Le droit et les rapports de dépendance vécus par les aînés ...
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Changement et crise:
comment sont-ils vécus dans les entreprises ?
Session prospective du 27 juin 2002
Document de synthèse N° 3
Michelle Bergadaà, Professeur
et
l'équipe des étudiants
de l'Observatoire de Vente et Stratégies du Marketi ng
Observatoire de Vente et Stratégie Marketing HEC - Université de Genève
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing ii
© OVSM - 2002
L'Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing
de Genève
Ses fondateurs et partenaires
• Caterpillar Overseas SA • CPG Market • Compaq Computer • FNAC • Fiat Auto Suisse • Groupe PP Holding • Nestlé Suisse • Procter & Gamble • Sanofi-Synthelabo • Société Coopérative Migros • Télévision Suisse Romande • UBS SA Depuis 1998, le comité de pilotage de l'OVSM, composé du professeur Bergadaà, de dirigeants d’entreprises et d'assistants de recherche, définit le programme des activités et le thème des travaux de recherche
Son rôle
et son fonctionnement • Observer les mutations sociales et leurs enjeux commerciaux par la réalisation de “recherche-actions” conduites par des chercheurs et des étudiants ; en diffuser les conclusions. • Analyser les mutations de la Vente et des Stratégies du Marketing grâce à des recherches dirigées par le Professeur Bergadaà et subventionnées par le Fonds National Suisse de Recherche Scientifique. • Innover en matière de développement et de transfert de connaissances, car la mondialisation et les nouvelles techniques de communication remettent en question les systèmes traditionnels de formation • Concevoir son site Internet, comme un espace de rencontre, de dialogue et d'action, pour les étudiants de l’Université et les acteurs du monde économique et social.
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RESUME
Le 27 juin 2002, l'Observatoire de Vente et Stratégies Marketing de Genève a
organisé sa journée de prospective annuelle sur le thème :
“Changement et crise:
comment sont-ils vécus dans les entreprises ?”
Ce thème avait été sélectionné par les membres du Comité de Pilotage de
l'Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing, qui ont choisi, lors de sa
fondation, les cinq axes suivants de réflexion :
1) Les rôles et les responsabilités de l'entreprise dans son environnement
2) Les mutations de l'organisation et des hommes qui la composent
3) La mise en œuvre des projets de mutation du métier central de
l'entreprise
4) Les nouvelles stratégies de marque
5) La mise en œuvre de la "proximité client".
Cette réflexion prospective permet de soulever des questions fondamentales et
d'indiquer des voies d'action pour l'avenir, aux niveaux stratégiques et
organisationnels. Son déroulement complet a été le suivant :
• Vingt étudiants de l'OVSM ont réalisé durant deux mois une enquête sur le
terrain en allant interroger des dirigeants de huit entreprises de secteurs
distincts afin de comprendre le sens de l'évolution et des mutations
auxquelles ces entreprises sont aujourd'hui confrontées. Une série
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d'ateliers de travail a permis de guider ce travail par une rigoureuse
démarche scientifique.
• L'analyse de contenu de ces interviews, et l'analyse des données
secondaires disponibles, a permis aux étudiants-enquêteurs de réaliser
une série de cas déclinant spécifiquement les mutations et changements
en action dans les entreprises de notre panel.
• Le 27 juin 2002, des travaux en ateliers avec les dirigeants de ces
entreprises ont permis d’approfondir les thèmes d'investigation et de
proposer des voies d'actions pour le futur.
• Durant la séance plénière finale, les participants ont confronté leurs
opinions, et la journée s’est conclue par des propositions consensuelles.
• Le président d'HEC Genève et les étudiants de l'OVSM ont ensuite convié
les experts à un cocktail.
• Le présent rapport est rédigé et transmis à tous les experts ayant participé
à cette journée.
• Ce rapport donnera lieu, comme chaque année, à des articles qui seront
publiés dans des revues scientifiques, concrétisant le partenariat monde
académique/monde économique de l'OVSM et assurant ainsi la promotion
de ses travaux.
• Ce présent rapport définit également les axes de recherche et de
pédagogie qui seront mis en œuvre au cours de la prochaine année avec
le concours d’étudiants de l'Observatoire de Vente et Stratégies du
Marketing de Genève.
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TABLE DES MATIERES
1 - Introduction 2 2. Vers l'entreprise du XXIe siècle 4 2.1 Le modèle de mutation initial 4 2. 2 Les conclusions des recherches de 2001 7 3. La recherche d'une pensée prospective 11 3.1 Son déroulement 11 3. 2 Le panel des entreprises 13 3. 3 La validation des résultats 14 4. Les synthèses des cas d'entreprises 16 4.1 Le cas de la crise d'Andersen 16 4. 2 Le cas Baume & Mercier 19 4.3 Le cas Caterpillar Inc. 22 4. 4 Le cas FNAC Suisse 25 4.5 Le cas de la Société Coopérative Migros-Genève 29 4.6 Le cas du Groupe PP-Holding 32 4.7 Le cas de la Télévision Suisse Romande 35 4.8 Le cas de l'UBS SA 38 5. La mise en œuvre des mutations 43 5.1 L'entreprise et son environnement 43 5.2 Les mutations de l'organisation et des hommes 44 5.3 Le projet de mutation du métier central 47 5.4 Une nouvelle stratégie de marque 50 5. 6 La proximité client 53 6. Conclusion 56 Annexe méthodologique 59
Introduction
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1 - Introduction
Depuis une dizaine d'années nos recherches nous ont permis de mieux
comprendre les mutations vécues par les entreprises. L'Observatoire de Vente
et Stratégies du Marketing de Genève (OVSM) permet à des dirigeants
d'entreprises de confronter régulièrement leurs opinions à ce sujet. Notre
journée de prospective annuelle est pour eux l'occasion de marquer une pause
dans leurs environnements immédiats et de prendre de la distance vis-à-vis de
leurs secteurs d'activités.
Nos journées de prospective permettent également d'accroître les relations
entre le monde universitaire et les entreprises en impliquant un certain nombre
d'étudiants de nos programmes de Licence, DEA et de doctorat. Les étudiants
réalisent sur le terrain la phase préliminaire de structuration de la
problématique, puis ils participent "en temps réel" aux débats de responsables
d'entreprises lors de la journée de prospective. Ils complètent ainsi leur
formation théorique.
Nos journées de prospective se concrétisent par la proposition de résultats qui
sont ensuite mis en œuvre dans les recherches de l'Observatoire et qui sont
utilisées au quotidien par les responsables impliqués dans le travail prospectif.
Le thème d'investigation du 27 juin 2002 a été choisi par les membres
fondateurs de l'Observatoire réunis lors de leur session de recherche du 11
décembre 2001. Il s'agissait de traiter du thème :
“Changement et crise:
comment sont-ils vécus dans les entreprises ?”
Ce document, synthèse des résultats de notre recherche, constitue un rapport
d'étape. Il est articulé en quatre points : a) la proposition initiale issue des
travaux de recherches réalisés à l'OVSM au cours de l'année 2001, b) le
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déroulement de la recherche 2002, c) les synthèses des huit cas d'entreprises
articulés autour de ce modèle générique, d) les propositions thématiques et les
conclusions de la journée de débat du 27 juin 2002.
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Le modèle générique de recherche
de l'OVSM
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2. Vers l'entreprise du XXIe siècle 2.1 Le modèle de mutation initial
Depuis la session de prospective de juin 2000, nos travaux de recherche
s'inscrivent dans le cadre générique qui suit.
Pour comprendre les changements qui se produisent et vont se produire dans
les entreprises, nous considérons tout d'abord le contexte de mutations dans
lequel les entreprises inscrivent de manière durable leurs (ré) organisations.
• La première mutation concerne le consommateur qui est d'abord touché,
tant par les modifications de la structure démographique (pyramide des âges,
espérance de vie accrue, etc.), que par les adaptations sociales en cours
(durée hebdomadaire du travail réduit, âge de la retraite, etc.). D'une part, une
répartition différente du "temps de loisir" vs. "temps de travail" se met en place
au niveau global de la société européenne ; d'autre part, l'augmentation des
possibilités de travail mobile (téléphone, micro, Internet, etc.) change la notion
de frontière entre ces deux types de temps traditionnels "libre" vs. "obligatoire".
Par ailleurs, l'augmentation du niveau de scolarité et de l'éducation, ainsi que
l'augmentation générale du niveau de vie, ont permis l'émergence de
populations plus aptes à décider de manière autonome de leurs modes de
consommation. Par conséquent, les individus gèrent (ou vont gérer) de manière
différente que par le passé leurs activités et leurs relations avec les entreprises
fournissant biens et services.
• La seconde mutation fondamentale touche l'extensi on des marchés.
Depuis quelques années l’Union européenne est devenue un vaste marché
unique de près de 400 millions de consommateurs potentiels. Parallèlement, la
mondialisation ouvre, pour les entreprises, la perspective d'un marché devenu
plus vaste et plus concurrentiel où la comparaison d’un pays à l’autre, voire
d’une région à l’autre, sera facilitée. La course à la taille, reposant sur la volonté
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de réduire les coûts, conduit certains acteurs économiques à standardiser prix
et produits. La mondialisation, qui ferait du monde un village et de l’Europe un
quartier, conduirait à une forme d'homogénéité culturelle. Mais cette dilution
des relations directes entreprise-client implique une prise de conscience : il ne
s'agira plus de se contenter d'attirer des clients, mais de bâtir des relations avec
eux à travers un ensemble de services offerts souvent par des partenaires
commerciaux différents. C'est dans ce cadre de changement, à la fois chez le
consommateur final et dans les transactions entre les entreprises, que le
nouveau courant du marketing relationnel ou Customer Relationship
Management (CRM) s'oppose au courant traditionnel transactionnel. Ici, on
parlera davantage de relations de type "one to one" que de segmentation de
marché ou de publicité de masse.
• Simultanément, l’explosion d’Internet est une mutation considérab le par
l'accès à la virtualité qu'elle procure. Au-delà de nouveaux moyens de
communication, Internet a le pouvoir de modifier l'ordre social actuel du savoir,
et donc l'"homo sapiens". L'individu, consommateur ou client industriel, apprend
à vivre avec de nouveaux paradigmes communicationnels et commerciaux. Ce
nouveau média interactif, qui a réussi la convergence du texte, du son et de
l'image, connaît une croissance fulgurante. Toutes les catégories d'individus
sont susceptibles d'être touchées à plus ou moins brève échéance. Seule sa
vitesse de propagation en est encore inconnue. Les technologies de
l'information et de la communication transforment profondément les stratégies
et les pratiques de l'entreprise. L'économie de l'Internet n'est plus virtuelle, mais
tout à fait réelle. Elle permet l'apparition de modèles de gestion qui affectent
radicalement métiers et organisations. Elles remettent en cause les techniques
traditionnelles du commerce, les politiques organisationnelles et les stratégies
d'entreprises. Nul n'est capable de prédire avec exactitude la configuration
future d'Internet, mais ce nouveau média est en train de bouleverser notre
façon d'apprendre, d'acquérir et de diffuser l'information, donc de communiquer
avec les hommes.
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Ces considérations sont résumées dans le modèle initial qui suit.
Impact de�
l'Europe et de �la mondialisation
Entreprise
Impact des�NTIC
Impact de�l'ˇvolution �
du client final
Mutation �des alliances�
et partenariats
Mutation de la�communication via �
Intranet, extranet,�Internet
Mutation de la composante�Vente de l'entreprise
1
2 3
Fig, 1 : Proposition d'un référentiel de mutation (tiré du document de synthèse n° 2, OVSM 2001)
Suite à ce modèle initial, les travaux de l'année 2001 nous ont conduits à poser
précisément les questions suivantes :
• Les facteurs contingents influencent-ils les responsabilités des dirigeants
d’entreprises?
• Quelles sont les mutations internes qui en découlent?
• Ces mouvements internes influencent-ils la stratégie marketing ?
• Conséquence : capitalisation de marque ou CRM?
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2. 2 Les conclusions des recherches de 2001
Les recherches effectuées en 2001 ont permis d'articuler notre modèle de
recherche autour des éléments qui suivent.
A – Les mutations externes
Nous avions mis en évidence cinq facteurs dominants exogènes qui
entraînaient plus spécifiquement une mutation de l'une ou l'autre des
entreprises de notre panel. Ce sont :
• Des contraintes financières et boursières accrues
• Des pressions concurrentielles importantes
• Des contraintes législatives et réglementation
• Une multiplication des stratégies d’alliances entre entreprises
• L'essor des nouvelles technologies de l’information et de la communication
D'où la question qui demeure pour les travaux de 2002 :
Dans quelle mesure, les facteurs contingents influencent-ils la manière dont
les dirigeants d’entreprises considèrent les mouvements qui les touchent ?
B - Les changements organisationnels
L'organisation est affectée par ces forces de mutation exogènes. Nos travaux
de l'an passé ont montré que le changement s'opérait dans les trois directions
suivantes :
• Une mutation de la perception du capital humain qui remplace l'ancienne
vision de la gestion des ressources humaines
• Une modification du système de valeurs de l’entreprise vers une orientation
marché
• Une prise de conscience d'un nouveau rôle social de l’entreprise
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D'où la question qui demeure pour les travaux de 2002 :
Comment une mutation externe se traduit-elle sous forme d’évolution dans
l’entreprise ou de mutation dans les différentes entreprises ?
C – Les changements du métier de marketing
Lien entre l'entreprise et le marché, le marketing a été une des disciplines les
plus bouleversées par les récentes mutations en action. Nous avions induit
trois axes de mutations possibles de la fonction :
• Une véritable orientation Marketing des décisions stratégiques
• Une modification de la politique de marque traditionnelle
• L'instauration et/ou une accentuation des relations directes avec les clients
D'où la question qui demeure pour nos travaux de l'an 2002 :
Quelles influences ont les mutations/évolutions internes sur la relation
clientèle? Se dirigera-t-on vers de nouvelles formes de capitalisation de
marque ou vers une accentuation du CRM ?
Ces thèmes de recherche sont résumés dans le modèle qui suit, lequel articule
les principaux thèmes approfondis dans ce document.
Observatoire de V
ente et Stratégies du M
arketing 15
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M - 2002
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Fig. 2 : Le m
odèle générique de recherche (tiré du docum
ent de synthèse n° 2, OV
SM
2001)
Le déroulement de la recherche
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3. La recherche d'une pensée prospective
Nous avons opté cette année pour la méthode des cas utilisée couramment
dans les recherches d'inspiration ethnologique car elle permet de prolonger la
réalité quotidienne des entreprises étudiées.
3.1 Son déroulement
La méthode utilisée suit d'assez près celle proposée dans l'ouvrage "Gestion et
pédagogie : une approche nouvelle par la méthode des cas", (MacGrawHill
1990, Bergadaà), et dont les différentes étapes et phases de travail sont
représentées dans le schéma ci-après.
Comme on peut s'en apercevoir, il s'agit d'une véritable opération de recherche
rigoureuse qui appelle une collaboration étroite entre le chercheur principal et
les enquêteurs, car chaque production (objectifs, plan synoptique, synthèse,
etc.) répond à des normes de réalisation précises et est donc strictement
contrôlées. Le problème, en effet, avec les méthodes qualitatives reste toujours
de savoir dans quelle mesure la "réalité" produite par les chercheurs n'est pas
simplement une interprétation subjective de leur esprit et si elle est
véritablement fidèle à la réalité vécue par les acteurs de l'entreprise.
Cette procédure de validation par aller-retour entre les concepts et le terrain,
entre chercheurs et enquêteurs, garantit cette éthique élémentaire sans
laquelle il ne saurait y avoir de production de recherche.
Dans le cas présent, l'enquête a été réalisée grâce au concours de vingt-trois
dirigeants d'entreprises en relation directe avec vingt étudiants de
l'Observatoire de Vente et Stratégie du Marketing de Genève. Tous, qu'ils
soient étudiants ou responsables en entreprise se sont fortement impliqués
dans cette recherche qui s'est déroulée sur une période de 3 mois d'avril à juin
2002.
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REALISATION D'UN PREMIER�INTERVIEW DANS LES ENTREPRISES POUR CERNER LA PROBLEMATIQUE GENERALE DE CHAQUE DIRIGEANT
ECHANTILLON D'ENTREPRISES, PUIS ATTRIBUTION DES ENTREPRISES A DES BIN�MES D'ENQU�TEURS�
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SUITE A LA VALIDATION DES NOTES DE SYNTHESE PAR LES ENTREPRISES, REDACTION D'UN CAS D'UNE VINGTAINE DE PAGES (PLUS ANNEXES)
FICHE DE TROIS PAGES ARTICULEE SUR : A) SON CONTEXTE, B) SON CONTENU, �C) SES LECONS D) L'UTILISATION POTENTIELLE DU CAS
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PLAN DE 4-5 PAGES PERMETTANT DE VERIFIER COMMENT LES "INDICES" S'ARTICULERONT POUR RENCONTRER LES OBJECTIFS DE L'ETAPE 2
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METHODE DE MEA�EUTIQUE PERMETTANT D'EXTRAIRE DEUX OBJECTIFS PRINCIPAUX ET QUATRE SECONDAIRES
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SECONDE PHASE D'ENTRETIENS�ET DE RECUEIL DES DONNEES SECONDAIRES ISSUES DE L'ENTREPRISE OU DE SOURCES EXTERNES
fig. 3 : Les étapes de la recherche
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© OVSM - 2002
3. 2 Le panel des entreprises
Notre panel était composé d'entreprises représentatives de différents secteurs
d'activité. Il s'agissait de Baume & Mercier, Caterpillar Overseas SA, Compaq
Computer, FNAC, Coopérative Migros Genève, Groupe PP Holding
(anciennement "Pharmacie Principale"), Procter & Gamble, Télévion Suisse
Romande, UBS SA..
Les personnes suivantes ont ainsi contribué de manière active à l'élaboration
des propositions de recherches présentées dans les pages suivantes :
Anne Audard Directrice PP Pharmacie Principale SA
Claude Baumann Directeur Marketing Andersen
Patrice Borde New Channel Development Procter & Gamble
Jérôme von Burg Ingénieur Commercial Procter & Gamble
Christophe Chevassus Conseiller à la clientèle UBS SA
Gilles Decarre Responsable des Ressources Humaines Société Coopérative Migros Genève
Daniel Delmas Senior Consultant Cap Gemini Ernst & Young
Sylvère Demonsais Directeur Administratif & Financier Baume & Mercier
Christian Dillier Capital Intellectual Manager Caterpillar Overseas SA
Berç Dirielyan Conseiller à la clientèle UBS SA
Christophe Fond Directeur Général FNAC Suisse
Charly Galley Directeur commercial Société Coopérative Migros Genève
Virginie Grandvaux Business Consulting Andersen
Christina Istria Human Ressources Director Procter & Gamble
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René Lorenzini Directeur UBS SA
Françoise Monachon Secrétaire générale i-TSR Télévision Suisse Romande
Daniel Mori Directeur Visilab et Audilab Holding SA
Philippe Mottaz Directeur du pôle i-TSR. Télévision Suisse Romande
Bonnie Roth Global Brand Manager Caterpillar Overseas SA
Eliane Sierro Directrice Groupe PP Services SA
J.-Philippe de Toledo Directeur général Groupe PP Holding
Guy Vibourel Directeur Général Société Coopérative Migros Genève
Salvador Vidal Dir. associé, Clientèle de placement
UBS SA
3. 3 La validation des résultats
Le 27 juin 2002, une journée prospective a permis de présenter aux dirigeants
des entreprises du panel les synthèses des cas réalisés par les enquêteurs-
étudiants.
Ensuite, deux sous-groupes de dirigeants ont été organisés pour débattre de
ces résultats (avec les étudiants-enquêteurs et sous la conduite d'un
animateur), puis formuler des propositions spécifiques. Chacun des sous-
groupes s'est attaché à déterminer quels sont les causes et les effets des
phénomènes étudiés, à distinguer des variables indépendantes et
dépendantes permettant de comprendre ce qui relevait d'une mutation ou
d'une simple évolution du métier (et des métiers internes) de l'entreprise.
Les résultats de la recherche
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4. Les synthèses des cas d'entreprises
Huit cas ont pu être finalisés (seul le cas de Compaq qui venait de fusionner
avec Hewlett Packard a dû être interrompu. Il sera repris l'année prochaine).
Chacun des cas illustre plus particulièrement une des mutations affectant un
des "blocs" de la figure 2 (p. 9), sous l'impact de forces contingentes, soit
l'organisation, le métier central ou la stratégie marketing.
4.1 Le cas de la crise d'Andersen L'analyse a été effectuée par Fatima Gueroui et Karine Soller. A - Contexte
Le secteur de l'audit et du conseil était dominé, à un niveau international, par
les "Big five" jusqu'en 2002. Le nombre de ces dernières, devenues "Fat four",
à la suite de la disparition d'Andersen, variera encore sans doute au gré des
fusions et des acquisitions. L'objet du cas porte sur la période de crise qui a
conduit à la dissolution brutale, en quelques mois, du réseau international
d'Andersen. Cette crise est analysée par rapport à ses facteurs contingents,
ses origines, ses spécificités et ses conséquences.
Alors même que l'ancien PDG d'Andersen déclarait un avenir prometteur pour
le réseau dans le rapport annuel 2001, et après 89 ans de croissance
ininterrompue, le réseau international du cabinet d'audit est démantelé en
l'espace de quelques mois, soit entre novembre 2001 (faillite d'Enron) et le 14
mars 2002 (mise en examen de l'entité américaine Andersen LLP). Ce réseau
intégré a permis à l'entreprise d'atteindre une taille compétitive ; il avait
également favorisé l'autonomie des différentes entités qui le composaient. Mais
il aura finalement conduit à l'incapacité d'assumer une gestion efficace d'une
crise majeure, et ce malgré la gestion de survie qu'ont adoptée
raisonnablement les différentes entités du réseau mondial.
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B - Contenu
Ce cas permet d'abord d'analyser comment l'"affaire Enron", problème
principalement éthique et origine de la crise Andersen, s'est transféré non
seulement à son auditeur mais à l'ensemble de la profession de consultants.
Enron, compagnie de gaz et d'électricité et 7ème entreprise américaine, fait
faillite en 45 jours à cause de fraudes et d'actes délictueux de la part de ces
dirigeants. Cette faillite a, de surcroît, des conséquences importantes en termes
d'éthique sociale, puisque les dirigeants ont volontairement occulté les mauvais
résultats du groupe ruinant ainsi l'espérance d'une juste retraite pour leurs
employés.
La crise dont il est fait état ici est un phénomène spécifique du monde
globalisé. En effet, ce cas illustre l'effet "boule-de-neige" d'une crise ne pouvant
être cantonnée en un seul lieu …car étant à la mesure même de la
globalisation des deux géants qui en ont fait les frais. La crise d’Enron a ainsi
dépassé ses propres frontières internes, puis celles de son pays d’origine et,
finalement, celles de son secteur d’activité. Elle s'est transposée chez son
auditeur, Andersen LLP, pour ensuite remettre en cause les pratiques dans
toute la profession des auditeurs. L’affaire Enron - Andersen a bouleversé le
monde économique, politique et médiatique. Par son caractère exponentiel, elle
a obligé les dirigeants politiques à poser de véritables questions de fond sur les
risques de crise de "la nouvelle économie" d'un monde globalisé.
L'élément central du cas porte sur l'éthique située comme un label d'entreprise
et un fondement culturel. L’ampleur du choc dans l’opinion publique,
l’implication des médias et des politiciens ont été consécutives à la violation de
ces règles éthiques. Et, parce que la crise touchait au cœur même du métier
d'Andersen (la certification de documents), aucune partie du réseau ne pouvait
y échapper. La destruction de documents comptables internes par Andersen
LLP induisait une violation de codes éthiques pour tous. Ces codes, fondement
culturel d'Andersen, auront ainsi été une arme à double tranchant dans ses
relations avec ses collaborateurs, ses clients, les politiques, les médias et le
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grand public. Finalement, le comportement de l'entité américaine était
inadmissible pour une entreprise de la renommée d'Andersen et c'est
l'ensemble de son réseau qui l'a subi jusqu'à la fatidique issue.
Ce cas illustre également la difficulté pour une entreprise d'une telle taille
qu'Andersen à mettre en place une politique de veille en matière de crise. Peut-
on maîtriser les tendances de l'environnement et les risques internes en vue de
se "prémunir" des crises ? Le monde de plus en plus complexe de l'entreprise,
quelle que soit sa taille, la confronte à des paramètres externes sur lesquels
elle n’a aucune emprise. Or, même si aucune cellule de crise n'était
opérationnelle pour anticiper la crise à Chicago, les gens du marketing auraient
pu jouer un grand rôle dans sa gestion, si la crise avait été prise à ses débuts.
Mais ils n'ont été informés que "trop tard" (de plus, le département, en pleine
restructuration, n'était pas encore opérationnel pour mettre en œuvre la
communication préventive adéquate).
C – Les leçons
L'intérêt de ce cas réside dans le fait qu'il propose une synthèse précise d'un
phénomène complexe et hautement médiatisé. Il permet ainsi d'avoir une vision
globale et neutre de cette affaire qui a défrayé les journaux. Ce scandale
devrait conduire les chefs d'entreprises et les investisseurs à s'interroger sur la
pertinence d'un modèle économique qu'ils ont contribué à faire progresser.
Inspirés par le capitalisme de la nouvelle économie, à forte exigence de
rentabilité à court terme, certains groupes se voient pris dans des situations à
risque. Les déboires de certaines entreprises ont fait plus de licenciements que
la faillite d'Enron, néanmoins, ce qui a choqué l'opinion publique est qu'avant de
sombrer, Enron se disait invincible et trônait dans les listes des firmes les plus
admirées en Amérique.
Le cas a également une portée individuelle. Ainsi, le métier d'auditeur appelle
un esprit d'indépendance et de responsabilisation des individus qui l'exercent.
En effet, les auditeurs signent de manière individuelle et doivent faire preuve de
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parcimonie afin d'éviter les conflits d'intérêt et ne délivrer que les informations
conformes à l'éthique de la profession et à la législation. Chez Andersen, les
auditeurs bénéficient d'une indépendance totale, mais ils sont fédérés depuis
l'origine de l'entreprise par sa forte culture. L'indépendance s'exerce-t-elle aux
dépens de la moralité interne dans certaines situations où "la fin semble justifier
les moyens", ainsi que l'ont cru les personnes à l'origine de la crise ? C'est la
question qu'a posée, de la manière la plus brutale qui soit, l'employé David
Duncan, déclaré fautif ; question qui replace chacun face à ses propres valeurs
et responsabilités.
Finalement, au travers de cette crise, le cas permet de s'interroger sur le
réalisme des propositions théoriques de ces dernières années, qui prônent des
concepts comme l'entreprise en réseau et l'autonomie des partenaires et
collaborateurs. Un des paradoxes rencontrés ici aura été la chute brutale d'une
entreprise par le fait même de recettes du management qui faisaient son
succès et qui se sont transformées en handicap majeur lorsque survient la
crise. Parce que ces "supers structures" atteignent aisément des tailles très
compétitives sur le marché en s'alliant à des associés locaux indépendants,
elles se retrouvent "orphelines" lors de moments critiques de crise. L'autonomie
ne génère-t-elle donc pas des organisations et des mentalités inadaptées aux
crises globalisées ?
4. 2 Le cas Baume & Mercier Cette analyse a été effectuée par Eva Alvarez et Alexandra Brolliet. A – Le contexte
Baume et Mercier, fondée en 1830, est active dans le domaine de l’horlogerie,
secteur traditionnel et prestigieux. Actuellement, l’entreprise fait partie du
Groupe Richemont qui englobe plusieurs autres marques mondialement
reconnues et fonctionnant comme un réseau autonome et intégré. La marque
Baume et Mercier est construite autour de valeurs telles que la précision, la
qualité, l’innovation technique et esthétique. Ses montres étant de type
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 26
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traditionnel et classique, Baume et Mercier évite les fluctuations dues à la
mode. Cependant, en 2001, cette stabilité des ventes a toutefois été ébranlée
par les événements du 11 septembre aux Etats- Unis.
Ce cas s’inscrit dans une perspective de contraintes financières et boursières. Il
illustre les choix organisationnels, financiers et de communication adoptés par
Baume et Mercier, suite aux attentats du 11 septembre qui faisaient craindre
une crise importante. Ce cas entrouvre également une porte sur le mode de
fonctionnement de ce secteur hautement confidentiel et de mieux comprendre
les spécificités du réseau de distribution de Baume et Mercier.
B - Le contenu
Ce cas illustre tout d'abord la valeur ajoutée dont bénéficie Baume et Mercier
par le fait d’appartenir au Groupe Richemont. En effet, le réseau intégré de
Richemont offre à ses entités des économies d’échelle importantes en terme de
négociations publicitaires et en coûts de production. Mais, a contrario, ce cas
analyse également les processus de décision de Baume et Mercier, qui, n’ayant
pas ses propres points de ventes, s’est retrouvé dans l’impossibilité d’estimer
avec précision l’impact de la crise du 11 septembre sur les ventes aux clients
finaux. Ce choix commercial, conjugué à la crise, et à son appartenance à un
très grand Groupe diminue sa réactivité.
Le cas clarifie le processus de gestion de crise qui a suivi le 11 septembre. Tout
d’abord, des mesures d’ajustement à court terme face à la fluctuation brutale du
marché boursier ont été prises. Par exemple, afin de combler les pertes
occasionnées par les annulations de commandes, Baume et Mercier a choisi de
geler le budget publicité marketing et des simulations de pertes et profits ont eu
lieu. Une seconde phase de gestion de la crise correspondait à la période
redoutée des ventes de Noël. Or, à cette occasion, Baume et Mercier a réalisé
des résultats proches des ventes habituelles. La question se pose donc de
savoir si la crise a été réelle ou si elle a simplement été un prétexte à un
ajustement des processus internes : les bilans, auparavant annuels, sont
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 27
© OVSM - 2002
dorénavant effectués trimestriellement, afin de mieux réagir dans des situations
imprévues.
Par ailleurs, ce cas de "crise" clarifie implicitement la rente de situation dont
jouit Baume et Mercier dans les produits de luxe et de prestige. Le cycle de vie
d’une montre de la marque est au minimum de 3 à 4 ans car la marque véhicule
une image classique, synonyme d’indémodable. Les estimations de vente sont
donc plus constantes que pour d’autres marques moins reconnues. Cependant,
ce point est à pondérer par le caractère semi-luxe de la marque, ce qui
s’exprime notamment lors de la hausse du franc suisse. La clientèle de Baume
et Mercier, tout de même sensible au prix, peut donc remettre en question
l’achat d’une montre Baume et Mercier dont le prix augmente. S'il n'y a pas de
risque de crise externe, la marque semble suivre son chemin ; quand des
risques externes se présentent les conséquences internes peuvent être non
négligeables.
Au plan opérationnel, ce cas illustre le rôle des foires horlogères dans la
profession. Dans le domaine horloger, les foires étant hautement symboliques,
il est important pour une marque de prestige d’y participer. En effet, dans le
cadre de la foire annuelle SIHH de Genève qui a lieu chaque printemps, Baume
et Mercier prend commande de 40% de son CA. Suite aux événements du 11
septembre, un bon nombre de distributeurs ont annulé les commandes
effectuées lors de la dernière foire, afin de procéder à un déstockage. Les
foires, en représentant près de la moitié du CA annuel, peuvent s’avérer avoir
un effet à double tranchant dans un contexte de crise.
C – Les leçons
Le milieu horloger étant discret et sobre par nature, ce cas donne la possibilité
au lecteur de percevoir de l’intérieur les préoccupations et les actions des
dirigeants de cet univers feutré. Il illustre une gestion stratégique lors d’une
crise mondiale, dans un milieu où les informations sont peu abondantes et peu
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 28
© OVSM - 2002
accessibles. Son intérêt principal réside donc dans ce luxe rare de lever un petit
coin du voile du secteur horloger.
Le cas propose le paradoxe suivant : en dépit des événements du 11
septembre qui laissaient présager un changement dans le comportement des
consommateurs, notamment par rapport aux produits de luxe, la crise n’a
finalement eu que peu conséquences sur les ventes de Baume et Mercier. Il
semble possible que ce type d’événement traumatique ramène les
consommateurs vers des valeurs plus traditionnelles, valeurs que, justement,
Baume et Mercier véhicule à travers ses montres. Mais pour comprendre ce
que veut réellement le client final, une véritable question se pose par rapport au
choix de mode de distribution : des voies de communication formelles avec les
distributeurs, afin de mieux réagir “ ensemble ” aux aléas du marché, sont-elles
possibles ? Permettraient-elles de mieux connaître les chiffres de ventes aux
clients finaux, donc de mieux estimer la crise ?
4.3 Le cas Caterpillar Inc.
Cette analyse a été effectuée par Maria del Carmen Santiago et Jeannine
Hlavac.
A – Le contexte
La société industrielle Caterpillar Inc., fondée en 1925, s’est spécialisée dans le
commerce de tracteurs à chenilles. Elle a progressivement réussi à implanter
solidement sa marque dans le monde, tout en diversifiant ses produits et
services. Son développement s'est opéré sur la base d'un réseau international
intégré. Dans les années '90, Caterpillar est entrée dans un profond processus
de restructuration organisationnel. Il lui fallait à la fois affirmer sa présence dans
un espace éclaté et mondial, rentabiliser son développement et renforcer sa
personnalité de marque. L'entreprise a donc opté pour une stratégie radicale en
matière de communication à la fois interne avec ses employés et
concessionnaires, et en externe avec les clients finaux.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 29
© OVSM - 2002
Ce cas s’inscrit dans une perspective à la fois commerciale et organisationnelle.
Il a pour but d’illustrer les contraintes auxquelles se heurte le réseau
mondialement éparpillé d’une société multinationale. Les deux phases
majeures de déploiement d'une nouvelle stratégie de communication, avec
réorganisation des processus internes, sont successivement présentées. La
première phase consiste en la définition et l'imposition d'une image de marque
clairement fédératrice permettant de consolider la très forte identité corporative
de Caterpillar. La seconde phase concerne la mise en place de processus de
communication et d'échange entre tous les acteurs et partenaires du réseau.
B - Le contenu
Ce cas illustre tout d'abord la manière dont une stratégie globale de
communication est construite, puis comment elle se transforme en une véritable
batterie d'outils opérationnels en vue d'impliquer chacun des partenaires,
employés et clients d'une entreprise. Ainsi qu'indiqué dans les documents et les
films réalisés par le service centralisé de communication de Caterpillar,
l'objectif était de “construire la valeur de marque”. Il ne s'agissait donc pas de
communiquer une image de marque commerciale, ni de la différencier de celles
de ses concurrents, mais bien de la bâtir à partir de son noyau ou les valeurs
dont elle se doit d'être porteuse.
Mais les valeurs d'une marque se partagent au quotidien. Il n'est donc pas
question de simplement "motiver" les collaborateurs et partenaires en leur
"vendant" une image de marque "relookée". Il s'agit réellement de les impliquer
dans la concrétisation des valeurs de la marque. Le cas montre donc tout
d'abord comment une stratégie de communication normative a permis de
fédérer les hommes autour d'une image corporative qui s'était diluée au fil du
temps. Cette image corporative devait représenter qualité, authenticité, et
durabilité. Or, pour être crédibles, ces valeurs doivent être vécues et portées
par chacun. De la couleur au graphisme, des instructions formelles aux cours
de formation, rien n'a été épargné pour que circule le "sang jaune" dans le
réseau de Caterpillar.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 30
© OVSM - 2002
Le nouveau défi des employés et des concessionnaires autonomes de
Caterpillar est maintenant de s'adapter aux nouveaux processus, aux nouvelles
responsabilités et aux nouveaux types d'encadrement de leur travail que la
stratégie “ 6 Sigma" a défini à cet effet. La stratégie “6 Sigma” est un véritable
processus de communication qui permet, théoriquement, d’éliminer les nœuds
de blocage de la communication, de découvrir des gisements de valeur
potentiels, donc de conduire in fine à une percée des bénéfices. Sa raison
fondamentale est d'introduire une véritable fluidité des transactions internes par
la mise en place d'une logique de relation. En souhaitant, par exemple, éliminer
les barrières que les concessionnaires placent entre Caterpillar et le client final,
ou que les différents services placent entre eux, “6 Sigma” sera créateur de
valeur pour chacun des partenaires.
Autant la première phase de construction de la valeur de marque suivait une
logique "up-down", autant “ 6 Sigma” appelle l'implantation d'une logique
inverse. Mobilisant un très grand nombre de personnes, elle implique que
chacun ait un rôle à jouer et possède les outils nécessaires à sa pleine
contribution à ce projet d'entreprise. En effet, le cœur de cette stratégie est de
considérer que, si les collaborateurs font partie de la solution, ils ne se
contentent pas d'accepter le changement, mais ils le conduisent véritablement
elles-mêmes.
Un des intérêts principaux de ce cas réside dans l'existence parallèle, chez
Caterpillar, d'un réseau de concessionnaires indépendants dans leur politique
et leur fonctionnement et dans la nécessité, malgré tout, d'un contrôle centralisé
de leur communication et de leur manière de gérer la marque dont ils sont
dépositaires. Ce cas illustre également comment, après l’imposition de
politiques spécifiques, les concessionnaires peuvent exprimer un attachement
certain à une marque dont ils mesurent aussi bien l'attrait en terme de
communication que le pouvoir en termes de service et service après-vente.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 31
© OVSM - 2002
C – Les leçons
Dans un contexte concurrentiel mondial important on peut s'interroger sur
l'impact réel de “6 Sigma”. Si la stratégie se déploie avec succès, employés et
partenaires seront valorisés et davantage responsables, prêts à relever de
manière autonome de nouveaux défis et à saisir de nouvelles opportunités.
Logiquement, les actionnaires, plus confiants, renforceront la valeur financière
de l'entreprise. Mais si l'immense investissement en capital humain qui est
actuellement mis en œuvre ne trouve pas assez de répondant en interne, la
question demeure de savoir ce qu'il adviendra de “6 Sigma” à moyen et long
terme. Enfin, le cas ne dit pas si Caterpillar a, ou non, envisagé une troisième
phase de communication, qui la situerait comme acteur face aux grands
problèmes d'éthique des entreprises que soulève un contexte planétaire.
4. 4 Le cas FNAC Suisse Cette analyse a été effectuée par Leila Amraoui et Pauline d'Hueppe. A – Le contexte
La Fnac, créée en France en 1954 par deux trotskistes qui voulaient proposer
aux consommateurs les meilleurs produits culturels aux meilleurs prix, est
aujourd'hui l’une des entreprises les plus connues en France. L’entreprise, qui
devient très vite un acteur culturel et un distributeur majeur, n'a jamais modifié
son image de marque. En 1994, la Fnac est rachetée par le grand groupe
transnational Pinault Printemps Redoute (PPR) qui a souhaité lui donner une
orientation internationale. Dans ce contexte, et au regard du succès déjà réalisé
par une autre filiale du groupe en Suisse, la Fnac y est implantée en octobre
2000. Mais le succès escompté à l'origine n'a pas été immédiatement au
rendez-vous.
Ce cas s’inscrit dans une perspective stratégique et commerciale à
l'international. Il présente le redressement d’une filiale implantée à l’étranger
grâce à l’adaptation du concept original de l’entreprise aux spécificités
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 32
© OVSM - 2002
culturelles et économiques du pays d’accueil. Les moyens mis en œuvre pour
permettre à l’entreprise d’exister, et de se faire accepter, dans le paysage
culturel local sont identifiés. Ils mettent en évidence les efforts déployés par la
Fnac pour s’adapter aux consommateurs Suisses. Ce cas permet, de plus,
d'identifier les éléments constitutifs d’une marque sur lesquels on peut transiger
et ceux qui, au contraire, ne se négocient pas et qui constituent les fondements
même du concept de l’entreprise.
B – Le contenu
Ce cas porte sur l’adaptation stratégique à l’international d’un concept
d’entreprise caractérisé par une image et une culture forte. Retracer l’historique
de la Fnac permet, dans un premier temps, de comprendre les différentes
influences idéologiques insufflées par ses propriétaires successifs qui en ont
fait une entreprise véritablement orientée vers les clients. Dans un second
temps, ce cas permet de comprendre comment l’entreprise a évolué au fil du
temps vers la distribution de produits qui, tout en relevant du secteur générique
des produits culturels, appartiennent à des secteurs d’activité spécifiques
relativement différents (livres, disques, photo, informatique, vidéo Hifi). Dans un
troisième temps, ce cas permet de suivre les différentes étapes qui structurent
la politique d’internationalisation de l'entreprise.
Mais, au-delà de cette stratégie spécifique du développement d'une entreprise,
l'organisation de la distribution d’un grand nombre de produits et de références
nécessite de réelles compétences en matière de logistique, de gestion des
stocks et de distribution. Il est donc possible d’identifier clairement les différents
éléments qui participent à une stratégie de distribution optimisée, comme la
gestion de la relation client, le support logistique, la politique de prix adoptée,
l’aménagement des points de vente, etc. Ces éléments constituent aujourd'hui
le cœur du savoir-faire de la Fnac. Sans le socle ferme et solide d'un tel savoir-
faire en matière de distribution, tous les efforts de développement de la marque
risqueraient d'être un jour ou l'autre compromis.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 33
© OVSM - 2002
Ce cas permet également d’analyser une politique de communication
progressive ayant pour objectif à moyen terme de permettre à la Fnac de
devenir un acteur culturel incontournable en Suisse. Sur la base des outils
habituels de la communication de la FNAC, la filiale Suisse utilise deux
approches différentes : la communication régulière sous forme de documents
adressés aux clients et aux adhérents, et une communication de type
événementiel. Afin d'analyser combien il est important de comprendre
réellement la culture locale - et pas simplement de souhaiter adapter
superficiellement des concepts de communication ayant fait leurs preuves dans
un autre contexte culturel - deux exemples d'événements sont présentés. Le
premier aborde l'externalisation du vecteur des communications lors du salon
annuel du Livre de Genève ; le second présente l'internalisation de ce vecteur
lors de la tenue de forums en magasins.
Finalement, la mise en place d’actions culturelles systématiques met en
exergue le développement progressif d’une image d’acteur culturel local. Ceci
s’illustre, notamment à travers la création d’un prospectus distribué au grand
public, qui a eu pour but initial de situer la Fnac en matière de prix, tant il est
vrai qu'il ne s'agit plus de décevoir des attentes des consommateurs suisses
très sensibles aux prix. Ce prospectus a ensuite rapidement pris une teinte
résolument culturelle. Mais, outre une politique classique de développement de
l'image de marque, la relation au quotidien client-vendeur est renforcée par
d'autres actions ciblées, comme la formation des vendeurs qui est mise en
place de manière à produire de véritables conseillers culturels.
C – Les leçons
Le cas permet tout d’abord d’identifier les différents éléments constitutifs d’une
marque. Il montre également la manière dont ceux-ci doivent être exploités afin
de construire un fort capital de marque du point de vue du consommateur. Il
identifie ensuite un certain nombre de difficultés rencontrées, ainsi que les
risques encourus par les entreprises qui amorcent tout juste leur
développement international et qui ne maîtrisent pas suffisamment le processus
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 34
© OVSM - 2002
(contrairement à des entreprises telles que Mc Donald, Coca Cola ou IBM). Il
présente enfin les détails de mise en œuvre d’un plan de communication
servant à faciliter l’implantation d’une entreprise lors de son internationalisation.
La volonté initiale de la Fnac a été de s'autoproclamer agitateur culturel au
moment même de son implantation en Suisse. Or, le fait que ce concept Fnac
soit un réel succès en France ne lui garantit pas son intégration sur le marché
Suisse pourtant voisin. Ainsi, et avant de pouvoir s’affirmer en tant qu’acteur
culturel, l’entreprise doit d’abord se faire accepter dans le paysage local. Un
paradoxe mis en évidence par ce cas repose sur le fait qu'il peut être
nécessaire qu'une entreprise souhaitant réussir à l'international mette "en
veilleuse" sa personnalité de marque, et en particulier si elle est forte et
porteuse de sens. Une telle personnalité enracinée dans des raisons
historiques, sociales et culturelles du pays d'origine peuvent se fondre aisément
dans un autre paysage culturel.
Actuellement, l’objectif de la FNAC est de mettre en œuvre une politique de
communication efficace afin de devenir un acteur commercial et culturel de
premier ordre en Suisse. Ses actions sont multipliées pour atteindre cet objectif
en trois ans, mais elles restent tributaires d'un consommateur suisse peut-être
peu sensible durablement à la démarche adoptée, alors que ces actions
commerciales semblent déjà couronnées d'un succès qui semble à certains
trop rapide.
4.5 Le cas de la Société Coopérative Migros-Genève
Cette analyse a été effectuée par Samson Dimitrijevic et Franz Schopf.
A – Le contexte
Lorsqu'en 1925, Monsieur Gottlieb Duttweiler décide de créer “ une
organisation commerciale sans intermédiaire entre le producteur et le
consommateur ”, il insuffle à Migros une culture d'entreprise très forte. Lorsqu'il
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 35
© OVSM - 2002
la transforme en Coopérative, cette entreprise devient une véritable “ institution
nationale Suisse”. Mais au niveau mondial, Migros reste une entreprise
modeste par rapport aux géants de la distribution issus des fusions de ces
dernières années. Le pouvoir d'acheteur de distributeurs tels les groupes
Wallmart ou Carrefour, leur procure un avantage indiscutable au niveau des
prix mondiaux. Ainsi, même si ce type de concurrence est (encore) faible sur le
marché national, afin de garder sa position de leader en Suisse, Migros a opté
pour une mutation de l'approvisionnement de ses marchandises à un niveau
national.
Ce cas a pour but d’illustrer les mutations de métier qu’entraîne cette stratégie
de centralisation des achats au niveau national. Jusqu'au en 1999, la fonction
des achats était décentralisée ; chaque Coopérative étant responsable de la
qualité et de la quantité de ses marchandises. La décision de réaliser une
réorganisation logistique au sein de l’entreprise Migros a été adoptée en vue de
rationaliser les approvisionnements. Cette mutation structurelle doit permettre à
l’entreprise de consolider sa position de leader. Ce passage de la
décentralisation historique à la centralisation qui débute par le “ projet pilote ”
du rayon textile a pour objectif, à moyen terme, de s’étendre progressivement à
tous les autres secteurs de la compagnie.
B – Le contenu
Ce cas illustre les principales causes de la centralisation de la fonction des
achats, et explique la nécessité d’une telle réorganisation dans le contexte
concurrentiel actuel. En effet, pour Migros, il s’agit de répondre à une pression
toujours plus intense dans le secteur, pression générée notamment par l’arrivée
des concurrents internationaux dans le marché national. Jusqu'en 1999, les
achats étaient régionalisés. La décision fut prise de procéder à la centralisation
des achats au niveau national afin de rester compétitifs au niveau du prix
consommateur. Ainsi, en centralisant les achats, Migros prétend chercher à
être plus réactif, plus flexible et plus près du marché pour garantir la satisfaction
de ses clients traditionnels.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 36
© OVSM - 2002
Certes, cette mutation logistique a des conséquences positives, car elle apporte
une réelle valeur ajoutée à l’entreprise. Mais toute transition du passage d'un
ancien à un nouveau système apporte son lot d'erreurs et de crises. Le
déroulement du processus de centralisation est présenté dans ce cas. Il insiste
sur l’importance du délai de prise de décision et de mise en place du processus
assez court. En effet, entre avril 1998, date de la décision, et janvier 1999, date
du démarrage du projet, huit mois à peine se sont écoulés. Est-ce suffisant
pour modifier des processus de fonctionnement logistiques aussi solidement
implantés que ceux du secteur des achats ?
Un des éléments clés du problème abordé concerne l’évolution d’un métier
spécifique, à savoir celui des acheteurs. Avant cette réorganisation structurelle,
la fonction principale de l’acheteur était de choisir les articles en fonction des
besoins d’une région déterminée, et de négocier des contrats avec divers
fournisseurs internationaux. A présent, la centralisation des achats implique
une mutation profonde de ce métier, et a comme effet un changement
important des responsabilités des acteurs concernés. Perdant une partie de
leur pouvoir personnel face aux vendeurs des fournisseurs, les acheteurs sont
désormais considérés comme “ chefs de produits ”. En tant que chefs de
produits, ils sont supposés collaborer de manière beaucoup plus étroite avec le
secteur de la vente qu’auparavant.
Ces changements provoquent des doutes et des craintes parmi les anciens
acheteurs de Migros-Genève, qui voient leur “ mission ” professionnelle
bouleversée. Ce cas met en exergue le difficile challenge d'une mutation de
métier, celui de transformer des acheteurs en vendeurs. Ces derniers ont
fonctionné durant des années dans une relation classique "vendeur <–->
acheteur", c'est-à-dire sur la base de l'instauration d'une logique de type
"gagnant-perdant". Ils doivent aujourd'hui coopérer et développer avec leurs
nouveaux partenaires internes une logique de type "gagnant-gagnant", dans le
souci de créer une valeur ajoutée significative pour leur entreprise et leurs
clients. Ce procédé est loin d'être toujours évident.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 37
© OVSM - 2002
C – Les leçons
Présentant l’histoire d’une entreprise devenue une vraie institution en Suisse au
cours du XXe siècle, et le défi actuel causé par la globalisation et les ouvertures
des marchés nationaux, ce cas donne une idée concrète du déroulement d’une
réorganisation au sein d’une grande entreprise à culture enracinée et des
obstacles liés à la mutation de métiers traditionnels.
Avec des traditions culturelles aussi bien implantées que dans l’entreprise
Migros, telles que "l’esprit de famille", le principal paradoxe de ce cas est de
voir des personnes démissionner de leur entreprise. Or, Migros a toujours fondé
son développement et sa solidité sur son capital humain. Il est risqué de voir
partir ces collaborateurs qui cumulent de nombreuses années d’expériences,
de compétences et d’aptitudes encore en devenir. Un second paradoxe vécu
par de nombreuses entreprises dans la même situation que Migros est de
mesurer qu'il n'est pas aisé de faire réellement collaborer différents
départements de travail ancrés dans leurs habitudes et leurs traditions
administratives de travail. Or, la volonté de coopération et de communication
interne au sein d’une grande organisation est déterminante pour l’évolution et la
réussite des projets de mutation de l’entreprise.
Les Nouvelles Technologies d’Information et de Communication (NTIC) sont
fortement présentes dans le système d'approvisionnement de Migros. La
centralisation des achats entraîne une uniformisation des systèmes
informatiques et introduit de nouveaux logiciels unifiés pour travailler avec des
ordinateurs centraux pour les processus commerciaux. Les magasins disposent
du réapprovisionnement automatique et les collaborateurs utilisent largement
les Échanges de Données Informatisées (EDI). Cependant, la question posée
reste de savoir dans quelle mesure le client sera bénéficiaire de tous ces efforts
conduisant de facto à une certaine standardisation. Le concept de commerce
de proximité qui a porté le succès de Migros durant un siècle survivra-t-il à cette
centralisation ?
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© OVSM - 2002
4.6 Le cas du Groupe PP-Holding
Cette analyse a été effectuée par Carine Andrey et Mélanie Scheuer.
A - Le contexte
Dans le domaine de la santé, contexte de ce cas, les différents acteurs
(médecins, pharmaciens, patients) ont habituellement des rôles spécifiques et
définis. Ce cas retrace l’évolution d’une dynastie de pharmaciens aux idées
novatrices, la famille de Tolédo, au cours du XXème siècle, et les défis qu’elle a
dû et va devoir relever afin d’assurer la pérennité de l’entreprise familiale face
aux mutations de l’environnement social, économique et technologique. Un de
ses défis actuels porte sur le changement de structure organisationnelle. D’une
structure monolithique, la société familiale, Pharmacie Principale, s’est
transformée en holding, devenant le Groupe PP Holding, afin de mieux affronter
les changements liés à la transformation de la définition du rôle des principaux
acteurs de la santé.
Ce cas illustre les contraintes du changement de génération au sein de la
direction d’une société familiale, compte tenu de l’évolution du comportement
du client. A chaque passage de témoin entre les trois générations, les
dirigeants ont su adopter une culture commerciale en accord avec leur temps,
voire se sont placés, grâce à leurs innovations, en tant que précurseurs. Face à
l’apparition d’une concurrence accrue et au changement de logique du marché
de cette entreprise familiale qui a réussi à créer de la différenciation.
Aujourd'hui, le Groupe PP Holding tente de créer de la valeur ajoutée en
adoptant, au-delà d’une logique axée uniquement sur le produit, une logique
centrée également sur les services et les connaissances.
B – Le contenu
Un des éléments de ce cas porte sur les différences de perception du métier
commercial qu’ont chacune des trois générations. Ces différences sont
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 39
© OVSM - 2002
illustrées par les caractéristiques et valeurs des hommes qui ont
successivement participé à la réussite de cette aventure qui dure depuis 90
ans. La première génération, entreprenante et révolutionnaire, a laissé sa place
à une génération qui s’est efforcée de maintenir et développer les nombreux
acquis reçus. La troisième génération, au pouvoir aujourd’hui, fait de
l’innovation un de ses leitmotivs.
De nombreuses mutations sont intervenues dans les relations patient-médecin-
pharmacien. L’approche traditionnelle fonction-nelle, dont l’unique finalité est la
guérison des malades, se concrétise par ce métier s’est transformé
progressivement, dans cette entreprise, en une approche curative et préventive
se préoccupant du maintien de la santé davantage que de la maladie. Demain,
plus encore que la santé des clients, c'est leur bien-être qu'il s'agira de
considérer globalement.
Cette mutation s’est déroulée sous la pression des patients devenus clients
exigeants et informés, et non plus de malades affaiblis par les risques liés à
leurs maux. Le pharmacien ne peut, dès lors, plus uniquement jouer le rôle de
fournisseur de médicaments. Le passage d’une logique de production à une
logique de demande est donc nécessaire. Les avantages et inconvénients de
cette mutation de logique d'offre à logique de demande sont éclairés à l’aide
d’une situation spécifique.
Mais la complexification des activités de l’entreprise a récemment nécessité la
création d’une holding, afin de clarifier et séparer les différents secteurs
d’activités en filiales. L’avantage de cette nouvelle structure organisationnelle
est, qu’en devenant autonome, chaque filiale peut procéder à une meilleure
analyse des besoins spécifiques de ses clients. Ainsi, le passage d’une
entreprise monolithique à une holding peut être considéré comme un élément
déclencheur favorisant l’implantation d’une véritable orientation marché.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 40
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C – Les leçons
Un des paradoxes rencontrés dans ce cas, et qui concerne toutes les
entreprises familiales, est intrinsèque au problème de la succession. En effet,
tout dirigeant-propriétaire est conduit un jour à abandonner ses fonctions et à
remettre son entreprise aux mains de quelqu’un d’autre. Traditionnellement, la
transmission du pouvoir s’effectue à l’intérieur du cercle familial et privilégie les
liens sanguins aux compétences, avec le risque de compromettre la pérennité
de l’entreprise. Les dirigeants-propriétaires préfèrent alors prendre le risque que
leur entreprise disparaisse plutôt que d’en céder une part à une personne
externe qui serait davantage "tirée" par les enjeux du futur que "poussée" par
l'histoire et la culture organisationnelle.
Actuellement, la famille de Tolédo effectue une réflexion sur les critères de
recrutement des cadres qui seront les dirigeants de demain. Ils remettent ainsi
explicitement en cause les avantages traditionnels dont ils ont eux-mêmes
bénéficié. Privilégiant la survie de l’entreprise aux liens familiaux, ils tentent de
définir les compétences dont devra disposer tout futur dirigeant, qu’il soit issu
de la famille ou de l’extérieur. Les compétences fonctionnelles de tout bon
manager sont encore à définir dans ce contexte en totale mutation. Mais de
surcroît, un problème supplémentaire se pose ici car la perception du risque
diffère fondamentalement entre un dirigeant issu de l'externe et un dirigeant-
propriétaire. Le manager perçoit le risque d’un point de vue personnel,
s’inquiétant essentiellement de sa carrière ; le dirigeant-propriétaire perçoit ce
risque du point de vue de l’entreprise et de sa pérennité. La question est donc
de déterminer à la lumière de ce risque quel type de dirigeant privilégier.
4.7 Le cas de la Télévision Suisse Romande
Cette analyse a été effectuée par Gaëlle Barras et Olga Derkatch.
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A - Le contexte
La Télévision Suisse Romande ( TSR ), unique chaîne publique de Suisse
romande, a été créée en 1958. Depuis cette période, la chaîne a toujours fait
partie du paysage audiovisuel suisse romand remplissant au mieux sa mission
de service public. C’est au début des années '90 qu’une vague de
changements profonds frappe le secteur des médias. Cette période marquant
un tournant dans l’histoire de l’audiovisuel n’épargne ni les pratiques de
télédiffusion, ni la “ consommation ” traditionnelle des médias. Les progrès en
matière de nouvelles technologies, les changements de comportement des
consommateurs sont à l’origine de ces bouleversements. C’est dans ce
contexte que la TSR décide de se lancer dans un projet ambitieux : la
construction d’un centre numérique de production du nom d’Actu 2000. Un site
Internet sera créé dans la foulée.
Ce cas présente une situation de gestion d'un projet révolutionnaire au sein
d’une entreprise publique, ayant une culture et une organisation traditionnelles,
et qui se trouve contrainte de changer sa manière de travailler et de fonctionner
sous la pression de forces externes. Il retrace le chemin parcouru par la TSR
depuis le moment où elle décide de quitter l’univers de l’analogique pour
basculer dans l’ère du numérique. Les mutations irréversibles qui sont
intervenues sont montrées ici à travers la création du site Internet tsr.ch et par
le passage à la numérisation.
B – Le contenu
Ce cas souligne comment, structurellement, la télévision ne peut envisager son
avenir sans produire et diffuser du contenu sur plusieurs plates-formes comme
les écrans de télévision et les écrans d’ordinateurs, par exemple. Ceci est
d’autant plus probable que le lien de parenté naturel entre ces deux médias est
fort : la télévision, aussi bien que son lointain cousin l’ordinateur permettent la
diffusion d’images et de sons. Les perspectives qu’offre la convergence de la
télévision et de l’ordinateur sont multiples : visionner du contenu télévisé en
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temps réel ou en différé sur l’écran d’un ordinateur, regarder des émissions de
télévision sur son PC ou encore se connecter au réseau grâce à un modem en
utilisant son poste de télévision muni d’un décodeur Internet. Tout porte donc à
admettre la convergence est irrémédiable entre ces deux médias.
Ce cas raconte la création quasi clandestine d’un site Internet au sein de la
TSR par un petit groupe de collaborateurs convaincus et tous animés par la
même passion pour les nouvelles technologies de l’information. Ce site Internet
de la TSR faisait partie des trois piliers du projet Actu 2000. Contrairement aux
plans initiaux, sa concrétisation a eu lieu avant celles des deux autres piliers.
Les deux premiers piliers exigeant le soulèvement de fonds trop importants
pour l’année 2000, ceux-ci ont été retardés d’une année. La nouvelle risque
d’entraîner la démotivation des collaborateurs intéressés par les nouvelles
technologies et impliqués dans la réalisation d’Actu 2000, la décision fut prise
de réaliser le site Internet, pilier beaucoup moins onéreux. Sa réalisation a été
discrète, pour d'évidentes raisons de politique interne, et les particularités du
fonctionnement de ce groupe quasi-informel éclaire les leviers de leur réussite.
Internet peut renforcer les liens de proximité entre la TSR et sa clientèle de
base, grâce à l’interactivité notamment. Le cas montre ainsi que le site permet
de réaliser les objectifs stratégiques du pôle i-TSR visant à diffuser du contenu
sur des supports autres que les écrans traditionnels de télévision. C’est en août
2001 que le projet Actu 2000 a été achevé. En septembre 2001, suite à la
restructuration de l’organisation de l’entreprise, un pôle multimédia répondant
au nom d’i-TSR a vu le jour. Le site Internet tsr.ch en fit désormais partie. Le
site concrétise la poursuite d'un développement de la télévision dans son
marché et, parallèlement, l'activité personnalisée vers laquelle elle se dirige. La
logique de travail dans le secteur relève traditionnellement d'une logique de
création-offre de production ; l'interactivité via Internet ajoute la prise en compte
d'une logique de demande émanant du spectateur.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 43
© OVSM - 2002
Mais la création de ce site Internet s’inscrit dans le contexte bien particulier
d'une entreprise de service culturel à but non-lucratif. Il s’apparente à un
service public et s'accompagne d'un cortège de valeurs et considérations
administratives et fonctionnarisées. On relèvera les réactions des salariés du
secteur public par rapport à l’introduction de l’Internet au sein de la chaîne : loin
de susciter de l’enthousiasme, l’Internet est plutôt source de réticences au sein
de la TSR. Les tensions et les crises sont provoquées par l’adoption de
nouvelles technologies de l’information au sein d’un environnement confortable
et fonctionnarisé. Pourtant, parce que leur métier est au cœur de la
communication, les employés de la TSR sont conscients de l’importance de
l’Internet et des nouvelles technologies de l’information et, ce, avant même que
le premier site tsr.ch de la TSR ne soit réalisé.
C – Les leçons
Le cas TSR permet l’identification des différents facteurs contextuels qui ont
poussé l’entreprise à adapter son produit audiovisuel aux exigences du
marché. Dans un deuxième temps, ce sont les éléments pouvant contribuer à la
constitution d’une plus-value du produit par rapport à la concurrence qui sont
abordés. Par ailleurs, le cas souligne l’importance de l’adoption d’une stratégie
orientée client-consommateur afin de satisfaire au mieux la demande du
marché.
Paradoxalement, un grand nombre de collaborateurs de la TSR se sont
opposés dès le début à la création du site tsr.ch rattaché à la chaîne. La
réponse adoptée a également été paradoxale. Ainsi, le petit groupe
responsable de la création du site a exécuté son projet de manière quasi
clandestine. Par la suite, les créateurs du site ont été confrontés à un certain
nombre de freins conscients et inconscients de la part de leur environnement
direct. La stratégie adoptée consiste à imposer un projet pour lui garantir un
acte de naissance irréversible serait-elle, parfois, plus performante que les
méthodes de "gestion de projets par objectifs" telles que préconisées dans les
manuels de gestion ? Le style de management par "détermination" serait-il plus
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 44
© OVSM - 2002
efficace quand il n'y a pas de temps à perdre que le style de management
coopératif, tant vanté ces dernières décennies ?
Le cas illustre la situation d’une chaîne de télévision publique confrontée aux
exigences d'une concurrence internationale féroce qui s’est intensifiée au cours
des dernières années. Les émissions phares, Téléjournaux et actualités
sportives proposées par la TSR ne tiennent plus la vedette et ne garantissent
plus la fidélité d’un téléspectateur romand qui se comporte davantage comme
un client-consommateur. Dans ce contexte, certains dirigeants de la TSR sont
conscients que l’avenir de la chaîne dépend de sa capacité à s’adapter aux
changements et ils sont convaincus que seules de profondes réformes
techniques permettront d’atteindre des résultats à la hauteur des objectifs fixés.
4.8 Le cas de l'UBS SA
Cette analyse a été effectuée par Christine Barbisch et Mirko de Matteis.
A – Le contexte
Depuis une dizaine d’années, le secteur de la banque en général, et celui du
retail banking en particulier, sont confrontés à un environnement en mutation.
Aujourd'hui, l'UBS doit, comme toute entreprise, dégager de la rentabilité. Les
conseillers à la clientèle individuelle sur lesquels se concentre ce cas l’ont
parfaitement intégré. L'UBS est proactive face à une concurrence mondiale et
locale exacerbée, mais d'importantes avancées, dans le domaine de la
technologie notamment, permettent au client d’avoir accès à de plus en plus
d’informations et d'être de plus en plus autonome. Ces changements de
besoins et de comportements traditionnels du client appellent une mutation du
métier du banquier privé.
Ce cas s’inscrit dans une perspective organisationnelle, car il examine la
composante humaine du changement de métier. La démarche présentée
considère la culture commerciale comme la pièce centrale de la problématique
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 45
© OVSM - 2002
de ce changement d'un métier qui s'oriente de plus en plus vers une logique de
vente. Le cas traite principalement du processus d'acceptation par les
employés du front-office (et du back-office) du caractère irréversible de cette
mutation, et il permet l'analyse de son caractère heuristique. Il illustre la
manière normative et coopérative de conduire le processus de changement, au
niveau culturel, structurel et individuel.
B - Le contenu
Le contexte historique de développement de cette grande banque devenue un
des tout premiers groupes financiers mondiaux, depuis la fusion en 1998 de la
SBS et l'UBS est posé. Ayant accumulé les valeurs de ces deux sociétés, l'UBS
SA est un des fleurons de Genève, berceau de la gestion de fortune. C'est dans
ce contexte traditionnel qu'il est demandé aux collaborateurs du Retail Banking,
secteur qui fait partie d'une des quatre entités de l'UBS, d'intégrer après un
changement récent de management dû à la fusion, un nouveau changement
beaucoup plus considérable de leur métier de base.
Ce cas permet l'analyse des principales dimensions d'une stratégie volontaire
de changement. Y sont discutés, tant les processus de formation des
collaborateurs que le rôle de la communication interne, les pratiques de
management et celles du coaching sur le terrain. Le cas illustre comment
l'implication du dirigeant sur le terrain est indispensable dans l'élaboration et la
conduite d'une politique de changement. Il permet de comprendre qu’il faut
laisser du temps au changement pour se réaliser, en sachant être souple dans
les moyens mis en œuvre, tout en restant intransigeant quant à l'objectif visé.
L'un des premiers intérêts est ici la justification de l'imposition du changement
de métier commercial par rapport à une évolution du client, et non par rapport à
une volonté strictement financière, comme il est de coutume en management
stratégique dans ce secteur d'activité. C'est donc une véritable orientation vers
le marché qu'il convient d'insuffler prioritairement à l'organisation. Mais la
diffusion de cette orientation réclame le support de techniques précises de
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 46
© OVSM - 2002
structuration du phénomène. Ainsi, le cas montre comment il est possible de
distinguer les caractéristiques de la population des personnes confrontées au
changement de leur métier, en vue de définir une politique d'accompagnement
adaptée à chacun.
Mais ce cas illustre également la mise en place d'une nouvelle démarche, plus
“ proactive ”, du conseiller face à son interlocuteur. Pour comprendre l'évolution
des attentes de la clientèle, pour savoir comment réagir et mettre en œuvre de
nouveaux comportements adaptés, le conseiller a besoin d'un management
proche du terrain. Autonomes et responsables par culture, certains ressentent
ce coaching de proximité comme une aide rassurante et un soutien dans leur
service à la clientèle ; d'autres l'interprètent comme un contrôle de leur activité,
voire un manque de confiance. Le risque de voir s'instaurer des tensions dans
le climat de travail est toujours présent.
C – Les leçons
Un des paradoxes de ce cas est qu'il n'y a pas une seule bonne manière de
conduire avec succès le changement. Surtout dans un secteur aux traditions
aussi solidement implantées que dans le Retail Banking ; surtout quand
intervient l'omniprésence de l'acteur externe de poids qu'est le client. Qui est le
mieux placé pour savoir ce dont il a besoin : la hiérarchie ou le conseiller
clientèle ? Nous voyons ici la nécessité de situer l'acteur de changement dans
un triple faisceau d'accompagnement, qui lui procure de solides raisons de
s'engager dans le changement. La première composante de ce faisceau est la
diffusion et l'implantation d'une véritable culture d'orientation vers le marché, la
deuxième est la mise en œuvre d'une politique d'information et de formation
adaptée à chaque style de collaborateur; la troisième est la création d'une
véritable politique de communication de "one to one" avec chacun des
collaborateurs dans le respect de sa représentation de la relation "conseiller -
client".
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 47
© OVSM - 2002
Aujourd'hui, la question de la place qu'occuperont les NTIC dans un avenir plus
ou moins rapproché reste en suspens. L’UBS est une entreprise très
informatisée, et ses collaborateurs utilisent largement les nouvelles
technologies. Du côté du client, les NTIC permettent d’avoir accès à plus
d’information n’importe où, n’importe quand, en temps réel, et de réaliser
certaines transactions bancaires indépendamment de tout conseiller. La
question est de savoir jusqu'où aller dans la proposition d'une offre axée, d'une
part sur une possibilité de gestion automatisée autonome du client et, d'autre
part, sur un renforcement d'une politique de vente, de prospection et de conseil
créateurs de valeur ajoutée pour le client.
La mise en œuvre des mutations
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© OVSM - 2002
5. La mise en œuvre des mutations
Lors des travaux en sous-groupes qui se sont déroulés durant la journée de
validation du 27 juin 2002, les participants devaient choisir de traiter des
questions qui leur semblaient les plus importantes et urgentes d'aborder dans le
contexte de crise et de changements actuels. Ces questions étaient issues de
l'analyse de contenu des précédentes synthèses de cas.
5.1 L'entreprise et son environnement
Les questions qui ont servi de guide de réflexion étaient les suivantes : Se
dirige-t-on vers un nouveau rôle social de l'entreprise ? La multinationale est-
elle, d'ores et déjà, un acteur des grands problèmes d'éthique des
entreprises que soulève un contexte planétaire ? La crise du 11 septembre
était-elle un élément précurseur d'une mutation ou une véritable crise ?
Les participants ont tout d'abord constaté que les expressions "rôle social de
l'entreprise" et "responsabilité sociale de l'entreprise" devaient être distinguées
clairement.
En terme de responsabilité, toutes les entreprises de notre panel ont des
programmes qui interdisent, par exemple, aux cadres certaines pratiques
commerciales. Il y a dans les grandes entreprises des valeurs de bases d'un
métier qui s'exerce dans le plus strict respect de l'intégrité. Ainsi, il est fréquent
que chaque collaborateur doive signer une charte d'éthique des affaires (ex.
pas d'argent au noir). Parallèlement, les employés et cadres de l'entreprise sont
également, à titre individuel, des acteurs qui appartiennent à des réseaux
personnels véhiculant certaines valeurs. Et si l'entreprise admet que ses
employés peuvent être des acteurs sociaux dans leur vie quotidienne, elles
souhaitent être co-créatrices d'une certaine responsabilité sociale. Ainsi, la
responsabilité ne se cantonne donc pas aux frontières de l'entreprise et les
systèmes éducatifs, tout comme les media, doivent également engager leur
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 50
© OVSM - 2002
responsabilité en étant porteurs de valeurs que les individus, notamment les
jeunes, puissent s'approprier. Ainsi ne seraient-ils pas surpris des exigences
des entreprises de notre panel en matière de codes d'éthique en vigueur.
Mais l'entreprise a également un rôle social certain à jouer. Les attentes de la
société et de l'environnement se font chaque jour plus précises. Les entreprises
ne peuvent pas ignorer les attentes des diverses organisations non
gouvernementales qui surveillent les pratiques d'un commerce qu'elles
souhaitent équitable et éthique. Les dirigeants d'entreprises ne peuvent ignorer
le mouvement de fond des jeunes de plus en plus éveillés aux particularités de
la mondialisation. Mais, en outre, il est des marques symboliques au niveau du
grand public induisant des croyances vivaces quant à leur rôle social. À l'instar
de l'UBS, de Danone ou de la FNAC, ces marques fédèrent des attentes assez
précises de la part du public en général. L'entreprise est devenue porteuse de
valeurs issues de croyances sociales durablement enracinées. Tel est le lot,
dans ce pays, de toutes les activités qui portent intrinsèquement le label de
"Swiss".
Certes, les entreprises entretiennent des croyances de cette nature en ayant un
rôle actif. Par exemple, les investissements sociaux, le mécénat et le bénévolat
sont autant d'actions qui renforcent ce rôle social perçu. Ce sont autant de
moyens que se donne l'entreprise pour être en phase avec l'environnement
dans lequel elle agit, pour en comprendre les mouvements en cours. Mais, ces
actions sociales à leur tour impliquent une responsabilité. Il s'agit
principalement, pour une compagnie multinationale, de ne pas imposer à
l'environnement international dans lequel elle agit ses valeurs et sa culture
spécifique.
5.2 Les mutations de l'organisation et des hommes
Les questions qui ont servi de guide de réflexion étaient les suivantes : Y a-t-
il une mutation réelle des "ressources humaines" vers une considération du
capital humain de l'entreprise ? Combien de métiers sont-ils en train de subir
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 51
© OVSM - 2002
une totale mutation ? Les crises actuelles vont-elles ramener les individus
vers des valeurs plus fondamentales ? L'entreprise en réseau est-elle
toujours gage de flexibilité, d'autonomie et de réactivité ?
La question de savoir si les métiers sont en mutation ou subissent une crise est
un faux débat. En quelques années, le contenu, comme les aspects
fonctionnels et les composantes techniques de tous les métiers se sont
modifiés en profondeur. La finalité même des métiers a changé.
Ainsi, au niveau de leur contenu, les métiers d'aujourd'hui réclament plus de
proactivité afin d'aller au-devant des besoins de la clientèle. Un exemple parmi
d'autres : on est passé en dix ans d'une TV de réalisateur à une TV de
journaliste et aujourd'hui à une TV de présentateur. Ceci implique que toute la
chaîne des métiers du back-office subit une mutation. On va demander à des
personnes qui avaient un rôle précis dans une chaîne connue de production
d'un service donnée, de devenir polyvalentes. Un phénomène strictement
similaire se produit dans tous les secteurs. Aujourd'hui, ces métiers appellent
une proactivité qui conduit à aller au-devant des besoins de la clientèle et une
aptitude à s'adapter continuellement au changement. Les rôles professionnels
ont une complexité accrue de réalisation.
Aujourd'hui, il est en outre nécessaire de s'adapter en permanence à de
nouveaux outils qui permettent de réaliser mieux et plus vite le travail. Mais à
cause de cette dimension technique inhérente à chaque métier, les modes
d'acquisition deviennent plus complexes. Sous l'impact des NTIC, il y a eu une
accélération des techniques dont les cycles de renouvellement vont toujours
plus vite. Certains secteurs évoluent considérablement. Partout de nouveaux
métiers d'interface apparaissent : les personnes qui répertorient les images, les
informations et les données sur la clientèle (celles qui sont issues de la veille
marketing comme celles provenant des indicateurs stratégiques), doivent
souvent apprendre instinctivement des rôles professionnels nouveaux sur
lesquels s'ancreront de nombreuses autres professions de l'entreprise.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 52
© OVSM - 2002
Ajoutons que les nouveaux outils techniques changent les métiers beaucoup
plus en profondeur qu'on ne le croit. Ainsi la possibilité de zapper sur les
chaînes de TV fait que l'on n'emmagasine pas de la même manière les
connaissances, ni la façon de les traiter. Le fait de chercher de l'information sur
"la toile" modifie également le champ et les perspectives des connaissances. Le
sachant, le métier des créateurs et des pourvoyeurs de connaissances, les
mondes des media et de l'éducation ou de la politique, sont également en
pleine mutation. Or, dans l'entreprise, on introduit de nouveaux media, mais on
ne sait pas comment ils sont réellement utilisés (ex. les mails ou les Intranets
que chacun utilise sans forcément en maîtriser la puissance et le potentiel). Et
ces interrogations ne se suffisent pas d'une réponse fondée sur les mentalités
des utilisateurs ; elles s'inscrivent bien dans la structuration même de leurs
connaissances et de leurs métiers.
Il y a donc, au niveau du contenu et de la mise en œuvre concrète des métiers,
une véritable crise des métiers. Mais comme cette crise s'est propagée sur
quelques années, on n'en perçoit pas encore tous les tenants et aboutissants. Il
demeure que pour les individus qui ont vu leurs métiers se modifier parfois du
tout au tout, il s'agit bien d'une véritable crise intérieure, plus ou moins bien
supportée. Il devient donc primordial de considérer ici que le "middle
management" n'est plus la courroie de transmission du haut en bas. Ces
personnes doivent sortir de leurs bureaux (et de leur isolement éventuel), se
mettre au travail à côté de leurs collaborateurs afin d'amorcer durablement le
changement.
Ainsi, les métiers se trouvent en situation de mutation profonde. Et, puisque l'on
doit, à présent, parler en terme de "rôle professionnel" et non de compétences
spécifiques, le premier des métiers à subir une mutation est celui de
responsable des ressources humaines.
On est d'ores et déjà très loin du DRH qui se contentait de traduire les
intentions stratégiques des dirigeants ou de simplement d'appliquer les
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 53
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instructions fonctionnelles des financiers souhaitant réaliser des économies via
le re-engineering. Créer une direction des ressources humaines séparée du
management serait une erreur en période de mutation de l'ensemble de
l'organisation. L'idéal est que ce responsable du capital humain soit issu du
terrain, de l'opérationnel, afin de comprendre véritablement les métiers et leurs
processus de mutation.
Cette évolution ne doit pas entraver la nécessaire fonction technique des
ressources humaines. En effet, quand l'entreprise est en situation de mutation
positive, il est aisé de mettre en place des politiques de type "gagnant-gagnant"
dans lesquelles chaque collaborateur sait qu'il peut trouver son
épanouissement professionnel. Or, c'est lorsque la situation devient plus
tendue, qu'il est important que les services de "Capital Humain" aient les
moyens techniques qui leur permettent d'éviter que les mutations à engager ne
se traduisent par des politiques démotivantes. C'est justement dans ce type de
périodes que les directions du "Capital Humain" doivent pouvoir concevoir des
politiques d'accompagnement techniques et humaines de changement de
concert avec le Directeur général qui reste le véritable responsable des
ressources humaines de son entreprise.
5.3 Le projet de mutation du métier central
Les questions qui ont servi de guide de réflexions étaient les suivantes : Un
projet réussi a-t-il (souvent) un développement anti-démocratique ? Le
dirigeant est-il un patron ou un gestionnaire ? Quel sera sa perception du
risque pour l'entreprise et pour lui-même ? Les décisions stratégiques
prennent-elles une véritable orientation marketing ?
Dans une période où la mutation des métiers s'impose à tous et où,
parallèlement, le métier central de l'entreprise évolue vers une optique
délibérée de vente, le changement de l'organisation se conçoit d'une part sur la
base du changement des hommes et, d'autre part, par la conduite précise de
projets de mutation culturelle.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 54
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Il ne s'agit surtout pas de "catégoriser" les collaborateurs en fonction de leur
aptitude plus ou moins nette à accepter le changement du métier central et à le
mettre en œuvre. Trois raisons majeures interdisent ce type de pratique :
a) Méthodologiquement, il est possible de segmenter un ensemble de
population en plusieurs catégories par déduction ; mais on ne peut pas,
par induction, créer des catégories explicatives et comportementales de
personnes.
b) Conceptuellement, on peut induire des catégories compréhensives sur la
base d'attitudes profondément enracinées et librement choisies par les
individus ; mais pas induire des catégories descriptives sur la base de
comportements particuliers et, de surcroît, temporaires.
c) Éthiquement, ce type de pratique de catégorisation du personnel
d'entreprise serait une position qui ne respecterait pas le libre choix
individuel de la personne à évoluer si on lui fournit simplement la preuve
que sa nouvelle position sera plus valorisante que l'ancienne et si on lui
offre les moyens de se réaliser.
La seule solution viable à long terme, et démocratique, est donc d'impliquer les
personnes concernées par la mutation dans un projet spécifique et collectif. Car
c'est dans l'action que l'implication de chacun peut naître et se développer.
Mais la réussite de tels projets nécessite des précautions spécifiques. Tout
d'abord il faut éviter, autant que possible, l'habitude d'un manque d'originalité
des nouveaux projets engagés qui reposent souvent, dans l'entreprise, sur une
reprise de projets antérieurs non complètement finalisés. Ceux-là ne sont, ni
très motivants, ni très stimulants.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 55
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Les véritables projets porteurs intrinsèquement d'une mutation culturelle et
pouvant conduire à la diffusion d'une véritable culture orientée vers la vente et
impliquante pour chacun doivent avoir les caractéristiques fonctionnelles qui
suivent.
• Un projet doit d'abord avoir un but clairement identifié aux yeux de tous
ses réalisateurs.
• Il doit également être conçu avec des mesures précises de sa réussite,
afin que chacun soit en mesure de savoir quand et dans quelle mesure
les objectifs sont atteints.
• Chaque projet appelle un pilotage précis avec des procédures de mise
en place adaptées aux spécificités de chaque projet.
• Un homme/une femme placé(e) à sa tête doit être pourvu(e) d'un
charisme certain et savoir se créer une "bulle d'indépendance".
• Ce leader doit être capable de voir loin et de transcender les différents
conjoncturels qui peuvent se produire.
• Il/elle doit avoir le pouvoir de décider, lorsque se présente un problème
technique qui n'appelle pas de décision consensuelle, et que la
subjectivité de certains acteurs risquerait de freiner le projet.
• Il/elle doit bénéficier d'un contexte favorable permettant de laisser le
temps au temps du projet, sans brusquer les choses.
• Le projet doit bénéficier de la protection des instances dirigeantes de
l'entreprise afin d'éviter les risques d'intervention de personnes qui
n'auraient pas le même niveau de compréhension de ses tenants et de
ses aboutissants pour l'organisation.
• Une vision démocratique, qui permet à chacun d'adhérer au projet en
comprenant comment et pourquoi le projet va dans le strict sens de
l'intérêt général, puis de s'en sentant porteur jusqu'au bout.
Ces projets appellent des compétences multidimensionnelles transversales de
la part de leurs responsables (lesquels peuvent toujours se faire seconder pour
les aspects techniques du pilotage par des spécialistes en la matière). Mais le
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 56
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vécu du projet, sa réalisation réclament tour à tour des aptitudes d'ingénieurs,
d'architectes, de psychologues, de leader et de gens pratiques. Ici encore il
s'agit d'être véritablement polyvalent et transversal dans son rôle professionnel.
5.4 Une nouvelle stratégie de marque
Les questions qui ont servi de guide de réflexion étaient les suivantes : Y a-
t-il modification de la politique des marques pour définir des valeurs de
marque ? Que reste-t-il des marques une fois qu'elles se sont
internationalisées ? Les individus seront-ils les bénéficiaires d'une
standardisation de la communication?
On ne peut pas choisir délibérément d'opter pour une culture de vente si l'on ne
reconsidère pas également le rôle de la marque tant dans la société que dans
la relation entreprise-client.
Au niveau social, il est devenu impossible de ne pas associer les marques à
l'actualité. Il y a quelques années, les media pouvaient sûrement éviter de
parler de marques, mais à présent ils ont franchi une véritable frontière en les
intégrant à leurs discours. Car les marques font totalement partie du paysage
social et économique, et les media se font à leur tour leurs porte-parole en
véhiculant leurs messages essentiels.
Mais attention, cette nouvelle visibilité s'accompagne d'une indispensable veille
éthique de la part des entreprises, veille d'autant nécessaire qu'aujourd'hui la
transparence est de mise. Les media n'hésitent pas non plus à épingler les
marques qui se risqueraient à être associées à des soupçons de pratiques
déontologiquement critiquables.
Ainsi, autrefois les marques étaient liées exclusivement à des produits et des
services échangés entre clients et entreprises. Aujourd'hui ces marques ont
leur vie sociale propre, et elles sont devenues un troisième acteur de poids des
échanges sociaux, économiques et même politiques.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 57
© OVSM - 2002
La stratégie de marque appelle donc l'avènement de nouvelles définitions plus
précises qui correspondent mieux à une définition élargie des échanges
commerciaux. Dans la relation entreprise-client, il devient indispensable de
différencier clairement trois types de marques.
a) La marque comme label technologique : ici le client est supposé capable
d'établir une relation étroite entre le produit ou service et le rendement
attendu comparativement à ceux proposés par des produits ou services
concurrents. Dans ce type de marques la seule alternative consiste à
construire systématiquement sa réputation sur la valeur ajoutée au client
lorsqu'il intègre ce type de produit et de service à sa propre production. Que
cette production soit d'ailleurs celle existant dans le "B to B" ou celle de la
production d'activités (de loisir, de travail, sociales, etc.) spécifiques par le
client du "B to C".
b) La marque comme un spectacle : ici le client ne peut comparer les
performances des marques concurrentes mais il va s'associer à une
certaine image personnelle ou sociale générée par le produit ou service.
L'entreprise communique sur ce spectacle auquel il invite ses clients à
participer. Ainsi on ne peut-on pas affirmer que le goût de "Pringles aux
oignons" est techniquement meilleur que celui de produits concurrents,
puisque le goût est tout à fait question individuelle. Alors, on communique
sur une image, et le client aime - ou pas - ce style "Pringles". Autre
changement du "spectacle" : on ne porte-on plus ses initiales sur la poche
de sa chemise, mais le logo d'une marque à la mode.
c) La marque comme un espace virtuel : ici le client "entre" dans le monde du
produit ou service proposé. On devient porteur d'une montre Baume &
Mercier ou adhérent de la FNAC. L'entreprise communique donc à ses
clients sur la base de l'appartenance à des valeurs profondes d'une
entreprise qui n'a plus dès lors que le choix de se construire sur des
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 58
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connotations intrinsèques durables. Au-delà d'un style il s'agit bien d'une
proximité de personnalité et de valeur entre une marque et ses fidèles
clients.
Notons à ce propos que les responsables de Max Haavellar se détachent
clairement des critiques actuelles sur les marques, même si ces critiques se
rattachent à un mouvement anti- mondialisation qu'ils respectent. En effet, les
attaques des marques à réputation mondiale confondent dans un même lot tant
les marques de type "label technologique", que les "marques spectacles" ou les
marques "espaces virtuels". Or, ce que proposent les défenseurs d'un
commerce équitable est bien la reconnaissance intrinsèque que leur marque
est le signe formel d'appartenance à un espace virtuel et pourtant bien concret
d'un commerce équitable. Vouloir tuer les marques ou attaquer indistinctement
la publicité reviendrait à vouloir jeter le bébé avec l'eau du bain. Une telle
attitude est nuisible à la société et aux individus, car comment se reconnaître si
on ne se nomme pas ?
Par contre, ces questionnements liés au phénomène de marque conduisent à
s'interroger sur une plus juste information aux clients de ce que recouvre
chaque marque et à mettre ensuite en place une politique de communication
adéquate.
A ce titre, il est significatif qu'une entreprise comme la FNAC, "marque
virtuelle", ait créé le poste de directeur marketing il y a moins de cinq ans.
L'entreprise n'ayant jamais été une "marque spectacle" n'avait simplement pas
besoin des anciens outils du marketing. La marque s'est simplement construite
seule, année après année. Ainsi, il est vrai que la publicité s'est essentiellement
épanouie dans la "marque spectacle" tout au long du XXème siècle. C'est tout
un projet de communication qu'il faut à présent mettre en œuvre.
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5. 6 La proximité client
Les questions qui ont servi de guide de réflexion étaient les suivantes : Y a-
t-il une instauration et/ou un renforcement de relations directes avec le client
? Va-t-on assister à une modification du système de valeurs de l'entreprise
et à une orientation marché ?
Au niveau global, il apparaît à tous que le paradigme marketing est en train de
se modifier fortement pour aller dans le sens d'un nouveau paradigme "client".
Celui-ci est au cœur de l'organisation. Il ne s'agit donc déjà plus d'une
"orientation marché", mais véritablement d'une "orientation client". La différence
est que l'orientation marché recouvre la mise en œuvre d'une culture spécifique
comme abordée au § 5.3. L'"orientation client", pour sa part recouvre
l'ensemble des actions spécifiques mises en œuvre de manière systématique
avec l'appui des outils techniques adéquats.
Dans le processus de rencontre du client avec le produit ou le service proposé,
il convient d'identifier clairement les "instants de vérité". De la prise de
renseignement sur le produit ou service (par Internet, téléphone ou sur le lieu
de vente), à l'évaluation du produit ou service et, finalement, à son utilisation en
tête-à-tête, le client doit savoir précisément quelle valeur ajoutée il obtient du
produit ou service.
Les nouveaux outils (NTIC) rendent la présence du client active même pour les
gens du back-office. Ainsi, cette orientation client conduit chacun dans
l'organisation à se préoccuper de qui génèrera un véritable bénéfice au client.
Dans le "B to C", les entreprises répondent de moins en moins aux besoins
ponctuels de leurs clients, mais elles les accompagnent dans leurs besoins. Le
plus souvent il s'agit de bien comprendre la place que le produit ou service
occupe dans la vie en général de l'individu. Pour certains produits, tels les
produits financiers, il s'agit de les situer dans le cycle de vie personnel des
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 60
© OVSM - 2002
clients. On adapte l'offre en fonction de ce cycle et des informations obtenues
directement dans le dialogue avec le client.
Mais c'est sans doute au niveau des biens industriels et du "B to B" que le
nouveau paradigme prend le plus de vigueur. Pour certaines entreprises, telles
Caterpillar, c'est un virage à 180° car on cherche maintenant systématiquement
ce que le client va faire du produit ou du service. Ensuite seulement on
détermine avec lui ce dont il va avoir besoin dans une politique de "sur-
mesure". Chaque valeur ajoutée est déterminée en fonction de chaque client.
C'est dans cette optique que de véritables programmes de mutation interne
sont mis en œuvre dans les entreprises du secteur industriel.
Conclusion
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6. Conclusion
Après avoir analysé le cas des huit entreprises de notre panel, toutes
représentatives de leurs secteurs d'activité, nous avons analysé un par un les
éléments de notre modèle. Ainsi, la relation de l'entreprise à l'environnement,
puis les mutations de l'organisation et des hommes, le projet de mutation du
métier central et enfin la détermination d'une nouvelle stratégie de marque et
d'une "proximité client" accrue, ont permis d'induire de nouvelles propositions
conceptuelles et pratiques.
Au terme de cette recherche nous avons considéré la manière dont les
mutations et les crises sont vécues par les entreprises.
Notre travail de recherche sur le terrain, et la journée de validation par les
dirigeants d'entreprise, ont permis de comprendre quel était finalement le
ressort de toutes les mutations en cours ; que ces mutations soient dans les
entreprises ou dans leur environnement, au niveau macro comme au niveau
micro, dans la réflexion comme dans la mise en œuvre. Ce ressort de "la"
mutation repose sur un changement de vision.
Alors qu'avant l'action se concevait comme "descendant" de la stratégie et
fondée sur une logique déductive et normative, elle se conçoit aujourd'hui de
manière radicalement différente. Les mutations en cours résultent d'abord, et
avant tout, d'une logique inductive par laquelle on s'efforce de comprendre les
raisons du terrain et celles du client, les motivations des employés du front-
office comme celles des employés du back-office. Là, les projets de
changement ne sont plus le fruit d'une "logique d'ingénieur" mais le résultat
d'une implication de chacun des acteurs.
Ce changement radical de perspective, s'il respecte l'individu, le client ou le
membre de l'entreprise, n'exclut pas l'usage des anciens outils du marketing
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traditionnel, de la segmentation des clients à la publicité de masse. Mais elle les
cantonne désormais simplement à des situations spécifiques et connues de
situations standardisables et aux "marques spectacles".
Toutefois, la mutation ne saurait s'imposer sans risques, car les gardes-fous
n'ont pas encore été inventés. Ainsi ce changement de perspective, s'il
respecte également et peut-être surtout les raisons des individus présentent le
risque de mettre dans les mains de tout un chacun des outils puissants
d'analyse de la situation et de décision. Par exemple l'accès de plus en plus
facile à l'information implique qu'il n'y a pas de différence apparente entre un
mauvais site Internet et celui d'un bon site de contenu, le discours d'un bon
journaliste ou d'un journaliste biaisé, les conclusions d'un chercheur rigoureux
et celles d'un illuminé.
La conviction de tous ceux qui ont participé aux travaux présentés dans ce
document est que c'est dans un travail de validation croisée comme ceux que
mènent ensemble chercheurs, responsables d'entreprise, gens des media et
étudiants qu'un sens prudent - mais authentique - peut être donné aux
mutations sociales et économiques actuelles. Ce travail ne fait que commencer.
Annexe
Méthodologie détaillée
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Note technique sur la méthode des cas
La méthode des cas utilisée dans cette recherche a été mise au point dans le
but de permettre de rencontrer, d'une part les objectifs de recherches de type
ethnologique, tels que définis dans des ouvrages de recherches traditionnels et,
d'autre part, de permettre l'induction de méthodes spécifiquement pédagogique.
Elle s'inspire de notre ouvrage "Gestion et pédagogie : une approche nouvelle
par la méthode des Cas" (ed. MacGraw Hill, 1990) et du récent ouvrage "La
méthode des cas - Application à la recherche en gestion", de Martine Hlady
Rispal, (ed. DeBoeck Université, 2002).
Les étapes principales de réalisation de cas que nous proposons aux étudiants-
enquêteurs sont fondées sur les documents suivants :
• Choix de la problématique du cas
• Objectifs du cas et recueil des données
• Plan synoptique
• Note de synthèse
• Cas rédigé
• Contrôle du cas
a) Choix d'une problématique de cas :
Avant leur premier entretien avec les responsables de l'entreprise sélectionnée,
les étudiants-enquêteurs regroupent les articles qui se réfèrent à l'entreprise.
Ce type de dossier permet au rédacteur d'avoir une bonne connaissance de
l'entreprise où sera réalisé le cas, avant même que ne débutent les entretiens
préliminaires. Un index chronologique des sources d'informations recueillies est
tenu à jour, afin de faciliter la constitution d'un dossier spécifique.
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Les entretiens débutent avec un dirigeant dont le niveau hiérarchique permet le
mieux d'appréhender la situation réelle. On procède à l'aide d'entretiens non
structurés et non dirigés ou, éventuellement, d'entretiens non structurés et
dirigés si on a déjà une bonne connaissance du sujet qui sera traité (cf.
méthodologie décrite dans le document de synthèse OVSM 2001).
b) Objectifs du cas et recueil des données :
La première étape de la réalisation d'un cas est celle de la mise au clair des
objectifs du cas avec le professeur responsable. Il s'agit, pour ce dernier, de
procéder par maïeutique afin de comprendre avec les étudiants-enquêteurs
quels sont les objectifs principaux et les objectifs spécifiques du cas traité. Ces
derniers sont rédigés en termes de verbes d'action pour le lecteur ("faire
analyser", " faire comprendre", etc"), afin de concevoir d'emblée le cas comme
tout à fait dynamique et non comme une simple description d'une situation
spécifique.
• Les objectifs principaux (un à deux) : ce sont ceux qui définissent l'intérêt
majeur représente le cas. Permet-il d'illustrer un concept spécifique ? de
faire analyser une problématique nouvelle ? de critiquer une démarche
ou une action stratégique de l'entreprise ?
• Les objectifs spécifiques (quatre à six) : ce sont ceux qui permettent de
conduire le lecteur du cas à atteindre les objectifs principaux.
Suite à l'écriture des objectifs du cas, les étudiants-enquêteurs recueillent les
données nécessaires à sa réalisation. Quatre types de données seront utilisées
:
• Les données internes primaires et secondaires.
• Les données externes primaires et secondaires.
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Dès que l'on progresse dans la réalisation du cas, l'objet des entretiens se
précise et ces derniers sont menés au rythme d'entretiens structurés de plus en
plus dirigés. Les questions sont classées par thèmes, et la personne interrogée
est informée de ces thèmes afin d'éviter qu'elle ne se perde dans de longs
développements.
c) Plan synoptique :
Le plan synoptique est le lien entre les objectifs définis et la réalité de
l'entreprise reproduite par la rédaction finale du cas. Le plan synoptique intègre
tous les éléments – ou indices – qui permettent aux lecteurs de mener à bien
leur analyse. Les indices peuvent se situer à tout endroit du cas, à condition
toutefois qu'ils ne soient pas les uns à la suite des autres (dans la vie réelle des
entreprises, ils ne sont jamais présentés de façon linéaire).
Le plan synoptique permet au professeur responsable, comme aux étudiants-
enquêteurs, de vérifier rapidement si le cas, tel qu'il sera rédigé, apparaît
satisfaisant. L'étape d'évaluation du plan synoptique prend le plus souvent la
forme d'une négociation. En revanche, une fois l'accord final acquis, le
rédacteur peut se lancer sans appréhension dans la rédaction finale. Ainsi, ce
plan synoptique est un garde-fou qui permet au rédacteur d'éviter de confondre
"verbiage" et "illustration" lors de l'écriture finale.
Notons que pour un cas final d'environ 25 pages, le plan synoptique devrait en
comporter le cinquième, soit environ 5 pages.
A ce stade, il arrive parfois que les objectifs doivent être modifiés, simplement
parce que les personnes interviewées se sont ouvertes et parlent davantage à
partir du 2ème entretien, et surtout parce que les étudiants-enquêteurs savent
mieux ce qu'ils cherchent et posent des questions plus pointues. Un cas, est
quelque chose de vivant qui évolue parfois au cours de rédaction. C'est l'aller-
retour "objectifs <--> plan synoptique" qui compte dans ces situations.
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d) Note de synthèse :
Il y a entre "note de synthèse" et "cas écrit et finalisé", la même relation qu'il y a
eu entre "objectifs" et "plan synoptique". C'est d'une relation d'aller-retour avec
aménagement de l'un et l'autre de ces deux documents que va naître la
production. La seule différence est qu'entre "objectifs" et "plan synoptique" le
chercheur se comporte comme un architecte définissant les dimensions et les
plans d'attaque du design de cas. Le travail entre "note de synthèse" et "cas
écrit et finalisé" en est un de romancier.
La note de synthèse a 3-4 pages et suit le plan suivant :
• Contexte du cas :
- Situer le cas avec unité de temps et d'espace, acteurs,
problématique, par rapport au contexte économique, social et de
management (§1)
- Intérêt général du cas, tel que formulé à peu près dans la fiche
"objectifs" (§2).
• Contenu du cas :
- Objectifs généraux et spécifiques en expliquant comment, dans le
cas on les rencontre (§ 3, 4, 5, 6)
- Les paradoxes, risques et dangers que la "théorie des livres" ne
semble pas expliquer mais que, justement, le cas permet d'illustrer
(§7)
- Question finale sur laquelle le cas n'apporte pas de réponse, mais au
contraire incite à s'interroger (§ 8).
e) Cas rédigé :
Le jeu de construction consiste à placer toutes les briques une à une du
"roman" qui découle des étapes précédentes.
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• Son unité de temps : elle concerne le déroulement du cas. Il doit être
logique et les informations données doivent s'enchaîner clairement.
• Son unité d'espace : le rédacteur doit vérifier que tous les éléments et les
acteurs du cas sont en place. Il lui faut également vérifier que les acteurs en
présence peuvent être facilement identifiés et que leur présentation ne prête
pas à des spéculations subjectives de la part du lecteur.
• Son unité d'action : le cas doit se dérouler selon la trame d'un roman
classique : situation initiale, héros, perturbation de l'état d'équilibre,
adjuvants et opposants, épreuves intermédiaires, acquisitions de forces
spécifiques, épreuve finale.
Le style rédactionnel doit être en accord avec l'objectif du cas.
f) Contrôle du cas :
Le contrôle d'un cas est effectué par l'enseignant responsable du cas, par le
rédacteur ainsi que par les personnes de l'entreprise. Suite à ces contrôles, des
modifications peuvent encore se produire et le cas peut devoir être en partie
réécrit ou reformulé.
Contacts & renseignements
Observatoire de Vente & Stratégies du Marketing HEC MANAGEMENT STUDIES UNI MAIL - Boulevard du Pont-d’Arve 40, CH-1211 Genève 4 Tél. / Fax. : 41 (0) 22 798 42 04 ou 41 (0) 22 705 8822 E-mail : [email protected] ou [email protected] Web site : http://ovsm.unige.ch/