LES RECONVERSIONS PROFESSIONNELLES - … · d’intérêt a jusqu’ici été porté à la manière...

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1 LES RECONVERSIONS PROFESSIONNELLES CHANGER DE METIER : QUELS ENJEUX ? QUELS RISQUES ? QUELLES OPPORTUNITES ? COLLOQUE DU CONSEIL D’ORIENTATION POUR L’EMPLOI 26 SEPTEMBRE 2013 Conseil d’orientation pour l’ emploi

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LESRECONVERSIONSPROFESSIONNELLES

CHANGERDEMETIER:QUELSENJEUX?

QUELSRISQUES?QUELLESOPPORTUNITES?

COLLOQUEDUCONSEILD’ORIENTATIONPOURL’EMPLOI

26SEPTEMBRE2013

Conseild’orientation pour l’emploi

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Synthèse

SECRETARIATGENERALDUCOE

Octobre2013

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SOMMAIRE

INTRODUCTION...................................................................................................................................................4 

LESRECONVERSIONSPROFESSIONNELLES:PRINCIPAUXFAITSETCHIFFRES.................6 

DISCOURS D’OUVERTURE DEMICHEL SAPIN,ministre du Travail, de l’emploi, de laformationprofessionnelleetdudialoguesocial(colloquedu26septembre2013).........14 

SYNTHESEDUCOLLOQUE/PREMIERETABLERONDE:Enjeux:quellesreconversionsprofessionnellesdansuneéconomieenchangement?..................................................................19 

SYNTHESEDEL’ENQUETECOE‐OPINIONWAY:«Opinionsetattitudesdesemployeursfaceauxreconversionsprofessionnelles»...............................................................................................23 

SYNTHESEDUCOLLOQUE/DEUXIEMETABLERONDE:Perceptions:quelsregardslessalariésetlesemployeursportent‐ilssurlesreconversionsprofessionnelles?.................40 

SYNTHESE DU COLLOQUE / TROISIEME TABLE RONDE: Solutions: pour desreconversionsprofessionnellesplusvolontairesetmieuxsécurisées.....................................44 

LecolloqueduCOEdu26septembre2013enimages...................................................................48 

ANNEXE1:PROGRAMMEDUCOLLOQUE............................................................................................50 

ANNEXE2:BIBLIOGRAPHIE......................................................................................................................52 

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INTRODUCTION

Aprèsavoirtravailléàplusieursreprisessurlaquestiondesmobilitésprofessionnelles(parexempledanssesrapports«Mutationséconomiques,reclassement,revitalisation»ou «Les trajectoires et mobilités professionnelles»), le Conseil d’Orientation pourl’Emploi a choisi d’apporter un éclairage sur les reconversions professionnelles, enorganisant son colloque annuel sur ce thème, en partenariat avec Europe1 et LesEchos.Les transitions professionnelles font aujourd’hui partie intégrante de la vieprofessionnelle,qu’ils’agissedechangementsd’entreprise,d’évolutionsauseind’uneentrepriseoudemobilitésgéographiques.Raressontlespersonnesquiexercenttouteleurvielamêmeprofessiondanslamêmeentrepriseetaumêmeendroit.Lesreconversionsprofessionnellessontplusquedesévolutions:elles impliquentunchangement important, voire dans certains cas une rupture dans une trajectoireprofessionnelle.En dépit des mouvements de plus en plus nombreux sur le marché du travail, peud’intérêtajusqu’iciétéportéàlamanièredontcesmouvements,notammentencasdereconversion, sontvécusetperçuspar lespersonnes ‐ salariésouemployeurs.Or, sichangerdemétier est un rêvepour certains salariés, celapeut à l’inverse constituerdanscertainescirconstances,unevéritableépreuve.Qu’ellessoientvolontairesounon, lafréquencedesreconversionsprofessionnellesetla façondontellessedéroulentnousenapprennentbeaucoupsur le fonctionnementdumarchédutravailetpluslargementsurlasociété.D’uncôté,ellesmettentenévidencelaplacequ’occupeletravaildansnosviesetdanslasociété.Letravailestunélémentdenotreidentité,àlafoisfacteurd’épanouissementpersonneletd’intégrationsociale.Ildoitdonccorrespondre,dansl’idéal,àunchoixdelapersonne.Lorsqu’ellen’estplussatisfaitedumétierqu’elleexerce,ellepeutchoisirlibrementd’enchanger.Onvoitmêmedespersonnesquitterunemploistableetbienrémunéré pour commencer une nouvelle carrière répondant davantage à leursaspirationspersonnelles.D’un autre côté, les personnes n’ont pas toujours le choix en matière d’emploi etpeuvent être contraintes de s’adapter, voire subissent des situationsnon souhaitées.De fait, l’augmentationdes transitions sur lemarchédu travaildepuis trenteansestessentiellementdueàlahaussedespassagesparlechômage.Danscecontexteoùlesruptures sont de plus en plus fréquentes, la reconversion professionnelle est doncégalementuneoption,voireunpassageobligé, faceaurisquedechômageoulorsquecelui‐cisurvient.

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Entre ces deux dimensions – mise en œuvre d’un projet de vie et adaptation auxmutations économiques et technologiques sur le marché du travail ‐, les questionsautour des reconversions professionnelles sont nombreuses: quelle est leurfréquence?Commentvont‐ellesévoluer?Commentsont‐ellesperçues?Quelssontlesobstaclesauxreconversionsprofessionnelles?Surquellesaides lessalariéspeuvent‐ils–ounon–compter?Commentlessalariéspréparent‐ilsetvivent‐ilscechangementsiimportant,qu’ilsoitvouluousubi?Surquelsoutilspeuvent‐ilss’appuyer?Alorsquelamobilitéestdeplusenplusvaloriséedans ledébatpublic,quelregardportent lesemployeurs – c’est‐à‐dire ceux qui recrutent, ou non ‐ sur ces changements detrajectoireprofessionnelle?

***Le26septembre2013,lorsducolloqueannuelduConseild’Orientationpourl’Emploi,les membres du Conseil mais aussi des experts ‐ économistes, sociologues,psychologues–ainsiquedespraticiensdesressourceshumainessesontpenchéssurcesquestions.Une enquête COE/OpinionWay a été réalisée à cette occasion afin d’analyser laperceptiondesDRHetdesentreprises sur ces changementsdemétier («Opinionsetattitudesdesemployeursfaceauxreconversionsprofessionnelles»).Le Conseil a volontairement retenu une approche très large des reconversionsprofessionnelles,ens’intéressantauxenjeuxmacroéconomiquessoulevésparcesujet,et en abordant demanière concrète les trajectoires des personnes sur lemarchédutravail(voirleprogrammedétailléenannexe1).Leprésentdocument rend comptedes interventions et des échangesqui ont eu lieulors du colloque du 26 septembre 2013 et les complète de certains élémentstechniques relatifs au sujet traité, afin d’en éclairer le contexte et les enjeux. Deséléments plus détaillés sont également disponibles sur le site Internet du Conseil(www.coe.gouv.fr/).

AyantétéélaboréparleSecrétariatgénéralduConseil,iln’engageévidemmentpasleConseil lui‐même ni aucun de ses membres au‐delà des propos tenus par lesintervenants.

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LESRECONVERSIONSPROFESSIONNELLES:

PRINCIPAUXFAITSETCHIFFRES

Dans son rapport sur «Les trajectoires et mobilités professionnelles»1, le Conseild’orientation pour l’emploi amis en évidence la grande variété des réalités, parfoisliées,querecouvrelanotiondemobilitésurlemarchédutravail.Lamobilitésurlemarchédutravailpeutd’abordêtre«verticale».Ellesedécomposealors en au moins deux sous‐ensembles: la mobilité salariale et le changement decatégoriesocio‐professionnelleencoursdecarrière.Elle peut également être «horizontale». Elle peut être géographique, impliquer unchangement de statut (emploi public, emploi privé, indépendant), un changementd’établissement(s’accompagnantounond’unchangementd’employeur)ouencoreunchangementdemétier.C’estàcettedernièrecatégoriedemobilitéprofessionnellequenousnousintéressonsici.Avec56%desactifsayantdéjàchangédemétieroudesecteurd’activitéaucoursde leur carrière (Enquête IPSOS/ AFPA 2012), le phénomène des reconversionsprofessionnellesestlargementrépandusurlemarchédutravail.Lesprincipauxfaitsetchiffres présentés ci‐dessous permettent de décrire l’état de ces reconversionsprofessionnellesenFrance.

Desreconversionsprofessionnellesenaugmentationetcorrespondantàunchoixpersonnelvolontairepourunemajoritédepersonnes

Enmoyenne,surlapériode1982‐2009,environ7,4%dessalariésemployésexercentunmétier2quidiffèredeceluiexercédanslecadredeleurdernieremploi3(graphique1).Ce taux de mobilité, extrêmement variable et sensible aux cycles économiques, estparticulièrement élevé dans les phases de croissance rapide mais n’a pas connud’évolution tendancielle à la hausse ou à la baisse. Une fois prise en compte lamodificationde larépartitiondessalariésselon leurâge,onconstate toutefoisuneaugmentation tendancielledes changementsdemétiersdepuis lesannées1980. En effet, la mobilité professionnelle diminuant avec l’âge, l’élévation de l’âgemoyen des salariés entre 1982 et 2009 a diminué de façon mécanique le taux demobilitésurcettepériode.

1Conseild’orientationpourl’emploi(2009),« Les trajectoires et mobilités professionnelles », septembre.2Lanomenclaturedesprofessionsutiliséeestcelledesprofessionsetcatégoriessocioprofessionnelles(PCS)quipossèdequatreniveauxd’agrégation.Lechiffrede7,4%correspondautauxdemobilitédanslanomenclatureà3chiffresquicompte434professions.Enutilisantlesnomenclaturesdeniveau1(7professions)et2(28professions),lestauxdemobilitésontrespectivementde3,8%et4,7%.3 E. Lalé (2012),Trends inoccupationalmobility inFrance:1982‐2009, Labour economics, 19 (2012)373–387,mars.

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Graphique 1 : Evolution de la mobilité professionnelle en France entre 1982 et 2009 

  sans prise en compte des effets de structure démographique,  en prenant en compte les effets de structure démographique 

Source : E. Lalé (2012), op cit. 

LesreconversionsprofessionnellesenFrancesefontprincipalementàl’occasiond’une rupture de contrat: sur la période 2004‐2011, 22,3% des reconversionsprofessionnelles ont eu lieu à la suite d’un licenciement économique ou personnel,25,3%àlasuited’unefindeCDDet34,3%àlasuited’unedémissionoud’uneruptureconventionnelle(graphique2).

Graphique 2 : Situations préalables à la reconversion professionnelle  

 Sources : présentation de S. Scarpetta pour  le COE  le 26 septembre 2013. Calculs OCDE à partir de l’enquête  emploi  INSEE  (2004‐2011).  Secteur  d’origine  des  actifs  occupés  du  secteur  du  privé. Situation observée 4 trimestres après la première interrogation. 

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En2012,pourplusde lamoitiédespersonnesayantdéjàchangéd’orientationprofessionnelleaucoursdeleurvie,ils’agissaitd’unchoixpersonnelvolontaire(graphique 3). Cette proportion est d’autant plus importante que le niveau dequalification est élevé, les cadres étant bien plus concernés (76%) par lesreconversionsvolontairesquelesouvriers(45%).

Graphique 3 : Motifs à l’origine de la dernière reconversion professionnelle 

 *item non suggéré Source : Enquête IPSOS/ AFPA, octobre 2012 

DesreconversionsprofessionnellestrèsdépendantesdumétierexercéinitialementLes changements de métier dépendent beaucoup du domaine professionnel danslequelexercelapersonne.Ilexistedesdomainesprofessionnels4oùleschangementsdemétierssontrares.Il s’agit notamment de domaines professionnels dont l’accès est réglementé, commeceux de la santé ou de la fonction publique5 (tableau 1). C’est également le cas deprofessions très qualifiées généralement accessibles par la voie de la promotioninterne (cadres de la banque et des assurances), demétiers stables d’indépendants(agriculteurs,patronsetcadresd’hôtels,cafésetrestaurant)ouencoredemétiersauxcompétences très spécifiques comme les métiers de bouche (boulangers, bouchers,charcutiers) ou encore d’ouvriers qualifiés du bâtiment ou de l’industrie. Cela nesignifiepaspourautantque,pourcertainsdecesmétiers(notammentceuxrequérantune compétence très spécifique), la mobilité n’est pas importante: les personnespeuvent changer fréquemment d’employeurs mais sans changer de métier, relevantd’unelogiquede«marchéprofessionnel».

4Lesbesoinsd’analysedel’emploietduchômageparmétierontconduitàlacréationdenomenclaturesspécifiques des métiers qui regroupent les différents métiers en «familles professionnelles», elles‐mêmesregroupéesen«domainesprofessionnels».5SimonnetV.etUlrichV.(2009),Lamobilitéentremétiers:30%despersonnesenemploien1998avaientchangédemétieren2003,Premièressynthèses,DARES,n°05.3,janvier.

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Tableau 1 : Les familles professionnelles à faible mobilité 

 

Source : V. Simonnet et V. Ulrich (2009), calculs Dares à partir de l’enquête FQP 2003, Insee. 

Lecture : parmi les médecins et assimilés en 1998, 4 % sont au chômage ou en inactivité et 96 % sont encore en emploi en 2003. Lorsqu'ils sont en emploi aux deux dates, 98 % exercent toujours le même métier. Ils ont occupés  1,3  emploi  en moyenne  entre  1998  et  2003.  7 %  d'entre  eux  ont  changé  au moins  une  fois  de fonction ou de poste sans promotion en 5 ans et 3 % ont eu une promotion. Ils ont passé 40 % de leur temps en emploi en CDI, 7 % en CDD ou en intérim et 53 % à leur compte. 

Champ  : personnes en emploi en 1998 dans  les 20 familles professionnelles où  la proportion de personnes étant restées dans le même métier entre 1998 et 2003 est la plus élevée. France métropolitaine. 

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Aucontraire,danscertainsdomainesprofessionnels,leschangementsdemétierssont fréquents,même s’ils ont généralement lieu au sein dumême domaineprofessionnel.C’estnotammentlecasdesdomainesprofessionnelsdelagestionetdel’administrationdesentreprisesouencoredel’informatiqueoùlesmouvementsentremétiersauseindumêmedomaineprofessionnelsonttrèsfréquents6.

Tableau 2 : Les familles professionnelles à forte mobilité au sein du même domaine professionnelle 

 

Source : V. Simonnet et V. Ulrich (2009), calculs Dares à partir de l’enquête FQP 2003, Insee, 

Champ  : personnes en emploi en 1998 dans  les 20 familles professionnelles où  la proportion de personnes ayant changé de métier dans le même domaine professionnel entre 1998 et 2003 est la plus élevée. France métropolitaine. 

6SimonnetV.etUlrichV.(2009),opcit.

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Enfin,d’autresmétierssontcaractérisésparunefortemobilitéversdesmétiersdansd’autresdomainesprofessionnels. C’est notamment le cas des ingénieurs etcadresdel’industrieouencoredemétiersdel’électricitéetdel’électronique7.

Tableau 3 : Les familles professionnelles ouvrant fréquemment vers d’autres domaines professionnelles 

 Source : Simonnet V. et Ulrich V.  (2009), La mobilité entre métiers : 30 % des personnes en emploi en 1998 avaient changé de métier en 2003, Premières synthèses, DARES, n°05.3, janvier. 

Champ  : personnes en emploi en 1998 dans  les 20 familles professionnelles où  la proportion de personnes ayant changé de domaine professionnel entre 1998 et 2003 est la plus élevée. France métropolitaine. 

7SimonnetV.etUlrichV.(2009),opcit.

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En adoptant une autre grille de lecture, on peut souligner que leschangementsdemétierpeuvents’accompagnerounond’unchangementd’employeur.Danscertainscas,leschangementsdemétiers’opèrentsanschangerd’employeur.Celaconcernenotamment lesmétiersà«marché interne»:personnelsadministratifsdesfonctions publiques, employés et techniciens administratifs des entreprises privées,employésetcadresdelabanqueetdel’assurance,agentsdemaîtrisedel’industrie.Dans beaucoup d’autres cas, les changements demétiers s’accompagnent dechangementsd’employeurs,parfois fréquents: parmi lespersonnesenemploi en1998exerçantunautremétierdansundomainedifférenten2003,prèsde lamoitiéont connu trois employeurs ou plus8. Ces mobilités externes s’observentparticulièrementdanslesmétierspeuqualifiés,oùlesindividusalternentsouventdescontrats courtsavecdespériodesd’inactivitéoude chômage: ouvriersnonqualifiés(industrie, bâtiment, manutention), employés de maison, agents d’entretien, aides àdomicile,vendeursetemployésdel’hôtellerieetdelarestauration.Au total, le bilan est assez contrasté. Pour les mobilités internes (c’est‐à‐dire enconservant le même employeur) et les transitions de l’emploi vers l’emploi (soitenviron9%desemploiset lesdeux tiersdes transitions),onpeutpenserqu’il s’agitplutôt de mobilités choisies et plutôt favorables à la carrière professionnelle desindividus9.Aucontraire,pourlestransitionsvialechômage,untiersdestransitionsaudébutdesannées2000,maislesplusdynamiques,cesontdesmobilitéssubies,parfoisdéfavorables10.

Lesreconversionsprofessionnellessontplusfréquentespourlesjeunesetpourleshommes.

Les jeunes évoluent plus souvent vers un autremétier que leurs aînés: entre1998et2003,31%des20‐29ansontchangédedomaineprofessionnel,contre21%pourles30‐39anset15%pourles40‐51ans(Tableau3).Si les hommes changent plus fréquemment de domaine professionnel que lesfemmes, on observe peu de différences selon le genre s’agissant deschangementsdemétierauseindumêmedomaineprofessionnel.Entre1998et2003 près d’un quart des hommes avait changé de domaine professionnel, contremoins d’un cinquième des femmes. Les changements de métiers au sein du mêmedomaineprofessionnel avaient concerné respectivement8%des femmes et7%deshommessurlamêmepériode.

8SimonnetV.etUlrichV.(2009),opcit.9 Balathier Lantage H. (de), Klein T., (2011), Le travail et l’emploi dans vingt ans, Centre d’analysestratégique(juillet).RapportdugroupedetravailprésidéparOdileQuintin.10Dans70%descas,leschangementsdemétiersaprèsunpassageparPôleemploicorrespondentàdesmétiersdifférentsdeceluiquiétaitrecherchéparlesdemandeursd’emploi.Parailleurs,unquartdecessorties du chômage se traduisent par unemobilité descendante (baisseduniveaudequalificationdel’emploi retrouvé), cf. Prokovas N., Poujouly C. (2009), «Mobilités professionnelles. Un tiers despersonnesquiretrouventunemploichangentdemétieretdequalification»,Repères&Analyses,Etudes,n°3,Pôleemploi,avril.

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Tableau 4 : Situation socioprofessionnelle en 2003 des personnes en emploi en 1998 selon leurs caractéristiques individuelles et leur parcours professionnel 

 Source : V. Simonnet et V. Ulrich (2009), calculs Dares à partir de l’enquête FQP 2003, Insee, 

Lecture  : parmi  les personnes en emploi en 1998, 55 % sont des hommes. Parmi eux, 93 % sont encore en emploi en 2003, dont 69 % dans le même métier, 7 % dans un métier différent mais dans le même domaine professionnel et 24 % dans un domaine différent. 

Champ : personnes en emploi en 1998. France métropolitaine. 

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DISCOURSD’OUVERTUREDEMICHELSAPIN,ministreduTravail,del’emploi,delaformationprofessionnelle

etdudialoguesocial(colloquedu26septembre2013)

MadamelaprésidenteduCOE,chèreMarie‐Claire,Mesdames,messieurs,Je vous remercie tout d’abord pour l’invitation quevousm’avezfaiteàvenirintroduirevotrecolloqueetàpartageravecvousquelquesréflexionssur lesenjeuxdeschangementsdemétier,votresujetdujour.

Ces moments, et les lieux comme le vôtre, sont importants pour poser une analysestructuranteetdelongterme.Certes,l’actualitén’estjamaistrèsloin,etcelledujour–pourêtrepréciscelled’hier‐n’estpasmauvaiseavec«lafortebaisseduchômagequin’estpasencoreuneinversion»…mais,ilfautaussipouvoirs’endéfaireetprendredela hauteur. Ne jamais le faire serait manquer à notre rôle aux uns et aux autres –gouvernants,responsablespatronauxousyndicaux,experts.C’estainsique,voiciquelquesmois,leGouvernementadécidédecréer–j’allaisdirederecréer‐ un instrumentnouveau : leCommissariatgénéralà la stratégieetà laprospective(CGSP).L’initiativeétaitvenuedespartenairessociauxlorsdelaGrandeConférenceSocialedejuillet 2012. Je sais que le Commissaire Jean Pisani‐Ferry a déjà rencontré lespartenaires sociaux pour fixer avec eux les modalités d’un renouveau de laconcertationsurlesperspectiveséconomiquesetsociales.LeCommissariats’estmisautravailetadéjàproduit,àlademandeduPrésidentdelaRépublique, un document d’un ton plus vif que ceux auxquels nous étions habituésjusqu’ici.Cedocumentafournilamatièred’uneréflexionstimulantelorsduséminairegouvernemental du 19 août sur la vision de la France en 2025, un travail qui sepoursuitdanslaconcertation.Nousavonsbesoin,surlesproblèmesdenotreéconomieetdenotresociété,dediagnosticsprécisetacérés.Justement, laquestionquevousposezaujourd’huiparticipedecetteréflexion :«changerdemétier». Jevousremerciedelaposerencestermes–plusintéressantsquelaseulemobilité–quipermettentd’envisagerlaglobalitédusujet.Celadénotedelapertinenceetdel’expertiseduCOE,quin’estplusàdémontrer,etquitrouveradansunearticulationplusétroiteavecleCGSPuneplus‐valueencoreaccrue.NB:Seulleprononcéfaitfoi

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Onpeutprendrelaquestionduchangementdemétierendifférentssens:

Celui de l’évolution professionnelle, de la construction réussie d’une carrièrefaited’opportunitésdifférentesetdebifurcationsenrichissantes;

maischangerdemétiern’estpastoujoursvoulu,c’estaussiuneviolence,celledel’emploidétruit,delareconversioncontrainte.

Jesaisqu’ilestnécessairedepenserentermesdeparcoursetdemobilité,maisilfautbienmesurer le caractère parfois insécurisant de cela, notamment pour les plus basniveauxdequalification.Gare donc aux constructions théoriques, à l’idéal abstrait d’une société de la fluiditésansobstacle.Celaestbienétrangeràlaréalitédemillionsdeviesdetravailleursdontonnepeut ignorer lamatérialité, l’ancragegéographique, l’attachementàsonsavoir‐faire,etc…Dans ces conditions, un enjeu s’impose de manière primordiale, celui de lasécurisation.Pourquoi?Pourconvertir lerisquedumouvementenunechanceetconjurer lavulnérabilitéqu’ilinduit.Permettez‐moi,danscetteenceinted’analyseetderéflexion,avantd’êtreplusconcret,deposerd’aborduneanalysedesociété.L’expérience de la modernité est que « tout va de plus en plus vite » ; à la foisl’accélérationtechniquemaisaussil’augmentationdesrythmesdevie.Or,parlepassé, le changement se faisait dans des structures relativement stables – lecommissariatauplan,dontleCGSPprendlasuite,étaitl'unedecesstructuresstablesquifaisaientnaîtrelechangement.Ilprenaitalorslenomdeprogrès.Lanatureduchangementestaujourd'huifondamentalementdifférente,trèsloindelaprévisibilité. Il est devenu synonyme d'incertitude fondamentale etpotentiellementchaotique.Desortequ’ilestdeplusenplusdifficiledediredequoidemain sera fait. Pour beaucoup, l’impression qui domine est celle d’une penteglissanteorientéeverslebas.Cettepressiondel’accélérations’exprimeparlapeurde manquer (manquer d'emploi, par exemple) et par la contrainte permanented’adaptation(c’estlaflexibilité).S'ilfallaitoseruneimage,jediraisquelamodernitéestdevenueliquide.Riennedoits’opposer à la vitesse de l’économie (pas même l’interdiction de l’ouverture desmagasinslanuit!).Maiscelaadesconséquences:cequiestabandonné,souslacontraintedelasociétédel’accélération‐quivadudirectpermanentàlatélévisionjusqu’àlaproduction«justeàtemps»‐c’estl’idéed’unprojetidentitairedelongterme–individuelcommecollectif–,avecsonautonomie,sesobjectifs,sesvaleurs.Dès lors comment se projeter ? Comment prendre le risque du changement, àcommencerparlechangementdemétier?Noussommesfaceàcettesituation.Elleimposedesréponsesnouvellesentermesdepolitique sociale et d’emploi pour les rendre capables de prendre en chargel’accélération.Jem’explique.

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Làoù laprotectionsocialeet laprotectionde l’emploiétaientstatiques (protectionsocialeattachéeaucontratetaupostedetravail,luttecontreladestructiondel’emploiexistant…),nousdevonsinventerunesécuritédynamique.C’estbiencequeditletermede«sécurisation»:pasun«état»maisunprocessus,unmouvement,uneadaptationcheminfaisant.Qu’est‐cequecelaveutdire?Quelessalariésdoiventsavoirquelapolitiqued’emploiestappeléeàsereconfigurerpourtrouverdesparadesàl’instabilitédel’emploi,duchômage–nonpourfixermaispoursécuriserlemouvement.Carleprixàpayerdel’instabilitéesttropfort:

‐ lamultiplicationdetrimestresnoncotiséspourlaretraite,‐ l’absencedecontinuitédanslesdroitsattachésaucontratdetravail,‐ lapertedegarantiessocialesliéesauchangementd’espaceconventionnelouaumanquedecoordinationdesrégimesdeprotectionsociale,‐ maisaussiladégradationdelasantéquiestlargementcorréléeauxtrajectoiresprécairesetinstables.

Jepourraismultipliercesexemples.L’enjeu,c’estdeprotégerlestransitions.Alors,changerd’emploiseradavantagepositif–nonplusseulementpour lescadresquisontdéjàpourbeaucoupdanscettedynamique,parfoismêmedansunespacedemobilitéinternational–maisaussipourlesplusbasniveauxdequalificationpourqui lamenaceduchangementestressentiede manière très forte, la flexibilité largement subie et l’instabilité, une donnéequotidienne.Dès lors, ilnous faudraêtreparticulièrementattentif aucouplageentre formationetemploi;entrechômageetformation,etaudébutdelavieprofessionnelleentreécoleetentreprise. Partout, nous aurons à imaginer les maillons juridiques, sociaux,économiquesquiconjurerontl’insécuritésociale.Voilàcequ’estla«sécurisation»,unepolitiquemodernedel’emploi.La question qui se pose pour envisager sérieusement la fluidification dumarché dutravail est : comment faire du « parcours » ou des « transitions » la situation deréférence et d’ancrage des protections plutôt que d’attacher chacune de cesprotectionsàunétatstatique?Etcommentrendrelesdroitsconsommablesendehorsdelaréférenceaucadredel’entreprise?Jevoudraisvouslivrermonapproche,commematièreàvotreréflexion.Silaloidesécurisationdel’emploi(ANIdu11janvieretloidu14juin)vised’abordàmaintenir l’emploi là où il est – par les accords demaintien de l’emploi ou parl’activité partielle – elle porte en elle l’ambition de transitions davantagesécurisées, en ouvrant de véritables pistes dans ce sens. Je pense notamment à lacréationd’uncomptepersonneldeformationayantvocationàêtreportableetàsuivrele salarié où qu’il aille. Elle ajoute un conseil en évolution professionnelle pourpermettre au salarié de construire son parcours, indépendamment de la formationprescrite par l’entreprise elle‐même qui réfléchit (légitimement) par rapport à sesbesoins. Et l’on peut lire les nouvelles dispositions liées au PSE comme un moyend’organiserdemanièreplus satisfaisanteetplus sécurisée la transitionversd’autresemploisetd’autrescompétencespourlessalariésdontl’emploiestdétruit.

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Maiscettethématiquedelasécurisationdel’emploietdestransitionsnes’arrêtepasàl’entreprise.Elledoitêtreportéeàl’échelledelafilière.Lareconstructionduconseilnationaldel’industrie l’incarne parfaitement, en incluant un volet emploi – compétences dansl’organisation des filières. C’est désormais dans un dialogue social et stratégiquenouveau entre les différentes composantes de la filière que des transitions vontpouvoirs’organiser,permettantlespassagesd’unemploiàunautre,d’unecompétenceàuneautre,d’unmétieràl’autre.Danscetédifice, lagestionprévisionnelledel’emploietdescompétencesauralerôlemajeur de faire le lien entre les différentes composantes. Et, à ce titre, elle devrachanger de registre, ne plus intervenir seulement au moment des restructurations,maisaucontrairedevenirunvraioutildedialoguesocialsurlagestiondesressourceshumaines, donc de sécurisation autant que de compétitivité, l’un n’allant pas sansl’autrepourmoi.Au‐delàde la filière, laproblématiquede lasécurisations’étendau territoire.Làencore, la sécurisation de l’emploi a ouvert la brèche en associant davantage ledonneurd’ordresetlesous‐traitant,biensouventàl’échelled’unmêmeterritoire.Ici,la GPEC se fait territoriale et il appartient et appartiendra à la politique de l’emploid’identifierlesbassinsquimutentpourfaireporterl’effortsurceux‐ci.Faireporterl’effort,qu’est‐cequecelaveutdirequandonfaitdelatransitionlepointd’ancragede la logiquedesécurisation?Celaveutdiremettreenplacecommenousl’avons fait des plateformes d’adaptation aux mutations économiques pourorganiserendouceur la transitiond’unsecteuràunautreetdoncpermettreàdesgensdechangerdemétier,desereconvertirenévitantpar‐dessustoutlepassageparlacasechômage.Jeprendsunexemple:l’unedecesplateformesconcernelaLGVversBordeaux.C’estun immensechantierquimobilisebeaucoupdesalariés,mais il auraune fin. D’ores et déjà, nous construisons les actions de reconversion pour que cessalariésnesoientpassanssolutionunefoislechantierfini.Derrièrecela,ilyauneidéeforte:sionnepeutcontrerlemouvementdel’économie,on peut le devancer, l’organiser et faire en sorte que demoins enmoins de salariéspassent par la case chômage entre différents emplois. A froid, c’est la GPECd’entreprise,debranche,deterritoire,c’est lebilandecompétences, laVAE, lecongédemobilité. A chaud, ce sont les cellules de reclassement, le contrat de sécurisationprofessionnelle qui sont autant de pièces d’une sécurité sociale professionnelle engestation.Maisonpeutréfléchirencoreau‐delà.L’organisationdesfilièresetdesterritoirespourproduiredesformessécuriséesdetransitionn’épuisentlesujet.Jepourraislepousserplusloinenregardantducôtédesnouvellesformesd’emploi.Ellessontnombreuseset variables, de l’hypothèsedu contrat‐cadre type « contrat d’activité » réparti entreplusieurs employeurs (les groupements d’employeurs, par exemple), jusqu’à«l’employeurdetransition»(coopérativesd’activitéetd’emploietautresincubateurset pépinières) en passant par le portage salarial. Ces formes existent et doiventdésormaisproduireavecnotreaideleseffetsescomptésdesécurisation.

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Enfin, en dernier lieu, lesdroitsuniversels etportables, indispensable bagage detoute transition sécurisée que sont le compte personnel de formation – pierreangulaire de la future réforme de la formation professionnelle, dont la négociationvient de s’engager mardi dernier. Je compte particulièrement sur la formationprofessionnellepourcontribuermassivementàlasécurisationdestransitions,tantenpermettant aux demandeurs d’emplois de revenir dans l’emploi, qu’aux salariésd’évoluer.Autrecompteuniverseletportable : lecomptedepénibilitéquiparachèvera l’édificed’une sécurité dynamique, en attendant pourquoi pas un jour un éventuel comptesocialpersonnel,comptedetouslescomptes...Maislàjeregardeencoreplusloin…Vousme direz que beaucoup de ce que je viens d’évoquer n’est pas opérationnel etrenvoieàl’avenir.Enréalitétoutadéjàcommencé!Etvousêtesbienplacés, iciauCOE,pour lesavoir.Vouspublierezparexempledansquelquesjoursunrapportsurlesemploisnonpourvus,quimontrequel’undesenjeuxde transitions réussies était d’être capable d’identifier territoire par territoire desbesoinsetdesdemandeursd’emploi,etdelesrapprocherparlebiaisdelaformationprofessionnelle.Jepenseégalementà larenégociationde laconventiond’assurancechômagequidébuterad’icilafindel’année.Cetterenégociationdevraitêtrel’occasiond’améliorerle rôle de l’assurance chômage en tant qu’institution du marché du travail dontl’objectif,au‐delàdel’indemnisationchômage,doitêtreégalementlasécurisationdesparcoursetleretouràl’emploi.C’estdanscettelogique,jel’espère,quelespartenairessociaux aborderont cette négociation. Ils en ont déjà pleinement pris conscience eninscrivantles«droitsrechargeables»àleuragendaderéforme.En somme, en économie, on parle souvent de « stabilisateurs automatiques », enl’occurrence, c’estde«dispositifsde transitionsautomatiques»dont il s’agiradeparler,capablesd’agiràtoutmomentetpartout,nonseulementencasdecrise.C’est ainsi que je voulais introduire votre colloque, par cetteapprocheglobaledeschangementsdemétier,doncdestransitions.Globale,car,ils’agitdemobilitéprofessionnelledoncsociale,géographiqueautantquejuridique,c’estàdiredesdéterminationsessentiellesdanslaviedesgens,aujourd’huiencoretropseulsfaceàl’accélérationdutemps.Bontravailtoutaulongdecettejournéetrèsdense.Jevousremercie.

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SYNTHESEDUCOLLOQUE/PREMIERETABLERONDE:Enjeux:quellesreconversionsprofessionnelles

dansuneéconomieenchangement?

DanscettetablerondeaniméeparEtienneLefebvre,chefduserviceéconomiegénéraledesEchos,sontintervenus:

FrancisKRAMARZ,directeurduCentrederechercheenéconomieetstatistique(CREST),professeuràl’Ensaeetàl’EcolePolytechnique

JeanPISANI‐FERRY,commissairegénéralàlastratégieetàlaprospective

StefanoSCARPETTA,directeurdelaDirectiondel'emploi,dutravailetdesaffairessociales,OCDE

PhilippeTRAINAR,directeurdesrisquesdugroupeScor,membreduCercledeséconomistes

 

Francis KRAMARZ indique que la mobilité est restée relativement stable en Francedepuistrenteans.Sonfaibleniveaularendtoutefoissusceptibled’êtreaffectéepardeseffets de composition: les personnes plus jeunes sont plus mobiles, or les jeunesentrentdeplusenplustardsurlemarchédutravail,alorsquel’ontravailledeplusenplusvieux.Uneétudemenéesurlasituationprofessionnelleen2003despersonnesenemploien1998montreque29%despersonnesontchangédemétier.8%sontrestéesdanslemême domaine et 21% travaillent dans un domaine différent. Certains métiers,comme lesmédecinsou lesassistantesmaternelles,sontpeuaffectéspar lamobilité.Lesmétiers à fortemobilité au sein dumêmedomaineprofessionnel concernent lespersonnestravaillantdansdesdomainessuffisammentlargespourprogresserauseinde leur entreprise ou de leur secteur. Il n’existe pas de raison de penser que cesrésultats,unpeuanciens,soienttrèsdifférentsaujourd’hui.L’exempledesEtats‐Unismontrequemobilité et inégalitésvontdepair.Kambourovmetenévidenceque les freinsaux réallocationset reconversionssontmauvaispourlessalariés:mieuxvautquitterrapidementl’entreprisequandl’emploiestmenacé.Stefano SCARPETTA souligne que la France connaît, à l’instar des autres pays del’OCDE, une mobilité professionnelle significative. Cette mobilité joue un rôleimportant d’allocation des travailleurs vers des opportunités de travail plusproductives et plus rémunératrices. Une partie de ces transitions sont néanmoinssubiesetnedébouchentpas forcément surdes situationsmeilleures.EnFrance,unepartiedelamobilités’expliqueégalementparlepassaged’unCDDàl’autre,parfoisenpassantparunepériodedechômage.Lastructurede l’emploiaconnuunepolarisationenFranceetenEurope: lespertesd’emploi dues à la crise se sont concentrées sur les quantiles intermédiaires derémunération. La demande de travail s’est également polarisée: les activités nonrépétitives sont de plus en plus demandées alors que les activités répétitivesrégressent.Uneprojectionà2020faitainsiapparaîtredespertesd’emploienEuropedans les professions intermédiaires, alors que les professions supérieures et lesprofessionsmoinsqualifiéesprogressent.

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Lesreconversionsprofessionnellessefontprincipalementà lasuited’unerupturedecontrat (licenciementéconomiqueoupersonnel, findeCDDoudémission).Parmi lestravailleursvictimesde licenciementqui retrouventun travail sousundélaid’unan,près de 50% en France changent de profession. Certains trouvent après unlicenciementunemploiquiexploitemieuxleurscompétences,maisd’autresfontfaceàunedégradationdeleurstatutprofessionnel.La crise économique a entraînédes changements structurels: beaucoupdes emploisdétruitsneserontpasrecrééslorsdelareprise.Lescompétencesgénériquesprennentuneimportancecroissanteaudétrimentdescompétencesspécifiques.Cesconclusionssont toutefois tirées detypologies conceptuelles et non de données empiriques. LaparticipationdelaFranceàunevasteétudedel’OCDEdevraityremédier.Pourconclure,lesreconversionsprofessionnellesnécessitentd’êtrepréparéestrèsenamont,cequiimpliquedemettrel’accentsurlesystèmedeformationprofessionnelle.LaFranceestl’undespaysquiinvestitlemoinsenlamatière.Parailleurs,laformationprofessionnelle accroît les inégalités au lieu de les réduire: ceux qui ont descompétenceslesplusélevéessontégalementceuxquienbénéficientleplus.Philippe TRAINAR rappelle que l’attente est double vis‐à‐vis de la reconversionprofessionnelle.Elleestcenséeàlafoisrattraperunequalificationqu’onn’apaseulachance d’acquérir étant jeune et donner au marché du travail plus de fluidité pours’adapter aux évolutions de la demande et des processus de production. Mais cettedernièrevisionresteassezutopiqueetporteusededéconvenues.L’expérience de Philippe TRAINAR montre que la demande de reconversionprofessionnelleestfaibledanslespaysoùlemarchédutravailestrelativementfluide,commeenSuisse,auxEtats‐UnisouenAsie.Elleestplusimportantedanslespaysoùlemarchédutravailestplusrigide,commeenFrance,enEspagneouenAllemagne.Lareconversion professionnelle permettrait donc d’améliorer à la marge lefonctionnementdumarchédutravail.Lerésultatdesactionsdereconversions’avèresouventdécevant,endépitdesnombreux instrumentsmisenplacepar lesréformes,sansdouteparméconnaissancedecetteréalité.Les entreprises qui procèdent à des licenciements sont dans l’ensemble peuintéresséespardesactionsdereconversion.Lessalariés tendentainsiàpréférerdespaiements comptants à des actions de reconversion: au‐delà des considérationsfinancièresde court terme, ils ont conscienced’une faible capacité à sélectionner lesnouvelles activités et les nouvelles compétences porteuses. Au contraire, lesentreprises qui recrutent sont très intéressées par les reconversions qui leurpermettentdemobiliserplusrapidementunemain‐d’œuvredisponiblelocalement.La reconversion professionnelle intéresse également les plus qualifiés. La main‐d’œuvredelabanque,fortementqualifiée,connaîtainsiunredéploiementmassifversl’assurance.Philippe TRAINAR conclut que la reconversion professionnelle ne saurait être leremède d’un marché du travail défaillant: elle ne peut apporter ce que seules desréformes structurelles peuvent produire. Elle est en revanche un adjuvant qui peuts’avérer très efficace. Cela implique de lui fixer des objectifs et des ambitionsraisonnables.Elledoits’appliquerauxentreprisesd’aveniretnonàcellesquiperdentpied.Il luifautêtretrèsprochedessalariésetdesentreprisescréatricesd’emploi: lelienaveclesentreprisesquilicencientnepeutêtrequ’ancillaire.Enfin,uneévaluationexpostrigoureuseestnécessaire,enparticulierquandl’argentpublicestmobilisé,avecconcurrencesystématiqueentrelesdifférentsoffreursenreconversion.

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Jean PISANI‐FERRY indique que le Commissariat général à la stratégie et à laprospective effectue régulièrement, en collaboration avec la DARES, des projectionssur les compétences d’avenir («Prospective des métiers et des qualifications»).Certains facteurs sont structurels: le vieillissement de la population induiranécessairement une croissance de la demande en services à la personne. D’autresfacteurs restent largement imprévisibles: concurrence internationale, évolutionstechnologiques,effetsconjoncturels,etc.Il fautdoncéviterquelesystèmeéducatifs’inscrivedansuncadredéterministeetseconcentre sur des débouchés de court terme, au détriment des compétencestransférables.Par ailleurs, la mobilité et les reconversions peuvent se trouver entravées par unestructure par branches professionnelles ancienne et peu vivante: la France compte700branches dont seules 300 sont réellement actives. Un toilettage du système desbranchesconstitueraitunmoyenpeucoûteuxdefaciliterlesreconversions.Lesfilièresconstituentuneébauchederéponse.Enfin, Jean PISANI‐FERRY évoque les travaux de Ricardo Hausmann étudiant le casd’entreprises qui s’installent dans un bassin d’emploi ne possédant pas d’autresentreprises de même profil de production. Deux approches sont envisageables etsubstituables:lamobilitégéographiqueetlamobilitéprofessionnelle.Lapremièreestlimitée en France pour des raisons structurelles. La seconde est donc davantage àfavoriser,sousréservequ’ellesoitsécurisée.StefanoSCARPETTAsoulignequelescompétencesimportentdavantagequelemétierdans le processus d’évolution professionnelle. L’étude récente de l’OCDE sur lescompétences des adultes montre que les soft skills sont aussi importantes que lescompétencesacquisesdanslecadredusystèmeéducatif.FrancisKRAMARZconfirmequ’ilestimportantdepousserrapidementlessalariéshorsdes entreprises qui se portent mal, pour les diriger vers celles qui recrutent. Parailleurs, la formation professionnelle est trop laissée aux mains des entreprises enFrance, alors que les pays scandinaves permettent aux salariés de décider par eux‐mêmes de leur formation. Enfin, Francis KRAMARZ conteste les études sur lapolarisationdestâches:lesentreprisessonttoutàfaitcapablesd’adapterlesmétiersenfonctiondespersonnesquilesoccupent.Un membre de l’assistance observe que les débats se concentrent sur le périmètrefrançais,alorsquebeaucoupdejeunesFrançaisenvisagentdepasserunepartiedeleurcarrièreàl’étranger.BeaucoupserendentparexempleenAsiehorsducadreclassiquedel’expatriationetrecherchentavanttoutdelaliberté,etnondelasécuritéd’emploi.Unmembrede l’assistanceestimepour sapartque ledébat se cristallise trop sur laformation.Au‐delàdescompétencessanctionnéespardesdiplômes,lechangementdemétierdépenddel’étatdesanté,desconditionsdanslesquellesonapudéveloppersescompétences dans sonprécédent poste, de l’organisationdu travail et desmodalitésd’accueildanslesentreprises.Unmembredel’assistancemetenavantlefaitquelessalariésquichangentd’emploiconnaissent souvent une perte importante de rémunération en quittant un emploi à35heurespayées39heuresetenabandonnantleurprimed’ancienneté.Unmembredel’assistanceremarquequelesdébatssetiennentàmodèleéconomiqueconstant,orlatransitionénergétiquedéboucherasurunchangementdeparadigme.

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Philippe TRAINAR convient que la mobilité professionnelle implique plusieursconditions sans lesquelles elle risque de déboucher sur un échec. L’entreprise doitpermettrelelienavecunnouveaumilieusocial.StefanoSCARPETTAconfirmeque lamobilité internationaleesttrès importantepourlesjeunes.Beaucoupd’emploissontégalementliésàlafilièreinternationale.S’agissantdeladeuxièmeremarque, l’étudecitéemontreeneffetquelescompétencesacquisessur le lieude travail sontplus importantesque les qualifications initiales. Il importealorsdepouvoirlesprendreencompte.JeanPISANI‐FERRYestimequelamobilitéinternationaleaétéfortementsous‐estiméeaumoment de l’ouverture de l’Union européenne aux pays d’Europe de l’Est, et quecela a été aussi le cas aumoment du boom espagnol. En sens inverse, beaucoup dejeunes d’Europe du Sud n’attendent pas aujourd’hui que l’emploi vienne à eux etpréfèrent aller le chercher ailleurs. Deuxièmement, le changement de modèleéconomiqueetlatransitionécologiquenesontpasnonplusununiverscertain,commel’amontrélabulledespanneauxphotovoltaïques.Unmembredel’assistanceévoquelavirtualisationdesprocessusdeproduction,qu’onapuqualifierd’«industrie4.0».Ensuite, ilestimeque lescompétencestransversaless’exercent dans un territoire. Enfin, la technologie «verte» entraîne une révolutioninévitable.Francis KRAMARZ estime que l’Etat n’a pas vocation à déterminer ce que lesentreprises doivent faire, mais se doter de règles de gouvernance telles qu’ellespuissent se développer. En l’occurrence, les entreprises se sontmal spécialisées. Demême,lesdysfonctionnementsdumarchédutravailexpliquentquelesjeunespartenttravaillerà l’étranger: ils subissentunediscriminationmassiveetnepeuventpas sedéplacerenFrance.Cetimmobilismestructurelaétéorganisécollectivement.Jean PISANI‐FERRY rappelle que l’Etat exerce des responsabilités en matière deformation,recherche,fiscalitéetinfrastructures,cequiconcourtàlaspécialisationdupaysetausuccèsdesesentreprises.

Lessupportsdeprésentationdeplusieursintervenantssontconsultablessurlesitewww.coe.gouv.fr.

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SYNTHESEDEL’ENQUETECOE‐OPINIONWAY:«Opinionsetattitudesdesemployeursfaceaux

reconversionsprofessionnelles»

Avant-propos

Dans le débat public, les enjeux de la reconversion professionnelle sont le plus souvent évoqués du point de vue du salarié : une reconversion pour quoi faire ? pour travailler dans quel secteur ? dans quelle région ? quels sont les risques ? quelles opportunités au cours d’une carrière ?

Mais un salarié qui s’est engagé dans une démarche de reconversion doit aussi franchir l’étape du recrutement et donc se confronter à un employeur.

Dans le cadre de son colloque « Changer de métier : quels enjeux ? quels risques ? quelles opportunités ? », le Conseil d’orientation pour l’emploi a souhaité consulter les chefs d’entreprise et les DRH sur leurs perceptions à l’égard des salariés qui ont choisi de se reconvertir ou ont été conduits à le faire.

Cette étude, confiée à OpinionWay, a pour objectifs :

d’identifier les grandes représentations et opinions associées à la reconversion à travers l’expérience et le vécu des chefs d’entreprise et des DRH ;

d’évaluer la présence et la fréquence des démarches de reconversion dans l’entreprise ;

de décrire les pratiques des employeurs face à ces démarches ; de mesurer le degré de satisfaction à l’égard des différents outils facilitant la

reconversion. 993 chefs d’entreprise et DRH ayant eu un contact avec des candidats qui se sont reconvertis ou des salariés ayant un projet de reconversion ont été interrogés en ligne du 18 avril au 14 mai 2013. Cet échantillon a été extrait d’un échantillon de 1165 chefs d’entreprise et DRH représentatif des entreprises françaises de 1 salarié et plus, constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de taille et de secteur d’activité.

Cette synthèse présente les principaux résultats de l’enquête.

   

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Leschiffresclés

Lareconversionprofessionnelle:unphénomènerencontréparlamajoritédeschefsd’entreprise/DRH

85%deschefsd’entrepriseet/ouDRHontdéjàrencontrédessituationsdereconversion.

70%ontdéjàreçudescandidatsenreconversionet62%ontdéjàrecrutédespersonnesenreconversion. 30%ontgérédesreconversionsinternes.Pour46%deceschefsd’entreprise/DRH,ilestfréquentquel’entreprisesouhaitedetellesreconversionsetpour43%lareconversioninternefaitpartiedeleurpolitiquedegestiondesfinsdecarrière. 51%ontvudessalariésquitterleurentreprisepoursereconvertir.

Unedémarcheperçueleplussouventcommesubieou«défensive»…

53%desrépondantsestimentque,leplussouvent,lareconversionestsubie.Parailleurs,selonleschefsd’entreprise/DRHayantreçuourecrutédescandidatsenreconversion,parmilesmotifsévoquésparlescandidats:

72% relèvent d’une logique «défensive», notamment retrouver un emploi (49%) ousortird’unsecteursinistré(36%); 65% relèvent de l’amélioration de la qualité de vie et 44% de celle du «statut

professionnel»(perspectivesd’évolution,catégorieprofessionnelle,rémunération,etc.).

Sans surprise, ces proportions s’inversent dans le cas des départs volontaires enreconversion.D’après leschefsd’entreprise/DRHayantdéjàétéconfrontésàcecasde figure, lesmotifsdecesdépartsrelèveraientdans71%descasdel’améliorationdelaqualitédevie,dans61%decelledu«statutprofessionnel»etdansseulement47%descasd’unelogique«défensive».

…maisquibénéficiemalgrétoutd’uneimagepositivechezlesrecruteurs

75% des chefs d’entreprise/DRH qui ont reçu ou recruté des candidats en reconversionconsidèrent que les reconversions constituent davantage un atout qu’un inconvénient dans unprocessusderecrutement.Parmieux:

64%soulignentlamotivationfortedecescandidats, 55%mettentenavantladiversitéqu’ilsapportentauseindel’équipe, 52%insistentsurl’apportqueconstitueleurregardneufsurlemétier.

86% des chefs d’entreprise/DRH qui ont fait confiance à des personnes en reconversion sontsatisfaitsdelaplupartdecesrecrutements.

Defait(parcomparaisonavecdescandidatsdirectementissusdelafilière):

60%estimentquelessalariésenreconversionsontplusmotivés(vs.4%pourlesquelscesontdessalariésmoinsmotivés),

30% qu’ils sont plus àmême de s’adapter aux évolutions dumétier (vs. 12% pourlesquelsilssontmoinsadaptables),

et25%qu’ilssontplusaptesàs’intégrerauseindel’entreprise(vs.5%pourlesquelsilssontmoinsenmesuredebiens’intégrer).

Enfin,77%deschefsd’entrepriseetDRHestimentque lesprojetsdereconversionvolontairesméritentd’êtretentés.

Par ailleurs, leschefsd’entrepriseetDRHsoulignent l’importancede lagenèseduprojetdereconversiondanslesuccèsdecesdémarches:lefaitquelareconversionaitétéchoisie,etnonsubie,optimiserait,seloneux,leschancesdesuccès(82%contre49%).

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Leschiffresclés

De nombreux facteurs interviennent dans le bon déroulement de la démarche etconditionnentsonsuccès

Leschefsd’entreprise/DRHidentifientdenombreuxfreins,…auniveaudescandidats

propresauprofildescandidats:sereconvertiràplusde50ansconstitueuneentrepriseplusrisquéeselon56%desrépondants

propresaudéroulementde ladémarche:sacomplexitéadministrative(évaluéecommel’unedesprincipalesdifficultésdecettedémarchepour40%desrépondants),lemanqued’informationsurlespossibilitésdereconversionetlesoutilsàdisposition(35%)ouencorelemanquedefondsensoutienauxreconversions(34%)

propres à la prise de risque que cela représente: pertes des avantages acquis jusque‐là,précaritéliéeàlapérioded’essai(37%)

…auniveaudesentreprisesAvec,pourcertainschefsd’entreprise/DRH,lesentimentqueletempsd’appropriationdumétierserapluslentetleniveaudecompétenceplusfaiblequepourlesautrescandidats.Les chefs d’entreprise/DRH mobilisent assez fortement les outils existants pourfaciliterlesdifférentstypesdereconversion,maisn’ensontquepeusatisfaits78%deschefsd’entreprise/DRHayantrecrutédespersonnesenreconversionmobilisentdesoutilspour faciliter l’intégrationdans l’entreprisedessalariésenreconversionet leurappropriationdumétier. Leprincipaldispositif utilisé est le tutorat avec40% des chefs d’entreprise/DRHqui lemettentenplace.Viennentensuitelesstages(29%)et le«tuilage»,c’est‐à‐direlefaitquelenouveausalariéestforméparlapersonnequ’ilremplace(23%).

Dans une situation de reconversion externe volontaire,77%des chefs d’entreprise/DRH (dont 20%systématiquement)fournissentunaccompagnement(conseil,entretien,etc.)ausalariéconcerné.74% (dont 16% systématiquement) leur proposent d’utiliser leur DIF et 60% (dont 13%systématiquement)leurcommuniquentunkitd’informationsurlesaidesàlareconversion.

Dans lecasdesreconversions internes individuelles,61% des chefsd’entreprise/DRHconcernésmobilisentunbilandecompétences,54%dututorat,53%unbilanprofessionnelet48%leDIF.

Pourtant, seuls 48% des chefs d’entreprise/DRH se disent satisfaits des outils existants pouraccompagner lesprojetsdereconversion.Leschefsd’entreprisesouhaiteraientunaccompagnementrenforcé des personnes, tout au long du processus de reconversion, davantage d’aidesfinancièrespour les entreprises recrutant des salariés en reconversion et une simplificationdesdémarchesadministrativesetdel’informationdisponible.

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L’imagedelareconversionprofessionnelle

La reconversion professionnelle: un phénomène rencontré par lamajorité des chefsd’entrepriseetDRH

Si lareconversionprofessionnelleestencore loind’êtresystématiquepour lesactifs,elle faitaujourd’huipartieintégrantedelagestiondesressourceshumaines.

85%deschefsd’entreprise/DRHfrançaisontdéjàétéencontactavecdespersonnesencoursde reconversion:70% ont reçudes candidats en reconversion et62% en ontrecruté.Unemoindreproportiondechefsd’entreprise(51%)avudessalariésquittersonentreprisedans une perspective de reconversion et une minorité (30%) a géré des reconversionsinternes. Pourleschefsd'entrepriseetDRHdegrandesentreprises(250salariésetplus),cesdifférentesconfigurations sontnettementplus répandues.Autourde90%d’entreeuxontdéjàvécucessituationsetautourde30%lesviventfréquemment.

Unedémarchequibénéficied’uneimagepositive

Leschefsd’entreprise/DRHontunebonneimagedelareconversion.Ainsi,75%deschefsd’entreprise/DRH ayant reçu en entretien ou recruté des candidats en reconversionprofessionnelle, estiment qu’être en reconversion constitue un atout. Les chefsd'entreprise/DRH des entreprises de 250 salariés et plus sont les plus convaincus, 82%d’entreeuxdéclarantqu’ils’agitd’unatout.C’estauseindusecteurindustrielquel’ontrouveleplusderéticences.Prèsd’untiersdeschefs d’entreprise de ce secteur envisage la reconversion plutôt comme un frein aurecrutement(31%).

Pourchacunedessituationssuivantes,mercidenousindiquersivouslesavezdéjàvécues:

% Oui

30%

51%

62%

70%

Oui, fréquemment Non, jamais Oui, parfois

15%

12%

7%

6%

55%

50%

44%

24%

30%

38%

49%

70%

27

75%

24%

1%

Au cours du processus de recrutement, considérez-vous généralement une reconversion plutôt comme un frein ou comme un atout ?

47%53%

…bienqu’encoreenvisagéeleplussouventcomme«enréaction»àunenvironnementenmouvement

La reconversion doit notamment s’analyser en fonction des aspirations des individus.L’unedesquestionsessentiellesestdesavoirsicettesituationestchoisieousubie.

Leschefsd’entrepriseetDRHpensentquelareconversionestplussouventsubie(53%)quevolontaire.

C’est une opinion particulièrement présente parmi les chefs d'entreprise/DRH desentreprisesdetaillemoyenne(62%)maisaussi,dansunemoindremesure,parmi leschefsd’entreprise/DRHdusecteurindustriel(57%).

Toutefoiscettevisionn’estpasunanime.Prèsdelamoitiédeschefsd’entreprise/DRHestime,à l’inverse,que la reconversionestgénéralement le fruitd’unchoixprofessionnelvolontaire(47%). Laréponsedeschefsd’entreprise/DRHayant reçuourecrutédescandidatsenreconversionillustreladiversitédesmotifsdereconversion.Pourlamajoritéd’entreeux,lesreconversionssontencore leplussouvent«défensives»,voiresubies. Elles relèveraient leplussouventd’unchoixrendunécessaireparlasituationdusalarié.Interrogéssur lesraisonsavancéespar lescandidatspourexpliquer leurreconversion,72%deschefsd'entreprise/DRHévoquent desmotifs relevant de lanécessitéoude logiquesdéfensives: pour 49% d’entre eux, la reconversion relève avant tout de la nécessité deretrouverunemploi; pour 36%, il s’agit desortird’unsecteur/d’unmétier fragileoupour11%des’assurerunemeilleuresécuritédel’emploi.

Plutôt comme un atout NSP

Plutôt comme un frein

De manière générale, avez-vous le sentiment que les reconversions sont le plus souvent … ?

Le fruit d’un choix professionnel volontaire

Subies

28

Les chefs d’entreprise/DRH font part, en second lieu, de motifs liés à la volonté descandidatsd’améliorer:

o leurqualitédevie(65%):35%estimentquel’undesprincipauxmotifsestlarecherchedeplusd’épanouissementprofessionnel,18%larecherched’unéquilibrevieprofessionnelle–viepersonnelleplusharmonieux,17%larecherched’unemploiplusprochedesondomicile,15%larecherchedemeilleuresconditionsdetravail;

o leurstatutprofessionnel(44%):21%estimentquelafinalitérecherchéeestd’élargirsesperspectivesd’évolution,16%dechangerdecatégorieprofessionnelle,15%d’accéderàunerémunérationplusélevée.

Pour leschefsd’entreprise/DRHdéclarantque lesreconversionssontgénéralementchoisies,lesmotivationsdessalariésenreconversionseraientleplussouventliéesàl’améliorationdelaqualité de vie avant tout (76%), devant celles relatives à la pure nécessité (retrouver unemploi, sortird’un secteuroumétier fragilenotamment,motivationsévoquéespar57%deschefsd’entreprise/DRH). Leschefsd'entreprise/DRHdesentreprisesde250salariésetplusévoquentplussouvent lapossibilité,miseenavantparlescandidats,d’améliorerleurstatut(68%,voire71%pourlesentreprisesde1000salariésetplus,contre44%pourl’ensembledesrépondants).Ilsévoquentensuitelanécessitéderetrouverunemploi/sortird’unsecteurfragile/s’assurerunemeilleuresécurité de l’emploi (67%, contre 72% pour l’ensemble des répondants) devançantl’améliorationdelaqualitédevie,quivientausecondplan(57%,contre65%pourl’ensembledes répondants). Cette hiérarchie sensiblement différente de celle de l’ensemble des chefsd’entreprise/DRH tient sans doute à la capacité des ETI et grandes entreprises à offrir denombreusesperspectivesauxyeuxdescandidatspotentiels,entermesd’améliorationdestatutcommed’opportunitésdecarrière.

49%

36%

35%

21%

18%

17%

16%

15%

15%

11%

Parmi les motifs de reconversion évoqués par les candidats dans le cadre du processus de recrutement, quels sont les plus récurrents ? Trois réponses possibles – Total supérieur à 100%

% Nécessité

72%

% Qualité de vie

65%

% Statut professionnel

44%

29

Selon les chefs d’entreprise/DRH, le fait que l’individu a choisi de se reconvertiroptimise les chances de succès, les reconversions subies semblant plus difficiles àréussir

Lefaitqu’unereconversionprofessionnellesoitvolontaireamèneleschefsd’entreprise/DRHàjugerqu’ellemérited’être tentéepour77%d’entreeux. 13%des répondants jugentun telprojettroprisquédansl’environnementactuelet10%quellequesoitlapériode.Les chefs d'entreprise/DRHdu secteur des services(82%),mais aussi les chefs d’entreprisedes entreprisesdemoinsde20 salariés (78%, contre71%desentreprisesde20 salariés etplus)sontceuxquiaccueillentdemanièrelapluspositivecesprojetsvolontaires.

Defait, lesprojetsdereconversionsportéspar lessalariéssemblent leplussouventêtredessuccès. 82% des chefs d’entreprise/DRH ayant vu un/des salarié(s) quitter leur entreprisedans une perspective de reconversion estiment que les reconversions souhaitées ont étéréussies.Les chefs d’entreprise/DRH des entreprises de 250 salariés et plus soulignent davantageencorecessuccès(90%).Làencore,leschefsd’entreprise/DRHdusecteurindustrielsontlesmoinspositifsquantauxsuccèsdecesreconversions(77%).

Lesreconversionsquiinterviennentenréactionàunlicenciementsontjugées,quantàelles,nettementplus fragiles.49%des chefs d’entreprise/DRHdéclarent que ces reconversionsontétédessuccès,48%deséchecs.

% Risqué

23% 77%

13%10%

Pour vous, une reconversion professionnelle volontaire c’est :

Un projet qui mérite d’être tenté

Un projet trop risqué dans l’environnement actuel pour être

tenté

Un projet trop risqué en général pour être tenté

% Mérite d’être tenté

77%

30

Pourêtreunsuccès,unprojetdereconversiondoitintégrerdesimpératifsquitiennentà la foisaux caractéristiquesobjectivesde lapersonne (sonâgeparexemple) età lasoliditéduprojet.

Prèsdesdeuxtiersdeschefsd'entreprise/DRHestimentque,pourêtretenté,unprojetdereconversion doit absolument être solide (63%). De fait, rares sont les chefsd'entreprise/DRH qui inciteraient systématiquement, sans condition, leurs proches àentamerunprojetdereconversion(9%).

Au‐delàdelasoliditéduprojet,29%estimentqu’ilsconseilleraientàleursprochesdemeneràbien un projet de reconversion uniquement s’ils rencontrent des difficultés dans leur posteactuelet14%uniquementsiceux‐cinesontpasdes«seniors».

Defait,pourlamajoritédeschefsd’entreprise/DRH,engagerunereconversionlorsquel’onest senior estplus risqué (56%). Les jeunes constituent en revanche le profil pour lequelengageruntelprojetestconsidérécommelemoinsrisqué(54%).Ainsi,lesuccèsd’unereconversionestmoinslefaitdel’expérienceacquise,quifavoriseraitlesseniors, que celui de la jeunesse qui laisse sans doute davantage de temps pourl’accomplissement du projet d’une part, mais remet aussimoins en cause, d’autre part, dessituationsacquises.Aufinal,pour leschefsd’entreprise/DRH, lesseniorssemblentavoirdavantageàperdrequelesjeunes(enniveaudesalairenotamment).Maiscecisous‐entendégalementquel’expérienceacquiseet laspécialisationquiendécoulesont insuffisammententenduescommedesatouts,descompétencestransférables.

Sexe et catégories socioprofessionnelles sont, en revanche, nettement moinsdiscriminants.Au‐delàdel’âgedespersonnesenreconversion,demultiplesfreinssoulignésparleschefsd’entreprise/DRHconcernent lesprojetsdereconversion.Ces freinssontdivers,sansquesedégageunevéritablehiérarchie:celaillustrelefaitquechaquereconversionestspécifique,portesespropresdifficultésetexigeuneanalysequicroiseàlafoisleprojet, l’individu,maisaussilescapacitésdel’entrepriseàyrépondre.

31

Lesquatrefreinslespluscitéssont:

o lacomplexitédesdémarchesadministratives(40%),

Pour les chefs d’entreprise/DRH, la reconversion est perçue comme une démarche tropsouvent solitaire, insuffisamment accompagnée. Selon eux, le candidat à la reconversion estavanttoutechosefreinéparlesformalitésadministratives.Cettevisionest,entendance,pluspartagéeparleschefsd’entreprise/DRHdesentreprisesdemoinsde20salariés(40%,contre34%pourleschefsd’entreprise/DRHdesentreprisesde250salariésetplus).Cesderniersontsansdouteeux‐mêmesunevisionassezimprécisedesdémarchesàentreprendre,quecesoitpour leurs salariés, dans le cas d’une demande interne, ou pour les porteurs de projets dereconversions’ilssontappelésàenrecevoir.

o lerisquedeperdredesavantagesacquis/unesituationsolide(ancienneté/congéspayés/périoded’essai,37%),

Leschefsd’entreprise/DRHdusecteurindustrielsontlesplussensiblesàcettepréoccupation(41%).Ils’agitlà,pourlesindividus,d’unenjeuclétantlesconséquencessontimportantessurlessituationséconomiquesetpersonnelles.Cettequestionestbienentendueaussidépendantedes conditions qui conduisent à la reconversion. Selon qu’elle est choisie ou non,l’appréhensiondurisque/desconséquencesparlescandidatsàlareconversionestsansdoutetrèsdifférente.

Quelles sont selon vous les principales difficultés ou freins pour une personne qui souhaite se reconvertir ? Trois réponses possibles – Total supérieur à 100%

40%

37%

35%

34%

31%

26%

19%

18%

1%

1%

La complexité des démarchesadministratives (...)

Le fait de perdre ses droits acquisdans le cadre d'un précédent contrat…

Le manque d'informations sur lespossibilités de reconversion et les…

Le manque de fonds pour suivre desformations

La difficulté à apprendre le nouveaumétier

Les obstacles liés à la mobilitégéographique

Le manque de disponibilité pourconstruire son projet de reconversion

L'intégration à une nouvelleentreprise/équipe de travail

Autres (manque de motivation, peur,difficulté d'orientation)

Ne se prononce pas

Taille de l’entreprise

20 à 249- de 20 250 et + Commerce Services Transport

Industrie

Secteur d’activité

32

o lemanqued’informationssurlespossibilitésdereconversionetlesoutils(35%),

Enamontdelacomplexitédesdémarches,intervientladisponibilitédel’information.C’estuneproblématiquedavantage soulignéepar les chefsd’entreprise/DRHdusecteurducommerce(40%).Elleestenrevanchemoinsprésentepourleschefsd’entreprise/DRHdesentreprisesde20à249salariés(23%).

o etenfinlemanquedefondspourfinancerlesformations(34%).

Ce frein estmoinsévoquépar les chefsd’entreprise/DRHdesentreprisesde250 salariés etplus (21%). Ces entreprises, ayant généralement un service ou une personne dédié à laformation,connaissentmieuxlesdifférentsdispositifsenmesuredefinancercesformations.Cesquatreprincipauxfreinstiennentglobalement:

o aucontextedanslequellareconversiondoitseréaliser,contextefaitàlafoisdesconditionsrèglementaires,deladisponibilitédel’information,desmoyenspouraccompagnerlespersonnesdansleurreconversion,

o maisaussiauxconséquencesquecettereconversionpourraitavoirsurlescarrièresdesindividus.

Au final,pour ces chefsd’entreprise/DRH, lesdifficultésproviennent avant toutd’unenvironnementencoreinsuffisammentpropiceàsoutenirlesprojetsdereconversion.On remarquera cependant que la hiérarchie varie sensiblement selon la taille desentreprises.Les chefs d’entreprise/DRH des entreprises de 20 à 249 salariés se distinguent enmettantprincipalementenvaleurlaquestiondesdroitsacquistelsquel’anciennetéoulescongéspayés(40%) ou la difficulté à apprendre un nouveau métier (37%), illustrant le fait que lesentreprises de taille moyenne ont sans doute davantage d’appréhensions vis‐à‐vis del’intégration des personnes en reconversion: le changement de métier sera‐t‐il vécupositivement?lespersonnesenreconversionvont‐ellesparveniràs’approprierleurnouveaumétier?Pour les chefs d’entreprise/DRH des entreprises de 250 salariés et plus, c’est en revanchedavantage la question de la mobilité géographique qui contraint et freine les souhaits dereconversion(40%),ainsiquel’accèsàl’information(35%).

33

Lareconversiondansunprocessusderecrutement

Etreenreconversiondansunprocessusderecrutement:unesituationvalorisante…

La reconversion est envisagée positivement par les chefs d’entreprise et DRH dans le cadred’unprocessusderecrutement.Cetteopinionpositiveestalimentéeparlesentimentquelespersonnesenreconversion:

o sontplusmotivées(64%),o apportent:

o deladiversitéauseindel’équipedetravail(55%),o ainsiqu’unnouveauregardsurlemétier(52%).

Un atout «innovation» que les chefs d’entreprise/DRH du secteur des services et desentreprises de 250 salariés et plus mettent tout particulièrement en avant (56% des chefsd’entreprise/DRHdesentreprisesdusecteurdesserviceset65%deschefsd’entreprise/DRHdesentreprisesde250salariésetplus)Ilssontmoinsd’untiers,enrevanche,àconsidérerqu’unplusgranddynamismecaractériseparticulièrementlescandidatsenreconversion(32%).

Quant aux chefs d'entreprise/DRH qui, dans un processus de recrutement, envisagent lareconversioncommeunfrein(24%),c’estavanttoutenraisondutempssupplémentairenécessairedontcessalariésontbesoinpours’approprierleposte:uneconceptionpartagéeparplusdesdeux tiersd’entre eux (67% etmême 77%dans l’industrie, secteur en quêted’opérationnalitéavanttout).Acelas’ajoute,pourunegrandepartied’entreeux,lefaitqueleurniveaudecompétencesestplus faible (47%).Enfinplusd’untiers craintque lecandidat fassepreuved’instabilitéprofessionnelle(34%).

Lespersonnesenreconversion:desprofilsplussouplesetmotivésquidonnentleplussouventsatisfactionLes chefs d'entreprise/DRH ayant recruté des personnes en reconversion s’en montrentsatisfaits.Pour86%d’entreeux,cesrecrutementsontétéunsuccès.

Un constat particulièrement présent parmi les chefs d'entreprise et DRH de grandesentreprises(91%desatisfaits).

Pourlespersonnesquevousavezrecrutéesaprèsunereconversion,diriez‐vousquecelaaétéunsuccès?

12%

74%

12% 2% 0%

Oui, systématiquement Oui, pour la plupartd'entre elles

Non, il y a eu denombreux échecs

Non, jamais Ne se prononce pas

% Positive 86%

% Négative 14%

34

60%deschefsd'entreprise/DRHayantrecrutédescandidatsenreconversionconsidèrent queleurmotivationest supérieure à celledes autres salariés. 30%pensentqu’ils ontuneplusgrande capacité d’adaptation aux évolutions dumétier (contre 12% qui pensent qu’ilss’adaptentmoinsbien),et25%estimentqu’ilss’intègrentmieuxdansl’entreprise(contre5%quiestimentqu’ilss’intègrentmoinsbien).Les chefs d'entreprise/DRH dans le domaine des services se montrent plus convaincusencoredelamotivation,descapacitésd’adaptationetd’intégrationsupérieuresdecessalariés(respectivement67%,36%et33%).

…dumoinsquandl’orientationaétéefficace

A l’origine des échecs de recrutement de personnes en reconversion, les chefsd’entreprise/DRHconcernésconstatentprincipalementdesproblèmesd’orientation(55%).Pour 52% des chefs d’entreprise/DRH ayant essentiellement observé des échecs dans cesrecrutements,ilpeuts’agirégalementd’uneincapacitéàsemettreàniveau.Cette problématique demise à niveau semble toucher davantage les recrutements dans lesgrandesetmoyennesentreprises(respectivement62%et70%).

Unemobilisation importantede lapartdes entreprisespour favoriser l’insertiondespersonnesenreconversion

Pouraccompagnercesnouveauxsalariés,78%deschefsd'entreprise/DRHayantrecrutédespersonnesenreconversionmobilisentdesoutils.

Parmilesoutilsmobilisésletutoratconstituel’outilleplusplébiscité(40%).Lesstagessontpourleurpartutilisésparprèsde30%deschefsd'entreprise/DRHconcernés(29%).Quantau«tuilage»,ilestmisenplaceparmoinsd’unquartdesentreprises(23%).De manière assez attendue, les grandes entreprises sont nettement plus nombreuses àmettre en place des outils d’accompagnement avec95% d’entre elles qui proposent tutorat(53%),«tuilage»(41%),stages(39%)et/oujournéesd’intégration(38%).

35

37%

33%

31%

28%

26%

21%

20%

20%

17%

Sortir d'un secteur ' sinistré ' / d'un métier' voués à disparaître '

S'épanouir davantage professionnellement

Pouvoir accéder à une rémunérationplus élevée

Augmenter ses perspectives d'évolution

Equilibrer davantage vie professionnelleet vie privée

Retrouver un emploi plus proche de sondomicile

Avoir de meilleures conditions de travail

Changer de statut professionnel

S'assurer une meilleure sécurité del'emploi

Lesdépartsenreconversion

Lesdépartsvolontairesenreconversion:desprojetsmotivésparl’envied’améliorersaqualitédevie

Unpeuplusde50%deschefsd’entreprise/DRH interrogésontvudessalariésquitter leurentreprisedansuneperspectivedereconversion(51%).Cette situation touche davantage les chefs d'entreprise/DRHdes entreprises demoyenne etgrande taille: rares sont ceux qui n’ont jamais vécu cette situation (respectivement 21% et6%).

Pourceschefsd'entreprise/DRH, lesmotivationsdecessalariéssontmultiplesetdiverses.Alors que les chefs d’entreprise et DRH déclarent que les motivations des candidats aurecrutement en reconversion relèvent souvent d’une logique «défensive», voire de lacontrainte,lesprincipauxmotifsicisontdavantageliésaudésird’améliorerleurqualitédevie(71%),notammentviaunmétierpermettantdes’épanouirdavantageprofessionnellement(33%) ou demieux équilibrer vie professionnelle et vie personnelle (26%).Améliorer sonstatutprofessionnel (61%), via une rémunération plus élevée (31%) ou l’augmentation desesperspectivesd’évolution (28%), constitueégalementunemotivation fortement répandued’aprèsleschefsd'entreprise/DRHinterrogés.Pour 37% des chefs d’entreprise/DRH, la nécessité de sortir d’un métier «voué àdisparaître»resteaussiunmotifimportant.

% Nécessité

47%

% Qualité de vie

71%

% Statut professionnel

61%

Selon vous quels sont les principaux motifs des salariés choisissant de quitter leur entreprise pour engager une reconversion ? Trois réponses possibles – Total supérieur à 100%

36

L’accompagnement des projets de reconversion, une pratique quasi généraliséemaisquirevêtdesformestrèsdiverses

Prèsde80%deschefsd'entreprise/DRHinterrogésdéclarentrencontrerlessalariésetleurprodiguerdesconseils (77%)etprèsdes troisquarts leurproposentd’utiliser leurDIFpourseformeràcenouveaumétier(74%).De lamêmemanière,60%des chefsd'entreprise/DRH ont formalisé cesdémarches encréantunkitd’informationsurlesdifférentesaidesàlareconversionqu’ilsdiffusentàleurssalariés.L’outplacement,enrevanche,estmoinsutilisé(44%).L’ensembledecesoutilsetpratiquesestplusutilisédanslesentreprisesde20à249salariés(±10points)etplusencore,danslesentreprisesde250salariésetplus(+16à+36points).

Si ces pratiques semblent être assez répandues, elles ne sont pas encore véritablementinstitutionnalisées.Moinsde20%deschefsd'entreprise/DRHinterrogésutilisentchacundecesoutilssystématiquement.

Lesreconversionssuiteàunlicenciement:unedémarchepouvantêtreàl’initiativedessalariésetdeschefsd’entreprise/DRH

Ledésirdereconversionapparaitrelativementfortparmilessalariéslicenciés.59%deschefsd'entreprise/DRHinterrogésestimentqu’ilarrivequedessalariés licenciésémettent lesouhaitdesereconvertiret32%quecelaarrivetrèsfréquemmentoudetempsentemps.Ils’agitd’unedémarchenettementpluscourantedanslesentreprisesdetaillemoyenne(44%estimentquecelaarrivefréquemment)etdegrandetaille(67%),ainsiquedanslessecteursducommerce(36%).

La reconversion est également souvent proposée par les entreprises à l’occasion d’unlicenciement.43%deschefsd'entreprise/DRHinterrogésincitentfréquemmentlessalariéslicenciésàsereconvertir.Seuls36%nelefontjamais.Là aussi, il s’agit d’une pratique nettement plus courante dans les grandes entreprises avec69% des chefs d'entreprise/DRH qui encouragent fréquemment leurs salariés licenciés à sereconvertir.

…maisrelativementmoinsaccompagnée…

Auxsalariéslicenciésdésireuxdesereconvertir,80%deschefsd'entreprise/DRHproposentavanttoutdes’adresseràPôleemploi.61%proposentunbilandecompétences,59%uneaction de formation même si là encore, la démarche est loin d’être systématique(respectivement 17% et 15% proposent systématiquement de réaliser un bilan decompétencesoudebénéficierd’uneactiondeformation).

…etavecdessuccèsmoins fréquents,commenous l’avonsdéjàvu:49%desuccèsencasdelicenciement,contre82%lorsdereconversionsvolontaires.

37

33%

35%

32%

Lesreconversionseninterne

Lesreconversionsinternes:desprojetsfréquentsengrandeentreprise…

Gérerouorganiserdesreconversionsinternes(individuellesoucollectives)estunesituationmoinsfréquentepourleschefsd’entreprisequederecruterdescandidatsenreconversionou de voir partir des salariés dans un but de reconversion. Seuls 30% des chefsd'entreprise/DRHl’ontdéjàfait.Maislàencore,ils’agitdesituationsplusprésentesdanslesmoyennesentreprises(55%)etsurtoutdans lesgrandesentreprises,avec89%deschefsd’entreprise/DRHquiontdéjàvécucettesituation,dont32%quidéclarentlavivrefréquemment.

…portésaussibienparlessalariésquelesentreprises.

L’initiativedesreconversionsinternessembleaussibienprovenirdessalariésquedeschefsd'entreprise/DRH. Près de 50% des chefs d'entreprise/DRH estiment qu’il arrivefréquemment que leurs salariés souhaitent changer de métier au sein de l’entreprise(46%).Et ils sont aussinombreuxàdéclarersouhaiter fréquemment une telleévolutioninterne pour un ouplusieurs de leurs salariés (46%). Ces souhaits de reconversion internesont plus présents dans les entreprises de 250 salariés et plus, tant de la part dessalariésquede l’entreprise,cequis’expliquecertainementpardespossibilitésdemobilitéinterneplusimportantes.Seul un tiers des chefs d'entreprise/DRH estime que les salariés obtiennent le plus souventleurchangementdemétier.

Danslesentreprisesdemoyenneetgrandetaille,offrantpardéfinitionplusdeperspectivesetoù les difficultés pratiques sont plus aisément surmontables, près de 50% des chefsd'entreprise/DRH estiment que les projets de reconversion émanant de leurs salariés seconcrétisentsouvent(respectivement46%et45%).

Le plus souvent, ces salariés obtiennent-ils leur changement de métier ?

Oui

Non, car leurs projets ne sont pas réalistes

Non, en raison de difficultés pratiques

% Non

67%

38

La reconversion des salariés, envisagée par l’entreprise pour répondre à desproblématiques aussi bien organisationnelles que de recrutement ou de gestion descarrières

Les raisons motivant les entreprises à envisager la reconversion interne de salariés sontmultiples. Il peut s’agir de réagiràune réorganisation (53%) comme de répondre à desproblématiquesderecrutement(46%)oudegestiondescarrières(évolutiondestalentsde l’entreprise ou encore gestion des âges) (44%). 43% des chefs d’entreprise/DRHinterrogés,etcequellequesoitlatailledel’entreprise,ontintégrélareconversioninterneàleurpolitiquedegestiondesfinsdecarrière.

…qu’ilss’efforcentd’accompagneravecdesoutilsd’orientationetdututorat

Lesmobilités internes souhaitéespar l’entreprise sont le plus souvent individuelles (63%).Pour faire face à ce type de reconversions internes, l’outil le plus plébiscité est lebilandecompétences (61%deschefsd’entreprise/DRH interrogés l’utilisent).Letutorat et lebilanprofessionnelsontégalementlargementutilisésavec54et53%deschefsd’entreprise/DRHquifontappelàcesdispositifs.Demanièreassezattendue,lesentreprisesdeplusde250salariésmettentenœuvredavantaged’outils.Ellessontbienplusnombreuses,notamment,à faireappelauDIF(68%,contre47%des entreprises demoins de 20 salariés ou de 20 à 249 salariés), au bilan de compétences(73%,contre61%et50%)ouautuilage(56%,contre41%et45%).

39

5%

43% 44%8%

Oui, tout à fait Oui, plutôt Non, pas vraiment Non, pas du tout

Lesoutilsdereconversion

Desoutilspeuconvaincants…

Les chefs d’entreprise/DRH sont partagés vis‐à‐vis des outils de reconversion (bilan decompétence,bilanprofessionnel,CIF,DIF,tutorat…).52%d’entreeuxestimentqu’ilsnesontpasvraiment(44%)voirepasdutout(8%)facilitantsetadaptés.Cesontprincipalementlespetitesentreprisesquin’ytrouventpasleurcompte:53%d’entreellesestimentquecesoutilsnesontpasadaptés,contre29%desentreprisesde250salariésetplus.

…quidevraientêtreplussimplesetpluspersonnalisés

Les principales améliorations que les chefs d’entreprise/DRH souhaiteraient voir apportéestouchent à l’accompagnement des personnes (29%) qui, selon eux, sont trop souventlivréesàelles‐mêmes,dansundédaled’informationsqu’ilssouhaiteraientvoirregroupéesetsimplifiées(19%).

Plusglobalement, les chefsd’entreprise/DRHappellentde leursvœuxunmouvementfortdecommunicationetd’incitationdelapartdel’Etat

Ils sont en attente demesures porteuses et incitatives de la part des pouvoirs publics:meilleure prise en charge des frais de formation, des heures de tutorat ou incitations àl’embauchedepersonnesenreconversion(25%).

Il existe, selon eux, une véritable opportunité àdavantagedévelopper lesdémarchesdereconversion,àlesvaloriserpourfaireévoluerlesmentalités(viadesjournéesconsacréesàl’information,desretoursd’expériences,etc.)(19%).

% Oui 48% % Non 52%

40

SYNTHESEDUCOLLOQUE/DEUXIEMETABLERONDE:Perceptions:quelsregardslessalariésetlesemployeursportent‐ilssurlesreconversions

professionnelles? 

Dans cette table ronde animée parDavid Abiker, journaliste à Europe 1, sontintervenus:

YvesBAROU,présidentdel’AFPA

JulienGOARANT,directeurd’Etudes,InstitutOpinionWay

CatherineNEGRONI,sociologue,maîtredeconférencesàl'universitédeLille‐3

JeanPRALONG,psychologue,titulairedelachaire«NouvellesCarrières»àRouenBusinessSchool

Jean‐ChristopheSCIBERRAS,présidentdel’ANDRH

Julien GOARANT présente les résultats de l’enquête confiée à OpinionWay par leConseild’orientationpourl’emploisurlethème«Opinionsetattitudesdesemployeursfaceauxreconversionsprofessionnelles».Elleaportésurunéchantillonde1065chefsd’entrepriseetDRHconstituéselonlaméthodedesquotas.85%deschefsd’entrepriseinterrogésdéclarentavoirreçuourecrutédessalariésenreconversion, avoir vudes salariésquitter leur entreprisedans cetteperspective, ouavoirgéréouorganisédesreconversionsinternes.75%estimentqu’unereconversionestunatoutdansunprocessusderecrutement;77%qu’unereconversionvolontaireest un projet méritant d’être tenté. 53% ont néanmoins l’impression qu’unereconversionestleplussouventsubie.Troisobjectifssontnotammentidentifiésdansunereconversion:retrouverunemploi,améliorersaqualitédevieourevalorisersonstatutprofessionnel.75% des chefs d’entreprise ont une bonne opinion de la reconversion: ils estimentque les salariés en reconversion sont plusmotivés, apportent de la diversité et unenouvelle vision dumétier. Ceux qui ont une vision plus négative craignent un délaiaccrupours’intégrer,unniveauplusfaibleouunecertaineinstabilitéprofessionnelle.En pratique, 86% estiment que le recrutement de personnes en reconversion dansleurentrepriseaétéunsuccès.Lesmotifsdesdépartsenreconversionévoquéssontlasortied’unmétierfragilemaisaussiuneenvied’améliorationdesaqualitédevie.Lareconversionestdécriteà82%commeunsuccèsdanslecasd’undépartvolontaire.Letauxderéussiteestplusfaibleaprèsunlicenciement.43%déclarentquelareconversionfaitpartiedeleurpolitiquede gestion de carrière. 41% souhaitent ainsi organiser de temps en temps desreconversions internes. 40% déclarent que les salariés expriment eux‐mêmes detempsentempslesouhaitdesereconvertir.

41

Jean‐ChristopheSCIBERRASestimequecesrésultatssontpeusurprenants. Ilprécisenéanmoinsquelesdépartsvolontairessefontenréalitésouventdansunelogiquedetransitionverslaretraite.Au‐delà,laquestiondelareconversionrestedifficiledansunmodèlefrançaismarquéparl’idéaldel’emploiàvie.Lemarchédel’emploifrançaissecaractériseinversementparunaccèstardifdesjeunesauCDI,unchômageélevéetuneduréedechômagelongue.JeanPRALONGobservequelesondageconfirmel’idéegénéraleselonlaquellechacundevra se reconvertir un jour et selon laquelle la reconversion est positive. La réalitéconcrète est toutefois différente. Les salariés déclarent bien être personnellementfavorablesàlareconversionetavoirrencontrédesopportunitésdelefaire,maisilsnesontpaspassés à l’acte; ceuxqui l’ont fait y ont été contraints. Ceparadoxemet enévidence les nombreux freins à la reconversion, souvent vécue comme undéclassement: le parcours normatif consiste à entrer à 25 ans dans une entreprisedanslaquelleonrestetrèslongtempsetdontongravitprogressivementleséchelons.Catherine NEGRONI confirme que la reconversion professionnelle est coûteuse etdifficile. Ses recherches menées dans les années 2000 auprès de personnes enreconversionvolontaireluiontpermisdedécomposerleprocessusencinqétapes: leconstatqu’onestfaitpourunautremétierqueceluiqu’onexerce; ledésengagementvis‐à‐visdesontravail; lalatence:lesalariésedemandes’ilentameraounonlareconversion; la bifurcation: la prise de décision est actée, souvent suite à des événements

déclencheurs; leréengagementdansunnouvelemploioudansunedémarchedeformation.

L’énoncédecescinqétapesmontrequelechangementdemétier,mêmevolontaireetchoisi,impliqueuntravailsursoi.Ilpeutmêmereprésenterunvéritableévénementdevie.YvesBAROUrappelled’abordquel’emploiestunmouvementbrownienetnonunétatfigé.UneenquêteIPSOScommanditéeparl’AFPAademandéàdessalariésn’ayantpasencoreconnudereconversioncequ’ilsenvisagentdefaireencasdedifficultéspesantsurleuremploi.82%répondentqu’ilschangerontdemétier.Bienavantlesquestionsfinancières,ilsidentifientcommefreinsl’orientationetlaformation.L’appareildeformationfrançaisnerépondpasauxdéfisposés.Ilesttroporientéverslesformationscourtesaudétrimentdesformationsqualifiantes.Larégionalisationdela compétence formation s’est également faite aux dépens des formations pointuespourlesfilièresd’avenir,qu’unerégionnepeutporterseule.Jean PRALONG souligne d’abord que les personnes ayant suivi des parcours deformation en sont souvent très heureuses: ces réussites doivent certainement êtredavantagemisesenvaleuretpopularisées.Lesentreprisescommeleservicepublicdel’emploipeuventégalementmettreenœuvredesoutilspourfaciliterlareconversion,quiesttraitéedemanièreponctuelleetenmodedecriseàl’heureactuelle.Sansdouteest‐ilplutôtbesoind’uneaideauxindividuspourbâtirunprojetdelongterme.Jean‐Christophe SCIBERRAS observe que le rapport au marché du travail diffèrefortementd’unpays à l’autre. Le changement d’employeur est vécudemanière pluspositive en Amérique du Nord, où le dispositif d’assurance chômage est moinsfavorable qu’en France. En Amérique du Sud où l’assurance chômage est quasimentinexistante, les salariés ne souhaitent pas rester trop longtemps au seinde lamêmeentreprise.

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L’évolution du droit du travail français peut favoriser le processus de reconversion.L’introductiondelaruptureconventionnelleaainsipermisauxpersonnesquiveulentchanger d’employeur ou demétier de se lancer sans perdre leurs droits sociaux. Laportabilitédesdroitsàmutuelleetàprévoyancefaciliteégalementlatransitionpourlapersonneconcernéecommepoursafamille.YvesBAROUdéplorequelasécurisationsoittropsouventconsidéréecommeexogène:lesvolontairesàlareconversionsontsouventconsidéréscommedes«meneurs».Lessalariésattendentplutôtd’êtreaidésenmatièred’orientationetd’accompagnement:le marché de l’emploi s’est considérablement compliqué au cours des dernièresdécennies.Catherine NEGRONI observe que la mobilité professionnelle volontaire impliqueanticipationetprisededistance.Or,lesoutils,commelebilandecompétences,nesontenvisagésqu’enmodedecrise.YvesBAROUrelèvequetouteslesenquêtessociologiquesmettentenévidencechezlesjeunes un désir d’autonomie dans le travail. L’arrivée dans une entreprise entraînesouventuncertaindésenchantement.Marie‐ClaireCARRERE‐GEE,présidenteduCOE,remarquequel’Australieaétenduauxadultesledispositifdel’apprentissage.YvesBAROUprécisequebeaucoupdepaysanglo‐saxonsproposentdesdispositifsdecetypepourlesjeunesparcequeladuréedeformationestgénéralementpluscourte.Pour les adultes, l’alternance ne lui paraît pas lemeilleur dispositif de formation; laformationgagneeneffetàêtrelapluscompactepossible.Unmembredel’assistanceremarquequelecolloquedevaitportersurlechangementdemétier,mais a glissé vers la reconversion professionnelle. Il estime que ce termen’estplusadaptéàlaplupartdessituationsetqueletermede«mobilité»devraitluiêtrepréféré.Unmembredel’assistanceévoquelecongéindividueldeformation(CIF),quipermetaux salariés de changer de métier avec un certain nombre de garanties.300000personnes en ont déjà bénéficié en France, mais le manque de moyenscontraintdésormaisleFONGECIFàn’accepterqu’undossiersurdeux.Unmembrede l’assistanceaurait jugé intéressantque l’enquêteporteégalementsurlesacteurssusceptiblesd’accompagner lessalariésdans leurreconversion. Ildéploreégalementquelequestionnairen’aitprésentéqu’unelisted’outilsaulieud’évoquerdevéritablesparcoursd’évolutionprofessionnelle.YvesBAROUpréciseque l’enquête IPSOSeffectuéeauprèsdesalariéscite l’AFPA, lesassociationsetl’entreprisecommeacteursprincipauxduparcoursdereconversion.Unmembre de l’assistance témoigne de son expérience de reconversion. Journalistedanslapressequotidiennerégionale, ilestpasséà lacommunicationpolitique,avantd’assurer la communication scientifique d’un grand organisme de recherche. Sonparcours répond effectivement à une quête de sens et implique un véritablecheminementmental.

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Unmembredel’assistancedéclaretermineruneformationautofinancée.Leprincipalfrein qu’elle identifie à la reconversion tient à l’attitude des recruteurs, qui restentobnubiléspar lesdiplômesinitiauxetn’apprécientpasque lescandidatsaientconnubeaucoupd’expériences.Jean‐Christophe SCIBERRAS en convient: un recruteur veut généralement savoirpourquoi lecandidats’est trouvésur lemarchédutravail. Il importeque lecandidatpuisse expliquer clairement et honnêtement son parcours, dans une démarche detransparence. Au‐delà, les recruteurs internes d’une entreprise répondent à unecommandemanagériale, or la tentation est grande pour lesmanagers de rechercherdes«clones». Ilappartientà lafonctionRessourceshumainesdedesserrer lecarcaninitialementimposéaurecrutement.Jean PRALONG ajoute que le recrutement est une prise de risque importante pourl’entreprise, cequi laconduitàvouloir réduire le risqueà toutprixvoiremêmeàseréfugier dans des croyances irrationnelles. Le recruteur tend ainsi à croire que toutsurvientpourunebonneraison:êtresurlemarchédutravaildevientintrinsèquementsuspect. Par ailleurs, l’entreprise peut s’être restructurée à un point tel qu’elle nepourrait fonctionner avec une personne enmoins. L’objectif du recrutement devientainsil’inclusion(enanglaisinclusiveness)plutôtquelaflexibilité.

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SYNTHESEDUCOLLOQUE/TROISIEMETABLERONDE:Solutions:pourdesreconversionsprofessionnelles

plusvolontairesetmieuxsécurisées

Dans cette table ronde animée par Béatrice TAUPIN, journaliste, sontintervenus:

JeanBASSERES,directeurgénéraldePôleEmploi

PierreFERRACCI,présidentdugroupeAlpha

RaymondSOUBIE,présidentdessociétésdeconseilAlixioetTaddeo

EmmanuelleWARGON,déléguéegénéraleàl’emploietàlaformation

professionnelle

RaymondSOUBIEdéclareavoirrencontréassezpeudereconversionsprofessionnellesvolontaires.Ellesprennentsouventlaformedecréationsd’entreprise,cequinécessiteunegrandemotivation, soitpositive, soitnégative, pardémotivationvis‐à‐visde sonemploiactuel.Beaucoupdedésirsdereconversionvolontairetiennentainsiaurejetdela «processisation» des grandes entreprises, puissant facteur de démotivation et deperte d’autonomie. Ensuite, les personnes qui souhaitent s’inscrire dans cecheminement sont souvent très seules: elles ne sont pas prioritaires et n’ont pasnécessairementde réseau. Les reconversionsvolontaires sontdoncavant tout le faitdes personnes les plus qualifiées et les plus élevées dans la hiérarchie. Le principalenjeu porte en réalité sur les reconversions subies, dont le traitement exigeanticipation, véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences etformationprofessionnelleefficace.Jean BASSERES indique que les deux tiers des demandeurs d’emploi retrouvent unpostedansunmétierdifférentdeceluidans lequel ils sesont inscritsàPôleEmploi.Une reconversion professionnelle exige une très forte individualisation, ce quiimplique des modalités de suivi différenciées suivant les besoins de chaquedemandeur.Une telledémarchemiseenœuvreparPôleemploi a été facilitéepar lerenforcement des effectifs. Elle doit également conduire à s’interroger sur larépartition des tâches entre le service public de retour à l’emploi et les opérateursprivés.Deuxièmement, il est indispensable de renforcer les compétences des conseillers etd'améliorer lesoutilsmisà leurdispositionenmatièred’orientationetde formation.Celasupposeuninvestissementinternefort.Troisièmement, le répertoire des métiers (ROME) est un instrument précieux,intégrant les «zones de mobilité» professionnelles. Pôle Emploi travaille avec lesbranches pour faire évoluer les stéréotypes attachés à certainsmétiers. PôleEmploiincite également les entreprises à modifier leurs modes de recrutement pour qu’ilssoientfondésdavantagesurlescompétencesetleshabiletésquesurlesCV.Enfin,l’aideàlamobilitégéographiqueresteinsuffisammentdéveloppéeenFrance.

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Emmanuelle WARGON distingue deux dispositifs dans lesquels l’individualisationfonctionne bien. Le contrat de sécurisation professionnelle (CSP), dispositifd’accompagnementdeslicenciementséconomiques,metl’accentsurlaformation:lesdeux tiersdes27%qui retrouventunemploipost‐CSP le fontdansunautremétier.Deuxièmement,leCIFs’adresseauxsalariésquidécidentd’entrerdansunedémarchedeformation.80000personnessontaccompagnéesenCIFàunmomentdonné.72%d’entre elles accèdent à une formation qualifiante pour 780 heures de formation enmoyenne.Lesdeuxtiersaboutissentàunprojetprofessionneldansunmétierdifférentdumétierinitial.Lesprojetsderéformeenvisagésvisentenparticuliertroispoints.Lepremierconsisteà mettre en œuvre une véritable gestion prévisionnelle des emplois et descompétences. Le second consiste à travailler sur un accompagnement différent desdemandeursd’emploi,pourmieuxrapprocherl’offredelademande.LaFrancepossèdeunimportantgisementd’emploisdanslesTPE‐PME,quinesaventpascommentniquirecruter: elles ont besoin d’un accompagnement pour trouver des profils adaptés.Enfin,lecomptepersonneldeformationdoitêtreunoutilimportant.PierreFERRACCIestimeégalementqueleCPFpeutêtreunexcellentoutil,sousréservedenepasretomberdansl’écueildudroitindividuelàlaformation(DIF).L’échecdecederniers’expliqued’abordparunevolontéégalitaristeaccordantundroitde20heuresàtous,PDG,salariéououvrier,indépendammentdeleursbesoins.Sonfinancementn’apasétéprévu.Enfin,leDIFn’aprévuqu’undialogueentreemployeuretemployé,sanslaisserdechampaudialoguesocial.Demême,GPECetplandeformationn’ontjamaisétéreliés.PierreFERRACCIplaide en faveurd’unmeilleur ciblagedesmesures. LeCSP est parexemple un bel outil qui gagnerait à ne pas être réservé aux licenciementséconomiques: les salariés faisant l’objet d’une rupture conventionnelle ne sont pasaccompagnés. Demême, les obligations imposées par l’Etat aux entreprises doiventêtre mieux ciblées: les entreprises assurent spontanément les formations quirépondentàleursbesoins,maisnerespectentpastoujoursleurobligationdemaintiende l’employabilité des salariés qu’elles identifient comme contribuant moins à leurcompétitivité,etquisontlesplusfragiles.Raymond SOUBIE observe qu’un dialogue social réussi (au sens de l’aboutissementd’unaccordetdesasignatureunanime)neconduitpastoujoursàunebonneréforme,comme l’amontré l’exemple de l’accord sur la formation professionnelle de 2009. Ilsouligne que même la réforme fondatrice de l’actuel système de formationprofessionnelle, en 1971, a fait l’objet d’une loi qui s’est écarté de l’accord despartenaires sociaux qui l’avait précédée. Il est favorable à une véritable gestionprévisionnelle des emplois et des compétences, mais souligne l’effet anxiogène quepeut avoir l’anticipation de difficultés futures. Certaines difficultés par ailleurs sontdifficilement prévisibles. Troisièmement, beaucoup de salariés n’ont pas consciencedescompétencesqu’ilspossèdent. Il fautdonc trouverunmoyende leur fairemieuxappréhender leurs possibilités. Enfin, les entreprises n’ont aucun intérêt à l’heureactuelleàfinancerdesformationsdestinéesàlareconversion.PierreFERRACCIestimeque l’anticipationestmoinsanxiogènepour lesalariéque lesentimentd’êtreinsuffisammentoutilléfaceauxévolutionsfutures.Ilconvientquelespartenaires sociaux ne peuvent pas travailler seuls sur certains sujets, d’autant plusqu’ils sont en lien avec leur financement. Il est de l’intérêt du pouvoir politiqued’intervenirdanscescas.

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JeanBASSERESjugequeladémocratiesocialeesttoutàfaitcapablededébouchersurdesaccordscourageuxetinnovants.Ilestimeégalementqu’ilfautsortirdelalogiquedecatégoriesà l’œuvrederrièrel’offreparpublics: tousles jeunes, lesseniorsouleschômeursde longueduréenesontpashomogènesentreeuxetn’ontpas lesmêmesbesoins.Demême,toutchômeurn’apasbesoind’uneformation.EmmanuelleWARGONestimequelanégociationsurlaformationprofessionnelleaunechance d’aboutir parce que l’Etat a annoncé une détermination claire, portée par leprésident de la République. Le financement des organismes et la simplification dudispositifontétéprisencomptedansl’établissementducalendrierdesnégociations.Lemarchédelaformationprofessionnelleestcaptif:lesentreprisespaientenavanceàunorganismeintermédiairequiachèteauxoffreursdeformation.Cedispositifposeunproblèmed’équilibreetderégulationdumarché.Enfin,beaucoupd’aidessontconsacréesaufinancementdelacréationd’entrepriseettrèspeuà l’accompagnementduporteurdeprojet.Orcebesoinest importantavant,pendantetaprèslacréationdel’entreprise.Unmembrede l’assistance s’enquiertde l’avisdesmembresde la table ronde sur laduréeet leniveaud’indemnisationduchômage. Ilévoqueparexempleunebaissedel’indemnisation en contrepartie d’un accompagnement réel dès le premier jour dechômage.PierreFERRACCIsedéclareadeptedesmodèlesnordiques,enparticulierledispositifdanois qui offre une indemnisation de meilleur niveau et plus longue. Le délai deretour à l’emploi est également plus court qu’en France grâce à une meilleureanticipation et un accompagnement plus réduit. Une éventuelle baisse del’indemnisation n’est donc pas le seul outil pour inciter au retour à l’emploi. Pourautant,mieuxvauteneffetrevenirversl’emploileplusrapidementpossible.RaymondSOUBIEobserveque lespartenaires sociaux sont toujoursparvenus, àuneexception près, à trouver un accord s’agissant du régime d’assurance chômage.Aujourd’hui, le patronat est fermement opposé à de nouvelles augmentations decotisationsetlessyndicatsestimentimpossibledebaisserlesdroitsenpériodedefortchômage. Une piste de compromis peut émerger autour de l’amélioration del’accompagnement.Parailleurs,RaymondSOUBIEremarquequel’assurance‐chômagedanoisefonctionnedemanière totalementdifférentedudispositif français: le salarié subitunepressionconsidérablepoursereclasser,dèsledébutdelapériodedechômage.PierreFERRACCIprécisequelamobilitéestbeaucoupplusimportanteauDanemark.Le dispositif fonctionne grâce un grandniveaude confiance, lui‐même suscité par lebon niveau des prestations sociales. Le Danemark se caractérise également par unniveauélevédesprélèvementsobligatoiresetdesprélèvementssociaux.Un membre de l’assistance remarque que la problématique du genre n’a pas étéabordée, alors que les femmes ontmoins accès à la formation. Demême, les débatsn’ontpasabordé les risquespsychosociauxqui sontparfois liésauxchangementsdemétiers.

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PierreFERRACIconfirmeque les femmessontmoinsbien traitéesà tous lesniveauxdans les entreprises, comme l’a montré une étude du CEREQ. Les risquespsychosociaux mériteraient un débat à part entière. Les changements mal préparéspeuvent effectivement susciter des risques psychosociaux, tout comme inversementl’absencedeperspectivesaucoursdelacarrière.UnmembredelaCFDTestimequeledialoguesocialprogresseaufildesannées,mêmes’illefaitparfoislentement.Ilobserveainsiquel’accordsurlaGPECdu14novembre2008contenaitengermetouteslesidéessoulevéesaucoursdesdébatsdelajournée.Un membre de l’assistance constate une certaine déconnexion entre la futurenégociationet lesproblèmesposésauxdemandeursd’emploi,quin’ysontpaspartieprenante. Au‐delà, il s’interroge sur les moyens de faire émerger les besoins enformationàlafoisdesdemandeursd’emploietdesentreprises,enparticulierpourlesmétierstransversauxquin’appartiennentàaucunebrancheparticulière.EmmanuelleWARGONremarquequelaterritorialisationestunequestiondifficilequiémergesurbiendessujetsévoquésaucoursdesdébats.Pierre FERRACCI rappelle que les régionspossèdent la compétence sur la formationprofessionnelle du demandeur d’emploi. Or, elles ne peuvent assumer seules cetteresponsabilité: une coordination de la puissance publique est nécessaire. Une pisteconsisterait à rapprocher Pôle Emploi des régions en accordant une certaineautonomieauxdirectionsrégionales.JeanBASSERES répondquePôleEmploimèneune importantedéconcentrationpourrapprocherl’actionterritorialedesbesoinsets’estdotédemoyensàceteffet.Au‐delà,RaymondSOUBIEestimequebeaucoupdesproblèmessoulevéstiennentnonpas à la définition des politiques, mais à leur mise en œuvre, compte tenu desnombreuxcorporatismes,publicsetprivés,quiexistentenFrance.

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LecolloqueduCOEdu26septembre2013enimages

Introductionducolloquepar OuvertureducolloqueparMichelSAPIN,Marie‐ClaireCARRERE‐GEE, ministre du Travail, de l’Emploi, de la FormationprésidenteduCOE professionnelleetduDialoguesocial

1èretablerondeaniméeparEtienneLefebvre,chefduserviceéconomiegénéraledesEchosDegaucheàdroite:F.Kramarz,S.Scarpetta,E.Lefebvre,P.Trainar,J.Pisani‐Ferry

2etablerondeaniméeparDavidAbiker,journalisteàEurope1etMarie‐ClaireCarrère‐Gée,présidenteduCOEDegaucheàdroite(photodedroite):J.Goarant,C.Négroni,M.‐C.Carrère‐Gée,J.‐C.Sciberras,J.Pralong,Y.Barou

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ANNEXES

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ANNEXE1:PROGRAMMEDUCOLLOQUE

Jeudi26septembre2013de9h00à16h30

«Changerdemétier:quelsenjeux?quelsrisques?quellesopportunités?»

enpartenariatavec

MaisondelaChimie‐GrandAmphithéâtre28bis,rueSaint‐Dominique,Paris7e

8h30‐Accueildesparticipants9h00‐OuvertureparMichelSapin,ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation professionnelle et duDialoguesocial9h15‐10h30

1ère table ronde – Enjeux : quelles reconversions professionnellesdansuneéconomieenchangement?

animée par Etienne Lefebvre, chef du service économie générale, LesEchos Francis Kramarz, directeur du Centre de recherche en économie etstatistique(CREST),professeuràl’Ensaeetàl’EcolePolytechnique JeanPisani‐Ferry,commissairegénéralàlastratégieetàlaprospectiveStefanoScarpetta,directeurde laDirectionde l'emploi,dutravailetdesaffairessociales,OCDEPhilippeTrainar,directeurdesrisquesdugroupeScor,membreduCercledeséconomistes

  10h30‐10h45Pause 

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  10h45‐12h45

2ème table ronde – Perceptions : quels regards les salariés et lesemployeursportent‐ilssurlesreconversionsprofessionnelles?  

animéeparDavidAbiker,journalisteàEurope1 Présentation de l’enquête COE/OpinionWay «Opinions et attitudesdesemployeursfaceauxreconversionsprofessionnelles» YvesBarou,présidentdel’AFPA JulienGoarant,directeurd’études,InstitutOpinionWayCatherine Négroni, sociologue, maître de conférences à l'université deLille‐3JeanPralong,psychologue,titulairedelachaire«NouvellesCarrières»àRouenBusinessSchoolJean‐Christophe Sciberras, président de l’Association Nationale desDirecteursdesRessourcesHumaines(ANDRH)

12h45‐Déjeunerlibre

14h30‐16h003èmetable‐ronde‐Solutions:pourdesreconversionsprofessionnellesplusvolontairesetmieuxsécurisées

animéeparBéatriceTaupin,journalisteJeanBassères,directeurgénéraldePôleemploiPierreFerracci,présidentdugroupeAlphaRaymondSoubie,présidentdessociétésdeConseilAlixioetTaddeoEmmanuelle Wargon, déléguée générale à l’emploi et à la formationprofessionnelle

16h00‐Clôture

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ANNEXE2:BIBLIOGRAPHIEBalathier‐LantageH.(de),KleinT.,(2011),Letravailetl’emploidansvingtans,Centred’analysestratégique(juillet).RapportdugroupedetravailprésidéparOdileQuintinConseild’orientationpourl’emploi(2009),Lestrajectoiresetmobilitésprofessionnelles,septembreIPSOS (2012), Enquête «La reconversion professionnelle» réalisée pour l’AFPA,octobreLalé E. (2012), Trends in occupational mobility in France: 1982‐2009, Laboureconomics,19(2012)373–387,marsProkovasN.,PoujoulyC. (2009), «Mobilitésprofessionnelles.Un tiersdespersonnesquiretrouventunemploichangentdemétieretdequalification»,Repères&Analyses,Etudes,n°3,Pôleemploi,avrilSimonnetV.etUlrichV.(2009),Lamobilitéentremétiers:30%despersonnesenemploien1998avaientchangédemétieren2003,Premièressynthèses,DARES,n°05.3,janvier