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Av 5771 9 LA FORCE DE LA TSÉDAKA

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Six histoires vous attendent dans ce bulletin, six histoires « made in France » qui ont eu lieu dans une ville différente de France, à un autre moment de l’année, à un autre moment de la journée.

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Rav 'Haïm

Kaniewsky

écrit son opinion

sur le phénomène

des délivrances

arrivées grâce à un

don à Koupat Ha’ir:

Av 5771

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SÉDA

KA

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TABLE DES MATIERESChers lecteurs,Vous tenez en main le bulletin de Koupat Ha’ir « La force de la tsédaka » et vous êtes impatient de le lire, de découvrir ces histoires miraculeuses, de vous sen-tir proche de ce lien avec D. qui se révèle par l’inter-médiaire de la tsédaka grâce à un don à Koupat Ha’ir, l’organisation guidée par les Grands Maîtres de notre génération.

Six histoires vous attendent dans ce bulletin, six his-toires « made in France » qui ont eu lieu dans une ville différente de France, à un autre moment de l’année, à un autre moment de la journée.

Cela arrive dans les grandes et les petites choses, dans les détails de tous les jours comme dans les tragédies. Qui mérite de donner mérite de recevoir. On donne la tsédaka et on reçoit la bénédiction.

Lorsque nous ouvrons le cœur et la main à nos frères en difficulté sans même les connaître, D. nous ouvre les Portes de la bénédiction et de la réussite.

Alors que nous recevons cette bénédiction extraor-dinaire par le mérite de la tsédaka, n’oublions pas un seul instant que l’essentiel, c’est la charité. L’essentiel, c’est le plaisir que nous causons au Créateur. Nous ne faisons pas de dons pour recevoir la bénédiction, en tout cas pas uniquement pour cela. Nous faisons un don à Koupat Ha’ir à cause de l’importance de cette mitsva qui cause de l’agrément à D.

Elle cause de l’agrément à notre Père céleste en parti-culier parce que le don passe par Koupat Ha’ir, l’organi-sation où chaque Juif donne naturellement, l’organi-sation de nos Grands Maîtres. Nous sommes sûrs que notre argent parvient à des personnes réellement nécessiteuses, sans le moindre gâchis. Tel est le vrai mérite ! Nous savons que tout est organisé sans faille à Koupat Ha’ir, surveillé par de grands Rabbanim, et guidé par les Grands Maîtres de notre génération.

Voilà… Le bulletin est devant vous. Dans quelques secondes, vous vous plongerez dans le récit de ces événements incroyables et vous serez ému. Vous avez raison ! Tous ces événements arrivent à des gens comme vous et nous. A vos amis, à vos voisins…

Toutes ces histoires peuvent vous arriver à vous aus-si. Vous aussi pouvez gagner ce mérite, comme eux. Faites un don à Koupat Ha’ir, et tendez la main pour recevoir la bénédiction d’en Haut…

Koupat Ha’ir

Koupat Ha’irLa principale Caisse de Tsédaka d’Israël

0800-525-523

p. 3

Une sur sept

p. 6

Disparu !

p.8

Juste à temps !

p. 10

Sauver la vie d’un inconnu

p. 12

Le dernier billet

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Avec ou sans hatan

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Une sur sept« Qu’en penses-tu ? » demande Michelle à son mari.

La responsabilité immense d’emballer tout le contenu de leur appartement en vue de leur aliya en Israël pèse lourdement sur Michelle. Chaque tâche demande une réflexion approfondie. Quoi emporter et quoi laisser, que faut-il donner et que faut-il acheter neuf en Israël ? Leur appartement à Jérusalem est bien plus petit que celui de Mar-seille. Il ne contiendra pas tous leurs meubles. A part cela, les changements des dernières an-nées au sein de leur famille – d’un foyer avec de jeunes enfants à une famille d’adultes – a mis de nombreux objets dans la catégorie « inutiles ». Si son mari et elle étaient restés là, elle n’aurait pas cherché à les jeter. Peut-être leurs petits-enfants les auraient-ils utilisés un jour. Mais lorsqu’on dé-ménage, et surtout quand on part en Israël, il n’est pas question d’emporter des objets inutiles.

« Tu as des photos de tout cela » lui dit Claude. Tu ne jettes pas les souvenirs car ils restent présents en toi, et tu as aussi les photos ».

C’est vrai. Les meubles qu’elle aime tant figurent dans leurs photos de famille. Elle hésite quant aux bulletins des enfants, aux lettres qu’ils lui ont écrites pour ses anniversaires, aux cartes de vœux avant Roch Hachana. En fin de compte, elle décide de les prendre. Un tiroir en Israël sera réservé à tout cela. Elle ne peut pas les jeter ; ces papiers font partie d’elle-même.

La maison est emballée peu à peu. Les objets encombrants seront emportés en bateau tan-dis que pour le voyage en avion, ils prendront quelques valises et des sacs à main. Les listes ont été faites depuis longtemps ; il ne reste qu’à réaliser.

« J’ai fait un don à Koupat Ha’ir pour que tout se passe bien et facilement » lui dit Claude un soir. Koupat Ha’ir fait partie de leur vie : avant chaque

fête, à chaque Appel, avant un événement impor-tant ou un soin médical, Koupat Ha’ir est présente. A part la valeur immense de la mitsva de tsédaka, ils ont constaté une utilité tangible : chaque fois qu’ils ont fait un don, la chose qu’ils devaient faire ou subir s’est passée plus facilement et mieux qu’ils ne l’espéraient. Quand Michelle fait un don à Koupat Ha’ir, elle se sent plus tranquille. Elle sait qu’elle a fait les efforts nécessaires et que désor-mais, tout est dans les mains du Ciel. Ses pressen-timents avant le déménagement se sont calmés depuis qu’elle sait que Claude a fait un don impor-tant à Koupat Ha’ir.

Les jours se suivent dans un tourbillon d’activités. Le jour où les déménageurs viennent prendre leurs meubles et leurs caisses est émouvant, éprouvant aussi. Elle les suit des yeux alors qu’ils les chargent sur le camion, puis va emballer les dernières choses. Les grandes va-lises neuves, au nom-bre de sept, sont o u -vertes par terre. Elle y ajoute des ob-jets au fur et à

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mesure, en veillant à ce que chaque valise con-tienne une certaine catégorie de choses afin de s’y retrouver plus facilement. Dans l’une, elle empile leurs vêtements de chabbat, dans l’autre, les vête-ments de tous les jours, dans la troisième les draps et les serviettes. Dans la dernière, elle dépose leur réserve de médicaments, étonnée de la quantité énorme qu’il leur faut emporter. Certes, ni Claude ni elle ne sont plus tout jeunes. Claude souffre de diabète et d’hypertension, elle de rhumatismes. A part cela, il faut emporter des crèmes, des cachets, des suppositoires, des compresses, des bandes, etc. Elle n’est pas sûre de trouver facilement en Israël tous ces produits auxquels ils sont habitués.

« Claude, qu’en penses-tu ? Que faire de tous les mé-dicaments à garder au frais ? »

Elle garde au réfrigérateur une boite entière pleine de médicaments à maintenir à basse température. Leur vieux réfrigérateur restera ici car de toute fa-çon, il ne supportera pas les rigueurs du voyage. Le nouveau locataire le jettera probablement. En Is-raël, un appareil neuf les attend dans leur apparte-ment.

« Je pense qu’il faut les prendre dans nos bagages à main, répond Claude.

– Dans nos bagages à main ? Tu crois que nous avons de la place pour tout cela ?

– Que faire d’autre ? Tu voudrais les mettre dans la valise ? Ils risquent de s’abîmer dans la soute !

– Nous pouvons les mettre dans la valise juste avant de partir pour l’aéroport et les remettre au frigi-daire dès que nous arriverons. Il s’agit d’une demi-journée, pas plus.

– Fais comme bon te semble. Crois-moi, tu t’y con-nais mieux en médicaments que moi ».

Elle trouve une boite de carton de taille moyenne, y dépose tous les médicaments au réfrigérateur, et

laisse une place pour elle dans la valise, à côté des autres médicaments.

Malgré tous les arrangements et les préparatifs, leur départ s’accompagne d’une grande émotion. Michelle se met à pleurer, chose à laquelle elle ne s’attendait pas du tout. La gorge serrée, elle fait le tour des chambres pratiquement vides. Au dernier moment, elle ouvre le réfrigérateur, prend le carton des médicaments et le cale dans la valise prévue. Elle la ferme soigneusement puis la tire dans les escaliers. Claude a déjà descendu les six autres va-lises identiques, et leurs sacs sont posés dessus. Un dernier baiser à la mézouza, et Claude la détache. Il avait déjà dévissé les vis de bon matin et à présent, il la sépare facilement du montant et la glisse dans son sac. Il ferme la porte à clé, fait un léger signe de la main et… voilà.

Ils sont en route pour Israël, pour y passer le restant de leurs jours. Au revoir la France, au revoir Mar-seille…

Elle ne se rappelle pas grand-chose de la queue pour enregistrer les bagages, de l’hôtesse, du contrôle des passeports... Tout s’est passé dans un brouillard. Heureusement que Claude s’est occupé de tout. Elle n’a pas non plus remarqué leur montée dans l’avion ni le paysage qu’elle a vu du hublot. Quelques heu-res plus tard, elle entend les instructions avant l’atterrissage. Voilà, les roues touchent le sol et son émotion s’éveille à nouveau. A présent, la joie rem-place la tension. Enfin en Israël !

« Les valises ne sont pas toutes là, leur expliquent les stewards à l’arrivée. Une partie n’arrivera que demain, dans un autre avion. Il n’y a rien à craindre! Il y a eu un problème que nous avons surmonté. Un peu de patience, vos valises vous seront achemi-nées demain à votre adresse. »

Claude prend les choses calmement mais Michelle s’inquiète.

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« Vous ne pouvez pas nous faire cela ! dit-elle à l’hôtesse. Nous avons une valise pleine de médica-ments à garder au frais. J’en ai absolument besoin maintenant ! »

Mais l’hôtesse n’a rien à lui proposer. « Je ne suis pas responsable de cela. Il n’y a aucun moyen de faire venir maintenant les bagages qui sont restés à Marseille. Allez voir ce qui est arrivé. J’espère que tout ira bien. »

« Je vais faire un don supplémentaire à Koupat Ha’ir» dit Claude, sachant que les larmes de Mi-chelle sont prêtes à couler. Il ne veut pas que la joie des débuts soit gâchée à cause d’une valise en re-tard.

« Je vais faire un deuxième don. Je te l’ai dit, j’ai déjà donné avant de partir, mais je vais donner encore maintenant, pour la valise des médicaments. »

Il sort son mobile et compose le numéro bien con-nu. Ils s’approchent du tapis roulant autour duquel les autres passagers sont groupés. Un coup d’œil leur suffit : aucune de leurs valises n’est là. Les pro-testations de toutes parts leur font comprendre que les autres passagers cherchent en vain leurs bagages. On dirait qu’une grande partie du cargo est restée en France.

Le tapis tourne.

« J’en vois une ! » s’écrie Claude, qui court et tire une

valise. Une parmi sept. Michelle le regarde, tendue.

Laquelle des sept valises est-elle arrivée ?

« Tu as un signe pour la reconnaître ?

– Non.

– Je suis sûr que le Ciel arrange les choses aux

mieux. Nous avons fait un don à Koupat Ha’ir. C’est

sûrement cette valise-là !

– Mais c’est une valise sur sept… Combien de

chances avons-nous ? »

Sans attendre, ils couchent la valise pour vérifier

son contenu. Ils se penchent et l’ouvrent…

Leurs regards se croisent. C’est la valise des médi-

caments !

« Une valise parmi sept ! dit Claude dans le taxi qui

les conduit à Jérusalem. Pour Lui, ce n’est pas dif-

ficile… Ce qu’il faut, c’est avoir le mérite nécessaire.

Et si on fait un don à Koupat Ha’ir, nos mérites sont

plus grands. C’est vraiment extraordinaire ! »

Et bien entendu, Claude et Michelle font un don

supplémentaire, pour remercier cette fois.

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« Je pense que quatre boites de sauce tomate nous suffiront pour le mois, dit Rachel à ses enfants. Il faut attendre un peu entre une boite et l’autre chez nous. Sinon, il y a certains enfants qui croient qu’on peut s’en servir à autre chose qu’à donner du goût ».

Elle ne regarde personne en particulier mais les deux grands rougissent et baissent les yeux. Ils se rappellent bien leur malheureuse tentative d’écrire des graffitis en sauce tomate sur les carreaux de la cuisine. Qui a eu cette idée terrible ? Peu importe. Tous deux l’ont réalisée avec enthousiasme, à la grande consternation de leur maman. A présent, on achètera moins de sauce tomate. C’est dom-mage, mais tant pis.

Ils avancent avec leur chariot qui s’emplit progres-sivement. Les courses mensuelles au supermarché leur font découvrir chaque fois de nouveaux pro-duits portant un hekhcher, une surveillance rab-binique. Certains sont importés d’Israël, d’autres sont fabriqués sur place.

« Des biscottes ! Qu’est-ce que vous en dites ? » Rachel scrute l’emballage et lit attentivement le relevé des valeurs nutritives. « C’est bien pour les enfants qui n’aiment pas manger du pain… »

Ils avancent dans l’allée. Leur mère les laisse par-tir pour choisir les surgelés qu’ils aiment. Ils connaissent la quantité qu’il faut et remplissent des sachets qu’ils déposent dans un coin du congé-lateur. Avant de passer à la caisse, ils les repren-dront. Ils continuent leur chemin vers les produits d’entretien. Le chariot s’emplit de plus en plus, il est près de déborder. Chacun a des préférences quant à la couleur des mouchoirs en papier, au parfum de la lessive et à la marque du cirage.

« Vous savez, cela me rappelle… » Lorsque Maman prend ce ton-là, les enfants s’approchent pour écouter. Encore l’une des histoires d’enfance inou-bliables de Maman ! Yaacov, Moché, Sarah et Arielle,

tous sont là… mais où est Michaël ?

« Maman, où est Michaël ? »

Rachel regarde autour d’elle, inquiète. Le turbulent Michaël, âgé de quatre ans, n’est pas là. Elle ne voit pas sa silhouette dans l’allée et ne se rappelle pas l’avoir entendu au cours des dernières minutes.

« Aux surgelés, il était avec vous ? » Les enfants se regardent, perplexes.

« Non, je crois qu’il n’était pas là. Il choisit toujours la même chose et ça nous énerve. Cette fois-ci, nous n’avons pas eu à nous disputer avec lui.

– Et devant les boites de sauce tomate ? »

Oui, il était là à ce moment-là. Il a marché sur le pied de Yaacov pour voir sa réaction. Oui, il était présent devant les boites de sauce tomate, très présent même. Mais depuis, un très long moment a passé. Où a-t-il pu disparaître ?

« Que chacun coure à une autre allée, demande Ra-chel. Courez d’un bout à l’autre et revenez ici dans trois minutes, que vous l’ayez trouvé ou pas. »

Les enfants se mettent à courir tandis qu’elle ar-pente la surface près des caisses. Pas de trace de l’enfant.

Les enfants reviennent les uns après les autres, tout essoufflés. L’expression de leur visage révèle le résultat de leurs recherches.

« Retournez chercher. Yaacov, va autour des caisses. Moché, près des dépôts. Sarah, à côté des bonbons. Danielle, là où il y a les promotions. Revenez dans trois minutes. »

Elle scrute de loin l’entrée du magasin. Peut-être la porte automatique l’a-t-elle attiré ? Peut-être les manutentionnaires avec leurs voitures à levier ? Elle observe partout mais Michaël reste invisible. L’angoisse commence à monter en elle.

Les enfants reviennent à bout de souffle, chacun

Disparu !

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espérant que l’autre ramènera Michaël avec lui. Mais non. Leurs yeux s’emplissent d’inquiétude. Rachel sent qu’elle est sur le point de perdre ses moyens.

Comme elle est dangereuse, cette grande surface ! Des gens obscurs qui cherchent une proie facile, des travailleurs étrangers, des lunatiques… Où Michaël a-t-il pu bien disparaître ?

Des histoires à faire dresser les cheveux sur la tête lui traversent l’esprit. Les fictions les plus effrayantes, les images les plus terribles. Michaël, petit Michaël ! Qu’est-ce qu’on est en train de lui faire? Et peut-être qu’il marche tout seul en pleurant, affolé de se re-trouver tout seul ? Qu’est-ce que son fils si mignon est en train de traverser ? Ses mains commencent à trembler. Les enfants la regardent, paralysés.

« Je fais un don à Koupat Ha’ir, les enfants ! » dit-elle en essayant de ne pas trahir sa peur car ils sont déjà assez effrayés comme cela. « Je fais un don mainte-nant et nous allons prier que D. nous aide à retrou-ver Michaël en bonne santé très vite. »

Les enfants la suivent des yeux : il y a des moments qui dépassent le temps et le lieu. Celui-ci en fait par-tie. Alors que son cœur bat à toute vitesse, le don à la tsédaka est une bouée de sauvetage presque physique. Ils ferment les yeux un instant et une prière intense monte en eux. « Mon D. ! Rends-nous Michaël en bonne santé, très vite. Je t’en prie ! »

« Maintenant, Yaacov, va chercher dehors ! Moché, près des toilettes. Sarah et Danielle, venez avec moi, nous allons voir ce qui se passe aux ascenseurs. »

Elle donne un portable à Yaacov avant qu’il ne s’éloigne en courant. Elle et ses filles filent vers l’ascenseur. Cet enfant a-t-il décidé de se promener de haut en bas ? Les talons heurtent le carrelage, le cœur bat comme un tambour. Michaël ! Michaël ! Où es-tu ?

« Il est là ! s’écrie Yaacov au portable. Il est là, on l’a trouvé ! Micky ! Dis quelque chose à Maman ! »

Rachel fond subitement en larmes. Toute la tension accumulée disparaît en une seconde et s’écoule en une cascade de larmes.

« Maman ! Cela n’a pas pris plus d’une minute. Dès

que je suis sorti, après ton don à Koupat Ha’ir, je l’ai vu ! Cela m’a pris trente secondes pour le rejoindre. Il marchait tout seul dehors, tout seul ! »

Après ton don à Koupat Ha’ir, je l’ai vu... Quel miracle que nous ayons fait un don ! Qui sait à quoi il a échappé ? Elle refuse de penser à ce qui aurait pu arriver. L’essentiel, c’est qu’il est là. Il est là, mon D. !

Rachel pense parfois que le service que Koupat Ha’ir lui rend est bien plus grand que celui qu’elle rend à Koupat Ha’ir. Voilà, comme maintenant par exemple. Qu’aurait-elle fait ? Combien d’heures d’affolement seraient-elles passées ? Que serait-il arrivé à son petit Michaël ?

Koupat Ha’ir l’a sauvée, littéralement.

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Juste à temps !« Viens, partons, David, dit Hanna. Il est vrai que la route ne prend que deux heures et que chabbat ne commence que dans cinq heures. Mais je voudrais que nous arrivions tôt, que nous ayons le temps de nous organiser et même de nous reposer un peu. Pourquoi attendre ? »

David ne voyait aucune raison de prendre la route si tôt et de rester ensuite à ne rien faire chez leurs hôtes. En outre, ceux-ci ne sont peut-être pas en-core prêts ! Il déteste être l’invité qui arrive au beau milieu du nettoyage et qui reste planté là où il ne faut pas. Il vaut mieux arriver un peu trop tard qu’un peu trop tôt.

« Mais David, et chabbat ! La veille de chabbat, on ne part pas en voyage à la dernière minute ! »

Il sourit : « Tu sais, mes amis en Israël m’ont raconté que chaque vendredi, une voiture passe dans les rues de la ville. Le haut-parleur rappelle aux habi-tants qu’il ne faut pas quitter la ville moins de deux heures avant l’entrée du chabbat. C’est incroyable, non ? »

Elle a du mal à sourire ; les histoires sur ce qui se passe en Israël le vendredi ne l’intéressent pas outre mesure à présent. Elle voudrait être déjà ar-rivée chez ses hôtes dans la ville voisine. Elle res-sent un malaise indéfinissable, comme une ango-isse sourde. David la regarde de côté, étonné. Gé-néralement, Hanna est patiente. Que signifie cette tension soudaine ? Le voyage ne prend que deux heures et ils ont cinq heures devant eux. Pourquoi est-elle si nerveuse ?

La réponse, il la reçoit sur la route…

Un bouchon interminable se dessine devant eux. A perte de vue, la file de voitures avance comme une rangée de fourmis. Un demi-tour de roues, un tour. Jamais plus d’un tour en une fois. Hanna se mord les lèvres.

« Heureusement que tu as insisté que nous par-tions tôt, commente David avec honnêteté. Le bouchon le plus lent finit toujours par se termi-ner et nous avons cinq heures devant nous. Mieux vaut utiliser notre temps utilement car nous n’arriverons pas tout de suite. Tu voudrais dormir? Tu voudrais boire quelque chose ? »

Non, elle ne veut ni dormir ni boire. Elle voudrait en avoir fini avec ce voyage. Qui sait quand ce bouchon disparaîtra ? Elle tente de freiner ses pensées pes-simistes.

David met la musique en marche et laisse les sons harmonieux calmer leurs nerfs à vif.

« David ? Il me semble qu’il vaut mieux renoncer à cette invitation. Viens, retournons à la maison. J’ai encore le temps de préparer ce qu’il faut pour chabbat. Rentrons, il vaut mieux que nous pas-sions chabbat chez nous. »

Qu’arrive-t-il à Hanna ? Pourquoi est-elle si nerveuse? Cela ne lui ressemble pas du tout. Et al-ors s’ils sont un peu en retard ? Ils arriveront deux heures avant chabbat au lieu de trois ; de toute fa-çon, leur aide n’est pas nécessaire pour les prépara-tions du chabbat.

Le bouchon n’avance pas, pas du tout. Cela com-mence à déplaire à David. Au début, il s’était calé sur son siège et avait laissé ses pensées vagabond-er. A présent, lui aussi est impatient et inquiet. Il serait prêt à accepter la proposition de sa femme mais un regard à l’extérieur le ramène à la réalité: il n’y a aucune possibilité de faire marche arrière.

« Je vais bientôt me mettre à pleurer, pense Hanna, paniquée. Je vais pleurer comme un bébé. Je sens les larmes arriver. Oh ! Que faire ? »

Le bouchon ne bouge pas mais le temps, lui, avance très vite.

« Je n’ai jamais transgressé chabbat, sanglote Han-

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na. Est-ce que nous dev-rons le faire aujourd’hui ? Il est impossible de rester un chabbat entier sur le bas-côté de la route ! C’est trop dangereux ! Mais est-il possible de rouler pendant chabbat ? Je ne peux pas ! Non, je ne peux pas !

– Nous avons encore une heure et demie jusqu’à chabbat, Hanna !

– Une heure et demie ! Quand nous sommes par-tis, nous avions cinq heures. Trois heures et demie sont déjà passées et il nous reste une heure et de-mie. La route est encore longue. Qu’allons-nous faire si c’est l’heure de chabbat et que nous som-mes encore bloqués ici ? »

David se rend bien compte lui aussi qu’ils sont dans une situation risquée.

« As-tu une idée ?

– Aucune. Mais je pleure, je pleure parce que c’est ce qu’il faut faire. Il faut pleurer devant D. et supplier qu’il nous tire de ce mauvais pas et nous évite de profaner le chabbat ! »

David se rend compte qu’elle a raison. Pleurer devant D. et chercher des mérites... Soudain, la lu-mière se fait en son esprit. Koupat Ha’ir ! Comment n’y a-t-il pensé plus tôt ? La seule chose qu’ils peu-vent faire pour sauver la situation. Koupat Ha’ir… La mitsva de tsédaka, les sommes intégralement versées aux pauvres, les recommandations des Grands Maîtres de notre génération. Tous les avantages en une fois. Avant les fêtes, Hanna fait régulièrement des dons à Koupat Ha’ir et lit avec intérêt les histoires racontées dans les bulletins. A présent, le moment est venu.

« Tu veux qu’on donne 18 euros ? » demande-t-elle à David. Il hoche la tête. Oui, 18, c’est la valeur numéri-que de חי, vivant. « Puisse D. nous donner la vie et nous sauver de la profanation du chabbat. » Il fris-sonne.

« Prenons 18 euros dès maintenant et mettons-les de côté, propose-t-elle. Ce sera comme un don con-cret. Et prions… »

Il sort l’argent de son portefeuille et le met de côté. Ensuite, ils lèvent les yeux vers D.

Le bouchon

n’avance pas mais

quelque chose s’ouvre en

leur cœur. Le fait d’avoir accompli

tout ce qu’ils pouvaient leur apporte un sen-

timent de sérénité bienfaisant. Ils ne savent pas

encore comment le miracle arrivera, mais ils ont

confiance en D. et en la force de la tsédaka.

« En moins d’un quart d’heure ! raconte Hanna à

la secrétaire de Koupat Ha’ir à l’issue du chabbat.

En moins d’un quart d’heure, le bouchon avait lit-

téralement fondu ! La route s’est ouverte brusque-

ment et nous sommes tous sortis de ce bourbier.

Les chauffeurs ont filé comme si on les avait sortis

d’une cage. Nous avons foncé vers la maison de nos

hôtes et nous sommes arrivés avant l’allumage des

bougies. Je n’ai jamais vécu un chabbat aussi gai.

– Vous voulez transmettre des noms pour la béné-

diction des Rabbanim ? demande la téléphoniste.

– Non, je veux seulement payer ma dette. Je n’ai

jamais été tellement contente de rembourser

une dette. Croyez-moi, je n’ai jamais éprouvé

une joie pareille. Lorsque nous sommes arrivés

à destination et que je me suis approchée pour

allumer les bougies, je me suis rendu compte à quel

point la peur m’avait étreint pendant les dernières

heures. Je me suis mise à pleurer. C’était tellement

prodigieux, ce bouchon qui a disparu en quelques

minutes ! Généralement, cela prend des heures

pour qu’un engorgement pareil se dégage. Mais là,

c’est comme si des anges étaient descendus pour

nous frayer un chemin ».

En fait, ce n’est pas « comme si », c’est vraiment ce

qu’il s’est passé.

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Sauver la vie d’un inconnu

Nathalie a la voix bouleversée.

« Marc était assis à côté du conducteur, raconta-t-elle la voix tremblante. C’est ce qui l’a sauvé d’ailleurs, car s’il avait été assis derrière, on au-rait pu l’enterrer avec la moitié de la voiture qui a été arrachée. Arrachée, littéralement. Tu vois une belle voiture qui a l’air solide, et tu ne sais pas qu’en réalité, c’est une fine plaque de métal qui se déchire comme rien !

– Et comment va-t-il maintenant ?

– Il est blessé, assez gravement. Il est dans le coma. Tant qu’il ne se réveille pas, on ne saura rien. D’après les examens, la tête n’est pas touchée, mais on ne peut rien savoir avant qu’il ne se soit réveillé.

– C’est arrivé il y a combien de temps ? Quand a eu lieu l’accident ? »

De nombreuses heures ont passé depuis l’accident. Il a d’abord fallu le transporter à l’hôpital, puis l’identifier, puis prévenir sa famille qui ensuite a fait part de la nouvelle à son entourage. Pendant tout ce temps, il n’a pas repris connaissance…

« Tu es sûre qu’on ne l’a pas endormi ?

– Oui. Les médecins disent qu’ils ne l’ont pas en-dormi. Les blessures qu’il a subies au corps, il s’en sortira, ce n’est pas pour cela qu’on est inquiet. Ce qui est vraiment inquiétant, c’est qu’il ne se réveille pas. Et quand il se sera réveillé, on espère qu’il n’aura pas perdu ses facultés…

– Oh ! Ne dis pas cela ! s’écria Stéphanie en frisson-nant.

– Marc était si… si plein de vie ! Si empli de vitalité et de joie ! Il était toujours aimable. Partout où il arrivait, il apportait le rire, la bonne humeur et l’optimisme. Est-il possible que cet homme soit

dans le coma à l’hôpital ? »

Nathalie ne pleurait pas à chaudes larmes mais Stéphanie l’entendit se moucher. Elle la compre-nait : Marc était un vieil ami de la famille qui les avait très souvent aidés. Stéphanie éprouva de la pitié pour le blessé, ainsi que pour son amie in-quiète.

« Donne-moi des nouvelles, Nathalie, dit Stéphanie. Et prie ! Prie de tout ton cœur. Moi aussi je vais prier et je vais demander à Sophie de réciter des Téhillim. A part cela, nous ferons un don à Koupat Ha’ir ; fais-le toi aussi. Chaque prière est influente, chaque don aide. Nous ferons pour lui tout notre possible. »

Nathalie semblait un peu rassérénée et Stéphanie put raccrocher avec un sentiment de soulagement. Elle chercha sa fille des yeux pour lui demander de prier pour le blessé. Elle écrivit son nom et le nom de sa mère sur une feuille blanche, qu’elle fixa à l’aide d’aimants sur le réfrigérateur : Yaacov Jacky ben Vivianne Rachel. Elle tremblait d’y penser : un homme sort de chez lui le matin et au lieu d’arriver à destination, il est pris dans un grave accident de la route et se retrouve à l’hôpital. Comme c’est terrible !

Sophie était penchée sur un livre de Téhillim et récitait un chapitre après l’autre. Au regard inter-rogateur de sa mère, elle lui montra son mobile. Après avoir appuyé sur les touches, elle lui fit ap-paraître le message sms qu’elle venait de recevoir: Récitez s’il vous plait d’urgence des Téhillim pour la guérison de Yaacov Jacky ben Vivianne Rachel qui a été grièvement blessé dans un accident de voiture.

« Ah ! Tu lis des Téhillim pour lui ? demanda Stéph-anie, étonnée de la coïncidence. A l’instant, Na-

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thalie vient de me parler de lui, justement de cet homme-là. C’est un ami de sa famille. Elle est dans tous ses états, la pauvre. Je lui ai parlé long-temps au téléphone jusqu’à ce qu’elle se soit un peu calmée. Elle n’arrive pas à se représenter cet homme si gai dans le coma. »

Sophie hocha la tête, et continua à prier. Stéphanie alla chercher son livre de Téhillim et s’arrêta près de la boite de tsédaka de Koupat Ha’ir posée sur une étagère de l’entrée. Elle préfère toujours faire ses dons par carte bancaire, pour que l’argent parvienne immédiatement aux pauvres. Mais elle laisse la boite devant elle pour lui servir de rappel.

« Je peux faire quelque chose pour cet homme, pensa Stéphanie. Il est vrai que je ne le connais pas mais c’est un Juif, et moi aussi. Il est en danger et moi, j’ai un moyen de l’aider. Pourquoi ne pas le faire ? »

Cette pensée l’emplit d’enthousiasme. Elle reprit son mobile en main et composa le numéro de Koupat Ha’ir qu’elle connaissait par cœur car elle l’utilisait souvent. Elle expliqua à la téléphoniste qu’elle désirait donner 100 euros et lui demanda de transmettre le nom Yaacov Jacky ben Vivianne Rachel aux Rabbanim pour qu’ils prient pour sa guérison.

« Maman ? Tu connais le blessé ? demanda Sophie. Pourquoi as-tu donné 100 euros pour lui ? C’est une très grosse somme !

– Est-ce trop pour sauver une vie ? Pour aider un Juif qui souffre ? Non. Je ne le connais pas du tout. Mais j’ai entendu parler de lui, et sa situation me fait de la peine. »

Ses mots émanaient d’un endroit nouveau qui ve-nait de s’ouvrir en son âme. Elle se sentit grandir et s’approcher de D. Elle continua à réciter des Téhilli-lm et demanda le soir à son mari d’en faire autant. Chacun des membres de leur famille a prié pour la guérison de Yaacov Jacky ben Vivianne Rachel après la récitation du Chéma au coucher.

Le lendemain matin, très tôt, Nathalie l’appela au téléphone. Lorsque Stéphanie vit son numéro sur l’écran, elle eut si peur qu’elle eut du mal à décro-cher. Pourquoi appeler si tôt le matin ? Y avait-il de mauvaises nouvelles ?

Nathalie était enthousiaste : « Il s’est réveillé ! Il est sorti du coma ! » annonça-t-elle.

Quelle joie ! Quel soulagement !

Un Juif inconnu vient de sortir du coma. Il ne fait pas de doute à Stéphanie qu’elle a une part dans le miracle qui vient de se produire. Quel sentiment extraordinaire que d’aider un Juif qu’on ne connaît pas. N’est-ce pas encore plus touchant que de prier et de faire un don pour un ami ou un parent ?

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Le dernier billet« Johanna, tu sais qu’il reste un mois et demi jusqu’au mariage. A cette allure, il faudra que tu dévalises une banque pour payer tous tes achats ! »

Sylvie regarde sa jeune sœur avec un mélange d’affection et de moquerie. Johanna hausse les épaules.

« Qu’est-ce que tu veux que je fasse ? Que j’aille au mariage avec des chaussures pas assorties à mon vêtement ? Que j’aie l’air d’une pauvre, ou d’une fille qui n’a aucun goût ?

– Je veux que tu ouvres les yeux, c’est tout. Au rythme des achats que tu fais, on pourrait croire que tu es la fiancée ! Lady D. n’a sûrement pas dépensé autant d’argent que toi pour son propre mariage !

– Ah ! Ah ! Très drôle ! Si tu avais combien a coûté sa robe ! Je pourrais travailler toute ma vie sans gagner cette somme. Ce que je fais, c’est ce que je peux avec mes moyens limités : je gagne très peu et je m’arrange avec ce que j’ai. C’est déjà bien que je ne demande pas à Papa et Maman de payer pour ce que j’achète.

– Merci ! Je te remercie du fond du cœur, Mlle Jo-hanna, d’être si raisonnable et de ne pas obliger Papa et Maman à payer pour tes folies. »

A ce stade, la discussion dégénère en une bataille de coussins. Johanna jette le coussin du canapé sur les pieds de sa grande sœur, qui se « venge » en le renvoyant sur sa tête. Les jeunes filles continu-ent à se jeter le coussin de l’une à l’autre, à tomber en éclatant de rire et à se relever pour recevoir un autre coup de coussin. Leur mère qui rentre plus tôt que prévu se trouve prise dans un champ de bataille…

« Qu’est-ce qu’il se passe ? Vous êtes des bébés ? Qu’est-ce que cette agitation ? »

Sylvie se dresse au milieu de la pièce, les mains sur les hanches.

« Maman ! Il faut remercier Mlle Johanna qui se contente de dépenser pour le mariage tout l’argent qu’elle a économisé pendant tout l’hiver. Elle mérite notre admiration pour ne pas mettre votre compte en banque à contribution !

– Tu veux arrêter tes moqueries, s’il te plait ? Qu’est ce que cela peut te faire, la façon dont Johanna uti-lise ses économies ? Elle a travaillé pour cela ! Si elle veut les donner entièrement à Koupat Ha’ir ou si elle veut s’acheter des pizzas avec tout son argent, je n’y vois pas d’inconvénient. C’est son argent et elle en fait ce qu’elle veut.

– Mais tu préfèrerais les pizzas…

– Ce que je préfère, c’est que chacun s’occupe de ses affaires. C’est tout. Maintenant, Johanna, montre-moi ce que tu as acheté. »

Johanna soulève le sachet élégant posé par terre. Elle l’ouvre et en sort une boite de chaussures de luxe.

« 170 euros ! soupire-t-elle. J’ai fait tous les magasins de chaussures. Je n’ai pas trouvé une seule paire as-sortie à ma robe. Pas une seule ! A part cette paire-là que j’ai vue depuis le début mais dont le prix était exorbitant. 170 euros ! Les gens sont devenus fous ! Mais il faut reconnaître que cette paire me va très bien. Cela fait deux semaines que je fouille partout sans rien trouver. Et je me promets que ces chaussures-là, je ne les achèterai pas à cause du prix. Mais aujourd’hui, j’ai craqué. Au lieu d’acheter un autre vêtement, j’ai acheté ces chaussures. »

La mère écoute en silence ses explications.

« Enfile-les que je les voie. »

Johanna les enfile sans enthousiasme. Les chaussures étaient magnifiques.

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« Va mettre aussi ta robe pour le mariage. Je voud-rais les voir ensemble. »

Quand Johanna quitte la pièce, la mère fait la leçon à Sylvie :

« Johanna est à l’âge sensible. Je ne suis pas d’accord que tu te moques d’elle parce qu’elle accorde tant d’importance à ses chaussures et à sa robe. Si nous passons cela sous silence, elle mûrira et changera d’elle-même. Si nous luttons contre, elle risque de s’accrocher rien que pour nous prouver qu’elle a raison. Tu comprends ? Elle travaille dur pour gagner son argent de poche et elle en connaît la valeur. Pour elle, son apparence a de l’importance. Après tout, ce n’est pas tous les jours que son frère ainé se marie ! »

Johanna revient, les talons de ses chaussures frap-pant le parquet. Sa tenue est vraiment splendide et lui va à merveille. Sylvie et sa mère applaudis-sent spontanément. Johanna rougit et se sauve pour se changer. Elle caresse sa belle robe avec affection et l’enveloppe à nouveau dans son em-ballage. Elle remet ses chaussures dans leur boite qu’elle glisse dans l’armoire. Voilà, à présent, elle est prête pour le mariage.

Le lendemain matin, Sylvie entre dans sa cham-bre. « Il y a un nouveau bulletin de Koupat Ha’ir, annonce-t-elle. Tu veux le lire ? »

Koupat Ha’ir fait partie de leur vie. Avant chaque événement, banal ou important, toute la famille fait un don. Lorsque des bulletins sont distribués, lors des appels, avant chaque fête, Koupat Ha’ir les accompagne.

« Lis-le, il est très intéressant. Je l’ai déjà lu deux fois. A mon avis, celui qui a une âme juive ne peut pas s’empêcher de se sentir lié à Koupat Ha’ir. »

Johanna prend le bulletin en main et parcourt les titres des yeux.

« Je n’ai pas d’argent à donner, dit-elle. J’ai dépensé tout ce que j’avais. Tu sais, les chaussures m’ont coûté deux fois plus que ce que j’avais prévu de mettre. Tout l’argent que j’ai gagné grâce aux cen-tres aérés et aux babysittings, je l’ai dépensé. Je n’ai pas le moindre projet de travail en vue pour l’instant.

– Alors ne donne pas, mais lis-le. Nos frères souf-frent, d’autres frères se dévouent pour eux, et nous faisons partie de cette action même si nous ne donnons rien pour l’instant.

– Et toi, tu as donné ? Combien ? Un cinquième de ce que tu as ? La dernière fois, tu as donné 300 eu-ros. C’est presque la moitié de ton salaire.

– Laissons de côté ce que moi je donne. J’ai donné ce que je pensais bien. »

Johanna reprend le bulletin en main et se met à lire attentivement. Elle le termine d’un bout à l’autre et pousse un soupir. Elle court chercher son portemonnaie. Peut-être lui reste-t-il quelque chose, malgré tout ? Elle ne veut pas le dire à Sylvie, mais elle

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voudrait beaucoup donner. Elle espère qu’il lui reste de l’argent ; si elle se rappelle bien, il y avait encore un billet.

Oui, un billet, tout neuf. Son dernier billet. Avant le mois prochain, elle n’a aucun travail prévu. Au-cune rentrée d’argent, aucun babysitting, aucun cours particulier. Rien. La morte saison de ses petits jobs. En cette période de grandes vacances, les gens sont partis. Si elle donne maintenant son dernier billet, cela veut dire qu’elle arrivera au mariage sans un sou. C’est de la folie. Il ne faut pas qu’elle le donne. Si elle en avait deux, elle en aurait volontiers donné un. Mais comme cela, c’est trop dur : elle déteste se sentir sans le sou. Lorsqu’elle recevra de l’argent, elle fera un don, si D. veut.

Le bulletin déclenche une lutte intérieure difficile. Elle fouille encore dans son portemonnaie et dans son sac. Rien. Il ne lui reste qu’un billet. Et si elle a besoin de quelque chose ? Et si elle veut acheter encore un accessoire pour le mariage ?

« Non, le bulletin est arrivé maintenant, et je vais donner ce que j’ai » décide-t-elle brusquement. Elle se sent soulagée. Elle prend son billet et entre dans la chambre de Sylvie.

« Sylvie ! Il me reste quelque chose. Prends ce billet et remets-le en même temps que ton don à toi. Je veux participer à l’appel de Koupat Ha’ir. »

Le téléphone en main, Sylvie prend le billet et hoche la tête tout en continuant à écouter son in-terlocutrice. Elle introduit le billet dans un sachet blanc

portant l’inscription « Koupat Ha’ir ».

Johanna retourne dans sa chambre, le cœur

débordant de joie. Quel sentiment spécial que de

donner son dernier billet ! Elle n’a jamais senti ce

qu’elle ressent maintenant. « C’était mon dernier

billet ! Maintenant, mon portemonnaie est vide,

vide ! »

Elle l’ouvre à nouveau pour vérifier qu’aucun bil-

let supplémentaire ne se cache quelque part. Non.

Aucun.

Le son d’un message sms l’interrompt et elle jette

un coup d’œil à l’écran.

« Johanna ! Nous sommes revenus en ville pour

quelques heures. C’était imprévu. Est-ce que tu

pourrais garder nos enfants ce soir ? Pendant

trois heures et demie, depuis 18h30. Merci. Sophie. »

Trois heures et demi… Johanna fait rapidement

le compte de son salaire futur pour ce babysit-

ting. Le résultat : le même billet qu’elle vient de

donner à Koupat Ha’ir lui reviendra ce soir à 22

heures ! Le même billet, la même somme

exactement !!!

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« Tu vas bientôt te fiancer, dit sa mère avec une gaité qui tente d’être sincère. Ce sont tes derniers jours de célibat. Profite-en ! Profite de ta liberté ! Pourquoi être toujours préoccupée par des soucis ?

– Comment sais-tu que je vais bientôt me fiancer ? demande Avigail avec une certaine amertume. Pourquoi espérer que la prochaine fois, cela se terminera autrement ?

– Parce que la prochaine fois, ce sera probablement après les quarante jours où les envoyés de Koupat Ha’ir auront prié pour toi à Amouka. Tu crois qu’avec des prières pareilles, c’est la même chose ? »

Non, elle sait que ce n’est pas la même chose. Avigail et sa mère font souvent des dons à Koupat Ha’ir indépendamment et transmettent les deux sommes ensemble. A part cela, elles ont toutes deux signé sur des prélèvements automatiques et aiment aussi donner de petites sommes de temps en temps. Pendant ces quarante jours où les envoyés de Koupat Ha’ir prient pour elle à Amouka, elles prient elles aussi, l’après-midi, en récitant des Téhillim et en ajoutant une prière personnelle. Elles prient qu’Avigail trouve le mari qui lui est destiné, son âme sœur. « Zivoug hagoun békarov » – un bon partenaire prochainement. Prochainement, oui, c’est important. Elle a connu beaucoup de déceptions ; beaucoup de propositions lui ont causé des soucis sans aucune conséquence positive. Si seulement la prochaine fois, cela pouvait être la bonne !

« Nous ne faisons pas un don puis nous désintéressons de la chose en pensant que quelqu’un fera le travail pour nous » lui dit sa mère quarante jours plus tôt après avoir téléphoné à Koupat Ha’ir et s’être inscrite pour 40 jours de prières à Amouka. Ce n’est pas la bonne attitude. Les envoyés de Koupat Ha’ir prieront pour nous, l’argent que nous avons donné ira à la meilleure charité qui soit, et le mérite de la tsédaka fera son effet. Quant à nous, nous ferons notre part. Nous prierons chaque jour nous aussi, nous ajouterons des mérites et des prières, et nous espérons que D. agréera nos efforts. Notre prière a une grande importance ».

Depuis, pendant quarante jours, elles prient et récitent des Téhillim tous les après-midis et ajoutent parfois un petit don pour ouvrir les Portes du Ciel.

Ces prières sont estimées au Ciel, cela ne fait pas de doute. La mitsva de tsédaka a une force extraordinaire. Et les 40 jours de prières à Amouka, et leurs prières ici. Quelque chose va changer…

« Les 40 jours à Amouka vont bientôt se terminer, Avigail. Je vois déjà l’assiette que nous allons casser à tes fiançailles. As-tu un vêtement pour les fiançailles?

– Des fiançailles sans hatan, Maman ? Oui. Pour des fiançailles pareilles, j’ai un vêtement. »

Avigail ne comprend pas d’où sa mère puise cette assurance. 36 jours ont déjà passé. Il n’y a aucune proposition matrimoniale en vue. Comment parler de fiançailles à présent ?

Mais sa mère avait raison. A la fin des 40 jours, une bonne proposition de chidoukh leur a été faite. Pendant une semaine, ils se sont renseignés sur tous les détails puis ont fait avancer les choses. Les deux jeunes gens ont de suite senti qu’ils étaient destinés l’un à l’autre. Avigail était plus heureuse que jamais.

Moins de quatre mois plus tard, Avigail était mariée et marchait fièrement aux côtés de son jeune époux. Moins de quatre mois ! Si on le lui avait dit à ce moment-là, elle ne l’aurait pas cru.

« Alors, tu t’es fiancée avec un hatan ou sans hatan ? lui demande sa mère en plaisantant. Les 40 jours de prières à Amouka se sont terminés, la proposition s’est présentée et tout s’est passé facilement. Voilà, un peu plus de trois mois plus tard, vous êtes déjà mariés. Est-ce qu’il peut y avoir mieux que cela ? »

Non, vraiment pas. D. merci mille fois !

Avec ou sans hatan

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Pour obtenir les autres bulletins déjà parus, vous pouvez téléphoner au :0800-525-523

ou consulter le site de Koupat Ha'ir:www.koupathair.com