L'importance de l'aspect ludiquedans l'apprentissage

Après des années et des années d'enseignement, on se rend compte que le prof qui essaie la manière classique d'enseigner, à travers livres et apprentissage se heurte à bien des échecs dans l'assimilation des savoirs. C'est pourquoi désormais sont mises en place d'originales formes d'enseignement notamment avec un enseignement participatif et stimulant.

L'évolution dans l'apprentissageDes études ont montré que l'être humain est capable de retenir :10% de ce qu'il lit ;20 % de ce qu'il entend ;30 % de ce qu'il voit ;50 % de ce qu'il dit ;90 % de ce qu'il dit en faisant.Force est de constater que la transmission du savoir ne se fait plusuniquement par le biais de la digestion de livres, par un bourrage decrâne systématique. L'avènement du cinéma, de la radio et de latélévision dans un premier temps, de l'ordinateur et des fameuxmultimédias dans un second temps a donné naissance à d'autressources de transmission de la connaissance. La prolifération deslogiciels conviviaux et la chute des prix du matériel informatique (CDROMet autres CD-I) ne feront qu'accroître l'utilisation de ces nouveauxmoyens d'apprentissage au détriment des livres et des revues2.La multitude de choix offerts et l'aspect stimulant de l'interactivitéincitent les utilisateurs de logiciels didactiques ou de multimédias à lacuriosité. Ils deviennent ainsi de véritables consommateursd'informations et de connaissances.Il faut cependant constater que ces moyens d'apprentissage sontterriblement individualistes et que l'une des valeurs fondamentales denotre civilisation, la communication, s'étiole graduellement. L'échange

direct d'opinions au sein d'un groupe n'a plus lieu. Pour contrecarrer ceglissement progressif vers un individualisme total, on constateactuellement un intérêt grandissant pour des jeux de société conçusprincipalement à l'intention des adultes tels que le «Trivial Pursuit», le«Monopoly» et le «Pictionnary». Ils amènent la preuve qu'il est possiblede se détendre en apprenant ou d'apprendre en se détendantÉDans ces conditions, pourquoi l'enseignant n'utiliserait-il pas lesaspects ludique et participatif qu'offre le jeu?L'apprentissage par l'actionC'est en partant de cette idée qu'a été réalisé le «Productionnary». Cejeu didactique, destiné aux élèves en fin de scolarité, explique demanière simple les problèmes les plus cruciaux que rencontrent lesindustries à l'heure actuelleencadré.L'objectif principal de ce jeu est de confronter l'élève aux composanteshumaines, organisationnelles et concurrentielles de la productionindustrielle. Pour ce faire, l'élève est chargé de réaliser en groupe unobjet complexe, ce groupe étant en concurrence avec d'autresgroupes. Le travail au sein du groupe met en évidence les problèmesde communication, de pouvoir et d'organisation rencontrés lors dumontage de l'objet.L'élève est complètement impliqué dans le processus didactique,puisqu'il participe à la réalisation de l'objet et aux discussions desynthèse qui concluent chacune des quatre phases du Productionnary.Le rôle de l'enseignant se limite à l'animation du jeu au niveau de lacoordination des phases et des synthèses.Le ProductionnaryVoyons à présent plus en détail les quatre phases du jeu.1. La nécessité de définir clairement un objectifLes élèves travaillent par groupe. Chaque groupe dispose d'une boîtede Lego et reçoit une mission vague (construire un objet d'une certaineutilité). Cette première étape permet de confronter les élèves auxproblèmes du travail en groupe (qui dirige ?, qui fait quoi ?, commentdoit-on communiquer ?) et au problème de la définition claire de lamission (l'entente parfaite entre le producteur et son client).

2. La nécessité d'organiser le travailDans la deuxième phase, la mission est clairement définie et chaquegroupe reçoit une image de l'objet à réaliser. Chaque groupe est alorsobservé suivant divers critères : le temps nécessaire pour réaliserl'objet, le nombre d'erreurs commises et le nombre de pièces utilisées.Cette étape permet de faire comprendre la notion de concurrence etmet en évidence la nécessité primordiale d'organiser le travail.3. Avec un plan, tout est si facile ÉLes groupes reçoivent des indications précises pour construire l'objet(plans) et ils sont observés à nouveau suivant les mêmes critères.Cette étape permet de comprendre l'importance d'une bonneorganisation du travail (en définissant clairement pour chaque élèveson rôle dans le groupe), de voir immédiatement les conséquencesfavorables de cette organisation (moins de temps perdu, moinsd'erreurs), et de saisir rapidement quelques actions économiques(moins de pièces utilisées, qui peuvent être employées dans un autreproduit).4. La synthèse des problèmes rencontrésL'enseignant conclut en faisant une synthèse des problèmesrencontrés et engage une discussion avec ses élèves.La formation en entrepriseOn pourrait penser que de tels apprentissages sont uniquementdestinés aux adolescents. Quel que soit son âge, l'être humain assimilemieux de nouvelles données par l'action. Les sociétés spécialiséesdans la formation du personnel utilisent donc les nombreux jeuxdéveloppés à l'intention des entreprises3. Ces jeux permettent de fairel'apprentissage de nouveaux concepts de production, tels que le"Juste-A-Temps", la "Maintenance Totale" et la "Qualité Totale".Le Centre de Promotion CIM Fribourg (CPCF) a utilisé ces jeuxdidactiques à l'occasion de cours organisés dans des entreprises aussidifférentes l'une de l'autre que Camille Bloch (fabricant du fameuxchocolat Ragusa) et Condis (production de condensateurs).L'application immédiate des idées issues du cours a permis de gagnerprès de 60 % de la surface de stockage d'un atelier de la première

entreprise!Bien sûr, il existera toujours des ronchonneurs traditionalistes pour quil'apprentissage et le jeu seront deux choses incompatibles. A ceux-là,nous ne pouvons dire qu'une chose : essayez! Essayez et imaginezcomment transférer votre savoir d'une manière moins conventionnelle.Le fait de réaliser un apprentissage participatif avec des jeuxdidactiques est aussi stimulant pour l'étudiant que gratifiant pourl'enseignant, car le message passe.Et il passe bien!Prof. Marino WidmerInstitut d'informatiqueNotes:1 Tiré du livre de Fanelly Nguyen-Thanh, La communication : unestratégie au service de l'entreprise, Éditions Economica, Paris, 1991.2 Ce qui est bien triste d'un côté puisque l'on constate une inquiétantedésalphabétisation de nos étudiants qui se trouvent dans l'impossibilitéd'écrire des textes (fond et forme) correctement et qui perdentprogressivement leur esprit critique !3 En France, le Centre International de la Pédagogie d'Entreprise(CIPE) est très actif dans ce domaine.Encart:Quelques mots sur le ProductionnaryLe mandat de la DIPDans le cadre de ses actions de sensibilisation des élèves auxproblèmes de l'économie fribourgeoise, la Direction de l'InstructionPublique du Canton de Fribourg (DIP), en collaboration avec l'Office deDéveloppement Économique du Canton de Fribourg (ODEF), amandaté le Centre de Promotion CIM Fribourg (CPCF) pour élaborerun projet permettant de faire comprendre de manière simple lescomposantes principales du processus de production industrielle.La réalisation proposée par le CPCFPlutôt que d'adapter un logiciel didactique expliquant les divers typesde planification actuellement en vogue dans les entreprises, le CPCFa développé un concept beaucoup plus simple à utiliser et dont l'impact

sur les élèves est bien plus fort. La réflexion a abouti à la réalisationd'un jeu de construction, le «Productionnary», basé sur l'utilisation deLego Technic.Le jeu testé sur une classeUne classe de Cycle d'Orientation de Jolimont à Fribourg a déjà testéce jeu. Les résultats ont été plus que positifs. En effet, les messagesqui devaient passer au travers des trois premières phases du jeu ontété pleinement saisis par les élèves. De plus, ils ont apprécié le côtéludique de cet apprentissage des problèmes concrets que rencontrentles entreprises. Ils ont été également sensibles à cette découverte de lanécessité de communiquer pour atteindre un but précis lorsqu'ontravaille en groupe.D'autre part, l'enseignant a constaté un effet inattendu de ce jeu : il a«découvert» certains élèves! En effet, il est des élèves qui se dévoilentau sein d'un groupe.La 3e mesure du programme de stimulationLe développement et la réalisation de ce jeu recouvrent pleinement lesobjectifs de la troisième mesure du «programme de stimulation del'économie fribourgeoise» (M. Perriard et G. Gaudard : Deuxièmephase du programme de stimulation de l'économie fribourgeoise,automne 1993) :«toucher, pendant l'année scolaire 1993-1994, les élèves des écolesfribourgeoises».Le CPCF pense que ce type de sensibilisation peut égalementpermettre la réalisation des objectifs de la cinquième mesure de ceprogramme:«créer, pour le début 1994, des points de ralliements entre partenairesde la vie économique :faire du CIM une interface technologique privilégiée pour l'industrie,avec toute la dimension symbolique que cela doit comporter».Et plus encore ÉL'impact de ce jeu ne se limite pas aux deux objectifs du programme destimulation. Nous constatons que le «Productionnary» permetd'aborder différents thèmes:

- le système de concurrence;- le système de formation;- le système de communication (au sens premier du terme);- le système social (équité, solidarité).La conception globale de ce jeu en fait un double instrument desensibilisation: il aborde non seulement lesproblèmes de production,mais également les problèmes sociaux de la vie économique. Sonaspect ludique et sa capacité à faire comprendre rapidement ces deuxmessages en font un outil didactique de premier choix pour les élèveset les enseignants.http://www.unifr.ch/spc/UF/95juin/widmer.html