Placebo Saint Antoine au 5 décembre 2012

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L’effet placebo en rhumatologie : à encourager ou à éviter ?

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L’effet placebo en rhumatologie : à encourager ou à éviter ? Certains médicaments commercialisés sont à peine voire pas du tout supérieurs à un placebo et il ne faut donc pas les utiliser Vrai Faux L’effet placebo dans l’arthrose est bien plus fort pour l’arthrose des doigts que pour l’arthrose de la hanche Vrai Faux QCMs sur l’effet placebo

Transcript of Placebo Saint Antoine au 5 décembre 2012

L’effet placebo en rhumatologie :à encourager ou à éviter ?

QCMs sur l’effet placebo

Certains placebos Vrai Faux

sont bien meilleurs que d’autres

Certains médicaments commercialisés

sont à peine voire pas du tout supérieurs à un placebo

et il ne faut donc pas les utiliser Vrai Faux

L’effet placebo dans l’arthrose est bien plus fort pour l’arthrose

des doigts que pour l’arthrose de la hanche Vrai Faux

Cas clinique

Un disc-jockey de 17 ans (piercings, tatouages, marijuana)décrit des symptômes de sciatique évoluant par brèves ‘crises’

Son scanner du rachis lombaire (L2-L3 au sacrum) est tout à fait normal

On lui donne un placebo, qui soulage vite et très bien une des ‘crises’ l’interne programme de ce fait sa sortie pour le lendemain (Noël)

Qu’en penser ?

Objectifs

1- différencier l’effet placebo du retour à la moyenne et des effets Hawthorne

2- décrire ses 2 principaux mécanismes :

conditionnement pavlovien, mais surtout attente optimiste d’un bon résultat

3- rappeler l’importance, dont commerciale, de l’effet placebo en rhumatologie

qui gène l’industrie, mais lui profite encore plus

4- souligner le paradoxe de l’effet placebo : il faut le nier pour le renforcer

sujet souvent conflictuel

5- se servir au mieux de l’effet placebo,

et ne surtout pas considérer les répondeurs comme des malades imaginaires

1-Différencier l’effet placebo du retour à la moyenne

et des effets Hawthorne

Temps

Douleur

1-a : Effet placebo ?

Administration d’un placebo

Amélioration !

Temps

Douleur

Non : évolution spontanée ou ‘retour à la moyenne’

Bénéfice du doute souvent accordé au traitement/médecin/rebouteux

« Le rhume mal soigné ne guérit qu’en une semaineUn rhume bien soigné guérit en 7 jours »

« Le rôle du médecin est de distraire le patient pendant que la nature le guérit » (Voltaire)

Activité

Explique en partie pourquoi les patients sont surtout inclus lors des ‘poussées’

retour à la moyenne ensuite porté au crédit de la molécule

Exemple de retour à la moyenne : Etude GAIT dans l’arthrose

Peu ou pas de différences entre glucosamine, etc et placebomais 60% de patients ‘répondeurs ’ sous placebo seul à 6 mois

Clegg DO, et al. N Eng J Med 2006; 354: 795-808

30% d’ACR 20 sous placebo, versus 50% sous adalimumab 20mg 60% sous adalimumab 40mg 60% sous adalimumab 80mg

Weinblatt E et al, Arthritis Rheum 2003; 48: 35-45

Ex de retour à la moyenne dans les rhumatismes inflammatoires

ACR 20 chez 50% des patients du groupe placebo, versus 80% sous golimumab et amélioration de la CRP sous placebo

Kay J et al; Arthritis Rheum 2008; 58: 964-75

Ex de retour à la moyenne dans les rhumatismes inflammatoires

Un des moyens de contourner le problème du retour à la moyenne :études en ‘cross-over’

Dans l’étude ci-dessous :

le placebo de morphine semble faire baisser la douleur de 1,4 versus 2,1 points pour la morphine elle-même

2/3 de l’effet de la morphine du à l’effet placebo ?

En fait, persistent deux possibilités de biais :1-surestimation possible de la douleur à J0

(car critères d’inclusion: seuil de douleur minimal requis)

peut pousser patients et médecins à surestimer la douleur à J0= exemple d’effet Hawthorne négatif du fait du médecin

En fait, persistent deux possibilités de biais :2-effet ‘inertie’ (‘carry-over’)

L’effet Hawthorne positif induit par le produit actifpeut perdurer lors de la prise du placebo

nivellement entre les périodes ‘verum’ et placebo

Effet Hawthorne

= manque d’exactitude de la mesure (majoration ou minoration)

du fait du patient, mais parfois aussi du médecin, lié :

-au fait d’être observé(e)

-au contexte socio-culturel

-à un bénéfice secondaire (ex: essai d’un nouveau ttt si score élevé)

L’effet Hawthorne peut jouer dans les deux sensdans les essais cliniques :

majoration initiale (pour être inclus) (effet négatif)mais minoration durant l’étude (incitation à moins se plaindre)

période de l’étude

placebo

vrai traitement

Sur-évaluation des troubles à J0pour pouvoir tester un nouveau traitement

(si seuil de douleur minimum requis)

période de l’étude

placebo

vrai traitement

Mais ensuite sous-évaluation pendant l’étude(par gratitude et optimisme induit par l’étude)

période de l’étude

placebo

vrai traitement

Puis une remontée aux valeurs de baseaprès la fin de l’étude

période de l’étude

placebo

vrai traitement

Exemple d’effet Hawthorne dans les essais cliniques(en l’occurrence, essai dans la PR)

réponse globale des patients et médecins : améliorationsalors que variations HAQ, douleur, et de la biologie : aggravations

Pincus T, et al. Bull NYU Hospital Jt Dis 2008;66: 216-23

Autre exemple d’effet Hawthorne

Avant de partir chez le dentiste :

douleur exprimée à l’épouse : « je souffre le martyre »

Mais en face de la ravissante assistante du dentiste :

«ça chatouille un peu »

Décalage parfois ++ du curseur pour une même douleur

selon la personne qui ‘évalue’

Rappel : pour une même douleur ressentie

Le mode d’expression peut beaucoup varier !

Rugby Football

Ne pas attribuer à un effet ‘placebo’ce qui n’est qu’un retour à la moyenne ou un effet Hawthorne

Alors qu’est-ce que l’effet placebo ?

C’est çà !

Effet placebo = envie d’aller mieux + foi dans l’effet du produit

L’effet placebo peut persister même si le sujet doute d’avoir reçu le vrai traitement

L’état d’attente optimiste et la ‘croyance’ dans un fort effet du produit suffisent

La croyance dans l’effet du placebo peut même persister malgré la levée de l’aveugle

Sur 34 patients : 18 améliorés de plus de 50% (anxiété, fatigue)

Mais surtout 16/18 des ‘répondeurs’ étaient encore persuadés que le traitement avait été le ‘verum’ (vrai)

alors qu’on leur avait pourtant révélé que c’était un placebo !

Aulas JJ, Rosner I. Encephale 2003; 29: 68-71

Et l’effet placebo se reproduitmême si on a annoncé à la personne que dans un essai antérieur

sa réponse avait été du à un simple effet ‘placebo’

Chung SK, et al. Pain 2007; 132: 281-8

Pour distinguer [effet placebo + effet Hawthorne] (souvent minimes)du retour à la moyenne : il faut trois groupes, dont un ‘sans rien’

très rarement fait…

Douleur

Pas de traitement

Placebo

Vrai ttt

Méta-analyse des études placebo versus rien

130 études, dont 114 analysables

Conclusion Effets placebo + Hawthorne = minimes et portant seulement sur les symptômes subjectifs :

SMD de – 0,36 (- 0,47 à – 0,25) SMD de – 0,27 (-0,40 à -0,15) pour la douleur

réduction de la douleur de seulement 6,5 sur échelle de 0 à 100

Effet placebo non significatif pour les signes objectifsSMD de – 0,12 (-0,27 à + 0,03)

Hrobjartsson A,et al : N Engl J Med 2001;344:1594-602

Mais article critiqué (1)

La plupart des ‘pathologies’ n’étaient pas sensibles à l’effet placebo

Anémie, hyperglycémie, hypercholestérolémie, alcoolisme, tabagisme, hygiène orale, obésité, herpès, infections bactériennes, rhume,

nausée, iléus, mal des transports, syndrome de Raynaud, infertilité, accouchement, ménopause, prostatisme,

dépression, schizophrénie, troubles compulsifs, handicap mental, déficit d’attention, alzheimer, épilepsie, énurésie, pertes fécales

peur du dentiste, mésentente conjugale, difficultés à atteindre l’orgasme…

Douleur : seulement 27/130 articles (20%)

Mais article critiqué (2)

Dans les 27 études avec évaluation de la douleur : placebo comparé à ‘rien’ et à un traitement peu actif

Or, force de l’effet placebo = (Très) faible lorsque le placebo est testé versus ‘rien’…Mais bien plus fort versus traitement très actif…

Méthodologie idéale : trois bras50% traitement très actif, Vs 25% placebo, Vs 25% rien

Mais article critiquable (3)

Qualité du double-insu douteuse ++ (études de 1946 à 1998) les observateurs devaient savoir souvent dans quel ‘bras’ était le patient

Or, biais majeur (en faveur du verum)quand l’insu n’est pas parfait (encore le cas actuellement dans 6 à 8 études /10 ! )

NB : qualité de l’insu très rarement vérifié

Seulement 2% des publications le vérifient (31/1599) Et alors double-insu ‘correct’ dans seulement 45% des cas (14/31)

Haahr MT, et al. Clin Trials 2006;3: 360-5

Modalités du ‘tirage au sort’Pharmaciens (préparation de la molécule)Infirmières (aspect du produit)Patients (effets spécifiques du produit)Médecins (ex : réception de la biologie)Personnes collectant les données

NB : Le mauvais insu augmente l’effet apparent du ‘vrai ‘traitement (majore les effets placebo et Hawthorne chez les patients ayant ‘deviné’)

Walach H, et al. BMC Med Res Method 2005;5 :26

Vrai traitement bon insu

Vrai traitement mauvais insu

Placebo bon insu

Alors que l’absence d’insu modifie +++ les résultats

Placebo mauvais insu

A la limite de l’éthique

Nécessite un mode d’administration en IV continu : ne peut s’appliquer qu’à certains contextes (ex péri-opératoire)

Autre moyen que les études ‘trois bras’pour mesurer la force de l’effet placebo (+ Hawthorne….)

: technique du ‘open-hidden’

On dit à la moitié des patients quand on injecte (ou on arrête)le produit efficace (‘open’)

Et on ne dit ‘pas grand-chose’ aux autres(et rien sur le moment de l’injection ou de l’arrêt) (‘hidden’)

Différence = Effet placebo + Hawthorne

Rebond de la douleur : effet ‘nocebo’ ou Hawthorne inverse (en fait effet ‘anti-placebo’)

II-Décrire les deux principaux mécanismes de l’effet placebo

conditionnement pavlovien + attente d’un heureux résultat

Effet Placebo = origine surtout cérébrale(faible rôle de la moelle et du système nerveux autonome)

Seulement présent si les symptômes sont contrôlés par le cortex

douleurs (dont douleurs ‘neuropathiques’ comme les CRPS1 +++)

troubles du sommeil

troubles de l’humeur

Tant en freinant la ‘remontée’ de la douleur (aux noyaux gris centraux)

qu’en diminuant son retentissement ‘psychologique’ (projections corticales)

Somme de deux phénomènes

1-Conditionnement (Pavlov) libération d’opioïdesEx : reprise d’un ttt ayant déjà bien soulagé

2-Attente d’un résultat heureux libération de dopamine NB : ‘plaisir’ maximal si 50% de chances de succès

Possibilité de renforcer les effets placebos

1-En faisant éprouver au patient dans la semaine avant une amélioration par un premier procédé ( opioïdes)

NB : utilisé par certains entraîneurs sportifs (courses de fond)

Colloca J, Benedetti F. How prior experience shapes placebo analgesia. Pain. 2006 Sep;124(1-2):126-33.

2-en vantant l’espoir d’une franche amélioration par le ‘marketing’… ( dopamine)

Effet placebo souvent plus netchez les patients ayant déjà une expérience positive du traitement

(ex : test d’un AINS versus placebo après sevrage en AINS dans l’arthrose)

Bingham III CO Rheumatology 2007;46:496-507

Effet placebo :proportionnel aux attentes du patient, et à son envie de ‘répondre’

-force présumée du traitement dans l’esprit du patient

-état psychologique du patient : attente optimiste

certains patients sont très bons ‘répondeurs’d’autres sont en général plutôt non répondeurs

mais variabilité dans le temps pour une même personne

Les mêmes vins sont bien plus appréciés s’ils sont 9 fois plus chers

sans précisions sur le prix avec précisions sur le prix

La stimulation du cortex médial orbito-frontal(centre de la satisfaction)

est plus intense si le vin est présenté comme bien + cher

NB : la force de l’effet placebo des traitementscroit aussi avec leurs prix

(valable aussi pour les biothérapies ?)

Waber RJ et al JAMA 2008; 299: 1016-1017

Kong J J Neurosci 2006; 26: 381-8

cortex préfrontal, insula, gyrus supramarginal, lobule pariétal inférieur gauche, cortex cingulaire rostral antérieur

plusieurs réseaux

pas un seul ‘centre’

‘Objectivation’ de l’effet placebo par l’imagerie fonctionnelle de nombreuses ‘zones’ impliquées

Et divers médiateurs impliqués

1-Renforçant l’effet placebo

-Endorphine, enképhaline, opioïdes: ( anti-douleur)

-Dopamine (anti-maladie de Parkinson, anti-déplaisir)

-Sérotonine (anti-dépression)

2-Diminuant l’effet placebo: effet ‘anti-placebo’

-Cholécystokinine

NB : L’effet placebo existe aussi chez l’animal domestique

Très capable d’anticiper / percevoir une attitude ‘positive’de la personne qui le ‘soigne’

Capable d’être conditionné (Pavlov) !

Rôle du système nerveux autonome dans certains effets placebo

Asthme, HTA, migraine

Les % d’amélioration dans les ‘bras placebo’peuvent aller de 0% à 100%

(retours à la moyenne + effets Hawthorne + effet placebo)

Walach H et al BMC Med Res Methodol 2005; 18: 26

Effet placebo : possibilité d’améliorations majeures

Jusqu’à 70% de patients un peu ‘répondeurs’ pour les douleurset possibilité (rare) de soulagement ‘complet’

Force de l’effet placebo très variable selon les :

A-patients (état d’esprit, croyance dans le traitement)

B-pathologies (++ dans douleurs neurogènes chroniques)

C-traitements (+ fort si traitement réputé efficace)

D-médecins (+ fort si médecin donne envie d’aller mieux)

E-publicités faites au traitement

A-Force variable selon les patients

B-Force variable selon la pathologie

Ex : effet placebo parfois marqué dans les ‘algodystrophies’Sur 29 ‘répondeurs’ à des blocs de phentolamine

22/29 l’étaient déjà au maximum sous sérum salé…

B-Force variable selon la pathologie

Ex : effet placebo plus marqué selon la topographie des arthroses ! doigts > genoux > hanches

B-Force variable selon la pathologie

Péridurales dans les sciatiques :

Kolsi I, et al. Rev Rhum 2000; 67: 134-9

Effet spectaculaire en ouvert Mais pas de différences d’avec le sérum phy

En fait, manquent des études péridurales versus ‘rien’ péridurales = pas que effets ‘placebo + Hawthorne’ ?

rôle ‘mécanique’ possible du sérum physiologique… (corrélation ++ entre volume injecté et effet des péridurales)

Contrôles

Fausses vertébroplasties

Vraies vertébroplasties

Même si ‘pur’ effet placebo non exclu Car effet placebo très fort dans les pathologies rachidiennes :

exemple des vertébroplasties

dans les douleurs neuropathiquesl’effet du placebo de la morphine = les 2/3 de celui de la morphine ?

C-Force variable selon le traitement servant de comparateur

(en fait, sans doute moins car rôle des effets Hawthorne)

3-Force variable selon le traitement servant de comparateur

dans les arthroses : la force des effets placebo + Hawthorne varie beaucoup selon les traitements testés

Les effets placebo les plus forts dans l’arthrose

1-acides hyaluroniques2-acupuncture3-gels AINS

Vraie acupuncture versus fausse acupuncturepeu ou pas de différences acupuncture inutile ?

Madsen MV, BMJ 2009;338: a3115

Madsen MV, BMJ 2009;338: a3115

Mais la ‘fausse’ acupuncture fait bien mieux que rien : acupuncture utile par son fort effet placebo !

L’effet placebo d’une fausse acupuncture est de fait plus fort que celui d’un faux anti-dépresseur

même pour traiter des douleurs neuropathiques…

Kaptchuk TJ et al, BMJ, 2006;332: 391-7

75% des participants du groupe placebo (93/124) pensaient avoir été traités par une ‘vraie’ acupuncture.

Versus 48% (59/123) de ceux ayant pris un placebo d’antalgique (p < 0.001).

Mais les différences entre acupuncture et ‘pilule’s’expliquent presque exclusivement par la nature des traitements

Certains placebos sont nettement plus efficaces que d’autres…

et 2 placebos sont un peu plus efficaces qu’un…

D-Force variable selon le médecin (capacité à induire une attente optimiste de la part du patient)

donner aux patients envie de s’améliorer

-temps accordé et à compatir-médecins ayant une ‘notoriété’-tarifs plus élevés !

savoir ‘vendre’ le traitement aux patients

-même si on n’y croit pas du tout !

Lors du traitement par acupuncturedu syndrome de l’intestin irritable

bien meilleure amélioration si médecins chaleureux prenant leur temps

Kaptchuck TJ, BMJ 2008;336:999-1003

E-Force du placebo accrue par le marketing

Renforce les croyances des patients et des médecinset, parfois, leur état d’attente optimiste

III-Rappeler l’importance commerciale de l’effet placebo

qui gène ++ les firmes lors des études ‘mépris du placebo’

Mais balance très favorable au final

(car des ‘quasi-placebos’ peuvent ensuite être vendus au prix de médicaments)

Obligation faite aux laboratoires d’études contre placebo

Indispensable pour apprécier la tolérance des traitements

Mais un fort effet placebo peut gênerla démonstration de l’effet d’un produit

ou forcer à inclure un très grand nombre de patients

études très coûteuses

En particuliers, si patients trop motivés/rémunérés

risques de fortes réponses placebos

Chin Feman SP et al. Contemp Clin Trials 2008;29:241-51

Sur les 36 études négatives/douteuses

selon la FDA

3/36 ont été publiées comme ‘négatives’

37/40 publis positives (93%)

au lieu de 40/74 en fait (52%)

Sur les 38 études positives

selon la FDA

37/38 ont été publiées comme positives

22 des 74 études (30%) n’ont pas été publiées, car négatives

Et 11 autres (15%) ont été publiées comme positives, alors qu’elles étaient négatives

Exemple d’études non publiées

Car le placebo faisait aussi bien que les anti-dépresseurs

N de patients inclus

Dispersion des résultats selon les études

(des plus optimistes aux plus pessimistes)

NB : Conclusion des méta-analyses faussées ++

si études négatives (quand le placebo fait aussi bien) non publiées

Pour le savoir : construire des ‘funnel plots’

Exemple de funnel plot

Pour un produit en fait non supérieur au placebo

Pas de différences

vis-à-vis du placebo

Mieux

que le placebo

Moins bien

que le placebo

Si le funnel plot est asymétrique

des études ‘négatives’ n’ont pas été publiées

Exemples de funnel plots

Les études les plus fiables =

celles portant sur le plus grand nombre de patients

Tentation pour les firmes de majorer le différentiel d’avec le placebo dans les essais

par un ‘tri’ des patients

Et mise au point d’outils de mesurepeu ou pas sensibles à l’effet placebo (et aux effets Hawthorne)

Privilégier les paramètres ‘objectifs’

et préférer plutôt la subjectivité du patient à celle du médecin ! !

Le placebo est souvent dénigré aussi par les experts lors de l’analyse et de la présentation des résultats

« Pas plus efficace que le placebo = Etude ’négative’ = Aucun effet »

Même quand l’expert à la HAS se sert beaucoup de l’effet placebo au quotidien….

Mais les firmes savent très bien encourager ensuite l’effet placebo !

1-en commercialisant des ‘quasi’-placebos

(au termes d’essais biaisés, et à des prix bien plus élevés que des ‘vrais placebos’…)

Article du JAMA 2002 287 : figure de la page 1843

Réponses aux placebos

Réponses aux tricycliques

< ou = aux antisérotoninergiques

2-en majorant par le marketing la croyance dans le produit

majore les effets placebos et Hawthorne, et majore l’effet ‘global’ !

Mais les firmes savent très bien encourager ensuite l’effet placebo !

Article du JAMA 2002 287 : figure de la page 1843

Dans le passé, les médecins (et les patients)engrangeaient presque seuls les bénéfices des placebos

Article du JAMA 2002 287 : figure de la page 1843

Les ‘bénéfices’ de l’effet placebo vont désormais autant aux firmes

(même si les placebos ne rapportent pas autant que les ‘blockbusters’)

Article du JAMA 2002 287 : figure de la page 1843

Ce qui est en partie ‘juste’, car la force de l’effet placebo du traitement

dépend de la vraie force du traitement

Et aussi du packaging et du marketing !

Article du JAMA 2002 287 : figure de la page 1843

La part du médecin dans l’obtention de l’effet placeboa baissé, parallèlement au prestige de la profession

(même si les attitudes et opinions du médecin comptent encore)

Article du JAMA 2002 287 : figure de la page 1843

Ce rôle se bornant de plus en plus souventà renforcer l’effet du marketing direct

IV-Souligner les paradoxes de l’effet placebo

Il faut le nier pour le renforcer sujet souvent conflictuel

L’effet placebo et les techniques placebo :

Des sujets qui fâchent !

Placebo considéré (à tort) comme le ‘niveau zéro’ du traitement mépris du placebo (cf éthymologie)

Placebo domino in regione vivorum

Début du psaume 116:9 chanté aux vêpres des morts (pour le salut de leur âme)

par des personnes payées pour cela déjà un gros marché !

Connotation un peu méprisante (‘fausses prières’)

Attitude des médecins vis-à-vis de l’effet placebo

1-Déni fréquent (pour leur spécialité surtout !)

surtout chez :

les praticiens les + âgésles internistesles psychanalistes

et…les chirurgiens

Attitude des paramédicaux vis-à-vis de l’effet placebo

2-Déni et méconnaissance ++ de ce qu’est l’effet placebo mais pour mieux l’utiliser !

Enquête chez 100 infirmières du CHU de Nantes

Deux placebos + efficaces qu’un : 35%Possibilité d’effets secondaires : 26%Bons répondeurs + désireux de guérir : 42%Effet possible chez animal : 14%

Bons répondeurs + fragile psychologiquement : 62%Effet sup chez hommes : 32%Effet sup chez femmes : 62%Effet sup chez jeunes : 36%Effet sup chez vieux : 68%

Enquête chez 100 infirmières du CHU de Nantes

Pas d’intervention de l’effet placebo dans l’efficacité de :

Acupuncture : 92% des infirmières (inhibé par naloxone) Homéopathie : 78% ‘ ‘ Oligoéléments : 74% ‘ ‘ Phytothérapie : 73% ‘ ‘ Vitamines : 73% ‘ ‘ Fortifiants : 54% ‘ ‘ Guérisseurs : 29% ‘ ‘ Magnétiseurs : 27% ‘ ‘ ! ! !

Kinésithérapie : 55% ‘ ‘ Chirurgie : 52% ‘ ‘

Principales raisons du déni (para)médical

1/ Placebo = terme perçu (à tort) comme péjoratif

-pour le patient (catalogué ‘psy’ ou ‘simulateur’)-pour le médecin (usage réservé aux ‘bobologues’ et non à ceux qui soignent de ‘vraies maladies’)

Principales raisons du déni (para)médical

2/ Images négatives du placebo parfois entretenues par l’industrie pour qui le placebo est un ‘gêneur’ dans les essais cliniques

Principales raisons du déni (para)médical

3/ Nécessité de ‘ne pas voir’ (scotomiser) le caractère placebo du traitement pour induire un effet placebo maximal (il est plus facile de faire croire à l’efficacité du produit si on y croit soi-même)

Principales raisons du déni (para)médical

4/ Crainte qu’une trop grande honnêteté fera fuir les patients vers d’autres thérapeutes ayant moins de freins à se servir de l’effet placebo !

L’effet placebo est un très grand ‘marché’

Combien je vous dois ?

1930 : (au rebouteux)

« comme le docteur ! »

2010 : (au rhumatologue secteur 2)

« comme l’ostéopathe ! »

Placebo = traitement le plus ‘doux’mais sujet pourtant conflictuel !

5-Magnifier l’effet placebo, et s’en servir, au lieu de le dénigrer

et ne surtout pas considérer les répondeurs au placebocomme des malades imaginaires !

Utilisation des placebos : malhonnête ?

Ethique du placebo (1)

-prescription licite : article 511 du code de la santé publique

-usage éthique en recherche si pas de risque vital, (mais recours à d’autres comparateurs de plus en plus proposé)

-35 à 45% des produits prescrits = placebo impurs prescription éthique que si le médecin y ‘croît’ ?(en fait ce qui compte c’est ce que le patient croit)

Ethique du placebo (2)

Réponses de 300 patients et 100 infirmières du CHU de Nantes

patients infirmières

Les médecins doivent-ils utiliser les placebos ? 45% 66%Doivent-ils alors prévenir leurs patients ? 27% 3%

Si les placebos étaient commercialisés 36% 16%en pharmacie, seriez-vous choqué(es) ?La sécu doit-elle les rembourser en partie ? 64% 43%

Avez-vous déjà pris des placebo ? 15% 6%Seriez-vous prêts à en prendre ? 28% 45%

Fréquence de la prescription de placebos par 679 rhumatologues ou internistes américains

Usage intentionnel de placebo par la moitié des rhumatologues (46% à 58%)

Pratique jugée éthique par 62%

Même si seulement 30% ont recours à des placebos pursLes autres utilisant des placebos impurs(vitamines 38%; sédatifs 18%, antibiotiques : 13%)

Tilburt JC, et al. BMJ 2008; 337: a1938

Parfois les patients préfèrent le placebo à un paracétamol et même à un AINS

Etude PACES dans l’arthrose (genoux, hanche)

Pincus T et al, ARD 2004;63: 931-9

Par ailleurs de ‘bonnes paroles’ d’un médecin peuvent parfois avoir un net effet

Même si les injonctions ne suffisent pas toujours

En fait, le médecin peut d’autant plus renforcer l’effet placeboque le traitement est déjà actif

l’effet placebo ne se résume pas à la prescription de placebosLes traitements actifs procurent aussi de forts effets placebos (et Hawthorne)

Le médecin doit renforcer aussi l’effet Hawthorne-patient éviter la ‘majoration’ ou instituer des stratégies de ‘coping’

Autre source d’intérêts divergents d’avec les firmes ?

Si tolérance à de faibles douleurs

peu de consommation de médicaments

Si intolérance même aux faibles douleurs

plus de consommation de médicaments

En 60 ans, on a appris aux consommateurs à se plaindre !

Très mauvais client Très bon client

Jusqu’à les culpabiliser s’ils ont ‘encore mal’

Résultats: valeurs des premières échelles numériques évaluant la douleur

Femmes Hommes

Les douleurs les plus basses sont désormais côtées à 3/10

A1 B1 C1 D1 E1 F1 G1 H1 I1 J1

0,00

2,00

4,00

6,00

8,00

10,00

174

76

102

185

147

155

160

112

35

112

113

106

118

113

68

138

161

125

113

112

66

113

161

A: douleur à perdre connaissance ou à souhaiter le faire 9,09 B: douleur à hurler 9,01

C: douleur induisant des pleurs 8,34

D: douleur à ne pas pouvoir fermer l’œil de la nuit 8,18

E: douleur à ne pas pouvoir se concentrer sur une lecture 6,89ou sur une émission de télé

F: douleur empêchant complètement de travailler 6,51mais permettant de se concentrer

G: douleur diminuant la capacité de travail 5,36sans l’empêcher complètement H: douleur limitant les activités de loisir mais pas le travail à l’extérieur ou à la maison 5,23

I: douleur ressentie même sans y prêter attention 3,77mais n’empêchant pas les loisirs J: douleur perceptible seulement en y prêtant attention 3,29

Effet placebo en rhumatologie :à minimiser si on est investigateur / expert

Faut-il accepter de rembourser des placebos ?

(59 € par mois)

Ex : Fibromyalgine classique (existe aussi en ‘forte’)

 Le matin : Formule tonique pour attaquer la journée avec le maximum d’énergie.

 Stimule l’organisme : Gingembre racine

Procure un effet dynamisant : Gelée royale lyophiliséeOffre un effet tonifiant : Vitamine C, Acérola

Connue pour ses vertus apaisantes : Reine des près 

Le soir : Formule correctrice du sommeil pour une nuit réparatrice. 

Maximise le bien-être physique : CamomilleOffre un effet bénéfique sur le sommeil et l’humeur : Passiflore

Connue pour ses vertus apaisantes : Reine des prèsParticipe à l’équilibre psychique : Chiendent

Agit sur la sérotonine : L-Tyrosine

Un duo Matin et Soir correspond à une cure de 2 mois.Chaque pilulier contient 60 gélules végétales.

Mais effet placebo en rhumatologie :à encourager ++++ si on est clinicien

(jusqu’à l’homéopathie ou l’acupuncture ?)

Pas de réponse univoque

Car il y a en tout rhumatologueun scientifique, un médecin, un citoyen,

un fiscalisé, un invité des firmes, et un futur patient…

QCMs sur l’effet placebo

Certains placebos Vrai

sont bien meilleurs que d’autres

Certains médicaments commercialisés en rhumatologie

sont à peine voire pas du tout supérieurs à un placebo

et il ne faut donc pas les utiliser Faux

L’effet placebo dans l’arthrose est bien plus fort pour l’arthrose

des doigts que pour l’arthrose de la hanche Vrai

Cas clinique

Un patient de 17 ans Décrit des symptômes de sciatiqueMais son scanner du rachis lombaire est normal

On lui donne placebo, qui le soulage très bien

l’interne décide de ce fait sa sortie pour le lendemain

Que faut-il en penser ?

C’était une erreur : ce patient avait un schwannome malin

Un placebo peut induire des effets nocebos !

Effet nocebo

Difficile à dissocier du ‘bruit de fond’

des symptômes fréquents chez les sujets normaux

39% : fatigue ou somnolence

26% : difficultés à se concentrer

23% : sensation d’ivresse

14% : céphalées

5% : vertiges

Seulement 19% des patients: aucun symptôme dans les 3 jours !

Fréquence des effets nocebo

On estime qu’en moyenne ¼ au moins des patients sous placebo relatent spontanément de ‘nouveaux’ effets indésirables

Dans certaines études :

plus d’effets indésirables dans le groupe placebo…!

(ex : céphalées dans l’étude de certains hypertenseurs)

Mécanismes des effets nocebo

Rôle du SNA :

Exacerbation des crises d’asthme par un placebo présenté comme un allergène (25%) ou un bronchoconstricteur (50%)

Mais aussi du SNC :

Parfois aussi effet nocebo à type de douleur :

libération de cholécystokinine ++

(car douleurs inhibées par la prescription de proglumide)

Mécanismes des effets nocebo

Assez proches des mécanismes

de l’effet ‘anti-placebo’ :

(résistance à l’effet placebo

empêchant celui-ci d’apparaître)

Effet nocebo accru chez :

Patients qui s’attendent à des effets indésirables

95% des ‘allergiques à la Péni’ ne le sont pas…

Patients avec expérience d’effets indésirables

(33% de nausées à la seule vue de l’infirmière –chimio)

Patients avec profil psychologique particulier ( ≠ placebo)

Anxiété, dépression (1/3 d’arrêts), somatisation

Les femmes (≠ placebo)