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29 30 DROITS DES JEUNES & DES PERSONNES VIVANT AVEC UN HANDICAP CHAPITRE IV YUMA instructeur travaille au bureau basé à Pikine. Youth Urban Media Academy (YUMA) Favoriser la réinsertion sociale des anciens détenus mineurs au Sénégal Le rapport annuel 2014 de l’administration pénitentiaire du Sénégal estime que 4,95% de la population carcérale sont des jeunes de moins de 18 ans. Cependant, selon les rapports de la police et de la gendarmerie, ce nombre est en réalité beaucoup plus élevé. Plusieurs raisons expliquent cette dissimulation. Comme par exemple le fait d’éviter que cela entraîne une surveillance plus attentive et suscite des critiques à l’égard des politiques et pratiques qui peuvent aller à l’encontre des objectifs de réhabilitation et de réinsertion de la prison, ainsi que des violations systématiques des droits humains qui ont souvent lieu dans l’enceinte des prisons. Il y a cependant un autre facteur, peut être moins évident, qui intervient : les jeunes au Sénégal, une fois sortis de prisons sont fortement stigmatisés et critiqués souvent par les amis et les membres de leurs familles. Même si le système judiciaire sénégalais est relativement plus avancé que ceux des autres pays de la région, on y note toujours une certaine tendance à privilégier le caractère punitif plutôt que l’approche de la réhabilitation et de la réinsertion. Cela signifie que, bien souvent, les condamnés n’ont pas d’orientation professionnelle ou de programmes d’apprentissage et d’acquisition de compétences nécessaires à la vie courante quand ils sont en prison. Il leur sera dès lors très difficile de se réinsérer et de tisser des liens sociaux une fois libérés. La Youth Urban Media Academy (YUMA) est une association qui a été créée en 2006 par le rappeur « Matador », suite à des inondations qui ont laissé des milliers de personnes sans-abri dans la banlieue dakaroise. Ils ont vite évolué pour devenir une organisation multiforme visant à favoriser l’engagement des jeunes dans la vie sociopolitique au Sénégal, notamment en travaillant avec les délinquants mineurs. En mars 2014, après avoir collaboré avec le Ministère de la Justice du pays, YUMA a lancé un projet pilote d’une durée d’un an pour la réinsertion sociale d’ex-prisonniers mineurs. Ils ont commencé en proposant à neufs jeunes participants des formations en vidéo, en photographie, en anglais, français et culture générale. Le programme comprenait quatre séances par semaine sur une période de six mois. L’idée était de permettre à ces ex-prisonniers de partager leurs expériences, en leur donnant les moyens d’intervenir de façon créative et informelle sur des thèmes relatifs aux droits humains, à la réforme du système carcéral et à d’autres questions touchant la justice sociale. À la fin de ce projet, en octobre 2014, les neuf participants ont projeté leurs films documentaires courts-métrages lors d’un rassemblement public à Dakar. La projection a laissé place à des discussions animées sur la pauvreté, le chômage, la mendicité des enfants. Les jeunes hommes ont eu la possibilité d’expliquer au public - dont leurs propres mères - leurs motivations, désirs et plans futurs. Ils ont été nombreux à se sentir responsabilisés et soutenus suite à cette expérience. Comme l’a d’ailleurs si bien dit l’un des participants : « Ce projet nous a permis de nous réconcilier avec nous- mêmes et nous a donné le courage d’aller de l’avant ». «Je ressens beaucoup de fierté », a déclaré l’un des instructeurs de Yuma. « Ces jeunes-là sont maintenant en mesure d’utiliser leurs compétences pour changer leurs propres images. » Pour assurer la pérennité de ce projet, YUMA entend mettre en place un programme de mentorat afin de faire en sorte que ces compétences pratiques soient transmises au sein de la communauté. Programme de réinsertion de délinquants mineurs au Sénégal.

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DROITS DES JEUNES & DES PERSONNES VIVANT AVEC UN HANDICAP

CHAPITRE IV

YUMA instructeur travaille au bureau basé à Pikine.

Youth Urban Media Academy (YUMA)

Favoriser la réinsertion sociale des anciens détenus mineurs au Sénégal

Le rapport annuel 2014 de l’administration pénitentiaire du Sénégal estime que 4,95% de la population carcérale sont des jeunes de moins de 18 ans. Cependant, selon les rapports de la police et de la gendarmerie, ce nombre est en réalité beaucoup plus élevé. Plusieurs raisons expliquent cette dissimulation. Comme par exemple le fait d’éviter que cela entraîne une surveillance plus attentive et suscite des critiques à l’égard des politiques et pratiques qui peuvent aller à l’encontre des objectifs de réhabilitation et de réinsertion de la prison, ainsi que

des violations systématiques des droits humains qui ont souvent lieu dans l’enceinte des prisons. Il y a cependant un autre facteur, peut être moins évident, qui intervient : les jeunes au Sénégal, une fois sortis de prisons sont fortement stigmatisés et critiqués souvent par les amis et les membres de leurs familles. Même si le système judiciaire sénégalais est relativement plus avancé que ceux des autres pays de la région, on y note toujours une certaine tendance à privilégier le caractère punitif plutôt que l’approche de la réhabilitation et de la réinsertion.

Cela signifie que, bien souvent, les condamnés n’ont pas d’orientation professionnelle ou de programmes d’apprentissage et d’acquisition de compétences nécessaires à la vie courante quand ils sont en prison. Il leur sera dès lors très difficile de se réinsérer et de tisser des liens sociaux une fois libérés.

La Youth Urban Media Academy (YUMA) est une association qui a été créée en 2006 par le rappeur « Matador », suite à des inondations qui ont laissé des milliers de personnes sans-abri dans la banlieue dakaroise. Ils ont vite évolué pour devenir une organisation multiforme visant à favoriser l’engagement des jeunes dans la vie sociopolitique au Sénégal, notamment en travaillant avec les délinquants mineurs.

En mars 2014, après avoir collaboré avec le Ministère de la Justice du pays, YUMA a lancé un projet pilote d’une durée d’un an pour la réinsertion sociale d’ex-prisonniers mineurs. Ils ont commencé en proposant à neufs jeunes participants des formations en vidéo, en photographie, en anglais, français et culture générale. Le programme comprenait quatre séances par semaine sur une période de six mois. L’idée était de permettre à ces ex-prisonniers de partager leurs expériences, en leur donnant les moyens d’intervenir de façon créative et informelle sur

des thèmes relatifs aux droits humains, à la réforme du système carcéral et à d’autres questions touchant la justice sociale.

À la fin de ce projet, en octobre 2014, les neuf participants ont projeté leurs films documentaires courts-métrages lors d’un rassemblement public à Dakar. La projection a laissé place à des discussions animées sur la pauvreté, le chômage, la mendicité des enfants. Les jeunes hommes ont eu la possibilité d’expliquer au public - dont leurs propres mères - leurs motivations, désirs et plans futurs. Ils ont été nombreux à se sentir responsabilisés et soutenus suite à cette expérience.

Comme l’a d’ailleurs si bien dit l’un des participants : « Ce projet nous a permis de nous réconcilier avec nous-mêmes et nous a donné le courage d’aller de l’avant ».

«Je ressens beaucoup de fierté », a déclaré l’un des instructeurs de Yuma. « Ces jeunes-là sont maintenant en mesure d’utiliser leurs compétences pour changer leurs propres images. »

Pour assurer la pérennité de ce projet, YUMA entend mettre en place un programme de mentorat afin de faire en sorte que ces compétences pratiques soient

transmises au sein de la communauté.

Programme de réinsertion de délinquants mineurs au Sénégal.

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Défendre les droits des personnes vivant avec un handicap en Sierra Leone

African Youth with Disabilities Network (AYWDN)

On estime entre 180 et 220 millions le nombre de jeunes vivant avec un handicap dans le monde. En Sierra Leone, avec l’absence de données statistiques spécifiques ou détaillées, l’ONU estime qu’il y a au moins un demi-million de personnes vivant avec un handicap– ces handicaps sont entre autres dus aux atrocités commises durant la guerre civile, la malformation congénitale ou les accidents. Chez les jeunes en particulier, certains estiment qu’il pourrait représenter jusqu’à 34% de ce groupe démographique. Il est toutefois établi qu’en Sierra Leone, comme dans une grande partie de l’Afrique, les personnes vivant avec un handicap font face à d’énormes défis et sont victimes de discrimination. Au-delà des difficultés pratiques telles que les coûts élevés des soins de santé, l’accès difficile à la plupart des espaces publics et privés et les taux élevés de chômage, les personnes vivant avec un handicap font l’objet de stigmatisation sociale. Elles sont souvent réduites au silence et ont peu ou pas de position politique ni sociale qui leur permettrait de se faire entendre.

Même si la Sierra Leone a ratifié la Convention relative aux droits des personnes vivant avec un handicap (CDPH) en mai 2009 et adopté en 2011 une loi sur les personnes vivant avec un handicap, visant à répondre à leurs préoccupations particulières en matière de droits humains, il reste encore beaucoup à faire pour satisfaire leurs besoins et défendre leurs intérêts. Les graves lacunes notées dans la planification en matière de développement, les programmes en faveur de l’inclusion des personnes vivant avec un handicap et la mise en œuvre de lois qui protègent ces groupes ont eu pour conséquence de limiter la pleine participation des jeunes vivant avec un handicap. Ainsi, ce groupe sombre encore plus dans l’exclusion et continue d’être exposé à d’autres

graves problèmes de santé comme le VIH / SIDA.Le Réseau africain des jeunes vivant avec un handicap (AYWDN) créé en 2011 est une organisation panafricaine engagée à unir et à renforcer la communauté des jeunes vivant avec un handicap dans le continent. Ils ambitionnent d’influencer les politiques et les programmes régionaux qui répondent aux défis spécifiques rencontrés par ce groupe de personnes.

La coalition locale d’AYWDN-Sierra Leone a lancé en 2012, et entrepris un an plus tard un projet visant à institutionnaliser la branche locale de l’organisation et à actualiser la mise en œuvre à la fois de la CDPH et de la loi sur les personnes vivant avec un handicap. Ils l’ont fait en mettant en place un comité national de pilotage qui prône et engage les parties prenantes dans différents endroits du pays pour l’inclusion des personnes vivant avec un handicap dans les processus décisionnels. Ils ont également lancé des campagnes médiatiques pour donner une meilleure visibilité de leurs actions, notamment à travers l’impression de banderoles et de t-shirts portant des messages de non-discrimination et d’inclusion. Et enfin, ils ont organisé des ateliers de renforcement des capacités à l’intention de cinq membres du personnel d’AYWDN et de 40 membres du réseau.

Ce projet a réussi à mettre en place un cadre de jeunes militants handicapés dynamiques, activement engagés dans les questions de défense des droits les concernant. Sahr Samuel Sorie qui est de Kono et membre du Comité de pilotage, est devenu président d’Operation Clean-the-City-Kono.

« Au début, j’étais un peu réticent à l’idée de devenir membre. Je ne me doutais guère des changements spectaculaires qu’AYWDN allait apporter à ma propre vie et à celle des jeunes vivant avec un handicap à Kono et dans le pays. Je ne vais plus reculer. Je vais continuer à remettre en question les politiques et à travailler avec mes camarades militants pour influencer les décideurs clés de Kono et du pays ».

Le réseau AYWDN-Sierra Leone s’institutionnalise progressivement et s’engage de plus en plus avec les intervenants clés, tels que la Commission sur les personnes vivant avec un handicap, le Ministère de l’Éducation et les conseils municipaux (qui ont adapté et changé le regard qu’ils portaient sur les personnes vivant avec un handicap dans la société).

Dans le cadre d’une collaboration entre Jamesina King, vice-président de la Commission des droits de l’Homme de la Sierra Leone et AYWDN, 40 jeunes vivant avec un handicap à travers le pays ont bénéficié d’une formation visant à renforcer leurs aptitudes dans le domaine de la sensibilisation et de l’action militante. Comme l’a du reste indiqué King dans son discours d’ouverture lors du lancement du Réseau: « J’ai la certitude que ce réseau et tous ses membres - les femmes et les jeunes dynamiques et talentueux à travers le pays - sont outillés et prêts à mener des actions soutenues de sensibilisation afin de s’assurer que les politiques, les programmes, les lois, les institutions et même la révision constitutionnelle intègrent et prennent en compte les besoins et les intérêts des jeunes vivant avec un handicap, garantissent leur participation au développement national tout en

tenant en considération leur position. »Formation de jeunes vivant avec un handicap en Sierra Leone.

Les garçons portent des poissons fraîchement pêchés à Freetown

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Lorsqu’il est question de défendre les droits des jeunes et des enfants au Sénégal, deux problèmes majeurs persistent: le nombre exorbitant d’enfants vivant dans la rue et l’absence de mécanismes efficaces de justice réparatrice pour aider les mineurs en conflit avec la loi postérieurement à l’incarcération.

Près de 50.000 garçons au Sénégal sont des enfants de la rue et des « talibés ». Beaucoup de ces jeunes, dont la majorité ont moins de douze ans et certains âgés d’à peine quatre ans, sont amenés au Sénégal par la force ou par leur propre volonté (fugues) en provenance des pays voisins et finissent dans des «daaras» ou écoles coraniques. Malgré les tentatives répétées du gouvernement pour venir à bout de ce qui pourrait être considérée comme une « crise » sociale, notamment en interdisant totalement la mendicité ou en réprimant les « marabouts » charlatans (faux chefs spirituels musulmans) qui forcent leurs jeunes disciples à mendier du riz, du sucre et de l’argent, force est reconnaître que le phénomène est toujours d’actualité.

Promouvoir et protéger les droits des jeunes au SénégalAssociation pour le sourire d’un enfant (SUE)

Parallèlement au problème des talibés, il est nécessaire de savoir la façon dont les mineurs incarcérés sont traités dans l’enceinte des prisons, y compris la façon dont leurs besoins de base (nourriture et équipements sanitaires) sont pris en compte, la façon dont ils sont éduqués et préparés à leur réinsertion sociale. Les prisonniers sont souvent confrontés à des difficultés particulières d’un point de vue sociétal, pendant et après l’incarcération. Cela peut être particulièrement dommageable pour les jeunes, qui ont toute la vie devant eux et peuvent ne jamais se «remettre » de la stigmatisation sociale dont ils sont victimes une fois libérés.

Pour contribuer à apporter une solution au problème des talibés et des détenus mineurs, l’Association pour le sourire d’un enfant (SUE), une ONG basée à Thiès, a lancé un programme qui promeut les droits des enfants et des jeunes en proposant une éducation alternative et en renforçant les synergies entre les principaux acteurs dans les domaines de la justice, de la religion et de la société civile. Entre le 1er janvier et le 31 juillet 2014, l’organisation

a pris en charge près de 6000 talibés, enfants de la rue et mineurs en conflit avec la loi. L’association a mis au point des activités d’alphabétisation et sportives à l’intention des enfants de la rue, à travers leurs bus école, en plus de la distribution de nourriture et la mise en place de programmes agricoles aux fins de retirer les enfants de la rue. Pour les mineurs emprisonnés, l’organisation a contribué à la construction d’un bloc de santé à la prison, et a proposé un programme éducatif quotidien qui comprend des cours d’alphabétisation et des activités sportives. L’association a également contribué à fournir des services d’assistance juridique à près de 120 jeunes détenus et veillé à ce qu’un détenu sur deux ait au moins un niveau d’étude primaire.

L’association travaille également sur une initiative unique qui utilise l’escrime comme activité socio-éducative permettant de cultiver la confiance en soi, l’estime de soi et le respect d’autrui. Les enfants de la rue y participent une fois par semaine, tandis que les jeunes détenus (garçons et filles qui purgent une peine de trois ans ou plus) assistent à deux séances par semaine. Des cours spéciaux ciblant les éducateurs de SUE et les agents pénitentiaires sont également proposés, ce qui leur permet de participer et de tirer des enseignements de

Deux garçons apprennent l’escrime dans le cadre du projet SUE. Mineurs en conflit avec la loi participent à des séances. Les garçons (et filles ) sont enseignées diverses techniques d’escrime pour aider à construire la discipline, la maîtrise de soi et la confiance.

cette approche innovante de la justice réparatrice.

Voici ce qu’en ont dit certains participants :

« L’escrime m’apaise et améliore ma faculté de concentration », explique un jeune homme de 18 ans qui purge une peine pour infanticide.

« L’escrime me fait oublier ma détention. Je viens ici pour oublier tous mes soucis et jouer », dit une fille de 16 ans.

« A la fin de ces sessions de formation, les agents pénitentiaires ont pu gagner la confiance des mineurs, offrant ainsi à ces derniers la possibilité de s’ouvrir et de raconter leurs histoires personnelles. Cela leur a aussi permis de sensibiliser ces jeunes sur l’importance de l’honnêteté », dit un formateur en escrime.

« La pratique de l’escrime peut avoir un effet apaisant sur les enfants tout en leur apprenant à accepter la défaite », explique un psychologue qui travaille sur le programme.

Un documentaire expliquant la façon dont l’escrime est utilisée comme justice réparatrice dans le système pénitentiaire du Sénégal est en cours de réalisation.

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En 1989, dans le cadre des efforts du gouvernement ghanéen visant à mettre en œuvre sa politique de décentralisation, à lutter contre la dépravation et assurer une plus grande participation de tous les segments de la société aux affaires politiques, un système de gouvernance au niveau des districts a été mis en place. Initialement expérimentés dans 110 districts, ce système a fini par être installé dans 170 districts au cours des 25 dernières années. Ces mesures ont contribué à améliorer la participation politique des ghanéens (notamment les femmes qui représentent un nombre relativement élevé d’électrices), ce qui du reste est essentiel pour créer des gouvernements responsables et exécuter des politiques pertinentes de développement local. Cependant, s’agissant des personnes vivant avec un handicap (PSH), qui représentent environ 5.180.000 personnes (20% de la population du Ghana), elles sont toujours tenues à distance de toute participation significative dans la vie politique. Cette exclusion peut être en partie attribuée à la discrimination, à la perception sociale négative en raison de préjugés culturels et de la situation économique précaire. Aider à combler le fossé entre les personnes vivant avec un handicap et assurer leur participation active dans la vie politique nécessite l’amélioration de leur accès à la gouvernance locale, et plus particulièrement aux systèmes de gouvernance des assemblées de district. Selon la Fédération ghanéenne des personnes vivant avec un handicap, les personnes vivant en situation de handicap sont représentées dans moins de 20 districts sur les 170 (ou environ 25 sur un total de 7650 membres des assemblées de district et municipales). Cela signifie que les personnes handicapées sont effectivement tenues à l’écart des processus de planification, de mise en œuvre et de suivi du développement au niveau local. Depuis 1980, la Société ghanéenne des personnes vivant avec un handicap physique (GSPD) est tournée vers la promotion et à la protection des droits des personnes

Les droits au niveau des assemblées de district au GhanaSociété ghanéenne des personnes vivant avec un handicap physique (GSPD)

vivant avec un handicap à travers le plaidoyer, la sensibilisation, la mobilisation et la fourniture de moyens de subsistance. En 2012, ils ont lancé un projet d’un an visant à faire avancer la réalisation des droits des personnes vivant avec un handicap à participer à la vie de la nation (comme stipulé dans la loi de 2006); à mieux défendre leurs droits; et à acquérir les compétences nécessaires pour briguer efficacement des mandats politiques au sein des gouvernements locaux. Le projet a démarré avec un appel à contributions du mouvement des personnes vivant avec un handicap au sein des assemblées de district. Il a également été mis en place un comité composé de membres du réseau national des personnes vivant avec un handicap qui a examiné les termes juridiques de la Loi et a rédigé un document politique. Grâce à ce projet, la GSPD a formé avec succès 20 personnes vivant avec un handicap (dont la plupart sont aujourd’hui membres des assemblées de district); 25 aspirants membres; et 30 dirigeants PWD venant de six districts, sur le système de décentralisation politique, les méthodes de campagnes et les techniques de plaidoyer.

Benjamin Amankwaah est un membre de l’Assemblée de Ohemaa Park, dans le district de New Juabeng, région Est du Ghana : « Le projet a complètement changé ma vie. Les gens pensent que parce que nous sommes handicapés, nous ne pouvons rien faire d’utile dans la vie, mais grâce à (vous), nous faisons maintenant partie de ceux qui prennent les décisions dans notre communauté. Les gens nourrissaient un certain mépris à mon égard à cause de mon handicap physique mais j’ai toujours su que Dieu m’a créé avec quelque chose et je fais désormais partie de ceux qui imposent le respect dans notre communauté. Je ne peux que m’en réjouir. Je vais briguer un nouveau mandat lors des prochaines élections locales et je suis très confiant grâce au travail que je fais, en particulier pour mes frères

et sœurs vivant avec un handicap. »

On estime à 340 millions la population de l’Afrique de l’Ouest, dont plus de la moitié a moins de 35 ans. Avec une telle croissance démographique, il devient de plus en plus nécessaire et pertinent de faire des jeunes des agents clés de changement et des acteurs de développement dans la région. En Afrique de l’Ouest, comme dans une grande partie du continent, la corruption reste l’un des fléaux les plus persistants et les plus dévastateurs, surtout en ce qui concerne les affaires économiques et démocratiques. Les jeunes peuvent cependant constituer un levier puissant pour lutter contre ce fléau. Mais pour ce faire - c’est à dire engager et mobiliser des millions de jeunes hommes et femmes - ils doivent être inspirés. Améliorer la participation des jeunes dans la lutte contre la corruption nécessitera de leur communiquer le sentiment d’être personnellement concernés et capables de lutter contre ce phénomène. Il s’agira également de créer les conditions, de libérer la créativité et de donner les moyens de le faire.

Transparency International (TI) qui a pour objectif d’endiguer la corruption, a lancé en 2014 un projet d’un an qui pourrait aider à servir de catalyseur à la jeunesse ouest-africaine dans l’amélioration de la qualité de la gouvernance dans des communautés locales au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, au Ghana, en Guinée, au Libéria, au Niger, au Nigeria, en Sierra Leone et au Sénégal. A cet effet, deux principales activités ont été mises au point, un camp d’intégrité pour jeunes et L’Initiative Entrepreneurs Sociaux (IES). Ces activités permettront aux jeunes de s’engager dans des discussions et débats sur la reddition des comptes et l’intégrité; et les encourageront à faire preuve d’innovation afin de développer de nouveaux outils, projets et méthodes de lutte contre la corruption. L’une des principales préoccupations soulevées au début de ce projet (et plus généralement dans le fait de collaborer avec une organisation basée à l’étranger

Les jeunes de l’Afrique de l’Ouest luttent contre la corruptionTransparency International (TI)

telle que TI), était de savoir comment il pourrait susciter l’adhésion des organisations locales et favoriser leur croissance. Pour contribuer à la durabilité et au transfert de compétences au-delà des participants choisis pour les camps des jeunes et l’IES, et bâtir une communauté de jeunes dynamique et viable, le projet a adopté une approche à deux volets: directement, en invitant les participants à retourner dans les camps pour former d’autres jeunes; et indirectement, en développant des outils de communication dont notamment un site internet, des pages sur les réseaux sociaux et des listes de diffusion qui continuent de promouvoir et d’améliorer l’engagement et la sensibilisation des jeunes en Afrique de l’Ouest.

L’ivoirienne Alexise Ouedraogo a été la lauréate de l’IES. Elle a réalisé une série de films visant à sensibiliser les élèves sur les effets dévastateurs de la corruption.« Mon souhait est de contribuer au changement des mentalités, en allant de la base au sommet. Les séminaires et les ateliers animés par des associations d’enseignants ou d’autres acteurs du secteur éducatif n’apportent rien de nouveau et semblent même inopérants dans la pratique. En sensibilisant les principales victimes de la corruption sur leurs droits et responsabilités à travers l’éducation, j’ai voulu les encourager à utiliser leurs voix pour dire « non » et imposer le changement de manière progressive ».

« La compétition a prouvé que les jeunes de l’Afrique de l’Ouest ont de grandes idées pour enrayer la corruption. Les présentations ont révélé une profonde compréhension de la façon dont la corruption affecte l’avenir des jeunes et comment ces derniers peuvent faire partie de la solution », a déclaré Rueben Lifuka membre du conseil de Transparency International, qui a

siégé au jury du concours.