VADEMECUM DE LA MEDIATION - avocatparis.org · Adopté par le Conseil en séance du 13 décembre...

29
1 VADEMECUM DE LA MEDIATION Mme Myriam LASRY Membre du Conseil de l’Ordre Adopté par le Conseil en séance du 13 décembre 2011 Sommaire INTRODUCTION DEFINITIONS DEFINITION DE LA MEDIATION DEFINITION DU MÉDIATEUR DEFINITION DE L’UNITE DE MEDIATION CIVILE TEXTES DE REFERENCE NORMES NATIONALES ET INTERNATIONALES PROTOCOLES ET CHARTES RAPPORTS LE PROCESSUS DE MEDIATION JUDICIAIRE I/ LA DECISION DE RECOURIR A LA MEDIATION : A/ EN DEBUT DE PROCEDURE : LA DOUBLE CONVOCATION B/ EN TOUT ETAT DE PROCEDURE 2/ PERMANENCES D’INFORMATION SUR LA MEDIATION AU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS : A/ OBJECTIF B/ ORGANISATION C/ LE CHOIX DU MEDIATEUR 3/ PERMANENCES DEVANT LA COUR D’APPEL 4/ DUREE DE LA MEDIATION : 5/ EFFETS SUR LA PRESCRIPTION 6/ ETENDUE DES PREROGATIVES DU JUGE ET LIMITES 7/ FIN DE LA MEDIATION

Transcript of VADEMECUM DE LA MEDIATION - avocatparis.org · Adopté par le Conseil en séance du 13 décembre...

1

VADEMECUM DE LA MEDIATION

Mme Myriam LASRY

Membre du Conseil de l’Ordre Adopté par le Conseil en séance du 13 décembre 2011

Sommaire

INTRODUCTION

DEFINITIONS

DEFINITION DE LA MEDIATION

DEFINITION DU MÉDIATEUR

DEFINITION DE L’UNITE DE MEDIATION CIVILE

TEXTES DE REFERENCE

NORMES NATIONALES ET INTERNATIONALES

PROTOCOLES ET CHARTES

RAPPORTS

LE PROCESSUS DE MEDIATION JUDICIAIRE

I/ LA DECISION DE RECOURIR A LA MEDIATION :

A/ EN DEBUT DE PROCEDURE : LA DOUBLE CONVOCATION

B/ EN TOUT ETAT DE PROCEDURE

2/ PERMANENCES D’INFORMATION SUR LA MEDIATION AU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS :

A/ OBJECTIF

B/ ORGANISATION

C/ LE CHOIX DU MEDIATEUR

3/ PERMANENCES DEVANT LA COUR D’APPEL

4/ DUREE DE LA MEDIATION :

5/ EFFETS SUR LA PRESCRIPTION

6/ ETENDUE DES PREROGATIVES DU JUGE ET LIMITES

7/ FIN DE LA MEDIATION

2

8/ FORMES DE L’ACCORD DES PARTIES

ROLE DES AVOCATS

I/ AVOCATS DES PARTIES ENGAGEES DANS LE PROCESSUS DE MEDIATION

2/ L’AVOCAT MEDIATEUR

-a- Une mission prévue par les textes

-b- L’intervention en qualité de médiateur clairement identifiée

LA MEDIATION CONVENTIONNELLE

1/ DEFINITION

2/ PORTEE DE L’ACCORD

3/ CAS DES CONTRAT INCLUANT UNE CLAUSE DE MEDIATION

LE MEDIATEUR : DEONTOLOGIE

FORMATION

REMUNERATION DU MEDIATEUR

1/ MEDIATION JUDICIAIRE

-a- Principes

-b- Aide Juridictionnelle

2/ MEDIATION CONVENTIONNELLE

ASSURANCE

PROCESSUS PARTICULIERS

I/ LA MEDIATION FAMILIALE

A/ DEFINITION

B/ LES TEXTES

-a- Autorité parentale

-b- Dans le cadre de la procédure de divorce

II/ LA MEDIATION EN DROIT SOCIAL

ANNEXES

INTRODUCTION

3

La culture de la médiation fait incontestablement son chemin se traduisant d’ailleurs, au-delà du

dispositif légal, par une tendance plus affirmée des parties à se rapprocher.

Il s’agit d’éviter l’ordalie, « les coups et les flèches, de l’outrageante fortune » (William Shakespeare).

Une simple atténuation du niveau de conflictualité peut en effet constituer une avancée significative et

sortir chacun de l’ornière de l’adversité. Il ne s’agit jamais que d’une approche humaniste des rapports

sociaux puisant sa source dans des pratiques anciennes.

Loin de nous l’idée que tous les conflits sans exception puissent être résolus ainsi, mais pourquoi

ignorer la simple possibilité d’essayer ? Est-il bien raisonnable de s’avouer vaincu ou sceptique face

aux outils que la loi et les différentes juridictions mettent en place à une cadence qui démontre qu’il

s’agit bien d’un enjeu de société ?

La défense que nous pratiquons est un rempart.

Rempart immense et précieux qui ne se dresse pas uniquement pour protéger un individu contre un

autre mais pour également le garder de lui-même, de ses démons, ses peurs, son goût parfois

immodéré du sang et de l’adversité… mais aussi tout simplement contre le coût financier et

l’enlisement à tous égards qu’induit un conflit sévère.

Les avocats rompus à la transaction et à la négociation pourront sourire, eux qui pratiquent depuis

toujours le rapprochement des parties. Mais que de fois ne se sont-ils heurtés à la perplexité, à

l’irritation – osant dire la déconsidération – de leur client face à la suggestion d’un rapprochement

amiable… tout cela parce que l’institution judiciaire ne s’en proclamait pas le relai.

Aujourd’hui c’est chose faite. De plus, l’Ordonnance du 16 novembre 2011 a transcrit la Directive

2008/52/CE du Parlement Européen et du Conseil du 21 mai 2008 relative à « certains aspects de la

médiation en matière civile et commerciales » dans l’ordre interne.

Alors à nous de jouer ! …

4

DEFINITIONS

AVERTISSEMENT : l’Ordonnance prévoit que certaines dispositions seront précisées par voie de décret pris en Conseil d’Etat -non intervenu ce jour.

Par ailleurs, les usages définis par les différentes juridictions et les procédés « pilotes » étant susceptibles d’évoluer, le lecteur est invité à réactualiser sa pratique en fonction de cette évolution.

DEFINITION DE LA MEDIATION

Article 21 Loi n°95-125 du 8 février 1995 « La médiation régie par le présent chapitre s’entend de tout

processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de

parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le

médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige. »

A retenir :

La notion de processus : la médiation est donc un processus et non une procédure Un processus structuré : la médiation n’est pas rigide : elle s’inscrit dans un cadre proposé par

le médiateur en accord avec les parties.

DEFINITION DU MÉDIATEUR

A ce jour, les critères de formation et d’accréditation n’ont pas été précisés par les textes. Le médiateur peut être issu de toutes formations et horizons professionnels.

Seule sa déontologie le définit.

L’article 21-2 de la Loi du 8 février 1995 précise : « Le médiateur accomplit sa mission avec

impartialité, compétence et diligence ».

Le principe d’indépendance n’est pas retenu.

Le principe de confidentialité est affirmé à l’article 21-3 mais les parties peuvent y renoncer. De même

l’atteinte à certains droits et aux principes d’ordre public permettent la levée du secret.

A noter : la compétence, l’indépendance, l’impartialité, la neutralité, la confidentialité et l’équité sont les principes fondamentaux qui avaient déjà été retenus par le Code de Conduite Européen des Médiateurs adopté en 2004. (Voir plus loin les développements relatifs à la déontologie du médiateur).

DEFINITION DE L’UNITE DE MEDIATION CIVILE :

l’article 2 du projet de protocole relatif à la médiation civile signé entre le Tribunal de Grande Instance de Paris et le Barreau de Paris du 14 décembre 2009

l’article II – 6 - de la Charte des Médiateurs du Tribunal de Grande Instance de Paris du 14 décembre 2009

« Chargée d’implanter la médiation dans les juridictions et de promouvoir toutes initiatives à l’égard des magistrats, avocats et justiciables, l’unité de médiation civile est composée des personnes suivantes :

5

Le Président de la juridiction ou son délégué. Le magistrat référent pour la médiation désigné par le président. Le bâtonnier ou son délégué. Le directeur de greffe ou son délégué. De deux magistrats, deux avocats et un ou deux greffiers particulièrement sensibilisés au

recours à la médiation civile. »

L’unité de médiation dresse une liste indicative et actualisée des médiateurs à destination des magistrats et avocats. Les médiateurs référencés sont adhérents à la Charte des médiateurs annexée au protocole du 14 décembre 2009, ce qui offre à la médiation une garantie de cadre juridique, déontologique et méthodologique.

L’Unité de médiation civile a le pouvoir de procéder à la radiation d’un médiateur en cas de manquement incompatible avec sa mission.

TEXTES DE REFERENCE

NORMES NATIONALES ET INTERNATIONALES

Loi n°95-125 du 8 février 1995, articles 21 à 25. Décret n°96-652 du 22 juillet 1996, articles 131-1 à 131-15 du Code de Procédure Civile. Directive 2008/52/CE : Directive du Parlement Européen et du Conseil du 21 mai 2008. Ordonnance du 16 novembre 2011( J.O du 17 novembre 2011)transcrivant la Directive

européenne.

PROTOCOLES ET CHARTES

16 octobre 2006 : charte des cabinets d’avocats pour la médiation. 14 décembre 2009 : signature du protocole relatif à la médiation civile entre le Tribunal de

Grande Instance de Paris et l’Ordre des Avocats. 14 décembre 2009 : Charte des Médiateurs du Tribunal de Grande Instance de Paris. 27 janvier 2010 : protocole entre le Tribunal de Grande Instance et les associations de

médiation.

RAPPORTS :

Rapport du Groupement Européen des Magistrats pour la Médiation (GEMME) intitulé Médiation publié dans le Bulletin d’information de la Cour de Cassation hors série de 2006

Rapport « célérité et qualité de la justice – la médiation : une autre voie » du président de la Cour d’Appel de Paris Monsieur Magendie publié en octobre 2008

LE PROCESSUS DE MEDIATION JUDICIAIRE

I/ LA DECISION DE RECOURIR A LA MEDIATION :

article 131-1 du Code de Procédure Civile issu du décret du 22 juillet 1996 article 22 de la loi du 8 février 1995 article 3 du projet de protocole relatif à la médiation civile du 14 décembre 2009

6

En pratique : la médiation peut être tentée en tout début de procédure ( article 3 du protocole relatif à la

médiation civile du 14 décembre 2009- par le système de la double convocation ) mais également plus

tardivement en cours de procès.

Elle est ordonnée par le Juge dans le cours de l’instance . L’article 22 de la Loi du 8 février 1995 est

désormais libellé ainsi « Le juge peut désigner, avec l’accord des parties, un médiateur judiciaire pour

procéder à une médiation, en tout état de la procédure, y compris en référé (…) ».La médiation ne

dessaisit pas le Juge qui garde la main sur le procès

Lorsqu’il s’agit d’une initiative du Juge, celle-ci se fait dans certaines chambres, à l’issue d’un travail de présélection.

Il convient de souligner que certains domaines se prêtent particulièrement bien à la médiation tels que le droit de la famille, le droit des successions et partages d’indivision, les conflits de voisinage.

A/ EN DEBUT DE PROCEDURE : LA DOUBLE CONVOCATION

Il peut être souhaitable que la médiation intervienne au tout début de la procédure.

A cette fin, le Juge qui estime qu’une affaire est susceptible de relever de la médiation adresse aux parties et à leur conseil, une lettre en vue d’une audience de proposition de médiation.

Article 3 du projet de protocole relatif à la médiation civile du 14 décembre 2009 : La double convocation consiste, pour le Juge, à faire parvenir, en même temps que la convocation à l’audience de procédure, une invitation à se présenter à une date antérieure à cette audience devant un médiateur en vue d’une réunion d’information gratuite sur la médiation.

B/ EN TOUT ETAT DE LA PROCEDURE

article 22 Loi 8 février 1995 article 131- 1 Code de Procédure Civile article 131- 2 Code de Procédure Civile

Après avoir recueilli l’accord des parties, le Juge du Fond, le Juge des Référés ou encore le Juge de la Mise en Etat peut décider, en tout état de la procédure qui lui est soumise de recourir à la médiation sur tout ou partie du litige. Le juge qui décide de l’opportunité du recours à la médiation n’est pas dessaisi de l’affaire et peut prendre à tout moment les autres mesures qui lui paraissent nécessaires.

2/ PERMANENCES D’INFORMATION SUR LA MEDIATION AU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS :

Le 27 janvier 2010 a été signé un protocole entre le Tribunal et les associations assurant des permanences de médiation.

A/ OBJECTIF :

Les permanences sont assurées pour une information gratuite sur la médiation dans le cadre d’une convocation adressée par le juge aux parties et à leur conseil devant le médiateur en vue d’un entretien préalable à l’audience.

7

Cet entretien a pour objet de fournir des éléments d’information et de réflexion aux parties sur l’intérêt de la médiation pour trouver une solution négociée au litige ainsi que sur le cadre des règles déontologiques de la médiation.

B/ ORGANISATION :

Les permanences sont organisées par roulement entre les associations signataires du protocole (AME1, CMAP2, ANM3, IEAM4). Chacune délègue un médiateur et les entretiens d’information se tiennent dans un local du tribunal. Ces entretiens sont gratuits.

Le planning est établi par chacune des chambres du tribunal correspondant à certains domaines de compétences particulières des médiateurs : construction, copropriété, baux commerciaux, successions et liquidations de communauté, propriété littéraire et artistique, banques.

C/ LE CHOIX DU MEDIATEUR :

article 4 du projet de protocole relatif à la médiation civile du 14 décembre 2009

Les parties ont le libre choix de leur médiateur pour la suite : médiateur ayant procédé à la formation ou médiateur choisi sur les listes fournies par l’association en fonction des domaines de compétence.

Le juge peut aussi désigner un médiateur et éventuellement un co-médiateur inscrit sur la liste mise à disposition et parmi ceux-ci, en priorité ceux qui ont adhéré à la Charte des médiateurs du Tribunal de Grande Instance de Paris du 14 décembre 2009.

Aujourd’hui, aucun critère ne permet de labelliser le choix des médiateurs inscrits sur les listes détenues par les juges.

3/ PERMANENCES DEVANT LA COUR D’APPEL

Le système de la double convocation existe au niveau des chambres sociales. Dans les dossiers préalablement sélectionnés par la cellule de médiation, les parties et leurs conseils sont invités à se présenter à une permanence de médiation pour leur information. Si elles le décident, elles pourront entamer ce processus. L’intérêt du système est que le processus est mis en place plusieurs mois avant la date d’audience, ce qui évite aux parties une perte de temps en cas d’échec de leur rapprochement.

4/ DUREE DE LA MEDIATION :

Article 131-3 du Code de Procédure Civile Article 131-6 alinéa 1 du Code de Procédure Civile Article 22-3 Loi du 8 février 1995

La décision du juge ordonnant la médiation doit mentionner la durée de la médiation ainsi que la date à laquelle l’affaire sera appelée à l’audience.

1 AME : Association des Médiateurs Européens composée pour la plupart des membres du barreau.

2 CMAP : Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris.

3 ANM : Association Nationale des Médiateurs.

4 IEAM : Institut d’Expertise d’Arbitrage et de Médiation.

8

Ce délai maximum doit être fixé par Décret en Conseil d’Etat. Le délai imparti par le Juge peut être renouvelé ou abrégé d’office ou à la demande du médiateur ou d’une partie.

5/ EFFETS SUR LA PRESCRIPTION

Article 2238 du Code Civil issu de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile : « La prescription est suspendue à compter du jour où, après la survenance d'un litige, les parties conviennent de recourir à la médiation ou à la conciliation ou, à défaut d'accord écrit, à compter du jour de la première réunion de médiation ou de conciliation. Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter de la date à laquelle soit l'une des parties ou les deux, soit le médiateur ou le conciliateur déclarent que la médiation ou la conciliation est terminée. »

Il est à noter que la Chambre Mixte de la Cour de Cassation dans son arrêt du 14 février 2003 n°00-19423 et 00-19424 avait déjà jugé que : « la clause d’un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en œuvre suspend jusqu’à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s’impose au juge si les parties l’invoquent ».

6/ ETENDUE DES PREROGATIVES DU JUGE ET LIMITES

Article 131-2 du Code de Procédure Civile alinéa 2 Article 131-9 du Code de Procédure Civile

Le juge garde la main sur le processus. Il ne s’agit donc pas d’un retrait ou d’un abandon par le système judiciaire de ses prérogatives.

Le juge ne peut demander un rapport sur le contenu de la médiation mais doit être seulement informé du déroulement des opérations conformément aux textes.

7/ FIN DE LA MEDIATION

article 131-10 du Code de Procédure Civile article 131-12 du Code de Procédure Civile article 22-3 de la loi du 8 février 1995

Le juge peut mettre fin à la médiation à tout moment :

- Sur demande expresse de l’une des parties. - A l’initiative du médiateur. - D’office si le bon déroulement de la médiation paraît compromis.

8/ FORMES DE L’ACCORD DES PARTIES

Cet accord peut constituer :

une transaction au titre de l’article 2044 et suivant du Code Civil ainsi que l’article 1441-4 du Code de Procédure Civile.

un protocole dénommé « protocole d’accord » non qualifié juridiquement et qui se distingue d’une transaction par l’absence de concessions réciproques.

9

L’article 21-5 de la Loi du 8 février 1995 modifiée par l’Ordonnance n°2011-1540 du 16 novembre 2011 prévoit que « l’accord auquel parviennent les parties peuvent être soumis à l’homologation du Juge qui lui donne force exécutoire ».

La rédaction de l’accord n’est pas une obligation. La réussite de la médiation peut se traduire par un désistement d’instance.

ROLE DES AVOCATS

Qu’elle soit judiciaire ou conventionnelle, la médiation permet d’inclure l’intervention des avocats tant au niveau des séances, que des pourparlers et de la rédaction de l’accord.

Les Avocats accompagnent leurs clients dans le processus de médiation (I). Ils peuvent tout autant, ainsi que le prévoit l’article 6.2 du RIN, tenir le rôle de médiateurs désignés dans une affaire (II).

I/ AVOCATS DES PARTIES ENGAGEES DANS LE PROCESSUS DE MEDIATION

Article 7 du projet de protocole relatif à la médiation civile du 14 décembre 2009 II- 1) de la charte des médiateurs du 14 décembre 2009 article 3 de la loi n°2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou

juridiques et certaines professions règlementées créant le chapitre I bis du titre II « le contreseing de l’avocat » soit les articles 66-3-1 à 66-3-3 de la Loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques

Le médiateur précise aux parties la possibilité de consulter à tout moment un avocat ou de se faire assister par celui-ci.

Les Avocats pourront rédiger un protocole d’accord et procéder à la rédaction d’un acte contresigné par un avocat.

2/ L’AVOCAT MEDIATEUR

-a- Une mission prévue par les textes

L’article 6.2 du Règlement Intérieur National prévoit expressément que l’avocat peut exercer entre autres, la mission de médiateur.

Il est précisé que dans l’accomplissement de [ces missions], il demeure « soumis aux principes essentiels et doit s’assurer tout particulièrement de son indépendance. »

-b- L’intervention en qualité de médiateur clairement identifiée

Il est impératif d’éviter la confusion : les parties doivent savoir exactement en quelle qualité intervient le médiateur.

LA MEDIATION CONVENTIONNELLE

I/ DEFINITION

10

Selon le rapport « célérité et qualité de la justice – la médiation : une autre voie » du groupe de travail sur la médiation présidé par Jean-Claude Magendie, premier président de la Cour d’Appel de Paris, « La médiation conventionnelle se déroule sur le fondement de la seule volonté des parties, avant ou après la naissance d’un litige ».

C’est une médiation qui s’inscrit en dehors de toute intervention du juge, totalement consensuelle du

début à la fin du processus.

L’article 24 de la Loi du 8 février 1995 exclut du champ de la médiation conventionnelle les différends

qui s’élèvent à l’occasion d’un contrat de travail lorsque ces différends ne sont pas transfrontaliers.

2/ PORTEE DE L’ACCORD

Article 131-12 du Code de Procédure Civile

L’homologation confère le caractère exécutoire à cet accord et le rend opposable aux tiers.

3/ CAS DES CONTRAT INCLUANT UNE CLAUSE DE MEDIATION

La Chambre Mixte de la Cour de Cassation a décidé dans son arrêt du 14 février 2003 (n°00-19423 et 00-19424) : « la clause d’un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en œuvre suspend jusqu’à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s’impose au juge si les parties l’invoquent ».

Solution suivie par la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation le 30 octobre 2007 (n° 06-13366) : l’invocation d’une clause de conciliation préalable à toute action contentieuse constitue selon les termes de son inclusion dans un contrat d’exercice en commun, une fin de non-recevoir qui s’impose au juge en application de l’article 122 du Code de Procédure Civile.

De même, la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation le 8 avril 2009 (n°08-10866) : une partie à un contrat ne peut, par avance, refuser une procédure de médiation qui n’a pas encore été mise en œuvre dès lors que la clause de médiation prévue au contrat n’a prévu la saisine du tribunal qu’en cas d’échec ou de refus de la médiation.

LE MEDIATEUR : DEONTOLOGIE

L’ article 21-2 de la Loi du 8 février 1995 précise : « Le médiateur accomplit sa mission avec

impartialité, compétence et diligence »

L’article 21-3 dispose : « Sauf accord contraire des parties, la médiation est soumise au principe de

confidentialité. Les constatations du médiateur et les déclarations recueillies au cours de la médiation

ne peuvent être divulguées aux tiers ni invoquées ou produites dans le cadre d'une instance judiciaire

ou arbitrale sans l’accord des parties ».

Les principes figurant dans la loi n°95-125 du 8 février 1995 et dans les articles 131-1 et suivants du Code de Procédure Civile, ont été développés dans le cadre du Code de Conduite Européen des Médiateurs adopté en 2004.

11

La Charte des médiateurs du 14 décembre 2009 impose, quant à elle, que le médiateur signataire déclare remplir les conditions légales prévues par le Code de Procédure Civile et s’engage à respecter scrupuleusement les principes et les règles de la médiation.

Ces principes sont les suivants :

I. LA CONFIDENTIALITE :

Article 8 du projet de protocole relatif à la médiation du 14 décembre 2009 I – 1) de la charte des médiateurs du 14 décembre 2009

Le médiateur respecte la confidentialité des entretiens de médiation, qui ne peuvent être ultérieurement utilisés, sauf accord des parties, obligations légales ou motifs d’ordre public.

Il s’assure du respect de la même obligation par les parties en leur faisant signer un engagement de confidentialité.

Article 131-8 du Code de Procédure Civile. Le médiateur ne dispose d’aucun pouvoir d’instruction mais peut néanmoins avec l’accord des parties entendre des tiers qui consentent, sous la même règle de confidentialité.

Article 131-11 du Code de Procédure Civile. La seule obligation qui incombe au médiateur est d’informer le juge de ce que les parties sont ou non parvenues à un accord.

Le non-respect de cette confidentialité entraine la mise en jeu de la responsabilité civile (article 1382 du Code Civil) ou pénale (violation du secret professionnel article 226-13 du Code pénal) si le caractère intentionnel est établi.

II. LA COMPETENCE :

Article 1 du projet de protocole relatif à la médiation du 14 décembre 2009 I- 2) de la charte des médiateurs du 14 décembre 2009 Article 131-5 du Code de Procédure Civile

Le médiateur est généraliste ou spécialisé selon le milieu professionnel dont il est issu, ainsi que la formation reçue.

Il ne devra avoir fait l’objet d’aucune condamnation, incapacité ou déchéance mentionnée sur le bulletin n°2 du casier judiciaire.

Il ne devra pas avoir été l’auteur de faits contraires à l’honneur, à la probité et aux bonnes mœurs ayant donné lieu à une section disciplinaire ou administrative de destitution, radiation, révocation, retrait d’agrément ou d’autorisation.

III. L’IMPARTIALITE ET LA NEUTRALITE :

Article 1 du projet de protocole relatif à la médiation du 14 décembre 2009 I- 3) de la charte des médiateurs du 14 décembre 2009

12

Le médiateur est impartial dans ses rapports avec les parties, il n’a pas à prendre parti ni à privilégier un point de vue sur un autre.

Il est neutre quant à l’issue du processus de médiation.

Le médiateur respecte les points de vue des parties : aucun rapport avec les principes essentiels des avocats.

IV. L’INDEPENDANCE :

I- 6) de la charte des médiateurs du 14 décembre 2009 Article 131-5 du Code de Procédure Civile Principe non retenu par l’Ordonnance du 16 novembre 2011.

Le médiateur ne peut intervenir dans une médiation impliquant des personnes avec lesquelles il entretient ou a entretenu des liens personnels, économiques ou professionnels.

Le médiateur ne pourra plus exercer une autre fonction que celle de médiateur avec les parties en cause.

V. L’EQUITE PENDANT LES ENTRETIENS :

I- 5) de la charte des médiateurs du 14 décembre 2009

Le médiateur préserve l’égalité des parties pendant le processus de médiation et veille à l’équité lors de l’engagement des parties.

VI. L’AUTONOMIE :

I- 6) de la charte des médiateurs du 14 décembre 2009

Le médiateur préserve l’autonomie de sa mission.

Il la refuse le cas échéant ou la suspend ou l’interrompt si les conditions nécessaires au bon déroulement de la médiation ne lui semblent pas ou ne lui semblent plus remplies et notamment si l’accord sur le point d’être conclu lui paraît illégal ou se révèle impossible à exécuter.

VII. LE RESPECT DE L’ORDRE PUBLIC ET DES LOIS EN VIGUEUR :

I- 7) de la charte des médiateurs du 14 décembre 2009

Le médiateur veille à ce que l’éventuel accord des parties ne porte pas atteinte à l’ordre public et ne soit pas contraire aux lois en vigueur.

L’article 21-3 impose deux limites au principe de confidentialité :

« a) En présence de raisons impérieuses d’ordre public ou de motifs liés à la protection de l’intérêt

supérieur de l’enfant ou à l’intégrité physique ou psychologique de la personne ;

13

b) Lorsque la révélation de l’existence ou la divulgation du contenu de l’accord issu de la médiation est

nécessaire pour sa mise en œuvre ou son exécution. »

FORMATION

Bien que le diplôme et les conditions d’obtention ne soient pas définies par la loi, plusieurs programmes de formation sont proposés.

1/ PROFIL DES CANDIDATS

Les candidats ont des diplômes, des formations et des expériences professionnelles antérieures variées. Ils sont soumis à un apprentissage théorique et des ateliers pratiques. Les matières enseignées sont notamment le droit, la communication, la négociation, la psychologie.

2/ PROGRAMME ET DUREE

Actuellement il existe plusieurs formations validées par un Brevet d’Etat : l’Université Paris 2 mais également des organismes tels que l’Institut Catholique de Paris (IFOMENE) et les centres de formation spécialisés dans la préparation du Certificat d’Aptitude à la Profession de Médiateurs (CAP’M délivré par la Chambre Professionnelle de la Médiation et de la Négociation).

1/ La formation principale obligatoire

environ 40 à 60 heures de modules pour la formation de base 160 heures de formation d’approfondissement

2/ Formation de spécialisation

Exemple : Prévoir 100 heures pour l’obtention d’une formation de spécialisation dans le domaine de la médiation familiale ou en entreprise

3/ Formation continue obligatoire

Elle est actuellement de 20 heures par an.

3/ LA FEDERATION NATIONALE DES CENTRES DE MEDIATION (FNCM)

Le programme de la formation de médiateur a été approuvé par l‘Assemblée Générale de la Fédération Nationale des Centres de Médiation (FNCM) en Mars 2008.

La Fédération Nationale des Centre de formation labellise les formations en apposant son sigle sur le livret du médiateur. Le Président du lieu de formation de chacun validera le livret du médiateur chaque année pour permettre sa (ré) inscription dans l’Annuaire de la Fédération Nationale.

REMUNERATION DU MEDIATEUR

1/ MEDIATION JUDICIAIRE

-a-Principes

14

L’article 131-6 alinéa 2 du Code de Procédure Civile : « [la décision ordonnant la médiation] fixe le montant de la provision à valoir sur la rémunération du médiateur à un niveau aussi proche que possible de la rémunération prévisible et désigne la ou les parties qui consigneront la provision dans le délai imparti ; si plusieurs parties sont désignées, la décision indique dans quelle proportion chacune des parties devra consigner. »

L’avenant au protocole de fonctionnement des permanences d’information sur la médiation au Tribunal de Grande Instance de Paris du 27 janvier 2010 établit les critères de fixation de la provision du médiateur :

Lorsque l’enjeu financier de la médiation est inférieur à 30 000 € : 800 € HT en cas de faible technicité.

Pour un enjeu supérieur à 30 000 € : un minimum de 1 500 € HT à fixer par le juge en fonction de la technicité du dossier.

En pratique, la rémunération est de 200 à 300 euros de l’heure avec une provision fixée de 600 à 1500 euros.

Article 22-2 de la loi du 8 février 1995, « les frais sont répartis à parts égales à moins que le juge n’estime qu’une telle répartition est inéquitable au regard de la situation économique des parties ».

Article 9 du projet de protocole relatif à la médiation du 14 décembre 2009 : reprend le contenu de l’alinéa 2 de l’article 131-6 du Code de Procédure Civile et ajoute que « à l’expiration de la mission, le juge peut fixer, si les parties le demandent, la rémunération définitive du médiateur et ordonner, s’il y a lieu, le versement de sommes complémentaires ou la restitution des sommes consignées en excédent. »

En matière familiale, la médiation est rémunérée selon le revenu –-gratuite ou très modique pour le contribuable sans revenu., suivant un protocole existant entre les associations de médiateurs et la CAF.

-b- Aide Juridictionnelle

Suivant l’article 22-2 de la loi du 8 février 1995 en son alinéa 3, « Lorsque l’aide juridictionnelle a été accordée, la répartition de la charge des frais de la médiation est établie selon les règles prévues à l’alinéa précédent. Les frais incombant à la partie bénéficiaire de l’aide juridictionnelle sont à la charge de l’Etat, sous réserve des dispositions des articles 45 et 46 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ».

Les bénéficiaires de l’aide juridictionnelle n’auront donc à verser aucune provision, le médiateur établissant ultérieurement une demande de taxes.

2/ MEDIATION CONVENTIONNELLE

Dans le cadre de la médiation conventionnelle, les avocats médiateurs pratiquent une tarification libérale qui dépendra alors de l’association à laquelle ils sont rattachés.

Tout comme en matière d’honoraires, il est nécessaire d’informer le client- avant le début de la mission- des critères de facturation de la provision et des éventuels compléments. La médiation ne débutera qu’après l’obtention de cet accord.

15

ASSURANCE

article II – 4) de la charte des médiateurs

« Le médiateur qui prend en charge les affaires dans le cadre d’une médiation veille à souscrire une assurance de responsabilité. Il s’engage à produire le justificatif à première demande. »

Lorsqu’un Avocat est médiateur, l’assurance professionnelle contractée au titre de son activité d’Avocat couvre les risques puisque cette mission est prévue par les textes (Règlement Intérieur National article 6.2 « Missions »)

PROCESSUS PARTICULIERS

I/ LA MEDIATION FAMILIALE

Initialement instituée par la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, son objectif visait l’apaisement des tensions familiales dans le but de préserver l’équilibre des enfants.

A/ DEFINITION

Conseil National Consultatif de la Médiation Familiale. « La médiation familiale est un processus de construction ou de reconstruction du lien familial axé sur l’autonomie et la responsabilité des personnes concernées par des situations de rupture ou de séparation dans lequel un tiers impartial, indépendant, qualifié et sans pouvoir de décision, le médiateur familial, favorise, à travers l’organisation d’entretiens confidentiels, leur communication, la gestion de leur conflit, dans le domaine familial entendu dans sa diversité et dans son évolution ».

B/ LES TEXTES

a-autorité parentale

L’article 373-2-10 alinéas 2 et 3 du Code Civil dispose : « A l'effet de faciliter la recherche par les parents d'un exercice consensuel de l'autorité parentale, le juge peut leur proposer une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder.

Il peut leur enjoindre de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l'objet et le déroulement de cette mesure. »

L’objectif de l’injonction de rencontrer un médiateur n’est pas d’obtenir un accord forcé mais de forcer les parties à tenter de s’entendre.

La médiation familiale a ensuite été étendue au divorce.

-b- dans le cadre de la procédure de divorce

Suite à la section 3 du chapitre 2 du titre 6 du livre 1er du Code Civil, dès l’Ordonnance de non-conciliation les parties peuvent être incitées à aller vers un processus de médiation.

16

Article 255 du Code Civil dispose : « Le juge peut notamment :

1° Proposer aux époux une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder ;

2° Enjoindre aux époux de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l'objet et le déroulement de la médiation »

Suite à l’article 268 du même code, ce processus pourra être engagé jusqu’à l’audience de jugement.

2/ LA MEDIATION EN DROIT SOCIAL

Le droit du travail, très concerné par la médiation, a permis aux juridictions de première instance et d’appel de développer un processus très structuré.

Elle est d’abord apparue dans le cadre de conflits collectifs du travail avant la légalisation de cette procédure et s’est ensuite étendue aux conflits individuels du travail. Elle est davantage efficace dans chambres sociales des Cours d’Appel que devant les instances prud’homales.

L’article L2522-6 du Code du Travail : « En cas d'échec de la procédure de conciliation, le conflit est soumis soit à la procédure de médiation dans les conditions prévues au chapitre III, soit à la procédure d'arbitrage prévue au chapitre IV si les deux parties en conviennent ».

La médiation pourra ensuite être initiée à tout moment de la procédure.

Il existe cependant un filtre devant la Cour d’Appel consistant en une audience de sélection des dossiers. Ces derniers sont triés selon des critères particuliers tels que l’ancienneté des salariés, le licenciement de personnes ayant un lien familial, s’il s’agit de cadres ou encore si les parties ont d’autres contentieux judiciaires entre elles, dans les cas de harcèlement ou de discrimination.

Un système de double convocation a été mis en place à partir de mai 2011.

17

ANNEXES :

18

19

20

21

22

23

24

25

QUELQUES DESSINS VALENT MIEUX QU’UN (LONG) DISCOURS

La médiation à l’épreuve des résistances, réticences et autres errances

26

27

28

29