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Étude sur la perception de la

santé mentale et des services offerts aux

immigrants francophones du Grand Toronto

Le 20 février 2015

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TABLES DES MATIÈRES

Sommaire…………………………………………………………………………………………………………..2

Contexte de l’étude ................................................................................................................................ 7

Démarche méthodologique et limites de l’étude ..................................................................................... 8

DÉMARCHE MÉTHODOLOGIQUE ...................................................................................................................................................... 8

LIMITES DE L’ÉTUDE ...................................................................................................................................................................... 9

Résultats des consultations ................................................................................................................. 11

LA COMPRÉHENSION DE LA SANTÉ MENTALE .................................................................................................................................... 12

LA CONNAISSANCE ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE OFFERTS EN FRANÇAIS ................................................................... 14

LES OBSTACLES À L’ACCÈS ET À L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE ..................................................................................... 17

LES PISTES D’AMÉLIORATION ........................................................................................................................................................ 19

Grands constats................................................................................................................................... 24

Recommandations ............................................................................................................................... 26

Annexe 1 : Analyse synthèse des entrevues ........................................................................................ 28

COLLECTE DE DONNÉES AUPRÈS DES UTILISATEURS DIRECTS ET INDIRECTS .............................................................................................. 28

COLLECTE DE DONNÉES AUPRÈS DES REPRÉSENTANTS COMMUNAUTAIRES .............................................................................................. 33

COLLECTE DE DONNÉES AUPRÈS DES INTERVENANTS EN SANTÉ ............................................................................................................. 38

Annexe 2 : Analyse synthèse des groupes de discussion .................................................................... 45

Annexe 3 : Analyse synthèse de l’enquête en ligne ............................................................................. 48

ANALYSE SYNTHÈSE DE L’ENQUÊTE EN LIGNE .................................................................................................................................... 48

TABLEAUX DE L’ENQUÊTE EN LIGNE ................................................................................................................................................ 50

TABLEAUX RELATIFS AUX UTILISATEURS DIRECTS ET INDIRECTS ............................................................................................................. 53

CONNAISSANCE ET COMPRÉHENSION DE LA SANTÉ MENTALE ............................................................................................................... 54

CONNAISSANCE ET UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE EXISTANTS DANS LA COMMUNAUTÉ ........................................................ 55

OBSTACLES À L’ACCÈS AUX SERVICES DE SANTÉ MENTALE .................................................................................................................... 57

AMÉLIORATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE EN FRANÇAIS .......................................................................................................... 58

Annexe 4 : Fiche de projet ................................................................................................................... 60

GRAPHIQUES

GRAPHIQUE 1 : LA CONNAISSANCE DE LA SANTÉ MENTALE ET DE SES ENJEUX ........................................................... 12

GRAPHIQUE 2 : OUTILLÉ POUR INTERVENIR EN SANTÉ MENTALE ............................................................................... 13

GRAPHIQUE 3 : L’ACCESSIBILITÉ DE L’INFORMATION ET DES SERVICES EN FRANÇAIS .................................................. 15

GRAPHIQUE 4 : LES PISTES D’AMÉLIORATION ........................................................................................................... 19

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SOMMAIRE La présente étude a pour but de recueillir des données qualitatives concrètes et fiables afin de pouvoir répondre aux défis qui attendent les nouveaux arrivants et les immigrants francophones quant à la perception de la santé mentale, à la connaissance des services de santé mentale offerts en français et à leur accessibilité. L’étude vise également à formuler des recommandations destinées à améliorer l’offre de services de santé mentale en français dans le Grand Toronto. Tout d’abord, rappelons que les immigrants constituent une clientèle très vulnérable en ce qui a trait aux enjeux de santé mentale. Cette situation s’explique par une multitude de facteurs : le processus d’immigration à lui seul comprend son lot d’épreuves et de combats quotidiens relativement stressants afin d’obtenir un statut, de trouver un logement, de décrocher un emploi, de faire reconnaître leur statut et leur formation professionnelle, d’apprendre les langues du pays d’accueil, de s’intégrer à la société d’accueil, d’apprendre à vivre éloigné des proches qui sont restés dans le pays d’origine, de surmonter l’isolement et de lutter contre la discrimination dont ils sont parfois victimes. De plus, certains nouveaux arrivants ont connu un parcours de vie difficile, source parfois d’importants traumatismes. Toutefois, malgré leur vulnérabilité, les immigrants sont souvent beaucoup moins enclins à demander de l’aide. Cela s’explique notamment par la persistance des tabous et des préjugés, l’existence d’une perception négative de la maladie mentale, la présence de barrières culturelles et linguistiques dans le pays d’accueil et le manque de connaissances sur les services et les ressources offertes. L’approche concernant la santé mentale présente cette particularité : la langue constitue le seul outil de diagnostic approprié. Cela signifie avoir la possibilité de décrire ses symptômes à un intervenant qui parle la même langue pour que celui-ci puisse saisir l’ensemble des subtilités langagières dans le processus de diagnostic. Le succès d’un bon diagnostic, en santé mentale, repose donc sur la communication. Il s’avère essentiel de sensibiliser les décideurs à cette particularité et de définir l’offre et la qualité des services de santé mentale dans ce contexte précis où la langue constitue le fondement d’un bon diagnostic et d’une approche de traitement sûre et adaptée. L’étude part du principe que les immigrants francophones ont accès à relativement peu d’information sur l’accessibilité aux services de santé mentale. Reflet Salvéo a mandaté PGF afin de définir les obstacles à l’utilisation des services de santé mentale ainsi que les conditions qui devraient être réunies pour en favoriser l’accès. Trois méthodes distinctes et complémentaires ont été retenues pour réaliser la collecte de données : une enquête en ligne, des entrevues semi-dirigées et des groupes de discussion. Les groupes de discussion ont été ouverts à tous les immigrants francophones, alors que les entrevues individuelles et l’enquête en ligne ont permis de catégoriser les participants selon qu’ils étaient des utilisateurs directs ou indirects de services de santé mentale, des fournisseurs de services de santé ou des représentants communautaires. L’objectif recherché des différentes méthodes de collecte de données était de :

recourir aux témoignages, aux expériences de vie et aux observations des participants pour avoir une meilleure idée des perceptions des immigrants francophones sur la santé mentale et sur les services qui sont à leur portée;

donner à l’ensemble des participants l’occasion de définir les besoins prioritaires en matière de services de santé mentale destinés aux immigrants francophones;

recueillir des suggestions concrètes susceptibles d’améliorer le quotidien des immigrants francophones et d’améliorer l’état actuel des services de santé mentale offerts en français.

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L’étude a été menée de septembre à novembre 2014. Plus d’une centaine de personnes y ont participé. Elles se répartissent comme suit :

vingt-six (26) participants aux entrevues individuelles, soit 13 utilisateurs, 7 fournisseurs et 7 représentants communautaires;

trente-sept (37) participants à l’enquête en ligne, soit 13 utilisateurs, 12 fournisseurs et 12 représentants communautaires;

quarante (40) participants aux groupes de discussion, qui ont eu lieu dans les locaux des trois organismes suivants : Oasis Centre des femmes, CANORAA et Africans in Partnership against Aids (APAA).

Les outils de collecte de données ont été conçus dans le but d’explorer les questions suivantes :

la compréhension de la santé mentale; le degré de connaissance et l’utilisation des services de santé mentale offerts en français; les obstacles à l’accès et à l’utilisation des services de santé mentale; les pistes d’amélioration.

Quatre grands constats ont émergé de l’ensemble du processus de consultation. Ils confirment l’importance de repenser profondément la promotion de la santé mentale et la prestation des services en vue d’améliorer l’accessibilité, l’utilisation et l’offre des services de santé mentale en français.

1. LA DIFFICULTÉ D’APPRÉHENDER LA SANTÉ MENTALE

La clientèle immigrante francophone, dans sa grande diversité, semble considérer la santé mentale à travers le prisme des « maladies mentales ». En effet, plusieurs semblent avoir le réflexe de l’associer à des troubles psychologiques (« folies »), au lieu de la percevoir comme un état de bien-être à préserver. L’étude nous a toutefois permis d’entrevoir des signes d’ouverture intéressants de la part des communautés immigrantes, conscientes du haut niveau de stress associé au processus d’immigration et des répercussions possibles de celui-ci sur la santé mentale. Ainsi, il apparaît nécessaire de trouver des moyens concrets de répondre à leurs besoins et de les outiller pour traverser ces épreuves difficiles. La santé mentale n’est pas un sujet facile à aborder. En général, il semble exister un rapport ambigu à son égard. Le désistement de certains participants au moment de réaliser les entrevues individuelles en fait foi. Toutefois, la majorité de nos participants issus des communautés ethnoculturelles francophones ont fait preuve d’ouverture en exprimant la volonté d’être davantage renseignés sur la santé mentale, et notamment sur :

les moyens de préserver l’équilibre mental et de gérer le stress; des façons de sonder les états d’âme, pour savoir, par exemple, si une personne se porte bien

ou non; des outils pour savoir s’il faut demander de l’aide, et à quel moment, etc.

2. LA MÉCONNAISSANCE DES RESSOURCES OFFERTES PAR LES COMMUNAUTÉS ETHNOCULTURELLES

FRANCOPHONES ET LES INTERVENANTS DE PREMIÈRE LIGNE

À la lumière des consultations, force est de constater que les services de santé mentale en français sont largement méconnus par les communautés ethnoculturelles francophones et par les intervenants de première ligne. Il apparaît essentiel de remédier à ce problème majeur, qui nuit à l’accessibilité et à l’utilisation des services offerts. En effet, les immigrants francophones ne peuvent pas demander des services dont ils ignorent l’existence. Et même s’ils s’informaient auprès de leur médecin de famille, d’intervenants en santé et services sociaux ou de leaders communautaires, les renseignements recueillis démontrent qu’ils auraient peu de chances d’être dirigés vers les bonnes ressources. Ceux

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qui sont censés connaître le milieu de la santé mentale semblent malheureusement aussi peu informés des ressources actuellement offertes en français.

3. LE BESOIN D’OUTILLER LES INTERVENANTS DE PREMIÈRE LIGNE

En outre, l’étude fait état de l’impression, chez les intervenants de première ligne en santé et services sociaux et les représentants communautaires, de ne pas être bien outillés pour aborder la question de la santé mentale avec les immigrants et pour diriger ceux-ci vers les bonnes ressources en français. Les représentants communautaires ont cerné un important besoin de formation en santé mentale. Ils souhaitent être davantage outillés pour identifier les personnes à risque et être capables de les renseigner sur les services offerts en français. De plus, les intervenants en santé et services sociaux souhaitent parfaire leurs connaissances en matière de santé mentale et souhaitent aussi être plus sensibilisés à la réalité des immigrants, afin de mieux comprendre les défis qui attendent ceux-ci et d’adapter leur intervention.

4. LE BESOIN D’AMÉLIORER LA SYNERGIE ENTRE LES DIFFÉRENTS INTERVENANTS

Enfin, le dernier constat porte sur le manque de synergie entre les services et les intervenants francophones en santé mentale. Dans le système actuel de santé en Ontario, les services en français sont souvent isolés et disséminés. Les intervenants francophones ont peu l’occasion de se mettre à jour sur les services offerts en français et de nouer des relations professionnelles de confiance avec d’autres intervenants francophones. Il est nécessaire de trouver des solutions favorisant la création de liens structurants entre les intervenants en santé et services sociaux et les fournisseurs, et ce, pour maximiser la rétention de la clientèle francophone et pour colmater les brèches tout au long du continuum de services de santé mentale en français. Il a aussi été question du besoin grandissant de spécialistes francophones dans le domaine de la santé mentale, notamment en psychiatrie, en psychothérapie et en pédopsychiatrie.

CONTEXTE DES RECOMMANDATIONS Les recommandations de l’étude tiennent également compte du rôle de Reflet Salvéo, qui est de « conseiller et de soutenir les RLISS par rapport aux différents éléments du développement de services de santé appropriés à la collectivité francophone locale et de déterminer les besoins et les priorités de cette collectivité en matière des services de santé ». À court terme, il apparaît nécessaire que Reflet Salvéo s’engage dans une réflexion pour élaborer un plan d’action avec les parties concernées (RLISS, fournisseurs, etc.), compte tenu de leurs rôles et de leurs responsabilités respectifs, afin d’améliorer l’accès et l’utilisation des services de santé mentale en français de la part des communautés francophones. Dans un premier temps, nous formulons quatre (4) recommandations prioritaires qui permettront de mieux estimer l’ampleur des services de santé mentale offerts en français et les besoins au sein des communautés francophones, ainsi que de poser les premiers fondements d’une structure de référencement destinée à soutenir l’offre et la demande francophones. Dans un deuxième temps, nous formulons six (6) recommandations liées au renforcement des capacités des intervenants clés qui travaillent auprès des communautés ethnoculturelles francophones.

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RECOMMANDATIONS PRIORITAIRES À COURT TERME OPTIMISER LA CONNAISSANCE ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE OFFERTS EN FRANÇAIS

1. Établir une liste exhaustive de l’ensemble des services de santé mentale et des services connexes offerts en français dans le Grand Toronto.

2. Faire la promotion des services de santé mentale et des services connexes offerts en français

auprès du grand public, des intervenants clés francophones et anglophones et des organismes qui desservent les immigrants francophones du Grand Toronto.

3. Élaborer une stratégie de sensibilisation destinée à démystifier la santé mentale auprès des

communautés ethnoculturelles francophones. Cette initiative devrait s’accompagner d’activités régulières, soutenues par des pairs et offertes dans les lieux de rencontre de la communauté (écoles, églises, centres communautaires, etc.), dans le but d’encourager l’établissement d’un dialogue constructif, d’enrichir les connaissances et de faciliter une meilleure compréhension commune de ces enjeux.

4. Créer un outil destiné à faciliter les références vers les services francophones. Cette base de données permettrait de mieux connaître l’ampleur de la clientèle et l’étendue des besoins en matière de services de santé mentale chez les immigrants francophones, et de planifier l’offre de services en conséquence.

RECOMMANDATIONS À MOYEN ET À LONG TERMES ACCROÎTRE LA PROMOTION ET LES RESSOURCES DES INTERVENANTS CLÉS QUI TRAVAILLENT AUPRÈS DES

IMMIGRANTS FRANCOPHONES

5. Élaborer une stratégie de transmission des connaissances en matière de prestation de soins

aux immigrants afin de répertorier les meilleures pratiques. Cette stratégie pourrait inclure un volet visant à encourager les partenariats entre les fournisseurs de services et les organismes d’aide aux immigrants afin qu’ils puissent mettre leur expertise en commun et développer des synergies constructives et porteuses pour l’avenir des services de santé mentale en français.

6. Traduire ou concevoir en français des outils de sensibilisation et de prévention consacrés à la santé mentale, et qui sont adaptés aux réalités et aux besoins des nouveaux arrivants et des communautés ethnoculturelles.

7. Encourager une participation accrue des immigrants francophones, des usagers et des familles

dans l’élaboration des politiques, la planification et la prise de décisions relatives à la question de la santé mentale des immigrants, et ce, par l’entremise des cadres institutionnels ou des comités existants.

8. Créer des espaces de dialogue sur la santé mentale accessibles aux communautés ethnoculturelles francophones.

9. Offrir des formations ou des séminaires sur divers sujets liés à la santé mentale et au processus

d’immigration afin d’outiller l’ensemble des intervenants de première ligne (médecins de famille, intervenants en santé et services sociaux, leaders communautaires, etc.), et que ceux-ci soient en mesure d’identifier les personnes vulnérables, d’adapter leurs modes d’intervention aux communautés ethnoculturelles francophones et de les diriger, le cas échéant, vers les services appropriés en français.

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10. Élaborer des lignes directrices d’une éthique de travail communautaire en santé mentale et former les intervenants clés afin de créer les conditions favorables à la sécurité, au bien-être et à l’épanouissement de tous les immigrants. Les intervenants de première ligne présents dans les communautés doivent être sensibilisés à la question et accompagnés dans la mise en place d’une éthique de travail rigoureuse favorisant le respect de la confidentialité et de l’identité des personnes aux prises avec des enjeux de santé mentale.

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CONTEXTE DE L’ÉTUDE Le 29 août 2014, Reflet Salvéo retenait les services de PGF Consultants pour réaliser une étude sur la perception sur la santé mentale et des services offerts aux immigrants francophones du Grand Toronto. Se basant sur les informations contenues dans la revue de la documentation sur les déterminants de la santé mentale des immigrants, réalisée en mars 2014 par le Rifssso (Regroupement des intervenantes et intervenants francophones en santé et services sociaux de l’Ontario) pour le compte de Reflet Salvéo, nous avons lancé cette étude visant à recueillir des données qualitatives et concrètes afin d’alimenter la réflexion et de formuler des recommandations en vue d’améliorer les services de santé mentale offerts aux immigrants francophones du Grand Toronto. En effet, bien que les immigrants jouissent généralement d’une meilleure santé que les gens nés au Canada, leur état a tendance à se détériorer une fois installés au pays. Durant le processus d’immigration et d’intégration, les immigrants font face à certains défis personnels et socioéconomiques qui peuvent avoir une influence sur leur bien-être. Ils arrivent parfois au pays avec un lourd passé qui, dans certains cas, peut affecter la santé mentale. On a toutefois constaté qu’en général, les immigrants sont plus réticents à demander de l’aide lorsqu’il est question de santé mentale. De récentes études ont d’ailleurs conclu à une sous-utilisation des services de santé mentale chez les immigrants. Parmi les explications avancées, on note la ténacité des préjugés et des tabous à l’égard de la maladie mentale, les barrières culturelles et linguistiques et le manque de connaissances sur les services et les ressources offerts. En outre, il existe relativement peu d’information sur l’accessibilité du système de santé s’adressant aux communautés ethnoculturelles, et qui traite de la qualité des soins qu’elles reçoivent, de leur satisfaction à l’égard de ceux-ci et des problèmes qu’elles vivent au sein du système lui-même. Pour mieux cerner cette problématique, Reflet Salvéo – organisme à but non lucratif qui a pour mission d’engager les communautés à recueillir les informations nécessaires à l’amélioration des services de santé en français pour ensuite fournir des recommandations aux réseaux locaux d’intégration des services de santé (RLISS) de Mississauga Halton, du Centre-Toronto et du Centre-Ouest – a mandaté PGF pour cerner les enjeux susceptibles de défavoriser l’accès aux services de santé mentale et d’en limiter l’utilisation.

C’est dans ce contexte que le Cabinet PGF a réalisé cette étude en élaborant les outils nécessaires pour recueillir des données sur la perception de la santé mentale et les services offerts aux immigrants francophones du Grand Toronto. Le présent document se veut un rapport sur l’ensemble de l’étude réalisée par PGF Consultants et se compose des sections suivantes :

le contexte d’évaluation;

la démarche méthodologique;

les résultats et les constats issus des consultations;

les recommandations qui en découlent.

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DÉMARCHE MÉTHODOLOGIQUE ET LIMITES DE L’ÉTUDE

DÉMARCHE MÉTHODOLOGIQUE En raison de la nature du sujet traité, la présente étude a subi quelques ajustements en cours de route, lesquels n’ont toutefois pas modifié la nature du mandat confié à PGF. Il a fallu tout simplement modifier les approches, les attentes et le positionnement de l’étude.

Ainsi, le titre de l’étude, qui était au départ Étude qualitative exploratoire sur la santé mentale des immigrants francophones a été changé pour Étude sur la perception de la santé mentale et des services offerts aux immigrants francophones, afin de mieux refléter la nature des informations recherchées et de rendre l’étude plus attrayante auprès du public cible. Pour colliger les données qualitatives permettant de formuler des recommandations destinées à offrir aux immigrants francophones un meilleur accès aux services de santé mentale dans leur langue, PGF a privilégié trois méthodes de collecte de données : une enquête en ligne, des entrevues semi-dirigées et des groupes de discussion. Le public cible était composé d’utilisateurs directs et indirects de services de santé mentale, de fournisseurs de services de santé et de représentants communautaires. L’objectif recherché des différentes méthodes de collectes de données était de :

recourir aux témoignages, aux expériences de vie et aux commentaires des participants pour avoir une meilleure idée de l’état des perceptions des immigrants francophones sur la santé mentale et les services qui sont à leur portée;

donner à l’ensemble des participants l’occasion de définir les besoins prioritaires en matière d’information et de services de santé mentale pour les immigrants francophones;

dégager des pistes de solution susceptibles d’améliorer l’accès des immigrants francophones aux services de santé mentale en français.

Les outils de collecte de données ont été conçus dans le but d’explorer les questions suivantes :

la compréhension de la santé mentale;

le degré de connaissance et l’utilisation des services de santé mentale offerts en français;

les obstacles à l’accès et à l’utilisation des services de santé mentale;

les pistes d’amélioration. Ainsi, les données qualitatives ont été recueillies dans le cadre :

d’une enquête en ligne visant à recueillir la rétroaction des catégories de répondants suivants :

- utilisateurs directs et indirects de services de santé mentale;

- fournisseurs de services de santé;

- représentants communautaires;

d’entrevues individuelles selon les mêmes catégories de répondants;

de groupes de discussion ouverts à l’ensemble des immigrants francophones.

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LIMITES DE L’ÉTUDE Les consultants ainsi que le mandataire ont dû faire montre de souplesse pour adapter le calendrier des livrables à la réalité logistique, qui était tributaire du degré de collaboration et de participation des partenaires et des répondants volontaires. La durée de l’enquête en ligne a dû être prolongée à quatre reprises et des messages de rappel hebdomadaires ont été diffusés afin de susciter l’intérêt et de susciter une participation optimale. Avec l’autorisation de Reflet Salvéo, on a également procédé au tirage d’une carte cadeau de 100 $ pour stimuler la participation.

Faute de participants, on a dû annuler la tenue des premiers groupes de discussion et reporter ceux-ci au mois de novembre. Les critères de participation à ces groupes de discussion ont été assouplis afin de pouvoir ouvrir la discussion et la réflexion sur la santé mentale et les services offerts à l’ensemble des immigrants francophones. De plus, les partenariats établis avec des organismes locaux qui œuvrent auprès des immigrants francophones ont facilité le recrutement de participants. Les ajustements apportés à la stratégie de consultation ont permis de tenir trois groupes de discussion, qui ont connu un bon taux de participation (40 personnes) et qui ont donné lieu à de riches échanges.

PRÉCISIONS SUR LE PROCESSUS DE RÉALISATION DES ENTREVUES INDIVIDUELLES

Pour les entrevues individuelles, PGF a recueilli le nom des participants au moyen de références. Reflet Salvéo a sollicité les membres du comité consultatif en santé mentale des immigrants francophones ainsi que son réseau de partenaires pour nous communiquer une liste de participants potentiels, qui a continué d’évoluer au gré des références obtenues. En ce qui a trait aux entrevues, la participation des utilisateurs de services de santé mentale constituait le principal défi. Les organismes et les établissements qui offrent des services de santé mentale sont assujettis à la Loi sur la protection des renseignements personnels et à un code de déontologie qui ne les autorisent pas à communiquer des informations sur leur clientèle. PGF a tenté de surmonter ce défi en créant une fiche de projet et un formulaire de consentement et de décharge requérant les signatures du client et du thérapeute (annexe 4), mais cela n’a pas suffi pour obtenir la collaboration des grands établissements en santé mentale. De plus, quelques utilisateurs volontaires avec qui PGF a pu communiquer et planifier un entretien se sont désistés au dernier moment. D’autres ont dû être exclus de l’étude parce qu’ils ne respectaient pas les deux critères de base suivants :

être un immigrant francophone ou un enfant d’immigrant;

avoir une expérience directe ou indirecte en santé mentale dans le Grand Toronto. Pour pallier la difficulté de réaliser des entrevues auprès des utilisateurs directs ou indirects, Reflet Salvéo a conclu un partenariat avec le Centre francophone de Toronto (CFT), qui a mis à contribution ses thérapeutes. Ces derniers ont réalisé des entrevues avec des clients du CFT à l’aide des outils conçus par PGF, et ce, dans le but d’assurer une collecte de données uniforme et rigoureuse. Cette stratégie de dernier recours a ainsi permis à Reflet Salvéo d’obtenir cette rétroaction individuelle nécessaire pour réaliser une étude approfondie. Motivé par le souci d’assurer l’objectivité des résultats retenus, PGF a analysé les résultats de ces entrevues avec beaucoup d’attention. PGF a choisi d’exclure les données communiquées par le CFT qui touchaient aux notions d’appréciation des services reçus (qualité, sensibilité des intervenants, délais d’attente, etc.).

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QUELQUES BIAIS ÉVENTUELS ET MESURES D’ATTÉNUATION

La cueillette de données qualitatives constituait le but principal de cette étude. L’objectif premier de Reflet Salvéo n’était pas de colliger les connaissances d’experts sur les enjeux de la santé mentale et sur les services dans le domaine, mais de recueillir les points de vue d’immigrants francophones du Grand Toronto. La contagion : Pour éviter la contagion, nous nous sommes assurés de l’absence de liens d’interdépendance. Ainsi, nous avons tenu les groupes de discussion à intervalles très rapprochés. En effet, il est possible que certains membres d’une même communauté soient déjà socialement très proches. Par conséquent, il y a risque qu’un participant partage ses perceptions à une autre personne appelée elle aussi à participer par la suite à un groupe de discussion. La complaisance des participants : Les participants ont été sensibilisés à l’importance de formuler des réponses objectives, et non de chercher à plaire à l’administrateur du questionnaire ou à l’auditoire. La validité interprétative : Sachant que les points de vue et les perceptions sont liés aux récits de vie des participants, PGF a réalisé l’étude en se basant sur les synthèses analytiques des faits (annexes 1, 2 et 3), sans porter de jugements sur les éléments avancés. L’analyse interprétative de ce rapport s’appuie sur les principaux éléments mentionnés. La validité interprétative a été assurée grâce à la triangulation de l’information. Elle a permis, pour un même sujet, de recueillir puis de comparer l’information colligée à l’aide des diverses méthodes de collecte. Ainsi, les informations contenues dans ce rapport reflètent celles recueillies auprès d’utilisateurs, d’intervenants en santé et services sociaux, de représentants communautaires et de membres des communautés ethnoculturelles qui ont volontairement participé à cette étude, par l’entremise des entrevues individuelles, de l’enquête en ligne ou encore des groupes de discussion.

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RÉSULTATS DES CONSULTATIONS L’étude a été menée de septembre à novembre 2014. Plus d’une centaine de personnes y ont participé. Elles se répartissent comme suit :

vingt-six (26) participants aux entrevues individuelles, soit 13 utilisateurs, 7 fournisseurs et 7 représentants communautaires;

trente-sept (37) participants à l’enquête en ligne, soit 13 utilisateurs, 12 fournisseurs et 12 représentants communautaires;

quarante (40) participants aux groupes de discussion, qui ont eu lieu dans les locaux des trois organismes suivants : Oasis Centre des femmes, CANORAA et Africans in Partnership against Aids (APAA).

Une grande majorité des participants, particulièrement les utilisateurs et les représentants communautaires, étaient d’origine africaine. L’origine des répondants à l’enquête en ligne est plus variée et se répartit comment suit : 51 % viennent de l’Afrique; 24 %, de l’Europe; 11 %, de l’Amérique du Nord; 8 %, de l’Asie; et enfin 2 %, de l’Amérique centrale, de l’Amérique du Sud et des Caraïbes. Le tableau suivant, qui ne tient pas compte de la quarantaine de participants aux groupes de discussion, dresse un profil un peu plus détaillé des participants aux entrevues individuelles et à l’enquête en ligne, selon leur sexe, le nombre d’années passées depuis leur arrivée au Canada et le groupe d’âge auquel ils appartiennent.

Tableau 1 : Description des participants aux entrevues et à l’enquête en ligne

Utilisateurs Représentants communautaires

Fournisseurs Total

Entrevues Enquête Entrevues Enquête Entrevues Enquête

Sexe :

Hommes 5 4 4 6 1 4 24

Femmes 7 9 3 6 6 8 39

Total 25 19 19 63

Au Canada depuis :

Moins de 1 an 1 0 1 1

nd

0 3

1 à 5 ans 5 5 3 3 1 17

6 à 10 ans 2 3 2 5 4 16

11 à 15 ans 1 2 0 1 3 7

16 à 20 ans 1 0 0 1 1 3

Plus de 20 ans 2 0 1 1 1 5

Toujours 0 3 0 0 2 5

Groupe d’âge :

Moins de 25 ans 2 0 0 0

nd

0 2

Entre 25 et 34 ans 1 2 1 2 2 8

Entre 35 et 44 ans 5 9 5 9 5 33

Entre 45 et 54 ans 2 1 0 1 2 6

55 ans et plus 2 1 1 0 3 7

Ce tableau indique que les femmes représentent 62 % du nombre total des participants. L’âge des participants varie de 18 à 55 ans et plus. Une proportion plus significative d’ente eux – les utilisateurs et les représentants communautaires notamment – sont âgés de 35 à 44 ans.

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Parmi les répondants de la catégorie des fournisseurs de services de santé, deux (2) sont des intervenants en santé mentale, sept (7) sont des intervenants en santé et services sociaux, un (1) est gestionnaire d’un organisme de santé et services sociaux et deux (2) appartiennent à la catégorie « autres ». Les données recueillies dans le cadre des entrevues individuelles, de l’enquête en ligne et des groupes de discussion ont fait l’objet d’un examen long et minutieux. Dans la section qui suit, nous proposons une analyse globale et descriptive qui fait état des obstacles à l’accès et à l’utilisation des services de santé mentale en français, pour les immigrants francophones, dans la région du Grand Toronto. L’analyse a permis de faire ressortir les éléments communs et les différences qui existent entre les catégories de répondants relativement aux quatre grandes thématiques susmentionnées.

LA COMPRÉHENSION DE LA SANTÉ MENTALE Dans l’ensemble, nous observons que la compréhension de la notion de santé mentale varie en fonction du niveau de scolarité des immigrants francophones. D’autres facteurs peuvent également influencer le degré de compréhension de la santé mentale, dont :

le niveau de sensibilisation à la santé mentale dans le pays d’origine;

le nombre d’années passées dans le pays d’accueil;

le fait de posséder ou non une formation dans le domaine de la santé;

le fait d’avoir fait face à des enjeux de santé mentale, etc. Selon les données recueillies lors du sondage en ligne, environ 41 % des répondants estiment que les communautés ethnoculturelles francophones connaissent les enjeux liés à la santé mentale et les comprennent. Le graphique ci-dessous indique que ce pourcentage est nettement plus élevé chez les utilisateurs. Lors des entrevues individuelles, ceux-ci démontraient une bonne connaissance des enjeux de santé mentale. Cela s’explique probablement par le fait qu’ils ont bénéficié de soutien, qu’ils ont fait l’objet d’un suivi ou qu’ils ont reçu de l’information pertinente à un moment ou à un autre. Toutefois, ce même niveau de connaissance est plutôt varié parmi les groupes de discussion où l’on a tendance à considérer la santé mentale comme un état psychologique lié à la démence ou à une anomalie psychologique. Une des explications possibles est que les immigrants francophones ont peu accès à des espaces pour discuter de santé mentale dans leur langue, ce qui par conséquent pourrait constituer un obstacle à la compréhension de la santé mentale et de ses enjeux.

Graphique 11 : La connaissance de la santé mentale et de ses enjeux

11

Tous les graphiques présentés dans ce rapport sont issus des données de l’enquête en ligne et utilisent une échelle allant

de 1 (entièrement en désaccord) à 4 (entièrement en accord); aucune valeur numérique n’est accordée aux réponses « ne sait pas/ne s’applique pas ».

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Au cours des entrevues réalisées avec des représentants communautaires (parmi lesquels quatre avaient obtenu une formation en santé dans leur pays d’origine), ceux-ci ont associé la santé mentale au concept de bien-être, lui-même tributaire de certains déterminants sociaux de la santé. La notion de bien-être englobe l’aspect mental, physique et social et est synonyme d’équilibre émotionnel. Les utilisateurs des services de santé mentale associent la santé mentale au concept de bien-être et à la notion de normalité, qui regroupent autant l’aspect mental, physique, social qu’environnemental. Autrement dit, on associe la santé mentale à l’idée d’avoir « un esprit sain dans un corps sain », comme dit l’adage. Par conséquent, la santé mentale est plutôt liée à l’état psychologique de l’individu, tandis que les déséquilibres émotionnels sont associés à des problèmes d’ordre pathologique. De leur côté, les fournisseurs associent la santé mentale au concept de bien-être émotionnel, physique, mental, social et même environnemental. Tous s’accordent pour dire que la santé mentale est un état d’équilibre nous permettant de fonctionner de façon optimale dans la vie, selon les capacités de chacun. Lorsque cet équilibre est perturbé, celui-ci peut avoir des conséquences négatives sur plusieurs aspects de la vie. Par ailleurs, la plupart des participants aux groupes de discussion associent la santé mentale aux problèmes psychologiques et psychiques, à l’état mental d’une personne incapable de travailler, à une personne isolée et déprimée, ou à un déséquilibre mental qui empêche les personnes de fonctionner normalement. Il est intéressant de constater que malgré un niveau de compréhension généralement satisfaisant de la santé mentale, une forte majorité de répondants à l’enquête en ligne, toutes catégories confondues, estiment ressentir le besoin d’approfondir leurs connaissances en la matière. Les participants aux entrevues et aux groupes de discussion font un constat similaire. Ils indiquent que ce désir d’en savoir davantage sur le sujet est mû par le désir d’aider les gens vulnérables. Ils souhaitent enrichir leurs connaissances générales sur la santé mentale, mais plus particulièrement sur le dépistage (symptômes avant-coureurs) et sur les services offerts. Pour plusieurs, l’accès à des documents d’information en français décrivant les enjeux de santé mentale selon une approche axée sur la compréhension et la prise en compte du parcours des immigrants pourrait favoriser les échanges sur le sujet, encourager les références et inciter les gens vulnérables à consulter. L’enquête en ligne révèle également qu’en matière de santé mentale, il ne suffit pas d’œuvrer dans le domaine de la santé ou auprès des immigrants pour se sentir outillé et pour connaître les ressources offertes dans le domaine, comme l’indique le graphique ci-dessous.

Graphique 2 : Outillé pour intervenir en santé mentale

Seulement 58 % des fournisseurs se sentent outillés pour intervenir dans le domaine de la santé mentale, et seulement 33 % d’entre eux estiment avoir une bonne connaissance des ressources offertes en santé mentale dans la région du Grand Toronto. Cette absence de connaissances sur les ressources en français soulève une question sur la capacité réelle des fournisseurs à assister adéquatement les personnes vulnérables et à les diriger vers les bons services. Elle soulève aussi à la question de la disponibilité de ces services en français.

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Quelque 66 % des représentants communautaires estiment ne pas être outillés et en pas connaître les ressources existantes. Or, les consultations individuelles et en groupe confirment que les immigrants se tournent presque systématiquement vers les membres de leur communauté pour être informés, dirigés et soutenus. Il apparaît important de mieux informer et de mieux former les leaders communautaires, qui jouent souvent le rôle de personnes ressources et de confidents dans leur milieu. Certains participants ont indiqué qu’ils éprouvaient un certain malaise à l’idée de discuter de leurs problèmes de santé mentale avec des leaders ou des intervenants en santé et services sociaux de leur communauté. En raison de la petite taille des communautés ethnoculturelles et de la proximité des membres, ils craignent de ne pouvoir garder l’anonymat et de pouvoir ainsi assurer la confidentialité des propos qui pourraient être échangés. Ces inquiétudes traduisent l’importance de mettre en place un code d’éthique pour encadrer, dans de telles situations, le travail des leaders communautaires, afin qu'ils deviennent de véritables vecteurs d'intégration, pour les personnes vulnérables, au sein de leur communauté. Il est primordial de sensibiliser les leaders et les intervenants au respect de la confidentialité et de l’anonymat des personnes vulnérables qui se tournent vers eux. Somme toute, il importe de considérer que les participants à l’étude veulent tous, sans exception aucune, approfondir leurs connaissances et leur compréhension de la santé mentale. Ce constat reflète l’importance d’offrir davantage d’activités de prévention en santé mentale aux immigrants francophones, d’améliorer l’accès aux ressources existantes dans les RLISS et de concevoir des outils appropriés pour servir cette clientèle plus vulnérable.

LA CONNAISSANCE ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE OFFERTS EN FRANÇAIS Pour la plupart des participants à l’étude, la connaissance et l’utilisation des services de santé mentale en français constituent deux défis de taille qui attendent les immigrants francophones dans la région du Grand Toronto. Les participants ont rappelé que le processus d’immigration est souvent beaucoup plus complexe que ne l’avaient prévu les immigrants. Ceux-ci doivent généralement surmonter un grand nombre de défis en même temps : légaliser leur statut, trouver un logement, décrocher un emploi, obtenir la reconnaissance de leur formation professionnelle, apprendre la ou les langues du pays d’accueil, s’intégrer à la société d’accueil, apprendre à vivre éloigné de leurs proches qui sont restés dans le pays d’origine, rompre l’isolement et parfois devoir lutter contre la discrimination. Certains immigrants arrivent également au Canada éprouvés et traumatisés par leurs expériences antérieures. Tous ces facteurs et défis à surmonter dans un court délai sont sources d’anxiété et de stress, que les immigrants doivent apprendre à gérer. C’est pourquoi ceux-ci constituent une clientèle plus vulnérable aux questions de santé mentale. Plusieurs immigrants francophones du Grand Toronto se rendent rapidement compte qu’aux difficultés d’adaptation et d’intégration se greffent les enjeux de la langue et de l’offre limitée de services essentiels et d’accueil en français. Ainsi, les immigrants francophones sont plus vulnérables, étant confrontés à un phénomène de « triple marginalisation » : être associé à une minorité visible, à une minorité linguistique et, dans certains cas, à une minorité sexuelle. En raison de ces nombreux obstacles, les immigrants ont souvent besoin d’un accompagnement plus soutenu pour comprendre la société canadienne, ses codes et ses services, d’autant que certains viennent de pays dépourvus de filet social. Il n’est donc pas étonnant de constater qu’une fois installés au Canada, ils ne puissent demander des services dont ils ignorent l’existence, et qui les aideraient à soigner des maux qu’ils ne parviennent pas à comprendre ou à nommer. De plus, il arrive que la langue maternelle de certains immigrants ne possède pas les mots ou les définitions permettant de

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décrire des maux qui ne sont pas physiques. D’autres sont confrontés aux préjugés hérités de leur culture d’origine, ce qui peut constituer un autre obstacle au moment d’aller chercher de l’aide. Tous ces éléments influent sur l’utilisation des services de santé mentale. Les données recueillies dans le cadre de cette étude viennent confirmer ce constat. En effet, selon l’enquête en ligne révèle, une faible minorité de répondants est d’avis que les informations sur la santé mentale en français sont facilement accessibles (16 %) et que les services sont connus (11 %). Les répondants estiment, dans une proportion de 84 %, que les personnes à risque ne font pas un bon usage des services.

Graphique 3 : L’accessibilité de l’information et des services en français

ACCESSIBILITÉ DE L’INFORMATION SUR LA SANTÉ MENTALE

Tous les répondants considèrent que l’information sur la santé mentale en français est une denrée rare dans la grande région de Toronto. La plupart d’entre eux n’avaient aucun souvenir d’avoir eu accès à de l’information sur la santé mentale dans cette langue. En effet, outre les utilisateurs de services de santé mentale, il s’agissait pour la plupart des participants d’une première occasion de parler de santé mentale et de réfléchir aux enjeux qui touchent les immigrants francophones du Grand Toronto. Parmi les utilisateurs sondés, 85 % estiment qu’il est difficile de trouver de l’information appropriée sur la santé mentale en français en Ontario. Cette statistique est corroborée par les entrevues que nous avons réalisées. Les utilisateurs et les participants aux groupes de discussion confirment aussi qu’il s’avère difficile d’accéder à de l’information et à des services en santé mentale dans cette langue. Les représentants communautaires abondent également dans le même sens, soulignant unanimement l’absence d’information sur la santé mentale en français. Les intervenants en santé sont d’avis qu’il n’existe pas suffisamment de documents d’information traitant de santé mentale en français qui circulent dans les communautés immigrantes francophones ou qui s’adressent à elles. La plupart des répondants ont affirmé avoir le réflexe de chercher de l’information sur Internet, ou encore de s’informer auprès de leur médecin de famille ou des leaders communautaires.

CONNAISSANCE DE L’OFFRE DE SERVICES

Les données recueillies font état d’une très faible connaissance de l’offre de services de santé mentale en français auprès des participants de l’étude. Outre les utilisateurs, peu connaissent l’existence des services. D’ailleurs, les participants à l’enquête en ligne ont indiqué qu’il était quasiment impossible d’obtenir des services de santé mentale dans leur région (85 %) et qu’il était très difficile d’être rapidement dirigé vers les bonnes ressources (77 %). Les représentants communautaires estiment que les services de santé mentale en français sont nettement insuffisants et parfois inexistants dans certaines régions comme Mississauga. Les intervenants ont affirmé avoir dû faire des recherches pour établir leur propre liste de ressources existantes. Aucun outil à jour répertoriant les services de santé mentale et les services connexes déjà

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offerts en français ne semble exister. Et plusieurs intervenants en santé et services sociaux et leaders communautaires se sentent démunis en raison de l’inexistence de cet outil. Par conséquent, ils ne savent pas toujours vers quels services rediriger leurs clients ni de quelle manière le faire. Ainsi, la plupart des participants – utilisateurs, intervenants et représentants communautaires – ont été incapables d’énumérer certains des services déjà offerts en français dans le Grand Toronto, exception faite du Centre francophone de Toronto, qui a été cité à quelques reprises. D’ailleurs, la plupart des participants croient que CAMH n’offre pas de services en français. En général, ils ont le sentiment que l’offre de services de santé mentale en français est peu connue parce qu’elle est nettement insuffisante, parce qu’elle ne répond pas aux besoins actuels et parce que les services existants semblent peu connus.

UTILISATION DES SERVICES

Les participants à l’étude ont souligné que les immigrants aux prises avec des difficultés émotionnelles, financières et autres ont en général tendance à solliciter l’appui de leurs proches et des leaders communautaires. Toutefois, en situation de crise aiguë et à défaut de connaître les services de santé mentale déjà offerts, les personnes qui ont le courage de demander de l’aide sont souvent contraintes de se présenter aux urgences des hôpitaux, avec l’espoir d’obtenir des services en français et d’être dirigés vers les ressources en santé mentale. Or, il semble que ce soit rarement le cas. Les utilisateurs interrogés estiment que très peu de services de santé mentale en français existent. D’ailleurs, leur propre appréciation des services reçus confirme cet état de fait. En effet, le taux de satisfaction des utilisateurs à l’égard de la qualité des services reçus atteint à peine 35 % et seulement 50 % d’entre eux estiment que les intervenants en santé mentale sont sensibilisés à leur culture, à leur langue et à leur parcours de vie, et respectueux de ceux-ci.2 Toutefois, au-delà de la notion de service culturellement adapté, ce qui importe pour les utilisateurs immigrants, c’est d’avoir un intervenant francophone de confiance ayant une bonne écoute, dénué de jugement, et qui fait preuve d’ouverture pour comprendre leur parcours de vie et trouver des solutions adaptées à leurs valeurs et leur système de croyances. L’impression générale de l’ensemble des participants est que seule une faible proportion de personnes à risque aurait effectivement recours à des services de santé mentale en français. Cela s’expliquerait, entre autres, par la méconnaissance de l’existence de ces services. La faible utilisation des services s’expliquerait également, selon les représentants communautaires, par le fait que certains immigrants ne saisissent pas bien le concept de maladie mentale, qu’ils ne sont pas tous bien outillés pour en détecter les signes précurseurs et pour demander l’aide nécessaire. De plus, plusieurs ne sauraient pas à qui s’adresser pour obtenir de l’information et des services. Les utilisateurs rencontrés abondent dans le même sens et expliquent que le concept même de santé mentale est inexistant pour certains immigrants et que, par conséquent, ceux-ci ne peuvent demander des services dont ils ignorent l’existence. La sensibilisation devient donc un élément fondamental. Les intervenants précisent toutefois qu’avec la clientèle immigrante, il ne suffit pas d’offrir des renseignements sur des services précis. Il est aussi nécessaire de créer des liens de confiance et d’offrir un accompagnement tout au long du processus de reconnaissance de la maladie et de l’utilisation de ressources adaptées.

2 Les données utilisées dans cette analyse excluent celles transmises par le Centre francophone de Toronto.

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Ces quelques éléments font ressortir l’ampleur de la tâche à accomplir pour améliorer l’accès et l’utilisation des services de santé mentale pour les immigrants francophones du Grand Toronto. Il est très certainement possible d’émettre l’hypothèse que le manque d’information en français et le manque de promotion des services existants figurent au nombre des principaux obstacles à une utilisation optimale des ressources en santé mentale déjà offertes en français dans le Grand Toronto. Toutefois, il serait également important d’effectuer une analyse détaillée de l’offre des services en santé mentale, de dresser une liste des ressources humaines spécialisées et de déterminer la répartition géographique des services existants dans le Grand Toronto.

LES OBSTACLES À L’ACCÈS ET À L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE L’étude nous a permis de définir quelques-uns des principaux obstacles à l’accès et à l’utilisation des services de santé mentale. Essentiellement, ceux-ci sont rattachés à la structure du système de santé en Ontario et à l’absence de réelle synergie entre les fournisseurs de services francophones.

L’ABSENCE DE STRATÉGIE POUR ASSURER UNE COMPRÉHENSION COMMUNE DE LA SANTÉ MENTALE

Cette étude révèle que la notion de santé mentale n’est toujours pas un concept intégré au sein des communautés immigrantes. Certains associent encore la santé mentale à la folie. D’autres ont une mauvaise compréhension de la santé mentale, des symptômes avant-coureurs, etc. Ce manque de connaissances favorise la sous-estimation des symptômes, des effets destructeurs et du potentiel d’aggravation. La ténacité des préjugés et le sentiment de honte lié aux problèmes de santé mentale nuisent également à la capacité des individus vulnérables de prendre l’initiative de s’informer et de chercher de l’aide pour mieux comprendre leur situation. D’autres n’ont tout simplement pas le luxe de se préoccuper de leur santé mentale au quotidien. Ils consacrent leur énergie à poursuivre les démarches nécessaires pour régulariser leur statut, trouver un logement, décrocher un emploi, etc. L’absence de stratégie pour assurer une compréhension commune et, à tout le moins minimale, de la santé mentale constitue un obstacle de taille. Il y a encore beaucoup de travail à accomplir sur le terrain pour s’assurer que l’information en français parvienne aux communautés immigrantes francophones. Il faut que la notion de santé mentale soit expliquée de façon claire, à l’aide d’exemples de symptômes, sans toutefois perdre de vue la nécessité d’aborder la santé mentale de manière positive et de rassurer les personnes vulnérables en démontrant qu’avec les ressources adéquates, les personnes touchées peuvent se rétablir et être heureuses.

L’ABSENCE D’UNE RÉFLEXION COLLECTIVE ET HONNÊTE SUR LA SANTÉ MENTALE DES IMMIGRANTS

Plusieurs intervenants nous ont indiqué que lorsque les immigrants étaient sensibilisés au sujet de la santé mentale, ils faisaient ensuite généralement preuve d’une plus grande ouverture sur le sujet. On peut étayer cette affirmation par une statistique de l’enquête en ligne révélant que 61 % des utilisateurs de services de santé mentale peuvent parler ouvertement de leurs problèmes. Le haut taux de participation – 40 personnes – aux trois groupes de discussion et la teneur des échanges démontrent également une ouverture à l’égard de la santé mentale. Si, effectivement, on a l’impression que la compréhension de la notion de santé mentale varie beaucoup, la participation et la teneur des échanges avec les communautés immigrantes traduisent toutefois un désir de changement de la part de celles-ci. Pleinement conscientes des nombreux défis que doivent surmonter leurs membres pour s’intégrer et pour s’épanouir au sein de la société canadienne, les communautés immigrantes veulent prendre part au processus de réflexion. Les propos des groupes de discussion font état du besoin que ressentent les immigrants d’exprimer leur vécu, de parler ouvertement de leurs traumatismes, de leurs difficultés quotidiennes, etc. Certains participants ont par ailleurs formulé le souhait d’offrir des groupes de discussion mensuels. Cette suggestion reflète

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le besoin de créer des espaces de dialogue ainsi que le désir de participer à la réflexion collective sur les questions de santé mentale.

Entreprendre une réflexion collective et honnête sur la santé mentale des immigrants francophones constituerait un excellent moyen de sensibiliser le public aux épreuves que les immigrants doivent surmonter, et qui sont parfois aux limites de l’acceptable. Ce processus permettrait également de déterminer les structures à mettre en place pour répondre aux besoins des immigrants (par exemple, des groupes de soutien).

ACCÈS LIMITÉ AUX SERVICES DE SANTÉ EN FRANÇAIS

Les participants à l’étude ont souligné à plusieurs reprises la difficulté d’obtenir des services de santé en français à Toronto. Ce constat concerne à la fois les soins primaires et les services de santé mentale, qu’ils pensent inexistants dans cette langue. En outre, il a été question de la pénurie de services spécialisés en français dans le domaine de la santé mentale, comme en psychiatrie, en psychothérapie et en pédopsychiatrie. Le manque d’équité dans l’accès aux soins spécialisés en français semble être un problème systémique important, qui a des conséquences considérables, si on pense aux coûts sociaux engendrés par l’absentéisme, la baisse de productivité et l’invalidité chronique. L’absence de synergie entre les intervenants et les fournisseurs de services de santé en français rend difficile toute action visant à combler ce manque de ressources et à proposer des solutions viables. On pourrait envisager la mise en place de mécanismes visant à mettre en contact les fournisseurs et les intervenants. Il serait également souhaitable d’examiner la possibilité de créer des partenariats pour accroître la gamme des services de santé mentale en français tout au long du continuum de soins. Il apparaît nécessaire de créer une liste complète des services et des ressources francophones en santé mentale ainsi que des services connexes. Cette liste est indispensable pour améliorer l’offre de services de santé mentale en français et pour cibler les éléments clés qui s’y rattachent, comme la promotion, le référencement vers les ressources et les services francophones, l’élaboration d’un portrait détaillé de l’offre réelle de services de santé mentale en français et la détermination des lacunes tout au long du continuum de soins.

RÉPARTITION DES SERVICES ET DES RESSOURCES

Il faut souligner que la plupart des ressources francophones en santé mentale se concentrent au centre-ville de Toronto. Les immigrants vivant dans l’ouest et dans l’est du Grand Toronto ont accès à très peu de services de santé mentale en français, quand sont ceux-ci ne sont pas carrément inexistants. L’équité pour l’ensemble des communautés immigrantes du Grand Toronto en matière d’accès aux services est un aspect qui doit être repensé en profondeur.

De plus, les minorités sexuelles immigrantes francophones du Grand Toronto sont elles aussi particulièrement vulnérables, puisque seulement deux organismes francophones s’adressent à elles, mais aucun ne semble offrir des services de santé mentale. Les personnes à risque sont généralement référées à des organismes anglophones, qui sont en mesure d’offrir une gamme complète de services en santé mentale à un immigrant LGBT3. Toutefois, le défi linguistique reste entier.

Il aurait lieu de penser à mettre sur pied des cliniques de santé mentale satellites dans les secteurs qui comptent une population immigrante francophone suffisante. Il serait également utile de s’assurer qu’au moins un thérapeute par équipe soit formé pour intervenir auprès des minorités LGBT. D’ailleurs, les organismes et les établissements qui travaillent en santé mentale ou auprès des immigrants devraient chercher à acquérir les compétences leur permettant d’intervenir auprès de la communauté immigrante francophone, et ce, dans toute sa diversité.

3 LGBT est un terme utilisé pour désigner les personnes non hétérosexuelles (lesbiennes, gaies, bisexuelles et trans).

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ABSENCE DE PRÉVENTION SUR LA SANTÉ MENTALE ET DE PROMOTION DES SERVICES

Au nombre des constats qui se dégagent clairement de cette étude, citons l’absence de prévention en matière de santé mentale et de promotion des services en français. Il apparaît urgent que les intervenants en santé mentale du Grand Toronto s’associent pour concevoir une campagne de sensibilisation prenant en compte les défis que doivent surmonter les immigrants francophones pour s’intégrer dans la société canadienne et pour s’y épanouir. Cette approche aurait non seulement pour avantage de contribuer à favoriser une compréhension commune de la santé mentale, mais également à faire connaître les services et les ressources francophones offerts dans la région.

LES PISTES D’AMÉLIORATION Des pistes d’amélioration ont été formulées à la lumière des informations recueillies au cours des entrevues, des groupes de discussion et de l’enquête en ligne.

Les répondants de l’enquête en ligne ont été appelés à se prononcer sur une série de pistes de solution préliminaires. Pour eux, il semble évident que l’offre actuelle de services de santé mentale est insuffisante, qu’il faut accroître les activités de sensibilisation auprès des communautés immigrantes, sensibiliser davantage les intervenants à la réalité des immigrants, assurer une meilleure promotion des services existants, faciliter l’accès aux informations et aux services de santé mentale en français, et mettre sur pied des cliniques d’information et de dépistage, comme le démontre le graphique ci-dessous.

De plus, les échanges réalisés dans le cadre des groupes de discussion et des entrevues avec les représentants communautaires, les utilisateurs et les intervenants en santé ont permis de corroborer la plupart des besoins formulés. Toutefois, les échanges de vive voix ont permis de mettre en contexte les enjeux et d’y greffer quelques initiatives prometteuses, qui sont présentées dans les thématiques abordées dans cette section.

Graphique 4 : Les pistes d’amélioration

3.69

3.63

3.56

3.50

3.50

3.47

1 2 3 4

Création de plus de services de santé mentale en français,l'offre actuelle étant insuffisante

Accroître la sensibilisation à la santé mentale auprès descommunautés.

Approche-traitement plus adaptée à la diversité culturelle

Meilleure promotion des services existants en français

Création d'un portail pour regroupe l’information relative aux services de santé mentale en français

Création d'une clinique d'information et de dépistage

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AMÉLIORATION DE L’OFFRE DE SERVICES DE SANTÉ MENTALE EN FRANÇAIS

La nécessité d’offrir davantage services francophones en santé mentale obtient le plus haut niveau d’approbation, d’après l’enquête en ligne. Toutefois, l’étude démontre que la très grande majorité des répondants ne connaissent pas les services déjà offerts. Dès lors, il faut se demander si cette méconnaissance des ressources résulte d’un manque de promotion des services existants ou de l’inexistence de ces services. Le mandat défini pour cette étude n’a pas permis d’obtenir une réponse à cette question. Cependant, certaines pistes d’amélioration proposées dans cette section permettront certainement de définir plus clairement l’état de l’offre des services en santé mentale. L’étude démontre avec certitude que les participants ont l’impression que les services de santé mentale en français semblent se concentrer au centre-ville de Toronto. Si l’analyse des ressources existantes corrobore cette impression, il sera nécessaire de penser à mettre sur pied des services satellites de santé mentale en français dans les régions périphériques, qui accueillent un nombre important d’immigrants francophones. Une équipe d’intervenants mobiles pourraient être formée pour desservir différents points de services à la périphérie du Toronto-Centre. Plusieurs participants souhaitent que des groupes de soutien pour immigrants francophones soient mis sur pied dans les différentes régions du Grand Toronto. Sous la supervision d’un intervenant – sensibilisé au processus d’immigration et au courant des ressources francophones offertes en santé mentale –, ce groupe pourrait échanger sur les difficultés vécues, et accéder à un lieu pour s’informer sur les ressources offertes (santé, logement, travail, etc.) et pour discuter de santé mentale. D’autres participants jugent important que les immigrants reçoivent, dès leur arrivée en Ontario, de l’information sur les services de santé mentale en français, afin de les aider à relever ce long et parfois pénible défi qu’est le processus d’immigration. Ils ont ainsi suggéré que soit produit un dépliant expliquant la notion de santé mentale et répertoriant les ressources existantes. Ce document devrait être remis aux services d’immigration, aux centres d’intégration, aux écoles et à tout autre organisme jugé pertinent, afin de s’assurer que chaque immigrant en reçoive un exemplaire. Certains participants ont également souligné l’importance d’avoir des ressources de soutien consacrées au rétablissement et à la « réinsertion » sociale des immigrants qui ont vécu des problèmes de santé mentale. En effet, les immigrants qui ont souffert de tels problèmes se sentent souvent démunis. Un réseau social parfois très restreint et la discrimination qui peut s’ensuivre après un diagnostic peuvent accroître le sentiment d’isolement chez certains. Il importe de les préparer et de leur accorder un soutien continu pour faciliter la transition et un retour aux activités quotidiennes le plus harmonieux possible. Rappel des quatre initiatives principales proposées pour améliorer l’offre de services de santé mentale :

équipe mobile d’intervenants en santé mentale pour desservir la périphérie du Toronto-Centre;

groupe de soutien s’adressant aux immigrants francophones;

dépliant d’information sur la santé mentale et sur les services offerts en français;

ressources de soutien consacrées au rétablissement et à la réinsertion sociale des immigrants qui ont vécu des problèmes de santé mentale.

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ACCROÎTRE LA PROMOTION, LA PRÉVENTION ET L’ÉDUCATION SUR LA SANTÉ MENTALE

Une très grande proportion de participants à l’étude a indiqué qu’il était absolument essentiel d’effectuer davantage de promotion, de prévention et d’éducation en matière de santé mentale auprès des communautés immigrantes. Pour eux, il est évident qu'il faut informer davantage la communauté. Il faut aussi vulgariser et démystifier le concept de santé mentale, et expliquer quels sont les signes précurseurs de la maladie mentale. Incorporer les aspects positifs de la santé mentale et illustrer des cas concrets pourraient démontrer les effets bénéfiques des services de santé mentale à ceux et celles qui y font appel. Plusieurs idées d’activités ont été proposées notamment des :

ateliers de sensibilisation offerts dans le cadre des réunions de parents en milieu scolaire ou dans les centres communautaires;

sessions d’information sur la santé mentale offertes dans les écoles, dans les émissions de radio communautaire et de télévision, dans le cadre d’activités sociales de la communauté et dans les centres de santé;

conférences, animées par des pairs, sur les enjeux importants de la santé mentale et sur les ressources disponibles, etc.

Deux éléments ont été jugés essentiels pour assurer le succès d’une campagne de prévention et d’information réussie. Celle-ci doit atteindre :

les lieux de rencontre des communautés ethnoculturelles francophones, notamment les lieux de culte, les organismes communautaires, les cabinets de médecine familiale, les marchés d’alimentation spécialisée, les salons de coiffure, etc.;

les personnages clés qui œuvrent auprès des immigrants francophones, notamment les leaders religieux, les leaders communautaires, les médecins de famille, les agents d’établissement, les travailleurs sociaux en milieu scolaire, etc.

En somme, pour maximiser les retombées d’une campagne de promotion sur la santé mentale en français, il faut rejoindre ces milieux, créer des liens avec les personnes clés pour qu’ils deviennent des relais de l’information et s’assurer que des dépliants soient accessibles dans les lieux de rencontre des communautés immigrantes.

MISER SUR LA FORMATION CONTINUE SUR LA SANTÉ MENTALE ET LA DIVERSITÉ CULTURELLE

Nous évoluons dans un monde où les connaissances s’accroissent continuellement au gré des échanges, des interactions, de la recherche, etc. Tous les individus et les organismes qui souhaitent se garder à jour sur le plan professionnel doivent consacrer temps et argent pour sans cesse renouveler et actualiser leurs connaissances. D’ailleurs, plusieurs ordres professionnels exigent que leurs membres suivent un certain nombre de formations pour conserver le permis d’exercice. Les intervenants de première ligne (agents d’établissement, médecins de famille, représentants communautaires, etc.) auprès des immigrants devraient avoir accès à des formations qui les sensibilisent aux multiples dimensions des communautés ethnoculturelles francophones, qui leur explique le processus d’immigration et qui les outillent sur les questions de santé mentale. L’enjeu de la formation est primordial. Dans un système de santé où les ressources francophones sont limitées et dispersées, il est essentiel de s’assurer que tous les intervenants de première ligne qui travaillent auprès des immigrants soient sensibilisés à la réalité des personnes vulnérables et soient formés pour dépister celles-ci et être en mesure de les diriger vers les bonnes ressources. D’ailleurs, les résultats de cette étude démontrent que l’ensemble des répondants aimerait être davantage outillé en matière de santé mentale pour mieux accompagner les personnes vulnérables.

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Miser sur la formation constitue un bon moyen de développer une compréhension commune des enjeux, en plus d’offrir des approches d’intervention et des outils de diagnostic et de suivi qui ont été validés par les intervenants du milieu. La formation permet en outre de favoriser la mise en place d’une éthique de travail susceptible d’assurer aux immigrantes des services plus rigoureux et de meilleure qualité. Somme toute, la formation des intervenants de première ligne devrait avoir pour l’objectif à faire de ceux-ci des agents de prévention dans leurs relations quotidiennes avec les immigrants.

ACCROÎTRE L’ACCESSIBILITÉ AUX RESSOURCES FRANCOPHONES EN SANTÉ MENTALE

Si cette étude devait en arriver à un seul et unique constat, ce serait la méconnaissance des ressources et des services de santé mentale offerts en français dans le Grand Toronto. Force est de constater que ces ressources et ces services sont méconnus non seulement par les immigrants francophones, mais également par les intervenants de première ligne qui travaillent auprès de cette clientèle. L’amélioration des services de santé mentale en français dans la région du Grand Toronto passe nécessairement par la mise en valeur des services déjà offerts et par la promotion de ceux-ci. En d’autres termes, pour desservir adéquatement les communautés immigrantes, il faut s’assurer que les personnes qui sont en rapport avec elles détiennent les informations sur les services offerts et que celles-ci soient accessibles dans les lieux où se rencontrent les immigrants. Il faut souligner que les intervenants susceptibles de devenir des agents d’information clés en matière de santé mentale auprès des immigrants ne connaissent pas, la plupart du temps, les ressources francophones existantes et ne savent pas à qui s’adresser pour obtenir l’information. Cette situation s’avère contre-productive, puisqu’elle démontre les limites des intervenants de première ligne à offrir l’accompagnement nécessaire pour aider les immigrants à naviguer dans le système de santé et pour diriger ceux-ci vers les bonnes personnes. Pour la sécurité et le bien-être des personnes vulnérables, on devrait viser à offrir aux immigrants un encadrement plus rigoureux. Ceux-ci devraient pouvoir compter sur les intervenants clés pour obtenir des conseils clairs et fiables et de bonnes informations, et pour être dirigés vers les bonnes ressources. Les immigrants, qui ont leur lot d’épreuves quotidiennes, ne devraient pas être laissés à eux-mêmes et avoir à départager les services francophones et les services anglophones. Dans un système fonctionnel, on devrait être en mesure d’obtenir des outils adéquats et l’encadrement nécessaire pour aider cette clientèle vulnérable à recevoir l’aide dont elle a besoin, et ce, dans un délai raisonnable. Cette mise en contexte nous rappelle l’importance d’établir une liste des ressources francophones en santé mentale et des services connexes, de la diffuser au grand public et de la rendre accessible aux intervenants de première ligne (anglophones et francophones), pour aider ceux-ci à référer les personnes à risque rapidement, et vers les bonnes ressources. Idéalement, cette liste devrait être accompagnée d’un processus de référencement permettant de comptabiliser les données et ainsi d’évaluer la demande francophone réelle. Car en raison de tous les obstacles énumérés à la section précédente et de la qualité variable des services, dont certains services d’urgence (délais d’attente plus élevé en français et/ou système de messagerie), on peut difficilement chiffrer l’étendue des besoins réels dans le domaine de la santé mentale en français dans le Grand Toronto. Il devient plus que nécessaire de créer des outils pour mesurer l’ampleur des besoins réels.

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CRÉER UNE SYNERGIE ENTRE LES ACTEURS CLÉS DE LA SANTÉ MENTALE

En ne favorisant pas les synergies entre les intervenants francophones, le système francophone de santé en Ontario, dans son fonctionnement actuel, se nuit à lui-même. Il est possible d’émettre l’hypothèse qu’avec l’absence de partenariats entre les organismes et le manque de connaissance des ressources francophones et de complémentarité entre les services, une grande partie de la clientèle francophone se tourne vers les services anglophones. À défaut de proposer une approche globale des services de santé en français, il est possible d’envisager une initiative francophone en santé mentale axée sur le développement de partenariats et sur l’accroissement de la coordination entre les intervenants et les fournisseurs du milieu. Ce projet pourrait prendre la forme d’un comité de réseautage en santé mentale. Il permettrait de regrouper l’ensemble des ressources francophones et francophiles œuvrant dans le domaine, lesquelles sont généralement isolées au sein d’unités de travail anglophone. Ce regroupement permettrait de développer des synergies, de traiter des enjeux et de cibler les zones de complémentarité potentielles et les lacunes à combler tout au long du continuum de service de santé mentale en français. Il serait également opportun d’inclure dans ce groupe des intervenants qui offrent des services connexes, dont Oasis Centre des femmes, les sociétés d’aide à l'enfance, les services d'aide aux immigrants et des leaders des communautés immigrantes francophones. Cette initiative qui rassemblerait un grand nombre de professionnels, détenteurs d’une grande expertise en la matière, pourrait également offrir le cadre idéal pour amorcer une réflexion de fond sur l’avenir de la santé mentale en français dans le Grand Toronto et sur les stratégies à adopter pour améliorer l’offre de service aux francophones et, par le fait même, aux immigrants. Somme toute, les pistes de solution présentées dans cette section décrivent quelques initiatives prometteuses visant à améliorer l’offre de services et l’utilisation des ressources en santé mentale chez les immigrants francophones. Il est primordial de créer les conditions gagnantes pour mieux accompagner la clientèle immigrante. Il faut mettre au point des approches d’intervention ciblées et des outils de travail facilitant la navigation dans le système de santé en français et favorisant les références. Il faut aussi mieux connaître l’ampleur des besoins de cette clientèle. Par ailleurs, il faudrait réfléchir aux initiatives structurelles qui devraient être mises en place pour soutenir le développement durable des services de santé mentale en français dans le Grand Toronto. Les pistes de solutions présentées dans cette section traitent des grandes thématiques suivantes :

accroître l’offre de services de santé mentale en français;

offrir davantage d’activités de promotion, de prévention et d’éducation en matière de santé mentale;

favoriser la formation continue en matière de santé mentale et de diversité culturelle;

améliorer l’accessibilité aux ressources francophones en santé mentale;

créer une synergie entre les acteurs clés dans le domaine de la santé mentale.

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LES GRANDS CONSTATS Rappelons que les immigrants constituent une clientèle vulnérable aux questions de santé mentale. Au nombre des facteurs d’explication se trouve le processus d’immigration, qui comporte son lot d’épreuves stressantes : obtenir un statut, trouver un logement, décrocher un emploi, obtenir la reconnaissance de leur statut et de leur formation professionnelle, apprendre la ou les langues du pays d’accueil, s’intégrer à la société d’accueil, apprendre à vivre éloigné de ses proches qui sont restés dans le pays d’origine, surmonter l’isolement et lutter contre la discrimination dont ils sont parfois victimes. De plus, certains immigrants arrivent au Canada avec des parcours de vie difficiles, ce qui est parfois source d’importants traumatismes. Toutefois, malgré leur vulnérabilité, les immigrants se montrent beaucoup moins enclins à demander de l’aide. Cela s’explique notamment par la ténacité des préjugés, l’image négative associée à la maladie mentale, l’existence de barrières culturelles et linguistiques dans le pays d’accueil et le manque de connaissances sur les services et ressources offerts. La particularité de l’approche traitement en santé mentale est que le seul outil de diagnostic approprié soit la langue. Il faut être en mesure de dialoguer et de décrire les symptômes avec un intervenant qui parle la même langue pour que l’ensemble des subtilités langagières soient pleinement prises en compte dans le cadre du processus de diagnostic. Le succès d’un bon diagnostic en santé mentale repose donc sur la communication. Il est essentiel de sensibiliser les décideurs à cette particularité et d’associer l’offre de services de santé mentale de qualité au fait que la langue constitue le fondement d’un bon diagnostic et d’une approche traitement adaptée et sûre. La prémisse de l’étude était qu’il existe relativement peu d’information sur l’accessibilité aux services de santé mentale pour les immigrants francophones. Reflet Salvéo a mandaté PGF pour cerner les obstacles à l’utilisation des services de santé mentale et les conditions devant être mises en place pour faciliter l’accès aux ressources existantes. Quatre grands constats émergent de la consultation. Ils démontrent l’importance de repenser en profondeur l’approche de promotion de la santé mentale ainsi que la prestation des services, en vue d’améliorer l’accessibilité, l’utilisation et l’offre des services de santé mentale en français.

1. LA DIFFICULTÉ D’APPRÉHENDER LA SANTÉ MENTALE

La clientèle immigrante francophone, caractérisée par sa grande diversité, semble classer la santé mentale dans la catégorie des « maladies mentales ». En effet, nombreux sont ceux qui l’associent aux troubles psychologiques (« folies ») plutôt que de la voir comme un état de bien-être à préserver. L’étude nous a toutefois permis d’entrevoir des signes d’ouverture intéressants de la part des communautés immigrantes. Celles-ci reconnaissent que le processus d’immigration peut se révéler fort stressant et qu’il peut affecter la santé mentale. Il apparaît alors nécessaire de trouver des moyens pratiques de répondre à leurs besoins et de les outiller pour traverser ces épreuves difficiles. La santé mentale n’est pas un sujet facile à aborder. En général, il y a une relation ambiguë à son égard. Le désistement de certains participants au moment des entrevues individuelles témoigne d’un certain malaise à l’égard de la santé mentale. Toutefois, la majorité de nos participants issus des communautés ethnoculturelles francophones ont fait preuve d’ouverture en exprimant le souhait d’être davantage renseignés sur la santé mentale, et notamment sur :

les moyens pour préserver l’équilibre mental et de gérer le stress ;

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des façons de sonder les états d’âme, pour savoir, par exemple, si une personne se porte bien ou non;

des outils pour savoir s’il faut demander de l’aide, et à quel moment, etc.

2. LA MÉCONNAISSANCE DES RESSOURCES EXISTANTES DE LA PART DES COMMUNAUTÉS

ETHNOCULTURELLES FRANCOPHONES ET DES INTERVENANTS DE PREMIÈRE LIGNE

Force est de constater, à la lumière des consultations, que les services de santé mentale en français sont largement méconnus par les communautés ethnoculturelles francophones et par les intervenants de première ligne. Il apparaît essentiel de surmonter cet obstacle majeur, qui nuit à l’accessibilité et à l’utilisation des services offerts. En effet, les immigrants francophones ne peuvent demander un service dont ils ignorent l’existence. Et même s’ils s’informaient à leur médecin de famille, à des intervenants en santé et services sociaux ou à des leaders communautaires, les renseignements recueillis démontrent qu’ils auraient peu de chances d’être dirigés vers les bonnes ressources. Ceux qui sont censés connaître le milieu de la santé mentale semblent malheureusement aussi peu informés des ressources offertes en français.

3. LE BESOIN D’OUTILLER LES INTERVENANTS DE PREMIÈRE LIGNE

En outre, l’étude a permis de mettre en évidence le manque d’outils dont disposent les intervenants de première ligne en santé et services sociaux et les représentants communautaires pour aborder la question de la santé mentale avec les immigrants et pour diriger ceux-ci vers les bonnes ressources en français. Les représentants communautaires ont décelé un important besoin de formation en santé mentale. Ils souhaitent être davantage outillés pour identifier les personnes à risque et pour pouvoir les renseigner sur les services offerts en français. Les intervenants en santé et services sociaux souhaitent aussi parfaire leurs connaissances en matière de santé mentale et être plus sensibilisés au contexte d’immigration, afin de mieux comprendre les défis et de pouvoir adapter leur intervention en conséquence.

4. LE BESOIN D’AMÉLIORER LA SYNERGIE ENTRE LES DIFFÉRENTS INTERVENANTS

Enfin, le dernier constat porte sur le manque de synergie entre les services et les intervenants francophones en santé mentale. Dans le système actuel de santé en Ontario, les services en français sont souvent isolés et disséminés. Les intervenants francophones ont peu l’occasion de se mettre à jour sur les services offerts en français et d’établir des relations professionnelles de confiance avec d’autres intervenants francophones. Il est nécessaire de trouver des solutions pour créer des liens structurants entre les intervenants en santé et services sociaux et les fournisseurs, dans le but de retenir un maximum de clients francophones et de combler les lacunes, tout au long continuum de services de santé mentale en français. En outre, il a été question du besoin grandissant de spécialistes francophones dans le domaine de la santé mentale, notamment en psychiatrie, en psychothérapie et en pédopsychiatrie.

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RECOMMANDATIONS

CONTEXTE DES RECOMMANDATIONS Les recommandations de l’étude tiennent également compte du rôle de Reflet Salvéo, qui est de « conseiller et de soutenir les RLISS par rapport aux différents éléments du développement de services de santé appropriés à la collectivité francophone locale et de déterminer les besoins et les priorités de cette collectivité en matière des services de santé ». Dans l’immédiat, il apparaît nécessaire que Reflet Salvéo amorce une réflexion afin d’élaborer un plan d’action avec les parties concernées (RLISS, fournisseurs, etc.), compte tenu de leurs rôles et de leurs responsabilités respectifs, afin de s’assurer que les communautés francophones aient accès à davantage de services de santé mentale en français, et que ceux-ci les utilisent. En premier lieu, nous formulons quatre (4) recommandations prioritaires, qui permettent de constater l’éventail des services de santé mentale offerts en français et les besoins des communautés francophones, ainsi que de poser les premiers fondements d’une structure de référencement susceptible soutenir l’offre et la demande francophones. Enfin, nous émettons six (6) recommandations liées au renforcement des capacités des intervenants clés qui travaillent auprès des communautés ethnoculturelles francophones.

RECOMMANDATIONS PRIORITAIRES À COURT TERME OPTIMISER LA CONNAISSANCE ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE OFFERTS EN FRANÇAIS

1. Établir une liste exhaustive des services de santé mentale et des services connexes offerts en français dans le Grand Toronto.

2. Faire la promotion des services de santé mentale et des services connexes offerts en français

auprès du grand public, des intervenants clés francophones et anglophones et des organismes qui œuvrent auprès des immigrants francophones du Grand Toronto.

3. Élaborer une stratégie de sensibilisation pour démystifier la santé mentale auprès des

communautés ethnoculturelles francophones. Cette stratégie devrait être accompagnée d’activités régulières, qui seraient organisées par des pairs dans les lieux de rencontre de la communauté (écoles, églises, centres communautaires, etc.), dans le but d’encourager l’établissement d’un dialogue constructif, d’enrichir les connaissances et de faciliter une meilleure compréhension commune de ces enjeux.

4. Créer un outil qui permet de gérer les cas référés vers les services francophones et qui permet de constituer une base de données destinée à mieux connaître la taille de la clientèle ainsi que l’ampleur des besoins en matière de santé mentale chez les immigrants francophones, permettant ainsi de mieux planifier l’offre de service.

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RECOMMANDATIONS À MOYEN ET À LONG TERMES ACCROÎTRE LA PROMOTION ET LES CAPACITÉS DES INTERVENANTS CLÉS QUI SONT AU SERVICE DES

IMMIGRANTS FRANCOPHONES

5. Définir une stratégie de transmission des connaissances en matière de prestation de soins aux

immigrants afin de répertorier les meilleures pratiques. Cette stratégie pourrait inclure un volet favorisant la création de partenariats entre les fournisseurs de services et les organismes d’aide aux immigrants afin de mettre l’expertise en commun et de créer des synergies constructives et porteuses pour l’avenir de la santé mentale en français.

6. Traduire ou concevoir des outils de sensibilisation et de prévention sur la santé mentale en français adaptés aux réalités et aux besoins des nouveaux arrivants et des communautés ethnoculturelles.

7. Favoriser une participation accrue des immigrants francophones, des usagers et des familles à

l’élaboration des politiques, à la planification et à la prise de décisions liées aux questions de santé mentale des immigrants, au moyen des cadres institutionnels ou des comités existants.

8. Créer des espaces et des cadres de dialogue sur la santé mentale s’adressant aux communautés ethnoculturelles francophones.

9. Offrir des formations ou des séminaires sur les enjeux de la santé mentale et le processus

d’immigration à l’ensemble des intervenants de première ligne (médecins de famille, intervenants en santé et services sociaux, leaders communautaires, etc.) afin que ceux-ci puissent identifier les personnes vulnérables, adapter leurs stratégies d’intervention auprès des communautés ethnoculturelles francophones et les orienter, en cas de besoin, vers les services appropriés en français.

10. Élaborer les lignes directrices d’un code d’éthique professionnelle de la santé mentale et former

les intervenants clés afin de créer un cadre favorisant la sécurité, le bien-être et l’épanouissement de tous les immigrants. Les intervenants de première ligne des communautés doivent être sensibilisés à l’importance d’adopter un tel code rigoureux, qui favorise le respect de la confidentialité et de l’identité des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale.

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ANNEXE 1: ANALYSE SYNTHÈSE DES ENTREVUES

COLLECTE DE DONNÉES AUPRÈS DES UTILISATEURS DIRECTS ET INDIRECTS Du 20 au 30 octobre, l’équipe de PGF s’est entretenue avec quatre (4) usagers directs et indirects, qui se sont portés volontaires pour participer à l’étude sur la perception de la santé mentale et des services offerts aux immigrants francophones du Grand Toronto. Reflet Salvéo a ensuite créé un partenariat avec le Centre francophone de Toronto, qui a eu l’occasion de réaliser huit (8) entrevues semi-dirigées avec des utilisateurs de services de santé mentale. Au total, les observations de onze (11) utilisateurs directs et d’un (1) utilisateur indirect ont été recueillies. L’échantillon était composé de cinq (5) hommes et de sept (7) femmes. Un répondant s’est identifié comme faisant partie d’une minorité sexuelle. Parmi ces répondants, six (6) vivaient au Canada depuis moins de 5 ans; deux (2), depuis 6 à 10 ans; et quatre (4), depuis plus de 10 ans. Notre échantillon comprenait deux (2) répondants âgés de moins de 25 ans, un (1) répondant âgé de 25 à 34 ans, cinq (5) répondants âgés de 35 à 44 ans, et quatre (4) répondants âgés de 45 ans et plus. La très grande majorité des répondants étaient d’origine africaine.

LA COMPRÉHENSION DE LA SANTÉ MENTALE

Q1. Qu’est-ce que la santé mentale pour vous? Plusieurs répondants associent la santé mentale à un sentiment de bien-être ou de normalité. Ce sentiment englobe autant l’aspect mental, physique, social qu’environnemental. Il s’agit d’avoir un équilibre et la capacité de gérer une gamme d’émotions et d’évènements sans se sentir dépassé et angoissé. Un participant reprend l’expression « avoir un esprit sain dans un corps sain » pour décrire la santé mentale. Un autre souligne que la santé mentale consiste à avoir un esprit sain, libre et fonctionnel. Au-delà de l’équilibre, il s’agit également de développer les bons réflexes et les bonnes réactions dans les situations critiques. Un répondant a souligné qu’une bonne santé mentale consiste à fonctionner correctement avec soi-même et avec sa famille, et à respecter les lois. Pour lui, ceux qui ne respectent pas les lois présentent des dysfonctionnements sur le plan de la santé mentale. Un autre répondant affirme que la santé mentale consiste à être cohérent avec ses pensées, à respecter les principes de société et les lois et à faire preuve d’une capacité d’adaptation et d’interaction avec les gens. Pour d’autres répondants, la santé mentale est perçue comme le signe précurseur d’un mal-être ou de la nécessité d’obtenir de l’aide ou du soutien afin de régler des problèmes qui ne sont pas d’ordre physique. Ainsi, ces répondants associent la santé mentale à l’état moral, aux déséquilibres mentaux et aux questions pathologiques. Certains participants établissent un parallèle entre la dégradation de la santé mentale et le processus d’immigration (le choc culturel qui l’accompagne). Voici d’autres réponses qui ont été recueillies : la santé mentale, c’est :

un état de bien-être, en harmonie avec son corps;

être positif et exprimer la joie de vivre autour de nous, dans notre entourage;

à l’opposé, ne pas se sentir bien lorsqu’on éprouve des problèmes;

pouvoir se trouver de l'emploi, se trouver un logis, avoir des amis;

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se comporter de manière à ne pas avoir de problèmes;

aller chercher de l'aide lorsqu'on a des problèmes;

souffrir de conditions liées à l’état moral. Q2. Pourriez-vous nous partager l’essentiel de votre parcours, de vos démarches et de votre vécu? Un répondant (utilisateur indirect) a dû aider un parent originaire de l’Afrique francophone, qui était venu le visiter dans le Grand Toronto. Celui-ci a soudainement subi une crise d’anxiété aiguë et le répondant, qui ne savait pas ce qui se passait et qui ne savait surtout pas à qui s’adresser, a dû l’emmener aux urgences. Le parent ne parlait pas un mot d’anglais et les professionnels en santé présents étaient anglophones. Au même moment, le répondant devait subir des traitements pour régler un grave problème de santé. Cette situation lui a occasionné beaucoup de stress. Le parent a été hospitalisé pendant deux semaines et le répondant a dû, jour après jour, servir d’interprète. Comme le répondant vivait déjà un stress énorme dû à ses problèmes de santé, on lui a suggéré il y a quelques mois de consulter un professionnel en santé mentale. Il pensait qu’il n’en avait pas besoin. Toutefois, après l’évènement très stressant qu’il a vécu avec ce parent, il a décidé d’accepter de l’aide pour régler ses propres problèmes de santé mentale. Il consulte actuellement un professionnel en santé mentale anglophone, car il n’existe pas d’intervenants francophone dans sa région. L’autre répondant avait un ami qui souffrait d’une maladie psychiatrique depuis plusieurs années. Il connaissait déjà ses besoins en services de santé mentale. Lorsque cet ami a vécu une période de crise aiguë, il a su amener son ami directement aux urgences de l’hôpital psychiatrique de sa région, où l’on a pu le soigner dans sa langue. Un répondant (utilisateur direct vivant à Toronto depuis plus de 25 ans) ne savait pas, à son arrivée, où obtenir des services en français. En lisant L’Express, un des journaux francophones de Toronto, il a appris qu’un centre de santé offrait des services en français. Il s’y est alors présenté pour recevoir des services de santé mentale. Un intervenant francophone l’a aidé et il a participé à un groupe de soutien francophone en santé mentale. Quelques années plus tard, il a été référé à un hôpital psychiatrique, où il est actuellement suivi par un psychiatre anglophone et, de façon plus régulière, par une intervenante francophone en santé mentale. Un répondant, originaire de l’Afrique francophone, habitant au Canada depuis près de cinq ans et dans le Grand Toronto depuis quelques mois, vient de perdre sa mère, qui vivait en Afrique. Cette perte, jumelée à certains facteurs de stress liés à sa vie personnelle, a été source de problèmes émotionnels. Comme il a actuellement le statut de demandeur d'asile, il pense ne pas avoir droit à des services de santé mentale. Il a commencé à chercher des services en français, mais ne sait pas où ils les trouver. Une autre répondante connaissait le Centre francophone de Toronto (CFT) et savait à qui s’adresser lorsqu’elle vécu des problèmes de santé mentale. Deux répondants ont dû se rendre aux urgences d’un hôpital avant d’être référés au CFT pour obtenir les services en français. Un autre a fait des recherches sur Internet pour trouver le CFT. Il avait d’abord joint Services Ontario, mais personne ne parlait français. Il a d’ailleurs éprouvé beaucoup de mal à obtenir sa carte santé. Un autre répondant s’est retrouvé dans un refuge et il dû attendre deux semaines avant de recevoir les services d’un interprète, qui l’a redirigé vers le CFT. Un autre répondant dit en être à son troisième intervenant, qui est anglophone et avec qui les communications sont difficiles. Cet utilisateur ne s’est pas vu offrir les services d’un interprète et reçoit toute la documentation en anglais. En somme, la majorité des répondants n’était pas au courant de l’existence de services de santé mentale en français. Ils ont dû se retrouver dans une situation critique avant de recevoir de l’aide et d’être référés à des spécialistes. Jusqu’ici, certains ne sont pas en mesure d’obtenir des services en

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français. Sur le pan de la documentation, plusieurs ont souligné que l’information en français sur la santé mentale est très rare.

LA CONNAISSANCE ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE DISPONIBLES EN FRANÇAIS

Q3. Croyez-vous qu’il existe suffisamment d’information en français sur la santé mentale (prévention, dépistage, intervention/médication, rétablissement, suivis et autres)? La plupart des répondants indiquent qu’il n’existe pas beaucoup d’information en français sur la santé mentale. D’ailleurs, les bénéficiaires de services ne connaissent que les ressources francophones du CFT, et pas les autres. Un des répondants aimerait voir la mise sur pied d’un groupe de soutien en français pour les personnes qui souffrent de problèmes en santé mentale, car présentement, il n’en existe aucun dans le Grand Toronto. Tous les répondants suggèrent l’instauration d’un système d’information qui rejoint les communautés francophones. Il pourrait s’agir d’un outil qui peut être facilement consulté par les individus nécessitant des services de santé mentale en français. De plus, on a suggéré de se rendre directement dans les communautés francophones, dans les milieux où les gens se rassemblent, afin d’offrir de l’information sur la santé mentale et sur les services offerts actuellement en français. Certains ont souligné l’importance de faire de la publicité dans les médias francophones, dans les écoles francophones, dans les centres communautaires, etc. Voici d’autres réponses qui ont recueillies :

la famille et les amis de la communauté essaient habituellement d'aider ceux qui souffrent, mais si le problème s'aggrave, ils ne sauraient pas où aller chercher de l'aide. Ils iraient voir le médecin de famille ou se rendraient aux urgences d’un l'hôpital.

je peux consulter des sites web et me documenter sur la santé mentale, mais je ne connais aucun service de santé mentale en français ici, à Toronto;

je ne suis pas tout à fait à l’aise avec tout ce qui a trait à la santé mentale. Je sais que cela a à voir avec la morale… Ce n'est pas un sujet avec lequel je suis à l’aise et je suis familiarisée.

Q4. Estimez-vous l’offre de services de santé mentale en français suffisante? Croyez-vous que les services sont bien connus au sein de votre communauté, qu’ils sont facilement accessibles et qu’ils sont culturellement adaptés? La plupart des répondants estiment qu’il n’y a pas suffisamment de services de santé mentale en français. D’ailleurs, la plupart ne savent pas où se trouvent les services en santé mentale en français dans leur région et ils croient qu’il en est de même pour les membres de leur communauté. Si les services en français étaient seulement offerts au centre-ville, les répondants devraient parcourir de très grandes distances ou devraient recevoir des services en anglais. En termes d’accessibilité, la plupart des répondants soulignent que le manque de connaissances sur les services et sur les ressources offerts nuit à l’accessibilité. Toutefois, les répondants du CFT affirment qu’ils ont la chance de pouvoir obtenir des services de santé mentale en français, mais ajoutent que ce n’est pas aussi facile ailleurs. Une fois connus, comme dans le cas de ceux du CFT, les services deviennent plus accessibles, mais les usagers doivent composer avec listes d’attente parfois très longues, puisque les ressources sont très limitées en français. Sur le plan de la sensibilité culturelle, les répondants de CFT estiment qu’ils recevoivent de bons services et que les intervenants sont sensibilisés aux enjeux des immigrants. Un répondant a défini ainsi la notion d’approche interculturelle : « C’est de recevoir de l'aide de quelqu'un qui sait écouter, qui est là pour toi et qui peux t'amener à parler de ton problème, sans porter de jugement ou de diagnostic rapide. C'est important que les intervenants en santé mentale soient ouverts à l'autre qui est d'une

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autre culture ». D’ailleurs, un autre répondant a souligné qu’il ne serait pas à l’aise de demander de l’aide ou de recevoir des services en santé mentale de la part d’un membre de sa communauté car, selon lui, cet intervenant n'accepterait pas son homosexualité. Q5. Croyez-vous que les personnes à risque dans les communautés ethnoculturelles font usage des services de santé mentale mis à leur disposition? Pour la plupart des répondants, l’absence de services ou de promotion des services francophones de santé mentale dans leur région semble être un élément expliquant le faible taux de consultation. Plusieurs ont remarqué que les services en français ne sont ni présentés, ni offerts systématiquement aux francophones. Il y a très peu d’information qui circule sur ces services, que même les intervenants en santé et services sociaux ne connaissent pas. D’autres soulignent que le concept de santé mentale est mal compris ou n’existe tout simplement pas pour plusieurs immigrants, ce qui complique la recherche et l’utilisation des services. Un répondant nous a d’ailleurs affirmé que dans sa communauté, on est soit normal soit fou. Le recours à un psychiatre n’est réservé qu’aux personnes qui présentent des comportements associés à la folie. Si on ressent de la mélancolie, pas besoin de consulter. Et ruminer des problèmes ne change pas grand-chose. Ce genre de croyances est assez répandu. D’ailleurs, un répondant a indiqué qu’auparavant, il ne savait pas qu’il pouvait recevoir de l’aide pour des problèmes d'anxiété et de stress. D’autres répondants indiquent que certaines personnes vulnérables ne veulent pas recevoir d’aide. Il y a un grand travail de sensibilisation qui doit être effectué sur le terrain pour convaincre les gens d’aller chercher de l’aide. Q5.1. Quelles stratégies devraient être mises en place pour rejoindre ceux et celles qui en ont le plus besoin? Comme les membres de la communauté immigrante consultent de façon régulière leur médecin de famille, celui-ci ou l’équipe qui l’entoure pourrait offrir de l’information à la fois sur la santé mentale et sur les services offerts en français dans la grande région de Toronto. De plus, on a suggéré que des sessions d’information sur santé mentale soient offertes dans les écoles, dans des émissions de radio communautaire et dans les centres de santé. Un des répondants nous suggère que le contenu des sessions d’information et d’éducation traite en premier lieu des aspects positifs de la santé mentale. Ensuite, il suggère donner des exemples de cas concrets démontrant les effets bénéfiques des soins de santé mentale à ceux qui les demandent. Q6. Si on devait accorder la priorité à un service de santé mentale, lequel serait-ce? Pourquoi? Plusieurs ont rappelé l’importance de faire la promotion des services existants et de sensibiliser les immigrants aux questions de santé mentale. Un des répondants nous l’explique comme suit : « C'est évident qu'il faut commencer par informer la communauté et par la sensibiliser. Il faut vulgariser le concept de santé mentale et expliquer de quelle manière les problèmes de santé mentale peuvent se manifester ». Les véhicules propices à cette sensibilisation sont les écoles, les lieux de culte, les organismes communautaires, les organismes d’aide à l’emploi, les agents d’établissement, etc. Un des répondants suggère de mettre en place des services de soins de santé mentale dans les cliniques de soins familiaux et un autre suggère d’inclure, dans cette gamme de services de santé en français, du soutien à l’emploi et des groupes d’entraide.

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Voici d’autres services à créer et d’autres besoins à combler qui ont cités en priorité :

services aux familles (gestion des traumatismes, aide aux enfants et accompagnement des parents;

bipolarité;

dépression;

toxicomanie et autres formes de dépendance. Q7. Quels sont les obstacles à l’accès aux services de santé mentale (existence et proximité des services, langues de prestation, sensibilités culturelles, etc.)? Pour la plupart des répondants, le manque d’information, la proximité des services ainsi que la langue de prestation constituent les principaux obstacles. Pour un répondant, l’absence de services dans sa région entraînerait des coûts de transport qui seraient trop élevés pour lui. Pour un autre répondant, le fait de ne pas être admissible à l’assurance maladie l’empêche d’accéder à des services de santé mentale. Certains répondants soulignent qu’il faut en premier lieu informer les communautés immigrantes sur les enjeux de la santé mentale. Il fait aussi offrir activement les services de santé mentale en français, car actuellement, dans la plupart des cas, les personnes vulnérables doivent effectuer elles-mêmes des recherches pour tenter de trouver un encadrement approprié, ce qui n’est pas évident, compte tenu du peu d’information diffusée sur les services en français. Voici d’autres obstacles qui ont énumérés :

les préjugés et les tabous;

le manque de ressources financières et humaines;

l’isolement des immigrants;

la fragilité financière;

la prévention et la sensibilisation. Q7.1. Que devrait-on faire pour assurer aux personnes à risque un accès accru aux services et pour encourager celles-ci à les utiliser? Les participants soulignent tous que l’accent devrait être mis sur la sensibilisation et la promotion des services de santé mentale en français (répertoire de ressources francophones, page web). On suggère d’offrir des informations dans le cadre d’activités sociales de la communauté, d’émissions de radio ou de télévision, ou encore à l'école ou dans les cliniques médicales. On suggère aussi de cibler les points d’entrée des immigrants (centres locaux d’emploi, services d’aide à l’établissement, etc.). D’autres suggèrent d’amorcer une véritable discussion sur la santé mentale en français, en offrant des rencontres, des conférences, des témoignages, des films, qui permettraient d’accroître le degré de compréhension des immigrants quant à la santé mentale et de cibler les pistes d’amélioration durables. Un autre répondant aimerait voir naître des services satellites de santé mentale offerts en français dans sa région. Un autre répondant aimerait s’assurer que son thérapeute en santé mentale se sente à l’aise d’aider une personne appartenant à la communauté LGBT. Q8. Quelles solutions permettraient d’améliorer les services de santé mentale en français dans votre communauté? Trois répondants réaffirment l’importance d’offrir plus d’information en santé mentale. On souligne toutefois que l’information sur la santé mentale doit être présentée de façon simple. Par la même occasion, on doit chercher à expliquer en quoi consistent les services de santé mentale. Un des répondants a déclaré ceci: « Si les gens de ma communauté ne connaissent pas ce que c'est la santé mentale, ils n’iront pas chercher de l'aide, car ils ne pourront demander ce qui, pour eux, n'existe pas ». Par conséquent, un plus grand nombre d’activités de sensibilisation devraient s’adresser aux communautés immigrantes francophones.

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De plus, il faut travailler à rendre plus accessibles les ressources francophones en santé mentale par l’entremise d’un répertoire, d’un site Internet, etc. Cette liste devrait être remise à l’ensemble des personnes qui travaillent auprès des immigrants francophones (médecins de famille, intervenants en santé et services sociaux, leaders communautaires, centres d’emploi, agents d’établissement dans les écoles, etc.), afin qu’ils puissent renseigner ceux-ci et les diriger vers les bonnes ressources. Un répondant suggère de travailler directement avec les médecins de famille de la région afin que ceux-ci soient informés de l’existence des services de santé mentale en français et que ceux-ci développent le réflexe d’y référer leurs clients, en cas de besoin. Une répondante aimerait que des intervenants francophones soient disponibles dans les hôpitaux, surtout aux urgences. Elle suggère aussi la mise sur pied d’un service d'accueil francophone pour informer les immigrants de tous les services de santé et de santé mentale en français.

COLLECTE DE DONNÉES AUPRÈS DES REPRÉSENTANTS COMMUNAUTAIRES Du 15 au 30 octobre, l’équipe de PGF s’est entretenue avec sept (7) représentants communautaires, qui se sont portés volontaires pour participer à l’étude de perception sur la santé mentale et les services offerts aux immigrants francophones du Grand Toronto. Dans l’ensemble, nous avons pu nous entretenir avec quatre (4) hommes et trois (3) femmes. Tous étaient d’origine africaine. Dans ce groupe, nous avions également une personne pour représenter la communauté LGBT, qui désigne les personnes ayant une orientation sexuelle autre que strictement hétérosexuelle, comme les lesbiennes, les homosexuels, les bisexuels, les transgenres et les personnes en questionnement. Parmi les répondants, quatre (4) vivaient au Canada depuis moins de 2 ans; deux (2), depuis moins de 10 ans; et un (1), depuis 30 ans. De plus, quatre (4) représentants communautaires ont reçu une formation en santé (médecin ou infirmière auxiliaire) dans leur pays d’origine, mais n’exercent pas leur profession; un autre possède une formation en travail social et exerce cette profession à Toronto; enfin, deux (2) travaillent dans le domaine des communications.

LA COMPRÉHENSION DE LA SANTÉ MENTALE

Q1. Qu’est-ce que la santé mentale pour vous? L’ensemble des répondants associe la santé mentale au concept de bien-être. Pour certains, ce bien-être comprend l’aspect mental, physique et social, alors que pour d’autres, il est associé à la notion d’équilibre émotionnel ou à ce qui se passe dans la tête des gens. Par ailleurs, un des répondants a observé une évolution dans la société canadienne, qu’il décrit comme le passage du concept de « maladies mentales » à celui de « santé mentale ». Cela signifie qu’il y a quelque chose à préserver et à mettre en valeur, un équilibre à entretenir pour être pleinement fonctionnel en société. Or, selon lui, il faudrait véhiculer davantage cette image plus positive de la santé mentale auprès des immigrants, qui auraient plus tendance à avoir une perception plus négative. Plusieurs ont également souligné l’importance de tenir compte des autres déterminants de la santé qui ont des répercussions importantes sur la santé mentale, comme l’emploi, le logement, le processus d’immigration, etc.

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Voici d’autres réponses obtenues : la santé mentale, c’est :

un sentiment de bien-être et d’équilibre émotionnel pour faire face aux défis de la vie;

le bien-être moral, un état d'être;

un état de bien-être qui tient compte des conditions de vie, du parcours et des relations;

un état de bien-être inhérent au bon fonctionnement psychique et psychologique des individus;

tout ce qui touche au bien-être mental des individus;

un ensemble de conditions qui vous procurent un état de bien-être général et qui favorisent un bon fonctionnement en société.

LA CONNAISSANCE ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE OFFERTS EN FRANÇAIS

Q2. Croyez-vous qu’il existe suffisamment d’information en français sur la santé mentale? Unanimement, les répondants ont souligné l’absence d’information sur la santé mentale et les services offerts en français dans le Grand Toronto. Ils ne semblent pas recevoir d’information sur la santé mentale en français, et ce, sous aucune forme. Certains ont d’ailleurs souligné que c’est en participant à cette étude qu’ils ont entendu parler, pour la première fois, de santé mentale en français à Toronto. À l’exception d’une personne qui habite dans la région du Toronto-Centre, tous ont déclaré ne pas connaître les services en français offerts dans leur région et à leur communauté. Plusieurs ont déploré cette situation, d’autant plus que les gens issus de l’immigration sont parfois :

confrontés à des situations de stress intense : obtenir les papiers de résidence, trouver un emploi et un logement, reconstruire leur identité, etc.;

sujets à subir des préjugés sur la santé mentale;

dotés d’une compréhension variable de la notion de santé mentale, car leur langue maternelle ne leur permet parfois pas de définir ou de décrire ce qu’ils ressentent;

tentés de justifier ou d’excuser des comportements jugés répréhensibles ou anormaux. Par conséquent, les répondants estiment que les nouveaux arrivants devraient constituer un public cible pour les intervenants en santé mentale, dans le but notamment de sensibiliser ceux-ci à la notion de santé mentale, aux symptômes, aux services offerts, etc. Q2.1. Quels mécanismes permettraient de mieux connaître les services de santé mentale offerts dans les communautés ethnoculturelles? Pour plusieurs, le médecin de famille constitue la « porte d’entrée » privilégiée pour aborder le sujet de la santé mentale. Les personnes qui souffrent d’insomnie ou d’anxiété seront davantage à l’aise d’en parler avec leur médecin de famille. Il est donc primordial de s’assurer que celui-ci puisse être outillé adéquatement pour aborder ce sujet et pour référer vers les services appropriés en français les personnes susceptibles d’éprouver des problèmes de santé mentale. Par ailleurs, cela exige que l’information sur les ressources offertes en français soit communiquée clairement aux intervenants de première ligne dans le réseau de la santé. Plusieurs estiment qu’il faudrait faire plus de promotion sur la santé mentale : démystifier le concept, faire connaître les services existants dans les communautés, etc. Toutefois, atteindre les immigrants francophones requiert une diffusion stratégique de l’information, notamment dans les lieux de rencontre habituels des communautés (lieux de culte, centres communautaires, salons de coiffure, épiceries spécialisées, etc.). Il est primordial d’informer directement les immigrants francophones. Les écoles francophones se veulent également lieu de prédilection pour rejoindre les familles immigrantes et les sensibiliser à la santé mentale. D’ailleurs, les écoles francophones du Grand Toronto semblent pouvoir compter sur des ressources pour accompagner les nouveaux arrivants (agents d’établissement). Certains suggèrent de faire appel à eux pour améliorer les services

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d’accompagnement destinés aux familles immigrantes, en donnant à celles-ci de l’information sur les services et les ressources francophones offerts en santé mentale. Q3. Estimez-vous l’offre de services de santé mentale en français suffisante? Croyez-vous que les services sont bien connus au sein de votre communauté, qu’ils sont facilement accessibles et qu’ils sont culturellement adaptés? La majorité des répondants ont indiqué que l’offre de services de santé mentale en français était insuffisante, voire inexistante, selon certains. La plupart ne connaissent pas les services offerts. Seulement deux répondants ont été en mesure de citer des organismes qui œuvrent en santé mentale : le Centre francophone de Toronto (CFT) et CAMH. Le CFT dessert la région du Toronto-Centre et, par le fait même, est plus ou moins accessible aux immigrants qui habitent dans la région de Peel-Halton. En ce qui a trait à CAMH, les deux répondants pensent qu’on n’y offre pas de services en français. Les autres n’ont aucune idée des services de santé mentale offerts dans leur milieu. L’aspect de l’accessibilité implique une connaissance minimale des services offerts. Or, avec l’absence de connaissance sur les services existants, les répondants ont indiqué spontanément que les services n’étaient pas facilement accessibles. Se prononcer sur la sensibilité culturelle des services de santé mentale soulève une autre difficulté, liée dà l’existence et à la connaissance des services. Pour la plupart, obtenir des services de santé mentale en français constitue déjà un défi qui ne semble pas être réglé sur l’ensemble du territoire du Grand Toronto. S’attendre à ce que les services soient en plus adaptés aux parcours variés des immigrants francophones semble tout simplement improbable pour le moment. Toutefois, certains ont souligné que les intervenants en santé mentale devraient, à tout le moins, tenter d’acquérir une expertise interculturelle, y compris sur les minorités sexuelles, pour desservir la communauté immigrante dans toute sa diversité. On estime d’ailleurs que cette clientèle représenterait environ 20 % de la population francophone du Grand Toronto, et qu’elle serait en croissance. Q4. Croyez-vous que les personnes à risque dans les communautés ethnoculturelles font usage des services de santé mentale mis à leur disposition? Selon les répondants, l’absence de connaissance sur les services de santé mentale laisse croire que les personnes à risque ne font certainement pas un usage optimal des services mis à leur disposition. Certains répondants ont indiqué que les membres de leur communauté ne connaissent pas le concept de maladie mentale, qu’ils ne sont pas outillés pour en détecter les signes précurseurs et qu’ils ne savent pas à qui s’adresser pour se renseigner et pour obtenir des services. D’autres ont souligné que les gens à risque auront davantage le réflexe de s’isoler. Selon eux, certains tenteront de trouver du soutien auprès d’amis plutôt que de demander l’aide d’un professionnel. Le problème, c’est qu’en l’absence d’information permettant de chasser les « faux raisonnements » à l’origine de certains comportements, ceux-ci risquent de perdurer et de se perpétuer au sein de la collectivité. Par conséquent, les mêmes réflexes demeurent. Voici quelques exemples qui ont été soulevés :

au lieu de parler de dépression ou d’état dépressif, certains évoqueront la notion de « choc culturel » et auront tendance à dire que c’est passager, que le temps arrangera les choses;

pour désigner des personnes qui manifestent des comportements jugés inappropriés (sautes d’humeur, parfois violentes), certains diront qu’il s’agit de personnes aigries, agitées ou mécontentes.

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Q4.1. Quelles stratégies devraient être mises en place pour rejoindre ceux et celles qui en ont le plus besoin? Pour rejoindre la clientèle immigrante vulnérable, plusieurs répondants ont indiqué qu’il faudrait diffuser de l’information sur le concept de santé mentale et sur les services offerts en français dans les lieux et les espaces que fréquente celle-ci, c’est-à-dire les écoles, les églises, les centres communautaires, les centres de santé familiale, les centres d’emploi, les centres de formation, les organismes d’aide aux immigrants, etc. Certains représentants communautaires ont également mentionné qu’il serait utile de profiter de la tenue de certaines activités (rencontres de parents à l’école, cours d’anglais langue seconde, ateliers de recherche d’emploi, activités bénévoles, etc.) pour aborder la question de la santé mentale, sous différents angles, par le biais de capsules d’information. Grosso modo, la stratégie prioritaire consisterait à améliorer la diffusion des informations sur la santé mentale et sur les services offerts, parce que ceux-ci sont très peu connus. Cette campagne de sensibilisation ou d’information devrait également s’accompagner d’une formation qui vise à outiller adéquatement les personnes ressources, comme les médecins, les techniciens d’établissement et les autres intervenants qui travaillent auprès de la clientèle immigrante, afin qu’ils se sentent à l’aise d’aborder ces questions et de diriger les personnes à risque vers les ressources disponibles. Pour sa part, la communauté LGBT francophone de Toronto semble très vulnérable, puisqu’il ne semble pas y avoir de services en français s’adressant à elle en particulier. Plusieurs membres de cette communauté sont arrivés au Canada avec l’espoir d’obtenir le statut de réfugié. Il s’agit d’un processus laborieux au cours duquel les demandeurs d’asile doivent non seulement témoigner des agressions qu’ils ont subies, mais également démontrer que leur vie serait menacée s’ils retournaient dans leur pays d’origine. Les deux organismes LGBT francophones – ActionPositive et FrancoQueer – n’auraient ni le budget ni la mission pour fournir des services de santé mentale. Ainsi, ceux qui ont besoin de tels services n’ont d’autres choix que de se tourner vers le réseau anglophone et la langue – qui constitue d’ailleurs le seul outil fiable de diagnostic – demeure un enjeu de taille pouvant freiner l’accès aux services ou à un traitement approprié. Il serait souhaitable que les organismes francophones qui offrent des services de santé mentale puissent identifier une personne ressource pour accompagner la communauté LGBT immigrante. La personne appelée à exercer ce rôle devrait recevoir une formation ou bénéficier d’une mise à niveau appropriée pour intervenir auprès de cette clientèle. Q5. Si on devait accorder la priorité à un service de santé mentale, lequel serait-ce? Pourquoi? Compte tenu de la situation, la prévention et la promotion de la santé mentale et des services offerts semblent être prioritaires pour le moment. Les répondants estiment qu’il faudrait également s’assurer que les intervenants de première ligne, francophone comme anglophone, soient au courant de l’existence des ressources offertes en français pour référer les clients aux bonnes personnes. La majorité des répondants recommandent de maximiser les efforts de prévention et d’accroître l’offre active des services de santé mentale en français.

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LES OBSTACLES QUI ENTRAVENT L’ACCÈS ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE

Q6. Quels sont les obstacles à l’accès aux services de santé mentale (existence et proximité des services, langues de prestation, sensibilités culturelles, etc.)? Les deux plus grands obstacles identifiés sont : (1) la mauvaise compréhension de la santé mentale et (2) le manque d’information sur les services offerts en français. Par ailleurs, les personnes, en particulier celles vivant à l’extérieur du Toronto-Centre, ne savent pas à qui s’adresser pour obtenir des informations ou des services en français. La plupart des répondants jugent qu’il n’existe pas de services en français dans leur région. Ils souhaiteraient que davantage de services soient offerts dans l’est ou dans l’ouest, là où les immigrants s’établissent quelques années après leur arrivée. Voici d’autres obstacles qui ont été cités et qui démontrent l’importance d’accroître les activités de prévention et d’éducation auprès des immigrants :

la ténacité des préjugés et des tabous;

la difficulté à reconnaître les enjeux de la santé mentale;

la difficulté à demander de l’aide, à aller chercher des soins (tendance à cacher son état);

l’existence d’un ordre de priorités chez les nouveaux arrivants (obtenir un statut légal, trouver un emploi, un logement, etc.), qui exclut souvent la santé mentale de cette liste.

Q.6.1. Que devrait-on faire pour assurer aux personnes à risque un accès accru aux services et pour encourager celles-ci à les utiliser? Certains répondants estiment qu’il faut miser sur un accompagnement plus personnalisé des nouveaux arrivants et s’assurer qu’ils reçoivent, dès leur arrivée, de l’information sur la notion de santé mentale, telle que définie dans la société canadienne, et sur les services en français mis à leur disposition. Les immigrants peuvent difficilement demander des services dont ils ne connaissant pas l’existence. En outre, plusieurs participants suggèrent de recourir davantage aux médias francophones pour faire de la prévention, histoire de déboulonner certains mythes à propos de la santé mentale et de promouvoir les services existants.

LES PISTES D’AMÉLIORATION

Q7. Quelles solutions permettraient d’améliorer les services de santé mentale en français dans votre communauté? Cette question touche l’ensemble des préoccupations citées. Plusieurs représentants indiquent qu’améliorer la promotion sur un sujet aussi sensible que la santé mentale et sur les services offerts s’avère primordial pour informer les immigrants et les inciter à aller demander de l’aide. Pour certains, la stratégie devrait consister à créer un dialogue collectif sur la santé mentale, et ce, sur toutes les plateformes qui ont comme public des communautés immigrantes. Il pourrait s’agir de capsules d’information, de séances de formation, d’un guide d’information qui traite des symptômes, d’un répertoire des ressources et des services offerts, etc. En résumé, il ressort des entrevues avec les représentants que les communautés immigrantes francophones ressentent un grand besoin d’être renseignées et outillées en matière de santé mentale.

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COLLECTE DE DONNÉES AUPRÈS DES INTERVENANTS EN SANTÉ Du 23 octobre au 6 novembre 2014, l’équipe de PGF s’est entretenue avec sept (7) fournisseurs de services en santé et en santé mentale, qui se sont portés volontaires pour participer à l’étude de perception sur la santé mentale et les services offerts aux immigrants francophones du Grand Toronto. Nous avons pu nous entretenir avec deux (2) fournisseurs qui offrent des services en santé mentale et avec cinq (5) fournisseurs des services variés en santé et services sociaux. Parmi ceux-ci, trois (3) sont d’origine africaine; une (1), d’origine européenne, et les trois (3) autres, d’origine canadienne. Ces fournisseurs comptent de 3 à 15 ans d’expérience dans le domaine de la santé et des services sociaux.

LA COMPRÉHENSION DE LA SANTÉ MENTALE

Q1. Qu’est-ce que la santé mentale pour vous? Trois répondants associent la santé mentale au bien-être émotionnel, alors que les quatre autres l’associent au bien-être physique, mental, social et même environnemental. Tous s’accordent pour dire que la santé mentale est un état d’équilibre qui nous permet de fonctionner de façon optimale dans la vie, en fonction de nos capacités. Pour une répondante, avoir une bonne santé mentale signifie avoir du soutien autour de nous, qu’il provienne de la famille, de professionnels ou d’autres personnes. Par contre, tous considèrent que la santé mentale peut être perturbée par un ensemble de facteurs sur lesquels les personnes n’ont parfois aucun contrôle. De plus, un déséquilibre sur le plan de la santé mentale peut avoir des effets négatifs sur plusieurs aspects de la vie. Il est donc important que les répondants abordent la notion de la santé mentale dans son ensemble (approche « holistique »). Une répondante nous explique que lorsqu’une personne vit un problème de santé mentale, elle se sent sur la corde raide, que sa vie semble stagner et, parfois, que celle-ci se détériore à un tel point que la personne devient en état de crise. Ainsi, en aidant les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale, on les aide à reprendre le contrôle sur tous les aspects de leur vie. Q2. Comment évaluez-vous la prise en charge des patients francophones issus de l’immigration en santé et en santé mentale? Deux répondants offrent des services directs de santé mentale, soit des services d’évaluation, de traitement ou de soutien. Une répondante travaille tout particulièrement avec des personnes démunies, des sans-abri ou des personnes à risque aux prises avec problèmes de santé mentale. Les autres répondants travaillent au sein d’organismes qui dispensent des services variés (services de counseling et de soutien aux femmes ou aux étudiants). Ils collaborent tous avec des services de santé et de santé mentale. Leur rôle premier n'est pas d'évaluer les problèmes de santé mentale de leurs clients, mais plutôt d’être en mesure de détecter ceux-ci, de trouver les ressources dont ils ont besoin et, enfin, de les diriger vers celles-ci. Q2.1. Que faites-vous lorsque vous rencontrez une personne aux prises avec des enjeux de santé mentale? Quel processus vous permet de déterminer ses besoins et de lui apporter l’aide requise? Où trouvez-vous les ressources dont vous avez besoin? Une des deux répondantes qui offrent des services directs en santé mentale travaille avec une équipe interdisciplinaire de services de crise dans un hôpital psychiatrique. De tous les postes de cette équipe, seul le sien est désigné pour offrir des services en français. Ailleurs dans l’hôpital, les services sont tous offerts en anglais et le client francophone qui y a accès peut recourir aux services d’un interprète. Afin que ces services soient plus connus des organismes de santé et services sociaux francophones de la ville, la répondante a mené plusieurs activités d’information sur le terrain (« outreach »). De plus, elle a fait des démarches auprès de l’hôpital afin qu’on permette aux clients francophones d’accéder directement à ses services sans avoir à passer par les urgences, étape qui était exigée pour tous les clients qui accèdent aux services de crise de l’hôpital. Ces démarches lui ont permis d’établir des liens de collaboration et de travail beaucoup plus étroits avec plusieurs organismes francophones de la ville.

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L’autre répondante qui offre des services directs en santé mentale fait partie d’une équipe de trois intervenants francophones œuvrant directement dans la communauté, dans des secteurs spécifiques de la ville. Ces professionnels offrent des services de soutien aux personnes qui vivent des problèmes de santé mentale sérieux et qui sont souvent très démunies. Le rôle de cette répondante consiste à travailler en collaboration avec les organismes, programmes et personnes ressources suivants : Assertive Community Treatment Teams (ACT), les services de justice, le programme Housing First, le programme Community Treatment Orders (CTO), les psychiatres et autres intervenants en santé, en santé mentale et en services sociaux. Nombre de ces clients peuvent accéder aux services de santé et de santé mentale du centre de santé francophone de la ville. Le rôle et la responsabilité des cinq autres répondants consistent à offrir de l’aide et du soutien à leurs clients ou à leurs étudiants. Cette aide peut prendre plusieurs formes : conseiller des étudiants, offrir du soutien aux personnes en crise, du soutien au logement et du soutien en établissement, et d’autres tâches de même nature. Si, en cours de route, ces répondants s’aperçoivent que certains clients et étudiants souffrent de difficultés émotionnelles ou de problèmes de santé mentale, ils approchent alors ceux-ci avec tact et, graduellement, leur suggèrent de consulter un médecin ou un professionnel de la santé mentale. À l’aide d’outils auxquels ils ont accès, ces répondants essaient de les référer des professionnels de la santé mentale capables de les évaluer et de leur offrir un meilleur soutien. Avant de référer ces clients à des services de santé mentale, les répondants nous soulignent qu’ils ont souvent un important travail d’éducation et de sensibilisation à effectuer auprès de leurs clients, afin d’encourager ceux-ci à consulter.

LA CONNAISSANCE ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE OFFERTS EN FRANÇAIS

Q2.2. Dans quelle mesure êtes-vous à l’aise d’identifier ou d’évaluer un patient aux prises avec des problèmes de santé mentale? Vous sentez-vous bien outillé? Les deux répondantes qui offrent des services directs en santé mentale s’estiment assez à l’aise pour offrir des services de santé mentale et se sentent assez outillées pour le faire. Les cinq autres répondants ont suivi des cours ou des formations en santé mentale, ce qui les a énormément aidés à se sentir plus à l’aise et à être plus habilités à déterminer les enjeux potentiels de santé mentale chez leurs clients ou chez leurs étudiants. Deux des répondants ont suivi le cours de premiers soins en santé mentale (cours PSSM) et les autres ont participé à plusieurs formations dans le domaine. Ils souhaitent tous recevoir davantage de formation en santé mentale. Deux des répondants soulignent tout particulièrement l’importance de reconnaître ses limites dans la relation d’aide avec les clients et les étudiants aux prises avec des problèmes de santé mentale. Q2.3. Quel est le degré de collaboration sur lequel vous pouvez compter dans l’ensemble des services en santé et en santé mentale? Les deux répondantes qui offrent des services directs en santé mentale ont établi de très bonnes relations de travail avec les organismes francophones et anglophones de Toronto, grâce surtout aux activités d’information sur le terrain (« outreach ») qui ont été déployées. Une des répondantes a mené ce type d’activités auprès des organismes francophones en santé et services sociaux et s’est assurée que les services offerts par l’hôpital soient le plus rassurant possible pour la population immigrante francophone. L’autre répondante offre des services directement dans la communauté et travaille en étroite collaboration avec des organismes francophones et anglophones de la ville. De plus, il est plus facile pour ces deux répondants d’offrir un ensemble de services à leurs clients, car leurs bureaux se trouvent dans les locaux d’organismes qui offrent plusieurs services de santé mentale. Toutefois, dans les deux cas, ces services sont offerts en grande partie en anglais.

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Les cinq autres répondants entretiennent de bonnes relations de collaboration avec les organismes francophones en santé et en santé mentale de Toronto. Malheureusement, il existe peu de services en français et il y a parfois des listes d’attente. Une répondante occupe son poste depuis peu et doit encore découvrir les ressources en santé mentale offertes en français afin de pouvoir offrir une gamme complète de services à ses clients. Q3. Croyez-vous qu’il existe suffisamment d’information en français sur la santé mentale (prévention, dépistage, intervention et médication, rétablissement, suivis et autres)? Dans l’ensemble, presque tous les répondants s’accordent pour dire qu’il n’y a pas assez d’information sur les services francophones de santé mentale. En effet, un des problèmes les plus souvent cités est la difficulté de trouver les services et les ressources en français. Les listes ne sont pas nécessairement mises à jour et chaque répondant doit s’organiser pour créer les siennes. Un autre défi qui a été souligné est le manque ou l’absence de documents d’information rédigés en français. Par contre, une des répondantes indique qu’il y a beaucoup d’information écrite en français au CAMH, mais ajoute que celles-ci ne semblent pas se rendre dans les communautés immigrantes. Enfin, quatre des cinq répondants qui ne travaillent pas directement en santé mentale soulignent une fois de plus le besoin d’avoir plus de formation en santé mentale. Q3.1. Quel est votre degré de connaissance des ressources en santé mentale offertes aux immigrants francophones? Sauf exception, presque tous les répondants ont dû effectuer eux-mêmes des recherches pour trouver des ressources en santé mentale déjà offertes en français à Toronto et à l’extérieur de la ville. Les moyens utilisés pour y parvenir variaient d’un répondant à l’autre, que ce soit par l’entremise d’activités de réseautage ou d’information sur le terrain (« outreach »), de recherches en ligne ou en consultant des banques de données. Une répondante, nouvellement en poste, se sent un peu démunie et aimerait avoir accès à une liste de services de santé mentale et de services connexes offerts en français, afin de pouvoir mieux aider ses clients qui en auraient besoin. Certains répondants connaissent bien les services en français, comme les services directs de santé mentale, mais tous déplorent le manque de tels services offerts à Toronto et à l’extérieur de la ville. Q3.2. Quels seraient les mécanismes qui vous permettraient d’avoir une meilleure connaissance des services de santé mentale offerts en français? Une répondante souligne qu’il est important, dans un premier temps, de répertorier les services en français. Nombre des répondants aimeraient avoir accès à une telle liste, constamment mise à jour, qui énumèrerait non seulement les services de santé mentale dispensés en français, mais aussi ceux offerts dans d’autres domaines de la santé et des services sociaux. Cette liste devrait contenir de l’information sur les services en français qui existent dans l’ensemble du Grand Toronto et devrait contenir de l’information sur les critères d’admissibilité aux services. Un répondant aimerait que cette liste soit accessible à ses clients et à la communauté francophone en général. Une autre répondante aimerait mieux connaître les services existants et souhaiterait qu’on en mette sur pied là où ils sont inexistants. Enfin, un répondant résume sa pensée comme suit : « Il faut que l'intervenant puisse compter sur des ressources ou qu’il en connaisse l’existence pour pouvoir aider le client à se retrouver dans le système ».

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Q4. Estimez-vous l’offre de services de santé mentale en français suffisante? Croyez-vous que les services sont bien connus au sein de votre communauté, qu’ils sont facilement accessibles et qu’ils sont culturellement adaptés? D’une voix unanime, les répondants estiment que l’offre des services en santé mentale en français est insuffisante à Toronto, et encore davantage à l’extérieur de Toronto. Une répondante offrant des services de santé mentale en français déplore particulièrement le manque de services en français. Malheureusement, dit-elle, « presque tous les services sont en anglais, ce qui nécessite le recours à des services d'interprétation. Ce n'est pas l’idéal, surtout en santé mentale ». Une autre répondante souligne que, malgré l’accès à certains services de psychiatrie en français à Toronto, ceux-ci s’avèrent insuffisants pour satisfaire la demande et répondre aux besoins de services de santé mentale de la communauté francophone et immigrante du Grand Toronto. Six des sept répondants affirment que les membres de la communauté immigrante ne connaissent pas les services de santé mentale. Une répondante explique qu’en plus de ne pas connaître les services, les clients doivent souvent surmonter la honte et leurs propres préjugés, ce qui peut les empêcher de faire appel aux services existants. Les personnes référées aux services en santé mentale se montrent, note-t-elle, très réticentes à accepter l'aide qu’offrent ces organismes. Une autre répondante estime toutefois que depuis quelques années, ses étudiants sont beaucoup mieux informés sur les services de santé mentale parce qu’ils participent à des foires d’information dans leur établissement d’enseignement. Ces évènements constituent d’excellents moyens de diffuser de l'information sur la santé mentale et sur les organismes qui dispensent des services. Tous les répondants considèrent qu’il est plutôt difficile, pour très grand nombre de clients francophones, surtout pour ceux qui habitent à l’extérieur du centre-ville de Toronto, d’accéder à des services de santé mentale en français. En effet, les services ne se trouvent pas à proximité et certains clients doivent parcourir de longues distances. Les opinions sont partagées quant à la dimension culturelle des services. Quatre des sept répondants estiment que les services ne sont pas culturellement adaptés aux clients qui sont issus de communautés immigrantes francophones. Pour certains répondants, les services de santé mentale privilégient une approche dite « eurocentrique » et ne tiennent pas compte du sentiment de honte, des préjugés, du parcours et de l'expérience d'immigration des clients. Une autre répondante juge trop rigides les critères d’admissibilité aux services de santé mentale et estime qu’ils ne correspondent pas forcément à la réalité des nouveaux arrivants. En revanche, quelques répondantes offrent des pistes de solutions susceptibles de rendre les services de santé mentale plus culturellement adaptés. L’une d’elles souligne l’importance de démystifier la santé mentale, d’en parler en termes de bien-être. À son avis, les intervenants doivent intervenir directement dans les communautés et travailler avec les leaders de celles-ci. Une autre répondante affirme que les services de santé mentale doivent être appropriés et que les intervenants, dans le cadre de leur travail, doivent se montrer curieux et se familiariser avec la culture de leurs clients. Une autre répondante résume sa pensée ainsi : « Il y a beaucoup à faire en ce qui a trait à la mise sur pied de services culturellement sensibles. Toutefois, si l'intervenant est sincère, qu’il avoue ne pas tout savoir et qu’il fait de son mieux, c'est ce qui compte le plus au final. » Enfin, CAMH disposerait déjà de plusieurs documents sur l'adaptation culturelle dans le domaine de la santé mentale, lesquels gagneraient à être davantage distribués.

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Q5. Croyez-vous que les personnes à risque dans les communautés francophones font usage des services de santé mentale mis à leur disposition? La plupart des répondants nous indiquent que les communautés immigrantes francophones n’utilisent pas les services de santé mentale mis à leur disposition. Selon une répondante, les personnes qui travaillent en santé mentale ne doivent pas s'attendre à ce que les immigrants francophones frappent à leur porte. À son avis, ce sont les intervenants qui doivent aller vers les immigrants et travailler avec eux. Un autre répondant affirme que les immigrants ne pensent pas à ces services, car ils ne les connaissent pas. Et si on les informait sur les services de santé mentale, ils n’y feraient pas nécessairement appel de leur propre chef. En général, ils ont besoin d’être davantage accompagnés. En revanche, une répondante estime que plus un immigrant se montrera sensibilisé à la santé mentale, plus il sera ouvert à recevoir des services. Enfin, l’absence de services francophones en santé mentale et le manque de services ont une incidence directe sur la popularité de ceux-ci. Une offre accrue de services en français, comme des programmes de jour pour francophones et des groupes de soutien offerts en français, pourrait favoriser une utilisation accrue de ces services. Q5.1. Quelles stratégies devraient être mises en place pour rejoindre ceux et celles qui en ont le plus besoin? Tous les répondants s’entendent pour dire qu’il faut tout d’abord vulgariser et démystifier le concept de santé mentale. Une répondante va jusqu’à dire qu’il ne faut pas, au départ, évoquer cette notion ou en parler, mais plutôt utiliser le mot bien-être ou d’autres synonymes à connotation plus positive. De plus, l'information doit être transmise de façon à ce que les personnes y trouvent un avantage personnel. Ces activités d’information, de sensibilisation et d’éducation doivent être offertes à l’extérieur des bureaux et des cliniques de santé. Les intervenants doivent rencontrer les communautés immigrantes dans leurs milieux de vie, dans le cadre d’activités sociales, dans les églises, lors de rencontres de parents à l’école, ou ailleurs. Une répondante insiste sur l’importance de mener des activités d’information sur le terrain (« outreach »), qui s’adressent aux communautés immigrantes francophones et à des organismes offrant des services en français (associations, établissements d’enseignement, etc.). Q6. Si on devait accorder la priorité à un service de santé mentale, lequel serait-ce? Pourquoi? Les répondants s’accordent pour dire que la prévention, l'éducation et l'information en santé mentale sont prioritaires parce que, de prime abord, les communautés immigrantes francophones ne sont pas familiarisées avec les concepts de santé mentale et de maladie mentale. De plus, ceux-ci font l’objet de beaucoup de préjugés et d’incompréhension. Une répondante souhaiterait qu’on s’intéresse aux services de soutien pendant le rétablissement. Les bénéficiaires de services de santé mentale se font traiter puis retournent dans leur communauté, dans leur établissement de formation ou dans leur milieu de travail, milieux où peuvent subsister beaucoup de préjugés. C’est dans ces situations que ces personnes ont besoin de soutien afin, notamment, de vaincre les préjugés.

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LES OBSTACLES À L’ACCÈS ET À L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE

Q7. Quels sont les obstacles à l’accès aux services de santé mentale (existence et proximité des services, langues de prestation, sensibilités culturelles, etc.)? Les obstacles sont multiples. Les communautés immigrantes ne comprennent pas le concept de santé mentale ou le comprennent mal. Le sentiment de honte et les préjugés qui habitent les personnes empêchent celles-ci de faire appel aux services de santé mentale. De plus, ces personnes ne savent pas en quoi consistent ces services, ni où ils peuvent les trouver. La plupart des services de santé mentale offerts en français se concentrent au centre-ville, ce qui oblige celles et ceux qui habitent à l’extérieur de la ville à parcourir de longues distances. Enfin, il n'existe tout simplement pas assez de services de santé mentale en français et on observe de longues listes d’attente pour les services existants. Q7.1. Que devrait-on faire pour assurer aux personnes à risque un accès accru aux services et pour encourager celles-ci à les utiliser? Pour plusieurs répondants, les activités d’éducation et de promotion de santé mentale demeurent la priorité. À ce propos, une répondante suggère l’adoption d’une approche communautaire et culturelle en matière de santé mentale. Une autre répondante souhaite qu’on élimine les obstacles à l'accès aux services de santé mentale difficile et qu’on personnalise davantage ceux-ci. Elle suggère aussi qu’on crée des postes d'accompagnateurs en santé mentale. Enfin, deux autres répondantes suggèrent qu’on établisse des partenariats, qu’on accroisse la coordination des services de santé mentale en français et qu’on sensibilise les intervenants en santé mentale à la réalité de la population immigrante dans le cadre de formations.

LES PISTES D’AMÉLIORATION

Q8. Quelles solutions permettraient d’améliorer les services de santé mentale en français dans les communautés ethnoculturelles? Nos répondants formulent les suggestions suivantes :

recenser les intervenants et les services de santé mentale en français et établir une liste de ces services, la garder à jour et la rendre accessible à tous;

informer les communautés immigrantes sur les services au moyen de communications écrites et orales, en plus d’encourager l’effet « bouche à oreille ». Le site web de CAMH constitue un excellent point de départ pour trouver certaines ressources;

mettre sur pied une plateforme de collaboration en santé mentale ou un organisme doté de certaines responsabilités, dont celle de coordonner les services de santé mentale en français et, au besoin, la gestion des plaintes liées à ces services;

favoriser l’acquisition de compétences chez les intervenants en santé mentale, en privilégiant une approche thérapeutique culturellement sensible;

former des intervenants en santé mentale issus des communautés immigrantes.

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Q8.1. Est-ce qu’un mécanisme pour favoriser l’échange d’information ou pour discuter des enjeux liés à la prestation des services de santé mentale en français devrait être mis en place? Dans l’ensemble, tous les répondants appuient la création d’un tel mécanisme, qu’il s’agisse d’un réseau, d’une association, d’une plateforme ou d’un comité en santé mentale, comme celui qui existe actuellement à Reflet Salvéo. Ce mécanisme pourrait avoir plusieurs fonctions, dont celle d’établir davantage de contacts, de faciliter le réseautage et la collaboration, ainsi que de contribuer au développement des compétences en santé mentale. Selon une répondante, ce mécanisme devrait autant regrouper les intervenants qui travaillent en santé mentale que ceux qui dispensent des services connexes (Oasis Centre des femmes, les sociétés d’aide à l'enfance, les services d'aide aux immigrants, les leaders des communautés immigrantes francophones, etc.). Une répondante recommande la création d’un site web, comme celui qui existe déjà au Québec, qui offrirait de l'information sur la santé mentale en français de même qu’un forum d’échanges, permettant ainsi aux intervenants de mieux connaître les stratégies et les ressources en santé mentale. Enfin, quel que soit le mécanisme privilégié, souligne une autre répondante, un travail accru devra être effectué auprès des communautés immigrantes.

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ANNEXE 2 : ANALYSE SYNTHÈSE DES GROUPES DE DISCUSSION Au total, quarante (40) personnes, dont douze (12) hommes et vingt-huit (28) femmes, tous originaires de l’Afrique subsaharienne, ont participé aux groupes de discussion portant sur la santé mentale et sur les services offerts aux immigrants francophones du Grand Toronto. Trois organismes communautaires, soit CANORAA Inc., OASIS Centre des femmes et APAA (Africans in Partnership against Aids), nous ont offert d’accueillir les participants dans leurs locaux. Comme les participants à ces groupes de discussion présentent de grandes similarités, la synthèse est présentée de façon globale, sans faire référence à un groupe spécifique.

LA COMPRÉHENSION DE LA SANTÉ MENTALE

Pour la plupart des participants, les problèmes de santé mentale que peuvent éprouver les immigrants sont souvent liés à leur intégration au Canada, notamment dans une province où les francophones sont en situation minoritaire. Ce défi d’intégration soulève différents enjeux : accès à emploi, intégration des enfants au système scolaire canadien, stress lié à la séparation de la famille, etc. La plupart des participants estiment avoir été obligés de quitter leur pays dans l’espoir d’obtenir un avenir meilleur, mais ils se retrouvent finalement confrontés à d’autres problèmes. Ils estiment être victimes d’oppression ici, au Canada, après avoir été soumis à des agressions dans leur pays d’origine. Certains participants jugent que la maladie mentale est liée au stress, à la dépression et au traumatisme. Il s’agit d’un problème intérieur, d’un mal invisible, qui, selon eux, affecte la personne moralement. Cette douleur pourrait éventuellement causer une maladie physique. D’autres, par contre, estiment que les personnes atteintes de maladie mentale sont des personnes dérangées et déséquilibrées. La désillusion liée à l’immigration, le délai lié au regroupement familial, le délai d’obtention des documents d’immigration pour séjourner au Canada constituent autant de facteurs susceptibles de miner la santé mentale des immigrants. Plusieurs participants s’accordent finalement pour dire que la maladie mentale est une affaire individuelle, un sujet tabou, souvent ignoré et mal perçu culturellement. Cette perception d’isolement, pour certains, et d’évitement, pour d’autres, entraînerait un accès limité aux ressources appropriées en santé mentale.

LA PERCEPTION DE LA MALADIE MENTALE DANS LA COMMUNAUTÉ

La plupart des participants ont admis que, culturellement, on considère une personne aux prises avec une maladie mentale comme ayant « l’esprit dérangé » ou le « cerveau dérangé ». Plusieurs estiment que seule la spiritualité pourrait « guérir » ces personnes. Certains font l’analogie avec les marabouts et les sorciers, qui « guérissaient » ces « malades » dans leur pays d’origine. Les participants ont relevé le fait les personnes aux prises avec ce genre de difficultés sont victimes de préjugés et de discrimination, ce qui amène la communauté à avoir honte d’elles et à s’en éloigner. Il arrive souvent que ces personnes n’arrivent pas à surmonter leurs problèmes, à s’exprimer et à parler avec quelqu’un, car elles trouvent les conditions d’accueil et d’intégration au Canada assez difficiles. Plusieurs estiment ne pas avoir assez de temps pour s’intégrer, en raison du rythme effréné qui caractérise notre société.

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La personne devient un sujet de moquerie, alors elle s’isole. Ce phénomène mine, selon la plupart des participants, le moral, car la personne provient souvent d’un pays axé sur la vie en communauté.

LA CONNAISSANCE ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE OFFERTS EN FRANÇAIS

Comme dans les précédentes analyses, on peut dégager un constat identique auprès des groupes de discussion : on déplore le manque flagrant d’information sur la santé mentale et sur les services offerts en français dans le Grand Toronto. Certains découvrent pour la première fois l’existence de services, cinq ans après leur arrivée dans la région. Les tabous persistants sur la question n’aident pas. Les femmes rencontrées disent que les membres de la communauté ont souvent tendance à ne pas partager une information sur les ressources susceptibles de servir à l’ensemble de la communauté. La santé mentale est sujette à la honte et aux préjugés. On se demande quelle sera la réaction des autres. Selon elles, les membres de la communauté ne pensent pas à apporter leur aide, mais plutôt à aller divulguer l’information confidentielle, au lieu de fournir l’information sur les ressources. Il est suggéré de remettre une liste des ressources offertes dès l’arrivée des nouveaux arrivants aux services d’immigration, ce qui n’est pas le cas actuellement. On lance aussi l’idée de former un groupe de personnes bénévoles, dans la communauté francophone, pour mener des campagnes de sensibilisation et pour faire connaître les ressources offertes en santé mentale.

Les services de santé en français sont en général rares et méconnus dans la région et, pour y accéder, il faut se rendre au centre-ville de Toronto. Cela engendre naturellement des coûts que certains ne sont pas en mesure d’assumer. Ceux qui connaissent les services offerts les jugent insuffisants. Le Centre francophone de Toronto et CAMH semblent être les services francophones les plus connus.

LES OBSTACLES À L’ACCÈS ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE

La ténacité des tabous à l’égard de la maladie mentale constitue un obstacle majeur à l’accès et à l’utilisation des services de santé mentale. Il est difficile de changer les mentalités du jour au lendemain. En plus de l’existence des préjugés, on note que les immigrants sont mal informés sur la question ou qu’ils ne le sont carrément pas, suivant leur degré d’instruction. Et nombreux sont ceux qui se disent incapables de considérer la maladie mentale comme une véritable maladie. La langue est considérée comme un obstacle de communication majeur dans le dépistage de la maladie mentale. Il est souhaité que des personnes parlant français puissent offrir tous les services. Lorsque des immigrants demandent à être servis en français, les travailleurs sociaux anglophones, par exemple, font appel à un interprète. Toutefois, des informations importantes se perdent ou sont mal interprétées au fil des échanges.

Les participants estiment que les immigrants font face à un double défi lorsqu’ils rencontrent leur médecin de famille : s’exprimer en tant qu’immigrants (barrières culturelles) et s’exprimer dans une langue autre que le français, une barrière linguistique importante, qu’il ne faut pas négliger. Un autre obstacle perçu par les participants est que les membres de la communauté ne sont pas formés pour aider les personnes souffrant de maladie mentale. En somme, la ténacité des tabous, la difficulté à obtenir des services de santé mentale en français, ainsi que l’ignorance observée face aux questions de santé mentale et à l’existence des services offerts sont les principaux obstacles observés.

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PISTES D’AMÉLIORATION

Les pistes d’amélioration proposées portent sur plusieurs points qui ont été soulevés à différentes reprises au cours de l’étude :

Une meilleure organisation des communautés immigrantes francophones constitue une piste prometteuse. Elle permettrait d’orienter les immigrants, surtout les nouveaux arrivants, vers les services appropriés. Cette démarche doit être suivie d’une vaste campagne de sensibilisation destinée à promouvoir la santé mentale.

Il faut envisager la formation de pairs éducateurs qui auront pour mission de sensibiliser les populations immigrantes aux grandes questions de santé mentale et d’informer celles-ci sur les ressources offertes, et ce, dans le but d’offrir un soutien efficace.

Les participants ont proposé des pistes d’amélioration axées davantage sur la prévention des facteurs pouvant nuire à la santé mentale, soit l’isolement et les problèmes d’intégration des immigrants à leur milieu de vie. Ils ont également insisté sur la nécessité de sensibiliser les communautés ethnoculturelles francophones à la santé mentale. Ils ont formulé les propositions suivantes :

offrir davantage de ressources en français, notamment en ce qui concerne le personnel traitant;

consacrer davantage d’efforts à la réduction des facteurs affectant la santé mentale des immigrants; simplifier les démarches administratives ainsi que les processus et les conditions d’accueil des immigrants;

mettre sur pied des activités visant à intégrer et à valoriser les membres d’une communauté aux prises avec des problèmes, en leur confiant des tâches à titre bénévole;

former un groupe de membres des communautés ethnoculturelles francophones chargés de sensibiliser leurs semblables aux questions de santé mentale;

créer des publicités vouées à sensibiliser les communautés ethnoculturelles francophones à reconnaître la maladie mentale comme une réelle maladie, et à éviter de stigmatiser les personnes qui en souffrent;

favoriser le recrutement de professionnels issus de communautés ethnoculturelles francophones et inciter les autres professionnels à adopter une approche de traitement de la santé mentale qui tienne compte des particularités des communautés immigrantes;

démystifier la santé mentale afin que les personnes se sentent libres de s’exprimer, de sortir de l’isolement et de faire appel aux ressources pour obtenir l’aide nécessaire (lors des discussions avec les femmes, de tels exemples ont été cités, dont celui d’une personne seule, qui a souffert de dépression et qui a fini par se suicider);

les leaders communautaires devraient également être guidés par un code d’éthique afin d’offrir aux membres de la communauté un cadre où règne la confiance et qui garantit la confidentialité.

On note cependant que les pistes d’amélioration sont souvent liées aux enjeux d’intégration. Les participants ont exprimé le besoin de parler de santé mentale de façon régulière dans différentes tribunes, par exemple au sein de leurs associations. Nombre d’entre eux estiment que les leaders spirituels peuvent jouter un rôle important en ce sens, car ceux-ci sont souvent appelés à être à l’écoute des personnes en difficulté.

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ANNEXE 3 : ANALYSE SYNTHÈSE DE L’ENQUÊTE EN LIGNE

ANALYSE SYNTHÈSE DE L’ENQUÊTE EN LIGNE En tout, trente-sept (37) personnes, soit vingt-trois (23) femmes et onze (11) hommes, ont pris part à l’enquête en ligne. Sept (7) sont des utilisateurs de services de santé mentale (usagers directs); six (6) sont membres d’une famille, conjoint ou ami d’une personne ayant des besoins de services de santé mentale (usagers indirects); douze (12) sont des intervenants de services de santé et services sociaux; et douze (12) autres sont des représentants ou des membres d’une communauté ethnoculturelle. Le groupe d’âge, l’origine géographique et la durée de séjour au Canada des participants sont très variés. En ce qui concerne l’âge, vingt-trois (23) participants sont âgés de 35 à 40 ans; six (6), de 25 à 34 ans; quatre (4) de 45 à 54 ans; et quatre (4) participants sont âgés de 55 ans et plus. Quant à l’origine géographique, deux (19) participants viennent d’Afrique; trois (3), de l’Asie; neuf (9), d’Europe; deux (2), d’Amérique centrale, d’Amérique du Sud et ou des Caraïbes; et quatre (4), d’Amérique du Nord. Enfin, pour la durée de séjour, deux (12) participants vivent au Canada depuis 6 à 10 ans; neuf (9), depuis 1 à 5 ans; six (6), depuis 11 à 15 ans; deux (2), depuis 16 à 20 ans; deux (2), depuis plus de 20 ans; et cinq (5) sont nés au Canada.

LA COMPRÉHENSION DE LA SANTÉ MENTALE

Bien que les communautés ethnoculturelles francophones soient de plus en plus sensibilisées aux questions de santé mentale, on note besoin réel d’approfondir leurs connaissances personnelles en la matière. En effet, le degré de connaissance et la compréhension des communautés ethnoculturelles francophones quant aux questions de santé mentale demeurent très variables.

LA CONNAISSANCE ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE OFFERTS EN FRANÇAIS

Les utilisateurs de services ne sont pas dirigés toujours vers les bonnes personnes ressources. Les immigrants doivent souvent se débrouiller seuls pour les repérer. Il est difficile de trouver de l’information appropriée sur la santé mentale en français et l’accès à ces services à proximité du lieu de résidence laisse à désirer, car il faut souvent parcourir des longues distances pour y accéder. Les intervenants des services de santé mentale deviennent de plus en plus sensibilisés à l’importance de la culture, de la langue et du parcours de vie des immigrants francophones, et respectueux de ces facteurs. Cependant, il y a place à amélioration. On observe aussi une hausse, légèrement supérieure à la moyenne, de la qualité et de la quantité – quoiqu’encore insuffisante – des services de santé mentale en français. Enfin, les personnes à risque n’utilisent pas assez les services de santé mentale. L’information sur la santé mentale offerte en français s’avère insuffisante et difficilement accessible. De plus, les services de santé mentale sont très peu connus dans la communauté.

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49

LES OBSTACLES À L’ACCÈS ET L’UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE

Les obstacles à l’accès aux services de santé mentale qui ont été soulevés sont les suivants :

la difficulté constante de parler ouvertement des enjeux de santé mentale, même si la plupart des immigrants commencent à se confier et à briser les tabous;

l’offre limitée d’outils d’intervention en santé mentale;

l’accessibilité réduite aux services de santé mentale en raison de la méconnaissance de ceux-ci et de l’offre restreinte de ressources francophones.

LES PISTES D’AMÉLIORATION

Les pistes d’amélioration sont les suivantes :

offrir davantage de services de santé mentale en français, l’offre existante étant insuffisante;

sensibiliser davantage les communautés aux problèmes de santé mentale;

privilégier une approche traitement mieux adaptée à la diversité culturelle;

promouvoir davantage les services en français existants;

créer un portail répertoriant l’information relative aux services de santé mentale en français;

mettre sur pied une clinique d’information et de dépistage;

offrir des services spécialisés répondant aux besoins spécifiques des personnes LGBT;

améliorer la connaissance des milieux d'origine des immigrants francophones;

organiser davantage d’ateliers comme celui proposé ce matin, car plusieurs francophones pourraient également en bénéficier;

créer un lieu qui abrite tous les services liés à la santé mentale en français et répertorier les sites web regroupant des programmes et des services en français;

accorder la priorité à l’éducation;

privilégier une approche-traitement adaptée aux femmes victimes de violence, sous toutes ses formes, et aux femmes immigrantes francophones. La culture de l'individu devrait être prise en compte lors du traitement;

offrir des ressources en santé mentale destinées aux enfants et aux parents;

créer un site Internet en français offrant des outils d’autoévaluation et inventoriant les ressources, services, programmes, agences et conseils. Il devrait s’adresser à l’ensemble de la communauté francophone, y compris les groupes encore plus marginalisés, comme les personnes LGBT, les personnes vivant avec le VIH/sida ou les sans-abri;

faire connaître l’existence de services de santé mentale en français aux communautés anglophones, car les francophones se font souvent soigner en anglais et ils perdent des informations ou ils comprennent mal celles-ci en raison de la barrière linguistique;

inclure les soins psychologiques dans la gamme de services, car il n’est pas facile de trouver un psychologue ou un pédopsychiatre francophone.

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50

TABLEAUX DE L’ENQUÊTE EN LIGNE Survol démographique des répondants

Femme HommeMoins de

25 ans

25 à

34 ans

35 à

44 ans

45 à

54 ans

55 ans

et plusAfrique Pacifique Asie Europe

Amérique

Centrale, du

Sud et

Caraïbes

Amérique du

Nord

Moins de

1 an

1 à

5 ans

6 à

10 ans

11 à

15 ans16 à 20 ans

Plus de 20

ansToujours

37 23 14 6 23 4 4 19 3 9 2 4 1 9 12 6 2 2 5

Utilisateur de serv ices en santé 7 6 1 2 5 3 1 2 1 3 1 2 1

Famille, conjoint(e) ou ami(e) 6 3 3 4 1 1 3 1 2 2 2 2

Fournisseur de serv ices 12 8 4 2 5 2 3 7 1 1 1 2 1 4 3 1 1 2

Représentant d’une communauté 12 6 6 2 9 1 6 1 5 1 3 5 1 1 1

Moins de 1 an 1 1 1 1

1 à 5 ans 9 5 4 1 8 7 2

6 à 10 ans 12 8 4 1 8 3 6 1 4 1

11 à 15 ans 6 4 2 1 3 1 1 4 2

16 à 20 ans 2 1 1 1 1 2

Plus de 20 ans 2 2 2 1 1

Toujours 5 3 2 2 1 2 1 4

Afrique 19 10 9 3 13 1 2

Pacifique

Asie 3 2 1 1 2

Europe 9 7 2 1 5 3

Amérique Centrale, du Sud et Caraïbes 2 2 2

Amérique du Nord 4 2 2 1 1 2

Moins de 25 ans

25 à 34 ans 6 5 1

35 à 44 ans 23 13 10

45 à 54 ans 4 4

55 ans et plus 4 1 3

Ca

tég

ori

e d

’âg

e

Genre Catégorie d’âge Zone géographique Durée du séjour au Canada

Nombre total de répondants :

Ca

tég

ori

e d

e

rép

on

da

nts

Du

rée

du

jou

r

au

Ca

na

da

Zo

ne

og

rap

hiq

ue

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51

Sexe

Ensemble des réponses

Utilisateur de services

Famille, conjoint(e) ou ami(e)

Utilisateur et/ou famille, etc.

Fournisseur de services

Représentant d’une communauté

Femme 23 6 3 9 8 6

Homme 14 1 3 4 4 6

Total 37 7 6 13 12 12

Groupe d’âge

Ensemble des réponses

Utilisateur de services

Famille, conjoint(e) ou ami(e)

Utilisateur et/ou famille, etc.

Fournisseur de services

Représentant d’une communauté

Moins de 25 ans 0 0 0 0 0 0

25 à 34 ans 6 2 0 2 2 2

35 à 44 ans 23 5 4 9 5 9

45 à 54 ans 4 0 1 1 2 1

55 ans et plus 4 0 1 1 3 0

Total 37 7 6 13 12 12

Origine géographique

Ensemble des réponses

Utilisateur de services

Famille, conjoint(e) ou ami(e)

Utilisateur et/ou famille, etc.

Fournisseur de services

Représentant d’une communauté

Afrique 19 3 3 6 7 6

Pacifique 0 0 0 0 0 0

Asie 3 1 0 1 1 1

Europe 9 2 1 3 1 5

Amérique centrale, Amérique du Sud et Caraïbes 2 1 0 1 1 0

Amérique du Nord 4 0 2 2 2 0

Total 37 7 6 13 12 12

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52

Nombre d’années au Canada

Ensemble des réponses

Utilisateur de services

Famille, conjoint(e) ou ami(e)

Utilisateur et/ou famille, etc.

Fournisseur de services

Représentant d’une communauté

Moins de 1 an 1 0 0 0 0 1

1 à 5 ans 9 3 2 5 1 3

6 à 10 ans 12 1 2 3 4 5

11 à 15 ans 6 2 0 2 3 1

16 à 20 ans 2 0 0 0 1 1

Plus de 20 ans 2 0 0 0 1 1

Toujours 5 1 2 3 2 0

Total 37 7 6 13 12 12

Catégorie de répondant

Ensemble des réponses

Utilisateur de services

Famille, conjoint(e) ou ami(e)

Utilisateur et/ou famille, etc.

Fournisseur de services

Représentant d’une communauté

Utilisateur de services de santé mentale (usager direct) 7 7 0 7 0 0

Membre de la famille, conjoint(e) ou ami(e) d’une personne ayant des besoins de services de santé mentale (usager indirect)

6 0 6 6 0 0

Fournisseur de services de santé et services sociaux 12 0 0 0 12 0

Représentant ou membre d’une communauté ethnoculturelle 12 0 0 0 0 12

Total 37 7 6 13 12 12

Comme intervenant, j’œuvre à titre de :

Fournisseur de services

Intervenant en santé mentale 2

Intervenant en santé et services sociaux 7

Gestionnaire d’un programme de services de santé mentale 0

Gestionnaire d’un organisme de santé et service sociaux 1

Autre 2

Total 12

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TABLEAUX RELATIFS AUX UTILISATEURS DIRECTS ET INDIRECTS Dernière utilisation de services de santé mentale

Ensemble des réponses

Utilisateur de services

Famille, conjoint(e) ou ami(e)

0 - 6 mois 5 2 3

6 mois à 1 an 3 0 3

1 an à 3 ans 2 2 0

3 ans à 5 ans 1 1 0

Plus de 5 ans 2 2 0

Total 13 7 6

En tant qu'utilisateur direct ou indirecte, j'estime que :

Utilisateurs directs et indirects

Entièrement d'accord (4)

Plutôt d'accord (3)

Plutôt en désaccord (2)

Entièrement en désaccord (1)

Ne sait pas/Ne s’applique pas

Moyenne

J'ai facilement trouvé de l'information sur la santé mentale en français correspondant à ma situation.

0 2 5 4 2 1,82

J'ai rapidement été dirigé vers les bonnes personnes pour m'aider. 0 3 7 1 2 2,18

J'ai reçu un service de santé mentale de qualité en français. 1 4 3 2 3 2,40

Les intervenants étaient respectueux de ma culture, de ma langue et de mon parcours de vie et y étaient sensibilisés.

2 5 2 2 2 2,64

J'ai reçu des services de santé mentale en français à proximité de mon lieu de résidence.

0 2 3 5 3 1,70

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CONNAISSANCE ET COMPRÉHENSION DE LA SANTÉ MENTALE Veuillez indiquer dans quelle mesure vous êtes d’accord avec les énoncés suivants :

Entièrement d'accord (4)

Plutôt d'accord (3)

Plutôt en désaccord (2)

Entièrement en désaccord (1)

Ne sait pas/Ne s’applique pas

Moyenne

Ensemble des répondants

J’ai besoin d’acquérir davantage de connaissances personnelles sur la santé mentale.

21 10 2 2 2 3,43

Selon moi, les communautés culturelles connaissent les enjeux de santé mentale et les comprennent.

7 8 15 6 1 2,44

Selon moi, les communautés culturelles sont de plus en plus sensibilisées aux enjeux de santé mentale.

7 13 10 5 2 2,63

Utilisateurs directs et indirects

J’ai besoin d’acquérir davantage de connaissances personnelles sur la santé mentale.

6 6 1 0 0 3,38

Selon moi, les communautés culturelles connaissent les enjeux de santé mentale et les comprennent.

3 5 4 0 1 2,92

Selon moi, les communautés culturelles sont de plus en plus sensibilisées aux enjeux de santé mentale.

2 6 4 0 1 2,83

Fournisseurs

J’ai besoin d’acquérir davantage de connaissances personnelles sur la santé mentale.

7 1 1 1 2 3,40

Selon moi, les communautés culturelles connaissent les enjeux de santé mentale et les comprennent.

2 2 4 4 0 2,17

Selon moi, les communautés culturelles sont de plus en plus sensibilisées aux enjeux de santé mentale.

3 4 1 3 1 2,64

Représentants communautaires

J’ai besoin d’acquérir davantage de connaissances personnelles sur la santé mentale.

8 3 0 1 0 3,50

Selon moi, les communautés culturelles connaissent les enjeux de santé mentale et les comprennent.

2 1 7 2 0 2,25

Selon moi, les communautés culturelles sont de plus en plus sensibilisées aux enjeux de santé mentale.

2 3 5 2 0 2,42

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55

CONNAISSANCE ET UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE EXISTANTS DANS LA COMMUNAUTÉ Veuillez indiquer dans quelle mesure vous êtes d’accord avec les énoncés suivants :

Entièrement d'accord (4)

Plutôt d'accord (3)

Plutôt en désaccord (2)

Entièrement en désaccord (1)

Ne sait pas/Ne s’applique pas

Moyenne

Ensemble des répondants

L'information en français sur la santé mentale est très accessible. 1 5 15 12 4 1,85

Les services de santé mentale sont bien connus dans la communauté. 0 5 17 11 4 1,82

Les personnes à risque font un bon usage des services de santé mentale. 2 4 19 9 3 1,97

On observe une augmentation de la qualité et de la quantité des services de santé mentale en français.

4 7 6 4 3 2,52

On observe une offre accrue de services de santé mentale dans la communauté.

2 6 9 3 4 2,35

Les fournisseurs sont respectueux de la culture, de la langue et du parcours de vie, et y sont sensibilisés.

5 9 3 3 4 2,80

Utilisateurs directs et indirects

L'information en français sur la santé mentale est très accessible. 0 0 6 6 1 1,50

Les services de santé mentale sont bien connus dans la communauté. 0 1 6 5 1 1,67

Les personnes à risque font un bon usage des services de santé mentale. 0 0 9 2 2 1,82

On observe une augmentation de la qualité et de la quantité des services de santé mentale en français.

0 0 0 0 0

On observe une offre accrue de services de santé mentale dans la communauté.

0 0 0 0 0

Les fournisseurs sont respectueux de la culture, de la langue et du parcours de vie, et y sont sensibilisés.

0 0 0 0 0

Fournisseurs

L'information en français sur la santé mentale est très accessible. 1 2 6 3 0 2,08

Les services de santé mentale sont bien connus dans la communauté. 0 1 6 3 2 1,80

Les personnes à risque font un bon usage des services de santé mentale. 1 3 5 3 0 2,17

On observe une augmentation de la qualité et de la quantité des services de santé mentale en français.

1 4 4 2 1 2,36

On observe une offre accrue de services de santé mentale dans la communauté.

0 3 6 1 2 2,20

Les fournisseurs sont respectueux de la culture, de la langue et du parcours de vie, et y sont sensibilisés.

2 4 2 2 2 2,60

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56

Entièrement d'accord (4)

Plutôt d'accord (3)

Plutôt en désaccord (2)

Entièrement en désaccord (1)

Ne sait pas/Ne s’applique pas

Moyenne

Représentants communautaires

L'information en français sur la santé mentale est très accessible. 0 3 3 3 3 2,00

Les services de santé mentale sont bien connus dans la communauté. 0 3 5 3 1 2,00

Les personnes à risque font un bon usage des services de santé mentale. 1 1 5 4 1 1,91

On observe une augmentation de la qualité et de la quantité des services de santé mentale en français.

3 3 2 2 2 2,70

On observe une offre accrue de services de santé mentale dans la communauté.

2 3 3 2 2 2,50

Les fournisseurs sont respectueux de la culture, de la langue et du parcours de vie, et y sont sensibilisés.

3 5 1 1 2 3,00

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OBSTACLES À L’ACCÈS AUX SERVICES DE SANTÉ MENTALE Veuillez indiquer dans quelle mesure vous êtes d’accord avec les énoncés suivants :

Entièrement d'accord (4)

Plutôt d'accord (3)

Plutôt en désaccord (2)

Entièrement en désaccord (1)

Ne sait pas/Ne s’applique pas

Moyenne

Ensemble des répondants

J’observe une diminution des obstacles pour accéder aux services de santé mentale.

3 11 13 6 4 2,33

Les services de santé mentale en français sont accessibles et bien connus. 0 4 19 10 4 1,82

Je peux parler ouvertement des enjeux de santé mentale. 1 7 3 1 1 2,67

Je me sens outillé pour intervenir en santé mentale. 5 6 2 7 4 2,45

J’ai une bonne connaissance des ressources offertes en santé mentale. 2 6 5 9 2 2,05

Utilisateurs directs et indirects

J’observe une diminution des obstacles pour accéder aux services de santé mentale.

1 3 7 0 2 2,45

Les services de santé mentale en français sont accessibles et bien connus. 0 1 6 4 2 1,73

Je peux parler ouvertement des enjeux de santé mentale. 1 7 3 1 1 2,67

Je me sens outillé pour intervenir en santé mentale. 0 0 0 0 0

J’ai une bonne connaissance des ressources offertes en santé mentale. 0 0 0 0 0

Fournisseurs

J’observe une diminution des obstacles pour accéder aux services de santé mentale.

0 5 3 4 0 2,08

Les services de santé mentale en français sont accessibles et bien connus. 0 1 7 4 0 1,75

Je peux parler ouvertement des enjeux de santé mentale. 0 0 0 0 0

Je me sens outillé pour intervenir en santé mentale. 3 4 1 4 0 2,50

J’ai une bonne connaissance des ressources offertes en santé mentale. 1 3 3 5 0 2,00

Représentants communautaires

J’observe une diminution des obstacles pour accéder aux services de santé mentale.

2 3 3 2 2 2,50

Les services de santé mentale en français sont accessibles et bien connus. 0 2 6 2 2 2,00

Je peux parler ouvertement des enjeux de santé mentale. 0 0 0 0 0

Je me sens outillé pour intervenir en santé mentale. 2 2 1 3 4 2,38

J’ai une bonne connaissance des ressources offertes en santé mentale. 1 3 2 4 2 2,10

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AMÉLIORATION DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE EN FRANÇAIS L'amélioration des services de santé mentale en français passe par :

Entièrement d'accord (4)

Plutôt d'accord (3)

Plutôt en désaccord (2)

Entièrement en désaccord (1)

Ne sait pas/Ne s’applique pas

Moyenne

Ensemble des répondants

Une meilleure promotion des services existants en français. 25 7 1 3 1 3,50

La création d'un portail d’information consacré aux services de santé mentale en français.

23 7 2 2 3 3,50

Une approche-traitement plus adaptée à la diversité culturelle. 27 5 1 3 1 3,56

Une offre accrue de services de santé mentale en français, l'offre actuelle étant insuffisante.

26 4 0 2 5 3,69

Une sensibilisation accrue des communautés à la santé mentale. 27 5 1 2 2 3,63

La création d'une clinique d'information et de dépistage. 25 4 1 4 3 3,47

Utilisateurs directs et indirects

Une meilleure promotion des services existants en français. 10 1 0 1 1 3,67

La création d'un portail d’information consacré aux services de santé mentale en français.

9 1 0 1 2 3,64

Une approche-traitement plus adaptée à la diversité culturelle. 9 1 1 1 1 3,50

Une offre accrue de services de santé mentale en français, l'offre actuelle étant insuffisante.

8 1 0 1 3 3,60

Une sensibilisation accrue des communautés à la santé mentale. 8 1 1 1 2 3,45

La création d'une clinique d'information et de dépistage. 7 1 1 2 2 3,18

Fournisseurs

Une meilleure promotion des services existants en français. 6 3 1 2 0 3,08

La création d'un portail d’information consacré aux services de santé mentale en français.

6 3 2 1 0 3,17

Une approche-traitement plus adaptée à la diversité culturelle. 7 3 0 2 0 3,25

Une offre accrue de services de santé mentale en français, l'offre actuelle étant insuffisante.

9 2 0 1 0 3,58

Une sensibilisation accrue des communautés à la santé mentale. 9 2 0 1 0 3,58

La création d'une clinique d'information et de dépistage. 8 3 0 1 0 3,50

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59

Entièrement d'accord (4)

Plutôt d'accord (3)

Plutôt en désaccord (2)

Entièrement en désaccord (1)

Ne sait pas/Ne s’applique pas

Moyenne

Représentants communautaires

Une meilleure promotion des services existants en français. 9 3 0 0 0 3,75

La création d'un portail d’information consacré aux services de santé mentale en français.

8 3 0 0 1 3,73

Une approche-traitement plus adaptée à la diversité culturelle. 11 1 0 0 0 3,92

Une offre accrue de services de santé mentale en français, l'offre actuelle étant insuffisante.

9 1 0 0 2 3,90

Une sensibilisation accrue des communautés à la santé mentale. 10 2 0 0 0 3,83

La création d'une clinique d'information et de dépistage. 10 0 0 1 1 3,73

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ANNEXE 4 : FICHE DE PROJET

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