New Bonnes vacances - France Catholique · 2014. 12. 2. · d’investissement américain Starwood...

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FRANCE n°2987 - 29 juillet 2005 3, 50 FRANCE Catholique FRANCE Catholique ISSN 0015-9506 www.france-catholique.fr 81 ème année - Hebdomadaire Bonnes vacances ! Bonnes vacances !

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  • FRANCEn°2987 - 29 juillet 2005 3,50 €F

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    Bonnes vacances !Bonnes vacances !

  • BREVES

    2 FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005

    FRANCETOUR DE FRANCE : L’Américain LanceArmstrong a remporté le Tour de Francecycliste, le 24 juillet à Paris, pour laseptième fois. Il a anoncé sa retraite dusport cycliste.INCENDIE : Trois pompiers volontaires,le lieutenant Emmanuel Pioux, l'adju-dant Michel Oudard et le sergent Phi-lippe Gropeaux morts, dans la nuit du17 au 18 juillet, alors qu'ils interve-naient sur l'incendie d'un bâtiment a-gricole à Metz-le-Comte (Nièvre) ontété cités à l'ordre de la Nation le 20juillet.DANONE : Le principal indice de laBourse de Paris, le Cac 40, a dépassé leseuil psychologique de 4400 (pour lapremière fois depuis 2002), le 19 juillet,sur fond de spéculation contre Danone,menacé, selon la rumeur, d’une OPAaméricaine. Les principaux responsablespolitiques français ont déclaré leur op-position à une OPA hostile sur le princi-pal fleuron de l’industrie agro-alimen-taire français.TAITTINGER : Le groupe français Tait-tinger (champagne, hôtels Crillon etLutétia à Paris, Martinez à Cannes,Cristallerie Baccarat, etc.), dont lesactionnaires familiaux n’étaient plusassez solidaires, a été vendu au fondsd’investissement américain StarwoodCapital pour 2 milliards 800 millionsd'euros.TELEVISION : La chaîne “Match TV”,lancée en 2001, cessera définitivementd’émettre fin août faute d’audiencesuffisante. Son propriétaire, le groupeLagardère lancera en revanche troischaînes thématiques sur la TNT.DISPARITION : Le docteur Alain Bom-bard, célèbre naufragé volontaire en1952, est mort à 80 ans le 19 juillet.

    MONDEEGYPTE : Au moins trois attentats si-multanés à la bombe ont secoué laville de Charm el-Cheikh, la célèbrestation touristique du Sinaï (nord-estde l’Egypte) dans la nuit du 16 au 17juillet. On a dénombré environ 90morts dont une dizaine d’étrangers, etau moins 200 blessés. Al-Kaïda arevendiqué l’attaque. Les autoritéségyptiennes ont diffusé le signalement

    de 6 suspects pakistanais.LONDRES : Le 21 juillet, 4 explosionsde faible intensité dans le métro etdans un bus londonien ont créé lapanique sans faire de victimes. Il y aeu, semble-t-il un ratage des artifi-ciers islamistes. La police a, dans lecadre de son enquête, arrêté troishommes, mais aussi tué par erreur,dans le métro, un suspect qui s’estrévélé être un Brésilien étranger à toutislamisme.IRAK : Le représentant de l'Algérie enIrak et son adjoint ont été enlevés le20 juillet à Bagdad. Parmi une dizained’attentats-suicides en une semaine,un attentat au camion piégé le 21 juil-let a fait une quarantaine de mortsdans l’est de Bagdad. Plusieurs per-sonnalités sunnites, qui avaient ac-cepté de collaborer avec le gouverne-ment dominé par les chiites, ont étéassassinées, ce qui risque de retarderle débat sur la Constitution irakienne.LIBAN : Le nouveau Premier ministrelibanais Fouad Siniora, 62 ans, du cou-rant du Futur de Saad Hariri, a annon-cé le 19 juillet la formation d'un gou-vernement de 24 membres, incluantpour la première fois le Hezbollahchiite mais aucun ami de Michel Aoun.Le 21 juillet, la secrétaire d’Etat amé-ricaine Condoleezza Rice a rendu unecourte visite surprise à Beyrouth.Quelques heures après, une bombeéclatait dans un quartier chrétien dela capitale libanaise, faisant un mortet au moins 7 blessés.YEMEN : Des manifestations à Sanaaet dans d’autres villes yéménites,contre une très forte hausse des prixde l’essence, se sont soldées, par lamort de plusieurs dizaines personnesles 20 et 21 juillet.ESPAGNE : Au cours d’énormes incen-dies de forêt, le 19 juillet, dans la pro-vince de Guadalajara, un groupe deonze pompiers espagnols a trouvé lamort dans les flammes.PORTUGAL : Le centre du Portugalconnaît des incendies, les plus violentsdepuis 35 ans, selon les pompiers.INFORMATIQUE : Le constructeur d’or-dinateurs Hewlett-Packard a annoncé,le 19 juillet, un plan de suppression de14.500 (sur 150.000) emplois dans lemonde.CANADA : Le Sénat, dominé par leParti libéral au pouvoir, s'est prononcé,le 20 juillet, par 47 voix contre 21 en

    faveur du texte, instituant un mariagehomosexuel, déjà adopté par laChambre. La loi a été aussitôt promul-guée par un membre de la Cour su-prême.COLOMBIE : Pour la première fois de-puis quatre ans, le 20 juillet, les gué-rilleros des Forces armées révolution-naires de Colombie (FARC, marxistes)ont libéré unilatéralement un soldatde l'armée colombienne, prisonnierdepuis le 25 juin. Les FARC, dont l’ef-fectif est évalué à 17.000 combat-tants, détiennent 1.600 otages. Lesenlèvements sont leur première sourcede financement.MADAGASCAR : Jacques Chirac aeffectué un voyage officiel à Mada-gascar les 21 et 22 juillet. La grandeîle, dont 70% de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté, vient dese voir remettre une dette de 2,5 mil-liards de dollars et connaît un taux decroissance de 5%.CHINE : Le 21 juillet, la Chine Po-pulaire a réévalué (de 2%) le yuan, samonnaie nationale pour la premièrefois depuis une dizaine d'années, enfixant un nouveau taux de change de8,11 pour 1 dollar américain et en laliant à un panier de devises.AUTOMOBILE : Le constructeur auto-mobile britannique MG Rover a été ra-cheté par l'entreprise chinoise NanjingAutomobile, a-t-on appris le 21 juillet.BANQUE : Le groupe espagnol BBVA adû renoncer à son offre publique d'é-change (OPE) sur la banque milanaiseBanca Nazionale del Lavoro, à la suitede la forte mobilisation des milieuxd’affaires et politiques italiens.ALLEMAGNE : Le président HorstKöhler a dissous, le 21 juillet, le 15eparlement fédéral allemand et deman-dé de nouvelles élections pour le 18septembre. La cour constitutionnellede Karlsruhe doit donner en août sonaval à cette décision souhaitée par lechancelier Gerhard Schröder, bien qu’ilsoit donné battu, dans tous les son-dages, par la démocrate-chrétienneAngela Merkel.

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  • EDITORIAL

    FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005 3

    'étonnante année que nous vivons depuis les événements d'avril,va connaître son accomplissement à Cologne en ce mois d'août. Lepacte que Jean-Paul II avait noué avec la jeunesse du monde va setrouver renouvelé par son successeur Benoît XVI. Et il n'est nulle-ment anodin que cela se passe à Cologne, haut lieu du catholicisme

    allemand, où le nouveau pape se retrouvera évidemment chez lui. Avec quelssouvenirs, quel rapport à l'histoire, quelle promesse de refondation à partird'un passé insupportable à jamais inscrit dans la conscience humaine ! Lavisite à la synagogue du pape allemand constituera, n'en doutons pas, unmoment indicible qui prolongera les actes décisifs accomplis par Jean-Paul II à Rome et à Jérusalem. On peut être assuré également que la trèshaute et pure figure d'Edith Stein, sœur Thérèse Bénédicte de la Croix,accompagnera ces Journées Mondiales de laJeunesse. Entre le carmel de Cologne où, enfille de Thérèse d'Avila et de Jean de la Croixelle accomplit son entrée dans la vie reli-gieuse, et Auschwitz où elle fit son entréedans la vie éternelle, en solidarité "avec sonpeuple", se dessine un chemin de souffranceet de gloire qui ne peut qu'interroger lesjeunes d'aujourd'hui face au sens de l'exis-tence et au message du Dieu de l'Alliance.

    Il faut, en effet, se rendre compte quedans l'immense crise de la culture occiden-tale un tel rassemblement, avec ce pape-là, revêt une signification extraor-dinairement forte. L'Europe contemporaine, héritière des Lumières, a puconformément au mot d'ordre d'Emmanuel Kant, oser son émancipationintellectuelle, rationnelle. Elle apparaît plus qu'hésitante, en notre temps,en dépit de toutes les chartes possibles énonçant des droits, à reconnaîtreet promouvoir, sur l'existence elle-même. Passion inutile ou improbable,chaos de tendances et d'instincts inscrutable, volonté d'affirmation quen'éclaire nulle téléologie même purement historique ? Il n'est pas indiffé-rent à ces JMJ qu'elles se déroulent au moment où les législations natio-nales sont bousculées sur les points les plus essentiels, ceux qui concernentla dignité du corps humain, le mariage et les règles de la filiation. C'est belet bien à un éclatement de la symbolique de notre humanité que nousassistons. Que cela se passe alors que l'on s'acharne à dénier l'importancede l'héritage chrétien dans les sources de notre civilisation n'a rien que detrès logique. Car d'évidence, ce n'est pas l'histoire révolue que l'on craintmais le rappel explicite de l'enseignement de la Bible et de l'Evangile avecses conséquences sur l'ordre législatif et la civilisation des mœurs.

    Qu'à l'appel de Benoît XVI, des centaines de milliers de jeunes puissentaffirmer et célébrer leur joie de venir adorer l'héritier de la Promesse et leRédempteur du monde, c'est l'espérance qui redevient lumière dans la nuitdes équivoques et des dislocations intérieures. Ajoutons que c'est aussi undéfi, alors que la proche actualité voudrait nous imposer le contre-témoi-gnage d'un religieux de mépris et de haine en faveur de la puissance d'unamour qui nous sauve. �

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    SOMMAIRE

    ACTUALITÉ4 EUROPE Eté croate

    Yves La Marck5 COMMERCE La bonne Samaritaine

    Alice Tulle6 DEMOGRAPHIE Chine : célibataires forcés

    Tugdual DervillePORTRAIT

    VACANCES SOLIDAIRES8 Brune s’envole pour Manille

    Paul CosteFAMILLE

    MARIAGE HOMOSEXUEL14 La confusion des genres

    Xavier Lacroix / Ludovic LécuruESPRIT11 ECCLESIA Benoît XVI parle des vacances

    16 EN MEMOIRE DES JOURS Jean-Baptiste GourionRobert Masson

    17 LECTURES Dimanches ordinaires d’étéPère Michel Gitton

    20 EGLISE L’œcuménisme du cœurLubomir Zak / Jacques Chastan

    22 LIVRES “Ma vie chez les Papous”J.C.

    MAGAZINE23 TELEVISION “Hiroshima”

    Marie-Christine Renaud d’André24 CINEMA “Mr & Mrs Smith”

    M.-C. R. d’A.25 THEATRE “Concessions”

    Pierre François

    26 LIVRES Sélection pour les vacancesBrigitte Pondaven

    27 MUSIQUE “Totus tuus” de Henryk GóreckiMichèle Nonnon

    28 LETTRES Le testament de SolovievGeorges Daix

    29 HISTOIRE TerreursFrédéric Aimard

    30 PHOTO “Le Brésil à la une”, “Salaam India”...Pierre François

    32 EXPOSITIONS Oswaldo VigasAriane Grenon

    34 LIBRAIRIE Anne Sigier38 BLOC-NOTES Vie associative et d’Eglise

    Brigitte Pondaven

    Couverture : © Pascal Lambot

    par Gérard LECLERC

    Avec Benoît XVIà Cologne

    Comme chaque année, France Catholiquesuspend sa parution pendant tout le mois

    d’août. Le prochain numéro sera daté du 2septembre. Pendant ce mois d’août, vous

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  • 4 FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005

    ’autres urgences ontfait oublier l’ex-You-goslavie. L’anniver-saire du massacre desmusulmans à Srebre-

    nica, la projection de cassettesvidéo inédites sur ces mas-sacres commis par des Serbes,la prolongation des procès autribunal international de LaHaye, nous rappellent que lepassé n’est pas mort. Qu’a-t-onfait de ces dix ans ?

    La paix est revenue, maisgrâce au maintien sur place de20.000 soldats de l’OTAN et del’Union Européenne, dont 7.000pour la seule Bosnie.

    La Slovénie est membre del’Union Européenne. La Croatiea entamé le processus d’adhé-sion...

    Mais ce dernier a été blo-qué par un problème de coo-pération judiciaire avec La Haye- on est presque obligé de direheureusement ! Il est impen-sable en effet de laisser laCroatie adhérer seule - on parlede 2009 - sans ouvrir des pers-pectives claires pour ses voisins.Ne serait-ce que parce que laCroatie - qui n’a donc pas clari-fié son attitude vis-à-vis de sespropres criminels de guerre -reste partie prenante au gou-vernement conjoint (avec lapartie musulmane et la partieserbe) de la Bosnie.

    Et que fera-t-on du Mon-ténégro qui sera peut-être in-dépendant l’an prochain ? DuKosovo sur la voie d’une souve-raineté monoethnique ? De l’Al-

    banie, de la Macédoine : le chau-dron balkanique continue dechauffer à petit feu sous le cou-vercle, avec la question serbe aucentre de tout.

    Les échéances ne peuventêtre repoussées éternellement.Des décisions sont obligatoiresmême si elles risquent de ravi-ver la flamme. L’idée est depouvoir conduire progressive-ment l’ensemble balkaniqueoccidental à l’Union Euro-péenne. Il y a urgence d’autantplus manifeste que l’adhésionprogrammée de la Roumanieet de la Bulgarie, à échéance2007, isolera encore davantagela Serbie et ses dépendances.

    Une commission interna-

    tionale a donc fixé 2014 commeéchéance pour une adhésion del’ensemble. 2014 ? A cause biensûr du centenaire de l’attentatde Sarajévo qui avait déclenchéla première Guerre Mondiale...

    Les parallèles entre la riva-lité austro-serbe de l’époque etla situation actuelle de la Serbiepar rapport à l’Union euro-péenne ne sont guère pertinents.Même à la lueur du Non auxréférendums français et hollan-dais, bien que l’un des princi-paux arguments en faveur du"oui", avancé surtout par DanielCohn-Bendit pour justifier sonrevirement personnel, était deremédier à l’impuissance dontavait fait preuve l’Europe à ar-

    rêter le conflit yougoslave : ilfallait voter oui pour qu’il n’yait plus de nouveaux Srebre-nica. De là à faire craindreaujourd’hui un nouveau Sara-jévo...

    Les Pays-Bas, qui ont ététraumatisés par la désastreuseimplication de leur contingentmilitaire à Srebrenica, souscommandement ONU, refusentcet amalgame. La prise encharge par l’Union Européennedu contingent en Bosniemontre que les capacités exis-tent pour peu que la volontépolitique se manifeste.

    L’Union n’a pas vocation àgouverner un Etat périphériquepar le biais de pro-consuls. Unconcert politique européenn’en est toutefois que plus né-cessaire, associant le plus tôtpossible en son sein les diri-geants et les peuples à sesfranges. Ces derniers ne doiventpas se sentir délaissés, rejetés,sujet de seconde classe, soumisau paternalisme autoritaired’une super-élite bruxelloise,mais être parties prenantes àleur propre destin.

    La souveraineté n’empêchepas la solidarité. Au contraire,celle-ci présuppose celle-là. Onne peut renoncer à ce qu’on nepossède pas.

    L’Europe de demain, celled’après le Non à la Constitutionet celle de l’intégration despays candidats, ne peut plusêtre fondée sur des "renon-ciations de souveraineté" maissur leur convergence, à com-mencer dans les Balkans. C’estaussi l’enseignement correct dela fin de l’histoire de l’empired’Autriche-Hongrie, dont cer-tains craignent de voir se répéterles erreurs dans une sorte de pré-diction dont on flaire la malsainevocation autoréalisatrice. �

    Le chaudron balkanique continue àchauffer à petit feu(

    D

    ACTUALITEEUROPE

    Eté croate par Yves LA MARCKTrès nombreux sont aujourd’hui les touristes sur la côte dalmate. Les spectres de juillet1914 et de juillet 1995 ne sont pourtant pas tous exorcisés.

  • rnest Cognacq, c’est lenom d’une rue pari-sienne (Cognacq-Jay) etl’une des gloires de l’îlede Ré. C’est là que naquit

    le 2 octobre 1839 le fils d’unmodeste orfèvre qui eut unetriste enfance. A douze ans, ilest orphelin de mère et de pèreet devient commis dans unmagasin de nouveautés à LaRochelle, Rochefort puis Bor-deaux.

    A quinze ans, il monte (àpied) à Paris, se fait embaucherau grand magasin du Louvre, estlicencié pour "insuffisance", ren-contre dans un autre magasinde nouveautés la jeune et aus-tère Marie-Louise Jay, s’installeà son compte, échoue, et se metà vendre des tissus à l’angle duPont-Neuf, près de l’emplace-ment d’une ancienne pompehydraulique ornée d’un motifreprésentant Jésus et la Sama-ritaine…

    Débuts modestes en 1869,puis résultats fulgurants : leurmagasin prendra sa place parmiles Grands du commerce pari-siens créés à la suite du BonMarché, fondé par Aristide Bou-cicaut en 1852 : les Magasinsdu Louvre (1855), le Bazar del’Hôtel de Ville (1856), le Prin-temps (1865), les Galeries La-fayette (1895)... La Samaritaineoriginelle qui couvrait moins de50m2 deviendra un groupe d’im-meubles de 70 000 m2, partiel-lement classés monumenthistorique.

    Nul n’ignore qu’on trouvaitde tout à La Samaritaine, mais

    ceux qui n’ont pas visité le petitmusée de "la Samar" (neuvièmeétage) ne savent pas que Ma-rie-Louise et Ernest étaient desfigures du patronat social etqu’ils créèrent une maternité etune maison de retraite. Au-jourd’hui, on évoque avec con-descendance ce "paternalisme"naguère fréquent dans le capi-talisme familial, et notammentdans le patronat chrétien. A laSamar, il avait perduré : on s’oc-cupait du logement des em-ployés, la garderie, les coloniesde vacances entretenaient uncertain esprit familial. Certes, ilne faut pas non plus idéaliser unmonde à la hiérarchie pesantesur tout un petit personnel pastoujours très formé ni beaucouppayé.

    Quoi qu’il en soit, La Sama-ritaine était restée dans la fa-mille Cognacg-Jay après la mortde Louise en 1926 et d’Ernest en1928, puis dans la famille deGeorges Renand, qui avait di-rigé le magasin avec le neveu dufondateur. En l’an 2000, legroupe LVMH, spécialisé dans lecommerce de luxe (Franck et fils,Kenzo…) acquiert La Samari-taine, seize ans après avoir ache-té Le Bon Marché. Malgré lesremises en cause provoquées parla concurrence des supermar-chés et centres commerciaux auxenseignes stéréotypées, les chosessemblaient suivre un cours aussipaisible que celui de la Seine

    (encore que la fermeture desrayons bricolage et épicerie...avait déjà beaucoup changé lafréquentation et l’esprit deslieux), quand tomba un sec com-muniqué annonçant la fer-meture du magasin, le 15 juin ausoir, pour des raisons de sécurité.Fermeture provisoire, disait-on,qui allait permettre de rénoverle système de protection contrel’incendie.

    Mais la durée de la fermeturen’était pas fixée et des rumeurscirculaient. En accord avec lamairie de Paris, l’immeuble réno-vé pourrait, disait-on, accueillirun hôtel de prestige, des loge-ments et des commerces deluxe…

    Certes, Bertrand Delanoë atenu à préciser le 20 juillet queLa Samaritaine restera un "lieucommercial" après cinq à six ansde travaux. L’expression est bienvague et permet d’envisager latransformation de ce qui fut,autrefois, un magasin apprécié

    par toutes sortes de clientèlesen un ensemble de commercesprestigieux. Ce qui serait en ac-cord avec la transformation so-ciologique de la capitale : le Parispopulaire cède chaque année duterrain devant la "bourgeoisie-bohème" qui apprécie l’ambiancefestive et ludique (Paris-plageetc.) créée par Bertrand Delanoëet son équipe.

    Prise dans l’urgence, la dé-cision de fermeture a provoquél’amertume des 750 employéspermanents du magasin, où laCFTC est majoritaire. Ceux quiaimaient travailler à La Samari-taine regretteront l’époque "pa-ternaliste" où les employésétaient assurés de travaillertoute leur vie dans une entre-prise à laquelle ils s’identifiaientfortement.

    D’autres feuilletons écono-miques de l’été nous montrentquelles fragilités laisse la remiseen cause de ce genre de modèlejugé dépassé. �

    Le Paris populaire cède chaque annéedu terrain devant la bourgeoisie-bohème

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    E

    ACTUALITE

    FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005 5

    COMMERCE

    La bonneSamaritaine

    La bonneSamaritaine

    Au bord de la Seine, La Samaritaine afermé pour au moins cinq ans. Uneépoque parisienne s’estompe. Une pagede l’histoire sociale est tournée.

    par Alice TULLE

  • ACTUALITE

    6 FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005

    u 25e congrès inter-national de la popu-lation réuni à Tours, latendance était plus àconstater les désé-

    quilibres qu’à risquer de nouvellesprédictions. Deux experts texansont frappé les esprits en expli-quant que vingt-cinq millions deChinois pourraient être condam-nés au célibat, conséquence desavortements sélectifs des fillesqui sévissent depuis trente ans.Un vieux dicton chinois dit :«mieux vaut un fils handicapéque huit filles en bonne santé» !

    Les traditions «machistes»d’Extrême-Orient se sont combi-nées à la politique de l’enfantunique et aux techniques de l’é-chographie fœtale permettant dedéceler le sexe du futur bébé. Unphénomène identique s’observeà Hongkong, en Corée du Nord,dans plusieurs Etats d’Inde, etmême dans certaines ex-répu-bliques soviétiques d’Asie (Ar-ménie, Géorgie, Azerbaïdjan).

    «La valeur accordée par unesociété aux femmes, et notam-ment aux jeunes filles, est plusvisible dans les données démo-graphiques que dans les discoursd’autocongratulation à l’occa-sion de la Journée de la femme,ou dans les quelques lois pro-gressistes qui sont promulguéesmais jamais appliquées», com-mentait il y a quelques mois Ma-rina Thoborg, dans la revue duCentre d’Etudes Français sur laChine Contemporaine.(1) L’histo-rienne et économiste juge qu’il

    manque environ100 millions defemmes en Asiedu fait de l’avor-tement, de l’in-fanticide et desnégligences dontelles sont vic-times. Et d’expli-quer que «lesréticences à l’é-gard de l’avorte-ment furent sansdoute annihiléespar la craintequ’inspirait la sé-vère politique del’enfant unique, avec ses avorte-ments forcés jusqu’au derniertrimestre de la grossesse».

    «Dans pareil contexte, pré-cise-t-elle, l’avortement d’unfœtus du ‘mauvais’ sexe peutsans doute apparaître comme unajustement nécessaire à la po-litique en vigueur. Lorsque l’Etat,par l’entremise de ses représen-tants locaux, falsifie les chiffreset force à l’avortement, il est diffi-cile d’empêcher les populationsde penser qu’elles peuvent agirde même, au gré de leurs préfé-rences. Dans ce domaine, l’Etat adéjà perdu toute autorité mo-rale». Et l’Occident ?

    Lorsqu’il s’éblouissait devantl'Empire du Milieu, qui allaitbientôt «s’éveiller», n’a-t-il pasfermé les yeux sur les atteintesaux droits de l’homme qui s’yperpétraient, au prétexte quel’enjeu démographique excusaittout ? Le fantasme du «péril

    jaune», cette invasion quel’explosion démographiquechinoise faisait craindre, n’a-t-il pas fait tolérer que ceshommes de l’autre bout du

    monde s’arrangententre eux pour êtremoins nombreux ?

    Plus que sur lespopulations chinoisesd'Homo sapiens, notre émotionse focalise sur celles d'Ailuro-pada melanoleuca, le grandpanda, menacé d'extinction. Lanaissance mi-juillet d'un spéci-men au zoo français de Thoiryou la mort, le 23, dans un parcchinois, de la femelle "Meimei",le plus vieux panda du monde,n'ont-elles pas damé le pion auxrévélations sur la démographiehumaine de la Chine ? Pourtant,ces dernières préfigurent unecrise inédite qui peut inquiéter àpropos d’un aussi grand pays (1,3milliard d’habitants). Non seule-ment sa pyramide des âges com-mence à ressembler à une toupie,tellement les personnes-âgéesvont devenir prépondérantes,mais encore cette toupie ne peut

    tenir en équilibre du fait du dé-ficit des femmes… Avec un ratio de 117 hommes pour 100femmes, note Gilles Pinson, del’Institut national d’études dé-mographiques, ces dernières de-vraient avoir davantage d’enfantspour assurer le renouvellementdes générations (2,3 en mo-yenne) que lorsqu’il y a autantd’hommes que de femmes (2,1).

    Et tout cela pourrait maltourner. Les générations nou-velles qui doivent porter tant

    d’aïeux sur leursépaules seront ten-tées de substituer leparricide (ou l’eu-

    thanasie) à l’in-fanticide, ou de

    favoriser les u i c i d edes vieil-lards.

    Quantau désé-

    q u i l i b r eentre les sexes, la Chine impé-riale l’a déjà cruellement expé-rimenté à l’époque du meurtredes petites filles : des bandeserrantes de célibataires armésmenaçaient sa sécurité. Pourdemain, les experts réunis à Toursenvisagent l’émergence de ghet-tos d’hommes dans les mégapo-les avec leur lot de prostitutionet de criminalité. Ils considèrentcomme «assez improbable» le dé-veloppement de la polyandrie oude l’homosexualité... De leurcôté, les féministes occidentalessont obligées de constater quel’avortement, qu’elles ont pré-senté comme le symbole de lalibération des femmes, a fait subirà des millions d’entre elles unesorte de génocide. �

    Il manque environ 100 millions de femmes enAsie du fait de l’avortement et de l’infanticide(

    A

    CHINE

    (1) "Où sont passées toutes les jeunesfilles ?". Perspective chinoise n°86,novembre-décembre 2004

    par Tugdual DERVILLE

    Célibataires forcésLa Chine connaît un net déséquilibredémographique entre hommes et femmes.Ou, quand une politique totalitaire renforcedes mentalités archaïques...

  • R E S U R R E C T I O NLa théologie au service de l'évangélisation

    Revue fondée en 1956 par Mgr Maxime Charles

    Guerre et Paix (II)Promouvoir la paixLa paix : variations sémantiquesBenedictus

    La guerre juste :nouvelle jeunesse d'une théologie vénérable ?P. Gabriel Delort-Laval

    L'éthique du soldat chrétienà l'épreuve des conflits contemporainsGénéral Bertrand de Lapresle

    Penser une théologie de la paixMgr René Coste

    Le droit d'ingérencePère Jean-Yves Calvez

    VariaDossier sur un témoignage épiscopalLa guerre : un évêque prend la parole, de Mgr Michel Dubost : étude analytique et critique

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    ANCIENS NUMEROS DISPONIBLES…... ex du n° 74 Hommage au P. Louis Bouyer 7,50 €…... ex du n° 75 Miettes bibliques 7,50 €…... ex du n° 76 Le Purgatoire 7,50 €…... ex du n° 77-78 La psychanalyse 13,70 €…... ex du n° 79 La vocation et les vocations 7,50 €…... ex du n° 80-81 L’évolution 13,70 €…... ex du n° 82 La justification par la foi 6,10 €…... ex du n° 83 L’apologétique 6,10 €…... ex du n° 84-85 Les mystères de la vie de Jésus12,20 €…... ex du n° 86-87 Jésus, vraiment ressuscité 7,50 €…... ex du n° 88-89 Dieu peut-il souffrir ? 13,50 €…... ex du n° 90 Le pardon 7,50 €…... ex du n° 91 La communion eucharistique 7,50 €…... ex du n° 92-93 Retrouver Denys le Mystique 13,00 €…... ex du n° 94-95 Homme et femme il les créa 10,00 €…... ex du n° 96-97 Questions de Bioéthique (1) 10,00 €…... ex du n° 98 Questions de Bioéthique (2) 10,00 €…... ex du n° 101 Théologie du Dieu personnel 10,00 €

    Total ............ €

    ✂Guerre et Paix (II)Promouvoir la paix

    N° 108-109Juin 2005

    Septembre 2005

    NOUVEAU

    Directeur-gérant : Père Michel Gitton - Rédaction : Paul Airiau, Isabelle Rak,Jacques-Hubert Sautel, Charles-Olivier Stiker-Métral - Publication : Catherine Bergot

  • PORTRAIT

    8 FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005

    rune de Linares m’apparaît presque inti-midante tant son regard direct et pai-sible affronte l’entretien avec pudeur etmodestie. Ses parents avaient-ils uneprémonition lorsqu’ils ont choisi, il y a

    vingt-et-un ans, ce prénom qui lui va si bien ? Jen’ose lui poser la question. Elle paraît d’ailleursétonnée que je m’intéresse à sa motivation person-nelle avant de l’interroger sur le projet qui va lafaire décoller vers les Philippines dans quelquesjours. Partir pour un lointain dessein humanitaire,dans un bidonville de Manille, alors que tant destages confortables réservés aux étudiants desgrandes écoles lui tendent les bras ? Elle trouvecela "naturel" et elle ne prétend surtout pas êtreune exception dans sa génération. Et de citer lesnombreuses associations caritatives qu’animent lesélèves de cette école de commerce où elle a étéadmise il y a un an : ateliers d’écriture pour les dé-tenus, soutien scolaire aux enfants hospitalisés,solidarité avec le Mali ou la Biélorussie.

    Si vous faites mine de vous étonner – ne vousa-t-on pas dit que les générations nouvellesétaient individualistes et matérialistes ? – ses traitsvolontaires et délicats se durcissent et le vert deses yeux s’assombrit : "Je ne pense pas que lasociété soit prête à s’effondrer. L’initiative des

    jeunes dans le monde humanitaire ou social esttrès présente". Un peu honteux d’être passé pour leneurasthénique de service, vous tentez de vousrattraper par un zeste d’érudition : vous savez bienque certains vieillards de la Grèce antique repro-chaient déjà à leurs petits-enfants d’avoir perdules valeurs traditionnelles… Mais pendant qu’unsourire apaisé éclaire à nouveau son visage, vousméditez sur votre propre propension à noircir lapériode contemporaine et, surtout, vous vous ré-jouissez pour la chance des écoliers philippins quivont bientôt recevoir la visite d’une aussi char-mante ambassadrice.

    Quand Brune de Linares parle de son prochainvoyage, une soudaine flamme s’allume dans ses yeux.Tour à tour grave et enjouée, elle insistera à plusieursreprises sur cette étrange "joie" qu’elle a hâte de goû-ter bientôt là-bas, au contact des pauvres. "Cetteconfrontation me remettra les idées en place faceà ma vie un peu trop facile de petite Parisienne",prévoit-t-elle avant de murmurer "sans vouloir mejuger trop négativement." Brune a levé un coin duvoile, avec ce brin d’ironie et d’autodérision qui luipermet de préserver sa part de mystère. Elle se dit"consciente" du risque de voir sa "vie dériver versla futilité" tout en précisant qu’il n’y a pas de"connotation sacrificielle" dans cet engagement oùelle pense trouver son compte. "Se tourner vers lesautres, c’est un plaisir différent".

    Je suis épaté. Comment une motivation aussi ajus-tée pourrait-elle être déçue ? Brune précise partir à larencontre de ces enfants "non pas pour les aider, maispour partager ce que nous avons à nous apprendre."C’est peut-être cela le pragmatisme dont on nousrebat les oreilles en parlant de ces nouveaux étu-diants de façon injustement péjorative. Leur modestieest peut-être aux antipodes du volontarisme idéolo-gique de la génération issue de mai 68 ou de la pré-tendue “génération morale” d’il y a vingt ans. Mais nepromet-elle pas une efficacité plus concrète ?

    Ne vousa-t-on pas ditque lesgénérationsnouvellesétaientindividualisteset matérialistes ?

    B

    Représentative d’une génération bien loindes clichés hédonistes dont on l’affubleparfois, Brune de Linares, étudiante,s’apprête à découvrir un bidonville desPhilippines avec l’association "Un cheminpour les enfants". Nous l’avons rencontrée à la veille de son départ pour cinq semaines d’immersion.

    VACANCES UTILES

    par Paul COSTE

    Brune s’envolepourManille

  • Pourquoi donc ce petit bout de femme qui n’ajamais été confrontée à la pauvreté est-il soudain siattiré par les bidonvilles de Manille ? Quand je l’in-terroge sur ses désirs et ses peurs, Brune livrequelque chose d’essentiel : de ce voyage-là, elle neveut surtout pas revenir indemne. Elle ne désire pastant changer le monde que se laisser transformerpar les pauvres. Quelle est sa plus grande frayeur ?A l’âge où l’on aime braver les dangers, ce n’est cer-tainement pas ce qui inquiète le plus légitimementses parents comme l’insécurité de certains moyensde transport ou ce qu’ils ont constaté, sur le siteInternet du quai d’Orsay : "les Philippines y sontqualifiées de pays à hauts risques parce qu’il y a eudes attentats sur une de leurs îles", précise moninterlocutrice. Et sa mère lui a sagement conseilléde ne pas acheter de valise pour éviter de passer dela drogue à son insu… De même, ni l’inconfort del’hébergement qu’on lui promet – elle pourrait biendormir par terre avec les rats – ni son éventuel mal-aise à la découverte de la grande pauvreté ne l’ef-fraient véritablement, même si elle se demandequelle sera sa réaction dans ces situations difficiles.Brune n’a qu’une véritable crainte : "passer à côté".Selon elle, ce serait le cas si elle "s’imperméabilisait"au contact de la souffrance ou de la misère. D’une

    voix douce elle résume son attente : "me laissertoucher". C’est peut-être pour cela qu’elle part pourManille seule, une semaine avant les autresFrançais, et qu’elle vient d’accepter, comme un défi,de visiter une prison pour enfants, une expérienceforte qu’elle envisage déjà avec émotion.

    Ce voyage a visiblement quelque chose d’unparcours initiatique, une étape qu’elle pressent im-portante pour consolider sa personnalité à l’entréedans l’âge adulte : elle va là-bas à la rencontre desautres, mais aussi d’elle-même. Sereinement. Cen’est pas un voyage sans préambule ni lendemainqui l’attend. Tout au contraire, le principe même del’association dans laquelle elle s’est engagée fait dece voyage l’aboutissement d’une année d’implica-tion au cours de laquelle elle a recherché en Francedes fonds nécessaires au financement de la scolari-sation des enfants qu’elle va visiter. Et les besoinssont grands. Elle confie au passage que le terribleTsunami, en épargnant les Philippines, n’a pas faci-lité la tâche des organisations humanitaires qui ytravaillent. L’émotion planétaire a détourné lagénérosité de ces zones où la misère sévit de façonplus structurelle encore... Le voyage va lui per-mettre d’évaluer au plus près l’efficacité desactions entreprises par l’association et les besoins

    FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005 9

    PORTRAIT

    S’impliquerau servicede cettecause durantplusieursannées

    D.R

    .

  • PORTRAIT

    10 FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005

    auxquels elle va devoir répondre. Ceux qui partentcomme elle s’engagent à s’impliquer au service decette cause durant plusieurs années. Encore uneraison de réviser nos a priori sur une générationjugée velléitaire, surfant sur des fugaces émotionset zappant d’un élan à l’autre. Brune nous donneenvie d’aider concrètement tous ces jeunes quiouvrent leur cœur à l’humanité souffrante. Elleaccepte sans hésiter mon invitation à revenir dèsson retour pour raconter son voyage aux lecteursde France Catholique. Rendez-vous est pris à larentrée.

    Est-ce la grâce propre à cette œuvre qui l’aappelée ? Mon interlocutrice fait preuve d’uneétonnante maturité. Endossant volontiers toutel’histoire de "Un chemin pour les enfants", elle sesent déjà "personnellement responsable" de lapérennité de son action. "Nousn’avons pas le droit de nousarrêter", explique-t-elle en évo-quant la scolarisation entaméepour deux cents enfants et lesbourses versées à ceux quideviennent étudiants, sansoublier le modeste salaire desdeux assistantes sociales em-bauchées sur place qui garan-tissent une distribution optimaledes sommes collectées, notam-ment pour assurer une assis-tance médicale aux membresdes familles suivies. Et l’étu-diante d’évoquer aussi lesbesoins d’urgence, comme cetincendie qui a ravagé l’an der-nier une partie du bidonville.

    "Touchée", Brune l’est déjà.Ces enfants dont elle va croiser– ou aplanir – le chemin, elle avoue les aimer sansencore les connaître, si ce n’est à travers quelquesphotographies : "C’est un désir qui est né du récitdes autres. Il y a dans la façon dont ils en parlententre eux une gaieté qui est bluffante pour desgens qui vivent comme moi dans une société assezmatérialiste".

    Quelques anecdotes ainsi glanées lui ont misl’eau à la bouche. Elle a ri en imaginant une cin-quantaine de petits Philippins rassemblés sur unparvis chanter – en français dans le texte – le célèbre "Vent frais vent du matin" et même "Je suisrital et je le reste" ! Question de génération, Bruneadore le comique décalé. Pour elle et ses amis,humour et amour font bon ménage. On saisit aupassage l’importance de ces liens d’amitié, uneamitié vraie et profonde, qui l’ont poussée à s’ou-vrir aux autres.

    Peut-être cette ouverture doit-elle quelquechose à son expérience de l’échec. La jeune fillen’oubliera pas de sitôt sa fin de première année de

    prépa : "Mes professeurs m’ont virée car ils necroyaient pas en moi !" Elle sourit à peine en seremémorant l’appréciation de l’un d’entre euxqu’elle qualifie aujourd’hui de "maladresse" : "lé-gère intellectuellement" ! Elle ne lui en veut plusmais sa blessure fut alors vive. Sa réussite auconcours après "deux années de galère" a donc été"un immense soulagement" et même "une re-vanche". Finalement, cette épreuve a contribué à lafaire mûrir. Aujourd’hui, tout cela appartient aupassé et Brune semble bien décidée à croquer la vieà pleines dents. Une amie l’a cependant avertie sur"le risque, au bout de trois ans d’école, d’avoir l’im-pression de n’avoir rien fait". Et ce conseil n’est pastombé dans l’oreille d’une sourde.

    Difficile d’accuser Brune de légèreté : "J’ai hâtede rencontrer la simplicité des gens. Ils ne sont pas

    naïfs au sens péjoratif du terme maisaccueillant des choses qui arrivent. Pasau sens de la fatalité mais de laconfiance : quand quelque chosearrive : on prie". Ne comptez pas sur l’é-tudiante pudique pour s’étaler sur sa viespirituelle, d’autant que son associationn’est pas spécifiquement confession-nelle. Elle laisse juste entendre que toutcela s’articule naturellement.

    La jeune catholique française habi-tuée à voir sa religion étouffée par laculture dominante sait que, sur ce pointaussi, un contraste saisissant l’attend là-bas : "Les Philippines étant un pays ca-tholique très pratiquant, je vais vivredans une atmosphère où la prière seraprésente au quotidien, par exemple audébut des réunions, à la journée de re-mise des prix aux meilleurs élèves, lesoir du week-end que nous organisons.Je suis contente d’aller dans un pays où

    la religion est presque naturelle, où il y a des gensqui ont la foi très spontanément". Et, surprise, cetteévocation la fait sortir de sa réserve : "Pour moi,partir là-bas est une manière d’approfondir ma foisans forcément plein de remises en cause. Il y a uneconfiance dans la religion qui m’attire et me fas-cine". En somme, on ne peut souhaiter qu’une choseà la jolie Brune : que le ciel lui tombe sur la tête. �

    “J’ai hâtede rencontrerla simplicitédes gens”

    UN CHEMIN POUR LES ENFANTS (www.awfc.free.fr)16, avenue de Villiers, 75017 ParisL’association permet de scolariser 220 écoliers des bidonvilles de Malibay :droits d'inscriptions, fournitures et uniformes... jusqu’à l’Université.- Organisation de visites médicales trimestrielles.- Organisation de week-ends au bord de la mer, activités sportives... - Un programme pour inciter les parents à envoyer leurs enfants à l’école.Tout est fait pour que les actions soient gérées à terme par des Philippins.Chaque année, des membres de l'association, chargés de recueillir des fondsen France, se rendent sur place à leurs frais, pour une période d'un à deuxmois, afin d’assurer le suivi de ses réalisations et de réévaluer les besoins. L’association délivre un reçu fiscal permettant une déduction de 60% dumontant du don.

  • KENYA

    Mgr Luigi Locati, vicaire aposto-lique d’Isiolo, au Kenya, a été assassinéle 14 juillet. Agé de 77 ans, il était mis-sionnaire en Afrique depuis 40 ans. Ilavait reçu des menaces et il avait déjàété victime d’agressions l’an dernier etau mois de mars 2005.

    Né le 23 juillet 1928 en Italie, àVinzaglio, dans la province de Verceil,il avait été ordonné prêtre en 1952,était parti pour l’Afrique comme prêtre"Fidei Donum" et avait travaillé au Ken-ya dans la mission ad gentes.

    Consacré évêque en 1996, il a été,souligne Radio Vatican "l’une des fi-gures les plus significatives du mondemissionnaire italien". Le nonce apos-tolique à Nairobi, Mgr Alain Paul Le-

    beaupin soulignait pour sa part que"Mgr Locati était à peine revenu deNairobi où il avait passé le début de lasemaine, et il était allé dîner dans uncentre pastoral à quelque 200 ou300 m. de sa résidence et il rentraitchez lui accompagné de deux per-sonnes lorsqu’on lui a tiré dessus, à19h45. L’évêque est décédé à 20h15 ".

    Mgr Lebeaupin estime que l’assas-sinat est a priori en relation "avec lebanditisme, et sans rapport ni avec lapolitique ni avec la religion ".

    ZF05071502

    PETIT CATECHISME

    La version française du compen-dium du Catéchisme de l’Eglise catho-lique s’appellera le "Petit catéchisme de

    l'Église catholique" et sera publiée aulendemain des JMJ de Cologne, le 22août prochain.

    Cette édition française est dueconjointement aux éditions du CerfBayard Fleurus-Mame et Pierre-Téqui.(230 pages, 17 €). A Rome, le théo-logien de la Maison pontificale, le car-dinal Georges-Marie Cottier, op, aconfié à Zenit que cette édition ré-sumée entend répondre à une "igno-rance préoccupante des catholiques",non seulement en raison de la "sécu-larisation”, mais aussi peut-être en rai-son d’un "défaut de pédagogie".

    Il souligne qu’on "ne mémoriseplus", ce qui représente "une grandeerreur pédagogique faite un peu par-tout", et précise : "On a beaucoupcritiqué les catéchismes ancienscomme celui de Pie X qui procédait pardemandes et réponses, mais il avait unegrande qualité que l’on n’a plus, àsavoir de permettre de mémoriser lesréponses. Expliquer bien les chosesn’est pas donné à tout le monde. Ilmanque souvent la précision, choseessentielle aujourd’hui. Ce catéchismequi est un résumé procède donc pardemandes et réponses".

    Ce catéchisme s’adresse d’abordaux catholiques, souligne le théo-logien, "parce que nous devonsconnaître notre foi, notre foi doit êtreéclairée" : "il faut connaître la signi-fication de ce que nous croyons, lasignification de la loi morale, la si-gnification des grandes dimensions dela vie chrétienne qu’est la vie sa-cramentelle et de la vie de prièrechrétienne".

    Mais en même temps, le texte nes’adresse "pas seulement aux catho-liques", mais à "tous ceux qui désirentconnaître le sens de la foi chrétienne.Quelqu’un qui s’interroge sur la foipeut ouvrir ce catéchisme".

    La présentation en français de cetabrégé du catéchisme a été confiée àl’un des rédacteurs de l’édition de1992, le cardinal Jean Honoré, arche-vêque émérite de Tours.

    La version italienne en a été pro-mulguée par le pape Benoît XVI le 28juin dernier. Plus de 200.000 exem-plaires ont été vendus et l’on en est à la3e édition. Notre ami Georges Daix

    FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005 11

    Quand Benoît XVI parle des vacancesDepuis quelques jours, je me trouve ici, au milieu des merveilleuses montagnes

    du Val d'Aoste, où est encore vif le souvenir de mon bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II, qui pendant plusieurs années y a fait de brefs séjours reposants et tonifiants.Cette pause estivale est un don de Dieu véritablement providentiel, après lespremiers mois du service pastoral exigeant que la Providence divine m'a confié. Jeremercie de tout cœur l'évêque d'Aoste, le cher Mgr Giuseppe Anfossi, etégalement l'archevêque métropolitain, le cher cardinal Poletto, de Turin, et ceuxqui l'ont rendue possible, ainsi que ceux qui avec discrétion et une généreuseabnégation, veillent afin que tout se déroule avec sérénité. Je suis en outrereconnaissant à la population locale et aux touristes pour leur accueil cordial.

    Dans le monde où nous vivons, cela devient presque une nécessité de pouvoirse régénérer dans le corps et dans l'esprit, en particulier pour ceux qui habitent enville, où les conditions de vie, souvent frénétiques, laissent peu de place au silence,à la réflexion et au contact reposant avec la nature. Les vacances sont, en outre, desjours pendant lesquels on peut se consacrer plus longuement à la prière, à la lec-ture et à la méditation sur les significations profondes de la vie, dans le cadre sereinde sa famille et de ses proches. Le temps des vacances offre des opportunitésuniques de s'arrêter devant les spectacles suggestifs de la nature, merveilleux "livre"à la portée de tous, grands et petits. Au contact de la nature, la personne retrouvesa juste dimension, elle redécouvre qu'elle est une créature, petite mais dans lemême temps unique, "capable de Dieu" car intérieurement ouverte à l'infini.Poussée par la demande de sens, qui est pressante dans son cœur, celle-ci perçoitdans le monde environnant l'empreinte de la bonté, de la beauté et de la pro-vidence divine et elle s'ouvre presque naturellement à la louange et à la prière.

    En récitant ensemble l'Angélus depuis cette agréable localité alpine, demandonsà la Vierge Marie de nous enseigner le secret du silence qui devient louange, durecueillement qui dispose à la méditation, de l'amour pour la nature qui fleurit enaction de grâce à Dieu. Nous pourrons ainsi plus facilement accueillir dans le cœurla lumière de la Vérité et la pratiquer dans la liberté et dans l'amour.

    Allocution du Pape avant l’Angélus, dimanche 17 juillet. - ZF05071801

  • nous commentera l’événement queconstitue cette édition, dans le pro-chain numéro de France Catholique.

    ZF05071404

    CARDINAL VON GALEN

    Le cardinal August von Galen pour-rait être béatifié le 9 octobre prochain.Cette béatification est rendue possiblepar la reconnaissance d’un miracle dûà son intercession, en décembre 2004.L’archevêque a été surnommé "le lionde Münster" pour son opposition aurégime hitlérien au nom des persécutés,en particulier les personnes handi-capées, éliminées par euthanasie.

    Pour cela, Pie XII le créa cardinal en1945 : il mourut peu après des suitesd’une péritonite. Selon le postulateurde sa cause de béatification, l’avocatAndrea Ambrosi, le cardinal von Galena subi de nombreuses intimidations dela part du régime : il a été en pratiqueune épine dans le flanc de Hitler, maisHitler n’a pas osé le faire assassiner,comme lui et les autres autorités l’au-raient voulu, sans doute parce qu’ilétait une personne trop en vue et parcequ’il avait de son côté les catholiquesde Westphalie, la région la plus riche etimportante d’Allemagne.

    Pie XII l’a suivi et admiré et finale-ment, il a voulu le récompenser pourtout ce qu’il avait fait sous le régimenational-socialiste, en le faisant cardi-nal. En le recevant à Rome, il a dit, enla basilique Saint-Pierre, qu’il em-brassait en lui un héros.

    ZF05071405

    BEATIFICATIONS

    On se souvient que le 14 mai, lepréfet de la congrégation pour lescauses des saints, le cardinal José Sa-raiva Martins a présidé pour la pre-mière fois la messe au cours de laquellea été lue la formule latine par laquellele pape Benoît XVI béatifiait deux re-ligieuses, Mère Marianne Cope (1838-1918), membre des Sœurs de saintFrançois de Syracuse, évangélisatricedes lépreux à Molokai, et Mère As-cension du Cœur de Jésus (1868-1940),co-fondatrice des Missionnaires domi-nicaines du Rosaire, qui se consacrentà l’évangélisation des Indiens d’Ama-zonie.

    Trois prêtres polonais ont égalementété béatifiés par le pape Benoît XVI : laformule de béatification, en date du 4juin 2005, a été lue dimanche 19 juin,à Varsovie, lors de la messe de conclu-sion du congrès eucharistique nationalpolonais, présidée par le cardinal

    Joseph Glemp, archevêque de Varso-vie : Ladislas Findysz (1907-1964),Bronislas Markiewicz (1842-1912),Ignace Klopotwoski (1866-1931).

    La canonisation de cinq bienheu-reux est maintenue au 23 octobre : lamesse sera présidée à Rome par BenoîtXVI. Il s’agit de Joseph Bilczewski,Gaétan Catanoso, Sigismond Goraz-dowski, Albert Hurtado Cruchaga etFélix de Nicosie, comme prévu à lasuite du consistoire du 24 février der-nier.

    Charles de Foucauld pourrait êtrebéatifié le 13 novembre.

    ZF05071405

    CONGO-BRAZZAVILLE

    Invitée par la Conférence épis-copale du Congo (CEC), une délégationde la Conférence des évêques deFrance s’est rendue au Congo-Brazza-ville du 20 au 27 juillet.

    A l'instar du voyage effectué enjuillet 2004 par une délégation de laCEF en République démocratique duCongo, au Rwanda et au Burundi, cettevisite est un signe de communion, unemanifestation de soutien à l'Église duCongo dans son action en faveur de lapaix et de la solidarité.

    La délégation, conduite par MgrJean-Pierre Ricard (archevêque de Bor-deaux et président de la Conférencedes évêques de France), a été reçue àBrazzaville par les évêques de laConférence épiscopale du Congo. Ellea visité la région du Pool - en s'arrêtantnotamment à Kinkala - et s’est rendue àPointe-Noire ainsi que dans le nord, enparticulier à Ouesso.

    Le dimanche 24 juillet, la messesolennelle concélébrée en la basiliqueSainte-Anne du Congo à Brazzaville aété présidée par Mgr Jean-Pierre Ricard.

    Parmi les membres de cette délé-gation, Mgr André Lacrampe (arche-vêque de Besançon et président duConseil national de la solidarité), MgrStanislas Lalanne (Secrétaire général dela CEF), sœur Marie-Claire Jadeau(vice-présidente de la Conférence desSupérieures majeures) et M. Jean-PierreRicher (président du Secours catholique- France).

    ETHIOPIE

    A la fin du mois de juin, les Salé-siens ont inauguré la première églisecatholique d’Adwa, consacrée à MarieAuxiliatrice. Sa construction est le fruitd’un rapport d’estime et de confiancené lors de la famine de 1985 : depuiscette période, les anciens de Adwa

    avaient demandé avec insistance àl’Evêque de Adigrat, la présence, dansleur localité, des Salésiens qu’ilsavaient rencontrés pendant les mo-ments difficiles.

    L’œuvre d’éducation et de forma-tion des garçons et des filles, la cons-truction d’écoles et de laboratoires,réalisée par les Salésiens et par lesFilles de Marie Auxiliatrice à partir de1993, ont été une des raisons qui ontsoudé le rapport de confiance entre lapopulation de Adwa et la Congrégationde Don Bosco. La pose de la premièrepierre en 2002, puis la construction etla consécration de l’église est le fruit dece travail socio-éducatif en faveur desplus nécessiteux et des plus pauvres decette terre.

    Cette église a ouvert ses portes le 23juin dernier, à près de mille personnes,dont une représentation importante duclergé et des fidèles orthodoxes quisont présents en grand nombre danscette région. La Conférence Episcopaled’Ethiopie et le nonce apostolique ontparticipé à cette cérémonie solennelle.

    ZF05071406

    J.M.J.

    "Je vous annonce que la prochaineJournée mondiale de la Jeunesse sedéroulera à Cologne. Dans l'imposantecathédrale de cette ville allemande estvénérée la mémoire des Rois Mages, lessages venus de l'Orient guidés par l'é-toile qui les conduisit jusqu'au Christ".

    Ainsi, à Toronto (Canada) en août2002, lors de la XIXe Journée mondialede la Jeunesse, Jean-Paul II lançait-il lenouveau rendez-vous 2005 de l'évé-nement institué en 1984 durant l'AnnéeSainte de la Rédemption pour renforcerl'intérêt de l'Eglise pour les jeunes. Lesjeunes catholiques se rassemblerontdonc à Cologne du 16 au 21 août au-tour du thème : "Nous sommes venuspour l'adorer" (paroles des Magesrapportées par Marc).

    Cette Journée de Cologne répond auvœu exprimé par Jean-Paul II à l'at-tention du cardinal Joachim Meisnerlors de la JMJ de 1997 à Paris. "Le Papem'avait dit qu'il serait bon - a racontél'archevêque de Cologne - que l'unedes premières JMJ du nouveau millé-naire se déroule en Allemagne, paysqui avait engendré au XXe siècle unecatastrophe pour l'humanité. Ce seraitbon qu'en vienne cette fois un signed'espérance".

    Le premier rendez-vous en vue dela XXe Journée fut le Dimanche des Ra-meaux 2003 lorsque, place St-Pierre,de jeunes Canadiens transmirent la

    12 FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005

  • Croix symbole de l'événement à dejeunes allemands. L'année suivante,cette croix et l'icône mariale SalusPopuli Romani entreprirent un pèle-rinage à travers les diocèses allemands,qui se conclura à Cologne le 16 aoûtprochain.

    Cologne sera le premier déplace-ment de Benoît XVI hors d'Italie. Il yrencontrera le million de jeunes at-tendu par les organisateurs le 18 août.Le lendemain soir il conduira la ViaCrucis avec eux et le 20 présidera laveillée de prière. Dimanche 21, il cé-lébrera la Messe de clôture de la JMJ2005, sur la colline dominant le lieu derassemblement des jeunes, constituéeavec de la terre provenant du mondeentier et amenée par les jeunes ayantparticipé à la phase préparatoire del'événement.

    Pendant la JMJ, le reliquaire desMages sera placé comme au MoyenAge derrière le maître-autel afin que lespèlerins puissent passer devant et serecueillir brièvement.

    Une sorte de mosaïque représentantle visage de Jean-Paul II a été réaliséepar collage des photos envoyées dumonde entier par les jeunes.

    Durant son séjour, Benoît XVI visi-tera la synagogue de Cologne et aurades entretiens avec les autorités civileset religieuses locales. Il se rendra aussià Bonn, ville universitaire où il ensei-gna la théologie de 1959 à 1963, poury rencontrer le Président fédéralallemand Horst Köhler.

    On attend aussi à Cologne 7.000prêtres et environ 700 évêques, quianimeront des catéchèses matinales,confesseront et célébreront la Messel'après-midi.

    VIS 050719 (460)

    BENOIT XVI A COLOGNE

    Le 20 juillet a été publié le pro-gramme du voyage de Benoît XVI enAllemagne, à l'occasion de la XXeJournée mondiale de la Jeunesse (18-21août). Le Pape quittera Rome par avionjeudi 18 août à 10h pour atterrir à midisur l'aéroport international de Köln-Bonn. Après la cérémonie d'accueil ilgagnera par la route sa résidence,l'archevêché de Cologne, où il dé-jeunera. Ensuite il se rendra à l'em-barcadère du Rodenkirchenbrücke pourprendre place sur un bateau. Une brèvecroisière sur le Rhin le conduira face auQuai du Rheinwiesen pour le premiercontact avec les jeunes. Après le dis-cours, revenant au point d'embarque-ment, Benoît XVI gagnera la cathédrale.

    Vendredi 19, le Pape célébrera une

    Messe privée à l'archevêché. A 10h30il se rendra à Bonn pour y rencontrer àla Villa Hammerschmidt le présidentfédéral Horst Köhler. De retour à Co-logne, il visitera la synagogue, aprèsquoi il déjeunera à sa résidence avecun groupe de jeunes pèlerins. A 17h leSaint-Père rencontrera les séminaristesen l'église St-Pantaléon, puis regagneral'archevêché pour une rencontreœcuménique.

    Le lendemain, après sa messe, Be-noît XVI recevra à sa résidence le chan-celier fédéral Gerhard Schröder, le pré-sident du Parlement fédéral WolfgangThierse, la présidente de la CDU An-gela Merkel, le ministre-président duland de Nord Rhénanie-WestphalieJürgen Rüttgers. A 18h se sera le tourdes représentants de communautés mu-sulmanes. En début de soirée il gagneral'esplanade de Marienfeld où se dérou-lera jusqu'à 23h la veillée des jeunes.

    Dimanche 21 août, le Pape célé-brera la Messe sur la même esplanade à10h, suivie de l'angélus. Après le dé-jeuner, il se rendra à la Piussaal du sé-minaire diocésain pour une rencontreavec l'épiscopat allemand. Il saluera

    ensuite le Comité d'organisation de laJMJ et gagnera par la route l'aéroport.La cérémonie de congé aura lieu à18h45 et l'atterrissage à Roma-Ciam-pino est prévu à 21h15.

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    EGLISE D’ALLEMAGNE

    L'Allemagne compte 82.520.000habitants dont 27.411.000 catholiquesdéclarés - pour les impôts - (33,2%).L'Eglise catholique dispose de 105évêques, 18.826 prêtres, 36.323 re-ligieux et 3.561 séminaristes.

    En Allemagne, l'Eglise catholiquegère 10.307 institutions d'enseigne-ment, de l'école maternelle à l'univer-sité pour un total de près de 960.000élèves et étudiants. Elle gère également536 hôpitaux, 1.359 dispensaires,2.588 maisons de retraite ou de soins,1.298 orphelinats ou garderies, 2.030centres de consultation familiale et pro-tection de la vie, 1.331 structures d'é-ducation spécialisée ou de rééducationsociale.

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    FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005 13

    Les vacances de France CatholiqueLe journal ferme donc ses portes cette semaine, jusqu’au 2 septembre. C’est avec joieque nous voyons arriver ce temps de légèreté mais aussi de ressourcement, joie déjàmêlée cependant d’un peu inquiétudes quant au retour. Le lien est si fort entre notrehebdomadaire et la plupart de ses abonnés qu’on se dit qu’il y a un risque commercial àinterrompre ainsi ces rendez-vous hebdomadaires. Nos lecteurs iront-ils voir ailleurs sil’herbe est plus verte ? Un autre journal, une autre forme d’information plus facile(télévision, internet...) ? Nous sommes assez lucides pour mesurer la force des autresmédias chrétiens ou non, leurs progrès souvent, et les faiblesses quelque peuirrémédiables du nôtre. Mais, c’est grâce à une gestion du personnel très parcimonieuseque nous avons réussi à maintenir le journal au cours de la grave crise juridique etéconomique de l’an dernier et, depuis quelques semaines, à en renouveler laprésentation dans le sens d’une plus grande lisibilité, d’une certaine jeunesse joyeuse dela forme. Mettre en vacances tout le monde en même temps, dans une petite entreprise,c’est un moyen de grande économie, voire une quasi obligation. Et puis, est-il si mauvais,pour nos amis, de rompre aussi, pour une courte période, leurs habitudes de lecture, dese dire qu’ils ont soudain un peu plus de temps, pour lire un livre à fond, pour se couperun peu de l’actualité et méditer dans la paix ?Réjouissons-nous de ne pas tout maîtriser, de ne pas pouvoir croire que nous pourrionstout organiser comme nous voudrions. L’année qui vient sera riche en rebondissements,en mobilisations missionnaires, en grâces reçues.Déjà des signes nous sont donnés que le travail récemment accompli a des échossensibles, des “résultats”, accompagne de grandes choses... De nouveaux amis nous ontrejoints ces derniers temps. Ils transformeront notre aventure, nous étonneront ens’étonnant eux-mêmes de se laisser toucher par la grâce unique de France Catholique,comme tous leurs prédécesseurs. Au 2 septembre donc, reposés et confiants. Bonnesvacances à ceux qui peuvent en prendre et amitié à tous.

    Frédéric AIMARDdirecteur de France Catholique

    P.S. Ah, oui, il ne faut pas croire que nous pouvons oublier toutes les “bonnes habitudes”. Pourconsolider la reprise du journal, nous aurons besoin de faire un assez sérieux “appel au peuple” enseptembre prochain. Vous vous en doutiez ? Ce sera aussi bon, peut-être, pour notre humilité. On peutdès aujourd’hui faire un don avec un chèque au nom de l’association ADCC et nous le transmettre.

  • � Votre dernier ouvrage a comme sous-titre :"Réponses à certaines demandes homo-sexuelles sur le mariage et l’adoption".Quelles sont ces demandes au juste ?

    Ces demandes – c’est bien connu -concernent l’adoption d’enfants et l’accèsau mariage pour les duos homosexuels. Ilfaut savoir toutefois qu‘elles ne sont pas lefait de la totalité, ni même de la majoritéde la population dite homosexuelle.Nombre des personnes concernées pen-sent que le meilleur pour elles n’est pasd’imiter, dans une problématique de jalou-sie, le modèle hétérosexuel. Ce qui meparaît le plus préoccupant est l’adoption,car y est en jeu le bien des enfants. Maisl’institutionnalisation publique des unionshomosexuelles serait aussi regrettable, neserait-ce que parce que nous perdrionsainsi un signifiant majeur : nous n’aurionsplus de terme pour désigner spécifique-ment l’union socialement reconnue d’unhomme et d’une femme. Une institutionpar laquelle la société affirme que l’al-liance entre deux êtres différents sexuelle-ment pour fonder une famille est un bienpour elle verrait son sens se diluer, etmême se perdre, pour devenir une vague"reconnaissance sociale de l’amour".

    � Pouvez vous préciser en quoi l’adoptionirait à l’encontre du bien des enfants ?

    Elle priverait les enfants de trois biensfondamentaux :

    Tout d’abord, de la différence entredeux repères identificatoires - masculin etféminin - dans l’univers de leur croissanceintime. Qu’il soit garçon ou fille, l’enfant abesoin, pour la découverte de son identité,d’un jeu subtil d’identification et différen-ciation avec son père-homme-masculin etsa mère-femme-féminine. (Il faut, de nosjours, tout expliciter !) Cela a été étudiéavec minutie par une littérature scienti-fique surabondante. Mais, par un étrangephénomène d’amnésie collective, le dis-cours médiatique fait froidement tablerase de tout cet acquis.

    Le second bien élémentaire pour l’en-fant est, lorsque cela est possible, la conti-nuité entre le couple procréateur et lecouple éducateur. Les difficultés propres àl’adoption indiquent bien que les rupturesdans l’histoire, les dissociations entre lesdifférentes composantes de la parentésont autant de complications dans la viede l’enfant. Dès lors, il est souhaitable qu’àla discontinuité liée à l’adoption ne viennepas s’ajouter une seconde discontinuité, àsavoir la perte de l’analogie entre le cou-ple d’origine et le couple éducateur.

    Le troisième bien élémentaire pourl’enfant sera une généalogie claire etcohérente, lisible. Nous sommes dans unsystème généalogique à double lignée, quicorrespond de surcroît à une réalité denature. Les bricolages de la filiation pro-posés par certains lui ôtent toute lisibilité.Savez vous qu’en cas d’adoption simplepar un couple homosexuel, l’enfant, béné-ficiant par ailleurs d’une filiation naturelle,pourrait se trouver avoir trois pères outrois mères ? Car l’adoption – il faut bien

    le savoir et le faire savoir – ne porte passeulement sur l’éducation (par qui l’enfantsera élevé), mais elle définit la filiation (dequi l’enfant est fils ou fille). C’est là queles choses deviennent vraiment graves.

    � Quelle est cette théorie du gender à l’ori-gine de ce que vous appelez "la confusiondes genres" ?

    Tous ces discours auxquels nous som-mes confrontés relèvent d’une philosophie– ou d’une idéologie – pour laquelle toutest culturel, tout est construit. On dira quele genre (distingué et même dissocié dusexe) est une construction purementculturelle. Tous les traits dits "féminins"seraient exclusivement culturels. Dans lamême ligne, la "parentalité" sera dissociéede la parenté. Si la deuxième reste liée à lanaissance, la première pourrait en êtredissociée. Sa définition dépendrait inté-gralement du contexte culturel. Tout neserait que convention et, dès lors, pour-quoi ne pas essayer de nouveaux mo-dèles ? Nous sommes ici au cœur du pro-blème : le refus du donné qui est à la basedes relations familiales.

    � Différentes études affirment que des en-fants élevés par des parents de même sexesont aussi équilibrés que les enfants élevéspar des parents hétérosexuels. Alors pour-quoi s’inquiéter ?

    Ces prétendues études sont constam-ment citées sans que personne n’aille leslire, à la source. J’en ai pris la peine. Dansmon ouvrage mais, auparavant, dans plu-sieurs publications scientifiques, j’ai mon-tré leur manque total de crédibilité.Echantillonnage ridicule (entre 11 et 38questionnaires), choix des situations biai-sées, absence de groupe de contrôle, ques-tionnaires standard extrêmement superfi-ciels etc.

    Xavier Lacroix, théologien,père de famille, réaffirme,la valeur positive del’alliance conjugale entrel’homme et la femme, etson incompatibilité avec larevendication du mariagehomosexuel.

    FAMILLE

    14 FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005

    XAVIER LACROIXpropos recueillis

    par Ludovic LECURULaconfusiondes genres

    Le refus du donné qui est à la basedes relations familiales(

  • Dans une publication française sou-vent citée (S. Nadaud), ce sont exclusive-ment les "parents" concernés qui sont in-terrogés, tous membres de l’Associationdes parents et futurs parents gays et les-biens !

    Mais le plus étonnant est que ces loin-taines enquêtes, invérifiées, passent avantce que l’expérience et les connaissancesscientifiques nous enseignent de manièretrès précise et très certaine ! D’ailleurs, laquasi totalité des psychanalystes – lesexceptions se comptent sur les doigts dela main – sont fermement opposés à l’a-doption.

    � Selon vous, ce débat de société s’enlisedans la confusion entre discrimination etdifférence…

    Notre culture est marquée par unecrise profonde du sens de la différence.L’idée d’égalité, légitime en soi, devientune sorte d’idée fixe, le seul critère sur

    lequel tous s’entendent. On oublie toutsimplement ce qui est en question dansles "droits" en question, à savoir ce qu’estle mariage, ce qu’est la parenté.

    Ce n’est pas l’homosexualité qui est enquestion, mais l’homosexuation. La loi n’ajamais interdit à une personne homo-sexuelle de se marier, d’être père ou mère,ni même d’adopter. Elle définit un cadreobjectif et n’a pas à entrer dans la psycho-logie des personnes. Ce cadre étant fixé,l’individu a soit le choix, soit la capacitéd’y entrer ou non, comme dans tout cadreinstitutionnel (religion, armée, univer-sité…).

    Par ailleurs, paternité et maternité nesont pas des droits dans la mesure où ellesimpliquent un tiers, un lien institué, uneresponsabilité. La Convention internatio-nale des droits de l’enfant reconnaît àcelui-ci "dans la mesure du possible, ledroit de connaître ses parents et d’êtreélevé par eux". Il faut alors prendre lajuste mesure des devoirs correspondant àces droits.

    � Le débat que vous abordez est-il une chan-ce pour notre société ou un baroud d’hon-neur ?

    Il pourrait être une chance, - d’aborderdes questions fondamentales - s’il étaitvraiment un débat, et non un combatdouteux, biaisé par des accusations quivisent à jeter l’opprobre sur l’interlocuteur,comme celle d’ "homophobie".

    Pour beaucoup, il s’agit surtout d’unrapport de forces dans lequel l’action d’unlobby très déterminé, qui va dans le sensdes idées reçues les plus faciles, a deschances de l’emporter. Mais il nous restela possibilité de faire de la résistance et derappeler coûte que coûte les enjeux fon-damentaux, pour l’avenir d’abord de nosenfants.

    FAMILLE

    FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005 15

    Xavier Lacroix, “La confusiondes genres”, Bayard-Etudes, 151pages, 9,80 €.

    D.R

    .

    Xavier Lacroix est professeur de théologie morale à la Faculté dethéologie de Lyon dont il est doyen depuis 1997. Il a été, de 1986 à 1994,directeur de l'Institut des sciences de la famille de Lyon. Il est membre du

    Conseil national de pastorale familiale de l'Église catholique.

  • En mémoire des jours

    ‘est un des hauts lieuxde Terre Sainte. L’en-droit où peut-être

    Jésus en personne s’est arrê-té, un soir où il se faisait bientard. On est à Emmaüs, ou cequi aurait pu l’être, peu im-porte. A distance en tout casde ces soixante stades deJérusalem, dont nous parlel’Evangile des Pèlerins d’Em-maüs. Inoubliable moment,où les yeux de deux pèlerinsqui ne s’y attendaient guère,s’ouvrirent, et ils le recon-nurent. Qui ne s’est un joursenti pèlerin d’Emmaüs, luiaussi ? Tandis que l’Ecritures’ouvre à nous pour nous re-dire l’ineffable du dessein di-vin : “Ne fallait-il pas que leChrist souffrît pour entrerdans sa gloire ?”

    On comprend mieux quepartout, en ces temps oùsonne le glas d’un Père Abbéqui de longue date s’était éta-bli à Abu Gosh, pour renoueravec le mystère d’Israël. Jean-Baptiste Gourion, il s’appelait.Et il ne se sentait pas étrangerà ce monde juif dont il venaitpar sa naissance. Sa démarchepersonnelle le conduit à de-venir chrétien, dans les an-nées 60. Il reçoit le baptême àl’abbaye du Becq Hellouin, enNormandie, avant d’entrer lui-

    même dans la congrégationbénédictine du Mont Olivet.Don Graaman, une figure dutemps, est alors Père Abbé auBecq. On est dans les annéesde l’après-guerre, où l’on sefait l’effet d’un revenant de lagrande épreuve. On ne parlepas encore de Shoah, maisson ombre plane. Un éveil seproduit dans la consciencedes chrétiens, qui réalisent lespassifs de l’histoire, qui estgrevée de pogroms, et deméconnaissance à l’endroitdu peuple de la première Al-liance. Il y a urgence, et périlen la demeure. Nécessité sur-tout d’en revenir au desseinde Dieu sur Israël.

    Des pionniers sont déjà àl’œuvre, avec la MaisonSaint-Isaïe, dont le père Mar-cel Dubois et quelques-uns deses compagnons, sont les pro-moteurs inspirés. On redé-couvre alors la langue desPères, et on obtient de Romela permission d’en faire lalangue liturgique des célébra-tions chrétiennes.

    Parmi les nations, Israëlrefait son chemin, mais à unprix de guerres, dont aucunene fait avancer les choses. LeConflit des Six Jours, permetà Israël d’étendre ses fron-tières, et à Jérusalem deretrouver sa vocation de capi-tale. Non sans problèmespour les Palestiniens, qu’oncommence à appeler de cenom. Ce qui est victoire pourles uns est défaite pour lesautres. On en est toujours là,malgré les espoirs d’Oslo, lesretrouvailles d’un instant surune pelouse à Washington.

    Les moines, dans cecontexte qui n’est pas desplus favorables, ont missionde prière et de paix. Ils setiennent debout et fidèles à

    la tâche. Jean-Baptiste Gou-rion est d’abord le prieur, puisPère Abbé. C’est un vrai ra-yonnement, qui émane de là,et dépasse les limites d’im-plantations locales.

    Une douzaine de moineset un peu plus de moniales, semontrent assidus dans la du-rée, à la louange et à l’implo-ration. Leur cœur se veut ou-vert à tous, même si d’aucunsleur reprochent parfois uneprédilection trop affichéepour les juifs. Mais à leurécoute on se prend à croire àl’impossible, et à l’amitié detous, si inconcevable que celaparaisse.

    Une petite communautéhébréophone existe, si dis-persée soit-elle. On est dansl’ordre du petit nombre, le“petit reste” nous dit la Bible.Abu Gosh est comme la mai-son de famille, pour ces chré-tiens esseulés, qui ont bien dumal à se faire une place.

    Jean-Baptiste Gourion estauprès du patriarche latin,leur mandant comme vicairegénéral. Numériquement, ceschrétiens hébréophones sontpresque inexistants. Mais auplan des symboles ils sonttrès importants : ils se ratta-chent, et nous avec eux, à lagrande Tradition, à la mé-moire de l’Eglise de Jéru-salem. Celle dont Jacques, lefrère du Seigneur, fut évêque,précisément.

    Jean-Paul II, qui avait leregard large, n’oublie per-sonne quand il vient àJérusalem et qu’il pose desgestes inoubliables aux mursdu Temple comme au mémo-rial de la Shoah. Ce qui nel’empêche pas d’aller à Ra-mala du même pas. A son re-tour à Rome, le Pape nommele Père Abbé d’Abu Gosh

    évêque auxiliaire du patriar-che latin de Jérusalem. Jean-Baptiste Gourion devientévêque de Jérusalem. L’évé-nement - c’en est un - nepasse pas inaperçu, et ne vapas sans controverses. Laconsécration de cet évêquehors normes, est un moment.Le symbole, et en ces lieuxprécisément, est d’une im-mense portée.

    Parce qu’il ressent déjà lesaffres du mal qui va l’empor-ter, Jean Baptiste Gourion saitmieux que personne la préca-rité de ses jours. Mais il enperçoit aussi la grâce, qui n’aévidemment rien à voir avecles petites gloires de cemonde. C’est dans la conti-nuité d’une mission que touts’inscrit. Comme ce qui pré-cède, la remise par exempledu prix de l’Amitié Judéo-chrétienne à Jean-BaptisteGourion.

    C’est un destin d’excep-tion, qui s’est accompli àAbbou Gosh. Ce Père Abbé,qui avait aussi la grâce de l’é-piscope, était avant tout unêtre de prière et de vraie pré-sence. La maladie ne lui a pasété douce, évidemment. Maisil était disciple, et ne secroyait pas au-dessus de sonmaître. C’est vraiment une viede chrétien qui s’achève.Comme le bon et fidèle servi-teur, Jean-Baptiste Gourionest entré dans la joie de sonmaître.

    Le soir tombe, et il se faitbien tard. Ce n’est pas d’unpas si lourd que l’on revientd’Abu Gosh, où une fois en-core il nous est redit : “Nefallait-il pas que le Christsouffrit pour entrer dans sagloire ?” �

    Une vie de chrétien

    C

    Par Robert Masson

    ESPRIT

    16 FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005

  • FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005 17

    ESPRITLectures de la messe du 31 juillet18ème dimanche du temps ordinaire par Michel GITTON� Qui pourra nous séparer de l’amour du Christ ? Laphrase de saint Paul claque comme un drapeau etrévèle l’expérience d’un homme qui avait pourtantbeaucoup souffert. Rien de ce qui peut nous arriversans faute de notre part n’est de nature à nousdétourner de notre vocation et du bonheur que Dieuveut pour nous. Ce n’est pas dire que tout sera facileet simple, et que nous serons miraculeusement à l’abride la misère des hommes, mais Dieu ne laissera pasinachevée l’oeuvre qu’il a commencée en nous et, soiten nous aidant à supporter l’épreuve, soit enl’allégeant, il nous permettra de la traverser sans enêtre brisé.

    � De cette sollicitude du Christ pour nous, nous avonsun exemple saisissant dans la multiplication des painsque nous rapporte l’Evangile selon saint Matthieu.C’est "saisi de pitié envers eux", qu’il guérit lesmalades et va au-devant de la détresse de ces

    hommes qui vivent sans doute dans unétat de sous-alimentation chronique. LeChrist saisit tout à la fois leur attente spirituelle etleur besoin physique. Et le don qu’il fait de cettenourriture abondante, et sans doute excellente,réchauffe leur cœur autant que leur corps.

    � En lien avec ce texte, nous avons entendu unpassage du Prophète Isaïe, qui, empruntant les accentsdes sages, exhortait son peuple à revenir à la seulechose sérieuse qui pouvait lui épargner le drame d’unenouvelle déportation. La présence du Seigneur aumilieu de son Peuple est présentée comme une sourcesurabondante de biens matériels, de boissonsreconstituantes et de nourritures de choix. Dieu nedédaigne pas nos humbles besoins même s’il veut nousmener plus loin. Mais, en retour, il est urgent,indispensable, de retrouver le chemin de la confianceet de la fidélité. �

  • 18 FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005

    20ème dimanche du temps ordinaire du 14 août� Toutes les lectures de ce dimanche tournent autour duprivilège d’Israël et de la place des non-juifs dans le plan deDieu. Force nous est de constater que pour Jésus lui-mêmel’élection veut dire quelque chose et, pour lui, les filsd’Israël sont les enfants de la maison, alors que les "païens"sont comme des chiens (formule classique chez les juifs,atténuée "en petits chiens", mais quand même…). Eh oui !Le Fils de Dieu lui-même confirme le choix fait à l’origine :Dieu s’est lié à une personne, Abraham, à une famille, lasienne, à un peuple, celui d’Israël. Et, comme le dit saintPaul, dans la deuxième lecture, "les dons de Dieu et sonappel sont irrévocables".

    � Ne nous scandalisons pas trop vite. Ce choix n’est pas dufavoritisme, cette élection n’est pas l’exclusion des autres. Leprivilège d’Israël est au bénéfice de tous les peuples, commeles prophètes en avaient déjà sérieusement conscience, ainsiqu’on le voit au passage d’Isaïe lu ce dimanche : les païenssincères qui honorent le Dieu unique et cherchent à vivreselon sa volonté ont leur place dans le culte d’Israël, ils sontattendus à Jérusalem. Mais le choix de certains, qui sont lespremiers appelés, est là pour manifester le côté personnel dela relation à Dieu : celui-ci ne communique pas avecl’humanité de façon globale et abstraite, il fait alliance avecdes êtres de chair et de sang, il tisse avec certains des

    rapports privilégiés et ensuite il étend de proche en prochecette relation aux autres par leur entremise. L’élection estgratuite et loin de constituer pour ceux qui la reçoivent unegarantie qui les mettrait à l’abri du jugement de Dieu, c’estune terrible responsabilité qui devrait les faire trembler.

    � Jésus, en faisant semblant de rejeter la demande d’unemère éplorée, pour le seul motif qu’elle n’est pas juive, necherche qu’une chose, à la mettre dans l’humilité. En luirappelant que l’initiative de Dieu suit un certain ordre, etqu’il y a des premiers concernés, il ne la rejette pas dans lesténèbres extérieures, comme la suite va bien le montrer,mais il l’invite à faire un acte de confiance et à reconnaîtrele privilège fait à Israël. Elle n’a pas de droit sur le Seigneur,et c’est quand elle l’aura reconnu qu’il pourra la combler.

    � L’enseignement de saint Paul s’inscrit tout entier danscette perspective. Pour lui, la conversion d’Israël résulterad’une émulation entre juifs et païens : si ces derniers ontaccueilli plus facilement en apparence le message del’Evangile, c’est pour provoquer la jalousie d’Israël, ils nedoivent pas pour autant mépriser ceux qui sont porteurs desalliances ; c’est en restant humbles, en sachant qu’ils sonteux-mêmes une "pièce rapportée" qu’ils mériteront d’entrerdans l’alliance et qu’ils présenteront aux juifs uneprovocation qui les amènera à la foi. �

    ESPRITLectures de la messe du 7 août19ème dimanche du temps ordinaire par Michel GITTON� "Je veux voir Dieu". Le livre d’un grand spirituel du 20°portait ce titre et, sous cette formule, on peut rassemblertoute l’attente religieuse de l’humanité. L’homme n’a pasété fait pour boire, manger et se reproduire, mais bien pourcela : voir la Beauté incréée, à l’image de qui il a été fait.Hélas, à cause du péché, les relations ne sont plus si simpleset l’homme, normalement, à cause de sa propension à toutramener à lui ne peut plus voir Dieu sans mourir, ce contactle brûle au lieu de le béatifier. Mais un espoir demeure :façonné par la Parole de Dieu, purifié par la pénitence, lecroyant peut au moins entrevoir quelque chose de la Gloirede Dieu, de son rayonnement, tel Moïse sur le Sinaï, ouencore Elie sur cette même montagne bien des siècles plustard, où il est venu retrouver l’intuition initiale de la foimonothéiste.

    � C’est ce que nous raconte la première lecture, où nousvoyons le Prophète "se tenir devant le Seigneur" et, au lieude se laisser prendre à tous les signes avant-coureurs trèsimpressionnants qui se succèdent (ouragan, tremblement deterre, ouragan), attendre la révélation du Seigneur : au-delàdes signes, le " murmure d’une brise légère. Ce coup-ci, ilpeut saluer la présence du Dieu vivant qui ne se confondavec aucun prodige extérieur. Le visage couvert de sonmanteau, inondé de joie, il peut rencontrer Celui qui l’aappelé dès le sein de sa mère.

    � Cette expérience exceptionnelle n’est pas réservée aupassé. Dieu n’est pas resté prisonnier de son ciel : en sonFils unique, il a permis que nous puissions le voir, si nous

    avons la foi. Saint Paul, dans le très beau passage de l’Epîtreaux Romains, où il essaie d’énoncer le privilège, jamaisremis en cause, d’Israël, en vient à dire "c’est de leur racequ’est né le Christ, lui qui est au-dessus de tout, Dieu, béniéternellement". Il est peu de textes du Nouveau Testament,où Jésus soit ainsi appelé directement Dieu, or c’est ici lecas. Nous savons donc qu’en lui, c’est Dieu, immédiatement,qui se communique, il n’est pas un intermédiaire entre leciel et la terre, avec lui c’est le ciel sur terre.

    � La scène que nous décrit l’Evangile nous en fait sentirtoute la profondeur. Le Christ se manifeste d’une façonhumainement très déconcertante. Notons d’abord que c’estlui qui éloigne ses apôtres et qui leur fait connaître lesincertitudes et les périls de la mer, qu’ils vont devoiraffronter sans lui. C’est dans l’expérience d’un monde agitéet déstructuré que soudain il va leur apparaître dans toutesa force, capable de marcher sur la mer, et avec ce mot queles prophètes mettaient dans la bouche de Dieu :"confiance ! c’est moi !". Mais ce n’est pas cette apparitiongrandiose qui va les gagner complètement, c’est la scènebien plus humaine qui suit : Jésus appelant à lui Pierre quis’offre à le rejoindre sur les eaux, Jésus lui faisant fairel’expérience de sa faiblesse, mais le tirant soudain dudanger pour l’amener près de lui, Jésus assis à côté d’euxdans la barque, la tempête une fois calmée. Ce contrasteentre l’autorité qui émane de lui et la proximité retrouvéeles convainc, mieux que tous les discours, de sa divinité. Ilspeuvent se prosterner comme Elie : Dieu, ils l’ont vu ! �

  • FRANCECatholique N°2987 29 JUILLET 2005 19

    21ème dimanche du temps ordinaire du 21 août� "Quelle profondeur dans la richesse, la sagesse et la sciencede Dieu !" Cette exclamation, qui échappe à saint Paul audétour d’une page où il vient d’exposer le dessein de Dieu sur lepeuple juif, traduit bien notre étonnement admiratif devant lesvoies de Dieu qui ne se laissent jamais déduire d’un conceptabstrait ("Dieu est tel et tel, donc il doit faire ceci et cela").Notre connaissance de Dieu et de son projet sur nous découletout entière d’une histoire, où nous retrouvons a posteriori quetout est mené d’une manière étonnante depuis lecommencement : les événements, chaque fois contingents,dépendant souvent de la liberté humaine, se révèlent aprèscoup porteurs d’une intention cohérente.

    � Il en est ainsi, au maximum, pour les événements quientourent la mission du Christ. Une lointaine prophétie, quel’on trouve au chapitre 22 d’Isaïe, nous décrivait la façon dontDieu prenait parti dans les événements politiques de la cour deJérusalem, en écartant un dignitaire, que l’on sait par ailleurspro-égyptien, au profit d’un autre, plus ouvert sur le parti fidèle

    à la Loi du Seigneur et plus indépendant des alliancesétrangères. Ce personnage, Eliakim, se voyait chargé d’uneresponsabilité immense, qui sans doute le dépassait largement,mais qui annonçait le vrai guide que Dieu voulait nous donnerun jour. Ce qui doit ici faire notre étonnement et notreadmiration, c’est la façon dont Dieu commence à agir (oucontinue de le faire) dans la lourde pâte humaine qu’il veutsoulever : ces commencements imperceptibles par lesquels ils’insinue dans l’histoire d’un peuple, l’éduque à la liberté, luidonne à certains moments des chefs selon son cœur, avant deplacer en son sein le Messie, dont l’influence, plus discrète etplus profonde à la fois, touchera un jour tous les peuples.

    � Nous avons dans l’évangile d’aujourd’hui le maillon décisif decette chaîne d’événements : la reconnaissance par Pierre de lamessianité de Jésus et, en retour, la prophétie par le Christ dela mission de Pierre et de ses successeurs. Là encore à traversdes êtres de chair et de sang, et même des êtres faillibles, Dieuassure le passage de son dessein dans le monde. �

    Comme pour toutes les fêtes chrétiennes, il faut en chercher l’origine dansla vie du Christ. Si Marie est aujourd’hui honorée d’une façon touteparticulière, c’est parce qu’elle a accepté d’être la Mère du Sauveur.L’humble fille de Nazareth à qui l’ange Gabriel a annoncé qu’elle serait lamère du Christ a répondu "Oui". Marie a accueilli dans sa chair, celui quiest l’origine de toute vie. Les Évangiles sont d’une discrétion étonnante surMarie. Il faut beaucoup d’attention pour apercevoir sa figure, car le cœurdu message des Évangiles, c’est la Révélation d’un Dieu Père par son FilsJésus. Si les Évangiles ne s’attardent pas sur Marie, celle-ci n’en est pasmoins présente auprès de son Fils, comme à Cana ou bien encore au piedde la Croix. Marie est "la servante du Seigneur" comme le dit le Magnificat.Marie accompagne la vie de Jésus car elle est à sa manière une disciple.Une femme qui a su écouter la Parole de Vie et se mettre à son service.Quand Jésus ressuscite, c’est le triomphe de la vie qui est manifesté au grandjour. La mort n’a pas pu retenir captif le Maître de la vie. Jésus n’a pas connula corruption du tombeau. C’est notre salut, notre bonheur qui est ainsiannoncé. La mort n’a pas le dernier mot. Avec la Résurrection de Jésus, c’estl’annonce de notre propre résurrection personnelle qui est dévoilée. "Je croisen la résurrection de la chair". L’affirmation du Credo est constitutive denotre foi chrétienne. Croire en Dieu, croire en son Fils et en sa BonneNouvelle, c’est croire aussi à la vie éternelle et à la résurrection des corps.Marie, première des croyantesMarie est désignée comme la première des croyantes parce qu’elle a cru enla venue du Christ. La fête de l’Assomption est issue de cette "logique" defoi. Si Marie est la première de ceux qui ont placé leur foi en Jésus, il estnaturel qu’en elle soit manifestée avant tout autre ce en quoi elle a

    vraiment cru. Or, la Résurrection de la chair fait partie de sa foi.L’Assomption est la célébration de l’accueil en Marie de la vie éternellejusque dans sa chair.Marie est une femme d’Israël. Elle a vécu sa condition humaine pleinementmais sans le péché. La solidarité avec l’humanité est cependant totale. Sa viede jeune fille, sa vie de mère, a été marquée par les joies, les souffrances, lespeines et aussi par la mort. Marie n’a pas échappé à la mort. Comme son Filselle a assumé l’ensemble de la condition humaine. Mais, sa vie a été rempliepar la présence de l’Esprit de Dieu. Marie après sa mort- nos frères chr�