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MODULE II. TECHNIQUES D’ENQUETE

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PLAN DU MODULE Introduction Objectif du module Chapitre 1. APERCU GENERAL SUR LA REALISATION D’UNE ENQUETE Chapitre 2. TECHNIQUES DE QUESTIONNEMENT

2.1. Entretiens, interviews, entrevues 2.2. Questionnaire de l’enquête

Chapitre 3. COLLECTE DES DONNEES 3.1. Administration par enquêteur 3.2. Enquête auto-administrée

Chapitre 4. EXPLOITATION DES DONNEES

4.1. Préparation des données 4.2. Codification des variables 4.3. Traitement des entretiens

Chapitre 5. ANALYSE ET PRESENTATION DES RESULTATS

5.1. Analyse des résultats 5.2. Présentation des résultats

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INTRODUCTION Le mot « enquête » est un concept ambigu. Dans le langage courant, il n’a pas nécessairement le sens d’une démarche méthodologique de recherche. Il désigne différentes pratiques et cela risque de provoquer des confusions dans les esprits. La langue anglaise est à ce propos beaucoup plus précise que le français. En effet :

dans les enquêtes administratives ou juridiques, on parle de inquiry, la police fait des investigations ou inquests, le journaliste qui réalise une enquête de reportage fait un newspaper report. les enquêtes sociologiques ou statistiques sont des surveys, et les sondages d’opinion sont des surveys of public opinion.

Une enquête sociologique ou statistique est une technique de collecte d’informations qui se distingue des autres du fait que la quête d’informations est réalisée par interrogation systématique de sujets d’une population déterminée, pour décrire, comparer ou expliquer : il s’agit d’une démarche de type scientifique conduite avec toute la rigueur méthodologique en vue de réduire la part de subjectivité du chercheur. En sciences sociales, le chercheur dispose d’autres méthodes de recherche pour obtenir des données : 1) L’étude documentaire

L’observation passe par l’étude de « traces » recueillies à travers des écrits divers, des relevés statistiques ou des inventaires d’objets et traitées comme des faits de société. Ce sont par exemple des documents officiels (journal Officiel, registres de délibération, …), des archives, des articles de presse, des annuaires, des oeuvres littéraires, des discours, de distribution de prix, des comptes rendus de réunions, des lettres, ... On peut également avoir recours à des documents statistiques, iconographiques (images, caricatures, timbres-poste, photos, films, dessins...), sonores (chansons, musiques...), ou des objets (insignes, vêtements, monuments aux morts ...). Ces documents donneront lieu à des analyses qualitatives (analyses de contenu) ou à des analyses quantitatives (analyses statistiques).

2) L’observation directe

L’observateur se rend sur son terrain pour étudier un groupe naturel (un groupe de jeunes, une classe d’élèves, une entreprise, un village). Il regarde ce qui se passe, interroge des informateurs et essaie de contrôler leurs dires.

3) L’expérimentation

La méthode expérimentale est utilisée pour observer les phénomènes et vérifier des hypothèses : il s’agit d’observer l’effet produit par la modification intentionnelle d’un facteur manipulé par l’expérimentateur. La situation est donc construite pour l’occasion et contrôlée par le chercheur.

Une enquête peut être exhaustive, c-à-d un recensement de toutes les unités statistiques de la population étudiée. C’est le cas des recensements agricoles, industriels ou de la population et/ou de l’habitat. Tout en reconnaissant qu’ils offrent des résultats fiables, il faut reconnaître que les recensements sont des opérations lourdes et très coûteuses.

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Bien souvent, on procède à des enquêtes par sondage qui ne portent que sur un échantillon de la population. Lorsque la constitution de l’échantillon se fait en donnant une probabilité non nulle à chaque unité statistique d’appartenir à l’échantillon, on parle de sondage ou échantillonnage probabiliste. Dans le cas contraire, le sondage est non probabiliste qui peut être un sondage à choix raisonné, c-à-d un sondage guidé par des critères subjectifs. Quelle est la démarche à suivre pour conduire une enquête par sondage ? C’est le contenu de ce module. Objectif du Module Ce module de « Techniques d’enquête » a pour objectif de permettre aux cadres de REMA de maîtriser les techniques de conduire une enquête par sondage, de la conception à la production du rapport final. Il se veut être un guide contenant les grandes étapes pour mener correctement une enquête en vue d’obtenir des données statistiques de qualité. CHAPITRE 1. ETAPES DE REALISATION D’UNE ENQUETE

La phase préliminaire d’une enquête consiste à établir des relations avec les parties prenantes, ainsi qu'à définir les besoins. Dans un second temps, il faut sélectionner les sous populations à étudier, vérifier si la collecte de données de qualité est possible au sein de ces groupes et constituer des bases de sondage. Cette phase est suivie par la préparation des outils de collecte et l'enquête sur le terrain, puis par l'analyse des informations recueillies et, finalement, par la diffusion et l'exploitation des résultats dans le but d'améliorer les programmes existants dans le domaine de l’étude. La préparation et la réalisation d'une telle enquête ne sont pas un processus aussi linéaire qu'il peut paraître. L'approche est plutôt de nature itérative, un processus à plusieurs étapes. Les informations recueillies ou les conclusions tirées à une certaine étape peuvent en effet entraîner le réexamen de décisions prises à une autre étape. A chaque étape, les responsables de l'enquête doivent trouver le meilleur compromis entre ce qui serait le plus utile et ce qui est le plus faisable. Etape 1 : Relations avec les parties prenantes Durant la phase d'organisation d'une enquête, il est important que les personnes morales et physiques intéressées par le projet s'entendent sur les objectifs du sondage et sur ses aspects pratiques. Les parties prenantes sont notamment les responsables commanditaires de l’enquête, les organisations prestataires de services dans le domaine de l’étude, les organismes finançant les activités du domaine étudié, … Cette première étape traite des partenaires les plus susceptibles de jouer un rôle-clé et est suivie d’une discussion des points essentiels autour desquels doit s'établir un consensus. Le développement de bonnes relations avec les partenaires intéressés par l'enquête et l'établissement d'un consensus avec ces parties sont des étapes fondamentales pour garantir que les résultats obtenus seront à la fois exploitables et exploités. Il faut noter que les idées et les ressources de ces partenaires peuvent contribuer largement à la qualité des données collectées.

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On pourra envisager d'organiser les consultations avec les diverses parties intéressées au sein d'une structure formelle, afin de permettre un échange continu d'idées et d'expériences pendant la phase préparatoire comme durant le déroulement de l'enquête. La constitution d'un groupe de travail technique (comité de pilotage) est une solution qui a fait ses preuves. Un tel groupe doit inclure toutes les parties liées à l'enquête. Il doit aussi se réunir très souvent durant la phase préliminaire de conception de l'enquête. Il continuera ensuite à se réunir, mais moins fréquemment, pendant le déroulement de l'enquête et au cours de l'analyse des données. Etape 2 : Etablissement d’un consensus Il faut que les parties mentionnées plus haut s'accordent sur plusieurs points :

• Quelles sous-populations faut-il inclure dans l'enquête ? • Quelles informations faut-il recueillir auprès de ces groupes ? • Qui sera chargé de la collecte des données et de leur analyse ? • Comment garantir que les résultats obtenus bénéficieront aux sous-populations concernées ?

Chaque décision pourra influencer les autres. Par exemple, le choix des sous-populations peut déterminer les institutions capables de conduire le plus efficacement la collecte des données. Et les données à collecter peuvent dépendre de la façon dont on souhaite exploiter les résultats. Etape 3 : Sélection des sous-populations Généralement, la question relative aux sous-populations à inclure dans l’enquête est la plus difficile à régler. Idéalement, on devrait porter le choix sur les sous-populations répondant à l’environnement étudié. Cependant, dans la pratique, d’autres facteurs influencent cette sélection, notamment les considérations politiques, les ressources disponibles et la facilité de contact avec ces groupes. Etape 4 : Définition des indicateurs Souvent, les commanditaires de l’étude expriment leurs besoins en termes d’objectifs sans indiquer exactement ce qu'ils cherchent à savoir, comment ils prévoient de mesurer ce qui les intéresse et comment les informations recueillies pourront aider à améliorer leur plan d’action actuel. Sans définition claire des objectifs dès cette phase préliminaire, on pourra craindre un gaspillage de ressources et/ou une collecte incomplète de données. Les informations recueillies seront alors difficiles à interpréter ou à comparer avec celles d'autres sources, et certaines interrogations pourtant pertinentes pourront demeurer sans réponse.

A quoi serviront les informations obtenues ? Les résultats d'une enquête doivent servir d'une manière ou d'une autre. Il faudra donc les présenter sous une forme utilisable par diverses audiences et par diverses autorités. Identifier ces utilisateurs et l’utilisation plausible de ces résultats est la première tâche à remplir et, en spécifiant à quoi serviront les données, on pourra définir les éléments à mesurer et répondre ainsi à la question suivante.

Que faut-il mesurer ?

Il faut traduire les problèmes posés en indicateurs précis, et c’est au vu des indicateurs que l’on peut déterminer s’il est justifié de mener une enquête. Il se peut que les informations recherchées soient déjà disponibles auquel cas, une collecte documentaire pourrait suffire.

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Avant le lancement de l'enquête, il faut tester le questionnaire pour vérifier s'il permet bien de recueillir les informations utiles. Il peut exister des motifs justifiant l'inclusion d'indicateurs plus spécifiques à l'environnement étudié. Par exemple, dans l’enquête comportementale, les indicateurs pourront refléter des types comportementaux propres à certaines cultures ou des aspects particuliers de l'effort national. Le recours à des définitions et à des périodes de référence standardisées facilite la comparaison des résultats dans le temps et entre sous-populations. Etape 5 : Définition des domaines de l’enquête Après la sélection des sous-populations, il faut définir l'univers d'échantillonnage, c’est-à-dire la population pour laquelle on peut extrapoler les résultats obtenus. Par exemple, on pourra conduire les interviews auprès des chauffeurs et retenir comme univers ceux qui exercent dans un pays. Une fois connu l'univers de l'enquête, il faut identifier les domaines d'échantillonnage. On appelle domaine un segment ou un sous-ensemble pour lequel on souhaite obtenir des données séparées. Si l'enquête vise par exemple les chauffeurs, on peut distinguer ceux qui travaillent à l’intérieur du pays de ceux qui vont jusqu’à l’étranger. Et les chauffeurs locaux peuvent à leur tour être classés selon leur milieu de résidence, urbain et rural. Pour pouvoir détecter toute évolution significative au plan statistique dans les sous-ensembles, il faut que les tailles d'échantillon soient calculées en fonction des domaines. Il ne sert à rien de constituer un échantillon quelconque de chauffeurs pour se demander plus tard si des changements comportementaux se sont produits. Il faut donc que le domaine soit identifié dès la phase préparatoire de l'enquête.

Définition des sujets au sein des domaines de l'enquête Une fois fixés les domaines de l'enquête, il faut définir sans ambiguïté les sujets qui les composent. L'emploi de définitions claires et pratiques est d'une importance très importante pour rendre l'exercice plus facile. Le plan d’observation détermine la population susceptible d’être interrogée, la taille de l’échantillon, comment seront choisis les répondants et la façon d’interroger les sujets. Si les sujets d'un domaine ne sont pas définis clairement préalablement, à l'échantillonnage et à l'enquête sur le terrain, les données recueillies pourront conduire à de considérables erreurs.

Délimitation géographique des domaines de l'enquête Après avoir défini les sujets de chaque domaine, les préparateurs de l'enquête doivent déterminer les zones géographiques pour lesquelles ils pourront extrapoler les résultats. Les résultats provenant par exemple des sondages réalisés exclusivement dans des écoles urbaines ne pourront en aucun cas concerner les écoles rurales. Il est entendu que bien des facteurs (coût, faisabilité, opportunités politiques, etc.) peuvent influencer la couverture géographique d'une enquête. Etape 6 : Repérage et détermination des sites d’échantillonnage Lorsqu'une évaluation rapide montre qu'une sous-population peut effectivement fournir des sujets en nombre suffisant et d'accès facile pour produire des résultats probants, lorsque l'univers et les domaines ont été bien définis et lorsque les critères d'inclusion des sujets potentiels ont été établis, les préparateurs de l'enquête peuvent alors déterminer les sites où seront prélevés les échantillons.

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Etape 7 : Constitution d’une base de sondage En fonction de la nature de la sous-population et des modalités de l'échantillonnage, la constitution d'une base de sondage peut être simple ou compliquée. Dans certaines situations, les listes nécessaires existent déjà. Si l'enquête doit par exemple se dérouler en milieu scolaire, on peut exploiter les listes fournies par le Ministère de l'Education, qui recensent non seulement les établissements, mais aussi le nombre d'élèves par site, par classe et par sexe. Etape 8 : Plan d’échantillonnage (de sondage) Le plan d'échantillonnage ou plan de sondage d'une enquête spécifie son univers et ses domaines, la taille d'échantillon voulu et sa répartition, le nombre et la taille des grappes, ainsi que d'autres éléments majeurs. De plus, il doit indiquer comment estimer les paramètres de population à partir des données d'échantillon et comment calculer les estimations d'erreur d'échantillonnage. Ce plan décrit aussi comment l'échantillonnage doit se dérouler et il contient les instructions pour sélectionner pas à pas les sujets à interviewer. La conception d’un plan d'échantillonnage est un exercice technique. Etape 9 : Protocole d’enquête Le protocole précise la méthodologie de l'enquête. Il inclut une présentation des objectifs de la recherche, de même que d'autres éléments, comme le contexte et la justification de l’étude, une description des groupes cibles et des sites sélectionnés et, éventuellement un plan d'échantillonnage pour chaque sous-population. Le protocole doit également contenir les questionnaires que les enquêteurs utiliseront lors des interviews sur le terrain, ainsi que d'autres documents annexes, tels qu'un manuel de formation et de référence pour les enquêteurs. Pour certaines enquêtes, il existe en plus de ces outils un guide de supervision visant à clarifier les travaux de supervision sur le terrain. Etape 10 : Test et adaptation des questionnaires Des questionnaires standardisés existent pour la réalisation de certaines enquêtes indispensables dans un système statistique bien organisé. L'utilisation de ces questionnaires standardisés permet de comparer plus facilement les données temporelles sur les groupes de populations et les régions. Cependant, il faut toujours les tester et les adapter à l'environnement dans lequel le sondage doit avoir lieu. Etape 11 : Formation des enquêteurs et enquête-pilote La formation des enquêteurs est un aspect essentiel de la préparation d’une enquête car, leur attitude peut influencer considérablement les résultats. Pour accroître les chances de réponses franches, les enquêteurs doivent apprendre à interviewer les sujets sans exprimer le moindre jugement, de même qu'à consigner (dans le questionnaire) méthodiquement les réponses. Le contenu de cette formation variera en fonction des enquêteurs. Il faut signaler que sans une formation adéquate, les enquêteurs peuvent avoir tendance à enregistrer les réponses d'une façon qui reflète leurs propres opinions ou leurs propres comportements. Lorsque la formation est terminée, une enquête pilote est organisée pour tester l'ensemble du travail préparatoire avant de lancer l'enquête proprement dite. A l’issue de ce test, on corrige les éventuels défauts découverts. Egalement, le test doit éprouver le mode de sélection des sujets, la faisabilité des interviews avec ces sujets, le rendement des enquêteurs (capacité à mener le nombre d'interviews prévues par jour), le rôle des superviseurs (contacts préalables et contrôle de la qualité du travail sur le terrain), ainsi que la conservation et le transport des questionnaires remplis.

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Etape 12 : Collecte des données et supervision La collecte des données ne peut commencer que si toutes les étapes précédentes ont été respectées. Les responsables des équipes restent vigilants durant tout le déroulement de l’enquête, surtout quand les enquêteurs commencent à montrer des signes de fatigue. Ces superviseurs doivent vérifier les questionnaires rendus (de manière ponctuelle) en s'assurant qu'ils sont remplis complètement et correctement. Dans la mesure du possible, ils peuvent commencer à coder les réponses à options libres, celles relatives aux questions ouvertes. C'est à l'investigateur principal de contrôler cette tâche de codage et, idéalement, c'est une seule et même personne qui devrait faire ce travail. Il faut éviter de la confier à plusieurs personnes, à moins de s’entendre à l'avance sur la manière exacte de procéder. Ensuite, il faudra envoyer les questionnaires à un site central pour la saisie informatique. Etape 13 : Vérification des données Après la collecte, les données doivent être saisies à l’ordinateur avant de rechercher les erreurs ou les incohérences. Cette vérification demande du temps, mais elle est absolument indispensable. Si aucun soin n'est pris à ce stade, l'analyse des données pourra en souffrir. Plusieurs types de vérification sont conseillés avant de lancer l'analyse. Tout d'abord, il faut contrôler la qualité de la saisie à partir d'un échantillon de questionnaires. Si les ressources le permettent, il est préférable de répéter la saisie une seconde fois, puis de comparer les deux séries de données enregistrées dans l'ordinateur. Une fois les erreurs de saisie rectifiées, on doit vérifier si les données sont hors-limite (impossibles ou peu vraisemblables) et/ou contradictoires (ex. grossesse déclarée alors que le sujet est de sexe masculin, ou encore réponses sur l'utilisation du préservatif alors que le sujet n'a pas eu de rapport sexuel). Il faut aussi s'assurer qu'aucune donnée obligatoire n'est manquante, du fait soit de l'incapacité ou du refus du sujet à répondre (non-réponse), soit d'une erreur de l'enquêteur. Le vérificateur peut décider de compléter les données manquantes ou corriger les données erronées (on parle alors d'imputation) ou simplement de les ignorer et d'éliminer ces entrées pour l'analyse. Etape 14 : Analyse des résultats L'avant-dernière étape est celle de l'analyse des résultats obtenus. Outre le calcul des indicateurs, cette phase inclut la pondération éventuelle des résultats (poids d'échantillonnage ou facteur d’extrapolation), le calcul des erreurs-types, des estimations et éventuellement des tests afin de déterminer la signification statistique des tendances observées dans le temps et/ou entre divers groupes ou sous-groupes. Etape 15 : Exploitation des résultats pour améliorer les actions existantes Cette dernière étape justifie tous les efforts entrepris pour l'enquête. C'est aux responsables de l’enquête que revient la responsabilité première de décider comment exploiter les résultats obtenus. Ce sont eux qui choisissent également la manière de présenter et de disséminer les résultats à différentes audiences pour les inviter au changement et à l'action. On peut citer leurs partenaires, qu'ils relèvent ou non du gouvernement, les membres des sous-populations ayant participé à l'enquête ou des organismes leur offrant des services et de l’assistance, ou encore les décideurs au niveau national ou international pouvant contribuer par leurs ressources à une réponse plus efficace.

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CHAPITRE 2. TECHNIQUES DE QUESTIONNEMENT Pour obtenir l’information auprès des enquêtés, il faut user des entretiens du genre discussions (approche qualitative) ou des questionnaires (approche quantitative) selon les besoins ou les moments de l’étude. Quelle que soit l’approche utilisée, la rencontre pour une interview n’est pas une situation ordinaire : deux individus qui ne se connaissent pas échangent des propos suivis sur un sujet, pendant une période de temps limité. L’un (l’enquêté) n’a pas demandé d’être interrogé (accepte ou subit) et n’a rien de tangible à gagner ou à perdre; l’autre (l’enquêteur) est intéressé à obtenir des informations en vue d’une étude. Dans ces conditions de dialogue, un impératif s’impose : motiver le répondant. On doit d’abord le persuader de participer à l’entretien. Les raisons pour qu’il accepte l’enquête peuvent être : l’occasion de pouvoir aborder un thème intéressant avec quelqu’un, l’opportunité de contribuer à la connaissance scientifique, le sentiment positif d’aider l’enquêteur ou encore la simple politesse qui l’empêche de refuser. L’intérêt de l’enquêté (ou au moins sa patience) doit ensuite être maintenu constamment. Si les questions sont incompréhensibles, embarrassantes, désadaptées ou si le ton est désagréable et l’ambiance lourde, le répondant peut falsifier ses réponses ou décider de mettre fin à l’entrevue. Pour maintenir la motivation, l’enquêteur doit posséder des compétences dans la conduite des entretiens et dans la formulation des questions. La qualité de l’information recueillie est fondamentale pour la réussite de l’enquête. Puisque les données sont obtenues par la médiation du discours, il faut tenir compte des interactions enquêteur-enquêté pour comprendre quelques sources d’erreur dans le processus de questionnement. 2.1. Entretiens, interviews ou entrevues 1. Une situation d’interaction particulière L’entretien n’est pas une situation de bavardage à bâtons rompus entre amis ni une simple discussion avec ses voisins. Ce n’est pas non plus un échange d’arguments pour convaincre ou pour controverser, ni un interrogatoire du type policier ou une confession.

Une situation professionnelle L’entretien est demandé par l’enquêteur pour obtenir de l’information sur un thème; c’est lui qui est concerné et qui conduit l’entretien. Il devra donc utiliser un savoir-faire professionnel pour parvenir à motiver l’enquêté avec attention et gentillesse et l’amener à fournir des informations valables et non des informations « pour faire bonne impression ». L’expérience a montré que l’enquêté peut se confier sur des sujets très intimes, privés, ou même des pratiques répréhensibles : il n’y a pas de sujet qui soit inabordable avec un bon enquêteur.

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Un processus de communication La situation d’entretien déclenche une série d’interactions entre l’enquêteur et l’enquêté. Ce qui peut biaiser le résultat d’enquête. La distance sociale entre protagonistes (évaluée par exemple par la proximité plus ou moins importante de classes sociales, de niveaux d’instruction ou l’âge) peut jouer sur le déroulement du discours. On considère généralement qu’il faut éviter une trop grande distance sociale. On doit tenter d’éviter les trop grands écarts ou les trop grandes ressemblances entre enquêteur et enquêté.

Du côté de l’enquêté Le répondant peut produire une information déformée : il a le désir de maintenir l’estime de soi, de faire bonne figure et de se montrer comme quelqu’un de tout à fait dans la norme sociale. Des mécanismes de défense du moi peuvent également jouer : l’enquêté attribue aux autres des sentiments qu’il n’ose prendre à son compte (« les gens disent... » « mes voisins pensent ... »).

Du côté de l’enquêteur La qualité et la quantité des informations obtenues dépendent beaucoup des enquêteurs : certains essuient des refus et des non-réponses multiples; d’autres au contraire savent obtenir des renseignements nombreux et intéressants. Qu’est-ce qui distingue un bon enquêteur ? Le sens des relations humaines (contact facile, oser aborder les gens dans la rue, ne pas avoir peur des refus, ne pas être gêné de poser certaines questions, …), le fait d’être accrocheur et persuasif pour convaincre les personnes de lui accorder un peu de temps, l’attitude professionnelle (cela s’acquiert). Cela suppose réceptivité, largeur d’esprit et attention en même temps que discrétion et neutralité : l’enquêteur ne doit pas risquer de biaiser les résultats en introduisant son propre cadre de référence, ses désirs ou ses préjugés.

Les biais de l’enquêteur L’enquêteur peut influencer les réponses en raison de ses caractéristiques physiques ou personnelles, visibles ou perçues par l’interviewé : âge, sexe, race, classe sociale, éducation ... D’autres influences inconscientes sont à l’oeuvre dans la communication : on a pu mettre en évidence une relation entre opinions des enquêteurs et réponses des personnes interrogées (effet de modération). Ce type de biais est même perceptible dans les enquêtes par téléphone. Les attentes des enquêteurs peuvent aussi jouer sur les réponses (effet d’anticipation) : lorsque l’enquêteur estime qu’une question est difficile ou qu’il aura beaucoup de non-réponses, il obtient en général moins de réponses. 2. Réalisation d’un entretien non directif (non guidé) Dans l’entretien non directif, l’enquêté organise son discours à partir d’un thème qui lui est proposé (le stimulus ou la consigne). Il choisit librement les idées qu’il va développer sans limitation, sans cadre préétabli. L’enquêteur joue un rôle de stimulateur et de facilitateur et montre par ses interventions qu’il écoute et qu’il comprend. Il doit apparaître comme quelqu’un de neutre, capable de tout entendre sans être indifférent, qui ne suggère, ni n’évalue, ni n’argumente. Les personnes interrogées prennent alors plaisir à parler avec un étranger qui ne met pas en doute leurs affirmations, qui prête attention à chacune de leurs paroles, ne les bouscule pas, ne les contredit jamais. Dans ce climat de confiance, les informations obtenues peuvent être riches et nuancées.

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Choix des enquêtés

Pour le choix des personnes à interroger, on peut penser à des procédures diverses : frapper aux portes, sélectionner sur listes ou passer par des intermédiaires (en utilisant par exemple le réseau de relations personnelles ou sociales de la personne à interroger). Pour assurer à la relation une dimension professionnelle, il est indispensable qu’enquêteur et enquêté ne se connaissent pas. Le répondant est ainsi en mesure de dire franchement et en toute sérénité à l’enquêteur ce qu’il tairait peut-être à un proche, par crainte des conséquences. En outre, interroger des personnes connues risque de provoquer une confusion des rôles. L’enquêté risque de répondre comme voisin, comme ami ou comme collègue.

Choix du lieu et du temps Le lieu de l’entretien peut orienter le discours du répondant. Ainsi, le lieu de travail incitera davantage à parler de la situation professionnelle, le domicile d’aspects plus personnels. Si le thème risque d’être générateur d’anxiété, il faut trouver un endroit rassurant pour l’enquêté; il risque de se sentir mal à l’aise s’il est convoqué dans un lieu institutionnel. Un endroit calme (loin du bruit et de la foule ou d’un lieu public) et assurant l’isolement de la personne (sans intrus ou curieux) donnera un caractère confidentiel à l’entretien. Il est nécessaire de prévoir une durée suffisante pour que la relation de confiance entre enquêteur et enquêté ait le temps de s’établir. Cela évitera aussi que la personne, pressée, ne regarde sans arrêt sa montre ou interrompe l’entretien. Une à deux heures est un ordre de grandeur classique pour des enquêteurs entraînés.

Prise de contact avec le sujet Dès les premiers instants, l’enquêteur doit motiver la personne sollicitée, accrocher son intérêt, la mettre en confiance pour l’amener à collaborer. Les informations suivantes sont nécessaires.

Se présenter et présenter l’organisme de recherche ainsi que l’objectif de l’étude. On peut insister sur l’intérêt de l’entretien pour le répondant (occasion de participer, de s’exprimer, de donner son avis, de faire avancer la science, de permettre des améliorations, etc.) en évoquant le thème général de l’entretien, évitant toutefois d’en dire trop pour ne pas déflorer la consigne qui sera donnée au début de l’entretien proprement dit.

Le sujet se demande « pourquoi moi ? » on doit lui expliquer comment, pourquoi ou par le canal de quel intermédiaire il a été contacté.

La situation d’entretien acceptée ; il faut informer le sujet sur les modalités de réalisation de l’entretien : lieu, durée approximative, enregistrement (le magnétophone sera par exemple présenté comme « mémoire » de l’enquêteur, appareil pour éviter de prendre des notes et mieux écouter). On parlera aussi du déroulement de l’entretien, du rôle de l’enquêteur (il propose le thème et intervient pour relancer l’entretien), de ce qu’on attend de l’informateur (réflexion sur un thème sans questions précises). Il faut lui montrer qu’il n’y a pas de risque à répondre à l’entretien.

L’évocation des aspects de déontologie professionnelle peut contribuer à rassurer le sujet : respect de l’anonymat, confidentialité, liberté de répondre.

Consigne initiale

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C’est la question (ouverte) de départ, celle qui va définir le thème du discours lorsque les deux interlocuteurs sont installés pour l’entretien. Dans les entretiens libres, c’est même la seule intervention directive. La consigne peut se présenter sous diverses formes qui ont chacune des avantages et des inconvénients. Selon le cas, on posera une question à champ large ou on abordera plus directement le sujet. Par exemple dans le cadre d’une étude sur la lecture, on peut se placer à la périphérie du thème : « J’aimerais que vous me parliez de votre vie hors travail ? » ou au centre de l’étude : « Voulez-vous me parler de vos lectures ? » Dans le premier cas, il est possible que la personne passe à côté du thème d’étude alors que dans le second cas on court le risque de ne pas savoir si le thème est important pour elle. On a parfois besoin d’essayer différentes formulations de la consigne afin de se rendre compte de ses effets.

Interventions et relances Non-directivité de l’interviewer ne signifie pas non-intervention. Au contraire, un entretien de ce type demande la participation active de l’enquêteur, mais de façon neutre, sans jouer sur le fond. L’enquêteur n’a pas de questions; il laisse le sujet créer lui-même le cadre dans lequel il s’exprime et développer comme il l’entend les informations, sans lui imposer un cheminement. L’attitude non directive et compréhensive de l’interviewer se manifestera par des interventions « techniques » destinées à favoriser la libre expression de l’interviewé, à l’encourager à préciser sa pensée et à l’inviter à poursuivre. Les relances se font autour des propos du sujet : elles reprennent ou complètent des idées, soulignent, synthétisent ou demandent une précision.

Fin de l’entretien Lorsque les propos deviennent redondants, l’entrevue est terminée. Il est temps de présenter un résumé de l’entretien (ce qui a parfois l’intérêt de faire repartir le discours sur des points oubliés). On demande enfin au sujet s’il ne voit rien d’important à ajouter avant d’arrêter le magnétophone (au cas où il est utilisé). C’est enfin le moment de poser des questions particulières (dont la liste est prévue à l’avance), notamment en ce qui concerne l’identification du sujet interviewé. Il est intéressant de discuter avec la personne enquêtée de son vécu de l’entretien (ses impressions). Il ne faut pas oublier de le remercier avant la séparation.

Prise de notes et magnétophone Doit-on enregistrer l’entretien ? C’est le seul moyen d’avoir à la fois l’intégralité du texte, les contours du discours (ton, atmosphère) et également la possibilité d’apprécier la part de l’enquêteur. L’enregistrement restitue fidèlement le déroulement et le langage de l’entrevue. Il est l’outil indiqué pour l’entretien, la mémoire de l’enquêteur qui ne peut pas assurer en même temps l’écoute attentive et positive, les relances et la prise de notes. Parallèlement à l’enregistrement, il est conseillé de prendre de petites notes pour retenir les thèmes abordés sur lesquels il pourra être utile de revenir.

Retranscription de l’entretien Pour être soumis à une analyse systématique, l’entretien sera retranscrit intégralement, avec ses hésitations et ses défauts de langage, sans oublier les silences et leur durée, les rires et les interruptions.

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On pourra ainsi s’intéresser non seulement au contenu thématique de l’entretien, mais également au vocabulaire employé et à la syntaxe du discours, etc. 3. Entretien semi-directif (guidé) Une recherche peut être conduite uniquement à partir d’entretiens exploratoires non directifs (pour prendre connaissance d’un terrain). Mais généralement, après quelques entretiens de ce type, on passera à une technique un peu plus directive, comme celle de l’entretien semi-directif ou guidé. Dans ce type d’entrevue, l’enquêteur s’est fixé des zones d’exploration et veut que le sujet traite et approfondisse un certain nombre de thèmes.

Conciliation de deux orientations L’entretien semi-directif combine l’attitude non directive pour favoriser l’exploration de la pensée dans un climat de confiance et l’aspect directif pour obtenir des informations sur des points définis à l’avance. Néanmoins, l’introduction des thèmes demande un entraînement solide et une bonne connaissance du guide d’entretien. Contrairement à ce que l’on peut penser, il est souhaitable de bien savoir conduire un entretien non directif pour pouvoir conduire une interview guidée de qualité, savoir laisser à l’enquêté la liberté d’expression. Sinon, l’enquêteur risque de transformer le guide d’entretien en une série de questions à réponses ouvertes.

Utilisation du guide d’entretien Généralement établi après quelques entretiens exploratoires, le guide répertorie les thèmes qui doivent être abordés au cours de l’entretien semi-directif. Il comporte une consigne initiale et peut revêtir une forme plus ou moins détaillée de la liste de trois ou quatre grands thèmes (jusqu’à une série d’informations spécifiées) sur deux ou trois pages. On s’attachera à donner à ce document une présentation qui le rend facile à utiliser, avec des mots clés très apparents (surlignés ou en gras). On peut coupler les thèmes avec des questions neutres comme dans l’exemple ci-dessous (surtout si l’enquête doit être réalisée par un grand nombre d’enquêteurs).

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Guide d’entretien sur la pollution

Thèmes du guide d’entretien Relances verbales prévues 1. Typologie de la pollution (pensée descriptive) 1. Qu’évoque pour vous le mot « pollution » ? 2. Aspects généraux : a) Naissance du problème b) Source des faits de pollution, phénomène local ou général ? c) Degré d’importance

2. a) Les phénomènes évoqués vous paraissent-ils nouveaux ? b) Où rencontrez-vous ce genre de phénomènes ? c) Pensez-vous que ces phénomènes aient une grande importance ?

3. Causalité : liaison au progrès, à la science, etc. (pensée explicative)

3. Quelles sont les raisons qui expliquent ces phénomènes ?

4. Remède (pensée pratique) 4. Pensez-vous qu’il faudrait faire quelque chose ? 5. Canaux d’information 5. Comment avez-vous entendu parler de ces phénomènes ? 6. Image du futur 6. Comment pensez-vous que cela va évoluer ? 7. Environnement idéal 7. Pourriez-vous décrire l’endroit où vous aimeriez habiter ?

Source : F. Jodelet et al., « La représentation sociale de la pollution de l’environnement », Bulletin de Psychologie, XXVIII, 316,1974-1975.

Le guide d’entretien ne doit pas être un cadre rigide. L’ordre des thèmes prévu est le plus logique possible, mais il n’est pas imposé : chaque entretien a sa propre dynamique. Ce qui est important est que tous les enquêtés abordent tous les thèmes du guide avant de terminer l’entretien. Ce qui permettra de réaliser une analyse comparative de différents entretiens. 4. Entretien de groupe La technique de l’entretien non directif s’applique aussi à un groupe de personnes réunies pour participer à un entretien collectif sur un sujet précis. La conduite en est plus délicate que dans l’entretien individuel: en plus de l’attitude non directive et des thèmes du guide, l’animateur a le souci d’assurer la prise de parole et l’intervention de chaque participant. Il lui faudra en outre jouer le rôle de régulateur de la dynamique du groupe. Un petit nombre de 6 à 10 personnes sont rassemblées pour une discussion ouverte parce qu’elles ont une expérience commune (chômeurs, habitants d’un même district, étudiants d’une même université, groupe familial, ...). Une certaine homogénéité doit caractériser les participants pour que la discussion soit possible et significative. Le discours produit est une parole collective qui n’aura pas la même teneur qu’un discours individuel (en raison de l’émulation, de la confrontation et des prises de position de chacun). Très utilisé dans les études qualitatives (notamment en marketing), l’entretien de groupe est aussi utile dans une étude quantitative en complément des entretiens individuels. Par exemple, il peut compléter les informations issues du questionnaire : des sujets ayant répondu au même questionnaire sont rassemblés pour discuter de cette expérience, expliquer comment ils ont compris les questions et ce qu’ils en pensent. L’entretien de groupe peut également intervenir pour éclairer l’analyse d’une enquête par questionnaire: les participants sont invités à discuter des résultats et à donner leur sentiment vis-à-vis des réponses obtenues.

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5. Autres formes d’entretiens Selon les besoins, on peut recourir à d’autres formes d’entretien d’inspiration non directive ou semi-directive. Sans être exhaustif, nous pouvons citer :

L’approche biographique, avec des récits de vie qui combinent la référence à différentes séquences temporelles de la vie de l’individu et le développement de thèmes en rapport avec l’objet d’étude (comme l’expérience professionnelle).

La réécoute de la totalité ou de parties d’un premier entretien réalisé avec un sujet pour approfondir certains points ou compléter les informations.

L’entretien film-action où le sujet est invité à reconstituer un moment de sa vie quotidienne.

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2.2. Questionnaire de l’enquête La spécification des objectifs d’une enquête conduit à la détermination des indicateurs qui, par la suite, sont traduits en questions dont la formulation revêt une grande importance. Une petite différence dans la formulation de deux questions peut produire des écarts importants. La mise au point d’un questionnaire fiable et valide demande un travail attentif et scrupuleux. 1. Le questionnaire et ses qualités a) Un instrument de mesure Le questionnaire conçu comme instrument de mesure devra être standardisé, c’est-à-dire qu’il placera tous les sujets dans la même situation pour permettre des comparaisons entre les répondants. On ne doit pas, en cours d’administration du questionnaire, modifier les questions ou ajouter des explications. b) Prise en compte de l’enquêté Une difficulté supplémentaire dans l’élaboration d’un questionnaire vient du fait qu’on s’adresse à des répondants non demandeurs de l’enquête : ne risque-t-on pas de le lasser ? Pour qu’ils aient envie de répondre, on se garde de leur donner l’impression de passer un examen, de subir un interrogatoire ou d’être ignorant. Pour que le questionnaire ne paraisse pas ennuyeux, monotone et inutile, il est souhaitable de varier la façon d’interroger. Une question n’est pas toujours une demande avec un point d’interrogation. Il existe une grande variabilité dans la formulation des questions. En même temps, on cherche à obtenir des réponses sincères en posant des questions auxquelles les sujets sont réellement capables de répondre (éviter qu’ils ne répondent au hasard), en prenant certaines précautions pour les thèmes gênants et en tenant compte des effets d’influence qui risquent de fausser les réponses. 2. Question ouverte et question fermée Une question est dite ouverte ou fermée selon que la réponse à donner est libre ou renseignée à l’avance. L’enquêté utilise son propre vocabulaire pour répondre à la question ouverte tandis la question fermée lui propose des modalités de réponses parmi lesquelles il en choisit celle qui convient. Evidemment, il faut éviter de se servir d’une question ouverte pour aborder des généralités ou de grands problèmes. Exemple, « Quel est votre avis sur la mondialisation? » risque d’effrayer la personne interrogée, tellement le sujet est vaste et complexe. a) Différentes formes de questions fermées Une question fermée peut donner le choix entre deux modalités de réponses (question dichotomique) ou proposer un nombre de modalités plus important :

− Votre ménage possède-t-il un poste téléviseur ? » • Oui • Non

− « Ecoutez-vous la radio, que ce soit chez vous, en voiture ou ailleurs ? »

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• Tous les jours ou presque • Environ 3 ou 4 jours par semaine • Environ 1 ou 2 jours par semaine • Rarement • Jamais ou pratiquement jamais.

La question fermée peut, comme dans les exemples précédents, imposer de ne retenir qu’une seule réponse (question à réponse unique) ou encore laisser la possibilité de donner plusieurs réponses (question à choix multiple) : Exemple : « Dans la liste suivante, quels sont les mots qui caractérisent le mieux l’ambiance de votre entreprise ? » (Cochez trois réponses de votre choix)

- Morosité – sympathie – froideur – convivialité – méfiance – chaleur - Sérénité – solidarité – inquiétude – individualisme – confiance – jalousie

b) Avantage et inconvénients de chaque type de question Les questions ouvertes donnent en général des informations riches et diversifiées. Elles renseignent aussi sur le niveau de compréhension des questions. Mais les personnes interrogées ont souvent du mal à répondre ; d’où des réponses vagues ou hors sujet, des non-réponses, des « ne sait pas » et « l’oubli » de certains aspects inavouables. Et puis, l’analyse de ces questions est lourde. A l’inverse des questions ouvertes où les réponses ne sont pas suggérées, les questions fermées risquent d’induire à des réponses peu réfléchies. Mais elles ont l’avantage indéniable de permettre des comparaisons et d’être faciles à administrer et à traiter. C’est pourquoi, bien que plus difficiles à mettre au point, elles constituent l’essentiel des questionnaires destinés à l’analyse statistique. c) Elaboration d’une question fermée à partir d’une question ouverte La meilleure façon de trouver les modalités de réponses à une question fermée consiste à poser dans la phase préparatoire une question ouverte. L’analyse du contenu permet d’élaborer des questions qui reflètent bien la substance et le vocabulaire utilisé spontanément. Par exemple dans un premier temps on demande : « A quoi vous fait penser le mot TRAVAIL », puis dans une seconde phase on reprend les principales catégories de réponses pour proposer une liste finie de formules entre lesquelles l’enquêté devra choisir, comme : salaire/occupation/obligation/contact/contrainte/plaisir/ambiance/fatigue. Au fur et à mesure de son avancement, le questionnaire comporte de plus en plus de questions fermées avec un éventail pertinent de réponses. Dans un questionnaire standardisé, trop de questions ouvertes est souvent un aveu de faiblesse. d) Des catégories de réponses exhaustives et mutuellement exclusives Il est nécessaire de s’assurer dans l’élaboration de la liste des réponses aux questions fermées que toutes les possibilités sont représentées (exhaustivité) et que chaque réponse ne peut se situer que dans une seule catégorie (exclusion mutuelle). C’est particulièrement important pour les estimations quantitatives, où les limites de classes doivent être correctement établies. Ainsi, la catégorisation d’âge « moins de 20 ans/21 - 30 ans/30 - 50 ans et 50 ans et plus » a un double défaut : les sujets de 20 ans ne peuvent pas se situer tandis que les sujets de 30 ans et de 50 ans ont la possibilité de se situer dans deux classes.

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e) Le faux intérêt de l’item « autre » On est souvent tenté d’introduire à la suite d’une liste de réponses à une question fermée la modalité « autre réponse (à préciser) » dont on pourrait espérer qu’elle va élargir le champ de réponses. Mais les questions semi-ouvertes n’ont pas l’intérêt et la richesse des questions ouvertes : seule une fraction des sujets utilisent cette possibilité d’expression. En outre, elles ne permettent plus de faire des comparaisons entre répondants, car tous ne se sont pas placés exactement dans la même situation : certains ont utilisé la question comme une question ouverte et d’autres comme une question fermée. Si l’on tient à l’ouverture, il est possible d’introduire à la suite d’une question fermée, une question ouverte spécifique du type : « Voyez-vous autre chose à ajouter à cette liste ? » La seule raison valable de conserver le « autre réponse, à préciser » est de ressortir la fréquence d’une caractéristique apparemment rare. La fréquence obtenue permet de proposer ou non cette réponse comme modalité lors d’une enquête similaire. 3. Questions directes et questions indirectes, une approche détournée Il est possible de poser une question directement, sans en cacher l’objet. Mais parfois, il vaut mieux poser des questions n’abordant pas de plein fouet le thème étudié ou encore une mise en situation d’une tierce personne. Demander à l’enquêté ce qu’il possède ou l’interroger sur son train de vie peut se substituer à une question directe sur le revenu. L’idéal est de l’entretenir sur ses dépenses par exemple pour se faire une idée de son revenu. Pour évaluer l’image plus ou moins positive d’une entreprise auprès de ses salariés, on remplace (ou on complète) des questions directes par un indicateur indirect comme: « Conseilleriez-vous ou non un jeune diplômé de venir travailler dans telle entreprise ?» ou encore: «Selon vous, quel animal représente le mieux telle entreprise? un lion/une fourmi/une tortue/un aigle/un éléphant/un lièvre ». Au lieu de demander : « Te drogues-tu? » à des jeunes, on aborde ce thème à travers des personnes de leur entourage en posant la question : « Y a-t-il dans tes connaissances beaucoup de jeunes qui se droguent ? » 4. Poser des questions concrètes et précises pour être compris Le questionnaire doit être élaboré de manière à faciliter la tâche aux enquêtés. Pour chaque question, on doit se demander si le sujet est capable d’y répondre sans difficulté, si la question ne porte pas un concept trop abstrait, si la question est suffisamment concrète et précise. Il faut éviter toute ambiguïté. Le bon usage des questions filtres est recommandé pour catégoriser les enquêtés avant une question qui ne concerne pas tout le monde. Avant de demander « Quel est l’âge de vos enfants? » par exemple, il faut cibler d’abord les sujets concernés en posant une question sur la composition familiale.

5. Poser des questions neutres pour ne pas influencer

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L’objectif d’un questionnaire d’enquête n’est pas de faire dire, mais d’obtenir des réponses sincères. Dans le libellé des questions, il faut prendre garde aux risques de suggestion par des questions tendancieuses ou biaisées. Il est donc nécessaire de se demander si la question n’oriente pas le choix du répondant. 6. Economie globale du questionnaire Les indicateurs ont été envisagés comme étant des cas séparés. Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue qu’une question fait partie d’un ensemble. Il faut donc penser au problème d’ordonnancement et de la présentation pour que le questionnaire se déroule harmonieusement, avec cohérence et continuité. Le questionnaire aura une apparence professionnelle et simple. On pensera à numéroter les questions et à laisser des espaces suffisants pour écrire les réponses attendues. Dans le cas de l’administration du questionnaire par l’enquêteur, le questionnaire se présente sous forme d’une conversation courante entièrement structurée pour que l’enquêteur n’ait pas à innover. Outre les questions, sont indiquées les consignes pour le choix des réponses et les instructions pour l’enquêteur (par exemple les renvois), y compris les formules d’introduction (accroche) et de fin d’entretien (de remerciement). Dans le cas d’un questionnaire auto-administré, la présentation (claire, aérée et éventuellement illustrée) et les consignes de chaque question doivent être particulièrement soignées pour que le répondant puisse se débrouiller seul. 7. Test du questionnaire On peut recourir à des experts pour relire le questionnaire en vue de corriger certains défauts. Bien entendu, cela ne signifie pas qu’il faut se passer des essais sur le terrain. Quelle que soit l’expérience du concepteur, la mise à l’épreuve de l’instrument d’enquête auprès d’un nombre limité de sujets, lors de l’enquête pilote, est nécessaire. Le temps consacré à tester et affiner le questionnaire est toujours un gain en qualité de réponses. 8. Format du questionnaire Le questionnaire de l’enquête peut être présenté sous le format unitaire, c’est dire un questionnaire

complet par répondant, à l’opposé d’un questionnaire en ligne qui contient à la fois les informations

relatives à plusieurs répondants, chacun occupant une ligne entière.

Illustration Modèle d’un questionnaire sur l’emploi Le MIFOTRA voudrait mener une étude portant sur l’emploi, avec l’objectif principal de connaître

l’état d’occupation de la population rwandaise.

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1. Sous-population : c’est la population à l’âge économiquement actif, soit de 15 à 64 ans

2. Identification des indicateurs : un seul indicateur est identifié, la proportion de la population

économiquement active, mais sous quelques aspects de l’emploi.

3. Univers et domaines :

• Univers : National

• Domaines : Ville de Kigali, Autres centres urbains et Milieu rural

4. Définition des variables : la proportion recherchée peut être présentée selon diverses

informations voulues, pour dire qu’à un indicateur, plusieurs variables peuvent être envisagées.

• La situation dans l’activité

• L’emploi exercé

• Le statut dans l’emploi

• Le secteur d’activité

• Le besoin d‘un emploi

• La durée de temps sans emploi

5. Formulation des questions : A chaque variable, une question est formulée pour obtenir

l’information voulue.

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Questionnaire sous le format « unitaire »

N° Variables Questions Réponse

Q01 Situation dans l’activité

Du 01/10 au 01/11/2010, ….. avait - il un emploi ? Encerclez le code correspondant à la réponse reçue Si réponse = 3 → Q06 Si réponse = 4, 5, 6, 7, 8 → Fin interview

1. OCC 5. ETU 2. CHO 6. RET 3. RPE 7. REN 4. PFO 8. AUT

Q02

Emploi exercé Actifs occupés ou ayant été occupés (OCC ou CHO)

Quel était le dernier emploi / occupation principale exercé par .......…? Ecrire l’emploi exercé S’il en avait plusieurs, noter l’emploi principal Ne rien écrire dans les cases grises car, le codage se fera pus tard

…………...........................

|___|___|___|

Q03

Statut dans l’emploi Actifs occupés ou ayant été occupés (OCC ou CHO)

Quel était le statut de…….. dans son emploi ? Encerclez le code correspondant à l’une des abréviations en bas de page selon la déclaration de l’enquêté

1. IND 5. APP 2. EMP 6. AF 3. SP 7. AU 4. ST

Q04

Secteur d’activité Actifs occupés ou ayant été occupés (OCC ou CHO)

Est-ce que …travaillait pour le secteur public ou privé ? Si secteur privé, préciser lequel et encercler le code correspondant à la réponse reçue.

1. PU 4. COOP 2. PAR 5. AP

3. ONG

Q05 Besoin d’un emploi Actifs CHO

…………….. a-t-il cherché du travail ? Encerclez le code correspondant à la réponse déclarée par l’enquêté

1. Oui

2. Non

Q06

Durée de temps sans emploi Actifs RPE

Depuis combien de temps …….. est-il sans emploi ? Ecrire la durée déclarée par l’enquêté (en mois)

|___|___|

Q01 1. OCC : Occupé Q03 1. IND : Indépendant Q04 1. PU: Public

2. CHO : Chômeur 2. EMP : Employeur 2. PAR: Parastatal

3. RPE : Recherche du Ier Emploi 3. SP : Salarié permanent 3. ONG: Organisations non gouvernementales

4. PFO : Personne au foyer 4. ST : Salarié temporaire 4. COOP: Coopérative

5. ETU : Elève / Etudiant 5. APP : Apprenti 5. AP: Autre Privé

6. RET : Retraité 6. AF : Aide familial

7. REN : Rentier 7. AU : Autres

8. AUT : Aucun travail

Questionnaire sous le format « en ligne » : à élaborer au cours de la formation

EXERCICE : Elaboration du questionnaire de l’enquête REMA dans le District de Karongi

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CHAPITRE 3. COLLECTE DES DONNEES Avec les chapitres précédents, on a appris à élaborer un questionnaire adapté au projet d'étude, bien formulé, fiable et valide. Maintenant, il faut prendre contact avec les répondants pour rassembler les informations. Dans cette étape de terrain, il faut continuer à tout mettre en oeuvre pour obtenir une information de qualité. Ce chapitre expose la façon d’interroger les enquêtés. Il n’est pas possible de décider a priori quel est le meilleur mode de collecte des informations. La mise au point d’une stratégie de recueil des données fait intervenir à la fois la spécialité de l’objet de l’enquête, la population concernée et le type de renseignements disponibles, les contraintes de temps et les ressources financières et humaines. Dans la pratique, le mode de collecte est déterminé avant d’être confronté à leur réalisation. Selon le mode de recueil des données, le questionnaire n’aura pas la même forme et le choix d’une technique d’échantillonnage peut aussi jouer sur l’organisation du questionnaire. Le recueil d’information par entretiens semi-directifs ou non directifs est obtenu dans une relation directe de face à face. Pour le questionnaire standardisé, divers moyens sont envisageables. Le questionnaire peut être administré par enquêteur ou auto-administré (le répondant inscrit lui-même ses réponses). L’enquêteur peut se présenter pour une entrevue de face à face ou au téléphone, tandis que le questionnaire auto-administré peut être envoyé par voie postale ou remis en main propre. Le choix de la stratégie doit être effectué dès la phase préparatoire de la recherche. Elle conditionne en effet le développement des questions (nombre, choix des thèmes), la forme du questionnaire (langage oral ou écrit) comme la présentation du protocole d’enquête. Les modes d’administration ne sont pas interchangeables car une enquête valable avec un procédé peut s’avérer catastrophique avec un autre parce que le questionnaire n’était pas prévu pour cet usage. 3.1. Administration par enquêteur La réussite de l’enquête repose sur les capacités professionnelles de l’enquêteur qui lit les questions et note les réponses. Dès la rencontre, il doit être capable de motiver le répondant. a) Un moment décisif : l’accroche L’accroche destinée à présenter la situation de l’enquête au répondant est donc un moment décisif. Elle doit pouvoir montrer à l’enquêté qu’on a besoin de lui et qu’on lui demande une tâche simple et intéressante. A noter que l’usage du mot « enquête » n’est pas toujours bien venu à cause de ses connotations policières ou fiscales. Un certain nombre de renseignements sont donnés au répondant sans chercher à le tromper. L’enquêteur présente éventuellement une attestation ou un justificatif qui rappelle le nom de l’organisme, le thème de l’enquête ou son objectif, la confidentialité et les références d’une personne qu’on peut joindre pour informations complémentaires, notamment l’autorité de base rencontrée avant d’entrer en contact avec les enquêtés.

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b) Nécessité d’une bonne sélection et formation des enquêteurs Les interactions enquêteurs-enquêtés sont source de biais. Un remède à l’influence consiste à avoir des enquêteurs sélectionnés, bien formés et encadrés.

Des enquêteurs bien choisis Des enquêteurs eux-mêmes motivés sont capables de motiver les enquêtés, même sur des sujets difficiles. S’ils sont peu sûrs d’eux, pessimistes sur la faisabilité ou l’intérêt de la tâche, insatisfaits de la rémunération proposée, ils devront être écartés. A cela s’ajoute un certain nombre de qualités personnelles qui pourront servir de critère de sélection. Un bon enquêteur doit avoir le sens de contacts humains pour introduire et maintenir une conversation avec un étranger, pour répondre professionnellement à des questions ou des situations non prévues, pour proposer le questionnaire de manière naturelle, pour compléter les réponses vagues de manière adaptée et rester neutre en toute occasion. Un bon enquêteur doit avoir aussi une élocution aisée et un niveau intellectuel acceptable: être capable de noter de façon sûre les réponses même longues; être capable de conduire plusieurs tâches simultanément (lire les questions, noter les réponses et suivre les instructions du questionnaire). Honnêteté intellectuelle et morale, disponibilité à certaines heures (en particulier soirées et week-ends), mobilité et présentation correcte (pour l’entretien de face à face) sont également indispensables.

Des enquêteurs informés Les enquêteurs ayant reçu une formation (même courte) se débrouillent mieux que les autres, car ils sont amenés à prendre conscience des implications de l’attitude professionnelle requise: neutralité, disponibilité, mise à profit de premiers instants de la rencontre, respect des consignes, absence de controverse, exploitation des moments de la journée les plus favorables aux entretiens. L’instruction comprend d’abord une initiation aux principes généraux de l’enquête insistant sur la nécessité de la standardisation, les techniques pour minimiser le taux de refus, le principe de confidentialité, une information minimum sur l’étude et ses objectifs et la spécificité de chaque question (explicitation des consignes, rôle attendu des enquêteurs). En complément de la formation, chacun reçoit un manuel d’instructions contenant la matière dispensée. Des exercices pratiques centrés sur l’enquête en cours complètent la formation (jeu de rôle enquêteur-enquêté).

Des enquêteurs contrôlés La tâche d’enquêteur n’est pas simple et l’enquêteur chevronné lui-même pourra être tenté un jour de « simplifier » son travail, fondant sur l’expérience acquise l’espoir d’une falsification vraisemblable. Il importe donc que soit mise en place une supervision et que les enquêteurs sachent qu’ils seront contrôlés à n’importe quel moment. Ceci assure la qualité des données collectées. c) Un questionnaire adapté Les risques d’influence de l’enquêteur sont moindres si la standardisation du questionnaire est poussée. Préciser non seulement les questions, mais aussi les consignes aux enquêteurs constitue une stratégie qui réduit au minimum leur marge d’initiative. L’enquêteur ne doit pas avoir à innover face à

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l’enquêté; il doit savoir ce qu’il peut dire, quand il a le droit de donner des précisions, quelles questions sauter en cas de question filtre... Ces renseignements seront portés sur le questionnaire en utilisant un caractère typographique différent pour les instructions aux enquêteurs et pour ce qui doit être lu aux enquêtés (par exemple MAJUSCULES pour les instructions, italiques pour d’autres indications particulières et caractère normal pour les questions; un signe conventionnel + pourra en outre indiquer une consultation des fiches aide-mémoire). L’utilisation de flèches ⇒ peut également guider l’enquêteur pour les renvois. Le questionnaire de face à face peut être précodé. L’enquêteur devra alors cocher (ou remplir le code) le numéro correspondant à la réponse fournie par l’enquêté; cela facilitera ultérieurement la saisie informatique de l’information.

d) Enquête assistée par ordinateur Le questionnement peut être guidé et géré par ordinateur. Au lieu d’avoir un questionnaire papier, l’enquêteur dispose d’un ordinateur sur lequel s’affichent les questions. Il saisit la réponse à la question qui s’inscrit, puis passe à la question suivante en respectant les instructions qui sont données sur l’écran. La saisie de l’information d’enquête est donc réalisée directement. Ce système suppose une préparation attentive du programme: les instructions aux enquêteurs apparaissent au fur et à mesure avec les questions et les « sauts » de questions sont gérés de façon automatique. e) Spécificité de l’enquête de face à face L’enquête par interrogation directe a longtemps été considérée comme la meilleure technique. L’enquêteur motive le répondant en sollicitant sa participation au début et l’encourage à continuer l’entretien jusqu’au bout: c’est le mode d’interrogation générant le moins de refus. En outre, on a une meilleure garantie de la qualité des réponses: les consignes sont respectées et les réponses oubliées sont rares. Toutefois, ce mode d’enquête est plus coûteux que les autres, à la fois en temps (il faut se déplacer à la recherche des enquêtés) et en argent (il faut payer les enquêteurs). L’administration du questionnaire est plus sensible aux effets d’influence de l’enquêteur (liés à son comportement, ses opinions, ses caractéristiques) et à la désidérabilité sociale (réponses faites pour donner une image favorable de soi, pour mériter la considération de l’interviewer).

f) Spécificité de l’enquête par téléphone Au niveau de l’interaction sociale, comme au niveau du taux de réponses, l’enquête par téléphone se situe entre l’entretien de face à face et le questionnaire postal.

Des avantages indéniables Plus rapide et économique que l’entretien de face à face surtout si l’enquête s’adresse à une population dispersée, l’enquête par téléphone permet de toucher pratiquement tout le monde grâce à la génération aléatoire des numéros, mais elle exclut ceux qui n’ont pas de téléphone. La supervision est facilitée dans la mesure où les enquêteurs peuvent être rassemblés dans une même salle autour d’un central téléphonique.

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Le rôle de l’enquêteur est aussi important que dans l’enquête de face à face. En plus du bon contact, il doit avoir une voix agréable, une prononciation distincte et être motivant. Il lui faudra aussi, s’il n’appelle pas une personne particulière, s’assurer que la personne contactée appartient bien à la population cible (par exemple mère de famille d’enfants d’école maternelle, utilisateur des transports en commun, etc.). Les répondants ne sont pas simples à toucher, parfois il faut 5 ou 6 appels avant de joindre le répondant.

Des contraintes fortes pour le questionnaire Ce type d’enquête n’est réalisable qu’avec un questionnaire simple et bien préparé: il est très facile à l’enquêté de raccrocher le combiné à la première difficulté. Il est généralement conseillé de ne pas dépasser vingt minutes. Les questions doivent être courtes, avec un nombre réduit de modalités (l’idéal est deux ou trois) de façon à être facilement mémorisables. On peut utiliser une technique de décomposition des questions pour réduire le nombre de réponses à prendre en considération en une fois. Les réponses recueillies par téléphone aux questions ouvertes sont assez pauvres: leur usage est donc déconseillé. 3.2. Enquête auto-administrée Le remplissage du questionnaire assuré par le répondant lui-même peut être réalisé en dehors de la présence de chargés d’étude (par voie postale) ou en présence d’une personne chargée de l’enquête (sur site). L’avantage indéniable d’un coût réduit est contrebalancé par une moins bonne qualité des réponses.

Soigner la qualité du questionnaire Le questionnaire auto-administré repose seulement sur les questions et les instructions écrites. On ne peut plus compter sur l’enquêteur pour encourager ou clarifier, comme cela était possible dans l’entretien de face à face et dans une moindre mesure dans l’entretien par téléphone. Ce type de questionnaire demande donc une préparation attentive, avec une attention toute particulière accordée aux tests préalables, effectués en présence de l’enquêteur. Le questionnaire doit donner envie de répondre, avec des questions courtes, spécifiques, écrites en langage accessible, avec un nombre limité de modalités de réponses. La mise en page est importance et doit donner l’impression que l’on a affaire à un document intéressant: première page avec un graphisme attirant et motivant (dessin, sigle); typographie soignée usant d’une police de caractères lisible; insertion d’espaces suffisants entre questions, de flèches ou de cadres, gestion des sauts de page, une question et sa consigne doivent être placées sur la même page. La taille des caractères peut jouer sur les réponses: un questionnaire en gros caractères convient mieux à ceux qui ont des difficultés de lecture ou de vision.

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Sauf pour une population particulière, les enquêtés n’aiment pas rédiger les réponses à des questions ouvertes. Toutefois, il est classique de terminer le questionnaire par une question qui invite le répondant à s’exprimer plus librement en rédigeant une réponse.

Enquête par voie postale L’envoi postal donne la possibilité de toucher au moindre coût un échantillon très dispersé géographiquement. Il n’y a plus besoin de former des enquêteurs et bien sûr les biais d’enquêteurs disparaissent. En outre, l’enquête postale permet d’atteindre des personnes difficiles à joindre (rarement chez elles ou refusant d’ouvrir la porte). Mais en contrepartie, on risque un faible taux de retour (biais des non-réponses). En outre, il n’est pas certain que les questions aient été correctement comprises et que les réponses émanent bien des personnes auxquelles le questionnaire a été adressé: la secrétaire peut répondre pour son patron, le mari pour sa femme, ... Les tests de connaissance sont inopérants car on peut se documenter à loisir. Certaines personnes ne se conforment pas aux instructions (barrer, entourer, ...), et il est parfois difficile de déceler leur manière de procéder. De plus, les réponses peuvent être illisibles, difficiles à comprendre ou incomplètes. Enfin, ce mode de collecte impose de disposer de listes d’adresses complètes et à jour.

Indications d’un questionnaire postal Les enquêtés doivent avoir la capacité de répondre: des enseignants, des employés de bureau, des sujets ayant un bon niveau d’instruction constituent une cible privilégiée. Des personnes ayant un niveau d’instruction limité ne devront pas être interrogées par ce moyen. L’enquête postale donne de meilleurs résultats si les enquêtés sont motivés et intéressés (de manière spéciale) par le thème d’étude ou s’ils ont l’impression que cette consultation servira à quelque chose. Ce mode d’administration convient à une étude dont l’objectif n’est pas trop complexe: lorsque le projet est bien défini, centré sur un seul thème, si le questionnaire ne nécessite pas trop de renvois (filtres) ou s’il porte sur la situation présente de l’enquêté (ce qu’il fait, ce qu’il pense, ce qu’il sait). En particulier ce type de questionnaire est inopérant dans le début d’une recherche où l’on a besoin de réponses à des questions ouvertes.

Une accroche: la lettre d’introduction Une lettre d’introduction accompagnant le questionnaire doit motiver le répondant et expliquer la procédure de l’étude. Elle doit avoir la fonction d’accroche pour éviter que le questionnaire ne finisse dans la corbeille à papier.

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CHAPITRE 4. EXPLOITATION DES DONNEES Cette partie sera consacrée aux opérations d’exploitation des données d’enquête. Les réponses aux questions de l’enquête ne peuvent généralement être traitées telles qu’elles ont été recueillies sur le terrain: il faut les mettre sous une forme qui les rend aptes à être analysées. Avec la réalisation d’un codage, il est possible de passer des données brutes aux données préparées pour l’analyse. Ce chapitre parle essentiellement du codage des enquêtes quantitatives par questionnaires. Le traitement des enquêtes qualitatives par entretiens y est rapidement évoqué. L’exploitation des données d’enquêtes est très souvent réalisée à l’aide de l’ordinateur qui effectue sans difficultés un grand nombre de calculs à l’aide des logiciels. 4.1. Préparation des données Les informations recueillies seront présentées sous une forme simple et systématique obtenue au moyen d’un codage. Les analyses ultérieures s’effectueront à partir du document rassemblant les données codées. Les étapes importantes de la préparation des données sont :

Passage des questions aux variables Les indicateurs de l’enquête ont été traduits en questions. Au moment de l’analyse statistique, chaque question de l’enquête devient une variable ou parfois même plusieurs variables. Une variable est une quantité susceptible de prendre un certain nombre de valeurs, par opposition à une constante.

Dans les analyses d’enquête, il est utile de distinguer trois types de variables :

Variable nominale ou catégorie : On parle de variable nominale lorsque les modalités d’une variable qualitative sont un ensemble de réponses simplement distinctes, sans ordre quelconque. Exemple: « avec qui êtes-vous venu visiter cette exposition ? » Seul/En famille/Avec des voisins amis.

Lorsque la variable nominale n’a que 2 modalités, on l’appelle variable ou attribut dichotomique: pour le sexe des répondants, la réponse est Masculin ou Féminin.

Variable ordonnée ou ordinale : Une variable est ordinale si un ordre existe entre les modalités de réponses. Ex. : « Comment appréciez-vous cette exposition? Très intéressante/Assez intéressante/Peu intéressante/Pas intéressante du tout.

Variable quantitative ou numérique : est une variable dont les données indiquent la quantité de quelque chose. Exemple : le nombre d’enfants, l’âge, le poids sont mesurés sur des échelles quantitatives.

4.2. Codification des variables Une fois identifiée, chaque variable de l’enquête fait l’objet d’une codification. Un code associe à chaque modalité de réponse une valeur. Parfois, les réponses sont précodées sur le questionnaire, mais ce n’est pas absolument le cas. Les numéros de code affectés aux réponses n’auront pas la même signification suivant la nature des variables.

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Pour les variables nominales, le code assigné est purement symbolique et arbitraire et

n’a pas valeur de quantité. C’est une correspondance destinée à simplifier l’écriture.

Si on attribue un numéro de code à chaque réponse d’une variable ordinale, ces numéros indiquent un ordre de classement, mais pas une quantité

Pour les variables quantitatives par contre, la valeur portée sur le questionnaire devient

la valeur codée et a le sens d’une unité de mesure (par exemple: âge, nombre d’enfants). Il convient de noter que pour les questions fermées à choix multiples, on fait une combinaisons de réponses, puis on attribut un code. C’est le cas des langues parlées : s’il y en a quatre, on aura 24, soit 16 combinaisons.

Confection d’un dictionnaire des codes

C’est un document synthétique qui indique comment chaque information du questionnaire sera notée dans le fichier informatique de données.

Passage du codage du questionnaire au tableau de données

On applique la codification élaborée aux réponses du questionnaire. Ce qui donne un tableau de données ou encore une matrice ou fichier de données qui prévoit une ligne pour chaque sujet et une colonne pour chaque variable de l’enquête. Ces données saisies sur un tableur classique pourront être transférées dans le logiciel choisi pour l’analyse (production des tableaux).

Vérification et toilettage des données Après la saisie informatique, on recherche les erreurs ou les incohérences. Cette vérification demande du temps, mais elle est absolument indispensable. Si aucun soin n'est pris à ce stade, l'analyse des données pourra en souffrir. Plusieurs types de vérification sont conseillés avant de lancer l'analyse. Tout d'abord, il faut contrôler la qualité de la saisie à partir d'un échantillon de questionnaires. Si les ressources le permettent, il est préférable de répéter la saisie une seconde fois, puis de comparer les deux séries de données enregistrées dans l'ordinateur. Une fois les erreurs de saisie rectifiées, on doit vérifier si les données sont hors-limite (impossibles ou peu vraisemblables) et/ou contradictoires (ex. : grossesse déclarée alors que le sujet est de sexe masculin, ou encore réponses sur l'utilisation du préservatif alors que le sujet n'a pas de rapport sexuel). Il faut aussi s'assurer qu'aucune donnée obligatoire n'est manquante - du fait soit de l'incapacité ou du refus du sujet à répondre (non-réponse), soit d'une erreur de l'enquêteur. Le vérificateur pourra décider de compléter ces données manquantes (on parle alors d'imputation) ou simplement de les ignorer et d'éliminer ces entrées pour l'analyse.

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Création de nouvelles variables non prévues dans le questionnaire

Une variable non initialement prévue dans le questionnaire, mais utile pour l’analyse, peut être construite à partir d’autres et ajoutée au tableau de données: elle se matérialise par une nouvelle colonne au dictionnaire des codes. 4.3. Le traitement des entretiens Dans l’enquête quantitative, on attribue une valeur à chaque catégorie en vue de traitements statistiques; dans l’approche qualitative les catégories obtenues sont surtout traitées globalement. L’analyse thématique des entretiens est un travail d’identification des catégories (on parle encore de thèmes et sous-thèmes) qui sont des points de vue, des concepts ou des idées qui doivent permettre le classement et l’organisation des informations. A partir d’un tableau des données, on pourra faire des comparaisons de sujets (rechercher des types d’individus qui se ressemblent) ou étudier des rapprochements ou répulsions de thèmes.

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CHAPITRE 5. ANALYSE ET PRESENTATION DES RESULTATS Outre le calcul des indicateurs et leur interprétation, l'analyse des données recueillies inclut la pondération éventuelle des données (poids d'échantillonnage), le calcul des erreurs-types des estimations et des tests afin de déterminer la signification statistique des tendances observées dans le temps et/ou entre divers groupes ou sous-groupes.

5.1. Analyse des résultats Les informations de l’enquête sont rassemblées dans le fichier des données qui va servir dans la construction des tableaux des chiffres devant décrire l’enquête. Les trois niveaux d’analyse sont : 1. Présentation des tris à plat La description des variables par l’opération dite « tri à plat » qui consiste à examiner une seule variable à la fois, c’est-à-dire que le calcul de la distribution des effectifs et des pourcentages des modalités de réponses se fait pour chaque question. Ce travail semble fastidieux, mais il est facile de le réaliser par ordinateur avec un programme adapté. 2. Analyse par tris croisés

La compréhension des réponses se fait par l’opération dite « tris croisés » qui consiste à analyser les tableaux prenant en compte deux variables simultanément, l’une étant la variable dépendante et l’autre la variable indépendante. L’analyse de l’enquête commence véritablement avec l’examen de ces tableaux croisés qui servent à examiner si les hypothèses formulées sont acceptables, à comparer la distribution des comportements et opinions entre sous-groupes de répondants ou encore à faire apparaître des associations entre réponses à des questions qualitatives. 3. Analyse multivariée Le contrôle des relations par une analyse multivariée permet de prendre en compte la complexité de la réalité en considérant plusieurs variables simultanément. La démarche consiste à introduire progressivement de nouvelles variables dans la relation à deux variables pour examiner leurs effets. Cette nouvelle variable dont l’effet est contrôlé est appelée la variable test. EXERCICES : cas de l’enquête de Karongi

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5.2. Présentation des résultats Rédiger le rapport est la dernière étape de l’enquête. L’essentiel de l’étude est effectué, mais l’analyse n’est pas nécessairement terminée : en cours de rédaction du rapport, on peut encore être amené à réaliser quelques traitements complémentaires des données. Le rapport comporte généralement une première rédaction longue concernant le détail des procédures et des résultats. Ensuite, il entre dans le domaine de la communication avec la rédaction d’un rapport abrégé, adapté au public destinataire, écrit clairement et illustré des représentations graphiques. La première page porte le titre, les auteurs, la date, le lieu et les commanditaires de l’étude et les noms des participants. Un résumé en quelques lignes ou/et un sommaire plus détaillé mettent l’accent sur les points importants, avec éventuellement un ou deux tableaux clés. La table des matières, la liste des tableaux et figures et un glossaire (termes spécifiques et abréviations particulières) se trouveront au début (ou en fin du rapport). Le chapitre introductif donne les raisons pour lesquelles l’enquête est conduite et ce qu’on en attend : en quoi l’objectif est intéressant et important, comment l’étude se situe par rapport aux travaux antérieurs et ce qu’on doit apporter de plus. Une partie théorique pourra définir les concepts et idées utilisées. Les questions spécifiques de recherche ou les hypothèses à tester sont précisées ainsi que les limites de l’enquête. Les choix méthodologiques et techniques seront précisés. C’est notamment : les caractéristiques de l’enquête : plan, population étudiée, échantillonnage, mode de collecte et taux de réponses ; les instruments de collecte des données avec leurs spécifications : contenu du questionnaire (le questionnaire complet doit se trouver en annexe du rapport) ; les aspects logistiques : étude pilote, mode de sélection et de formation des enquêteurs, supervision, durée de l’entretien et période de réalisation de l’enquête ; les constructions effectuées en vue de l’analyse, les techniques particulières d’analyse sans oublier les logiciels utilisés pour l’exploitation des données ; les caractéristiques démographiques des répondants. Les principaux résultats et commentaires sont décrits dans différents chapitres avec des tableaux, des graphiques, des traitements statistiques ou la description des données qualitatives. La dernière partie est une conclusion qui donne le résumé et l’interprétation des résultats : le résumé décrit de manière suggestive ce que les données révèlent en situant les résultats par rapport à la question posée au départ, aux hypothèses et au contexte de la recherche. Le rapport se termine par la discussion et l’interprétation où le rédacteur attire l’attention sur les points importants et compare les résultats obtenus à ceux d’autres enquêtes, il note les résultats inattendus et propose des interprétations pour les observations, il discute des limites de l’étude et enfin il fait des suggestions pour une recherche future. Certaines études sont conduites seulement pour obtenir des données. Dans d’autres cas, il est demandé de prévoir des recommandations: c’est à ce niveau qu’il faut les exposer.

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QUELQUES ASPECTS À CONSIDERER DANS LA PRESENTATION DES RESULTATS

1. Bibliographie Les références bibliographiques utilisées sont présentées de manière standardisée. Elles donnent pour un ouvrage le nom de l’auteur (EN CAPITALES) avec l’initiale du prénom (ou parfois le prénom complet), le titre de l’ouvrage (en italique), puis le lieu d’édition, le nom de l’éditeur et l’année d’édition. Pour les articles on commence aussi par le nom de l’auteur (EN CAPITALES) et l’initiale du prénom, puis on note le titre de l’article (« entre guillemets »), le titre du périodique (en italique), et l’on précise les références du numéro des la revue (le volume, le numéro, l’année avec le mois de l’année) et les pages de début et de fin d’article (p.52-63). On peut aussi donner l’année de parution directement après les nom et prénom de l’auteur au lieu de la renvoyer en fin de référence. Le cas échéant, on indique à la fin le nombre de volumes lorsqu’il y en a plusieurs (2 volumes ou 2 tomes) et pour les traductions en français, l’année de première édition en langue originale.

2. Annexes Cette partie rassemble les informations qui n’ont pu être introduites dans le texte. Le questionnaire est intégralement reproduit, accompagné d’une fiche résumant les caractéristiques de l’enquête. On complète par des informations techniques (de méthodologie ou de statistique), les guides d’entretien, les codes, la description des réponses aux questions ouvertes ou l’édition de tableaux complémentaires.

2.1. Les tableaux Les tableaux résument utilement les données sur les répondants ou permettent de comparer les réponses. Dans le chapitre consacré à l’analyse, la façon de présenter des tableaux a été examinée (titre, modalités de réponses en clair, calcul de pourcentages et mention des effectifs sur lesquels portent les calculs).

2.2. Tableaux ou graphiques ? Les tableaux donnent davantage d’informations détaillées et chiffrées alors que les graphiques ont un impact visuel plus important. On peut prévoir d’utiliser les deux, mais pas pour la même information: un graphique ne doit pas être la simple répétition d’un tableau. Les graphiques sont particulièrement utiles pour montrer la forme des distributions statistiques ou leurs variations.

2.3. Typographie

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Les règles habituelles de typographie et de mise en forme du texte sont respectées. La mise en page doit être soignée et le document attentivement relu. Ne pas oublier de numéroter les pages d’un rapport.

3. Des représentations graphiques La présentation de résultats sous forme de graphique est souvent très éclairante pour décrire les observations. Des logiciels spécialisés proposent différents formats, avec la possibilité d’éditer le titre, la légende, la définition des axes, etc. Voici quelques formes parmi les plus utiles.

3.1. Diagrammes en barres disjointes Ils sont faciles à lire d’un coup d’oeil et à interpréter. De plus, ils conviennent pour tout type de données. Les barres sont en général présentées verticalement. S’il y en a plus de six ou sept, il est préférable de les présenter horizontalement.

3.2. Diagrammes en barres empilées Les barres peuvent être positionnées les unes à la suite des autres pour arriver au total de 100%.

3.3. Diagrammes à secteurs (camembert) Ils décrivent la distribution des pourcentages à une question. Pas très faciles à construire à la main, ils sont largement proposés par les logiciels. Malgré leur intérêt, ces représentations sont souvent moins faciles à lire que les diagrammes en barres. Ce type de représentation est particulièrement intéressant pour situer les répondants d’une modalité par rapport aux autres en attirant l’attention sur une « tranche »: dans ce cas, on peut même insister en la détachant. Lorsque le nombre de modalités est important, ces représentations deviennent illisibles: on évite de représenter sur un tel diagramme plus de six tranches (si nécessaire on groupe les petites tranches sous la rubrique « autre »).

3.4. Courbes Les informations peuvent encore être représentées sous forme de courbe essentiellement pour dégager la tendance.

3.5 Comparaisons graphiques

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Pour comparer les réponses de groupes, les diagrammes en barres ou les courbes sont adaptés (en représentant plusieurs courbes sur le même graphique). Dans ce cas, une légende est nécessaire pour spécifier les groupes. Les diagrammes à secteurs ne conviennent pas pour des comparaisons.

3.6. Pour les variables quantitatives: histogrammes De nombreux logiciels proposent la construction automatique d’histogrammes en calculant des classes contiguës d’égale amplitude, la hauteur étant proportionnelle à l’effectif. EXERCICES : cas de l’enquête de Karongi