PRESSE EN REVUE LUNDI 26 OCTOBRE 2015 -...

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I) «Mein Kampf» : un historien répond à Mélenchon SOMMAIRE 1) Il lui répond 2) Une « liste noire » 3) Un delirium tremens à Béziers 4) Communiqué 5) 70 ans 6) « Faire la peau " du PS… 7) Il tend la mains aux musulmans 8) Le front ou pas ?! LA FAMILLE LUNDI 26 OCTOBRE 2015 Gérard Diez La Presse en Revue LA PRESSE EN REVUE... Jean-Luc Mélenchon à Villejuif, le 5 juillet 2015. Photo Jacques Demarthon. AFP

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I) «Mein Kampf» : un historien répond à Mélenchon

SOMMAIRE

1) Il lui répond 2) Une « liste noire » 3) Un delirium tremens à Béziers 4) Communiqué 5) 70 ans 6) « Faire la peau " du PS… 7) Il tend la mains aux musulmans 8) Le front ou pas ?!

LA FAMILLE LUNDI 26 OCTOBRE 2015

Gérard Diez La Presse en Revue

LA PRESSE EN REVUE...

Jean-Luc Mélenchon à Villejuif, le 5 juillet 2015. Photo Jacques Demarthon. AFP

Par Christian Ingrao , chargé de recherches au CNRS

Après le courrier de Jean-Luc Mélenchon demandant aux éditions Fayard de ne pas republier l'ouvrage d'Adolf Hitler, «Libération» publie la réponse de Christian Ingrao, historien du nazisme et chercheur au CNRS.

Monsieur,

Je viens de prendre connaissance de votre courrier à l’éditrice de la maison Fayard, Sophie Hogg, lui demandant de renoncer à l’édition de Mein Kampf et en tant qu’historien du nazisme, je voudrais vous apporter quelques éléments de réflexion.

Votre description du livre d’Adolf Hitler m’a tout d’abord paru pour le moins problématique : «une condamnation de six millions de personnes à mort», vraiment ? Les cinquante dernières années de labeur acharné des historiens, illustrées par l’avènement de l’école fonctionnaliste opposée à cette école intentionnaliste que vous représentez ici involontairement, ont montré que le Troisième Reich ne fut pas la réalisation d’un programme écrit dans l’ennuyeux livre du futur dictateur, mais bien que le génocide constitua l’aboutissement de politiques incohérentes, obsessionnelles, portées à l’incandescence homicide par un mélange de considérations idéologiques, logistiques, économiques et guerrières. Ni les usines de mort ni les groupes mobiles de tuerie ne sont annoncés dans Mein Kampf et il est tout simplement faux de penser accéder à la réalité du nazisme et du Génocide par la seule lecture du piètre pamphlet du prisonnier autrichien.

Vous me direz : «Raison de plus pour ne pas le publier !» et je n’en aurais pas disconvenu avant de vous lire. Mais votre argumentation m’a au fond convaincu du contraire. Il est nécessaire de re-publier ce livre harnaché de ce discours historien dont vous faites peu de cas pour pallier la pathologisation du dictateur et la surestimation de sa lourde prose. Il faut montrer en pleine lumière qu’Hitler fut le révélateur d’une immense crise politique non seulement allemande mais européenne. Ni psychopathe halluciné, ni magicien manipulant les foules, Hitler dicta un essai besogneux qu’il faut montrer comme tel. Il fut aussi et surtout le catalyseur d’un projet

politique dont il faut montrer les évolutions, traquer les cohérences internes et, inexorablement, souligner la grande attractivité.

En d’autres termes, il faut s’adresser à des lecteurs comme vous, Monsieur, pour les conduire à cesser de rejeter Hitler et Mein Kampf dans le pathologique et la démonologie, pour les conduire à penser en termes historiens et politiques, simplement. Il faut arrêter de croire que Mein Kampf nazifierait les égarés qui tomberaient dessus par accident. C’est un livre qui ne peut convaincre que des convertis.

Vous me pardonnerez, je l’espère, de ne pas souscrire non plus à la formule choc «éditer c’est diffuser». Voilà bien le propos de quelqu’un qui n’a jamais tenté de trouver ce texte, et je vous comprends. Mais la recherche «Mein Kampf PDF» est la deuxième plus populaire quand on tape les premiers mots du titre dans Google, et il faut deux clics de souris pour y accéder. Allez-vous écrire une lettre aux fondateurs de Google ? J’imagine les nababs de Mountain View passablement occupés à imaginer le futur augmenté de notre planète et me demande bien comment ils recevraient votre courrier…

Regardons la réalité en face : le livre est immédiatement disponible à quiconque veut le trouver et l’édition que projette Fayard, en rendant la lecture du texte plus technique, ne me semble pas risquer de le rendre plus attractif. Garni de longues introductions, bardé de notes infra-paginales et de renvois d’index, le texte dont les historiens se seront saisis sera lisible pour ce qu’il est, mais aussi pour ce qui aura été créé. Et il sera enfin disponible pour les enseignants, étudiants, et lecteurs curieux qui veulent accéder au texte pour s’en faire une idée.

Vous faites ensuite appel à la mémoire de la maison Fayard et des précédentes éditions de Mein Kampf, caviardées et sorties avec l’aval d’Hitler. Je suis heureux de vous annoncer que cette fois-ci il n’en est rien et qu’il y eut aussi à l’époque une édition qui provoqua la fureur du dictateur et l’incita à ester en justice.

Mais anecdote que tout cela. Ce qui se dit dans votre propos, sur un monde sans mémoire, est bel et bien ce qui constitue mon désaccord suivant. Non, monsieur Mélenchon, le monde n’est pas sans mémoire : la guerre en Yougoslavie, par exemple, cette guerre monstrueuse, a bien surgi aussi d’un trop-plein de mémoire ; la dernière transgression de M. Nétanyahou n’est pas de

II) Travail dissimulé : une "liste noire" sur Internet des entreprises condamnées

l’ordre de l’amnésie, mais du calcul politique et de l’instrumentalisation d’une mémoire précisément encore si douloureusement omniprésente qu’elle est entourée du halo du tabou.

Editer Mein Kampf, c’est précisément lutter contre cette mise en tabou, c’est refuser de sacraliser négativement ce texte si pataud. C’est lui opposer le savoir et l’éclairage historiens en muselant véritablement un texte dont on sent bien que son halo excède de très loin l’effet de sa lecture.

J’ai enfin, je l’avoue, beaucoup moins de prise et d’avis sur la question morale qui constitue le dernier axe de votre courrier. Vos propos sur l’ignominie et l’horreur que vous inspire le projet me semblent devoir être portés au crédit de la rhétorique de votre adresse car je vous avoue réserver pour ma part mes larmes et ma nausée aux charniers de Syrie et d’Irak, aux noyés de la Méditerranée, à l’incurie étatique de Calais, et certainement pas à ce texte.

Vous abordez cependant ensuite les aspects financiers de la question, et «la vertu, la brûlante exigence […] qui doivent commander à ceux qui ont l’honneur d’être les "pousse à penser" de leurs lecteurs». Décrites ainsi, la condition de l’éditeur et celle de l’historien sont bien lourdes à porter et très intimidantes. Mais croyez-vous sérieusement que de ne pas éditer Mein Kampf va changer quelque chose à l’éventualité de la victoire de madame Le Pen aux élections régionales dans la région Nord-Pas-de-Calais ? Croyez-vous vraiment qu’éditeurs et historiens auraient quelqu’efficace à offrir leur abstention de publication tels des héros achéens leur poitrine pour empêcher des hordes brunes d’accéder à la représentativité ?

Ce n’est pas en empêchant un projet scientifique de venir à terme que ceux auxquels ces choses importent vont retrouver prise sur le réel de la politique. L’urgence, en politique, c’est de formuler enfin un projet fédérateur, une manière d’avenir que les hommes, les femmes et les enfants de France et d’Europe voudront vraiment vivre ensemble. Loin de moi l’idée de donner conseil à quiconque : j’ai trop travaillé sur des intellectuels militants nazis et génocidaires pour me permettre de sortir de mon rôle d’historien. Mais chacun son métier, sa fonction, ou son office, Monsieur : les historiens et les éditeurs sont là pour écrire des livres et parler du passé ; les hommes politiques pour parler d’avenir.

Je vous adresse mes sentiments les plus cordiaux.

Christian Ingrao a publié un ouvrage au sein de la maison d’édition Fayard.

Christian Ingrao chargé de recherches au CNRS

Par latribune.fr

Y figureront notamment l'identité des personnes physiques (nom, prénom, date et lieu de naissance...), leur adresse professionnelle, la nature de l'infraction, ainsi que la durée et la date de fin de diffusion. (Crédits : reuters.com)

De quoi dissuader les entreprises fraudeuses ? Un juge condamnant une personne ou une entreprise à une amende pour travail illégal peut désormais rendre publique son identité sur le site internet du ministère du Travail, selon un décret paru vendredi 23 octobre au Journal officiel. Le décret d'application dit "liste noire" est entré en vigueur samedi.

Cette "peine complémentaire" est rendue possible par la loi dite "Savary" du 10 juillet 2014 "visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale". Elle est à la discrétion du juge pénal qui fixe la durée de la publication, dans la limite de deux ans.

Nom, adresse et nature de l'infraction

Cette liste sera "consultable librement et

III) Béziers : trois opposants à Robert Ménard menacés de mort

gratuitement par toute personne" dans une rubrique dédiée sur le site du ministère du Travail, précise le décret signé par le Premier ministre Manuel Valls et deux ministres, Myriam El Khomri (Travail) et Christiane Taubira (Justice).

"C'est la première fois en France qu'un juge pourra prononcer une peine complémentaire d'affichage d'une décision de condamnation en matière de travail illégal sur un site internet, accessible à tous", s'est félicitée Myriam El Khomri dans un communiqué.

Y figureront notamment l'identité des personnes physiques (nom, prénom, date et lieu de naissance...), leur adresse professionnelle, la nature de l'infraction, ainsi que la durée et la date de fin de diffusion. Les entreprises seront nommées, ainsi que l'identité de leur représentant légal "lorsque celui-ci est également condamné", précise le décret.

La ministre du travail a qualifié d'"extrêmement dissuasive" une telle publication, qui vise notamment à assurer "une transparence sur les pratiques frauduleuses des entreprises".

(avec AFP)

Un courrier à l'effigie du Klu Klux Klan a été envoyé au siège du Parti communiste. L'un des élus visés fait le lien entre son engagement et ces menaces.

Crédit : REMY GABALDA / AFPRobert Ménard le 18 mai 2015, à Toulouse.

par Marine Cluet

Connus pour leurs actions contre la politique de Robert Ménard, l'élu communiste de Béziers, Aimé Couquet et les deux militants Linda Mendy-Hamdani et Mehdi Roland ont reçu une lettre de menaces de mort, rapporte samedi 24 octobre Midi Libre. Envoyé au siège du Parti communiste biterrois le 21 octobre, le courrier, insultant et truffé de fautes d'orthographe, affiche une du Klu Klux Klan en en-tête.

Connus pour s'être opposés au maire de Béziers proche du Front national notamment sur la question des réfugiés syriens, les trois personnes visées avaient par ailleurs été qualifiées de "militants de la haine" dans le bulletin municipal du 15 octobre, rapporte Metronews.

Crédit : Capture d'écran "Midi Libre".Des opposants communistes à Robert Ménard ont reçu des menaces de

mort

Pour Aimé Couquet, aucun doute : il y un lien direct entre son engagement et ces menaces : "Par ses propos et ses interventions musclées, le maire de Béziers crée dans notre ville un climat délétère

IV) Le tripartisme est une machine à nourrir le FN

de suspicion et de dénonciation. Peut-être cela pèse-t-il dans le comportement de certains individus qui croient que tout est permis ? Ce n'est pas cela qui nous fera reculer dans notre résistance". Il a refusé de porter plainte, au contraire de Mehdi Roland qui dit vouloir étudier le cas avec son avocat selon le quotidien régional.

Des propos qui n'ont pas manqué de faire réagir le maire de Béziers. S'il condamne le courrier, "le fait d'abrutis", il considère qu'utiliser cette histoire à des fins politiques est "minable". "Je ne rends personne responsable des graffitis me visant. Aimé Couquet a une attitude minable. Si ces faits sont graves, on commence par porter plainte avant de prévenir la presse.

rtl.fr

LAPRESSEENREVUE.EU

Communiqué d'Eric Coquerel

La comédie de DPDA sur France 2 et les réactions surjouées de Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy et Jean-Christophe Cambadélis ont permis à la responsable politique la plus avantagée par les grands média de se « victimiser » à bon compte.

Cet épisode a surtout confirmé la volonté d’imposer le tripartisme. Nous rappelons qu’il s’agit d’une fiction politique qui laisse de côté les millions d’électeurs de la gauche anti-austérité et écologique que nous représentons.

En réalité le tripartisme est une machine à nourrir l’austérité et le FN.

Nous le dénonçons. Nous demandons à ce que notre liste Nos Vies D’abord, comme toutes celles que nos partis animent dans le pays, ait l’accès à part entière à tous les débats audio-visuels,

notamment ceux du service public de France 3 régions.

Les co-animateurs de la campagne "Ile-de-France, nos vies d'abord !" :

Pierre Laurent, Tête de liste FDG en Île-de-France,Clémentine Autain, tête de liste FDG en Seine-saint-DenisEric Coquerel, tête de liste FDG à Paris,

V) La Sécurité sociale : 70 ans de plus ?

Par Mathieu Magnaudeix

La Sécurité sociale vient de fêter ses 70 ans. Envié à l'étranger, notre système de protection sociale né en 1945 paraît fatigué. Et il est souvent contesté. Est-on en train de démanteler la protection sociale ? Assiste-t-on au contraire à sa transformation, mais dans ce cas pour plus ou moins de protections ? Deux économistes débattent.

Le 6 octobre, François Hollande a fêté les 70 ans de la Sécurité sociale. L'anniversaire n'a pas été célébré en fanfare. En 1945, au sortir de la guerre, l'idée était d'offrir à chacun, sans distinction de classes, une protection sociale solidaire contre les aléas de la vie, la maladie, le chômage, la vieillesse, ou la prise en charge des enfants. Soixante-dix ans plus tard, notre bon vieux système de protection sociale paraît fatigué. La protection sociale à la française, qui a été un puissant moyen de réduire les inégalités, est souvent vue comme un malade ou comme un problème. Certains veulent la réduire ou la privatiser. D'autres pensent qu'elle crée des « assistés ». D'autres enfin, plus progressistes, estiment que son modèle paternaliste et familialiste n'est plus adapté à la société d'aujourd'hui.

Est-on en train de démanteler la protection sociale

Assiste-t-on au contraire à sa transformation, mais dans ce cas pour plus ou moins de protections ? Pour en débattre, nous avons réuni Nathalie Coutinet, économiste à l'Université de Paris 13 et membre du collectif des « économistes atterrés », et Bruno Palier, directeur de recherche du CNRS à Sciences Po et coauteur de Refonder la protection sociale (Presses de Sciences Po).

mediapart.fr

VI) Régionales: Cambadélis accuse Le Monde de vouloir "faire la peau" du PS

Le Premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis s'adresse à la presse, le 18 octobre 2015 à Paris

© FRANCOIS GUILLOT

Le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, a accusé samedi le journal Le Monde de vouloir "faire la peau" du Parti socialiste, après une Une...

Le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, a accusé samedi le journal Le Monde de vouloir "faire la peau" du Parti socialiste, après une Une consacrée aux élections régionales, le quotidien répliquant n'avoir "fait que rendre compte d'un dilemme" d'élus socialistes.

" a décidé de faire la peau au @partisocialiste pour installer une France FN/ Républicains sans gauche!", a tweeté M. Cambadélis, joignant à ce commentaire une image de la Une du journal daté de dimanche-lundi.

Sollicité par l'AFP, le directeur du Monde Jérôme

Fenoglio a affirmé: "Nous n'avons fait que rendre compte d'un dilemme qui est évoqué par plusieurs élus socialistes", ajoutant: "Notre intention n'est évidemment pas celle dénoncée par M. Cambadélis dans son tweet".

La Une en question est titrée: "Régionales: le dilemme du PS, aider la droite ou favoriser le FN". En manchette, le quotidien indique que la question de savoir s'il faut "faire barrage" au parti de Marine Le Pen à l'issue du premier tour des régionales "empoisonne les socialistes à six semaines du scrutin".

"Trois scénarios existent", écrit Le Monde, toujours en Une: "maintenir la liste au risque de favoriser le FN, la retirer et renoncer au conseil régional pour six ans, fusionner avec Les Républicains".

Le journal souligne ensuite que "dans le Nord-Pas-de-Calais et en PACA, où le FN pourrait l'emporter, des têtes de listes départementales socialistes confient leur désarroi", renvoyant à un article dans les pages intérieures, intitulé "Droite ou Front national, la gauche dans l'embarras".

Le secrétaire national du PS aux élections Christophe Borgel est lui aussi intervenu sur le réseau social Twitter pour regretter cette Une du quotidien. "Euh , on a le droit de se battre pour que la gauche existe dans ces deux régions ?", a tweeté le député de Haute-Garonne.

La Une du Monde daté du 10 octobre, qui titrait sur un PS "rongé par ses divisions" aux régionales, avait déjà fortement déplu au premier secrétaire du parti.

"Une spéculation dans le Nord et un désaccord dans le Rhône sur 13 régions, c'est, pour +Le PS rongé par ses divisions+ Affligeant!", avait alors tweeté M. Cambadélis.

publicsenat.f

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VII) Pierre Manent: «Il faut faciliter l'engagement des musulmans dans l'aventure française»

Par Anastasia Vécrin et Léa Iribarnegaray

Pierre Manent: «Il faut faciliter l'engagement des musulmans dans l'aventure française» Dessin Sylvie Serprix

Dans un essai polémique, le philosophe prône une meilleure reconnaissance des pratiques liées à l’islam tout en demandant aux musulmans de renoncer à des positions «défensives» et «communautaires».

Il a fait couler déjà beaucoup d’encre avec Situation de la France, «modeste» essai comme il le qualifie lui-même. Il a été face à Alain Finkielkraut, en deux volets, dans le Figaro. Commenté durement par Pascal Bruckner dans les colonnes du Point, en débat avec le cardinal Gerhard Müller dans l’Obs… Certains l’ont jugé courageux, d’autres défaitiste, en tout cas Pierre

Manent a surpris. Philosophe libéral catholique, disciple de Raymond Aron, il tend la main aux musulmans, ce que des ténors de gauche ne feraient pas au nom de la laïcité. Mais le fait-il vraiment ? Oui, mais si, et seulement si, les musulmans acceptent de passer un contrat social avec la nation, tout en rompant définitivement leurs liens politiques, économiques, financiers et culturels avec des pays islamiques perçus comme «dangereux» et «inquiétants». De vaillant essayiste, Pierre Manent défend, en fait, une bonne thèse de catholique de droite : le salut de la France passerait, selon lui, par un sursaut national et chrétien…

Vous partez du constat d’une scission entre Européens et musulmans, entre «eux» et «nous». Pourquoi appréhender l’islam comme un «problème» ?

Parce que c’en est un ! La première face du problème, c’est la méfiance réciproque. Méfiance des non-musulmans à l’égard des musulmans, et méfiance des musulmans à l’égard du reste de la société. Les musulmans ont tendance à rester sur leur quant-à-soi, gardant une position purement défensive et n’intervenant dans l’espace public que pour leurs affaires propres. Et pour se plaindre de l’«islamophobie». Du côté des non-musulmans, on ne sait parler que le langage de la laïcité. Les uns et les autres, nous sommes confrontés à la limite de la disposition collective dans laquelle nous sommes respectivement engagés.

L’appréhension des non-musulmans à l’égard des quelques millions de musulmans installés en France est avant tout déterminée par le fait que ceux-ci sont une partie du vaste ensemble du monde arabo-musulman - l’oumma, la communauté des croyants parcourue aujourd’hui de mouvements extrêmement destructeurs. Le problème majeur, c’est cette dépendance des musulmans français à l’égard de l’ensemble musulman. Leurs organisations sont largement influencées par leurs pays d’origine, en particulier l’Algérie et le Maroc. Leurs associations cultuelles et culturelles sont dépendantes financièrement de pays et d’organisations étrangères qui, parfois - je pense aux pays du Golfe -, ont une conception de la vie sociale ou personnelle très éloignée de ce que nous considérons comme juste.

Vous vous représentez les musulmans comme extérieurs à la société. Mais ce qui reste en silence dans ce livre, c’est toute cette vie commune qui existe malgré tout.

Précisément, il n’y a pas tellement de vie commune. On observe une extension et une consolidation d’îlots de sociabilité distincts. Certains quartiers, certaines communes, notamment dans le sud de la France, sont devenus parfaitement homogènes : boucheries exclusivement halal, présence dans la rue presque exclusivement masculine… Bien sûr, les musulmans étant très nombreux en France, les parcours varient énormément. Un nombre indéterminé d’entre eux est entré franchement dans la vie nationale. Je crois cependant que la

cristallisation communautaire se confirme plutôt qu’elle ne tend à disparaître.

Selon vous, la laïcité est inadéquate pour faire coexister les différentes «masses spirituelles». Pourquoi ?

Au sens strict et originel du terme, la laïcité signifie la séparation de l’institution religieuse et de l’institution politique. L’Eglise ne commande pas à l’Etat, l’Etat ne commande pas à l’Eglise. Et l’école publique, ouverte à tous, est indépendante de toute influence religieuse. Puisque la laïcité a effectivement réglé un certain nombre de problèmes dans le passé, on s’imagine que nous pouvons l’appliquer à nos problèmes contemporains. Mais pour ce faire, nous en changeons le sens. Aujourd’hui, on voudrait faire de la laïcité un projet de société. On envisage une sorte de neutralisation religieuse de la société. Cette entreprise me paraît assez mal conçue. La religion est une chose sociale, elle s’exprime naturellement dans la société. Le projet de la rendre la plus invisible possible dans l’espace public nous engage dans une entreprise indéterminée et illimitée. Si l’on ne se contente pas de quelques mesures cosmétiques limitant les signes religieux dans l’espace public, si l’on entend parvenir à un «espace public nu» (et sans signes religieux) comme disent les Américains, on s’engage alors dans une entreprise qui a quelque chose de tyrannique.

En quoi consiste le compromis avec les musulmans que vous appelez de vos vœux ?

Le but est de permettre une participation plus complète et plus heureuse des musulmans à la vie nationale. Comment ? Il est entièrement légitime que la République interdise certaines conduites autorisées par l’islam, comme la polygamie et le voile intégral. Mais, en général, je suis sceptique sur l’efficacité d’une réforme des mœurs par la loi. Je crois davantage à une démarche indirecte qui inviterait les musulmans à sortir de leur quant-à-soi et à entrer vraiment dans la vie commune, ce qui aurait des conséquences sur leur manière de vivre. Je suggère alors que l’on soit moins vétilleux, moins en garde, par exemple contre leurs pratiques alimentaires, afin que les musulmans soient plus confiants dans la société où ils se trouvent maintenant, que soit facilité leur engagement dans l’aventure française, et que leur avenir soit du côté de l’appartenance à cette nation européenne qu’est la France.

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Mais vous demandez aux musulmans des contreparties…

Il faut être exigeant sur l’aspect politique, c’est-à-dire sur l’indépendance organisationnelle, financière, intellectuelle, des musulmans français, ou des Français musulmans. Pour que les musulmans inscrivent leur vie dans l’espace français, les gouvernements doivent prendre certaines décisions. Depuis la constitution du Conseil français du culte musulman, il n’y a eu aucun progrès. Cette institution est largement décorative et n’accomplit pas ce que l’on attendait d’elle. Elle est d’ailleurs extrêmement opaque et divisée, et le moins que l’on puisse dire est qu’elle n’inspire guère confiance ni aux musulmans ni aux autres.

Les musulmans ne peuvent pas vivre indéfiniment dans cette incertitude d’appartenance. Dans ce contexte, la question de la langue est décisive. Le français est la langue de la République : le gouvernement serait dans son droit en pressant les associations musulmanes d’être instruites par des figures d’autorité françaises, parlant français, et ne dépendant pas de pays étrangers. Aucun gouvernement français n’a encore pris de mesure sérieuse en ce sens. Ils sont plutôt tentés de sous-traiter la question de la formation des imams à un pays musulman «ami».

Le salut viendrait selon vous d’un sursaut national et chrétien, un programme qui paraît très réducteur et même anachronique.

Il est vrai que je prends très au sérieux la composante chrétienne de la France. Le langage public actuel tend à parler de la vie sociale uniquement en termes de droits individuels. C’est très réducteur car nous appartenons aussi à des groupes, à des formes de vie communes. Nous devons cerner plus précisément le caractère de cette France dans laquelle nos concitoyens musulmans s’inscrivent et dont ils doivent devenir les participants à part entière. On ne peut pas simplement dire que l’islam entre dans un pays laïc. Notre régime politique est laïc, mais notre pays est par ailleurs marqué par certaines traditions et par une longue et complexe éducation, dont le christianisme fait partie.

De même que nous avons décidé que la nation était derrière nous, nous pensons que la religion appartient au passé. C’est une double illusion. Evidemment, nous ne reviendrons pas à «la France toute catholique», mais dans la redéfinition constante de la communauté

nationale, les religions, y compris le christianisme, auront leur part, proportionnelle à leur dévouement.

Si l’Europe et la nation sont toutes les deux fragilisées, pourquoi privilégier la nation ?

C’est la question fondamentale, indépendamment de la question musulmane. Ce que l’on a espéré longtemps de l’Europe n’advient pas ou advient de moins en moins. Cela fait des décennies que nous sommes supposés dire adieu aux nations. Néanmoins, comme le montre la crise migratoire, dès qu’il y a un problème sérieux, celles-ci reviennent au premier plan. L’essentiel de nos vies se situe toujours au sein des nations. Elles ne ressemblent plus guère à celles de jadis - elles sont moins sûres d’elles-mêmes, moins orgueilleuses - mais l’expérience politique déterminante reste nationale. C’est seulement dans cet espace que l’on peut conduire une éducation complète et partagée, jusqu’à trouver un chemin de perfectionnement commun. Le sentiment national est aujourd’hui malheureux et réactif. On se sent menacé par l’immigration, par la mondialisation, par toutes sortes de choses. Cette réassociation, à laquelle les musulmans prendraient part, et dans laquelle tous les Français redécouvriraient l’importance de l’association nationale comme cadre de production d’une nouvelle vie commune, me paraît être une perspective encourageante. Mais je ne prophétise pas.

Anastasia Vécrin , Léa Iribarnegaray

situation de la france de pierre manent Editions Desclée de Brouwer, 173 pp., 15,90 €.

Régionales : Dray appelle le PS à ne «pas se laisser impressionner»

Julien Dray le nouveau sage du PS !

Le socialiste Julien Dray, proche de François Hollande, estime que le combat des régionales n'est pas perdu pour

la gauche. (Capture écran)

Fâché, Julien Dray. Le vice-président de la région Île-de-France, en campagne comme tête de liste pour le Val-de-Marne aux côtés de Claude Bartolone, s'est inscrit en faux, avec vigueur, contre les prédictions d'une défaite de la gauche début décembre aux régionales.

« La bataille sur le terrain ne fait que commencer, je le dis à mes camarades, ne vous laissez pas impressionner », martèle le socialiste au Grand Rendez-vous d'Europe 1 – iTélé – Le Monde. « Si la gauche était unie en PACA et dans le Nord Pas-de-Calais Picardie, elle pourrait se maintenir au second tour et même l'emporter. (…) En Normandie, en Île-de-France et en Bourgogne France-Comté, les sondages nous donnent à deux points de différence, c'est-à-dire la marge d'erreur » des enquêtes d'opinion.

http://dai.ly/x3ayn42

Régionales : "le scénario n'est pas écrit à l'avance", affirme Julien Dray

Samedi, le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis, a accusé le quotidien Le Monde de « faire la peau au parti socialiste », en titrant à la Une « Régionales : le dilemme du PS, aider la droite ou favoriser le FN ».

.@lemondefr a décidé de faire la peau au @partisocialiste pour installer une France FN/ Républicains sans gauche! pic.twitter.com/STKVKrelfD

— Jean-Chr. Cambadélis (@jccambadelis) 24 Octobre 2015

A son tour, Julien Dray s'est montré irrité du traitement par les médias de la « bataille perdue » des régionales et de la victoire annoncée du Front national dans certaines régions. « Quand je me lève le matin, je me demande : Pourquoi je fais campagne puisque le résultat de l'élection est dans la presse du soir ?... » Selon lui, c'est « le jeu du grand frisson », qui consiste à « se faire peur avant que la campagne se soit déroulée ».

« Le Front national est un baromètre dans les sondages. Or, ça fait plusieurs élections que la réalité électorale n'est pas au rendez-vous des sondages. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de déception (à l'égard de la gauche et du gouvernement, Ndlr), pas de crise, je dis que la réalité électorale n'est pas encore écrite », assure-t-il alors que de nombreuses enquêtes donnent deux à trois régions au parti frontiste.

Interrogé sur les stratégies de Front républicain entre les deux tours, Dray s'est même emporté : « Je vais arrêter de parler, je ne veux pas rentrer dans ce débat. Vous êtes en train de tuer la campagne du premier tour pour ne me parler que du deuxième tour. C'est incroyable ! »

http://dai.ly/x3ayly8

Julien Dray face à Jean-Pierre Elkabach

Dans les réunions d'appartement qu'il organise dans le Val-de-Marne pour sa campagne, l'ancien député de l'Essonne affirme rencontrer « une ambiance de déception diffuse ». Surpris, dit-il, que le débat porte très peu sur l'économie et les questions sociales, Dray affirme que « la grande question posée, c'est l'angoisse sur l'éducation. La gauche doit être beaucoup plus offensive sur son projet éducatif et culturel », estime-t-il donc.

Dray, qui fait partie des visiteurs réguliers de François Hollande à l’Élysée, défend posément le bilan du président de la République. « Les choses ont été compliquées au départ, on ne s'est pas assez expliqués », analyse-t-il, ajoutant que « ce n'est pas un problème de casting » gouvernemental. Tout juste concède-t-il que « la gestion du conflit à Air France par l'exécutif n'a

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pas été bonne. Il faut toujours être équilibré. Il faut dénoncer les violences mais pas donner le sentiment aux salariés qu'on est d'un côté et pas de l'autre, parce que la violence est aussi sociale ». « Si vous voulez me le faire dire, moi je n'aurais pas employé le terme voyou, finit-il par lâcher. Manuel Valls appréciera.

Dray et Macron discutent la nuit

Entre l'ancien trotskyste Dray, 60 ans, qui cite volontiers François Mitterrand, et le jeune ministre de l’Économie Emmanuel Macron, 37 ans, qui ne s'est jamais frotté au suffrage universel, s'est nouée une forte amitié. « Emmanuel Macron est une voix qui va compter ». « On parle souvent. La nuit, parce qu'on on est deux noctambules, en tout bien tout honneur au téléphone », a-t-il raconté. « Ce n'est pas le père qui dit au fils. On n'a pas la même histoire politique. (…) Il me dit parfois que j'ai une vision dépassée », a-t-il poursuivi.

Son poulain pourra-t-il résister à son envie de tout bousculer, qui lui a fait dire quelques propos mal accueillis au PS ? « C'est là qu'on va voir s'il a de la densité, s'il n'est pas grisé par l'euphorie du pouvoir et qu'il se concentre sur ses dossiers et sur les idées », plaide Dray qui voit en Macron une promesse de « tornade ».

VIII) Régionales : les socialistes agacés par l’éventuel "front républicain" contre le FN

Claude Bartolone, chef de file PS pour les régionales en Ile-de-France, le 22 octobre 2015 à Paris, © 2012 AFP

La question du second tour des régionales et d'un éventuel "front républicain" pour empêcher le Front national d'emporter une région, relancée par les résultats d'un récent sondage, met sous pression les socialistes, qui ne cachent plus pour certains leur irritation.

La Une du Monde de dimanche-lundi titrée : "Régionales : le dilemme du PS, aider la droite ou favoriser le FN" a suscité un tweet virulent samedi du premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, selon lequel le quotidien a "décidé de faire la peau au @partisocialiste pour installer une France FN/Républicains sans gauche".

Niant une telle "intention", le directeur du quotidien Jérôme Fenoglio, sollicité par l’AFP, a répliqué qu’il s’agissait de "rendre compte d’un dilemme" évoqué par plusieurs élus socialistes.

A quelques semaines des élections régionales (6-13 décembre), Daniel Keller, le grand maître du Grand Orient de France, s’est alarmé pour sa part dans le Journal du Dimanche du "tapis rouge" qu’on "déroule" au FN et a exhorté au "désistement républicain" en cas de triangulaire, persuadé que "la République est en danger".

Il y a près d’un mois, le Premier ministre Manuel Valls avait déclaré que "tout sera fait" pour empêcher la victoire du FN dans certaines régions notamment en Nord-Pas-de-Calais/Picardie, appelant la gauche à l’unité et la droite à "ne pas courir derrière le FN".

Il n’avait pas voulu s’exprimer sur un désistement

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de la gauche en cas de danger de victoire de l’extrême droite, alors que le premier secrétaire du PS avait pris mi-septembre ses distances avec le "front républicain".

Si une disparition de la gauche des assemblées régionales semble difficile à envisager pour certains socialistes, qui déplorent parallèlement une droitisation accrue de certains élus LR, la maire PS de Paris a défendu en septembre cette option, "là où il y aura un risque majeur" de présidence FN.

"Avant de se tordre trop le cerveau, il faut essayer de faire en sorte que cette situation ne se réalise pas", selon certains poids lourds socialistes.

- "Scénario du grand frisson" -

Convaincu qu’"une élection n’a jamais été faite par les sondages" ni par la presse mais aussi que le climat était moins à "la rancune" envers la gauche qu’avant les municipales, le chef de file PS pour les régionales en Ile-de-France Claude Bartolone en a dimanche appelé aux électeurs de gauche tentés par une abstention pouvant donner les "clés du pouvoir à l’extrême droite ou à la droite".

Vice-président du conseil régional d’Ile-de-France, Julien Dray a regretté lui un "scénario du grand frisson du Front national", notamment dans les médias, n’excluant pas, comme d’autres, que la gauche puisse ne conserver plus que trois des treize nouvelles régions.

Pas question de prendre position sur un choix d’entre-deux-tours susceptible de décourager des électeurs, alors que la bataille des régionales "commence à peine", que la "cristallisation" se fera dans la dernière ligne droite et que le total des voix de gauche au soir du premier tour n’est pas connu, estiment certains élus.

Mais "quand il a fallu prendre ses responsabilités, le PS l’a fait", a glissé M. Dray.

Du côté de la droite, le chef de file de la droite et du centre dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie Xavier Bertrand (Les Républicains) a exclu dimanche une fusion éventuelle avec la liste du socialiste Pierre de Saintignon en vue du second tour pour contrer une victoire Marine Le Pen, ce qui relèverait de "manœuvres IVe République".

Quant au député Les Républicains et ancien secrétaire d’État Frédéric Lefebvre, il a estimé

samedi, dans Le Figaro, que l’action "de concert" du patron du PS et de celui de son parti, Nicolas Sarkozy, face à l’invitation de Marine Le Pen à l’émission de France 2, "Des paroles et des actes", constituait "une forme de +front républicain+ par anticipation" risquant de ne "pas être compris par l’immense majorité des électeurs".

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