Intoxications par les esters organophosphorés.

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Pratique Médicale 5ème année FMSDr. Methammem

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Intoxications par les esters organophosphorés

Pr Hafedh ThabetService des urgences- centre anti poison-

Centre d’assistance médicale urgente- Tunis

Congrès Fédération Maghrébine de médecine d’urgence Hammamet, Samedi 27 Mars 2010

Cas clinique

• Un Etudiant âgé de 22 ans est admis au service des urgences pour coma convulsif avec encombrement bronchique.

• Il a été retrouvé inconscient dans sa chambre au foyer universitaire avec présence d’une bouteille vide (Fattak, Dichlorvos) de 100 ml

• Le patient est comateux, avec un score de Glasgow à 7, Il est polypnéïque (fréquence respiratoire à 32 /min et saturation à 85% en air ambiant), avec une PA= 95/60 mmHg , fréquence cardiaque à 55/min). Les pupilles sont en myosis serré. Il existe une plaie latérale au niveau de la langue

• L’auscultation pulmonaire retrouve des râles ronflants diffus et des crépitants aux deux bases.

• Des traces de vomissements, une hyper- sialorrhée et une diarrhée étaient présentes.

• L’examen abdominal: sensibilité épigastrique • Les gaz du sang artériel (AA) montrent : pH à 7,28, HCO3

- 18 mmol/l, PaCO2 à 25 mmHg et PaO2 à 61 mmHg, L’ionogramme sanguin retrouve une natrémie à 144 mmol/l, une kaliémie à 2,1 mmol/l, une chlorémie à 92 mmol/L mmol/l, une créatinémie à 134 µmol/,une urémie à 9,8 mmol/l et une lipasémie ↑ (4 X normale)

• NFS, bilan d’hémostase et bilan hépatique normaux

Q1

Quel diagnostic évoquez vous?A/ Intoxication volontaire par un insecticide

organophosphoréB/ intoxication volontaire par un carbamate

inhibiteur des cholinestéraseC/ Intoxication volontaire par un raticide du type

chloraloseD/ Intoxication volontaire par un pyréthrinoide

R1

Quel diagnostic évoquez vous?A/ Intoxication volontaire par un insecticide

organophosphoréB/ intoxication volontaire par un carbamate

inhibiteur des cholinestéraseC/ Intoxication volontaire par un raticide du type

chloraloseD/ Intoxication volontaire par un pyréthrinoide

Classification des pesticides

- INSECTICIDES: (maximum d’efficacité) - HERBICIDES

- RODENTICIDES

- -

- Organochlorés: 1937-1970 dichlorodyphényléthane (DDT) hexa- chloro benzène (HCB)-Organophosphorés: 1944 Parathion, Diazinon, Dichlorvos (1950)-Carbamates: 1930-1955-Pyrethrinoïdes: 1980

-α Chloralose 1918-Anticoagulants-Phosphure d’aluminium

- 2,4- D: 1942- Paraquat

Q2

Le diagnostic clinique repose sur l’existence

A/ d’un syndrome muscariniqueB/ d’un syndrome nicotiniqueC/ d’un syndrome anticholinergiqueD/ d’un syndrome encéphaliqueE/ d’un syndrome sérotoninergique

R2

Le diagnostic clinique repose sur l’existence

A/ d’un syndrome muscariniqueB/ d’un syndrome nicotiniqueC/ d’un syndrome anticholinergiqueD/ d’un syndrome encéphaliqueE/ d’un syndrome sérotoninergique

a- Rôle physiologique de l’acétylcholinestérase (AChE)b- (1) Interaction de l’EOP avec un groupe hydroxyl sérine avec formation d’un complexe

intermédiaire(2) Phosphorylation de l’enzyme(3) Réactivation spontanée très lente pour la majorité des EOP(4) Phénomène de vieillissement ou « aging » , l’enzyme n’est plus réactivable

Toxicité des EOP

Jonction neuro- musculaire

Neurones post ganglionnaires parasympathiques

Neurones pré- ganglionnairessympathiques &

parasympathiques

Inhibition des cholinestérases

Accumulation d ’acétylcholine: médiateur chimique responsable du transfert de l ’influx nerveux

TOXICITÉ AIGUË• Syndrome muscarinique: • Signes oculaires: myosis, hypersécrétion lacrymale,

photophobie.• Signes respiratoires: bronchospasme, hypersécrétion

bronchique (OAP), salivaire, nasale. • Signes digestifs: nausées, vomissements, épigastralgies,

spasmes, diarrhée.• Signes cardiovasculaires: bradycardie, hypotension artérielle

par vasoplégie. • Syndrome nicotinique• Fasciculations musculaires, crampes, asthénie, paralysie des

muscles striés, arrêt respiratoire.• hypertension artérielle, tachycardie.

• Syndrome encéphalique• Troubles du comportement, ataxie, crises convulsives, coma

encéphalopathie.

Q3

Examens complémentaires à visée toxicologiqueA/ Toujours nécessaire avant de démarrer le traitementB/ Il faut pratiquer une recherche de toxiques dans les

urinesC/ Il faut demander un dosage de l’activité

cholinestérasique sériqueD/ Il faut demander un dosage de l’activité

cholinestérasique sérique et globulaireE/ Certains sont des indicateurs de gravité

R3

Examens complémentaires à visée toxicologiqueA/ Toujours nécessaire avant de démarrer le traitementB/ Il faut pratiquer une recherche de toxiques dans les

urinesC/ Il faut demander un dosage de l’activité

cholinestérasique sériqueD/ Il faut demander un dosage de l’activité

cholinestérasique sérique et globulaireE/ Certains sont des indicateurs de gravité

CONFIRMATION DIAGNOSTIQUEDOSAGE DE L’ACTIVITE CHOLINESTERASIQUE

- Plasmatique (pseudocholinestérase): butyrylcholinestérase Technique rapide Indicateur d’exposition à un EOP Sensible mais non spécifique - Globulaire: plus spécifique 30-50%: Asymptomatique <10- 20%: modérée <10%: sévère

Hedhili A. Biochimica Clinica 1991; 15: 805-8 Worek F. Toxicology 2005; 214: 182-89

H Thabet et al Réanimation 2009; 18:633-639

Q4

Quelle est votre CAT immédiate?A/ OxygénothérapieB/ Oxygénothérapie suivi d’une intubation avec

ventilation mécaniqueC/ Pratique d’un lavage gastriqueD/ Administration de charbon activéE/ Administration parentérale d’un traitement

antidotique

R4

Quelle est votre CAT immédiate?A/ Oxygénothérapie seuleB/ Oxygénothérapie suivi d’une intubation avec

ventilation mécaniqueC/ Pratique d’un lavage gastriqueD/ Administration de charbon activéE/ Administration parentérale d’un traitement

antidotique

Détresse respiratoire/ intoxication par les OP

• 1- hypersécrétion bronchique (encombrement) OAP lesionnel/ ARDS• 2- Bronchoconstriction dyspnée

asthmatiforme. • 3- Inhibition des centres respiratoires avec

hypoventilation alvéolaire• 4- Paralysie des muscles respiratoires

• 90/376 (24%) ont été intubés- 58% dans les 2heures suivant l’admissionIndication: altération de l’état de conscience et/ou syndrome cholinergique- 32% intubation après 24 heures alors qu’il était conscient avec disparition du syndrome cholinergique

• 2 mécanismes de l’insuffisance respiratoire- Une IRA précoce mixte centrale et périphérique- Une IRA plus tardive périphérique

Traitement symptomatique

- Oxygénothérapie +++- Intubation ventilation mécanique si

besoin (administration préalable d’atropine++)

- Restauration des pertes hydriques: Remplissage- Drogues vasoactives: si état de choc

Place de la décontamination digestive

LAVAGE GASTRIQUE

• Précocement (après stabilisation) en raison de l'absorption rapide des OP

• Aucun intérêt à répéter le lavage gastrique

•Majorité des études sont originaires d’Asie avec problèmes méthodologiques ++

Li Y et al. BMC Emerg Med 2006 Li Y et al. Clin Tox 2009; 47: 179 -92

CHARBON ACTIVE ?

Lancet 2008; 371: 579–87

Résultats

Charbon activé

L'administration orale de charbon activé n’est pas recommandée vu l’absence d’intérêt prouvé.

Q5

• Quelle (s) autre(s) thérapeutique (s) spécifique faut' il instaurer?

A/ Administration d’atropine seuleB/ Administration d’oximes (régénérateurs des

cholinestérases) seuleC/ Administration d’atropine et de régénérateurs

de cholinestérasesD/ AlcalinisationE/ Administration d’une benzodiazépine

R5

• Quelle (s) autre(s) thérapeutique (s) spécifique faut' il instaurer?

A/ Administration d’atropine seuleB/ Administration d’oximes (régénérateurs des

cholinestérases) seulesC/ Administration d’atropine et de régénérateurs

de cholinestérasesD/ AlcalinisationE/ Administration d’une benzodiazépine

ATROPINE

Agent antimuscarinique de choix Agit en compétition avec l’Ach au niveau des récepteurs

muscariniques et des récepteurs cholinergiques centraux

Pas d’effet sur les AChE de la jonction neuromusculaire (symptômes nicotiniques) → Oximes

Posologie de l’atropine• Adulte: 1-2 mg IV (0.05 mg/kg) IV à administer lentement sur 3 min à

répéter toutes les 5 à 10 minutes en fonction de la réponse clinique ( fréquence cardiaque> 80/min, disparition du myosis, diminution des sécrétions bronchiques et des troubles digestifs)

• Enfant :- 0,015 à 0.05 mg /kg IV, toutes les 5 à 10 min, jusqu’à ensuite:

toutes les 1 à 4 heures, en fonction de la réapparition des symptomes muscariniques

Accès intraveineux impossible: voie IM, sous cutanée, intraosseuse (enfant ++), ou endotrachéale

IPCS1989M Jokanovic, Toxicology letters 2009; 190: 107-115

EFFETS SECONDAIRES

• Agitation, délire• Globe vésical• Mydriase, flou visuel• Tachycardie: (n’est pas une contre-indication absolue)

diminuer les doses ou arrêter momentanément

puis renouveler à des doses moindres

Régénérateurs des cholinestérases ou Oximes

PRALIDOXIME

• Permet de régénerer les cholinestérases particulièrement au niveau des récepteurs nicotiniques

• Concentration efficace = 13,8 mg/L ( 80µmol/L)• Dose Adulte: 1 à2 gr bolus sur 30 min puis infusion 0,5gr/h• Dose Enfant : 25 mg/kg sur 30min puis infusion continue 10-20

mg/Kg/h pour une durée de 18 heures minimum• Meilleur réponse sur les Diethyl OP ( Chlorpyrifos, Parathion)

que pour les Diméthyl OP (Dimethoate, Dichlorvos)• Efficacité des oximes persiste quand instaurées dans les 120

heures suivant l’intoxication par un Diéthyl OP et 12H pour les Diméthyl OP

IPCS 1989M Jokanovic, Toxicology letters 2009; 190: 107-115

Obidoxime

• Permet de régénerer les cholinestérases au niveau des récepteurs nicotiniques

• Concentration efficace = 3,6mg/L (10µmol/L)• Dose Adulte:

250mg ,bolus sur 30min puis 750mg/24h

M Jokanovic, Toxicology letters 2009; 190: 107-115

Controverse sue l’utilisation des oximes

Pralidoxime

Pralidoxime

Pour: 200 patients bolus: 2 g puisContinue vs Discontinue (n=100) (n=100) 1 g/h 1 g/4h

Pawar KS. Lancet 2006; 368: 2136- 41

PralidoximeEditorial:

- Etude non randomisée - Produits exactes non identifiés- Evaluation basée sur le dosage des cholinestérases plasmatiques non

globulaires- Exclusion des intoxications sévères- Nature différente de l’OP dans les deux groupes

(plus de chlorpyrifos dans le groupe étudié)

P Eyer, N Buckley. Lancet 2006; 368: 2111

2009;6:1-12

• Critères d’inclusions:– Tous les patients adultes admis pour intoxication aiguë volontaire OP et qui ont

reçu de l’atropine en accord avec le protocole • Les critères d’exclusion:

– âge <14 ans, grossesse connue, prescription de pralidoxime dans les hôpitaux transférants, participation précédente a l'étude.

• But:– 1/ déterminer si la Pralidoxime réduit toutes les causes de mortalité confondues

lors d’une hospitalisation pour intoxication volontaire aux organophosphores – 2/déterminer l’impact du pralidoxime sur:

• le recours a la ventilation mécanique • le délai nécessaire pour la ventilation• La durée de la ventilation• Le temps avant décès

Dessin Etude

2g Pralidoxime en dose de charge sur 20min puis une perfusion de 0,5 g/h max 7j

Sérum physiologique

Sous groupes:1 PEC <4h2 4h<PEC<12h3 PEC>12h

Commentaires

• Attention aux recommandations de L’OMS• Peut être intoxications moins graves il faux utiliser

moins d’antidote• Biais de l’étude:

- Double aveugle a été rompu car devant les données de l'activité globulaire après thérapeutique on pouvait distinguer le groupe contrôle du témoin.

- Le groupe Pralidoxime est beaucoup plus grave que le groupe contrôle.

Autres thérapeutiques

Benzodiazépines

• Effet anticonvulsivant• Réduisent l’agitation, les fasciculations et

l’anxiété• Le diazépam augmente l’efficacité de

l’atropine• IL diminue la concentration synapatique

d’acétylcholine→ atténue le syndrome cholinergique

Benzodiazépines ( Posologie)

• A considérer dans les intoxications sévères• E n cas de convulsions: 10-20mg IVL à répéter

éventuellement• En absence de convulsions: • L’OMS recommande chez l’adulte d’administrer

5-10mg IVL sur 3min à répéter au bout de 10 à 15 min ( maximum 30mg)Chez l’enfant: 0,2 à0,3mg/Kg IV lente sur 3min maximum 5mg (<5 ans); 10mg (>5 ans) IPCS 1989

Alcalinisation?

Quel effet de l’alcalinisation?

• La présence d’une acidose est un facteur de mauvais pronostic dans les intoxications par les EOP

• L’alcalinisation permet:d’augmenter la clairance des OPamélioration du fonctionnement neuromusculaireVolémie et perfusion tissulaire

• Objectifs pH entre 7,46-7,55• Faible évidence en matière d’efficacité

Garcia Reppetto R et al Vet Hum Toxicol 1996;4:202-4Balali-Mood M et al Clin Toxicol 2005;43:571-4Roberts D, Buckley NA, Cochrane data base Syst Rev 2005;1:CD004897

Q6

Le patient présente une hypersensibilité abdominale et une hyperlipasémie. Vous évoquez le diagnostic de pancréatite aiguë. Quels autres investigations envisagez vous?

A/ Echographie abdominaleB/ TDM abdominalC/ Contrôle des enzymes pancréatiques

R6

Le patient présente une hypersensibilité abdominale et une hyperlipasémie. Vous évoquez le diagnostic de pancréatite aiguë. Quels autres investigations envisagez vous?

A/ Echographie abdominaleB/ TDM abdominalC/ Contrôle des enzymes pancréatiques

La pancréatite aiguë

• La pancréatite aiguë: complication rare des intoxications par les EOP *• Due à une hyperactivité parasympathique

• Le retard ou la non administration d’atropine et /ou de Pralidoxime aus doses recommandées seraient à l’origine de cette complication ** *Ann Surg 1979,2: 199-04. ** Ann Surg 1982,4: 424-34

Augmentation de la sécrétion exocrine: effet direct sur les acini et les cellules canalaires

Pronostic

• Nature de L’EOP et quantité ingérée• Gravité du tableau clinique initial (GCS≤13*)

Scores de gravité• Délai de prise en charge

Thérapeutiques symptomatiques +++Précocité de l’administration de l’atropine et des oximes

*Davies JO; Eddleston M QJM 2008;101 (5):371-9

Eddleston M et al. Lancet 2005; 366:1452-59

Conclusion (1)

• Intoxications par EOP posent un problème de santé publique dans les pays en voie de développement

• Toxicité variable selon la nature de L’EOP• L’amélioration du pronostic passe par une meilleur

prise en charge ( pré hospitalière, SAU, réanimation)

• Une protocolisation est utile tenant compte de la présentation clinique du patient et la nature de L’EOP

Conclusion (2)

• Les thérapeutiques symptomatiques, l’atropine et les oximes représentent la pierre angulaire du traitement

• De nouvelles thérapeutiques (antidotes…) sont en cours d’évaluation surtout dans la région asiatique

• Prévention garde toute sa place ( interdire la vente et la commercialisation d’EOP dangereux et limiter d’une façon générale l’usage de ces produits