LES EUROPEENS ET LA PENINSULE INDIENNE - … · LIVRET REF – L. 036 LA COMPAGNIE FRANCAISE DES...

14
LIVRET REF – L. 036 LA COMPAGNIE FRANCAISE DES INDES ORIENTALES LES EUROPEENS ET LA PENINSULE INDIENNE LES FRANCAIS « LA COMPAGNIE FRANCAISE DES INDES ORIENTALES » (1660 à 1782) © www.kergour.com Reproduction Interdite Janvier 2013

Transcript of LES EUROPEENS ET LA PENINSULE INDIENNE - … · LIVRET REF – L. 036 LA COMPAGNIE FRANCAISE DES...

LIVRET REF – L. 036 LA COMPAGNIE FRANCAISE DES INDES ORIENTALES

LES EUROPEENS ET LA PENINSULE INDIENNE

LES FRANCAIS

« LA COMPAGNIE FRANCAISE DES INDES ORIENTALES »

(1660 à 1782)

© www.kergour.com Reproduction Interdite Janvier 2013

2

3

Au 16ème siècle, quelques aventuriers français armeront des navires pour aller « aux Indes » et en

rapporter des épices. Quelques-uns seulement réussiront à éviter les contrôles portugais dans l’Océan

Indien, à rejoindre la côte Ouest de la Péninsule Indienne et à s’y procurer des épices. De retour, ils

vendront bien leurs cargaisons mais renonceront à créer un trafic régulier car les Portugais sont

vigilants et les risques trop grands.

Début du 17ème siècle, les conditions ont changé. Les Portugais n’exercent plus un contrôle absolu de

l’Océan Indien mais les Hollandais ont pris leur place et n’hésitent pas à confisquer ou couler les

navires européens s’aventurant au-delà du Cap de Bonne Espérance.

En dépit des risques courus, de très nombreuses petites compagnies de navigation sont créées à

ST-MALO ou à DIEPPE. Elles ne seront jamais capables de générer des trafics commerciaux

réguliers et d’une certaine importance et elles disparaîtront très rapidement.

RICHELIEU, semble-t-il, comprendra la nécessité de s’intéresser à l’Extrême-Orient et il négociera en 1624 avec les Hollandais le « Traité de Compiègne » qui accorde aux Français le droit de commercer librement dans l’Océan Indien, mais, curieusement, les commerçants français ne profiteront pas de l’opportunité qui leur est offerte : l’intérêt pour l’Orient était alors passé.

Il va falloir attendre 30 ans pour que COLBERT, dans les années 1650, s’inquiète des prises de positions hollandaise et anglaise en Extrême-Orient. Il estime, et il est approuvé par LOUIS XIV, que la France ne peut rester absente de cette immense et riche région et il décide de fonder, en 1664, une compagnie commerciale semblable aux compagnies anglaise et hollandaise qui y sont déjà implantées.

Cette compagnie sera :

« La Compagnie Française pour le Commerce des Indes Orientales » que nous appellerons la COMPAGNIE FRANCAISE.

Sa devise sera : « Je fleurirai où je serai porté ».

Le monopole du commerce du Cap de Bonne Espérance au Cap Horn – (c’est là une conception nouvelle) lui est concédé pour 50 ans.

Ses statuts, semblables à ceux d’une manufacture royale, font d’elle une entité privilégiée exemptée de taxes et disposant de la garantie de l’Etat. Elle reçoit également le pouvoir de nommer des ambassadeurs, de déclarer la guerre et de conclure des traités !!!

Son capital initial de 8.8 millions de livres est souscrit par l’Etat.

Son siège est à LORIENT.

On est là totalement à l’opposé des conceptions hollandaise et anglaise. Pour les Anglais et les Hollandais, de telles compagnies de navigation sont des sociétés « à risques » et doivent donc être exclusivement « privées », le Gouvernement n’étant pas censé courir de tels aléas financiers.

4

5

Par ailleurs, la COMPAGNIE FRANCAISE s’est vu fixer des objectifs multiples. Certes, elle doit « commercer » et faire activement concurrence aux Hollandais et aux Anglais, mais elle doit aussi :

- objectif politique : affirmer la présence française dans les mers orientales,

- et objectif culturel et religieux : propager la civilisation française et la religion chrétienne.

Et là encore, on se trouve bien loin des Hollandais et des Anglais qui, eux, n’ont qu’un seul objectif sur lequel ils se concentrent avec toute leur énergie : commercer et gagner de l’argent….

En somme, COLBERT a voulu créer une compagnie qui serait semblable aux compagnies hollandaises et anglaises, de droit privé, et exclusivement vouées au commerce et finalement, il crée une compagnie étatique aux objectifs multiples et de plus confus !!!

Dès 1666, la COMPAGNIE FRANCAISE se manifeste en Inde en s’établissant à SURAT puis, au cours des 30 années suivantes, à MASULIPATAM, PONDICHERRY, CHANDERNAGOR et enfin à CALICUT et MAHE.

Ce spectaculaire effort d’implantation est accompagné d’un effort équivalent dans le domaine commercial. La COMPAGNIE adopte une attitude originale. Contrairement à ses prédécesseurs et concurrents, elle entre en contact direct avec les producteurs afin de réduire le rôle des intermédiaires et elle privilégie la qualité. Les résultats sont très bons. Les exportations augmentent et les profits sont substantiels.

En 1700, c’est-à-dire seulement 30 ans après son apparition sur les côtes de la Péninsule, la COMPAGNIE FRANCAISE peut s’enorgueillir d’un vrai succès. Elle est solidement implantée. Elle est bénéficiaire et PARIS se déclare satisfait.

Au cours des deux décennies suivantes, malheureusement, la situation se dégrade. Les Hollandais ont, dans la deuxième moitié du 17ème siècle, beaucoup souffert de la concurrence anglaise et ils cherchent par tous les moyens à redresser leurs affaires. Quant aux Anglais, tenaces, concentrés, ils continuent d’augmenter régulièrement leurs parts du marché sans cacher leur volonté de s’assurer le monopole absolu du commerce avec l’Inde.

Pour la COMPAGNIE FRANCAISE, la concurrence est trop rude. Elle ne peut faire face, les exportations diminuent ainsi que les bénéfices dans des proportions telles que sa survie financière est compromise. En 1720, la COMPAGNIE FRANCAISE est sur le bord de la faillite et les autorités françaises convainquent LAW, le fameux financier parisien « à la mode » de reprendre la société. Cette reprise ne sera pas un succès, au contraire, et dès 1722, la COMPAGNIE FRANCAISE doit être « réorganisée » évidemment par l’Etat.

Réorganisée, elle devient la « COMPAGNIE des INDES » et reprend ses activités commerciales.

6

Pondichéry

7

Les 20 années qui suivent sont difficiles jusqu’à ce que DUPLEIX, qui sert la COMPAGNIE en Inde depuis 1725, soit nommé en 1744, Directeur Général des Comptoirs Français de l’Inde. Connaissant parfaitement le contexte indien (de son fait et aussi de celui de son épouse JEANNE, une métisse passionnée de l’Inde que le peuple appelle JAN BEGUM), DUPLEIX, énergiquement, va donner une impulsion politique agressive à la COMPAGNIE.

Alors que DUPLEIX vient d’être nommé Directeur Général, la Guerre de Succession d’Autriche éclate en Europe. Immédiatement, DUPLEIX passe à l’offensive et, avec l’appui de la flotte de l’Amiral de la BOURDONNAIS, arrivé de MAURICE, enlève MADRAS, en dépit de la résistance obstinée organisée par celui qui sera désormais son opposant, Robert CLIVE.

Puis, sans tarder, DUPLEIX intervient par l’intermédiaire de son brillant adjoint, le Général de BUSSY, dans la succession du Nizam d’HYDERABAD. C’est le sort du DECCAN qui est en jeu et naturellement, là aussi, il se heurte aux Anglais et à Robert CLIVE.

Enfin, DUPLEIX intervient dans le CARNATIC à l’occasion de problèmes de succession et y acquiert des positions avantageuses.

On peut estimer qu’il est en passe de contrôler le Centre et une partie du Sud de l’Inde.… Certains envisagent déjà, à l’époque, un partage de l’Inde entre la France et l’Angleterre.

Mais en 1748, en Europe, signature du traité d’AIX la CHAPELLE qui met fin à la Guerre de Succession d’Autriche et qui rend MADRAS aux Anglais en échange d’une cité en Louisiane.

C’est la catastrophe. Les Français vacillent. Surtout leurs alliés, les Princes du Sud et du Centre, perdent confiance en la France.

En dépit de ce « revers », DUPLEIX arrive à maintenir la plupart de ses avantages sur les Anglais, mais une guerre larvée s’éternise en Inde entre les deux compagnies alors que PARIS veut la paix. Il faut en finir.

Les ennemis de DUPLEIX à PARIS proclament qu’il est trop « ambitieux » et qu’en voulant intervenir en HYDERABAD, il a été amené à diviser ses forces alors qu’il aurait dû consacrer tous ses moyens au Sud.

Il n’y a qu’une chose certaine, c’est que bien que ses forces aient été, en effet, divisées, il avait en 1754, réussi à conserver toutes ses conquêtes excepté celles (MADRAS et territoires adjacents) que PARIS avait rendues à l’Anglais par le traité d’AIX.

En 1754, DUPLEIX est rappelé en France. Il y est arrêté et embastillé. Jugé, il sera acquitté mais il est ruiné et finira sa vie, seul, rejeté de tous, pratiquement indigent.

8

Joseph-François Dupleix (1697 - 1763)

Il fut gouverneur général des Etablissements français de l’Inde.

9

Le successeur de DUPLEIX est un incapable, GODEHEU qui, en exécution des instructions de PARIS, s’empresse de signer avec les Anglais un «Traité Provisoire » leur rendant pratiquement toutes les conquêtes de DUPLEIX.

En 1756, à nouveau, l’Europe est en guerre. Cette fois-ci, c’est la Guerre de Sept Ans – 1756-1763. Un officier général d’origine irlandaise, qui s’est distingué dans les guerres précédentes, est nommé Gouverneur Général des comptoirs français et Commandant en Chef, ce qui signifie qu’il dispose de tous les pouvoirs civils et militaires, alors que ces prédécesseurs ont dû se contenter de « partager » leurs pouvoirs….

Dès son arrivée à PONDICHERRY, LALLY rompt brutalement le honteux « Traité Provisoire ». Il rappelle BUSSY du DECCAN, regroupe dans le Sud toutes les troupes dont il dispose et remporte de notables succès contre les Anglais. Ces succès sont confortés par l’intervention d’une flotte française arrivée de MAURICE sous les ordres de l’Amiral d’ORVES. Cette flotte d’Avril à Septembre 1758, va livrer trois combats dans le Golfe du Bengale : CUDDALORE, NEGAPATAM, PORTO NOVO.

Aucun de ces combats ne se terminera par une victoire, mais tous seront des combats qualifiés « d’indécis » avec peut-être, un léger avantage aux Français qui seront courageux à l’extrême.

Ces combats annoncent le renouveau de la France sur mer et ils auront une très forte répercussion en Inde.

En somme, en 1759, la situation française en Inde est satisfaisante.

Malheureusement, probablement par excès de confiance, LALLY va, en 1760, tout remettre en question. Il prépare mal et engage mal la bataille de WANDIWASH qu’il sait devoir être le combat décisif de sa campagne. Il est écrasé. Il a perdu toutes ses troupes. Il ne peut espérer redresser la situation.

10

Suffren (1726 - 1788)

11

Dès 1761, PONDICHERRY est enlevé par les Anglais et ses fortifications sont rasées.

Cinq comptoirs sont laissés à la France : PONDICHERRY, CHANDERNAGOR, KARIKAL, YANAON et MAHE. Ces cinq comptoirs sont insignifiants tant sur le plan économique que dans le domaine politique et stratégique.

On pourrait penser que c’est la fin des ambitions françaises en Inde. Et pourtant, non.

En 1781, le Sultan de MYSORE qui est toujours en guerre contre l’Angleterre, menace MADRAS. Les autorités françaises décident de l’appuyer et la flotte française d’Orient, basée à MAURICE, reçoit l’ordre d’escorter un convoi de renforts, hommes et matériel, convoi destiné à ce Sultan.

La flotte d’Orient est alors sous les ordres de l’Amiral d’ORVES qui, comme nous l’avons vu, s’est distingué en 1758 dans le Golfe du Bengale. Mais d’ORVES décède en Février 1782 et sa flotte passe sous les ordres de Pierre-André de SUFFREN, un de nos meilleurs, sinon le meilleur, de nos marins. SUFFREN est un caractériel, violent, emporté. Il est hardi, énergique, plein de talent et même peut-être de génie mais il est jaloux, envieux, détesté de ses camarades, haï de ses supérieurs.

SUFFREN va mener dans le Golfe du Bengale de Février 1782 à Août 1782 – six mois – une des plus belles campagnes de notre marine. Il livrera quatre combats (SADRAS, 17 Février – PROVIDIEN, 12 Avril – NEGAPATAM, 6 Juillet – TRINCOMALY, 25 Août). Les historiens français parlent de quatre combats indécis. Les Anglais sont plus généreux et disent trois indécis et un victorieux pour les Français : TRINCOMALY. Tous furent des combats héroïques d’une extrême violence. Au cours de toute cette campagne, SUFFREN fera la preuve de sa valeur et gagnera l’admiration de ses ennemis et de nos alliés en Inde.

En 1783 en Europe, c’est la paix et SUFFREN se replie avec sa flotte vers MAURICE d’où en 1784, il rejoindra la France où il sera accueilli triomphalement.

Et pendant ces années « houleuses », la COMPAGNIE continue de vivre – ou plutôt de survivre – et elle fait même des bénéfices. Elle vivra cahin-caha les premières années de la Révolution, toujours continuant son commerce et produisant des bénéfices !!!

En 1793, la Terreur soupçonne la COMPAGNIE d’activités contre- révolutionnaires. La COMPAGNIE est supprimée, marchandises et locaux réquisitionnés … et les directeurs arrêtés. La plupart de ces malheureux seront guillotinés mais trois d’entre eux échapperont à l’exécution et dès la Terreur passée, se constitueront en association pour poursuivre le Gouvernement Français et obtenir la restitution de leurs biens réquisitionnés.

Tout ceci serait sans intérêt si la procédure judiciaire ne battait pas tous les records. Elle se terminera en 1875 !!!

12

13

Bataille Navale de Trincomaly – 25 avril 1782

14