Rapport E-Leadership

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INTERVIEW

RAPPORT DE L’OBSERVATOIRE PASC@LINE

« QUELS BESOINS DE COMPETENCES

POUR LES E-LEADERS DE DEMAIN ? »

© Association Pas@line 25 mars 2014

Remerciements aux contributeurs de ce rapport :

La commission Européenne pour ses travaux « e-skills »

Le Syntec Numérique pour l’implication des ESN sur le sujet

Le CIGREF pour ses travaux sur la culture numérique en entreprise

La Fondation Mines-Télécoms pour ses travaux sur les business models du numérique

L’Insead pour ses travaux sur l’e-leadership

également à

Andrès HOYOS-GOMEZ Principal chez McKinsey,

Jean-Baptiste RUDELLE Président fondateur de Criteo

Tariq KRIM, Télécom ParisTech, fondateur de NetVibes

Frédéric BRUEL Ingénieur ENSEEIHT, serial entrepreneur

Mickael KERFANT, de l'école des Mines de Nantes, CEO fondateur la société JYMEO

Qui ont acceptés d’être interviewé sur le sujet

et aux contributeurs de l’Observatoire Pasc@line

Écoles d’ingénieurs et Entreprises qui ont œuvrés sur cette étude pendant 2 ans :

Anne-Sophie BOISARD (CIGREF), Pierre BAYLET (Institut MinesTélécoms), Stella BISSESUR

(Pasc@line), Noël BOUFFARD (Sopra), Alain BRAVO (Académie des Technologies), Pascal BROUAYE

(Pôle Universitaire Léonard de Vinci), Christian COLMANT (Pasc@line), Renaud CORNU EYMIEUX

(EMSI), Gilbert DEUNF (ITIN), Claude GUEDAT (Insa-Lyon) Frédéric LAU (CIGREF), Frédéric MEUNIER

(EFREI), Tristan MONROE (Metanex), Jean-Marie PINON (INSA Lyon), Christine SANCHIS (Oracle) et

Luc VANDENBOOMGARDE (ADP)

Yves POILANE

Directeur de Télécom ParisTech

Président de Pasc@line

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INTERVIEW L’association Pasc@line a été crée en 2006 afin de développer l’attractivité des

formations et des métiers du numérique auprès des jeunes générations, filles et

garçons pour faire face au déficit de talents dans ce secteur. Aujourd’hui Pasc@line

rassemble 1.200 entreprises à travers deux syndicats professionnels (Syntec

Numérique et CICF Informatique) et 75 établissements d’enseignement supérieur.

Pasc@line a quatre objectifs :

Assurer la promotion des formations et des métiers du numérique auprès des

jeunes générations susceptibles de rejoindre les filières de formations supérieures qui

y préparent.

Réunir les conditions d’un échange et d’une coopération entre les milieux des

établissements de formation et ceux des grands secteurs employeurs du numérique.

Établir, avec les acteurs institutionnels, les contacts et relations susceptibles de

favoriser et de faire progresser les idées et les actions de Pasc@line.

Mener des réflexions prospectives tant qualitatives que quantitatives et en tirer

des actions possibles allant dans le sens de l’intérêt des étudiants et des

professionnels.

Sites et référence : Site de référence Pasc@line: www.assopascaline.fr Chaîne YouTube des publications Pas@line: www.youtube.com/user/AssoPascaline Page Facebook Pasc@line: www.facebook.com/AssociationPascaline Groupe privé Linkedin: http://www.linkedin.com/groups?gid=5072489&trk=hb_side_g Twitter : @AssoPascaline Formations et métiers du numérique: www.passinformatique.com/ Femmes du numérique: www.femmesdunumerique.com/ Mail : [email protected] Association Pasc@line (Loi 1901) 3 rue Léon Bonnat 75016 Paris SIRET : 492 345 657 00018 – APE 913E 06 62 10 04 04 www.assopascaline.fr

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INTERVIEW « L’entreprise, quelle qu’elle soit, n’a plus le choix du numérique ! Elle n’a d’ailleurs

même plus le temps de se poser la question. Tôt ou tard, l’ensemble de ses

fonctions, son organisation elle-même, son management et les ressources humaines

dont elle a besoin seront impactés par ces transformations » selon Jean-Pierre

Prioux (le choc du numérique).

Aucune entreprise ne peut imaginer réussir, dans aucun secteur d'activité, si elle

persiste à voir le numérique seulement comme un outil, car le développement et la

diffusion généralisée du numérique et de ses usages dans l’ensemble de l’activité

économique, industrielle et domestique ont un impact considérable sur le

fonctionnement des entreprises ; l’émergence d’une culture numérique dans la sphère

de l’entreprise modifie les comportements, les manières de faire, les attitudes. Elle

crée de nouveaux usages et de nouveaux besoins qui nécessitent une adaptation des

compétences et des métiers existants et entraîne l’émergence de nouvelles fonctions.

Aussi, l’entreprise doit s’organiser pour répondre aux nouveaux challenges d’un

monde numérique.

En effet, l’organisation d’entreprise de type industriel par les process est vouée à

disparaître au profit du travail collaboratif au service des usages et des marchés. La

transformation numérique des entreprises est devant nous.

Dans ce cadre, les experts des sciences de gestion considèrent que le numérique

impacte profondément les entreprises dans leur ensemble et notamment sur les deux

champs principaux que sont la relation client, l’organisation et le management.

Les ressources humaines sont l’un des piliers indispensables à cette transformation

numérique (cf. les challenges de la transformation numérique pour les RH de

l’entreprise, étude CIGREF 2013) et par là du rôle qu’auront à jouer les ingénieurs et

les managers dans le futur.

Au-delà de la maîtrise des technologies numériques, les diplômés de nos écoles

devront donc disposer de compétences nouvelles leur permettant d’exploiter les

possibilités offertes par le numérique en matière d’évolutions des métiers, de

transformation des méthodes de management, de création de valeur via des services

innovants répondant à de nouveaux usages et d’ouvertures de nouveaux marchés.

Ces compétences peuvent être regroupées sous l’expression e-leadership.

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INTERVIEW OBJECTIFS ET FINALITÉS

Le groupe de travail de l’Observatoire Pasc@line a lancé une réflexion sur l’e-

leadership considérant que les compétences associées devaient faire partie du métier

/ bagage de l’ingénieur afin qu’il puisse agir sur tous les leviers de l’économie

numérique.

Cette synthèse vise à identifier les compétences que devront développer les e-

leaders afin qu’ils puissent avoir un impact sur toutes les dimensions de

l’économie réelle et du fonctionnement des entreprises, à partir de la maîtrise

des technologies, socle traditionnel de la formation de l’ingénieur et

particulièrement les technologies numériques

Plus précisément, les travaux menés ont eu pour objectifs :

de stabiliser une définition du e-leadership que les membres (établissements

et entreprises) s’approprient,

d’identifier en quoi le numérique était un levier pour le « leader » en

entreprise, dans une approche multidimensionnelle, détaillée ci-dessous,

d’évaluer la prise en compte actuelle de cette approche dans les formations

initiales et continues des établissements membres de Pasc@line,

de proposer, voire faire développer par les membres, des formations ou

briques de formation permettant de mieux préparer nos diplômés à l’exercice

du e-leadership.

Méthode de travail

Les travaux ont été réalisés, en 2013, par un groupe mixte de dirigeants

d’écoles et d’entreprises membres de Pasc@line. L’Observatoire Pasc@line

a associé à ses réflexions les études faites par la Conseil National du

Numérique, l’Observatoire du Numérique, le CIGREF, l’Institut Montaigne, la

Commission Européenne. Les membres du groupe de travail ont rencontré

des e-leaders reconnus, échangé avec les institutions, pour ce qui relève de

la compétitivité du secteur du numérique en France et réalisé quelques fiches

de lecture.

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INTERVIEW DÉFINITION DU E-LEADERSHIP

La définition suivante du e-leadership a été retenue pour son caractère générique et

multidimensionnel :

« Capacités techniques méthodologiques et humaines nécessaires pour

exploiter les opportunités liées à internet et aux technologies de l'information,

dans un contexte de pilotage d'équipes multiculturelles et mondialisées :

1. en optimisant l'efficacité des organisations et des processus,

2. en explorant les nouvelles possibilités de chaîne de valeur,

3. en identifiant de nouveaux « business ».

Cette définition est la traduction (adaptée en français et actualisée), de celle retenue

par la Commission Européenne (réf : E-SKILLS FOR EUROPE: TOWARDS 2010 AND

BEYOND, THE EUROPEAN E-SKILLS FORUM, SYNTHESIS REPORT, September

2004 : "the capabilities needed to exploit opportunities provided by ICT, notably the

Internet, to ensure more efficient and effective performance of different types of

organisations, to explore possibilities for new ways of conducting business and

organisational processes, and to establish new businesses.”)

DIMENSIONS IDENTIFIÉES

Il est apparu nécessaire de décrire les diverses modalités selon lesquelles le

numérique est un levier de croissance, de mutation et de compétitivité dans

l’entreprise.

Quatre dimensions distinctes mais complémentaires, impactées par le

développement du numérique, ont été identifiées :

Dimension « Métiers » :

Comment les grandes fonctions de toute entreprise sont-elles révolutionnées

par le numérique ? En quoi la compréhension de ces mécanismes peut-elle

asseoir un leadership ?

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INTERVIEW Dimension « Usages et Marchés » :

Comment le numérique transforme les comportements, crée de nouveaux

besoins et ouvre de nouveaux marchés?

Dimension « Management »

Dans un contexte international et multiculturel d’innovation permanente,

comment évolue le management des ressources humaines et des

compétences ?

Dimension : « Technologies impactantes » (qui sous-tend les trois

premières) :

Quelles sont les technologies qui portent la transformation numérique des

entreprises et dont la maîtrise peut s’avérer un facteur de leadership ?

Ces quatre dimensions s’articulent selon le schéma ci-dessous.

Les compétences attendues du e-leader s’exercent dans ces quatre dimensions

qui font l’objet de mutations majeures

e-leadership

Technologies du numérique

MétiersUsages

etMarchés

Management

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INTERVIEW LES BESOINS DE COMPÉTENCES ET LES FORMATIONS NÉCESSAIRES

L’acquisition de ces compétences passe par des formations spécifiquement orientées

dans cette perspective.

Il y a très peu de formations existantes faisant référence au e-leadership. Si elles le

font, c’est le plus souvent de manière parcellaire, dispersée ou indirecte sans prendre

en compte ces quatre dimensions.

La synthèse des interviews réalisées et des études analysées a permis d’identifier des

besoins spécifiques en compétences nouvelles pour lesquelles il est nécessaire de

proposer des formations spécifiques, initiales ou continues

Ce rapport peut constituer un cahier des charges pour permettre aux écoles de

construire une offre de formations spécifiquement orientées vers des e-

programmes pour e-leaders

______________________________

SOMMAIRE

LA DIMENSION « METIERS »

LA DIMENSION « USAGES ET MARCHES »

LA DIMENSION « MANAGEMENT »

LA DIMENSION « TECHNOLOGIES IMPACTANTES »

BESOINS IDENTIFIES ET COMPETENCES ATTENDUES

ORIENTATIONS POUR UNE OFFRE DE FORMATIONS

ANNEXES : notes de lecture, portraits de e-leaders

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INTERVIEW

LA DIMENSION « MÉTIERS »

À partir d’interviews d’enseignants-chercheurs des sciences économiques, de gestion

et sociales de Télécom École de Management, Telecom ParisTech et de Mines

ParisTech, nous nous sommes attachés à identifier en quoi le numérique a des effets

de leviers majeurs dans les grandes fonctions de l’entreprise, dans le passé récent et

pour l’avenir. Nous avons interviewé quelques e-leaders et signalé quelques ouvrages

de référence traitant de ces impacts, spécifiquement à certaines de ces fonctions.

Il apparaît que le développement du numérique impacte, à des degrés divers, la

plupart des fonctions de l’entreprise :

Recherche et Innovation

Marketing, vente et relation client

Finances

Ressources Humaines

Production, Logistique

Juridique

LES FONCTIONS RECHERCHE ET INNOVATION

Le fonctionnement des activités de recherche et développement ont été profondément

bouleversées par le numérique :

- la simulation et la virtualisation en phase de développement, qui abaissent les coûts

de la R & D, réduisent le « time to market » et facilitent très sensiblement le travail

collaboratif intra-entreprise et inter-entreprise,

- les intégrations de briques numériques dans les produits et services qui accroissent

de manière considérable et non déterministe leurs fonctionnalités et bénéfices,

- les modalités d’écoute du marché et de création d’innovation par les utilisateurs eux-

mêmes, dans le cadre de ce qu’on appelle le « crowdsourcing » qui consistent à

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INTERVIEW utiliser la créativité, l’intelligence et le savoir-faire d’un grand nombre d’internautes, et

ce, au moindre coût. Wikipédia, dont la présente définition est tirée, en est le plus

parfait exemple,

- les modalités de coopération entre entreprises dans la conduite de projets de

recherche collaboratifs, grâce à des outils numériques de travail également

collaboratif,

- les modalités de valorisation de la propriété intellectuelle grâce à la plus grande

visibilité et accessibilité des portefeuilles de brevets et la possibilité d’améliorer la

qualité de la place de marché de l’innovation (« market for technologies »),

- la nécessité pour les entreprises de développer des compétences d’intelligence

économique.

Pour en savoir plus :

Ouvrage de Thierry Isckia « Understanding Business Ecosystems »

LES FONCTIONS MARKETING, VENTES ET LA RELATION CLIENT

C’est probablement dans les fonctions marketing, ventes et plus globalement dans la

relation client que les ruptures liées à l’utilisation des outils numériques sont les plus

significatives :

Le développement du commerce en ligne qui impose de revoir toute la

stratégie de distribution multicanal et le positionnement des réseaux de

boutiques et/ou de distribution indirecte,

Les plates-formes de comparaison des prix, qui mettent la pression prix sur

les fournisseurs et imposent des stratégies de différenciation qualitative et

des politiques de marques puissantes,

Les développements du web 2.0 et des réseaux sociaux, qui donnent du

pouvoir aux consommateurs au travers de leurs avis sur les fournisseurs (e-

réputation des marques),

Les outils du nomadisme avec les smartphones pour les clients qui donnent

accès à l’information commerciale et l’achat en nomadisme et les

smartphones et tablettes pour les vendeurs nomades ou debout, qui

permettent l’accès direct au SI commercial et à la prise de commande,

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INTERVIEW Les possibilités d’identification de l’utilisateur, de mémorisation de son profil,

de géolocalisation… qui permettent d’offrir des services personnalisés dans le

temps et dans l’espace,

Les outils de traitement, de visualisation et d’exploitation des grands volumes

de données générées par les prospects et clients, les informations qu’ils

saisissent volontairement sur le net ainsi que les traces qu’ils laissent

(involontairement) dans le monde numérique (« big data for marketing»). On

peut dire que le « big data » est l’arme des entreprises face à un client

toujours mieux informé grâce à Internet.

Mais l’évolution de la relation client ne va plus loin que la « simple » intégration des

technologies de l’information et de la communication dans chaque fonction de

l’entreprise en vue d’en améliorer la performance (approche historique des systèmes

d’information).

Il faut passer à une autre logique, à une nouvelle dynamique dans laquelle le

numérique doit être exploité comme révolutionnant totalement tant les besoins du

client, ses habitudes d’achat et de consommation, que sa relation au monde

marchand, révolution dont l’ingénierie de toutes fonctions de l’entreprise va découler.

Usage et proposition de valeur d’usage deviennent les mots-clés de toute stratégie

d’entreprise dans un monde numérique. La collecte, la gestion, la circulation et le

traitement de l’information/des informations, deviennent stratégiques. Cette dynamique

est portée tant par la diffusion de la « société numérique » (informatique pervasive et

outils numériques - téléphones portables, réseaux sociaux…) que par la sensibilisation

croissante de celle-ci aux enjeux du développement durable.

Les développements du net et des réseaux sociaux ont amené les clients de produits

à y témoigner de leur expérience d’usage de ceux-ci. Cette dynamique sociétale a

conduit les entreprises à chercher à maîtriser et enrichir ces expériences d’usage très

largement relatées par leurs clients, déplaçant peu à peu le cœur du business de la

vente d’un produit à la création d’une intelligence numérique : le produit s’estompe ou

n’est plus qu’un « accessoire » du service numérique devenant source de valeur

ajoutée.

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INTERVIEW

Pour en savoir plus :

Alain Goudey, Gael Bonnin (www.marketingpouringenieurs.com et ouvrage 2010 « marketing

pour ingénieurs » : cf note de lecture)

André Fady, Valérie Renaudin, Dany Vyt, « Du category management au e-merchandising »

LA FONCTION FINANCES

La fonction finances au même titre que les autres fonctions de l’entreprise est

impactée par la révolution numérique. Elle doit entreprendre sa mutation, si elle veut

accompagner l’entreprise dans ce véritable challenge numérique.

Dans cette révolution industrielle numérique, trois phénomènes principaux modifient en

profondeur le monde de la finance et la fonction dans l’entreprise, phénomènes qui

font émerger la notion d’e-finance :

- L’accélération

- La masse d’informations

- La transnationalisation : la fin des frontières

La rapidité, la croissance des débits, les autoroutes de l’information, apportent une

masse considérable de données, un véritable « raz-de-marée » informationnel qui

inonde l’entreprise y compris ses propres services financiers.

L’accélération des échanges d’information transforme les bourses mondiales, le «

trading » mais aussi le rôle du directeur financier qui peut accéder encore plus

rapidement aux indicateurs de contrôle mis en place dans les services, Business Unit,

filiales, entités étrangères… avec possibilité de consolidations et d’agrégations

pratiquement instantanées. Ainsi, une société familiale en Suisse, passe actuellement,

d’une budgétisation annuelle à trimestrielle avec l’objectif d’atteindre un budget tous

les mois. Cela implique une refonte totale des façons de penser, accélère les prises de

décisions, nécessite des ajustements rapides. Cette agilité demandée par

l’instantanéité doit être acquise par l’entreprise dans son ensemble et faire partie

entière de son évolution culturelle.

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INTERVIEW Les traders depuis plusieurs décennies avaient déjà été impactés ; aujourd’hui il s’agit

du comptable, du gestionnaire qui doivent développer ces compétences d’analyse,

faire appel à des algorithmes complexes pour extraire de cette masse d’informations,

les données pertinentes.

La e-finance doit développer sa réactivité, son attention et la gestion de ses risques

(compliance) tout en gardant présent ce qui en a fait sa force, sa capacité d’analyse.

Cette instantanéité et cette vague d’information sont renforcées par la réduction de

l’espace. Cela impacte directement la fonction financière en lui donnant un champ

d’investigation beaucoup plus large, une intégration encore plus grande des

contraintes internationales (devises, taux de change, taux d’intérêt…) mais aussi

encore plus de contrôle.

Une étude d’Accenture réalisée à l’occasion de la 13e édition des Journées Solutions

Bancaires (JSB) à Genève, indique que s’il y a cinq ans, moins de 5% des clients

étaient prêts à changer de banque, ils sont dorénavant un sur trois à l’envisager si on

leur offre des opportunités et des innovations techniques intéressantes.

LES FONCTIONS DE PRODUCTION ET DE LOGISTIQUE

Le numérique s’est fortement développé dans les unités de production avec les

machines à commande numérique d’abord pour les grandes séries, puis lorsqu’elles

ont été suffisamment versatiles pour permettre l’adaptation de la fabrication aux

évolutions des biens à produire, dans leur variabilité au sein d’une même série, ou

dans leurs évolutions au fil du temps.

Ces unités de production sont aujourd’hui connectées directement à l’ensemble des

activités de l’entreprise numérique, ce qui introduit une bien meilleure réactivité de la

production, mais aussi et surtout lorsqu’elle est connectée à l’extérieur, de nouvelles

vulnérabilités (virus Stuxnet fin 2010 s’attaquant à des robots Siemens). Par ailleurs, le

numérique modifie les relations donneur d’ordre/sous-traitant, facilite la réalisation et la

production de service en off-shore.

S’agissant de la logistique, les flottes de véhicules sont désormais géolocalisées et

communicantes chez tous les grands transporteurs.

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INTERVIEW

Perspectives :

On peut attendre, de la captation et centralisation des millions de données collectées

chaque jour, une exploitation de type « big data » pour en tirer des enseignements sur

le lien entre le process de production, la conformité du bien en sortie de process et sa

fiabilité au fil du temps.

La grande révolution des années à venir dans la logistique pourrait être ce que l’on

appelle « l’internet physique », c’est-à-dire l’utilisation des principes de base du réseau

internet pour la gestion des flux de marchandises. La logistique pourrait ainsi passer

d’une multitude de systèmes propriétaires qui cohabitent et n’empruntent comme

infrastructures communes que les voies de communication, les plates-formes

modales/multimodales (des hubs), et le conteneur comme unité de base, à un système

beaucoup plus ouvert et banalisé, avec ses « blocs » (des boîtes de petite taille), ses

tables de routage, etc.

Pour ce qui est de la production proprement dite, l’impression 3D fait l’objet d’une forte

médiatisation en ce moment, mais il est un peu tôt pour savoir quelle sera l’étendue

réelle de son application et, donc son « potentiel révolutionnaire » (voir le chapitre «

Technologies impactantes »).

Par ailleurs, le vieillissement de la population dans les pays développés amènera à

faire évoluer l’ergonomie des postes de travail en unités de production, qui conduira

inévitablement à une extension du champ de la robotisation.

Pour en savoir plus :

En annexe la note de lecture « Vers un Internet Physique, une nouvelle mutation logistique ».

Professeur Eric Ballot, Mines ParisTech

http://www.internetactu.net/2012/04/04/linternet-physique-appliquer-les-principes-dinternet-a-la-

logistique/

Observatoire de l'usine du futur. www.lesusinesdufutur.com

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INTERVIEW

LA FONCTION JURIDIQUE

Situation actuelle :

La fonction juridique tire largement parti des technologies du numérique. Fondée sur

un corpus légal abondant et régulièrement enrichi des modifications législatives et

réglementaires, mais aussi des jurisprudences (constantes ou contradictoires), les

outils de gestion de documentation, d’extraction d’information, de recherche

d’informations, de corrélation, permettent d’accélérer et de simplifier le travail de la

fonction juridique.

Le « client » (au sens large), pour les entreprises B to C, a lui-même un accès facilité à

une abondante documentation juridique, et peut partager avec d’autres ses

expériences juridiques sur des forums, et devenir un contradicteur redoutable

(pertinent ou pas) de toute entreprise en cas de désaccord et se transformer en un soi-

disant quasi-expert juridique à l’issue d’un surf sur le web. Ce phénomène est de

même nature que celui rencontré dans le domaine de la santé avec les sites sociaux

d’information/partage sur la santé (doctissimo.com).

Par ailleurs, la numérisation de toutes les activités humaines a des conséquences

considérables sur l’exercice de l’activité juridique en entreprise, que ce soit en matière

de droit social et du travail, de droit des affaires, de droit de la propriété

industrielle/intellectuelle, etc. De nouveaux champs se sont ouverts au domaine

juridique et des apports juridiques ont dû être réalisés pour traiter de nouveaux

problèmes créés par le numérique (ex. : droits liés à l’utilisation de la messagerie

électronique dans les entreprises).

Pour donner deux exemples, s’agissant du droit du travail, le numérique modifie

l’espace et le temps du travail du salarié et s’agissant du droit des affaires, il crée des

correspondances traçables d’un nouveau type (mails, SMS). Dans ces deux domaines,

le droit reste à la « traîne » des pratiques et des potentialités des outils, nécessitant de

la part des juristes une vigilance permanente sur l’évolution de la jurisprudence.

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INTERVIEW Perspectives :

Il reste encore beaucoup à faire dans les outils d’analyse et traitement automatique

d’une abondante production écrite (électronique ou pas d’ailleurs) pour faciliter

l’identification et la qualification des opportunités et menaces juridiques liées à telle ou

telle action d’une entreprise.

Pour en savoir plus :

Voir notamment jurispedia (http://fr.jurispedia.org/index.php/Accueil), le site du droit partagé.

LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES

Situation actuelle :

Pour les gestionnaires des ressources humaines, le numérique a tout d’abord simplifié

la gestion individuelle par des workflows appliqués aux nombreuses procédures d’un

domaine fortement codifié et procédural. Les outils numériques ont également permis

la mise en place d’une concentration des centres de services RH et la réalisation de

gains de productivité, probablement au détriment du lien social et de l’humanisation de

la relation.

La gestion des compétences a, quant à elle, bénéficié de la gestion de bases de

données de compétences associées aux salariés de l’entreprise, mais de façon très

modeste, les entreprises ayant assez peu souvent des systèmes très avancés de

gestion des compétences : référentiels incomplets, terminologie peu stabilisée,

difficultés de formalisation, bases de données insuffisamment renseignées et

informations trop peu qualifiées, limite des outils d’extraction automatique des

compétences dans le curriculum vitae.

Au-delà de la seule fonction RH, le numérique transforme profondément le rôle des

managers et leur gestion des ressources humaines :

Les outils numériques et notamment l’e-mail accélèrent la circulation

d’information, décloisonnent et mettent à plat les organisations, permettent le

développement du travail à distance ou du management à distance.

Page 17: Rapport E-Leadership

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INTERVIEW Mais dans le même temps submergent les utilisateurs, banalisent toutes les

informations, génèrent stress et déresponsabilisation, font disparaître la

frontière entre vie personnelle et vie professionnelle.

Les outils du nomadisme amplifient encore ces phénomènes à la fois dans ce

qu’ils ont de meilleur (efficacité, rapidité, gain de temps…) et de ce qu’ils ont

de difficile à vivre (vie personnelle impactée, sentiment d’être toujours en

activité…). Ils exposent les collaborateurs nomades à un déferlement

d’informations à toute heure et en tout lieu.

Pour en savoir plus :

« Comprendre la génération Y dans l’entreprise » http://www.telecom-

em.eu/sites/default/files/CPouvragegenY.pdf

Majeure Management des Ressources Humaines de TEM

http://telecom-em.eu/content/majeure-management-des-ressources-humaines

Article Baudoin, Gupta, 2013, « Constraints and Opportunities : The Use of Space by

Employees to Complete Their E-learning Programme » pp. 179-194 in « Materiality and Space»

http://www.amazon.fr/Materiality-Space-Organizations-Artefacts-Practices/dp/1137304081

« Exploring the diversity of learning outcomes in e-learning courses: four case-studies in a

French MNC »: http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1468-2419.2010.00354.x/full

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INTERVIEW

LA DIMENSION « USAGES ET MARCHES »

La révolution numérique s’opère par le biais de nouveaux usages qui ont créé de

nouveaux besoins, encore inimaginables il y a quelques années : qui aurait en effet

imaginé que les nouveaux modes de relations s’appuieraient sur la base de données

mondiales de Facebook comptant plus d’un milliard d’individus moins de 5 ans après

sa création? Qui aurait pensé que l’Encyclopedia Universalis serait mise au placard

par Wikipedia ?

Qui a prédit qu’Amazon réaliserait près de 100 milliards de CA moins de 20 ans après

sa création, révolutionnant le monde de la distribution ? À quoi va ressembler le

paysage des services informatiques dans 5 ans après que ce même acteur aura

imposé sa vision du cloud computing dont il détient déjà près de 40 % du marché en

valeur, et probablement 70 % en volume ? L’idée simple mais terriblement efficace de

Criteo, d’analyser l’utilisation des cookies pour aligner la publicité en ligne avec vos

besoins n’est-elle pas révolutionnaire ?

Les exemples de bouleversements des modes d’usage, de consommations et par là-

même de business models en place depuis des décennies par l’avènement de

nouveaux usages numériques, sont nombreux. Les gagnants de la bataille

économique sont ceux qui savent développer une vision claire de l’avenir et des

ruptures engendrées par une nouvelle application, au point que les Américains,

maîtres en la matière, sont en permanence à la recherche de la « killer application ».

Qui plus est, le jeu est désormais mondial et la vitesse d’adoption est fulgurante. Car

nous savons désormais que notre renouveau industriel viendra de notre capacité à

innover, une innovation par les usages, impliquant de nombreuses ruptures des

business models traditionnels, mais également de l’audace et la gestion du risque. À

ce titre, il est utile de signaler que le processus d’innovation ne peut en aucun cas

résulter d’une vision « top-down », où une direction centralisatrice déciderait d’innover

dans telle direction. Bien au contraire, les exemples récents dans le numérique

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INTERVIEW montrent que les nouveaux leaders émergent parmi des centaines de tentatives

infructueuses, laissant libre cours à la créativité et aux tentatives de mise en œuvre.

L’émergence d’un business-modèle leader est le résultat d’une loi statistique où

l’échec doit être accepté, et où la multiplication des tentatives faire partie du jeu.

Certes, une gestion du risque adaptée doit également être mise en œuvre et celle-ci

peut également faire l’objet de formations dans le cursus de l’ingénieur.

En conclusion, la « destruction créatrice » chère à Schumpeter, qui désigne le

processus continuellement à l'œuvre dans les économies et qui voit se produire de

façon simultanée la disparition de secteurs d'activités économiques conjointement à la

création de nouvelles activités économiques, doit être sous-tendue par un

apprentissage affirmé du processus d’innovation par les nouveaux usages, dans un

cadre formel de gestion du risque adapté.

Les exemples sont nombreux et dans des secteurs d’activité très variés. Nike avec son

programme Fuelband : les données collectées par les chaussures de sport (ou tout

autre objet connecté) permettent d’indiquer la performance de la course et le nombre

de calories perdues : Nike vend des chaussures et du service. Ikea a ajouté à son

application Catalogue une fonctionnalité de réalité augmentée permettant de visualiser

une centaine de meubles à l’échelle dans la pièce de son choix, créant ainsi un nouvel

usage numérique. Lego, fabriquant de jouets, réinvente son modèle d’affaires en

concevant une série de robots programmables depuis tout terminal.

Le modèle service centré sur l’usage a rencontré par ailleurs le modèle « d’économie

de fonctionnalité » qui vise à substituer à la vente d’un bien, la vente d’un service

remplissant les mêmes fonctions, tout en créant des externalités environnementales et

sociales positives.

Là encore, les exemples sont nombreux, comme celui du consommateur qui n’achète

plus une voiture, mais sollicite un prestataire lui fournissant un service de mobilité avec

les services d’auto partagé de véhicules automobiles, ou celui de Michelin qui passe

d’un modèle de vente de pneumatiques aux transporteurs routiers professionnels à un

modèle de mise à disposition de pneumatiques facturés au kilomètre parcouru par les

camions.

Page 20: Rapport E-Leadership

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INTERVIEW La figure du client-usager connecté et le rôle des données numériques (émission et

exploitation à partir des terminaux, capteurs pour rendre possible les conditions du

passage de la propriété d’un bien à l’usage d’un service) sont déterminantes dans les

nouveaux modèles économiques.

Concernant l’évolution des « Usages » nous devons prendre en compte l’impact :

Des réseaux sociaux (espace privé et pro),

Du travail collaboratif,

De la mobilité et interopérabilité des médias,

Des outils de communication via l’animation virtuelle, la réalité augmentée…

De la généralisation des documents multimédias numériques,

Du partage solidaire basé sur la confiance : location, troc…

De la nécessité de partager l’information en temps réel (Tweeter, Linkedin,

forums…).

Les « Marchés » changent de modèles organisationnels et économiques via :

Les Commerces et Services en ligne (mono ou multicanal),

Les secteurs de la presse, banque, vente, enchères… en ligne,

Les modes de paiement et monnaies alternatives,

Le courrier électronique et services associés : lettre recommandée, signature,

authentification…

La production artistique,

La « smartisation » des secteurs d’activités, des villes…

La formation avec l’utilisation des MOOCs.

On peut considérer aujourd’hui que ces marchés ne sont qu’en émergence et que

l’évolution des technologies et des réseaux amplifieront les transformations des

modèles.

Page 21: Rapport E-Leadership

20

INTERVIEW

LA DIMENSION « MANAGEMENT »

Le numérique amène les entreprises à quitter le modèle de l’entreprise

« disciplinaire » (au sens de Michel Foucault), c'est-à-dire tout à la fois hiérarchique,

régie par des règles et des procédures a priori, localisée dans l’espace (les lieux de

travail) et dans le temps (les horaires de travail), à l’entreprise « contrôlée » (au sens

de Gilles Deleuze), c'est-à-dire où le numérique va à la fois rendre l’entreprise

« ouverte », « étendue », « perméable », « informelle », « rhizomique » et où le

pilotage se fera largement en temps réel par l’exploitation d’un volume considérable de

données, de traçabilité des matières premières, des produits, des collaborateurs, de

leur activité, etc.

L’article co-écrit par Aurélie Leclercq-Vandelannoitte (IESEG) intitulé « Technologies

de l’information, contrôle et panoptique : pour une approche deleuzienne », expose

assez bien le changement de paradigme auquel les entreprises sont actuellement

confrontées, même si c’est dans une intensité variable en fonction de la nature de leur

activité.

Au travers d’innovations technologiques et organisationnelles, la dimension contrôle du

management semble en effet s’ouvrir à des « logiques et pratiques de surveillance

plus flexibles, mobiles et réticulaires ». Les technologies ubiquitaires (réseaux sans-fil,

téléphonie mobile, Internet mobile) ont récemment conduit à des transformations

organisationnelles du travail, en l’étendant à des espaces-temps nouveaux : télétravail,

travail nomade, hors-travail. Elles concourent également à une délégation plus forte

des responsabilités et une autonomisation des salariés, à travers la modification de

l’espace-temps qu’elles génèrent.

Le cas d’une société de conseil du monde de la finance, peut-être considéré comme

extrême, mais trouvera sa transposition, ne serait-ce que partielle, dans toutes les

entreprises d’aujourd’hui.

Pour développer la culture numérique en leur sein, les entreprises doivent :

Page 22: Rapport E-Leadership

21

INTERVIEW Repenser leurs modèles économiques et leurs organisations en tenant

compte des comportements des individus et des différents usages possibles

de la technologie,

Accepter de partager l’information et la connaissance au sens de l’entreprise

étendue afin de créer une intelligence collective source de valeur,

Considérer que le développement des ressources humaines passe par la

reconnaissance des compétences individuelles (numériques et métiers) et par

l’émergence d’e-leaders,

Accepter que le corollaire d’une culture numérique ouverte, basée sur la

confiance et l’échange entre les individus et les organisations, nécessite, pour

les entreprises, de faire face à des risques nouveaux,

Faire partager aux hommes et femmes de l’entreprise une même vision et

des valeurs communes pour accompagner la transformation numérique de

leur entreprise.

Le CIGREF a ainsi identifié 10 tendances structurantes de la transition numérique :

deux d’entre elles concernent particulièrement la présenté étude : la gestion de la

mobilité, le bénéfice des dynamiques collaboratives.

1) Les challenges de la mobilité.

- Si la mobilité présente de nombreux avantages (flexibilité) elle génère aussi

des problèmes (dérives horaires, difficultés de contrôle). Des outils

permettent au manager de tracer les échanges ou toutes les activités liées à

la tâche ; ces outils doivent être complétés par un accompagnement, une

charte d’usage sur le temps de travail.

- Afin de conserver une certaine cohésion d’équipe et éviter un isolement,

certaines entreprises obligent à des retours réguliers des salariés dans leur

bureau.

- Selon une étude menée par le cabinet d'étude Markess International, 71 %

des collaborateurs interrogés utiliseraient à titre professionnel des solutions

non mises à disposition par leur entreprise. Cette pratique appelée BYOD

(Bring Your Own Device) interroge sur la limite vie professionnelle/vie privée

et sur la protection des données sensibles de l’entreprise.

Page 23: Rapport E-Leadership

22

INTERVIEW 2) Les dynamiques collaboratives

Elles favorisent la créativité, l’innovation et l’identification des talents. Elles étendent le

périmètre de collaboration et permettent de renforcer l’intelligence collective. Elles

impactent dès lors :

- le business (nouvelles idées = nouveaux produits),

- les modes de travail (outils, postures, international),

- les relations hiérarchiques (décentralisation du pouvoir et du savoir),

- les relations sociales intra-organisationnelles.

Mais la décentralisation du savoir entraîne aussi une dispersion du pouvoir de la

connaissance et de l’information : qui est garant de la bonne information ?

Sur le plan technique, la multiplicité des outils (RSE, forums, blogs, mails, GED) peut

entraîner de la confusion et être un frein à leurs développements.

L’arrivée de ces outils collaboratifs nécessite de nouvelles compétences mais aussi

l’évolution des mentalités et des attitudes.

Toutes ces compétences ont pour ambitions de faire émerger de l’intelligence

collective de l’usage de ces outils, de favoriser l’innovation et de créer de la valeur

D’autres challenges sont liés à la transformation numérique : une redistribution

des compétences existantes ou nouvelles qui viennent compléter les profils de métier

voire les impacter fortement, à savoir :

- les relations entre les utilisateurs et les métiers : création de Business

Relation Manager, lien entre les métiers et l’expression de leurs besoins et

les équipes de la DSI,

- l’architecture d’entreprise reprend un rôle-clé dans la relation avec les métiers

pour les aider à repenser la transformation numérique de l’entreprise,

- l’urbanisme du SI doit prendre en compte dans son organisation les nouvelles

architectures de services afin d’y intégrer des systèmes externes (Cloud,

systèmes mobiles…) sans omettre la sécurité de l’entreprise.

Page 24: Rapport E-Leadership

23

INTERVIEW Pour en savoir plus

Biblio économie de fonctionnalité avec une lecture « business » Christophe Sempels et Jonas

Hoffmann, Les business models du futur : créer de la valeur dans un monde aux ressources

limitées, Pearson Education, Février 2012 (ISBN 978-2744076138)

Publication CIGREF : voir note de lecture en annexe « Entreprise et culture numérique »

http://www.entreprises-et-cultures-numeriques.org/publications/ebook-entreprises-culture-

numerique/?goback=%2Egmp_5072489%2Egde_5072489_member_269861656#%21

Page 25: Rapport E-Leadership

24

INTERVIEW

LA DIMENSION « TECHNOLOGIES IMPACTANTES »

L’acquisition de compétences métiers, la connaissance des marchés et des usages,

l’intégration des nouveaux modes de management par un leader ne lui suffisent pas

pour assurer la transition vers l’e-leadership. Il lui faut aussi une solide connaissance

des technologies du numérique et de leur capacités d’action sur les leviers de

l’économie.

Les technologies numériques se diffusant dans toutes les activités économiques et

sociales, le e-leader se doit d’en connaître les plus importantes, celles qui comptent et

contribuent ou contribueront à transformer les modèles économiques, les processus

productifs, les relations clients et plus généralement les manières de travailler et de

collaborer.

Nous avons retenu d’analyser quelques technologies clés du numérique en devenir

avec leurs impacts sur les applications, interfaces ou méthodes de développement, qui

constituent un réel enjeu en matière de développement économique.

Les terminaux mobiles (Smartphones, Tablettes).

Au cœur de la révolution numérique, les terminaux mobiles modifient profondément les

métiers de l’entreprise, tant au plan des processus internes que des relations avec les

clients et les fournisseurs. En ce sens, ils contribuent aux bouleversements des

modèles économiques auxquels nous assistons dans un grand nombre de secteurs

d’activité.

Ils contribuent à une transformation en profondeur de la relation client, en forte

évolution, comme il a été dit plus haut. Celui-ci disposant de terminaux mobiles,

devient potentiellement beaucoup plus disponible ce qui donne l’occasion de

développement de nouveaux services et d’interactions contextuelles en le sollicitant en

fonction de sa navigation web ou de sa circulation devant tel ou tel rayon, boutique,

etc.

Ces terminaux mobiles représentent également un facteur d’accélération de la

dématérialisation dans la mesure où le client est sollicité pour gérer lui-même des

transactions : formulaire, titres de transports, etc. Tout cela conduit à une remise en

question et à une redéfinition des processus internes que ce soit du fait des clients qui

Page 26: Rapport E-Leadership

25

INTERVIEW ont la capacité à disposer d’informations en temps réel (promotion chez un concurrent,

sortie de nouveaux produits…) mais aussi par le fait que les salariés eux-mêmes

voient leurs métiers bouleversés (commerciaux, cadres, techniciens de

maintenance…). Dans ce contexte, les directions des Systèmes d’Information doivent

évoluer également dans une approche davantage partenariale et agile que

descendante vis-à-vis des collaborateurs avec une grande réactivité, car la mobilité

exige des cycles de développement courts.

Le « bring your own device » - (BYOD)

Ce point est à mettre en relation avec le point précédent auquel il est intimement lié. Il

s’agit de la tendance consistant à permettre, voire à demander aux collaborateurs

d’utiliser leurs équipements personnels (mobiles, PC, tablettes,…) dans un contexte

professionnel. C’est bien parce que les terminaux deviennent mobiles qu’ils peuvent

devenir des objets au service de la vie professionnelle et de la vie personnelle. Les

questions posées par ces nouvelles approches sont nombreuses : juridiques (droit du

travail..), technologiques (sécurité, confidentialité…).

Les Big Data, le neuromarketing

Il s’agit des approches probablement les plus essentielles actuellement, tant les

applications semblent importantes dans le domaine de la prédiction opérationnelle au

service des activités économiques et sociales et dont le potentiel de création de valeur

semble infini. Que ce soit par l’exploitation des quantités considérables de données

numériques produites par les activités économiques et sociales (les big data) ou par

l’utilisation des sciences cognitives afin de mieux comprendre les comportements des

consommateurs (le neuromarketing), ces nouvelles approches sont en train de

révolutionner le marketing et la communication. Il s’agit de l’idée selon laquelle un

énorme volume de données ne révèle son potentiel qu’après traitement, analyse et

croisements.

Le cloud computing

Il s’agit du passage d’un modèle de propriété des infrastructures informatiques,

matérielles et logicielles, à un modèle de mutualisation et de paiement à l’usage. Un

« nuage » (Cloud en anglais) est une infrastructure informatique qui fournit des

services que les organisations et les individus peuvent utiliser à volonté partout dans le

Page 27: Rapport E-Leadership

26

INTERVIEW monde. Les services sont mis à disposition via l’Internet et sont accessibles par tous

terminaux fixes ou mobiles.

L’une des dimensions importantes du Cloud Computing est de dispenser les

organisations de la gestion de la croissance ou de la décroissance de leurs besoins en

matière d’infrastructures informatiques, mais bien d’autres avantages découlent de

cette approche notamment :

- l’accroissement de la collaboration entre les employés qui disposent d’outils

de partage performants et d’accès leur permettant de travailler de n’importe

quel endroit,

- l’accès des entreprises, quelle que soit leur taille, aux technologies les plus

performantes,

- un meilleur respect de l’environnement dans la mesure où chacun consomme

en fonction de ses besoins.

L’Internet des objets et les objets communicants

Munis de capteurs ou de puces, de nombreux objets ont vocation à être connectés

entre eux et à Internet, et à générer des données. Il s’agit là aussi d’une révolution

importante. En 2020, selon l’Idate – think tank spécialisé dans l’économie numérique -

80 milliards d’objets seront connectés et deviendront de facto, producteurs majeurs

des fameuses Big Data. Les objets connectés font d’ailleurs partie des 34 projets

d’avenir sélectionnés par le gouvernement français pour relancer l'industrie.

Ce phénomène va conduire l’industrie à se transformer en profondeur, car la

conception d’objets connectés implique un grand nombre d’acteurs et d’équipements :

semi-conducteurs, cartes à puces, capteurs, réseaux, cloud,… qui devront être

intégrés dans les processus de conception et de fabrication industriels.

Le Web 3.0 sémantique

Il s’agit d’un ensemble de technologies destinées à rendre plus accessibles et

utilisables de façon « plus intelligente » les informations (textes, images, vidéos…) du

web. En particulier le web sémantique permet d’agréger des données entre elles afin

d’enrichir les recherches d’informations. Le Web sémantique va permettre aux

organisations et aux particuliers de collecter, analyser et synthétiser de grands

volumes de données structurées et non structurées, telles que les mails, les

Page 28: Rapport E-Leadership

27

INTERVIEW commentaires des blogs et des forums, les flux RSS, les sons, etc. Il s’agit donc de

donner de l’intelligence à la gigantesque masse d’informations que représente le Web

aujourd’hui et la transformer en un guide intelligent en mesure de répondre à des

requêtes effectuées en langage naturel.

Le très haut débit et les réseaux intelligents

Le très haut débit est considéré comme un chantier majeur par le gouvernement. Son

développement qui passe par le déploiement généralisé de la fibre optique apparaît

nécessaire pour l’accès à des services de Cloud Computing (cf supra), la téléphonie,

la télévision haute définition et plus généralement les applications exigeantes en

termes de débit. D’une façon générale, le très haut débit offre des perspectives de

nouveaux services notamment chez le particulier en jouant sur des complémentarités

entre différents supports (TV, mobile, tablettes,..) qui pourraient être utilisés et

sollicités simultanément pour une même application.

On parle de réseau intelligent lorsque celui-ci dispose de moyens logiciels et radio lui

permettant de s’adapter et de se configurer en temps réel, afin d’avoir un

fonctionnement optimal selon les besoins, ce qui apparaît de plus en plus nécessaire

pour satisfaire les attentes croissantes de ressources.

La sécurité et ses enjeux

Le déploiement des technologies évoquées ci-dessus conduit au développement d’un

cyberespace dont la sécurité devient un enjeu stratégique. La confiance dans ce

nouvel espace est un élément-clé de son expansion.

Pourtant, ce cyberespace qui prend une place croissante dans l’économie et plus

généralement dans la vie quotidienne des personnes et des organisations, est de plus

en plus soumis à des menaces et des attaques. Dans ce contexte, une cybersécurité

fondée sur des technologies spécifiques afin de préserver son intégrité est

indispensable.

Celle-ci passe par le développement de solutions de protection des infrastructures, la

conception de moyens de détection d’attaques et de mise en place de moyens de

Page 29: Rapport E-Leadership

28

INTERVIEW protection allant jusqu’à la prise en compte des protocoles spécifiques des systèmes

industriels.

D’autres technologies impactantes peuvent être évoquées dans ce rapport bien

qu’elles soient encore peu développées ou localisées à des fonctions ou des métiers

spécifiques. On peut citer par exemple :

Les imprimantes 3D qui sont en train de révolutionner les fonctions de conception de

produits en mettant à la portée de petites structures la capacité à concevoir et à

maquetter des produits matériels complexes. L'imprimante 3D fabrique des objets sur-

mesure, en 3 dimensions à partir d'un fichier engendré par un logiciel de conception.

Elle découpe de la matière (plastique, cire, métal, poudre à base d'eau et de sel...)

puis la dépose couche par couches pour fabriquer un objet. Les imprimantes 3D

s’invitent dans tous les secteurs de la mode à l’industrie en passant par la santé et leur

utilisation pourrait bien avoir pour conséquence de relocaliser des productions

industrielles qui avaient été délocalisées et de permettre des productions fortement

personnalisées.

La réalité augmentée qui rend possible la superposition d’un modèle virtuel 3D ou 2D

à la perception naturelle que nous avons de la réalité et ceci en temps réel. Les

applications possibles sont nombreuses dans l’édition, la presse, la publicité, les jeux,

le e-commerce mais aussi les transports, l’aéronautique, etc.

Page 30: Rapport E-Leadership

29

INTERVIEW

BESOINS IDENTIFIES ET COMPETENCES ATTENDUES

En préalable, un e-leader se doit d’avoir une totale maîtrise de la langue anglaise et

comprendre la culture anglo-saxonne, car son activité dans les nouvelles technologies

est nécessairement globale et internationale et sa langue de travail est très souvent

l’Anglais. S’il connaît une seconde voire une troisième langue, il dispose d’atouts

supplémentaires certainement très utiles dans son business. Pour ce faire, et au-delà

de qualités humaines essentielles, les compétences en management de ressources

humaines nécessaires à un e-leader, doivent couvrir les 3 domaines que sont le

management des affaires, le management des hommes et le management des

technologies.

MANAGEMENT DES AFFAIRES

Pour manager efficacement les activités et le business dont il aura la charge, l’e-leader

se doit de disposer de savoirs minimum sur des sujets variés qui ne sont pas toujours

abordés ou approfondis, au titre des Sciences Humaines et Sociales (SHS), dans les

écoles d’ingénieurs. Sont ainsi concernées :

Les bases du management et des organisations : ce sont les grands

principes qui définissent les règles du management, les organisations et

les comportements, les méthodes et les outils pour les faire fonctionner,

Les compétences techniques dans le domaine de son business : elles

sont souvent acquises lors de la formation initiale, mais ne couvrent pas

forcément tout le domaine d’activité du e-leader,

La connaissance de la gestion d’entreprises qui couvre les procédures

en vigueur dans les entreprises (« policy »), tous les aspects comptables,

financiers, trésorerie et reporting, ainsi que les systèmes d’information de

pilotage et de contrôle,

Page 31: Rapport E-Leadership

30

INTERVIEW La culture commerciale et la connaissance des techniques de

négociation afin de permettre au e-leader d’acquérir de véritables

réflexes « commerciaux » et business en sachant qu’une entreprise ne

peut fonctionner et faire des profits que si elle vend des produits adaptés

aux besoins des clients ou attendus par les marchés,

La sensibilisation aux business plans et aux budgets. Dans le cadre de

son activité, l’e-leader sera nécessairement amené à faire du « go to

market » et donc prévoir, planifier et budgéter l’ensemble du cycle de vie

d’un produit ou d’un service, en intégrant les coûts et les profits sur des

périodes allant de 3 à 5 ans. Dans ce contexte, il devra savoir effectuer

un diagnostic financier, réaliser des business plans, présenter ses

objectifs et ses budgets à sa hiérarchie, à ses clients, à ses partenaires,

à des analystes financiers, à ses équipes,

La connaissance et la compréhension des chiffres permettront au e-

leader de savoir analyser et comprendre le sens des chiffres, leurs

valeurs, les ordres de grandeur, les grands indices économiques, etc.

Les bases de l’entrepreneuriat voire de l’intrapreneuriat, avec un esprit

d’innovation, de créateur de nouveaux systèmes et capable de drainer

des financements.

MANAGEMENT DES ÉQUIPES

La connaissance dans le management des hommes est essentielle pour l’activité d’un

e-leader, dans la mesure où il doit établir un climat social approprié, encadrer et

animer des équipes multiculturelles et créer un réseau de connaissances virtuelles.

Pour ce faire, il doit maîtriser les basiques de management dans des domaines

incontournables que sont :

La gestion des ressources humaines tant sur les aspects

réglementaires qu’administratifs,

Page 32: Rapport E-Leadership

31

INTERVIEW L’étude et la connaissance des comportements en sachant décrypter

les réactions de ses interlocuteurs,

La maîtrise totale d’une expression écrite parfaite associée une

grande aisance dans l’expression orale,

Les règles de délégation, d’animation et d’organisation,

La communication et la décision.

Enfin, l’e-leader doit savoir transmettre des compétences exemplaires

interpersonnelles grâce à la technologie associée.

« Un e-leader c’est un leader qui a des compétences supplémentaires pour être

toujours vigilant sur les technologies émergentes »

MANAGEMENT DES TECHNOLOGIES

L’e-leader se doit d’avoir une bonne culture sur l’ensemble es technologies de

l’Information telles que :

Les bases sur l’architecture des systèmes d’information d’entreprise et

sur la gestion des bases de données,

Les solutions logicielles d’interopérabilité pour les dialogues et échanges

entre les systèmes,

Les règles essentielles à connaître et à appliquer pour la sécurité et la

confidentialité de ses propres données.

Ensuite, dans le cadre de ses activités, il doit avoir de solides connaissances sur les

technologies majeures identifiées sous le nom de SMAC (Social Mobile Analytics

Cloud) et qui couvrent les grands domaines d’application détaillés dans les pages

précédentes.

Page 33: Rapport E-Leadership

32

INTERVIEW

COMPÉTENCES COMPLÉMENTAIRES D’UN E-LEADER

La plupart des ingénieurs exerceront au cours de leur vie professionnelle des

responsabilités managériales

Certains d’entre eux sauront exercer un leadership et donc de plus en plus souvent un

e-leadership

Les e-leaders devront intervenir dans un environnement complexe, changeant

multiforme, ils devront donc porter des compétences variées de plusieurs ordres

Rappelons d’abord le socle, le bouquet de compétences de base dont doit disposer

aujourd’hui tout diplômé de l’enseignement supérieur et déjà intégré dans la plupart

cursus d’écoles d’ingénieurs ou de management.

QUALITÉS HUMAINES

Cet ensemble concerne plus spécifiquement « l’être » et « le savoir-être » du e-leader

qui sont caractérisés par des qualités tant vis-à-vis de lui-même (internes) que vis-à-

vis des autres (externes).

- Qualités internes

L’e-leader doit développer sa curiosité sur les domaines de son

business par une lecture intensive, une veille technologique

personnelle, une interrogation permanente et une attention aux

signaux faibles qu’il peut percevoir sur l’évolution de son secteur

d’activité. Il doit rester en permanence « en veille »,

L’e-leader doit travailler sur une bonne connaissance de lui-même,

de ses forces, de ses faiblesses, de ses points de progression. Il doit

disposer d’une grande maîtrise de soi, et être capable de prendre du

recul en toutes occasions. Il doit faire preuve de ténacité et montrer

en situation ses convictions étayées par des faits et des chiffres,

L’e-leader doit agir en toutes occasions avec une nécessaire

intégrité basée sur des valeurs personnelles et business vécues au

jour le jour et affichées clairement.

Page 34: Rapport E-Leadership

33

INTERVIEW

- Qualités externes.

- L’e-leader dispose d’un enthousiasme naturel capable de motiver, de

dynamiser et d’entrainer une équipe. Son comportement positif doit être

un exemple autour de lui. Sur les dossiers qu’il étudie, et dans son

fonctionnement quotidien, il doit se montrer pessimiste dans l’analyse et

optimiste dans l’action,

- Son relationnel est simple et facile, sans agressivité : il ne cherche pas à

écraser ses interlocuteurs. Sa communication doit être habile, car il sait

dire aux bons moments et aux bonnes personnes, ce qu’il est nécessaire

qu’elles sachent,

- Il a une forte capacité à :

écouter et comprendre les autres en sachant faire preuve d’empathie

naturelle face à ses interlocuteurs,

entendre et décrypter les signaux faibles exprimés par son

environnement,

voir le monde différemment, avoir un autre regard que la norme et

savoir détecter les opportunités et les projets,

coopérer avec des partenaires apportant une réelle complémentarité

de compétences, de savoir, de vision, de moyens, de culture,

associer les talents du fait de la transversalité des domaines.

Toutes ces qualités nécessitent un travail personnel intense, basé sur des lectures

permanentes, des études de cas, des recherches, des réflexions, des mises en

situation et des échanges avec des experts.

IMAGINER DE NOUVEAUX USAGES

L’objectif est de sensibiliser l'ingénieur français a la réflexion qui développe la

créativité, l'innovation ; cela résulte certainement de mécanismes / processus /

postures; tous les success stories en matière de numérique sont le résultat de

l'imagination et de la mise au point de nouveaux besoins/usage/business models...

Développer une sensibilité à la créativité, à l'innovation avec une vision iconoclaste

etc. Ex : Facebook, Linkedin, Criteo, Amazon, priceminister, vente privée... Apple

Page 35: Rapport E-Leadership

34

INTERVIEW (Steve Jobs pensait que le besoin se créait chez l'utilisateur en imaginant une nouvelle

offre...),

En termes de compétences, ces outils militent en faveur de l’émergence de

gestionnaires de la connaissance, d’animateurs et de modérateurs de réseau, de

responsables d’usages et de formation (management à distance, s’exprimer avec les

nouveaux outils).

COMPRENDRE ET ANTICIPER LES BESOINS DES UTILISATEURS

De nos jours, l’innovation est plus marketing que technologique, même lorsqu’on est

loin du client : « penser client » est indispensable.

Pour reprendre la citation de Lee Iacocca, qui figure dans la préface d’Hervé Biausser

« Celui qui n’a jamais rien vendu, n’a jamais vraiment travaillé ».

Il faut ouvrir l’esprit et les yeux des ingénieurs sur ce fait.

Pour en savoir plus :

voir la note N° 3 en annexe : Marketing pour ingénieurs : Alain Goudey/Gaël Bonnin –

Dunod 2010

AVOIR UNE VISION ET UNE CAPACITE DE PROSPECTIVE

Dans ce contexte, il est indispensable d’entraîner nos futures élites et managers à cet

exercice de prospective des usages du numérique, qui repose sur une grande

créativité et une imagination de besoins futurs, inexistants à l’instant présent. La

formation classique de l’ingénieur français est reconnue pour la capacité d’abstraction

qu’elle développe chez le jeune étudiant : si l’on parvenait à utiliser cette capacité

d’abstraction pour induire une capacité d’innovation basée sur la créativité de l’usage,

nous créerions certainement davantage de jeunes sociétés leaders dans leur domaine.

Il faut aussi dans le e-leadership maîtriser les innovations dans toutes ses phases,

avant le lancement du projet en s’assurant de la pertinence de la problématique,

pendant le projet en assurant un suivi de l’exécution, mais aussi de répondre au

« vrai » besoin en cherchant celui le plus facile à mettre ne œuvre et qui apporte de la

valeur à toutes les parties prenantes.

Page 36: Rapport E-Leadership

35

INTERVIEW AVOIR LA CAPACITÉ D’AGIR DANS LES NOUVELLES ORGANISATIONS

ET DE NOUVEAUX MODES DE GOUVERNANCE

Mais il manque souvent dans les formations initiales du numérique les facteurs

sociologiques à intégrer dans une activité managériale que sont :

• l’évolution des fonctions sous l’influence des outils numériques,

• le décloisonnement des organisations et travail en mode collaboratif.

Le développement des nouveaux modes de travail liés à la mobilité des salariés a pour

conséquence le développement des compétences liées :

au support et à l’accompagnement au changement,

au management de personnes à distance en situation de télétravail ou de

mobilité,

à la compréhension des aspects réglementaires et juridiques de la mobilité.

La confiance est à la base d’un travail à distance réussi. Cette confiance doit être

réciproque. Les compétences comportementales sont :

l’autonomie,

l’autorégulation,

la responsabilisation,

la capacité de concentration,

la maîtrise d’un modèle de gouvernance en mode projet inter fonctions.

UTILISER PLEINEMENT LES OUTILS COLLABORATIFS

Le e-leader doit avoir la capacité à travailler en mode cross fonctionnel :

Le e-leader doit totalement maîtriser les outils et techniques numériques qu’il utilisera

dans le cadre de ses activités. Sans que cette liste soit exhaustive, on peut citer entre

autres :

La messagerie instantanée collaborative qui permet des échanges

immédiats entre une équipe en gommant les notions de distances

physiques,

Page 37: Rapport E-Leadership

36

INTERVIEW Les systèmes bureautiques intégrés qui mixent les grandes fonctions

d’édition, de calcul et de présentation de documents,

Les « Massive Open Online Courses (MOOCs) » qui permettent de

disposer de manière ouverte et à distance de formations en télé-

enseignement,

La visioconférence haute définition qui permet des réunions sous forme de

télé-présence immersive avec mur d’images ou personnelle en face à face,

Les flux RSS afin d’être automatiquement et immédiatement informé à

partir d’une base bien identifiée,

L’agrégation des contenus et de tous types de médias (texte, podcast,

videoblog…) afin de faciliter des présentations qui captent

En termes de compétences, ces outils militent en faveur de l’émergence de

gestionnaires de la connaissance, d’animateurs et de modérateurs de réseau, de

responsables d’usages et de formation (management à distance, s’exprimer avec les

nouveaux outils).

La capacité à partager et à faire circuler l'information est essentielle. L’e-leader passe

un temps considérable à communiquer, à mettre en relation, en réseau, à intermédier.

La période où le leader était écouté parce qu'il était le chef est révolue. Il y a de plus

en plus d'entreprises où la capacité à évangéliser, à séduire, a de plus en plus de

valeur. La personne la plus importante chez Apple c'est Johnny Ive, le designer.

IMAGINER DE NOUVEAUX BUSINESS MODELS,

(voir étude 2013 de la Fondation Télécom)

http://www.fondation-telecom.org/page/notre-action-5/think-tank-18/ et aussi éduquer a

l'invention, l'innovation, à la création Processus d'innovation, de destruction créatrice

(Schumpeter)

Constat : tout peut-être réinventé,...

Or, comme toute discipline, c’est certainement par la pratique régulière de l’exercice

consistant à imaginer les nouveaux usages et les business models associés que cette

Page 38: Rapport E-Leadership

37

INTERVIEW capacité pourrait se développer. Les formations doivent impérativement inclure des

modules de développement de la créativité, de l’innovation, du processus de

développement créatif. Le processus d’innovation est désormais clair et théorisé ; la

phase de brainstorming qui doit donner lieu aux idées les plus folles doit être l’objet

d’entraînement régulier. Là encore, des méthodes existent et un entraînement est

requis.

Pour en savoir plus

Voir article de Jean-Luc Beylat, président d’Alcatel-Lucent Bell Labs France: « Numérique :

nous n’avons encore rien vu », estime Jean-Luc Beylat http://www.industrie-

techno.com/numerique-nous-n-avons-encore-rien-vu-estime-jean-luc-beylat.24367 et industrie

4.0 http://www.usinenouvelle.com/l-usine-nouvelle-du-29-aout-2013-n3342

Page 39: Rapport E-Leadership

38

INTERVIEW

ORIENTATIONS POUR UNE OFFRE DE FORMATIONS

Une compétence, c’est un savoir et un savoir-être mis en œuvre dans un contexte.

Tout ne peut donc être du domaine de la formation.

Mais le recensement des compétences attendues peut ainsi constituer une ébauche

de cahier des charges. Cette identification des compétences requises ou souhaitées

peut constituer un cahier des charges pour l’adaptation, l’évolution ou la construction

de programmes ou de modules de formation initiale ou continue

Il existe en effet au sein de certaines formations existantes des séquences visant cet

objectif. Nous proposons donc aux écoles de Pasc@line de lancer une réflexion pour

d’analyser comment sont enseignés ces thèmes dans leurs programmes : de formation

initiale (cycle grande école ou spécialisation) de formation continue

qualifiante/certifiante, ou de formation continue de plus courte durée

À partir de cet état des lieux des formations existantes et des besoins identifiés,

l’Observatoire propose à la commission Pédagogie Numérique de Pasc@line de

préciser les formations spécifiques à développer dans les enseignements des écoles

de Pasc@line selon les quatre dimensions de l’e-leadership. Sur ces bases, les écoles

de Pasc@line pourront ainsi déclencher des initiatives d’évolution de leur offre de

formation, seules, en partenariats ou en association avec des écoles de management.

Cet « auto-diagnostic » permettrait aux écoles de faire remonter leurs meilleures

pratiques au regard de la problématique du développement de l’e-leadership. Il pourra

également servir de grille d’analyse des formations existantes hors périmètre des

membres de Pascaline (notamment des écoles de management) susceptibles de

traiter ces problématiques. Un recensement structuré pourra ainsi être réalisé.

La construction d’une offre de formation spécifique et cohérente apporterait une réelle

valeur ajoutée à nos diplômés dans ce nouveau contexte.

Page 40: Rapport E-Leadership

39

INTERVIEW

Annexes

PORTRAITS DE E-LEADERS ET RETOURS D’EXPERIENCE

Frédéric BRUEL

Mickaël Kerfan

Tariq Krim

NOTES DE LECTURE

Vers un Internet Physique, une nouvelle mutation logistique

Eric Ballot, Professeur, Mines ParisTech

Marketing pour ingénieurs Alain Goudey/Gaël Bonnin – Dunod 2010

Quel est l’impact du développement de la culture numérique sur

les entreprises ?

Rapport du CIGREF

Page 41: Rapport E-Leadership

40

INTERVIEW PORTRAITS DE E-LEADERS ET RETOURS D’EXPERIENCE :

Frédéric BRUEL Ingénieur ENSEEIHT, serial entrepreneur

Après des études d’ingénieur à Toulouse, il part pour les États-Unis chez Microsoft

(division des réseaux locaux – Windows) où il exerce des fonctions de technico

marketing : facteur d’accélération de connaissance, d’expérience, d’exposition au

monde de l’entreprise, L’aventure est très riche avec un impact sur l’état d’esprit.

En même temps il effectue un MBA à Harvard (très jeune et même trop jeune.

Il est ensuite coopté par un ancien de Harvard pour développer le marketing et les

ventes d’une société, un challenge à 26 ans. Lors du stage à Harvard, il réfléchit sur

des services nouveaux pour autour de l’idée « comment connaître le titre d’une

chanson que l’on écoute ? Cinq ans après (et l’explosion bulle internet) il crée sa

société.….

Pourquoi se lancer dans l’aventure et quels sont les déclics ?

Les élèves qui sont impliqués dans la gouvernance d’associations deviennent souvent

des entrepreneurs. Il existe aussi un profil d’entrepreneur favorisé par l’environnement

familial.

Il y a des conditions nécessaires mais pas suffisantes : les hommes, le rêve,

l’Innovation totale ( free style : vous créez un besoin sans connaître le marché, savoir

doser l’effort en terme d’investissement).

il faut s’accrocher et savoir pivoter au bon moment.

Il faut s’informer via des abonnements à toutes les revues spécialisées et faire la

passerelle entre la théorie et la pratique.

Le secret est là : rester connecté en lisant, en s’abrutissant de lecture, en parlant, en

échangeant, en posant des questions, en parlant de ses idées, car c’est la seule façon

de savoir si on va bien faire,

Il faut aussi trouver son mentor : cela peut-être n’importe qui, pas forcément un

entrepreneur, mais quelqu’un qui vous guide et vous éclaire.

Enfin, il faut avoir un certain équilibre et du soutien dans sa vie de couple et de famille.

Qu’est-ce qui a manqué dans la formation initiale pour devenir un e-leader ?

Dans une école d’Ingénieurs, on apprend à apprendre - c’est la base de tout. Il ne faut

pas dénaturer le cœur de l’enseignement et intégrer dans le processus de formation

des modules de gestion et management d’entreprises. Il faut ouvrir l’enseignement sur

Page 42: Rapport E-Leadership

41

INTERVIEW les sociétés si l’on veut que les élèves s’ouvrent sur les sociétés. Quelques années

après on ne connaît plus les contenus des formations,

.

Quelles propositions formuler pour développer les compétences d’e-leader dans

les écoles d’ingénieurs du numérique ?

Dans le cadre de l’école, il est nécessaire de favoriser des espaces de créativité et de

développer un écosystème favorable à l’entrepreneuriat. Cela passe par les campus et

des pôles de compétitivité autour du campus.

Dans les cursus de formation, il faut prévoir de faire intervenir des entrepreneurs qui

ont réussi (ou raté) leur projet pour susciter l’envie de créer et transmettre leur

expérience.

Il serait intéressant de savoir combien d’étudiants veulent créer une entreprise en

rentrant dans les écoles et compter combien le veulent toujours en sortant. Je pense

que 90 % veulent un CDI, se marier, acheter leur logement et avoir des enfants, 5 %

désirent être entrepreneur, 5 % ne savent pas.

Il faut pouvoir encourager et aider ceux qui veulent devenir entrepreneurs dans les

cursus de formation initiale, créer un module pour ceux qui sont demandeurs (au

détriment d’autre chose) ou développer une option « entreprenariat », mettre en place

un environnement pour favoriser l’éclosion de futurs entrepreneurs ?

Est-il nécessaire de passer par une formation spécialisée pour devenir un e-

leader ?

Les formations spécialisées ont un décalage entre la théorie et la pratique : La

pédagogie à Harvard est totalement déstructurée, c’est un environnement favorable en

tant qu’accélérateur d’expérience avec une ouverture totale, multiculturel…

Faire les deux n’est pas possible, mais suivre une autre formation n’est pas

impossible, car une École de commerce est mieux armée pour aider à entreprendre ce

qui complète la formation d’ingénieur.

Page 43: Rapport E-Leadership

42

INTERVIEW PORTRAITS DE E-LEADERS ET RETOURS D’EXPERIENCE :

Mickaël KERFANT ingénieur d'École des Mines de Nantes

Mickael Kerfant, jeune diplômé de l'École des Mines, dirige la société JYMEO dont la

principale vocation est d'accompagner les consommateurs en proposant des solutions

leur permettant de trouver les produits les mieux adaptés à leurs besoins. JYMEO

propose des comparateurs de prix, des guides d’achats, et des sites informatifs

spécialisés dans des domaines variés, principalement pour des produits de grande

consommation. La société édite notamment quelpneu.com, comparateur de prix de

pneus présent dans 10 pays d'Europe.

Pourquoi se lance-t-on dans l’aventure ?

Après un bac scientifique et une année de classe préparatoire, j'ai fait 4 ans d'études

à l'École des Mines de Nantes. Je suis diplômé depuis 2009. J'ai fini mes études par

un stage en tant que consultant en SSII (CapGemini) où j'ai été embauché en CDI, et

où je suis resté pendant deux ans et demi. En parallèle de la fin de mes études et de

ma première expérience professionnelle, j'ai développé ma société avec un camarade

de promotion. Au bout de 2 ans, j’ai décidé de quitter la SSII qui m'employait pour me

consacrer à plein temps à ma société. Aujourd’hui, nous sommes 4 dans la société.

Nous avons recruté un développeur en contrat de professionnalisation et un

responsable webmarketing. Mon associé est orienté technique (développement et

maintenance des sites) tandis que je prends en charge les aspects commerciaux,

juridiques, comptables et marketing.

Quels ont été les déclics ?

L'idée de création a commencé à germer à peu près quand je suis rentré à l'École des

Mines. Au départ, je voulais être ingénieur, via la voie royale "prépa + École

d'Ingénieurs"...

Il y a eu plusieurs déclics. Tout d'abord, j'ai rencontré des anciens élèves de l'École

des Mines qui avaient monté leur structure. Ces personnes, en vous parlant de leurs

expériences et leur quotidien, vous transmettent leur passion et vous donnent envie de

vous lancer.

En 2ème année d'École, j'ai participé à un programme régional né dans les Pays de la

Loire, maintenant national, qui s'appelle « Les entrepreneuriales ». Ce programme, qui

se déroule sur 4 mois et qui est ouvert à tout élève de l'Enseignement Supérieur,

Page 44: Rapport E-Leadership

43

INTERVIEW permettant à des équipes pluridisciplinaires de tester un projet fictif de création

d’entreprise. Les participants reçoivent des apports théoriques par des conférences

thématiques et sont accompagnés par des parrains du Réseau Entreprendre. L'objectif

est de confronter son idée à la réalité en allant sur le terrain. Je trouve ce programme

extrêmement enrichissant parce qu'il permet de démythifier le processus de création

d’entreprise. La création est ouverte à tous. Chacun est capable de monter une

structure.

En 3ème année, j'ai fait un stage aux États-Unis dans une agence web. Je n'ai pas

choisi ce stage par hasard, je l'ai obtenu via un ancien des Mines devenu

entrepreneur. Le gérant de cette structure était un véritable entrepreneur, au parcours

atypique et avec une vraie fibre entrepreneuriale, qu'il savait transmettre. Ce n'est

probablement pas un hasard si les 5 stagiaires passés avant moi dans cette entreprise

ont aujourd'hui tous créé leur structure.

Qu’est-ce qui manque dans la formation initiale pour devenir un e-leader ?

Aux Mines, on développe avant tout une réelle capacité à apprendre et à appréhender

beaucoup de sujets. Je pense donc que cette compétence-là, on arrive à l'avoir à

travers cette approche.

De mon côté, j'ai opté pour une option de l'école qui s'appelle « Organisation et

Management des technologies de l'information »*. C'est une option qui allie à la fois

des compétences informatiques et des cours axés sur les sciences humaines. Déjà,

j'ai pu choisir des cours en rapport avec mes idées de création : marketing, découverte

de l'internet, comptabilité, gestion de la relation commerciale. Cette option est vraiment

très intéressante et prépare très bien au métier de consultant notamment. Elle permet

d'avoir une certaine culture des grands projets informatiques (ERP, CRM...) et d'être

capable de prendre un peu de recul. On a de la chance d’avoir cette option à l’École

des Mines de Nantes.

En revanche, ce que l’on n’aborde pas assez pendant ses études, c'est l'échec.

L'échec est quelque chose de très négatif en France, voire même un tabou. Je pense

que l'on devrait mettre l'accent sur les côtés positifs de l'échec et les leçons que l'on

tire de ses erreurs. Pour moi, un entrepreneur doit sans cesse savoir se remettre en

question et faire évoluer son entreprise, même si son business s'éloigne de l'idée de

départ.

Page 45: Rapport E-Leadership

44

INTERVIEW Est-il nécessaire de passer par une formation spécialisée pour devenir un e-

leader ? Et, si oui laquelle ou lesquelles ?

Je suis persuadé que ce n'est pas nécessaire, mais par contre elles peuvent faciliter

grandement. Le challenge des « Entrepreneuriales » était parfait pour appréhender la

création. Il faut offrir aux élèves des interventions extérieures facultatives, mais qui

nous donne des ouvertures et des éclairages… et aussi envie de faire ! Le mastère

entrepreneurs d'HEC est selon moi un excellent parcours. Ce type de mastère ou de

formation complémentaire n'est pas nécessaire mais est un bon accélérateur,

notamment dans l'accompagnement et le dimensionnement de son projet.

Quelles propositions formuleriez-vous pour développer les compétences d’e-

leader dans les écoles d’ingénieurs du numérique en formation initiale et/ou

spécialisée?

J'en ai fait quelques-unes à l'École des Mines et je m'inspire moi-même beaucoup des

témoignages des autres. Le fait de réussir crée le dialogue.

Je pense que l'entrepreneuriat est avant tout un état d'esprit. La première étape vers

l'entrepreneuriat est à mon avis de lever les freins (comprendre que l'entrepreneuriat

est accessible à tous, qu'il n'y a pas forcément besoin de l'idée du siècle, que le risque

est bien souvent beaucoup plus limité que ce que l'on pense). Pour moi, discuter avec

des entrepreneurs de leurs réussites (ou de leurs échecs) peut être extrêmement

motivant et enlever toutes ces barrières.

Pour autant, on ne pourra pas changer la mentalité de certaines personnes qui

penseront toujours "C'est une École d'Ingénieurs donc on n'est pas là pour former des

entrepreneurs".

Je pense qu'il faudrait simplement donner plus de possibilités, quitte à rendre une

information très courte obligatoire, toujours dans ce but de démystifier, répondre aux

questions. Ça n'a aucun sens d'obliger quelqu'un à être entrepreneur mais il est bon

de lui en donner les moyens s’il veut le devenir.

*Note :quelques éléments sur l'option OMTI « Organisation et Management des Technologies

de l'Information » de l’Écoles des Mines de Nantes :

http://www.mines-nantes.fr/fr/Formations/Ingenieur/Annee-3-Options/OMTI-Organisation-et-

Management-des-Technologies-de-l-Information

http://www.mines-nantes.fr/fr/Formations/Ingenieur/Annee-3-Options/OMTI-Organisation-et-

Management-des-Technologies-de-l-Information/Video

Page 46: Rapport E-Leadership

45

INTERVIEW

PORTRAITS DE E-LEADERS ET RETOURS D’EXPÉRIENCE : Tariq KRIM, Télécom

ParisTech, fondateur de NetVibes

Tariq Krim est diplômé de Télécom ParisTech/UPMC d’un DEA en systèmes de

télécommunications .Il est un des entrepreneurs français emblématique du Web. Agé de

41 ans, il est notamment le fondateur du site Netvibes, pionnier du web 2.0, racheté par

Dassault Systèmes en 2012 pour 50 M€ et actuellement le fondateur et PDG de

Jolicloud.

En 1999, alors qu'Internet n'en est qu'à ses débuts en France, il crée

GenerationMP3.com à San Francisco, ouvrant rapidement une filiale à Paris. À l'origine,

site consacré à la musique en ligne, il devient l'un des principaux blogs spécialisés dans

la technologie.

Tariq Krim est le premier Français à obtenir le prestigieux prix scientifique TR35 de la

revue américaine Technology Review publiée par le MIT, récompensant les innovateurs

de moins de 35 ans. Il est l'une des six personnalités françaises à avoir été désignées

par le Forum économique mondial comme « Young Global Leaders » en 2006.Il est

nommé vice-président écosystème et innovation du Conseil national du numérique

(CNN) pour une durée de trois ans en janvier 2013.

Tariq Krim apparaît régulièrement dans la presse grand public en tant que « spécialiste

des médias sur Internet».

Quelle est votre vision du e-leader ?

Au plan général, un e-leader, c'est tout d'abord quelqu'un qui a une vision pour le

numérique et qui est capable de la mettre en œuvre.

Un e-leader doit être persévérant sur la vision mais souple sur les détails.

C'est ensuite quelqu'un qui est capable de mettre en œuvre, de faire grandir la vision.

Pour cela, il faut qu'il ait la capacité à séduire et à créer un effet d'entraînement, d'autant

plus indispensable que, dans le monde d'aujourd'hui, le monde est moins hiérarchique et

les organisations moins pyramidales.

Le e-leader doit être capable de raconter l'histoire de l'entreprise qu'il développe, de

construire (ou enrichir) la culture de l'entreprise. L'entreprise est de plus en plus une

aventure humaine, à laquelle les collaborateurs ont besoin de croire pour s'investir.

Page 47: Rapport E-Leadership

46

INTERVIEW

Note de lecture Vers un Internet Physique, une nouvelle mutation logistique

Eric Ballot, Professeur, Mines ParisTech

La logistique a considérablement évolué durant les dernières décennies en

accompagnant et en favorisant la transition d’une production de masse régionale à une

production spécialisée mondialisée.

Aujourd’hui, d’autres défis liés à la logistique apparaissent : la consommation des

ressources naturelles notamment fossiles avec les carburants, la pollution, la congestion

ou la pénibilité de nombreux emplois dans ce secteur. Il ne s’agit pas ici de montrer du

doigt un secteur essentiel à l’économie et qui s’est fortement professionnalisé mais de

montrer que les limites qui se font jour relèvent en fait de la nécessité d’une nouvelle

mutation pour faire face aux défis à venir. C’est précisément l’objet de cet article.

Montrer qu’une autre organisation de la logistique est possible et que celle-ci pourrait

fournir un cadre plus favorable pour répondre aux enjeux à venir de la logistique et du

transport de marchandises. Cette organisation, c’est celle de l’Internet Physique qui a

pour ambition une interconnexion universelle de l’ensemble des prestations logistiques.

Dans un premier temps les facteurs d’évolution sont rappelés puis le concept de

l’Internet Physique exposé ainsi que ces principales implications potentielles et les

éléments de réponse aux points soulevés. Enfin, des illustrations à partir de projets en

cours exposent les premiers résultats obtenus.

Le transport de marchandises a connu une évolution majeure en passant d’activités

largement menées en compte propre à des activités logistiques élargies et prestées

auprès de spécialistes qui, non seulement, transportent les marchandises, mais

également les groupent, les stockent ou les préparent. Aux côtés des opérateurs

historiques du transport de marchandises, de la messagerie et des colis, de nouveaux

réseaux se sont constitués. Ces réseaux se sont spécialisés sur des prestations : la

livraison en ville, le stockage, etc., pour répondre aux besoins de certains secteurs :

automobile, pharmacie, grande distribution,… voire sur des modes de transports tels que

la route ou le maritime. Il en résulte la constitution de très nombreux réseaux spécialisés,

voire dédiés à une activité ou à un client. Pour les chargeurs, c’est l’assurance de

trouver une solution en face de chaque besoin, quitte à construire un réseau de

prestations ad hoc, pour déployer des activités à l’échelle mondiale si nécessaire. Cette

organisation associée à des solutions techniques tels que le conteneur, le camion semi-

Page 48: Rapport E-Leadership

47

INTERVIEW remorque ou la palette ont permis un développement remarquable de ces activités à un

point tel que l’on peut quasiment dire que la logistique est victime de son propre

développement. En effet, on n’hésite plus à spécialiser les usines et à transférer les

produits entres-elles sur des échelles géographiques de plus en plus grandes y compris

pour des produits de valeur de plus en plus faible. Des produits électroniques, des

pièces automobiles, du textile,… couvrent ainsi un tour du monde avant de nous

rejoindre. Il en a résulté une augmentation exponentielle du trafic de marchandise, des

tonne.km. En France le trafic de marchandises a ainsi progressé de 50% entre 1994 et

2004, passant de 200Gt.km à 300 Gt.km avant de ralentir sous l’effet de la crise

économique depuis 2007-2008 en Europe. Cette croissance du trafic correspond

d’ailleurs à une fourchette basse comparée à la croissance du transport de

marchandises aux niveaux international ou des pays émergents. Cette croissance se

heurtera naturellement aux ressources nécessaires à sa mise en œuvre et les boucles

courtes d’approvisionnement ne peuvent être qu’un élément de solution.

Parallèlement, l’augmentation de la diversité des produits, qui rend le stockage et la

prévision plus aléatoires, conduit à expédier des quantités qui ne cessent de diminuer

pour tendre vers l’unité dans le cas du commerce en ligne. La logistique est ainsi

devenue un outil dans le prolongement des démarches de juste-à-temps industriel. Ici

encore, cette évolution de la demande n’a pas été sans conséquences. D’une part, les

moyens de transport « lourds » comme le ferroviaire se sont révélés en décalage avec

les attentes des chargeurs malgré leur efficience énergétique (quantité minimale

d’expédition trop élevée, délai trop long, densité des produits manufacturés trop faible…)

et d’autre part même les moyens plus « légers » sont devenus difficiles à remplir malgré

leur plus faible volume et leur grande flexibilité. Il en résulte une désaffection des

moyens lourds – fluviale et ferroviaire –, à l’exception notable du maritime sur lequel on

reviendra, qui occupent une part de marché historiquement basse malgré les annonces

de redéveloppement. Il en résulte également une véritable difficulté pour de saturation

des moyens de transport. Les statistiques européenne indiquent ainsi année après

année un taux de remplissage des poids lourds aux alentours de 70% sans que ce

chiffre n’évolue significativement. En outre, il ne faut certainement pas voir dans cette

stagnation un manque d’implication des acteurs à résoudre ce problème, auquel ils

auraient tout à gagner, mais d’avantage une limite impossible à dépasser en l’état

malgré les innovations compte tenu de l’évolution des tailles des expéditions. On

constaterait sans doute des taux d'utilisation du même ordre de grandeur voire moins

Page 49: Rapport E-Leadership

48

INTERVIEW bons pour les trains, les véhicules utilitaires ou encore les entrepôts mais on ne dispose

malheureusement pas de statistiques fiables dans ces domaines.

On peut analyser ces faits et d’autres de différentes manières, mais on fait ici

l’hypothèse que ceux-ci proviennent de l’organisation même des réseaux logistiques.

Dépasser les limitations ou antagonismes actuels nécessite donc de repenser

l’organisation de ces réseaux autour d’une idée forte : favoriser leur interconnexion. Par

interconnexion des réseaux logistiques, on entend qu’un envoi de marchandises puisse

transiter d’un réseau de prestation à un autre de manière aussi transparente que

possible. Évidemment cela va à l’encontre de nombreux principes actuels mais, on

demande ici au lecteur de ne pas se focaliser sur le cadre actuel et bien vouloir suivre le

raisonnement proposé pour en comprendre la logique et les potentialités. De fait

l’interconnexion existe déjà dans différents types de réseaux électriques par exemple

mais surtout informatique. Le réseau des réseaux informatiques, autrement dit Internet

que tout le monde connaît aujourd’hui provient d’une volonté d’interconnecter des

réseaux au départ hétérogènes, ce qui a permis de créer « l’autoroute de l’information ».

Nous proposons de renverser la métaphore en proposant de travailler à l’établissement

du réseau des réseaux logistiques où tout « paquet » circulerait de manière transparente

de son origine à sa destination empruntant le meilleur cheminement, passant d’un

opérateur à un autre et utilisant des infrastructures de transport de stockage et de

manutention largement partagées. L’Internet Physique serait donc un système logistique

global et ouvert mettant à profit des réseaux logistiques interconnectés par des

conteneurs modulaires et des protocoles de collaborations standardisés. Cette

organisation a pour but de rendre plus efficace et plus durable la logistique. Cette

définition prend évidemment à contre pied un certain nombre de développements

récents de la logistique comme sa spécialisation. On verra cependant qu’une

interconnexion universelle ne signifie ni service identique ni opérateur unique. Mais dans

un premier temps, on revient sur la définition proposée pour examiner quelles seraient

les caractéristiques d’un tel système ?

La première caractéristique de l’Internet Physique est de considérer les réseaux de

prestations logistiques, quel que soit le mode de transport, le service ou le pays, comme

un seul réseau d’un point de vue logique même si formé de nombreux sous-réseaux. À

ce jour il existe des prémisses d’un tel réseau. Dans le domaine du courrier moyennant

un montant forfaitaire, on peut faire parvenir une enveloppe partout dans le monde.

Qu’importe que l’enveloppe soit enlevée par un camion puis prenne le train, passe par

Page 50: Rapport E-Leadership

49

INTERVIEW Orléans, etc. du moment que l’envoi arrive à destination dans le délai promis. Ce service

repose naturellement sur des accords internationaux et des instances auxquels ont

adhéré tous les services postaux. Il se trouve que dès que l’envoie dépasse la taille d’un

petit colis ce service n’existe plus. On trouve également d’autres prémices d’un réseau

de réseaux logistiques mais ceux-ci restent limités à des partenariats bilatéraux (accord

de trafic) ou à des modes de transport (conteneur maritime ou aérien par exemple). La

volonté est de donc de promouvoir des réseaux de prestations ouverts et globaux c’est-

à-dire mondiaux. Mais il faut maintenant s’attacher à définir l’interconnexion des réseaux

de prestations logistiques et les potentiels associés envisageables.

Les réseaux de prestations logistiques actuels, s’ils étaient représentés superposés les

uns aux autres, formeraient autres formeraient un gigantesque entremêlât indescriptible.

En effet, chaque réseau pris indépendamment à sa logique, par exemple une

concentration sur un hub pour servir plusieurs destinations avec la fréquence demandée,

mais au prix de nombreux détours. Un autre opérateur faisant quasiment la même

opération à côté indépendamment. Et une vue plus globale de la demande permettrait

pourtant de remplacer ses services par d’autres à la fois plus concentrés et plus directs !

C’est ce que la mutualisation logistique essaye de faire, mais à une échelle qui reste très

limitée. Ainsi, le fait de pouvoir passer d’un réseau de a par nous il faut entendre Benoît

Montreuil, professeur à l’Université Laval de Québec (Canada) à l’origine de l’idée,

Russell D. Meller, professeur à University of Arkansas et l’auteur de cet article qui ont

travaillé ensemble à l’établissement des concepts présentés ici.

.

Prestation logistique à un autre permettrait à chacun de ces réseaux de se rationaliser. À

la superposition «anarchique» car indépendante des réseaux de prestations se

substituerait progressivement un maillage hiérarchisé des territoires opérés par

différents prestataires. Cette forme de rationalisation a été simulée dans un projet de

recherche et elle montre des enjeux considérables. Par exemple pour tous les flux qui

passent par des entrepôts centraux, la réduction des km parcourus pour atteindre leur

destination finale est de l’ordre de 20% ou plus. À l'inverse bien qu’avec un maillage

réduit du territoire (moins de 40 hubs) les détours sur des trajets préalablement en direct

sont inférieurs à 5%. Globalement et bien que sur un exemple limité c’est plus de 12%

des t.km qui sont évitées. C’est donc un gain net substantiel en transport, en émission et

en congestion. En parallèle, et toujours avec des volumes limités, la consolidation des

flux est telle qu’il devient possible sur les grands axes de remplir des trains quotidiens

entre les hubs principaux, permettant de retrouver une complémentarité entre rail et

Page 51: Rapport E-Leadership

50

INTERVIEW route, avec en France comme conséquence une baisse jusqu’à 2/3 des émissions

globales de gaz à effet de serre du transport de marchandises avec des tractions

électriques. Enfin, le taux de chargement des moyens de transport, toujours du fait de la

consolidation des flux, augmente suivant les simulations réalisées de 60% à 80% en

charge utile, soit environ 33% d’amélioration sans remise en cause des services initiaux.

Pour obtenir ces résultats, il faut non seulement des processus adaptés et partagés mais

également un conditionnement standardisé des marchandises. À ce titre le transport

conteneurisé maritime fournit un précédent impressionnant. En effet si l’on se réfère au

transport de marchandise par cargo avant la fin des années 50, il existait autant de

conditionnement que d’envois, la manutention était peu efficace et chère sans parler de

l’utilisation des navires eux-mêmes. L’arrivée des conteneurs de 20 et 40 pieds munis

d’attaches normalisées depuis, loin de constituer une contrainte, a été un formidable

outil de structuration et de développement du fret maritime, des navires et des ports. Les

conteneurs passent d’un navire à un autre, d’une compagnie à une autre, etc. Le tout

pour un coût bien inférieur à celui qui préexistait. Cependant, une fois arrivé à terre le

conteneur maritime s’interconnecte mal avec les réseaux terrestres : utilisation partielle

de la capacité des semi-remorques du fait de leur taille, pas compatible avec les palettes

(sauf exception), etc. Le principe de la conteneurisation qui protège les biens et permet à

chaque acteur d’avoir un espace privé dans un espace partagé (moyens de transport,

stockage, etc.) est un élément fondamental d’une logistique interconnectée comme le

montre les exemples postaux ou maritimes.

L’Internet Physique propose donc un ensemble de conteneurs de tailles modulaires

fixable entre eux de 3 classes de tailles allant de la classe de taille des conteneurs

maritimes (dizaine de m3) à la classe du décimètre3 en passant par le m3, avec à

chaque fois plusieurs tailles. Ainsi dans le cas des plus gros conteneurs 4 longueurs ont

été étudiées en complément des 20ft et 40ft, permettant ainsi par leurs combinaison de

mieux utiliser les moyens de transport (wagons, camions, barges) tout en offrant une

flexibilité de volumes aux chargeurs, cf. étude citée précédemment. Dans le cadre du

projet européen Modulushcac lancé fin 2012, un consortium d’industriels et

d’académiques s’attache à définir des conteneurs de petite taille adaptés aux besoins

des produits de grande consommation. L’objectif est de définir ces conteneurs

(dimensionnement, fixation, fonctionnalités, matériaux possibles) et de trouver un

compromis sur le nombre de tailles (peu de choix et ils seront difficiles à remplir, choix

Page 52: Rapport E-Leadership

51

INTERVIEW large et ils seront difficiles à gérer). Les premiers résultats à ce niveau sont attendus en

2014.

Munis de ces réseaux et de jeux de conteneurs, on peut envisager le fonctionnement de

l’Internet Physique. On se concentrera ici sur des protocoles opérationnels. Si l’on se

place dans le cas d’un industriel désireux de livrer ses différents clients, il a n’a plus

besoin de concentrer ces produits sur un entrepôt central, à la place il pourra envoyer un

ou plusieurs conteneur, contenant ses produits, à chacun de ses clients. Les conteneurs

sont donc groupés au départ puis arrivent sur un premier hub (routeur en informatique)

qui organise le transfert, le tri et l’assemblage de ces conteneurs avec d’autres de

manière à diriger chacun d’eux vers sa destination finale le plus efficacement possible

compte tenu du service demandé pour chacun. En pratique, ces opérations reposent sur

des algorithmes complexes qui ont été développés et mis en œuvre dans des

simulations pour évaluer l’efficacité du système. En effet, le risque serait un nombre de

ruptures de charge important qui non seulement coûteraient plus chers que les gains

faits en transport mais également compromettraient le délai promis.

Les résultats obtenus avec les algorithmes de routage développés montrent un nombre

de ruptures charge entre 2 et 3 en incluant le report modal, mais avec la possibilité de

s’affranchir d’un passage par entrepôt. Au final, à trajet comparable, il y a 1,3 ruptures

de charge en plus en moyenne suivant les scénarios. Les simulations montrent que non

seulement cela pourrait être tout à fait compétitif en prix, mais également que le délai ne

serait majoré que de quelques heures en moyenne sur des trajets nationaux. Ces

résultats reposent sur des hypothèses de volumes, d’infrastructure de transbordement

que le lecteur intéressé trouvera dans les rapports de recherche, notamment du Material

Handling Institute. Naturellement d’autres éléments sont nécessaires à la mise en œuvre

de l’Internet Physique qui ne repose pas que sur de la logique mais nécessite la

traçabilité des conteneurs, la standardisation des processus de traitement, la publication

des données dans un cadre structuré et protégé et des accords de transfert de flux d’un

opérateur à un autre. Les verrous à lever sont donc encore nombreux mais plusieurs

projets coordonnés en France, en Europe et en Amérique du Nord s’y attachent. En

France, deux projets visent notamment à tester la traçabilité individuelle — Open Tracing

Containers — et l’expérimentation de routage de flux de la grande distribution sur palette

— Centre de Routage Collaboratif. Tous ces projets ont en commun d’être dans un

environnement ouvert et multi-acteurs, notamment en s’appuyant sur les standards

émergents de l’internet des objets pour la communication et la structuration des

Page 53: Rapport E-Leadership

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INTERVIEW données. L’Internet Physique peut être vu comme un système logistique pour améliorer

les pratiques actuelles. Cependant, comme pour Internet qui a commencé avec

l’interconnexion de réseaux informatiques, puis le web, le commerce en ligne… les

potentialités ouvertes et les opportunités de changement apparaissent nombreuses. Si

l’on se projette dans le fonctionnement de l’Internet Physique on peut, sans être limitatif,

imaginer quelques pistes.

- Tous les hubs deviennent aussi « mes » entrepôts.

À partir du moment où l’espace privé se situe à l’intérieur du conteneur, il est possible de

stocker à chaque nœud du réseau qui offre cette fonctionnalité. En lieu et place de

quelques stocks, il deviendrait possible diffuser les produits vers les marchés.

Lorsqu’une demande se manifeste, elle est servie depuis le hub adéquat qui dispose du

produit et le réseau est éventuellement réajusté. De cette manière il n’y a plus des

stocks mais un seul stock avec dans la plupart des cas une pression bien inférieure sur

les délais de transport et un risque de rupture amoindri. L’idée est de diffuser

progressivement les produits en conteneurs en lieu et place de sprints entre lieux de

stockage où les produits attendent des jours voire des semaines. Ici encore des

modélisations viennent conforter les intuitions.

- Utiliser toutes la capacité de transport.

La marchandise étant sécurisée et en sûreté, on peut imaginer que le covoiturage

s’étende à des marchandises conteneurisées. Si l’on considère les trajets récurrents

domicile travail par exemple, il faut admettre qu’il existe une capacité de transport

prévisible et absolument non négligeable notamment en zone dense permettant de

réduire congestion et émissions. La standardisation de petits conteneurs en lien avec

des hubs (gares, zone de rechargement de véhicule électrique, etc.) pourraient favoriser

ce développement tout en réduisant le coût de la mobilité.

- S’abonner à un fournisseur de livraison.

Aujourd’hui de la même manière que les chaînes logistiques des industriels chaque site

marchand confie sa logistique à un prestataire qui gère chacun de ses clients

indépendamment. À l'autre bout de la chaîne, le particulier ou la PME voient défiler les

livreurs avec plus ou moins de bonheur et de succès. Outre la multiplication des moyens

et la faible efficacité globale du système, l’apprentissage est limité et le service réduit. En

revanche si les marchandises commandées, quel que soit le canal, sont finalement

orientées vers le hub d’un opérateur à proximité de mon domicile, celui-ci pourra non

Page 54: Rapport E-Leadership

53

INTERVIEW seulement regrouper les commandes mais aussi me fournir une prestation adaptée à

mon besoin, quotidienne, 2 fois par semaine le soir, le samedi matin, etc.

On le comprend aisément, les possibilités d’utilisation d’un tel système seraient multiples

pour livrer un principe actif en toute sécurité à un conditionneur, pour commander ses

légumes directement à la ferme, etc. et les bouleversements dans les métiers de la

logistique, du tri, du transport également. C’est pourquoi la vision décrite ici ne doit pas

être vue comme une révolution qui arrivera, ce serait aussi irréaliste qu’extrêmement

présomptueux, mais plutôt comme une perspective qui ouvre un champ de possibles et

d’innovation pour préparer une logistique de demain dont nos sociétés modernes ont de

toute façon besoin. Devant l’ampleur de ce projet, il va de soi que ni l’auteur, ni les

quelques projets en cours n’arriveront au bout de la tâche. L’auteur et les équipes qui

travaillent sur ce sujet sont donc particulièrement ouverts à toutes suggestions, critiques,

contributions qui permettront de faire progresser la logistique vers un nouveau cadre

plus innovant et durable.

Page 55: Rapport E-Leadership

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INTERVIEW Note de lecture : Marketing pour ingénieurs: Alain Goudey/Gaël Bonnin – Dunod 2010

La capacité à partager et à faire circuler l'information est essentielle. L’e-leader passe un

temps considérable à communiquer, à mettre en relation, en réseau, à intermédier. La

période où le leader était écouté parce qu'il était le chef est révolue. Il y a de plus en plus

d'entreprises où la capacité à évangéliser, à séduire, a de plus en plus de valeur. La

personne la plus importante chez Apple c'est Johnny Ive, le designer.

Il est capable de s'entourer de personnes complémentaires par rapport à lui et en qui il a

confiance, sur qui il va pouvoir se reposer.

Lorsque c'est un créateur ou patron d'entreprise, dans son rapport au marché, le e-

leader doit être un homme d'action et un opportuniste, les succès, comme les échecs,

étant toujours inattendus. Il faut accepter moins de marketing et plus d'essais-erreurs

dans les tentatives de développement du marché.

Lorsqu'il est responsable du numérique dans une entreprise dont ce n'est pas le cœur

de métier, le e-leader va être le DSI qui sait devenir un CDO (Chief Digital Officer) et

convaincre son COMEX de sortir de l'apport des systèmes d'information à la productivité

pure. Pour devenir un CDO est un catalyseur des opportunités que le numérique offre à

l'entreprise d'attaquer de nouveaux marchés, de capter de la valeur, de transformer le

management interne, de faire du numérique un élément de la culture de l'entreprise.

Aucune entreprise ne peut imaginer réussir, dans aucun secteur d'activité, si elle

persiste à voir le numérique seulement comme un outil.

Comment faire évoluer les formations d'ingénieurs du numérique pour préparer

des e-leaders ?

Il faut mettre en contact les futurs ingénieurs avec le design (avec les designers) et la

relation produit/usage/client. Plus généralement, il faut les mettre en relation avec les

arts, ce qui va cultiver la sensibilité, mettre en relation avec les émotions, pour des

étudiants plutôt cerveau gauche. Il faut leur apprendre à participer et à conduire des

projets de bout en bout, car le e-leader est capable de mener des projets de A à Z. Dans

le même ordre d'idée, pour être un leader du monde numérique il faut savoir

programmer.

L'expérience à l'étranger et/ou dans un environnement réellement multiculturel est

totalement indispensable.

La capacité à travailler sa communication, son image est également essentielle. Je

Page 56: Rapport E-Leadership

55

INTERVIEW pense à la fois à la communication interpersonnelle, aux relations humaines mais aussi

à la communication publique en mode diffusion, au travers notamment des réseaux

sociaux, des tribunes, blogs etc.À cet égard, les formations d'ingénieur n'en font encore

pas assez, sachant que les élèves ont, de part leur mode de sélection mais aussi leur

appétence personnelle, un handicap par rapport à leurs collègues des grandes écoles

de management.

Comme son titre l’indique, l’ouvrage se veut un document de référence pour ouvrir un

public d’ingénieurs aux concepts de base du marketing (stratégie, produit, marché, prix,

distribution, communication), mais au-delà, il vise à ouvrir l’esprit et les yeux des

ingénieurs sur le fait que, de nos jours, l’innovation est plus marketing que

technologique, que, même lorsque l'on est loin du client, « penser client » est

indispensable.

Pour reprendre la citation de Lee Iacocca, qui figure dans la préface d’Hervé Biausser

« Celui qui n’a jamais rien vendu, n’a jamais vraiment travaillé ».

Lorsqu’on lit l’ouvrage avec l’œil de celui qui s’intéresse à l’impact du numérique sur la

fonction marketing/vente, on est tout d’abord frappé par le fait que 60% des exemples

cités sont relatifs soit à des entreprises du numérique (Equipementiers (Motorola, Lacie,

Apple, Cisco), Opérateurs (SFR, Orange), « Over The Top » (Google, Napster, Skype),

composants (AND, Intel), Editeurs logiciels (Dassault systèmes, Microsoft), soit à des

entreprises ayant utilisé le numérique (Air Liquide, GE Security, Intergraph, Fnac, Dow

corning).

Le premier exemple est l’évolution du taux de pénétration d’internet en France pour

parler de l’incertitude de marché.

Venant d’auteurs de Reims Management School et Dauphine pour l’une et de l’EDHEC

pour l’autre, cette place faite au numérique est riche d’enseignements.

Le document mentionne le numérique en ce qu’il transforme les fonctions de marketing

et de la vente, notamment :

- par le test de produits en ligne, avec une ouverture vers le crowdsourcing

- par l’introduction et de développement du multi canal physique/numérique

- par l’impact du numérique sur la stratégie de prix, avec un passage intitulé

« s’adapter à Internet » !

Page 57: Rapport E-Leadership

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INTERVIEW Un chapitre complet est intitulé « Comment utiliser les nouvelles technologies dans la

stratégie de communication ? ». À cet égard, « nouvelles technologies = numérique ». Il

traite successivement :

- du marketing numérique,

- de la communication institutionnelle (site internet),

- de la communication traditionnelle (achat d’espace sur le net, vidéos),

- de la communication relationnelle (MMS, SMS),

- de la communication communautaire (réseaux sociaux),

- de la communication informelle (les blogs, la e-réputation),

- de la communication « virale » (le « buzz »).

Cet ouvrage décrit particulièrement bien l’apport du numérique en matière de

communication commerciale, il montre également l’impact du numérique sur le politique

prix, avec les stratégies du « gratuit », du « freemium », du « yield management » ; il

entrouvre la porte du « crowdsourcing » et fait l’impasse totale sur le « big data »

(probablement apparu post 2010).

Page 58: Rapport E-Leadership

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INTERVIEW

Note de lecture : Quel est l’impact du développement de la culture numérique sur

les entreprises ?

Publication CIGREF « Entreprise et culture numérique »

En synthèse pour développer la culture numérique en leur sein, les entreprises:

doivent repenser leurs modèles économiques et leurs organisations en tenant

compte des comportements des individus et des différents usages possibles de

la technologie.

doivent accepter de partager l’information et la connaissance au sens de

l’entreprise étendue afin de créer une intelligence collective source de valeur.

doivent considérer que le développement des ressources humaines passe par

la reconnaissance des compétences individuelles (numériques et métiers) et

par l’émergence d’e-leaders,

doivent accepter que le corollaire d’une culture numérique ouverte, basée sur la

confiance et l’échange entre les individus et les organisations, nécessite, pour

les entreprises, de faire face à des risques nouveaux,

et que les hommes et les femmes de l’entreprise devront partager une même

vision et avoir des valeurs communes pour accompagner la transformation

numérique de leur entreprise.

À l'origine, le SI avait pour vocation d’automatiser des processus récurrents. Avec

l’avènement des systèmes communicants et du partage d’information, le SI a pris une

réelle dimension stratégique pour les entreprises qui l’ont vu comme un outil

d’amélioration de leur performance et de conquête de nouveaux marchés. Aujourd'hui, le

monde se métamorphose, la culture numérique irradie notre planète, ce qui impose de

repenser le SI comme un outil de transformation et d’adaptation de l’entreprise à son

écosystème : clients, collaborateurs et fournisseurs, pour créer de la valeur :

économique, sociale et environnementale.

Ce n’est donc pas la technologie qui sera le moteur de la transformation des SI et de la

performance d’entreprise mais l’innovation dans les usages et les comportements. À titre

d’exemple le développement de la presse en ligne a permis de faire face au déclin de du

presse-papier : la technologie existe depuis plus de 20 ans mais les comportements ont

changé avec le développement de la mobilité numérique.

Page 59: Rapport E-Leadership

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INTERVIEW Les entreprises natives du numérique ont très vite compris l’intérêt de dématérialiser la

totalité de leurs processus et ainsi d’augmenter leur chaîne de valeur, ce sont souvent

des pure players du web qui ont innové en terme d’usage à partir de technologies

existantes. Les exemples sont nombreux, depuis le commerce électronique, les sites de

rencontres jusqu’aux réseaux sociaux. Ces entreprises ont tout basé sur la capacité

d’évolution de leur SI en fonction de leur business. C’est alors que l’on a vu arriver le

Cloud (externalisation de le puissance machine et des données afin d’assurer une

qualité de service régulier) puis le Big Data (exploitation des masses de données à des

fins d’études comportementales…) pour en arriver à du real time bidding (proposer en

temps réel la meilleure offre en fonction de votre profil) en attendant le web 3

sémantique couplé à l’eye tracking , à des outils de neuromarketing…

Les entreprises historiques sont condamnées à effectuer leur mutation numérique ou à

décliner. Le SI est donc l’épine dorsale de l’ensemble des besoins internes comme

externes de l’entreprise. Si l’entreprise a pris en compte l’impact de la culture numérique

dans ses modèles de management, business, RH… et aussi dans sa relation avec ses

clients et ses fournisseurs alors son modèle économique aura changé avec par voie de

conséquence une adaptation de son SI.

La Fnac a très vite compris les conséquences de la culture numérique sur les

comportements de sa cible de clients et a développé un service multi canal de

distribution cohérent et complémentaire entre ses magasins et le web. Virgin a disparu

par manque de volonté de changement de son modèle. On peut citer aussi les banques

qui ont multiplié les services en ligne et ont augmenté la chaîne de valeur de leurs

processus, le secteur des transports avec l’automatisation totale de lignes de métro

comme Meteor (transport, contrôle des passagers, supervision du trafic, sécurité…),

l’automobile où le coût du produit est à 30% numérique, devient communiquant avec le

SI du réseau de la marque et de ses fournisseurs…

L’exemple industriel de La Poste qui savait depuis l’avènement d’internet et du mail que

son service courrier serait en déclin. Aujourd’hui, le service courrier s’est adapté à la

culture numérique par une refonte complète des processus et des organisations ainsi

que par la création de nouveaux services innovants permettant de fidéliser les clients. La

Poste n’a pas réellement de concurrent sur le segment des services courrier, car elle a

su s’adapter à l’évolution et aux usages de la culture numérique.

Page 60: Rapport E-Leadership

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INTERVIEW Dans tous les cas de transformation d’une entreprise vers le numérique, le SI est

impacté et c’est l’innovation dans les usages qui est l’objectif principal de la stratégie

numérique des entreprises et non pas la techno, le tout sous-tendu par de la création de

valeur. Cette création de valeur doit être aussi bien comprise pour l’entreprise que pour

ses collaborateurs et ses clients car la frontière entre l’entreprise et son écosystème

devient de plus en plus interopérable.

Le SI devra donc s’adapter aux nouveaux modèles du business numérique qui se

décomposent en cinq éléments selon le modèle VISOR élaboré par l’UCLA** :

- Une proposition de valeur au client final même si l’entreprise est un maillon de

la chaîne de valeur,

- Une interface utilisateur fonctionnelle pratique, esthétique, résiliente aux

erreurs…

- Une plate-forme de service collaborative, à valeur ajoutée, d’accès partagé par

tous acteurs,

- Un modèle d’organisation lisible, efficace et de qualité,

- Un modèle de revenus versus qualité de service, adapté aux préférences des

utilisateurs et au prix que le client est prêt à payer.

Dans ces conditions, le rôle des DSI (Directeur des Systèmes d’Informations) selon le

CIGREF* est défini « Comme une aptitude à mobiliser les ressources numériques, en

combinaison avec d’autres ressources et compétences. Il est au cœur de la converge

entre le système d’information et les enjeux stratégiques et opérationnels des métiers. »

En conclusion les SI doivent s’adapter aux nouvelles lois du marché en minimisant les

coûts intermédiaires tout en améliorant la qualité du service rendu au client pour un prix

attractif. Les SI doivent prendre en compte le développement rapide des comportements

dans une société de plus en plus empreinte de culture numérique dès le plus jeune âge.

Les mots-clés sont : innovation, usages, compétences, réseaux, travail collaboratif,

confiance, gestion des risques, respect des individus et des organisations. La

technologie est là, à nous d’en trouver les meilleurs usages pour créer de la valeur

La question que doit se poser un dirigeant n’est pas de savoir si le changement

numérique de son entreprise sera bon, mais s’il faut le réaliser rapidement ?

Page 61: Rapport E-Leadership

60

INTERVIEW Références Biographiques :

*Publication CIGREF et travaux de la fondation CIGERF [email protected] : « Entreprise et culture

numérique » édition juin 2013 et « L’entreprise numérique : Quelle stratégie pour 2015 » édition

décembre 2010 : http://www.entreprises-et-cultures-numeriques.org/publications/ebook-

entreprises-culture-

numerique/?goback=%2Egmp_5072489%2Egde_5072489_member_269861656#%21

** Modèle VISOR élaboré par les professeurs Omar A. El Sawy et Francis Pereina UCLA édition

ibid 2013

Voir aussi : la publication par le CIGREF concernant le cadre de référence sur la

culture numérique d'entreprise http://www.cigref.fr/publications-numeriques/ebook-

cadre-ref-cigref-culture-numerique/index.html

Ce cadre de référence permet à chacun d’évaluer la propre culture numérique de son

organisation. Il sert aussi à identifier les facteurs-clés de réussite et à évaluer les leviers

et les freins. Il aide enfin à savoir comment mobiliser les dirigeants et les collaborateurs.

Il a été expérimenté par des entreprises membres du CIGREF. Il s'intéresse plus à

"mesurer" les pratiques et les usages relatifs à la culture numérique que la maîtrise des

outils et des techniques.

Page 62: Rapport E-Leadership