Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

200
Thèse de Doctorat de l’Université Pierre et Marie Curie – Paris VI Spécialité : MECANIQUE Présentée par Pierre KŒCHLIN Pour obtenir le grade de Docteur de l’Université Paris VI Modèle de comportement membrane-flexion et critère de perforation pour l’analyse de structures minces en béton armé sous choc mou Thèse dirigée par Stéphane ANDRIEUX et Alain MILLARD Soutenue le 11 janvier 2007 devant le jury composé de : M. Friedhelm STANGENBERG Prof. Dr.-Ing. an der Ruhr-Universität Bochum Président M. Patrice BAILLY Prof. à l’ENSI Bourges Rapporteur M. Patrick DE BUHAN Prof. à l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées Rapporteur Mme. Françoise LENE Prof. à l’UPMC Paris VI Examinateur M. Stéphane ANDRIEUX Prof. chargé de cours à l’Ecole Polytechnique Directeur de thèse M. Alain MILLARD Prof. chargé de cours à l’Ecole Polytechnique Directeur de thèse LaMSID Laboratoire de Mécanique des Structures Industrielles Durables UMR CNRS EDF 2832

Transcript of Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Page 1: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Thèse de Doctorat de l’Université Pierre et Marie Curie – Paris VI

Spécialité : MECANIQUE

Présentée par

Pierre KŒCHLIN

Pour obtenir le grade de Docteur de l’Université Paris VI

Modèle de comportement membrane-flexion et critère de perforation pour l’analyse de

structures minces en béton armé sous choc mou

Thèse dirigée par Stéphane ANDRIEUX et Alain MILLARD

Soutenue le 11 janvier 2007 devant le jury composé de :

M. Friedhelm STANGENBERG Prof. Dr.-Ing. an der Ruhr-Universität Bochum Président M. Patrice BAILLY Prof. à l’ENSI Bourges Rapporteur M. Patrick DE BUHAN Prof. à l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées Rapporteur Mme. Françoise LENE Prof. à l’UPMC Paris VI Examinateur M. Stéphane ANDRIEUX Prof. chargé de cours à l’Ecole Polytechnique Directeur de thèse M. Alain MILLARD Prof. chargé de cours à l’Ecole Polytechnique Directeur de thèse

LaMSID Laboratoire de Mécanique des Structures Industrielles Durables

UMR CNRS EDF 2832

Page 2: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...
Page 3: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

« La crainte de l’Éternel est le commencement de la science. »

(La Bible – Livre des Proverbes, chapitre 1, verset 7)

Page 4: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...
Page 5: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

5

Remerciements Juste quelques mots pour ne pas être ingrat envers tous ceux qui, de près ou de loin, m’ont aidé pendant ces trois dernières années. Et si cette page peut ne paraître qu’un exercice convenu de politesse, j’espère que ceux auxquels elle s’adresse sauront y trouver l’expression d’une vraie reconnaissance. Merci avant tout à Stéphane Andrieux de m’avoir proposé cette thèse et de m’avoir ainsi choisi comme premier cobaye-thésard officiel. J’ai ainsi bénéficié de sa part d’un encadrement scientifique de grande qualité. Je lui suis gré d’avoir toujours montré de la disponibilité et de la patience devant ma lenteur à décoder et appliquer ses idées. Merci également à Alain Millard pour son regard critique, son expérience et ses conseils. Il a été l’interlocuteur qu’il fallait à Stéphane. Merci à Patrick de Buhan et à Patrice Bailly d’avoir accepté de relire attentivement ma prose et d’être rapporteurs de ce mémoire. Merci au Prof. Dr.-Ing. Stangenberg d’être venu d’Allemagne en avion, en train et pour finir à pied jusqu’au fin fond de Clamart pour se voir confier la tâche de présider la soutenance… en français. Merci aussi à Françoise Léné d’avoir bien voulu faire partie du jury. Merci spécialement à Serguei Potapov, le meilleur et le seul chef de projet que je n’ai jamais connu, pour son réalisme, son optimisme et ses encouragements : la SAGA continuera sans moi. Merci à Patrick Massin pour ses minutieuses relectures et à François Voldoire pour son enthousiasme simultané envers l’analyse limite, le béton et les poutres. Merci à Ian May, Arnaud Delaplace et Sébastien Woestyn pour leurs contributions fort utiles. Merci à Vincent d’être breton, à Patrick pour ses actions, à Georges pour ses intarissables discussions ; merci à Nicolas, Thomas, Stéphane, Emmanuel et les autres dynamiciens de T62, anciens ou nouveaux : vous aurez un concurrent de moins au café pour une place sur le canapé. Une mention particulière à Damijan qui a dû se plonger dans les lignes de Fortran du modèle GLRC, et à Shahrock pour ses questions-chocs de juillet et son aide à la préparation de la soutenance. Merci également à Géraldine et aux compagnons de fortune et d’infortune, qui ont dû supporter quotidiennement mes humeurs au LaMSID : Josselin (Thank you Mr. Chairman !), Khaled, Samuel, Pierre-Emmanuel, Thomas, Philippe, Amine, Benjamin, Mohamed, Renaud et Minh. Merci enfin à mes amis et ma famille pour leur soutien moral pendant ces trois années, et plus que tout, merci à mes parents pour leurs prières.

Page 6: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

6

Page 7: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

7

Table des matières

INTRODUCTION 11

PARTIE I

PHENOMENOLOGIE DES IMPACTS DE PROJECTILES DEFORMABLES : CARACTERISATION, MODELISATION 15

CHAPITRE 1 CARACTERISATION DE L’IMPACT ETUDIE 17

1.1 Choc mou (soft impact) 17 1.1.1 Choc mou et choc élastique 18 1.1.2 Choc mou, déplacements et force d’impact 19 1.1.3 Caractérisation unifiée des chocs 22 1.2 Une dynamique pas si rapide 25 1.2.1 Evaluation du taux de déformation 25 1.2.2 Comparaison avec d’autres phénomènes 26 1.2.3 Comportement indépendant du taux de déformation 27 1.3 Essais de référence 28 1.3.1 Essais d’impact sur dalles en béton armé 28 1.3.2 Représentativité des essais 31 1.4 Conclusion 33

CHAPITRE 2 LE PROCESSUS DE PERFORATION POUR LES CHOCS MOUS 35

2.1 Un processus caractérisé par un cône de rupture 36 2.1.1 Etude post-mortem des dalles Meppen 36 2.1.2 Etablissement d’un scénario de perforation 37 2.1.3 Le cône, caractéristique de la perforation sous chocs mous 39 2.2 La génération du cône par les ondes de structure 40 2.2.1 La fissuration dans les essais de l’université d’Edinburgh 40 2.2.2 Ondes élastiques dans une poutre 42 2.2.3 Interprétation : origine du cône et de l’écaillage 44 2.2.4 Compléments d’analyse 45 2.3 Conclusion 48

CHAPITRE 3 CHOIX DE MODELISATION 49

3.1 Cahier des charges 49 3.1.1 Tenue locale et tenue globale de la structure 49 3.1.2 Phénomènes à modéliser 51 3.2 Revue des différentes modélisations possibles 52 3.2.1 Modélisation des discontinuités dans la matière 52 3.2.2 Echelle de modélisation 53 3.2.3 Modélisations possibles 54 3.3 Conclusion : une modélisation globale 56

RESUME ET BILAN DE LA PARTIE I 57

Page 8: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Table des matières

8

PARTIE II

MODELE GLOBAL DE COMPORTEMENT POUR DALLES EN BETON ARME 59

CHAPITRE 4 DESCRIPTION DU MODELE THEORIQUE GLRC 61

4.1 Elasticité 62 4.2 Endommagement 64 4.2.1 Energie libre 64 4.2.2 Critère d’endommagement 65 4.3 Comportement plastique 68 4.4 Récapitulatif des hypothèses 69 4.5 Conclusion 71

CHAPITRE 5 CRITERE DE PLASTICITE MEMBRANE-FLEXION 73

5.1 Critère poutre 74 5.1.1 Notations et hypothèses 74 5.1.2 Préalables 75 5.1.3 Critère sur N et M 76 5.1.4 Validation du critère poutre avec deux lits d’acier 79 5.2 Extension au critère dalle 80 5.2.1 Obtention du critère dans un cas particulier 80 5.2.2 Validation du critère dans le cas général 85 5.3 Conclusion 86

CHAPITRE 6 INTEGRATION DE LA RELATION DE COMPORTEMENT 87

6.1 Lois d’état 88 6.1.1 Effort normal et moment 88 6.1.2 Variables YI , YII associées aux variables internes DI , DII 89 6.2 Algorithme d’intégration 90 6.2.1 Principe 90 6.2.2 Endommagement 92 6.2.3 Plasticité 93 6.3 Conclusion 95

CHAPITRE 7 VALIDATION DU MODELE GLRC 97

7.1 Comparaison avec poutre multifibre et modèle La Borderie 98 7.1.1 Définition du test 98 7.1.2 Résultats 99 7.2 Impact sur dalle : essais EDF-CEMETE 102 7.2.1 Définition du test 102 7.2.2 Résultats 103 7.3 Impact sur dôme : benchmark avec modèles Ottosen et Drucker-Prager 104 7.3.1 Définition du test 104 7.3.2 Résultats 106 7.4 Conclusion 108

RESUME ET BILAN DE LA PARTIE II 109

Page 9: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Table des matières

9

PARTIE III

CRITERE DE PERFORATION POUR PLAQUES EN BETON ARME 111

CHAPITRE 8 UTILISATION DE L’ANALYSE LIMITE ET DE L’APPROCHE CINEMATIQUE PAR L’EXTERIEUR 113

8.1 Notations et hypothèses 114 8.1.1 Géométrie et mécanisme de ruine 114 8.1.2 Critères locaux de résistance du béton et de l’acier 115 8.2 Préalables 117 8.2.1 Champs de vitesse et de déformation 117 8.2.2 Fonction d’appui 118 8.2.3 Considérations sur le paramétrage du critère de Drucker-Prager 119 8.3 Ecriture du problème d’optimisation 120 8.3.1 Principe des puissances virtuelles 120 8.3.2 Le problème plaque 123 8.3.3 Le problème poutre 123 8.4 Méthodes de résolution 124 8.5 Conclusion 126

CHAPITRE 9 LE CRITERE POUTRE STATIQUE 127

9.1 Résolution 128 9.1.1 Optimisation par rapport aux composantes du champ de vitesse 128 9.1.2 Optimisation par rapport à l’angle θ 130 9.2 Résultat : un critère entièrement analytique 133 9.3 Validation 135 9.3.1 Vérification numérique 135 9.3.2 Comparaison avec le critère de cisaillement de Nielsen 136 9.3.3 Comparaison dans des cas de chargement combiné 137 9.4 Conclusion 139

CHAPITRE 10 LE CRITERE PLAQUE STATIQUE 141

10.1 Résolution 142 10.1.1 Partie analytique 142 10.1.2 Partie numérique 144 10.2 Validation 145 10.2.1 Essais Yamada, Nanni, Endo 145 10.2.2 Facteur de contrainte effective 147 10.3 Conclusion 148

Page 10: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Table des matières

10

CHAPITRE 11 VALIDATION DU CRITERE EN DYNAMIQUE POUR LA PERFORATION 149

11.1 Description des essais Meppen 150 11.1.1 Géométrie 151 11.1.2 Caractéristiques des matériaux 152 11.1.3 Chargement 153 11.2 Modélisation 154 11.2.1 Modèle éléments finis 154 11.2.2 Conditions aux limites 155 11.2.3 Amortissement 155 11.2.4 Chargement 156 11.2.5 Paramètres spécifiques à la perforation 156 11.3 Résultats 158 11.3.1 Perforation 158 11.3.2 Vérification de la cohérence la modélisation 162 11.4 Conclusion 169

RESUME ET BILAN DE LA PARTIE III 170

CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES 171

ANNEXES 175 Annexe A : Essais d’impact 176 Annexe B : Fonction d’endommagement 182 Annexe C : Convexité du critère de Johansen généralisé 183 Annexe D : Un cas particulier d’optimisation sous condition 185 Annexe E : Un second cas d’optimisation 189

BIBLIOGRAPHIE 191

Page 11: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

11

Introduction

Contexte

L’idée de garantir la sécurité d’un espace confiné à l’aide d’une structure de protection pour se prémunir de l’agression de projectiles externes n’est pas nouvelle. Dès la fin du XIIIe siècle, avec l’apparition des pièces d’artilleries, le concept du mur-bouclier se répand dans les châteaux forts d’Europe et du Moyen Orient (Figure 0.1-a). La muraille n’est plus là seulement pour protéger d’une intrusion, mais en augmentant sa hauteur et son épaisseur qui peut atteindre plusieurs mètres, elle est capable, lors d’un siège, de protéger les bâtiments internes des boulets lancés par les assaillants. Au cours des siècles, si l’artillerie se perfectionne, les structures de protections évoluent également. On passe de la pierre au béton armé (Figure 0.1-b). Le principe reste cependant le même : interposer une structure entre le projectile et les éléments à protéger.

Ce bouclier de protection est de manière générale une construction surfacique, car on cherche à sécuriser le volume le plus grand possible avec le moins de matériau possible, c’est-à-dire avec une épaisseur minimale. C’est donc, selon les définitions des dictionnaires, une structure au sens propre du terme : un ensemble cohérent dont la fonction détermine la forme et les dimensions. En corollaire, le fait qu’une dimension soit nettement plus petite que les autres ou que la structure soit incurvée pour englober l’espace à protéger a une incidence sur la réponse mécanique à l’impact. Ainsi l’histoire de l’architecture militaire nous rapporte que dans la conception des fortifications de la fin du Moyen-Age, les tours carrées ont été supplantées par des bastions circulaires, plus résistants aux impacts d’artillerie.

a)

b)

Figure 0.1 : Structures surfaciques de protections a) Mur bouclier du château d’Ortenberg en Alsace [Lechenet 2006, Tjemmes 2002]

b) Bunker en béton armé du mur de l’Atlantique [Rüdiger Wölk 2005]

Page 12: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Introduction

12

Remarquons également qu’une structure de protection joue un double rôle : d’une part dissiper l’énergie localement sans qu’il y ait perforation (d’où dans les châteaux forts la construction de mur-bouclier avec des pierres à bossages, d’ailleurs plus faciles à tailler, dont les renflements éclataient sous le choc en évitant ainsi la formation de brèches dans le mur lui-même), et d’autre part transférer les efforts depuis la zone d’impact jusqu’au sol en limitant l’ébranlement de la structure entière.

Avec le développement des transports, donc la multiplication des objets mobiles, et l’avènement d’une culture de prévention des risques technologiques et naturels, la protection contre les chocs n’est plus aujourd’hui un domaine réservé aux militaires. En effet, cette problématique s’applique aussi bien aux piles de ponts ou aux canalisations d’hydrocarbure dans les zones portuaires qu’il s’agit de protéger contre les collisions de bateaux avec des structures adéquates, qu’aux routes de montagne au-dessus desquelles sont construits des pare-avalanches ou des dalles pare-blocs [Delhomme et al. 2005], ou encore aux centrales nucléaires susceptibles de subir l’impact d’un aéronef [Berriaud et al. 1978, Zukas et al. 1982].

Ainsi l’industrie nucléaire en général, et EDF en particulier, travaillent sur la thématique chute d’avion depuis plus de 30 ans. Comme l’enjeu de sûreté associé à un tel accident potentiel est de toute importance, l’exploitant veut disposer d’outils de simulation toujours plus performants, c’est-à-dire non seulement plus rapides, mais aussi donnant des résultats plus proches de la physique observée dans les tests expérimentaux. La multiplication des méthodes de modélisation donne également la possibilité de confronter les différentes réponses obtenues, et permet ainsi d’obtenir un degré de confiance toujours plus élevé dans les prédictions numériques.

Objectifs et contraintes

C’est dans ce contexte-là que s’inscrit la présente thèse. Son objet principal, en proposant des alternatives aux modélisations existantes, est de fournir à l’ingénierie nucléaire de nouveaux outils de simulation qui soient capables de prédire les conséquences mécaniques – perforation et ébranlement – d’un impact d’avion sur une enceinte de confinement en béton armé. Il s’agit donc d’un travail de recherche académique dont le sujet est directement fourni par l’ingénierie. A ce titre, il participe à la réalisation des objectifs propres du laboratoire où il a été effectué, le LaMSID, Laboratoire de Mécanique des Structures Industrielles Durables, qui est une unité mixte CNRS-EDF.

Ce positionnement de la thèse, avec ses exigences scientifiques et ses enjeux industriels impose également un certain nombre de contraintes.

Tout d’abord, il doit y avoir une maîtrise de la complexité de la modélisation : des temps de calcul trop longs ne permettraient pas de traiter le cas de la structure complète. L’échelle de modélisation doit donc être choisie de manière à permettre une représentation suffisamment fine des phénomènes locaux comme la perforation sans que cela nuise à la simplicité et à la performance du calcul d’ébranlement global. Il faut également éviter si possible la modélisation du projectile.

Deuxièmement, les outils de simulation doivent être associés à une méthodologie d’utilisation qui précise en particulier le domaine d’application. Ce champ d’application doit être suffisamment large pour couvrir l’impact de projectiles de tailles très diverses.

Troisièmement, les outils de prédiction doivent s’intégrer dans le logiciel éléments finis Europlexus, code d’expertise industriel développé conjointement par le CEA (Commissariat à l’Energie Atomique, Saclay, France), le JRC (Joint Research Centre of the European Commission, Ispra, Italie), et d’autres partenaires comme EDF, Samtech et SNECMA [Europlexus 2006]. Les développements doivent donc satisfaire aux exigences de qualité propres à un code industriel.

Page 13: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Introduction

13

Plan

Le double objectif de la thèse – représenter d’une part la perforation au droit de l’impact et l’ébranlement dans l’ensemble de la structure – conduit à organiser ce mémoire selon le plan suivant.

Dans une première partie, nous examinons les phénomènes liés à la chute d’avion en cherchant à les caractériser et à les expliquer. Nous commençons donc par définir le problème en caractérisant le type d’impact que l’on considère, à savoir les chocs mous. Si on peut considérer que les phénomènes globaux de comportement vibratoire de la structure sont génériques et ne nécessitent pas d’étude particulière, en revanche les phénomènes locaux aboutissant à la perforation sont à analyser plus en détail en raison de la spécificité du processus de ruine caractérisé par un cône de rupture. La phénoménologie ayant été établie, le choix d’une stratégie de modélisation en découle naturellement. Une réponse aux exigences du cahier des charges fixé à l’avance est ainsi proposée : deux outils sont développés, une loi de comportement globale et un critère de perforation.

La seconde partie décrit le premier de ces outils que nous avons mis au point : un modèle global de comportement pour plaques en béton armé appelé GLRC (GLobal Reinforced Concrete) [Kœchlin et Potapov 2007]. Alternative aux lois 3D très coûteuses numériquement, cette loi de comportement en variables globales (effort membranaire et moment), destinée à être représentative de la dissipation d’énergie due à la fissuration du béton et à la plastification des aciers, repose sur un modèle basé à la fois sur la théorie de l’endommagement et sur celle de la plasticité. Après avoir défini les hypothèses et les bases thermodynamiques de la loi de comportement dans le chapitre 4, nous développons un critère de plasticité pour plaques sollicitées en membrane et en flexion au chapitre 5. Le modèle GLRC ayant été complètement défini, le chapitre 6 permet d’expliciter les grands lignes de l’algorithme utilisé pour l’intégrer dans le logiciel Europlexus. Enfin le chapitre 7 décrit la validation du modèle à l’aide de trois cas-tests.

La troisième partie est consacrée au second outil développé au cours de la thèse et nécessaire à l’étude de la zone directement impactée : un critère de perforation pour plaques en béton armé. Ce critère est un critère statique, mais il est destiné à être appliqué aux efforts généralisés (effort membranaire, effort tranchant et moment) issus d’un calcul dynamique. Le problème d’analyse limite est posé au chapitre 8. Sa résolution dans le cas d’une poutre, donnée au chapitre 9, permet d’établir un critère poutre entièrement analytique. Le cas d’une dalle est traité dans le chapitre 10, pour aboutir à un critère mi-analytique, mi-numérique qui est validé en statique. Son application à la dynamique pour la perforation est analysée au chapitre 11. Ce dernier chapitre de la thèse, en combinant l’utilisation du modèle GLRC et du critère pour retrouver les résultats des essais Meppen d’impact de projectiles déformables sur dalle [Jonas et al. 1979], fait ainsi la synthèse de l’ensemble de notre travail et en est l’aboutissement.

Page 14: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

14

Page 15: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

15

Partie I Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

La chute d’avion sur une structure de protection en béton armé est un phénomène complexe. Tout d’abord parce qu’il s’agit d’un choc, c’est-à-dire d’un contact violent entre deux corps, phénomène dynamique toujours difficile à étudier en raison de sa brièveté. Mais également à cause de la nature très différente des deux solides : l’un est une structure composite de géométrie variable, relativement molle, se déplaçant à vitesse élevée, et non dimensionnée pour résister à l’écrasement, l’autre est une structure surfacique courbe en béton armé, avec toute la complexité que représente l’hétérogénéité et le caractère composite d’un tel matériau dans son association de l’acier et du béton. L’intensité des actions mécaniques en jeu dans le choc implique une sollicitation très forte de chacune des deux structures. Il en résulte des phénomènes mécaniques non-linéaires aussi variés dans le projectile (flambage, grands déplacements, autocontact) que dans la cible (multifissuration, plasticité, endommagement, perforation, vibrations).

Cependant tous ces phénomènes ne sont pas exclusifs de notre problème d’impact d’un projectile déformable. Le séisme par exemple engendre, d’une manière analogue à l’impact, des vibrations dans les bâtiments en béton armé, ainsi que de la fissuration et de l’endommagement. De même aussi, une plaque en béton armé peut être perforée par un impact balistique de missile.

Par conséquent il convient au début de ce mémoire de caractériser de manière précise notre problème d’impact par rapport aux autres types de chocs de projectiles sur des boucliers de protection, comme les impacts de rochers sur des dalles pare-blocs ou les chocs de bateaux sur des structures offshore. Nous montrerons en quoi l’impact d’un avion se distingue d’un problème sismique ou d’un impact de missile militaire. Au cours de cette caractérisation nous verrons que pour le type de choc considéré, dit choc mou, le comportement du projectile peut être découplé de celui de la cible. Tout ceci fait l’objet de notre premier chapitre.

Le problème ayant été défini, il nous faut ensuite étudier la phénoménologie. Puisqu’il a été montré que la réponse de la cible pouvait être découplée de celle du projectile, nous ne nous intéressons dans la suite qu’à la cible. Or pour une telle structure soumise à un impact, les phénomènes sont différents à proximité de la zone d’impact et dans le reste de la structure. Si les non-linéarités observées loin du point d’impact (ondes de flexion produisant la fissuration du béton et la plastification des aciers) correspondent à un comportement qu’il n’est pas difficile de caractériser, en revanche les phénomènes locaux, à savoir la multifissuration, l’écaillage et la perforation sous la zone d’impact sont beaucoup plus difficiles à appréhender. Le deuxième chapitre analyse donc spécifiquement les phénomènes liés à la perforation lors des chocs mous.

Page 16: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

16

Comme l’objectif de ce travail est de fournir des outils de calcul permettant de simuler le comportement de la structure sous la chute d’avion, une stratégie de modélisation des différents phénomènes caractérisés précédemment doit être définie. Le troisième chapitre nous permet donc de définir un cahier des charges en justifiant la nécessité de représenter la structure entière et pas seulement le comportement local de la plaque sous le projectile. Pour répondre aux différentes exigences de modélisation, la littérature propose plusieurs solutions. Nous en dressons la liste, et justifions le choix d’une modélisation globale en variables généralisées (effort normal, moment, effort tranchant) avec d’une part un modèle de comportement pour plaques en béton armé et d’autre part un critère de perforation, qui font l’objet respectivement des parties II et III de ce mémoire.

Pour résumer, cette première partie comporte trois chapitres :

Chapitre 1 : Caractérisation de l’impact étudié où nous définissons le problème de la chute d’avion parmi les différents types de chocs et de dynamiques ;

Chapitre 2 : Le processus de perforation pour les chocs mous, où la phénoménologie du comportement local est étudiée ;

Chapitre 3 : Choix de modélisation, où sont explicitées les raisons d’une stratégie de simulation basée d’une part sur un modèle global pour plaques et d’autre part sur un critère de perforation.

Page 17: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 1 : Caractérisation de l’impact étudié

17

Chapitre 1

Caractérisation de l’impact étudié

Equation Chapter 1 Section 1

Qu’il s’agisse de civilisation, de culture, d’émotions, ou de particules élémentaires à haute énergie, on appelle choc une interaction violente entre deux entités distinctes, qui provoque des variations brutales dans leur comportement. En mécanique, on parle indifféremment de chocs ou d’impact dès qu’un solide vient en frapper un autre. Or lorsque deux corps se heurtent de manière violente, on constate que des actions mécaniques (en particulier des forces) de forte amplitude sont générées pendant un temps très court, les vitesses (voire la température) variant brutalement [Brossard 1997]. D’où la difficulté de mesurer ces actions mécaniques pendant le choc lui-même.

Ceci a conduit les mécaniciens à examiner de manière spécifique ces phénomènes de chocs et à les classer tout d’abord en fonction de ce qu’il était possible d’observer, à savoir l’état avant le choc, et après le choc : vitesse initiale, rigidité, rebond, écrasement des corps, le fait qu’un des deux corps pénètre ou traverse l’autre.

Puis, avec l’amélioration des méthodes expérimentales (barres de Hopkinson [Hopkinson 1914]), il a été possible de connaître un peu mieux le comportement des matériaux en dynamique, et donc de comprendre ce qui se passait au cours des brefs instants d’interaction entre les solides. On en a déduit un classement des phénomènes en fonction de leur caractère dynamique.

Dans ce chapitre, pour définir proprement le problème de la chute d’avion, on s’attache donc à situer l’impact d’avion à l’aide des différentes classifications de chocs. Comme les classifications existantes ne sont ni suffisamment précises, ni suffisamment générales, car elles ne couvrent que certaines catégories d’impacts, nous sommes amenés à proposer une nouvelle caractérisation des chocs. Cette catégorisation conduit naturellement à sélectionner, parmi tous les essais d’impact sur plaques en béton armé, ceux qui s’approchent le plus de notre problème à étudier.

1.1 Choc mou (soft impact) La chute d’avion, qu’il soit militaire ou civil, est qualifiée habituellement de choc mou. Cette appellation vient de l’absence de rebond de l’avion contre la paroi en béton, constatée sur les essais effectués en grandeur nature [Sugano 1993-c] : l’avion se déforme et s’écrase complètement contre la structure en béton armé qui ne subit que de faibles déplacements.

Dans ce paragraphe, on cherche donc à répondre aux questions suivantes :

Existe-t-il une définition précise des chocs mous dans la littérature ?

Comment ces chocs mous se positionnent par rapport aux autres types de chocs (chocs durs, chocs élastiques) ?

Ces définitions et ces classifications ont-elles des conséquences sur le choix d’une méthode de calcul pour simuler le comportement de la cible soumise à l’impact ?

Page 18: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

18

1.1.1 Choc mou et choc élastique Dans le cas de deux masses ponctuelles qui s’entrechoquent, on définit habituellement un choc mou par opposition au choc élastique [Brossard 1997]. On parle de choc mou lorsque les deux corps se lient l’un à l’autre pour ne plus former qu’un seul solide et repartir avec la même vitesse, sans qu’il n’y ait aucun rebond. Au contraire, lorsqu’il y a un rebond parfait sans dissipation d’énergie, le choc est qualifié d’élastique (Figure 1.1). Le choc élastique est parfois improprement appelé choc dur.

Choc élastique Choc mou

Figure 1.1 : Chocs mou et élastique de masses ponctuelles

Ces deux cas sont les deux configurations basiques de la théorie des chocs, telles que Huygens a réussi à les traiter dès 1652 pour des trajectoires non-obliques (chocs directs) [Huygens 1652-c, 1703], en contestant et corrigeant au passage les formules erronées de Descartes [Huygens 1652-a,b, Descartes 1644]. Celui-ci avait mis en évidence la conservation de la quantité de mouvement. Cette propriété, équivalente au principe fondamental de la dynamique, permet de s’affranchir habilement de l’écriture des forces. En effet, ce n’est pas en premier lieu les forces de chocs qui nous intéressent. D’ailleurs, elles sont difficiles à évaluer à cause de leur brièveté et de leur intensité. Pour un choc direct, la conservation de la quantité de mouvement s’écrit donc de manière algébrique :

( ) ( ) ( ) ( )1 1 2 2 1 1 2 2m v t m v t m v t' m v t'+ = + (1.1)

Mais dans le cas du choc élastique, cela ne suffit pas à déterminer les vitesses après impact. Huygens introduisit la conservation, non plus seulement de mv, mais de mv2, ce qui revient à écrire la conservation de l’énergie cinétique :

( ) ( ) ( ) ( )2 2 2 21 1 2 2 1 1 2 2

1 1 1 1m v t m v t m v t' m v t'2 2 2 2

+ = + (1.2)

Le choc mou est un cas particulier de choc anélastique, tout comme le choc élastique est un cas particulier de

choc avec rebond. Le choc mou et le choc élastique sont deux cas extrêmes de choc, et sont, dans ce sens, opposés.

v1(t’)

m1 m2

m1 m2

v2(t)

v2(t’)

v1(t)

m1 + m2 v1+2(t’)

m1 m2 v2(t)v1(t)

Page 19: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 1 : Caractérisation de l’impact étudié

19

Il est alors possible d’obtenir les vitesses au temps t' :

( ) ( ) [ ] ( ) ( ) ( ) ( )

( ) ( ) [ ] ( ) ( ) ( ) ( )

2 2 1 2 1 1 21 1

11 2

2

1 1 1 2 2 1 22 2

21 2

1

2m v t m m v t v t v tv t' v t 2 mm m 1+

m2m v t m m v t v t v t

v t' v t 2 mm m 1m

+ − −= = − +

− − − = = + + +

(1.3)

Dans le cas du choc mou, la conservation de la quantité de mouvement (1.1) donne directement la vitesse finale des deux corps :

( ) ( ) ( )1 1 2 21+2

1 2

m v t m v tv t'

m m+

=+

(1.4)

Si on fait le bilan de l’énergie dissipée au cours du choc mou, on obtient :

( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) 22 2 2 1 21 1 2 2 1 2 1+2 1 2

1 2

m m1 1 1 1m v t m v t m m v t' v t v t 02 2 2 2 m m

+ − + = − ≥ + (1.5)

Il y a bien dissipation d’énergie. Mais en réalité, il existe beaucoup d’autres types de choc où il y a dissipation d’énergie. Ainsi, pour traiter tous les cas intermédiaires entre choc élastique et choc mou, il est possible d’introduire un coefficient de restitution d’énergie défini par :

( ) ( )( ) ( )

1 2

1 2

v t' v t'v t v t

ε−

= −−

(1.6)

Les chocs mous ainsi que les chocs élastiques sont évidemment des cas particuliers où le coefficient de restitution prend respectivement les valeurs 0 et 1. L’énergie dissipée s’écrit alors :

( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) 22 2 2 2 21 21 1 2 2 1 1 1 2 1 2

1 2

m m1 1 1 1 1m v t m v t m v t' m v t' 1 v t v t 02 2 2 2 2 m m

ε + − − = − − ≥ + (1.7)

On peut voir que le choc mou correspond à l’impact où l’énergie dissipée est maximale.

Cette définition basique des chocs mous peut être appliquée aux impacts d’avion. Elle n’est cependant pas assez précise pour caractériser complètement de tels impacts. En effet cette approche ne permet pas de savoir en quoi les caractéristiques des matériaux influent sur le type de choc ni de distinguer les chocs mous des chocs durs, que l’on définirait intuitivement comme un impact où un corps très résistant percute à forte vitesse l’autre corps et l’endommage sans être lui-même détérioré. Autant le choc élastique est clairement défini, autant pour le choc mou, il reste à préciser où se dissipe l’énergie et si les différents corps sont endommagés ou non.

1.1.2 Choc mou, déplacements et force d’impact Dans la distinction qui vient d’être explicitée entre choc élastique et choc mou, les deux corps qui entrent en contact jouent un rôle symétrique. Or si on considère un impact d’avion sur une structure en béton ou plus généralement un impact de projectile déformable sur une structure rigide, il est évident qu’il n’y a pas symétrie dans le choc. Pas de symétrie parce qu’un des corps est immobile et l’autre en mouvement, pas de symétrie non plus si on examine les matériaux, la nature des structures ou leur mode de ruine. Pas de symétrie enfin parce que du point de vue de celui qui cherche à garder intègre sa structure en béton, le sort de l’avion lui importe moins que la ruine du béton armé soumis à l’impact.

Dans la suite de ce document, on désigne donc naturellement l’avion comme le projectile et la structure en béton armé comme la cible immobile juste avant l’impact.

Page 20: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

20

Cette dissymétrie de comportement entre le projectile et la cible au cours de l’impact conduit à une nouvelle caractérisation des chocs mous, proposée par Eibl [Eibl 1987] et reprise ensuite par le Comité Euro-International du Béton [CEB 1988]. Cette classification est basée sur une modélisation avec des systèmes de masse-ressort (voir Figure 1.2).

instant t0=0

instant t

Figure 1.2 : Modélisation d’un choc avec systèmes masse-ressort

Soient deux solides rigides de masses m1 et m2, et k1 et k2 les raideurs des ressorts associées. Les équations différentielles décrivant le mouvement s’expriment ainsi :

( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )

1 1 1 1 2

2 2 1 1 2 2 2

m x t k x t x t 0

m x t k x t x t +k x t 0

+ − =

− − = (1.8)

Si le déplacement de la cible est faible par rapport au projectile, c’est à dire si x1(t) >> x2(t), alors, en posant :

( ) ( )1 1F t k x t= (1.9)

les équations du mouvement s’écrivent :

( ) ( )( ) ( ) ( )

1 1 1 1

2 2 2 2

m x t k x t 0

m x t +k x t F t

+ =

= (1.10)

Le problème est maintenant découplé : il est possible de résoudre d’abord la première équation qui est indépendante de x2, d’en déduire F(t) et enfin de calculer la réponse de la cible à partir de la seconde équation. Ce cas est appelé choc mou (‘soft impact’ en anglais). Par contraste, les cas où les deux équations ne peuvent pas être découplées sont qualifiés par Eibl de chocs durs [Eibl 1987].

On peut noter au passage qu’il n’a pas été fait d’hypothèse sur la linéarité des ressorts. Cette approche est par conséquent tout à fait applicable aux cas de matériaux au comportement non-linéaire.

Des essais en grandeur réelle ont montré que lors d’un impact d’avion sur une structure en béton armé, le projectile s’écrase complètement et les déplacements et déformations de la cible sont faibles comparés aux déplacements et déformations de l’avion [Sugano et al. 1993-c].

En accord avec la définition des chocs mous donnée par Eibl, cette constatation nous permet de traiter le problème de manière découplée, en commençant par estimer la force d’impact et ensuite en procédant à un calcul de toute la structure en béton armé soumise à cette force d’impact.

Pour déterminer la force d’impact d’un avion, on utilise classiquement l’approche de Riera [Riera 1968] qui a été validée par des essais [Sugano et al. 1993-c] et des calculs [Wolf et al. 1976].

m1 m2

x1(t) x2(t)

k2 k1

k1 k2

Page 21: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 1 : Caractérisation de l’impact étudié

21

Figure 1.3 : Modélisation d’un choc mou : détermination de la force d’impact

Pour un projectile ayant une force de flambage Pf et une masse linéique µ s’écrasant perpendiculairement sur une cible rigide à une vitesse V, Riera explique que la force d’impact F peut se décomposer en deux termes : l’un venant du flambage, l’autre de l’effet inertiel de la masse.

( ) ( )( ) ( )( ) ( )2fF t P x t x t V tµ= + (1.11)

avec x(t) la distance écrasée (en partant du nez du projectile).

En vertu du découplage du système (1.10), cette force peut être ensuite appliquée à la structure en béton armé dans un calcul éléments finis en dynamique transitoire.

Des expressions plus complètes de la force d’impact ont été proposées : voir [Abbas et al. 1993, Sugano et al. 1993-c] qui présentent de bons panoramas des résultats obtenus depuis ceux de Riera en 1968. Par exemple, Sugano relève la formulation suivante :

( ) ( )( ) ( )( ) ( )2fF t P x t x t V tαµ= + (1.12)

où se trouve un coefficient α dit de « masse effective sur l’impact » (coefficient of effective mass on impact) dont on peut démontrer qu’il est compris entre 0,5 et 1. Les essais entrepris par Sugano l’ont identifié à 0,9 sur un impact de F-4 Phantom. La formule (1.11) donnée par Riera est donc conservative.

Abbas et Sugano reprennent également une formulation corrigée pour tenir compte d’un éventuel recul de la cible [Abbas et al. 1993, Sugano et al. 1993-c]. Ainsi, si on définit la force d’impact par :

( ) ( ) ( )1 1 2F t k x t x t = − (1.13)

sa valeur au cours du temps peut être trouvée en résolvant le système masse-ressort couplé (1.8). Puis, comme dans le cas où les déplacements de la cible sont négligeables, il est possible d’appliquer cette force à un modèle élément fini de la structure en béton. Il reste à vérifier que les déplacements de la cible au droit de l’impact sont analogues à ceux trouvés avec le système masse ressort. Dans un tel processus de calcul chaîné, on constate que la force varie peu en fonction du recul de la cible (ou de sa rigidité), sachant que le projectile est nettement plus souple que la cible. En revanche l’énergie transmise à la structure impactée va fortement dépendre de la raideur de la cible.

x(t)

t=0 t>0

cible

projectile V(0)

F(t)

V(t)

Page 22: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

22

1.1.3 Caractérisation unifiée des chocs Si la définition des chocs mous par Eibl et le CEB est intéressante car elle est associée à une méthode d’étude de ce type d’impact (découplage entre le calcul de la force par la formule de Riera et le calcul de la structure impactée), elle pose problème en revanche pour ce qui concerne la distinction d’avec les chocs durs. En effet, la comparaison des déplacements de la cible par rapport au projectile est pratique parce qu’elle induit un découplage des phénomènes ; elle correspond aussi à la définition intuitive du choc mou : un projectile mou qui s’écrase sur une cible rigide. En revanche une telle classification ne permet pas de bien intégrer les chocs durs où un projectile rigide traverse une cible moins solide, ni les chocs où le projectile s’écrase contre une cible souple mais résistante. Dans le premier de ces deux cas, c’est la nature de la modélisation avec des masses et des ressorts qui est un peu limitative lorsque le projectile pénètre la cible. Dans le second cas, le choc est qualifié de dur par Eibl, mais il relève intuitivement plutôt des chocs mous.

Il conviendrait donc d’avoir un critère de distinction entre chocs mou et dur pas uniquement sur les déplacements ou sur la rigidité, mais également sur les seuils de rupture des matériaux. Pour pouvoir analyser les différents essais d’impact disponibles dans la littérature, quels que soient leurs paramètres, leur géométrie et leur comportement, nous proposons ici un nouveau critère permettant de caractériser tous types de chocs : avec rebond, durs, mous.

L’idée est de comparer le seuil de rupture de la cible σc avec celui du projectile σp et de vérifier si la cible va résister à l’impact. Si la cible résiste et que c’est le projectile qui s’écrase, on considère que c’est un choc mou, et lorsque le projectile pénètre la cible, c’est un choc dur.

Si on réécrit la formule de Riera (1.11) en contrainte à l’instant initial du choc, lorsque la vitesse du projectile qui s’écrase vaut V0, alors la cible est soumise à une contrainte qui a deux composantes, l’une venant du matériau, l’autre de la vitesse :

20p pVσ σ ρ= + (1.14)

avec :

σp : la contrainte de rupture du projectile ;

ρp : la masse volumique du projectile ;

V0 : la vitesse du projectile.

Notons également :

σc : la contrainte de rupture du matériau qui constitue la cible.

La limite entre choc dur et choc mou s’établit lorsque :

20p p cVσ ρ σ+ = (1.15)

c’est-à-dire :

2

0 1 p p

c c

Vσ ρσ σ

+ = (1.16)

Page 23: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 1 : Caractérisation de l’impact étudié

23

Remarquons qu’il apparaît un nombre analogue à celui que Johnson utilise pour déterminer la sévérité d’un impact, à savoir le nombre d’endommagement de Johnson ΦJ (en anglais : Johnson’s Damage Number) défini par la formule suivante [Corbett et al. 1996] :

2

0cJ

c

Vρσ

Φ = (1.17)

avec :

ρc : la masse volumique de la cible.

L’analogie peut être également faite avec le facteur d’impact I introduit par Haldar [Haldar et Hamieh 1984] et discuté par Riera [Riera 1989] :

2

03

c

NmVId σ

= (1.18)

avec :

N : paramètre sans dimension représentant l’influence de la forme du nez du projectile ;

m : masse du projectile ;

d : diamètre du projectile.

L’équation (1.16) nous donne une limite entre choc dur et choc mou lorsque le projectile s’écrase, car la formule de Riera n’est valable que dans ce cas-là.

Lorsque le projectile ne s’écrase pas mais qu’il rebondit contre la cible, le problème nécessite une nouvelle analyse. Pour un système masse-ressort (masse m, raideur k) où la masse a une vitesse initiale V0, la force maximale dans le ressort s’élève à 0 kmV . Par analogie, la contrainte maximale dans le projectile peut s’écrire : 0 p pV E ρ où Ep est le module d’Young du projectile. La condition

d’écrasement (et donc la condition d’application de la formule de Riera) revient à dire que la contrainte maximale est supérieure à la contrainte de rupture du projectile. La condition d’écrasement s’écrit donc :

0 p p pV E ρ σ≥ (1.19)

En définissant la déformation de rupture εp du projectile comme :

pp

pEσ

ε = (1.20)

la condition d’écrasement (1.19) peut alors s’exprimer :

2

01 p p

p c c

Vρ σε σ σ

≥ (1.21)

Toujours en partant de la contrainte maximale dans le projectile, mais en s’intéressant cette fois-ci à la cible, il est possible de déterminer une limite entre les chocs élastiques avec rebond et les chocs non-élastiques avec rebond. Cette limite traduit le fait que le contrainte maximale dans le projectile est appliquée à la cible et n’atteint pas le seuil de rupture dans la cible :

0 p p cV E ρ σ≤ (1.22)

En utilisant la déformation de rupture εp du projectile, cette dernière inégalité (1.22) se traduit par :

2

01 p c

p c p

Vρ σε σ σ

≤ (1.23)

Page 24: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

24

Pour résumer, nous avons donc obtenu un domaine des chocs avec rebond (équation (1.21)), pour lesquels on peut distinguer les chocs purement élastiques des chocs inélastiques (équation (1.23)). S’il n’y a pas de rebond, une frontière entre chocs durs et chocs mous a été déterminée (équation (1.16)). On en déduit une représentation graphique des différents types de choc (Figure 1.4).

Figure 1.4 : Classification des chocs (à εp constant)

Cette classification nécessite un certain nombre d’observations.

Cette méthode de comparaison permet de confronter des essais à échelles différentes. La distinction entre choc dur et choc mou (équation (1.16)) est bien plus générale que les

caractérisations des chocs avec rebond (équations (1.21) et (1.23)). En effet, ces dernières dépendent de la déformation de rupture εp du projectile qui est un paramètre matériau. Par conséquent la zone des chocs avec rebond est en réalité difficile à définir. Dans la suite, on considérera simplement qu’il existe un domaine où le projectile rebondit contre la cible lorsque la vitesse d’impact est faible ; dans ce cas, la distinction entre chocs durs et chocs mous n’a plus de sens.

Lorsque la vitesse est élevée, on a uniquement des chocs durs. C’est ce qui est généralement constaté lorsqu’on étudie les chocs [Bischoff et Perry 1991].

La frontière entre chocs durs et mous est la limite d’une modélisation avec l’emploi d’une force d’impact. En effet, si le matériau cible casse au droit de l’impact sous l’effet du choc, on imagine bien qu’il est difficile de savoir où appliquer la force d’impact dès qu’il y a eu rupture du matériau directement sollicité par le projectile. Il est donc nécessaire soit de faire un calcul simultané du projectile et de la cible avec une modélisation du contact entre les deux objets, soit d’utiliser des formules globales recalées sur des essais et qui prédisent la profondeur de pénétration ou la perforation à partir de la vitesse d’impact, de l’épaisseur et de la résistance de la cible.

L’approche proposée semble à première vue très locale : elle ne tient pas du tout compte ni de la géométrie du projectile, ni des effets de structure qui pourraient en découler. Mais elle reste valable si le mode de ruine principal du projectile est un phénomène de structure comme en témoigne l’application de (1.14) par Riera qui utilise une force de flambage comme effort de rupture, et une masse volumique tenant compte des vides de la structure. Ceci nous autorise donc à utiliser notre approche pour comparer des impacts avec des projectiles qui ont des modes de ruine très différents. Autrement dit, malgré une expression à partir de contraintes qui peut faire penser à une analyse locale, notre classification est capable de traiter le choc de structures.

La géométrie de la cible (en particulier son épaisseur) ne joue aucun rôle non plus dans cette classification, puisqu’elle établit simplement la frontière entre ruine locale et ruine globale. En effet, à la contrainte de rupture σc de la cible peut être associé un mode de ruine que l’on

Choc dur

Choc mou

1

10

20p

c

Vρσ

p

c

σσ

Choc non-élastique avec rebond

Choc élastique avec rebond

Page 25: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 1 : Caractérisation de l’impact étudié

25

qualifiera de local (même si ce qualificatif est assez relatif). Si c’est un choc dur, cela signifie que la ruine est locale ; si c’est un choc mou, alors il n’y a pas de ruine locale, et cela ouvre la possibilité d’une ruine liée à des effets globaux de structure.

Avec cette analyse, la caractérisation de choc est a priori dissociée de la perforation. Un choc mou, tout comme un choc dur, peut être perforant ou non-perforant.

Notre approche ne tient pas compte de l’influence que peut avoir la vitesse, ou plutôt le taux de déformation ε sur les contraintes limites. Mais, tout comme Johnson qui utilise dans (1.17) une contrainte limite dynamique ( )c cσ ε pour prendre en compte cet effet, il est possible de transformer l’équation (1.16) qui délimite chocs durs et chocs mous en ceci :

( )( ) ( )

20 1p p p

c c c c

Vσ ε ρσ ε σ ε

+ = (1.24)

Cette dernière remarque nous amène à nous poser la question de l’influence du taux de déformation sur le comportement du béton pour le type d’impact que l’on considère.

1.2 Une dynamique pas si rapide Un phénomène caractéristique de la dynamique est la variabilité de comportement des matériaux selon la vitesse de sollicitation (en anglais : strain rate effect). Certes, lorsqu’on évoque ce sujet, il existe toujours le débat entre d’un côté ceux qui estiment que c’est un phénomène qui vient uniquement du comportement du matériau et de l’autre côté, les partisans d’une explication uniquement par l’inertie. Quelle que soit la réponse apportée à cette question, il n’en demeure pas moins que le domaine de la dynamique peut être séparé entre dynamique lente et dynamique rapide en fonction des vitesses de déformation observées. En dynamique rapide, c’est-à-dire lorsque le taux de déformation est élevé, le comportement des matériaux est très sensible à la vitesse de déformation, ce qui n’est pas le cas en dynamique lente.

Après avoir établi dans le paragraphe précédent la nature du choc étudié il est donc nécessaire de préciser maintenant dans quel domaine de la dynamique on se situe. En effet, il nous faut savoir s’il est nécessaire d’utiliser des lois de comportement dépendant du taux de déformation ou si les lois de comportements statiques suffisent.

1.2.1 Evaluation du taux de déformation Une manière simple d’évaluer l’ordre de grandeur des vitesses de déformation au cours d’un impact d’avion est de partir de la relation en élasticité unidimensionnelle dérivée par rapport au temps :

Eσ ε= (1.25)

avec le point indiquant la dérivée par rapport au temps, et :

E : module d’Young de la cible ;

σ : contrainte ;

ε : déformation.

Cette équation (1.25) nous montre qu’au droit de la surface d’impact, le taux de déformation dépend de σ qui est directement lié à la vitesse de chargement . En partant des données fournies par Abbas [Abbas et al. 1993], il est possible de donner un ordre de grandeur des taux de déformation pour une cible de module d’Young à 35000 MPa (Tableau 1.1). Les avions militaires (Phantom F4 et FB-111) génèrent des vitesses de déformation dix fois plus élevées que l’avion civil (B707-320), mais qui restent inférieures à 10-1 s-1.

Précisons que la vitesse de déformation ainsi estimée est relative à un mouvement de structure, modélisé

comme tel avec un chargement représenté par une force imposée (au sens de Saint-Venant) qui est en fait le résultat de l’interaction entre le projectile et le béton.

Page 26: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

26

Type d’avion B707-320 Phantom F4 FB-111

Vitesse d’impact m/s 103 215 103

Vitesse de chargement dF/dt maximum MN/s 6000 11000 12000

Surface d’impact m2 28 7 7

Vitesse de déformation dε/dt s-1 0,006 0,045 0,049

Tableau 1.1 : Ordre de grandeur des vitesses de chargement et de déformation pour différents impacts d’aéronef

1.2.2 Comparaison avec d’autres phénomènes Le taux de déformation déterminé dans le paragraphe précédant nous permet de comparer la chute d’avion à d’autres phénomènes dynamiques. Les classifications établies en fonction de la vitesse de déformation sont présentes en nombre dans la littérature (par exemple : [Zukas et al. 1982, CEB 1988, Bischoff et Perry 1991, Miyamoto et King 1994]). Comme chaque auteur a sa vision personnelle des choses et présente des taux de déformation différents pour le domaine du séisme, du fluage ou des chocs durs, on a essayé de faire une rapide synthèse sur le schéma suivant en séparant ce qui relevait du chargement de ce qui était lié aux phénomènes physiques (Figure 1.5).

L’ordre de grandeur des vitesses de déformation trouvées pour les impacts d’avion place ce genre de choc dans la catégorie des taux de déformation intermédiaires (en anglais : intermediate strain rate). Il ne s’agit en tous cas pas de dynamique hyper rapide, comme la balistique, les impacts de missiles ou les chocs à hyper vitesses, ni non plus de dynamique lente comme le séisme.

Figure 1.5 : Classification en fonction du taux de déformation

10-8 10-6 10-4 10-2 1 10+2 10+4 10+6 ε

constant quasistatique dynamique Type de chargement

Exemple de sollicitation

forces d’inerties importantes forces d’inerties négligeables Forces d’inerties

Phénomènes

séisme

explosion

crash auto trafic routier

choc mou

choc dur

choc à hyper-vitesse

battage de pieu

fluage relaxation

comportement statique

résonance ondes de chocs ondes élasto-plastiques

Page 27: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 1 : Caractérisation de l’impact étudié

27

1.2.3 Comportement indépendant du taux de déformation Si on observe les résultats expérimentaux compilés par Bishoff et Perry qui montrent l’influence du taux de déformation sur la résistance en compression du béton [Bischoff et Perry 1991] , la distinction est habituellement faite entre le domaine où -110 sε < , qui correspond à un comportement faiblement dépendant du taux de déformation et la zone -110 sε ≥ , où la limite en compression varie très fortement en fonction du taux de déformation. Les valeurs de ε trouvées pour les cas d’impact d’avion (voir Tableau 1.1) montrent qu’il n’est pas nécessaire d’utiliser des lois de comportement dépendant du taux de déformation pour modéliser la structure en béton. Un modèle de béton tel que celui de Holmquist, Johnson et Cook [Holmquist et al. 1993], quoique très performant pour des impacts de missiles, serait complètement inutile dans notre cas, l’effet du taux de déformation n’étant pas le phénomène le plus important pour un impact d’avion. Les lois statiques sont par conséquent amplement suffisantes.

On pourrait objecter que la limite en compression peut être malgré tout différente d’environ 50% par rapport à sa valeur statique. Mais négliger cette augmentation de la résistance du béton va dans le sens du conservatisme pour les calculs de la structure à dimensionner ou à vérifier.

Figure 1.6 : Résistance en compression du béton en fonction du taux de déformation

[Bischoff et Perry 1991]

Il est à noter que ces essais ont été effectués à vitesse de déformation constante. L’extrapolation à un impact

réel où la vitesse de déformation varie au cours du temps est à faire avec prudence.

Page 28: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

28

1.3 Essais de référence Les impacts de type chute d’avion ont été caractérisés dans les paragraphes précédents, tant sur le plan de la nature du choc que sur le plan de la dynamique. Le problème étant clairement défini, il est important d’avoir des essais d’impact à disposition qui nous permettent dans un premier temps de comprendre les différents phénomènes de dégradation des plaques et les mécanismes qui conduisent à la perforation, et dans un second temps de valider la modélisation choisie en confrontant les résultats numériques aux résultats expérimentaux. Dans ce paragraphe, nous commençons par présenter un panorama des essais d’impact disponibles dans la littérature. Parmi tous ces programmes expérimentaux, nous déterminons ensuite lesquels sont les plus pertinents pour notre étude.

1.3.1 Essais d’impact sur dalles en béton armé L’histoire des essais d’impact sur des plaques en béton armé est présentée succinctement en introduction dans [Sugano et al. 1993-a]. Les premiers essais ont été effectués dès la première moitié du XXe siècle avec des projectiles ‘rigides’ et ‘durs’, relativement légers et à haute vitesse. En effet seuls les projectiles militaires (balles, obus, missiles,…) étaient concernés. Les premières formules de perforation empiriques (formule de Petry, formule NDRC… [Li et al. 2005]) en ont été déduites [Kennedy 1976].

A partir des années 1970, ce ne sont plus seulement les militaires, mais l’industrie nucléaire qui s’est intéressée à la perforation. Il s’agissait de connaître le comportement des enceintes de confinement soumises à l’impact de projectiles éjectés par la turbine ou l’alternateur [Woodfin et Sliter 1981, Romander et Sliter 1984], et surtout à l’impact d’avion. Des essais ont alors été entrepris avec des projectiles plus lourds et des vitesses plus lentes ; et d’autres formules ont été établies (formule CEA-EDF, formule de Degen, formule de Chang… [Li et al. 2005]). Le domaine de recherche s’est étendu des projectiles ‘rigides’ aux projectiles dits ‘mous’ ou ‘déformables’ (essais Alderson [Alderson et al. 1977], essais Meppen [Jonas et al. 1979]), ces deux champs d’investigation restant cloisonnés.

Enfin la troisième phase d’expérimentation, à partir du milieu des années 1980, a confirmé et affiné les résultats précédents en étudiant des projectiles plus représentatifs des avions : ont été mis en œuvre des essais en taille réelle de moteurs d’avion [Sugano et al. 1993-a,b]. L’apogée de la recherche expérimentale sur la chute d’avion a été atteinte en 1988 lors de l’essai avec un véritable avion aux SANDIA National Laboratories, à Albuquerque, au Nouveau Mexique [Sugano et al. 1993-c]. Pendant cette période, quelques programmes de recherches se sont également intéressés à la transition entre ‘chocs durs’ et ‘chocs mous’ (selon une qualification intuitive) [Kojima 1991, Ohno et al. 1992]. Par la suite, le rythme des essais a diminué, en partie en raison des possibilités grandissantes offertes par la simulation et le calcul numérique.

Pour les chocs traditionnellement qualifiés de ‘durs’ ou avec projectile ‘rigide’ (c’est-à-dire sans écrasement du projectile), une liste critique très complète des formules de perforation et d’écaillage est donnée par Li [Li et al. 2005]. A partir des références fournies par cet auteur, il est possible de retrouver tous les essais qui ont servis à établir ces formules. Dans la suite, nous ne présentons que quelques séries caractéristiques de ces tests d’impact sur dalle (impacts perforants ou non) : sont retenus les essais qui ont compté dans l’histoire de l’étude des impacts et de la perforation de dalles en béton armé, que ce soit par leur envergure ou par la qualité de leur résultat et donc l’influence qu’ils ont eu dans la communauté scientifique (essais CEA-EDF [Berriaud et al. 1978]).

Puisque les vingt dernières années de recherche ont montré que même les moteurs s’écrasent comme des projectiles ‘déformables’ [Sugano et al. 1993-a] et que tout choc d’avion est un ‘choc mou’, selon la définition d’Eibl où le projectile s’écrase complètement et la cible ne subit que de faibles déplacements (voir §1.1.2, [Eibl 1987, Sugano et al. 1993-c]), les essais les plus ‘mous’ sont donc l’objet d’une attention particulière.

Voici donc la liste des essais d’impact les plus significatifs (se référer à l’Annexe A pour davantage de détails).

Page 29: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 1 : Caractérisation de l’impact étudié

29

Essais CEA-EDF

[Gueraud et al. 1977, Fiquet et Dacquet 1977, Goldstein et al. 1977, Berriaud et al. 1978]

Cette campagne d’essais de grande envergure (pas loin de 90 tirs sur 24 types de dalles différentes) a été entreprise par EDF et le CEA suite au constat de divergences entre les différentes formules de perforation existant à l’époque. Elle comporte trois séries d’essais :

les essais EDF-CEBTP : 13 tirs [Gueraud et al. 1977] ;

les essais EDF-Direction Centrale du Génie : 35 tirs [Fiquet et Dacquet 1977] ;

les essais CEA-CESTA : 41 tirs [Goldstein et al. 1977].

Les caractéristiques principales de tous ces tests sont reprises par Berriaud, qui les utilise pour établir la formule de perforation dite CEA-EDF pour des projectiles ‘durs’ [Berriaud et al. 1978].

Essais EDF-CEMETE

[Dulac et Giraud 1981, Dulac 1982]

Cette campagne d’essai a été menée en 1979 au laboratoire CEMETE d’EDF pour étudier le comportement non-linéaire des dalles sous chargement dynamique. Ces essais se distinguent des précédents à double titre : d’une part la perforation n’est pas véritablement l’objet de l’étude (c’est le comportement plastique de la dalle qui est étudié), et d’autre part le chargement dynamique n’est pas dû à un projectile qu’on lance, mais à un tube qui est écrasé à l’aide d’un mouton.

Essais Meppen :

[Jonas et al. 1979, Nachtsheim et Stangenberg 1981, Jonas et al. 1982-a, Jonas et al. 1982-b, Nachtsheim et Stangenberg 1982, Rüdiger et Riech 1983, Nachtsheim et al. 1984]

Ces travaux expérimentaux ont été menée en Allemagne, au centre d’étude de l’armée (Wehrtechnische Dienststelle für Waffen und Munition) situé à côté de la ville de Meppen, dans le but de connaître le comportement des dalles sous l’impact de projectiles ‘déformables’ (c’est-à-dire des projectiles qui s’écrasent au cours du choc). La campagne d’essais compte 21 tirs, et a été complétée par des tests en dimension plus réduite pour étudier les effets d’échelle [Sage et Pfeiffer 1979].

Essais Kojima :

[Kojima 1991]

Cette étude a été entreprise suite au constat que le dimensionnement des structures en béton à la chute d’avion à l’aide de formules de perforation pour projectiles ‘durs’ n’était pas optimal et conduisait à surestimer l’épaisseur de béton nécessaire à l’intégrité de la structure. Il fallait donc tenir compte de la déformabilité du projectile, ou plus précisément, de l’écrasement du projectile au cours du choc. Les essais qui datent de 1987 et 1988, comparent donc les chocs de projectiles ‘durs’ et de projectiles ‘déformables’ pour une même masse et une même vitesse. Les expériences montrent que le degré d’endommagement de la dalle dû à un missile ‘déformable’ qui s’écrase est comparable à celui d’un projectile dur qui évolue à une vitesse 20% plus faible. La confrontation des résultats expérimentaux à la formule de perforation de Degen prouve que celle-ci est très nettement conservative (environ 80% de marge !) dans les cas de projectiles dits ‘déformables’.

Page 30: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

30

Essais Ohno :

[Ohno et al. 1992]

Ces essais, effectués au Japon, comme ceux de Kojima, s’intéressent à la transition entre projectiles ‘rigides’ et ‘déformables’. L’objectif est de quantifier les conservatismes des formules de perforation pour chocs de projectiles ‘durs’ lorsqu’elles sont utilisées avec des projectiles qui s’écrasent. Les cinq projectiles ont tous une même masse et une même vitesse, mais leur structure est telle que la force axiale de flambage est différente pour chacun d’eux. Les résultats ont été confrontés à la formule de perforation NDRC : la formule prédit bien le choc correspondant au projectile le plus rigide, mais plus le projectile devient ‘mou’, plus l’épaisseur de perforation (c’est-à-dire l’épaisseur minimale nécessaire pour empêcher la perforation) diminue. Celle-ci est une fonction affine de la force axiale de flambage du projectile. L’épaisseur de perforation peut donc être estimée à partir des formules de perforation pour projectiles ‘rigides’, moyennant un coefficient de réduction qui dépend de la force axiale de flambage et qui est d’autant plus grand que la force axiale est faible.

Essais Sugano :

[Sugano et al. 1993-a, Sugano et al. 1993-b, Sugano et al. 1993-c]

Les essais Sugano, mis en œuvre en partie au Japon et en partie au laboratoire SANDIA d’Albuquerque au Nouveau-Mexique sont certainement ceux qui, à défaut de s’intéresser à la compréhension physique des phénomènes, se sont attachés à être les plus réalistes et les plus représentatifs d’un impact d’avion. Quatre séries d’essais ont été effectuées :

des essais à petite échelle : 32 avec projectiles déformables et 12 avec projectiles rigides ;

des essais à échelle intermédiaire : 16 avec projectiles déformables et 13 avec projectiles rigides ;

des essais à grande échelle : 1 avec projectile déformable et 4 avec un moteur d’avion du type GE-J79 ;

un essai d’impact avec un avion réel, un Phantom F4-D.

Ces essais ont permis d’aboutir aux conclusions suivantes.

Des tests à échelle réduite, si le changement d’échelle est fait avec soin, donnent des résultats analogues aux essais de taille réelle.

Les moteurs d’avion, tout comme l’avion lui-même, sont des projectiles ‘déformables’ au sens où ils s’écrasent au cours du choc ;

Pour les moteurs d’avion, les formules de perforation CEA-EDF, Criepi, Degen et Chang surestiment l’épaisseur minimale nécessaire pour empêcher la perforation. Ces formules sont néanmoins utilisables à condition d’appliquer à l’épaisseur calculée un facteur de réduction de 0,6 à 0,75.

Ces essais ne sont pas les seuls, loin de là. Le choc sur des dalles en béton armé intéresse d’autres applications que la chute d’avion : les essais effectués par Delhomme et Mougin pour tester des structures de protection de chute de blocs rocheux sur des routes de montagne en sont la preuve [Delhomme et al. 2005, ]. Mais ils semblent moins représentatifs de la chute d’avion que ceux que nous avons détaillés précédemment, en particulier parce que ce sont des chocs avec rebond.

Page 31: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 1 : Caractérisation de l’impact étudié

31

1.3.2 Représentativité des essais Deux critères sont essentiels pour sélectionner des tests expérimentaux. D’un part leur représentativité par rapport au problème réel étudié, et d’autre part la disponibilité de l’information sur ces essais. Concernant la représentativité des essais décrits dans le paragraphe précédent (§ 1.3.1), une manière de s’en assurer est de tracer le graphe introduit en 1.1.3 sur la Figure 1.4 pour vérifier s’il s’agit de choc dur ou de choc mou (Figure 1.7).

Cette Figure 1.7 suggère les remarques suivantes.

Tout d’abord, on constate que le seul essai avec un avion réel, un Phantom F-4, effectué à Sandia National Laboratory d’Albuquerque [Sugano et al. 1993-c] est proche des impacts supposés des autres avions, civils ou militaires et se trouve avec eux dans la zone des chocs mous. On peut noter en passant que l’avion civil se trouve dans la zone la plus éloignée des chocs durs : c’est un choc « très mou », plus mou que l’avion militaire.

Ensuite, les essais mis en œuvre par Sugano avec des projectiles dits déformables sont bien dans la zone où se trouvent les essais avec moteurs réels. Les essais avec projectiles déformables sont donc bien représentatifs du choc d’un moteur d’avion.

Enfin, parmi tous les tests expérimentaux présentés, et si on exclut les essais Delhomme et Mougin qui sont manifestement des impacts avec rebond, on peut distinguer trois grandes catégories d’essais :

les essais Sugano et Kojima avec projectiles rigides et les essais CEA-EDF. Il s’agit sans ambiguïtés de chocs durs. Les formules de perforation usuelles s’appliquent très bien à ces chocs-là.

les essais Ohno ainsi que les essais Kojima et Sugano avec projectiles déformables, improprement qualifiés de chocs mous. Il s’agit d’impact où le projectile, considéré comme déformable (en comparaison avec les projectiles rigides de la catégorie précédente) s’est écrasé au cours du choc. Cependant, ces tests s’approchent de la limite entre chocs durs et chocs mous : deux essais de Sugano sont d’ailleurs sur la frontière. Mais il s’agit toujours de chocs durs selon notre classification. D’ailleurs, la preuve en est que les formules de perforation, quoique conservatives dans ces cas-là, peuvent très bien être appliquées, moyennant l’utilisation d’un facteur de réduction.

les essais Meppen. Ce sont les seuls essais expérimentaux dans la zone des chocs mous (un essai est à la limite du choc dur).

Puisque les essais Meppen sont les seuls dans la catégorie des chocs mous et que l’impact d’avion en est un, notre choix se porte naturellement vers les essais Meppen comme essais de référence.

En plus du caractère représentatif des essais Meppen pour les chocs mous, deux autres arguments justifient le choix des essais Meppen au détriment des essais Sugano. En premier lieu, les tests Sugano sont moins bien documentés, en particulier sur les déplacements des dalles au cours du choc. Deuxièmement, les projectiles de Meppen sont plus simples que ceux de Sugano : ce sont des tubes qui ont été conçus pour produire une force à peu près constante en s’écrasant, alors que Sugano a construit les siens pour représenter au mieux l’impact d’un moteur d’avion. Comme on s’intéresse au comportement de la dalle, il est plus aisé de travailler avec un chargement simple qu’avec un chargement chahuté. La compréhension des phénomènes s’en trouve facilitée.

Page 32: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

32

1,E-04

1,E-03

1,E-02

1,E-01

1,E+00

1,E+01

1,E+02

1,E-02 1,E-01 1,E+00 1,E+01 1,E+02

Impact théorique B707-320Impact théorique FB-111 Impact théorique Phantom F-4CEA-EDFOhnoMeppenSugano: projectiles rigidesSugano: projectiles déformablesSugano: Moteurs GE-J79Sugano: Phantom F-4DKojima: projectiles rigidesKojima: projectiles déformablesDelhomme et MouginLimite choc dur-choc mou

Figure 1.7 : Classification des essais d’impact en chocs mou et chocs durs

p

c

σσ

20p

c

Vρσ

Choc mou

Choc dur

Page 33: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 1 : Caractérisation de l’impact étudié

33

1.4 Conclusion Ce chapitre a permis de se remémorer les classifications habituelles des chocs : élastiques, mous et durs. Il est apparu que les définitions existantes des chocs durs et mous étaient intéressantes, mais insuffisantes pour effectuer des comparaisons précises entre chocs, en particulier parce qu’elles se limitent à des solides ponctuels, et qu’elles ne tiennent pas bien compte des seuils de rupture du projectile et de la cible. Nous avons donc proposé une nouvelle caractérisation des chocs durs et des chocs mous qui a plusieurs avantages.

Elle est cohérente avec les notions intuitives des qualificatifs « dur » et « mou », avec les précédentes définitions qui étaient un peu limitatives et avec le constat que l’on fait habituellement qu’à vitesse élevée, il n’y a plus de chocs mous mais uniquement des chocs durs.

Elle permet de comparer des chocs à différentes échelles.

C’est une classification qui peut caractériser non seulement les chocs de corps assimilables à des solides ponctuels, mais également les chocs entre structures. Elle permet ainsi une comparaison de chocs avec des projectiles et des cibles de natures très différentes. L’impact sur une plaque mince d’une structure de type tube dont le mode de ruine est en écrasement avec flambages successifs, peut être confronté à l’impact de roches sur un bloc massif en béton.

Cette classification donne la frontière entre ruine locale et ruine globale.

Elle indique la limite de validité d’un calcul de la cible qui utiliserait une force d’impact en lieu et place d’une modélisation du projectile.

Elle permet d’intégrer éventuellement l’effet de la vitesse de déformation.

Pour appliquer cette classification au cas qui nous intéresse tout particulièrement, les impacts d’avion sur des structures en béton armé, il a fallu montrer que cet effet de la vitesse de déformation sur le comportement du béton était négligeable. Une évaluation sommaire a donné une vitesse de déformation de l’ordre de 5.10-2 s-1 pour un avion militaire et une valeur 10 fois moindre pour un avion civil. Pour ces vitesses, le comportement du béton peut donc être considéré comme très peu différent du comportement quasistatique.

Finalement, les impacts d’avions ont été caractérisés selon notre nouvelle classification et comparés aux nombreux essais de la littérature censés représenter ce type d’évènement. La chute d’un avion sur une structure en béton est bien un choc mou. Malheureusement, peu nombreux sont les tests expérimentaux qui sont véritablement des chocs mous. En effet, certains essais, qualifiés arbitrairement d’« impacts mous » sont en réalité des chocs durs, bien qu’ils aient été effectués avec des projectiles déformables. Seuls les essais Meppen semblent aptes à servir d’essais de référence pour nous permettre de comprendre les phénomènes liés à la chute d’avion, puis de procéder à leur modélisation.

Page 34: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

34

Page 35: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 2 : Le processus de perforation pour les chocs mous

35

Chapitre 2

Le processus de perforation pour

les chocs mous

Equation Section (Next)

Le premier chapitre a permis de définir précisément les caractéristiques de la chute d’avion par comparaison aux autres problèmes de chocs : il s’agit en l’occurrence d’un choc mou. Ceci implique notamment que la réponse de la cible peut être découplée du comportement du projectile qui s’écrase. Par conséquent dans la suite de ce document, seul le comportement dans la cible sera l’objet de notre étude.

Les phénomènes qui se produisent dans la structure en béton armé sollicitée par un choc mou peuvent être classés dans deux catégories, selon qu’ils se produisent dans la zone d’impact ou dans des zones de la structure qui sont plus éloignées. Localement il y a un forte dégradation du béton armé qui conduit à la perforation. En effet, on constate sur les essais que le projectile peut traverser la cible (voir par exemple [Nachtsheim et Stangenberg 1982]) ; dans le reste de la structure, il y a des vibrations induites par le choc avec une également une dégradation des matériaux, mais sans qu’il y ait formation de ‘trou’ dans la structure. Nous commençons par nous intéresser à la réponse locale en perforation de la plaque en béton armé.

Or la définition des chocs mous telle qu’elle a été présentée dans le chapitre précédent (Chapitre 1) a ceci de paradoxal qu’elle semble exclure toute perforation de dalle puisqu’on considère que la pression infligée par le projectile sur la cible ne dépasse pas la contrainte limite de rupture du matériau constituant la cible. Comment se fait-il donc qu’il puisse y avoir perforation dans les cas de chocs mous ?

Pour répondre à cette question, les essais Meppen nous fournissent un certain nombre d’indications. Ainsi, les chercheurs ayant dirigé et analysé ces essais ont proposé un scénario de perforation qui semble se répéter dans chaque cas, puisque la ruine se produit toujours selon le même mode : un cône qui finit par se détacher du reste de la dalle. Mais ce processus de perforation demande à être expliqué. On veut notamment savoir ce qui est à l’origine de ce cône de perforation.

Ce chapitre se décompose donc en trois paragraphes. Le premier, à partir des essais Meppen, décrit le processus de perforation caractérisé par une rupture en forme de cône. Un second paragraphe étudie plus finement la formation du cône à partir d’essais effectués à Edinburgh et montre que ce cône est généré par des ondes de structure (onde de flexion et d’effort tranchant). Un dernier paragraphe donne quelques compléments d’analyse.

Page 36: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

36

2.1 Un processus caractérisé par un cône de rupture L’étude des essais Meppen permet de montrer que dans le cas des chocs mous, la perforation a lieu selon un scénario bien défini caractérisé par la formation et le détachement d’un cône.

2.1.1 Etude post-mortem des dalles Meppen Ces essais, effectués à la fin des années 1970 en Allemagne dans la ville de Meppen, n’ont pas l’envergure des essais CEA-EDF ou Sugano, puisqu’ils ne sont constitués que de 21 tirs, comparés à la petite centaine de tirs français ou japonais. Mais ils ont ceci de remarquable que les dalles ont été soigneusement instrumentées et les résultats de chaque tir dépouillés et analysés avec une rigueur toute germanique. En particulier, une coupe des dalles a été systématiquement réalisée à l’issue des essais, ce qui a permis d’analyser le réseau de fissures et de constater que la perforation se produisait toujours selon le même processus.

Figure 2.1 : Face arrière et coupe d’une dalle après impact (dalle II-17)

(essais Meppen [Rüdiger et Riech 1983])

La Figure 2.1 montre une dalle à l’issue d’un essai de choc. On y voit la plupart des phénomènes qui ont été observés sur les 21 dalles de l’ensemble du programme expérimental.

Sur la face opposée à l’impact apparaissent :

une fissuration radiale débouchant sur les côtés de la dalle ;

un réseau de fissures en mailles dans un anneau autour de la zone centrale ;

de l’écaillage dans la zone centrale.

Sur les deux coupes de la dalle sont visibles :

des fissures obliques, plus ou moins inclinées, délimitant un cône ; certaines de ces fissures se prolongent le long du ferraillage longitudinal arrière ;

quelques fissures droites tout au centre du cône ;

une dégradation du béton à l’intérieur du cône ;

Page 37: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 2 : Le processus de perforation pour les chocs mous

37

de la compaction, ou plutôt un enfoncement de la dalle et un éclatement du béton sur la zone d’impact en face avant.

Sur les dalles qui sont davantage endommagées, on peut observer également :

un déplacement du cône ;

une rupture des aciers longitudinaux avant ;

une rupture des aciers transverses ;

une déformation et une rupture de la nappe d’aciers longitudinaux arrière.

2.1.2 Etablissement d’un scénario de perforation Il est toujours difficile voire présomptueux, à partir d’observations post-mortem d’essais dynamiques où sont manifestement en jeux des phénomènes non-linéaires, d’en déduire ce qui s’est passé au cours de l’expérience. Cela revient à interpoler la succession des évènements, ne connaissant que l’état initial et l’état final. Cependant, une étude soigneuse effectuée par les chercheurs ayant analysé les essais Meppen [Jonas et al. 1982-a, Nachtsheim et al. 1984] a permis d’établir un scénario de perforation.

La démarche part du constat que certains phénomènes sont toujours observés en association avec d’autres (Figure 2.2). Par exemple, le cône de fissuration est systématiquement observé. Et l’écaillage intervient toujours quand il y a un réseau de fissures en mailles débouchant en face arrière et en particulier lorsqu’il y a des fissures obliques en forme de cône. En revanche, l’inverse n’est pas vrai : l’essai II-2 présente un cône de fissuration, mais pas de véritable réseau de fissures en face arrière, ni d’écaillage. De même, la rupture des aciers de flexion en face arrière n’est présente que lorsqu’il y a déplacement du bloc de béton en forme de cône (essais II-3, II-5, II-13, II-15, II-19), mais ce phénomène de déplacement du cône peut intervenir sans qu’il y ait rupture de la nappe des aciers longitudinaux arrières (essais II-6, II-7, II-16, II-17, II-18, II-20, II-22). Et ainsi de suite.

Figure 2.2 : Endommagement des dalles des essais Meppen [Nachtsheim et al. 1984]

II-1

II-

2

II-3

II-

4

II-5

II-

6

II-7

II-

8

II-9

II-

10II-

11II-

12II-

13II-

14II-

15II-

16II-

17II-

18II-

19II-

20II-

21II-

22Essai

Dommage

Fissures obliques délimitant un cône

Fissures sur la face arrière

Fissures se propageant le long du ferraillage longitudinal arrière

Ecailles du béton de couverture en face arrière

Décollement de petits morceaux de béton

Déplacement du cône

Décollement de gros morceaux de béton

Desagrégaton du béton à l'intérieur du cône

Rupture des premiers aciers longitudinauxarrières

Limite de perforation de la plaque

Vitesse résiduelle du projectile non nulle

Page 38: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

38

Les liens systématiques entre les divers types de dégradation observés sur les dalles conduisent à ranger les phénomènes qui se produisent au cours de l’impact selon un ordre événementiel bien défini. Cet ordre est parfois assez évident : avant qu’il n’y ait le moindre décollement des écailles de béton, il faut bien qu’elles se forment. C’est moins naturel pour d’autres successions chronologiques, comme l’écaillage qui a lieu après la formation du cône et non avant.

Ce raisonnement aboutit ainsi à un scénario de perforation bien précis qui se décompose en huit étapes schématisées sur la Figure 2.3 (certains phénomènes ont été regroupés par rapport à la Figure 2.2) :

1. Etat initial avant contact du projectile sur la dalle.

2. Début du choc, formation de fissures diagonales dans l’épaisseur de la dalle.

3. Développement de la fissuration diagonale pour former une zone de fissures de diverses inclinaisons. Certaines de ces fissures débouchent sur la face arrière.

4. Fissuration le long de l’interface du ferraillage longitudinal arrière.

5. Formation d’écailles du béton de couverture en face arrière qui finissent par se détacher de la dalle.

6. Désolidarisation d’un cône, délimité par une fissure diagonale principale. Décollement de grosses écailles de béton.

7. Destruction du béton à l’intérieur du cône. Les aciers longitudinaux arrières forment une nappe qui retient le cône.

8. Désagrégation complète du cône, rupture des aciers transverses et du « filet » d’aciers longitudinaux arrières. Le projectile traverse la cible : c’est la perforation.

Figure 2.3 : Scénario de perforation d’après les essais Meppen [Jonas et al. 1982-a]

Page 39: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 2 : Le processus de perforation pour les chocs mous

39

2.1.3 Le cône, caractéristique de la perforation sous chocs mous Si on considère que l’écaillage n’est qu’un effet annexe, l’enchaînement des phénomènes qui conduisent à la perforation peut être condensé en trois grandes étapes :

1. formation du cône ;

2. déplacement du cône ;

3. rupture des aciers reliant encore le cône et désagrégation du béton à l’intérieur du cône.

Tous les chocs mous perforants présentent donc un mode de rupture en cône. C’est le constat qui est fait également par le Comité Européen du Béton [CEB 1988]. Mais l’inverse est-il vrai ? Le profil de perforation en cône est-il exclusif aux chocs mous, ou bien les chocs durs présentent-ils également un cône de perforation ?

Plusieurs observations permettent de répondre à cette interrogation. On peut noter tout d’abord que l’essai II-1, qui est à la limite du choc dur et du choc mou selon notre classification (voir Figure 1.7) présente un cône qui a plutôt la forme d’un cylindre. Ce constat est à mettre en parallèle avec la comparaison des coupes des dalles II-9, II-4 et II-6 qui montre que plus la vitesse est grande (c’est à dire, plus on s’approche du choc dur), moins les fissures générant le cône sont obliques. Enfin, ni les essais CEA-EDF, ni Sugano, ni Kojima, ni Ohno ne font état de la formation systématique d’un cône. Certains essais présentent des profils de rupture avec des combinaisons de cônes ou de cylindres, mais jamais un cône qui traverse toute l’épaisseur de la dalle.

On peut donc en conclure que le cône de perforation est le mode de rupture caractéristique des chocs mous.

Page 40: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

40

2.2 La génération du cône par les ondes de structure Si les essais Meppen nous permettent d’établir que la perforation sous choc mou a lieu systématiquement selon un mode de rupture en cône, avec un processus bien défini qui commence par la formation de fissures obliques, pour finir par la rupture des aciers de flexion arrière ne retenant plus un cône de béton qui se morcelle, on veut connaître les raisons d’un tel processus. En particulier, on voudrait savoir pourquoi un cône se forme systématiquement. Ceci revient à expliquer comment sont générées les fissures obliques. Quant à l’écaillage, on souhaiterait en comprendre l’origine.

Pour répondre à ces interrogations, l’analyse post-mortem des dalles n’est plus suffisante. Il nous faut pouvoir observer en détail l’évolution des phénomènes pendant la durée de l’impact. Par conséquent dans cette partie de chapitre nous commencerons par étudier la propagation des fissures générant le cône dans des essais effectués à l’université d’Edinburgh. Puis nous en donnerons une explication à partir de l’étude des ondes élastiques dans une poutre. Enfin quelques compléments d’analyse seront donnés.

2.2.1 La fissuration dans les essais de l’université d’Edinburgh Un des moyens d’investigation habituel pour observer l’évolution du comportement d’une structure au cours d’un choc consiste à filmer le processus avec une caméra ultra-rapide. C’est bien ce qui a été fait au cours des essais Meppen, mais seul le projectile a été filmé, pour visualiser son écrasement et en déduire l’évolution de son déplacement et de sa vitesse au cours de l’impact. En outre, avec des essais d’impact sur dalle, quoiqu’il soit toujours possible de filmer les faces supérieures et inférieures, il est impossible de visualiser ce qui se passe dans l’épaisseur : pour ce genre d’observation, il faut une expérimentation avec des poutres.

L’expérimentation menée à l’université Heriot-Watt, à Edinburgh en Ecosse, répond à cette double exigence puisqu’il s’agit d’un impact sur poutre filmé avec une caméra ultra-rapide à 4500 images par secondes [May et al. 2005, May et al. 2006]. Un projectile en chute libre qui heurte une poutre en béton armé sur appuis simples (Figure 2.4). La force d’impact est de l’ordre de 0,25 MN pendant une dizaine de millisecondes.

Figure 2.4 : Test d’une poutre en béton armé soumise au choc d’un projectile en chute libre

V (chute libre)

2,6 m

0,2 m

Page 41: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 2 : Le processus de perforation pour les chocs mous

41

L’évolution de la fissuration dans la poutre au début de l’impact est présentée sur la Figure 2.5 et permet de faire un certain nombre de constatations.

Les premiers phénomènes qui apparaissent sont une fissure verticale du côté opposé à l’impact et une fissure diagonale, de chaque côté de l’impact, à mi-hauteur de la section. L’initiation de ces fissures a lieu après que le front de l’onde initiale de compression a eu le temps d’atteindre la face inférieure de la poutre, de s’y réfléchir et de retraverser l’épaisseur de la poutre (l’onde met 0,05 ms pour traverser les 20 cm d’épaisseur de la poutre).

A 0,33 ms, puis à 0,56 ms après le début de l’impact, on peut voir d’une part que cette fissuration oblique s’est propagée vers le haut et vers le bas de la poutre, et d’autre part que de nouvelles fissures diagonales apparaissent un peu plus loin de la zone d’impact : la zone de fissuration diagonale s’étend progressivement vers les extrémités de la poutre.

Ensuite un cône se forme, délimité par une fissure oblique qui s’ouvre davantage que les autres, de part et d’autre de la zone de chargement.

Enfin un écaillage se produit sur la face inférieure du cône.

Ces observations sont tout à fait concordantes avec le processus constaté sur les essais Meppen. Mais la visualisation avec caméra ultra-rapide permet d’apporter quelques précisions supplémentaires sur l’évolution de la fissuration. On retiendra deux éléments importants : d’une part l’initiation de la fissuration oblique à mi-hauteur après que l’onde de compression a fait un aller-retour dans l’épaisseur de la poutre, et d’autre part l’extension de la zone de fissuration diagonale vers les extrémités de la poutre.

La nature de ces phénomènes et surtout l’échelle de temps où ils apparaissent nous montrent que le fait qu’il ne s’agisse pas d’un milieu semi-infini, mais bien d’une structure avec ses faces supérieures et inférieures libres, joue un rôle déterminant. Une étude simple de propagation des ondes élastiques dans une poutre va nous permettre de mieux le comprendre.

t=0,11 ms t=0,33 ms

t=0,56 ms t=10 ms

Figure 2.5 : Evolution de la fissuration et formation du cône de cisaillement [May et al. 2005, May et al. 2006]

Page 42: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

42

2.2.2 Ondes élastiques dans une poutre On a montré que le cône de fissuration, qui pilote le mode de rupture lors d’un choc mou perforant, est généré par des fissures obliques initiées dans l’épaisseur de la poutre. Au cours de l’impact, ces fissures se multiplient en éventail dans une zone qui s’étend progressivement, sur quelques centimètres, en direction des appuis de la poutre. L’origine de ces fissures obliques peut être expliquée en faisant l’inventaire des ondes élastiques dans une poutre sollicitée par un impact.

En élasticité, lorsqu’une poutre est soumise à un impact sur son bord supérieur, dans une zone suffisamment éloignée des appuis, on peut schématiquement distinguer trois ondes qui se succèdent l’une après l’autre (voir Figure 2.6).

Figure 2.6 : Propagation des ondes successives dans une poutre a) onde de compression dans l’épaisseur

b) onde de structure : compression membranaire c) onde de structure : flexion et effort tranchant

Tout d’abord une onde de compression dans l’épaisseur, directement générée par l’impact, se propageant dans la direction z. Cette onde traverse toute la hauteur de la poutre pour se réfléchir sur le bord libre inférieur.

Cette onde de compression produit, par effet de Poisson, une faible onde de compression membranaire qui se propage selon x, sur toute la longueur de poutre (l’onde est visible sur la simulation de la Figure 2.7). Cette onde de structure, non-dispersive, est régie par l’équation d’équilibre dynamique suivante :

( )2 2

2 2E ,x xx

u u f x tx t

ρ∂ ∂

− =∂ ∂

(2.1)

avec :

E : module d’Young ;

ρ : masse volumique ;

ux : déplacement horizontal (selon x) ;

fx : chargement axial.

Direction de propagation de l’onde Compression Traction

z

x

a)

b)

c)

Page 43: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 2 : Le processus de perforation pour les chocs mous

43

Enfin, une onde de flexion et d’effort tranchant générée par la flexion locale au droit du chargement, qui est gouvernée par l’équation suivante :

( )4 2

4 2EI ,z zz

u uS f x tx t

ρ∂ ∂+ =

∂ ∂ (2.2)

avec :

I : inertie de la section ;

S : aire de la section ;

uz : déplacement transversal (selon z) ;

fz : chargement transversal.

Cette dernière onde est dispersive ; elle se propage en s’atténuant le long de la structure. Lors de cette propagation on observe une série de changements de signe de la flexion (voir la Figure 2.7), associés à une rotation du repère principal des contraintes. Dans chaque zone de changement de signe de flexion (et en particulier au bord de la zone de chargement), on observe donc : une traction à 45° par rapport à la fibre moyenne et une compression dans la direction perpendiculaire, ce qui correspond à un cisaillement, maximal à mi-hauteur de la section. Ces zones se déplacent avec le reste de l’onde de flexion en direction de l’extrémité de la structure.

Figure 2.7 : Onde de flexion dispersive et onde de compression non-dispersive dans une poutre

soumise à un impact localisé

Page 44: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

44

2.2.3 Interprétation : origine du cône et de l’écaillage

Origine du cône

La confrontation de la répartition des contraintes due aux ondes de flexion-effort tranchant, et des fissures diagonales constatée expérimentalement nous autorise à conclure que les fissures obliques sont initiées au bord de la zone d’impact et à mi-hauteur de la section par le cisaillement dû à l’effort tranchant. En raison de la propagation de l’onde de flexion-cisaillement, la zone de fissuration diagonale s’étend sur une petite distance de la zone d’impact vers les extrémités de la poutre. D’autre part, ces fissures se propagent vers la face supérieure et surtout vers la face inférieure, à cause de la traction due à la flexion.

Le cône de cisaillement est donc un pur produit issu d’une onde de structure. Ceci est à mettre en relation avec le constat de Zukas qui affirme que plus la vitesse d’impact est lente, plus la pénétration et la perforation sont couplées à la déformation globale de la structure [Zukas et al. 1982]. Ici, il ne s’agit pas d’un comportement perforant qui serait dépendant de l’ensemble de la structure (poutre ou dalle avec ses conditions aux limites), car le cône apparaît avant que les ondes n’atteignent les appuis. Mais il s’agit d’une réponse locale en perforation qui, bien plus que dans le cas d’un choc dur, est déterminée par la nature de la cible : une structure dont une des dimensions, l’épaisseur, est très inférieure aux autres.

Origine de l’écaillage

Quant à l’écaillage, théoriquement, dans des matériaux sollicités dynamiquement, il peut être généré par la réflexion d’une onde de compression. En effet, lorsque la fin de l’onde incidente croise le début de l’onde réfléchie, le matériau est soudainement sollicité en traction (voir Figure 2.8). Si la résistance en traction du matériau est plus faible qu’en compression, il y a alors écaillage (davantage de détails sont donnés dans [Suffis 2004]).

Notons :

E : module d’Young du matériau

ρ : masse volumique

h : hauteur de la poutre

e : distance entre la zone d’écaillage et la face inférieure (c’est l’« épaisseur de l’écaille »)

Tc : la durée du chargement

Une condition pour qu’il y ait écaillage est que :

e h< (2.3)

Ce qui correspond à :

cT 2hEρ

< (2.4)

L’application numérique avec des ordres de grandeur correspondant au test de l’université Heriot-Watt (voir § 2.2.1) :

E = 35000 MPa

h = 0,2 m

ρ = 2500 kg/m3

Page 45: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 2 : Le processus de perforation pour les chocs mous

45

donne une durée de chargement Tc < 0,1 ms. Manifestement, cette condition n’est vérifiée ni dans l’expérience écossaise (durée du choc : plusieurs dizaine de millisecondes), ni plus généralement dans les chocs mous.

L’écaillage que l’on observe dans ces cas-là n’est donc pas généré par ce croisement d’onde incidente et d’onde réfléchie. C’est bien pour cette raison qu’il n’apparaît qu’après les fissures diagonales d’effort tranchant. Il est plutôt la conséquence de la multifissuration due à l’effort tranchant et à la flexion et observée sur la face opposée à l’impact. Il semble d’ailleurs que cet écaillage se localise au droit des aciers longitudinaux inférieurs, les fissures diagonales se propageant, comme on l’a vu précédemment, le long de l’interface acier-béton.

Figure 2.8 : Diagramme de Lagrange (matériau élastique)

2.2.4 Compléments d’analyse L’analyse de la perforation des chocs mous présentée dans les paragraphes précédents (§ 2.1.1 et 2.2) et en particulier l’interprétation des essais écossais de l’université Heriot-Watt à Edinburgh doit être complétée par quelques remarques.

Compétition cisaillement-flexion

Tout d’abord, s’il n’y a jamais rupture en flexion dans les essais Meppen, d’autres essais montrent qu’il peut y avoir compétition entre les deux modes de rupture en cisaillement et en flexion [Brandes et al. 1979] (voir Figure 2.9).

Choc avec rebond

Une deuxième remarque relève de la nature de l’impact lors du test de poutre effectué à Edinburgh. Manifestement il s’agit d’un choc avec rebond, sans écrasement du projectile. On est en droit de se demander en quoi l’évolution de la fissuration observée lors de l’essai a un rapport avec la perforation lors d’un choc mou. En réalité, ce qui compte pour la mise en place du mode de rupture en cône, c’est qu’il ne s’agisse pas d’un choc dur, c’est-à-dire qu’il faut que le matériau résiste à la contrainte dynamique sous l’impacteur (ce que l’on peut constater sur la Figure 2.5) pour que les ondes de structures (flexion et effort tranchant) soient générées (voir également [Dinic et Perry 1990] pour d’autres impacts de ce type). Un choc avec rebond peut être considéré comme un choc mou dans lequel l’énergie cinétique initiale n’est pas suffisante pour que le projectile s’écrase.

z

Epaisseur h de la poutre

Durée Tc du chargement

t

Ecaillage e

Face supérieure

Face inférieure

Page 46: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

46

Figure 2.9 : Modes de rupture d’une poutre sous sollicitation dynamique [Brandes et al. 1979] :

a) c) en cisaillement (poinçonnement) b) d) en flexion (b,d)

Autres phénomènes au tout début de l’impact

Une troisième remarque concerne l’existence de phénomènes qui se produisent avant la fissuration oblique, au tout début de l’impact. En effet la fréquence des prises de vue de la caméra ultra-rapide, 4500 images par secondes, c’est-à-dire une image toute les 0,22 ms, n’est pas vraiment suffisante pour visualiser l’évolution des phénomènes pendant les 0,05 ms que met l’onde de compression initiale pour traverser les 20 cm d’épaisseur de la poutre. D’autre part, un tel dispositif ne permet d’observer que les macro-fissures. Par conséquent, on ne sait rien de ce qui se passe vraiment sous l’impacteur (compaction dynamique [Burlion 1997], éclatement, endommagement, micro-fissuration…) au début du choc.

A ces réserves, on peut objecter que l’identification du mode de ruine d’une structure n’exclut pas qu’il puisse y avoir d’autres phénomènes locaux de dissipation d’énergie, éventuellement en compétition avec le mode de rupture habituellement constaté. Notons en passant que Delhomme dans son essai d’un impact, tout juste à la limite du choc dur et du choc mou, estime l’énergie dissipée au cours de la compaction à moins de 5% de l’énergie incidente [Delhomme et al. 2005].

En outre, pour donner une idée des phénomènes et du profil de micro-fissuration pouvant apparaître au cours d’un impact, quelques calculs ont été effectués avec des éléments discrets en utilisant le logiciel DEAP, conçu et développé par Arnaud Delaplace au LMT Cachan [Ibrahimbegovic et Delaplace 2003, Wœstyn et al. 2006]. Il s’agit d’une poutre ayant les caractéristiques du test de l’université Heriot-Watt à Edinburgh (§ 2.2.1, Figure 2.4), mais avec un matériau homogène, au comportement indépendant de la vitesse de déformation. Les résultats sont présentés Figure 2.10. On constate que l’évolution de la fissuration dépend de la vitesse de chargement et peut être plus complexe que ce que l’on a observé sur la Figure 2.5. En effet, à vitesse de chargement lent, se développe une fissuration de cisaillement et de flexion, ainsi que des effets de bords aux limites de la surface d’impact, de manière tout à fait identique à ce que montre la caméra ultra-rapide dans l’essai expérimental. En revanche, si la vitesse de chargement est plus rapide, l’onde de compression initiale ‘radiale’ (et de traction

Page 47: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 2 : Le processus de perforation pour les chocs mous

47

‘orthoradiale’) produit une désagrégation du matériau, sous la zone d’impact. Mais dans ce second cas, et c’est particulièrement remarquable, un cône se forme également.

Cette simulation avec des éléments discrets permet donc de conforter l’idée que, même s’il existe une micro-fissuration ou un éclatement du béton sous la zone d’impact, voire d’autres phénomènes dissipatifs locaux dans le béton, relativement bien caractérisés dans le cas d’impacts balistiques (voir par exemple [Forquin 2003]), le cône est donc le mode de ruine privilégié des plaques en béton armé dans le cas des chocs mous.

Chargement lent Chargement 10 fois plus rapide

Fissures Liaisons en train de se rompre T Temps de traversée de l’épaisseur de la dalle pour l’onde de compression incidente

Figure 2.10 : Evolution de la fissuration selon la vitesse de chargement dans un calcul avec éléments discrets

Temps

Page 48: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

48

2.3 Conclusion

L’analyse des nombreux essais Meppen et du test d’impact sur poutre effectué à l’université Heriot-Watt à Edinburgh a permis de montrer que, lors d’un choc mou, la perforation a lieu selon un processus bien établi, avec un mode de rupture en forme de cône. De plus, ce cône est en réalité un cône de cisaillement généré par des ondes de structures d’effort tranchant.

D’autres phénomènes, plus ou moins directement liés à la perforation elle-même, peuvent se produire :

la fissuration de flexion, qui caractérise en fait le mode de rupture en flexion, concurrent de la perforation ;

l’écaillage, qui n’est pas un écaillage dynamique généré par le croisement, dans l’épaisseur, de l’onde incidente avec l’onde réfléchie, mais qui est une conséquence de la fissuration produite par les ondes de structures, et qui se développe le long de l’interface acier-béton ; l’écaillage du béton de couverture ne participe pas à la ruine de la plaque ;

la dégradation, voire la désagrégation du béton, sous la surface d’impact, ou davantage à l’intérieur du cône ; l’endommagement du béton a l’intérieur du cône, excepté le fait qu’il dissipe de l’énergie, n’est pas un élément déterminant de la ruine en perforation car l’éjection du cône (c’est-à-dire la perforation) peut avoir lieu même avec un cône peu endommagé ;

la plastification et la rupture des aciers transversaux et longitudinaux. La nappe des aciers longitudinaux inférieurs joue le rôle de filet pour le cône. Lorsque ces aciers finissent par rompre, le cône est éjecté, le projectile traverse la cible : il y a perforation. De manière générale, dès que le cône est formé par la fissuration du béton, ce sont les aciers qui retiennent le cône. La rupture des aciers est donc un élément essentiel de la ruine en perforation.

Ces différents phénomènes étant classés selon l’importance du rôle qu’ils jouent dans le processus de perforation, nous allons maintenant nous intéresser à leur modélisation.

Page 49: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 3 : Choix de modélisation

49

Chapitre 3

Choix de modélisation

Equation Section (Next)

Le champ de notre étude ayant été limité aux chocs mous (Chapitre 1), nous avons étudié les phénomènes en jeu lors d’un impact, en particulier le comportement local, à savoir les phénomènes aboutissant à la perforation ont été expliqués (Chapitre 2).

Pour répondre à l’objectif de la thèse qui consiste à fournir à l’ingénierie des outils de calculs permettant de simuler un impact d’avion, se pose alors la question de la modélisation de la structure. Tout d’abord, il nous faut savoir s’il suffit de représenter juste la zone d’impact ou bien s’il est nécessaire d’avoir un modèle de la structure entière. Le fait que le type de perforation envisagée soit généré par des ondes d’effort tranchant et de flexion qui se propagent facilement dans le reste de la structure nous pousse à penser que pour les chocs mous, il faut s’intéresser à la fois au comportement local – la perforation – et aussi aux conséquences que peuvent avoir la propagation des ondes dans le bâtiment tout entier. Par conséquent, il s’agit de disposer d’outils traitant non seulement de la ruine en perforation, mais aussi de la flexion des plaques de béton armé et des non-linéarités qui en découlent.

Une fois déclinés les impératifs de la modélisation, dictés par la phénoménologie, les solutions envisageables dépendent essentiellement de la méthode de traitement des discontinuités et de l’échelle de modélisation. Un dernier critère entre en jeu : c’est l’objectif qu’à l’issue des trois années de thèse, les outils de simulation soient effectivement utilisables dans un cadre industriel.

3.1 Cahier des charges Le processus de perforation sous choc mou a été largement détaillé dans le chapitre précédent (Chapitre 2). Mais, avant de nous lancer dans un travail de modélisation, la liste des phénomènes devant être représentés est requise. S’agit-il uniquement des phénomènes locaux liés à la perforation ou bien l’impact risque-t-il d’ébranler le bâtiment tout entier ? Suffit-il de simuler les quelques mètres carrés de plaque autour du point d’impact, ou bien faut-il un modèle de tout le bâtiment ? Si le choc du projectile peut mettre en mouvement, voire dégrader des éléments de la structure loin de la zone de perforation, alors il faut pouvoir modéliser l’endommagement du béton et le comportement des aciers également loin de l’impact.

L’ensemble des phénomènes à modéliser ne sera donc explicité que lorsqu’on aura examiné si l’analyse de la perforation doit être locale ou globale.

3.1.1 Tenue locale et tenue globale de la structure Dès les années 70, l’étude des conséquences de la chute d’un aéronef sur une structure industrielle en béton armé s’est généralement décomposée en deux parties [Berriaud et al. 1978] :

la tenue locale, dans la zone d’impact, et en particulier la perforation de la paroi ;

la tenue globale de la structure, sous l’effet des vibrations induites par le choc.

On peut expliquer cette approche en deux temps par le fait qu’elle combinait les pratiques habituelles du séisme (étude vibratoire de l’ensemble de la structure) et les méthodes des militaires pour leurs études de la perforation (étude locale de la perforation par impacts de missiles). Deux autres raisons peuvent être invoquées.

Page 50: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

50

La première venait de la nature des projectiles : la tenue locale concernait l’impact de projectiles rigides (auxquels les moteurs étaient assimilés) alors que la tenue globale devait être vérifiée dans le cas de l’écrasement d’un projectile déformable, en l’occurrence le fuselage.

Un second motif tenait à l’enjeu : préserver l’intégrité de ce qui se trouve juste sous l’impact (par ex. l’étanchéité d’une enceinte interne) était aussi important que de s’assurer du non endommagement d’éléments internes au bâtiment (par ex : un plancher support d’une machine ou d’une tuyauterie).

30 ans plus tard, il est toujours difficile de trouver dans la littérature une stratégie générale d’analyse de bâtiment en béton armé applicable à l’ensemble des problèmes dynamiques. Certes, chaque sollicitation a ses spécificités, mais on aurait souhaité trouver des grands principes généraux capables de guider un ingénieur ou un chercheur dans ses choix de modélisation. Le besoin s’en fait d’autant plus sentir pour une application comme la tenue de structures sous la chute d’avion, à la frontière de deux domaines, celui des basses fréquences et celui des hautes fréquences, celui de l’analyse modale et celui de l’analyse transitoire.

Il existe certes des méthodes efficaces dans des domaines spécifiques. On a cité le séisme et la perforation à haute vitesse. Historiquement, ce sont les contraintes liées aux moyens de calculs limités qui ont conduit à développer des méthodes simplifiées, avec un domaine de validité assez restreint. Mais le retour d’expérience a permis au fur et à mesure d’améliorer les calculs et d’avoir une certaine confiance dans ces méthodes. Dans l’analyse sismique, il en est ainsi par exemple de la détermination de la fréquence de coupure, choisie de telle sorte que la somme des masses modales des différents modes concernés atteigne 0,9 fois la masse totale.

Si une stratégie générale n’existe pas, il est malgré tout possible de recenser quelques grandes indications pouvant aider au choix d’une modélisation. Les principaux éléments à considérer sont :

1. le chargement et son contenu fréquentiel ; par exemple, un séisme n’a en général que des composantes basses fréquences, à cause du filtrage haute fréquence par le sol ; en revanche un choc, ou n’importe quel chargement impulsif, contient des basses fréquences comme des hautes fréquences ;

2. les modes et fréquences de la structure, et en particulier les correspondances entre ces modes et les fréquences de la sollicitation ;

3. le comportement de la structure ; si par exemple la structure a un comportement linéaire, une sollicitation basse fréquence ne sollicitera pas les modes hautes fréquences ; en revanche, s’il y a des chocs internes, une structure sollicitée en basses fréquences génèrera des hautes fréquences.

La littérature nous fournit en outre quelques informations. Gibert montre qu’une onde de flexion dans une poutre peut être considérée comme une combinaison d’ondes de surface particulières [Gibert 1988]. Dans ce cas, il existe une condition sur l’onde :

1hcω

<< (3.1)

h : épaisseur de la poutre

c : célérité de l’onde

ω : pulsation

Cette condition montre l’impossibilité pour une onde de flexion de se développer à très hautes fréquences.

Par ailleurs, dans le cas de chargement impulsif (c’est à dire une sollicitation de faible durée totale, comparée aux périodes de vibration de la structure) Clough et Penzien constatent que la réponse de la structure n’a pas les mêmes caractères pendant le chargement et après le chargement [Clough et Penzien 1993]. Ils préconisent donc une analyse en deux phases. D’abord une phase de chargement (ou de vibration forcée) où l’amortissement interne a peu d’influence. La réponse de la structure peut

Page 51: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 3 : Choix de modélisation

51

être analysée en terme de spectre de choc (ou spectre de déplacement-réponse). Ensuite une seconde phase, dite de vibration libre, où l’amortissement joue tout son rôle.

Compte tenu des observations faites dans les chapitres précédents (Chapitre 1 et Chapitre 2) sur les chocs que constitue un impact d’avion, l’étude du choc d’un moteur d’avion avec une analyse purement locale, en utilisant les formules de perforation (éventuellement adaptées pour tenir compte de la déformabilité), semble tout à fait pertinente. En effet cette démarche est cohérente avec une durée d’impact très courte par rapport à la réponse de la structure qui peut donc être considérée comme rigide.

En revanche, pour l’analyse d’un impact d’avion, il est nécessaire d’avoir une approche globale. Un calcul local, pendant la phase dite de ‘vibration forcée’ serait insuffisant. La durée d’impact est plus longue. Des ondes de structure sont générées. Des modes basses fréquences de la structure sont sollicités. Il convient d’examiner à la fois le comportement local de la plaque en béton armé au droit de l’impact et le comportement global, c’est-à-dire l’ébranlement de l’ensemble de la structure.

De plus, si le couplage entre comportement local et global semble difficile à établir, il existe malgré tout un lien évident entre les deux. En effet, la réponse globale de la structure n’a pas véritablement d’influence sur le comportement local car pour la perforation, on a vu que seul comptait la réponse locale de la plaque. En revanche, on comprend bien qu’il faut a minima estimer correctement l’énergie dissipée localement pour pouvoir évaluer de façon pertinente l’énergie vibratoire transmise au reste de la structure.

Là encore, les contraintes liées au temps de calcul ont longtemps limité les possibilités d’un calcul complet, qui contienne à la fois l’analyse locale de la plaque en béton armé, et la réponse globale du bâtiment. Mais ce genre de calcul est maintenant possible grâce à la décomposition de domaine, multi-échelle en temps et en espace [Faucher et Combescure 2003], qui permet de diviser un bâtiment industriel en deux parties : la zone d’impact, avec un maillage raffiné et des petits pas de temps, et le reste de la structure pour l’étude vibratoire, avec un maillage plus grossier [Moulin et al. 2004].

D’où la nécessité de disposer d’outils permettant de simuler également le comportement de la structure dans des parties éloignées de l’impact.

3.1.2 Phénomènes à modéliser Les bâtiments concernés sont des constructions en béton armé essentiellement composées de plaques, c’est-à-dire que leurs éléments structuraux ont une dimension plus petite que les deux autres. Concrètement, il s’agit de murs, voiles, planchers et parois de protection. En outre, certains de ces éléments ne sont pas plans, c’est-à-dire qu’il s’agit de plaques courbes (ou de coques). Or un impact transversal sur une telle structure peut produire un effort membranaire non négligeable. Il faut donc en tenir compte et ne pas seulement considérer les ondes de flexion.

Compte tenu du type d’impact à modéliser, à savoir un choc mou dont les conséquences sont à la fois des ondes se propageant dans toute la structure et à la fois de la perforation dans la zone d’impact, nous avons vu au paragraphe précédent (§ 3.1.1) qu’il était nécessaire de faire un calcul de la structure toute entière. Nous nous intéresserons donc de manière générale au comportement du béton armé dans des plaques, et pas seulement à la représentation du processus de ruine locale en perforation.

Ainsi, les phénomènes qui apparaissent dans une plaque en béton armé sollicitée par des ondes de flexion et de membrane sont principalement les suivants :

la fissuration du béton en traction ;

l’écrasement et l’endommagement du béton en compression ;

la plastification des aciers longitudinaux.

Une modélisation de l’ensemble de ces comportements non-linéaires est donc indispensable.

Page 52: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

52

Quant à la perforation, on veut disposer d’outils permettant de caractériser le processus jusqu’au moment où le cône se détache, c’est-à-dire jusqu’à la rupture de la nappe des aciers longitudinaux inférieurs, qui correspond à la perforation effective. On s’intéresse donc aux phénomènes suivants :

fissuration du béton et formation du cône ;

rupture des aciers et détachement du cône ;

compétition avec le mode de rupture en flexion (voir § 2.2.4).

Le contenu phénoménologique que l’on doit être capable de représenter est donc assez riche. Mais il relève de problématiques somme toute très usuelles en génie civil. Il existe donc un certain nombre de solutions pour modéliser ce type de comportement.

3.2 Revue des différentes modélisations possibles La liste des phénomènes à modéliser, dressée dans le paragraphe précédent (§ 3.1.2), décrit des comportements non-linéaires du béton et de l’acier. Mais c’est le béton qui semble poser le plus de difficultés. En effet, il faut non seulement une modélisation qui différencie son comportement en traction (fissuration) et en compression (écrasement), mais surtout, comme il s’agit de caractériser le processus de perforation jusqu’au détachement du cône, on doit pouvoir représenter une macro-fissuration et une multi-fissuration, c’est-à-dire de fortes discontinuités dans la matière.

Or le choix d’un modèle de béton et d’une méthode de traitement de ces discontinuités sont tous deux liés à l’échelle de modélisation.

3.2.1 Modélisation des discontinuités dans la matière Pour une modélisation précise du processus de perforation, il semble qu’il faille disposer d’outils de simulation qui permettent de représenter la formation et l’évolution de nombreuses discontinuités, et éventuellement le détachement de blocs de matière du reste de la structure. Or ce type de problème se situe bien au-delà de ce que la méthode des éléments finis classique permet de modéliser dans le domaine continu.

Il existe cependant différentes approches pour traiter cette question des discontinuités dans la matière. Parmi les solutions proposées dans la littérature, une première catégorie adapte la méthode des éléments finis classiques et se base donc sur un maillage. Dans ce cas, plusieurs possibilités peuvent être énumérées :

la matière est dissociée de la maille : ce sont les méthodes eulériennes qui ne sont vraiment adaptées qu’aux très grandes vitesses d’impact (voir pour un exemple de calcul : [Leppänen et Gylltoft 2002]);

la discontinuité est représentée par une maille entière dans laquelle il n’y a plus de matière : c’est le principe de l’érosion, c’est-à-dire la disparition de l’élément au-delà d’un seuil de déformation plastique par exemple; ce genre d’approche donne de bons résultats qualitatifs (formes des cratères d’impact) pour des chocs à grande vitesse [Ågårdh et Laine 1999, Huang et al. 2005], mais des comparaisons plus fines avec des tests expérimentaux montrent que les résultats ne sont pas toujours satisfaisants [Unosson 2000] ; en outre, sauf exception [Johnson et al. 2002], il n’y a pas conservation de la masse ;

la discontinuité est située entre deux mailles : interfaces constituées de modèles cohésifs [Ortiz et Pandolfi. 1999] avec éventuellement un processus de maillage adaptatif qui permet de suivre la fissure [Bouchard et al. 2000] ;

la discontinuité est située à l’intérieur de la maille : citons la SDA (Strong Discontinuity Approach, aussi appelée ’embedded discontinuity model’) qui incorpore une discontinuité de déplacement dans l’élément fini [Ortiz et al. 1987, Jirásek 2000] ou la X-FEM (Extended Finite Element Method) qui a davantage fait ses preuves, du moins en statique, car son utilisation en dynamique n’en est qu’à ses débuts [Réthoré et al. 2005]. Cette méthode est

Page 53: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 3 : Choix de modélisation

53

certainement la plus performante pour suivre l’évolution d’une fissure mais ne résout ni la question de l’amorçage ni celle des fissures débouchantes et ne peut donc pas être appliquée en l’état à notre problème.

L’autre classe de modélisation rassemble les méthodes dites sans maillage (’meshless or meshfree methods’). On s’affranchit du maillage en concentrant l’information sur les noeuds. [Fries et Matthies 2004] proposent une excellente classification de ces méthodes dont les plus connues sont probablement :

SPH (Smoothed Particle Hydrodynamics) (pour l’application aux calculs d’impact, voir [Johnson et al. 1996, Hansson 2004]) ;

EFG (Element Free Galerkin), mais qui, à notre connaissance, n’a presque jamais été utilisée pour des calculs d’impact ;

DEM (Discrete Element Method): en français, méthode des éléments discrets, parfois appelée méthode des éléments distincts. Il s’agit d’une méthode particulaire dont le classement parmi les méthodes sans maillage est quelque peu abusif puisque les connections entre les différentes particules forment une sorte de réseau de mailles. Les spécificités de cette méthode viennent de ce qu’elle ne nécessite aucune intégration et qu’elle s’apparente aux méthodes où la discontinuité se situe entre les mailles puisqu’une interface cohésive est définie entre chaque particule [Sawamoto et al. 1998, Hentz et al. 2003, Wœstyn et al. 2006].

De manière générale, on peut constater que même si certaines de ces méthodes sont prometteuses, en particulier la DEM, elles sont toutes assez complexes à mettre en œuvre. De plus, elles nécessitent des améliorations concernant :

la modélisation des aciers (surtout dans le cas de modélisation du béton avec des méthodes sans maillage) ;

les méthodologies d’identification des paramètres matériau ;

les liens entre la méthode des éléments finis classiques et les méthodes sans maillage, car une simulation uniquement avec une de ces méthodes sans maillage est exorbitante en terme de temps de calcul. Seule la zone d’impact qui risque d’être perforée nécessiterait d’être modélisée avec ces méthodes.

Ces questions ont été, et sont encore l’objet d’investigations poussées (par exemple : [Oñate et Rojek 2004]) mais il semble qu’il ait davantage été mis l’accent sur les problématiques des chocs à haute vitesse et la dépendance à la vitesse de déformation [Hentz et al. 2004, Rabczuk et Eibl 2006].

Par conséquent, dans notre cas, la modélisation des discontinuités dans la matière est un problème qui se pose avec toute son acuité. Mais ce n’est pas le seul, car il s’agit également de disposer d’un modèle de béton performant, et avant cela de déterminer à quelle échelle on désire modéliser la plaque de béton armé.

3.2.2 Echelle de modélisation Il existe différentes stratégies de simulation du béton armé, diversement efficaces. Une question clé concerne le choix du modèle de matériau, qui est étroitement associé au type d’élément fini utilisé. Il est évident que la loi de comportement du matériau doit bien représenter les principaux phénomènes observés expérimentalement, mais elle dépend aussi du niveau de représentation souhaité : local, semi-global ou global [Prat et al. 1997].

Dans une description locale, l’acier et le béton sont modélisés séparément : des lois de comportement 3D sont utilisées avec des éléments de milieu continu 3D pour le béton, et l’acier est modélisé avec des poutres ou des barres, parfois avec des éléments 3D. Dans certains cas, des éléments 3D dégénérés, ou des méthodes spéciales qui imposent les conditions de contraintes planes, permettent d’utiliser des lois de comportement 3D avec des éléments multicouches. Ce genre d’approche permet une description très fine des non-linéarités des matériaux, avec les inconvénients qui en découlent comme la localisation. D’où la complexité et la lourdeur des calculs, et parfois la non-convergence des

Page 54: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

54

modèles. Par conséquent, la modélisation locale est très difficilement applicable à l’analyse d’une structure industrielle de grande taille en dynamique transitoire.

Quant à la modélisation semi-globale (ou semi-locale), elle tient compte de la forme et de la géométrie de la structure. Les éléments finis utilisés sont des éléments structuraux tels que les éléments poutres, plaques, coques, tous multicouches. Des hypothèses sont faites concernant les contraintes et les déformations (contraintes planes, déformations planes) ce qui implique que les équations constitutives des matériaux ne sont plus formulées en 3D. Mais l’acier et le béton restent modélisés séparément, et une intégration est faite sur plusieurs points de Gauss dans l’épaisseur. Cette approche, moins coûteuse en temps de calcul, est plus adaptée que la précédente à la simulation de bâtiments en béton armé.

Enfin, l’approche globale utilise également des éléments à cinématique réduite, mais sur une seule couche : il n’y a qu’un seul point de Gauss dans l’épaisseur. Le comportement des poutres et des plaques de béton armé est décrit en terme de variables globales (effort normal ou force membranaire, moment, effort tranchant). Ceci oblige à construire une loi de comportement spécifique à l’élément de béton armé. Certes la description est moins fine que dans des approches plus locales mais on y gagne en efficacité, surtout dans le cas de grandes structures.

3.2.3 Modélisations possibles Concrètement, les possibilités qui s’offrent à nous sont au nombre de trois.

La première consiste à faire le choix d’une modélisation locale, en utilisant des modèles de béton 3D. Les modèles existants dans la littérature sont très nombreux [Badel 2001, Ung Quoc 2003]. Mais ceux qui sont déjà rodés, qui ont fait leurs preuves et qui sont disponibles dans des codes de calcul industriels sont nettement plus rares. Nous citerons :

les modèles d’endommagement de Mazars, Badel ou Godard dans Code_Aster® [Mazars 1984, Badel 2001, Godard 2005] avec leur formulation non-locale [Proix 2006] ;

des modèles de plasticité : modèles Drucker-Prager dans Europlexus [López Cela et al. 1997, Europlexus 2006], modèle Ottosen dans CAST3M [Dahlbom et Ottosen 1990, Mersseman et Millard 1995, Rambach et al. 1998] ou celui de Malvar dans LS-DYNA [Malvar et al. 1997] ;

le modèle de fissuration distribuée de Winfrith dans LS-DYNA [Broadhouse 1995].

Bien d’autres modèles existent et seraient éventuellement utilisables dans un cadre industriel, mais tous ne donnent pas des résultats pertinents [Ghavamian et Delaplace 2003].

Ces modèles 3D doivent être combinés avec de l’érosion, sinon la simulation cesse d’être valide dès que les fissures s’ouvrent et que le cône commence à se déplacer de manière conséquente. Un calage du critère d’érosion est probablement nécessaire.

Outre les questions de pertinence et de disponibilité des modèles de béton, la principale difficulté d’une telle approche vient de la lourdeur des calculs et de leur précision dès qu’un algorithme d’érosion est utilisé.

Une alternative à la modélisation locale avec les éléments finis peut être d’utiliser la méthode des éléments discrets (DEM), qui semble pouvoir reproduire correctement le profil de fissuration du béton dans la zone d’impact. Puisqu’on a vu qu’il n’était pas nécessaire de tenir compte des effets de la vitesse de déformation sur le matériau, une loi de béton relativement simple peut suffire dans le cas d’un choc mou. Cependant, tant que les recherches sur les couplages entre éléments discrets et éléments finis et sur les performances de la DEM n’auront pas débouché sur des méthodes efficaces, cette solution ne peut s’appliquer qu’à des calculs sur une structure de dimension modeste.

Une troisième possibilité revient à utiliser une approche globale avec des éléments finis plaques. Un modèle de comportement de plaque en béton armé doit permettre de représenter les principaux phénomènes non-linéaires en jeu et en particulier le couplage membrane-flexion qui peut apparaître dans des structures courbes. De plus, comme on a montré que pour les chocs mous la formation du cône est un phénomène généré par une onde de flexion et d’effort tranchant dans la plaque,

Page 55: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 3 : Choix de modélisation

55

indépendamment de toute autre onde dans l’épaisseur sous la zone d’impact, la perforation peut être traitée en utilisant un critère global écrit en variables généralisées. Ce critère doit porter sur :

l’effort tranchant, car il s’agit d’un cône de cisaillement ;

le moment, car la compétition avec le mode de rupture en flexion doit être représentée ;

l’effort membranaire, toujours en raison de l’application à des structures courbées.

Voici quelques arguments qui militent en faveur de ce genre d’approche.

Tout d’abord, pendant toute la durée du processus de perforation jusqu’au moment où les aciers retenant le cône cèdent (voir Figure 2.3), même si le béton est fortement dégradé, il existe encore une certaine rigidité dans la plaque due aux aciers (aciers d’effort tranchant et longitudinaux au droit de la fissure en cône, aciers longitudinaux arrière dans le cône). Une approche globale avec des éléments plaques, qui considère le bouchon en forme de cône comme une structure plaque (même très détériorée) jusqu’à sa cassure au moment ou le projectile est traversant, permet de s’affranchir de la modélisation des discontinuités du béton, et de considérer le projectile comme un chargement appliqué sur la structure sans qu’on soit obligé de le modéliser. Ce dernier point n’est pas forcément acquis dans une modélisation 3D, que ce soit avec des éléments discrets ou des éléments finis : par exemple dans le cas où on utilise une méthode d’érosion pour représenter la dégradation du béton dans le cône et qu’on applique une pression en surface, il faut gérer au cours du calcul le fait que cette surface évolue avec la disparition d’éléments.

Ensuite, en terme de rapidité du calcul, l’approche globale est plus avantageuse qu’une description locale 3D, avec des éléments finis et a fortiori avec des éléments discrets.

Enfin, un dernier argument, mais pas le moindre, vient de l’absence de problème de localisation. En effet, on peut imaginer obtenir une robustesse du calcul supérieure dans des situations de localisation de la déformation et de la rupture par l’effet régularisant qu’apportent une dimension du calcul inférieure et un contrôle des déformations dans l’épaisseur (hypothèse de contrainte plane qui impose l’allure des déformations dans l’épaisseur).

La modélisation avec des variables globales et un critère de formation du cône présente donc des avantages certains. Malgré cela, force est de constater qu’il n’existe dans la littérature traitant des plaques en béton armé ni modèle global performant qui inclut l’effort membranaire, ni critère de rupture dépendant de l’effort membranaire, de l’effort tranchant et du moment de flexion. Le développement d’une modélisation globale complète représente ainsi l’essentiel de notre travail qui sera présenté dans les chapitres suivants.

Page 56: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie I : Phénoménologie des impacts de projectiles déformables : caractérisation, modélisation

56

3.3 Conclusion : une modélisation globale Dans le choix d’une stratégie de modélisation, les questions de taille et d’échelle sont essentielles.

Il y a tout d’abord l’échelle des phénomènes qu’il convient d’examiner. Si les chocs durs sont des phénomènes locaux, caractérisés par la pénétration du projectile dans un milieu continu 3D, où l’épaisseur du béton importe peu (sauf dans sa comparaison à la profondeur de pénétration pour définir la perforation ou la non-perforation), les chocs mous, en revanche, conduisent à des phénomènes caractéristiques de l’échelle de l’élément de structure : la propagation des ondes de flexion et d’effort tranchant. En cas de perforation, ce sont d’ailleurs ces ondes qui sont à l’origine du mode de rupture spécifique.

En se plaçant à l’échelle du bâtiment tout entier, la perforation sous choc mou reste un phénomène localisé à la zone d’impact : c’est bien là que l’on observe le cône de rupture. Néanmoins les ondes de structure produites par l’impact sollicitent l’ensemble de la structure et, à ce titre le choc mou doit être considéré comme un phénomène global.

L’échelle des phénomènes observés a des implications sur l’échelle de la modélisation elle-même. Dans le cas d’un choc dur, il n’est pas nécessaire de modéliser l’ensemble du bâtiment, une formule de perforation locale suffit à la prédiction. En revanche, pour le choc mou, le bâtiment entier doit être représenté pour permettre l’analyse vibratoire de l’ensemble de la structure. Un modèle traitant du comportement des plaques sollicitées par des ondes de structure est donc nécessaire. Pour la perforation elle-même, qui se produit localement à l’échelle du bâtiment mais globalement à l’échelle d’une plaque, un critère en variables globales est l’outil le plus simple permettant de caractériser le phénomène.

Ce chapitre a montré qu’il existait d’autres voies possibles, en particulier en utilisant des modèles 3D de béton avec de l’érosion, ou bien en employant la méthode des éléments discrets. Mais une approche plus globale, avec un modèle pour plaques en béton armé et un critère de rupture, tous deux en variables globales, permet :

de représenter le processus de perforation jusqu’au détachement du cône par rupture des aciers longitudinaux ;

de diminuer fortement les temps de calcul par rapport à une approche 3D et a fortiori par rapport à une approche avec éléments discrets ;

de s’affranchir des problèmes de localisation présents dans certains modèles 3D locaux de béton.

En revanche, le principal inconvénient de cette approche vient du fait que pour des structures plaques en béton armé avec courbure éventuelle, il n’existe dans la littérature ni modèle global, ni critère de rupture à l’effort tranchant.

La suite du travail de thèse consistera donc à développer, mettre en œuvre dans le logiciel Europlexus, et valider ces deux outils de simulation.

Page 57: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 3 : Choix de modélisation

57

Résumé et bilan de la partie I

Dans la première partie de ce mémoire, pour appréhender la modélisation de la chute d’un avion sur une structure surfacique de protection en béton armé, nous avons commencé par définir précisément le problème. La caractéristique principale qui distingue la chute d’avion d’autres types de choc est la déformation du projectile au cours de l’impact, associé à une forte dissipation d’énergie. Ceci relève intuitivement du choc mou. Comme les définitions existantes des chocs durs et mous semblaient imprécises et insuffisantes, nous avons proposé une classification générale des chocs. Cette nouvelle catégorisation des chocs tient compte à la fois des caractéristiques de la cible et du projectile, permet de comparer tous types de corps soumis à un impact (en particulier les structures), et surtout se base sur une caractérisation mécanique de la réponse de la cible en définissant une frontière entre ruine locale et ruine globale de la structure. L’impact d’avion est ainsi considéré comme un choc mou, ce qui nous permet en particulier de découpler la réponse de la cible du comportement du projectile : une force d’écrasement suffit à représenter la sollicitation du projectile sur la cible.

De plus, toujours pour définir les frontières de notre problème d’impact, nous avons mis en évidence que la chute d’avion était un phénomène qui se situait entre la dynamique lente du séisme et la dynamique très rapide des impacts balistiques. Pour la sollicitation considérée, le matériau dépend peu de la vitesse de déformation.

Une fois le problème clairement défini, nous avons étudié les phénomènes qui intervenaient lors d’un choc mou. En particulier l’étude du comportement local dans la zone d’impact a montré que la perforation se produisait toujours selon le même processus, par la formation et le détachement d’un cône de béton. Par l’analyse détaillée de la formation des fissures, nous avons mis en évidence que le cône était généré par des ondes de structure (ondes de flexion et d’effort tranchant).

La compréhension de l’origine des différents phénomènes apparaissant lors d’un choc mou montre qu’une modélisation simultanée de l’ensemble de la structure et de la perforation locale sous l’impact est nécessaire. Par conséquent, la modélisation de l’impact d’avion est envisagée à l’aide de deux outils de simulation :

un modèle de comportement global pour plaques en béton armé ;

un critère de perforation pour plaques en béton armé.

Les détails sur ces deux outils sont donnés dans les parties II et III de ce mémoire.

Page 58: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

58

Page 59: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

59

Partie II Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

L’approche globale, alternative aux modélisations 3D ou multicouches, décrit le comportement de l’élément de structure (poutre, plaque) à l’aide d’un seul point de Gauss dans l’épaisseur. Pour les poutres en béton armé, le modèle le plus largement utilisé est la loi trilinéaire de Takeda [Takeda et al. 1970]. Même si les modèles globaux de poutres sont encore l’objet de quelques travaux récents, en particulier pour représenter correctement le comportement cyclique et traiter la question de la localisation de l’endommagement [Addessi et Ciampi 2002], la recherche dans ce domaine a produit des modèles dont l’état de maturité a été prouvé depuis longtemps par leur large utilisation dans les calculs de structures sous chargement sismique [Combescure 2001]. Cependant dans la pratique, de nombreux bâtiments industriels ne sont pas composés uniquement de poutres et de poteaux, mais également de murs et de planchers. Il existe toujours la possibilité de représenter les dalles par des treillis de poutres, mais ce genre de solution n’est pas optimal. Des lois de comportement spécifiques pour plaques sont bien plus adaptées.

Pour modéliser le comportement de plaques en béton armé, en utilisant des variables généralisées, il est possible d’utiliser soit les variables dans le repère principal (repère propre), soit les variables associées au repère du ferraillage. La première méthode [Ibrahimbegovic et Frey 1993, Øverli et Sørensen 2000] a un réel intérêt pour modéliser la fissuration (rotating cracks) mais sa mise en œuvre est difficile dès que l’on veut inclure le comportement membranaire parce que le repère principal des moments n’est pas nécessairement identique au repère principal des forces membranaires. La seconde méthode [Aufaure et al. 1986, Rasmussen et Baker 1998] implique de définir le comportement correspondant à la torsion et au cisaillement dans le plan. Souvent, pour des raisons de simplicité, le comportement membranaire est négligé [Ibrahimbegovic et Frey 1993, Aufaure et al. 1986, Rasmussen et Baker 1998]. Pour le prendre en compte Øverli utilise une méthode assez complexe qui divise l’épaisseur de la plaque en deux couches, et se rapproche donc en fait d’un modèle multicouches.

Pour faire le tour des modélisations globales des plaques disponibles dans la littérature, il convient de noter qu’il existe également un certain nombre de travaux destinés à la simulation de voiles sous séisme [Vulcano et al. 1988, Fajfar et Fischinger 1991]. C’est une approche par macro-éléments composés de ressorts non-linéaires en parallèles. Un macro-élément peut représenter un mur entier sur la hauteur d’un étage d’immeuble. Mais il n’est souvent sollicité que dans une direction, et c’est essentiellement la réponse au cisaillement dans le plan qui est examinée. De plus ce genre de modélisation est assez différente de la méthode des éléments finis. Malgré un nom qui peut porter à confusion, ces travaux n’ont donc en réalité pas grand chose à voir avec la modélisation globale des plaques telle que nous l’envisageons dans la suite de ce document.

Page 60: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

60

Dans la seconde partie de ce mémoire, nous présentons une loi de comportement global, appelée GLRC (GLobal Reinforced Concrete), développée spécifiquement pour des plaques de béton armé avec ferraillage orthogonal. Ce modèle prend en compte à la fois les comportements de flexion et de membrane [Kœchlin et Potapov 2007].

Pour cela nous utilisons à la fois de l’endommagement et de la plasticité. La fissuration du béton est modélisée dans le cadre de la théorie de l’endommagement avec deux variables d’endommagement isotrope : une variable pour la fissuration de chacune des faces correspondant à la flexion positive et négative, la distinction étant faite selon le signe de la déformation de courbure. Les déformations résiduelles sont modélisées dans le cadre de la théorie de la plasticité, en partant de l’idée d’Aufaure [Aufaure et al. 1986] qui utilise le critère de Johansen destiné aux plaques de béton armé en flexion, pour s’en servir comme un critère de plasticité. Pour cela, nous généraliserons le critère de Johansen au comportement combiné de membrane et de flexion.

Le modèle est validé dans des cas de géométries et de chargements simples. Puis on montre une comparaison de résultats numériques obtenus avec GLRC et avec deux modèles 3D élastoplastiques destinés à la simulation du béton (modèles utilisant le critère d’Ottosen [Ottosen 1977, Dahlbom et Ottosen 1990]et le critère de Drucker-Prager [Drucker et Prager 1952, López Cela et al. 1996]), pour prouver que notre modèle global est une alternative relativement simple aux modélisation plus fines.

Cette partie se découpe en quatre chapitres :

Chapitre 4 : Description du modèle théorique, où les principales hypothèses et les bases thermodynamiques du modèles sont explicitées ;

Chapitre 5 : Critère de plasticité membrane-flexion, où le critère de Johansen pour plaques est généralisé aux sollicitations membranaires pour servir de critère de plasticité au modèle GLRC ;

Chapitre 6 : Intégration de la relation de comportement, où les lois d’état du modèle GLRC sont établies, ainsi que les principes de l’algorithme d’intégration ;

Chapitre 7 : Validation du modèle GLRC, où trois configurations permettent de tester le modèle programmé dans Europlexus.

Page 61: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 4 : Description du modèle théorique GLRC

61

Chapitre 4

Description du modèle théorique GLRC

Equation Section 4

Les phénomènes qui apparaissent dans une plaque ou une poutre en béton armé sollicitée par des ondes de flexion sont principalement les suivants (Figure 4.1) :

tout d’abord la fissuration du béton et une perte de raideur qui en découle ; dans le cas de flexion alternée, il peut y avoir refermeture des fissures et reprise de raideur ;

ensuite la plastification des aciers longitudinaux, qui génère des déformations résiduelles.

Ce sont donc ces deux principales sources de dissipation d’énergie que nous cherchons à représenter. Pour cela, nous utilisons les théories de l’endommagement et de la plasticité, en faisant les hypothèses relatives aux matériaux standards généralisés, afin d’obtenir une certaine robustesse dans le modèle, des qualités de convergence dans l’intégration, et surtout pour s’assurer qu’il y a bien dissipation d’énergie au cours du temps, autrement dit pour que le second principe de la thermodynamique soit bien vérifié.

C’est principalement le comportement en flexion qui nous intéresse. Cependant nous cherchons à intégrer le plus possible au modèle les effets membranaires, c’est-à-dire non seulement l’influence de l’effort membranaire sur le comportement en flexion, mais également les non-linéarités en membrane.

Un autre objectif de la modélisation est la cohérence avec le comportement en poutre. En effet, puisqu’une dalle sollicitée dans une seule direction ressemble très fortement à une poutre, nous voulons que la dalle, si elle est sollicitée dans une des deux directions du ferraillage, reproduise la réponse des poutres correspondantes. Notre approche consiste donc à étendre dans la configuration dalle un comportement poutre simple.

Plutôt que de présenter abruptement l’expression complète de l’énergie libre du modèle GLRC (GLobal Reinforced Concrete), nous choisissons une écriture plus didactique : partant du comportement élastique, l’expression de l’énergie est enrichie au fur et à mesure par de l’endommagement et puis de la plasticité. Pour pallier le défaut de ce type de présentation qui conduit à une dispersion des différentes hypothèses à l’intérieur du texte, l’ensemble des choix de modélisation est repris à la fin du chapitre.

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

0 0,01 0,02 0,03 0,04 0,05 0,06

Courbure (1/m)

Mom

ent (

kN.m

)

Figure 4.1 : Comportement expérimental d’une poutre en béton armé sollicitée en flexion

(d’après un essai de [Maldague 1965])

Plastification des aciers

Fissuration du bétonEtat élastique

Etat fissuré

Etat plastique

Page 62: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

62

4.1 Elasticité Nous nous plaçons dans le cadre de la théorie des plaques. En particulier, si la plaque admet le plan (xOy) comme plan moyen et (Oz) comme normale (Figure 4.2), la composante des contraintes normale à la plaque σzz est nulle ou négligeable et les déformations membranaires dans l’épaisseur peuvent être décrites à partir du tenseur de déformation moyenne ε0 et du tenseur de courbure κ :

( ) 0z z+ε = ε κ (4.1)

avec :

0x xy

xy y

ε εε ε

=

ε le tenseur de déformation moyenne ;

x xy

xy y

κ κκ κ

=

κ le tenseur de courbure.

Figure 4.2 : Plaque

Pour traiter de manière correcte le comportement en membrane et en flexion d’une plaque avec des variables globales, il est nécessaire d’écrire d’abord proprement les équations régissant l’élasticité. Si on suppose que les comportements élastiques en membrane et en flexion sont découplés, ce qui revient à faire l’hypothèse d’un ferraillage symétrique dans l’épaisseur, alors l’énergie libre Φ pour une plaque isotrope et homogène s’écrit :

( ) ( ) ( )0 0, m bΦ = Φ + Φε κ ε κ (4.2)

ou, plus précisément, en détaillant la contribution de membrane Φm et de flexion Φb :

( ) ( ) ( )

( ) ( ) ( )

2 20 0 0

2 2

2

2

mm m

bb b

tr tr

tr tr

λµ

λµ

Φ = +Φ = +

ε ε ε

κ κ κ (4.3)

on a donc :

( ) ( ) ( ) ( ) ( )2 22 20 0 0,

2 2m b

m btr tr tr trλ λµ µΦ = + + +ε κ ε ε κ κ (4.4)

avec :

λm µm les coefficients d’élasticité en membrane ;

λb µb les coefficients d’élasticité en flexion.

x

y

z

Oh

Page 63: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 4 : Description du modèle théorique GLRC

63

Ces coefficients d’élasticité, analogues aux coefficients de Lamé s’expriment ainsi :

( )

2h

1h

2 1

m

m

vE

E

λν

µν

= − =

+

( )

( )

3

2

3

h12 1

h24 1

b

b

vE

E

λν

µν

=

− = +

(4.5)

avec :

h l’épaisseur ;

E le module d’Young ;

ν le coefficient de Poisson.

C’est à partir de cette formulation du comportement élastique que nous introduirons successivement l’endommagement et la plasticité.

Remarque

On peut se demander pourquoi il est nécessaire d’exprimer l’élasticité avec une formulation si particulière du potentiel thermodynamique. Une expression du type : ( )0 0 0, : : : :m bA AΦ = +ε κ ε ε κ κ (4.6)

est plus générale et permettrait notamment d’intégrer l’orthotropie induite par un ferraillage différent selon x et selon y. Mais c’est la manière dont nous allons introduire l’endommagement qui nous impose d’avoir une expression en fonction du premier et du second invariant de la déformation. D’où l’isotropie en élasticité.

Page 64: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

64

4.2 Endommagement On suppose que la fissuration est associée principalement à la flexion. En réalité elle peut intervenir lorsque la dalle est soumise à une traction membranaire, ou un cisaillement dans le plan (phénomène important en cas de séisme). Mais ces deux sollicitations sont faibles dans le cas de la chute d’avion : ce sont les ondes de flexion qui sont prépondérantes lors d’un impact transversal sur une plaque (voir Chapitres 2 et 3). Par conséquent nous voulons caractériser l’évolution de la fissuration uniquement à l’aide des variables généralisées de flexion.

Comme les fissures dans le béton génèrent essentiellement une diminution de la rigidité en flexion (voir Figure 4.1), la théorie de l’endommagement est appropriée pour modéliser ce type de comportement. La fissuration peut intervenir en face supérieure ou en face inférieure de la dalle, selon qu’elle est sollicitée en flexion positive ou en flexion négative. Par conséquent deux variables d’endommagement sont nécessaires pour distinguer ces deux types de fissuration. Pour simplifier nous choisissons d’utiliser un endommagement isotrope. Le modèle ne donnera donc pas la direction des fissures.

4.2.1 Energie libre Pour nous assurer de la continuité de l’évolution du moment et la reprise de raideur en cas de chargement cyclique (principalement pour des petits cycles, avec une flexion positive et négative alternée), nous nous inspirons du modèle d’endommagement de Badel [Badel 2001] qui se base sur une distinction intelligente de la traction et de la compression (voir également [Godard 2005] pour une comparaison des méthodes de prise en compte de l’effet unilatéral).

Ainsi, la part de flexion Φb de l’énergie libre qui s’écrit, selon l’équation (4.3) :

( ) ( )2 2 2b

b b ii

trλµ κΦ = + ∑κ κ (4.7)

est remplacée par l’expression suivante :

( ) ( ) ( ) ( )2 2, , , , , ,2b

b I II I II b i i I IIi

D D tr tr D D D Dλξ µ κ ξ κΦ = + ∑κ κ κ (4.8)

où on note :

iκ la i –ème valeur propre du tenseur de courbure κ ;

DI , DII les variables internes d’endommagement.

Dans l’équation (4.8), ξ désigne une fonction qui distingue l’endommagement en flexion positive de l’endommagement en flexion négative, c’est-à-dire la fissuration en face inférieure et supérieure. Cette fonction est définie ainsi :

( ) ( ) ( )1 1x, , x x1 1

I III II

I II

D DD D H HD D

γ γξ + += + −

+ + (4.9)

avec γ une constante (γ <1 pour assurer la convexité) et H la fonction de Heaviside qui nous permet de connaître le type de flexion considérée :

( )x 1H = si x ≥ 0 (4.10)

( )x 0H = si x < 0 (4.11)

Page 65: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 4 : Description du modèle théorique GLRC

65

Remarques

La fonction x2ξ (x) est bien dérivable sur IR, de dérivée continue et sa dérivée est nulle en zéro.

Le choix de la fonction ξ est intimement lié au choix du critère d’endommagement, car ces deux éléments déterminent l’adoucissement du matériau. Dans le but d’obtenir un adoucissement affine, ou si on veut être plus précis, dans le but d’obtenir un moment fonction affine de la courbure en flexion simple, nous avons pris le parti de simplifier le plus possible le critère d’endommagement et de complexifier la fonction d’endommagement ξ , plutôt que de faire l’inverse. La justification du choix de ξ et du critère d’endommagement, faite en étudiant l’évolution du moment sur une poutre en flexion simple, se trouve dans l’Annexe B.

4.2.2 Critère d’endommagement On définit les variables YI , YII associées aux variables internes DI , DII :

I

I

IIII

YD

YD

∂Φ = ∂ ∂Φ = ∂

(4.12)

Si on fait l’hypothèse d’un découplage des deux phénomènes d’endommagement en flexion positive et négative, alors, dans le cadre des matériaux standards généralisés [Lemaître et Chaboche 1985] :

le potentiel de dissipation ΨD relatif à l’endommagement se décompose en une somme de deux potentiels convexes :

( ) ( ) ( ),I IID I II D I D IID D D DΨ = Ψ + Ψ (4.13)

de même pour son dual D∗Ψ par la transformée de Legendre-Fenchel :

( ) ( ) ( ),I IID I II D I D IIY Y Y Y∗ ∗ ∗Ψ = Ψ + Ψ (4.14)

et on peut écrire les relations suivantes :

I II

I II

D DI II

I II

D DI II

I II

Y YD D

D DY Y

∗ ∗

∂Ψ ∂Ψ= − = − ∂ ∂

∂Ψ ∂Ψ = − = − ∂ ∂

(4.15)

( ) ( )

( ) ( )

sup

sup

II

IIII

D I I I I ID

D II II II II IID

Y Y D D

Y Y D D

Ψ = − − Ψ

Ψ = − − Ψ

(4.16)

Page 66: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

66

On suppose que le comportement est indépendant des vitesses (phénomène dissipatif instantané) et on définit

ID∗Ψ et

IID∗Ψ comme les fonctions indicatrices des convexes ( )f 0

ID IY ≤ et ( )f 0IID IIY ≤ :

( )( )( )( )

0 si f 0

si f 0

0 si f 0

si f 0

I I

I I

II II

II II

D D I

D D I

D D II

D D II

Y

Y

Y

Y

Ψ = ≤Ψ = +∞ >

Ψ = ≤

Ψ = +∞ >

(4.17)

avec (si OD est une valeur arbitraire de ID ou IID ) :

( )

( )

( )( )

f

f

I

I

II

II

D OD I I

O

D OD II II

O

DY Y

D

DY Y

D

Ψ = − −

Ψ= − −

(4.18)

( ) /ID O OD DΨ ne dépend pas du choix de OD . En effet, un comportement indépendant des vitesses

implique que Ψ soit positivement homogène de degré un [Lemaître et Chaboche 1985].

Tout ceci justifie la définition de critères d’endommagement qui respectent le formalisme des matériaux standard généralisés, en posant :

( ) ( )( ) ( )

f , 0

f , 0I

II

D I I I I

D II II II II

Y Y D k

Y Y D k

= − − ≤

= − − ≤

κ

κ (4.19)

où kI et kII caractérisent les seuils des forces thermodynamiques YI et YII pour lesquels l’endommagement est activé dans la dalle de béton armé. Leur valeur est fixée ainsi :

( )( )

, 0

, 0

fI I I I

fII II II II

k Y D

k Y D

= − =

= − =

κ

κ (4.20)

où fIκ et f

IIκ sont les courbures lorsque le béton fissure respectivement en face supérieure et inférieure de la dalle (cf Figure 4.3).

Figure 4.3 : Comportement schématique d’une poutre en béton armé en flexion

Plastification des aciers

Fissuration du béton

Mx

κx

M f

pente p1

pente p2

κ f

Page 67: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 4 : Description du modèle théorique GLRC

67

Remarques

YI et YII sont négatifs. Par conséquent le second principe qui, à cause du découplage, s’écrit 0I IY D− ≥ et 0II IIY D− ≥ impose que 0≥ID et 0≥IID .

Les fonctions critères de l’endommagement définies en (4.19) sont convexes mais pas strictement convexes.

Les courbures fIκ et f

IIκ définissant la courbure en début de fissuration sont directement reliées via l’élasticité aux moments de fissuration (Figure 4.3), et peuvent être exprimées en fonction de la contrainte limite de traction du béton.

De manière générique (pour la flexion positive ou la flexion négative), en flexion simple, les équations (4.20) s’écrivent :

[ ]( )2 2

2f

b bk λ µ κγ −1= − + (4.21)

Donc en utilisant l’élasticité qui donne une expression du moment de fissuration fM :

( )2 f fb bM λ µ κ= + (4.22)

on obtient :

( )2

2 2

f

b b

Mk

λ µ1− γ

=+

(4.23)

Endommagement maximal

On fixe une valeur maximale maxID et max

IID pour l’endommagement car une plaque de béton armé fissurée garde toujours une certaine raideur en flexion (Figure 4.1). On impose donc :

max

max

0

0I I

II II

D D

D D

≤ ≤

≤ ≤ (4.24)

Ceci revient à ajouter formellement une fonction indicatrice du domaine admissible dans l’expression du potentiel thermodynamique explicité dans l’équation (4.8).

Pour l’identification de ces paramètres maxID et max

IID , on peut se baser sur le comportement en flexion simple, c’est-à-dire sans effort membranaire. Dans ce cas, de manière générique (pour la flexion positive ou la flexion négative), au début de la fissuration : 0D = et en fin de fissuration maxD D= . Donc, si on note p1 la pente élastique de la courbe moment-courbure avant fissuration et p2 la pente élastique de la courbe moment-courbure après fissuration (voir Figure 4.3), il est possible d’écrire :

max

2max

1

11

p Dp D

+ γ=

+ (4.25)

On en déduit l’expression de l’endommagement maximal :

max 2 2

1 11 /p pD

p p

= − − γ

(4.26)

Les aciers ne sont sollicités que lorsque le béton est fissuré. Par conséquent la plasticité n’intervient que lorsque l’endommagement a déjà eu lieu : la pente après endommagement est considérée comme "élastique".

Page 68: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

68

4.3 Comportement plastique Lorsque le chargement augmente, on observe non seulement la fissuration du béton, mais aussi la plastification des aciers (Figure 4.3). Pour tenir compte de ce phénomène qui génère des déformations résiduelles, de la plasticité est ajoutée à la loi de comportement.

Ainsi nous faisons l’hypothèse de partition des déformations en déformation élastique e e0 ,ε κ et

déformation plastique p p0 ,ε κ :

e p

0 0 0e p

= +

= +

ε ε ε

κ κ κ (4.27)

Nous réécrivons le potentiel thermodynamique (4.2) en utilisant l’expression pour la flexion Φb définie en (4.8) incluant l’endommagement et en l’enrichissant d’un terme Φecr régissant l’écrouissage (e et k sont les variables internes associées à l’écrouissage).

( ) ( ) ( ) ( )p p p p0 0 0 0, , , , , , , , , ,I II m b I II ecrD D D DΦ = Φ − + Φ − + Φe k e kε κ ε κ ε ε κ κ (4.28)

La plasticité est supposée totalement découplée des autres phénomènes de dissipation par endommagement en flexion positive ou négative. Par conséquent, toujours dans le cadre des matériaux standard généralisés et de manière un peu analogue à ce qui est décrit dans le paragraphe précédent en supposant un comportement indépendant de la vitesse, il est possible d’introduire un double critère de plasticité, l’un pour la flexion positive, l’autre pour la flexion négative, avec une loi d’écoulement normale associée couplant la membrane et la flexion et un écrouissage cinématique [Lemaître et Chaboche 1985, Simo et Hughes 1998].

En notant :

Nr, Mr les forces membranaires de rappel et moments de rappel, variables associées aux variables internes e et k ;

Cm, Cb les constantes de Prager en membrane et en flexion (matrices de raideurs plastiques généralisées) ;

I II,p pλ λ les multiplicateurs plastiques ;

nous écrivons le double critère :

( )( )

I

II

f , 0

f , 0

p

p

− − ≤

− − ≤

r r

r r

N N M M

N N M M (4.29)

puis la loi de normalité :

p I II0 I II

p I III II

f f

f f

p pp p

p pp p

∂ ∂λ λ∂ ∂

∂ ∂λ λ

∂ ∂

+

+

=N N

=M M

ε

κ

(4.30)

et enfin les relations entre les déformations plastiques et les efforts de rappel :

p0p

=

=

rm

rb

N C

M C

ε

κ (4.31)

Page 69: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 4 : Description du modèle théorique GLRC

69

Remarques

Le terme Φecr s’écrit formellement pour un écrouissage cinématique :

( ) 1 1, : : : :2 2ecrΦ = +m be k C e e C k k (4.32)

Il n’y a qu’un multiplicateur plastique par critère dans le but de coupler le comportement membranaire et le comportement de flexion au niveau de la plasticité.

4.4 Récapitulatif des hypothèses Nous résumons l’ensemble des hypothèses que nous avons faites au cours de l’élaboration du modèle, pour discuter de leur validité et de leurs implications.

Découplage membrane-flexion en élasticité

Le couplage n’existe en réalité en élasticité que lorsque le ferraillage est dissymétrique dans l’épaisseur de la dalle, c’est-à-dire lorsque le ferraillage du lit supérieur n’est pas identique au ferraillage inférieur. Cette hypothèse n’empêche pas de définir un couplage pour le comportement non-linéaire.

Isotropie de la plaque

Cela implique que le ferraillage soit identique dans les deux directions x et y. Cette hypothèse est nécessaire pour introduire l’endommagement. Mais elle est inutile pour le comportement membranaire puisque l’endommagement n’intervient qu’en flexion.

Découplage des différents phénomènes non-linéaires

Cette simplification vient du constat que l’endommagement représentant la fissuration du béton ainsi que la plasticité correspondant à la plastification des aciers sont associés au comportement de deux matériaux bien distincts. Quant au découplage entre endommagement en flexion positive et endommagement en flexion négative, la justification vient de ce qu’ils représentent chacun une fissuration dans une zone différente de la plaque : l’un en face supérieure, l’autre en face inférieure.

Endommagement

L’endommagement permet de résoudre deux problèmes inhérents au modèle simplement élasto-plastique sans endommagement :

difficulté à identifier un comportement élastique équivalent au comportement de la dalle avant plastification des aciers : quelle raideur en flexion choisir entre celle du matériau non-fissuré et celle du matériau fissuré ? quelle pente choisir entre p1 et p2 (voir Figure 4.3) ?

mauvaise modélisation de l’énergie dissipée par la fissuration du béton.

Endommagement associé uniquement à la flexion

Cette hypothèse forte revient non seulement à dire qu’une traction de la membrane ou qu’un cisaillement dans le plan ne génère ni fissuration, ni par conséquent de diminution de raideur de la plaque, mais ce choix implique aussi qu’on néglige les effets d’une compression membranaire sur la fissuration en flexion.

Page 70: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

70

Endommagement isotrope

C’est la manière la plus simple de traiter l’endommagement. On néglige ainsi le caractère directionnel des fissures.

Deux variables d’endommagement

Ce choix permet de dissocier la fissuration produite par la flexion positive de celle générée par la flexion négative. En cas de flexion alternée, il est alors possible de représenter la reprise de raideur due à une refermeture des fissures.

Plasticité

La plastification des armatures est le phénomène prépondérant lorsqu’une dalle en béton armé est fortement sollicitée en flexion par un impact. Négliger ce phénomène, en tenant compte ou non de la fissuration du béton reviendrait à dire qu’il n’y a pas de déplacement résiduel de la dalle à l’issue de l’impact.

Couplage membrane-flexion en plasticité : critère fonction de M et N

Le couplage entre le comportement de membrane et de flexion intervient de manière générale dès qu’il y a dissymétrie dans l’épaisseur de la section de la plaque. L’origine de la dissymétrie peut venir de la géométrie en élasticité (cet effet relevant de l’hypothèse sur le découplage membrane-flexion en élasticité), ou bien du comportement à cause des non-linéarités. Ainsi la variation du moment seuil de plasticité des aciers en fonction de l’effort membranaire se révèle un phénomène très important qu’il est impossible de négliger dans les structures courbes (dômes, arcs) [Braestrup 1980, Kœchlin et al. 2002]. Il convient donc de définir un critère dépendant à la fois du moment et de l’effort membranaire. Couplage membrane-flexion en plasticité : plasticité associée et écoulement normal

Utiliser un critère fonction de l’effort membranaire sans tenir compte de déformations plastiques en membrane conduit à une plasticité non-associée, et par conséquent à des problèmes de convergence du modèle sous fortes sollicitations. On opte donc pour les hypothèses classiques de plasticité associée et d’écoulement normal qui donne une certaine régularité au modèle. Double critère en plasticité

Ce n’est pas véritablement une hypothèse, mais une manière d’écrire le critère définissant le domaine d’élasticité. Cette formalisation vient de ce qu’il existe un seuil en flexion positive et un seuil en flexion négative qui ont des expressions différentes. Une formalisation avec un seul critère revient à écrire : I IIf max(f ,f ) 0p p p= ≤ . On notera que le gradient de la fonction critère f p n’est pas continu à l’intersection des deux critères I IIf = f = 0p p . Ecrouissage cinématique

La plasticité de la dalle en flexion est la conséquence de l’écrasement en compression du béton et surtout de la plasticité des aciers. Or pour ce type de matériau, l’écrouissage cinématique, plus évolué que l’écrouissage isotrope, permet d’obtenir une première approximation de l’effet Bauschinger [Lemaître et Chaboche 1985].

Page 71: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 4 : Description du modèle théorique GLRC

71

Expression de l’énergie libre

( ) ( ) ( ) ( )p p p p0 0 0 0, , , , , , , , , ,I II m b I II ecrD D D DΦ = Φ − + Φ − + Φe k e kε κ ε κ ε ε κ κ (4.33)

avec :

( ) ( ) ( )2e e e20 0 0

2m

m mtr trλµΦ = +ε ε ε (4.34)

( ) ( ) ( ) ( )2e e e e2 e, , , , , ,2b

b I II I II b i i I IIi

D D tr tr D D D Dλξ µ κ ξ κΦ = + ∑κ κ κ (4.35)

( ) 1 1, : : : :2 2ecr m bΦ = +e k C e e C k k (4.36)

Critère d’endommagement

( ) ( )( ) ( )

f , 0

f , 0I

II

D I I I I

D II II II II

Y Y D k

Y Y D k

= − − ≤

= − − ≤

κ

κ (4.37)

Critère de plasticité

( )( )

I

II

f , 0

f , 0

p

p

− − ≤

− − ≤

r r

r r

N N M M

N N M M (4.38)

4.5 Conclusion Dans ce chapitre, nous avons décrit les bases thermodynamiques du modèle GLRC construit pour modéliser le comportement des plaques en béton armé. Cette modélisation s’effectue dans le cadre des matériaux standard généralisés, à partir de la théorie de l’endommagement et de la plasticité. L’endommagement est censé représenter la fissuration du béton et la plasticité les déformations résiduelles générées par la plastification du ferraillage. L’ensemble des hypothèses correspondantes a été détaillé et analysé.

Dans les faits, l’énergie libre a été explicitée en fonction des différentes variables (variables physiques et variables internes) et des caractéristiques des matériaux. Les phénomènes non-linéaires, découplés les uns des autres, sont décrits formellement à l’aide de potentiels de dissipation qui, dans notre cas correspondent à des critères d’évolution de l’endommagement et de la plasticité.

Si le critère sur l’endommagement a été décrit de manière relativement simple dans ce chapitre 4, le critère de plasticité nécessite un examen plus approfondi dans le cade du chapitre 5.

Page 72: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

72

Page 73: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 5 : Critère de plasticité membrane-flexion

73

Chapitre 5

Critère de plasticité membrane-flexion

Equation Section (Next)

Au cours du chapitre précédent a été mise en évidence la nécessité d’établir un critère de plasticité permettant de caractériser l’inflexion de la courbe moment-courbure correspondant à la plastification des aciers en traction (voir Figure 4.1).

En 1962, Johansen a proposé de manière intuitive un tel critère dans le cadre de la théorie des lignes de rupture pour les plaques (yield line theory) [Johansen 1962]. Depuis, ce critère a été démontré analytiquement par différentes méthodes d’analyse limite, a été validé avec des tests expérimentaux, et est maintenant reconnu comme un critère de référence pour la ruine en flexion des plaques en béton armé ([Save et al. 1997] donne une bonne revue de ce critère). Cependant ce critère de Johansen n’est valide que lorsque les forces membranaires sont négligeables. Des tentatives ont été faites pour obtenir un critère dans le cas général d’une dalle soumise à six composantes d’efforts généralisés (Nx, Ny, Nxy Mx, My, Mxy) (voir un bref aperçu dans [Nielsen 1999]). On notera en particulier le travail de Cookson qui, à partir d’une approximation paramétrique du critère poutre, en déduit un critère plaque, mais son critère est relativement complexe [Cookson 1979].

Dans ce chapitre, nous cherchons donc à généraliser, en une expression simple, le critère de Johansen aux cas où les forces membranaires ne sont pas nulles. Pour cela, nous partons du cas d’une poutre en flexion composée (moment et effort normal), pour ensuite examiner le cas d’une plaque.

La démonstration se fait en utilisant les principes du calcul à la rupture décrit par Salençon, car son formalisme est propre et rigoureux, comparé à d’autres approches d’analyse limite disponibles dans la littérature [Salençon 2001]. L’approche cinématique par l’extérieur est ainsi appliquée : en majorant le travail des forces internes, on obtient une borne supérieure du chargement. Le critère global est donc en fait le plus petit majorant trouvé pour tous les états de déformation compatibles avec le mécanisme de ruine considéré.

Comme cette méthode donne un critère sous forme de borne supérieure et que cette borne pourrait être assez éloignée du seuil réel de ruine, une validation expérimentale du critère est nécessaire.

Page 74: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

74

5.1 Critère poutre Nous commençons par préciser les données de départ (données géométriques, données matériau). Dans un deuxième temps ces données sont exploitées pour définir un champ de déformation virtuel admissible pour la cinématique, et un majorant de la puissance des efforts intérieurs. A partir de ces éléments, nous obtenons dans un troisième temps un critère local poutre. Enfin, ce critère est validé.

5.1.1 Notations et hypothèses On se donne une géométrie, un mécanisme de ruine et des critères locaux sur le béton et l’acier.

Figure 5.1 : Géométrie et mécanisme de ruine dans la poutre

Géométrie

Soit une poutre P, de largeur unitaire, renforcée avec deux lits d’aciers (Figure 5.1). Ses principales caractéristiques sont notées :

h hauteur de la poutre

Ωsup aire du lit supérieur des aciers.

Ωinf aire du lit inférieur des aciers.

z = ρsuph/2 position du lit supérieur

z = ρinfh/2 position du lit inférieur ( inf sup1 1ρ ρ− ≤ < ≤ )

Mécanisme de ruine

Nous postulons l’existence d’un mécanisme de ruine correspondant à un saut de vitesse le long d’une surface verticale Σ (Figure 5.1). Nous supposons qu’il n’y a pas de glissement selon z, donc que la discontinuité des vitesses n’a qu’une composante selon x.

z

h 0x

ρsuph/2

ρinfh/2

h/2

–h/2Σ

Ωsup

Ωinf O

Page 75: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 5 : Critère de plasticité membrane-flexion

75

Critères locaux des matériaux

Pour le béton, nous supposons qu’aucune des contraintes principales σi ne dépasse un seuil en compression et qu’il ne résiste pas à la traction. Le critère local s’écrit donc :

0c if− ≤ σ ≤ (5.1)

Il s’agit donc d’un critère carré en 2D (contraintes planes) et cubique en 3D (dans ce cas, le critère ne tient pas compte de l’augmentation de la résistance du béton lors d’une compression hydrostatique) .

Pour ce qui relève de l’acier, nous faisons l’hypothèse d’une résistance des barres identique en traction et en compression. Ainsi, si σu est la contrainte unidimensionnelle dans l’acier :

u Yσ σ≤ (5.2)

Efforts généralisés

La force normale et le moment sont définis ainsi :

h / 2

h / 2xxN dzσ

= ∫ (5.3)

h / 2

h / 2xxM z dzσ

= ∫ (5.4)

5.1.2 Préalables Les données du paragraphe précédent nous permettent de définir d’une part des champs de déformation virtuels admissibles et d’autre part les fonctions d’appui des critères locaux.

Champs de vitesses et de déformation

Nous définissons un champ de vitesse virtuel admissible pour la cinématique proposée dans le paragraphe précédent. Si on suppose que la vitesse est nulle dans la partie gauche de la poutre P, et que le mouvement de la partie droite est celui d’un corps rigide, alors en notant ( )0 0 0, ,x zu u ω la vitesse et la rotation virtuelle au point O, le champ de déformation virtuelle ε peut s’écrire :

( ) [ ]00 0

2z

x x x x z z xuu z e e e e e eε ω= − ⊗ + ⊗ + ⊗ sur la surface Σ (5.5)

0ε = sur P\Σ (5.6)

Comme il n’y a pas de glissement le long de z, nous avons 0 0zu = et donc finalement :

( )0 0 x x xu z e eε ω= − ⊗ sur la surface Σ (5.7)

Faire l’hypothèse d’un critère carré associé à des contraintes planes est certainement plus justifié que de

supposer un critère 3D de résistance local du béton de forme cubique. L’hypothèse de contraintes planes est d’ailleurs faite par [Save et al. 1997] et légitimée dans [Averbuch 1996].

Page 76: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

76

Fonction d’appui

Pour pouvoir trouver une borne du chargement, il faut d’abord trouver une borne de la puissance des forces internes. Pour cela, il nous faut l’expression des fonctions d’appui Π définies pour un critère local de contrainte flocal par :

( ) ( ) sup : 0 localfσ

ε σ εΠ = σ ≤ (5.8)

Pour le béton, le calcul de la fonction d’appui :

( ) sup : 0 Beton c ifσ

ε σ εΠ = − ≤ σ ≤ (5.9)

nous donne :

( ) ( ) 1 2 32c

Betonf trε ε ε ε ε

− Π = − − − (5.10)

On notera que puisque le critère est totalement borné, la fonction d’appui est définie quel que soit le champ de déformation choisi : tous les champs de vitesse sont pertinents.

Si nous cherchons la valeur de la fonction d’appui (5.10) sur Σ pour les champs de déformation virtuelle décrits dans l’équation (5.7), nous obtenons :

( ) 0Beton εΠ = si 0 0 0xu zω− > (5.11)

( ) ( )0 0 zBeton c xf uε ωΠ = − − si 0 0 0xu zω− ≤ (5.12)

Quant à l’acier, la fonction d’appui du critère (5.2) pour les même champs de déformation virtuelle (5.7) s’exprime de la manière suivante :

( ) 0 0Acier Y xu zε σ ωΠ = − (5.13)

5.1.3 Critère sur N et M Nous appliquons l’approche cinématique par l’extérieur décrite par Salençon pour obtenir une borne supérieure du chargement [Salençon 2001].

L’écriture du principe des puissances virtuelles nous donne :

0 0P

: dPxNu Mω σ ε+ = ∫ (5.14)

En utilisant l’expression des fonctions d’appui, nous pourrons tout d’abord obtenir une borne supérieure de la puissance des efforts extérieurs 0 0xNu Mω+ . Cette borne, ou plutôt ces bornes, dépendront des composantes 0xu et 0ω du champ de vitesse virtuel. Dans un second temps, nous chercherons le minimum de ces bornes pour tous les champs de vitesse considérés, en éliminant 0xu et

0ω .

Tout d’abord, majorons l’expression de la puissance des forces extérieures. La définition des fonctions d’appui (5.8) nous permet de transformer l’équation (5.14) en une inégalité :

( )0 0xNu M dSω εΣ

+ ≤ Π∫ (5.15)

Page 77: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 5 : Critère de plasticité membrane-flexion

77

A partir des expressions (5.11), (5.12) et (5.13) des fonctions d’appui, nous obtenons en cas de flexion positive ( 0 0ω > ) :

( )h2

0 0 0 0 sup 0 sup 0 inf 0 inf 0h2

h h z z 2 2x c x Y x Y xNu M f u d u uω ω σ ρ ω σ ρ ω

η+ ≤ − − + Ω − + Ω −∫ (5.16)

où 0 0z h/2 /xu ω= η = désigne la position dans l’épaisseur où 0=xxε , autrement dit la fibre neutre. En intégrant, puis en divisant l’inégalité (5.16) par 0h / 2ω , nous obtenons pour 1 1− ≤ η ≤ :

( )2sup sup inf inf

2 h h 4c Y YMN f σ ρ σ ρη + ≤ η −1 + Ω η − + Ω η − (5.17)

Posons :

( ) ( )2sup sup inf inf

2 h h 4c Y YMg N f σ ρ σ ρη = η + − η −1 − Ω η − − Ω η − (5.18)

On doit avoir ( ) 0g η ≤ pour tout 1 1− ≤ η ≤ .

Examinons tout d’abord les deux cas particuliers lorsque la fibre neutre est située au droit des nappes d’aciers, c’est-à-dire lorsque supρη = ou infρη = . Ils nous donnent les deux conditions :

( )2sup sup inf sup inf

2 h 0h 4c YMN fρ ρ σ ρ ρ+ − −1 − Ω − ≤ (5.19)

( )2inf inf sup inf sup

2 h 0 h 4c YMN fρ ρ σ ρ ρ+ − −1 − Ω − ≤ (5.20)

Dans le cas général, lorsque supρη ≠ et infρη ≠ , le critère (N,M) est donné par l’enveloppe des courbes paramétriques (5.17). Cette enveloppe est déterminée par le système d’équations :

( )( )

0

' 0

g

g

η ≤

η = (5.21)

qui équivaut à :

( )

( ) ( ) ( )

2sup sup inf inf

sup sup inf inf

2 h 0h 4h 1 02

c Y Y

c Y Y

MN f

N f sign sign

σ ρ σ ρ

σ ρ σ ρ

η + − η −1 − Ω η − − Ω η − ≤ − η − − Ω η − − Ω η − =

(5.22)

En utilisant l’égalité dans l’inégalité du système (5.22), on obtient finalement un critère paramétrique qui s’écrit :

( ) ( ) ( )

( ) ( ) ( )

2sup sup sup inf inf inf

sup sup inf inf

2 h 1 0h 4

h 1 02

c Y Y

c Y Y

M f sign sign

N f sign sign

ρ σ ρ ρ σ ρ

σ ρ σ ρ

− − η + Ω η − + Ω η − ≤ − η − − Ω η − − Ω η − =

(5.23)

Page 78: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

78

Le cas de la flexion négative 0 0ω < fournit des équations similaires à (5.19), (5.20) et (5.23) :

( )2sup sup inf sup inf

2 h 0h 4c YMN fρ ρ σ ρ ρ+ + +1 + Ω − ≥ (5.24)

( )2inf inf sup inf sup

2 h 0h 4c YMN fρ ρ σ ρ ρ+ + +1 + Ω − ≥ (5.25)

( ) ( ) ( )

( ) ( ) ( )

sup sup sup inf inf inf

sup sup inf inf

2 h 0h 4

h 1 02

c Y Y

c Y Y

M f sign sign

N f sign sign

ρ σ ρ σ ρ

σ ρ σ ρ

2 + 1− η − Ω η − ρ − Ω η − ≥ + η + + Ω η − + Ω η − =

(5.26)

Dans l’espace (N,M), le critère (équations (5.19), (5.20), (5.23), (5.24) (5.25) (5.26)) est en partie parabolique, en partie affine. En effet, l’élimination du paramètre η dans les équations (5.23) et (5.26) donne une expression de M fonction de N au second degré.

Remarques :

Ce résultat se trouve dans [Save et al. 1997], avec simplement deux différences. D’une part, le critère n’est établi que pour une poutre avec un seul lit d’acier. Cependant l’ajout d’une seconde nappe d’acier ne nous a pas posé de difficulté particulière. Les formules peuvent donc être facilement généralisées au cas de n lits d’acier. D’autre part [Save et al. 1997] fait une hypothèse de contraintes planes et part donc d’un critère carré (au lieu d’un critère cubique dans notre cas).

Un critère poutre similaire (en partie affine, en partie parabolique) est établi également dans [Averbuch 1996], en partant pour le béton d’un critère local de Coulomb tronqué en traction, et en utilisant des champs de vitesse continus avec des composantes dans les trois directions. Averbuch montre que son critère peut être aussi obtenu par une approche statique par l’intérieur : c’est donc une borne exacte. A posteriori, il vérifie qu’une approche en contrainte plane aurait donné le même résultat.

Page 79: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 5 : Critère de plasticité membrane-flexion

79

5.1.4 Validation du critère poutre avec deux lits d’acier La forme du critère dans un cas d’une poutre de 1.0 mètre de large dont le ferraillage est dissymétrique dans l’épaisseur peut se voir sur la Figure 5.2. Pour davantage de détails sur la géométrie de la poutre ainsi que sur les caractéristiques de son béton et de ses aciers il faut se référer au Tableau 5.1.

La Figure 5.2 montre également une comparaison avec un calcul multicouches où chaque moment limite (moment de plastification) a été identifié sur la réponse moment courbure pour un effort normal donné. On constate que dans la plupart des cas, le calcul multicouches et le critère obtenu par l’analyse limite donnent des résultats très proches l’un de l’autre. Cela corrobore les résultats déjà existants dans la littérature [Save et al. 1997] en prouvant une fois de plus la validité de ce critère poutre, pour un ou deux lits d’acier.

Paramètres Valeur Unité

h 0.5 m fc 35 MPa σY 500 MPa

Ωinf 8.04 10-3 m2 Ωsup 5.03 10-4 m2 ρinf 0.824 ρsup -0.872

Tableau 5.1 : Caractéristiques de la poutre pour la validation

-2

-1,5

-1

-0,5

0

0,5

1

1,5

2

-25 -20 -15 -10 -5 0 5

N (MN)

M (M

N.m

)

Critère poutre

Calculmulticouches

Figure 5.2 : Comparaison du critère par analyse limite avec un calcul d’une poutre multicouches

Page 80: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

80

5.2 Extension au critère dalle Dans ce paragraphe, nous cherchons à étendre les résultats obtenus pour la poutre au cas des dalles en béton armé avec ferraillage orthogonal. D’après [Save et al. 1997, Nielsen 1999], si le critère plaque est atteint, cela signifie qu’il existe une section de la plaque, inclinée d’un angle α par rapport à l’axe des abscisses (Figure 5.3), pour laquelle le critère poutre est atteint.

En réalité, une telle écriture du problème conduit à une expression pour laquelle il n’est pas possible d’éliminer α dans le cas général. Dans un premier temps, on examine un cas particulier, pour obtenir l’expression du critère. Dans un second temps, on valide expérimentalement ce critère dans le cas général.

Figure 5.3 : Repérage de la section de ruine sur la dalle (ferraillage orthogonal)

5.2.1 Obtention du critère dans un cas particulier Nous commençons donc par écrire le critère poutre dans une section orientée par α, en fonction des variables dans le repère (x,y). Puis on cherche l’optimum par rapport à α pour obtenir le critère dalle, dans le cas particulier où le ferraillage est identique selon les directions x et y et où l’effort normal est également identique selon x et y.

5.2.1.1 Critère poutre dans une section orientée par α Considérons une section de la plaque dont la normale fait un angle α avec l’axe des abscisses (Figure 5.3). On note :

Ωxsup et Ωxinf : aires d’acier du ferraillage longitudinal dans la direction x, correspondant aux lits supérieurs et inférieurs (m2/m).

Ωysup et Ωyinf : aires d’acier du ferraillage longitudinal dans la direction y, correspondant aux lits supérieurs et inférieurs (m2/m).

Alors, Ωsup et Ωinf l’aire effective des aciers dans la section α s’écrit [Save et al. 1997] :

2 2

sup sup sup

2 2inf inf inf

cos sin

cos sinx y

x y

α α

α α

Ω = Ω + Ω

Ω = Ω + Ω (5.27)

α x

y

X

Y

Page 81: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 5 : Critère de plasticité membrane-flexion

81

En utilisant l’effort normal et le moment adimensionnels définis par :

h c

Nnfα = et 2h c

Mmfα = (5.28)

la frontière du critère poutre, dans sa partie parabolique (équations (5.23) et (5.26) avec l’égalité au lieu de l’inégalité) peut se réécrire :

( ) ( )

( )

( ) ( )

( )

sup 2 2sup sup

2 2infinf inf

sup sup 2 2sup sup

2 2inf infinf inf

cos sinh

1 cos sinh 2

cos sin2 h

1 cos sin2 h 4

Yx y

c

Yx y

c

Yx y

c

Yx y

c

nf

f

mf

f

α

α

σα α

σ α α

σ ρα α

ρ σ α α2

ξξη = + Ω + Ω

ξξ − ξη+ Ω + Ω −

ξξη = − Ω + Ω

ξξ − η− Ω + Ω + ξ

(5.29)

avec trois paramètres indépendants de α :

( )sup supsign ρξ = η − et ( )inf infsign ρξ = η − qui caractérisent la position de la fibre neutre par

rapport aux lits d’acier ;

1ξ = ± qui caractérise le type de flexion ( 1ξ = pour la flexion positive et 1ξ = − pour la flexion négative).

On introduit les variables suivantes:

( )

( )

sup sup inf inf

sup sup inf inf

h

h

Yx x x

c

Yy y y

c

f

f

σ

σ

γ = ξ Ω + ξ Ωγ = ξ Ω + ξ Ω

(5.30)

et :

sup sup sup inf inf inf

sup sup inf inf

sup sup sup inf inf inf

sup sup inf inf

x xx

x x

y yy

y y

ρ ρρ

ρ ρρ

ξ Ω + ξ Ω= ξ Ω + ξ Ω

ξ Ω + ξ Ω = ξ Ω + ξ Ω

(5.31)

Alors le critère (5.29) s’écrit, d’une manière un peu plus condensée qui montre la contribution de l’angle α :

( )

( )

2 2

2 2

1cos sin2

1 1 1cos sin2 2 4

x y

x x y y

n

m

α

α

α α

ρ α ρ α2

− ξη η = ξγ + ξγ −

− η η = − ξ γ − ξ γ + ξ

(5.32)

Page 82: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

82

En éliminant η, l’équation paramétrique (5.32) devient une équation du second degré en nα avec α comme paramètre :

( ),m f nξα α α= (5.33)

qui s’exprime :

( )( )

( )( )

2 2 2

22 2

2 2

2 2

/2 2 cos sin /2

cos sin /2

cos sin /2

cos sin /2

x y

x y

x y

x x y y

m n nα α αα α

α α

α α

ρ α ρ α

= −ξ + γ + γ − ξ

− ξ γ + γ

+ γ + γ

− ξ γ + γ

(5.34)

Maintenant, nous allons écrire ce critère dans le repère (x,y). L’effort normal nα et le moment mα peuvent s’exprimer en fonction de α et en fonction des efforts normaux adimensionnels nx, ny, nxy et des moments adimensionnels mx, my, mxy :

2 2

2 2

cos sin 2 cos sin

cos sin 2 cos sinx y xy

x y xy

n n n n

m m m mα

α

α α α α

α α α α

= + +

= + + (5.35)

En utilisant ces expressions dans le critère (5.34), nous obtenons une équation de la forme suivante :

2 3 4tan tan tan tan 0a b c d eα α α α+ + + + = (5.36)

avec a, b, c, d, et e des paramètres indépendants de α :

( ) ( )( )

( ) ( )( )( )( )

( )( ) ( )

2

x

2

2

1 / 2 / 2 / 2

2 2

1 / 2 / 2 1 / 2 / 2

2

2 2

1 / 2 2 / 2 / 2

x x x x x x

xy xy xy x x

x x x y y y y

xy x x y y

xy xy xy y y

y y y y y y

a m n n

b m n n n

c m n m n

n n n

d m n n n

e m n n

ρ

ρ ρ

ρ

= − − ξ γ + ξ + ξ − ξγ = + ξ + ξ − ξγ = − − ξ γ + ξ + − − ξ γ + ξ + ξ − + − ξγ − ξγ

= + ξ + ξ − ξγ = − − ξ γ + ξ + ξ − ξγ

(5.37)

On remarquera que :

( ) ( ) 222 / 2xy x x y yc a e n n n = + + ξ − ξ − ξγ − − ξγ (5.38)

et que :

( ) ( )2 2xy x x xy y yb n n d n n+ ξ − ξγ = + ξ − ξγ (5.39)

Page 83: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 5 : Critère de plasticité membrane-flexion

83

5.2.1.2 Optimisation par rapport à α Pour une combinaison d’efforts généralisés (nx, ny, nxy, mx, my, mxy) donnés, le critère plaque recherché est atteint si et seulement s’il existe un angle α qui satisfait le critère poutre (5.36). Cela signifie que le critère est donné par la condition d’existence d’une solution α de l’équation (5.36).

La condition générale d’existence d’une telle équation est difficile à obtenir analytiquement. Par conséquent, nous allons faire dans la suite de ce paragraphe les hypothèses simplificatrices suivantes :

le ferraillage est identique selon x et y, ce qui signifie : γx = γy ;

l’effort normal est identique selon x et y, et il n’y a pas de cisaillement dans le plan : nx = ny et nxy = 0.

Avec ces hypothèses, les équations (5.38) et (5.39) deviennent :

c a e= + (5.40)

et :

b d= (5.41)

On en déduit une nouvelle expression de l’équation (5.36) :

2tan tan 0a b eα α+ + = (5.42)

Sous cette forme, la condition d’existence d’une solution α pour une telle équation s’écrit :

2 4 0b ae− ≥ (5.43)

qui est équivalent à :

( ) ( )

( ) ( )

2

2 2

1 / 2 / 2 / 2

1 / 2 / 2 / 2 0

x x x x x x

y y y y y y xy

m n n

m n n m

ρ

ρ

− − − ξ γ + ξ + ξ − ξγ × − − ξ γ + ξ + ξ − ξγ + ≥

(5.44)

En utilisant la définition de f ξ en (5.33) et (5.34) qui correspond au critère poutre, on remarque que le critère plaque (5.44) s’écrit :

( ) ( ) 20 / 2 0x x y y xym f n m f n mξ ξα α π − − , = − , = + ≥ (5.45)

Donc si on définit :

( )Ipx xM N : le moment limite poutre dans la direction x pour une flexion positive ;

( )Ipy yM N : le moment limite poutre dans la direction y pour une flexion positive ;

( )IIpx xM N : le moment limite poutre dans la direction x pour une flexion négative ;

( )IIpy yM N : le moment limite poutre dans la direction y pour une flexion négative ;

alors le critère plaque (5.45) (condition suffisante de rupture) peut être interprété, en inversant le sens de l’inégalité, comme le double critère suivant (condition nécessaire de stabilité) :

( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )

2I I I

2II II II

f , 0

f , 0

p p px x x y y y xy

p p px x x y y y xy

M M N M M N M

M M N M M N M

= − − − + ≤

= − − − + ≤

N M

N M (5.46)

Page 84: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

84

L’expression (5.46) du critère a été obtenue à partir de la partie parabolique du critère poutre (équations (5.23) et (5.26)). De la même manière, quand on part des parties affines du critère poutre (équations (5.19), (5.20), (5.24) (5.25)), il est possible de montrer que l’expression (5.46) est aussi valide dans ces cas-là, cette fois-ci sans aucune restriction sur γx, γy, nx, ni ny, en supposant simplement nxy = 0.

Le critère obtenu, visible sur la Figure 5.4, appelle un certain nombre de remarques.

Notons tout d’abord que sa formulation est simple. Lorsqu’il n’y a pas d’effort membranaire, ce critère correspond bien au critère de Johansen qui s’écrit [Johansen 1962] :

( ) ( ) ( )

( ) ( ) ( )

2I I I

2II II II

f 0 0 0

f 0 0 0

p p px x y y xy

p p px x y y xy

M M M M M

M M M M M

= − − − + ≤

= − − − + ≤

M

M (5.47)

La question que l’on se posera dans la suite, c’est donc la validité d’une telle expression dans le cas général.

La théorie du calcul à la rupture prouve la convexité de tout critère global obtenu par l’approche cinématique par l’extérieur. Donc notre critère est convexe dans le cas particulier de la démonstration précédente. Dans le cas général, la convexité d’un critère tel que celui exprimé en (5.46) est démontrée dans l’Annexe C.

On peut remarquer enfin que le cisaillement dans le plan (Nxy) n’intervient pas du tout dans l’expression du critère. En effet, au cours de la démonstration, nous avons supposé que Nxy=0. Si, comme nous l’avons vu, il est très difficile d’obtenir analytiquement un critère dans le cas général, il est toujours possible de postuler une expression du critère, puis de la valider expérimentalement. A ce titre, il serait certainement pertinent de s’intéresser dans le futur à un critère sous la forme :

( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )

2

I I I I

2

II II II II

f , 0

f , 0

p p p px x x y y y xy xy xy

p p p px x x y y y xy xy xy

M M N M M N M M N

M M N M M N M M N

= − − − + − ≤ = − − − + − ≤

N M

N M (5.48)

car si IpxyM et II

pxyM sont des fonctions affines de Nxy, le critère est convexe (cf Annexe C).

Mx

My

Mxy

fIp = 0

fIIp = 0

Nx

Ny

fIp = 0 ou fII

p = 0 pour Mxy=0

fIp = 0 ou fII

p = 0 pour Mxy>0

Critère à effort membranaire constant Critère à moment constant

Figure 5.4 : Critère généralisé

Page 85: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 5 : Critère de plasticité membrane-flexion

85

5.2.2 Validation du critère dans le cas général Dans le paragraphe précédent, nous avons obtenu l’expression d’un critère membrane-flexion dans un cas particulier de ferraillage et de chargement. Nous allons maintenant montrer que ce critère peut être utilisé dans le cas général. Pour cela, nous comparons le critère à des résultats expérimentaux obtenus par Polak et Vecchio pour des plaques avec ferraillage différent selon x et y et des cas de chargement incluant du cisaillement dans le plan et de la torsion [Polak et Vecchio 1994].

Quatre tests ont été effectués sur des plaques de 316 mm d’épaisseur avec un ferraillage orthogonal. Les lits d’acier supérieurs et inférieurs sont identiques. Le ferraillage selon x est situé à 35 mm de la face externe de la plaque alors que selon y, il est localisé à 60 mm de la face externe. Pour plus de détails sur ces tests, se référer au Tableau 5.2.

Ferraillage selon x Ferraillage selon y Numéro du test

Résistance du béton en

compression fc (MPa)

Taux de ferraillage par lit (%)

Résistance de l’acier en

traction σY (MPa)

Taux de ferraillage par lit (%)

Résistance de l’acier en

traction σY (MPa)

Chargement

Test 1 47 1,25 425 0,42 430 Nx = Ny = Nxy = 0

Mx My = Mxy = 0

Test 2 62 1,25 425 0,42 430

Nx = – Ny Nxy = 0

Mx / Nx = 0,25 m My = Mxy = 0

Test 3 56 1,25 425 0,42 430 Nx = Ny = Nxy = 0

Mx / My = 3,2 Mxy = 0

Test 4 64 1,32 425 0,44 430 Nx = Ny = 0

Mx = My = Mxy Mx / Nxy = 0,125 m

Tableau 5.2 : Caractéristiques des dalles testées par Polak et Vecchio

Numéro du test

Moment limite: résultats expérimentaux

de Polak (kN.m/m)

Moment limite: critère GLRC

(kN.m/m)

Test 1 Mx = 437 Mx = 442 Test 2 Mx = 302 Mx = 302 Test 3 Mx = 435 (My = 138) Mx = 447 (My = 140) Test 4 Mx = 80 Mx = 128

Tableau 5.3 : Comparaison des moments limites

Page 86: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

86

Les résultats sont présentés sur le Tableau 5.3. Nous constatons que pour les trois premiers tests, le moment limite prédit par notre critère est très proche de celui des essais. Le critère permet de bien représenter l’effet caractéristique des dalles en biflexion, remarqué par [Polak et Vecchio 1994] et par [Pascu 1995] : sans torsion ni cisaillement transverse, le comportement dans la direction y a peu d’influence sur le comportement dans la direction x et réciproquement. Le dernier test montre que le critère pourrait être amélioré pour mieux tenir compte de l’effet du cisaillement dans le plan sur la ruine de la plaque ce qui semble évident puisque le terme Nxy n’intervient pas dans l’expression (5.46) du critère. Cependant, on rappelle que le critère est destiné à être utilisé pour simuler des impacts sur des plaques, et dans cette configuration, le cisaillement dans le plan intervient peu.

On conclut donc que le critère (5.46) est valable dans le cas général, et peut donc être utilisé comme critère de plasticité pour le modèle GLRC. Certes, ce critère est un critère de ruine, mais en utilisant la contrainte limite élastique au lieu de la contrainte limite de rupture comme valeur de contrainte limite des aciers σY, le critère de ruine peut être assimilé à un critère de plasticité. L’emploi d’un critère de ruine (critère de Johansen) comme critère de plasticité a déjà été proposé par [Aufaure et al. 1986].

Les fonctions M p du critère plaque (5.46) décrivant le critère poutre dans chaque direction et pour chaque sens de flexion ont été déterminées pour un ferraillage avec deux lits d’aciers. Cependant la démonstration peut être généralisée au cas de plaques avec davantage de lits d’aciers dans l’épaisseur. Les fonctions M p ont alors une expression un peu plus complexe, mais le critère plaque (5.46) a toujours la même forme.

Dans notre démonstration, c’est le calcul à la rupture qui nous a fourni les fonctions M p indiquant le moment limite d’une poutre en fonction de l’effort normal N ; si on a utilisé le critère poutre de [Save et al. 1997], la démonstration pourrait se faire également avec le critère d’Averbuch puisqu’il est aussi parabolique [Averbuch 1996]. On notera que, dans la pratique, pour obtenir une expression de ces fonctions M p et s’en servir dans le critère plaque (5.46), il est possible d’utiliser n’importe quelle autre méthode de calcul (par exemple la méthode décrite dans [Kahan 2002]) ou même des courbes expérimentales.

5.3 Conclusion Dans ce chapitre, nous avons obtenu l’expression d’un critère de ruine membrane-flexion qui généralise le critère de Johansen pour plaques en béton armé [Johansen 1962]. C’est une expression relativement simple, valable pour tout type de ferraillage. En effet le critère est utilisable quel que soit le nombre de lits d’aciers, du moment que le ferraillage est orthogonal.

C’est également un critère valable pour tout type de sollicitation (excepté lorsqu’il y a un cisaillement dans le plan trop important). On peut noter en particulier que le critère prédit bien les moments limites en biflexion et qu’il permet également de bien reproduire le comportement poutre de la plaque lorsqu’elle est sollicitée en flexion composée (moment et effort membranaire) dans l’une ou l’autre des directions orthogonales du ferraillage. Sa formulation est d’ailleurs basée sur l’expression du moment limite en fonction de l’effort membranaire dans chacune des deux directions du ferraillage.

Le critère est valable quel que soit le comportement des matériaux dans la plaque. En effet, pour obtenir ce critère, on a utilisé la méthode cinématique par l’extérieur du calcul à la rupture qui ne fait pas d’autre hypothèse sur le comportement matériau en dehors de l’existence d’un critère de résistance local en contrainte pour le béton et l’acier.

Enfin, nous avons montré que ce critère est bien convexe dans l’espace à six dimensions des efforts généralisés (Nx, Ny, Nxy, Mx, My, Mxy). Il est destiné à être utilisé comme critère de plasticité pour le modèle GLRC.

Page 87: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 6 : Intégration de la relation de comportement

87

Chapitre 6

Intégration de la relation de comportement

Equation Section (Next)

Au cours des chapitres 4 et 5, nous avons défini les bases théoriques du modèle GLRC (GLobal Reinforced Concrete). Cela nous a conduit à expliciter le potentiel thermodynamique de la loi de comportement ainsi que les critères d’endommagement et de plasticité. A ce stade, le modèle est donc complètement caractérisé.

Dans ce chapitre, nous exploitons les données du modèle GLRC définies précédemment. Tout d’abord, nous donnons l’expression des variables généralisées des efforts (effort membranaire, moments, variables duales de l’endommagement) en fonction des variables d’état (déformation, courbure et variables internes) : ce sont les lois d’état.

Ensuite, nous nous intéressons à la manière d’intégrer le modèle dans un code numérique. Les idées directrices des algorithmes utilisés sont donc explicitées.

Page 88: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

88

6.1 Lois d’état La donnée du potentiel thermodynamique Φ, fonction scalaire convexe des variables d’états (voir chapitre 4), permet d’écrire les lois d’état qui relient les efforts à la déformation, à la courbure et aux variables internes. Nous détaillons dans la suite les lois d’état associées à l’effort membranaire N, au moment M, et aux forces thermodynamiques YI et YII duales des variables d’endommagement DI et DII.

6.1.1 Effort normal et moment Les lois d’état correspondant à l’effort membranaire N et au moment M s’écrivent :

( )

( )

e0

e0

e

e

, ,

m

b I IID D

∂Φ = ∂ ∂Φ =

N

M

ε

ε

κ

κ

(6.1)

où Φm et Φb sont donnés par (4.34) et (4.35).

Si la première des deux équations s’écrit facilement :

( )e e0 0 2 m mtrλ µ= +N Idε ε (6.2)

pour la seconde, c’est un peu plus complexe. La dérivation du terme ( ) ( )( )2e etr trξκ κ de l’équation

(4.35) ne pose pas de problème particulier puisqu’on sait que :

( )e

e

tr∂=

∂Id

κ

κ (6.3)

et que la fonction x2 H(x) et donc aussi la fonction x2ξ (x) sont bien dérivables sur IR et de dérivée continue.

En revanche, il s’avère que l’expression ( )e2e ~~ii κξκ est moins évidente à différentier, puisque cela

implique la différentiation des valeurs propres. La dérivation du problème aux valeurs propres est aisée lorsque les valeurs propres sont simples. Mais les valeurs propres multiples ne sont pas différentiables au sens courant des dérivées : seules des dérivées directionnelles existent. Badel a cependant montré dans sa thèse que soit dans le cas des valeurs propres distinctes soit pour les valeurs propres doubles, il est possible d’arriver au résultat général suivant [Badel 2001] :

( ) ( )e2 e e e eˆ2 i i i i iii i

d dκ ξ κ κ κ κ= ξ∑ ∑ (6.4)

les expressions de la courbure κe dans les différents repères s’écrivant (en utilisant la notation des indices répétés d’Einstein) :

e eij i je eκ= ⊗κ où ( ie )i=1,2 est le repère orthonormée du plan de la plaque associé au

ferraillage ; e eˆij i jV Vκ= ⊗κ où ( iV )i=1,2 est le repère principal orthonormé ; eˆijκ est diagonal et

s’écrit : e eˆij i ijκ κ= δ .

Page 89: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 6 : Intégration de la relation de comportement

89

En se servant du résultat de Badel (6.4), on peut alors différentier, à endommagement constant, le potentiel de flexion (4.35). On obtient :

( ) ( ) ( ) ( )e e e e e e eˆ 2 b b b i i iii

d tr tr d tr dλ ξ µ κ κ κΦ = + ξ∑κ κ κ κ (6.5)

c’est-à-dire :

( ) ( ) ( )e e e e e eˆ 2 b b b i i iii

d tr tr dλ ξ µ κ κ κ Φ = + ξ ∑κ κ κ (6.6)

d’où l’expression du moment en fonction de la courbure d’après (6.1) :

( ) ( )e e e e 2 b b i i i ii

tr tr V Vλ ξ µ κ κ = + ξ ⊗ ∑M κ κ (6.7)

Remarques :

On constate que le repère propre des moments est le même que celui des courbures élastiques.

S’il n’y a pas de perturbation liée à l’endommagement, c’est-à-dire si ξ est toujours égal à 1, on retrouve le résultat des plaques en élastoplasticité : e e 2b btrλ µ= +M Idκ κ .

6.1.2 Variables YI , YII associées aux variables internes DI , DII D’après les équations (4.12), les variables YI , YII associées aux variables internes DI , DII s’écrivent :

( )

( )

e

e

, ,

, ,

b I III

I

b I IIII

II

D DY

D

D DY

D

∂Φ = ∂

∂Φ=

κ

κ (6.8)

On en déduit la forme des variables :

( )

( ) ( ) ( )

( )( ) ( ) ( )

2e e e2 e2

2e e e2 e2

21

21

bI b i i

iI

bII b i i

iII

Y tr H tr HD

Y tr H tr HD

λµ κ κ

λµ κ κ

γ −1= +

+

γ −1 = − + − +

κ κ

κ κ

(6.9)

Page 90: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

90

6.2 Algorithme d’intégration La loi de comportement GLRC a été mise en œuvre dans le logiciel aux éléments finis Europlexus, propriété conjointe du Commissariat à l’Energie Atomique en France et du Joint Research Center en Italie et dédié au calcul de phénomènes transitoires en dynamique rapide. Il a donc fallu développer un algorithme d’intégration adapté aux spécificités du modèle, algorithme que nous expliquons dans le présent paragraphe. Pour éviter de se perdre dans les détails, seuls les grands principes sont donnés.

6.2.1 Principe La loi de comportement GLRC a quelques spécificités qui déterminent le choix de l’algorithme de résolution.

Le modèle comporte de l’endommagement et de la plasticité. Même si ce sont des phénomènes découplés du point de vue thermodynamique, il n’en demeure pas moins qu’il faut gérer ces deux non-linéarités dans un seul et même modèle.

Le critère de plasticité est un double critère fIP et fII

P, avec une zone d’intersection où le gradient n’est pas continu.

Ces deux critères de plasticité ne sont pas suffisants pour caractériser le domaine d’élasticité. Mathématiquement, chacun d’eux définit un double cône dans l’espace (Mx, My, Mxy), à effort membranaire fixé (Figure 6.1). Il est donc nécessaire d’ajouter les conditions :

( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )

I x Ix x y Iy y

II x IIx x y IIy y

g , 0

g , 0

p p p

p p p

M M N M M N

M M N M M N

= − + − ≤

= − − + − ≤

N M

N M (6.10)

Le sommet de chacun de ces doubles cônes est un point anguleux du critère (Figure 6.1). De plus, en ce point :

f0

f0

p

p

∂= ∂

∂ = ∂

N

M

(6.11)

Ceci rend difficile l’utilisation de la loi de normalité en ce point.

GLRC est programmé dans le code de dynamique rapide explicite Europlexus.

Page 91: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 6 : Intégration de la relation de comportement

91

Double critère fIP et fII

P Critère en flexion positive (Mxy=0)

Figure 6.1 : Doubles cônes (effort membranaire fixé)

Si le modèle GLRC possède certaines particularités, la littérature propose néanmoins des algorithmes généraux théoriquement applicables à ce genre de modèle, soit pour l’endommagement, soit pour la plasticité.

Endommagement sans plasticité

Comme les phénomènes sont découplés en flexion positive et négative et que l’endommagement est isotrope, l’intégration sans la plasticité est directe.

Plasticité sans endommagement

Parmi les algorithmes de « return-mapping » destinés à intégrer ce genre de non-linéarité, deux classes de méthodes de résolution sont à distinguer [Simo et Hughes 1998] :

les algorithmes implicites, du type « closest point projection » où la loi de normalité est imposée à la fin de l’itération :

( ) ( )

( ) ( )

p I II0 I II

p I III II

f f, ,

f f, ,

p pp p

p pp p

∂ ∂λ λ∂ ∂

∂ ∂λ λ

∂ ∂

∆ +

∆ +

+ + + +

+ + + +

= N M N MN N

= N M N MM M

ε

κ

(6.12)

les algorithmes explicites, du type « cutting plane », où la loi de normalité est exprimée au début de l’itération :

( ) ( )

( ) ( )

p I II0 I II

p I III II

f f, ,

f f, ,

p pp p

p pp p

∂ ∂λ λ∂ ∂

∂ ∂λ λ

∂ ∂

− − − −

− − − −

∆ +

∆ +

= N M N MN N

= N M N MM M

ε

κ

(6.13)

fIP ≤ 0

gIp = 0

My

Mx

fIP ≤ 0 MIx

p(Nx)

MIyp(Ny)

gIp > 0

gIp < 0

Mx

My

Mxy

fIIp = 0

fIp = 0

Page 92: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

92

Stratégie adoptée pour le modèle élastoplastique endommageant

Le fait que la plasticité et l’endommagement soient des phénomènes découplés nous pousse à découpler également l’intégration. Compte tenu de la forme du critère, l’intégration implicite de la plasticité est difficile. Nous avons donc préféré une intégration explicite, d’autant plus que GLRC est destiné à un code explicite, où les incréments de déformation sont petits. Ceci nous conduit à traiter l’endommagement et la plasticité par un chaînage où une matrice tangente est d’abord calculée en tenant compte de l’endommagement, cette matrice étant ensuite utilisée en lieu et place de la matrice tangente élastique dans le calcul de la plasticité. L’algorithme d’intégration de la plasticité est le « cutting plane ». Cependant, le « cutting plane » n’est applicable que lorsque le prédicteur élastique se trouve dans le domaine vérifiant gI

P < 0 et gIIP < 0. Dans le cas contraire, on fait une dichotomie

pour imposer des incréments de déformation plus petits qui permettent d’obtenir un prédicteur élastique où le « cutting plane » est efficace.

Dans la suite nous donnons d’abord l’expression de la matrice tangente qui tient compte de l’endommagement, puis quelques indications sur l’intégration explicite de la plasticité.

6.2.2 Endommagement En analysant les différents types d’évolution possibles avec ou sans endommagement, on peut écrire la dérivée du moment M :

e e e e, constants f 0 f 0

. .I II D DI II

ij ij ij ijI II

I IIkl kl kl klD D

M M M MD DD Dκ κ κ κ

= =

∂ ∂ ∂ ∂∂ ∂= + +

∂ ∂∂ ∂ ∂ ∂ (6.14)

Matrice de raideur tangente à endommagement constant

Le premier terme de la matrice tangente (6.14) correspond à une évolution à endommagement constant. Ses composantes dans le repère principal des moments et des courbures s’écrivent (la démonstration est dans [Badel 2001]) :

( ) ( ) ( )( ) ( )

e e e e

e e e ee e e

e e

ˆ ˆ 2

ˆ ˆ2 pour et si

ii b b i ii

j j i iij b ij i j

j i

dM tr tr d d

dM d i j

λ µ κ κ

κ κ κ κµ κ κ κ

κ κ

= ξ + ξ ξ − ξ = ≠ ≠

κ κ

( ) (6.15)

Matrice de raideur tangente à endommagement variable

Les deux autres termes de la matrice de raideur (6.14) sont liés à une évolution de l’endommagement. Or cette évolution a lieu si un critère d’endommagement est atteint. Prenons le cas de l’endommagement associé à DI . On a donc :

( )f 0ID IY = (6.16)

Compte tenu de l’expression (4.37) du critère et de celle de YI donnée en (6.9), la condition (6.16) devient :

( )

( ) ( ) ( )2e e e2 e2 0

21b

b i i IiI

tr H tr H kD

λµ κ κ

γ −1− + − =

+ ∑κ κ (6.17)

Pour simplifier l’écriture, on pose :

( ) ( ) ( ) ( )2e e e e2 e 2b

b i ii

W tr H tr Hλµ κ κ

= +

∑κ κ κ (6.18)

Page 93: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 6 : Intégration de la relation de comportement

93

L’équation (6.17) permet de relier l’endommagement DI à la courbure élastique κe. En différentiant (6.17), on obtient :

( )

( )( )e

e eef 0

1

2DI

II

ij ij

WDDWκ κ

=

∂+∂=

∂ ∂

κ

κ (6.19)

Par ailleurs, en utilisant les lois d’états (6.1) et (6.8) :

2

e eij I

I ij I ij

M YD Dκ κ

∂ ∂∂ Φ= =

∂ ∂ ∂ ∂ (6.20)

ce qui nous donne :

( )

( )e

2 e1ij

I ijI

WMD D κ

∂∂ γ −1=

∂ ∂+

κ (6.21)

Finalement, en regroupant les résultats (6.19) et (6.21), il est alors possible d’écrire la matrice de raideur tangente à endommagement variable :

( ) ( )

( ) ( )e e

e e eef 0

.2 1

DI

ij I

I kl ij klI

W WM DD D Wκ κ κ

=

∂ ∂∂ ∂ γ −1=

∂ ∂ ∂ ∂+

κ κ

κ (6.22)

6.2.3 Plasticité Nous nous intéressons dans ce paragraphe à l’intégration de la plasticité. Le choix a été fait d’une intégration explicite (cutting plane), en utilisant la matrice de raideur tangente calculée en fonction de l’endommagement (voir § 6.2.1). Cette matrice tangente, dont la partie de flexion est calculée selon les formules (6.14), (6.15) et (6.22), est notée Db. La matrice élastique en membrane est notée Dm. Le problème élastoplastique incrémental s’écrit donc, lorsqu’un seul critère est activé :

( )( )

( )

( )( )

p0 0

p

p0p

p I0 I

p II

I

I

f ,

f ,

f , 0

0

pp

pp

p

p

∂λ∂

∂λ∂

λ

− − − −

− − − −

− − − −

∆ = ∆ ∆∆ = ∆ ∆∆ = ∆∆ = ∆∆ = − −∆ = − − − + ∆ − ∆ − + ∆ − ∆ = >

m

b

rm

rb

r r

r r

r r r r

N D

M D

N C

M C

N N M MN

N N M MM

N N N N M M M M

ε − ε

κ − κ

ε

κ

ε

κ

(6.23)

Page 94: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

94

En notant pour simplifier :

( )I If f ,p p∂ ∂

∂ ∂

−− − − −= − −r rN N M M

N N (6.24)

le problème incrémental se réécrit en :

( )

( )

( )

I0 I

II

I

I

f

f

f , 0

0

pp

pp

p

p

∂λ∂

∂λ∂

λ

− − − −

∆ − ∆ = ∆ − +

∆ − ∆ = ∆ − + − + ∆ − ∆ − + ∆ − ∆ = >

rm m m

rb b b

r r r r

N N D D C N

M M D D CM

N N N N M M M M

ε

κ (6.25)

Pour trouver une solution simple, on peut approcher le critère à l’aide d’un développement limité au premier ordre. Le problème incrémental (6.25) se résout en donnant une solution λI

p sous la forme :

( ) ( )

I II 0

II I I I

f ff

f f f f

p pp

pp p p p

∂ ∂∂ ∂λ

∂ ∂ ∂ ∂∂ ∂ ∂ ∂

− −−

− − − −

+ ∆ + ∆=

+ + +

m b

m m b b

D DN M

D C D CN N M M

ε κ (6.26)

L’approximation de fIP au premier ordre, lorsqu’un seul critère est activé, conduit donc à une équation

du premier degré à une inconnue. Si les deux critères sont activés, alors, l’approximation de fIP et fII

P au premier ordre donne un système de deux équations du premier degré à deux inconnues.

Si on se trouve à proximité du sommet d’un cône (Figure 6.1), alors l’approximation du critère au premier ordre n’est pas assez précise. On fait donc un développement limité au second ordre. Si un seul critère est activé, alors nous obtenons une équation du second degré à une inconnue. Le fait qu’il existe plusieurs solutions vient de ce que rien dans la résolution n’impose que gI

P < 0 et gIIP < 0 à

l’issue du calcul incrémental : on peut donc trouver des solutions sur la partie du cône qui n’est pas admissible. Les conditions gI

P < 0 et gIIP < 0 (auxquelles s’ajoute la condition λΙ

P > 0) nous permettent donc de faire a posteriori une sélection entre les différentes solutions disponibles. Si deux critères sont activés, le problème est plus complexe car il s’agit cette fois de résoudre un système de deux équations à deux inconnues, mais composé d’équations du second degré. La résolution de ce système d’équations polynomiales se fait par la méthode générale du polynôme résultant (qui correspond au déterminant de la matrice résultante ou matrice de Sylvester [Wales 2006]) dont les racines nous sont données grâce à l’algorithme de Bairstow [Press et al. 1992].

Page 95: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 6 : Intégration de la relation de comportement

95

6.3 Conclusion Ce chapitre a permis d’expliciter les lois d’état du modèle GLRC, en particulier :

la loi donnant l’effort membranaire en fonction de la déformation moyenne ;

la loi donnant le moment en fonction de la courbure ;

les lois reliant les variables d’endommagement aux forces thermodynamiques duales.

Si certaines de ces expressions ont été obtenues de manière assez directe, en revanche pour ce qui concerne le moment, la difficulté vient de l’expression de l’énergie libre à partir des valeurs propres de la courbure.

Dans la suite de ce chapitre, nous avons également précisé les choix algorithmiques qui ont été faits pour développer le modèle dans Europlexus, un code de dynamique rapide. Les éléments principaux de cet algorithme sont :

le traitement de l’endommagement à l’aide d’une matrice tangente ;

le traitement de la plasticité à l’aide d’un algorithme de return mapping explicite : le cutting plane associé à une dichotomie.

Page 96: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour dalles en béton armé

96

Page 97: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 7 : Validation du modèle GLRC

97

Chapitre 7

Validation du modèle GLRC

Equation Section 7

Les chapitres précédents ont décrit les grandes principes du modèle GLRC : ses hypothèses, ses bases thermodynamiques, l’expression de ses lois d’état et son algorithme d’intégration dans le code de dynamique rapide Europlexus. Il nous reste maintenant à vérifier que la mise en œuvre dans le code correspond bien à la réalité expérimentale, et donc à valider ce modèle en le comparant soit à des essais, soit à d’autres lois de comportement, elles-mêmes validées sur des tests expérimentaux.

Pour cela, nous proposons dans ce chapitre d’examiner trois cas différents, qui permettent de balayer l’ensemble des configurations dans lesquelles le modèle GLRC peut être utilisé. Nous examinons donc :

une poutre en flexion ;

une dalle plane sous impact mou ;

un dôme sollicité par une force d’impact transversale.

Page 98: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour plaques en béton armé

98

7.1 Comparaison avec poutre multifibre et modèle La Borderie

Dans ce premier test de validation, nous nous intéressons plus spécifiquement au comportement d’une poutre en flexion. En effet, le modèle GLRC a été construit de telle sorte que si la dalle est sollicitée dans une seule direction, la réponse de la dalle fournie par GLRC corresponde au comportement d’une poutre.

Nous cherchons également à valider le comportement en flexion alternée, c’est-à-dire d’une part la fissuration en faces supérieure et inférieure pour des faibles sollicitations, ainsi que la perte de raideur associée, et d’autre part, lorsque la sollicitation est plus forte, la plastification des aciers supérieurs et inférieurs et l’écrouissage qui en découle (effet Bauschinger).

La référence est un calcul multicouches utilisant le modèle avec endommagement de La Borderie pour le béton [La Borderie 1991].

7.1.1 Définition du test La structure testée est une poutre en béton armé de 5 mètres de longueur, sur appuis simples (Figure 7.1). Le ferraillage, symétrique dans l’épaisseur, est constitué de 2 HA 32 dans le lit inférieur et 2 HA 32 dans le lit supérieur, ce qui donne une section d’acier de 1,61 10-3 m2 par lit (taux de ferraillage de 0,8 % par lit). L’enrobage est de 3,2 cm.

Figure 7.1 : Géométrie de la poutre

Les caractéristiques des différents matériaux sont définies ainsi :

Béton :

Module de Young : Eb = 20000 MPa

Contrainte limite en traction : ft = 2,4 MPa

Contrainte limite en compression : fc = 25 MPa (εc = 2.3 10-3)

Masse volumique : ρb = 2400 kg/m3

Acier :

Module de Young : Ea = 210000 MPa

Contrainte limite élastique en traction : σY = 400 MPa (εY = 2. 10-3)

Module plastique Eap =3280 MPa

Masse volumique : ρa = 7800 kg/m3

Le taux de ferraillage est défini classiquement comme le rapport de la section d’acier sur la section de béton.

5 m

x

z

0,5 m

y

z

0,2 m

Page 99: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 7 : Validation du modèle GLRC

99

Le chargement consiste en un déplacement alterné imposé au centre de la poutre (Figure 7.2). On impose une vitesse de chargement suffisamment lente pour qu’un calcul quasistatique soit suffisant. Deux cas de chargement sont envisagés, avec des amplitudes de déplacements différentes : petits cycles avec une amplitude de 1 cm, et grand cycle avec une amplitude de 2 cm.

-1,5

-0,5

0,5

1,5

0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 4,5 5

Temps

Dép

lace

men

t

Figure 7.2 : Chargement

7.1.2 Résultats Les calculs GLRC sont comparés aux résultat de référence obtenus en utilisant une modélisation de poutre multifibres (PMF) du logiciel aux élément finis Code_Aster®. Dans ce type de modélisation (cf. [Moulin et al. 2003]), les efforts généralisés globaux sont obtenus par sommation des contributions de chaque fibre. Le comportement non linéaire des matériaux est pris en compte par :

une loi de comportement élastoplastique à écrouissage cinématique pour les aciers ;

une loi de comportement avec double endommagement pour le béton : loi de La Borderie, qui permet de bien prendre en compte l’effet unilatéral, c’est-à-dire la restauration de la raideur du béton au moment de la refermeture des fissures. Ceci permet de traiter proprement les problèmes cycliques [La Borderie 1991].

La comparaison des différents calculs se fait sur le comportement moment-courbure de la section au milieu de la poutre et sur la réaction d’appui à son extrémité.

Page 100: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour plaques en béton armé

100

Figure 7.3 : Comportements moment-courbure calculés avec GLRC et PMF (petit cycle)

Figure 7.4 : Comportements (moment-courbure) GLRC et PMF (grand cycle)

Page 101: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 7 : Validation du modèle GLRC

101

Figure 7.5 : Réactions d’appui calculées par GLRC et PMF (grand cycle)

Les réponses de la poutre avec le modèle global GLRC et avec la modélisation multicouches PMF avec loi de Laborderie sont très proches (Figure 7.3, Figure 7.4 et Figure 7.5).

Lorsque la sollicitation alternée est faible (petit cycle sur la Figure 7.3), on notera tout de même un petit écart au cours de la décharge dû au fait que la loi de comportement GLRC traite la fissuration par endommagement global : par définition il n’y a pas de courbure résiduelle. Dans la poutre multifibre (PMF), même si l’endommagement local de Laborderie ne produit aucune déformation résiduelle au niveau de chaque fibre, le modèle peut générer globalement une courbure résiduelle. GLRC sous-estime ainsi légèrement l’énergie dissipée au cours de la fissuration .

Lorsque la sollicitation alternée est plus forte (grand cycle), l’observation du comportement moment-courbure Figure 7.4 montre que si GLRC s’écarte légèrement de la modélisation multicouche (en particulier GLRC est un peu trop raide au moment de l’alternance de charge), le comportement général est bien représenté. En outre, la comparaison des réactions d’appui Figure 7.5 montre que, excepté un très léger décalage dans le niveau de la réaction avec GLRC dû à un effet dynamique dans la poutre (Europlexus n’est pas prévu pour simuler des comportements quasistatiques), les deux modèles donnent des résultats similaires en ce qui concerne le comportement global de la structure.

Comme le comportement semble assez proche d’un comportement linéaire, on peut se demander s’il était

vraiment nécessaire d’introduire l’endommagement en flexion dans le modèle GLRC. Dans la réalité, lors d’un impact, les zones fissurées sont importantes. Par conséquent l’énergie dissipée par ce moyen est loin d’être négligeable : la modélisation de la fissuration en flexion est une nécessité.

Page 102: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour plaques en béton armé

102

7.2 Impact sur dalle : essais EDF-CEMETE Dans ce second test nous examinons non plus la réponse d’une poutre, mais celle d’une dalle : il s’agit d’un essai d’impact sur une dalle plane en béton armé effectué au laboratoire CEMETE d’EDF en 1979 [Dulac et Giraud 1981, Dulac 1982].

7.2.1 Définition du test Nous voulons simuler le premier des trois essais effectués sur la dalle n°8 de la campagne de tests effectués au CEMETE : une dalle en béton armé simplement appuyée sur ses quatre côtés, subit un chargement dynamique obtenu en écrasant un tube en son centre (Figure 7.6). Ce chargement est suffisamment important pour solliciter fortement la dalle dans le domaine plastique.

Figure 7.6 : Géométrie de la dalle

Les caractéristiques des différents matériaux utilisés pour couler la dalle sont récapitulées ci-dessous :

Béton :

Module de Young : Eb = 37400 MPa

Contrainte limite en traction : ft = 4,2 MPa

Contrainte limite en compression : fc = 52,2 MPa

Coefficient de Poisson : 0,22

Masse volumique : ρb = 2400 kg/m3

Acier :

Module de Young : Ea = 210000 MPa

Contrainte limite élastique en traction : σY = 510 MPa (εY = 2. 10-3)

Coefficient de Poisson : 0,3

Module plastique Eap =473 MPa

Masse volumique : ρa = 7800 kg/m3

1,80 m

0,12 m 1,80 m

Tube

Plaque métallique

Page 103: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 7 : Validation du modèle GLRC

103

Le tube s’écrase sur une plaque de métal de 30 cm de diamètre qui, posée sur la face supérieure de la dalle, transmet les efforts à la structure (Figure 7.6). La force d’impact, mesurée à l’aide de capteurs installés sur la plaque métallique, est approchée selon la courbe de la Figure 7.7 avec un plateau à 215 kN pendant 27 ms.

0

50

100

150

200

250

0 20 40 60

Temps (ms)

Forc

e (k

N)

Figure 7.7 : Force d’impact

7.2.2 Résultats Nous comparons les résultats d’un calcul avec le modèle GLRC et les mesures enregistrées au cours de l’essai avec des capteurs dynamiques. On notera au passage que les calculs GLRC, effectués avec des éléments DKT (Discrete Kirchhoff Triangle) (Figure 7.8), prennent en compte un amortissement forfaitaire de 7% à la fréquence 15 Hz qui correspond à la fréquence du premier mode de la dalle sur appuis simples (amortissement basse fréquence de Rayleigh), selon les préconisations de l’ETC-C [ETC-C 2005] (code réglementaire de référence pour le génie civil des constructions nucléaires, largement inspiré des Eurocodes).

La Figure 7.9 qui confronte le calcul avec l’essai montre que les pics de déplacement sont bien reproduits par le modèle, ainsi que les fréquences d’oscillation lorsque la dalle est endommagée. L’écart lors des remontées de la dalle au cours des oscillations peut venir du chargement qui n’est connu que de manière approchée, ou d’une prise en compte pas assez précise des déformations résiduelles au cours de la décharge, comme cela a déjà été constaté dans le test précédent (§ 7.1). Malgré ce léger défaut, on peut dire que GLRC approche bien les résultats expérimentaux dans le cas de l’impact d’une dalle.

Figure 7.8 : Maillage

Surface d’impact

Page 104: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour plaques en béton armé

104

Figure 7.9 : Déplacement vertical au centre de la dalle

7.3 Impact sur dôme : benchmark avec modèles Ottosen et Drucker-Prager

La première motivation de ce troisième test est de s’assurer que le modèle GLRC est capable de prendre en compte les effets membranaires induits par la non planéité d’une structure. La seconde raison est de tester le modèle sur une structure de grande taille qui soit représentative d’un bâtiment industriel. A ces deux motifs s’en ajoute un troisième : faire un benchmark avec des modélisations locales.

Ceci nous conduit à définir la structure testée comme étant une coupole posée sur un fût. La structure est sollicitée en son sommet par une force normale à la surface. Deux modèles locaux de béton, l’un dans Europlexus, l’autre dans CAST3M nous servent d’éléments de comparaison.

7.3.1 Définition du test On s’intéresse à une structure axisymétrique courbe en forme de dôme (Figure 7.10). L’épaisseur de la coque est de 1,30 m. Le ferraillage est composé de deux lits identiques et disposés de manière symétrique dans la section. Le taux de ferraillage par lit pour les aciers radiaux est le même que pour les aciers orthoradiaux : 0,387 %. L’enrobage est de 4 cm ; avec un entrecroisement orthogonal d’aciers HA40, on a ainsi une distance de 8 cm depuis le centre de gravité des lits d’aciers jusqu’à la face externe.

Page 105: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 7 : Validation du modèle GLRC

105

Figure 7.10 : Géométrie de la structure

Voici les principales caractéristiques des matériaux :

Béton :

Module de Young : Eb = 40000 MPa

Contrainte limite en traction : ft = 4,0 MPa

Contrainte limite en compression : fc = 35 MPa

Coefficient de Poisson : 0,2

Masse volumique : ρb = 2400 kg/m3

Acier :

Module de Young : Ea = 210000 MPa

Contrainte limite élastique en traction : σY = 500 MPa

Pente d’écrouissage : Eap =306 MPa

Coefficient de Poisson : 0,3

Masse volumique : ρa = 7800 kg/m3

La structure, encastrée dans sa partie inférieure est sollicitée par une pression fonction du temps appliquée au sommet du dôme (Figure 7.11).

17,57m

11,29 m

4,69 m

33,55 m

27,75 m

p(t)

Axe de symétrie

Page 106: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour plaques en béton armé

106

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

1,2

0 20 40 60 80 100 120

Temps (ms)

Pres

sion

: P/P

max

Figure 7.11 : Chargement

7.3.2 Résultats Le calcul GLRC est comparé à deux autres calculs :

un calcul 2D axisymétrique utilisant un modèle local élastoplastique de béton (modèle Drucker-Prager d’Europlexus [López Cela et al. 1996, López Cela et al. 1997, Europlexus 2006]); l’acier est représenté par un modèle élastoplastique avec critère de type Von Mises ;

un calcul 3D avec des éléments finis volumiques qui se sert d’un modèle de comportement de béton écrit selon l’approche des modèles de fissuration fictive (modèle Ottosen de CAST3M [Dahlbom et Ottosen 1990, Mersseman et Millard 1995]) ; ce modèle possède également un traitement particulier de la localisation ; quant aux aciers, il sont modélisés par des barres et suivent un comportement élastoplastique (Von Mises) à écrouissage cinématique.

La comparaison des différents calculs se fait sur le déplacement vertical au sommet du dôme et sur les énergies (Figure 7.13).

On voit sur cette figure que les deux modèles de Drucker-Prager et d’Ottosen ont leurs limitations. Le calcul avec le modèle Drucker-Prager s’arrête 75 ms après le début de la simulation à cause de problèmes de convergence du modèle de béton : c’est un problème typique de loi de comportement locale qui, si elles représentent correctement la phase de chargement, ont du mal à simuler la décharge. Le modèle d’Ottosen surestime la rigidité, comme la plupart des modèles de fissuration fictive [Ung Quoc 2003]. De plus, comme ce genre de modèle n’est pas construit à partir de la thermodynamique, les processus non-linéaires ne dissipent pas toujours de l’énergie (voir Figure 7.13 b).

En revanche, le modèle GLRC prédit bien le pic de chargement ainsi que les différents niveaux d’énergie mis en jeu. La dissipation d’énergie est toujours positive ou nulle et il n’y a pas de problème particulier de convergence. Cependant, entre 20 ms et 40 ms, GLRC surestime légèrement les déplacements, certainement parce qu’il ne prend pas en compte l’influence de la force membranaire sur la fissuration en flexion. Dans la réalité, cette fissuration est retardée par l’effet de la membrane qui comprime l’ensemble de la section de béton. On peut noter que cela n’affecte pas la suite de la réponse de la dalle.

La comparaison des temps de calcul montre que la modélisation GLRC avec des plaques est environ cent fois plus rapide que la modélisation 3D. Pour donner un ordre de grandeur, la simulation des 120 ms de l’impact sur le dôme en utilisant le modèle GLRC (3000 degrés de liberté) met 1500 s de temps CPU sur une machine Compaq AlphaServer Tru64.

On conclut donc que GLRC est un modèle capable de représenter correctement le comportement non-linéaire d’une dalle, même dans le cas où les effets de membrane sont importants, et ceci avec un gain considérable en temps de calcul par rapport aux modélisations 3D.

Page 107: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 7 : Validation du modèle GLRC

107

Figure 7.12 : Fissuration en peau externe à la fin du calcul (DI/DImax à 160 ms)

-0,06

-0,05

-0,04

-0,03

-0,02

-0,01

0

0,01

0,02

0,03

0 20 40 60 80 100 120 140 160Temps (ms)

Dép

lace

men

t ver

tical

(m)

Drucker Prager

Ottosen

GLRC

0

0,5

1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

4,5

0 20 40 60 80 100 120Temps (ms)

Ener

gie

(MJ)

Drucker

Ottosen

GLRCTravail des forces extérieures

Energie dissipée

a) Déplacement vertical au sommet b) Bilan des énergies

Figure 7.13 : Résultats du benchmark

Page 108: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie II : Modèle global de comportement pour plaques en béton armé

108

7.4 Conclusion Dans ce chapitre, le modèle GLRC a été vérifié et validé sur trois tests différents :

une poutre en flexion, la comparaison se faisant avec une modélisation multicouches et la loi de comportement endommageante de La Borderie ;

une dalle plane impactée par un tube qui s’écrase en son centre ;

un dôme, en comparant les résultats avec le modèle Drucker-Prager d’Europlexus et avec le modèle d’Ottosen de CAST3M.

Ces tests se distinguent les uns des autres, soit par la nature des structures en béton armé (poutre, dalle plane ou coque), soit par leurs dimensions et leurs tailles (structure unidimensionnelle ou bidimensionnelle, structure simple ou structure de taille industrielle), soit par la nature de la référence à laquelle GLRC a été comparé (test expérimental ou calcul numérique), soit encore par le type de modélisations et de lois de comportement auxquels GLRC a été confronté (modélisation 3D locale ou modélisation semi-globale multicouches, loi de comportement avec endommagement ou avec plasticité). Dans toutes ces configurations GLRC a donné des résultats pertinents, et a même permis de diviser les temps de calcul par un facteur d’ordre cent par rapport aux modélisations 3D.

On peut donc conclure que le modèle global GLRC pour plaques en béton armé est une alternative pertinente aux modélisations 3D locale ou multicouches semi-globale. Compte tenu de ses performances, ce modèle est parfaitement utilisable dans un cadre d’ingénierie.

Page 109: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 7 : Validation du modèle GLRC

109

Résumé et bilan de la partie II

Nous avons développé un modèle global en variables généralisées (effort membranaire, moment) pour simuler le comportement de plaques en béton armé soumises à des impacts. Ce modèle, appelé GLRC (GLobal Reinforced Concrete) est basé sur la théorie thermodynamique des matériaux standard généralisés. Il a les caractéristiques suivantes :

c’est un modèle d’endommagement : il représente la perte de raideur en flexion due à la fissuration du béton à l’aide de deux variables d’endommagement, distinguant ainsi la fissuration en face supérieure de la plaque de la fissuration en face inférieure ;

c’est un modèle de plasticité, ce qui lui permet de tenir compte des déformations résiduelles générées par la plastification des aciers lorsque la dalle est fortement sollicitée ; l’écrouissage est cinématique.

Si l’endommagement n’a lieu qu’en flexion, la plasticité couple le comportement en membrane et en flexion. Ainsi, nous avons déterminé, via le calcul à la rupture, un critère généralisé membrane-flexion, qui étend le cas particulier en flexion du critère de Johansen. Le nouveau critère a été validé par comparaison à des résultats expérimentaux.

Le modèle GLRC a été inséré dans le logiciel de dynamique rapide Europlexus, en utilisant un algorithme explicite pour la plasticité : le « cutting plane » a ainsi été adapté pour tenir compte des particularités du critère de plasticité. Le couplage avec l’endommagement a été réalisé en calculant une matrice tangente tenant compte de la diminution de raideur due à l’endommagement.

Nous avons validé le modèle GLRC sur plusieurs cas tests. Nous avons ainsi montré que le modèle permet tout d’abord de reproduire correctement le comportement en poutre des dalles lorsqu’elles ne sont sollicitées que dans une direction. Le comportement dalle est également bien représenté, tout comme celui d’une structure plus complexe, de taille industrielle. Nous avons mis en évidence que le modèle prend bien en compte l’effet induit par la membrane lorsque les plaques représentent une surface courbe.

Comparé aux modélisations locale 3D ou semi-globale multicouches, le modèle global GLRC est donc une solution simple, mais pertinente et efficace numériquement, pour simuler les impacts sur dalles en béton armé.

Page 110: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

110

Page 111: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

111

Partie III Critère de perforation pour plaques en béton armé

Il existe déjà dans la littérature de nombreux critères de perforation pour des structures en béton armé : formule CEA-EDF, formule de Degen et autres formules de Chang (voir une liste critique dans [Li et al. 2005]). Cependant tous ces critères sont destinés aux chocs durs, à des projectiles de petite taille et ne sont pas adaptés aux chocs mous, car ils sont trop conservatifs en ne tenant pas compte de l’énergie dissipée dans l’écrasement du projectile. Pour la plupart ils relient directement la vitesse du projectile à la distance de pénétration dans la cible ou à l’épaisseur maximale de perforation (Figure 8.0). Or on a vu, dans la première partie de ce document, que pour les chocs mous il était possible de dissocier le comportement du projectile qui s’écrase et la réponse de la cible. En outre, nous avons montré que dans ce cas, la perforation a été caractérisée comme étant le fait d’ondes de structure en flexion et en effort tranchant. Par conséquent, nous recherchons un critère qui porte uniquement sur la cible, c’est-à-dire un critère dont les paramètres ne dépendent ni de la vitesse d’impact, ni de la manière dont s’écrase le projectile. En effet, ceci permettrait d’élargir l’application de ce critère à des impacts de projectiles de taille très diverse.

Là encore, la littérature propose un certain nombre de critères permettant de prédire la ruine en cisaillement (ou poinçonnement) de structures en béton armé [Nielsen 1999]. Mais ces critères, établis le plus souvent via l’analyse limite, ne sont valables que pour des configurations particulières : dalles carrées encastrées avec une force ou une pression appliquée en leur centre. De fait, les critères portent sur le chargement de la structure (Figure 8.0) et ne sont applicables qu’en statique car ils ne tiennent pas compte de la réponse dynamique de la dalle.

Figure 8.0 : Différents types de critères

Critères de perforation type CEA-EDF pour chocs durs [Li et al. 2005]

Critères de poinçonnement statiques [Nielsen 1999]

inutilisables en dynamique

Equilibre dynamique

Critère statique pour la perforation

CIBLEPROJECTILE

Efforts dans la dalle (N,T,M)

Caractéristiques du projectile

(vitesse, masse)

Chargement (force,

pression)

Caractéristiques de la dalle

(matériau, géométrie)

Page 112: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

112

Pour pallier cette difficulté, nous nous proposons de déterminer dans cette partie un critère de ruine statique qui porte sur les efforts généralisés dans une dalle, à savoir sur les forces membranaires N, les moments M, et les efforts tranchants T qui eux suivent la dynamique de la dalle. S’il est possible de trouver quelques résultats sur les poutres, ou sur les dalles non ferraillées, ou pour un seul type de sollicitation (par exemple la flexion [Johansen 1962]) ou pour deux sollicitations (cf Chapitre 5 où un critère membrane-flexion est établi), il n’existe pas à notre connaissance de critère aussi général pour les trois sollicitations combinées N, T et M, destiné aux plaques en béton armé.

Pour obtenir ce critère, nous utilisons encore une fois la théorie de l’analyse limite (calcul à la rupture), outil ‘mathématique’ très puissant qui permet de récupérer un critère global en efforts généralisés à partir de critères locaux en contraintes et d’un mécanisme de ruine. Ainsi, nous allons expliciter analytiquement le critère en configuration poutre et nous proposerons une méthode numérique pour traiter des dalles. Le critère est d’abord validé en statique avec des résultats probants. Programmé dans Europlexus, le critère est appliqué aux efforts généralisés issus de calculs dynamiques afin de prédire la perforation. Cette méthode d’analyse de la perforation est validée à l’aide d’une comparaison avec les résultats expérimentaux des essais Meppen.

Cette troisième partie est donc divisée en quatre chapitres :

Chapitre 8 : Utilisation de l’analyse limite et de l’approche cinématique par l’extérieur, où les principes du calcul à la rupture sont appliqués pour obtenir deux problèmes d’optimisation, l’un pour les poutres, l’autre pour les plaques ;

Chapitre 9 : Le critère poutre statique, où le problème d’optimisation pour poutre est résolu ; un critère poutre entièrement analytique est ainsi obtenu et validé ;

Chapitre 10 : Le critère plaque statique, où le problème d’optimisation pour plaque est traité ; on obtient ainsi un critère mi-analytique mi-numérique qui est validé sur diverses configurations ;

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation, où le critère plaque statique est utilisé pour prédire la perforation des essais d’impact Meppen.

Page 113: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 8 : Utilisation de l’analyse limite et de l’approche cinématique par l’extérieur

113

Chapitre 8

Utilisation de l’analyse limite et de

l’approche cinématique par l’extérieur

Equation Section 8

Le principe de l’approche cinématique par l’extérieur est présenté de manière très claire dans l’ouvrage [Salençon 2001]. Les deux hypothèses de base sont, d’une part, un mécanisme de ruine, c’est à dire le postulat que la ruine de la structure se produit selon une cinématique bien définie, et, d’autre part, un domaine convexe de résistance locale pour le matériau, c’est à dire un critère en contrainte.

Le principe des puissances virtuelles appliqué à la structure P, de bord P∂ , permet de relier le travail des efforts extérieurs au travail des efforts intérieurs pour tout champ de vitesse cinématiquement admissible pour le mécanisme :

( )P P

.n .u dS : dPσ σ ε∂

=∫ ∫ (8.1)

La partie gauche de l’égalité (8.1) peut s’exprimer en fonction du chargement et du champ de vitesse u . La partie droite de l’égalité (8.1), en exploitant le critère local en contrainte, peut être majorée par une borne supérieure qui ne dépend que du champ de vitesse. Alors, en éliminant de part et d’autre le champ de vitesse, apparaît une borne supérieure pour le chargement.

Cette méthode d’analyse limite est également appelée théorème de la borne supérieure. Remarquons-le bien, elle est indépendante de toute hypothèse sur le comportement du matériau : que le matériau soit rigide-plastique parfait ou élastoplastique endommageable avec adoucissement, la méthode est applicable du moment qu’il existe un domaine convexe de résistance locale en contrainte.

Comme au chapitre 5 pour le critère de Johansen généralisé, on va dans ce chapitre appliquer la méthode cinématique pour obtenir des problèmes d’optimisation menant à des critères statiques de ruine. Il nous faut donc en premier lieu définir une géométrie, un mécanisme de ruine et des hypothèses sur les critères des matériaux. Dans un deuxième temps, ces hypothèses sont exploitées pour définir des champs de vitesses virtuels admissibles et des fonctions d’appui. Enfin, après ces préalables, la méthode cinématique peut être appliquée. On obtient ainsi deux problèmes d’optimisation. Le premier a pour solution un critère poutre et le second un critère dalle.

Avant d’aborder les calculs, une remarque importante doit encore être faite. Pour une combinaison d’efforts donnés, un critère poutre ou dalle, s’il est atteint, va fournir le mécanisme optimal correspondant. Or rien ne garantit que ce mécanisme optimal soit identique au mécanisme réel de ruine. Cela n’est vrai que si la borne est exacte. Cependant, dans ce chapitre, on va choisir pour la méthode cinématique une famille de mécanisme qui soient proches du mécanisme réel. Compte tenu de l’analogie entre le mécanisme optimal et le mécanisme réel, on interprétera le mécanisme optimal comme étant le mécanisme réel prédit par le calcul.

Page 114: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

114

8.1 Notations et hypothèses On se donne d’une part une géométrie et un mécanisme de ruine, et d’autre part des critères locaux de résistance des matériaux acier et béton.

8.1.1 Géométrie et mécanisme de ruine Soit une plaque de béton armé P caractérisée par :

h : épaisseur de la plaque

Ωxsup et Ωxinf : aires d’acier du ferraillage longitudinal dans la direction x, correspondant aux lits supérieurs et inférieurs (m2/m).

Ωysup et Ωyinf : aires d’acier du ferraillage longitudinal dans la direction y, correspondant aux lits supérieurs et inférieurs (m2/m).

ΩT : densité de ferraillage transversal (m2/m2)

suph/2z ρ= et inf h/2z ρ= : position des deux lits d’aciers longitudinaux ( −1 ≤ ρinf < ρsup ≤ 1) ; cela implique

que la position des aciers est identique selon x et selon y.

Les observations expérimentales détaillées dans le Chapitre 2 ont montré que, lors de la perforation d’une plaque sous un choc mou, la ruine se produisait toujours de la même manière, selon des fissures inclinées dans l’épaisseur de la plaque ou de la poutre. Nous définissons donc le mécanisme de ruine comme un saut de vitesse au niveau d’une surface plane Σ, inclinée d’un angle θ par rapport au plan xOy de la plaque. L’angle α permet de caractériser complètement l’orientation du plan Σ (voir Figure 8.1).

Figure 8.1 : Mécanisme de ruine dans la plaque et surface de discontinuité des vitesses

α x

y

X

Y

θ

O

z = Z

2hsupρ

2hinfρ

h 0X

nt

x

y

z

Σ

Page 115: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 8 : Utilisation de l’analyse limite et de l’approche cinématique par l’extérieur

115

Nous voulons trouver un critère de ruine fonction des tenseurs d’efforts N,T,M, qui correspondent aux forces membranaires, aux efforts tranchants, et aux moments de flexion. Nous noterons leurs composantes Nx, Ny, Nxy, Tx, Ty, Mx, My, Mxy dans le repère x,y,z, et NX, NY, NXY, TX, TY, MX, MY, MXY dans le repère X,Y,Z. Dans le repère x,y,z, les efforts globaux s’expriment en fonction des contraintes comme suit :

forces membranaires :

h / 2

h / 2x xxN dzσ

= ∫ h / 2

h / 2y yyN dzσ

= ∫ h / 2

h / 2xy xyN dzσ

= ∫ (8.2)

moments :

h / 2

h / 2x xxM z dzσ

= ∫ h / 2

h / 2y yyM z dzσ

= ∫ h / 2

h / 2xy xyM z dzσ

= ∫ (8.3)

effort tranchant :

h / 2

h / 2x xzT dzσ

= ∫ h / 2

h / 2y yzT dzσ

= ∫ (8.4)

On rappelle les liens entre les composantes des différents repères :

2 2

2 2

cos sin 2 cos sin

cos sin

cos sin 2 cos sin

X x y xy

X x y

X x y xy

N N N N

T T T

M M M M

α α α α

α α

α α α α

= + + = +

= + +

(8.5)

Si Ωinf et Ωsup sont définis comme l’aire effective du ferraillage supérieur et inférieur dans la direction X (en m2/m), alors ils peuvent être exprimés en fonction des caractéristiques des aciers Ωxinf , Ωyinf , Ωxsup , Ωysup, données dans le repère xyz, selon les équations suivantes [Save et al. 1997] :

2 2

sup sup sup

2 2inf inf inf

cos sin

cos sinx y

x y

α α

α α

Ω = Ω + Ω

Ω = Ω + Ω (8.6)

8.1.2 Critères locaux de résistance du béton et de l’acier Les hypothèses sur les matériaux concernent l’acier et le béton.

Pour l’acier de ferraillage, on suppose que le seuil de résistance σY est identique en traction et en compression. De plus, comme on fait également l’hypothèse qu’il n’y a pas de rupture en cisaillement des barres d’acier, le critère local définissant le domaine de résistance de l’acier pour une géométrie unidimensionnelle peut être exprimé ainsi :

( ) 0S u u Yf σ σ σ= − ≤ (8.7)

Pour le béton, c’est un critère de Coulomb ou un critère de Drucker-Prager qui est utilisé, car ce sont les deux critères les plus simples qui ont un cisaillement dépendant de la pression hydrostatique.

Page 116: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

116

Critère de Coulomb :

Ce critère, s’il est écrit en fonction des contraintes principales σi, a la forme suivante [Salençon 2001] :

( ) ( ) ( ) sup 1 sin 1 sin 2 cos , 1,2,3 0C i jf C i jσ σ φ σ φ φ= + − − − ∈ ≤ (8.8)

avec :

C : la cohésion du matériau

φ : l’angle de frottement

Critère de Drucker-Prager :

Usuellement, le critère de Drucker-Prager s’exprime ainsi :

( ) 0tr 0DP eqf aσ σ σ σ= + − ≤ (8.9)

avec :

0a > et 0 0σ >

( )21 tr s2eqσ = où s est la contrainte déviatorique : 1s tr

3σ σ= − I

Mais, pour l’analyse limite et pour permettre une correspondance avec le critère de Coulomb, d’autres paramètres sont préférés [Salençon 2001]. Le critère s’écrit alors :

( )( ) ( )2 2

sin 3costr3 3 sin 3 3 sin

DP eqf Cφ φσ σ σφ φ

= + −+ +

(8.10)

avec, comme pour le critère de Coulomb :

C : la cohésion du matériau

φ : l’angle de frottement

La Figure 8.2 montre bien que même si le paramétrage est identique, les deux critères de Coulomb et Drucker-Prager sont différents.

Page 117: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 8 : Utilisation de l’analyse limite et de l’approche cinématique par l’extérieur

117

-50

-40

-30

-20

-10

0

10

20

-50 -40 -30 -20 -10 0 10 20

σ1

σ 2

Drucker-PragerCoulomb

Figure 8.2 : Critères de Coulomb et de Drucker-Prager en contrainte plane, pour des valeurs de

C et φ identiques

8.2 Préalables Pour pouvoir utiliser le principe des puissances virtuelles et appliquer la méthode cinématique, il nous faut d’abord définir un champ de vitesse virtuel cinématiquement admissible pour le mécanisme considéré. Ensuite, il nous faut trouver un majorant de la puissance des efforts intérieurs, en exploitant l’hypothèse faite sur le comportement local du matériau.

8.2.1 Champs de vitesse et de déformation On suppose que ce champ correspond à un mouvement de corps rigide sur chaque partie de la plaque, et même qu’il est nul dans la partie gauche. Par conséquent le saut de vitesse en un point M de la surface de discontinuité Σ peut être décrit avec l’équation suivante :

( ) 0 0u M u OMω= + ∧ (8.11)

où 0u est le saut de vitesse de translation du point O, et 0ω le saut de vitesse de rotation.

Comme on ne veut pas que le critère porte sur le cisaillement dans le plan, il est inutile de choisir un saut de vitesse qui ait une composante selon Y. Donc dans le repère X,Y,Z, qui est associé à la section orientée par l’angle α (voir Figure 8.1), le saut de vitesse a deux composantes de translation 0 0,X Zu u , selon les directions X et Z, et une composante de rotation 0Yω autour de l’axe Y. L’équation (8.11) peut se réécrire :

( ) 0 0 0u M OMX X Z Z Y Yu e u e eω= + + ∧ (8.12)

Page 118: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

118

Puisqu’il n’y a pas de composante selon Y, en changeant de repère, le saut de vitesse au point M de la surface Σ peut aussi s’écrire :

( ) ( ) ( )n tu M u M n u M t= + (8.13)

ou encore :

( ) ( ) ( )u M u M u MX X Z Ze e= + (8.14)

Toutes ces composantes peuvent être exprimées en fonction de ( )0 0 0, ,X Zu u ω et de l’abscisse s selon t sur Σ :

n 0 0 0

t 0 0

sin coscos sin

X Z Y

X Z

u u u su u u

θ θ ωθ θ

= + + = − +

(8.15)

0 0

0 0

sincos

X X Y

Z Z Y

u u su u s

ω θω θ

= + = +

(8.16)

avec comme conditions sur s:

h h2sin 2sin

sθ θ

− ≤ ≤ (8.17)

Compte tenu de l’équation (8.13), le champ de taux de déformation sur la surface Σ a la forme suivante :

( ) tn

1 u n n u n n n t t n2 2

uuε = ⊗ + ⊗ = ⊗ + ⊗ + ⊗ (8.18)

Mais 0=ε partout ailleurs dans la plaque.

8.2.2 Fonction d’appui Pour obtenir un majorant de la puissance des efforts intérieurs, on définit la fonction d’appui Π d’un critère local f comme :

( ) ( ) sup : 0fσ

ε σ ε σΠ = ≤ (8.19)

Ces fonctions d’appui sont parfois un peu fastidieuses à calculer. [Salençon 2001] donne leur expression pour les critères de Coulomb et de Drucker-Prager (avec le paramétrage de (8.10)). Ainsi la fonction d’appui du critère de Drucker-Prager prend les valeurs suivantes :

( ) trtanDP

Cε εφ

Π = si ( )

( )2

2

3sintr 2tr e3 3 sin

φεφ

≥+

(8.20)

( )DP εΠ = +∞ si ( )

( )2

2

3sintr 2tr e3 3 sin

φεφ

<+

(8.21)

Et pour un champ de déformation virtuelle tel qui celui défini dans (8.18) :

( ) ntanDPC uε

φΠ = si n u sinu φ≥ (8.22)

( )DP εΠ = +∞ si n u sinu φ< (8.23)

Page 119: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 8 : Utilisation de l’analyse limite et de l’approche cinématique par l’extérieur

119

Quant au critère de Coulomb :

( ) trtanC

Cε εφ

Π = si ( )1 2 3tr sinε ε ε ε φ≥ + + (8.24)

( )C εΠ = +∞ si ( )1 2 3tr sinε ε ε ε φ< + + (8.25)

avec iε les valeurs propres du tenseur de vitesse de déformation ε .

Pour les champs de déformation virtuelle comme ceux définis dans (8.18) :

( ) ntanCC uε

φΠ = si n u sinu φ≥ (8.26)

( )C εΠ = +∞ si n u sinu φ< (8.27)

On voit que pour un mécanisme avec saut de vitesse, le critère de Drucker-Prager exprimé avec un paramétrage approprié et le critère de Coulomb ont une fonction d’appui identique. Donc le critère global que l’on devrait obtenir aura la même formulation quel que soit le critère local utilisé. En revanche pour un matériau donné, l’identification des paramètres peut donner des valeurs de C et φ qui diffèrent selon que le domaine de résistance correspond à Drucker-Prager ou à Coulomb (cf Figure 8.2).

En ce qui concerne l’acier, la fonction d’appui du critère (8.7) pour le ferraillage longitudinal est donnée par l’équation :

( ) S long Y Xuε σΠ = (8.28)

et pour le ferraillage transversal par :

( ) S trans Y Zuε σΠ = (8.29)

8.2.3 Considérations sur le paramétrage du critère de Drucker-Prager Si on part d’un critère de Drucker-Prager avec le paramétrage classique décrit en (8.9), sa fonction d’appui s’écrit :

( ) 0 tr3DP aσ

ε εΠ = si ( )2tr 3 2tr eaε ≥ (8.30)

( )DP εΠ = +∞ si ( )2tr 3 2tr eaε < (8.31)

avec : ( )e tr / 3ε ε= − Ι , le déviateur de la vitesse de déformation.

Dans le cas d’un mécanisme avec saut de vitesse tel que celui que nous utilisons, la condition de

pertinence ( )2 tr 3 2tr eaε ≥ s’exprime ainsi :

2

2nn t

4 3 3uu a u≥ + (8.32)

Ceci implique que :

1 2 3

a ≤ (8.33)

Page 120: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

120

Une manière usuelle d’identifier les paramètres du critère consiste à les caler en traction simple et compression simple. Or si le seuil en traction est dix fois moindre que le seuil en compression (c’est généralement le cas pour le béton), cela donne 3 3 /11a = qui est une valeur ne satisfaisant pas la condition (8.33). Dans ce cas, il n’existe pas de champs pertinent, et il est impossible d’obtenir un critère global par cette méthode.

En réalité, ce n’est pas le critère de Drucker-Prager qui est inadapté à une approche d’analyse limite par l’extérieur, mais la difficulté vient des paramètres et de leur identification. Tout d’abord signalons que l’identification des paramètres en contraintes planes n’est pas opportune ; le mécanisme impose plutôt des déformations planes. Caler le critère de Drucker-Prager en contrainte plane pour l’utiliser dans une configuration où les contraintes ne sont pas planes n’est certainement pas très pertinent.

Utiliser un paramétrage en C et φ ne change rien sur le fond : c’est toujours le même critère que l’on utilise. Cependant, poser :

( )2

sin

3 3 sina φ

φ=

+ (8.34)

permet formellement de s’assurer que la condition (8.33) est toujours vérifiée. De plus, la fonction d’appui qu’on en déduit est identique à celle du critère de Coulomb (voir § 8.2.2).

La fonction d’appui est par définition la transformée de Legendre-Fenchel de la fonction indicatrice du domaine défini par le critère convexe. Comme la transformée de Legendre-Fenchel est involutive pour des fonctions convexes, on peut se demander comment il se fait que les fonctions d’appui de Drucker-Prager et de Coulomb soient identiques alors que les critères sont différents.

En fait, tout dépend du domaine sur lequel sont examinés le critère et la fonction d’appui. On a ( ) ( )εε CDP Π=Π uniquement sur une restriction de l’ensemble des champs ε de IR 6 qui s’écrivent sous

la forme ( ) tn

1 u n n u n n n t t n2 2

uuε = ⊗ + ⊗ = ⊗ + ⊗ + ⊗ et qui correspondent aux champs des

vitesses discontinues.

8.3 Ecriture du problème d’optimisation Les données du problème et les hypothèses ont été écrites au § 8.1. Elles ont été exploitées pour définir des champs de vitesses virtuels cinématiquement admissibles et les fonctions d’appui des critères locaux (§ 8.2). Ces préalables ayant été effectués, nous pouvons appliquer la méthode cinématique décrite en introduction de ce chapitre. Cette méthode part du principe des puissances virtuelles pour aboutir à un problème d’optimisation. Dans ce paragraphe, deux problèmes d’optimisation seront écrits, l’un pour les plaques, l’autre pour les poutres.

8.3.1 Principe des puissances virtuelles Le principe des puissances virtuelles (8.1) appliqué à la plaque P s’écrit :

( )P

.n .u d : dPσ σ εΣ

Σ =∫ ∫ (8.35)

L’utilisation des champs de vitesse virtuels définis dans le § 8.2.1, qui conduisent à des vitesses de déformation nulles exceptées sur la surface de discontinuité Σ, et l’exploitation de la définition (8.19) des fonctions d’appui Π, permettent de transformer l’égalité (8.35) en inégalité :

pour tout ε ( ) ( ).n .u d dσ εΣ Σ

Σ ≤ Π Σ∫ ∫ (8.36)

Les champs ( )εΠ < +∞ , seuls utiles, sont appelés champs pertinents.

Page 121: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 8 : Utilisation de l’analyse limite et de l’approche cinématique par l’extérieur

121

La partie gauche de l’inégalité (8.36), qui correspond à la puissance des efforts extérieurs, est égale à :

( ) ( ) ( )

( ) ( )

h h2sin 2sin

0 0h h

2sin 2sinh h

2sin 2sin2

0 0h h

2sin 2sin

.n .u d sin sin

sin cos

X XX Z ZX

Y XX X XZ

u ds u ds

s ds u ds

θ θ

θ θ

θ θ

θ θ

σ σ θ σ θ

ω σ θ σ θ

Σ − −

− −

Σ = +

+ +

∫ ∫ ∫

∫ ∫

(8.37)

En supposant la contrainte indépendante de l’abscisse X, (8.37) peut être exprimé en fonction des efforts généralisés :

( ) 0 0 0 0.n .u d cotX X X Z X Y X XN u T u M T uσ ω θΣ

Σ = + + +∫ (8.38)

L’utilisation des composantes des efforts généralisés dans le repère XYZ conduit à un critère poutre. Pour obtenir un critère plaque, il nous faut employer les efforts généralisés exprimés dans le repère xyz :

( ) ( ) ( )

( ) ( )

2 20 0

2 20 0

.n .u d cos sin 2 cos sin cos sin

cos sin 2 cos sin cot cos sin

x y xy X x y Z

x y xy Y x y X

N N N u T T u

M M M T T u

σ α α α α α α

α α α α ω θ α αΣ

Σ = + + + +

+ + + + +

∫ (8.39)

La partie droite de l’inégalité (8.36) se décompose en trois termes :

( ) ( ) ( ) ( ) d d d dDP S long S transε ε ε εΣ Σ Σ Σ

Π Σ = Π Σ + Π Σ + Π Σ∫ ∫ ∫ ∫ (8.40)

ΩT étant la densité de ferraillage transverse (en m2/m2), la quantité d’acier dans une plaque de dimension h/ tanθ ×1 m est θtanh/TΩ (en m2). D’où la densité d’acier que voit la surface de

discontinuité Σ : h sin costan hT T

θ θθ

Ω = Ω (voir Figure 8.3)

Figure 8.3 : Densité d’acier d’effort tranchant

θ

θsinh

θtanh

h

Σ

Page 122: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

122

Par conséquent l’équation (8.40) devient :

( ) ( )

( )

hsup2sin

n suph2sin

hinf 2sin

inf h2sin

h d

tan 2sin

h cos2sin

Y X

Y X Y T Z

C u s ds u

u u s ds

θ

θ

θ

θ

ρε σ

φ θ

ρσ σ θθ

−Σ

Π Σ = + Ω

+ Ω + Ω

∫ ∫

∫ (8.41)

En utilisant les expressions des déplacements (8.15) et (8.16), cela donne :

( ) ( )h

2sin0 0 0h

2sin

sup infsup 0 0 inf 0 0

h2sin

0 0h2sin

d sin costan

h h 2 2

cos cos

X Z Y

Y X Y Y X Y

Y T Z Y

C u u s ds

u u

u s ds

θ

θ

θ

θ

ε θ θ ωφ

ρ ρσ ω σ ω

σ θ ω θ

−Σ

Π Σ = + +

+ Ω + + Ω +

+ Ω +

∫ ∫

(8.42)

De plus, comme :

( ) ( )2

1

2 12 12 2

x

x

ax b ax bax b dx ax b ax b

a a+ +

+ = + − +∫ (8.43)

on obtient finalement l’expression du majorant de la puissance des efforts intérieurs :

( ) [ ]0 0

sup infsup 0 0 inf 0 0

0 00 0

0

0

h d cottan

h h 2 2

cos h h cot cot2 cos 2 2

cos

2 cos

X Z

Y X Y Y X Y

Y T Y YZ Z

Y

Y T

Y

C u u

u u

u u

u

ε θφ

ρ ρσ ω σ ω

σ θ ω ωθ θ

ω θ

σ θω θ

Σ

Π Σ = +

+ Ω + + Ω +

Ω + + +

Ω−

0 00 0

h hcot cot2 2

Y YZ Zuω ω

θ θ − −

(8.44)

Il nous reste à expliciter la condition de pertinence ( )εΠ < +∞ (voir (8.36)). Compte tenu des expressions des fonctions d’appui détaillées en 8.2.2, on doit avoir pour tout s tel que

( ) ( )h/ 2sin h/ 2sinsθ θ− ≤ ≤ :

( ) ( )n u sinu s s φ≥ (8.45)

Or cette dernière inégalité est équivalente à :

( ) ( )n t tanu s u s φ≥ (8.46)

En utilisant les expressions des composantes des vitesses (8.15), la condition de pertinence qui doit être satisfaite pour tout champ de vitesse s’écrit finalement :

0 0 0 0 0h sin cos cos sin tan

2sinX Z Y X Zu u u uθ θ ω θ θ φθ

+ ± ≥ − (8.47)

Page 123: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 8 : Utilisation de l’analyse limite et de l’approche cinématique par l’extérieur

123

8.3.2 Le problème plaque L’écriture de (8.36), en utilisant les expressions (8.39) et (8.44), conduit au problème plaque, qui revient à trouver le domaine de l’espace ( , , , , , , ,x y xy x y x y xyN N N T T M M M ) tel que :

( )( )( )( )

[ ]

( )

2 20

0

2 20

0 0

sup2 2sup sup 0 0

cos sin 2 cos sin cot cos sin

cos sin

cos sin 2 cos sin

h cottan

h cos sin

2

x y xy x y X

x y Z

x y xy

X Z

Y x y X Y

N N N T T u

T T u

M M M

C u u

u

α α α α θ α α

α α

α α α α ω

θφ

ρσ α α ω

+ + + +

+ +

+ + +

≤ +

+ Ω + Ω +

( )

( )

( )

2 2 infinf inf 0 0

0 00 0

0

0 00 0

0

h cos sin2

h h sgn cos cot cot2 2 2

h h sgn cos cot cot2 2 2

Y x y X Y

Y YY TZ Z

Y

Y YY TZ Z

Y

u

u u

u u

ρσ α α ω

ω ωσθ θ θω

ω ωσθ θ θω

+ Ω + Ω +

Ω + + +

Ω − − −

(8.48)

pour tout 0 0 0, , , ,X Z Yu u ω θ α qui satisfont les conditions :

0 0 0 0 0hsin cos cos sin tan

2sin0

X Z Y X Zu u u uθ θ ω θ θ φθ

θ π

+ ± ≥ − < <

(8.49)

Ce problème est en fait un problème d’optimisation sous condition, avec cinq variables à éliminer 0 0 0, , ,X Z Yu u ω θ et α. Il est possible de le résoudre étape par étape, ce qui signifie trouver l’optimum

de l’inégalité (8.48) pour certaines variables en fonction des autres qu’on a fixées. Ainsi, pour résoudre le problème plaque, le plus simple est de commencer par résoudre le problème poutre.

8.3.3 Le problème poutre Si α est fixé, la formulation du problème plaque conduit au problème poutre. Le domaine de l’espace ( , ,X X XN T M ) doit être déterminé de telle sorte que :

( )

[ ]

( )

0 0 0

0 0

sup infsup 0 0 inf 0 0

0 00 0

0

coth cot

tanh h

2 2

h h sgn cos cot cot2 2 2

X X X X Z X Y

X Z

Y X Y Y X Y

Y YY TZ Z

Y

N T u T u MC u u

u u

u u

θ ω

θφ

ρ ρσ ω σ ω

ω ωσθ θ θω

+ + +

≤ +

+ Ω + + Ω +

Ω + + +

( ) 0 00 0

0

h h sgn cos cot cot2 2 2

Y YY TZ Z

Y

u uω ωσθ θ θωΩ − − −

(8.50)

Page 124: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

124

pour tout 0 0 0, , ,X Z Yu u ω θ qui satisfont les conditions :

0 0 0 0 0hsin cos cos sin tan

2sin0

X Z Y X Zu u u uθ θ ω θ θ φθ

θ π

+ ± ≥ − < <

(8.51)

8.4 Méthodes de résolution De manière générique, notre problème revient à trouver le domaine des x tels que :

( ) ( )( )

( )

1 u, 0x,u, 0, u, u, ...

u, 0n

hF

h

θ

θ θ θθ

≤ ≤ ∀ ∈ ≤

(8.52)

où F est une fonction continue de la forme : ( ) ( )x,u, x.u u,F Gθ θ= − ; G est aussi une fonction, dont les caractéristiques sont :

( )u, 0G θ ≥ lorsque ( )u, 0ih θ ≤ parce qu’on suppose que x=0 fait partie du domaine à trouver ;

( ) ( )u, u,G Gλ θ λ θ= pour 0>λ (fonction positivement homogène de degré 1 par rapport à u ).

Les hi sont n fonctions traduisant les conditions devant être vérifiées par les variables u et θ.

Dans une direction x fixée, il faut trouver le domaine des ζ tels que :

( ) ( )( )

( )

1 u, 0x,u, 0, u, u, ...

u, 0n

hF

h

θ

ζ θ θ θθ

≤ ≤ ∀ ∈ ≤

(8.53)

ce qui correspond à trouver ζ1 et ζ2 tels que :

( )

( )

( )

1

1 u,

u, 0u, ...

minx.u u, 0

x.u 0n

hG

θθ

ζθ

≤ =

≤ >

(8.54)

et :

( )

( )

( )

1

2 u,

u, 0u, ...

maxx.u u, 0

x.u 0n

hG

θθ

ζθ

≤ =

≤ <

(8.55)

La difficulté vient de ce que la fonction ( ) ( )u,u,

x.uG

θ = n’a en général pas de propriété de

convexité.

Page 125: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 8 : Utilisation de l’analyse limite et de l’approche cinématique par l’extérieur

125

Pour trouver une solution à ce problème d’optimisation, deux manières de procéder sont donc possibles :

une résolution analytique en éliminant « à la main » les variables u et θ ;

une résolution numérique, en testant un nombre fini de valeurs de u et θ ; cela est suffisant pour trouver une valeur proche de l’optimum ; en effet, le domaine de définition de θ est borné, et il suffit de tester les u sur une sphère unité car H est positivement homogène de degré 0 par rapport à u .

L’avantage évident de la résolution analytique sur la résolution numérique est que l’expression analytique du critère est donnée en fonction des paramètres, quelles que soient leurs valeurs. En revanche, pour un critère numérique, si ces valeurs changent il faut refaire un calcul. De plus, le critère numérique correspond en fait à un critère discret (Figure 8.4

Figure 8.4), qu’il est difficile d’exploiter tel quel dans un calcul de structure. Il est possible d’interpoler ce genre de critère pour obtenir des surfaces, mais les résultats ne sont pas très probants en terme de qualité d’interpolation. Enfin, un gros inconvénient pour ce type d’approche vient du fait qu’on ne peut pas être assuré de la convexité de la surface interpolée.

Notons cependant qu’une approche numérique peut servir à vérifier l’exactitude de calculs analytiques.

Discrétisation des directions de test

sur la sphère unité Résultat :

critère discret

Figure 8.4 : Exemple de résolution numérique pour un critère tridimensionnel

Page 126: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

126

8.5 Conclusion

Dans ce chapitre a été mise en œuvre une méthode d’analyse limite, l’approche cinématique par l’extérieur, en l’appliquant à une dalle en béton armé. Les hypothèses faites sont rappelées succinctement :

on a supposé un mécanisme de ruine avec une surface de discontinuité plane en déformations planes ; d’autres mécanismes auraient pu être envisagés, mais auraient conduit à des problèmes difficiles à expliciter et impossibles à résoudre analytiquement ;

les critères locaux choisis sont un critère unidimensionnel identique en traction et en compression pour l’acier (le cisaillement n’est pas pris en compte dans les barres d’acier), et un critère de Coulomb ou de Drucker-Prager pour le béton ; un critère de Coulomb tronqué en traction (Modified Coulomb criterion) est souvent plus représentatif du comportement du béton, mais conduit à un problème que l’on ne peut résoudre que numériquement ;

outre les hypothèses usuelles des plaques, on suppose que la contrainte n’est pas fonction de X (dans le plan moyen de la plaque, abscisse du repère associé à la surface de discontinuité) sur la longueur de la fissure dans l’épaisseur ; plus le plan de discontinuité est incliné, moins cela est vrai.

Le problème de détermination d’un critère global a été exprimé pour une plaque en béton armé, et pour une poutre. Deux méthodes de résolution sont envisagées, l’une analytique, l’autre numérique. Nous avons vu que la méthode numérique est difficilement intégrable dans un code de calcul dès qu’il s’agit d’un critère dans un espace de dimension supérieur à deux. Elle peut néanmoins servir à valider une solution analytique. Dans le cas de notre problème de détermination d’un critère pour dalle en béton armé, nous avons montré que la première étape d’une résolution analytique consiste à trouver la solution poutre.

Remarquons que si la théorie de l’analyse limite est relativement simple (en particulier en terme d’hypothèses sur le comportement des matériaux), elle conduit rapidement à des formulations complexes, surtout s’il s’agit de structures composites, comme le béton armé.

Page 127: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 9 : Le critère poutre statique

127

Chapitre 9

Le critère poutre statique

Equation Section 9

La mise en œuvre dans le chapitre 8 de la méthode d’analyse limite qu’on appelle l’approche cinématique par l’extérieur a permis d’établir la formulation du problème à résoudre pour obtenir un critère poutre. Il s’agit maintenant de trouver une solution à ce problème d’optimisation. Nous avons vu que deux manières de procéder étaient possibles : une résolution numérique et une résolution analytique.

Dans ce chapitre, nous proposons une détermination analytique du critère poutre, ce qui permettra au chapitre suivant d’obtenir un critère plaque nettement plus simple à intégrer dans le code de calcul Europlexus. Les éléments les plus fastidieux de la démonstration sont placés en annexe. Une fois l’expression analytique du critère obtenu, on cherche à en interpréter la forme, puis ce critère pour poutre statique est validé dans diverses configurations. On montre ainsi qu’il reproduit bien le comportement connu des poutres sollicitées en effort tranchant pur, et pour des combinaisons d’effort membranaire et d’effort tranchant.

Ce chapitre est une étape nécessaire pour atteindre notre objectif d’obtenir un critère général pour les plaques.

Page 128: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

128

9.1 Résolution La résolution du problème d’analyse limite pour un critère poutre se fait de manière totalement analytique.

9.1.1 Optimisation par rapport aux composantes du champ de vitesse Le problème à résoudre est défini dans le paragraphe (8.3.3) par les équations (8.50) et (8.51). La variable θ est fixée entre 0 et π. La condition de pertinence (8.51) oblige à distinguer deux cas selon le signe de 0 0 cos sinX Zu uθ θ− .

On suppose d’abord :

0 0 cos sin 0X Zu uθ θ− ≥ (9.1)

Définissons les paramètres ai , bi , ci (i =1 à 5), k, d, e, f, g, h en utilisant les expressions suivantes :

1 11

2 sup 2 sup sup2

3 inf 3 3 inf inf

4 4 4

5 5 5

cot h / tan h / tan coth/20

0 h/20 1 h/2cot0 1 h/2cot

X X XX

Y Y

Y Y

a N T C c Mb T Ca cba b ca b ca b c

θ φ φ θσ σ ρ

σ σ ρθθ

= + − = = − = Ω = Ω= = Ω = = Ω = = = = = − =

(9.2)

( )

( )

sin tan coscos tan sin h/ 2sincos

sinsgn cos / 2Y T

defghk

θ φ θθ φ θ

θ

θθ

θ σ

= − = + = = = −

= Ω

(9.3)

Remarquons en passant que : 1dh eg− = − .

Soit la fonction F suivante :

( )

( ) ( )

1 1 1 2 2 2 3 3 3

4 4 4 4 4 4 5 5 5 5 5 5

, ,F x y z a x b y c z a x b y c z a x b y c zk ka x b y c z a x b y c z a x b y c z a x b y c zz z

= + + − + + − + +

− + + + + − + + + + (9.4)

Le problème poutre des équations (8.50) et (8.51) peut être écrit comme la recherche des conditions sur les paramètres ai , bi , ci (i =1 à 5), k, d, e, f, g, h tels que :

( ), , ; , , , 0i i iF x y z a b c k ≤ 0

, , tq 00

dx ey fzx y z dx ey fz

gx hy

+ + ≥∀ + − ≥ + ≥

(9.5)

Ce problème est résolu dans l’annexe D.

Page 129: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 9 : Le critère poutre statique

129

Ainsi, on peut trouver des conditions nécessaires sur les paramètres ai , bi , ci (i =1 à 5), k, d, e, f, g, h, pour que (9.5) soit satisfait. Ces conditions se résument à trois inégalités :

( ) ( )

( ) ( )

sup sup inf inf

sup sup inf inf

2 1 1 h sinh

h 1 2 cos h 0tan sin

2 1 1 h sinh

h 1 2 cos h 0tan sin

hcottan

XX Y Y T

X Y T

XX Y Y T

X Y T

X X

MN

CT

MN

CT

CN T

σ ρ ρ σ θ

θ σφ θ

σ ρ ρ σ θ

θ σφ θ

θφ

+ − Ω + + Ω + + Ω

+ − + Ω ≤

− − Ω − + Ω − + Ω

+ − + Ω ≤

+ − ( ) ( )

( )( )

sup inf

hcos tan sin cot sin tan costan

cos tan sin

h sin tan cos cos sin tan cos cos 0sin 2

X

Y

Y T

CTθ φ θ θ θ φ θφ

σ θ φ θ

σθ φ θ θ θ φ θ θ

θ

+ − − −

− Ω + Ω +

Ω − − − − ≤

(9.6)

Si maintenant, au lieu de (9.1), on suppose que :

0 0 cos sin 0X Zu uθ θ− ≤ (9.7)

le même type de résolution nous donne également trois conditions :

( ) ( )

( ) ( )

sup sup inf inf

sup sup inf inf

2 1 1 h sinh

h 1 2 cos h 0tan sin

2 1 1 h sinh

h 1 2 cos h 0tan sin

hcottan

XX Y Y T

X Y T

XX Y Y T

X Y T

X X

MN

CT

MN

CT

CN T

σ ρ ρ σ θ

θ σφ θ

σ ρ ρ σ θ

θ σφ θ

θ

+ − Ω + + Ω + + Ω

+ − + Ω ≤

− − Ω − + Ω − + Ω

+ − + Ω ≤

− + − ( ) ( )

( )( )

sup inf

hcos tan sin cot sin tan costan

cos tan sin

h sin tan cos cos sin tan cos cos 0sin 2

X

Y

Y T

CTθ φ θ θ θ φ θφ φ

σ θ φ θ

σθ φ θ θ θ φ θ θ

θ

− + − +

− Ω + Ω −

Ω − + + + ≤

(9.8)

Page 130: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

130

Comme les deux premières inégalités de (9.8) sont identiques aux deux premières inégalités de (9.6), nous obtenons quatre conditions qui doivent être satisfaites pour tout ] [0;θ π∈ :

( ) ( )sup sup inf inf

2 1 1 h sinh

h 1 2 cos h 0tan sin

XX Y Y T

X Y T

MN

CT

σ ρ ρ σ θ

θ σφ θ

+ − Ω + + Ω + + Ω

+ − + Ω ≤

(9.9)

( ) ( )sup sup inf inf

2 1 1 h sinh

h 1 2 cos h 0tan sin

XX Y Y T

X Y T

MN

CT

σ ρ ρ σ θ

θ σφ θ

− − Ω − + Ω − + Ω

+ − + Ω ≤

(9.10)

( ) ( )

( )( )

sup inf

h hcot cos tan sin cot sin tan costan tan

cos tan sin

h sin tan cos cos sin tan cos cos 0sin 2

X X X

Y

Y T

C CN T Tθ θ φ θ θ θ φ θφ φ

σ θ φ θ

σ θ φ θ θ θ φ θ θθ

+ − + − − −

− Ω + Ω +

Ω − − − − ≤

(9.11)

( ) ( )

( )( )

sup inf

h hcot cos tan sin cot sin tan costan tan

cos tan sin

h sin tan cos cos sin tan cos cos 0sin 2

X X X

Y

Y T

C CN T Tθ θ φ θ θ θ φ θφ φ

σ θ φ θ

σ θ φ θ θ θ φ θ θθ

− + − − + − +

− Ω + Ω −

Ω − + + + ≤

(9.12)

Les deux premières conditions (9.9) et (9.10) sont fonctions de NX, MX et TX alors que les deux dernières (9.11) et (9.12) sont indépendantes du moment.

9.1.2 Optimisation par rapport à l’angle θ Il reste à déterminer l’optimum de chacune des quatre équations (9.9), (9.10), (9.11) et (9.12) pour tout θ entre 0 et π.

9.1.2.1 Conditions sur NX, MX et TX Les inégalités (9.9) et (9.10) sont du type ( ) 0f θ ≤ , ] [0,θ π∀ ∈ , avec la fonction f de la forme :

( ) cos sinsin

cf a bθ θ θθ

= + + (9.13)

La fonction f s’écrit aussi :

( ) sin 2 cos2 22sin

a b b cf θ θθθ

− + += (9.14)

On en déduit :

] [

( ) 2 2

0,max 2sin 2f a b b c

θ πθ θ

∈ = + + + (9.15)

Page 131: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 9 : Le critère poutre statique

131

Par conséquent l’inégalité ( ) 0f θ ≤ est satisfaite ] [0,θ π∀ ∈ si et seulement si :

2 2 2 0a b b c+ + + ≤ (9.16)

L’optimum est atteint pour :

1 arctan4 2opt

ba

πθ = + (9.17)

En remarquant que c < 0 dans notre cas, l’inégalité (9.16) est alors équivalente à :

2 24 4a c bc≤ + (9.18)

Nous obtenons ainsi, à partir des inégalités (9.9) et (9.10) deux conditions qui correspondent à deux cylindres paraboliques :

( ) ( )

( ) ( )

22

sup sup inf inf

22

sup sup inf inf

h htan

2 h 1 1 h hh tan

h htan

2 h 1 1 h hh tan

X Y T

XX Y Y T Y T

X Y T

XX Y Y T Y T

CT

M CN

CT

M CN

σφ

σ ρ ρ σ σφ

σφ

σ ρ ρ σ σφ

≤ + Ω

− + − Ω + + Ω + + Ω + Ω

≤ + Ω

− − − Ω − + Ω − + Ω + Ω

(9.19)

L’angle du mécanisme optimal est donné pour chacune des deux conditions respectivement par :

( ) ( )

( ) ( )

sup sup inf inf

sup sup inf inf

2 1 1 h1 harctan4 2 2

2 1 1 h1 harctan4 2 2

XX Y Y T

optX

XX Y Y T

optX

MN

TMN

T

σ ρ ρ σπθ

σ ρ ρ σπθ

+ − Ω + + Ω + + Ω = +

− − Ω − + Ω − + Ω = +

(9.20)

9.1.2.2 Conditions sur NX et TX En ce qui concerne les deux autres inégalités (9.11) et (9.12), elles peuvent être réécrites comme ceci :

( ) ( ) ( )

( ) ( ) ( ) ( )sup inf

cos sin sin sin cos cosh h cos cos sin sin cos sin cos

2

X X X

Y TY

N T T

C

θ φ θ θ φ θ θ φ θ

σφ σ θ φ θ θ φ θ θ φ θ

− − − + −

Ω ≤ + Ω + Ω − + − − − (9.21)

( ) ( ) ( )

( ) ( ) ( ) ( )sup inf

cos sin sin sin cos cosh h cos cos sin sin cos sin cos

2

X X X

Y TY

N T T

C

θ φ θ θ φ θ θ φ θ

σφ σ θ φ θ θ φ θ θ φ θ

− + + + − +

Ω ≤ + Ω + Ω + + + + + (9.22)

Page 132: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

132

Soit la fonction F définie par :

( ) ( ) ( )

( ) ( )

sup infh cos cos sin

h sin cos sin cos2

Y

Y T

F Cθ φ σ θ φ θ

σ θ φ θ θ φ θ

= + Ω + Ω −

Ω + − − − (9.23)

Le problème revient à alors à trouver dans l’espace (NX , TX), les frontières du convexe qui satisfasse :

( ) ( ) ( ) ( )cos sin sin sin cos cosX X XN T T Fθ φ θ θ φ θ θ φ θ θ− − − + − ≤ ] [0,θ π∀ ∈ (9.24)

La résolution de ce problème est détaillée dans l’annexe E.

En remarquant que la dérivée de F est continue pour tout θ ∈ [0,π], sauf en θ =φ, en θ =π/2 et θ =π/2 + φ, on peut montrer que les frontières du convexe recherché correspondant à l’inégalité (9.21) sont incluses dans les trois courbes suivantes de l’espace (NX , TX) :

h h tanX Y TT C σ φ− ≤ + Ω (9.25)

( )sup infsin cos h cos sinX X YN T Cφ φ φ σ φ− ≤ + Ω + Ω (9.26)

( ) ( ) ( )( )

( )( )

( )( )

( ) ( ) ( )( )

( )

sup inf

2 2

2 2

2 2

h sgn costan

cos sin hh 1 sgn sin costan 2sin cos

cos sin sin cossin cos

hh . 1 sgn sintan 2

X Y

Y T

X

Y T

CN

C

T

C

θ σ θ φφ

θ θ φ σ θ φ θφθ θ φ

θ θ θ φ θ φθ

θ θ φ

σθ φ

φ

= + Ω + Ω −

+ − Ω − + − − + − − − −

= + − Ω

+ − −( )cosθ

(9.27)

Cette dernière courbe (9.28) est une surface paramétrique définie pour θ ∈ ]0,π[, avec θ ≠φ, θ ≠π/2 et θ ≠π/2 + φ. L’angle du mécanisme correspond au paramètre θ.

De manière analogue, l’autre inégalité (9.22) conduit aux trois courbes suivantes :

h h tanX Y TT C σ φ≤ + Ω (9.29)

( )sup infsin cos h cos sinX X YN T Cφ φ φ σ φ+ ≤ + Ω + Ω (9.30)

( ) ( ) ( )( )

( )( )

( )( )

( ) ( ) ( )( )

( )

sup inf

2 2

2 2

2 2

h sgn costan

cos sin hh 1 sgn sin costan 2sin cos

cos sin sin cossin cos

hh . 1 sgn sintan 2

X Y

Y T

X

Y T

CN

C

T

C

θ σ θ φφ

θ θ φ σ θ φ θφθ θ φ

θ θ θ φ θ φθ

θ θ φ

σθ φ

φ

= − Ω + Ω +

+ + Ω − + + − + + − + +

= + + Ω

+ + +( )cosθ

(9.31)

La courbe paramétrique (9.31) est définie pour θ ∈ ]0,π[, avec θ ≠ π − φ, θ ≠π/2 et θ ≠π/2 − φ. Comme précédemment, le paramètre θ est l’angle du mécanisme optimal.

Page 133: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 9 : Le critère poutre statique

133

9.2 Résultat : un critère entièrement analytique Résumons l’ensemble des résultats obtenus dans les paragraphes précédents, en réécrivant les équations (9.19), (9.25), (9.26), (9.27), (9.29), (9.30) et (9.31) à l’aide des variables adimensionnelles suivantes :

h

X

c

Nnf

= , h

X

c

Ttf

= , 2hX

c

Mmf

= et 2 cos1 sincCf φ

φ=

− (9.32)

Ainsi, le critère poutre se décompose en trois parties :

1. Deux cylindres paraboliques, de génératrice 2 0n mξ+ = avec 1ξ = ± :

( ) ( )

22

sup sup inf inf

1 sin2sin

1 sin 2 1 1h 2sin

Y T

c

Y Y T Y T

c c c

tf

n mf f f

σφφ

σ σ σφξ ξρ ξρφ

Ω−≤ +

Ω Ω− − + − Ω + + Ω + + +

(9.33)

L’angle du mécanisme est donné par :

( ) ( )sup sup inf inf2 1 1

h1 arctan4 2 2

Y Y T

c copt

n mf f

t

σ σξ ξρ ξρπθ

Ω + − Ω + + Ω + + = + (9.34)

2. Quatre plans, dont les deux premiers s’écrivent ( 1ξ = ± ) :

1 sin tan2cos

Y T

ct

fσφξ φ

φΩ−

≤ + (9.35)

avec pour angle correspondant :

2optπθ ξφ= − (9.36)

Les deux autres plans sont également perpendiculaires au plan (n,t), donc relèvent aussi de critères indépendants du moment m ( 1ξ = ± ) :

( )sup inf1 sinsin cos sin

2 hY

cn t

fσφφ ξ φ φ−

+ ≤ + Ω + Ω (9.37)

Dans ce cas, l’angle du mécanisme s’écrit :

2optπθ = (9.38)

3. Deux surfaces paramétriques symétriques, indépendantes du moment m ( 1ξ = ± ) :

( ) ( ) ( )( )

( )( )

( )( )

( ) ( ) ( )( )

sup inf

2 2

2 2

2 2

1 sin sgn cos2sin h

cos sin 1 sin 1 sgn sin cos2sin 2sin cos

cos sin sin cossin cos

1 si .

Y

c

Y T

c

nf

f

t

σφθ ξ θ ξφφ

θ θ ξφ σφ ξ θ ξφ θφθ θ ξφ

θ θ θ ξφ θ ξφθ

θ θ ξφ

−= − Ω + Ω +

+ + Ω− − + + + + + − + +

= + +

− ( )( )n 1 sgn sin cos2sin 2

Y T

cfσφ ξ θ ξφ θ

φ

Ω + + +

(9.39)

Page 134: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

134

Compte tenu du fait que les deux surfaces se superposent en partie , on fait varier le

paramètre θ dans l’intervalle 3;4 2 4 2π φ π φξ ξ − −

avec 2πθ ≠ et

2πθ ξφ≠ + . L’angle du

mécanisme optimal est donné par la valeur du paramètre au point considéré :

optθ θ= (9.40)

Ce critère poutre, assez complexe, mais de forme entièrement analytique, peut être visualisé sur la Figure 9.1 dans l’espace (n,t,m). C’est en réalité une combinaison de conditions nécessaires, que l’on peut regrouper en deux catégories :

les conditions qui sont fonctions du moment (les cylindres paraboliques) ;

les conditions qui s’expriment exclusivement en fonction de l’effort normal et de l’effort tranchant (plans et surfaces paramétriques).

On peut interpréter ces deux zones du critère comme caractérisant respectivement une rupture en flexion et une rupture en cisaillement. Ainsi notre critère permet théoriquement de représenter la compétition entre les deux modes de ruine. A première vue, cette interprétation peut paraître abusive dans la mesure où le critère autorise une rupture en cisaillement lorsque que t=0, et des ruptures en flexion avec des efforts tranchants t non nuls. Mais la distinction entre les deux parties du critère est trop manifeste, et les expériences sur la compétition et les transitions entre les deux modes de rupture sont trop rares et trop peu systématiques pour qu’on ne puisse pas proposer une telle interprétation.

Figure 9.1 : Critère poutre et modes de ruine

La superposition des deux surfaces signifie que pour un chargement limite donné (n,t), deux mécanismes sont

en concurrence. Dans notre cas, on choisit le mécanisme correspondant à la valeur de θ la plus proche de π/2. En effet, on estime que des mécanismes où θ est proche de 0 ou π (fissures presque horizontales) nécessitent en réalité plus d’énergie, parce que dans ce cas, le cisaillement des aciers longitudinaux ne peut plus être négligé. C’est d’ailleurs ce qui est constaté expérimentalement.

Ruine enflexion Ruine en

cisaillement

Page 135: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 9 : Le critère poutre statique

135

9.3 Validation A notre connaissance, il n’existe pas dans la littérature de critère pour les poutres en béton armé portant à la fois sur le moment, l’effort normal et l’effort tranchant. Pour vérifier d’une part l’exactitude du calcul analytique, et d’autre part la validité du critère lui-même pour prédire la ruine de la poutre, nous allons dans une premier temps comparer le critère à des calculs numériques, et dans un second temps le comparer, sur des domaines restreints, à des critères de référence existants (critères sur l’effort tranchant pur, critères sur le moment et l’effort normal).

9.3.1 Vérification numérique Comme cela a été présenté en 8.4, le calcul numérique permet de vérifier si les calculs analytiques sont corrects. On présente une comparaison du critère numérique et du critère analytique restreint au plan (n,t) sur la Figure 9.2. Les deux approches fournissent des résultats concordants.

-0,5-0,4-0,3-0,2-0,1

00,10,20,30,40,5

-1,5 -1 -0,5 0 0,5

n

t

Critère numériqueCritère analytique

Figure 9.2 : Comparaison entre le calcul analytique et le calcul numérique

Il est certain que, dans le calcul numérique, plus le nombre de champs 0 0 0, , ,X Z Yu u ω θ testés est élevé, plus la solution trouvée est proche de la solution exacte de l’approche cinématique. Mais, comme il s’agit d’une approche par l’extérieur, cette solution numérique se trouve toujours en dehors du domaine convexe de la solution exacte, et a fortiori en dehors du domaine de résistance réel.

Pour la même raison, le critère analytique explicité en 9.2 définit un volume plus large que le domaine de résistance réel de la poutre. Rappelons encore que le critère analytique n’est pas la solution exacte du problème d’analyse limite. En effet il n’est constitué que de conditions nécessaires (voir § 9.1.1 et annexe D). C’est pourquoi le critère numérique, qui n’est rien d’autre qu’une autre condition nécessaire, se situe parfois à l’intérieur du critère analytique, parfois à l’extérieur (voir Figure 9.3). Le très faible écart entre les deux approches tend néanmoins à prouver que le critère analytique est très proche de la solution exacte de la méthode cinématique par l’extérieur.

Page 136: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

136

0

0,1

0,2

0,3

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5n

t

Critère numériqueCritère analytique

Figure 9.3 : Comparaison entre le calcul analytique et le calcul numérique (détail)

9.3.2 Comparaison avec le critère de cisaillement de Nielsen Un critère simple, validé expérimentalement et couramment utilisé pour la résistance en cisaillement d’une poutre en béton armé, est la formule obtenue par Nielsen et Braestrup [Nielsen 1999]. Elle s’écrit comme suit :

1Y T Y T

c c

tf f

σ σ Ω Ω≤ −

(9.41)

C’est un critère indépendant de l’angle de frottement du béton et qui est valide pour des niveaux de ferraillage longitudinal suffisamment élevés pour empêcher toute rupture en flexion. A l’inverse de Nielsen, notre critère dépend de l’angle de frottement, de la quantité de d’acier transversal et également du ferraillage longitudinal, même en cisaillement pur.

Notons ψ le paramètre de notre critère qui traduit la quantité d’acier longitudinal présent dans la poutre :

( )sup inf

hY

cf

σψ

Ω + Ω= (9.42)

L’angle de frottement étant fixé de telle sorte que tan φ = 0,75 , notre critère est comparé à Nielsen pour différentes valeurs de ferraillage longitudinal ψ . La Figure 9.4 montre que notre critère et celui de Nielsen sont proches pour des valeurs de ψ = 0,5 , c’est-à-dire pour un niveau de ferraillage longitudinal assez élevé. Pour ψ >0,5 , notre critère est une borne supérieure. Pour ψ <0,5 , la différence entre les deux critères vient du fait que Nielsen n’est pas adapté à des niveaux de ferraillage longitudinal faibles.

On peut aussi remarquer qu’il y a un écart assez important entre Nielsen et notre critère lorsque le ferraillage transversal lui aussi est faible. Deux raisons peuvent être invoquées. D’une part, notre approche est fondée sur le critère de Drucker-Prager. Or ce critère n’est pas parfaitement adapté au béton. Moins il y a d’acier dans la poutre, plus les limites du critère, liées à Drucker-Prager dans le béton se font sentir. D’autre part, le critère de Nielsen tel qu’il est présenté ici n’est pas non plus très bon en l’absence de ferraillage transversal. Des améliorations en fonction de la position du chargement par rapport aux appuis de la poutre ont été proposées pour rehausser le critère [Nielsen 1999].

Page 137: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 9 : Le critère poutre statique

137

On peut donc conclure de cette comparaison que notre critère permet de prédire correctement la rupture en cisaillement pur et de bien tenir compte des effets des différents niveaux de ferraillages transversal et longitudinal.

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6σ Y Ω T / f C

t

Nouveau critère : ψ=0,15 ψ=0,3 ψ=0,5 ψ=1,0Nielsen

Figure 9.4 : Comparaison entre Nielsen et le nouveau critère pour différents taux ψ de

ferraillage longitudinal

9.3.3 Comparaison dans des cas de chargement combiné Notre critère a été conçu pour représenter en tout premier lieu la rupture en cisaillement. Dans le paragraphe précédent, on a vérifié que cet objectif était bien atteint. Mais notre travail avait également l’ambition de prendre en compte l’influence de l’effort normal et du moment sur la ruine en cisaillement. Pour vérifier que ce but a également été atteint, nous présentons des comparaisons de notre nouveau critère dans des configurations (n,t), (n,m) et (m,t).

Les caractéristiques de la poutre étudiée sont les suivantes :

tan 0,75φ = sup 0,05h

Y

cfσ Ω

= inf 0,1h

Y

cfσ Ω

= 0,08Y T

cfσ Ω

= sup 0,85ρ = inf 0,75ρ = −

L’élément de comparaison est un critère numérique d’analyse limite, avec une approche par l’extérieure et un mécanisme analogues à ceux que l’on a utilisées pour notre critère, mais en employant un critère de Coulomb tronqué en traction (Modified Coulomb criterion), généralement à une valeur correspondant au dixième de la résistance en compression. Ce critère numérique est forcément situé à l’intérieur de notre critère analytique parce que tronquer le critère local du béton rend le domaine de résistance en contrainte plus petit.

Page 138: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

138

En configuration (n,t) sans moment, les deux critères ont une allure similaire (Figure 9.5). L’écart le plus important se situe, comme on pouvait s’y attendre, en traction pure. Si on s’intéresse à des chargements avec moment (Figure 9.6), on peut constater que :

d’une part, l’influence du moment sur la rupture en effort tranchant n’est pas très bien prise en compte ; une des raisons en est la mauvaise représentation du comportement en traction par Drucker-Prager ;

d’autre part, dès qu’il y a un peu de compression axiale, ni le nouveau critère, ni le critère de Coulomb tronqué ne représentent correctement la rupture en flexion réelle, correspondant au critère de Johansen (voir Chapitre 5) ; dans ce cas, le problème vient du mécanisme, puisque même un critère de Coulomb sans résistance en traction produit le même défaut.

En résumé, l’influence de l’effort normal sur la rupture en cisaillement est bien représentée par notre critère, contrairement à l’influence du moment qui n’est pris en compte que grossièrement. Pour la ruine en flexion, il vaut mieux se fier à Johansen qui a déjà été validé. Cependant, si on combine un critère de Johansen avec notre critère, alors il est possible de bien représenter la compétition entre les modes de ruine en flexion et en cisaillement.

-0,5

-0,4

-0,3

-0,2

-0,1

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

-1,5 -1 -0,5 0 0,5

n

t

Nouveau critèreModified Coulomb (ft=fc/10)

Figure 9.5 : Comparaison de critères de rupture (n,t)

-1

-0,5

0

0,5

1

-1,5 -1 -0,5 0 0,5

n

m

Nouveau critèreModified Coulomb (ft=fc/10)Modified Coulomb (ft=0)Johansen

-0,5

-0,25

0

0,25

0,5

-0,5 -0,25 0 0,25 0,5

t

m

Nouveau critèreModified Coulomb (ft=fc/10)

Figure 9.6 : Comparaisons de critères de rupture (n,m) et (m,t)

Page 139: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 9 : Le critère poutre statique

139

9.4 Conclusion Dans ce chapitre nous avons obtenu un critère entièrement analytique pour poutre en béton armé sollicitée par un effort tranchant, une force axiale et un moment. Ce critère est une borne supérieure, c’est-à-dire que, de manière certaine, le chargement ne peut pas dépasser la limite donnée par le critère sans que la ruine ne soit atteinte. Autrement dit, les efforts réels de rupture sont inclus dans le domaine décrit par le critère.

Ce critère a la particularité de se décomposer de manière assez nette en deux parties, caractérisant chacune un mode de ruine :

une partie indépendante du moment, pour une ruine en cisaillement ;

une partie fonction du moment, de l’effort tranchant et de l’effort normal, que l’on identifie avec une ruine en flexion.

Ainsi ce critère permet théoriquement de prédire la compétition entre les deux modes de ruine. Il a également l’avantage de fournir l’angle du mécanisme optimal parmi tous les mécanismes de ruine considérés. Dans la suite, on interprètera cet angle comme l’angle réel orientant le plan de rupture dans l’épaisseur de la poutre.

Nous avons validé le critère en sollicitation d’effort tranchant pur par une confrontation avec le critère classique de Nielsen. La pertinence des conditions de ruine a également été vérifiée pour différentes combinaisons d’efforts en les comparant à des critères numériques. On en a conclu que le critère représentait bien l’influence de l’effort normal sur la ruine en cisaillement. Pour traiter de manière appropriée la compétition entre la ruine en cisaillement et la ruine en flexion, on a montré qu’il fallait combiner l’utilisation de notre nouveau critère avec le critère de Johansen.

Page 140: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

140

Page 141: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 10 : Le critère plaque statique

141

Chapitre 10

Le critère plaque statique

Equation Section 10

Au chapitre 8, nous avons montré que pour obtenir un critère plaque, une solution consistait à résoudre d’abord le problème d’analyse limite pour une poutre. Cette étape préalable ayant été franchie dans le chapitre 9, nous nous intéressons donc maintenant à la détermination du critère pour une plaque.

Comme au chapitre précédent, le problème à résoudre est un problème d’optimisation, avec cette fois-ci comme variable l’angle α définissant l’orientation du mécanisme dans la plaque. Mais, bien qu’il ne s’agisse que de fonctions d’une seule variable, il n’est pas possible d’obtenir un critère entièrement analytique. Le résultat est donc mi-analytique, mi-numérique, la partie numérique étant relativement simple puisqu’elle se base sur les résultats poutres entièrement analytiques.

Outre la résolution, ce chapitre présente également la validation des résultats. Il est montré que le critère plaque statique obtenu est efficace pour prédire la ruine de la structure. Les hypothèses effectuées au chapitre 8, en particulier le choix du mécanisme et du critère local pour le béton, étaient donc pertinentes.

Page 142: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

142

10.1 Résolution La résolution s’effectue en partant de chacune des conditions du critère poutre. Mais contrairement au chapitre précédent, il n’est pas possible de trouver une solution entièrement analytique : certaines conditions du critère poutre ne peuvent être exploitées que de manière numérique, même dans le cas plus simple d’une dalle axisymétrique.

10.1.1 Partie analytique Les conditions correspondant aux cylindres paraboliques et aux plans peuvent être étendues analytiquement au cas des plaques.

10.1.1.1 A partir des cylindres paraboliques du critère poutre Pour simplifier l’écriture, posons :

max h h tanY TT C σ φ= + Ω (10.1)

et :

( )

( ) ( )2

2 max maxsup sup inf inf

, ,

2 1 1 h

tan h tan

beami i i

ii i Y i i Y T

f N T M

T M TT N

ξ

ξ σ ξρ ξρ σφ φ

=

+ + − Ω + + Ω + + Ω −

(10.2)

où i est mis pour x, y, ou bien X.

Les cylindres paraboliques du critère poutre (9.33) s’écrivent alors de manière beaucoup plus simple :

( ), , 0beamX X Xf N T Mξ ≤ (10.3)

Le repère (X,Y,Z) est déterminé par l’angle α. Nous allons donc réécrire cette condition (10.3) dans le repère (x,y,z) en fonction du paramètre α. En utilisant les formules de changement de repère pour les efforts (8.5), sans oublier celles pour le ferraillage (8.6), on peut montrer que le problème plaque revient à trouver le domaine des (Nx, Ny, Nxy, Tx, Ty, Mx, My, Mxy) qui vérifient :

( ) ( )2 2

max

, , cos , , sin

22 cos sin 0

tan h

beam beamx x x y y y

xyx y xy

f N T M f N T M

MTT T N

ξ ξα α

ξ α αφ

+

+ + + ≤

[ ]0,α π∀ ∈ 2 (10.4)

On rappelle que si F est une fonction définie comme suit :

( ) 2 2cos sin cos sinF a b cα α α α α= + + (10.5)

alors le maximum de la fonction pour α ∈ [0,2π] s’écrit :

( ) ( )2 2

[0,2 ]max F a b c a b

α πα

∈= − + + + (10.6)

Ce maximum est atteint pour une valeur de α correspondant à :

1 1arctan arctan4 2 2opt

a b cc a b

πα −= − =

− (10.7)

Page 143: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 10 : Le critère plaque statique

143

Par conséquent la condition (10.4), qui doit être vraie pour tout α ∈ [0,2π], est équivalente à :

( ) ( )

( ) ( )

22

max 2, , , , 4

tan h

, , , , 0

xybeam beamx x x y y y x y xy

beam beamx x x y y y

MTf N T M f N T M T T N

f N T M f N T M

ξ ξ

ξ ξ

ξφ

− + + +

+ + ≤

(10.8)

L’angle du mécanisme dans la plaque est égal à :

( ) ( )

max

, , , ,1 arctan4 2 2

2tan h

beam beamx x x y y y

optxy

x y xy

f N T M f N T M

MTT T N

ξ ξπαξ

φ

−= −

+ +

(10.9)

Ce critère est relativement compliqué, mais il a l’avantage d’être analytique. Il se simplifie dans le cas axisymétrique (ferraillage et chargement axisymétriques). En effet, en utilisant les notations décrites sur la Figure 10.1, on obtient des conditions qui s’écrivent :

( )

( ), , 0 0

,0, 0 2

beamrr rr rr opt

beamopt

f N T M

f N M

ξ

ξ ββ ββ

α

πα

≤ =

≤ =

(10.10)

On voit que la ruine peut intervenir selon des mécanismes ou des fissures radiales, ou orthoradiales (circulaires).

Figure 10.1 : Dalle axisymétrique

10.1.1.2 A partir des plans du critère poutre Compte tenu de la notation simplifiée introduite dans le paragraphe précédent (10.1), la partie du critère poutre correspondant aux deux plans (condition (9.35)) se réécrit ainsi :

maxcos sinx yT T Tα α+ ≤ [ ]0,α π∀ ∈ 2 (10.11)

Ceci nous donne le critère plaque correspondant : 2 2

maxx yT T T+ ≤ (10.12)

et l’angle du mécanisme optimal :

arctan yopt

x

TT

α = (10.13)

α

y

X

Y

β r

x

Page 144: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

144

Pour une dalle axisymétrique, on trouve :

max 0 r optT T α≤ = (10.14)

c’est-à-dire, dans ce cas, une fissuration circulaire ou orthoradiale.

10.1.2 Partie numérique Les deux autres conditions correspondant à des plans (équation (9.37)), ainsi que les surfaces paramétriques (9.39) ne peuvent pas être exploitées analytiquement pour en déduire un critère plaque explicite. Même le cas axisymétrique, théoriquement plus simple, ne conduit pas à des inéquations dont il est possible de tirer l’optimum par rapport à l’angle α.

Une tentative de résolution a été faite en interpolant la surface paramétrique avec des polynômes de degré deux. Mais d’une part cela ne permet plus de connaître l’angle optimal θ d’inclinaison du plan de rupture dans l’épaisseur de la dalle, car l’angle est lié au paramétrage du critère. Et d’autre part cela ne permet pas de simplifier suffisamment le problème. La seule chose que l’on puisse dire c’est qu’il n’est pas impossible que, dans le cas axisymétrique, l’angle α du mécanisme optimal puisse être différent de 0 ou de π, c’est à dire qu’il puisse y avoir un mécanisme avec des fissures en hélices (voir Figure 10.2).

2πα = 0α = 0,

2πα ≠

Figure 10.2 : Mécanismes dans le cas axisymétrique

A défaut d’avoir pu obtenir une expression analytique de cette partie du critère, il nous reste donc comme unique solution à programmer le critère de manière numérique.

On choisit un nombre fini de valeurs de l’angle αi. Dans chacune de ces directions αi, on vérifie si le critère poutre correspondant aux plans (9.37) et aux surfaces paramétriques (9.39) est atteint pour les efforts NXi TXi MXi :

2 2

2 2

cos sin 2 cos sin

cos sin

cos sin 2 cos sin

Xi x i y i xy i i

Xi x i y i

Xi x i y i xy i i

N N N N

T T T

M M M M

α α α α

α α

α α α α

= + + = +

= + +

(10.15)

avec un ferraillage de poutre :

2 2

sup sup sup

2 2inf inf inf

cos sin

cos sini x i y i

i x i y i

α α

α α

Ω = Ω + Ω

Ω = Ω + Ω (10.16)

La seule difficulté tient au fait que la surface paramétrique (9.39) de paramètre θ doit également être discrétisée à partir d’un nombre fini de valeurs θ j du paramètre (Figure 10.3). La surface est alors décrite à partir des points : ( ) ( )( ),

i ij jN Mα αθ θ . Si d’une part on note ( ),X XN Mαξ la fonction qui

vaut –1 lorsque le point ( ),X XN M est à l’intérieur du critère décrit par la surface paramétrique et +1

Page 145: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 10 : Le critère plaque statique

145

lorsqu’il se trouve à l’extérieur, et si d’autre part ( ) ( )( ) ( ), ; ,j j X XN M N Mα αθ θ est la distance

entre les points ( ) ( )( ),j jN Mα αθ θ et ( ),X XN M , alors le critère numérique peut s’écrire :

( ) ( ) ( )( ) ( )max , min , ; , 0i i iXi Xi j j Xi Xiji

N M N M N Mα α αξ θ θ ≤ (10.17)

Plans αi définissant les sections des "poutres" Mécanismes θj dans la "poutre" définie par αi fixé

Figure 10.3 : Discrétisation des mécanismes pour le critère numérique

10.2 Validation Dans la littérature, il existe peu d’études expérimentales systématiques de dalles qui fournissent directement des efforts limites combinés en membrane, en flexion et en effort tranchant. On peut trouver quelques résultats expérimentaux dans [Jau et al. 1982, Adebar et He 1994], mais ils sont difficilement exploitables. Par conséquent, on ne peut pas comparer le critère directement, mais on peut néanmoins le valider avec un calcul de structure.

10.2.1 Essais Yamada, Nanni, Endo On s’intéresse ainsi aux essais effectués par [Yamada et al. 1992]. Il s’agit d’une colonne encastrée dans une dalle sur laquelle sont appliquées des forces qui produisent un poinçonnement en cisaillement au niveau de la jonction entre la dalle et la colonne (voir Figure 10.4). On obtient ainsi une combinaison de moment et d’effort tranchant dans les deux directions au droit de l’encastrement. Les caractéristiques des tests sont données sur la Figure 10.4 et dans le Tableau 10.1.

Figure 10.4 : Schéma des essais de poinçonnement (dimensions en cm) [Yamada et al. 1992]

x

z

x

y

Lignes d’application du chargement

Colonne encastrée dans la dalle

200

20

30

25

30

30

25

x

y

z

Page 146: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

146

Béton Ferraillage longitudinal Ferraillage transversal

Contrainte limite en compression Aire des aciers Contrainte limite Aire des aciers Contrainte limite

fc Ωxinf = Ωyinf

= Ωxsup = Ωysup σYL ΩT σYT

Test

MPa m2/m MPa m2/m2 MPa

K1 26,0 0,00306 568 0,00 -

K2 27,17 0,00306 568 0,25 347

K3 25,90 0,00306 568 0,50 347

K4 27,37 0,00306 568 0,55 317

K5 26,00 0,00306 568 1,11 317

K6 26,39 0,00306 568 0,99 330

K7 27,76 0,00306 568 1,98 330

Tableau 10.1 : Caractéristiques des dalles testées

Les résultats obtenus directement avec un calcul Europlexus linéaire et le nouveau critère sont montrés sur la Figure 10.5. On constate que, malgré une allure similaire, il existe un écart assez important entre la prédiction numérique et les valeurs expérimentales. Dans la suite, nous allons nous intéresser aux raisons d’un tel écart, et justifier l’introduction d’un ingrédient supplémentaire dans le critère, à savoir un facteur de correction sur la contrainte du béton.

0

200

400

600

800

1000

1200

1400

1600

1800

2000

0,00% 0,50% 1,00% 1,50% 2,00%

Taux de ferraillage transversal

Forc

e de

rupt

ure

(kN

)

Test Yamada Nanni Endo

Nouveau critère sans facteur decontrainte effective

Figure 10.5 : Comparaison du critère (sans facteur de contrainte effective) avec les essais

[Yamada et al. 1992]

Page 147: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 10 : Le critère plaque statique

147

10.2.2 Facteur de contrainte effective Le paragraphe précédent a établi que, malgré une bonne prédiction qualitative, le critère dalle donnait quantitativement des résultats assez éloignés de la réalité. Pourtant le critère a été validé en configuration poutre (voir § 9.3). Une conclusion hâtive serait de remettre en question l’extension du critère poutre aux dalles.

En réalité, le critère poutre a été validé sur un autre critère analytique (critère de Nielsen). Mais Nielsen note que son critère, pour être applicable et prédictif, doit être combiné avec l’utilisation d’une contrainte effective différente de la contrainte limite de compression du béton. Ainsi, compte tenu de nombreux essais effectués au Danemark, Nielsen préconise l’utilisation d’une contrainte effective du béton νfc.fc au lieu de fc comme contrainte limite de compression du béton avec νfc le facteur de contrainte effective (effectiveness factor) défini par [Nielsen 1999] :

0,8200

cfc

fν = − avec fc en MPa (10.18)

La nécessité d’employer une contrainte effective dans le cadre de l’analyse limite du béton armé est largement reconnue de part et d’autre de l’Océan Atlantique [Eurocode2 1991, Wang 1995]. Les Eurocodes ajoutent pour les bétons à haute performance la condition :

0,5fcν ≥ (10.19)

Trois raisons peuvent justifier l’utilisation d’un tel facteur de réduction.

Cela permet de corriger le fait qu’il s’agit d’une borne supérieure déterminée au moyen d’une approche par l’extérieur, c’est-à-dire qu’on réduit ainsi un critère qui est par construction plus grand que le domaine de résistance réel.

Bien que théoriquement indépendant du comportement du matériau, le calcul à la rupture est bien adaptée aux matériaux ductiles. En effet le critère enveloppe obtenu nécessite, pour que les mécanismes de ruine s’expriment, une capacité de déformation non négligeable lorsque le pic en contrainte est atteint. En analyse limite, le critère de ruine issu d’un calcul à la rupture correspond au chargement maximal supporté par une structure au comportement parfaitement plastique [Salençon 2001]. Or, si l’acier peut être considéré comme ductile, il n’en est pas de même du béton qui est fragile en traction et adoucissant en compression. La réduction de la limite en compression du béton permet de corriger dans le critère cette erreur, en définissant un comportement parfaitement plastique équivalent du béton (voir Figure 10.6).

De plus comme il s’agit d’un mécanisme de ruine global, il est illusoire que localement la contrainte atteigne partout le pic maximum en compression.

Figure 10.6 : Comportement du béton

ε

σ fc

νfc.fc

Page 148: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

148

Les nouvelles valeurs des forces de rupture issues d’un calcul utilisant la contrainte effective sont présentées Figure 10.7. La correction apportée par ce facteur de réduction améliore considérablement les résultats. Il existe toutefois un léger écart lorsque le ferraillage transversal est faible. C’est déjà ce qui avait été constaté lors de la validation du critère poutre. De manière général, comme le critère du béton est comparativement moins bon que le critère des aciers, plus il y aura d’aciers dans la plaque, meilleur sera le critère.

La Figure 10.7 montre également que le critère peut prédire le mode de rupture, par flexion ou par cisaillement. Cela permet de valider l’interprétation faite au § 9.2 sur les deux zones du critère, l’une dépendant uniquement de l’effort membranaire N et de l’effort tranchant T pour la ruine par cisaillement et l’autre qui est fonction également du moment de flexion M pour la ruine en flexion.

0

200

400

600

800

1000

1200

1400

1600

1800

2000

0,00% 0,50% 1,00% 1,50% 2,00%

Taux de ferraillage transversal

Forc

e de

rupt

ure

(kN

)

Test Yamada Nanni Endo

Nouveau critère sans facteur decontrainte effective

Nouveau critère avec facteur decontrainte effective

Figure 10.7 : Influence du facteur de contrainte effective : essais [Yamada et al. 1992]

10.3 Conclusion Ce chapitre a permis d’obtenir un critère pour toute plaque en béton armé sollicitée localement par une combinaison d’efforts généralisés qu’il s’agisse d’efforts tranchants, de forces membranaires ou de moments de flexion. Ce critère plaque est atteint lorsqu’il existe une direction dans la plaque où le critère poutre est lui-même activé. Ce constat a permis de déduire le critère plaque du critère poutre. Cependant le critère plaque, contrairement au critère poutre, n’a pas une expression totalement analytique. La partie du critère qui pilote la ruine en flexion est analytique alors que la gestion de la ruine en cisaillement nécessite une procédure numérique.

L’ensemble du critère a été programmé dans Europlexus, ce qui a permis une validation du critère par le calcul d’une plaque reliée à un poteau par un encastrement. La confrontation des résultats donnés par Europlexus avec des résultats expérimentaux a mis en évidence la nécessité d’utiliser une contrainte effective à la place de la contrainte limite en compression du béton. Moyennant cet artifice reconnu depuis longtemps comme nécessaire par la communauté du génie civil pour le calcul à la rupture du béton, les résultats du calcul concordent avec les essais. La qualité du critère est montrée également par le fait qu’il permet de prédire le mode de ruine de la structure, par cisaillement (poinçonnement) ou par flexion.

B B Rupture en flexion

S S Rupture en cisaillement

S

B

B

B B

S/B S S S

S S

S S S

Page 149: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

149

Chapitre 11

Validation du critère en dynamique

pour la perforation

Equation Section 11

Dans la première partie de ce mémoire, l’analyse des phénomènes dynamiques apparaissant au cours d’un choc mou nous a conduit à proposer l’utilisation d’un critère statique de rupture pour prédire la perforation. Ce critère, formulé en fonction des tenseurs N,M,T (effort normal, moment et effort tranchant) a été déterminé et validé en statique au cours des chapitres 8, 9 et 10. Il s’agit maintenant de vérifier qu’il est possible d’utiliser ce critère statique en dynamique pour prédire la perforation de la dalle en l’appliquant aux efforts issus d’un calcul dynamique.

Pour cela, on utilise les essais de référence pour les chocs mous que constituent les tests Meppen [Jonas et al. 1979] (voir Chapitre 1). L’intérêt de ces essais vient du fait que les dalles testées présentent différents degrés de dégradation. Nous montrons dans ce chapitre les résultats donnés par le critère de perforation sur un calcul Europlexus non linéaire avec le modèle GLRC décrit dans la partie II de ce mémoire. Ce faisant, l’objectif est d’élaborer une méthode d’utilisation de ce critère par l’ingénierie permettant une analyse efficace de la perforation.

Enfin, on vérifie la pertinence de la modélisation adoptée en vérifiant que GLRC fournit des résultats corrects. Les éléments de comparaison sont bien sûr les courbes expérimentales de déplacement des essais Meppen, mais également des calculs effectués par le bureau d’étude Hochtief [Jonas et al. 1982-a].

Page 150: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

150

11.1 Description des essais Meppen Les données sur les essais Meppen sont dispersées dans plusieurs documents [Jonas et al. 1979, Nachtsheim et Stangenberg 1981, Jonas et al. 1982-a, Jonas et al. 1982-b, Nachtsheim et Stangenberg 1982, Rüdiger et Riech 1983, Nachtsheim et al. 1984].

Parmi les vingt et un tests effectués à Meppen sont choisis quelques essais caractéristiques pour lesquels on possède suffisamment d’information (Figure 11.1) :

un essai peu endommageant (essai II-2) ;

un essai où le cône de perforation est formé et où la fissuration s’est développée de manière conséquente (essai II-9) ;

un essai à la limite de l’intégrité complète, c’est-à-dire juste avant que des morceaux de béton ne se détachent (essai II-4) ;

un essai perforant (essai II-5).

Figure 11.1 : Essais Meppen – Etat d’endommagement des dalles de béton armé (d’après [Nachtsheim et al. 1984])

II-2

II-

10II-

11II-

12II-

9

II-8

II-

4

II-21

II-7

II-

16II-

17II-

18II-

22II-

20II-

6

II-14

II-1

II-

5

II-13

II-15

II-3

II-

19Test

Dommage

Fissures obliques délimitant un cône

Fissures sur la face arrière

Fissures se propageant le long du ferraillage longitudinal arrière

Ecailles du béton de couverture en face arrière

Décollement de petits morceaux de béton

Déplacement du cône

Décollement de gros morceaux de béton

Desagrégaton du béton à l'intérieur du cône

Rupture des premiers aciers longitudinauxarrières

Limite de perforation de la plaque

Vitesse résiduelle du projectile non nulle

Intégrité complète

Perforation

Page 151: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

151

11.1.1 Géométrie Tous les essais sont effectués sur des dalles de 6,00 m × 6,50 m (voir Figure 11.2). Elles sont maintenues verticalement contre un bâti à l’aide de cylindres d’appui et de câbles de précontrainte. Le centre de la dalle est impacté par un projectile constitué d’un tube déformable creux en acier. Les quatre dalles examinées ont toutes la même épaisseur. En revanche, le ferraillage varie selon les essais (voir Tableau 11.1).

Figure 11.2 : Géométrie de la dalle (dimensions en cm)

Essai Epaisseur h

Densité linéique

d’aciers face avant

Ωxsup= Ωysup

Densité linéique

d’aciers face arrière

Ωxinf=Ωyinf

Diamètre des barres d’acier

face avant

Diamètre des barres d’acier face arrière

Epaisseur du béton de

couverture face avant

Epaisseur du béton de

couverture face arrière

Densité surfacique d’aciers

transversaux ΩT

m cm2/m cm2/m mm mm m m cm2/m2

II-2 0,7 27,3 53,6 20 28 Pas connu Pas connu 24,6

II-4 0,7 27,3 53,6 20 28 0,025 0,06 50,2

II-5 0,7 27,3 53,6 20 28 Pas connu Pas connu 12,6

II-9 0,7 28,5 56 20 28 0,05 0,06 50,2

Tableau 11.1 : Epaisseurs et ferraillage des dalles

650

600

55 55 540

30

30

540

Cylindres d’appui Câbles de précontrainte

Page 152: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

152

11.1.2 Caractéristiques des matériaux

Acier

Deux types d’acier sont utilisés : l’acier RK et l’acier RU, dont les courbes déformation contrainte sont présentées ci-dessous (Figure 11.3), avec leurs valeurs dans le Tableau 11.2. Le module d’Young Ea de l’acier est de 210000 MPa. La déformation εp au début de la plasticité est de 0,2% (voir Figure 11.3).

Acier RK Acier RU

Figure 11.3 : Comportement schématique des aciers en traction

Essai Type d’acier Limite élastique σe

Limite plastiqueσp

Résistance maximale

σmax

Déformation résiduelle à

résistance max εc

MPa MPa MPa %

II-2 RK BSt 420/500 422 505 617 5,6

II-4 RK BSt 420/500 430 494 620 6,0

II-5 RK BSt 420/500

Caractéristiques exactes inconnues, mais valeurs proches de II-4

II-9 RU BSt 420/500 527 527 689 11,3

Tableau 11.2 : Caractéristiques des aciers

Béton

Beaucoup de tests ont été effectués sur le béton pour en déterminer les caractéristiques (Tableau 11.3). Par conséquent il est parfois difficile de savoir à quelle valeur se fier (en particulier pour la contrainte limite en compression). La déformation du béton lorsque la contrainte limite en compression est atteinte est de 0,2%.

ε

σ

εc εp

σe

σp σmax

ε

σ

εc εp

σe= σp σmax

Page 153: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

153

Essai Module d’Young (pour σ=1/3 fc)

Eb

Contrainte limite en compression [Jonas et al.

1982-a] fc

Contrainte limite en compression

[Rüdiger et Riech 1983]

fc

Contrainte limite en traction

ft

MPa MPa MPa MPa

II-2 30155 38,4 34,4 5,3

II-4 29053 37,2 37,3 4,8

II-5 30000 [Jonas et al. 1982-a] 26578 [Jonas et al. 1982-b] 33 39,7 4,6

II-9 30083 32,5 38,9 5,7

Tableau 11.3 : Caractéristiques du béton

11.1.3 Chargement Un projectile constitué d’un cylindre creux s’écrase sur le centre de la dalle. L’épaisseur de la paroi du tube cylindrique varie légèrement entre l’avant et l’arrière du projectile, ceci afin d’obtenir une force d’impact la plus constante possible au cours de l’écrasement. La masse et la vitesse du projectile à l’impact sont données dans le Tableau 11.4.

Principales caractéristiques du projectile :

Diamètre extérieur : 600 mm

Partie avant : Epaisseur de la paroi : 7 mm

Longueur : 2500 mm

Partie arrière : Epaisseur de la paroi : 10 mm

Longueur : 3300 mm

Longueur totale : 5990 mm

Acier : RSt 37-2

Essai Masse du projectile Vitesse Energie cinétique

kg m/s kJ II-2 1016 172,2 15100 II-4 1016 247,7 31200 II-5 974 234,8 26800 II-9 970 235,8 27000

Tableau 11.4 : Caractéristiques du chargement

Page 154: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

154

11.2 Modélisation Après avoir décrit les données importantes récupérées de la documentation sur les essais Meppen, nous détaillons dans cette partie les choix faits pour modéliser ces quatre essais et pour effectuer les calculs avec Europlexus.

11.2.1 Modèle éléments finis On utilise les propriétés de symétrie de la dalle et du chargement pour ne modéliser qu’un quart de la structure (voir Figure 11.4). Les éléments finis choisis sont les plaques quadrangulaires Q4GS (théorie de Reissner-Mindlin) d’Europlexus parce que, contrairement à la modélisation DKT (théorie de Love-Kircchoff), ils calculent explicitement l’effort tranchant T, nécessaire au critère de perforation. Cet effort tranchant est calculé par Europlexus sur la base de la loi élastique suivante :

x x x

y y y

T GT G

γγ

= =

(11.1)

avec γx γy les déformations de cisaillement hors plan et Gx et Gy des coefficients élastiques. Nous déterminons ces coefficients en faisant l’hypothèse relativement grossière que la plaque est homogène avec un module d’Young (Eb+EaΩT) et un coefficient de Poisson pris égal à celui du béton νb (hypothèse classique qui considère que puisque le ferraillage est constitué de grilles, la contribution des armatures à l’effet de Poisson est négligeable). Par conséquent, les expressions de Gx et Gy issues de la théorie des plaques sont les suivantes :

( ) ( )

( ) ( )

h2 1

h2 1

x b a Tb

y b a Tb

G k E E

G k E E

ν

ν

= + Ω + = + Ω +

(11.2)

avec k le facteur de correction de cisaillement transverse pris égal à 5/6.

Figure 11.4 : Maillage

Surface de chargement

Ligne d’appui

Page 155: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

155

11.2.2 Conditions aux limites L’analyse des déformations dans les différents types de câbles de précontraintes qui maintiennent la dalle contre le bâti (voir Figure 11.5) montre que :

les déformations des câbles situés au droit des cylindres d’appui sont très faibles ;

les déformations des câbles situés symétriquement de part et d’autre de cette ligne de cylindres d’appui sont opposées : si un câble se tend d’un côté, alors le câble symétrique par rapport à la ligne des cylindres d’appui se détend.

On en déduit que la plaque est appuyée simplement au droit de la ligne de cylindres d’appui qui court sur son pourtour (Figure 11.5). Ceci est confirmé par les calculs Hochtief , qui prennent en compte une raideur en rotation, mais concluent que cette raideur est faible et qu’elle a peu d’influence sur le résultat final [Jonas et al. 1982-a].

Types de câbles de précontrainte Modélisation

Figure 11.5 : Conditions aux limites (dimensions en cm)

11.2.3 Amortissement On prend en compte un amortissement forfaitaire de 7% à la fréquence 45 Hz (amortissement basse fréquence de Rayleigh calé sur le premier mode de la dalle en flexion sur appuis simples). Cela correspond aux préconisations de l’ETC-C, code réglementaire de référence pour le génie civil des constructions nucléaires, largement inspiré des Eurocodes [ETC-C 2005].

650

600

55 55 540

30

30

540

Ligne d’appui simple Cylindre d’appui

Câbles de précontrainte symétriques par rapport aux cylindres d’appui

Câble de précontraintesur la ligne des

cylindres d’appui

Page 156: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

156

11.2.4 Chargement La force appliquée à la dalle par le projectile au cours de l’impact est reprise de la documentation des essais Meppen [Jonas et al. 1982-a]. Elle a été calculée sur la base de la formule de Riera [Riera 1968], à partir des relevés de vitesse et de position du projectile durant l’écrasement. Le détail du chargement est présenté dans la Figure 11.6.

0

2

4

6

8

10

12

14

0 10 20 30 40

Temps (ms)

Forc

e (M

N)

II-2II-4II-5II-9

Figure 11.6 : Evolution du chargement en fonction du temps

Surface de chargement

Le projectile a un diamètre de 0,60 m. Mais au cours de l’impact, la surface de contact augmente légèrement à cause de l’écrasement de la tôle (voir Figure 11.7). Le diamètre du projectile écrasé, mesuré sur ce qui reste du projectile après l’impact, est de 0,80 m. C’est cette dernière valeur qui est prise comme diamètre de la surface d’impact dans les calculs.

Projectile intact avant impact Projectile après impact

Figure 11.7 : Forme schématique du projectile au cours de l’impact

11.2.5 Paramètres spécifiques à la perforation Les paramètres du critère sont de deux ordres. D’abord, ceux qui décrivent les caractéristiques de la section de béton armé et dont les valeurs sont directement déduites des données fournies dans les paragraphes précédents :

Ωxsup et Ωysup : aires (densité linéique) du lit supérieur des aciers longitudinaux dans les directions x et y (m2/m) ;

Ωxinf et Ωyinf : aires (densité linéique) du lit inférieur des aciers longitudinaux dans les directions x et y (m2/m) ;

0,6 m 0,8 m

Page 157: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

157

ΩT : densité surfacique d’aciers transversaux (m2/m2) ;

supρ et infρ : positions relatives des aciers longitudinaux dans l’épaisseur de la plaque ( inf sup1 1ρ ρ− ≤ < ≤ ).

En second lieu, il y a les paramètres liés aux matériaux, qui correspondent aux critères locaux du béton et de l’acier :

fc : contrainte limite du béton en compression ;

νfc : coefficient de réduction de la contrainte limite du béton (νfc..fc étant la contrainte effective) ;

φ : angle de frottement du béton ;

σY : contrainte limite de l’acier en traction.

La contrainte limite du béton fc utilisée pour les calculs est celle fournie par les documents Meppen et donnée en 11.1.2.

Le coefficient de réduction νfc de la contrainte limite du béton pour la détermination de la contrainte effective, qu’il est nécessaire d’utiliser avec le critère pour obtenir des résultats corrects (§ 10.2.2) est calculé à partir de fc en utilisant l’équation (10.17) que l’on rappelle ici :

0,8200

cfc

fν = − avec fc en MPa (11.3)

Il n’y a pas d’information sur l’angle de frottement dans les tests matériaux des essais Meppen. Kaufman constate que l’angle de frottement varie peu en fonction du béton utilisé. On prend donc une valeur standard telle que tan φ=0,75 [Kaufman 1998].

Enfin, la contrainte limite de l’acier en traction est prise soit comme la contrainte plastique σp (série de calculs n°1) soit comme la contrainte à rupture σmax (série de calcul n°2). En effet, le critère de perforation utilisé est un critère issu de l’analyse limite et de l’approche cinématique par l’extérieur. Il correspond donc au comportement d’un matériau plastique parfait [Salençon 2001]. Or bien que l’acier ait un comportement ductile, il ne correspond pas exactement à un matériau parfaitement plastique à cause de l’écrouissage. Selon le choix de la contrainte limite comme la contrainte plastique ou bien la contrainte à rupture, on obtient un critère global de plasticité, ou bien un critère global de rupture. Dans le cas de la perforation, on s’attend à ce que le critère de plasticité corresponde à un critère de formation du cône et que le critère de rupture soit un critère de détachement du cône.

Les valeurs de tous les paramètres sont reprises dans le Tableau 11.5.

Essai Contrainte limite en compression

fc

Coefficient de réduction

νfc

Angle de frottement

φ (tanφ = 0,75)

Contrainte limite des aciers

σY (Série 1)

Contrainte limite des aciers

σY (Série 2)

MPa - Degrés MPa MPa

II-2 34,4 0,628 36,87 505 617

II-4 37,2 0,614 36,87 494 620

II-5 33 0,635 36,87 494 620

II-9 32,5 0,638 36,87 527 689

Tableau 11.5 : Paramètres pour le critère de perforation

Page 158: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

158

11.3 Résultats 11.3.1 Perforation

Comme indiqué dans le § 11.2.5, on effectue deux séries de calculs : d’abord en fixant pour le critère de perforation la contrainte limite pour les aciers à la valeur de la contrainte plastique σp (série n°1) et ensuite à la valeur de la contrainte maximale à rupture σmax (série n°2). L’objectif est de caractériser d’une part la formation du cône et la plasticité des aciers, ou plus généralement le début du processus de perforation (série n°1) et d’autre part la rupture des aciers et la perforation effective (série n°2).

11.3.1.1 Série n°1 : critère d’intégrité complète On présente les résultats du calcul du critère à 25 ms, c’est-à-dire à l’issue du premier pic de déplacement (Figure 11.8 et Figure 11.9). La première figure montre la manière dont sont visualisés les résultats du calcul Europlexus : lorsque le critère est atteint en un point de Gauss, apparaît alors le plan correspondant au mécanisme de ruine locale, incliné d’un angle θ par rapport au plan moyen de la plaque. Sur la Figure 11.9, les zones en rouge correspondent aux points de Gauss où le critère a été atteint au cours des instants précédents.

Zoom Interprétation

Figure 11.8 : Mécanisme de ruine pour l’essai II-4 (série de calculs n°1)

Surface de rupture

x

y z

θ

Page 159: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

159

Essai II-2 Essai II-9

Essai II-4 Essai II-5

Figure 11.9 : Points de Gauss atteints par le critère (série de calculs n°1)

Comparaison des modes de ruine de la structure et de l’angle du cône

On observe qu’une couronne de points de Gauss atteints par le critère s’est développée à la limite de la surface d’impact pour un état d’endommagement intermédiaire entre les cas II-9 et II-4. Cette disposition des points atteints par le critère, ainsi que l’inclinaison des plans de rupture n’est pas sans rappeler la forme d’un cône (Figure 11.8), exactement comme dans les essais.

L’angle d’inclinaison calculé (angle θ par rapport au plan (xy) de la plaque : Figure 11.8) est comparé aux valeurs identifiées dans les essais pour les différents cas (Tableau 11.6). L’angle du cône donné par le calcul est proche de celui observé expérimentalement. De plus, dans les calculs comme dans les tests, l’angle diminue lorsqu’on s’éloigne de la zone d’impact.

x

y

Page 160: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

160

Essai Angle θ calculé

Angle θ expérimental

II-4 58° 63°

II-5

58°

(53° pour les points de Gauss les plus éloignés du

point d’impact)

45° – 52°

Tableau 11.6 : Angle du cône de rupture

Comparaison des niveaux de ruine de la structure

Nous avons déjà mis évidence que lors du calcul de la dalle II-4 le critère a été activé sur une couronne autour de la surface d’impact. En outre nous remarquons qu’un certain nombre de points a dépassé le seuil du critère dès l’essai II-9, mais que dans ce cas ils ne forment pas une couronne complète.

La Figure 11.1 qui présente les résultats expérimentaux montre que les fissures obliques et donc le cône de fissuration se sont formés pour des sollicitations intermédiaires à l’essai II-2 et l’essai II-9. Jusqu’à l’essai II-4, bien que la dalle ait déjà commencé à se dégrader, son intégrité est conservée au sens où la structure reste entière sans qu’aucun morceau de béton ne se détache. Après l’essai II-4, le cône commence à se déplacer, ce qui implique la plastification de aciers.

De la comparaison des calculs et des essais, nous pouvons déduire que si on utilise la contrainte limite plastique σp comme contrainte limite des aciers, le critère peut décrire l’endommagement ou plutôt la rupture locale de la dalle qui se manifeste par la fissuration du béton et la plastification locale des aciers. C’est ainsi qu’il convient d’interpréter les points de Gauss atteints par le critère et relativement isolés les uns des autres (par exemple ceux observés au bord de la dalle dans les cas II-4, II-5 et II-9). Dans cet état, la structure reste intègre ou plutôt entière : il n’y a pas de détachement de blocs de béton. De plus lorsque les points de Gauss atteints par le critère sont regroupés, et forment une ligne ou une couronne ininterrompue, cela signifie qu’un mécanisme de ruine de la structure s’est mis en place, et qu’à partir de là, il y a plastification des aciers dans la zone concernée et déplacement d’une partie de la structure par rapport à l’autre ; des blocs de béton peuvent également se détacher de la plaque.

On peut donc considérer que l’usage d’une contrainte limite plastique σp comme contrainte limite des aciers permet d’obtenir un critère qui décrit la formation du cône, le développement de fissures et d’écailles. Ceci permet de déterminer la limite d’intégrité complète de la structure au-delà de laquelle des morceaux de la dalle commencent à se détacher. Le critère est donc capable ainsi de caractériser le début du processus de perforation.

Page 161: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

161

11.3.1.2 Série n°2 : critère de perforation Dans ce paragraphe, la contrainte limite des aciers dans le critère est choisie comme étant la contrainte de rupture. Comme pour la série de calculs précédente, on présente les résultats à 25 ms après le premier pic de déplacement (Figure 11.10).

Cette fois-ci, ce n’est que dans le cas II-5 que l’on observe une couronne fermée de points de Gauss ayant atteint l’état local de ruine. Quant aux autres calculs, ils présentent soit quelques points de Gauss isolés au-delà du seuil (essai II-4), soit même aucun point où le critère a été dépassé. Or l’essai II-5 est le seul des quatre essais présentés qui est perforant (voir Figure 11.1). Comme dans le cas précédent (§ 11.3.1.1), on constate donc que la ruine de la structure est déterminée par l’arrangement ordonné (couronne, alignement) d’une densité suffisante de point de Gauss où le critère est atteint. De plus, on peut déduire de la confrontation des essais avec les calculs que l’utilisation de la contrainte de rupture comme contrainte limite des aciers dans le critère permet de prédire la rupture des aciers et le détachement complet du cône, c’est-à-dire la perforation effective de la dalle.

Essai II-2 Essai II-9

Essai II-4 Essai II-5

Figure 11.10 : Points de Gauss atteints par le critère (série de calculs n°2)

x

y

Page 162: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

162

11.3.2 Vérification de la cohérence la modélisation Pour s’assurer de la pertinence des résultats obtenus précédemment, nous effectuons dans ce paragraphe quelques vérifications sur les déplacements (seules mesures pertinentes des essais Meppen dont nous disposons) en vue de tester la cohérence de la modélisation. En particulier, il s’agit de justifier l’emploi de la loi GLRC dans le cadre de l’analyse de la perforation.

11.3.2.1 Sans recalage On examine les déplacements sur l’essai le moins endommageant, c’est-à-dire le test II-2. En effet, c’est pour cet essai qu’on dispose du plus grand nombre d’informations, car le bureau d’étude allemand Hochtief l’a étudié de manière détaillée en vérifiant la validité des données fournies par l’expérience [Jonas et al. 1982-a]. Par ailleurs, étant donné que notre modélisation avec GLRC ne prend pas en compte les non-linéarités pour l’effort tranchant, cet essai sans perforation devrait être bien représenté. Les points où sont mesurés les déplacements sont indiqués sur la figure ci-dessous (Figure 11.11).

Figure 11.11 : Emplacement des points de mesure pour le déplacement pour l’essai II-2 (dimensions en cm)

Pour vérifier à la fois la pertinence des données fournies par les essais et la validité de notre modélisation avec GLRC, on présente d’abord les résultats d’un calcul effectué avec les données brutes décrites dans les paragraphes précédents et on les confronte :

aux mesures enregistrées pendant les essais ;

à un calcul 2D effectué par le bureau d’étude Hochtief, qui prend en compte un comportement de flexion et de cisaillement transverse (effort tranchant) tous deux non-linéaires [Jonas et al. 1982-a].

La comparaison des déplacements GLRC avec les mesures montre un écart assez conséquent aussi bien au niveau du pic de déplacement qu’en terme de déplacement résiduel. En revanche, il semble qu’après 50 ms les périodes d’oscillation sont proches dans les deux cas (Figure 11.12 et Figure 11.13).

120

150

W1

60

W2

W4 W5

Page 163: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

163

En revanche, on constate qu’il y a peu d’écart entre le calcul brut GLRC et le calcul brut Hochtief pour le point W4 qui est loin de la zone d’impact (Figure 11.12). A un déplacement résiduel près, qui diminue d’ailleurs si la surface d’impact augmente, c’est également le cas pour le point W5 qui est très proche de l’impact (Figure 11.13).

De ces observations, on tire les conclusions suivantes :

la modélisation GLRC est bien analogue à celle d’Hochtief, sauf en ce qui concerne l’effort tranchant ; l’influence de la non-linéarité de l’effort tranchant se voit surtout au droit de la zone d’impact ;

les données brutes (matériau, chargement) nécessiteraient un recalage pour que GLRC produise des résultats conformes aux mesures ; le même constat a été fait par le bureau d’étude Hochtief pour leurs calculs.

Figure 11.12 : Déplacement au point W4 (calcul brut)

Page 164: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

164

Figure 11.13 : Déplacement au point W5 (calcul brut)

11.3.2.2 Avec recalage

On effectue donc un calcul en utilisant un jeu de paramètres recalé par Hochtief. Le tableau suivant (Tableau 11.7) dresse la liste des paramètres qui diffèrent d’avec les données brutes.

Essai Contrainte limite en traction ft

Limite plastique σp

Coefficient élastique pour l’effort tranchant

Gx=Gy

MPa MPa MPa

II-2 brut 5,3 505 7480

II-2 recalé 1,07 464 292

Tableau 11.7 : Paramètres recalés

On notera que le module de cisaillement global (coefficient élastique pour l’effort tranchant) est fortement diminué ; il correspond grosso modo à un béton fissuré (ce qui revient à ne tenir compte que des armatures) [Jonas et al. 1982-a].

Page 165: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

165

Chargement

Le chargement est également modifié (Figure 11.14). La nouvelle fonction de chargement a été obtenue par Hochtief en se recalant sur les mesures des efforts sur les cylindres d’appui de la dalle.

0

1

2

3

4

5

6

7

8

0 10 20 30 40 50Temps (ms)

Forc

e (M

N)

II-2 brutII-2 recalé

Figure 11.14 : Evolution en temps du chargement recalé

Le diamètre de la surface de chargement sur le feuillet moyen est de 0,75 m pour les calculs GLRC (0,72 m pour les calculs Hochtief).

Résultats

Les quatre figures suivantes (Figure 11.15, Figure 11.16, Figure 11.17 et Figure 11.18) montrent que le modèle GLRC donne de très bons résultats. Le pic de déplacement est bien reproduit par les calculs. En revanche, les déformations résiduelles qui sont d’autant plus importantes que l’on est proche de la zone d’impact ne sont pas bien captées parce qu’elles viennent essentiellement de la non-linéarité en cisaillement. Or GLRC décrit le cisaillement de manière linéaire.

Page 166: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

166

Figure 11.15 : Déplacement au point W4 (calcul recalé)

Figure 11.16 : Déplacement au point W5 (calcul recalé)

Page 167: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

167

Figure 11.17 : Déplacement au point W1 (calcul recalé)

Figure 11.18 : Déplacement au point W2 (calcul recalé)

Page 168: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

168

La modélisation avec GLRC permet donc de bien représenter les déplacements, moyennant un recalage des paramètres d’entrée. Si ce recalage peut changer la valeur des déplacements, il affecte peu le niveau d’effort tranchant (Figure 11.19), car GLRC a un comportement d’effort tranchant linéaire. Or c’est essentiellement l’effort tranchant qui pilote le mécanisme de perforation (c’est d’autant plus vrai dans notre cas où il s’agit de plaques planes dans lesquels l’effort membranaire est négligeable en cas d’impact).

Ceci confirme donc la validité de l’utilisation du modèle GLRC (même sans recalage) associé au nouveau critère pour prédire la perforation.

Figure 11.19 : Effort tranchant à 75 cm du centre de la dalle – Comparaison avant et après

recalage

Page 169: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Chapitre 11 : Validation du critère en dynamique pour la perforation

169

11.4 Conclusion Une méthode d’analyse de la perforation de dalles en béton armé à l’aide d’un critère statique en variables globales (effort membranaire N, moment M, effort tranchant T) a été validée. Les calculs ont été confrontés à la campagne d’essais Meppen, tests de référence pour les chocs mous et les impacts de projectiles déformables pour des vitesses de déformation dans la cible inférieures à 10 s-1 (voir Partie I). Quatre essais caractéristiques des expérimentations Meppen ont été choisis. Ces quatre essais présentent différents stades d’endommagement, depuis l’intégrité complète jusqu’à la perforation, en passant par la formation d’un cône de cisaillement.

On a montré dans cette étude que ces divers niveaux de dommage de la structure peuvent être prédits grâce aux résultats d’un calcul non linéaire élasto-plastique endommageant avec la loi de comportement pour plaques en béton armé GLRC, associée au critère de perforation. Selon le paramétrage du critère, il est en effet possible d’avoir un critère de formation du cône et d’intégrité complète (avant tout détachement de matière) ou bien un critère de perforation (le projectile traverse la dalle).

Les principales améliorations à envisager concernent d’une part la prise en compte des non-linéarités pour l’effort tranchant et d’autre part le post-traitement : un critère sur la densité des points de Gauss ayant dépassé le critère statique et sur la connexité des lignes qu’ils forment serait certainement utile.

En validant l’ensemble de la démarche et en particulier le fait qu’un critère statique global est suffisant, ce chapitre a présenté une méthodologie performante d’analyse de la perforation sous impact de projectile déformable, associée aux outils de simulation GLRC et au critère mis en œuvre dans le code Europlexus.

Page 170: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Partie III : Critère de perforation pour plaques en béton armé

170

Résumé et bilan de la partie III

Deux critères de ruine pour structure élancées en béton armé ont été établis via la théorie du calcul à la rupture :

l’un destiné aux poutres d’expression totalement analytique ;

l’autre pour les plaques d’expression mi-analytique et mi-numérique.

Il s’agit de critères de rupture statiques obtenus par l’approche cinématique par l’extérieur. Ils ont cinq caractéristiques principales :

1. ce sont des critères globaux, qui s’expriment en fonction de grandeurs généralisées ; à savoir l’effort normal, l’effort tranchant et le moment fléchissant ;

2. ce sont des critères de résistance limite applicables avec toute loi de comportement. Si le critère plaque est destiné à être utilisé pour la détection d’une perforation éventuelle, il ne constitue par une loi de comportement permettant de déterminer l’évolution de la structure ; on peut donc utiliser ce critère dans un calcul linéaire élastique ou non-linéaire avec la loi de comportement GLRC ;

3. ce sont des critères statiques, qui ne comportent aucun ingrédient dynamique ;

4. ils permettent de distinguer les modes de ruine en flexion et en cisaillement ;

5. ils indiquent l’orientation du plan de glissement correspondant au mécanisme optimal de ruine, proche du mécanisme réel.

Conformément à l’analyse phénoménologique (Partie I) qui a montré que dans les cas de la chute d’avion la perforation est générée par les ondes de structure, le critère statique pour plaques en béton armé a été appliqué aux efforts généralisés des ondes de flexion et d’effort tranchant issus d’un calcul dynamique avec le modèle GLRC (Partie II). Cette méthode a permis d’obtenir des résultats qui reproduisent correctement les expériences Meppen de chocs mous sur dalles en béton armé. Le critère est donc un critère de perforation. Selon le choix des paramètres du critère, il est possible de caractériser :

soit l’intégrité de la dalle et le début du processus de perforation ; soit le détachement du cône de perforation, c’est-à-dire la perforation effective.

Cette troisième partie a donc permis de mettre en œuvre une méthodologie d’analyse de la perforation des plaques sous impacts mous, en développant les outils de calcul nécessaires à cette analyse.

Page 171: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

171

Conclusions et perspectives

La sûreté est une préoccupation essentielle de l’industrie nucléaire. Dans ce domaine, pour prendre en compte les divers risques liés aux installations industrielles, qu’il s’agisse d’incidents ou d’accidents, la simulation numérique est une aide précieuse. Des méthodes de prédiction toujours plus fiables et plus robustes doivent donc être constamment développées afin de s’adapter à l’évolution des risques.

Tel était l’enjeu de notre travail de thèse résumé dans le présent document et dont l’objectif consistait à fournir des outils de calcul capables de simuler avec des coûts de calcul réduits les conséquences mécaniques d’un impact d’avion sur une structure surfacique élancée de protection en béton armé. Ces outils de simulation, alternatifs aux modèles existants souvent gourmands en temps CPU, doivent être immédiatement utilisables par l’ingénierie dans un cadre industriel, ce qui représente une forte contrainte pour un travail de recherche.

Le travail de thèse a donc consisté dans un premier temps à caractériser, comprendre et analyser les phénomènes se produisant au cours de l’impact, étape indispensable avant toute tentative de modélisation (Partie I). Dans un deuxième temps, des formulations mathématiques et des algorithmes numériques ont été proposés et des outils adéquats de simulation ont été mis en œuvre dans le code d’expertise industrielle en dynamique rapide Europlexus (Parties II et III). Si on s’est attaché à ce que les exigences de simplicité et de représentativité soient respectées dans la modélisation, notre travail a aussi permis d’obtenir un certain nombre de résultats théoriques et méthodologiques nouveaux.

Bilan scientifique

Le premier élément nouveau apporté par notre travail est une classification simple mais générale des chocs durs et des chocs mous (Chapitre 1). Jusqu’ici, dans la littérature, les qualificatifs de ‘mou’ et ‘dur’ donnés aux chocs étaient très relatifs, faisant tantôt référence à la déformabilité ou à la résistance du projectile, tantôt au déplacement ou à l’endommagement de la cible. Nous avons proposé une caractérisation qui se base sur le type de réponse mécanique de la structure (ruine locale ou ruine globale) en fonction des caractéristiques du projectile, de sa résistance à l’écrasement et de sa vitesse. Le fait d’intégrer tous ces paramètres dans la classification a permis de comparer des chocs très divers soit par la taille des corps qui entrent en contact, soit par leur vitesse, soit par leur caractéristique structurelle.

Le second résultat important a été d’expliquer le processus de perforation des plaques en béton armé dans le cas des chocs mous (Chapitre 2). Si le scénario (formation et détachement d’un cône de rupture) était connu depuis longtemps, on a mis en évidence la cause à l’origine de la formation d’un tel cône, à savoir les ondes de structure (ondes de flexion et d’effort tranchant) qui génèrent une fissuration oblique.

Le troisième résultat notable est la généralisation du critère de flexion de Johansen destiné aux plaques en béton armé, pour prendre en compte les effets de membrane (Chapitre 5). Le nouveau critère, d’expression à peine plus compliquée que le critère originel, permet de retrouver les résultats expérimentaux de ruine sous chargement combiné de membrane et de flexion, lorsqu’il n’y a pas de cisaillement dans le plan, et ceci quel que soit le nombre de lits d’acier dans la dalle de béton.

Page 172: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Conclusions et perspectives

172

Le quatrième apport scientifique de la thèse porte sur un autre critère de ruine pour plaques en béton armé qui a permis d’étendre les cas de chargement du critère de Johansen généralisé aux chargements avec effort tranchant. Ce critère de ruine qui porte donc à la fois sur le moment, l’effort tranchant et l’effort membranaire a une forme entièrement analytique dans le cas des poutres en béton armé (Chapitre 9), et une forme semi-analytique et semi-numérique pour les plaques (Chapitre 10). Jusqu’ici des résultats d’analyse limite disponibles dans la littérature donnaient des bornes sur les efforts dans des combinaisons restreintes (par exemple pour un effort tranchant pur dans le cas d’une poutre), ou pour des cas particuliers de dalles avec un chargement et des conditions aux limites données. Notre critère a l’avantage d’être bien plus général.

Enfin le dernier grand résultat de notre travail consiste à avoir montré qu’il est possible de prédire la perforation des plaques en béton armé dans le cas des chocs mous à l’aide d’un critère statique. La formation du cône et la perforation ont lieu lorsque l’onde d’effort tranchant atteint un seuil qui est le seuil de rupture statique.

Applications et apports méthodologiques

Le bilan de notre travail de thèse ne se limite pas à ces éléments théoriques. En effet, deux outils sont maintenant disponibles pour l’ingénierie dans le code d’expertise industrielle Europlexus.

Le premier de ces outils, décrit dans la Partie II de ce mémoire, est une loi de comportement appelée GLRC pour plaques en béton armé soumises à de fortes sollicitations (ondes de flexion) utilisable pour des structures courbes avec prise en compte des effets de membrane [Kœchlin et Potapov 2007]. Ce modèle permet de représenter la fissuration en face supérieure ou inférieure de la plaque ainsi que les déformations résiduelles liées à la plastification du ferraillage. Il est simple d’utilisation parce que ses paramètres sont basés sur le comportement, analogue à celui d’une poutre, dans chacune des directions de ferraillage. Sa robustesse et la qualité de ses résultats ont été éprouvées, au point qu’il a été exporté dans le Code_Aster® (logiciel libre d’EDF pour le calcul de structure) .

Le deuxième outil de simulation mis à disposition dans Europlexus est un critère de perforation pour les chocs mous. Il s’agit en fait d’un critère statique mais avec lequel on teste les efforts généralisés calculés à chaque pas de temps d’un calcul dynamique. La méthodologie d’utilisation, applicable au cas de chute d’avion, permet de prédire soit la formation du cône de rupture soit son détachement qui correspond à la perforation effective. Le programme permet également de visualiser l’angle du mécanisme local de ruine.

Les avantages de ces deux outils viennent du fait qu’ils sont basés sur des modélisations plaques. Cela permet un gain considérable en temps de calcul (GLRC avec des plaques est environ cent fois plus rapide qu’une modélisation 3D), ainsi qu’une régularisation, par le changement d’échelle, des problèmes de localisation liés aux modèles 3D, et également la possibilité de simuler le processus de perforation jusqu’au détachement du cône sans qu’une méthode spécifique de traitement des discontinuités ne soit nécessaire.

Perspectives

Les résultats obtenus poussent à s’engager dans d’autres travaux, et le caractère volontairement simplifié de notre approche ouvre la voie à plusieurs améliorations.

Le résultat théorique peut-être le plus marquant de notre travail, à savoir la classification unifiée des chocs, devrait naturellement conduire à une réflexion sur la représentativité des essais destinés à reproduire l’impact d’avion : notre classification devrait par exemple permettre une meilleure détermination des caractéristiques d’essais futurs. De plus, l’étude des chocs avec rebond et de leur frontière avec les chocs mous et durs mériterait d’être approfondie.

http://www.code-aster.org : documentation de référence R7.01.31 à paraître.

Page 173: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Conclusions et perspectives

173

Concernant la loi de comportement GLRC, si elle est adaptée à la chute d’avion, son utilisation dans le cadre d’un calcul sismique nécessiterait de mieux prendre en compte des phénomènes actuellement négligés. Ceci revient à :

introduire un terme de cisaillement transverse (cisaillement dans le plan) dans le critère généralisé de Johansen ; théoriquement, une telle expression semble difficile à obtenir, mais on peut en supposer la forme, et vérifier le critère obtenu sur des essais ;

tenir compte de l’influence de l’effort membranaire sur les seuils de fissuration en flexion, ou mieux que cela, faire dépendre l’évolution des deux variables d’endommagement du comportement membranaire de la plaque ; cette évolution est prévue dans la prochaine version du modèle GLRC de Code_Aster®.

Pour le critère de perforation, comme il s’agit d’une borne supérieure, il est toujours possible d’affiner le critère. La difficulté est liée à l’obtention analytique du critère, car une borne numérique peut toujours être obtenue. Deux solutions sont théoriquement envisageables :

utiliser un critère local plus adapté au béton que Drucker-Prager ; on peut imaginer un critère tronqué en traction et borné en compression ;

prendre en compte un mécanisme plus complexe, ce qui revient à multiplier le nombre de champs de déformation virtuelle testés dans l’optimisation ; un mécanisme continu peut être envisagé ; ceci devrait contribuer à améliorer notamment la borne en flexion, dont on a vu qu’elle était éloignée de celle de Johansen.

L’analyse de la perforation est également perfectible en améliorant le post-traitement. Il ne s’agit pas seulement de mieux visualiser les plans du mécanisme de ruine, mais de définir un critère global de perforation sur la densité des points de Gauss atteints par la ruine locale et sur la connexité des lignes qu’ils forment. Ceci permettrait de systématiser l’analyse en fournissant un instant précis où le cône se forme ou bien se détache, sans que cela ne soit laissé à l’appréciation de l’ingénieur.

Une amélioration ayant trait à la fois au modèle et à la perforation consisterait à avoir un modèle qui représente de manière plus fine le comportement au droit de la zone d’impact. Une première piste serait de s’intéresser au phénomène d’écrasement de la plaque sous l’effet de la force d’impact. Une autre problématique, qui mériterait peut-être davantage d’être traitée, est la prise en compte de la dissipation d’énergie liée aux non-linéarités du comportement en cisaillement hors-plan. En effet, actuellement l’effort tranchant est calculé avec une loi élastique à partir de la déformation en cisaillement hors-plan. Or on a pu voir les limites d’une telle modélisation à proximité de la zone de perforation, car si le critère suppose la ruine et donc des non-linéarités, il ne fait pas d’hypothèses sur le comportement. Il faudrait donc utiliser le critère de formation du cône comme seuil à partir duquel la loi GLRC prendrait en compte une dissipation d’énergie et prendre ainsi en compte un comportement d’effort tranchant élastoplastique. La difficulté réside dans la compatibilité avec la théorie de plaque de l’élément utilisé pour laquelle le calcul des déformations de cisaillement hors-plan suppose un comportement élastique. On atteint ici les limites d’une modélisation globale.

Ceci nous montre que même si des améliorations sont envisageables à la fois pour le modèle GLRC et pour le critère de perforation, une modélisation globale basée sur des éléments de structure (plaques, poutres) et exprimée en efforts généralisés ne peut remplacer totalement une approche 3D, ni une méthode spécifique comme les éléments discrets pour le traitement avancé de la perforation (modélisation des impacts secondaires dus aux détachements de blocs…). Une approche globale est en revanche une alternative efficace à une modélisation 3D dans le cadre industriel, et l’une ne saurait exclure l’autre face au défi de la simulation mécanique des structures.

Page 174: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

174

Page 175: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

175

Annexes

Ce mémoire comporte cinq annexes :

Annexe A : Essais d’impact ;

Annexe B : Fonction d’endommagement ;

Annexe C : Convexité du critère de Johansen généralisé ;

Annexe D : Un cas particulier d’optimisation sous condition ;

Annexe E : Un second cas d’optimisation.

Page 176: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexes

176

Annexe A

Essais d’impact

Cette annexe détaille les caractéristiques principales des essais d’impact destinés à la chute d’avion que l’on peut trouver dans la littérature.

Essais CEA-EDF

[Gueraud et al. 1977, Fiquet et Dacquet 1977, Goldstein et al. 1977, Berriaud et al. 1978]

Essai EDF CEBTP

EDF Direction Centrale du

Génie

CEA CESTA

Projectile

Type Dur Nez plat ou sphérique

Dur Nez plat ou conique

Dur Nez plat

Masse kg 334 – 343 160 – 300 30 – 300

Diamètre m 0,11 – 0,155 0,20 – 0,305 0,1 – 0,3

Vitesse m/s 27,2 – 30,1 65 – 173 21,9 – 445

Cible

Type Dalle en béton armé Dalle en béton armé Dalle en béton armé

Dimensions m2 1,50 × 1,50 5,0 × 5,0 1,46 × 1,46

Epaisseur m 0,175 – 0,4 0,4 – 0,6 0,104 – 0,416

Contrainte max. en compression du béton MPa 34,5 – 42,7 33,5 – 40 34 – 50,5

Ferraillage longitudinalµx sup+ µx inf * % 0,0 – 1,96 1,07 – 1,61 0,0 – 3,71

Ferraillage transversal ** % 0,0 – 0,79 inconnu inconnu

* : On note µx sup, µx inf, µy sup, µy inf le taux d’acier longitudinal (aire d’acier / aire de béton) des lits supérieurs et inférieurs, selon x et selon y. Dans ces essais, le ferraillage longitudinal est identique dans les deux directions x et y. D’où : µx sup+ µx inf = µy sup+ µy inf.

** : Le ferraillage transversal est exprimé en terme de taux d’acier transverse (aire d’acier / aire de béton).

Tableau A.1 : Caractéristiques des essais CEA-EDF

Page 177: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexe A : Essais d’impact

177

Essais EDF-CEMETE

[Dulac et Giraud 1981, Dulac 1982]

Essai EDF-CEMETE

Projectile

Type Tube déformable écrasé par un mouton

Diamètre m 0,3

Ordre de grandeur de la force d’impact kN 100 – 230

Ordre de grandeur de la durée du chargement ms 10 – 47

Cible

Type Dalle en béton armé sur

appuis simples ou encastrée

Dimensions m2 1,80 × 1,80 entre appuis 1,90 × 1,90 hors tout

Epaisseur m 0,12

Contrainte max. en compression du béton MPa 45 – 57

Ferraillage longitudinalFace avant : µx sup * % 0,20 – 0,65

Ferraillage longitudinalFace arrière : µx inf *

% Identique à la face avant

Ferraillage transversal ** % 0,0 – 0,88

(en zone d’impact) * : On note µx sup, µx inf, µy sup, µy inf le pourcentage d’acier longitudinal (aire d’acier / aire de béton) des lits supérieurs (face avant) et inférieurs (face arrière), selon x et selon y. Dans ces essais, le ferraillage longitudinal est identique dans les deux directions x et y. D’où : µx sup = µy sup et µx inf = µy inf.

** : Le ferraillage transversal est exprimé en terme de taux d’acier transverse (aire d’acier / aire de béton).

Tableau A.2 : Caractéristiques des essais EDF-CEMETE

Page 178: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexes

178

Essais Meppen :

[Jonas et al. 1979, Nachtsheim et Stangenberg 1981, Jonas et al. 1982-a, Jonas et al. 1982-b, Nachtsheim et Stangenberg 1982, Rüdiger et Riech 1983, Nachtsheim et al. 1984]

Essai Meppen

Projectile

Type Déformable Tube

Masse kg 940 – 1060

Diamètre m 0,6

Longueur m 6,0

Vitesse m/s 172 – 258

Ordre de grandeur de la force d’impact MN 10

Ordre de grandeur de la durée du chargement ms 30

Cible

Type Dalle en béton armé sur appuis simples

Dimensions m2 5,40 × 5,40 entre appuis 6,50 × 6,00 hors tout

Epaisseur m 0,5 – 0,9

Contrainte max. en compression du béton MPa 21,1 – 43,1

Ferraillage longitudinalFace avant : µx sup * % 0,11 – 0,72

Ferraillage longitudinalFace arrière : µx inf *

% 0,22 – 1,27

Ferraillage transversal ** % 0,13 – 0,87

* : On note µx sup, µx inf, µy sup, µy inf le pourcentage d’acier longitudinal (aire d’acier / aire de béton) des lits supérieurs (face avant) et inférieurs (face arrière), selon x et selon y. Dans ces essais, le ferraillage longitudinal est identique dans les deux directions x et y. D’où : µx sup = µy sup et µx inf = µy inf.

** : Le ferraillage transversal est exprimé en terme de taux d’acier transverse (aire d’acier / aire de béton).

Tableau A.3 : Caractéristiques des essais Meppen

Page 179: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexe A : Essais d’impact

179

Essais Kojima :

[Kojima 1991]

Essai Kojima : projectiles durs

Kojima : projectiles déformables

Projectile

Type Dur Nez hémisphérique

Déformable Nez hémisphérique

Masse kg 2 2

Diamètre m 0,06 0,06

Vitesse m/s 95 – 215 199 – 214

Cible

Type Dalle en béton armé sur 4 appuis dans les

coins

Dalle en béton armé sur 4 appuis dans les

coins

Dimensions m2 1,20 × 1,20 1,20 × 1,20

Epaisseur m 0,06 – 0,24 0,06 – 0,18

Contrainte max. en compression du béton MPa 27 27

Ferraillage longitudinal µx sup+ µx inf * % 0,6 0,6

Ferraillage transversal ** % 0,6 0,6

* : On note µx sup, µx inf, µy sup, µy inf le pourcentage d’acier longitudinal (aire d’acier / aire de béton) des lits supérieurs et inférieurs, selon x et selon y. Dans ces essais, le ferraillage longitudinal est identique dans les deux directions x et y. D’où : µx sup+ µx inf = µy sup+ µy inf.

** : Le ferraillage transversal est exprimé en terme de taux d’acier transverse (aire d’acier / aire de béton).

Tableau A.4 : Caractéristiques des essais Kojima

Page 180: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexes

180

Essais Ohno :

[Ohno et al. 1992]

Essai Ohno

Projectile

Type Tube plus ou moins

déformable Nez plat

Masse kg 0,43

Diamètre m 0,0341 – 0,0383

Longueur m 0,225

Vitesse m/s 200

Force axiale de flambage kN 18,6 – 186,4

Cible

Type Dalle verticale en béton armé suspendue par un

côté

Dimensions m2 0,60 × 0,60

Epaisseur m 0,07 – 0,15

Contrainte max en compression du béton MPa 30,6

Ferraillage longitudinalFace avant : µx sup * % 0,0

Ferraillage longitudinalFace arrière : µx inf *

% 0,1 – 0,3

Ferraillage transversal ** % inconnu

* : On note µx sup, µx inf, µy sup, µy inf le pourcentage d’acier longitudinal (aire d’acier / aire de béton) des lits supérieurs (face avant) et inférieurs (face arrière), selon x et selon y. Dans ces essais, le ferraillage longitudinal est identique dans les deux directions x et y. D’où : µx sup = µy sup et µx inf = µy inf.

** : Le ferraillage transversal est exprimé en terme de taux d’acier transverse (aire d’acier / aire de béton).

Tableau A.5 : Caractéristiques des essais Ohno

Page 181: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexe A : Essais d’impact

181

Essais Sugano :

[Sugano et al. 1993-a, Sugano et al. 1993-b, Sugano et al. 1993-c]

Essai Sugano

Petite échelle 1/7,5

Sugano Moyenne échelle

1/2,5

Sugano Grande échelle

1/1

Sugano Avion réel

1/1

Projectile

Type Déformable Rigide Déformable Rigide Déformable Moteur GE-J79 Phantom F-4D

Masse kg 3,6 100 ~1500 19000

Diamètre m 0,0101 0,30 ~0,76 Envergure : 11,77

Vitesse m/s 100 – 215 100 – 250 215 215

Force axiale de flambage MN ~ 3,9 ~ 3,9 ~ 4,2 ~ 3,2

Cible

Type Dalle en béton armé

Dalle en béton armé

Dalle en béton armé

Bloc en béton armé

Dimensions m2 1,50 × 1,50 2,5 × 2,5 7,0 × 7,0 7,0 × 7,0

Epaisseur m 0,06 – 0,35 0,3 – 0,6 0,9 – 1,6 3,66

Contrainte max en compression

du béton MPa 23,5 23,5 – 35,3 23,5

Ferraillage longitudinal

µx sup+ µx inf * % 0,2 – 0,6 0,2 – 0,6 0,4

Ferraillage transversal ** % 0,0 – 0,4 0,0 – 0,4 0,0

* : On note µx sup, µx inf, µy sup, µy inf le pourcentage d’acier longitudinal (aire d’acier / aire de béton) des lits supérieurs et inférieurs, selon x et selon y. Dans ces essais, le ferraillage longitudinal est identique dans les deux directions x et y. D’où : µx sup+ µx inf = µy sup+ µy inf.

** : Le ferraillage transversal est exprimé en terme de taux d’acier transverse (aire d’acier / aire de béton).

Tableau A.6 : Caractéristiques des essais Sugano

Page 182: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexes

182

Annexe B

Fonction d’endommagement

Dans cette annexe, nous donnons une explication du choix de la fonction d’endommagement sous la forme :

( ) ( ) ( )1 1x, , x x1 1

I III II

I II

D DD D H HD D

γ γξ + += + −

+ + (B.1)

Le facteur (1+γDI)/(1+DI) dans la fonction ξ est choisi en rapport avec le critère d’endommagement de telle sorte qu’en flexion simple le moment soit une fonction affine de la courbure. En effet, si le critère d’endommagement est atteint, on a :

( ), 0I I IY D k− − =κ (B.2)

d’où en flexion simple :

( )

[ ]( )2e2 2 0

2 1b b x I

I

kD

λ µ κγ −1− + − =

+ (B.3)

On en déduit l’expression de la variable d’endommagement en fonction de la courbure :

[ ]e 2 12I x b b

ID

kκ λ µ1− γ

= + − (B.4)

Or l’expression du moment en flexion simple est la suivante :

( ) e1 2 1

Ix b b x

I

DMD

γ λ µ κ+= +

+ (B.5)

Donc, en utilisant (B.4) dans (B.5), le moment s’écrit :

( )( ) ( ) e2 2 2 x I b b b b xM k λ µ γ λ µ κ= 1− γ + + + (B.6)

On constate que le moment est une fonction affine de la courbure, de pente ( )2b bγ λ µ+ .

Page 183: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexe C : Convexité du critère de Johansen généralisé

183

Annexe C

Convexité du critère de Johansen généralisé

Dans cette annexe, nous démontrons la convexité du critère généralisé de Johansen. Soit le domaine D défini par :

2

3 ( ) 0( , , ) 0 0 F M XY ZM X Y Z

X Y

= − + ≤ = ∈ ≤ ≤

D (C.1)

La fonction F peut aussi s’écrire :

( ) ( )2 2

2( )4 4

X Y X YF M Z

− += + − (C.2)

Cette formulation permet de voir que la fonction F caractérise un double cône, de section ellipsoïdale, d’axe X Ye e+ , avec pour sommet l’origine O.

Par conséquent le domaine D est un cône simple, manifestement convexe, et correspond au critère de Johansen classique (critère en trois dimensions pour la flexion).

Définissons maintenant le domaine H, correspondant au critère de Johansen généralisé (critère en six dimensions pour la membrane et la flexion) :

( )( ) ( )26 4 1 1 5 2 2 6 3 3

1 2 3 4 5 64 1 1 5 2 2

( ) ( ) ( ) ( ) 0( , , , , , ) ( ) 0 ( ) 0 f M x g x x g x x g xM x x x x x x

x g x x g x

= − − − + − ≤ = ∈ − ≤ − ≤

H (C.3)

avec g1 et g2 des fonctions concaves et g3 une fonction affine.

Soient deux points M et M ' appartenant à H et un troisième point M '' défini par :

( )'' 1 'OM OM OMλ λ→ → →

= + − (C.4)

avec λ entre 0 et 1. Pour montrer la convexité du domaine H, nous allons montrer que M '' est un point qui appartient également à H.

Comme g1 est une fonction concave, nous avons :

( ) ( )( )1 1 1 1 1 1 1( ) 1 ( ' ) 1 'g x g x g x xλ λ λ λ+ − ≤ + − (C.5)

ce qui est équivalant à :

( ) ( )( ) ( ) ( )4 4 1 1 1 4 4 1 1 1 11 ' 1 ' 1 ' ( ) 1 ( ' )x x g x x x x g x g xλ λ λ λ λ λ λ λ+ − − + − ≤ + − − − − (C.6)

L’inégalité (C.6) peut être réécrite comme :

( ) ( )( ) [ ] ( )[ ]4 4 1 1 1 4 1 1 4 1 11 ' 1 ' ( ) 1 ' ( ' )x x g x x x g x x g xλ λ λ λ λ λ+ − − + − ≤ − + − − (C.7)

Or, puisque M et M ' appartiennent à H, on a :

4 1 1

4 1 1

( ) 0' ( ' ) 0

x g xx g x

− ≤ − ≤

(C.8)

Page 184: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexes

184

Les inégalités (C.7) et (C.8) nous donnent alors :

( ) ( )( ) [ ] ( )[ ]4 4 1 1 1 4 1 1 4 1 11 ' 1 ' ( ) 1 ' ( ' ) 0x x g x x x g x x g xλ λ λ λ λ λ+ − − + − ≤ − + − − ≤ (C.9)

De la même manière, en partant de la concavité de la fonction g2, on peut montrer que :

( ) ( )( ) [ ] ( )[ ]5 5 2 2 2 5 2 2 5 2 21 ' 1 ' ( ) 1 ' ( ' ) 0x x g x x x g x x g xλ λ λ λ λ λ+ − − + − ≤ − + − − ≤ (C.10)

Du fait que g3 est affine, on déduit un troisième résultat :

( ) ( )( ) [ ] ( )[ ]6 6 3 3 3 6 3 3 6 3 31 ' 1 ' ( ) 1 ' ( ' )x x g x x x g x x g xλ λ λ λ λ λ+ − − + − = − + − − (C.11)

Définissons maintenant deux points A(X,Y,Z) et A'(X',Y',Z') de l’espace 3, de coordonnées :

4 1 1

5 2 2

6 3 3

( )( )( )

X x g xY x g xZ x g x

= − = − = −

et 4 1 1

5 2 2

6 3 3

' ' ( ' )' ' ( ' )' ' ( ' )

X x g xY x g xZ x g x

= − = − = −

(C.12)

On remarque que le fait que M et M ' appartiennent à H est équivalent au fait que A et A ' appartiennent à D. Par conséquent, puisque D est convexe, le point A'', défini par :

( )'' 1 'OA OA OAλ λ→ → →

= + − (C.13)

appartient également à D. En utilisant la définition du domaine D, on en déduit alors que :

( ) ( ) ( ) 21 ' 1 ' 1 ' 0X X Y Y Z Zλ λ λ λ λ λ − + − + − + + − ≤ (C.14)

ce qui peut également être écrit de la manière suivante :

( ) ( )( ) ( ) ( )( )

( ) ( )( )4 1 1 4 1 1 5 2 2 5 2 2

26 3 3 6 3 3

( ) 1 ' ( ' ) ( ) 1 ' ( ' )

( ) 1 ' ( ' ) 0

x g x x g x x g x x g x

x g x x g x

λ λ λ λ

λ λ

− − + − − − + − −

+ − + − − ≤ (C.15)

Si on exploite les équations (C.9), (C.10) et (C.11) dans l’inégalité précédente (C.15), on obtient d’un côté :

( ) ( )( ) ( ) ( )( )

( ) ( )( )4 4 1 1 1 5 5 2 2 2

26 6 3 3 3

1 ' 1 ' 1 ' 1 '

1 ' 1 ' 0

x x g x x x x g x x

x x g x x

λ λ λ λ λ λ λ λ

λ λ λ λ

− + − − + − + − − + −

+ + − − + − ≤

(C.16)

Mais d’un autre côté, les équations (C.9) et (C.10) expriment :

( ) ( )( )( ) ( )( )

4 4 1 1 1

5 5 2 2 2

1 ' 1 ' 0

1 ' 1 ' 0

x x g x x

x x g x x

λ λ λ λ

λ λ λ λ

+ − − + − ≤

+ − − + − ≤ (C.17)

Ces deux résultats signifient en réalité que M'' appartient au domaine H. C’était ce qu’il fallait démontrer.

Le domaine H, qui correspond au domaine défini par le critère de Johansen généralisé membrane-flexion est donc bien un domaine convexe.

Page 185: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexe E : Un second cas d’optimisation

185

Annexe D

Un cas particulier d’optimisation

sous condition

Soit la fonction F définie ainsi :

( )

( ) ( )

1 1 1 2 2 2 3 3 3

4 4 4 4 4 4 5 5 5 5 5 5

, ,F x y z a x b y c z a x b y c z a x b y c zk ka x b y c z a x b y c z a x b y c z a x b y c zz z

= + + − + + − + +

− + + + + − + + + + (D.1)

Nous voulons déterminer les conditions sur les paramètres ai , bi , ci (i =1 à 5), k, d, e, f, g, h de telle sorte que :

( ), , ; , , , 0i i iF x y z a b c k ≤ 0

, , tq 00

dx ey fzx y z dx ey fz

gx hy

+ + ≥∀ + − ≥ + ≥

(D.2)

La résolution s’effectue de la manière suivante. Si x,y,z satisfait les trois conditions :

00

0

dx ey fzdx ey fzgx hy

+ + ≥ + − ≥ + ≥

(D.3)

Alors cela signifie :

, , 0 t u v∃ ≥ tels que dx ey fz tdx ey fz ugx hy v

+ + = + − = + =

(D.4)

Par conséquent, il est possible d’exprimer x,y,z en fonction de t,u,v, à condition que le système soit inversible, c’est à dire si : ( ) 0f dh eg− ≠ . On obtient ainsi :

( )

( )

22

2 2

2

ht hu evxdh eg

gt gu dvydh eg

t uzf

+ −= −

− − + =−

− =

(D.5)

Définissons la fonction F comme :

Page 186: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexes

186

( ) ( ) ( ) ( ), , , , , , , , , ,F t u v F x t u v y t u v z t u v = (D.6)

En utilisant les expressions de (D.5) dans la définition (D.6), la fonction F s’écrit :

( )

( ) ( )

1 1 1 2 2 2 3 3 3

4 4 4 4 4 4 5 5 5 5 5 5

, ,F t u v A t B u C v A t B u C v A t B u C vK KA t B u C v A t B u C v A t B u C v A t B u C v

t u t u

= + + − + + − + +

− + + + + − + + + +− −

(D.7)

où Ai , Bi , Ci , K (pour i =1 à 5) sont des paramètres qui dépendent de ai , bi , ci, k, d, e, f, g, h :

( )

( )

( )

2 2

2 2

2

i i ii

i i ii

i ii

a h b g cAdh eg f

a h b g cBdh eg f

a e b dCdh eg

K fk

− = + − −

= −−

− + =−

=

(D.8)

Notre problème décrit en (D.2) revient à trouver les conditions sur Ai , Bi , Ci , K de telle sorte que :

( ), , ; , , , 0i i iF t u v A B C K ≤ , , 0t u v∀ ≥ (D.9)

Si K=0, alors ces conditions viennent simplement :

1 2 3

1 2 3

1 2 3

0

0

0

A A A

B B B

C C C

− − ≤ − − ≤ − − ≤

(D.10)

Mais si K≠0 (ce qui signifie fk≠0), alors le problème est un peu plus complexe car il est difficile, voire impossible de trouver des conditions nécessaires et suffisantes. Néanmoins, on peut s’en sortir en cherchant des conditions nécessaires qui soient les plus restrictives et les plus pertinentes possibles. C’est le comportement asymptotique de F qui va nous les donner. Si K≠0, la condition (D.9) doit être satisfaite dans les cas particuliers suivants :

0 and 00 and 00 and v

0 and v

0 and 0

0 and 0

u v tt v ut ut u

v t u

v t u

+

= = > = = > − > → +∞ − < → +∞ = − →

= − →

(D.11)

Ces différents cas donnent respectivement les conditions :

Page 187: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexe E : Un second cas d’optimisation

187

( )( )

( ) ( )( ) ( )

1 2 3 4 4 5 5

1 2 3 4 4 5 5

4 4 5 5

4 4 5 5

4 4 4 4 5 5 5 5

4 4 4 4 5 5 5 5

0

0

0

0

0

0

A A A K A A A A

B B B K B B B B

C C K C C K

C C K C C K

A B A B K A B A B K

A B A B K A B A B K

− − − + ≤ − − + + ≤

− − ≤

+ ≤

− + + − + + ≤ + + + + + ≤

(D.12)

Comme K≠0, c’est équivalent à :

( )( )

( ) ( )

1 2 3 4 4 5 5

1 2 3 4 4 5 5

4 4 5 5

4 4 4 4 5 5 5 5

0

0

0

0

A A A K A A A A

B B B K B B B B

C C C C

A B A B A B A B

− − − + ≤ − − + + ≤

+ =

+ + + + + =

(D.13)

ou encore, comme 4 4 5 5 0C C C C+ = implique 4 5 0C C+ = :

( )( )

1 2 3 4 4 5 5

1 2 3 4 4 5 5

4 5

4 4 5 5

0

0

00

A A A K A A A A

B B B K B B B B

C CA B A B

− − − + ≤ − − + + ≤

+ = + + + =

(D.14)

Compte tenu de ces résultats, si on regarde de nouveau les cas :

0 v

0 v

t ut u

− > → +∞ − < → +∞

(D.15)

nous obtenons deux autres conditions :

1 2 3 4 4 5 5 4 4 5 5

1 2 3 4 4 5 5 4 4 5 5

0

0

C C C K C A C A C A C A

C C C K C B C B C B C B

− − − + + + ≤

− − + + + + ≤ (D.16)

En résumé, si K≠0, voici six conditions nécessaires données par le comportement asymptotique :

( )( )

1 2 3 4 4 5 5

1 2 3 4 4 5 5

4 5

4 4 5 5

1 2 3 4 4 5 5 4 4 5 5

1 2 3 4 4 5 5 4 4 5 5

0

0

00

0

0

A A A K A A A A

B B B K B B B B

C CA B A B

C C C K C A C A C A C A

C C C K C B C B C B C B

− − − + ≤ − − + + ≤

+ = + + + = − − − + + + ≤ − − + + + + ≤

(D.17)

Ces six conditions peuvent être réécrites en fonction des paramètres ai , bi , ci , k, d, e, f, g, h. Ainsi, pour fk≠0, nous devons vérifier :

Page 188: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexes

188

3 3 31 1 1 2 2 2

5 5 5 5 5 54 4 4 4 4 4 0

a h b g ca h b g c a h b g cdh eg f dh eg f dh eg f

a h b g c a h b g ca h b g c a h b g cfkdh eg f dh eg f dh eg f dh eg f

−− −+ − + − +

− − −

− −− −− + + + + + ≤ − − − −

(D.18)

3 3 31 1 1 2 2 2

5 5 5 5 5 54 4 4 4 4 4 0

a h b g ca h b g c a h b g cdh eg f dh eg f dh eg f

a h b g c a h b g ca h b g c a h b g cfkdh eg f dh eg f dh eg f dh eg f

−− −− − − − −

− − −

− −− −+ − − + − − ≤ − − − −

(D.19)

4 4 5 5 0a e b d a e b d− + − + = (D.20)

4 4 5 5 0a h b g a h b g− + − = (D.21)

3 31 1 2 2

5 5 5 5 54 4 4 4 4

5 54 4 4 4 4

a e b da e b d a e b ddh eg dh eg dh eg

a e b d a h b g ca e b d a h b g cfkdh eg dh eg f dh eg dh eg f

a e b da e b d a h b g cdh eg dh eg f dh eg

− +− + − +− −

− − −

− + −− + −− + + + − − − −

− +− + −+ + + − − −

5 5 5 0a h b g cdh eg f

−+ ≤ −

(D.22)

3 31 1 2 2

5 5 5 5 54 4 4 4 4

5 54 4 4 4 4

a e b da e b d a e b ddh eg dh eg dh eg

a e b d a h b g ca e b d a h b g cfkdh eg dh eg f dh eg dh eg f

a e b da e b d a h b g cdh eg dh eg f dh eg

− +− + − +− −

− − −

− + −− + −+ − + − − − − −

− +− + −+ − + − − −

5 5 5 0a h b g cdh eg f

−− ≤ −

(D.23)

Page 189: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexe E : Un second cas d’optimisation

189

Annexe E

Un second cas d’optimisation

Soit une fonction F de trois variables définie de la manière suivante :

( ) ( ) ( ) ( ) ( ), , cos sin sin sin cos cosF x y x y y fθ θ φ θ θ φ θ θ φ θ θ= − − − + − − (E.1)

On fait les hypothèses suivantes :

f une fonction continue définie sur [0,π], de dérivée également continue sur l’intervalle excepté en un nombre fini n de points iθ ( ni ,...,1= ).

( ) 0f θ > pour [ ]0,θ π∈

2

0 πφ <<

Cherchons les frontières du domaine D défini par les points (x,y) qui satisfont :

( ), , 0F x y θ ≤ ] [0,θ π∀ ∈ (E.2)

Manifestement, D est identique au domaine défini par les points (x,y) qui satisfont :

( ), , 0F x y θ ≤ [ ]0,θ π∀ ∈ (E.3)

D, qui est l’intersection de demi-espaces convexes est donc un convexe. Si le point (x,y) appartient à la frontière du domaine D, il est alors possible de montrer que :

[ ]0 0,θ π∃ ∈ ( )0, , 0F x y θ = (E.4)

et que si 0 iθ θ≠ et ] [0,θ π∈ , alors :

( )0, , 0F x y θθ

∂=

∂ (E.5)

Par conséquent, (x,y) est la solution du système de deux équations :

( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( ) ( )

0 0 0 0 0 0 0

0 0 0 0 0 0 0 0 0

cos sin cos cos sin sin

cos cos sin sin 2 cos sin sin cos '

x y f

x y f

θ φ θ θ φ θ θ φ θ θ

θ φ θ θ φ θ θ φ θ θ φ θ θ

− + − − − =

− − − − − + − = (E.6)

Comme 0 / 2φ π< < , ce système équivaut à :

( ) ( ) ( )( )

( ) ( ) ( )( )

( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )

0 0 0 0 02 2

0 0

0 0 0 0 02 2

0 0

0 0 0 0 0 0 0 02 2

0 0

2 cos sin sin cos

cos sin

cos cos sin sin '

cos sin

cos cos sin sin cos sin '

cos sin

fx

f

f fy

θ φ θ θ φ θ θ

θ φ θ

θ φ θ θ φ θ θ

θ φ θ

θ φ θ θ φ θ θ θ φ θ θ

θ φ θ

− + − =− +

− − − +

− + − − − − − = − +

(E.7)

Page 190: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Annexes

190

On en déduit que les frontières de D sont incluses :

1. soit dans la courbe paramétrique définie par :

( )

( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )

( )( ) ( ) ( ) ( ) ( )

( )

2 20 0

2 2

2 cos sin sin cos cos cos sin sin '

cos sin

cos cos sin sin cos sin '

cos sin

f fx

f fy

θ φ θ θ φ θ θ θ φ θ θ φ θ θθ

θ φ θ

θ φ θ θ φ θ θ θ φ θ θθ

θ φ θ

− + − + − − − =− +

− − − − − = − +

(E.8)

pour ] [0,θ π∈ et iθ θ≠ ;

2. soit dans les n droites frontières des demi-espaces suivants :

( ) ( ) ( ) ( )cos sin sin sin cos cos 0i i i i i i ix y y fθ φ θ θ φ θ θ φ θ θ− − − + − − ≤ (E.9)

pour 1,...,i n= ;

3. soit dans les 2 droites frontières des demi-espaces suivants :

( )( )

cos 0 0

cos 0

y f

y f

φ

φ π

− ≤

− ≤ (E.10)

Page 191: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

191

Bibliographie [Abbas et al. 1993] Abbas H., Paul D.K., Godbole P.N., Nayak G.C. – Reaction-time response of aircraft crash, Computers and Structures, Vol. 55, No. 5, 1995, pp. 809-817. [Addessi et Ciampi 2002] Addessi D., Ciampi V. – A beam finite element based on damage mechanics for dynamical structural analysis, Proc. EURODYN 2002, München, Balkema Publishers, Lisse, The Netherlands, 2002. [Adebar et He 1994] Adebar P., He W. – Influence of Membrane Forces on Transverse-Shear Reinforcement Design, ASCE Journal of Structural Engineering, Vol. 120, No. 4, 1994, pp. 1347-1366. [Ågårdh et Laine 1999] Ågårdh L., Laine L. – 3D FE-simulation of high-velocity fragment perforation of reinforced concrete slabs, International Journal of Impact Engineering, Vol. 22, No. 9-10, 1999, pp. 911-922. [Alderson et al. 1977] Alderson M.A.H.G., Davis I.L., Bartley R., O’Brien T.P. – Reinforced concrete behaviour due to missile impact, Proc. 4th SMiRT, San Francisco, 1977, J7/7. [Aufaure et al. 1986] Aufaure M., Chauvel D., L’Huby Y. – « Dynamic elasto-plastic analysis of reinforced concrete slabs and application to plastic design of some building structures », Finite element analysis of reinforced concrete structures, Proc. of the Seminar held in Tokyo (1985), C. Meyer and H. Okamura eds., ASCE, New York, 1986. [Averbuch 1996] Averbuch D. – Approche du dimensionnement des structures en béton armé par le calcul à la rupture, Thèse de doctorat, Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, 1996. [Berriaud et al. 1978] Berriaud C., Sokolovsky A, Gueraud R, Dulac J, Labrot R. – Local behaviour of reinforced concrete walls under missile impact, Nuclear Engineering and Design, Vol. 45, 1978, pp. 457-469. [Badel 2001] Badel P.-B. – Contributions à la simulation numérique de structures en béton armé, Thèse de doctorat, Université Paris VI, 2001. [Bischoff et Perry 1991] Bischoff P., Perry S. – Compressive behaviour of concrete at high strain rates, Material and Structures, Vol. 24, 1991, pp. 425-450. [Bouchard et al. 2000] Bouchard P., Bay F., Chastel Y., Tovena I. – Crack propagation modelling using an advanced remeshing technique, Computer Methods in Applied Mechanincs and Engineering, Vol. 189, No. 3, 2000, pp. 723-742. [Braestrup 1980] Braestrup M.W. – Dome effect in RC slabs: rigid-plastic analysis, ASCE Journal of the Structural Division, Vol. 106, No. ST6, 1980, pp. 1237-1253. [Brandes et al. 1979] Brandes K., Limberger E., Herter J. – Experimental investigation of reinforced concrete behaviour due to impact load, Proc. 5th SMiRT, Berlin, 1979, J7/3. [Broadhouse 1995] Broadhouse B.J. – The Winfrith Concrete Model in LS-DYNA3D, Report SPD/D (95) 363, Atomic Energy Agency (UKAEA), Winfrith Technology Center, U.K., 1995.

Page 192: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Bibliographie

192

[Brossard 1997] Brossard J.P. – Mécanique générale - Dynamique : théorie classique du choc – Techniques de l’ingénieur, 1997, Dossier A1668. [Burlion 1997] Burlion N. – Compaction des bétons : éléments de modélisation et caractérisation expérimentale, Thèse de doctorat, ENS de Cachan, 1997. [CEB 1988] Concrete Structures under Impact and Impulsive Loading, Synthesis Report, Comité Euro-International du Béton (CEB), Bulletin d’information n°187. [Clough et Penzien 1993] Clough R. W., Penzien J. – Dynamics of Structures, 2nd ed., McGraw-Hill, 1993. [Combescure 2001] Combescure D. – Modélisation des structures de génie civil sous chargement sismique à l’aide de Castem 2000, Rapport CEA SEMT/EMSI/RT/01-008A, 2001. Disponible sur: <http://www-cast3m.cea.fr/cast3m/xmlpage.do?name=documentation> (consulté le 27 septembre 2006) [Cookson 1979] Cookson P.J. – A general yield criterion for orthogonally reinforced concrete slab elements, Proc. of IABSE Colloquium, Session I, Plasticity in Reinforced Concrete, Final Report, Copenhagen, Vol. 29, aug. 1979, pp. 43-50. [Corbett et al. 1996] Corbett G.G., Reit S.R., Johnson W. – Impact loading of plates and shells by free-flying projectiles: a review, International Journal of Impact Engineering, Vol. 18, No. 2, 1996, pp. 141-230. [Dahlbom et Ottosen 1990] Dahlbom O., Ottosen N.S. – Smeared crack analysis using generalized fictitious crack model, ASCE Journal of Engineering Mechanics, Vol. 116, No. 1, 1990, pp. 55-76. [Delhomme et al. 2005] Delhomme F., Mommessin M., Mougin J.P., Perrotin P. – Behavior of a structurally dissipating rock-shed: experimental analysis and study of punching effects, International Journal of Solids and Structures, Vol. 42, 2005, pp. 4204-4219. [Descartes 1644] Descartes R. – Principia philosophiae, Partie II, Art. 46-52, 1644. [Dinic et Perry 1990] Dinic G., Perry S.H. – Shear plug formation in concrete slabs subjected to hard impact, Engineering Fracture Mechanics, Vol. 35, No. 1-2-3, 1990, pp. 343-350. [Drucker et Prager 1952] Drucker D.C., Prager W. – Soil Mechanics and Plastic Analysis or Limit Design, Quarterly of Applied Mathematics. Vol. 10, No., 1952, pp. 157-165. [Dulac 1982] Dulac J. – Comportement dynamique élastoplastique des dalles en béton armé. Essais CEMETE – Décembre 1979 – Dalles 8 à 12, Rapport interne EDF-SEPTEN, E-SE-GC-82-13-A, 1982. [Dulac et Giraud 1981] Dulac J., Giraud J.P. – Impact Testing of Reinforced Concrete Slabs, Proc. 6th SMiRT, Berlin, 1981, J7/1. [Eibl 1987] Eibl J. – Soft and hard impact, Proc. FIP Congress, The Concrete Society, Concrete for hazard protection, Edinburgh, Scotland, sept. 1987, pp. 175-186. [ETC-C 2005] – «EPR Technical Code for Civil works». Note EDF, EN-GS-GC-05-0076B.

Page 193: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Bibliographie

193

[Eurocode2 1991] Eurocode 2, Design of Concrete Structures – Part 1, General rules for buildings, European Prestandard ENV 1992-1-1:1991, European Committee for Standardisation TC 250, Brussels, 1991. [Europlexus 2006] Europlexus – A Computer Program for the Finite Element Simulation of Fluid-Structure Systems under Transient Dynamic Loading – User’s manual, CEA-JRC, 2006. Disponible sur: <http://europlexus.jrc.it/public/manual_html/index.html> (consulté le 15 novembre 2006) [Fajfar et Fischinger 1991] Fajfar P., Fischinger M. – Mathematical modeling of reinforced concrete structural walls for nonlinear seismic analysis, Proc. of the European Conference on Structural Dynamics EURODYN 90, Bochum, Germany, Krätzig et al. eds, Balkema, Vol. 1, 1991, pp. 471-478. [Faucher et Combescure 2003] Faucher V., Combescure A. – A time and space mortar method for coupling linear modal subdomains and non-linear subdomains in explicit structural dynamics, Computer Methods in Applied Mechanics and Engineering, Vol. 192, No. 5-6, 2003, pp. 509-533. [Fiquet et Dacquet 1977] Fiquet G., Dacquet S. – Study of the perforation of reinforced concrete slabs by rigid missiles – Experimental study, part II, Nuclear Engineering and Design, Vol. 41, 1977, pp. 103-120. [Forquin 2003] Forquin P. – Endommagement et fissuration de matériaux fragiles sous impact balistique, rôle de la microstructure, Thèse de doctorat, ENS de Cachan, 2003. [Fries et Matthies 2004] Fries T.-P., Matthies H.-G. – Classification and Overview of Meshfree Methods, Informatikbericht n° 2003-3, Institute of Scientific Computing, Technical University Brunswick, Germany, juillet, 2004. Disponible sur: <http://opus.tu-bs.de/opus/volltexte/2003/418> (consulté le 29 août 2006) [Ghavamian et Delaplace 2003] Ghavamian S., Delaplace A. – Modèles de fissuration du béton: projet MECA, Revue Française de Génie Civil, Vol. 7, No. 5, 2003. [Gibert 1988] Gibert R.J. – Vibrations des structures : Interactions avec les fluides, sources d'excitation aléatoires, Ecole d’été d’analyse numérique CEA-EDF-INRIA, Collection de la Direction des Etudes et Recherches d'Electricité de France, ed. Eyrolles, Paris, 1988. [Godard 2005] Godard V. – Modélisation de l’endommagement anisotrope du béton avec prise en compte de l’effet unilatéral : Application à la simulation numérique des enceintes de confinement, Thèse de doctorat, Université Paris VI, 2005. [Goldstein et al. 1977] Goldstein S., Berriaud C., Labrot R. – Study of the perforation of reinforced concrete slabs by rigid missiles – Experimental study, part III, Nuclear Engineering and Design, Vol. 41, 1977, pp. 121-128. [Gueraud et al. 1977] Gueraud R., Sokolovsky A, Kavyrchine M, Astruc M. – Study of the perforation of reinforced concrete slabs by rigid missiles – General introduction and Experimental study, part I, Nuclear Engineering and Design, Vol. 41, 1977, pp. 91-102. [Haldar et Hamieh 1984] Haldar A., Hamieh H.A. – Local effects of solid missiles on concrete structures, ASCE Journal of Structural Division, Vol. 110, No. 5, 1984, pp. 948-960. [Hansson 2004] Hansson H. – 3D simulation of concrete penetration using SPH formulation and the RHT material model, Proc. Structures Under Shock and Impact VIII, Crete, Greece, ed. N. Jones & C.A. Brebbia & A.M. Rajendran, WIT Press, 2004.

Page 194: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Bibliographie

194

[Hentz et al. 2003] Hentz S., Daudeville L., Donzé F. – Modeling of reinforced concrete structures subjected to impacts by the discrete element method, Proc. 16th ASCE Engineering Mechanics Conference, University of Washington, Seatle, 2003. [Holmquist et al. 1993] Holmquist T.J., Johnson G.R., Cook W.H. – A computational constitutive model for concrete subjected to large strains, high strain rates, and high pressures, Proc. 14th International Symposium on Ballistics, Québec, sept. 1993, pp. 591-600. [Hopkinson 1914] Hopkinson B. – Philosophic Transactions of the Royal Society, Vol. A213, 1914, pp. 437-452. [Huang et al. 2005] Huang F., Wu H., Jin Q., Zhang Q. – A numerical simulation on the perforation of reinforced concrete targets, International Journal of Impact Engineering, Vol. 32, No. 1-4, 2005, pp. 911-922. [Huygens 1652-a] Huygens C. – Lettre du 17 janvier 1652 à G. van Gutschoven, Œuvres complètes de Christiaan Huygens, Société Hollandaise des Sciences, M. Nijhoff, La Haye, Tome I, 1889. [Huygens 1652-b] Huygens C. – Lettre du 29 octobre 1652 à Fr. van Schooten, Œuvres complètes de Christiaan Huygens, Société Hollandaise des Sciences, M. Nijhoff, La Haye, Tome I, 1889. [Huygens 1703] Huygens C. – De motu corporum ex percussione, Œuvres complètes de Christiaan Huygens, Société Hollandaise des Sciences, M. Nijhoff, La Haye, Tome XVI, 1929. [Ibrahimbegovic et Delaplace 2003] Ibrahimbegovic A., Delaplace A. – Microscale and mesoscale discrete models for dynamic fracture of structures built of brittle material, Computers and Structures, Vol. 81, No. 12, 2003, pp. 1255-1265. [Ibrahimbegovic et Frey 1993] Ibrahimbegovic A., Frey F. – Stress resultant finite element analysis of reinforced concrete plates, Engineering Computations, Vol.10, No.1, 1993, pp. 15-30. [Jirásek 2000] Jirásek M. – Comparative study on finite elements with embedded discontinuities, Computer Methods in Applied Mechanics and Engineering, Vol. 188, No. 1-3, 2000, pp. 307-330. [Jau et al. 1982] Jau W.C., White R.N., Gergely P. – Behavior of Reinforced Concrete Slabs Subjected to Combined Punching Shear and Biaxial Tension, Rapport NUREG/CR-2920, Department of Structural Engineering, Cornell University, Prepared for US Nuclear Regulatory Commision, 1982. [Johansen 1962] Johansen K.W. – Yield-line theory, Cement and Concrete Association, London, 1962. [Jonas et al. 1979] Jonas W., Meschkat R., Riech H., Rüdiger E. – Experimental investigations to determine the kinetic ultimate bearing capacity of reinforced concrete slabs subject to deformable missiles, Proc. 5th SMiRT, Berlin, 1979, J8/3. [Jonas et al. 1982-a] Jonas W., Rüdiger E., Gries M., Riech H., Rützel H. – Kinetische Grenztragfähigkeit von Stahlbetonplatten, RS 165, Schlussbericht (Rapport final), IV. Technischer Bericht, Hochtief AG. [Jonas et al. 1982-b] Jonas W., Rüdiger E., Gries M., Riech H., Rützel H. – Kinetische Grenztragfähigkeit von Stahlbetonplatten, RS 165 (RS 149), Anhangband (Annexe), IV. Technischer Bericht, Hochtief AG. [Johnson et al. 1996] Johnson G.R., Stryk R.A., Beissel S.R. – SPH for high velocity impact computations, Computer methods in applied mechanics and engineering, Vol. 139, 1996, pp. 347-373.

Page 195: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Bibliographie

195

[Johnson et al. 2002] Johnson G.R., Stryk R.A., Beissel S.R., Holmquist T.J. – An algorithm to automatically convert distorted finite elements into meshless particles during dynamic deformation, International Journal of Impact Engineering, Vol. 27, No. 10, 2002, pp. 997-1013. [Kahan 2002] Kahan M. – Dimensionnement d’une section en béton armé soumise à une enveloppe elliptique de sollicitations dynamiques combinées, Revue française de génie civil, Vol. 6, No. 7-8, 2002, pp. 1283-1308. [Kaufman 1998] Kaufman W. – Strength and Deformations of Structural Concrete Subjected to In-Plane Shear and Normal Forces , Dissertation, Institute of Structural Engineering, ETH, Zurich, Switzerland, 1998. [Kennedy 1976] Kennedy R.P. – A review of procedures for the analysis and design of concrete structures to resist missile impact effects, Nuclear Engineering and Design, Vol. 37, 1976, pp. 183-203. [Kœchlin 2002] Kœchlin P. – Enrichissement de MOCO pour l’alimentation en données d’entrée de GLRC : Mise à jour des documentations de principe, d’utilisation et de référence, Note interne EDF n° H-T62-02-009-A, 2002. [Kœchlin et al. 2002] Kœchlin P., Moulin S., Potapov S., Jean C. – A global constitutive model for reinforced concrete shells under dynamic loading, Proc. Fifth European Conference on Structural Dynamics – EURODYN 2002, München, Germany, 2002, pp. 881-886. [Kœchlin et Potapov 2007] Kœchlin P., Potapov S. – Global constitutive model for reinforced concrete plates, ASCE Journal of Engineering Mechanics, Vol. 133, No. 3, 2007, in press. [Kojima 1991] Kojima I. – An experimental study on local behaviour of reinforced concrete slabs to missile impact, Nuclear Engineering and Design, Vol. 130, 1991, pp. 121-132. [La Borderie 1991] La Borderie C. – Phénomènes unilatéraux dans un matériau endommageable, Modélisation et Application à l’analyse des structures en béton, Thèse de doctorat, Université Paris VI, 1991. [Lechenet 2006] Lechenet F. – Alsace - Château d'Ortenbourg, Photo publiée avec autorisation, extraite du site <http://lechenet.free.fr/>, 2006. [Lemaître et Chaboche 1985] Lemaître J., Chaboche J.-L. – Mécanique des matériaux solides, Dunod, Bordas, Paris, 1985. [Leppänen et Gylltoft 2002] Leppänen J., Gylltoft K. – Finite element analyses of concrete penetration with a steel projectile. Comparison of Lagrangian and Eulerian techniques, Proc. Structures Under Shock and Impact VII, Montreal, Canada, ed. N. Jones & C.A. Brebbia & A.M. Rajendran, WIT Press, 2002. [Li et al. 2005] Li Q.M., Reid S.R., Wen H.M., Telford A.R. – Local impact effects of hard missiles on concrete targets, International Journal of Impact Engineering, Vol. 32, 2005, pp. 224-284. [López Cela et al. 1996] López Cela J.J., Pegon P., Casadei F. – Brittle Material Law with Drucker Prager Yield Surface and Softening Behaviour, JRC Technical Note N. I.96.34, February 1996.

Page 196: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Bibliographie

196

[López Cela et al. 1997] López Cela J.J., Pegon P., Casadei F. – Fast Transient Analysis of Reinforced Concrete Structures with Drucker-Prager Model and Viscoplastic Regularization, Proc. 5-th International Conference on Computational Plasticity, Complas-5, Barcelona, Spain, March 17-20, 1997. [Maldague 1965] Maldague J.-C. – Détermination expérimentale des lois moments-courbures des poutres en béton armé, Annales de l’Institut Technique du Bâtiment et des Travaux Publics (ITBTP), No. 209, mai 1965, pp. 517-628. [Malvar et al. 1997] Malvar L.J., Crawford J.E., Wesevich J.W., Simons D. – A plasticity concrete material model for DYNA3D, International Journal of Impact Engineering, Vol. 19, No. 9-10, 1997, pp. 847-873. [May et al. 2005] May I.M., Chen Y., Owen D.R.J., Feng Y.T., Bere A.T. – Behaviour of reinforced concrete beams and slabs under drop-weight impact loads, Proc. 6th Asia-Pacific Conference on Shock and Impact Loads on Structures, Perth, Australia, 2005. Vidéo de l’essai sur : <http://www.sbe.hw.ac.uk/research/structural/impact_test/index.htm> (consulté le 24 août 2006) [May et al. 2006] May I.M., Chen Y., Owen D.R.J., Feng Y.T., Thiele P.J. – Reinforced concrete beams under drop-weight impact loads, Computers and Concrete, Vol. 3, No. 2, 2006, pp. 79-90. [Mazars 1984] Mazars J. – Application de la mécanique de l’endommagement au comportement non linéaire et à la rupture du béton de structure, Thèse de doctorat d’état, Université de Paris VI, 1984. [Mersseman et Millard 1995] Mersseman B. de, Millard A. – Introduction du modèle Ottosen dans Castem2000, Formulation, Implémantation, Rapport CEA DMT/94-705, 1995. [Miyamoto et King 1994] Miyamoto A., King M.W. – Shock and Impact on Structures, International Series on Computational Engineering, C.A. Brebbia and V. Sanchez-Galvez Eds, Chapter 5. Concrete structures under soft impact loads, pp. 107-204. [Moulin et al. 2004] Moulin S., Kœchlin P., Potapov S., Champain E. – Méthodologie de simulation d'impact sur un bâtiment industriel en béton armé, Revue européenne des éléments finis, Vol. 13, No. 5-6-7, 2004, pp. 605-616. [Moulin et al. 2003] Moulin S., Davenne L., Gatuingt F. – Eléments de poutre multifibre, Documentation du Code_Aster, Manuel de Référence R3.08.08, 2003. Disponible sur <http://www.code-aster.org> (consulté le 6 octobre 2006) [Nachtsheim et Stangenberg 1981] Nachtsheim W., Stangenberg F. – Impact of deformable missiles on reinforced concrete plates – Comparisonal calculations of Meppen tests, Proc. 6th SMiRT, Berlin, 1981, J7/3. [Nachtsheim et Stangenberg 1982] Nachtsheim W., Stangenberg F. – Interpretation of results of Meppen slab tests – Comparison with parametric investigations, Nuclear Engineering and Design, Vol. 75, 1982, pp. 283-290. [Nachtsheim et al. 1984] Nachtsheim W., Stangenberg F., van Exel C., Gurski B. – Analysen und Auswertungen zu den Meppener Plattenversuchen - Anprall deformierbarer Projektile auf Stahlbetonplatten, BMFT-Vorhaben 150410, Abschlußbericht – Zerna, Schnellenbach und Partner. [Nielsen 1999] Nielsen M.P. – Limit Analysis of Concrete Plasticity, 2nd ed., CRC Press, Boca Raton, Florida, 1999.

Page 197: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Bibliographie

197

[Ohno et al. 1992] Ohno T., Uchida T., Matsumoto N., Takahashi Y. – Local damage of reinforced concrete slabs by impact of deformable projectiles, Nuclear Engineering and Design, Vol. 138, 1992, pp. 45-52. [Oñate et Rojek 2004] Oñate E., Rojek J. – Combination of discrete element and finite element methods for dynamic analysis of geomechanics problems, Computer methods in applied mechanics and engineering, Vol. 193, 2004, pp. 3087-3128. [Ortiz et al. 1987] Ortiz M., Leroy Y., Needleman A. – A finite element method for localized failure analysis, Computer Methods in Applied Mechanics and Engineering, Vol. 61, No. 2, 1987, pp. 189-214. [Ortiz et Pandolfi. 1999] Ortiz M., Pandolfi A. – Finite-deformation irreversible cohesive elements for three-dimensional crack-propagation analysis, International Journal for Numerical Methods in Engineering, Vol. 44, 1999, pp. 1267-1282. [Ottosen 1977] Ottosen N.S. – A failure criterion for concrete, ASCE Journal of the Engineering Mechanics Division, Vol. 103, 1977, pp. 527-535. [Øverli et Sørensen 2000] Øverli J.A., Sørensen S.I. – Alternative Stress-Resultant Material Modelling in Collapse Analysis of Reinforced Concrete Plates and Shells, Nordic Concrete Research, No. 25, 2000, pp. 1-20. [Pascu 1995] Pascu I.R. – Contribution à l’analyse d’éléments en béton armé sollicités en membrane et en flexion biaxiale, Thèse de doctorat, INSA de Lyon, 1995. [Polak et Vecchio 1994] Polak M.A., Vecchio F. – Reinforced concrete shell elements subjected to bending and membrane loads, ACI Structural Journal, Vol. 91, No. 3, 1994, pp. 261-268. [Prat et al. 1997] Prat M., Bisch P., Millard A., Mestat P., Pijaudier-Cabot G. – Calcul des ouvrages généraux de construction, AFPC – Emploi des éléments finis en génie civil, Hermès, Paris, 1997. [Press et al. 1992] Press W.H., Teukolsky S.A., Vetterling W.T., Flannery B.P. – Numerical Recipes in C, The art of scientific computing, Second Edition, Cambridge University Press, 1992. [Proix 2006] Proix J.-M. – Comportements non linéaires, Documentation du Code_Aster, Manuel d’Utilisation U4.51.11, 2006. Disponible sur <http://www.code-aster.org> (consulté le 17 novembre 2006) [Rabczuk et Eibl 2006] Rabczuk T., Eibl J. – Modelling dynamic failure of concrete with meshfree methods, International Journal for Numerical Methods in Engineering, Vol. 32, 2006, pp. 1878-1897. [Rambach et al. 1998] Rambach J.M., Nahas G., Grillon G., Chrétien N. – Prestressed containment: behaviour when concrete cracking is modelled, Proc. OECD-Nuclear Energy Agency, Principal Working Group No. 3 on integrity of components and structures, Workshop on finite element analysis of degraded concrete structures, Upton, Long Island, New York, 29-30 october 1998, pp. 77-90. [Rasmussen et Baker 1998] Rasmussen L.J., Baker G. (1998) – A finite element yield line model for the analysis of reinforced concrete plates, Structural Engineering and Mechanics. Vol.6, No.4, 1998, pp. 395-409. [Réthoré et al. 2005] Réthoré J., Gravouil A., Combescure A. – An energy-conserving scheme for dynamic crack growth using the extended finite element method, International Journal for Numerical Methods in Engineering, Vol. 63, 2005, pp. 631-659.

Page 198: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Bibliographie

198

[Riera 1968] Riera J.D. – On the stress analysis of structures subjected to aircraft impact forces, Nuclear Engineering and Design, Vol. 8, 1968, pp. 415-426. [Riera 1989] Riera J.D. – Penetration, scabbing and perforation of concrete structures hit by solid missiles, Nuclear Engineering and Design, Vol. 115, 1989, pp. 121-131. [Romander et Sliter 1984] Romander C.M., Sliter G.L. – Model tests of turbine missile impact on reinforced concrete, Nuclear Engineering and Design, Vol. 77, 1984, pp. 331-342. [Rüdiger et Riech 1983] Rüdiger E., Riech H. – Experimental and theoretical investigations on the impact of deformable missiles onto reinforced concrete slabs, Proc. 7th SMiRT, Chicago, 1983, J8/3 pp 387-394. [Rüdiger Wölk 2005] Rüdiger Wölk – Søndervig, Denmark, German bunker at the beach, Picture licensed under Creative Commons Attribution ShareAlike 2.0 Germany License, Credit Rüdiger Wölk Münster, 2005. [Sage et Pfeiffer 1979] Sage R, Pfeiffer A. – Response of reinforced concrete targets to impacting soft missiles. An FRGMRT-UKAEA co-operation in tests to validate computer codes and scaling laws, Proc. 5th SMiRT, Berlin, 1979, J8/4. [Salençon 2001] Salençon J. – Elastoplasticité et calcul à la rupture, Presses de l’Ecole Polytechnique, Palaiseau, 2001. [Save et al. 1997] Save M.A., Massonet C.E., De Saxcé G. – Plastic limit analysis of plates, shells and disks, Applied Mathematics and Mechanics Vol. 43, J.D. Achenbach, B. Budiansky, H.A. Lauwerier, P.G. Saffman, L. Van Wijgaarden and J.R. Willis, eds, Elsevier Science, Amsterdam, 1997. [Sawamoto et al. 1998] Sawamoto Y., Tsubota H., Kasai Y., Koshika N., Morikawa H. – Analytical studies on local damage to reinforced concrete structures under impact loading by discrete element method, Nuclear Engineering and Design, Vol. 179, 1998, pp. 157-177. [Simo et Hughes 1998] Simo J.C, Hughes T.J.R. – Computational inelasticity, J.E. Marsden, L. Sirovich, S. Wiggins, eds., Springer-Verlag, New-York, 1998. [Suffis 2004] Suffis A. – Développement d’un modèle d’endommagement à taux de croissance contrôlé pour la simulation robuste de ruptures sous impacts, Thèse de doctorat, INSA de Lyon, 2004. [Sugano et al. 1993-a] Sugano T., Tsubota H., Kasai Y., Koshika N., Ohnuma H., von Risemann W.A., Bickel D.C., Parks M.B. – Local damage to reinforced concrete structures caused by impact of aircraft engine missiles – Part 1. Test program, method and results, Nuclear Engineering and Design, Vol. 140, 1993, pp. 387-405. [Sugano et al. 1993-b] Sugano T., Tsubota H., Kasai Y., Koshika N., Itoh C., Shirai K., von Risemann W.A., Bickel D.C., Parks M.B. – Local damage to reinforced concrete structures caused by impact of aircraft engine missiles – Part 2. Evaluation of test results, Nuclear Engineering and Design, Vol. 140, 1993, pp. 407-423. [Sugano et al. 1993-c] Sugano T., Tsubota H., Kasai Y., Koshika N., Orui S., von Risemann W.A., Bickel D.C., Parks M.B. – Full-scale aircraft impact test for evaluation of impact force, Nuclear Engineering and Design, Vol. 140, 1993, pp. 373-385. [Takeda et al. 1970] Takeda T., Sozen M.A. and Nielson N.N. – Reinforced concrete response to simulated earthquakes, ASCE Journal of Structural Division, Vol. 96, ST12, 1970, pp. 2557-2573.

Page 199: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Bibliographie

199

[Tjemmes 2002] Tjemmes M. – Castle Ortenbourg, Photo publiée avec autorisation, extraite du site <http://www.castles.nl>, 2002. [Ung Quoc 2003] Ung Quoc H. – Théorie de dégradation du béton et développement d’un nouveau modèle d’endommagement en formulation incrémentale tangente. Calcul à la rupture appliqué au cas des chevilles de fixation ancrées dans le béton, Thèse de doctorat, Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, 2003. [Unosson 2000] Unosson M. – Numerical simulations of penetration and perforation of high performance concrete with 75mm steel projectile, Rapport FOA-R--00-01634-311—SE, FOI Swedish Defence Research Agency, 2000. Disponible sur: <http://www.foi.se/FOI/templates/Page____4502.aspx> (consulté le 31 août 2006) [Vulcano et al. 1988] Vulcano A., Bertero V.V., Colotti V. – Analytical Modeling of RC Structural Walls, Proc. of 9th World Conference on Earthquake Engineering, Tokyo-Kyoto, Japan, Vol. 6, 1988, pp. 41-46. [Wales 2006] Wales J. – Wikipedia, 2006. Disponible sur: <http://de.wikipedia.org/wiki/Resultante> <http://en.wikipedia.org/wiki/Sylvester_matrix> (consultés le 4 octobre 2006) [Wang 1995] Wang W. – Shear strength and fatigue crack propagation in concrete by energy method, PhD Thesis, New Jersey Institute of Technology, 1995. Disponible sur: <http://www.library.njit.edu/etd/1990s/1995/njit-etd1995-012/njit-etd1995-012.html> (consulté le 20 septembre 2006) [Wolf et al. 1976] Wolf J.P., Bucher K.M., Skrikerud P.E. – Response of equipment subjected to aircraft impact, Nuclear Engineering and Design, Vol. 47, 1976, pp. 169-193. [Wœstyn et al. 2006] Wœstyn S., Delaplace A., Kœchlin P. – Analyse de la rupture fragile du béton par un modèle discret, Revue Européenne de Génie Civil, Vol. 10, No. 10, 2006, pp. 1281-1308, in press. [Woodfin et Sliter 1981] Woodfin R.L., Sliter G.L. – Modeling and Conduct of Turbine Missile Concrete Impact Experiments – Results of Full Scale Turbine Missile Concrete Impact Experiments, Proc. 6th SMiRT, Berlin, 1981, J8/1 et J8/2. [Yamada et al. 1992] Yamada T., Nanni A., Endo K. – Punching Shear Resistance of Flat Slabs : Influence of Reinforcement Type and Ratio, ACI Structural Journal, 1992, pp. 555-563. [Zukas et al. 1982] Zukas J. A., Nicholas T., Swift H. F., Greszcuk L. B., Curran D. R. – Impact dynamics, Chapter 5. Penetration and perforation of solids, pp. 155-214.

Page 200: Modèle de comportement membrane-flexion et critère de ...

Résumé L’étude des structures surfaciques en béton armé destinées à la protection contre des impacts de projectiles déformables, nécessite de caractériser précisément ce type d’impact. Nous proposons dans ce mémoire une nouvelle classification générale des chocs, distinguant précisément les chocs mous des chocs durs. Nous montrons ainsi que la chute d’avion, comme tout choc mou, génère des ondes de flexion et d’effort tranchant, qui produisent non seulement des dégradations dans toute la structure comme la fissuration du béton et la plastification des aciers longitudinaux, mais aussi des phénomènes très locaux comme la perforation, toujours caractérisée par un cône de rupture.

Cette analyse des phénomènes conduit à proposer deux outils de simulation. Le premier correspond à une loi de comportement non linéaire membrane-flexion pour plaques en béton armé. Ce modèle global en variables généralisées permet de représenter la fissuration du béton à l’aide de la théorie de l’endommagement et les déformations irréversibles à l’aide de la théorie de la plasticité. Pour cela, le critère de plasticité en flexion de Johansen est généralisé en incluant les effets de membrane. Le modèle, programmé dans le code d’expertise industrielle Europlexus, est validé par comparaison avec d’autres modélisations et avec des essais.

Le second outil de simulation est un critère de perforation pour dalles en béton armé. Il s’agit d’un critère statique portant sur le moment, l’effort normal et l’effort tranchant, et déterminé via l’analyse limite. En appliquant le critère aux efforts généralisés issus d’un calcul dynamique, nous montrons qu’il permet de prédire la perforation dans le cas des chocs mous.

Summary In order to study the protection offered by reinforced concrete shell structures against soft projectiles impacts, we need first to characterize that kind of impact. In this document, we propose a new unified classification of shocks, allowing to distinguish soft and hard impacts. We show that aircraft crash, like every soft impact, produces bending and shear waves, which generate global and local damage: concrete cracking and reinforcement yielding in the whole structure, and possible perforation with a yield cone in the impact area.

To model these phenomena we propose two computational tools. The first one is a membrane-bending non linear constitutive law for reinforced concrete slabs. This global model, using resultant variables, can simulate concrete cracking through damage theory and inelastic strains through plasticity theory. The Johansen bending yield criterion is improved to account for membrane effects. This material law has been implemented in Europlexus, an industrial finite element software for fast dynamics, and validated by comparison with experimental tests and other computational models.

The second simulation tool is a perforation criterion for reinforced concrete slabs. It is a static criterion depending on bending moment, normal force, and shear force, and derived using limit analysis. We prove that it is possible to predict perforation in case of soft impact, applying this criterion on stress resultant variables coming from a dynamic computation.