissant au passa-ge 25 milliards d'euros. Nous comptons obtenir 5 milliards d'euros cette année en vendant des parts de Sovkomflot et de Sberbank.

Comment ces entreprises vont-el-les être vendues ? Allez-vous en vendre les blocs de contrôle ou par morceaux ?Chaque société est un cas parti-culier. Par exemple, nous pour-rions vendre un bloc de contrôle

Les privatisations frauduleuses des années 90 ont jeté le discré-dit sur ces opérations. Qu'allez-vous faire pour rassurer les inves-tisseurs ?

La loi de privatisation actuelle prévoit des ventes aux enchères claires, ouvertes à tous ceux qui s'acquittent d'un droit de parti-cipation.

Quelles sont les grandes entreprises de la liste qui intéressent le plus les investisseurs étrangers ?En 2011, les grandes entreprises mises en vente comprennent Sovkomfl ot et une participation de 7,5% dans Sberbank. En 2012, ce sera au tour de FSK, RusHydro, et 10% de VTB.Nous prévoyons de vendre 25% moins une action cette année. Elle sera probablement vendue lors d'une introduction en bourse, en privatisant par le biais du mar-ché boursier, utilisé comme un instrument afi n de recueillir des fonds et améliorer la qualité du marché. Si cela fonctionne bien, alors la valeur des actions va aug-menter. Plus tard nous vendrons de nou-veau 25% et pourrions ensuite vendre 25% plus une ou deux ac-tions, ce qui pourrait survenir en 2015.

Alexeï Ouvarov suit les privatisa-

tions au ministère de l'économie

ENTRETIEN ALEXEÏ OUVAROV, RESPONSABLE DES PRIVATISATIONS

Moscou lèvera 25 milliards en 3 ansLE GOUVERNEMENT RUSSE GARANTIT AUX ÉTRANGERS DES ENCHÈRES TRANSPARENTES

Les principaux projets de privatisation pour 2011-2015, en milliards de dollars

Sociétécotée en

bourse

Valorisation

du marché

Part mise en

vente

Levée

estiméeCalendrier

VTB oui 34,9 25,5% 8,7 2012-13

Sberbank oui 77,1 7,58% 5,8 2011-13

Rosneft oui 76,1 25% 19,0 2012-15

RusHydro oui 13,5 7,97% 1,1 2012-13

FSK oui 14,6 4,11% 0,6 2012-13

Sovcomflot non 4 à 6 50% 2 a 3 2011-13

RSHB non 3 à 5 25% 0,8 a 1,3 2012-15

United Grain

Companynon 0,5 100% 0,5 2012-13

Rosagroleasing non 2,4 à 4,8 50% 1,2 a 2,4 2013-15

RJD (chemins de fer) non 48 à 66 25% 12 a 16,5 2013-15

Total 52 67

CHIFFRE CLÉ

10% de part du mar-ché mondial d’ici 2025 : c'est

l’objectif de la Russie alors que la concurrence avec Boeing et Airbus est accentuée par l’arrivée des ap-pareils chinois.

Le contrat d'achat de deux porte-hélicoptères de classe Mistral a été si-

gné à Saint-Pétersbourg. Le coût total du contrat s'élève à 1,2 milliard de

dollars. Le groupe d'armement naval français DCNS livrera le premier por-

te-hélicoptères de type Mistral à la Russie en 2014. Cette vente a été criti-

quée par les États-Unis, ainsi que par les pays baltes et la Géorgie.

ARMEMENTPARIS VEND DEUX NAVIRES MISTRAL À MOSCOU

EN BREF

NIKITA DOULNEVLA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

Depuis le 1er juin, les producteurs de céréales peuvent de nouveaux exporter malgré la menace d'une nouvelle sécheresse.

Poutine lève l'embargo sur les exportations de céréales

Agriculture Vers une détente sur les marchés internationaux ?

chute des récoltes et menaçaient de provoquer une pénurie de pro-duits agricoles en Russie.Si le gouvernement est prêt à lever l'interdiction, la possibilité d'un défi cit domestique de céréales de-meure. Selon l'association russe des pro-ducteurs de céréales, la Russie pourrait exporter 10 millions de tonnes de céréales cet automne. C'est très loin des 100 millions de tonnes que le gouvernement russe promettait pour l'année 2010, juste avant que la séche-resse catastrophique de l'été der-nier ne ruine ses espoirs. 40% de

La Russie a renoncé aux mesu-res protectionnistes sur le mar-ché domestique des céréales. Le premier juillet, l'embargo sur les exportations de céréales, en vi-gueur pendant près d'un an, sera levé. La mesure avait été impo-sée en août 2010 après des incen-dies et une sécheresse sans pré-cédent, qui ont conduit à une

provisionnement sur le marché intérieur. « Les taxes à l'exporta-tion devraient atténuer l'impact infl ationniste de la levée de l'em-bargo », a précisé Ignatiev.Les producteurs étrangers et les consommateurs redoutent le re-tour des céréales russes sur le marché international. D'une part, il pourrait modifi er le prix de ces produits en Europe et sur les pla-ces boursières. D'autre part, le marché s'est profondément réor-ganisé au cours de cette année sans céréales russes et il n'existe ni niche, ni consommateur pour ces dernières au sein de la nou-velle structure. Ces préoccupa-tions sont reflétées dans les contrats à terme sur le blé euro-péen : depuis le 23 mai (jour où la Russie a annoncé la levée de l'embargo), ils sont en baisse constante.

la production russe était partie en fumée, ne laissant que 60,9 mil-lions de tonnes, tandis que les ré-serves connaissaient une diminu-tion de 25%.Le président de la Banque cen-trale de Russie a proposé de ré-soudre le problème en introdui-sant des droits d'exportation sur ces produits. Son initiative a été soutenue par le ministère du Dé-veloppement économique et le mi-nistère de l'Agriculture. Le chef de la Banque centrale estime que l'introduction de taxes est le seul moyen de contenir l'infl ation et de garantir la stabilité de l'ap-

Propos recueillis par Ben Aris

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" Ce style de vie traditionnel est condamné. Je com-prends que les Nénètses

voient les choses de manière tota-lement différente, mais imaginez que vous et moi décidions de nous promener avec des "lapots" aux pieds (leurs chaussures tradition-nelles) et portions une longue barbe. Tu veux enfiler des perles et fumer un bambou ? Fais-le dans des lieux destinés à cela et non sur un territoire grand comme plu-sieurs États européens."

IL L'A DIT

Andreï IvanovGYNÉCOLOGUE-OBSTÉTRICIEN, DIRECTEUR AD-

JOINT DE L'HÔPITAL DE SALEKHARD

Survivre à l'expansion de GazpromReportage L'ethnie Nénètse peine à garder son mode de vie nomade en zone arctique

Des 13 000 nomades de la péninsule de Yamal beaucoup craignent d’être sédentarisés de force, un processus encouragé par le gouvernement.

L'exploitation gazière empiète sans cesse davantage sur les territoires appartenant aux Nénètses

ANNA NEMTSOVALA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

Ils ont survécu pendant des siècles au climat extrême du Grand Nord. Le soviétisme les a affaibli, mais c'est l'extension du capitalisme qui pourrait leur asséner le coup de grâce.

Les mains enfl ées et rugueuses de Lena Sarteto virevoltent. Au centre de la tente, l’eau bout sur le feu et pendant ce temps, Sar-teto, une nomade de la tribu des Nénètses, un peuple indigène de Sibérie occidentale, prépare un festin pour les invités et sa fa-mille de cinq personnes. Elle dé-coupe des morceaux pourpres de viande de renne séchée, écaille un énorme poisson argenté et dis-pose du pain sec et des biscuits sur des assiettes qu’elle range dans un traîneau en bois. Son parter-re, c’est l’herbe qu’elle foule ; les écailles et arrêtes de poissons jon-chent le sol autour du feu. Ils res-teront là après leur départ. Sarteto est pressée. Dans quel-ques heures, son petit groupe de nomades composé d’une dizaine de familles, toujours appelé « Bri-gade n°5 », comme à l’époque so-viétique, prendra la route du nord. C’est le début de l’été polaire, et profi tant de la lumière presque continue du jour, ils emmènent leurs 3000 rennes vers les côtes de la mer de Kara, atteignant le cercle Arctique au mois d’août. Puis ils font demi-tour, fuyant le froid glacial et ramènent leurs troupeaux à l’herbe et la mousse de la toundra, plus douce. Ce cycle séculaire est de plus en plus menacé.Car la péninsule de Yamal est aussi la base du géant Gazprom, qui fournit du gaz à toute la Rus-sie et à une bonne partie de l'Eu-rope. En s’installant dans la pé-ninsule, Gazprom a apporté routes, chemins de fer et pipeli-nes, un développement qui mé-tamorphose la toundra. Les Né-nètses ont découvert les autoroutes goudronnées, le métal rouillé, les poteaux électriques et les foreuses. La richesse de la Rus-sie semble arrachée à la toundra qui jadis leur appartenait. « Le poisson a un goût de mort, nous tombons malades après avoir bu l’eau de nos lacs, nos rennes s’empêtrent dans les câbles, tré-buchent sur des tuyaux, se bri-sent les jambes et meurent... », confie Sarteto. Puis elle récite, comme un mantra : « Nous som-mes la dernière génération de no-mades ; nos enfants vivront dans des villes, sans la toundra ».La péninsule de Yamal abrite le champ de Bovanenkovo, qui contient environ 4,9 trillions de mètres cubes de gaz naturel que Gazprom s’apprête à extraire dès

l’année prochaine. Les tours de forage se sont hérissées à l’hori-zon. Et pour aider à l’exploita-tion, un nouveau chemin de fer de 520 km a été construit l’an dernier. Des 13 000 nomades de la pénin-sule de Yamal beaucoup craignent d’être sédentarisés de force. Ce changement de mode de vie est encouragé par le gouvernement mais redouté par un peuple qui a forgé son identité sur le voyage à travers les étendues de la toun-dra. Personne ne sait combien de centaines d’années au juste les Nénètses ont vécu à ce rythme annuel, devançant avec leurs ren-nes le froid glacial. « Notre recherche révèle que la plus grande peur des nomades n’est pas le changement de cli-mat mais celle de se faire chasser de la toundra », explique Vladi-mir Tchouprov, porte-parole de Greenpeace Russie. Pendant l’installation du campe-ment, les hommes s'entraînent à attraper les rennes au lasso tan-dis que les femmes élèvent les ten-tes, ou « mya » en nénètse. Les rennes fournissent les peaux pour les tentes, les tissus pour les vê-tements et la nourriture. Ce n’est pas le premier assaut sur leur mode de vie. Le régime so-viétique avait tenté de forcer les Nénètses à entrer dans des fer-mes collectives. Les différentes tribus avaient été divisées en bri-gades et obligées de payer un impôt en viande de renne. Des milliers d’entre eux s’étaient alors installés dans les villes sibérien-nes, en luttant pour préserver leurs traditions. Aujourd’hui, les militants nenets voient dans les efforts de gouvernement une at-taque renouvelée. « Nous sommes un petit peuple », se lamente Yezingi Hatyako, un ancien de 61 ans. « Nous n’avons pas de députés pour nous défen-

champ de gaz. Un porte-parole de Gazprom ex-plique que l’entreprise essaye de partager le territoire avec les tri-bus, mais ne récolte qu'ingrati-tude. « Quels que soient nos ef-forts pour les aider – nous organisons le transport, payons des salaires pour ce qu’ils ont tou-jours fait gratuitement, construi-sons des ponts au-dessus des pi-pelines ou des écoles et des maternelles pour leurs enfants… Mais les Nénètses se plaignent quand même », regrette Andrei Teplyakov. Et de fait, de nombreux efforts de Gazprom pourraient être in-terprétés comme des améliora-

tions pour les nomades de ce que l’on appelle la Région autonome Yamalo-Nénèts. L’entreprise verse des salaires aux hommes pour l’élevage et aux femmes pour l’en-tretien du foyer. Lena et son mari, par exemple, reçoivent 1700 euros par mois, une somme tout à fait respectable pour la région. Tous les étés, les hélicoptères de Gaz-prom survolent les campements des Nénètses pour rassembler plus de 2000 enfants et les emmener dans des pensions de Yar-sale, la capitale des habitants de la toun-dra. Mais Lena Sarteto assure qu’elle échangerait volontiers l’argent contre une toundra préservée, sa famille rassemblée autour d’elle. Elle se tourne vers l’idole de bois familiale, posée sur de la fourru-re. Elle place la statuette dehors. La divinité qu’elle représente n’est pas censée partager la maison avec des étrangers, une promesse de plus en plus difficile à tenir. Sarteto répète sa prière, qui pa-rait bien futile : « Que Gazprom s’en aille bientôt et que Yamal ne redevienne qu’à nous ».

Les familles de la « Brigade

n°5 » emmènent leurs 3000

rennes vers la mer de Kara au

début de l’été polaire.

Conquérants de l'Arctique

Le peuple des Nénètses est la plus importante des 26 ethnies sibé-riennes. Vivant à proximité du cer-cle polaire, ils sont particulière-ment présent sur les péninsules de Iamal et de Taïmyr. La principale activité économique de ce peuple nomade est l'élevage traditionnel de rennes, nécessaire à leur survie, ainsi que la pêche. La principale menace qui pèse sur les Nénètses n'est pas de nature démographi-que puisque leur nombre augmen-te et était estimé au recensement de 2002 à 41 302, mais l'assimi-lation qui favorise la perte de leur culture. La scolarisation russe, la sédentarisation mais aussi l'exploi-tation du gaz et du pétrole qui me-nace leur environnement mettent en péril leur mode de vie.

Gazprom a construit des routes, des chemins de fer et des gazoducs qui ont changé le visage de la toundra

41 mille, c'est la popula-tion totale des Nénèt-ses. Mais seuls 27 000

parlent la langue nénètse. Qui plus est une majorité d'entre eux ont été convertis à l'orthodoxie.

CHIFFRES CLÉS

26 Ethnies peuplent la région. Les Nénètses, bien que principale

ethnie autochtone, ne représentent que 5,2% de la population locale, loin derrière les 300 000 Russes.

dre au parlement, ni d’oligarques pour fi nancer notre défense léga-le ». Quand la brigade n°5 de Lena Sarteto a pris la route du nord, elle a dû traverser deux autorou-tes pavées, une épreuve pour les rennes (300 par famille) et les jeu-nes familles équipées de 50 traî-neaux de bois. Une équipe de Gazprom avait pourtant recou-vert le goudron d’un matériau iso-lant glissant, un geste de bonne volonté pour faciliter le passage des Nénètses. Traditionnellement, les différents groupes se dépla-çaient à travers la péninsule selon des parcours bien défi nis. Celui de Sarteto mène au cœur du

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LE SOUFFLEDES ALLIANCES

FedorLoukianov

MOSCOVSKIE NOVOSTI

Dans le roman d’Alexan-dre Dumas, Le comte de Monte-Cristo, le mistral, ce vent puissant et froid,

représente un véritable fl éau pour la paysannerie provençale. Le porte-avion éponyme, dont la vente par la France à la Russie a été récemment entérinée, au contraire, ne peut que réjouir les ouvriers de Loire-Atlantique. C’est là que se trouve le chantier naval de la compagnie transna-tionale STX où sera exécutée la commande qui s’élève à plus d’un milliard d’euros. Même si le chô-mage est un peu plus faible dans ce département (moins de 8%) que dans le reste de la France (10% environ), cet apport dans l’emploi industriel tombe très bien pour Nicolas Sarkozy, à la veille des élections de 2012. Savoir si la Russie a besoin de ces navires pour la défense des îles Kouriles où ils seront dé-ployés, est une autre question. Cette première acquisition d’une marchandise stratégique d’enver-gure à l’un des principaux pays de l’OTAN marque une date im-portante. Ce que n’a pas manqué de remarquer la présidente du Comité des affaires extérieures de la Chambre des représentants des États-Unis, Ileana Ros-Le h - tinen, une grande amie de la Rus-sie, en qualifi ant la transaction de menace pour la sécurité amé-ricaine. Quelle est la dimension politique de ce contrat ? Évidemment, une coopération commerciale dans le domaine de l’armement entre deux États issus de blocs antagoniques et se considérant encore comme des ennemis po-tentiels ne garantit pas qu’ils ne s’affronteront plus à l’avenir. Par exemple, au XIXe siècle, la Rus-sie a souvent passé des comman-des à des chantiers navals de pays européens avec lesquels elle se re-trouvait souvent en guerre par la suite. Mais la coopération mili-taire et technique crée un lobby

politique puissant, intéressé par l’expansion de l’entreprise et donc par l’absence de confl its. Jusqu’à présent, ce genre de re-lations entre la Russie et l’Euro-pe existaient surtout dans le do-maine de l’énergie. Les plus fi ables promoteurs de l’interaction constructive avec la Russie sont les grandes compagnies éner-gétiques d’Allemagne, Italie, France, Grande-Bretagne. Et no-nobstant les efforts de la Com-mission européenne pour libéra-liser et diversifier les marchés énergétiques, ces contacts sou-tiennent la carcasse russo-euro-péenne. La coopération militaire et technique est un domaine tout aussi politisé et infl uent. L’opération « Mistral », accueillie avec crainte en Europe centrale et orientale, souligne les diver-gences des objectifs et des inté-

rêts au sein de l’OTAN. Moscou gagne à posséder un lobby en Occident, même s’il est encore difficile de deviner com-ment l’alliance évoluera. La « nouvelle » Europe cherchera peut-être à obtenir des garanties supplémentaires des États-Unis, ce qui équivaudra à la formation d’un nouveau bloc le long des frontières russes. Dans tous les cas, ces intérêts commerciaux pourront limiter ce type d’ambi-tion. On peut espérer qu’à la dif-férence du vent qui arrache les arbres à la racine, le navire qui porte son nom ne portera pas pré-judice au paysage politique.

Article publié dansMoskovskie Novosti

Fedor Loukianov est rédacteur en chef du journal « La Russie dans la politique globale ».

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La coopération militaire crée un puissant lobby intéressé par l’expansion de l’entreprise et par l’absence de conflits

HOMOPHOBES SANS SAVOIR POURQUOI

StanislavMinine

NEZAVISIMAYA GAZETA

Le maire de Moscou, Sergueï Sobianine, estime que la ca-pitale « n’a pas besoin » d’une Gay Pride. « C’est

déjà la troisième personne qui pose une question sur la Gay Pride. Il y a un problème ? », ironisait-il devant des journalistes lors d’une conférence de presse en février dernier. Le niveau de discussion des responsables russes sur l’ho-mosexualité et l’homophobie est celui d’écoliers pendant la récréa-tion. Des plaisanteries plates et puériles, quelques clins d’ œil. Pourtant il est temps que des po-litiques responsables émergent et permettent aux gays, lesbiennes, bisexuels et transsexuels de ma-nifester. Et bien sûr, ces person-nes devraient aussi être protégées contre les agressions des « acti-vistes orthodoxes radicaux ». Nous avons appris à nous insurger contre le racisme, à nous émou-voir des huées lancées des tribu-nes, des bananes brandies en di-rection de footballeurs de couleur. Mais nous ne voyons toujours pas le lien entre la discrimination dont étaient victimes les sportifs noirs dans les années 50 aux États-Unis, et celle que rencontrent les gays et les lesbiennes dans la Russie contemporaine. Parmi les signes de l’homophobie: le refus, actif ou passif, de l’idée même d’un rassemblement, d’une manifestation ou d’un défi lé des représentants des minorités sexuelles. Une intolérance justi-fi ée par des arguments fort an-ciens, selon une logique qui vou-drait que l’homosexualité soit contraire à la nature car elle ne permet pas la reproduction. Ar-gument hypocrite et fourbe puis-que les hétérosexuels sont les pre-miers à avoir des rapports pour le plaisir. Autre subterfuge désolant, l’argu-ment selon lequel l’homosexua-lité n’est pas conforme aux tradi-tions, ne correspond pas aux « bonnes » valeurs véhiculées sur la famille. Et tous ces couples hé-térosexuels sans enfants, qui ne rentrent pas dans le tableau idéal ? Et les personnes divorcées ?La Gay Pride est dénoncée comme « propagande » et ses détracteurs partent du principe que l’homo-sexualité est un style de vie. Le message des participants à la Gay Pride s’adresse à ceux qui répri-ment leur homosexualité et en souffrent. Beaucoup ne réalisent pas combien les citoyens qui par-ticipent à la Gay Pride ne jouis-sent pas de leurs droits civiques.

Beaucoup d’entre nous ne cachent pas leur homophobie. Beaucoup en sont même fi ers. L’homopho-bie fait partie de cet air que nous respirons, de notre façon d’édu-quer et d’élever nos enfants. Pen-dant de nombreuses années, le re-foulement quotidien de la sexualité dans les discours nous a conduits à ne plus savoir com-ment parler de « ça », surtout s’il s’agit d’en parler sous des formes « non conventionnelles ». Dire : « je ne veux pas que mes enfants voient ça, que les gays restent chez eux », ce n’est pas se préoccuper de la santé psychique de nos en-fants, mais reconnaître sa propre défaite pédagogique. Qu’importe si l’argumentation est rationnelle ou non. La société russe n’est pas prête à accepter la Gay Pride ou à légaliser le mariage gay. Mais formellement, elle est suffisam-ment développée pour accepter l’Autre dans sa différence. Parce que dans l’ensemble, nous som-mes tous différents. Et chacun a, dans sa vie, la possibilité de se sentir gay ou lesbienne. Je ne parle bien sûr pas de l’orientation sexuelle. Je parle de l’incompré-hension et du désintérêt.

Ainsi, en vertu de l’article 31 de la Constitution, le « droit de se rassembler pacifi quement, sans armes, de tenir des réunions, mee-tings et manifestations, des mar-ches et piquets » est grossièrement violé d’année en année.Les gays et les lesbiennes se bat-tent pour le droit d’officialiser leur relation. Les conservateurs ne sont pas prêts à accepter l’idée de met-tre sur un pied d’égalité la rela-tion mari-femme et celle des cou-ples homosexuels. Les gays et les lesbiennes aime-raient aussi élever des enfants. Une requête très controversée. Mais les opposants à cette idée ne disposent pas d’arguments suffi-

samment rationnels. Ils préten-dent notamment qu’un enfant issu d’une famille homoparentale souf-frira inévitablement de séquelles psychologiques, mais ne s’appuient sur aucune source. En attendant, des études menées aux États-Unis, au Canada et en Australie prou-vent que les enfants, élevés dans des familles homoparentales, grandissent comme les enfants de familles hétérosexuelles sans avoir plus de chances de devenir gays ou lesbiennes, contrairement aux craintes exprimées par la majo-rité conservatrice. En Russie, sur quelles études se base-t-on ?« Je ne comprends pas ce qui leur manque. Qu’ils restent donc chez eux », entend-on ça et là. L’acte de manifester dépend de la conscience de chacun, plutôt que d’une solidarité envers la majo-rité. Le droit pour les gays et les lesbiennes de manifester et de re-vendiquer est inaliénable.« Ils cherchent à imposer leur mode de vie comme une norme». Une expression typique de l’ho-mophobie, qui ne se base sur aucun fait, car il est difficile de trouver l’exemple d’un pays dans lequel les hétérosexuels feraient l’objet d’une discrimination. Le fondement de cette phobie est tabou. Car cela revient à admet-tre qu’ils pourraient « se compor-ter avec nous comme nous nous sommes comportés avec eux ».

Article déjà publié dans Nezavisimaya Gazeta.

Stanislav Minine, éditorialiste de Nezavisimaya Gazeta.

Le message de la Gay Pride s’adresse à ceux qui répriment leur homosexualité et en souffrent

Préparé parVeronika Dorman

LU DANS LA PRESSELES DESSOUS

DE L’EMBARGO

SUR LES LÉGUMES

EUROPÉENS Les Européens ne trouvent pas les causes de l’infection qui rava-ge leur continent, mais ils s’indi-gnent de ce que la Russie refuse leurs légumes ? ! La norme veut qu’un candidat à l’OMC doive en respecter les règles avant même d’y pénétrer. Ils exigent que nous les respections déjà, mais les res-pectent-ils, eux-mêmes ? Est-ce normal qu’un pays comme la Rus-sie marine depuis des années dans le statut humiliant de « candidat éternel »? Mais cette guerre des légumes est à prendre au sérieux. Nous savons que quand le Kremlin se dispute avec tel ou tel ex-pays satellite, sa production agricole cesse généralement de répondre à nos normes sanitaires !

LA GUERRE DES SALADES Mikhail RostovskyMOSKOVSKI KOMSOMOLETS

La Russie, candidate à l’Organi-sation mondiale du commerce (OMC), a décrété un embargo sur les légumes en provenance de l’Union européenne. Cette ri-poste, disproportionnée pour les Européens et pour bien des Rus-ses, intrigue. Et si derrière le sou-ci sanitaire légitime se cachaient des intentions démagogiques (les élections approchent), voire des mesures protectionnistes ?

ENTRE DE BONNES MAINSÉditorialVEDOMOSTI

SIMULACRE DE SANG-FROIDÉditorialGAZETA.RU

Quelle chance que la Russie ne soit pas membre de l’OMC ! C’est ce qui nous sauvera des terribles légumes européens. Nous avons la chance de vivre en Russie, où notre mé-decin en chef nous a maintes fois sauvés du vin moldave ou géor-gien, du poulet américain au chlore et de la grippe porcine et aviaire. Aurait-il pu en faire autant si l’on pouvait contester ses actes devant un tribunal indépendant ? Pas sûr. L’embargo sur les légumes, c’est bien, mais pas assez. Comme nous le disent les médecins, l’E. coli est aussi un problème de mains sales. Tant qu’on y est, il faudrait aus-si interdire l’importation de mains européennes, et ceux qui s’y rat-tachent.

Derrière cette répression commer-ciale pourrait se cacher une vo-lonté préélectorale de jouer l’atout « on prend soin du peuple », tout en décochant une taloche démons-trative à l’Occident arrogant. Ce soupçon est renforcé par le sang-froid dont notre pouvoir fait tou-jours preuve dans des situations tout aussi dangereuses qui surgis-sent sans cesse dans notre pays. Mais contrairement à l’E.coli, les tonnes de produits avariés dans les supermarchés et les empoisonne-ments massifs récurrents dans les écoles ne deviennent pas des évé-nements sensationnels. Ils ne dé-bouchent même pas sur des sanc-tions à l’encontre des instances de contrôle sanitaire.

L’argument invoquant la protection de la santé psychique des enfants masque une défaite pédagogique

Une large majorité de russe (60%) estime que l'Union Soviétiqueaurait pu remporter la victoire con-tre les forces nazies sans l’aide des Alliés, un chiffre légèrement in-férieur à celui de 1997 (71%). 32% estiment le contraire (contre 21% en 1997) et 9% n'ont pas d'opinion. La Seconde Guerre Mondiale est également appelée Grande Guerre Patriotique en Russie, car l'URSS n'est entrée en conflit qu'en 1941, après l'invasion des forces nazies.

Pourquoi tant de morts ?27 MILLIONS DE CITOYENS SOVIÉTIQUES ONT PÉRI LORS DE LA SECONDE GUERRE

MONDIALE. SOIT PRÈS DE LA MOITIÉ DU BILAN TOTAL DES VICTIMES.

SONDAGE

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Saisir les plus belles éruptions

Photographie Entretien avec une photographe qui consacre sa vie à ramener les clichés les plus impressionnants du Kamtchatka

être là, à côté du maestro et cher-cher la possibilité de montrer le même objet, mais à ma ma-nière ». Evoquant les spécificités de la photographie de la nature sau-vage, Daletskaya souligne qu'une photo réussie coûte parfois plu-sieurs années de travail, avec des vols en hélicoptère répétés. Si le scénario prévu pour réaliser l'ima-ge n'est pas possible, la tentative est reportée à l'année suivante.« Par exemple, en 2008, après des années de tentatives, j'ai fi nale-ment réussi à "capter" un moment unique : l'éruption du volcan Ka-rymski, qui était auparavant calme pendant cinq mois. Après une dure journée dans le froid et le vent avec un sac de 20 kilos, il a fallu passer la nuit dans l'obs-curité. Avec les équipements prêts au cas-où, je fi xais le volcan dans l'espoir d'une éruption qui pou-vait ne pas survenir. Le Karyms-ki ne s'est réveillé qu'à 4 h du matin, illuminant le ciel noctur-

La fameuse Caldéra, la vallée des geysers, un paysage unique au monde, situé dans une zone difficilement accessible.

Pour Daletskaya, chaque ours possède sa propre personnalité.

Des années d'attentes sont par-

fois nécessaire pour un cliché.

ANTON MOURADLA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

Depuis plus de 25 ans, l'intrépide Irina Daletskaya parcours la nature savage et exubérante du Kamtchatka. Son travail rassemble une collection unique de photographies.

« Ce n'est pas moi qui ai choisi le Kamtchatka, c'est le Kamtcha-tka qui m'a choisie. Ma mission est de le montrer aux gens », an-nonce Irina Daletskaya, une belle et élégante femme que l'on a du mal à imaginer au milieu des tem-pêtes de neige et du gel intense. « C'est un territoire unique, je pense que c'est précisément à cela que ressemblait notre planète à l'origine, poursuit avec passion Daletskaya. C'est une sorte de musée à ciel ouvert, sauf que pour observer certaines pièces, il vous faut un hélicoptère ».Daletskaya rêvait d'aller au Kamtchatka depuis ses années d'étudiante à l'Université de Géo-

logie. « Sur les rares photos de l'époque, j'ai été frappée par cette terre fantastique, c'est le seul en-droit sur la planète qui m'a atti-rée comme un aimant ». Après avoir gagné dans une expédition polaire son premier salaire sé-rieux, elle est partie à la rencon-tre de son rêve avec un appareil photo.Pendant ce voyage, Irina a ren-contré le volcanologue Alexan-dre Sviatlovski, qui inclut Dalets-kaya comme photographe dans le groupe d'expédition qu'il avait créé pour réaliser l'album « Les volcans actifs du Kamchatka ». Elle travailla à cette occasion avec l'éminent photographe soviétique Vadim Gippenreiter, qui devint son mentor.« Lorsque nous travaillions avec Gippenreiter sur les mêmes sites, depuis le même hélicoptère, ma tâche principale était de dévelop-per ma propre écriture de photo-graphe, individuelle et reconnais-sable. C'est extrêmement difficile:

ne d'une décharge de foudre pro-voquée par la friction des parti-cules de cendres. L'éruption a duré environ une minute, pas plus, et le lendemain le volcan s'est à nouveau tu ».Daletskaya rapporte de chaque expédition trois ou quatre "jack-pots" : des chefs d'œuvres photo-graphiques, « Je paie pour

travailler, pas l'inverse, déclare-t-elle un sourire ironique aux lè-vres. Tout le monde dépense son argent dans des voitures, des mai-sons, des croisières. Moi, je dé-pense mes derniers kopeks pour mon projet. C'est l'affaire de toute ma vie. Je veux montrer que le Kamtchatka est le chef-d'œuvre de notre planète ».

MARIA TCHOBANOVLA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

Les témoignages et études historiques sur le Goulag sont légion. Mais rassembler des témoignages antagonistes dans un même ouvrage est une première.

Victimes et bourreauxse souviennent de Solovki

Document C'est aux somptueuses îles Solovki que le Goulag a été imaginé

genre côtoient la pègre, qui est chargée par les autorités de faire régner un climat de terreur. D’origine ingouche, Sozerko Mal-sagov a d’abord pris part à la Guerre civile, pour ensuite rejoin-dre la guérilla dans le Caucase, après la défaite de l’Armée blan-che. Il atterrit aux Solovki en 1923, dupé par les bolcheviks qui

promettaient l’amnistie aux offi-ciers blancs qui se rendraient de leur plein gré. Le témoignage de Malsagov est d’autant plus inté-ressant et important qu’il est le premier à réussir son évasion en 1925. Une fois en sécurité à Riga, Sozerko commence immédiate-ment l’écriture de ses mémoires. Il raconte les sévices subis par les prisonniers et toute la violence dont il a été témoin. Il consacre également une partie de ses notes aux évènements méconnus de la

Le 15 juin à Paris, la Librairie du Globe, spécialisée dans la litté-rature russe, a présenté la sortie du livre Aux origines du Goulag. Récits des îles Solovki, aux édi-tions François Bourin. Le livre rassemble les textes de Sozerko Malsagov et Nikolaï Kisselev-Gromov, deux anciens officiers du Tsar, puis de l’Armée blanche. Tous deux ont participé à la Guerre civile, et tous deux ont été dépor-tés vers les Camps à destination spéciale des Solovki (SLON), construits en 1923 sur les lieux d’un ancien monastère du XVème siècle, près du cercle polaire. Dans ce prototype du Goulag, tous ceux considérés comme les ennemis les plus dangereux de l’État bolchevique sont déportés, condamnés aux travaux forcés. Contre-révolutionnaires, prosti-tués et faux-monnayeurs en tout

Guerre civile dans le Caucase et à l’arrivée du pouvoir soviétique dans la région, notamment en Géorgie. C’est un autre ex-offi-cier et journaliste russe, Savin, qui va aider Malsagov à publier ses récits. L’auteur du deuxième fragment, Nikolaï Kisselev-Gro-mov, est un ancien officier de l’Ar-mée blanche, passé du côté so-viétique. Lui aussi a purgé plusieurs années aux Solovki, mais pour le compte de l’admi-nistration du camp. En 1930, après cinq années de service, ne supportant plus l’atmosphère qui règne au SLON et ne souhaitant plus être complice des horreurs perpétrées par les autorités so-viétiques, Kisselev-Gromov réus-sit à s’enfuir. De ses péripéties après sa fuite, il ne reste aucune trace. En 1936, ses récits regrou-pés sous le titre Camps de la mort en URSS sont publiés à Shan-ghaï. Ses écrits, postérieur à ceux de Malsagov, sont ceux d’un tchékiste horrifié par ce qu’il observe : la fi nalité des camps, explique-t-il, c’est de « Transfor-mer les détenus en bois d'expor-tation », en les faisant travailler jusqu’à la mort.

Dans la préface du livre Aux ori-gines du Goulag, Nicolas Werth, historien et spécialiste de l’his-toire de l’Union Soviétique, écrit que la valeur et l’intérêt sont dans le fait qu’il apporte des informa-tions peu connues sur la naissan-ce du système concentrationnai-re dans la Russie d’avant Staline. Un système qui refl ète la déme-sure des horreurs et des atrocités de la Guerre civile, et où la « re-lation normative » entre victimes et bourreaux, présente dans la lit-térature plus tardive du Goulag, ne s’est pas encore propagée. Une relation réglée selon un ordre et une discipline spécifi ques, main-tenus par les surveillants et l’ad-ministration des camps.

Récits croisés de deux officiers

de l'Armée Blanche. IRINA KROLEVALA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

L'anniversaire des studios Soyouzmultfilm qui furent jadis un des grands studios de cinéma d'animation vient remettre au goût du jour la question des problèmes financiers du secteur.

L'animation russe appelle l'Étatau secours

Dessin animé Subvention ou disparition

recettes totales de 18 millions d’euros. En comparaison, les des-sins animés étrangers ont récolté 132 millions d’euros en Russie, soit une augmentation d'environ 45 millions par rapport à 2009.Le budget moyen d'un dessin animé occidental est d'environ 87 millions d’euros contre 2 millions pour un russe. Les acteurs du marché ne doutent pas que Soyouzmultfi lm parviendra à re-cevoir un fi nancement de l'État, mais l'utilité de cet argent pour relever l'industrie nationale du film d'animation est une tout autre question. Au dire d'un des interlocuteurs, la production de Soyouzmultfi lm « même pendant les meilleures années, ne pouvait pas être considérée comme une industrie à cause de la faible quan-tité d'oeuvres produites ». Même Soyouzmultfilm a déclaré que cette lettre avait été écrite par ses auteurs de leur propre chef et qu'elle ne refl était pas la position officielle des studios qui tra-vaillent sans l'aide de l'État.

Début juin, les metteurs en scène des studios ont écrit une lettre ouverte au gouvernement dans laquelle ils demandaient de faire de la production des fi lms d'ani-mation russes un nouveau projet national et d'allouer aux studios 7,5 millions d’euros de fi nance-ment sur 8 ans. En réponse, le premier ministre Poutine a pro-mis de rencontrer le groupe de producteurs.Soyouzmultfi lm traverse une pé-riode délicate. Bien que des fi lms comme Le Loup gris et le Petit Chaperon Rouge aient obtenu des prix dans les festivals internatio-naux, seuls quatre fi lms d'anima-tions russes sont sortis sur grand écran en 2010 en Russie, pour des

Un dixième des prisonniers étaient des femmes, qui étaient particulièrement visées par les humiliations

© IRINA DALETSKAYA (3)

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Page 8: La Russie d'Aujourd'hui

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À TABLE !

Ce chachlik qui n'est préparé que par les hommes

J’ai beaucoup d’affection pour mes lecteurs. Quand Laura m’a écrit pour me demander si je pouvais parler de la salade de betterave, je me préparais à accé-der à ses voeux. Mais les lilas m’ont quelque peu perturbée. Le printemps débar-que brutalement en Russie. Un jour, le monde est un pot rempli d’eau sale et de pinceaux boueux, le lendemain, il éclot en une vi-brante palette de couleurs pastel. Les premières fraises et tomates mûres déboulent d’Asie centrale et de Crimée, pour être vendues par des blondes peroxydées ar-borant tabliers et ongles sales. La betterave à cette époque de l’année ? Non, la betterave en Russie vient du butin musqué de l’automne, pas de la promesse bourgeonnante du printemps. Le printemps arrive avec les pre-mières bouffées de la fumée acre du « kostior », le feu du barbe-cue. Alors que fleurissent les lilas, les « perce-neige », ces voitures rouillées et déglinguées, qui ne servent qu’à sortir de la ville en été, prennent le chemin des dat-chas. Là, qu’il y ait de l’électricité ou non, le menu traditionnel reste inchangé : des brochettes de porc ou d’agneau mariné, grillées sur un feu de bois.Comme beaucoup de mets in-contournables, le chachlik n’est pas originaire de Russie, mais les Russes l’ont adopté. Ou plu-

Jennifer Eremeeva SPÉCIALEMENT POUR

LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

tôt, les hommes russes l’ont adop-té. Les hommes russes ne sont pas des cuisiniers nés : la cuisine, c’est un peu efféminé, rien à voir avec la domination du monde - il faut nettoyer et faire des projets à long terme. Ça ne les fait pas rê-ver. À l’exception du chachlik, qui « ne supporte pas les mains fé-minines », assurent les hommes. J’ai remarqué, pour ma part, que le chachlik survit parfaitement à la présence féminine aux étapes de la préparation et du nettoyage post-festin. Toujours est-il que les hommes russes s’adonnent à leur seule expérience culinaire avec passion : des débats animés autour du secret ancestral de la marinade (vinaigre, huile, sel et poivre), et de la bonne manière de disposer la viande sur le feu durent le temps de boire une bouteille de vodka. Avec amour, ils enfilent les mor-ceaux collants de viande sur des broches d’un mètre de long, avant de les déposer lentement entre les flammes. Je me dis parfois que si les hommes russes traitaient leurs femmes avec autant de tendresse, le problème brûlant de la natalité en déclin pourrait être résolu dans ce pays. Servez le chachlik avec des toma-tes, des concombres, de l’aneth et du pain lavach, la pita du Cauca-se. Sans autre assaisonnement que du sel. Quand le produit est frais et que le soleil ne se couche pas avant neuf heures du soir, que sou-haiter de plus ?

Ingrédients :1 kilo de porc ou d’agneau2 oignons coupés en quatre1 verre de vinaigre de vin rougeEau froideLe jus d’un citron ou 1 verre de jus de grenadePersil frais haché, aneth frais4 c. à soupe de poivre en grains4 c. à soupe de sel4 échalotes émincées4 gousses d’ail écrasées1 poignée de coriandre frais1/2 verre d’huile d’olive

Préparation :Débarrassez la viande de son gras et coupez-la en cubes de 5 cm. Pla-cez-la dans un grand plat étanche avec un couvercle. Mélangez vinai-gre, jus, persil, poivre, sel, échalote et ail dans un bocal et agitez vi-goureusement. Versez la marinade sur la viande en allongeant à l’eau pour recouvrir tous les morceaux. Réfrigérez une nuit, ou, si vous êtes

pressés, laissez quelques heures à température ambiante. Remuez régu-lièrement pour que tous les morceaux soient bien marinés. Enfilez la viande et les quartiers d’oignons sur de longues broches, aspergez d’huile d’olive et grillez en tournant souvent, jusqu’à ce que la viande brunisse. Débrochez, saupou-drez de coriandre et servez immédia-tement.Il y autant d’assaisonnements que de chachliks différents. Les sauces du Caucase allient l’acidité du citrus, le musc du fruit, et les herbes fraî-ches pour le Tkemali (sauce de prune aigre-douce) ou le goût prononcé de la noix, de l’ail et du coriandre frais pour le Satsivi (sauce aux noix). Dans les Balkans, on penche pour des sau-ces au yoghourt et à l’ail ou une salsa de tomate. Soyez inventif !

D’autres recettes surwww.larussiedaujourdhui.be

ANASTASIA GOROKHOVALA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Sur sa carte de visite verte on peut lire le nom « Roman Vert » surmontant l’inscription « Parti Animal ». Roman Sablin est l’un des militants écologistes les plus en vue de la capitale.

Chasse au plastique et au gaspillage

Environnement Un militant écologiste mène le combat dans Moscou-la-polluée

bouteilles vides (vertes, pour la plupart) s’étaient accumulées en quantité telle que Roman com-mença à les empiler entre les vi-tres de la double fenêtre. Rendu furieux par l’absence de conte-neurs de recyclage en Russie, il se mit à envisager un mode de vie écologique. Et c’est ainsi que tout a vraiment commencé.Roman déménagea à Moscou et trouva un ÉcoLoft dans un an-cien bâtiment de la rue Piatnits-kaïa, non loin du Kremlin. Avec quatre de ses amis, il emménagea dans le spacieux local de cinq chambres l’été 2010. Des couleurs « écologiques » recouvrent désor-mais des dizaines de couches de papier peint. Sur le mur à côté du poêle, le site Internet Ekoloft est inscrit en gros caractères, et des documents d’information re-posent sur la table pour les nom-breux visiteurs désirant savoir comment vivre d’une manière éco-logique dans une ville qui l’est si peu. Avant l’ouverture du loft, les oc-cupants se rasèrent la tête : fi ni le shampoing et autant d’eau éco-nomisée. Des sacs en tissu sont accrochés dans l’entrée : décla-ration de guerre au plastique. Un

Vert, tout était vert. Trousse à outils, téléphone portable, même la mobylette. Ce fut ma première impression de Roman Sablin. Il m’accueillit dans l’entrée de l’ap-partement de la résidence témoin que nous étions sur le point de louer ensemble, me lança un grand sourire, et m’étouffa pres-que en m’étreignant. Son amour pour la couleur verte commença après son divorce. Peut-être parce que le vert est la couleur de l’es-poir, et que Roman avait besoin d’espoir à ce moment-là. Origi-naire de Sibérie, il y travaillait dans une entreprise de construc-tion, ce qui ne l’enthousiasmait guère. Voulant changer sa vie, Roman se lança dans un projet artistique. Il fi t de son logement un « appartement d’art », y réu-nissant ses amis autour de verres de vodka et de cigarettes. Au bout de plusieurs mois, les

endroit a été repéré où pouvaient être déposés les objets en plasti-que ou en métal ainsi que les ver-res.Roman a trouvé sa vocation. Épa-noui, il est maintenant mince, porte le bouc et d’élégantes lu-nettes rectangulaires. Vertes, na-turellement. Pas d’alcool, pas de viande, pas de consommation d’énergie inutile. À la place, un engagement prodigieux et la vo-lonté de changer la manière dont les Moscovites pensent. Lorsqu’il évoque son loft, Roman parle de projet éducatif. Il sen -

Roman Sablin dans son ÉcoLoft de la rue Piatnitskaïa.

sibilise les jeunes à la protection de l’environnement. Chaque jeudi soir, des experts, des scientifi ques et des militants sont invités à l’école écologique. Roman ne se lasse pas de faire visiter son ap-partement, ses sacs en tissu et sa poubelle à canettes. Les ballots de foin dans le salon font sensa-tion, de même que la douche dans l’entrée et les murs décorés. Que pense son fi ls de quatre ans du mode de vie de son père ? « Il ex-plique à mon ex-femme comment les déchets doivent être triés », rigole Roman.

SVETLANA ALEKSEEVALA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

L’attachement à la maison de campagne est tel que même au cœur de l’été, nombreux sont ceux qui ne vont pas plus loin. La datcha est plus que jamais enracinée dans la culture russe.

Chez vous en pleine natureDétente Les Russes plébiscitent leurs modestes résidences secondaires

Pour « l’homo sovieticus », la datcha était sa propriété privée dans un pays où celle-ci était niée. C’était le seul moyen d’échapper momentanément au contrôle total sur la société. « J’étais à la datcha » justifiait une longue absence, une sorte d’émigration interne. La datcha met aussi du baume sur les chamailleries familiales, c’est le lieu du consensus. Elle offre un bouquet d’activités qui met tout le monde d’accord.

C’est un exode rituel. Les voitu-res s’extirpent des grandes villes chargées de jeunes et de moins jeunes, de chats et de chiens, de vieux vêtements, frigos, matelas et tout ce qui peut servir loin de la civilisation. On fuit la pollu-tion et la grisaille pour un retour à la nature hebdomadaire. De pré-férence pendant la belle saison. Qu’est-ce qu’une datcha tradi-tionnelle ? Un lopin de 600 m2, situé entre 50 et 200 km du do-micile urbain, avec quelques buis-sons, des pommiers et un pota-ger, une maison en bois sans téléphone ni eau courante, et des toilettes à l’extérieur. Il est vrai que pendant la dernière décen-nie, de fastueuses résidences se-condaires ont été érigées dans les secteurs à datchas, avec des co-lonnades, balustrades et autres fastes, mais ces constructions n’ont plus rien à voir avec les dat-chas traditionnelles.

« Nous allons à la datcha », et tout est dit. Le mari plante des clous, la femme des tomates, les enfants et les chiens sont lâchés en liberté... La datcha nourrit aussi ses oc-cupants, ce qui n’était pas rien à l’époque soviétique où le défi cit chronique de produits dans le commerce était compensé par les légumes récoltés sur son lopin de terre et mis en bocaux. Les concombres marinés à la maison ou la confi ture faite avec les fram-

boises du jardin restent imcom-parablement plus savoureux que ceux que l’on achète en maga-sin. C’est aussi le lieu idéal du rituel des brochettes (chachlik), la dé-gustation de viande prisée dans toute l’ex-URSS. Et comme le chachlik, c’est meilleur en grou-pe, il fournit une bonne raison d’inviter des amis. La vie à la dat-cha est telle qu’on ne se rend pas compte qu’il est déjà temps... de retourner en ville.

La datcha, c’est le ballon d’oxygène adoré des citadins russes.

Mieux que la mer

Selon une étude récente du cen-tre Levada : 24% des sondés pas-seront l'été dans leur datcha, 28% resteront chez eux en raison d'évé-nements importants, et 12% visite-ront d'autres régions russes (dont 7% le littoral de la mer Noire). 18% resteront chez eux, par manque d'argent. Seuls 3% partiront pour l'étranger, plus 2% qui optent pour les anciens satellites de l'URSS. 14% n'ont pas encore décidé ce qu'ils feront. Plus ils tergiverseront, plus l'option datcha aura des chan-ces de l'emporter.

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