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perception & parcours l’architecture comme expérience Hélène Besnard, Gaëlle Lukács Sous la direction de Jacques Lucan et l’assistance de Benjamin Persitz Ecole d’Architecture de la Ville et des Territoires Master éorie & Projet – janvier 2012 Ecole d'architecture de la ville & des territoires à Marne-la-Vallée Document soumis au droit d'auteur

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perception & parcoursl’architecture comme expérience

Hélène Besnard, Gaëlle LukácsSous la direction de Jacques Lucanet l’assistance de Benjamin Persitz

Ecole d’Architecture de la Ville et des TerritoiresMaster Théorie & Projet – janvier 2012

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perception-surfaceSOMMAIRE

SENSATIONAxialité descriptionmise en scène chai Dominus Winery

COGNITIONReprésentation univoqueperspective frontalepoint de vue uniqueabsence de subjectivitéimage véritéperception omniscienteHiérarchieréduction à un centreefficacité mathématique

ACTIONAnticipationvoir de loin éprouver et vérifierDéplacement linéairesubordination à la géométrierégularité de l’expérience

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perception-volume perception-évènement

SENSATIONRapport d’angledescriptionmise en scène musée Aomori

COGNITIONDéclinaison harmonieuse suggérer multiplicité perceptiveperception non globalisante Médiationréciprocité des élémentsrelations topologiques

ACTIONIndéterminationexpérience empirique itinéraire choisiFlottement continudéambulation continuité plan-séquence

articles*

SENSATIONFiguresdescriptionmise en scène ambassade des Pays-Basscript

COGNITIONCollection hétérogènevista successives hétérotopiedistinctionconfrontationmulticentrismemise à distancejuxtaposition

ACTIONAttractionchronologie attenteParcours irréguliercéder à l’attractionmontage de perceptioncontinuité irrégulière

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Ce travail est le reflet d’une curiosité à questionner la dimension perceptive de l’architecture. Nous nous intéressons au rapport entre perception et parcours qui sont des thèmes majeurs de l’architecture de la deuxième moitié du XXe siècle. Percevoir c’est entretenir des relations avec les particularités de son environnement. Nous cherchons à définir quels types de rapports peut entretenir un visiteur avec l’espace perçu.Les questions que nous posons ici sont de l’ordre de l’expérience que l’on a dans l’architecture. Notre point de vue est donc celui d’une personne située dans un espace, que nous nommerons alternativement observateur, visiteur ou plus rarement spectateur.

Nous posons comme hypothèse que l’observation phénoménologique de l’architecture, non compositionnelle a priori, permet d’extraire des perceptions clairement distinctes. « Après tout il existe des formes spécifiques et bien définies qui produisent des effets relativement précis. »1

Il nous a semblé utile de définir une grille conceptuelle qui subordonne la question compositionnelle à celle de la perception. Nous appliquons ensuite cette grille conceptuelle sur le réel, comme un outil pratique de la pensée phénoménologique de l’architecture. Faire cette grille c’est fabriquer une série d’hypothèses, comme le filtre d’une réflexion posée sur une réalité perçue. Cette grille identifie des facteurs de perception d’un espace (architectural ou urbain) par un observateur. Il apparaît assez rapidement que «  nulle forme ne peut être forme […]  si elle n’éveille une sensation […] », et que réciproquement «  il est contradictoire de tenter de créer

1 JUDD Donald, « De quelques objets spécifiques », in JUDD Donald, Ecrits 1963-1990, Daniel Lelong éditeur, Paris, 1991. p.9.

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une forme dépourvue de signification»2. Il nous semble important d’ajouter que nulle forme ne peut être forme si elle n’éveille pas la capacité d’action. Nous avons donc défini la perception comme la corrélation entre une sensation (principalement visuelle pour l’architecture), une cognition et une action. La dimension sensitive de la perception est notre rapport premier à l’espace. En cela elle se distingue légèrement des deux autres. Elle est de l’ordre de l’affect, mêlant rapport affectif et physique au lieu et dépassant les simples questions d’esthétique. La dimension cognitive de la perception est de l’ordre de la compréhension. L’espace perçu contient des idées, des informations que l’on éprouve à son contact.La dimension active de la perception est de l’ordre du déplacement (pour l’architecture). A la manière de la chaise qui suggère de s’asseoir, l’architecture suggère, entre autre, de se mouvoir. L’espace perçu contient un potentiel d’action qu’il nous communique.

Ces trois facteurs seront donc systématiquement interrogés pour permettre d’identifier, comparer et discerner différents rapports perceptifs, que nous avons posés au nombre de trois : perception-surface, perception-volume, et perception-évènement.Il s’agira alors de démontrer nettement les caractères communs et les différences de ces trois types de perceptions relevés. Pour ce faire, nous convoquerons des exemples appartenant à des époques différentes. En effet, nous chercherons à définir des familles de projets pour leur aspect phénoménologique, et non pas compositionnel, ni historique.

2 JUDD Donald, cité dans FRÉMONT Jean, « préface » in JUDD Donald, Ecrits 1963-1990, Daniel Lelong éditeur, Paris, 1991. p.7.

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Ce tableau illustre la grille conceptuelle élaborée pour la réalisation de ce mémoire. Il est alors autant un outil de travail, que la représentation synthétique de notre réflexion. Deux sens de lecture sont possibles pour cette grille : dans le sens horizontal, on peut comprendre séparément les trois types de perception selon leurs facteurs principaux. Par une lecture verticale, il est possible d’isoler un facteur (sensation, cognition ou action) et de comparer la manière dont il est convoqué dans les trois types de perception. Le sommaire et le récit du mémoire que nous proposons sont une lecture horizontale de cette grille. Les titres en majuscule indiquent qu’un facteur de perception prédomine pour chacune d’entre elles. On pourra y associer un mode de représentation particulier. Pour la perception-surface ; la perspective frontale, pour la perception-volume ; le plan-séquence, et pour la perception-évènement ; le script.

sensation cognition action composition

perception-surface axialitéreprésentation

univoquehiérarchie anticipation

déplacement linéaire

monument ordre

perception-volume rapport d’angle

déclinaison harmonieuse

médiation indéterminationflottement

continuatmosphère arrangement

perception-évènement figurecollection

hétérogèneconfrontation attraction

parcours irrégulier

narration système

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La première perception que nous abordons est la plus liée à une conception historique de la perception. Il s’agit de la perception-surface qui se caractérise par la centralité et l’axialité. C’est une représentation normée et régulière.

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1 . Dominus WineryYountville, U.S.A., Herzog & de Meuron,1998.2 . Cien HouseChili, Pezo von Ellrichshausen, 2011.3 . Galerie GoetzMunich, Allemagne, Herzog & de Meuron, 1992.4 . BBB BruggerstrasseBaden, Suisse, Burkard Meyer, 2006.5 . Antipodes II, logements étudiantsDijon, France, Herzog & de Meuron, 1991.6 . Hôpital de jourYokohama, Japon, sanaa, 2000.

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Axialité description Par perception-surface, nous entendons perception d’un

espace symétrique et limité par des lignes concourantes en un même point (le point de fuite qui est plus ou moins central). Cette perception marque une succession de plans superposés les uns aux autres. «Je vois les choses chacune à sa place précisément parce qu’elles s’éclipsent l’une l’autre.»3

Les différentes rotondes de Claude-Nicolas Ledoux, placées aux entrées de Paris, sont typiques d’une perception-surface. Elles présentent leur façade principale de face. Leurs allées dessinent des lignes fuyantes clairement établies. (fig

1 1)

3 MERLEAU-PONTY Maurice, L’Oeil et l’Esprit, éd. Folio Essai, Paris, 1964, p.64.

perception-surface

SENSATION

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mise en scène

(fig1 1)

Représentation des barières d’octroi, C.N. Ledoux, Paris,1788.

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Dans certains projets, la perception-surface est magnifiée. Elle montre alors deux situations  : une superposition de plans et de profondeurs marquée par leurs limites verticales, ou une perception sans succession de plans et alors marquée par des lignes horizontales concourantes.Les colonnades sont caractéristiques d’une perception-surface marquée par une superposition de plans, comme peuvent l’être aussi les enfilades de pièces. Ces dernières sont décrites par Blondel de la manière suivante  : «Les différentes pièces offrent d’un seul coup d’œil, et par une même enfilade, la magnificence intérieure du principal corps de logis.»4 (fig

1 2)

Les couloirs ou pièces profondes sont caractéristiques d’une perception-surface marquée par des lignes concourantes. Le Chai viticole Dominus Winery réalisé par Herzog & de Meuron à Yountville en Californie (1997) est un exemple contemporain de ce type de perception. (fig

1 3)

Jacques Herzog et Pierre de Meuron réalisent ici un bâtiment linéaire qui, par sa simplicité formelle et sa radicalité s’affirme, entre autre, comme une architecture de l’expérience. L’enjeu du projet est celui de la mise en scène : «La configuration monotone du paysage des régions produisant du vin est profondément ennuyeuse. […] La question posée est comment les architectes Jacques Herzog et Pierre de Meuron, et par la suite le photographe Jeff Wall, ont réussi à sublimer la monotonie morne et pénétrante? »5

4 AMALDI Paolo, Mies van der Rohe: Espace et densité - Mur, colonnes, interférences, coll. Archigraphy, éd. Infolio, Paris, 2006, p. 177.5 MOUEIX Christian, « The Dominus winery », in HERZOG Jacques, DE MEURON Pierre, URSPRUNG Philip, Natural History, Lars Muller Publisher, Montréal, 2005. p.138.Texte original : « The mononous configuration of the landscape in wine-producing regions is profoundly boring. […] The question to be asked is how the architects Jacques 

mise en scène

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(fig1 2)

1. BBB Bruggestarsse, Baden, Suisse, Burkard Meyer, 2006.2. Ministère de la Marine, Paris, France J.A. Gabriel, 1775.3. Cien House,Chili, Pezo von Ellrichsausen, 2011.4. Hôtel de Lauzun, Paris, France, L Le Vau,1658.

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Les architectes abordent alors le bâtiment comme un espace à expérimenter dans sa dimension phénoménologique. «Nous sommes plus intéressés par l’impact physique et émotionnel, comme le son d’une musique ou le parfum d’une fleur. […] La force de nos bâtiments est l’impact immédiat, viscéral, qu’ils ont sur un visiteur.»6 «Notre approche est phénoménologique! […] Tous nos projets sont les produits de notre perception projetée sur des objets! […] Puisque nous tournons la tête dans des directions différentes, le bâtiment résulte de différentes perceptions. Nous marchons en observant des phénomènes.»7

Herzog and pierre de Meuron, and thereafter the photographer Jeff Wall, managed to sublimate pervasive monotony and bleakness ? »6 «With Jacques Herzog, A conversation, KIPNIS Jeffrey in Herzog et de Meuron », El croquis, n°60+84, 1981.Texte original : « We are more interested in the physical and emotional impact, like the sound of a music or the scent of a flower. […] The strength of our building is the immediate, vsiceral impact they have on a visitor.. »7 ZAERA Alejandro, « Interview with Jacques Herzog, Continuities », in Herzog et de Meuron, El croquis, n°60+84, 1981.Texte original : « Our approach is phenomenological ! […] All of our projects are products of our perception projected onto objects ![…]Since  we turn our heads in different directions, the building arise from other perception. We work by observing phenomena. »

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(fig1 3)

1. Dominus Winery, Yountville, U.S.A., Herzog & de Meuron, 1998.2. Hôptital de jour, Yokohama, Japon, sanaa, 2000.3. Hôtel Bisseuil, Paris, France, P. Cottard, 1660.4. Antipodes II, Dijoj, France,Herzog & de Meuron, 1991.

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Dominus WineryHerzog & de MeuronYountville, Californie, U.S.A.1998

« Le bâtiment est divisé en trois unités fonctionnelles : la pièce de Réservoir avec d’énormes réservoirs chromés pour la première étape de fermentation, la Cave Barrique où le vin mûrit dans des cuves pendant deux ans, et la Réserve où le vin est mis en bouteille emballé dans des caisses en bois, et des Dépôts jusqu’à ce qu’il soit vendu. Nous avons hébergé ces trois unités fonctionnelles dans un bâtiment linéaire. La construction traverse l’axe principal de la cave à vin et est ainsi au milieu des vignobles. Les vignes en Californie grandissent à la hauteur de bien plus de 1,80 mètres si bien que le bâtiment est complètement intégré à la texture linéaire, géométrique du vignoble. »8

8 « Dominus Winery in Napa Valley », in Herzog et de Meuron, El croquis, n°60+84, 1981. Texte original : « The building is divided into three fonctional unit : the Tank room with huge chrome tanks for the first stage of fermentation, the Barrique Cellar where the wine matures in oak vats for two years, and the Storeroom where the wine is botteled, packed in wooden cases , and stores until it is sold. We designed to house these three fonctional unit in a linear building. The building bridge the main axis, the main path of the winery, and is thus in the midst of the vineyards. Vines in California grow to height of well over 6 feet, so that the building is completely integrate into the linear, geometric texture of the vineyard. »

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La perception des plans successifs ou des lignes concourantes entraîne une mise en abîme de l’espace. Le lieu est perçu dans toute sa profondeur, tel qu’il est. L’objet architectural réfère à lui même et se donne à voir clairement. «What you see is all that there is to see.»9 Aussi, (par les plans superposés ou les lignes concourantes) il fait part d’une axialité très forte qui s’impose à l’observateur.La perspective* frontale est le mode de représentation par excellence de la perception-surface. Perspective et perception-surface posent conjointement le point de vue et la représentation comme des questions fondamentales. A ce titre Herzog & de Meuron affirment leur attachement à la question de la représentation et expriment leur rapport

9 JUDD Donald cité dans Martin STEINMANN, The presence of things, Construction, Intention, Detail, Artemis.

Représentation univoque

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Le fonctionnement de l’oeil, R. Descartes, 1637.

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problématique quant à l’usage de la perspective naturaliste. «Penser la présentation d’une architecture est la même chose que penser l’architecture elle-même. Pour le dire autrement, la présentation de chaque architecte ne communique pas l’architecture par les images présentées de cette architecture, mais par la présentation elle-même ; de là, notre relation problématique aux modèles architecturaux conventionnels et au dessin perspectif.»10 Dans son texte La perspective comme forme symbolique (1927), Erwin Panofsky se penche sur les propriétés du dessin perspectif qui émerge en période renaissance, en remettant en cause l’idée reçue selon laquelle il s’agirait d’une restitution à vocation objective. Loin d’être la transcription neutre de la réalité tridimensionnelle sur une surface bidimensionnelle, la perspective est un instrument de représentation symbolique. En ce sens, il montre que la perspective affirme une vision des choses plus qu’elle ne montre les choses de manière aussi neutre que prétendu.

Lors d’une perception-surface, la possibilité de percevoir l’espace en un regard, et l’axialité du lieu amène l’observateur à se positionner précisément sur l’axe central. Ce type de perception n’offre pas la possibilité d’une variation perceptive. Non seulement, «le visiteur se

10 « Essays and lectures by Herzog & de Meuron » (1988, traduit de l’allemand par Claire Bonney), in WANG Wilfried, Herzog et de Meuron, Artemis, Londres Zürich Munich, 1994. Texte original : « Thinking about the presentation of an architecture is identical to thinking about the architecture itself. To say it another way, each architect’s presentation communicates insight into architecture no so much through the images presented of this architecture, but through the presentation itself ; hence, our problematic relationship to conventional architectural models and to perspective drawing. »

point de vue unique

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Dominus Winery, Yountville, U.S.A., Herzog & de Meuron, 1998.

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place devant l’espace comme devant un tableau »11, mais il le regarde comme tel.Herzog & de Meuron, concernant le chai viticole, disent de ce bâtiment que « la cave à vin apparaît comme elle est : presque invisible, absorbée dans le sol et les collines environnantes, mais néanmoins très présente ; non obstacle, mais réellement là … comme le Mastaba d’un noble enterré au milieu de son armée.»12 Ce lieu construit des images frontales flagrantes et est communiqué par des photographies aux perspectives centrales. Il est pourtant intéressant de constater à quel point Herzog & de Meuron sont conscients des limites et de la sémantique liée à la représentation perspective. Le chai viticole apparaît alors comme une construction on ne peut plus consciente des enjeux de l’axialité. «Plus le dessin est naturaliste, tel un dessin de perspective, plus son intention est descriptive. Le dessin de perspective deviendra une limite parce qu’il ne permet pas à son observateur de voir autrement que de la manière dont l’auteur l’a prévu, ou de voir n’importe quelle autre perspective que celle choisie. Pour l’architecture, le mode naturaliste perspectif de représentation est donc autoritaire et anti-instructif.»13

11 Eisenman.12 MOUEIX Christian, « The Dominus winery », in HERZOG Jacques, DE MEURON Pierre, URSPRUNG Philip, Natural History, Lars Muller Publisher, Montréal, 2005, p.138.Texte original : « The winery appears like it is : almost invisible, absorbed into the soil and the surrounding hills, but nonetheless very present ; unobstructive, but indeed there … like the mastaba of some great nobleman buried in a midst of his army. »13 « Essays an lectures by Herzog & de Meuron » (1988, traduit de l’allemand par Claire Bonney), in WANG Wilfried, Herzog et de Meuron, Artemis, Londres Zürich Munich, 1994. Texte original : « The more  naturalistic such a perspective drawing is, the more descriptive is its intention.The perspective drawing will become confining because it does not allow its observer any new mode of seeing other than which its autor intended or any new perspective other than the one chosen. The perspective naturalistic mode of presentation for architecture is therefore autoritarian and anti-enlightening. »

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absence de subjectivité

La perception-surface par un point de vue unique et pour ainsi dire imposé, est produite depuis l’objet et pour lui-même, c’est une perception allo-centrée. Cette vision ne dépend pas de la subjectivité du sujet. «Dans l’espace perspectif, nous essayons de nous identifier à une position du sujet qui, étrangement, ne paraît pas là. […]. Cela dit au sujet de quelle manière se positionner de face, selon quel point de vue et quelle profondeur de champ.»14 Pour l’observateur il s’agit alors de reconnaître, de comprendre, d’identifier, éventuellement de confronter sa perception à des représentations présentes en sa mémoire. La perception-surface est caractéristique de l’importance accordée à une appréhension mentale de l’espace.Elle se réfère donc à l’idée d’une image vérité et globale, comme un texte proposé à notre lecture. Ce type de perception est marqué par une conception grecque dans laquelle la vision est l’organe qui permet l’appréhension simultanée des choses et leur distribution dans l’espace. On remarque alors «l’emploi d’un même terme, ‘’idein’’, pour designer à la fois l’idée et la vision»15. Dans le texte La Dioptrique (1637), Descartes s’inscrit dans cette tradition en faisant de l’œil «un organe conquérant qui ordonne les choses extérieures en une image visuelle synthétique et univoque»16. L’espace est en quelque sorte le lieu de la description objective des corps. Nous sommes ici « dominés par le paradigme du centrisme oculaire, une interpénétration de la connaissance, de la vérité et de la réalité issue de la vision et centrée sur elle»17.

14 HOLM Lorens, Brunelleschi, Lacan, Le Corbusier. Architecture, space and the construction of subjectivity, éd. Routledge, 2010.15 AMALDI Paolo, Espaces, éd de la Vilette, Passage, Paris, 2007.16 AMALDI Paolo, Espaces, éd de la Vilette, Passage, Paris, 2007.17 PALLASMAA Juhani, Le regard des sens, éditions du Linteau, Paris, 2010.

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Ce type de perception fait référence à des notions de vérité et de vertu. Le travail de Jean-Nicolas-Louis Durand en est un exemple. Dans une expression et une philosophie tout à fait différente Herzog & de Meuron font eux aussi appel à la dimension cognitive de ce type d’espace. «La réalité de l’architecture n’est pas l’architecture construite. Une architecture crée sa propre réalité au-delà du construit ou du non construit […]. La réalité dont je parle n’est pas le bâtiment réel, le tactile, le matériel. Bien sûr, nous aimons cet aspect tangible, mais seulement dans un rapport au travail architectural. Nous aimons sa qualité spirituelle, sa valeur immatérielle. » 18 On voit alors apparaître l’idée d’une architecture vertueuse. Vertu qui selon les époques se réfère à différentes pensées. Pour Palladio, dans la villa Rotonda, c’est une vision métaphysique de l’architecture. «  Méditant sur la nature changeante des choses de la vie, il [le propriétaire de la villa Rotonda] contemplera au fil des ans les antiques vertus d’une race simple  : l’ordonnance harmonieuse de sa vie et de son domaine sera une analogie du paradis»19. Pour Herzog & de Meuron, l’enjeu est de montrer «que les idées pourraient toujours être inclues dans des formes concentrées et réduites […]. Herzog et de Meuron cherchent de nouveau à combiner la dimension physique primaire de l’architecture avec sa capacité à incarner une qualité conceptuelle. […] L’architecture d’Herzog & de Meuron combine l’image et le

18 « Essays an lectures by Herzog & de Meuron » (1988, traduit de l’allemand par Claire Bonney), in WANG Wilfried, Herzog et de Meuron, Artemis, Londres Zürich Munich, 1994. Texte original : « The reality of architecture is not built architecture. An architecture creates its own reality outside of built or unbuilt […]. The reality of which I speak is also not the real building, the tactile, the material. Certainly we love this tangibility, but only in a relationship within the whole of architectural work. We love its spiritual quality, its immaterial value. »19 ROWE Colin, « mathématique de la villa idéale », Mathématique de la villa idéale et autres essais, Hazan, Paris 2000, p.9.

image vérité

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cadre pour se référer à son propre programme, contenu, site et en fin de compte à son idée»20.

Lors d’une perception-surface et dans la perspective frontale, toutes les lignes horizontales de l’espace perçu se rejoignent en un point de fuite (souvent central). Ce point évoque l’idée d’un univers infini. Le XIVe siècle - moment des premiers traités de perspectives d’Alberti*, Brunelleschi, Piero della Francesca, ou encore Léonard de Vinci - la conception du monde change. D’une perception théo-centrée on se tourne vers une conception anthro-centrée. La perspective frontale qui représente un espace sans fin évoque l’idée d’un univers nouveau et infini. Panofsky dans sont écrit La perspective  comme forme symbolique met clairement en évidence la corrélation entre représentation et conception plus globale du monde. On pense alors aux perspectives célestes qui s’éloignent d’un œil humain et le surplombe pour en affirmer l’aspect infini. (fig

1 6-7) La perspective est alors un moyen d’exprimer

une soif de connaissance. Ce point de vue omniscient, que Michel de Certeau qualifie de «simulacre théorique de connaissance, oubli et méconnaissance des pratiques d’un en bas»21 est toujours véhiculé par la représentation perspective de l’espace-surface. « Icare élevé peut détourner les rues de Dédales »

20 WANG Wilfried, « The presence of ideas in built matter », in Herzog et de Meuron, Artemis, Londres Zürich Munich, 1994.Texte original : « that ideas could still be embodies in concentrated and reduced forms, […] Herzog et de Meuron are once again seeking to combine architecture’s primary physical dimension with its capacity to embody conceptual quality. […] Herzog & de Meuron’s architecure combines image and frame to refer to its programme, contents, site, and ultimately to its idea.»21 DE CERTEAU Michel, L’art de faire, l’invention du quotidien, volume 1: l’art de faire [1ère édition: 1979], Gallimard, Paris, 1990, p. 139.

perception omnisciente

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(fig1 6)

Place Louis XVactuellement

Place de la Concorde,et plan correspondant.

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(fig1 7)

Place Louis-le-GrandactuellementPLace Vendome,et plan correspondant, Plan Jaillot, 1782.

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La perception-surface, allo-centrée, fait apparaître une subordination de l’ensemble à son centre. Un point de vue axé sur ce centre est estimé significatif et suffisant pour la représentation du lieu dans son ensemble. A Vaux-le-Vicomte, «c’est seulement ici [au niveau de la statut d’Hercule], […] que l’essence de la composition spatiale peut être comprise»22. Même lorsque le centre de cette axialité n’est pas visible directement, il est virtuellement présent puisque tout s’y réfère.

De cette façon, l’objet central fabrique l’environnement qui l’entoure selon sa propre logique, il rayonne. On pense bien sûr aux châteaux et leurs jardins à la française, ou encore à la Villa Rotonda de Palladio (1566-1571) (fig

1 8). Cette dernière

illustre radicalement, la relation hiérarchique qu’instaure l’espace-surface. En effet, la villa n’a physiquement aucune répercussion sur le paysage (en dehors de l’allée qui en donne l’accès), pourtant elle en a partout. De quelque côté qu’on se place, les quatre faces de la Rotonda sont présentes en puissance et sont donc à elles seules le moyen de diviser en quatre le paysage environnent sans le diviser réellement. Le chai viticole Dominus Winery s’inscrit dans ce rapport au paysage, il trace une ligne séparatrice au cœur de la parcelle sans l’interrompre vraiment. «La construction traverse l’axe principal de la cave à vin et est ainsi au milieu des vignobles. Les vignes en Californie grandissent à la hauteur de bien plus de 1,80 mètre, si bien que le bâtiment

22 STEENBERGEN, Wouter REH, Architecture and Landscape - The Design Experiment of the Great European Gardens and Landscape, éd. Birkhaüser, Bussum, 2003, p.155.

Hiérarchieréduction à

un centre

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(fig1 8)

Villa Rotonda, Vicence, Italie, A. Palladio, 1571.

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(fig1 9)

Dominus Winery, Yountville, U.S.A.,

Herzog & de Meuron, 1998. Plan masse

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est complètement intégré à la texture linéaire, géométrique du vignoble.»23 La perception-surface est synonyme de focalisation. Le point de vue est maîtrisé et dirigé. Cette absence de liberté perceptive montre la volonté d’exprimer très clairement les enjeux du lieu. A ce titre Colin Rowe décrivant la Villa Rotonda dira : «en tant que type idéal à plan centré, la villa Capra-Rotonda de Palladio s’est plus sans doute que toute autre maison, imposée à l’imagination. Elle est mathématique, abstraite, cruciforme, sans fonction apparente et totalement mémorable»24.

L’axialité exprime une radicalité du message. Le principe est de faire de cette architecture une sorte de démonstration, en tous cas de chercher un effet. Aussi, la perspective frontale, par la géométrie de ses tracés, a une prétention scientifique «à rendre avec exactitude et rationnellement la diminution ou l’agrandissement des choses»25. Alberti qualifie la perspective de construction légitime. On voit ici le souci d’efficacité lié à la perception-surface et sa représentation perspective.On pense par exemple à l’énergie déployée par Jean-Nicolas-Louis Durand* pour justifier l’utilité du Précis d’Architecture et pour en énoncer les principes rigoureux. On pense aussi au travail de Donald Judd dont les objets

23 « Dominus Winery in Napa Valley », in Herzog et de Meuron, El croquis n°60+84, 1981.Texte original : « The building bridge the main axis, the main path of the winery, and is thus in the midst of the vineyards. Vines in California grow to height of well over 6 feet, so that the building is completely integrate into the linear, geometric texture of the vineyard. »24 ROWE Colin, Mathématiques de la villa idéale et autres essais [ éd. Originale : Birkhäuser verlag, Basel 1968], Hazan, Paris, 2000.25 PANOFSKY Erwin, La perspective comme forme symbolique, éd. Les Editions de Minuit, Paris, (1927) 1975, p. 121.

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spécifiques, «sans grandiloquence, avec finesse et autorité, formulent leur identité comme un postulat, un axiome, un théorème, un produit de l’intelligible qui aurait subit l’épreuve du sensible». La perception-surface fait référence à la rigueur et l’objectivité, elle revêt un caractère scientifique et véritable. Le chai viticole Dominus Winery est décrit lui aussi par un souci de rationalité, ici avec une certaine pointe d’ironie. «Les gabions sont-ils une simple idée de génie, solitaire, sans assiette? Au contraire. La carrière est à 15 km, la relation au socle, à la réalité volcanique de la Napa Valley, à celle du terroir, une évidence. L’axe central horizontal du domaine, en traversant les chais, les lie à la topographie. Leur développement spatial longitudinal, est une suite logique rationnelle. […] L’immersion s’intensifie au fil du parcours, curieuse oscillation entre rigueur, géométrie, matériaux bruts, et des impressions quasi tactiles.»26

Cette apparente qualité intrinsèque de la perception-surface est parfois détournée par les plasticiens ou les architectes. On pense alors aux photographies frontales de Bernd et Hilla Becher* qui construisent une représentation savante et objective de bâtiments industriels, a priori peu regardés, afin d’en démonter les qualités esthétiques et sémantiques. Plus directement, le trompe-l’œil est une manière flagrante de s’emparer de l’apparente vérité de la perception-surface, afin de faire illusion. «Alors que cette convention [la perspective] a permis de peindre un espace profond plus naturellement, elle a permis à l’architecture de représenter un espace profond sur une surface de façade et ainsi de devenir plus proche de la peinture. En peinture cela a permis l’illusion

26 « Gabions de lumière, Dominus Winery, Yountville, Californie. », in Technique et Architecture, n°442, 1999.

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de la réalité ; en architecture cela a réduit l’espace réel à l’illusion d’un espace plat sur une surface peinte.»27

La maison Koechlin (fig1

10) (Herzog & de Meuron, Riehen, Suisse, 1994) ou le Théâtre Olympique (fig

1 11) (A.

Palladio,Vicence, Italie,1580) sont des sortes d’espace trompe-l’oeil. Par de fausses parallèles en plan et coupe, ils donnent l’impression d’une plus grande profondeur.

27 EISENMAN Peter, « A critical analysis: Andrea Palladio » in CASSARA Silvio, Peter Eisenman, Feints, Skira, Milan, 2006, p.50.

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(fig1 10)

Maison Koechlin, Riehen, Suisse, Herzog

& de Meuron, 1994.

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(fig1 11)

A. Palladio,Vicence, Italie,1580

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La perception-surface procède d’une mise en abîme de l’espace. L’espace perçu est globalement visible dans toute sa profondeur. D’une manière générale, la perception-surface est une perception lointaine, comme a priori. Le point de vu éloigné et globalisant semble suffire à lui-même. Ainsi la perception-surface suggère une posture statique. Reprenant la dimension cartésienne de la perception-surface, on remarquera ce qu’en dit à ce sujet Merleau-Ponty. «La vision selon Descartes est une pensée conditionnée qui nait à l’occasion de ce qui arrive dans le corps. Il y a en son centre un mystère de passivité.»28 Parallèlement, force est de constater que si la perception-surface est unique, elle ne présente que très peu de variation et d’intérêt pour le mouvement. S’il suit strictement l’axialité suggérée, alors la perception de l’observateur ne change que très peu selon la distance.

28 MERLEAU-PONTY Maurice, L’oeil et l’esprit, Folio plus, philosophie, Paris, 1964, p. 40.

perception-surface

ACTION

Anticipationvoir de loin

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On constate, que l’approche du chai viticole Dominus Winery le long de son axe ne fait apparaître que peu de variation qui sont de l’ordre du cadrage sur une image déjà perçue dans son ensemble. (fig

1 12) D’une certaine manière,

«la ligne droite est forte ennuyeuse pour le voyageur dont les yeux sont toujours arrivés avant les jambes»29.

Cependant, comme le dit William Morris, «simplicité formelle ne signifie pas nécessairement simplicité de l’expérience », et l’axialité n’a d’intérêt que si elle est vérifiée en l’éprouvant par le pas, elle montre alors sa complexité. «En fait, le plan et le travail architectural nous [Herzog & de Meuron] intéresse comme des outils pour la perception de réalité et la confrontation avec elle. »30 Vaux-le Viconte est un exemple clair de la richesse perceptive générée par un lieu d’une apparente simplicité axiale. Le jeu de nivellement des parterres et les pentes ainsi que certains éléments qui font obstacle faussent la perception du jardin. Par exemple le jardin est beaucoup plus long qu’il n’y paraît. L’espace réel «la position objective de l’horizon perspectif et la profondeur réelle du jardin sont manipulés par la façon dont l’axe spatial a été organisé architectoniquement.»31 Il y a des illusions de perspective, par raccourci ou accélération optique. Aussi, le cheminement axial est parfois obstruer pour obliger le visiteur à expérimenter le rayonnement selon au

29 DE GIRARDIN René louis, De la composition des paysages, p. 52.30 HERZOG Jacques, « Essays an lectures by Herzog & de Meuron » (1988, traduit de l’allemand par Claire Bonney), in WANG Wilfried, Herzog et de Meuron, Artemis, Londres Zürich Munich, 1994. Texte original : « As a matter of fact, the architectural plan and the architectural work interest us as tools for the perception of reality and confrontation with it. »31 STEENBERGEN Clemens, Wouter REH, Architecture and Landscape - The Design Experiment of the Great European Gardens and landscape, éd. Birkhaüser, Bussum, 2003, p.156.

éprouver et vérifier

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(fig1 12)

Dominus Winery, Yountville, U.S.A.,

Herzog & de Meuron, 1998.

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Déplacement linéairesubordination à la géométrie

autre axe. De la même manière le chai viticole Dominus Winery présente en réalité trois axes de symétrie qui sont autant de cadrages possibles sur leur environnement que d’expériences différentes. Aussi, les parois de gabions dont la dimension est variable apportent une complexité sensorielle liée aux questions de lumière. Herzog & de Meuron expliquent que  : «À Dominus, la tendance est de se rapprocher ou de s’éloigner des murs gabion pour les comprendre […]. Cette surface enregistre aussi des petits changements progressifs lorsqu’on se déplace le long. À cause de la profondeur des cages, à cause de la vue de parallaxe et le chevauchement de peaux des deux ouvertures principales, il y a des élisions et des occlusions et d’étrange diffusion de lumière»32. Ce bâtiment apparemment d’une extrême simplicité développe une grande variation perceptive, selon le point de vue, et le moment.

Dans sa capacité d’action, le visiteur est toujours confronté à la géométrie du lieu qui lui impose physiquement ou lui suggère des tracés rectilignes. Par exemple, les jardins de la Renaissance ne sont pas seulement un décor autour d’un édifice. Les végétaux dessinent des parterres géométriques et des allées aux perspectives fuyantes. La symétrie, l’ordre et les proportions s’appuient sur la géométrie. La perspective devient prioritaire, la nature se reconnaît dans l’ordre que l’homme lui impose. Le travail de Donald Judd*

32 RYAN Raymund , « Memories of light, curtains of stone » , Abitare n°516, Noc 2011, p.6.Texte original : « At Dominus , the tendency is to move closer to or further away from the gabion walls in order to comprehend them […]. These surface also register small incremental changes as one moves alongside them. Because of the depth of the cages, because of parallax view and the overlapping of skins about the two principal openings, there are elisions and occlusions and strange emissions of light. »

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Parc du Chateau de Vaux-Le Vicomte,

Maincy, France, A. Le Nôtre, 1661.

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régularité de l’expérience

propose constamment d’éprouver ce rapport à la symétrie. Le visiteur suit les lignes dessinées par l’axialité dominante de l’espace-surface. Jacques Tati, dans le film Playtime* se joue de cette subordination géométrique du mouvement à l’espace, les personnages ont des mouvements rectilignes et en deviennent caricaturaux. Aussi, la direction du mouvement dans le sens de l’axialité génère une succession de plans perpendiculaires ou parallèles au sens de la marche. L’espace entre chacun des plans pourrait devenir le lieu de changement. Pourtant, la régularité géométrique étant dominante, l’espace est prévisible.

L’expérience de l’espace-surface entre vision a priori et vérification par l’expérience, s’organise par un va et vient alternant entre hypothèse, à partir d’une expérience visuelle et vérification d’une expérience, par la marche. Il y a un «rythme d’alternance du schéma et de la correction »33. Cet aller-retour répété rythme la progression dans le lieu en lui donnant une dimension régulière. Si l’hypothèse perceptive est réfutée, on en élabore une autre. Si elle est vérifiée on est amenée à en élaborée une nouvelle et ainsi de suite. C’est une sorte de perception en chaine qui parallèlement à la régularité géométrique de la perception-surface, lui donne une régularité dans l’action et la réaction.

33 GOMBRICH Ernst Hans, L’art et l’illusion, psychologie de la représentation picturale (1960), éd. Gallimard, Paris, 1971, p. 341.

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La perception-surface met en exergue l’axialité. L’espace procède d’une représentation univoque. L’appréhension de l’espace se rapporte toujours à un centre qui domine. Cette perception est régie par un principe de hiérarchie. Le visiteur y est subordonné. La perception-surface présente une logique allo-centrée qui affirme une objectivité intrinsèque. Cette rigueur suggère au visiteur un déplacement linéaire et continu le long d’un axe de symétrie. L’observateur est mis à distance, même soustrait à l’espace, il observe de loin. Son rapport au lieu est de l’ordre de l’anticipation puis de la vérification de l’a priori observé.

De par le jeu de mise en scène, l’effet de monumentalité est caractéristique de la percepion-surface. En plan, cela se traduit par le dessin de parallèles et de symétries axiales. Ce type de projet se rapporte à une définition  formelle  de l’espace. Ce dernier «est composé symétriquement ou selon une autre discipline géométrique explicite et abstraite »1.

Comparée aux perception-volume et perception-évènement, la perception-surface se distingue par l’importance accordée à sa dimension cognitive. Le caractère dominant de cette perception est son principe de représentation. La perception est signifiante, univoque, en un sens elle est autoritaire. Elle affirme une seule lecture possible. C’est ce qui la différencie des deux autres perceptions. En effet, les perception-volume et perception-événement, par leurs principes respectifs d’indétermination et de multiplication, sont synonymes de pluralité de la perception.

1 BANHAM Reyner, Le brutalisme en architecture, éthique ou esthétique?, Paris, 1970, p. 68, in LUCAN Jacques, Composition non composition : architecture et théories, XIXe-XXe siècle, Press Polytechniques et Universitaires Romandes, Lausanne, 2009, p. 467.

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1 . Dominus WineryYountville, U.S.A., Herzog & de Meuron,1998.2 . Cien HouseChili, Pezo von Ellrichshausen, 2011.3 . Galerie GoetzMunich, Allemagne, Herzog & de Meuron, 1992.4 . BBB BruggerstrasseBaden, Suisse, Burkard Meyer, 2006.5 . Antipodes II, logements étudiantsDijon, France, Herzog & de Meuron, 1991.6 . Hôpital de jourYokohama, Japon, sanaa, 2000.

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articles*

Perception d’une image frontale – la perspective Perception d’une architecture signifiante – Léon Battista AlbertiPerception objective – Bernd & Hilla BecherPerception d’une architecture efficace – J.L.N DurandExpérience contrainte – Jacques Tati, Play timeExpérience de la symétrie – Donald Judd

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Perception d’une image frontaleLES PRINCIPES GÉOMÉTRIQUES DE LA PERSPECTIVE

La perception-surface donne à voir un espace axé et géométrique. Elle fait apparaître des surfaces avant tout perçues d’un point de vue frontal. Par ce type d’approche elle donne à voir les choses telles quels sont.La représentation perspective, apparue au Quatrocento italien, est représentative de cette perception. Par une construction géométrique et comme issue de l’œil, elle focalise une image aux prétentions scientifiques et réaliste à la fois.

«On le sait, ces procédés [de réduction perspective] sont tous fondés sur la définition du plan pictural comme l’intersection de la pyramide formée par les rapports visuels, ayant pour sommet l’œil de l’observateur et pour base l’objet à représenter.»1 La perspective consiste alors «à rendre avec exactitude et rationnellement la diminution ou l’agrandissement des choses, qui résulte pour l’œil humain de leur éloignement ou de leur proximité : maisons, plaines, montagnes, paysages de toutes espèces et partout les figures et autres choses.»2

«Item perspectiva est mot latin signifiant vision traversante». C’est en ces termes que Dürer a cherché à cerner le concept de perspective. Pour nous la perspective, au sens prégnant du terme, est donc l’aptitude à représenter plusieurs objets avec la partie de l’espace dans laquelle ils se trouvent, de telle sorte que la notion de support matériel du tableau se trouve complètement chassée par la notion de plan transparent, qu’à ce que nous croyons, notre regard traverse pour plonger dans un espace extérieur imaginaire qui contiendrait tous ces objets en apparente enfilade et qui ne serait pas limité

1 DALAI EMILIANI Marisa, « La question de la perspective » , in PANOSFKY Erwin, La perspective comme forme symbolique [1927], Les Editions de Minuit, Paris,1975.2 Manetti cité par R. Wittkower, Brunelleschi et la «proportion en perspective», 1953, in Architecture et perspective chez Brunelleschi et Alberti[1990], éd. Verdier, Lagrasse, 2004, p.49.

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mais seulement découpé par les bords du tableau.»3

Cependant, la perspective est aussi un mode de représentation, au sens de manière de voir (et de monter) les choses. « Dans son texte La perspective comme forme symbolique (1927), Erwin Panofsky se penchait sur les propriétés du dessin perspectif qui émerge en période de renaissance, en remettant en cause l’idée reçue selon laquelle il s’agirait d’une restitution à vocation objective. Loin d’être la transcription neutre de la réalité tridimensionnelle sur une surface bidimensionnelle, la perspective est un instrument de représentation symbolique. La perspective serait à cet égard, une ‘‘forme d’écriture profondément liée à une façon de voir le monde’’.»4

En effet, «l’invention de la représentation de la perspective a fait de l’œil le point central du monde perceptible autant que du concept de soi. La représentation de la perspective a pris une forme symbolique qui non seulement décrit mais conditionne la perception.»5

Pour l’architecture, la perspective a fait apparaître une question nouvelle et fondamentale en l’architecture  : la proportion. L’architecture devient la mise en scène de rapports entre distance et mesure, «ce n’est qu’à la Renaissance que ces ‘’rapports perspectifs’’ devinrent une composante essentielle du fait stylistique […]. Tout fut tenté pour transformer cette perception des rapports harmoniques en une expérience vivante pleinement ressentie.»6

«Autrement dit, l’architecture de cette période, à l’instar des édifices peints, détermine une situation psychologique dans laquelle la proportion et la perspective deviennent compatibles et, même, l’aboutissement d’une conception métrique et harmonique de l’espace»7

3 PANOSFKY Erwin, La perspective comme forme symbolique [1927], Les Editions de Minuit, Paris,1975.4 Amaldi Paolo, Espaces, éd de la Vilette, Passage, Paris, 2007. 5 PALLASMAA Juhani, Le regard des sens, éditions du Linteau, Paris, 2010.6 Brunelleschi cité par R. Wittkower, Brunelleschi et la «proportion en perpective»,1953, in Architecture et perspective chez Brunelleschi et Alberti [1990], éd. Verdier, Lagrasse, 2004, p.66.7 R. Wittkower, Brunelleschi et la «proportion en perspective » 1953, in Architecture et perspective chez Brunelleschi et Alberti [1990], éd. Verdier, Lagrasse, 2004, p.69.

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Perception d’une architecture signifianteLÉON-BATTISTA ALBERTI

« DE L’ARCHITECTURE ET DE L’ART DE BIEN BÂTIR »

La perception-surface réfère à une conception signifiante voire vertueuse de l’architecture, qui lui est héritée de l’architecture de la renaissance (française et italienne) et de la représentation perspective. La perception-volume fait sens dans une dimension collective.Léon-Battista Alberti théoricien humanisme de l’architecture italien du Quattrocento, est marqué par une «conception antiques et une détestation de la ‘‘barbarie’’ gothique »1. Après avoir publié d’importants traités concernant la peinture et la perspective, il rédige en 1485 le livre IX du De re aedificatoria qui, selon Françoise Choay, est le premier véritable traité d’architecture et d’art urbain. Il est consacré aux édifices privés de la ville et de la campagne, qui contient des recommandations concernant « le paysage » et les jardins propres à accompagner les «maisons champêtres» bâties à proximité des villes.

«Voilà comment les courtils [jardins de maisons champêtres] voisins de la ville, et où l’on peut facilement se retirer, sont cause de grand bien[…].Au regard d’un tel bâtiment, il contentera fort la vue, si dès que l’on sortira des portes de la ville, il se montre totalement joyeux, et d’une grâce telle comme pour attirer le monde, et l’attendre.[…]Mais quand est de tout le corps du logis, je veux au reste que ce qui principalement en toute manière de bâtiment le rend agréable et plaisants, se y trouve, à savoir que toute la face et abords du logis soit illustre et transparent, si qu’on le puisse bien voir de toutes parts, et que chose du monde ne l’empêche, […], en outre qu’il n’y ait rien à l’environ qui mécontente l’œil.»2

1 LE DANTEC Jean-Pierre, Jardins et paysages, Larousse, textes essentiels, Paris 1996 2 LE DANTEC Jean-Pierre, Jardins et paysages, Larousse, textes essentiels, Paris 1996.« De l’architecture et de l’art de bien bâtir » 1485 Léon-Battista Alberti

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Perception objectiveBERND ET HILLA BECHER

« DE L’ARCHITECTURE ET DE L’ART DE BIEN BÂTIR » 1485

La perception-surface par sa géométrie impose un point de vue et un déplacement normé au visiteur. De cette manière, elle nie la dimension subjective de l’architecture. A l’inverse, la représentation frontale et centrée de cette perception porte une connotation scientifique.Bernd et Hilla Becher, adoptent systématiquement ce point de vue pour photographier les bâtiments industriels qu’ils présentent. Ils utilisent cette connotation scientifique pour affirmer la dimension narrative et documentaire de leur travail photographique.

« Ces images présentent ces édifices ordinaires avec la même monumentalité et la même absence de temporalité que celle de l’architecture ancienne, importante historiquement, ou les réalisations nouvelles.»1

«Avec leurs photographies de château d’eau et de tours sinueuses, de hauts fourneaux silos et gazomètres, Bernd et Hilla Becher mettent aussi de nouvelles normes dans l’esthétique perceptrice, présentant l’industrie lourde - qui n’a jamais eu un caractère très public et a porté des connotations en grande partie négatives - comme un objet d’art.»2

1 KNAPE Gunilla , « Forewords », in Basics forms of industrial building, Thames & Hudson, Londres, 2005, p.5.Texte original : « There images render the unglamorous edifices with the same monumentality and timelessness as used for hitorically important ancient architecture or new designs.  »2 LANGE Susanne, « History of style », in Basics forms of industrial building, Thames & Hudson, Londres, 2005, p.7.Texte original : « whith their photographs of water towers and winding towers, blast furnaces, silos and gasometre, Berd and Hilla Becher also set new standards in perceptual aesthetics, presenting heavy industry – something which never had much of public profile and carried largely negative connotations – as an object of art. »

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« Bien que Bernd et Hilla Becher aient travaillé exclusivement la photographie pendant 45 ans […] ce n’est pas parce qu’ils sont principalement intéressés par ce medium. Ils sont passionnés par les objets eux-mêmes peut ne peuvent être précisément et systématiquement préservés qu’au moyen de la photographie. […] L’objectivité de ce rapport signifie s’abstenir d’images suggestives, symbolisme ou métaphore. L’intention des artistes n’est pas de dépeindre des réponses subjectives, mais de décrire le monde extérieur en termes les plus précis possible.»3

« Bien sûr, les Becher ont un style de signature, […]. Mais les tonalités uniformément grises-sur-gris de leur photographies, sans contraste fort ou ombres spectaculaires, ne sont pas fascinantes; leur effet est distant, historicisant, parce qu’il rappel les illustrations des revues professionnelles anciennes […] Et cet entfremdungseffekt [effet d’éloignement], ces sens de l’aliénation, est renforcé par la taxonomie apparemment systématique des présentations, des formats standardisés et des points de vue, arrangés sur la page ou le long des murs des galeries sur des planches de taille identique comme dans un vieux catalogue de musée. »4

3 op.cit.p.7Texte original : « Although Bernd and Hilla Becher have worked exclusively through photography for 45 years […] this is not because they are primarily interested in the medium. Their passion is for the object s themeselves, which can precisely and systematically preserved only by means of photography. […] Objectivity in this connection means refraining from suggestive imagery, symbolism or metaphore. The artists’ intention is no to depict subjectives responses but to describe the outside world in the most precise terms possibles. »4 BANHAM Reyner , « The Becher vision », in Water tower, the mit press, Cambridge London, 1988, p.7.Texte original : « Of course, the Becher have a signature style,[…]. But the uniformly gray-on-gray tonalities of their photography, without strong modeling or dramatic shadows, are unglamorous ; there effect is distancing, historicizing, because the recall the illustration in older trade journal. […]And this entfremdungseffekt, this sens of alienation, is reinforced by the seemingly systematic taxonomie of presentation, the standardized formats and viewpoints, arranged on the page or along the gallery wall in identically sized plates as in an old museum catalog.»

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Perception d’une architecture efficaceJ.N.L. DURAND

« LE PRÉCIS D’ARCHITECTURE »

La perception-surface procède de géométrie et d’axialité. Elle donne à voir des principes simples et efficaces. Elle est ainsi synonyme d’abstraction et de rationalité. Ce type de perception réfère à une construction mentale de l’espace dans l’objectif de produire un effet maitrisé.J.L.N. Durand, rédige en 1819, le Précis des leçons d’architectures données à l’école royale polytechnique. Cet ouvrage a pour objectif de définir les enjeux de l’architecture, ses principes et la manière de la réaliser. L’auteur rédige avec convictions ces leçons, dont les règles sont strictement géométriques et rationnelles. Il cherche constamment à en établir la légitimité.

« - Avis au lecteur sur cette nouvelle édition -

L’accueil favorable que depuis quinze ans le public n’a pas cessé de faire à cet ouvrage ; les suffrages dont l’ont honoré des savants du premier ordre ; succès obtenus en architecture par la plupart des élèves qui ont suivi ces leçons, le désir de répondre au zèle d’une jeunesse intéressant toujours avide de connaissances qui lui seront nécessaires un jour ; celui de mériter par ce moyen la confiance des personnes également distinguées par leur rang et par leur mérite, que l’école Royale Polytechnique à le bonheur d’avoir à sa tête ; tous ces motifs dont un seul aurait suffit, m’ont déterminé à revoir mon travail. »1

1 Durand J.N.L., Précis des leçons d’architectures données à l’école royale polytechnique [reproduction de la 2e ed : Firmin Didot imprimeur du roi, paris 1819], Verlag dr. Alfons uhl, Nòrdlingen, 1985.p.5

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« - Introduction - 

Il ne sera pas difficile de découvrir le but de l‘architecture. D’après ce que nous avons vu plut haut, il est évident qu’elle n’en a d’autre que l’utilité publique et particulière, la conservation, le bonheur des individus, des familles et de la société.[…] Ainsi la convenance et l’économie, voilà les moyens que doit naturellement employer l’architecture. […] D’abord pour qu’un édifice soit convenable, il faut qu’il soit solide, salubre et commode. […]Une superficie étant donnée, si l’on observe que lorsqu’elle est terminée par les quatre cotés d’un carré, elle exige moins de contours que lorsqu’elle l’est par un parallélogramme, et moins encore quand elle est terminée par la circonférence d’un cercle […], il sera aisé de conclure qu’un édifice sera d’autant moins dispendieux qu’il sera plus symétrique, plus régulier et plus simple. […] Tels sont les principes généraux qui, partout et dans tous les temps, quand il a fallu élever des édifices, ont du guider les hommes raisonnables. […] Soit que l’on consulte la raison, soit que l’on examine des monuments, il est évident que plaire n’a jamais pu être le but de l’architecture. […]Ainsi, tout le talent de l’architecte se réduit à résoudre ces deux problèmes : 1° avec une somme donnée faire l’édifice qui soit le plus convenable possible ; 2° les convenances d’un édifice étant données, faire cet édifice avec la moindre dépense qu’il se puisse. »2

« - Troisième section : ensemble des édifices -

En nous occupant de combinaisons primitives, nous avons vu que, d’après les principes généraux de l’architecture, les murs, les colonnes, les portes et les croisées, devaient entre placées sur un axe commun. […]Nous allons donner un exemple de la manière dont on doit fixer ses idées en

2 Durand J.N.L., Précis des leçons d’architectures données à l’école royale polytechnique [reproduction de la 2e ed : Firmin Didot imprimeur du roi, paris 1819], Verlag dr. Alfons uhl, Nòrdlingen, 1985. P.6-21

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architecture, au moyen d’un croquis. Supposons qu’il s’agisse de dessiner un édifice destiné à la réunion des savants. […] Ayant reconnu qu’un tel édifice ne doit comporter qu’une seule masse, […], par un signe quelconque, on fixera le centre de la salle d’assemblée générale quelque part, comme en A. (fig.1re) et l’on tracera à la main les deux axes principaux de l’édifice AA et BB, […] par d’autres signes on indiquera le milieu de la place destinée à chaque classe et au vestibule commun, et l’on tracera les axes de chacune de ces parties. […] Au moyen de nouveaux axes on indiquera la situation de la galerie de communication. (fig.2) […]La disposition générale étant exprimée ainsi par des signes et par des axes, on tracera les différents murs qui doivent enclore l’édifice et le diviser. (fig.3) […] Le croquis étant ainsi parvenu à ce point, l’on examinera si l’édifice sera couvert de plancher ou par des voutes, et quelle espèce de voute on devra préférer. […] On les indiquera dans quelques endroits par des signes, dans d’autres par des espèces de lignes ponctuées. (fig.4) […]Cela étant fait, il n’y aura plus qu’a déterminer les rapports de grandeur qui doivent exister entre les différentes parties de l’édifice ; ce qui sera fait en fixant le nombre d’entre axe de chaque partie, et en le chiffrant sur le croquis ; on additionnera ensuite tous les entre-axes, et avec la somme qui résultera de cette addition, on divisera la quantité de toises ou de mètres que contient le terrain, le quotient fera la largeur des entre-axes.[…]On pourra mettre ce plan au net sans rencontre d’obstacle, les dernières convenances de détail viennent se placer, comme d’elles-mêmes. […] (fig.5) »3

3 Durand J.N.L., Précis des leçons d’architectures données à l’école royale polytechnique [reproduction de la 2e ed : Firmin Didot imprimeur du roi, paris 1819], Verlag dr. Alfons uhl, Nòrdlingen, 1985.p.91-9

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Expérience de la symétrieDONALD JUDD

OBJETS SPÉCIFIQUES

La perception-surface est d’une rigueur géométrique. Elle ne traite pas la variation perceptive par variation formelle, mais plutôt par une expérience répétée et d’une perception similaire. Donald Judd, sculpteur contemporain (1928-1994), propose un art de la perspective et de la mise à l’épreuve d’une vision située. Autrement dit, il pose la géométrie et l’axialité comme principe de base des expériences perceptives qu’il propose. L’ensemble de sont œuvre est un exemple de la variation produite à partir de cette géométrie apparemment monotone.

«Nulle forme ne peut être forme si elle ne possède une signification, une qualité, si elle n’éveille une sensation […]. Il est contradictoire de tenter de créer une forme dépourvue de signification. Il est tout aussi impossible d’exprimer un sentiment sans l’intermédiaire d’une forme. »1

«Sans grandiloquence, avec finesse et autorité [les «  objets spécifiques  » œuvres de Donald Judd] formulent leur identité comme un postulat, un axiome, un théorème, un produit de l’intelligible qui aurait subit l’épreuve du sensible. […] Sans ombre, sans autre espace illusoire que celui d’une perspective choisie selon l’angle qui donne, de l’objet imaginé, la vue la plus claire, tels sont aussi les dessins de Donald Judd. Ils ne tentent pas de dire autre chose que ce qu’ils doivent dire.»2

1 Donald Judd cité dans FRÉMONT Jean, « préface » in JUDD Donald, Ecrits 1963-1990, Daniel Lelong éditeur, Paris, 1991. p.7.2 FRÉMONT Jean, op.cit.

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« Après tout il existe des formes spécifiques et bien définies qui produisent des effets relativement précis.» 3

«La symétrie est la règle générale et l’asymétrie l’exception. Bien sur, un architecte ou un artiste peuvent faire usage des deux ou n’utiliser que l’asymétrie, mais j’ai moi-même, il y a bien longtemps, décidé de ce que je considère comme la condition primordiale  : l’art en ce qui me concerne, et l’architecture, qui nous concerne tous, devraient toujours être symétrique, sauf s’il existe une très bonne raison à ce qu’il ne le soit pas. […]Étant donné que l’asymétrie est l’exception, il faut d’avantage s’interroger à son propos. Souvent et particulièrement aujourd’hui où l’architecture se réduit bien souvent à n’être que zigzags et protubérance, l’asymétrie indique l’absence de but.»4

3 Donald Judd « De quelques objets spécifiques », in JUDD Donald, Ecrits 1963-1990, Daniel Lelong éditeur, Paris, 1991. p.9.4 Donald Judd « De la symétrie », in JUDD Donald, Ecrits 1963-1990, Daniel Lelong éditeur, Paris, 1991. p.165.

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Expérience contrainteJAQUES TATI« PLAYTIME»

La perception-surface, par sa géométrie exacerbée, impose l’axialité comme seul moyen d’appréhender l’espace. Le visiteur est contraint à la linéarité et est amené à se déplacer suivant les lignes dictées par l’architecture.Jacques Tati marqué par la rigueur de l’architecture américaine et par celle de l’architecture moderne en général, s’empare de cette caractéristique. Le début du film Playtime se déroule dans un aéroport où la géométrie est extrême et dans lequel les visiteurs se déplacent en formant des lignes droites et des angles droits.

«Il faut faire la différence entre un film visuel et un film pensé. Playtime est tout le contraire d’un film littéraire. C’est plutôt écrit comme un ballet. C’est écrit en images.»1

« Il n’y a pas d’histoire dans Playtime ? Il y a des types qui sont prisonniers de l’architecture moderne parce que les architectes les ont obligés à circuler de telle façon, toujours en ligne droite.»2

«  Voilà le début du film, j’ai demandé aux acteurs de dabords suivre des lignes  : jamais de ronds ou de demi-ronds, toujours à angles droit dans les bureaux-labyrinthe, dans des cases. C’est l’architecte qui a décidé ainsi et tout le monde suit, tourne, retourne. […]C’est un petit peu comme un ballet, plus le film avance, plus les gens danse, se mettent à faire des courbes, à tourner, à être absolument rond.»3

1 Jacques Tati cité dans FIESCHI Jean-André, NARBONI Jean, Le champ large, Cahiers du cinéma, n°199, mars 1968.2 Jaques Tati, Cahier du cinéma, n°239, septembre 1979.3 Jacques Tati, « Tati’s democraty », Film Comment, mai1973, p.39.

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Dans le chapitre précédent, nous parlions de perception-surface synonyme de représentation et de linéarité. Il s’agit maintenant de s’intéresser à la perception-volume qui se distingue de la précédente en cela qu’elle est de l’ordre de la suggestion. Elle développe une perception multiple synonyme de subjectivité.

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1 . Musée AomoriAomori, Japon, Jun Aoki, 2004.2 . Musée KirchnerDavos, Suisse, Gigon & Guyer, 1992.3 . Ecole PaspelsPaspels, Suisse, Valerio Olgiati, 1999.4 . Ecole VoltaBâle, Suisse, Miller & Maranta, 2000.5 . Weekend HouseGunma, Japon, sanaa, 1998.6 . Musée KanazawaKanazawa, Japon, sanaa, 2004.

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perception-volume

SENSATION

Par perception-volume nous entendons perception d’un espace marqué par la frontalité d’une arrête et limité par des lignes concourantes en deux points de fuite (au moins). Cette perception diagonale ou biaise indique et fait sentir le retournement d’un volume, elle est caractéristique d’un rapport d’angle. Merleau-Ponty explique d’ailleurs dans Phénoménologie de la perception (1945), que «la vision est un acte à deux faces.»2

Au Yale Center for British Art (New Haven, 1953), Louis Kahn communique son projet au travers de photographies qui sont des illustrations directes de la définition de la vision selon Merleau-Ponty. On a une lecture très claire de l’arrête et des deux faces qui constituent l’angle. (fig

2 1)

2 MERLEAU-PONTY Maurice, Phénoménologie de la perception, [1945], Paris, Gallimard, 1981.

Rapport d’angledescription

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(fig2 1)

Yale center for British Art, New Haven, U.S.A., Louis Kahn, 1974.

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Lorsqu’il s’agit de comprendre la disposition irrégulière des édifices de l’acropole d’Athènes, John Pennethorne, un anglais du XIXe siècle, cherche à distinguer des principes de la composition de ce paysage. Il énonce ainsi trois grands principes qu’il cite dans Elements and mathematical principles of the greek architects and artists3 :- Point of sight : on doit regarder les édifices de l’Acropole selon un certain point de vue, qui ne se situe pas nécessairement sur l’axe de symétrie principal,- Road of approach  : les points de vue se situent sur un chemin d’approche qui est un parcours pittoresque qui nous amène à nous approcher des différents édifices,- Angular point of view    : c’est-à-dire le fait que l’édifice soit disposé de telle façon sur le parcours que le spectateur l’appréhende depuis un point de vue d’angle.

Auguste Choisy* affirme dans son Histoire de l’architecture (1899) qu’«une vue d’angle est plus pittoresque, une vue de face plus majestueuse : à chacune son rôle»4. Certains projets semblent particulièrement désireux d’interroger l’intérêt de ce rapport d’angle. Alors, cette perception est magnifiée et interrogée dans sa capacité d’usage. Ce sont ici les déformations occasionnées par la perception-volume qui sont mises en valeur. En effet, à la différence d’un espace frontal et axé, on ne perçoit pas les faces des volumes dans leur description géométrale (rectangles, cercles) mais on perçoit des profils (trapèzes, ellipses). On pourra cependant noter que la vision frontale est aussi présente dans la

3 PENNETHORNE John, Elements and mathematical principles of the greek architects and artists, londres, in LUCAN Jacques, Composition non-composition : architecture et théories, XIXe  –XXe siècles, Press Polytechniques et Universitaires Romandes, Lausanne, 2009. p.355.4 CHOISY Auguste, Histoire de l’architecture, tome 1, Pairs, Vincent Fréal, p 331.

mise en scène

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(fig2 2)

Dessin du Voyage d’Orient, acropole d’Athènes, Le Corbusier, 1960.1. L’acropole vue de l’Odéon d’Hérode Atticus.2. Le Parthénon vu à travers la colonnade des Propylées.

«Le Parthénon apparaît (parce qu’il est hors de l’axe!)»

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perception d’un espace-volume mais elle est prise dans un ensemble de vues liées et continues. La frontalité est une des multiples perceptions d’un même volume.

Dans l’école de Valerio Olgiati (Paspels, Suisse, 1996-1998) et la Week-end House de Sanaa (Usui-gun, Japon, 1998) le rapport d’angle est pris comme un sujet à part entière. Dans ces deux cas, les angles délimitent l’espace sans le fermer, et créent ainsi des tensions entre les différents espace distribués. (fig

2 3)

Le musée Aomori, réalisé par Jun Aoki (Aomori, Japon, 2004) multiplie les rapports d’angles jusqu’à ne présenter que ce type d’interaction entre les éléments qui constituent le musée. L’enjeu de ce lieu est alors pour chacun de ses visiteurs d’établir son propre itinéraire, dans une expérience toujours renouvelée et partielle.

musée Aomori

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(fig2 3)

1. Ecole PaspelsPaspels, Suisse, Valerio Olgiati, 1999.2.Weekend HouseGunma, Japon, Sanaa, 1998.

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Musée AomoriJun AokiAomori, Japon 2004

Le musée Aomori est construit sur le site d’un ancien campement néolithique qui est marqué par les tranchées historiques et les marques des fouilles archéologiques. Jun Aoki reprend cette caractéristique volumique pour l’intérieur du musée et organise alors de grandes tranchées de béton teinté brun qu’il appelle earthen galleries et de pièces blanches les with galleries. Les volumes des salles blanches se détachent en contraste des galeries brunes. L’absence d’axialité dans ce lieu mène le visiteur à percevoir simultanément des faces biaises et frontales, dans des rapports d’angles multiples.

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La perception-volume, par le rapport d’angle, donne à voir deux faces d’un même élément. Cela ne privilégie donc aucun point de vue. Le visiteur est invité à prendre possession de l’espace, à faire un choix quant à son déplacement. «Le système de l’expérience n’est pas déployé devant moi comme si j’étais Dieu, il est vécu par moi d’un certain point de vue, je ne suis pas le spectateur, j’y suis partie, et c’est mon inhérence à un point de vue qui rend possible à la fois la finitude de ma perception et son ouverture au monde total comme horizon de toute perception.»5

Jun Aoki questionne cette indifférence du point de vue par la matérialité. Dans le musé Aomori, les matériaux utilisés sont homogènes, ils ne présentent ni échelle, ni direction, ce sont le béton projeté sombre des earthen galleries ou de la peinture époxy blanche des white galleries (fig

2 4). Ainsi,

Aoki explique : «Je souhaite éliminer tout sens de l’échelle

5 MERLEAU-PONTY Maurice, Phénoménologie de la perception, [1945], paris, Gallimard, [1945] 1981.

perception-volume

COGNITION

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(fig2 4)

1. Musée AomoriAomori, Japon, Jun Aoki, 2004.

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[…]. Pour ceci, j’ai besoin de matériaux hors d’échelle comme l’asphalte ou certaines substances synthétiques.»6

Par cette liberté face à l’objet perçu, la perception-volume est synonyme de suggestion, elle propose. La perception-volume déploie la dimension subjective de l’architecture, le visiteur expérimente autours de ce possible laissé à lui. Dans cette conception de l’espace, la chose et l’idée sont en totale imbrication. A l’inverse d’un rapport cartésien à l’espace, ici «le corps est opérant et actuel, il n’est pas un morceau d’espace mais un entrelacs de vision et de mouvement »7.

L’espace-volume n’est, en réalité, jamais perçu tel qu’il est, il est toujours déformé et incomplet. Il y a une multiplicité de perception d’un même espace selon le point de vue du visiteur qui se déplace. Ce dernier est alors capable de se faire une idée de l’espace en le recomposant à partir de ce qu’il a vu, ce qu’il voit et ce qu’il imagine voir. C’est ce que Merleau-Ponty appelle l’horizon intérieur. «Les objets forment un système où l’un ne peut se montrer sans en cacher d’autres. Plus précisément, l’horizon intérieur d’un objet ne peut devenir objet sans que les objets environnants deviennent horizon.»8 Définition que Rosalind krauss complète dans L’originalité de l’avant-garde et autres mythes modernistes : «L’horizon intérieur d’un objet comme réseau de tous les points de vue possibles dans lequel est pris cet objet.»9

6 AOKI Jun, dans HAGENBERG Roland, 14 japonese architects, Taiwan, Garden City Publisher, 2009.Traduction : «  I want to eliminate the sens of scale. (…) I need non-scale materials like asphalt or certain synthetique substances. »7 MERLEAU-PONTY Maurice, L’oeil et l’esprit, Folio plus, philosophie, Paris, 1964.8 MERLEAU-PONTY Maurice, Phénomènologie de la perception, [1945], Paris, Gallimard, 1981.9 KRAUSS Rosalind, L’originalité de l’avant-garde et autres mythes modernistes, Paris, Macula, 1993, p. 327.

multiplicité perceptive

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perception non globalisante

Jun Aoki parle de définition circulaire. Sans chercher à évaluer une image globale, il décrit la visite de son musée à Aomori comme un processus qui additionne les perceptions successives  : «La chaîne de nos perceptions moment par moment, de telle ou telle surface ne s’additionnent pas avec clarté en une image cohérente et complète de l’architecture.»10

La perception-volume est alors porteuse d’une dimension relative. La relativité est liée au parcours du visiteur, mais aussi à sa continuité. En effet dans ce type de perception passé, présent et futur s’imbriquent en un mouvement commun. La perception est établie à la manière d’une mélodie, on se rappelle ce qui précède et on anticipe ce qui va suivre. Husserl estime que le présent n’est jamais une pure instantanéité, il contient toujours du passé (sous la forme de rétention) et du futur (sous la forme de protention). Lorsque l’on perçoit deux faces d’un volume, les faces arrières (que l’on va voir ou que l’on a déjà vues) sont en puissance. Il y a simultanéité de l’actuel et du virtuel. Cela créé une fluidité spatiale et une continuité.

La perception-volume, par la liberté de choix qu’elle suggère et la multiplicité de perception qu’elle propose, dessine une conception non globalisante de l’espace. Pour le visiteur qui se déplace, au centre du processus perceptif, l’entièreté du bâtiment n’est pas visible d’emblée. La perception diagonale des rapports d’angle créé un espace non visible globalement. La représentation géométrale classique des

10 MAKI Fumihiko, « Archeology and architecture », in BUNTROCK Dana, Materials and meaning in contemporary Japanese architecture, London New York (NY), Routledge, 2010, p. 212.Texte original : « The chain of our perceptions moment-by-moment from this or that surface do not add up into a consistent overall picture of the architecture».

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Médiationréciprocité des

éléments

bâtiments (plan, coupe, élévation) est ici insuffisante pour comprendre l’espace à priori. Il est alors nécessaire de parcourir l’espace pour se faire une idée de l’ensemble.Le musée Aomori développe une succession d’angles décalés ou de galeries coudées. Sa géométrie est complexe, impossible à comprendre de prime abord. C’est par le mouvement et les différentes perceptions qui en découlent que le visiteur se fait une idée de l’espace qu’il parcourt. De cette cumulation de perceptions découle une perception d’ensemble, qui bien que multiple, se synthétise en une atmosphère générale. Pour Aoki, «il serait vide de sens d’extraire un élément et de peser ces mérites ou ses démérites, ou de discuter de sa beauté ou non. Ce qui importe c’est son degré de contribution à créer une atmosphère particulière.»11

La perception-volume donne à voir des éléments qui se font écho. Leurs faces juxtaposées ne montrent pas d’apparente hiérarchie. Aussi, la part de vide qui sépare les différents éléments ne leur semble pas assujettie. L’arrangement entre les volumes est ainsi instauré via un vide tenu et contrôlé. Il y réciprocité entre les éléments considérés comme volume mais aussi entre ces volumes et le vide qui les entoure. A l’Acropole d’Athènes, Auguste Choisy, qui observe les différents rapports entre les bâtiments, parle de «la pondération des masses». Pour lui, l’Acropole est un ensemble d’éléments qui, malgré des tailles et des apparences variées, prennent tous la même importance dans la formation d’un ensemble équilibré. «Dans cette nouvelle acropole les apparentes dissymétries ne sont que le moyen de donner le pittoresque au groupe d’architecture le

11 AOKI Jun, Atmospherics, tokyo, Toto Suppan, 2000, p.12.

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(fig2 5)

1. Musée AomoriAomori, Japon, Jun Aoki, 2004.2. Musée KirchnerDavos, Suisse, Gigon & Guyer, 1992.

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plus savamment pondéré qui fut jamais.»12

C’est cette réciprocité qui suggère au visiteur le choix d’un parcours. Les éléments se qualifient l’un l’autre. Il y a dépassement de la contradiction et absence de conflits entre l’ensemble et les éléments. Dans le musée Aomori, les deux types d’espaces (bruns et blancs) qui constituent le musée sont tous deux lieux d’expositions. (fig

2 5) De plus, Jun Aoki les qualifie tous

deux de galleries, l’un n’emporte pas sur l’autre (ni dans l’usage, ni dans la dénomination), ceci malgré leurs différences apparentes. «Les éléments interagissent les uns avec les autres, créant une atmosphère pour l’ensemble de l’espace, cela signifie que chaque élément est indispensable et simplement aussi important que les autres.»13 Cette conception indifférenciée des deux types d’espace est généralement incomprise. Pourtant, la conception d’Aoki n’est pas plus une critique du cube blanc, qu’une tentative de rendre les cubes blancs plus sensibles que leur extérieur.La réciprocité entre deux éléments se rapproche de la complémentarité formelle de certains dessins de Escher*, à qui Jun Aoki fait très directement référence  : «Comme dans les dessins de M.C. Escher, Je veux créer un atmosphère homogène dans laquelle on ne sait où les choses commencent et où elles terminent.»14

12 CHOISY Auguste, Histoire de l’architecture, tome 1, [1899], Paris, Vincent Fréal, 1964, p. 328.13 AOKI Jun, Atmospherics, tokyo, Toto Suppan, 2000, p.12.Texte original : « They [the elements]  interrelate whith another, creating an atmosphere for an entire space, which means that each element is indispensable and just as important as the other. »14 AOKI Jun, Interview avec Roland Hagenberg, p. 34.Traduction : « Like in M.C Escher drawing, I want to create a homogeneous atmosphere where you don’t know where things start and end. »

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relations topologiques

La perception-volume est faite de protention et rétention simultanées. Aussi, sa compréhension et son expérience sont subjectives, toujours incomplètes et sans cesse renouvelées. C’est une perception qui laisse au visiteur la liberté de placement et le mouvement, sans imposer ni image globalisante, ni image vérité. En ce sens, c’est «un espace sans point de vue, c’est-à-dire sans début ni fin», caractéristiques qui selon Jean Piaget dans son écrit Espaces, définissent un espace topologique. C’est une architecture de relations relatives, topologiques. Le musée Aomori, mais aussi celui de Kanazawa (fig

2 6)

(sanaa, 1983-2004) sont deux exemples de la liberté laissée au visiteur quant à son parcours muséal. Ils proposent ainsi un rapport personnel à l’art. «Les gens peuvent librement sélectionner et explorer leur propre expérience.»15 Peter Eisenmann, pour la construction du mémorial aux Juifs déportés d’Europe, à Berlin aborde aussi cette question de l’individualité, cette fois ci par rapport au recueillement. Ces trois bâtiments revendiquent l’importance de l’individu dont la liberté de choix est une question centrale de l’espace-volume. Dans sa définition de la topologie, Jean Badovici, marqué par la conception de Poincarré, exprime cette idée d’une architecture du rapport subjectif : «On ne peut parler ni de « position absolue, ni de grandeur absolue, ni de distance absolue entre deux points» ; on ne peut parler que de rapports.» 16

La relativité topologique n’est cependant pas synonyme d’absence totale de logique. Dans l’un des premiers Carnets de Charles-Edouard Jeanneret* (1915), on peut lire  :

15 « Sanaa 1983-2004 », El Croquis, n° 77+99+121, 122, p.308.Texte original : « People can freely lesect and explore their own experience. »16 BADOVICI Jean, L’espace et le temps d’après Hanri Poincaré, p.18, in LUCAN Jacques, Composition non-composition : architecture et théories, XIXe –XXe siècles, Press Polytechniques et Universitaires Romandes, Lausanne, 2009, p.398.

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(fig2 6)

1. Musée Kanazawa, Kanazawa, Japon,

sanaa, 20042. Mémorial aux Juifs assassinés d’Europe, Berlin, Allemagne, P.

Eisenman, 2005.

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«L’Acropole est une œuvre d’adaptation, d’appropriation. Est-elle construite sur une idée génératrice ? Se renseigner.»17 Le Corbusier pose ici la question d’une logique possible. Cette remarque est proche des questions de Rolland Barthes* qui, observant l’organisation apparemment illogique de la ville de Tokyo, pose cette possibilité d’un système sous-jacent autre. Le musée Aomori, multipliant les déambulations possibles en une atmosphère commune et non hiérarchisée, présente un lieu qui semble sans logique apparente. En ce sens il s’inscrit dans une tradition japonaise de d’architecture où les pièces juxtaposées entretiennent des rapports de proche en poche, non globaux. La perception-volume montre que le rapport empirique est une logique bien identifiable, même si elle se base sur une conception non rationnelle de l’espace.

17 LUCAN Jacques, Le Corbusier, une encyclopédie, Paris, CNACGP : Centre georges pompidou, 1987, p. 21.

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La perception-volume procède de rapports de médiation qui ne permettent pas a priori de lire l’espace dans son ensemble. Le mouvement est la condition nécessaire pour percevoir l’espace-volume. Il suggère donc une posture dynamique. Le visiteur explore le lien en des mouvements de proche en proche. Dans l’architecture-volume, on perçoit par l’action et le choix individuel subjectif. Le visiteur éprouve et perçoit l’espace avec son corps. La cadence de la visite est celle de sa marche. Michel de Certeau*, dans L’art de faire, l’invention du quotidien, décrit très bien ce phénomène  : «Les jeux de pas sont façonnage d’espaces, ils trament les lieux.»18 C’est un rapport empirique à l’espace, il est situé et relatif à l’individu qui le parcourt.

18 DE CERTEAU Michel, L’art de faire, l’invention du quotidien, volume 1: l’art de faire, (1ère édition: 1979), Gallimard, Paris, 1990.

perception-volume

ACTION

Indéterminationexpérience empirique

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(fig2 7)

1. Carte de Rome et de ses environ, Peutinger, 393.2. Real time Rome, Massachusetts Institute of Technology, 2006.

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Le Corbusier n’a de cesse tout au long de sa carrière de rappeler la nécessité de penser l’architecture en fonction du regard situé, précis et en même temps en mouvement : «L’architecture ne se voit pas d’une fois  : elle se voit en la parcourant, en se tournant. Les hommes ont des yeux devant et non pas autour de la tête et ils ont des yeux à 1,60 mètre au-dessus du sol, et cela est péremptoire pour considérer les œuvres d’architecture.» 19

La perception-volume propose un rapport empirique à l’espace et suggère la capacité de choix. Le déplacement du visiteur consiste alors à dessiner son propre itinéraire, suite d’opérations face à l’indétermination qui lui est proposée. L’espace volume démultiplie la capacité de choix pour démultiplier les itinéraires possibles. « L’espace m’englobe il est autour de moi non devant moi. (…) L’espace est un espace compté à partir de moi comme point zéro de la spatialité. Je ne le vois pas selon son enveloppe extérieure, je le vis de dedans, j’y suis englobé. Après tout le monde n’est pas devant moi, il est autour de moi.»20 Merleau-Ponty distingue un devant moi qui renvoie à une perception cartésienne de l’espace-surface, d’une perception dans un espace-volume au milieu duquel le visiteur est englobé. Jun Aoki est attaché à cette capacité de choix. Il explique qu’elle est particulièrement importante dans les musées aujourd’hui. Pour lui, ces lieux n’ont plus à transmettre une conception hiérarchisée de l’art mais à l’inverse doivent pousser le visiteur à expérimenter son propre rapport à l’art. On peut souligner que le musée dispose de sept

19 Le Corbusier, entretien avec le recteur Robert Mallet (enregistrement sonore), 1951.20 MERLEAU-PONTY Maurice, L’œil et l’esprit, ed. Folio Essai, Paris, 1964, p.42.

itinéraire choisi

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entrées possibles. Le parcours dans l’espace d’exposition n’est donc pas pré-établi et maîtrisé par l’architecte. Pour Michel de Certeau, la carte (par extension le plan lorsqu’il s’agir d’un bâtiment) a le «pouvoir de métamorphoser l’agir en lisibilité, mais elle fait oublier la manière d’être au monde»21 En effet, la carte ne représente ni le temps, ni les choix, ni les étapes. A l’inverse «l’itinéraire est l’art du geste et du récit de pas ». Le dessin de l’itinéraire parcouru est un descriptif d’opérations, c’est la transcription d’une trajectoire subjective. On peut constater qu’un même territoire, comme celui de Rome par exemple, est décrit de manières différentes selon la période ou l’usage que l’on en a. L’itinéraire de Peutinger (393)transcrit l’éloignement et les trajectoires entre différentes communes environant Rome. Le Massachusetts Institute of Technology fait le choix, aujourd’hui, de représenter les déplacements des bus et la densité d’utilisation de telephone portable dans cette même ville. (fig2 7)

Dans un espace-volume, le visiteur se déplace de manière non préméditée dans un rapport de proche en proche. Aussi, il trace à l’épreuve de la marche son propre itinéraire en explorant des rapports non hiérarchiques de médiation. Le déplacement du visiteur est donc de l’ordre la déambulation sans but précis, il va lentement explorer le lieu jusqu’à s’en faire une idée suffisante. L’absence de rigueur géométrique du lieu, et le type de parcours provoqué, fait inévitablement apparaître les thèmes de la promenade architecturale et la figure du flâneur.

21 DE CERTEAU Michel, L’art de faire, l’invention du quotidien, volume 1: l’art de faire, (1ère édition: 1979), Gallimard, Paris, 1990, p. 147.

Flottement continudéambulation

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C’est au sujet de la villa La Roche que Le Corbusier introduit pour la première fois cette expression. Il écrit : «on entre : le spectacle architectural s’offre de suite au regard ; on suit un itinéraire et les perspectives se développent avec une grande variété ; on joue avec l’afflux de la lumière éclairant les murs ou créant des pénombres. Les baies ouvrent des perspectives sur l’extérieur où l’on retrouve l’unité architecturale.»22 Le Corbusier développe ce parti pris de la promenade architecturale dans le pavillon des temps nouveaux (1937) (fig

2 9). Ce lieu laisse libre d’un parcours individuel pour une

compréhension et une réflexion personnelle. Par ailleurs, on peut relever que ces thèmes sont chers à Richard Serra* qui fait de ses sculptures de véritables parcours perceptifs.

La perception-volume produit un déplacement de l’ordre de la flânerie. Ce déplacement est continu et régulier. Il est marqué par le rythme de la marche et le rapport régulier de proximité entre les différents éléments de l’espace perçu.En 1948, Le Corbusier définit la continuité comme l’élément clé d’un espace architectural. Cette unité est autant spatiale que temporelle. «[…] L’architecture est une suite d’évènements visuels, comme une symphonie et une suite d›évènements sonores. Le temps, la durée, la succession, la continuité sont les facteurs constituants de l’architecture.»23 (fig

2 8) Le projet de Rem Koolhaas pour les

deux bibliothèques de Jussieu (Paris, France, 1993) illustre

22 LE CORBUSIER et Pierre JEANNERET, OC 1910-1928, à propose de la villa La Roche (1923-1925). 23 LE CORBUSIER, « Unité », L’Architecture d’aujourd’hui, numéro hors-série « Le Corbusier », avril 1948, p.44, in LUCAN Jacques, Composition non-composition : architecture  et  théories,  XIXe  –XXe  siècles, Press Polytechniques et Universitaires Romandes, Lausanne, 2009, p.396.

continuité

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(fig2 8)

1. Villa Savoye, Poissy, France, Le Corbusier, 1931.2. Bibliothèque de Jussieu (projet), Paris, France, Koolhaas, 1993.

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(fig2 9)

1. Tracé du parcours au Pavillon des temps nouveaux, Exposition Universelle de Paris, Le Corbusier, 1936.2. Ecole Volta, Bâle,

Suisse, Miller & Maranta, 2000.

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cette idée de flottement continu dans un espace-volume. Il l’explicite visuellement en réalisant une maquette à partir d’une seule feuille de papier découpée pour former le plancher continu du projet. «Tous les planchers sont reliés par une seule trajectoire, un boulevard intérieur qui supporte et concentre tous les éléments programmatiques. Le visiteur devient un flâneur baudelairien, inspectant et séduit par un monde de livres et d’informations - par le scénario urbain.»24 La figure du flâneur est réintroduite ici par Rem Koolhaas, en ce qu’il qualifie bien l’attitude du visiteur dans un espace-volume, un flottement permanent. Dans le projet de Jussieu, les planchers se déforment pour être tous liés les uns aux autres et permettre une «expérience continue»25 dans «un paysage vertical intensifié»26.

L’école Volta réalisée par Miller & Maranta (Bâle, Suisse, 2000), exprime elle aussi la continuité par la transparence et les visions diagonales (fig

2 9). La disposition du plan en

quinconce fait apparaître des patios dont les percements généreux montrent la profondeur de l’espace. L’observateur est poussé à se déplacer. L’école Volta est une sorte de réseau perspectif changeant, un espace homogène sans centralité qui montre clairement l’homogénéité et la continuité de l’espace-volume.

24 KOOLHAAS Rem, MAU Bruce, S, M, L, XL, New York, Monacelli Press, 1998, p. 1316-1317 et 1320-1325.Texte original : « all the planes are connected by a single trajectory, a wrapped interior boulevard that exposes and relates all programmatic elements. The visitor becomes a Baudelairean flâneur, inspecting and being seduced by a world of books and information – by the urban scenario. »25 KOOLHAAS Rem, Content, Taschen, Varia, p. 79, 1993.Texte original: « Deforming the floor not in plan but in section potentially turns the seemingly inevitable séparation of different floors into a continuous experience. » 26 KOOLHAAS Rem, MAU Bruce, S, M, L, XL, New York, Monacelli Press, 1998, p. 1316.Texte original : « a vertical intensified landscape »

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(fig2 10)

1. Tracé du parcours dans l’extension

du Musée Rietberg (Projet), Zurich,

Suisse, sanaa, 2002.2. Tracé du parcours dans Musée Aomori

Aomori, Japon, Jun Aoki, 2004.

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Au musée Aomori, la matérialité homogène souligne la régularité et la continuité de l’expérience. Le parcours pourrait presque en devenir ennuyeux. En réalité, son homogénéité est un moyen simple de mettre en valeur l’œuvre exposée.

La perception-volume produit un parcours subjectif et à l’échelle du corps. L’agencement des volumes et de leurs interstices est non hiérarchisé, il produit un espace continu. On peut alors souligner le mode de représentation de ce type de perception.On retrouve le dessin en un geste trait-parcours dans d’autres projets qui s’apparentent à celui du Musée Aomori. (fig

2 10) Par cette représentation commune on voit apparaître

une parenté quant à la manière dont ces projets traitent de perception. Par l’espace-volume ils affirment la continuité.Jun Aoki représente un parcours possible dans le musée en un seul trait. Il représente ainsi un cheminement régulier qui montre la dimension continue de l’espace perçu. Ce dessin s’apparente au tracé du parcours filmé de L’arche russe d’Alexandre Sokourov* (2002). Ce film est réalisé en un seul plan traveling à l’aide d’une caméra portée. On pense aussi à la présentation vidéo en 3D du Rolex Learning Center* de sanaa, réalisé par Wim Wenders et présenté à la biennale de Venise en 2010. Le point de vue de la caméra est celui d’un visiteur parcourant le bâtiment. Cet espace s’affirme comme un paysage continu.Ainsi, le travelling et les plans-séquences, images filmées particulières car sans montage-cut, sont des médiums qui rendent très bien compte de la continuité spatiale et temporelle de la perception-volume. Ils n’opèrent pas de rupture dans le temps.

plan-séquence

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La perception-volume expérimente le rapport d’angle. Par la multitude des perceptions proposées, l’appréhension de l’espace est toujours incomplète. Elle est déclinée par le principe de médiation. L’espace est suggéré à un visiteur qui élabore sa propre image du lieu. La perception-volume présente une logique égo-centrée qui, à la rationalité, oppose la subjectivité.Les différents rapports d’angle ne produisent pas d’ordre hiérarchique ou de polarité. Ainsi le parcours produit par la percetpion-volume est libre et continu.

Le déploiement d’une atmosphère homogène est caractéristique de l’espace-volume. En plan, cela se traduit par le dessin de volumes et de vides disposés par arrangement et disposition. Ce type de projet se rapporte à une définition informelle de l’espace. Ce dernier est «asymétrique et appartient à une discipline moins stricte (comme la composition pittoresque).»

Comparée aux perceptions-surface et perception-évènement, la perception-volume se distingue par l’importance accordée à sa dimension active, autrement dit au déplacement. Le caractère dominant de cette perception est sa capacité à produire un flottement continu et subjectif. Il pourrait être indéfiniment répété ou prolongé, parce que la perception-volume est partielle et individiuelle, elle est non globalisante. C’est ce qui la différencie des deux autres perceptions. En effet, la perception-surface ainsi que la perception-évènement, par leurs principes respectifs d’une représentation unique ou d’un nombre définit d’événements, définissent des limites à l’expérience perceptive. pe

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1 . Musée AomoriAomori, Japon, Jun Aoki, 2004.2 . Musée KirchnerDavos, Suisse, Gigon & Guyer, 1992.3 . Ecole PaspelsPaspels, Suisse, Valerio Olgiati, 1999.4 . Ecole VoltaBâle, Suisse, Miller & Maranta, 2000.5 . Weekend HouseGunma, Japon, sanaa, 1998.6 . Musée KanazawaKanazawa, Japon, sanaa, 2004.

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articles*

Perception pittoresque – Auguste ChoisyPerception d’éléments réciproques – Jun Aoki, M.C. Escher Expérience des pas – Michel de CerteauExpérience du flottement – Wim Wenders, Sanaa ; – Alexandre Sokourov, L’arche russeExpérience empirique – Rolland Barthes, Le CorbusierPerception du parcours – Richard Serra

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Perception pittoresqueAUGUSTE CHOISY

HISTOIRE DE ‘ARCHITECTURE, TOME 1

La perception-volume est faite de rapport d’angle et de vision de biais. D’autre part, les différents éléments forment un ensemble par des interactions régulières et continues.La description faite par Auguste Choisy, de l’Acropole d’Athènes décrit ce type de situation. Choisy explique que le lieu se donne à voir principalement par des vues biaises. Il affirme aussi qu’il y a une pondération entre les différents éléments qui constituent la scène de sorte qu’ils ont tous la même importance perceptive.

Le pittoresque dans l’art grec : partis dissymétriques, pondération des masse.

- Les partis dissymétriques -Les Grecs n’imaginent pas un édifice indépendamment du site qui l’encadre et les édifices qui l’entourent. […]Lorsqu’il s’agit d’un groupe d’édifice, ce respect de l’allure naturelle du sol interdit la symétrie. […]L’architecture se plie à ces sujétions [intervalles que laissent libres les vieux sanctuaires], elle les met à profit  : l’impossibilité des plans symétriques nous a valu des partis pittoresques tels que l’acropole, […].

- Pondération des masses : exemple de l’acropole d’Athènes -L’Acropole se présente comme un rocher isolé de toutes parts et dont la plate-forme est consacrée au culte des dieux nationaux.a. Le tableau des Propylées (fig.4)Rien n’est en apparence plus irrégulier que ce plan  : en fait c’est un ensemble équilibré, ou la symétrie des masses s’associe à la plus originale

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variété des détails. L’aile droite, avec le temple de la Victoire forme une masse qui répond à celle de l’aile gauche : si bien que, pour une spectateur placé au pied de l’escalier, les deux limites AX et AY s’inclinent également sur l’axe général de l’édifice.Si l’architecte a tronqué l’aile droite, ce fut pour respecter l’enceinte de la Victoire aptète et permettre au temple V de se dessiner tout entier sur le ciel. Ce petit temple n’est point orienté parallèlement à l’axe général de la composition : irrégularité nouvelle qui fixe sur lui le regard et lui rend une importante que l’exiguïté de es dimensions semblait lui refuser.

b. Le premier aspect de la plate-forme : la Minerve Promachos.La minerve de Promachos se dresse au premier plan […]. Le Parthénon ne prendra son importance qu’au moment où le visiteur aura perdu de vue cette statue gigantesque.

c. Le Parthénon et ses vues d’angle.Suivant nos idées modernes, le Parthénon, le grand temple de l’Acropole, se placerait en face de la principale entrée : les Grecs entendent les choses autrement.Ainsi posé, le Parthénon s’aperçoit obliquement […]. Une vue d’angle est pittoresque, une vue de face est majestueuse : à chacun son rôle ; la vue d’angle est la règle, la vue de face est l’exception toujours motivée. […]C’est de bais que se montre le temple de Mineve Ergané H lorsqu’on pénètre en E dans son enceinte. […]Parvenus en C, nous sommes trop près du Parthénon pour en embrasser les formes ; c’est à ce moment que l’Erechtheion devient le motif principal du tableau.Ainsi se sont succédés trois tableaux correspondant à trois points de vue principaux.

d. Premiers aspects de l’ErechtheionContinuons à suivre le sentier vers l’Acropole; vers le point B, le Parthénon est le seul momument qui se place dans le champs de la vue.

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- résumé - le pittoresque et les premières impressions -Chaque motif d’architecture pris à part est symétrique, mais chaque groupe est traité comme un paysage où les masses seules se pondèrent. (…) La symétrie règne dans chacune des parties, l’ensemble est soumis aux seules lois d’équilibre dont le mot pondération contient à la fois l’expression physique et l’image.1

1 Choisy Auguste, Histoire de l’architecture, tome 1 [1899], p. 318-333.

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Perception d’éléments réciproquesM.C. ESCHER

JUN AOKI

L’espace-volume présente un arrangement en un vide tenu, cet emboitement génère une médiation des éléments entre eux. Ces derniers ne s’opposent pas l’un à l’autre dans un rapport hiérarchique, ils se définissent réciproquement.Dans les dessins d’Escher, on ne peut discerner la forme de son fond. Les rapports de contraste laissent d’abord croire à des motifs posés sur un fond. Pourtant un regard plus attentif nous permet rapidement de lire l’ambiguïté de ces dessins. Ce qui nous apparaissait comme un fond peut être considéré comme une forme et vice versa. Il n’y a pas de dualité il y a imbrication.

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« Comme dans un dessin de M.C. Escher, je veux créer des atmosphères homogènes où on ne sait où les choses commencent et où elles se terminent.»1

1 Jun Aoki, dans HAGENBERG Roland, 14 Japanese Architects, Taiwan, Garden City Publishers, 2009, p 34.Trad. :  « Like in a M.C. Escher drawing, I want to create homogeneous atmosphere where you don’t know where things start and end. »

Dessin d’Escher extrait de : LOCHER J.L. , Le monde de M. Escher, Paris, Chêne, 1972.Dessin de Jun Aoki, schéma explicatif du projet d’hôtel OPJ à Okinawa (non réalisé)Extrait de : JA, automne 2007, n°67, p 33.

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Expérience empiriqueROLLAND BARTHES - TOKYO

LE CORBUSIER - LA VILLE MAROCAINE

L’espace-volume s’appréhende par la marche. La déambulation donne à voir l’espace et permet de s’en faire sa propre image. C’est un rapport empirique à l’espace. Il n’y a pas de système global, mais subjectivité de rapport. De prime abord, cet espace semble sans système logique. En réalité, bien qu’irrationnel, le rapport empirique à l’espace est le système sous-jacent Roland Barthes (concernant Tokyo) et Le Corbusier (concernant la ville marocaine) explicitent ce type de rapport à la ville. Ces deux points de vue semblent transposables dans l’espace-volume qui présente un ensemble plus qu’un bâtiment au sens stricte.

En dehors de quelques axes majeurs qui sont nommés, la ville de Tokyo n’est pas organisée avec un système des adresses. «Tokyo nous redit cependant que le rationnel n’est qu’un système parmi d’autres. Pour qu’il y ait maîtrise du réel (en l’occurrence celui des adresses), il suffit qu’il y ait système, ce système fût-il apparemment illogique, inutilement compliqué, curieusement disparate […] » 1

« [Tokyo] ne peut être connue que par une activité de type ethnographique: il faut s’y orienter, non par le livre, l’adresse, mais par la marche, la vue, l’habitude, l’expérience […] »2

1 Roland Barthes, « Sans adresse », in L’empire des signes, Paris,Points, essais, p.51. 2 Roland Barthes, « Sans adresse », in L’empire des signes, Paris, Points, essais, p.55.

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«  [La ville marocaine]s’apprécie à la marche, avec le pied ; c’est en marchant, en se déplaçant que l’on voit se développer les ordonnances de l’architecture […] il s’agit d’une véritable promenade architecturale. C’est un principe contraire à l’architecture baroque qui est conçue sur le papier. »3

3 Le Corbusier, Pierre Jeanneret, Œuvres completes, 1929-1934, Zurich, 1984, p.24

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L’expérience des pas« L’ART DE FAIRE »

MICHEL DE CERTEAU

L’espace-volume est perçu par le déplacement du visiteur et les choix qu’il opère dans ce lieu aux multiples possibles. Le visiteur dessine son propre itinéraire, il découvre l’espace à sa manière.Dans son chapitre «Marche dans la ville», Michel de Certeau fait un parallèle entre parler et marcher. Il montre la dimension subjective et créatrice du déplacement.

« L’art de tourner des phrases a pour équivalent l›art de tourner des parcours.»1

Pour Michel de Certeau, la marche est un acte créatif et sélectif ce n’est pas seulement une suite de pas successifs. « Les pas sont nombre, mais un nombre qui ne fait pas série. Chacune de ces unités est du qualitatif, on ne peut pas les compter. »2

Ainsi, la marche se développe à l’aide de différentes manières de faire. Ces rhétoriques cheminatoires, différents modes de déplacement et de perception, peuvent s’apparenter à des figures de style (métaphore, oxymore, synecdote, assyndète …). «Le style spécifie une structure linguistique qui manifeste sur le plan symbolique la manière d’être au monde fondamentale d’un homme.»3

Michel de Certeau fait une distinction entre lieu et espace en opposant la stabilité au mouvement, et l’expérience à l’ordre pré-établi. «Le lieu est l’ordre selon lesquels les éléments sont distribués, deux choses ne peuvent pas être à la même place, il signifie stabilité. »4

1 1- Michel de Certeau, l’invention du quotidien, volume 1 : l’art de faire, Gallimard, Paris, 1990 p. 1512 2 – op. cit. p. 147.3 3 - op. cit. p. 1524 - op. cit. p. 172

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«L’espace prend en compte les questions de direction, de vitesse et de variable de temps, c’est l’inverse de l’univocité.»«L’espace est un lieu pratiqué, selon Merleau-Ponty, c’est la différence entre espace géométrique et un espace anthropique.»

Ce sont c’est pas qui permettent la constitution de l’espace à partir du lieu, ceci par l’intermédiaire du visiteur.«Les jeux de pas sont façonnage d’espaces, ils trament les lieux.»5

En ce qui concerne la traduction graphique de cette distinction, il discerne la carte de l’itinéraire. L’itinéraire décrit des gestes, c’est un descriptif d’opérations. La carte définit des systèmes à priori.«La carte a le  pouvoir de métamorphoser l’agir en lisibilité, mais elle fait oublier la manière d’être au monde.»6

5 - op. cit. p.1466 - op. cit. p.147

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Perception du parcoursRICHARD SERRA

DES ŒUVRES AU TITRES SIGNIFICATIFS

La perception-volume est synonyme d’absence de hiérarchie. Le choix est donc laissé au visiteur d’explorer son propre rapport au lieu en dessinant un parcours personnel.Le travail de Richard Serra est une constante exploration des questions de perception liée au mouvement. Il réinterroge continuellement les possibilités de parcours et les interactions à des lieux toujours renouvelés. Les titres de certaines de ses ouvres ainsi rassemblées, montrent en filigrane cette préoccupation toujours requestionnée.

«Tout sujet arrêté dans le temps, isolé et immuable, devient pour Richard Serra une image, et une image, par définition […] est toujours l’image de quelque chose, représentation. Pour Serra, le sujet ne se révèle pleinement que dans le cadre d’une expérience qui fait dépendre l’un de l’autre, l’espace et le temps. Car c’est au moment même ou se produit le déplacement [shift] dans la vision que ce dont nous faisons l’expérience visuelle apparait dégagé de toute stase, de toute image.»1

«Le visiteur contournant l’oeuvre comme des murs, découvre au fur et à mesure de sa déambulation à l’intérieur de l’œuvre de nouveaux point de vue […]. Le rapport [de Richard Serra] à la sculpture est à la fois celui d’une perception mobile et sans cesse renouvelée. Redécoupé, redéfini, l’espace initial est radicalement transformé.»2

1 Krauss Rosalind, L’originalité de l’avant-garde et autres mythes modernistes, traduction Jean-Pierre Criqui, ed. Macula, Paris, 1993, p.332.2 Krauss rosalind, Passages in modern sculpture, Cambrige , the mit press, 1977.Photographies extraites de : COOKE Lynne, Richard Serra sculpture Forty Years, MOMA, 2007.

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Catwalk, 2003

Shift,1972

Circuit, 1972

Viewpint, 2006

Walking is mesuring, 2000

Promenade, 2000

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Expérience du flottement«IF BUILDINGS COULD TALK… »

WIM WENDERS, SANAA

La perception-volume d’éléments liés en une atmosphère homogène, suppose un visiteur en mouvement continu. Le déplacement de celui-ci est une dynamique ininterrompue et régulière. C’est une sorte de flottement continu.Le film réalisé par Wim Wenders If buildings could talk …, est composé de longs plans travelling. Il montre le Learning Center (SANAA), comme si le spectateur était visiteur de ce lieu. Ces plans donnent à voir la dimension déambulatoire de ce lieu. Ils affirment une temporalité régulière au rythme de la marche.

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«Les mouvements de l’homme ne sont pas linéaires comme le serait la trajectoire d’un train, mais plutôt courbe dans une trajectoire plus organique. Avec les lignes droites on ne peut que créer des croisements mais avec les courbes on peut créer plus d’interactions diverses.»1

Ryue Nishizawa

1 Texte original : « Human movements are not linear like the way of train travels, but curve in a more organic way. With straight lines we can only create crossroads but with curves we can create more diverse interactions. »Extraits choisis de «If buildings could talk», réalisé par Wim Wenders,vidéo non officielle diffusée sur le net : http://www.youtube.com/watch?v=cYA8Tykc6Bc&noredirect=1

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Expérience du flottementL’ARCHE RUSSE

ALEXANDRE SOKOUROV

La perception-volume suppose un mouvement continu et régulier au visiteur. Cela participe à comprendre l’atmosphère homogène du lieu. C’est une sorte de flottement continu. L’arche russe est un film réalisé par Alexandre Sokourov en un seul plan-séquence. Pendant 96 minutes le réalisateur film un parcours continu et régulier au sein du musée de l’Hermitage de Saint-Pétersbourg. Au final, le film est une promenade cinématographique de 1,5 km dont le scénario est presque secondaire.

Sokourov explique qu’il a souhaité « faire un film d’un seul souffle»1.

Son caméraman, Tilman Büttner raconte « Nous sommes allés à l’Ermitage et il (Sokourov) m’a montré l’itinéraire. Il était si long qu’une journée n’a pas suffi.»2

1 SOKOUROV Alexandre, « In one Breath », L’arche russe, making off du film2 BUTTNER Tilman, ibidem.

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Nous avons vu dans les chapitres précédents que les perception-surface et perception-volume se différencient clairement l’une de l’autre par leur dimension univoque ou subjective, et la liberté de mouvement qu’elles limitent ou développent. La perception-évènement ne se définie pas aussi simplement dans cette opposition mais emprunte au deux perceptions précédentes pour élaborer une perception de l’attraction.

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perception-évènement

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1 . Ambassade des Pays-BasBerlin, Allemagne, Rem Koolhass, 2003.2 . House in ChinaTanggu, Tianjin, Chine, sanaa, 2003.3 . VitraHausWeil, Allemagne, Herzog & de Meuron, 2010.4 . Villa in the ForestChino, Nagano, Japon, sanaa,1994.5 . Théâtre d’AlmereAlamera, Pays-bas, sanaa, 1998.6 . House JSetagaya, Tokyo, Japon, Jun Aoki, 2007.

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Par perception-évènement, nous entendons perception de différentes figures dans un même espace. Ces éléments isolés ne se déterminent pas nécessairement par un point de vue frontal ou angulaire. C’est-à-dire que des éléments (appelés ici figure/événement/surprise) ont clairement plus d’importance que ce qui les entoure. Il y a une prédominance des figures sur un fond. Elles sont isolées et cadrées par une mise en scène de l’espace.

La chapelle Sainte-Marie-des-Anges, réalisée par Mario Botta (Monte Tamaro, Suisse, 1992), est un édifice multiforme. (fig

3 1) En effet elle montre clairement le collage

de différentes figures disparates et discernables en un ensemble pourtant clairement identifié.

perception-évènement

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(fig3 1)

Chapelle Notre Dame-des-Anges, Monte Tamaro, Suisse, Mario Botta, 1995.

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La perception-évènement est une mise en scène particulière de l’espace. Elle met à distance des figures qui sont séparées physiquement les unes des autres. On les perçoit en elles-mêmes de façon isolée, comme des icônes. Les événements se détachent nettement de leur interstice. Le vide entre les figures ne participe pas à la perception de l’espace-évènement, sinon à mettre à distance les évènements les uns des autres pour ménager la surprise. C’est la lecture proposée par Peter Smithson de la ville de Bath en Grande-Bretagne. Il la décrit comme «un éparpillement d’événements»27. Il rédige une leçon de Bath en quatre points, qui décrit, entre autre, l’art de l’aménagement urbain comme la mise en place de dimensions et intervalles entre des évènements. (fig

3 2) Les différentes figures urbaines

de Bath sont clairement identifiées : le Queen square (1730), le Circus (1758) et le Royal Crescent (1769-1774). Elles sont respectivement mises à distance les unes des autres par Gay street (1735) et Brock street (1765).

L’expérience perceptive de la Villa in the Forest de sanaa (Chino, Nagano, Japon, 1992-1994) s’apparente à ce type de perception. Elle met en scène des points de vue cadrés autour d’un espace concentrique. (fig

3 3) Un premier

anneau encercle un disque qui abrite un atelier et un espace d’exposition, éclairé zénithalement. Les vues vers l’extérieur depuis les espaces de vie sont traitées comme des évènements dans la maison. Les ouvertures sont toutes singulières. La forme circulaire exprime l’idée d’une circulation sans fin, rythmée par les percées visuelles sur l’extérieur.

27 SMITHSON Peter, « Bath, walks within the walls », Architectural Design, n°10, 1969, p. 554.Texte original : « It is a squatter of events. »

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(fig3 2)

Plan de la ville de Bath. Erik Lorange.

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L’ambassade des Pays-Bas réalisée par Rem Koolhass (Berlin, Allemagne, 2003), procède de la dissémination de points de vue spectaculaires le long d’un parcours. Ces moments sont appelés Cavités par Koolhaas. Ils sont identifiables en tant qu’éléments singuliers de cette architecture. Le reste du parcours dessert les cavités et est subordonné à la formation de ces effets de surprise.

ambassade des Pays-Bas

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(fig3 3)

Villa in the Forest, Chino, Nagano, Japon, sanaa, 1994.

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Ambassade des Pays-BasRem KoolhaasBerlin, Allemagne2003

Le programme est réparti dans deux bâtiments différents  : un L qui entoure un cube. Le premier abrite les logements des ambassadeurs, le deuxième accueille tous les autres programmes : hall, espace de press, administration, salle de réunion, café. Autant de programmes qui sont traités comme des évènements dans le bâtiment. La hiérarchie entre les évènements (le programme) et le reste de l’espace (espace de circulation) qui les relie est exacerbée par une mise en œuvre de matériaux différents  : l’espace de circulation est recouvert d’aluminuim mat sur le sol, les murs et le plafond, alors que les cavités et les recoins (cavity and recesses), de part et d’autre de l’espace de circulation ont des ambiances variées.

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Dans un espace-évènement, les images des figures sont suffisantes pour rendre compte de l’expérience perceptive de l’espace. Ces images fortes se détachent du reste de l’espace, par leurs caractéristiques formelles ou matérielles. C’est une suite d’images sans relation apparente mais qui fait sens lorsqu’on les juxtapose physiquement. C’est sur ce principe que se basent le story-board* et le script, des représentations visuelles (illustrées) sous forme d’images fortes successives.

Rem Koolhaas ne manque pas de se servir de ce mode de représentation pour communiquer le projet de l’ambassade des Pays-Bas. En effet, sous le plan, il dispose une série d’images qui sont des évènements particuliers dans le bâtiment (comme des cadrages sur des vues extérieures par exemple). Ces photos sont disposées comme sur un story-board de film. Les points de vue de ces photos sont reportés sur le plan et signalés par des cercles. Bernard Tschumi illustre son principe de superposition de programme par des images en série qu’il appelle Transcript. (fig

3 4)

L’espace-évènement est fait de chocs perceptifs. Eisenstein appelle ce type de perception le «shot effect  : l’émergence d’une logique dans la consécution des scènes contrastantes»28. Le contraste est entendu par Eisenstein comme un vecteur structurant et ordonnateur de l’œuvre. Selon lui, ce qui lie les différentes attractions est le contraste.

28 AMALDI Paolo, Espaces, éd de la Villette, Passages, Paris, 2007, pp. 7-8.

script

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(fig3 4)

Bernard Tschumi,The Manhattan transcripts, 1982.

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La perception-évènement résulte d’une ambiguïté entre, la reconnaissance de figures isolées et disparates, et une impression d’unité parfois difficilement explicable. Elle se situe souvent entre différence et répétition.

La perception d’un espace-évènement imprime à l’esprit du spectateur des images fortes. Le psychologue James J. Gibson qualifie la perception comme une succession de vista, c’est-à-dire «ce qui est vu d’ici»29. Les évènements, ou vista pour reprendre le terme de Gibson, sont visibles les uns après les autres, séparément. Pour Gibson, la vista que l’on voit au présent est isolée de la vista précédente et de la suivante par des barrières visuelles. Elles ne sont pas visibles toutes à la fois. « Pour aller d’un endroit à un autre cela implique l’ouverture de la vista suivante et la fermeture de la vista précédente. Et ainsi, pour trouver la voie jusqu’à un endroit caché, on a besoin de voir quelle vista doit être ouverte ensuite, ou qu’est-ce que

29 GIBSON James J., Ecological approach to visual perception, 1979.Texte original : «A vista is what is seen from here (…) »

Collection hétérogène

vista successives

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COGNITION

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cache le but. Une vista mène à une autre dans un ensemble continu de transitions réversibles.»30 Gibson affirme que c’est la constitution d’une collection de vista qui révèle l’invariant, la cohérence de l’ensemble. La perception isolée d’une seule figure n’est pas significative de la perception d’ensemble d’un espace-évènement. C’est la juxtaposition des figures qui par leur collection en font perception.

La perception-évènement donne à voir des figures singulières qui se distinguent les unes des autres. Comme celles-ci sont toutes différentes, elles constituent des points de repère dans l’espace perçu. C’est donc par leur intermédiaire que le visiteur s’oriente dans l’espace. On se perd moins dans un espace-évènement que dans un espace-volume où tous les objets ont la même valeur. Pourtant, le visiteur élabore une vision d’ensemble de cette apparente hétérogénéité par le fait de poser sur cet ensemble, sa propre vision. Cette collection hétérogène d’évènements est homogénéisée par le regard du spectateur. La perception-évènement consiste alors en un équilibre entre variété d’évènement et capacité de synthèse.

La perception-évènement, par le rapport complexe entre singularité et ensemble, pose la question de la limite entre différence et répétition. La perception-évènement, distingue les figures les unes des autres. En effet, le visiteur n’identifie pas la différence entre les figures de manière abstraite. La

30 GIBSON James J., Ecological approach to visual perception, 1979, p. 198.Texte original : « To go from one place to another involves the opening up of the vista ahead and closing in of the vista behind. And thus, to find the way to a hidden place, one needs to see which vista has to be opened up next, or which occluding edge hides the goal. One vista leads to another in a continuous set of reversible transitions »

hétérotopie

distinction

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différence singulière n’est pas abordée pour elle-même. Elle est comprise par une pensée qui observe les figures à travers le filtre de la ressemblance et de l’équivalence. C’est ce sujet que questionne Gilles Deleuze dans son livre Différence et répétition (1968). Il est intéressé par «ces questions de l’accident, de l’événement, de la multiplicité, de la différence»31. Naturellement, lorsque le spectateur se trouve face à un évènement, il l’assimile d’emblée à ce qu’il connaît pour établir des rapprochements ou des différences. Il a tendance à unifier sa perception. Or ce qui anime G. Deleuze, c’est justement l’idée que le visiteur doit se montrer passif face au monde pour activer «la rencontre violente et fortuite de l’étrangeté et de la nouveauté». Le visiteur doit être «plus perméable à l’accidentel, au fluctuant, plus ouvert au surgissement de l’événement dans son irréductibilité à du déjà connu […]»32. C’est cet effet imprévisible que produit et développe la perception-évènement. La House J, réalisée par Jun Aoki, (Setagaya, Tokyo, Japon, 2007), propose un cadre toujours identique confronté à des situations toujours différentes. La repétition de ce même cadre exacerbe la variété des situations produites. (fig

3 5)

La perception-évènement procède de la vision successive d’évènements perceptifs. Les jardins à fabriques, comme celui de Stourhead en Angleterre conçu par Henry Hoare II, en montrent clairement le principe. Les fabriques sont des évènements qui constituent des points clés du parcours.

31 DELEUZE Gilles, Différence et répétition, Paris, Presses Universitaire de France, Epimethee, 2000, p 244.32 DELEUZE Gilles, Différence et répétition, Paris, Presses Universitaire de France, Epimethee, 2000, p 333.

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(fig3 5)

House J, Setagaya, Tokyo, Japon, Jun Aoki, 2007.

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Lorsqu’on aperçoit de loin une fabrique (un kiosque, un pont, un temple, etc.) on est attiré par elle. Une fois arrivés au pied, on en aperçoit une autre au loin et immédiatement une nouvelle attraction nous pousse à continuer notre chemin. Et ainsi de suite. (fig

3 6)

Le Parc de la Villette, réalisé par Bernard Tschumi (1983), peut être considéré comme un jardin à Fabriques ou autrement dit à Folies. L’organisation du jardin résulte d’une superposition programmatique «intensifiant les collisions fécondes entre événement et espace»33. Cette confrontation produit ce que André Breton appelle une étincelle. «C’est du rapprochement en quelque sorte fortuit de deux termes qu’a jailli une lumière particulière, une lumière de l’image, à laquelle nous nous montrons infiniment sensibles. La valeur de l’image dépend de la beauté de l’étincelle obtenue ; elle est par conséquent, fonction de différent de différence de potentiel entre deux conducteurs.»34 La perception-évènement donne à voir différentes figures qui prennent une attention toute particulière au moment précis où elles sont perçues de près. Lorsqu’elles sont perçues de loin, chacune d’entre elle est de même importance secondaire. La prépondérance de chaque évènement est d’ordre local seulement. Cette variation hiérarchique selon le positionnement du visiteur montre le multicentrisme de l’espace-évènement. A l’inverse d’un espace-surface qui rayonne constamment selon le même centre, l’espace-évènement change de centralité au cours de sa perception. Cet espace est relatif à l’individu qui le parcourt.

33 Tschumi Bernard, Praxis : Villes-évènements, Tourcoing-Paris, 1994, p.13.34 Breton André, Manifeste du surréalisme (1924), dans Oeuvres complètes, I, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléïade, 1988, pp.337-338.

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(fig3 6)

1. Parc de la Villette, Paris, France, Bernard Tschumi, 1983.2. Parc Stourhead, Stourton, Engleterre, Henry Hoare II, 1780

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La perception-évènement affirme des éléments contrastés et pose ainsi la question de l’entre-deux. L’indépendance de chaque élément rend leurs interactions fortuites. Cette opposition apparente peut se faire par un rapport au lointain (comme dans les jardins). L’ambassade des Pays-Bas s’inscrit dans cette conception d’une architecture comme paysage, Rem Koolhaas utilise l’espace de circulation comme transition entre les différents événements. La progression du spectateur est marquée par «[…] des évènements fortuits le long du chemin, qui sont comme noués au sein du bloc (bâtiment).»35

Les cartes de Guy Debord, sortes d’ellipses narratives entre différentes situations, mettent en image le rapport lointain entre différents évènements. Il développe alors la théorie de la dérive, à la fin des années 1950. (fig

3 7) «Entre

les divers procédés situationnistes, la dérive se définit comme une technique du passage hâtif à travers des ambiances variées. Le concept de dérive est indissolublement lié à la reconnaissance d’effets de nature psychogéographique, et à l’affirmation d’un comportement ludique-constructif, ce qui l’oppose en tous points aux notions classiques de voyage et de promenade.»36 L’adjectif «hâtif» traduit le rythme même de la déambulation. Celle-ci est moins semblable à un déroulé fluide et souple qu’à un enchaînement de visions et d’ambiances. On ne peut s’empêcher de rapprocher les cartes psychogéographiques réalisées par Guy Debord* du schéma explicatif de sanaa pour le projet du Centre

35 CHASLIN François, HOFER Candela, The Dutch Embassy in Berlin by OMA/Rem Koolhaas, Rotterdam, NAI Publishers, 2004. Texte original : « The superimposition creates chance events along the way, as though knotted within the hollow of the block. »36 DEBORD Guy Ernest, théorie de la dérive, « Les Lèvres nues », n° 9, déc. 1956 et dans l’Internationale Situationniste, n°2, déc. 1958.

mise à distance

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(fig3 7)

1. Centre hitorique de Famenco, Flamenco Jerez, Espagne, sanaa, 2003.2. Discours sur les passions de l’amour, Guy Debord, 1957.

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historique de Flamenco à Jerez. Il y a une correspondance graphique qui montre une préocupation commune de relier des ambiances contrastées.On voit ici la distinction entre la perception de l’espace-volume et celle d’un espace-évènement, en ce que le premier s’appréhende par la promenade alors que le second relève de l’imprévisible et de l’attraction au sens ludique.

La perception-évènement différencie l’entre-deux des évènements eux-même. Certains projets vont jusqu’à le supprimer et proposent donc une juxtaposition franche. Le choc perceptif subit par le visiteur se situe alors dans l’accolement. A cette image, le gratte-ciel du Donwtown Athletic Club décrit par Rem Koolhaas dans New York Délire (1978), empile différents programmes qui n’ont rien à voir les uns avec les autres (golf, piscine, gymnase, restaurant, club de boxe, bar à huîtres). Les étages sont des mondes en soi, isolés. Il n’y a pas de transition. L’ascenseur supprime toute mise en scène spatiale de la transition. (fig

3 8)

Le VitraHaus d’Herzog & de Meuron met en exergue cette situation. L’espace procède d’une transition brutale entre deux pièces. Les architectes conçoivent le bâtiment d’exposition à partir d’une interprétation de la maison-type de la Rhur. Ils obtiennent un volume-type qu’ils empilent, confrontent et enchevêtrent. Cela créé une configuration spatiale complexe. A chaque fois que le visiteur passe d’un volume à un autre, il y a un choc perceptif. «L’intérieur est dessiné comme une sequence spatial avec des transitions surprenantes et des vues sur le paysage.»37 La transition

37 « VitraHaus, musée vitra, Herzog & de Meuron », El croquis, n° 152.Texte original : « The interior is designed as a spatial sequence with surprising 

juxtaposition

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(fig3 8)

Downtown Athletic Club, New York, U.S.A.,1930, dans New York Delire, Rem Koolhaas.

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(fig3 9)

VitraHaus, Weil, Allemagne, Herzog & de

Meuron, 2010.

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(fig3 10)

Villa Hadriana, Tivoli, Italie, 138.

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est brutale, les géométries s’intersectent telles que, sans chercher à se rejoindre. Les interactions qu’Herzog & de Meuron établissent entre les volumes sont fortuites. Elles sont inattendues, comme accidentelles. Le rapport avec l’évènement est bien là. (fig

3 9)

Cette absence de transition est particulièrement manifeste dans la villa Hadriana . Sur une superficie de quelques cent vingt hectares, différentes typologies de bâtiments publics sont juxtaposées (du théâtre à l’hippodrome, en passant par des thermes et des bibliothèques). Les bâtiments semblent disséminés sur le terrain mais toujours en contact. Chaque programme est un évènement, une figure reconnaissable à la forme singulière et pourtant sans transition avec sa voisine. (fig

3 10)

La juxtaposition de deux situations contrastées est le concept de base du projet de la maison en Chine de sanaa (2003). Sur un rez-de-chaussée de 600m2, les architectes disposent quarante pièces qui abritent des fonctions aussi multiples que variées (salon, chambre, bibliothèque, salon de thé, bureau, jardin, cour avec piscine, sauna, salle de théâtre, etc.). (fig

3 11) Cet espace-évènement s’approprie

la perception axiale pour affirmer la juxtaposition. L’ouverture systématique de toutes les pièces les unes sur les autres fait apparaître des liaisons physiques et visuelles entre des situations inattendues. Le plan sans couloir et la grille irrégulière sont alors manifestes de la perception d’un espace-évènement dans la mesure où ils juxtaposent sans intermédiaire, sans distance, des pièces et des fonctions. La perception de ce type d’espace est vécue comme une suite continue d’événements et pourtant une surprise à chaque seuil de pièce.

transitions and views of the landscape. »

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(fig3 11)

1. Théâtre Almere, Almere, Pays-Bas, sanaa, 1998.2. House in China, Tanggu, Tianjin, Chine, sanaa, 2003.

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perception-évènement

ACTION

La capacité d’action du visiteur d’un espace-évènement est limitée à sa réaction par rapport à une attraction produite. La hiérarchie entre les évènements et l’espace de transition, entre eux, suggère une chronologie dans le parcours du spectateur. Celui-ci est amené à percevoir ces figures qui ont un effet attractif sur lui. La dimension préméditée du parcours dans un espace-évènement est une manière d’interpréter les jardins à fabriques, comme celui de Stourhead en Angleterre conçu par Henry Hoare II. Les fabriques sont des évènements qui constituent des points clés du parcours. Leur disposition, qui pourrait paraître totalement aléatoire, est en fait réfléchie de manière à attirer le spectateur où l’on veut. Celui-ci n’a pas réellement le choix du parcours. Il passera forcément par ces étapes, établies par le concepteur du jardin.

Attractionchronologie

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(fig3 12)

Renauvation centre antique de Salerno, Italie, sanaa, 1998.

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Il est possible de voir là une parenté avec le travail du réalisateur, producteur et scénariste, Alfred Hitchcock* (1899-1980). Une de ses principales préoccupations est de trouver le système qui puisse donner une direction précise au spectateur. Il utilise lui-même l’expression de «direction du spectateur» à propos de Psychose. «Il joue au chat et à la souris avec le spectateur, met en place des mécaniques, des leurres, qui conduisent son public où il le désire.»38 Eisenstein* (1898-1948), cinéaste russe, parle aussi de cette volonté de maîtriser l’effet sur le spectateur. «Les films produisent l’effet que je voulais que ça produise».

Dans la perception d’un espace-évènement, le visiteur est en attente, il est suspendu à l’apparition de figures nouvelles dans l’espace. Celles-ci apparaissent brusquement mais sont attendues. Il faut bien distinguer suspense de surprise pure, en ce que dans le premier cas on s’attend à ce qu’une figure apparaisse alors que dans le deuxième on ne s’attend à rien de particulier. L’attraction est donc le moyen par lequel la perception-évènement est dirigée, orchestrée. sanaa emploie ce terme dans sa proposition pour la rénovation du quartier antique de Salerno en Italie en 1998. (fig

3 12) A ce sujet,

elle décrit la nécessité de la marche  : «Walking is fun  : In this old steep city area you just have to walk. In this city-park/park-city, walking becomes a new exciting expérience. […] This system of paths is painted white, with black letters and signs that highlight different points of interest and attractions nearby, like 1  :1 scale map. The

38 TRUFFAUT François, Hitchcock/Truffaut, Gallimard, Paris, 1966.

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(fig3 13)

Ambassade des Pays-Bas, Berlin, Allemagne, Rem Koolhaas, 2003.

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old boring area thus becomes a new public experience.»39  On voit ici la préoccupation de sanaa de redynamiser un centre historique par l’identification d’attractions, de points d’intérêts dans le parcours touristique de la ville de Salerno. La vieille ville qu’elle décrit est en fait une ville où l’ambiance est homogène et continue, une perception proche de celle de l’espace-volume. La volonté des architectes est justement de casser cette vision homogène et ennuyeuse de la ville historique. Cette préoccupation pour l’attraction se manifeste de façon littérale dans le projet pour le centre ville de Flamenco à Jerez en 2003. L’idée est de créer un théâtre sur une place qui prend la forme d’un creux qui a la capacité réelle d’attirer, par effet de gravité. Les architectes décrivent ce lieux comme «un convecteur et un point d’intersection […] gidant le flux des gens qui vont et viennent entre les évènements du centre historique»40. (fig

314)

Avec le mot attraction apparaît toute une dimension ludique liée à la perception de l’espace-évènement. On pense tout de suite à Coney Island, île parc-d’attraction* décrite par Rem Koolhaas dans New York Délire (1978). L’île est par essence une collection d’évènements destinés à attirer les visiteurs. Koolhaas affirme d’ailleurs que «c’est bien le besoin de divertissement qui prédomine  ; la zone centrale de l’île développe son magnétisme propre, attirant sur son territoire toute une gamme d’installations spécialisées, destinées à satisfaire l’ampleur de la demande en divertissements.»41

39 Sanaa, El croquis, n°77, 1983-2004.40 Sanaa, El croquis, n° 77, 1983-2004.texte original : «a convector and a point of intersection […] guiding the flow of people coming and going to various events taking place in the historical center»41 KOOLHAAS Rem, New York Délire, 1978, p 32.

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(fig3 14)

Centre hitorique de Famenco, Flamenco Jerez, Espagne, sanaa, 2003.

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La perception-évènement donne à voir des figues apparemment dissociées qui pourtant nous attirent à elles, de l’une à l’autre. Ce type de perception pousse alors le visiteur à expérimenter ce phénomène d’attraction. La marche permet d’identifier une logique d’ensemble. L’impression générale reste morcelée mais le visiteur est alors capable de faire un travail de synthèse entre toutes ces perceptions. C’est l’idée développée par James J. Gibson dans Ecological approach to visual perception  : «Lorsque les vista auront été mises en ordre par un cheminement exploratoire, […] l’invariant sera révélé. […] Il ne s’agit pas tant d’avoir une vue à vol d’oiseau sur le terrain que d’être partout à la fois.»42 Le mouvement produit par ce type de perception est de l’ordre de la réaction. Le visiteur cède au pouvoir attractif des événements et explore par les pas le parcours ainsi imposé.

Les figures affirmant leur singularité, la liaison entre elles est faite de faux raccords, de montage. La perception-évènement est une sorte de «montage d’attractions», terme proposé par Eisenstein.Le montage est une technique née dans le monde du cinéma, que deux architectes comme Rem Koolhaas ou Bernard Tschumi ne manquent pas de convoquer pour leurs projets. Quinze ans après avoir écrit New York Délire, Rem Koolhaas reconnaît d’ailleurs que son travail d’écriture fait écho à ses débuts dans le cinéma. «La structure du texte est très architecturale. Je parle de blocs en analogie avec New York

42 GIBSON James J., Ecological approach to visual perception, pp. 198-199.Texte original : « when the vistas has been put in order by exploratory locomotion, (...) the invariant will be apprehended. (...) It is not so much having a bird’s-eye view of the terrain as it is being everywhere at once. » 

Parcours irréguliercéder à l’attraction

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même  ; chaque bloc est subdivisé en épisodes qui ont une vraie relation architecturale avec chacun des autres, c’est-à-dire qu’ils coexistent le plus souvent. […] un élément crucial de ce travail - que ce soit d’écriture ou d’architecture – est le montage. En fin de compte, je suis toujours en train d’écrire des scripts, ce que je faisais quand j’avais 20 ans»43. La question du montage est omniprésente dans le travail de Koolhaas. A ce titre, il réaffirme son attachement au monde du cinéma en 2003 : « encore maintenant, je suis intimement persuadé que le travail d’un scénariste et celui d’un architecte sont deux processus fondés sur le montage, sur l’art d’enchaîné des séquences programmatiques, cinématographiques ou spatiales»44. Dans la même idée, Bernard Tschumi affirme que pour lui «l’opération d’architecture n’est rien d’autre qu’un montage. L’architecture n’est rien d’autre qu’une somme de combinaisons»45. Bernard Tschumi cultive un rapport de rivalité avec Rem Koolhaas dans cette recherche des rapports entre cinéma et architecture. Il estime que «l’architecture peut se définir (et donc se dissocier) à travers trois éléments qui sont l’espace (la fabrication des espaces physiques ou matériels), le mouvement (le mouvement des corps dans l’espace) et l’événement»46. Comme «en littérature et au cinéma, les relations entre les cadrages ou entre les séquences peuvent être manipulées par des procédés tels que le retour en arrière, le faux-raccord, le gros plan, le fondu enchaîné»47.

43 KOOLHAAS Rem, « Why i wrote Delirious New York and Other Textual Strategies », Arey, Wrinting in Architecture, n°0, mai-juin 1993.44 « Changement de dimensions », entretien de Jean-François Chevrier avec Rem Koolhaas, 1998, l’Architecture d’aujourd’hui, n °361.45 ORLANDINI Alain, entretien avec Bernard Tschumi, Le parc de la Villette de Bernard Tschumi, Somogy, 2001, p. 100.46 Bernard Tschumi à propos des Manhattan Transcripts, 1979, Tschumi, Une architecture en projet, Le Fresnoy, Centre Georges Pompidou, 1993, p. 36.47 TSCHUMI Bernard, un parc pour le XXe siècle », dans Vaisseaux de pierres-

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La caractéristique du mouvement impliqué par une percepton-évènement reste donc celle de l’irrégularité. En effet, la succession d’évènements et le passage brutal d’une situation à une autre engendre un parcours saccadé, syncopé par ces transitions multiples. Le parcours est rythmé par des accélérations (pour aller vers les attractions) et des ralentissements (du fait d’observer l’attraction). Cependant, le visiteur par son passage fait un travail de synthèse synonyme de continuité. Kevin Lynch* dans The view from the road met en place un système de représentation de la perception syncopée du paysage depuis la voiture. Ces schémas mettent en valeur des points importants dans le paysage autant que le parcours continu qui les traverse. Traduites en terme de rythmes et d’oscillations, Lynch dessine un graphique qui rend compte de l’irrégularité d’un parcours en voiture. Il rend compte de l’ambivalence de l’espace-évènement.(fig

3 14)

Cette même contradiction est exprimée par Gordon Cullen : «le piéton marche à travers la ville à une vitesse uniforme, le décor (scenery) des villes est souvent révélé en une série de secousses ou révélations. Nous appelons cela la vision en série»48. (fig

3 15) Ceci explique pourquoi il cherche a mettre

en relation un dispositif de plan (où figure le tracé) avec une représentation (en perspective) de la perception du passant. Les bâtiments sont pris dans une sorte montage, capturé par un œil mouvant qui est comme une caméra «eye as a movie-camera». Traditionnellement, dans un espace-surface, l’importance est donnée à la représentation perspective. Dans un

Architectures, n°2, 1987, Seyssel, p. 12.48 CULLEN Gordon, The Concise Townscape, éd. Architectural Press, Guildford, (1961) 1971, p.9.

continuité irrégulière

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View from the road, Kevin Lynch, 1964.

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espace-évènement, le monde de la peinture laisse place à celui du cinéma. Giedion défend ce point de vue au sujet des maisons ouvrières du quartier Pessac réalisées par Le Corbusier en 1925  : «des vues fixes ne permettent pas de s’en faire une idée claire. Il faudrait pouvoir accompagner le regard dans ses déplacements  : seule la caméra peut rendre justice à la nouvelle architecture ! Et encore, seulement sous un certain cadrage (…)»49.Rem Koolhaas s’inscrit dans cette réflexion concernant continuité et rupture : «il y a toujours en architecture une volonté de continuité alors que le cinéma est au contraire fondé sur un système de ruptures systématiques et intelligentes. C’est mon affinité avec ce système de la rupture plus qu’avec l’imaginaire de la continuité qui constitue l’essentiel de mon engagement avec le cinéma»50. Son projet de l’ambassade des Pays-Bas est une sorte de compromis entre une trajectoire continue qui zigzague dans le bâtiment zigzag trajectory51 et des séries de cavités discontinues series of cavity52 disposées irrégulièrement le long du parcours. Ces cavités sont très semblables à des décors comme ceux des films d’Hitchcock* qui sont constitués de petites pièces accolées à un espace principal.

49 GIEDION Andres, CLAY Verena, Bauen in Frankreich Eisen Eisenbeton, 1928 ; édition française, Construire en France, construire en fer, construire en béton, La Villette, Paris, 2000, p. 92. 50 « Face à la rupture », entretien entre Rem Koolhaas et François Chaslin, dans Mutations, Barcelone, Bordeaux, Actar’Arc en rêve centre d’architecture, 2000.51 CHASLIN François, The Dutch Embassy in Berlin by OMA/Rem Koolhaas, with a text dy François Chaslin, and photography by Candida Höfe, NAi Publishers, Rotterdam, 2004.52 CHASLIN François, The Dutch Embassy in Berlin by OMA/Rem Koolhaas, with a text dy François Chaslin, and photography by Candida Höfe, NAi Publishers, Rotterdam, 2004.

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Westminster, Gorden Cullen, 1961.

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La perception-évènement met en valeur des figures qui se détachent de leur fond. Chacune présente une caractéristique de l’espace, comme une icône. L’espace multicentré est localement subordonné à ces figures. L’ensemble forme une collection hétérogène. Les relations entre les évènements sont fortuites. Les différentes figures produisent un effet d’attraction sur l’observateur. Ainsi poussant à se déplacer d’une figure à l’autre, la perception-évènement produit une dynamique continue et irrégulière.

Le développé narratif est le principe de composition de l’espace-évènement. Ce principe peut prendre de nombreuses formes, l’objectif est de mettre en place un système cohérent et rigoureux qui produit l’attraction. La dimension formelle de ces espaces reste assez libre. Elle procède indifféremment de rapports frontaux ou bais. L’important est le contraste. «La dimension évènementielle se voit comprise dans la structure même du dispositif architectural  : séquence, sérialité ouverte, narrativité, cinématique, dramaturgique, chorégraphique.»53

Comparée aux perception-surface et perception-volume, la perception-évènement se distingue par l’importance accordée à l’effet visuel. Le caractère dominant est le facteur sensation toujours alimenté et remis en question par les attractions successives. C’est ce qui le différencie des deux premières perceptions. En effet, la première ménage une anticipation unique, allo-centrée, on voit tout de loin avant d’y arriver par le corps. La seconde ne présente aucune centralité donc aucune attraction particulière. Le visiteur est plongé dans une ambiance homogène.

53 DÉRIDA Jacques, « Point de folie - maintenant l’architecture », dans TSCHUMI Bernard, La case Vide, la villette 1985, Londres, 1986, p.6.

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1 . Ambassade des Pays-BasBerlin, Allemagne, Rem Koolhass, 2003.2 . House in ChinaTanggu, Tianjin, Chine, sanaa, 2003.3 . VitraHausWeil, Allemagne, Herzog & de Meuron, 2010.4 . Villa in the ForestChino, Nagano, Japon, sanaa,1994.5 . Théâtre d’AlmereAlamera, Pays-bas, sanaa, 1998.6 . House JSetagaya, Tokyo, Japon, Jun Aoki, 2007.

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articles*

Perceptions successives – le story-board Perception elliptique - Guy DebordExpérience de l’attraction – Rem Koolhaas, New York DélireExpérience de l’attente – HitchcockPerception irrégulière – Kevin Lynch, The view from the roadExpérience du montage – Eisenstein, Le journal de Gloumov

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perceptions successivesLE STORY-BOARD

ALFRED HITCHCOCK

Dans un espace-évènement, les images des figures sont suffisantes pour rendre compte de l’expérience perceptive de l’espace. Ces images fortes se détachent du reste de l’espace par leurs caractéristiques formelles ou matérielles. C’est une suite d’images sans relation apparente mais qui font sens lorsqu’on les juxtapose physiquement.C’est sur ce principe que se base le story-board et le script. Cest une représentation visuelle illustrée sous forme d’images fortes successives. L’espace ou la situation décrite est réduite à une série d’images.

Alfred Hitchcock, dont le cinéma procède de juxtapositions parfois surprenantes, dessine des story-board préablables à son travail de réalisation. Pour le film Les oiseaux, les images présentent une variation brutale. Les points de vue s’entrechoquent sans raccord. Ils montrent sans transition les personnages humains ou oiseaux et les décrivent a des échelles très variables. Par cette juxtaposition, les images produisent un discours narratif fait d’imprévisible.

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perception elliptiqueGUY DEBORD

SITUATIONNISTE, THÉORIE DE LA DERIVE

L’espace-évènement confronte le visiteur à des évènements. Ceux-ci sont perçus les uns après les autres, indépendamment. Ils sont parfois éloignés les uns des autres par une distance, un intervalle, mais ils peuvent aussi être strictement juxtaposés. En 1956, dans Les lèvres nues, Guy Debord propose la théorie de la dérive qu’il définie comme «une technique de passage hâtif à travers des ambiances variées». Il réalise des cartes psychogéographiques qui sont des comptes-rendus de dérive faites dans la ville. Sur ces plans, il identifie des unités d’ambiances. Selon Debord, la psychogéographie cherche à rendre compte des «effets du milieu sur le comportement des individus». Il passe alors de situation en situation sans continuité absolue et produit des ellipses narratives.

Ces dérives seront aussi mises par écrit sous forme de comptes-rendus. En voici un exemple qui relate un relevé d’ambiances urbaines effectué par le moyen de la dérive le mardi 8 mars 1956.

«  Le mardi 8 mars 1956, G.-E. Debord et Gil J. Wolman se rencontrent à 10 h. dans la rue des Jardins-Paul, et partent en direction du nord pour reconnaître les possibilités d’une traversée de Paris à ce niveau. Malgré leurs intentions ils se trouvent rapidement déportés vers l’est et traversent la partie supérieure du XIe arrondissement qui, par son caractère de standardisation

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commerciale pauvre, est un bon exemple du paysage petit-bourgeois repoussant. La seule rencontre plaisante est, au 160 de la rue Oberkampf, le magasin “ Charcuterie-Comestibles A. Breton ”. Parvenus dans le XXe arrondissement Debord et Wolman s’engagent dans une série de passages étroits qui, à travers des terrains vagues et des constructions peu élevées qui ont un grand air d’abandon, joignent la rue de Ménilmontant à la rue des Couronnes. Au nord de la rue des Couronnes, ils accèdent par un escalier à un système de ruelles du même genre, mais déprécié par un fâcheux caractère pittoresque. Leur progression se trouve ensuite infléchie vers le nord-ouest. Ils traversent, entre l’avenue Simon Bolivar et l’avenue Mathurin Moreau, une butte où s’enchevêtrent des rues vides, d’une consternante monotonie de façades (rues Rémy de Gourmont, Edgar Poë, etc.). Peu après, ils en viennent à surgir à l’extrémité du canal Martin, et rencontrent à l’improviste l’admirable rotonde de Claude-Nicolas Ledoux, presque ruinée, laissée dans un incroyable abandon, et dont le charme s’accroît singulièrement du passage, à très proche distance, de la courbe du métro suspendu. On songe ici à l’heureuse prévision du maréchal Toukhachevsky, citée jadis dans “La Révolution Surréaliste”, sur la beauté que gagnerait Versailles quand une usine serait construite entre le château et la pièce d’eau.

En étudiant le terrain, les lettristes croient pouvoir conclure à l’existence d’une importante plaque tournante psychogéographique - la rotonde de Ledoux en occupant le centre - qui peut se définir comme une unité Jaurès-Stalingrad, ouverte sur au moins quatre pentes psychogéographiques notables (canal Martin, boulevard de la Chapelle, rue d’Aubervilliers, canal de l’Ourcq), et probablement davantage. Wolman rappelle à propos de cette notion de plaque tournante le carrefour qu’il désignait à Cannes, en 1952, comme étant “le centre du monde”. Il faut sans doute en rapprocher l’attirance nettement psychogéographique de ces illustrations, pour les livres des très jeunes écoliers, où une intention didactique fait réunir sur une seule image un port, une montagne, un isthme, une forêt, un fleuve, une digue, un cap, un pont, un navire, un archipel. Les images des ports de Claude Lorrain ne sont pas sans parenté avec ce procédé.

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C’est par la belle et tragique rue d’Aubervilliers que Debord et Wolman continuent à marcher vers le nord. Ils y déjeunent au passage. Ayant emprunté le boulevard Macdonald jusqu’au canal Denis, ils suivent la rive droite de ce canal vers le nord, stationnant plus ou moins longuement dans divers bars de mariniers. Immédiatement au nord du pont du Landy, ils passent le canal à une écluse qu’ils connaissent et arrivent à 18 h. 30 dans un bar espagnol couramment nommé par les ouvriers qui le fréquentent “Taverne des Révoltés”, à la pointe la plus occidentale d’Aubervilliers, face au lieudit La Plaine, qui fait partie de la commune de Denis. Ayant repassé l’écluse, ils errent encore un certain temps dans Aubervilliers, qu’ils ont parcouru des dizaines de fois la nuit, mais qu’ils ignorent au jour. L’obscurité venant, ils décident enfin d’arrêter là cette dérive, jugée peu intéressante en elle-même.

Faisant la critique de l’opération, ils constatent qu’une dérive partant du même point doit plutôt prendre la direction nord-nord-ouest ; que le nombre des dérives systématiques de ce genre doit être multiplié, Paris leur étant encore, dans cette optique, en grande partie inconnu  ; que la contradiction que la dérive implique entre le hasard et le choix conscient se reconduit à des niveaux d’équilibre successifs, et que ce développement est illimité. Pour le programme des prochaines dérives Debord propose la liaison directe du centre Jaurès-Stalingrad (ou Centre Ledoux) à la Seine, et l’expérimentation de ses débouchés vers l’ouest. Wolman propose une dérive qui, à partir de la “Taverne des Révoltés”, suivrait le canal vers le nord, jusqu’à Denis et au-delà.»

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expérience de l’attractionNEW YORK DELIRE (1978)

REM KOOLHAAS

L’espace-évènement implique les notions d’attraction et de suspense. On ne peut s’empêcher d’y voir une dimension ludique liée aux parcs d’attractions. Dans son livre New York Délire, Rem Koolhaas consacre un chapitre à Coney Island, île-parc d’attraction. Dans le chapitre cartographie, il décrit le parc de Dreamland et ses 17 attractions.

Les attractions se différencient par contraste1 les unes des autres. Elles ont un impact visuel fort sur le visiteur, ce sont des évènements, des attractions au sens ludique du terme. Il y a «17 attractions selon un plan très Beaux-Arts en fer à cheval, reliés par une plate-forme qui circule d’une attraction à l’autre sans une marche, dénivellation ou articulation»2.

1 Rem Koolhaas, New York Délire, (1978), Parenthèses, traduit de l’anglais par Catherine Collet, 2008, p. 272 Rem Koolhaas, New York Délire, (1978), Parenthèses, traduit de l’anglais par Catherine Collet, 2008, p. 46

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expérience de l’attenteDECORS DE FILMS

HITCHCOCK

La perception de l’espace-évènement est marquée par l’apparition, le surgissement de figures dans l’espace. C’est la distance ménagée ou non entre les évènements qui met le spectateur en attente. C’est ce principe qu’Hitchcock utilise dans ses films pour créer le suspense. Par ailleurs, les plans de ses décors montrent la juxtaposition d’évènements distincts.

On peut interpréter les pièces du décor du film Rebecca comme des événements. Celles-ci sont numérotées alors que le reste de l’espace n’est pas nommé, ni qualifié, il sert d’espace de transition. La mise à distance des pièces (et donc des évènements) est le système qui permet d’attirer le spectateur et de le surprendre. Il y a une ressemblance graphique entre les plans des décors du film Rebecca d’Hitchcock et le déroulé du plan de l’ambassade des Pays-Bas.

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perception irrégulièreTHE VIEW FROM THE ROAD (1964)

DONALD APPLEYARD, KEVIN LYNCH, JOHN RANDOLPH

L’éclatement de l’espace-évènement produit une perception saccadée et syncopée. Les différences de rythme lors d’un déplacement participent de cette irrégularité. C’est l’idée développée par Kevin Lynch dans The view from the road. Il met en place un système de représentation de cette perception syncopée du paysage depuis la voiture.

Kevin Lynch, assez traditionellement dessine les différentes vues qui se présentent à lui lors de déplacement en voiture. Parallèlement il élabore des schémas qui font la synthèse de ces situations..Ces derniers montrent simultanément le nombre d’éléments présents et la manière dont ils appraissent et disparaissent du champs de vision.

«The problem of transition will be faced repeatedly in the highway, as the read moves through areas of different use or form. There are models for this problem in sequential grammar.

(53 A) For exemple, one characteristic may gradually melt into the other, like a movie dissolve:

(53 B) Or the first may disappear before the second builds up :

(53 C) The latter model may be embellished by an alternation of character before the new character is fully established, by use of hints and echoes :

(53 D) The transition may be abrupt and shocking :

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(53 E ) The change may be mediated by a minor connecting link of a different kind, as when the holland tunnel stands between New Jersey and Manhattan :

(53 F) Contrariwise, connections may be maintained by a continuous invariant characteristic or ground : »1

1 LYNCH Kevin, APPELYARD Donald , RANDOLPH John The view from the road, Cambridge, Mass, MIT, 1964. p.18.

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expérience du montageLE JOURNAL DE GLOUMOV (1923)

SERGUEI EISENSTEIN

La perception-évènement soumet le visiteur à des images de figures contrastées. Celui-ci cherche à assembler ses perceptions en une image cohérente. C’est un véritable travail de montage. Serguei Eisenstein est un cinéaste russe de la période soviétique. Il a une grande influence sur le monde du cinéma par ses écrits théoriques et les innovations qu’il apporte à la technique du montage.

S. Eisenstein définit en 1898 le terme montage d’attractions. Selon lui, le montage est un enchaînement incohérent d’actions dont chacune est frap-pante par elle-même. «Le signe stylistique le plus caractéristique de la ciné-matographie – son nerf déterminant – le montage»1.

Dans la même perspective, dans son cours de cinéma donné à Moscou en 1920, Lev Koulechov développe l’idée que le montage rassemble des plans totalement différents sous un principe général de reconnaissance. Et il affirme : «le montage-cut est l’indice de la différence, de la dissociation, à l’intérieur d’un champ régi par un principe général d’identité»2.

1 EISENSTEIN Serguei, « la non-indifférente nature », 1945, dans S. Eiseinstein, Œuvres, Tome 4, Paris, 1978.2 KRAUSS Rosalind, L’originalité de l’avant-garde et autres mythes modernistes, traduction Jean-Pierre Criqui, ed. Macula, Paris, 1993, p.319.

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Le court-métrage, Le journal de Gloumov, est un exemple de montage d’attractions. Il montre les aventures disparates de Gloumov. Il est réalisé par des montages brutaux, de cadrages, de bandes sons en décalage par rapport à l’image. Eisenstein soumet le spectateur à un difficile travail de synthèse à partir d’une succession d’images contrastées. Le film est lui même inséré de manière surprenante au déroulement d’une pièce de théatre appelée Le Sage.

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Par l’élaboration d’une grille déclinant la perception en trois facteurs sensitif, cognitif et actif, nous avons discerné trois types de perceptions.La perception-surface se distingue des autres par l’importance de sa dimension cognitive. L’espace est représentation d’une idée univoque. La perception-volume est caractérisée par la particularité de son action. L’espace amplifie la question du mouvement au sens où il le démultiplie et le laisse libre. La perception-évènement affirme un aspect sensitif voir sensationnel. L’espace se développe dans l’objectif de produire un effet visuel fort.

Une approche phénoménologique permet un autre regard sur l’architecture. Observer un plan c’est se faire une idée a priori de l’espace perçu. Se concentrer sur l’effet perceptif est se laisser surprendre. C’est produire des rapprochements parfois inattendus, dévoilant finalement des familles de projet aux phénomènes communs mais aux plans différents. Une similitude formelle apparente en plan n’est pas nécessairement synonyme de similitude de l’expérience.Pourtant, les plans, parce qu’ils montrent la réalité construite de l’espace, contiennent déjà en eux des sensations, des idées, des pratiques et donc des perceptions.

La démonstration appuyée, voire radicale de ces différences perceptives est un moyen de poser un regard conscient sur des questions de phénoménologie. Certains projets montrent alors un engagement certain vers un type de perception bien identifiable. D’autres adopterons des postures qui sont celle de la variation perceptive et combinent différents types. Enfin, il est aussi intéressant de constater que certains projets échappent à ce classement.

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index des articles

perception-surface p. 52 . Perception d’une image frontale – la perspective . Perception d’une architecture signifiante – Léon Battista Alberti . Perception objective – Bernd & Hilla Becher . Perception d’une architecture efficace – J.L.N Durand . Expérience contrainte – Jacques Tati, Play time . Expérience de la symétrie – Donald Judd perception-volume p. 108 . Perception pittoresque – Auguste Choisy . Perception d’éléments réciproques – Jun Aoki, M.C. Escher . Expérience des pas – Michel de Certeau . Expérience du flottement – Wim Wenders, Sanaa ; Alexandre Sokourov, L’arche russe . Expérience empirique – Rolland Barthes, Le Corbusier . Perception du parcours – Richard Serra

perception-évènement p. 170 . Perceptions successives – le story-board . Perception elliptique - Guy Debord . Expérience de l’attraction – Rem Koolhaas, New York Délire . Expérience de l’attente – Hitchcock . Perception irrégulière – Kevin Lynch, The view from the road . Expérience du montage – Eisenstein, Le journal de GloumovEcole

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Paul Cox, A Sentimental Journey I, 2000, sérigraphie sur aluminium

COXCODEX 1, seuil, 2003 p. 121.

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