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LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. LES JEUX DE BALLE ET DE BALLON EN PICARDIE. Marie CEGARRA Décembre 1992

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LES BARRIERES DE L'INVISIBLE.

LES JEUX DE BALLE ET DE BALLON EN PICARDIE.

Marie CEGARRA Décembre 1992

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Recherche aidée par :

La Mission du Patrimoine Ethnologique et la Direction Départementale de la Jeunesse et des Sports d'Amiens

(Ludovic Mondouet).

Avec le soutien :

du Conseil Régional de Picardie, du Conseil Général de la Somme,

de la Ligue de Picardie de Longue Paume.

Et la participation :

de Robert Fossier, Professeur d'histoire médiévale, Sorbonne (Paris I),

de Francis Carton, Professeur émérite de l'Université de Nancy II,

et de Jean-Michel Dewailly, Professeur à l'institut de géographie, Lille I.

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Table des matières.

I. Première partie. 7

A. Frontière et culture 7

1. Le jeu : marqueur social 7

2. Jeux de balle et de ballon 10

B. Les concepts de frontière 12

1. Jeux de limites 12

2. Lieu neutre et non-lieu 13

3. La nature et l'artifice 15

4. Limites dialectales 16

C. En Picardie 18

1. Des frontières insaisissables 18

2. Les frontières administratives 21

D. Jeux de Picardie 23

1. Frontières internes 23

2. Frontières externes : de la Flandre à la Picardie 29

a) Examen des jeux pratiqués dans chaque région 31

b) Le jeu de balle 32

3. Jeux et langue 36

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4. Jeux et droit coutumier 36

E. Les zones limites : remarques 44

1. lerebot 46

2. Le jeu de balle au tambourin 46

3. La pelote provençale 47

II. Deuxième partie. 48

A. Histoire ancienne, universalité, implantation 48

1. Evolution et transformation du jeu 52

2. Structuration 58

3. Les joueurs 59

4. Le règlement 61

5. Les interdictions 62

6. Le déclin 63

B. L'image de la discipline 64

1. Le jeu : étude technique 65

a) La balle à la main 65

b) Le ballon au poing 70

c) La balle au tamis 76

d) La longue paume 83

2. Différenciation des pratiques et représentations 91

a) Le degré de l'énergie 91

b) La spectacularité 91

c) Coup d'oeil et astuce 92

d) Force et souplesse 93

e) L'esthétisation 94

3. Le matériel 94

a) La raquette 94

b) Le tambour 94

c) Le ballon 95

d) La balle 95

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4. Usages sociaux 95

a) La chicane et l'arbitrage 96

b) Les catégories socioprofessionnelles 96

c) Les chasses : du concret à l'abstrait 97

5. Chasse et jeux de balle 102

6. L'importance du contexte : les petites régions 103

a) Le Santerre 104

b) Le Vimeu 106

c) Le plateau picard 107

d) LePonthieu 107

7. L'autochtonité 108

a) Ouvert/fermé : la vie au village 108

b) Etre du pays 108

c) Les familles ballonnistes 108

8. L'endogène et l'exogène 113

III. Troisième partie. 115

A. La réduction et la résistance 115

1. Les fractures 115

2. L'évolution des loisirs et des sports 116

3. La place de la femme 117

4. L'ossature en défaut 118

5. L'odeur d'enfance 119

6. Lieux ouverts / Lieux clos 121

7. L'apprentissage 123

8. L'arrêt de la pratique : un aspect cumulatif. 123

9. La résistance 124

IV. Conclusion. 127

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V. Annexes. 130

A. Le système coutumier flamand/picard-wallon 131

B. XIXe siècle : importance approximative des différents jeux selon la région 138

C. Le langage du jeu 141

D. Règlement du jeu de balle en 1801 158

VI. Bibliographie. 164

A. Frontière 164

B. Jeux 167

C. Jeux de balle et de ballon 168

D. Journaux 171

VII.Index des illustrations. 172

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I.Première partie.

A. Frontière et culture.

La contribution présentée dans le cadre de cette étude est liée à la rencontre entre deux termes "frontières et culture". Deux termes dont le sens, la valeur, le statut sémantique et historique sont bien différents.

Choisir le thème des frontières culturelles, c'est tout d'abord penser l'espace en confins, limites, modalités d'intégration, consolidation ou à l'inverse, raisons et effets des remises en cause d'aires spatiales. C'est s'imposer de réfléchir sur les nuances de sens qui lui sont associées.

C'est aussi prendre conscience que le monde culturel n'a pas acquis la netteté d'organisation du monde politique. Les pouvoirs et les enjeux sont mal définis, les systèmes d'interpénétration et d'action se chevauchent ou se superposent et les limites restent floues.

Dans cette perspective, a été menée l'étude de traits culturels circonscrits dans une aire géographique déterminée. Il s'agit des pratiques ludiques et notamment des jeux de balle et de ballon implantés en Picardie.

1. Le jeu : marqueur social.

L'étude de la géographie des jeux semble offrir, à première vue, un axe propre à saisir le concept de frontière culturelle.

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En effet, on peut constater que les jeux se répartissent par grands ensembles et par zones géographiques. Une étude antérieure dans la région du Nord a pu montrer une distribution particulière des pratiques ludiques : Le jeu de quilles est circonscrit dans le haut Boulonnais et le haut Artois ; le javelot dans le Ternois, la Gohelle, le bas Artois ; la crosse au but ou à la plaine, la paume dans le Valenciennois ou la Thiérache. Leur persistance apparaît plus clairement dans les zones rurales que dans les zones anciennement industrialisées.

Le relevé des différentes associations de jeu montre que certaines zones se singularisent nettement : la bourle dans le Ferrain, les jeux de quilles du Boulonnais. De plus, la forêt de Mormal, forêt frontière entre les territoires qui dépendaient du saint empire germanique et les territoires sous l'influence française, semble être le point de rupture et de démarcation d'un jeu à l'autre.

On peut ajouter des remarques complémentaires à propos des frontières : on se rend compte que la zone frontalière franco-belge demeure l'un des lieux de survie des traditions et des pratiques de jeux. Elles constituent un vaste domaine de relations transfrontalières avec une vie associative très développée, orientée vers les activités sportives mais également vers les traditions locales et le respect des habitudes sociales (archers, arbalétriers, combats de coqs etc.). Le recrutement des joueurs se fait de part et d'autre de la frontière et favorise de nombreuses rencontres intersociétales.

Dans chaque aire considérée, on rencontre des jeux ou des types de jeux différents : jeux avec animaux, tirs, frappes, joutes etc. Il s'agira soit de jeux à dominante individuelle orientée vers l'adresse, soit de jeux d'équipe supposant des stratégies collectives. Certains jeux peuvent relever d'une activité non spécifique à la région que l'on retrouve ailleurs en France, soit parfaitement identique, soit avec des variantes (quilles, boules, etc.).

D'autres jeux spécifiques sont circonscrits dans une aire déterminée (ex : bourle située dans un triangle de villes frontalières Wattrelos, Leers, Tourcoing). A l'opposé, d'autres pratiques ludiques s'entrecroisent et se combinent (en Flandres, jeux avec animaux, jeux d'intérieur et tirs).

Enfin, certaines activités débordent de nos frontières administratives et étatiques et s'étendent en Belgique et en Hollande.

Cette évocation rapide montre que les réseaux de pratiques peuvent se croiser, se chevaucher en déterminant des aires spécifiques, elle montre aussi que des jeux s'estompent ou disparaissent au-delà d'une certaine aire géographique et peuvent réapparaître au-delà de la frontière étatique.

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Les zones de jeux dans la région Nord Pas-de-Calais.

Les barrières de l'invisible. Première partie.

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2. Jeux de balle et de ballon.

Il semble cependant utile de ne pas s'en tenir à des vues trop générales. C'est pourquoi, nous avons choisi de sélectionner quatre types de jeux liés à la famille des jeux de balle, notamment la longue paume, le ballon au poing, la balle à la main, et la balle au tamis pratiqués dans la région Picarde. Tous possèdent un certain nombre de règles communes (les chasses, le décompte des points, la dissymétrie du jeu) sur lesquelles nous reviendrons.

Ces jeux de balle occupent une position particulière dans la région : leur localisation est spécifique et s'explique par des raisons intrinsèques (antériorité de la balle à la main, affaiblissement de la balle au tamis et prédominance actuelle du ballon au poing dans la région d'Amiens avec revendication d'un statut de sport à part entière, etc.).

La sélection des jeux de balle ne manque pas d'intérêt dans la mesure où leur localisation dessine des frontières internes à la région Picarde.

Longue paume, ballon au poing, balle à la main, balle au tamis en Picardie. Les jeux du patrimoine, revue EPS. Paris, 1989 p. 59.

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De plus, leur étude visera à mieux comprendre les raisons du maintien de ces sociétés de jeux dans une région caractérisée par une profonde crise identitaire. En effet, leur regain va à l'encontre des traits actuels volontiers associés à cette région et notamment l'absence apparente de sociabilité (contrairement au Nord de la France et à la Belgique).

En examinant le maintien et le poids de la reconstruction de ces jeux et le fait qu'ils se régénèrent pour une part, nous tenterons d'éclairer le problème de groupes qui cherchent, non seulement à retrouver la mémoire de leurs traditions culturelles et corporelles mais aussi à leur faire franchir et déborder les frontières (la revendication d'un statut de sport reconnu au plan national n'en est-elle pas une composante ?).

Par ailleurs, les zones de pratiques dépassent les frontières départementales. Mais l'on sait aussi que la Flandre, si féconde enjeux, ne semble pourtant pas offrir une telle variété de jeux de balle. Elle semble, nous l'avons vu, s'orienter davantage vers les jeux avec animaux, les tirs, les quilles, etc.

N'y aurait-il pas là matière à imaginer et à concevoir une zone de rupture séparant une unité géographique d'une autre par une combinaison de types de jeux spécifiques ?

L'utilisation de ces "unités folkloriques", notamment à travers les jeux peuvent retenir notre attention pour tenter de circonscrire des domaines spécifiques avec des frontières, des zones de contact.

Dans ce cadre, une enquête exhaustive et représentative où sont recensées ces associations de jeux permet dans un premier temps d'établir une cartographie et participe à les situer. Cet inventaire va servir de point de départ à l'analyse.

En effet, tracer les limites de ces jeux est un moyen d'investigation pour aborder les frontières culturelles. Leur classement et leur analyse permettent d'approcher des "unités" soit principales, soit secondaires, de trouver des similitudes, voire des terres hybrides qui servent de transition d'un jeu à un autre, ou de cerner des choix d'affiliation ou de rejet à des attaches non consenties.

Mais, il semble aussi nécessaire de saisir des traits pertinents, des paramètres qui permettraient d'appréhender une réalité d'ensemble ou, s'ils sont comparés, de favoriser la délimitation du concept de frontière. Pour cela, la délimitation des zones sélectionnées, la caractérisation des groupes qui pratiquent, du jeu lui-même, des gestes du corps1 peuvent faire apparaître des

1J. de France écrit dans la Fortification des corps (thèse EHESS 1978, p.22) : "Les différentes manières d'être et de se mouvoir... surtout sans fonction utilitaire définie permettent d'observer ce que l'investissement d'un

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traits, qui en s'opposant ou en se combinant sont aptes à éclairer des aires spécifiques, des points de rupture, des zones à configuration symbolique particulière.

Ces réflexions préliminaires se sont accompagnées d'autres axes de réflexion.

Tout d'abord, nous nous sommes invités à acquérir une notion plus claire de la frontière et pour ce faire, nous avons emprunté les concepts de la géopolitique. Puis nous nous sommes penchés sur le contenu intrinsèque des jeux sélectionnés.

B. Les concepts de frontière.

1. Jeux de limites.

Paraphrasant Braudel, nous nous attacherons à donner l'origine de ce mot. Le mot frontière vient de l'adjectif "frontier, frontière" (qui fait front) comme le montre ce texte du début du XIVe siècle "li navré vident les frontières" (les blessés abandonnent la ligne de front pour gagner les arrières). Devenu substantif, le mot implique longtemps deux adversaires front contre front, de part et d'autre d'une ligne qui les sépare.

Cette définition est récente : ainsi, le monde antique connaissait des "limites". Les textes d'Hérodote (l'enquête, VI. 108) et Thuycydide (1122, IX 92) permettent de discerner les conceptions grecques de la frontière. Si une cité est vaincue "le vainqueur enlève les bornes et transforme les sanctuaires bordier s en place forte".2 En effet, les conflits entre cités étaient souvent des conflits d'intérêts (litiges sur la possession des terres) et les cités, se comportant en propriétaires, matérialisaient leurs limites comme des limites de propriété : les bornes étaient sacrées, liant le pouvoir à la religion.

En fait, la frontière était davantage un symbole politico-religieux recouvrant une réalité double : d'une part, les arbitrages rendus par les prêtres ou les institutions politico-judiciaires autour d'une ligne idéale purement

groupe social dans une mode de pratique déterminée doit à la relation qu'il entretient avec les investissements des autres groupes par rapport auxquels il se définit".

2Fronts et Frontières, Michel Foucher, éd. Fayard 1988.

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artificielle et d'autre part, un espace flou mais disputé pour ses potentialités nourricières.

En cela, elle semblait plutôt être la base de l'expansion territoriale toujours mouvante.

2. Lieu neutre et non-lieu.

A Rome, la notion de "limes" recouvre à l'origine un terme d'arpentage qui désigne une limite de domaine. Route frontière, elle se différencie des "fines imperii", indéterminées et flottantes qui marquent, dans l'espace, l'aboutissement des opérations de conquête.

Simple notion religieuse, limites de propriété, la frontière devient un terme stratégique désignant une route fortifiée et acquiert une signification militaire.

Le terme français de frontière apparaît au début du XIVe siècle. Le front, terme d'architecture, au sens de façade est aussi le front d'une troupe qui se mettant en bataille "fait frontière". C'est donc un ordre de bataille. Le terme est employé pour la première fois, dans un acte royal de Louis X le Hutin, il concerne la zone des châteaux construits face à la Flandre et remplace celui de marche employé jusqu'à Philippe Le Bel.

Dans ce contexte, la frontière va désigner les limites par lesquelles on a procédé au découpage d'un espace alors unifié. Cette notion géostratégique va caractériser les points de défense des confins du royaume face aux adversaires du moment, puis les limites d'état à état.

Mode d'organisation de l'espace par temps de guerre, la frontière désigne les lieux où peut se présenter l'adversaire, elle est perçue comme un lieu d'affrontement et de rencontres offensives et défensives résultant de la configuration du sol et des ouvrages de fortification.

La représentation d'un ensemble aux contours géographiques délimités est aussi importante à analyser dans ses variations. Selon Michel Foucher, '77 est curieux de constater que les termes de frontière et "natione gallicus" sont apparus en même temps, à trois ans près : 1315 et 1318"?

Le terme "natio" désignait un groupe de naissance commune et les groupes parlant des langues différentes autour de la Sorbonne.

^Fronts et Frontières, Michel Foucher, p. 58, opus cité.

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Ainsi, à mesure que les limites du royaume s'affirment, dans le même temps, comme des frontières, points frontaux face à des adversaires étrangers, il devient possible de différencier naturel et aubain. "Et c'est d'être né au-delà ou en deçà de cette limite déplus en plus épaisse, de cette frontière déplus en plus importante, qui distingue les étrangers d'une part et d'autre part les "naturels" "les bourgeois du royaume"(...) ou les regnicoles (...). "4

La frontière engendre ainsi la perception d'un savoir vivre commun, d'une distinction à l'égard de ses voisins.5

Michel Foucher utilisera la définition suivante :

"La relation de l'état et de la nation, de la construction politique et géographique et des représentations du sentiment d'appartenance sont issus d'une mise en coïncidence progressive de deux structures : un état territorial et une culture hybride nationale (...) la nation se constitue comme une combinaison multiscalaire : à l'échelle des "pays" localement, joue le sentiment d'appartenance à un "ensemblepolitique" d'ordre de grandeur supérieur à l'échelle de l'état, se formule un projet de clercs, à vocation de cohésion, l'unité du royaume (même au prix de guerres intestines et de luttes contre les féodalités) projet appuyé en haut et relayé vers le bas par l'église pourtant universelle (...) ; enfin, à plus petite échelle, celle de la chaîne des états adjacents jouant les rivalités entre princes, qui déboucheront sur des guerres ; celles-ci servent de facteur d'identification, par opposition et par différenciation. "

Le principe de cohésion et d'organisation de l'état national va impliquer une technique rationnelle de délimitation linéaire. En cela, cette ligne devient une limite politique, frontière militaire, défensive mais aussi une limite idéologique, fiscale, douanière mais pas nécessairement linguistique et religieuse.

De ce fait, les termes de limites et de frontières deviennent synonymes séparant davantage les populations implantées de part et d'autre.

Ce tour d'horizon sur la notion de frontière politique et géographique nous amène à examiner les discours à ce propos.

4Michel Foucher, opus cité.

5Le rôle de l'église est aussi à souligner dans l'origine de la subdivision de l'espace à des fins d'organisation et à l'émergence d'un sentiment d'appartenance commune.

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3. La nature et l'artifice.

Il est traditionnel de considérer que les frontières naturelles sont tracées par des barrières géographiques qui peuvent constituer des obstacles souvent difficiles à franchir et qui délimitent des espaces où le développement des peuples se faisait sans réel contact avec ceux qui vivaient de l'autre côté.

Par ailleurs, les frontières artificielles marquent davantage la volonté des hommes. Toutefois, il est rare qu'une frontière suive sur toute sa longueur des éléments naturels.6

Enfin, les frontières peuvent être considérées comme des limites arbitraires si des peuples sont coupés.

Mais la principale question relative aux frontières a consisté, longtemps à savoir si la frontière était une ligne ou une zone.

Jean House (1980) écrit que la frontière (frontier) est une zone s'étendant des deux côtés d'une ligne qui démarque une frontière (boundary) internationale. Ici, ligne et zone correspondent à deux ordres de grandeur différents, la ligne émanant d'un concept politique et juridique, la zone d'un concept géographique.

Cependant selon Michel Foucher, il n'est pas possible de réduire les faits frontaliers à un ordre de grandeur : "/'/ convient de décliner toute une gamme de fonctions ou d'échelles non exclusives : la région de proximité certes mais aussi des ensembles de plus grandes dimensions : états, ensembles géopolitiques et stratégiques, idéologiques et de civilisations. "

Il semble donc aujourd'hui que l'on privilégie une notion unique de la frontière : la notion juridique qui effectue une délimitation symétrique de compétences égales entre deux états et masque de ce fait, la dimension culturelle.

Ainsi, cette rapide enumeration des concepts géopolitiques montre que les frontières peuvent être envisagées à diverses échelles "car elles sont les contours d'ensembles de nature et de taille très diverses : constructions géopolitiques datées, multiscalaires et multifonctions. Limites politiques et fiscales souvent linguistiques, militaires, elles seront abordées aussi en distinguant les questions du dehors - relations internationales -, de proximité

6La frontière franco-belge par exemple, a été fixée de manière arbitraire, devant l'impossibilité de porter la frontière du Nord de la France jusqu'aux Bouches de l'Escaut. Son tracé fut confirmé par les traités de paix signés à Paris le 30 mai 1814 et le 20 novembre 1815. Sur certaines parties, il s'agit d'une frontière naturelle (entre Armentières et l'entrée de la Lys qui suit le tracé des cours d'eau), le reste est formé d'un tracé artificiel.

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entre étais, rapports entre ethnies ou géopolitique externe, et les questions du dedans - effets internes des tracés -processus de construction nationale ou régionale".1

Pourtant, la frontière linéaire est devenue longtemps le réfèrent unique et obligé, le seul concept politique intégré mentalement, même si elle se heurte aujourd'hui à sa remise en cause. Mais les ensembles spatiaux ne coïncident pas toujours à la perception des habitants qui les habitent. Alors on parlera de frontières arbitraires en référence aux coupures politico-ethniques. C'est ainsi que l'étude des particularismes peut nous autoriser à croire qu'il y a des tracés de frontières de nature différente.

4. Limites dialectales.

Dans ce cadre, la notion de frontière en dialectologie nous apporte d'autres précisions.

La question des frontières en dialectologie est liée en corollaire au concept d'aire dialectale ou d'aire linguistique. Elle émane du souci de déterminer avec précision les limites des idiomes dans ce que l'on peut appeler les langues mères et de reconnaître des territoires de langage qui n'occupent pas une situation principale.

Le dialecte a une fonction double : communiquer et se démarquer, montrer la différence de l'altérité. C'est dire que les frontières linguistiques sont différentes des frontières politiques que nous avons évoquées. Elles confèrent un caractère séparateur tangible à deux systèmes linguistiques mais, s'il est possible de déterminer une discontinuité linguistique à travers deux langues différentes, deux langues de même famille ou deux langues qui ne sont pas de la même famille, il semble que.des limites nettes ne peuvent être véritablement établies. De plus, si à la notion de limite objective s'ajoute une notion subjective telle la conscience linguistique, le concept de frontière linguistique tend à se complexifier.

Des ensembles, divers par la taille, la nature, la fonction, peuvent donc surgir selon les points de vue des analystes.

7Michel Foucher, opus cité.

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B 7 H

t( Xi I 50km

1 Faisceau d'isoglosses caractéristiques de la limite sud du domaine picard. - 2. Charbon/carbon (au sud: ch; au nord: K ) - 3. Chardon/cardon (id ). - 4. Cent/chent (au sud: s; au nord: ch) - 5. Chasser/cacher (au sud: ch et s: au nord. K et ch) -6 Extension maximale des parlers néerlandais au Haut Moyen Age. - 7. Limite actuelle des parlers néerlandais - 8 Région néerlandophone - 9 . Frontière actuelle.-10. Frontière du traité de Cateau-Cambrésis( 1559).- 11. Frontière du traité de Verdun

(843). - 12. Limites départementales.

(1 à 5: d'après l'Atlas linguistique de la France de Gilhéron. 6: d'après Gysselinck. 9 à 11: en partie d'après Lentacker)

Limites linguistiques et frontières politiques.

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Première partie. •

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Claude Lévi-Strauss l'a noté.

"Si l'on cherche à déterminer des écarts significatifs entre l'Amérique du Nordet l'Europe, on les trouvera comme des cultures différentes, mais à supposer que l'intérêt se porte sur des écarts significatifs entre - disons Paris et Marseille - ces deux ensembles urbains pourront être provisoirement constitués de deux unités culturelles... une même collection d'individus... relève simultanément de plusieurs systèmes de cultures... sans doute, encore ne faut-il rien exagérer. Les systèmes culturels, compte tenu de telles réserves, ont une existence et une consistance propres, objectives et s'appliquer à découvrir des frontières entre eux ne relève pas simplement de la fantaisie ou de l'illusion. "*

Ainsi, en partant des pratiques ludiques circonscrites en Picardie, et de leur vécu, nous tenterons de montrer les déclinaisons qui s'opèrent autour du thème des frontières culturelles.

C. En Picardie.

1. Des frontières insaisissables.

La région Picarde est traversée par une profonde crise identitaire. De ce fait, les instances régionales sont soucieuses de mettre en valeur les composantes du patrimoine et notamment les jeux traditionnels qui persistent encore. Elles sont relayées à la base par une série d'associations qui travaillent depuis de longues années à conserver les éléments de culture traditionnelle mais aussi à étendre leurs pratiques.

Il n'est donc pas étonnant qu'une recherche ethnologique puisse voir le jour dans ce contexte. Ce souci de préservation du patrimoine nous vaut une littérature abondante liée à des initiatives locales d'érudits ou d'historiens et nous pouvons utiliser dans un premier temps toutes les indications recueillies de part et d'autre. Il s'agit pour les jeux, de descriptions, d'énumérations, de relevés géographiques, de cartes d'identité. Ce type de renseignements croise certaines pistes de recherche abordées lors de terrains précédents effectués dans la région du Nord de la France, voisine de la Picardie que nous avons déjà évoquées.

8Cité par Maurice Crubellier, le concept de frontière culturelle, in Frontières et contacts de civilisation. Colloque universitaire franco-suisse Besançon-Neuchâtel. Le Passé présent, études et documents, éd. de la Baconnière. Neuchâtel. 1977.

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Il est toutefois utile dans un premier temps de caractériser la région Picarde : son originalité réside dans le fait que ses frontières semblent insaisissables.

Dans l'ouvrage intitulé Provinces et pays de France,9 l'abbé Jarry écrit :

"Il n'est possible, en particulier de déterminer ses frontières historiques qu'entre certaines dates, tant les annexions militaires, les apports dotaux et les attributions d'apanage d'une part, les réunions et les disjonctions administratives d'autre part, en font varier les confins. La Picardie, terre d'invasions, marche du royaume jusqu'au XVIIe siècle, souffre plus qu'aucune autre des fluctuations apportées par l'histoire. A la veille de la révolution française, les limites des juridictions militaires, judiciaires, ecclésiastiques, financières chevauchent entre elles et débordent sur les provinces voisines. "

Si l'on ajoute que cette région n'offre pas de frontières naturelles, géologiques ou forestières, on comprendra que l'utilisation d'autres paramètres sera utile pour tracer des limites.

C'est ainsi que les jeux ont retenu notre attention, à première vue, pour circonscrire des aires spécifiques.

En effet, les seules délimitations réellement apparentes sont les obstacles naturels qu'offrent la Manche et la Mer du Nord.

Le recours à l'histoire n'apporte pas plus de précisions. La Picardie ne fut jamais qu'un terme pour désigner un ensemble confus de domaines, de seigneuries, qui ne dépendaient pas d'un grand fief mais qui se rattachaient tantôt à tel voisin puissant, la Flandre, tantôt à tel autre, l'Ile de France.

"Flottante et diffuse", tels sont les termes qu'emploie Fernand Couët dans Aux quatre vents de Picardie pour définir cette région.

Par contre, l'importance linguistique semble l'élément principal pour caractériser un ensemble plus homogène.

C'est à Paris vers 1220, qu'il se fait du terme Picardie, un emploi officiel, ceci pour désigner une des "nations" d'étudiants de l'université. Le renom des enseignements, la notoriété des maîtres attiraient déjà au pied de la montagne

9Cité dans le Folklore de Picardie (Somme, Aisne, Oise) de la société de linguistique Picarde, Amiens, 1988, M. Dewailly et M. Crampon.

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Sainte Geneviève une foule très cosmopolite déjeunes gens. Les officiers de l'université les répartissaient suivant leur pays en quatre groupes.10

Ces différents diocèses sont devenus tout le Nord de la France, la partie wallonne de la Belgique et même l'extrémité méridionale des Pays-Bas. C'était l'ensemble des contrées où était parlé un dialecte roman dérivé du latin par opposition à celles dont le langage était d'origine germanique, comme celui des flamands appelés alors les thiois. Et ces dialectes, de langue d'oïl, parlés au Nord de Paris, étaient confondus dans l'appellation de "langue picarde".

De la pratique de l'université, le terme passa bientôt dans l'usage commun. Les auteurs de descriptions de la France, les chroniqueurs, les écrivains savent que cette Picardie commence à peu de distance vers le Nord, mais sont bien incapables d'indiquer où elle finit.

"Picardie a (comme limite) la rivière du Rhin par devers l'Orient" peut-on lire dans le Propriétaire des choses en 1372.

Pour Froissait en 1390, Saint Orner, Douai, Tournai sont de "bonnes villes de Picardie".

Les rois du XIVe siècle sont embarrassés pour désigner leurs possessions du Nord, zone frontière sans cesse élargie ou restreinte par les faits de guerre ou les accords ; ils nomment des capitaines, des gouverneurs "es parties de Picardie", "aux pays de Picardie", ou encore "en toute langue picarde".

Dans ce contexte, il valait mieux écouter les propos des habitants pour savoir réellement si l'on était ou pas de Picardie.

Durant cette période, les terres de langue Picarde s'étiraient jusqu'en Hollande. La philologie moderne a étudié par la suite une succession de parlers distincts entre Beauvais et Maastricht : picard proprement dit des régions de la Somme, patois d'Arras, camberlot du Cambrésis, rouchi du Hainaut français, modalités de wallon échelonnées de Mons à Liège. Issus d'une même souche, ces parlers se sont différenciés au cours des siècles dans le vocabulaire, la syntaxe même, la prononciation.

Toutefois, il reste quelques traces de l'extension primitive de cette "langue picarde", une partie de la Wallonie Occidentale, de la frontière française jusqu'à une ligne passant par Braine-le-Comte et Binche, est appelée par les linguistes la "région picarde". Mais du picard au rouchi, du rouchi aux variétés de wallon, les transitions sont insensibles : ces parlers se pénètrent, mais comme tout

10Ile de France à laquelle étaient joints les diocèses de Tours, Bruges, Sens et Reims, de Normandie et de Bretagne, d'Angleterre avec l'Allemagne et les pays Scandinaves ; enfin de Beauvais, Laon, Noyon, Arras, Thérouanne, Tournai, Liège et Maastricht.

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idiome, ils sont trop complexes, trop mouvants pour servir à tracer des frontières.

2. Les frontières administratives.

Restent donc les frontières administratives :

"La création en 1790 des 83 départements, divisés en cantons et en communes par les révolutionnaires, fut une opération géopolitique de première importance. Il s'agissait de supprimer la relative autonomie des provinces et d'unifier le territoire politiquement et administrativement. Dès lors, il fallait doter le pays d'un système électoral et gouvernemental identique sur l'ensemble du territoire national. Les départements étaient donc aussi des circonscriptions législatives et comme on votait au chef lieu, il fallait pouvoir s'y rendre de tout point dans la journée. Par ailleurs, il était nécessaire de contrôler l'ensemble du territoire national en ces périodes de troubles révolutionnaires ".11

Le découpage réalisé en 1790, n'a été que peu modifié par la suite. La création de 21 régions entraîne l'assemblage de la Somme, l'Aisne, l'Oise. Il s'agit donc d'un cadre spatial, entièrement construit par la volonté de l'homme, qui participe et se prolonge culturellement dans les régions voisines. Cette précision est d'autant plus importante que l'enchevêtrement de multiples ensembles spatiaux, leur découpe, peuvent être à l'origine de mauvais choix de stratégies pour les acteurs, de fausses explications pour les chercheurs.

En effet, attentif aux permanences, les responsables politiques voudraient faire de leur région politique une vraie région à laquelle peut s'identifier la population régionale. Les traditions dans ce cadre jouent un rôle important. Toutefois, même si pour des nécessités structurelles, la recherche s'effectue dans une région nécessairement délimitée, on montrera rapidement qu'elle ne peut en aucun cas, s'en tenir à cette géographie.

1 Béatrice Giblin Delvallet, géopolitique du Nord Pas-de-Calais, Fayard, 1986.

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Les divisions administratives en Picardie.

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D. Jeux de Picardie.

1. Frontières internes.

Quatre variantes de l'ancien jeu de paume étaient pratiquées jusqu'à une date très récente dans le département picard. Il s'agissait de la longue paume, la balle à la main, le ballon au poing, la balle au tamis. Aujourd'hui, les trois premières persistent, seule la balle au tamis ne se pratique plus.

Si l'on s'en tient dans un premier temps aux limites administratives, on s'aperçoit que les pratiques de jeux de balle sont circonscrites dans le nord de l'Oise, le Santerre, l'Amienois. Le relevé des associations nous donne la cartographie suivante.

Il s'agit de noyaux résistants qui se sont peu à peu rétrécis. En effet, le relevé des associations de jeu vers 1930 montre que les différentes variantes des jeux de balle couvraient non seulement l'Amienois, le Santerre, le Vimeu mais aussi étaient présentes dans l'Aisne, et traversaient les frontières départementales.

Ainsi à cette époque, le jeu de tamis appelé jeu de sas s'étendait très largement vers l'Oise12 tandis que la paume et la petite balle au gant se pratiquaient dans la région du Nord Pas-de-Calais.

12Ce jeu serait parvenu des Flandres Orientales par l'Escaut, le canal de Saint Quentin et l'Oise. Les emigrants se rapprochant de Paris au fur et à mesure des permissions royales ont permis son implantation. Quant aux dérivations transversales vers la zone Nord proche de Paris et vers le Vexin, la Normandie, la Basse Somme, elles semblent s'être diffusées par la route au passage des ponts notamment dans les régions de Compiègne Noyon, aboutissement du canal de Saint Quentin, Pontoise vers le Vexin, Poissy vers le Pinceray et la région de Dreux.

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Jeux de balle et de ballon en Picardie (1930).

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Jeux de balle et de ballon en Picardie (1991).

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Le jeu de tamis dans l'Oise au XIXe siècle. (Cantons et communes avoisinantes).

La balle au tamis. L'équipe de Fressenneville vers 1910 : une des 67 sociétés de l'entre-deux guerre.

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Emile Draux, membre de la commission historique du Nord, rappelle l'implantation de ces jeux à Douai et à Orchies.

"Le jeu de paume" à Douai :

"Ce sport parmi les plus anciens est très en vogue dans la région. La paume Douaisienne qui a son siège 40, place du Boulet, compte 150 membres honoraires et 40 membres actifs répartis en sept équipes dont quatre scolaires. Elle organise chaque dimanche et jour férié de mars à octobre, des luttes sur la place d'Armes ou la place du Boulet. Ayant remporté de nombreux championnats, la répartition des équipes de la ville permet d'organiser le congrès de la fédération en 1930. "

On retrouve aussi à Orchies les traces du jeu de paume sous la variante de la petite balle au gant.

"Le jeu de balle, précisément la petite balle au gant, un gant en genre de corne, ressemblant à un gros sabot de cheval vidé, est sans doute le sport le plus ancien qui ait été pratiqué à Orchies ¡pourquoi a-il disparu de nos jours ? On ne saurait le dire, faute de joueurs probablement ; il eut durant des siècles de nombreux adeptes, on se déplaçait de loin, le dimanche et les jours de fête, en bonne saison, pour venir assister aux luttes et tournois. Le ballodrome était installé place De Gaulle, entre l'hôtel de ville et le côté est, d'une part, le côté sud et la place Gambe tta, d'autre part ; il avait un inconvénient, celui d'engendrer des nuages de poussière sous les vents un peu forts. Je me souviens des rencontres d'avant 1914 avec les parties de Somain, Flines-lez-Râches, Haumont, Aniche, Marchiennes, Rongy, Rebaix et autres formations belges qui attiraient quantité d'amateurs. La guerre 1914 terminée, le jeu de balle au gant fit place au jeu de paume ; vers 1930, il fut essayé de reconstituer une équipe de petite balle, sa durée fut éphémère et la paume reprit ses droits pour disparaître à son tour avec la tourmente de 1940-1945, après avoir, une année, remporté la coupe de France. Le ballodrome, a comme le reste de la place, été macadamisé et se trouve ainsi enseveli pour toujours, son ancienne aire est maintenant un parc à voitures.

Pendant plusieurs années et il n'y a pas encore si longtemps, le programme de la ducasse comportait une lutte de jeu de paume qui se jouait avenue Kennedy, elle réunissait les vieux fervents de ce sport et aussi les jeunes qui s'y intéressaient ; hélas, cette attraction coûtait cher, les parties se déroulant le lundi, les équipes ne se déplaçaient pas pour rien, loin de là, elle a, à son tour, été abandonnée. "

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13En 1981.

Orchies, une lutte de jeu de balle avant 1900.

On retrouve encore dans le Valenciennois et près de Maubeuge des permanences sensibles.13 C'est dire que l'extension du jeu était très large et qu'il était en vogue sur une partie du territoire.

Valenciennois - Douaisis

• Anzin Beuvrages Raismes Crespin Hasnon Somain Petite-Forêt Saint-Amand Gognies-Chaussée.

Avesnois

• Maubeuge Solre-le-Chateau Louvroil Wargnies-le-Grand Ferrière-la-Grande Houdain-lez-Bavay.

Lieux où se pratiquent les jeux de balle.

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De plus, ces jeux que l'on présente aujourd'hui comme typiquement "picards" se retrouvent sous de légères variantes en Belgique et notamment en dessous de la frontière linguistique.

2. Frontières externes : de la Flandre à la Picardie.

En effet, les jeux de balle ne se cantonnent pas seulement à l'espace géographique français.

La pelote paume est encore répandue dans une grande partie de la Belgique. Comme en France, on retrouve des allusions à cette pratique dès le XIVe siècle.14

A Oudenbourg, Namur, Liège, Spa, Bruges, Courtrai, Mons, le jeu de paume se pratique. Mais parfois soumis aux interdictions, les habitants de la ville comme à Mons, établissent une requête aux autorités locales afin de récupérer la liberté de s'exercer au jeu de paume.

"Sur ce que au conseil de la ville de Mons, tenu au mois de mai, les manans des faubourgs de la porte de Nimy avaient présentés requeste a/fin qu'il leurfuist permîz passer le temps au jeu de palme à Saint Ladre, même aller au four et aupuîche, comme passe cent ansfaict avoit esté, ce qui puis peu de temps leur estoit défendu".15

Dès le XVe siècle, nous avons mention de l'exercice du jeu de paume à Bruxelles, Oudenbourg, Namur, Liège, Spa et Bruges, Courtrai, Deynze, Wairegehm, Zottegegem-Geselghem Mons puis dans la seconde moitié du XVe siècle à Ypres, Gand, Fûmes, Thielt puis Alost, Liège, Namur.

14La pelote paume est une variante du jeu de paume. Elle se différencie selon qu'elle est jouée par les nobles et les notables ou par les manants. Les premiers disposent d'emplacements réservés au jeu et les échanges de balle peuvent se faire sur des distances importantes. Par contre, les vilains, en raison de la médiocre qualité des esteufs sont contraints déjouer sur les parois des églises. Les joueurs des bourgs éloignés des agglomérations jouent à la "paume au toit". Il s'agit ici pour le service de lancer la balle sur un toit incliné. Le jeu se déroule sur un espace très réduit, les parties en présence doivent donc disposer "d'un toit haut placé afin de pouvoir bien re (chasser) la balle". Le rechas par la partie adverse se fait, soit après la chute de la balle au sol, soit en la cueillant avant qu'elle ait touché le sol. L'ère bourguignonne entraîne le pavage des rues principales des cités et donne la possibilité aux villageois et aux citadins de jouer sur un espace plus grand. L'encombrant accessoire que constitue le toit est alors abandonné. L'historien Léon Van Neck apporte de précieux renseignements sur l'histoire du jeu de paume à Bruxelles et précise que "de vieux manuscrits aux enluminures bizarres nous montrent seigneurs, moines et artisans rivalisant de force et d'adresse au jeu de paume". Quant au petit peuple des bourgs et de la campagne, il pratiquait un jeu désigné sous le vocable "boerenkoats", c'est à dire paume des paysans, particulièrement lors de la fête patronale ou la kermesse locale.

13Les jeux sportifs de pelote paume du XIVe au XIXe siècle. Bruxelles, 1967.

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Les jeux de paume sont donc répandus dans une partie importante de la Belgique et notamment dans la partie flamande qui les délaissera très rapidement.16

Pourtant, certains évoquent l'origine essentiellement Wallonne. "Dans les Flandres, ce jeu (de balle) est inconnu parce qu'auparavant le territoire de cette partie de la Belgique était couvert d'immenses marais. " En fait, il apparaît très vite que cette pratique sera délaissée par les populations des Flandres sauf celles proches de la partie francophone du Sud et par celles fixées le long de la vallée de la Dendre. Ainsi au XVIIIe siècle, l'expansion du jeu est stoppée en pays flamand. Le grand Bruges, la côte belge, la Zélande, le Courtraisis abandonnent le jeu de paume. De plus, alors que le Hainaut n'avait que quelques centres importants, toute la province ainsi que les régions voisines adoptent le jeu.17

Donc, l'apogée de ces jeux au gant se révèle durant tout le XIXe siècle.

La centralisation a créé une ère nouvelle où le Hainaut concentre la plus grande activité des joueurs de balle. De plus, du particularisme local, on passe à l'organisation fédérale.18

16Comme en France, les évolutions dans les différentes pratiques de jeu s'établissent. De la longue paume pratiquée en champ clos, on passe à la courte paume en salle avec toit (toit de face au début doublé par un toit de côté) ; de la corde chargée de séparer le terrain, on passe au filet. Puis le toit de la longue paume disparaît, mais l'aire du terrain de jeu s'agrandit. Les parties confrontant deux adversaires passent à trois contre trois puis six contre six. Une grosse balle est employée pour la courte paume, une balle plus petite pour la longue paume. Toutefois, délaissant palettes et raquettes, le joueur de paume belge a tendance à adopter le gant dit "casserole".

17Les déplacements, la construction des routes ont une influence marquante sur l'exode définitif des populations rurales. Ce brassage entraîne un acheminement de l'uniformisation de ces différentes pratiques de jeu. Le jeu "frustre" dit "paume des paysans" cède la place aux jeux plus ordonnés des villes. Le jeu de plein air reprend une nette prépondérance sur le jeu en salle. Bientôt le jeu prend la forme qu'on lui connaît aujourd'hui notamment la petite balle au tamis et la balle pelote. Si les autorités ne défendent plus, elles organisent. Le jeu se structure. En effet, durant un très longue période, les rencontres de paume n'ont comme but que la distraction doublée souvent de l'attrait du pari. Il n'est pas question de parties formées régulièrement. L'évolution s'effectue dans la formation des parties permanentes, les succès les font persévérer pour que ces unions temporaires deviennent régulières. Ces parties franchissent les limites des villes et l'esprit de clocher apparaît. Mais les règles d'affiliation sont rigides. Il est impossible dans un premier temps de s'adjoindre un joueur étranger à la commune. Trop souvent, il s'agit de militaires d'une même unité, d'élèves d'un même établissement, d'ouvriers ou d'employés d'une même entreprise. Parfois, il est possible de composer des équipes avec des frères même s'ils sont de communes différentes, ou de parents proches mais ces règles d'affiliation très rigides ont nuit à l'expansion géographique.

181900 : Fédération du jeu de petite balle au tamis. 1902 : Fédération du jeu de demi-dure. 1903 : Fédération nationale du jeu de pelote. 1853 : En Hollande, la "permanente commissie" prend en charge la réorganisation des jeux en Hollande et permet en 1897 la constitution du "koninklyke Nederlandsche kaats bond".

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a) Examen des jeux pratiqués dans chaque région.

Tournaisis (a) : on jouait surtout à la grosse balle au gant et à la petite balle au tamis. Ce dernier jeu disparut vers la fin du XIXe siècle sous la poussée irrésistible de la pelote. Le Tournaisis fut le berceau de la pelote à cause des influences picardes et espagnoles ; cette région constituera le point de départ de l'irrésistible ascension de la pelote face aux autres jeux de paume en Belgique et restera pendant longtemps en contact étroit avec le Nord de la France (Saint Amant, Antoing, Valenciennes, Cousolre etc.)

Mons et le Borinage, ainsi que la région carolorégienne (b) furent les lieux sacrés de la petite balle au tamis, bien que plusieurs jeux aient été pratiqués. Ces régions avec Liège, Bruxelles, le Namurois, la Thudinie et la Basse Sambre seront les derniers îlots de résistance de la petite balle au tamis.

Ath (c) : centre ballant très ancien où l'on jouait surtout à la pelote, mais avec une balle spéciale ("balle d'Ath", 0 50 millimètres). On y jouait aussi à la grosse balle au gant (assez peu) et à la balle au tamis. La pelote, telle que nous la connaissons, s'y implantera vers 1850 et supplantera les autres jeux vers 1870.

Braine-Soignies (d) : fut une des régions où la petite balle au tamis disparut assez tôt (1899) sous la poussée de la pelote.

Flandres (e) : la crise économique qui frappa le pays flamand eut pour conséquence une disparition presque complète des jeux de balle (vers 1840). Seules les régions proches de la Wallonie et celles de la vallée de la Dendre connurent un net regain dans le jeu de pelote (presque exclusivement).

Bruxelles (f) : on y jouait à la balle au tamis et à la pelote partout, avec une prédilection pour la petite balle dans les communes de Etterbeek, Bruxelles, Saint Gilles et Ixelles (soit à l'est de la Senne) et pour la pelote dans les communes de Molenbeek, Anderlecht, Ganshoren, Koeckelberg et bien sûr Laeken (soit à l'ouest de la Senne).

Brabant (f) : subit les influences tournaisienne et flamande (pelote), namuroise et hennuyère (tamis).

Julien Desees, dans sa Petite chronique des jeux de balle belges précise le type de jeux, les variantes pratiquées en Belgique en 1914. Dans ses propos, il considère deux aires géographiques égales à peu près en étendue, l'une où l'on joue de préférence à la balle pelote, l'autre où les amateurs accordent plus d'attention aux jeux de balle au gant (petite balle au tamis et demi-dure).

Ces aires sont marquées par une ligne allant de Maubeuge à Gembloux et passant par La Louvière et Gosselies. Ces délimitations sont toutefois approximatives car ces disciplines peuvent s'enchevêtrer.

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b) Le jeu déballe.

Il n'a pas été possible de déterminer s'il s'agit de balle pelote ou de petite balle.19

19J. Desees dans les Jeux sportifs de pelote-paume en Belgique du XIVe siècle au XIXe siècle (pp. 82 et 83), déduit de l'article 20 d'un règlement type pour lequel il donne la seule référence : Archives d'Ath, qu'il s'agit d'un jeu de pelote. On notera que cet article est inspiré de l'article 23 du Règlement pour le jeu de petite balle, arrêté à Ath le 10 août 1835 (A. V. A. : Q. 41., Folklore).

L'organisation. Les parties dont la composition ne pourra être modifiée, sont formées par cinq joueurs connus, domiciliés dans la même commune, dont l'équipe portera le nom. Seule la ville d'Ath a la faculté de présenter deux parties - trois exceptionnellement en 1803. Dès 1801, ces parties doivent s'inscrire à la mairie, à une date qui varie avec les années. Le certificat de domicile est exigé en 1809. Un tirage au sort détermine les tours de rôle. Les prix. Aucun règlement ne fournit d'indication quant aux prix. Il faut, pour les connaître, se reporter aux procès-verbaux ou aux lettres d'invitation. De 1796 à 1801, ils consistent en boucles d'argent : cinq paires de grandes, à garder à la partie gagnante ; cinq paires de petites, pour culotte, à la concurrente. En 1804, la première reçoit cinq paires de chaque sorte ; l'autre, cinq de grandes. La balle d'honneur, en argent et de 13 pouces de circonférence, "pour celui qui aura fait le dernier coup" apparaît en 1807 seulement, en même temps que dix montres : cinq en or pour la partie première, cinq en argent pour la seconde. Il semble bien qu'avant la révolution française (A Mons dès la fin du XVIe siècle selon J. Desees, op. cité, p. 51), le prix consistait généralement dans le Hainaut en une balle d'argent que le vainqueur offrait souvent à l'église de sa paroisse (Conf., notamment, J. Dewert, Jeu de Balle au Pays d'Ath, in Jadis, Soignies, XIII (1909) pp. 131-134 et J. Desees, op. cité p. 68). Tournai où la ville organise de 1786 à 1819 à l'occasion de la grande procession annuelle, des concours opposant diverses communes, innove dès 1781, en attribuant outre ce trophée unique, des prix individuels : cinq paires de grandes boucles en argent et cinq de petites (J. Desees, op. cité, pp. 74 et 99). La balle aura 15 pouces l'année suivante, mais les montres en argent seront remplacées par cinq couverts du même métal. Les prix prévus lors des luttes ultérieures ne sont plus que des services dont le nombre va bientôt décroissant. Si bien que l'on en revient, en 1812, aux boucles avec, exceptionnellement, une balle d'honneur. Une pareille régression, mais moins accentuée, se constate au tir à l'arc. Peut être faut-il attribuer ce renversement au fait que les prix sont, à partir de 1809, payés par les toiliers qui, de cette année à 1831, affectent à diverses fins d'utilité publique le produit du droit d'étalage qu'ils affirment. J. Dewert, op. cité p.134, les Toiliers d'Ath in Annales du Cercle archéologique d'Ath, Bruxelles, VI (1920), pp. 13 - 14. Tout ceci pour les grands concours qui comprennent éliminatoires et finales. Car à la naissance du roi de Rome, en 1811, les deux équipes emportent chacune cinq mouchoirs à six francs pièce. Les seul frais prévus - paiement des marqueurs et des balles à fournir - sont à la charge des parties perdantes. Tous les prix dont j'ai parlé sont donc entièrement gratuits. Le jeu. Les indications que les règlements fournissent au sujet du jeu lui-même sont rares. Les luttes n'occupent que l'après-midi de la fête en 1796 et en 1797. Elles commencent le 14 juillet en 1801, le 12 août en 1804, le 15 à partir de 1806, pour se terminer pendant la Dédicace. Trois parties - une le matin, deux l'après-midi - se jouent chaque dimanche et jour de fête. Elles ne peuvent être interrompues sous quelque prétexte que ce soit. Dès 1801, aucun objet, ni même les personnes ne portent volée. En 1810, toute balle qui touche la corde, de milieu ou de côté, est mauvaise. Enfin, la même année, toute équipe qui aurait été battue, même par une autre constituée illégalement, ne sera plus admise à concourir, pour quelque motif que ce soit. Les experts. Cinq experts - nommés par le maire, ses adjoints ou le secrétaire - se prononcent irrévocablement, selon la coutume locale, sur les contestations qui s'élèvent entre les parties ou les joueurs qui composent celles-ci. Cependant, le jugement porté par un ou plusieurs experts qui auraient parié en faveur de l'une ou l'autre partie serait rejeté. Toutes ces dispositions datent de 1801. Elles ne seront pas modifiées.

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Vers 1914, la pratique des jeux évolue singulièrement. J. Desees fixe les limites d'extension de la façon suivante.

"On peut délimiter, grosso modo, la partie du pays où l'on joue à la balle (etc.) par une ligne imaginaire passant par Lille, Renaix, Gramont, Alost, Hamme, Malines, Wavre, Gembloux, Huy, Dinant, Chimay et Maubeuge. Dans la partie nord, on joue de préférence à la pelote, au sud à la balle au gant. Les deux régions sont séparées par une ligne allant de Maubeuge à Gembloux, en passant par La Louvière et Gosselies. "

En 1920, les grands centres de la petite balle au tamis restaient la région carolorégienne, la Basse Sambre et le centre (Binche, Carnières) ainsi que Bruxelles. Elle disparaîtra dans les années 60. La demi-dure disparut elle aussi après les années 50. Seule la balle pelote subsista.

Les mesures disciplinaires. Les règlements prévoient également des mesures disciplinaires. Chaque partie est appelée au jour et à l'heure fixés. On l'attendra pendant une demi-heure, délai porté à une heure en 1806, après quoi, on l'appellera trois fois. Celle qui ne répondra pas sera exclue et censée battue. Aucune réclamation ne sera admise pour non-réception des lettres. Toute partie, tout joueur qui réclameront contre la décision des experts seront renvoyés sur-le-champ et déchus du droit déjouer. La même sanction s'applique à ceux qui se permettraient des invectives ou des voies de fait, car la plus grande "honnêteté" doit régner.

Les barrières de l'invisible. Première partie. 33

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Jeux de balle en Belgique.

Les barrières de l'invisible. 34

Première partie.

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De la Flandre à la Wallonie.

Ces éléments de cartographie regroupés semblent nous montrer les vestiges d'un ensemble plus vaste.

Ainsi, la première question a été de savoir s'il existait une origine historique précise qui pouvait correspondre à l'aire mise en relief. Si la superposition des strates historiques décelait les traces de l'empire bourguignon, l'hypothèse n'a pu être retenue ; en effet, selon Robert Fossier, la maison de Bourgogne a été un agrégat occasionnel et de brève durée (1435-1478).

Par contre, l'implantation et la persistance des pratiques ludiques semblent coïncider avec un parler spécifique : le Picard dans son acceptation la plus large.

Les barrières de l'invisible. Première partie. • 35

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3. Jeux et langue.

Francis Carton, dans Romanistischen Linguistik évoque le problème de la Picardie actuelle ; centrée sur Amiens, la Picardie en tant que région ne correspond que partiellement, comme nous l'avons déjà évoqué, au domaine de la grande Picardie linguistique qui recouvre les pratiques ludiques cartographiées.20

Les pratiques de jeux semblent donc correspondre à des zones linguistiques précises.

De plus, elles s'inscrivent dans une zone géographique à laquelle correspond un droit coutumier spécifique. Il s'agit de groupe de coutumes picard-wallon se distinguant nettement du groupe de coutumes flamand.

4. Jeux et droit coutumier.

C'est en se plaçant de ce point de vue que J. Yver a distingué deux zones géographiques du droit coutumier, le groupe des coutumes picard-wallon et le groupe flamand.21

Le premier insiste sur les intérêts du ménage avant ceux des enfants dans le droit successoral. Les biens sont attribués à l'époux survivant et ces mêmes

20Selon Francis Carton, le domaine où se recrutait la natio picarda de la Sorbonne comprenait au début du siècle les diocèses de Beauvais, Amiens, Thérouanne, Noyon, Arras, Cambrai, Laon, Tournai et Liège en partie. C'est ce que l'on considère comme les domaines linguistiques picard et wallon. Mais si l'on fait la synthèse dans ce domaine, il serait plus exact de dire "parlers de type picards" plutôt que picard au singulier. On distingue de nombreux petits pays dont l'unité tient à des raisons politiques économiques ou géographiques. Ils ont joué le rôle de centres de vitalité dialectale. Par exemple, la Picardie proprement dite comprend l'Amiénois, le Santerre, le Vermandois, la Thiérache, le Vimeu, le Ponthieu, le Marquenterre ; le Boulonnais et le Calaisis sont parfois regroupés sous le nom de Basse Picardie. Lexikon der Romanistischen Linguistik, Gunter Holtus, Michell Metzeltin, Christian Schmitt, band vol. 1, Tübrugen, 1990.

2'Les origines de cette opposition entre ces deux groupes de coutume sont obscures. Une hypothèse a été formulée par Meyers qui a cru pouvoir attribuer l'opposition de deux systèmes de dévolution qui ne peuvent provenir ni du droit romain, ni du droit germanique, ni du droit celtique. Beaucoup de ces régions étaient difficilement accessibles et auraient pour cette raison échappé à l'influence des envahisseurs romains ou germaniques (Bretagne, Pays Basque, Pays-Bas, Hollande méridionale, Zélande plus la Flandre flamingante, le nord de l'Artois et l'ouest du Brabant. Dans toutes ces régions qui présentent certains traits communs du point de vue successoral, un droit préceltique avait subsisté : le droit ligurien. Meyers tire la conclusion suivante : "il existe un droit successoral dont les caractéristiques sont communes, qui n'est pas issu du droit germanique et qui doit être antérieur au moyen-âge. Il doit dès lors correspondre à la coutume d'une ethnie autochtone, antérieure aux grandes invasions, qui ne serait ni celtique, ni romaine. " Le Droit privé dans les Pays-Bas Méridionaux du XIIe au XVIIIe siècle, Philippe Godding, 15, Bruxelles, Palais des Académies, Académie Royale de Belgique, fas. 1, 1987.

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biens seront à vocation exclusive des enfants. Mais le partage entre les enfants est inégal. Le second groupe est par contre attaché à l'égalité entre les enfants.

Selon R. Jacob, le groupe Picard connaît une féodalisation poussée à laquelle correspond un droit d'aînesse très accentué. La conservation du patrimoine lignager est assurée par les restrictions au mariage des cadets, tandis que pour les filles à marier, la tendance est de leur donner une dot mobilière plutôt qu'immobilière. Il n'y a donc pas de ponction du patrimoine terrien. Par contre du côté Wallon, la féodalisation est incomplète.

Les pratiques de jeux dans le Nord, la Picardie et la Belgique.

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C'est en se plaçant de ce point de vue que J. Yver a distingué deux zones géographiques du droit coutumier, le groupe des coutumes picard-wallon et le groupe flamand.22

Le premier insiste sur les intérêts du ménage avant ceux des enfants dans le droit successoral. Les biens sont attribués à l'époux survivant et ces mêmes biens seront à vocation exclusive des enfants. Mais le partage entre les enfants est inégal. Le second groupe est par contre attaché à l'égalité entre les enfants.

Selon R. Jacob, le groupe Picard connaît une féodalisation poussée à laquelle correspond un droit d'aînesse très accentué. La conservation du patrimoine lignager est assurée par les restrictions au mariage des cadets, tandis que pour les filles à marier, la tendance est de leur donner une dot mobilière plutôt qu'immobilière. Il n'y a donc pas de ponction du patrimoine terrien. Par contre du côté Wallon, la féodalisation est incomplète.

L'alleu23 conserve une grande place dans le patrimoine lignager et se partage sur pied d'égalité. D'où une faible incidence du droit d'aînesse. A chaque génération, il y a partage entre les fils mais seule, la fille aînée est mariée, les cadettes étant vouées à la vie religieuse. Ainsi, une seule dot est à payer.

Quant à l'origine des divergences entre les systèmes successoraux des groupes "flamands" et "picards-wallon", il le rattache au statut des paysans. Pour l'homme du manse (petit domaine féodal constituant une unité agricole), ce serait la transmission de la terre cénsale24 et la prépondérance des mâles dans la succession aux biens paternels qui constitueraient les traits dominants ; pour l'homme d'avouerie : la terre allodiale25 et l'héritage de la mère.

22Les origines de cette opposition entre ces deux groupes de coutume sont obscures. Une hypothèse a été formulée par Meyers qui a cru pouvoir attribuer l'opposition de deux systèmes de dévolution qui ne peuvent provenir ni du droit romain, ni du droit germanique, ni du droit celtique. Beaucoup de ces régions étaient difficilement accessibles et auraient pour cette raison échappé à l'influence des envahisseurs romains ou germaniques (Bretagne, Pays Basque, Pays-Bas, Hollande méridionale, Zélande plus la Flandre flamingante, le nord de l'Artois et l'ouest du Brabant. Dans toutes ces régions qui présentent certains traits communs du point de vue successoral, un droit préceltique avait subsisté : le droit ligurien. Meyers tire la conclusion suivante : "// existe un droit successoral dont les caractéristiques sont communes, qui n'est pas issu du droit germanique et qui doit être antérieur au moyen-âge. Il doit dès lors correspondre à la coutume d'une ethnie autochtone, antérieure aux grandes invasions, qui ne serait ni celtique, ni romaine. " Le Droit privé dans ¡es Pays-Bas Méridionaux du XIIe au XVIIIe siècle, Philippe Godding, 15, Bruxelles, Palais des Académies, Académie Royale de Belgique, fas. 1, 1987.

23Alleu : terre de pleine propriété affranchie de toute redevance à l'opposé du fief.

24Terre cénsale : redevance fixe que le possesseur d'une terre payait au seigneur d'une terre. Le droit privé dans les Pays-Bas méridionaux du xii au xvme siècle par Philippe Godding, Bruxelles, Palais des académies, Académie royale de Belgique, fase. 1,1987.

25Terre allodiale : qui appartient à un franc alleu.

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Géographie des coutumes de la Belgique et du nord de la France

xvie - xviiie siècle.

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FRANCE COUTUMIÈRE . . D'après la carte de H. Klimrath (1837) . .

complétée dana l'Introduction bibliographique à l'histoire du droit, 0/l,France(im)

Limites de la France en 1789.

Limites générales entre pays de droit écrit et pays de droit coutumier.

Limites des ressorts de coutumes.

La France coutumière. D'après la carte de H. Klimrath (1837)

complétée dans l'Introduction bibliographique à l'histoire du droit, C/l, France (1967).

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1. Régimes matrimoniaux

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Régimes matrimoniaux.

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Mais le droit successoral est complexe et divers. Si nous étudions les cartes du droit coutumier et des jeux (voir annexe n° 1), il apparaît que si l'opposition, flamand / picard-wallon est nette, il semble impossible de croiser tous les traits, fluctuants et variés, qui peuvent s'associer à certains endroits et se dissocier à tels autres.

Cette superposition des ensembles coutumiers et des pratiques ludiques se renforce de parlers spécifiques.

A ce stade de l'enquête, il semble impossible d'établir des lois mais de faire comprendre les différentes contradictions qui se développent autour du thème des frontières culturelles à partir des pratiques ludiques.

Une des premières questions qui se pose est celle de la pertinence du champ picard, au sens où la terminologie politique et administrative l'entend.

La seconde question est celle des aires culturelles que ces jeux de balle et de ballon tracent et qui divisent l'espace en plusieurs entités.

A travers ces questions, le problème posé est celui des apports respectifs de l'histoire, de la linguistique et de la géographie dont il convient de mieux comprendre la genèse et l'évolution.

La transcription cartographique a montré des ensembles et donne à voir un état donné de certaines pratiques culturelles. Il s'agit de portions de territoire qui condensent conceptions et représentations spécifiques. Il s'agit de temps inscrits dans des espaces qui subsistent et qui s'opposent à d'autres zones. Ces zones, nous les retrouvons à des endroits précis du département de la Somme et de l'Oise, à la frontière du Nord, en Belgique.

En fait, le relevé des associations à différents moments de l'histoire (1900-1930) révèle la régression progressive de leur implantation.

Aujourd'hui, si la frontière est marquée nettement par la cartographie, elle ne représente que le résultat de l'effacement des limites antérieures et la mise en scène de configurations actuelles. Elle devient une photographie instantanée d'effets contemporains et de rapports réels ou imaginaires que les pratiquants entretiennent.

On le voit, les tracés actuels de la pratique de jeux de balle et de ballon expriment des modalités d'organisation spécifiques, ils se rattachent à d'autres ensembles linguistiques. Jeux et langue s'associent. Il est donc intéressant de voir dans quelle mesure ces frontières ethnographiques correspondent aux frontières linguistiques.

La Picardie, nous l'avons déjà évoqué, ne se cantonne pas aux limites administratives. Elle s'étend pour une part dans le département du Nord et aussi en Belgique. C'est dire que cet ensemble culturel franchit les frontières

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départementales et étatiques. Il dégage de plus une opposition majeure avec le groupe flamand. Dans ce cadre, nous pouvons retenir l'hypothèse d'un groupe picard-wallon opposé au groupe flamand.

Mais les éléments cartographiques sont assez explicites pour nous amener à nuancer davantage.

Carte 1: Segmentation dialectale de la Belgique romane

Segmentation dialectale de la Belgique romane. LRL, V. 1, Niemeyer, Tügingen, 1990.

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Selon Francis Carton, les zones de pratiques ludiques repérées en Belgique sont simplement picardes. F. Carton énonce en effet, que la différenciation picard wallon s'est faite anciennement. "Dès avant l'époque littéraire, le Picard et le Wallon possédaient des traits linguistiques les opposant les uns aux autres, mais avec une région mixte" Nivelles, Charleroi, Philippeville (wallo-picard) et vers 1200, la différenciation entre le liégeois et le namurois était sensible. Une théorie déjà ancienne a voulu voir dans la segmentation de la Belgique romane une conséquence du découpage en diocèses (reprenant des limites plus anciennes). Mais tout l'ouest de la Belgique romane depuis Thuin et Soignies est picard (Mons, Ath, Tournai, Comines).

C'est pourquoi, les zones ludiques sont en fait picardes et non wallonnes. Si les phénomènes de corrélation tracent des limites, elles restent cependant approximatives. Les contours déterminent des territoires précis mais ne peuvent en aucun cas se superposer complètement ni exprimer les notions subjectives d'appartenance. Aussi faut-il se contenter à ce stade de la recherche, de décrire ces larges zones qui confèrent cependant à la ligne de partage un caractère séparateur.

Reste à dégager d'autres traits de leur interprétation.

Si la traduction spatiale des jeux et de la langue peuvent caractériser une aire culturelle, d'autres traits culturels se trouvent aussi associés.

Il s'agit du système coutumier dont parle Yver. Cependant, ces traits supplémentaires peuvent n'être communs qu'à deux ou trois petites régions comme le montrent les cartes du droit coutumier. D'où la nécessité, pour tenter d'y voir clair, de repérer dans l'espace, non seulement différents traits culturels mais aussi de les faire coïncider. Il serait donc utile de poursuivre un travail de débroussaillage de l'ensemble de ces trois composantes. Mais seule la perspective plus globalisante, à défaut d'informations plus précises, peut nous faire dire que le système coutumier relevé par la cartographie fait partie du même ensemble culturel.

Reste à savoir comment ces traits culturels et notamment ceux que nous avons sélectionnés, les pratiques de jeux de balle et de ballon, peuvent subsister dans certains endroits et pas dans d'autres.

E.Les zones limites : remarques.

La géographie des jeux met en relief un itinéraire géographique qui conduit les jeux de balle et de ballon d'un ensemble extrêmement vaste (sol national et plus largement occidental) à des îlots de résistance situés aux lisières du pays.

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Parmi les ancêtres du jeu de paume, on retrouve aujourd'hui :

- le rebot en Pays-Basque français et espagnol, - la balle au tambourin dans la région de Montpellier, - la pelote provençale.

Jeux de balle et de ballon. Aires géographiques et variantes des jeux.

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1. lerebot.

Le rebot se pratique en Pays Basque et en Espagne, en Labound et en Pays Basque Espagnol, notamment Oyarzun, le Guipúzcoa ainsi que Villabona et Zubrieta.

En France, la pratique du rebot s'effectuait principalement à Hasparrien, Louhossa, Itxassou, Cambo, Espelette, Ustaritz.26

2. Le jeu de balle au tambourin.

Cette variante du jeu de paume se pratique uniquement dans l'Hérault et le nord de l'Italie.

Par le biais de la Tonnellerie-Gênes, les ports méditerranéens de l'Hérault, l'étang de Thau, les pratiques ont été uniformisées. Elles consistent en un échange de balles entre deux équipes de cinq joueurs chacune, l'instrument de jeu étant un tambourin, cercle de bois tendu naguère de peau de cheval, et joué sur un terrain de 80 mètres de longueur sur 20 mètres de largeur, divisé en deux

26Le rebot se pratique sur un terrain de 90 mètres à 100 mètres de long et limité par un mur dit de rebot, de surface réduite mais qui peut apparaître comme un vrai fronton. Une ligne de démarcation, à 32 mètres du mur de face, le "Pasa mane" délimite la "canche" en deux portions très inégales. L'équipe de cinq joueurs se décompose comme suit : "le paret" qui partage les tous premiers rôles avec le buteur et le second gant Terrebot", le troisième gant très proche de lui et deux cordiers, aux alentours de la ligne de "pasa". En face, les deux cordiers mélangés à leurs rivaux, les trois gants disposés jusqu'à la limite de fond ont pour objectif de bloquer les balles. Le rebot est l'un des jeux basques qui utilise "les chasses" ; le changement de camp s'effectue lorsque le point est gagné. Comme les jeux picards, rien n'est définitif avant le dernier quinze. Le destrocteur, l'excès de confiance, les aléas du terrain ou le hasard peuvent renverser inéluctablement la situation.. La pelote basque Les divers jeux de pelote basque se caractérisent de trois façons : - la disposition des camps de joueurs -les terrains de jeux - les accessoires. Il y a deux types distincts de jeux : - les "jeux directs" dans lesquels les joueurs sont face à face, chacun dans son camp. Il s'agit du rebot et le pasatea - les "jeux de Slaid" dans lesquels les joueurs sont tous face au fronton sur lequel la pelote doit obligatoirement frapper à chaque coup. Ces jeux se sont développés surtout depuis l'invention de la chistera (vers 1858). Il s'agit de la main nue, yoko-gerti ou petit chistera, grand chistera, pala, pala ancha ou palette argentine, paleta, remonte, sare ou raquette argentine etc. Les terrains de jeux : le trinquet est une salle fermée dérivée des "tripots" ou "salles de jeu de paume". La main nue, le pasatea, la raquette argentine, la palette argentine, la paleta etc. se jouent en trinquet. La place libre est un terrain rectangulaire comportant un fronton à chaque extrémité. On y joue : "la main nue, le rebot, le yoko-gerti, le grand chistera, la pala etc. Les accessoires sont divers, l'utilisation de la main nue, gant de cuir, chistera en osier.

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camps par une ligne médiane dite "la basse". La balle "bonne" à volée et au premier bond, doit être obligatoirement envoyée dans le camp adverse.

La plupart des clubs et des terrains se situent dans le triangle Pezenas-Gignac-Montpellier (Mèze, St Georges d'Orques, Grabéis, Vendémian, Cournonsec, Pignon, Balaruc les Bains). Ils entretiennent des relations et organisent des rencontres sportives avec l'Italie du Nord.

3. La pelote provençale.

Enfin, la pelote provençale, aujourd'hui disparue, a persisté longtemps à la frontière italienne.

La persistance de ces jeux semble donc être liée à leur emplacement géographique.

Pourtant, soumises au brassage de diverses influences, les régions frontalières sont celles où l'idée de tradition aurait dû être contredite par la réalité changeante. Or le maintien sous de multiples formes de pratiques ancestrales semble attester de la résistance humaine à la désagrégation. Ces pratiques orales et gestuelles, liées à un groupe déterminé, offrent un moyen de réappropriation d'une identité entamée par un univers mouvant.

Le déplacement géographique qui s'est effectué ainsi que la réduction, voire la disparition de ces pratiques ludiques nous amènent à formuler les questions suivantes :

- qu'est-ce qui fait que dans certaines régions de limites, les forces sportives sont accaparées, pour une part, par ces jeux issus de l'histoire, alors que le contexte s'est complètement transformé ?

- qu'est-ce qui fait qu'un village, qu'un bourg, une région s'identifie encore à cette forme de pratique, se démarquant par la même de son voisin ?

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II. Deuxième partie.

Nous avons présenté dans une première partie le relevé cartographique des associations de jeux et tenté de les analyser dans le cadre d'ensembles culturels déterminés.

Dans cette seconde partie, nous nous attacherons à analyser la pratique des différents jeux de balle tout d'abord dans le contexte historique puis dans le contexte actuel.

A. Histoire ancienne, universalité, implantation.

L'histoire des jeux de balle et de ballon en France nous renvoie au célèbre jeu de paume "roi des jeux et jeux des rois". Mais bien souvent, les différents écrits s'évertuent, en plus, à retrouver des origines les plus anciennes possibles.

Ainsi, les ancêtres de ce jeu évoquent des cultes archaïques et la rotondité du matériel des cultes solaires ; puis revient la période grecque et romaine où semble-t-il, se pratiquaient dans des formes éloignées, les différentes variantes de la sphéristique.

Il est bien probable que le jeu de balle soit ancien et qu'il se pratiquait à différents endroits du monde. La mention du Tlachtli, sorte de jeu de paume

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mexicain, semble remonter à la plus haute antiquité. Il a été découvert dans les cités Mayas et au Yucatan.

"Le Tlachtli avait certainement une signification mythologique et religieuse. On pensait que l'enceinte du jeu représentait le monde, la balle un astre, soleil ou lune. Le ciel est un Tlachtli divin où les êtres surnaturels jouent à la balle avec les astres. Mais dans la vie quotidienne et profane, le jeu de paume servait de prétexte à des paris énormes, par lesquels des quantités de vêtements, deplumes, d'or et d'esclaves changeaient de possesseurs : passe-temps de seigneur s'il en fut, et qui se terminait pour certains par la ruine et l'esclavage. "21

Les indications mentionnées par Jacques Soustelle, relèvent tout d'abord la forme du terrain de jeu en I majuscule, plus large aux deux extrémités et resserré en son milieu, entouré de murs, ornés de peinture et de statues. Deux anneaux de pierre étaient fixés sur les murs latéraux et les joueurs qui parvenaient à lancer la balle à travers ces anneaux gagnaient la partie. La balle ne pouvait être touchée ni avec les mains, ni avec les pieds mais seulement avec les genoux, les cuisses ou les hanches. Ce jeu d'une brutalité extrême était pratiqué par la seule classe dirigeante.

En Grèce, les jeux de balle, variés et nombreux, étaient couramment pratiqués. Claude Galien (131-201), anatomiste réputé et surtout médecin de l'empereur Marc Aurèle, les recommande vivement pour la culture du corps et le développement de l'esprit.

"Les jeux de balle", écrit-il, "assurent la santé du corps, la juste proportion des membres et développent les qualités de l'esprit. Le plus pauvre peut s'en offrir le matériel ; pas besoin de filets, d'armes, de chevaux, de chiens de chasse, mais rien qu'une balle et une balle toute petite. Et ce jeu empiète si peu sur nos autres occupations qu'il n'oblige à en négliger aucune".

Ces jeux servaient à l'entraînement. "Les éphèbespratiquaient cet exercice dans le sphairistérion, salle annexe de la palestre ou du gymnase. "*8

L'epyskiros (episcire, éphébique ou épicène) a été décrit par Julius Pollux, écrivain grec du IIe siècle, dans son Gnomasticon.

"On trace à la craie entre les deux camps une ligne, la scyre (pierre) ; c'est là que la balle est posée. On trace ensuite deux autres lignes derrière chaque camp. Les uns lancent la balle au-dessus des autres qui doivent essayer

27Jacques Soustelle, cité dans Dictionnaire des jeux, éd. Veyrier Tchou.

28J. Le Flochmoan : La genèse des sports, payot 1962.

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de l'arrêter et de la relancer. Ce jeu se termine lorsqu'un camp est bouté hors de sa ligne de fond "

La phéninde, autre variante du jeu de balle est présentée par Antiphane dans le Banquet des savants.

"Ayant pris la balle, il se plaisait à faire lapasse à l'un tout en évitant l'autre ; il la faisait manquer à celui-ci, déséquilibrait celui-là et tout cela avec des cris sonores :je l'ai ! balle longue!passe à côté ¡passe au-dessus! en bas, en haut ! balle courte ! passe derrière !"

Enfin, l'harpaston, lequel se pratiquait avec une petite balle que l'on frappait contre le sol de la paume d'une main. La pratique des jeux variait d'une région à l'autre, les règlements différaient localement. Il semble que ces jeux ont été empruntés aux grecs et sont passés aux romains.

Ovide, Horace, Martial, Plaute, Pétrone ont tout à tour chanté la popularité de ces divertissements des âges classiques et notamment du follis, grosse balle légère lancée à l'aide de l'avant-bras mum d'une sorte de gantelet, le trigon29 (pila trigonalis) et la pila paganica.30

Enfants et adultes y jouaient dans la rue. Aux thermes, le sphaeristerium y était spécialement consacré et permettait de s'échauffer avant le bain. La balle romaine ou pila était petite, rembourrée de crin ou de duvet, et généralement peinte de couleurs vives. On y jouait souvent contre un mur, avec le creux de la main : première forme du jeu de paume, qui fut aussi un des premiers jeux de balle en France.

C'est vers le XIIe siècle que les sources écrites réapparaissent. Cinnamus, en 1153, décrit une balle de cuir de la grosseur d'une paume, qu'on lançait avec une baguette, tenue dans la main, se terminant par une large courbure dont le milieu était fait de cordes de boyaux entrelacés.

Les ecclésiastiques y jouaient comme les seigneurs, les clercs, les rois, les gens d'église et les écoliers.31

29Trigon : trois joueurs formaient triangle (trigonum) et l'un deux (dator) propulsait le trigon que les deux autres (factores) devaient recevoir de la main ou du pied.

30¿a pila paganica était d'origine paysanne.

31 "Le jeu de paume et le sport universitaire". Dr René Truchet, extrait du journal de médecine de Bordeaux du 10 mars 1934. Bordeaux, imp. Delmas Chapon, 1934 (BN. 8°V. 24887).

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Ce jeu semblait ne pas manquer d'adeptes et il fut, comme d'autres jeux, soumis à interdiction par le roi Charles V, par un édit de mai 1362.32

Jeu de balle à la main, XVe siècle.

32En 1397, une ordonnance interdit la paume, la boule, les dez, les cartes et les quilles à "plusieursgens de métier et autres du petit peuple" qui "quittent leurs ouvrages et leurs familles pour aller jouer et gaspillent ainsi temps et argent". Interdiction leur est faite déjouer les jours ouvrables sous peine d'amende et de prison. Cette défense visait les périodes de jeux, d'autres les lieux. Ainsi, la coutume d'Amiens datant du tout début du XVIe siècle, dit ceci "A ucun ne peut sur les frocs, chemins etflegards de la terre et seigneurie d'un haut ou moyen justicier, estaller marchandise, prendre l'estoeufpour jouer à la paume, danser le jour de la feste du patron ou dédicace de l'église, jouer à la cholle en assemblée publique, n 'entreprendre autrement sur la justice du dit haut ou moyen justicier sans son congé et consentement, ou de ses officiers autrement eschat en amende de soixante sols parisis. " Lambert Vuillemen, Les jeux et les divertissements dans les provinces septentrionales au XIVe et XVe siècle. Mémoire de maîtrise Lille III. 1979-1980.

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1. Evolution et transformation du jeu.

C'est vers le XVe siècle que le jeu subit les principales transformations qui lui donnèrent son caractère définitif. Tandis que certains jeux (mail et boules) se jouaient sur les remparts de la ville, la balle à la main se jouait en France et en Italie dans des lieux non couverts, tels que les parcs et les fossés du château, voire même sur tous les espaces de plein air qui présentaient les dimensions voulues.33

A la fin du XVe siècle,34 plusieurs modifications furent opérées. De la proximité des châteaux ou de l'espace campagnard, le jeu se popularise et gagne la ville. A défaut d'espace, les joueurs se voient forcés d'avoir recours à des lieux plus réduits, entourés de murs. La courte paume naquit, s'associant bientôt à la longue paume qui continua à se jouer en plein air.

La transformation du jeu s'effectue encore à d'autres niveaux. La violence des coups et la résistance des balles étaient telles qu'elles pouvaient endommager la main, jusqu'à rompre le poignet ou écraser les veines.

"En ce temps, le déduit des joueurs était tout autre, parce qu'ils jouaient seulement de la main et lors, les uns jouaient à main découverte et les autres pour se faire moins mal, y apportaient des gants doubles. Quelques uns, plus fins, pour se donner quelque avantage sur leurs compagnons y mirent des cordes et tendons, afin de jeter mieux et avec moins de peine la balle. Ce qui se pratique communément. Et finalement de là, s'était introduite la raquette telle que nous voyons aujourd'hui, en laissant la sophistiquerie du gant.>ri5

En fait de raquette, il s'agit dans un premier temps de battoir : long manche adapté à un cadre que l'on tendait de grillage, de cordes ou de parchemin.

"Avant la venue du battoir, certains joueurs se munissaient de gants et de doubles gants. Lorsque l'utilisation de cet instrument se généralisa, on aperçut le plus souvent les battoirs avec parchemin sur les terrains de longue

^"La ville poursuivait ses transformations et dans le fossé extérieur du château où existaient déjà un jeu de battoir installé en 1753 et un jeu de paume depuis 1766, la ville créa un emplacement pour la danse. Ces deux jeux avaient été installés aux frais de la jeunesse, carKfne la Comtesse de Toulouse ne faisait que livrer le terrain à titre temporaire et toujours révocable. " Frédéric Lemaire : Albert jadis et aujourdhui. Imp. du progrès de la Somme. Amiens 1937.

34I1 est difficile de fixer la date à laquelle on commença à jouer à la paume dans un endroit clos mais il est certain qu'il existait des jeux de courte paume à Paris vers le milieu du XIVe siècle. La Paume à Paris et le lawn tennis, G. de Saint clair, C. Delahaye, Paris Hachette 1898.

35J. J. Jusserand p. 247, \es Sports et exercices dans l'ancienne France. Champion - Spatkine. Paris - Genève 1986.

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paume et ceux munis de cordes dans les salles de courte paume. Car le jeu lui-même comprit deux variantes dès la fin du XIVe siècle, la paume en salle devenant très populaire. "36

C'est à l'invention du battoir que l'on doit la disparition de nombreux et précieux manuscrits et notamment de plusieurs passages des Décades de Tite-Live.

"Un des amis de Chapelain signale qui ayant joué à la longue paume avec un battoir, il constata qu'il renvoyait la balle avec des fragments ignorés des Décades. Ils avaient été achetés par un raquettier à un apothicaire lequel, ayant eu en don plusieurs volumes en parchemin, provenant des religieuses de Fontevrault, les avaient vendus, étant incapable d'en connaître la valeur véritable. "37

C'est donc à partir du milieu du XIVe siècle et durant le XVe siècle que le jeu connut ses principales subdivisions.

Du jeu circonscrit aux remparts des châteaux et aux places rurales, s'étendit une nouvelle variante urbaine où à défaut d'espace, les joueurs se voient forcés d'avoir recours à des lieux clos, entourés de murs. Si la courte paume naquit, la longue paume n'en continua pas moins à être populaire. Mais là aussi, cette pratique connaît des formes variées. C'est ainsi que coexistent à cette époque courte et longue paume.38

La longue paume se joue sur une grande rue large ou sur une grande place non fermée. "Un grand toit de planches, attaché à un mur ou sur quatre piliers, garni d'une planche large d'environ 12 à 14 pouces, placée droite sur le côté, percée dans le milieu de sa longueur et à 4 doigts du toit, soutenu par derrière d'un bâton de 2 ou 3 pouces 1/2 de tour et qui excède la planche d'environ 2 pieds de haut sert d'objectif." Ainsi, lorsque la balle qu'on sert passe sur la planche dans le trou, le serveur gagne 15 points, lorsque la balle passe au-dessus de la passe, le serveur perd 15 points.39

36Cf. Floch'moan, opus cité.

37Cf. Dictionnaire des jeux. Henri Veyrier/Claude Tchou. éd.

38Les écrits ne distinguent pas toujours courte et longue paume ; ce qui entraîne parfois des confusions.

39Notes sur le jeu de paume à Angers. BN. 8° L. k 7. 45032. V. Dauphin. Extrait des Mémoires de ¡a société nationale d'agriculture. Sciences et Arts d'Angers 1919.

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Jeu de ballon et tir à la butte.

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Raquettes et balles.

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Différentes sortes de raquettes et de battoirs.

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Deuxième partie. *

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\-r*»jà».-VJ

JEU DE PAUME FRANÇAIS (ÉPOQUE DE LOUIS XII l )

Le jeu de paume.

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Quant à la courte paume, elle fut enfermée dans des salles qui prirent le nom de tripots.

Antonio Scaino de Salo le disait ainsi :

"Il est de dimensions importantes, dignes de la grandeur d'un roi. Haut de quatre étages et se terminant par un grand mur. Il est entouré d'un beau portico, que les français appellent galeries, très commode pour l'assemblage de nombreux barons désireux d'être présents pour assister à une bataille aussi noble et aussi royale et aussi pour que la balle puisse y courir ...le mur principal est uni mais plus épais dans une de ses parties, là où il commence à avancer sur le sol, formant une projection que les français nomment tambour (tambourino), et celui-ci s'avançant obliquement force la balle à bondir en une variété de bonds lorsqu'elle le rencontre avec des effets variés et nombreux lorsqu'elle est lancée par de bons joueurs, ce qui est fort beau à voir. "

C'est à l'instigation de la bourgeoisie montante des villes (commerçants et usuriers) que le jeu de paume fut enserré entre quatre murs.

"On dut payer pour entrer dans ces salles où se pratiquait la paume durant les frimas. "40

Les accidents de terrain, le rôle du vent et des arbres furent supprimés. De plus, l'intérêt des parties en fut augmenté, à cause des ricochets multiples des balles sur les parois. On ajoutait ainsi à la subtilité du jeu en faisant ricocher l'éteuf sur les murs, en le faisant rouler sur le toit d'une galerie en le faisant sortir par une ouverture d'un mètre carré appelé "grille". De plus, au lieu du simple trait séparant les deux camps ou d'une corde, on coupait la salle en deux parties par un filet.41

Tous ces perfectionnements permirent déjouer par tous les temps. Les édifices ainsi conçus furent appelés "tripots". Ils se multiplièrent au cours du XVIe siècle et donnèrent naissance à une industrie nouvelle : celle des paumiers.

2. Structuration.

Durant cette même période, fut réglementée la fabrication des balles. Louis XI rendit une ordonnance en 1480, le 24 juin, sur les faiseurs de balle pour la ville de Rouen, lesquels maîtres jurés lui avaient remontré que "ledit

40Floch'moan, opus cité.

41Les camps étaient séparés par une corde d'où pendait une simple frange qui n'allait pas jusqu'à terre. De là, de fréquentes discussions pour savoir si la balle était passée par-dessus ou non et l'invention du filet.

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métier est de grand peine et à peu de profit parce que, le temps passé, chacun qui s'en est voulu mêler l'a fait", et que des gens sans conscience "emplissent vieux esteufs de chaux, sable et autres choses qui ne sont bonnes et à l'occasion de quoi plusieurs ont eu les bras et mainsßlees et blessées".

Seront tous les maîtres dudit métier tenus de faire bons esteufs bien garnis et étoffés, de bon cuir et bonne bourre, sans y mettre sablón, craie, bature (rognures de métaux), chaux, son, resture (rebut) de peau nommée resur, sciure d'ais (de bois), cendre, mousse, poudre ou terre "souspeine d'amende et de saisie de tous mauvais esteufs qui seront ars et burlés afin que aucun n'en soit inconveniente ".42

Le XVIe siècle se caractérise par l'évolution des techniques, le renforcement d'une division sociale déjà amorcée et corrélativement l'explosion numérique des aires de jeu.

En 1598, un anglais, Sir Robert Dallington, voyageant en France, disait du jeu de paume :

"Le pays est semé de tennis, ils sont plus nombreux que les églises, les français naissent une raquette à la main, il y a plus de joueurs de tennis en France que de buveurs de bierre en Angleterre. "43

3. Les joueurs.

Dans le cadre de la société amiénoise, les participants sont essentiellement des membres de la bourgeoisie. Dans les textes de l'époque, il est fait mention de "saiteur", de "maître déchargeur de vin".

Le 26 mai 1544, le saiteur Viscongne demandait 24 livres tournois "gagnez aujoeu de paulme par-dessus payer la corde" à l'encontre de Boulet, dont le maître des déchargeurs de vin devait payer la dette : ils avaient joué à la taverne de bos.

Il apparaît que le sieur Boulet était un jeune compagnon à marier et ce dernier voulait bien payer le banquet pour s'acquitter comme c'était coutume entre des gens "de tel état, autrement n'était à eulx affaire déjouer si gros jeu, mais avec gentilshommes et personnes callifiez".

42Cf. Jusserand p 145, opus cité.

43Cf. Cruchet, opus cité.

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Il s'agit d'après ces lignes de commerçants et d'aristocrates. Un lien nouveau les unit : les paris.

Les lettres patentes de François 1er affirmaient que tout ce qui était payé au vainqueur d'une partie serait considéré comme une dette raisonnable mais également acquise par son travail.

C'est dire qu'au XVIe siècle, on ne joue pas gratuitement au jeu de paume. Dans le peuple, comme dans d'autres milieux, ce jeu est occasion de gains et de pertes. Mais alors que pour le commun, les enjeux se limitaient au prix du vin consommé après la partie, les dépenses des nobles sont beaucoup plus élevées.

Or certains ne peuvent régler leurs dettes de jeu. Si un duc à court d'argent est réduit à laisser des gages tels qu'un diamant ou une ceinture ornée de métal précieux, d'autres peuvent se faire saisir leurs biens, sous le contrôle d'un noble nommé par le roi et chargé de réglementer les paris d'argent.

L'exclusion était donc permise. A Amiens, en 1571, des maîtres de jeu de paume furent condamnés pour avoir permis à "des gens mécaniques" déjouer à la paume. Cette condamnation répondait à des interdictions précises interdisant le jeu "aux gens mécaniques oisifs". Il semble que celui qui ne possédait pas d'argent gagné par son travail était exclu du divertissement. La démarcation sociale s'impose par les enjeux et les paris écartant ceux qui ne peuvent en acquitter les montants. Le jeu de paume devient le reflet fidèle des oppositions sociales de la population de la cité au XVIe siècle et indique même des tensions plus sourdes promises à développement..

Mais outre les joueurs, d'autres personnes étaient liées au jeu de paume, notamment les tenanciers d'auberge ou les marchands d'éteufs.

En 1501, Charles Leurin, "estoeuffier" prit "un bail à louage" "pour une maison, jeu de paume, pourprins et tenement au devant du pont de Cay, que l'on nomme le rouge jeu".

Quant aux marchands d'estoeufs, ils pouvaient être soumis à des réclamations.

Dans une affaire de justice datée du 13 août 1594, l'on retient l'exemple d'une "dalle rongnée", mauvaise balle dont le revêtement semble fragile à en croire la fréquence d'achats des balles et leur nombre.

En 1609, certains fabricants de raquettes furent pris à partie par les habitants de la rue de Baurelles pour les nuisances et ils furent "tenus mettre les briaulx en œuvre ungjour après qu'ils les auront achetés sans tendre davantage pour éviter un mauvais air qui s'en pourrait austrement ensuir".

Le développement du jeu de paume entraîne parallèlement l'augmentation du nombre de maîtres paumiers et leur structuration. Ils étaient les seuls à tenir

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les jeux de paume, à fabriquer les raquettes et les balles dont on se servait pour le jeu.44

4. Le règlement.

Les premières règles écrites de la paume parurent en 1599 en France. Mais, selon G. de S* Clair,45 le plus ancien de tous les ouvrages traitant de la paume est le Traîtato délia palla d'Antonio Scaino publié en 1555. La manière de compter était déjà adoptée ainsi que l'usage des chasses sur lesquelles nous reviendrons.

Le jeu se décomposait en 4 quinze ; il fallait 2 quinze successifs pour gagner un jeu quand les deux camps avaient chacun 45. On employait dans ce cas là, les termes "a due et vantaggio" pour désigner la position de la partie, termes dont dérivent à deux et avantage. A cette époque, en Italie, la partie ne se composait pas de plusieurs jeux et se jouait en un seul. Mais le gain de cet unique jeu était simple, double ou triple : simple quand le côté perdant avait gagné un ou plusieurs coups, double lorsque les 4 quinze étaient gagnés par le même côté ; triple lorsqu'un côté après avoir gagné les 3 premiers quinze, en perdait 5 consécutivement.

Scaino évoque aussi l'usage des chasses "caceta". D'après cet auteur, "ce mot explique la marque de la balle qui est lancée et fixe cette marque au point où la balle termine sa course dans les limites qu'elle ne doit pas franchir". Les chasses sont marquées au premier point où la balle cesse de rouler ou est arrêtée après le second bond. Cette règle, observée dans la paume jouée en plein air (alla distesa), est encore en usage dans toutes les variétés de jeux de balle pratiqués encore aujourd'hui en Picardie.

44L'art de la paumerie fut érigé en corps de maîtrise en 1610, sous le titre de communauté des maîtres raquettiers, faiseurs d'esteufs, de pelotes et de balles. Cette communauté était gouvernée par quatre jurés qui recevaient les apprentis et faisaient des visites tous les mois. On élisait deux de ces jurés chaque année et ils restaient deux ans en charge. L'apprentissage était de trois ans et le brevet devait être enregistré par les jurés. Les aspirants à la maîtrise devaient faire un chef d'oeuvre. A Bordeaux, il existait une corporation de maîtres paumiers, ayant des statuts, acceptés et enregistrés par la jurade. En 1684, leur blason était "d'azur à une sainte barbe d'or, tenant une palme de sa dextre etsenestrée d'un tour, le tour d'or sur terrasse de même". Parmi les statuts, un des plus impérieux articles était l'obligation d'avoir du linge pour les joueurs "à scavoir, quatre douzaines de serviettes fines pour faire des bonnets, deux douzaines de chemises, six douzaines de demies serviettes pour essuyer, douze paire de calsons, autant de chemisettes, autant de chaussettes, autant de chaussons de cuir et douze de laine et huiet de linsuls". Il était interdit "défaire servir aux joueurs deux fois un même linge sans estre blanchy". Le tarif était de deux sols de chaque pièce de linge. (Cruchet), opus cité.

4ÎG. de Saint Clair, Jeux et exercice de plein air, 3e éd. Paris 1889. P. Arnould.

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Le premier service était un coup d'essai, qui ne comptait pas. Il fut appelé coup de dieu, puis le coup des dames ou demoiselles : usage galant tombé en désuétude et remplacé par le salut de la raquette de joueur à joueur.

Ces règles montrent que ni le temps, ni la pratique, ni la mode n'y ont apporté de grands changements. Encore en usage actuellement, elles contiennent tous les principes du jeu tels que nous les trouvons dans ces anciens documents.

Mais le règlement s'affine car les enjeux financiers à travers les paris existent. La paume est un exercice honnête permis par les lois, dont les différents peuvent se régler en justice et qui donne lieu à des concours publics et à des prix.46 Les infractions sont punies d'amendes. Les cas douteux seront examinés par les maquets ou marqueux mais aussi par le public, constitué en tribunal arbitral.

5. Les interdictions.

A cette passion, l'église opposa une réprobation absolue "le décret du concile de Sens de 1485 interdit déjouer à la paume surtout en chemise et en public". L'immoralité des jeux de hasard, l'indécence des jeux de société, la brutalité des jeux physiques, telles étaient les raisons pour les interdire.47

Les prescriptions d'ordre religieux furent nombreuses. En 1585, on appliqua une amende à Liénard Flameng qui laissa ouvert son jeu de paume de Cay durant le service divin. En effet, l'église exigeait la présence de tous aux offices religieux. Les tenanciers du jeu de paume, même s'ils furent quelque peu privilégiés, étaient soumis aux mêmes règles.

Les prescriptions religieuses ne furent pas les seules à limiter l'exercice du jeu de paume. Le 9 mai 1519, à Amiens, la ville décida d'interdire le jeu à cause de la peste. Le déplacement des joueurs en plein effort causait de la sueur et une respiration courte, agissant sur l'air. Les gens de l'époque savaient que l'épidémie se déplaçait justement dans l'atmosphère ; pour eux, interdire tout mouvement brusque entraînant une dépense d'énergie était source de prévention.

46Couronne de fleurs, une paire de gants, un éteuf d'argent ou une raquette.

47I1 est stipulé dans les règlements intérieurs des collèges, notamment à Narbonne et à Seez les éléments suivants : "que personne ne joue dans la maison à la paume ou à la crosse ou à d'autres jeux dangereux sous peine de six deniers d'amende". A Seez : "Nous ordonnons que personne ne s'adonne au jeu de dés, ni à d'autres jeux malhonnêtes ou défendus, ni même aux jeux admis comme la paume, surtout dans les lieux communs et si on les pratique ailleurs, ce sera peu fréquemment".

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Mais si ces interdictions furent clairement invoquées, elles ne furent pas toujours respectées et le jeu de paume continua à se pratiquer.

L'époque des Valois parait marquer l'apogée de la paume en France. Sous Henri III, 1800 jeux environ existaient dans la capitale. Cette multiplication des jeux et tripots avaient déjà provoqué en 1530 un édit royal ordonnant de fermer tous les jeux, exceptés ceux fréquentés par la noblesse, incluant la défense d'en bâtir de nouveaux, même dans les faubourgs (il s'agissait plus de supprimer les paris que les jeux eux-mêmes). Expulsés de la ville, les tripotiers se rejetèrent sur les faubourgs mais un nouvel édit interdit dans les faubourgs aussi "chasse et paume, plaisirs de gentilshommes".48

6. Le déclin.

Mais bientôt, le déclin se fit sentir. Avant la constitution définitive de l'idée de noblesse, la plupart des jeux étaient communs à tous49 : jeux d'adultes et de gentilshommes, jeux d'enfants et de manants. François 1 e r et Henri II ne dédaignaient pas la lutte, Henri II jouait au ballon, Louis XIV jouait à la paume. Ce jeu fut un des plus répandus.

Cette unanimité cessa vers le XVIIe siècle et les gens "de qualité" délaissèrent le jeu. Les classes sociales supérieures abandonnèrent la paume qui subsista dans le peuple. Le nombre de tripots diminua très rapidement.50

Devenue isolée, négligée par la noblesse, elle continua à déchoir.

Son extension puis sa régression semblent donc avoir été le fait des facteurs suivants.

Selon les époques, étaient plus ou moins encouragés les jeux à caractère militaire. Des ordonnances mentionnent de telles indications. Dès 1319, Philippe V. le long défendait les "jeux de dez, de table, de palets, de quilles, de soûles et billes". A cette liste, Charles V, en 1369, ajoutait "la paulme" et les "boules". Tous deux préféraient que leurs sujets s'exercent plutôt "au fait et usage d'armes à la défense de notre dit royaume" et favorisaient le tir à l'arc.51

4SLa Paume et le lawn-tennis, E. de Nanteuil, G. de Saint Clair, C. Delahaye, Paris 1898, Hachette et Cie.

49Depuis le xiie siècle, certains jeux étaient réservés aux chevaliers (tournoi et bague) et interdits aux vilains.

50114 tripots à Paris en 1657,10 en 1780.

5'Hélène Tremaud Jeux deforce et d'adresse. Guide ethnologique du musée national des Arts et Traditions populaires (n°14), Paris 1972.

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De plus, certains jeux dont la paume étaient liés aux paris et ils étaient soupçonnés d'avoir un caractère pernicieux moralement et économiquement.

L'attitude par rapport aux jeux se modifie au XVIIIe siècle, les médecins conçoivent à partir "des vieux jeux d'exercice" une technique nouvelle d'hygiène du corps : la culture physique. A la fin du XVIIIe siècle, les jeux d'exercice reçoivent une autre justification, patriotique, ils préparaient à la guerre.

Ainsi, sous les influences successives de pédagogues humanistes, des médecins des lumières, des premiers nationalistes passe-t-on des jeux violents et suspects de l'ancienne coutume à la gymnastique et à la préparation militaire, des empoignades populaires aux sociétés de gymnastique.

C'est ainsi qu'au XIXe siècle, plusieurs jeux français sont transformés à travers la codification que font apparaître les anglais. La soûle s'oriente vers le football et le rugby, la courte et longue paume deviennent le tennis. L'apparition de ces nouvelles formes ne met pas pour autant fin à la carrière des premiers. Ceux-ci continuent surtout dans les classes populaires et le milieu rural, à être pratiqués dans leurs anciennes formes et subsistent jusqu'à nos jours.

Cette rapide remontée dans le temps se caractérise par des discontinuités et des ruptures. Mais il ne s'agit pas ici, de trouver une généalogie simple et convaincante. Les différentes données historiques ont été relevées afin de resituer les jeux qui subsistent aujourd'hui et notamment les jeux de balle et de ballon dérivant du jeu de paume.

B. L'image de la discipline.

C'est surtout au travers des entretiens que va réellement se façonner l'image des disciplines actuelles..

En ce qui concerne les différents jeux de balle localisés dans la région picarde administrative, nous nous apercevons que des modalités différentes traduisent des oppositions entre les quatre jeux.

La balle à la main, la balle au tamis, le ballon au poing sont parfaitement identifiables du point de vue moteur, matériel, etc. mais l'image des différentes disciplines donnée par "les connaisseurs" et les pratiquants dépassent le simple constat des différences.

Deux niveaux d'analyse sont donc nécessaires : l'étude technique du jeu et la prise en compte des appréciations des joueurs sur leur propre pratique et sur celle des autres.

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1. Le jeu : étude technique.

a) La balle à la main.

BALLE A LA MAIN

Se joue à main nue, la balle étant frappée avec la paume, ce qui a donné au jeu son appellation fran­çaise.

s i ) Développé de la balle

Balle

Laine pelotonnée très serrée sur noyau de caout­chouc dur, le tout recouvert de cuir.

Diamètre .'environ 4,5cm. Poids : de 40 à 42 g.

FEDERA TION FRANÇAISE DE BALLE A LA MAIN

HANGEST-ENSANTERRE -80110 MOREUIL

La balle à la main.

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La balle à la main est qualifiée de jeu de paume à l'état pur et on lui attribue une antériorité par rapport aux autres jeux parce qu'elle utilise comme moyen de propulsion la paume de la main.52

La balle, d'un diamètre d'environ 4,5 cm et pesant de 40 à 43 grammes est faite d'un noyau de caoutchouc recouvert de fils de laine et enveloppé de peau de chèvre ou de mouton taillée en forme de huit et cousue par une seule couture à la main.

L'équipe de balle à la main est composée de huit joueurs : un foncier, un ou deux hautes volées, deux ou trois basses volées, trois ou quatre cordiers. Les terrains de la balle à la main comportent à chaque extrémité une délimitation matérialisée par une ligne appelée "rapport" et généralement bornée par des poteaux surmontés de drapeaux. La longueur, variable en fonction des possibilités locales, s'étend environ à 65 mètres.

Le livreur joue une première balle qui sera sans conséquence. Puis chaque livreur envoie la balle pendant tout un jeu. La partie comporte huit jeux. En cas d'égalité, le dernier jeu est disputé avec avantages (2 quinze d'écart).

La spécificité de la balle à la main réside dans le système de gagne-terrain matérialisé par des repères appelés chasses. Ce système spécifique est utilisé pour tous les types de jeux de balle.

La balle à la main, comme la cartographie nous l'a montré, s'est pratiquée dans l'est du département de la Somme et au nord du département de l'Oise. Si elle comprenait à la veille de la seconde guerre mondiale une quarantaine de sociétés, elle ne représente plus aujourd'hui que quelques sociétés.

32Le dedans de la main entre le poignet et les doigts.

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BALLE A LA MAIN.

ZONE GEOGRAPHIQUE

• - Est du département de la Somme.

• Au nord du département de l'Oise

- Santerre et Amiénois.

• - Crévecœur - Oise. - Haudivillers. - Avant Aubigny. - Pont/Noyelles - Querrieux. - Hangest/s/Santerre. - Demuin.

• Zone de petites cultures, 30, 40 ha.

• "Balle au gant presque professionnalisée en Belgique".

QUALITES RECONNUES

• Sport athlétique :

- adresse, - souplesse, - force, - astuce.

QUALITES DITES

• "Avant jet plus long",

"aujourd'hui, moins deforce. "

SCHEMA CORPOREL

• Rude détente du bras et du corps.

• Fonciers célèbres pour les balles à la volée, ou pour la longueur des rachats.

GROUPE

• 40 sociétés à la veille de la dernière guerre.

Aujourd'hui, 8 sociétés dont 7 dans la Somme et 1 dans l'Oise.

• Somme :

Aubigny, Bouchain, Demuin, Hangest en Santerre, Parvillers, Pont Querrieu, Vaux sur Somme, Villers Bretonneux.

• Oise :

"Tous originaires, certains à l'extérieur reviennent pour jouer".

Origines familiales ; on joue de père en fils.

"Dans les villages, les nouveaux ne s'intéressent pas."

Mariage : rupture de la pratique un an après.

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BALLE A LA MAIN.

REGLES

• 8 joueurs :

-1 foncier "le fort du jeu"

-1 ou 2 hautes volées, - 2 ou 3 basses volées, - 3 ou 4 cordiers.

Toléré : 6 joueurs.

• 8 jeux sans avantage sauf lorsque les équipes arrivent à égalité à la fin de l'avant dernier jeu. Dans ce cas, le dernier jeu est disputé avec avantage (2 quinze d'écart).

• 8 joueurs, différent de la longue paume où il faut moins de joueurs (adaptation de la longue paume).

MATERIEL

• Instrument de propulsion, le plus simple qui puisse se concevoir : le dedans de la main entre le poignet et les doigts, autrement dit : la paume.

• Balle:

4,5 cm, 40 à 43 gr, constituée d'un noyau de caoutchouc dur sur lequel on pelotonne des fils de laine très serrés. Le tout est recouvert de peau de chèvre ou de mouton, taillée en forme de 8 et cousue par une seule couture.

• Tolérés:

les gants de ville souples à l'exclusion des gants rigides pouvant accroître la propulsion de la balle.

"Plus de cordoniers pour faire les balles (cuir de veau), les joueurs n'aiment pas jouer avec des balles neuves, les coutures font mal."

LANGAGE

• "rapport" :

délimitation matérialisée par une ligne "rapport", bornée de poteaux surmontés de drapeaux.

TRANSMISSION

• Relais de l'école.

• Transmission familiale.

RESEAUX

• Instituteurs.

• Famille.

SYMBOLIQUE

• L'équipe proclamée championne se voit confier la garde du drapeau de la fédération pendant un an.

LIEUX

• Plein air.

• Aléas du vent.

RAISONS DE LA DISPARITION DE

SOCIETES

• Sport peu spectaculaire.

• "On ne voit pas la balle".

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BALLE A LA MAIN.

TERRAINS DEROULEMENT DU JEU

FAUTES

8m 20m* 37m p

-ap-501t

ligne de tir

corde

• ramené à 18m en 2è catégorie, 16m en 3 è • poteaux

• Terre battue ou craie damée ou macadam.

• Maintenant la tradition, la balle à la main commence chaque partie par une balle sans conséquence quelle que soit la trajectoire, la chasse est portée à hauteur de corde.

• Jeu de paume "à l'état pur".

• Pénalisation d'un quinze pour :

- livrer la balle au-dessus de l'épaule,

- dépasser la ligne de tir, - toucher la balle "bonne" des deux mains,

- la balle touche de volée une chasse ou un poteau de délimitation.

• D'autres fautes ou incidents sont laissés ä l'appréciation de l'arbitre

joueur gêné, balle touchant une branche ou des feuilles d'arbre, animaux traversant le terrain.

ARBITRAGE

• Un seul arbitre prend les décisions, sans appel. Peut s'adjoindre un commissaire qui circule du côté opposé.

BALLE A LA MAIN.

COMPETITIONS

• Mai à fin août (coupes, challenges).

• 3 catégories.

la première : le plus haut niveau.

PRIX

• Prix symboliques aujourd'hui.

• Prix exposés.

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b) Le ballon au poing.

BALLON AU POING

Est aussi appelé dans certaines régions (Ballon français» ou «Paume au ballon».

Ballon

Genre hand-ball, en cuir avec vessie de caoutchouc.

Diamètre :20 cm Poids : environ 475 g.

Le ballon est frappé par le poignet générale­ment protégé par une bande de toile.

Le championnat de France de ballon au poing au Parc de la Hotoie à Amiens, tous les 15 août, constitue la manifestation picarde la plus impor­tante et la plus colorée de l'année.

Plusieurs milliers de supporters, venus des villa­ges concernés par ce sport, viennent encourager en picard leurs équipes favorites.

FEDERATION FRANÇAISE DE BALLON AU POING

BUIRESUR-ANCRE • 80300 ALBERT

Le ballon au poing.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. * 70

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Comme la balle à la main, le ballon au poing se caractérise par le même système de jeu. Le ballon utilisé est dans sa conception moderne, semblable à un ballon de handball d'une circonférence de 60 à 65 centimètres, son poids oscille entre 425 et 475 grammes.

Le terrain est de la même longueur que celui de la balle à la main ; l'équipe ne comporte que six joueurs.

Le foncier commence à livrer une balle qui, contrairement à la balle à la main, comptera d'emblée.

Plus étendue que la balle à la main, le ballon au poing organise des compétitions variées avec plusieurs types de catégories : excellence, juniors, cadets.

Le point culminant de ces rencontres s'effectue traditionnellement le 15 août à la Hotoie à Amiens. Les vainqueurs de chaque catégorie se voient confier pour un an la garde du drapeau qui conserve le nom de la société victorieuse.

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BALLON AU POING.

ZONE GEOGRAPHIQUE

• Hérissart.

60 licenciés sur 650 : la plus forte, la plus ancienne association.

• Nord-est d'Amiens. Amiens et environs. (Albert - Doullens, triangle de 30 km de côté.

• Myriade de bourgs et de villages éparpillés.

QUALITES RECONNUES

• Apprentissage difficile du geste de frappe.

• Motivation nécessaire.

• Geste répété par des générations de picards.

• Apreté de la compétition.

• Violence rentrée des coups.

• Vedette du jeu : le foncier. Homme à tout faire : chef de bande plus fort, plus rapide, plus résistant.

QUALITES DITES

• Sport très dur. Jeu de force avec une façon particulière de frapper la balle (décrochement).

"Frappe rageuse et terrienne. "

• Au niveau tactique.

Ils "sentent", ce sont des "maquignons", ils savent que pour gagner un point, il faut faire çà ou çà ; ils connaissent les points faibles".

Ils savent "regarder", leur champ de vision est plus étendu.

SCHEMA CORPOREL

• Dès le départ, "on voit la façon de jouer pour voir s'il fait un bon joueur".

• Bras tendu comme moyen de frappe.

"Il faut de la force physique. "

"Le geste est chevillé au corps. "

• Le ballon est frappé par le poignet généralement protégé par une bande de toile.

GROUPE

• -Cultivateurs, - ouvriers, - quelques artisans ou commerçants.

• "Tous du pays". Aujourd'hui 3/4 dlîérissart + 3 ou 4 de pays voisins qui viennent par mariage.

• Tous les jeunes qui jouent ont des parents qui ont joué.

Réseaux de famille, "c'est dans le sang", "Ils voient les autres jouer, ils jouent".

• Les jeunes cumulent football et ballon au poing.

• Transmission par le relais de l'école.

• Amour du village et passion du ballon.

• A la Hotoie, plusieurs milliers de supporters venus des villages concernés par ce sport, viennent encourager en picard leurs équipes favorites.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. » 72

Page 73: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

BALLON AU POING

REGLES

• Chaque ¿quipe doit s'efforcer de propulser une balle, dans le camp opposé de manière telle que l'adversaire ne puisse pas la renvoyer.

• Fonciers, cordiers, basses volée et milieux de corde doivent frapper la balle avec le poignet.

• La partie se déroule en 5,6 ou 7 jeux qui se décomposent en points à la manière du tennis.

MATERIEL

• Aujourd'hui, ballon plastifié, genre handball avec vessie de caoutchouc.

Diamètre 20 cm, poids environ 475 g.

LANGAGE

• "Ballodrome".

• "Mais nom de Dieu, frappe donc dins ch'tchuir !"

• "C'est pas possible, ils ont pas pu se faire battre par ces abrutis de..."

• "Celui-là, çàfait trois fois qu'il méfait un quinze. Yen a marre".

TRANSMISSION

• - Vecteur du sang.

- Mariage.

- Belle prestation dans le jeu.

"La base pour que çà continue c'est la formation, l'instituteur. "

• "H y a ballon au poing que s'il y a eu des racines".

"l'important, c'est les racines".

• "La politique départementale joue dans la mesure où elle encourage, mais ne peut pas créer de toutes pièces".

• "Si on ne sème pas, on n 'a rien"

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Page 74: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

BALLON AU POING.

RESEAUX

• Famille élargie :

71 père o fils

11 l¿ <=• neveux 1 cousins germains

avec un grand père "bon joueur", "extraordinaire foncier".

• Père + 3 fils.

• Père, neveu, 2 fils Père, 3 neveux, 1 beau-frère, 2 fils etc.

• Métiers :

- marchand de vaches, - artisans, - agriculteurs, - salariés/ouvriers, - instituteur.

• "Beaucoup de petits cultivateurs de 4 à 5 ha expliquent la solidarité. "

SYMBOLIQUE

• Pas de chasse pour l'ouvrier.

• C'est le ballon qui prime.

• Ballon au poing + langue.

LIEUX

• Le championnat de France de ballon au poing au parc de la Hotoie à Amiens, tous les 15 août, constitue la manifestation picarde la plus importante et la plus colorée de l'année.

RAISONS DE LA DISPARITION DE

SOCIETES

• "C'est resté parce que c'était pas trop grand", "c'était rural".

Différent de Doullens où il n'y a plus personne.

• Vallée de la Nieire.

"Là où il n'y a plus rien ", "c'étaient des jeux exportés. Il n'y avait pas d'âme. C'est le football qui l'a remplacé";

"c'était pas pareil". "Pour un oui ou pour un non, on arrête, on prend sa voiture et on fout le camp. "

• "Le ballon au poing s'est déplacé comme un nuage. "

• "Le ballon au poing profite, il y a moins d'argent, les gens ne partent pas. "

• Apprentissage difficile du geste de frappe.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. • 74

Page 75: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

BALLON AU POING.

TERRAINS

• Terrain rectangulaire de 65 m sur 20, divisé en son milieu par une corde située à 2 m de hauteur.

DEROULEMENT DU JEU

• Ballon au poing "plus spectaculaire", on arrive à suivre la balle.

• "Plus d'échanges, on ne cherche pas à faire du spectacle. "

• Circulation de la balle et placement des joueurs sur le terrain.

FAUTES

• Contact du ballon avec l'arrière du corps.

• Contact du ballon avec un objet situé hors du jeu.

• Franchissement des lignes latérales.

BALLON AU POING.

PRIX

• Récompense suprême pour les meilleurs : la garde des drapeaux fédéraux par catégorie pour un an.

• Le Poing d'or.

COMPETITION

• Plusieurs catégories :

selon l'âge : cadets, juniors, minimes, seniors.

selon la valeur : excellence A ou B, première A ou B, deuxième...

• Coupes, challenges par équipe.

• Championnats, etc.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. • 75

Page 76: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

c) La balle au tamis.

BALLE AU TAMIS

Sport importé d'Espagne au XVIè siècle.

Tamis

Ne sert que pour l'engagement, (livrée)

Le joueur fait rebondir la balle sur le tamis et la propulse à main nue lorsque le bond lui convient.

Balle

Autrefois en brique pilée recouverte de peau.

Les joueurs utilisent actuellement les balles (pelottes belges) en matière plastique.

Diamètre : environ 4,5 cm Poids : environ 50 g.

Tambour

Pièce de bois ovale de 21 cm sur 15 avec un côté concave sur lequel est tendue une peau et un côté convexe avec disposi­tif de fixation à la main et au poignet.

FEDERATION PICARDE DES SOCIETES DU JEU DE BALLE AU TAMIS

5, rue du 8 mai 1945 80520WOINCOURT

La balle au tamis.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. 76

Page 77: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

La balle au tamis, contrairement aux deux types de jeux précédents, nécessite comme l'indique son appellation un tamis, cercle de fer recouvert d'une toile métallique tendue qui ne sert qu'à livrer, c'est à dire à faire rebondir la balle au moment de l'engagement.

Le jeu se déroule ensuite à l'aide de "tambours" formés par une pièce de bois ovale, présentant une face concave et une face convexe. Il s'agit du même principe que les battoirs, ustensiles apparus dans l'histoire et qui ont été évoqués antérieurement.

Les balles sont semblables à celles utilisées à la balle à la main, l'intérieur étant composé de lanières de feutres ou de caoutchouc mélangées à du cuir, avec à l'intérieur une bille d'acier, le tout recouvert de cuir. Le terrain fait en principe 94 mètres. Neuf joueurs forment l'équipe composée d'un fort de jeu, un deuxième fort de jeu, deux basses volées ou joueurs de fond, deux basses volées de quinze, un milieu de corde, deux cordiers. Cependant, il est possible de réduire l'équipe à six.

Le service se fait à main nue. Pour livrer, le tireur fait rebondir la balle sur le tamis. La terre de prédilection de la balle au tamis était le Vimeu. Depuis la guerre, l'activité a des hauts et des bas.

Des reprises timides n'ont pas permis de lutter contre sa disparition actuelle.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. • 77

Page 78: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

BALLE AU TAMIS.

ZONE GEOGRAPHIQUE

• Auparavant Seine et Oise. Toutes les sociétés ont disparu à Abbeville et dans les villages limitrophes.

• Plus prés de nous le Vimeu, fief de la balle au tamis et notamment l'ensemble géographique de Mesnelies, Saint Quentin, la Motte, Worncourt, Billencourt, Yzengrer, Ramburel, Millebaux en Normandie.

QUALITES RECONNUES

• Coupd'œil.

• Réflexes.

• Agilité.

• Précision.

• Appréciation.

• Jugement.

QUALITES DITES

• "Il faut bien connaître le jeu. "

• "Il faut bien se connaître. "

• "Il ne faut pas frapper comme un sourd. "

• "Il faut être placé."

• "Il ne faut pas se laisser surprendre par ¡a balle. "

SCHEMA CORPOREL

• "Il faut courir un peu. "

GROUPE

• "Beaucoup de cultivateurs" et des "ouvriers d'usine".

• Jeu "pluspopulaire".

• Jeu "d'adultes, pas d'enfants, parce que la balle ça fait mal".

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. • 78

Page 79: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

BALLE AU TAMIS.

REGLES

• 9 joueurs : - 2 cordicrs -1 milieu de corde - 2 basses volées ou ailes -1 fort du jeu - 2 basses volées de 15 -1 deuxième fort du jeu

5 ou 7 jeux.

• Fort en honneur jusqu'en 1934.

Concours annuels : toute une journée.

Sociétés reçues par la municipalité et les organisateurs.

Après le tirage au sort, derrière les autorités, la musique et les sapeurs pompiers, elles défilent dans les rues et se rendent sur le terrain.

Le soir : distribution des prix et récompenses.

Traditionnel banquet le soir.

• Règles variables d'un village à l'autre unifiées en 1904 par la fédération.

MATERIEL

• Chaque équipe doit posséder un tamis et chaque joueur un tambour.

• Le tamis :

une toile métallique tendue sur un cercle de cuivre, de fer ou de bois, de 40 à 50 cm de diamètre, lequel repose sur 3 pieds de fer. L'usage du tamis s'est généralisé en Picardie vers 1910. Avant on livrait à la main.

Vimeu, livrage au tamis.

• Les marques :

piquets de cuivre, de fer ou de bois, de 40 à 50 cm de long. L'une d'elles porte un ruban ou un pompon rouge à l'une de ses extrémités et l'autre un ruban ou un pompon bleu.

• Le tambour :

pièce de bois ovale de 21 sur 15 présentant une face concave et une autre convexe. Sur la partie concave est fixée une peau de veau tendue. La face convexe porte une espèce de gant de cuir (sans doigts) dans lequel le joueur enfile la main.

Normandie, livrage au tambour.

• La balle est ronde et dure :

32 mm de diamètre et 28 gr, elle était en terre à brique cuite, entourée de filasse et recouverte d'une mince peau de veau cousue.

Aujourd'hui, légèrement plus grosse mais plus légère (26 gr), elle se dirige moins facilement. Le projectile était dangereux, remplacé par des pelotes semblables à celle de la balle à la main.

LANGAGE

• A l'envoi : "balle".

Le camp adverse : "à nous"

"p'lote" "l'eteuf "jud'plote".

TRANSMISSION

• 4 ou 5 familles "tous ou presque tous parents".

"Pas une famille qui à la 3e et 4e génération ne fasse pas partie de la même famille. "

• Jeunes moins motivés.

Les jeunes "n'ont pas ça en tête".

Ils ne veulent pas appliquer le code.

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Page 80: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

BALLE AU TAMIS.

RESEAUX

• Chaque commune possédait au moins une partie de balle.

Les sociétés recevaient un nom de baptême :

"Molasses, mercantiles, ahuries, costauds, fraternelle, mitraille, villette. bontelette, vigilante. "

• La fédération picarde :

1904 : naissance de la fédération picarde du jeu de balle au tamis qui groupe la plupart des sociétés locales et qui leur donne un règlement uniforme.

SYMBOLIQUE

• Le drapeau fédéral :

équivalent de la coupe de France de football.

en Picardie : c'était le fanion.

LIEUX

• Worncourt

• Meneslies

• Ramburelles

• Yzengremer

• S* Quentin-la-Motte

• Biencourt

• prés de Gamaches et en Normandie

• Sur la place, après dans la pâture d'un cultivateur lui-même joueur.

un minimum de qualité de terrain. Pas d'herbe trop haute.

RAISONS DE LA DISPARITION

• Le football a supplanté la balle au tamis.

• Tamis : sport statique.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. » 80

Page 81: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

BALLE AU TAMIS.

TERRAINS FAUTES ET ARBITRAGE

camp

fond

< = 94 m. = >

camp

tamis

O

13 m.

DEROULEMENT DU JEU

• Lorsqu'un jeu commence, le livreur envoie du camp tamis la balle dans le camp fond.

La première balle est toujours chasse à la corde même s'il y a eu faute.

Etablissement des chasses.

Les équipes changent de camp. L'équipe tamis essaie de prendre les chasses que l'adversaire défend

au-delà : 15 en deçà : 15 pour l'autre équipe.

Une balle hors limite donne 15 points à l'adversaire.

Balle de volée ou de premier bond donne 15.

Les contestations que soulèvent ces différentes fautes rendent souvent la tâche des arbitres délicate bien que le règlement établi par le comité de la fédération le 16 mars 1935 prévoit les difficultés qui peuvent surgir.

Tout joueur qui joue avant son tour, tout joueur dont la balle touche un objet quelconque, a une faute.

D'autres fautes sont laissées à l'appréciation des arbitres.

Les parties sont arbitrées par des joueurs en activité ou par d'anciens joueurs, normalement au nombre de 3. En cas de contestations, les arbitres se réunissent pour prendre la décision qui est sans appel.

Les arbitres peuvent consulter les marqueurs mais ne sont pas obligés de tenir compte de l'avis de ces derniers.

ARBITRAGE

• Pas d'arbitre : il faut que les joueurs soient sincères. Avant il y avait des arbitres, un à chaque extrémité, un au tamis. Les litiges étaient réglés par "les 2 forts du jeu".

Equipes renommées pour se "chamailler".

Quand il y avait désaccord, on appelait "les commissaires".

La discussion venait de la perception de la balle qui était tombée sur la corde, dehors.

• Raisons des discussions : soit place dans l'équipe, soit d'équipe à équipe.

Quand "on se fâche, on ne joue plus".

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. 81

Page 82: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

BALLE AU TAMIS.

COMPETITIONS

• Challenges.

PRIX

• Indépendamment des coupes ou médailles, des prix en espèces pour certain niveau de compétitions (1/4 de finale ou 1/2 finale).

BALLE AU TAMIS.

ROLE DES JOUEURS

• Le fort du jeu doit diriger ses joueurs et tenir dans l'équipe la place la plus importante.

• Les meilleurs joueurs sont :

le milieu de corde, les deux basses volées, le deuxième fort du jeu.

• Les cordiers et les basses volées de 15 accomplissent une tâche moins lourde, mais souvent plus ingrate et leur rôle consiste surtout en rachat et en contre-rachat.

• Chaque équipe possède son marqueur qui est généralement un passionné du jeu, il encourage les joueurs, ranime les ardeurs, discute les intérêts de son équipe.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. • 82

Page 83: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

d) La longue paume.

LONGUE PAUME

Qualifiée de «longue» pour se différencier de la «courte» paume qui se joue également avec des raquettes, mais en salle.

Raquette

Longueur : 72 cm Largeur du cadre : 20 cm Cordage boyau ou nylon

Balle

Sphère de liège recouverte de molleton.

Diamètre : environ 5,5 cm Poids : de 16 à 20 g.

Les terrains ne comportant pas d'obstacle, la balle est propul­sée sans aucune retenue dans la frappe.

UNION DES SOCIETES DE LONGUE PAUME DE LA SOMME

25, rue Georges Caron

80200 PERONNE

La longue paume.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. 83

Page 84: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

Il ne suffit pas, pour bien jouer à la paume, d'avoir de la vigueur dans les bras et de l'agilité dans les jambes. Il faut encore joindre à ces avantages un coup d'oeil juste, de l'adresse et une certaine présence d'esprit.

"Dès que la balle est servie, les joueurs placés au premier rang dans le camp opposé doivent juger rapidement si c'est à eux qu'il convient de reprendre et de relancer la balle, ou s'ils feront mieux de la laisser passer et arriver à ceux de leurs associés qui sont placés derrière eux. Les coups sont pour ainsi dire aussi variés qu'il y a de balles lancées. Tantôt le joueur reçoit de volée et repousse avec vigueur la balle lancée par un adversaire ; tantôt il se contente de lui opposer sa raquette à un bouclier, quand cette simple tactique suffit à son jeu. Quelquefois, il reprend la balle à ras de terre et la relève par dessus la corde d'enceinte ; souvent aussi, au lieu de la renvoyer droit devant lui, il la force à suivre une direction oblique à droite ou à gauche, de manière à tromper les adversaires.

Une partie ne se compose jamais moins de ce qu'on appelle quatre jeux ; chaque jeu est de 60 points, et chaque coup gagné ou perdu vaut 15 points. Quand il y a plus de trois joueurs de chaque côté, la partie est d'un nombre de jeux égal à celui des joueurs de chaque côté, plus un. Ainsi dans une partie de cinq joueurs contre cinq adversaires, il faut pour gagner avoir six jeux. Il est bien rare, lorsque les forces sont à peu près égales des deux côtés, qu'un jeu soit gagné coup sur coup par un parti, sans que l'autre parti soit parvenu à prendre des points. Il arrive le plus souvent, au contraire, que le jeu est vivement disputé et ne se termine à l'avantage de l'un ou de l'autre qu'après une série de coups dont le nombre s'augmente avec certaines circonstances ou combinaisons qu'il est utile de connaître. Ainsi, en admettant que le camp A gagne 15 au premier coup, et le camp B 15 au second coup, les deux partis seront alors en termes de jeu, quinze à un. Si les deux coups suivants sont encore gagnés, l'un par le camp A, l'autre par le camp B, les deux partis seront toujours en termes de jeu, trente à un. Maintenant A gagne encore 15 et arrive ainsi à 45. Mais le coup suivant donnera simplement avantage à celui des deux partis qui le gagnera et il faudra qu'il gagne immédiatement après un autre coup pour obtenir le jeu. Si c'est le parti contraire qui gagne le coup, il y a alors avantage à deux et pour que le jeu appartienne enfin au camp A ou au camp B, il faut que celui-ci ou celui-là gagne deux coups de suite. Ainsi, le gain du jeu n'est quelquefois définitivement acquis à tel ou tel parti qu'après une série de huit ou dix coups vivement disputés.

Les chasses viennent encore augmenter le nombre des coups, allonger le jeu et en même temps y ajouter une agréable variété. La première loi du jeu est de relancer la balle soit de volée, c'est à dire avant qu'elle touche la terre, soit quand elle a fait un premier bond. Il n'est plus temps de la reprendre au second bond, et l'endroit précis où on l'arrête lorsqu'elle a touché la terre pour la seconde fois, est ce qu'on appelle une chasse. Tant que la balle n'est pas arrêtée, qu'elle roule et gagne du terrain, sans toutefois dépasser les limites de l'enceinte, la chasse s'allonge d'autant et l'on plante un petit piquet à l'endroit où la balle s'est arrêtée, pour indiquer la chasse. Selon les conventions qui ont été faites d'avance, c'est à dire suivant qu'on a limité la partie ou qu'on Ta étendue à tout le jeu, une chasse peut être faite soit seulement dans l'un des

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. • 84

Page 85: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

espaces compris entre la corde du milieu et la limite d'un camp, soit dans toute la longueur de l'enceinte depuis la marque du service ou du tirer jusqu'à l'autre bout du terrain. Dans le premier cas, elle peut passer sous la corde même en roulant par terre.

Une chasse faite n'amène ni perte, ni gain pour aucun des deux partis. Ce n'est que lorsqu'on la tire qu'on peut la gagner ou la perdre et pour la tirer on "passe" c'est à dire que les joueurs changent déplace, pour que ceux qui occupaient le camp inférieur passent dans le camp supérieur et réciproquement. On passe, dès qu'il y a deux chasses faites dans le cours d'un jeu, pourvu toutefois qu'aucun des deux partis n'ait encore atteint le point 45. Mais si ce point a été obtenu pour l'un ou l'autre des deux partis, on passe pour une seule chasse faite. Tirer une chasse, est essayer de la gagner. Il faut que le joueur pousse la balle de manière que celle-ci fasse son second bond au-delà de la ligne ou du piquet qui sert à marquer la chasse faite. Si le second bond a lieu en deçà de cette ligne, la chasse est perdue et comptée 15 pour les adversaires. "Défendre une chasse" est empêcher, autant que possible, celui qui la tire pour la gagner. Pour cela, les joueurs opposés à ceux qui tirent la chasse se tiennent prêts à reprendre la balle avant le second bond, s'ils jugent que ce second bond va se faire au-delà de la ligne indiquée et donner le gain de la chasse aux adversaires. Mais si, par l'habitude d'un coup d'œil exercé, ils prévoient sûrement que la balle une fois lancée fera son second bond en deçà de la ligne, ils se gardent bien de la reprendre et ils la laissent poursuivre son chemin. Ils gagnent la chasse sans se donner la peine déjouer. "53

Aujourd'hui, la raquette est devenue le mode de propulsion exclusif de ce jeu. D'un poids de 430 à 450 grammes, elle propulse des balles de 40 grammes environ pour les parties "terrées" et 30 grammes pour les parties "enlevées". Une équipe de terrée est composée de six joueurs : un foncier, deux basses volées, un milieu de corde, deux cordiers. L'équipe d'enlevée de quatre joueurs est composée d'un foncier, une basse volée, deux cordiers.

^Dictionnaire universel de la vie pratique à la ville et à la campagne 1882, Paris, Hachette.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. » 85

Page 86: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

LONGUE PAUME.

ZONE GEOGRAPHIQUE

• Santerre.

• Nord de l'Oise.

• (et Vermandois).

• Rollot.

Avant la guerre de 1914, Rollot faisait partie de la Picardie.

• Enclave à la frontière de la Somme et de l'Oise, les limites se perçoivent par des bouts de routes non goudronnées et par la différence d'arbres.

QUALITES RECONNUES

• Adresse :

La précision exclut la force brutale, vigueur et beauté.

• Elégance

QUALITES DITES

• "ceux qui tapent fort ne gagnent jamais ou gagnent si le temps est calme. "

• "Celui qui est adroit profite lorsque le temps est mauvais", "il faut être capable de mettre la balle à un mètre prés".

• "Coup d'ail, puissance. "

SCHEMA CORPOREL

• Les gauchers ont une balle qui tourne.

GROUPE

• Niveau social élevé.

• Présence :

- de "châtelains", - de "notabilités", - de "gros fermiers".

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. • 86

Page 87: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

LONGUE PAUME.

REGLES

• En 1891,1-USFSA (Union des Sociétés Françaises des Sports Athlétiques), née 4 ans auparavant décide d'étendre sa compétence à d'autres disciplines. La longue paume adhère au mouvement.

» • 1907:

Elle constitue au sein de l'union une commission spécialisée.

• 1892: Premier championnat de France.

• 1895: Code et règles du jeu.

• 1920: Fédération française de longue paume.

MATERIEL

• S'étant inspirée de la raquette de la courte paume, la longue paume adopte un matériel à peu prés semblable.

• Raquette de même poids (430 à 450 gr), balles de même conception bien que plus petites (40 pour les terrées et 30 pour les enlevées contre 60 à 65 gr pour les parties de courte paume).

• Au milieu du XIXe siècle, les raquettes deviennent plus performantes.

• Vers 1850, apparition d'une balle de liège recouverte de molleton de 5,5 cm à 6 cm et pesant de 16 à 20 gr.

• Raquette de 300 gr.

• C'est ce nouveau matériel qui est en usage, les raquettes pesant de 275 à 300 gr pour une longueur de 72 cm, le tamis large de 20 cm.

• Balles:

18 gr pour les terrées, 16 gr pour les parties enlevées.

• "La raquette coûtait cher. "

LANGAGE

• "Noble jeu."

• "Sain."

• "Elégant."

• Vif, gai, narquois, violent mais courtois.

TRANSMISSION

• -collège, - de père en fils, - rupture au mariage.

Pérennité :

Organisation de manifestations dans les lieux où l'on a joué pour raviver les souvenirs et faire rejouer.

Formateurs.

Femmes.

• Pas d'obligation de s'engager ou des joueurs passionnés qui jouent tous les dimanches ou joueurs épisodiques quand ils réussissent à être 6.

• "Les jeunes jouent à ¡a paume, après ils courent les filles et ils ne jouent plus."

• "Les instituteurs, ce n'est pas de grands joueurs, ce sont des petits joueurs mais ils forment", "les grands joueurs ne font rien".

"Il faut une mentalité spéciale pour diriger", "parler quand il le faut, se taire quand il le faut".

"L'entrée se faisait par proximité et par cooptation. "

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. • 87

Page 88: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

LONGUE PAUME.

RESEAUX

• Travailleurs sérieux.

• Grosses fermes (Belges)

• Personnalités jouaient à la paume.

Les châtelains s'occupaient de la paume dans la mesure où les terrains de jeux leur appartenaient.

Il y avait des dons de terrain pour les réserver à la longue paume (Tartigny, Ansauvillers).

Les personnalités étaient "maîtres sur leur terrain", ils complétaient leurs parties avec des gens du village

SYMBOLIQUE

• "Vieux jeu français. "

• "Saveur du terroir".

• Chasse et longue paume couplées.

La paume terminée, la chasse commençait le premier dimanche de septembre "bons joueurs, bons chasseurs".

• Aujourd'hui, chevauchement longue paume - football.

LIEUX

• Problème des intempéries.

Vent et sol.

Avant, 80% du jeu se passait dans le village. Trop de parties à l'extérieur maintenant.

RAISONS DE LA DISPARITION DE

SOCD2TES

• "Le maire avait 4 fils, il n'a plus passé aux élections, les fils sont partis. "

"Pour la chasse, c'est pareil, ils réservent. "

"Avant 80 % du jeu se passait dans le village, mais ont été créés de nouvelles coupes, des championnats, trop de parties à l'extérieur. "

• Temps : de nombreuses équipes sur le terrain. Par élimination, ils jouaient de 8 heures du matin à 6 heures le soir.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. •

• Terrain spécifique. • Les bons joueurs (foncier, cordier) partaient dans des équipes plus fortes alors "ch pays était foutu".

• Les enfants des nouveaux lotissements viennent jouer à la paume, pas les parents. "

88

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LONGUE PAUME.

TERRAINS DEROULEMENT DU JEU

FAUTES

• Parties terrées :

L'aire de jeu étant illimitée, les limites sont prolongées imaginairement.

17m.

On tire toujours contre le vent.

corde

12/14 m. vent^

> Partie enlevée :

Aire de jeu limitée.

• 4 contre 4. 17m.

• 2 contre 2. 7m 133m 7m 20,5m

12 m

rap­port

KSDL

1 contre 1. 5m 14m 7m 19m

11m

• Contact de la balle avec le corps.

• Chute de la raquette.

• Franchissement de la ligne de tir en livrant.

• Toute sortie de terrain etc.

ARBITRAGES

• Jury composé par un président, membre de la fédération ou d'une union départementale, assisté de deux commissaires, pris parmi les joueurs expérimentés.

Ces commissaires, placés de part et d'autre du terrain circulent le long des limites latérales.

La décision est prise à la majorité.

LITIGES

• Le marqueur suffisait. Maintenant, marqueur + arbitre.

Avant, le marquage était effectué par des rails ou des briques.

Aujourd'hui, ce sont des lignes, les fautes sont plus difficiles à arbitrer.

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. • 89

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LONGUE PAUME.

COMPETITIONS

• Mi-avril à fin septembre

(championnats, coups, challenges, tournois).

PRIX

• Coupes, breloques et bibelots divers.

LONGUE PAUME.

ROLE DES JOUEURS

• Partie terrée :

6 joueurs consacrent la valeur de l'équipe.

-1 foncier, - 2 basses volées, -1 milieu de corde, - 2 cordiers.

• Partie enlevée :

4 joueurs

plus spectaculaire, plus compréhensible, équivalent de la courte paume en salle.

-1 foncier, -1 basse volée, - 2 cordiers.

• Catégories d'âges :

-juniors : 16 ou 17 ans, - cadets : 14 ou 15 ans, - minimes : 12 ou 13 ans, - benjamins : - de 12 ans.

• Classement selon la valeur :

Ie : le plus haut niveau, 2 e : 3 e : 4e : débutants + jeunes.

Une équipe est classée automatiquement dans la catégorie de son joueur du plus haut niveau.

Partie terrée : rôle important des cordiers. Partie enlevée : fonciers.

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2. Différenciation des pratiques et représentations.

La logique interne de chacune des pratiques de jeux de balle à travers l'aire géographique de jeu, les qualités physiques et morales demandées, le matériel, le déroulement du jeu etc. permettent en les distinguant, de mieux identifier chacune des variantes. Cependant, si l'on oublie volontairement la réglementation et les techniques, pour s'attacher aux appréciations des pratiquants sur leur propre pratique, on s'avance vers une définition plus subtile.

a) Le degré de l'énergie.

Le ballon au poing est qualifié comme un sport très dur. Il se présente comme un jeu de force qui nécessite une façon particulière de frapper la balle (décrochement et rapidité dans le mouvement lors de la frappe).

La longue paume exclut la force brutale pour gagner en vigueur et en beauté "ceux qui tapent fort ne gagnent jamais ou gagnent si le temps est calme".

La balle au tamis exclut elle aussi la force brutale "il ne faut pas frapper comme un sourd".

La balle à la main s'identifie à un sport athlétique qui nécessite adresse et souplesse.

La variabilité énergétique du jeu est l'un des traits qui distingue les activités entre elles. Si les parties ne se ressemblent pas, c'est aussi que le type d'effort que chacune d'entre elles exige n'est pas de même nature.

b) La spectacularité.

Un deuxième élément qui caractérise la pratique et qui la différencie des autres est le degré de spectacularité qu'elle engendre.

La possibilité de suivre la balle pour les spectateurs est importante et semble une des raisons de la difficulté à faire subsister certains jeux de balle. "Le ballon au poing est plus spectaculaire, on arrive à suivre la balle." Il y a plus d'échanges. La vision de la balle et des échanges possible au ballon au poing l'oppose aux autres jeux. "A la paume, on ne cherche pas à faire du spectacle." La balle au tamis, c'est "statique". La notion de déplacement est donc importante et s'oppose par exemple au football qui a supplanté ces pratiques traditionnelles.

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c) Coup d'oeil et astuce.

Quant aux qualités intrinsèques des joueurs, elles semblent elles aussi de natures différentes.

La balle au tamis demande coup d'œil, réflexes, agilité, précision, jugement.

La balle à la main réclame adresse, souplesse, force, astuce.

La longue paume, coup d'œil, puissance, adresse, "celui qui est adroit profite lorsque le temps est mauvais" ; "il faut être capable de mettre la balle à un mètre près".

Coup d'œil, adresse, astuce, force sont des qualités attribuées à des personnalités particulières, qualités paysannes d'acheteurs ou de vendeurs de bêtes, us sentent, "ce sont des maquignons, ils savent que pour gagner un point, il faut faire çà ou çà, ils connaissent les points faibles". Ds savent regarder, "leur champ de vision est plus étendu de loin et de près".

On devine que ce rapport à la force, au coup d'œil, à l'astuce n'est pas seulement dicté par les préoccupations motrices. Les différences n'obéissent pas seulement aux nécessités de la rationalisation technique, elles expriment aussi une conception de l'affrontement que concrétise l'accent mis sur certaines qualités.

La codification de ces disciplines tend aujourd'hui à limiter l'expression trop brutale de la violence. S'il reste encore des vestiges de jeux de balle "durs", la soûle par exemple à Rollot, l'euphémisation des parties semble être l'aboutissement actuel d'un processus historique ancien, "lié au niveau de violence socialement toléré, au niveau et à l'organisation atteints par le contrôle de la violence et corrélativement de la formation de la conscience dans les sociétés considérées".54

Contrairement à ce que suggère la recherche systématique de filiation entre les pratiques antiques et le sport moderne, les disciplines ont aujourd'hui peu de rapport avec ce qui se passait antérieurement, le degré d'euphémisation est lié à la manière dont les pratiquants conçoivent l'affrontement à partir d'une codification précise, en façonnant ainsi une certaine "image" de la pratique.

Il est possible de repérer les éléments que permettent de distinguer à ce niveau les trois principales pratiques.

54N. Elias, Sport et violence, Actes de la recherche en sciences sociales n° 6, 1976.

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d) Force et souplesse.

Le lancer de ballon au ballon au poing favorise un lancer direct, violent dans lequel la force, la vitesse d'exécution du geste, la puissance musculaire semblent s'imposer. Dans ce sport spectaculaire, les meilleurs allient la puissance physique à l'adresse technique, arrivant à catapulter la balle à 50 mètres et plus. Mais la force brute ne suffit pas s'il manque le sens du placement et le coup d'oeil pour juger de la trajectoire et la vitesse de la balle. A force égale, la victoire reviendra à l'équipe la plus maligne, la plus douée pour déstabiliser l'adversaire.

La frappe du ballon.

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Cet ensemble d'éléments se distingue très nettement de la longue paume qui utilise la raquette et qui exige des habiletés motrices différentes. La souplesse, la vitesse d'exécution jouent un grand rôle et atténuent par la même la "puissance musculaire". La féminisation existante de la pratique renforce davantage l'image d'une discipline plus "douce" et plus accessible à tous et à toutes.

e) L'esthétisation.

L'importance accordée à l'esthétique dans les discours est très révélatrice de la fonction des jeux dans leur globalité.

Pour le ballon au poing, la dimension esthétique n'est jamais évoquée comme un des fondements de l'activité. Par contre, les joueurs de longue paume perçoivent leur jeu comme un jeu élégant, violent mais courtois.

Dans la construction de l'image de ces disciplines, les justifications "techniques" et "éthiques" fonctionnent conjointement. Le débat entre les pratiquants de chaque discipline ne se situe pas en somme au niveau de la validité de ces images mais plutôt au niveau des valeurs socialement pertinentes qui la fondent.

3. Le matériel.

a) La raquette.

La longue paume adopte une raquette d'un poids de 430 à 450 grammes qui s'est perfectionnée et devenue plus performante à partir du milieu du XIXe siècle, raquette de longueur de 72 centimètres avec tamis large de 20 centimètres. Les balles de liège recouvertes de molleton de 5,5 cm à 6 et pesant de 16 à 20 grammes. La raquette coûtait cher, dit-on.

b) Le tambour.

Chaque équipe doit posséder un tamis et chaque joueur un tambour pour pratiquer la balle au tamis.

Le tamis est une toile métallique tendue sur un cercle de cuivre, de fer ou de bois de 40 à 50 centimètres de diamètre, lequel repose sur trois pieds de fer. L'usage du tamis est généralisé en Picardie vers 1910. Avant, on livrait à la main.

Le tambour est une pièce de bois ovale de 21 sur 15 centimètres présentant une face concave et une face convexe. Sur la partie concave est fixée

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une peau de veau tendue. La face convexe porte une espèce de gant de cuir (sans doigts) dans lequel le joueur enfile la main.

La balle est ronde et dure : 32 millimètres de diamètre et 28 grammes. Elle était en terre à brique cuite entourée de filasse et recouverte d'une mince peau de veau cousue. Aujourd'hui, légèrement plus grosse, elle pèse 26 grammes mais plus légère, elle se dirige moins facilement.

Le projectile était dangereux, remplacé par des pelotes semblables à celle de la balle à la main.55

c) Le ballon.

Aujourd'hui, certains joueurs emploient un ballon plastifié lors des parties de ballon au poing qui rend le jeu difficile en cas de pluie ou de terrain humide. Pour beaucoup, l'idéal reste l'utilitsation du cuir souple.

d) La balle.

Pour la balle à la main, la balle est constituée d'un noyau de caoutchouc dur sur lequel on pelotonne des fils de laine très serrés, le tout est recouvert de peau de chèvre ou de mouton, taillée en forme de huit et cousue par une seule couture.

Des gants de villes souples sont tolérés à l'exception de gants rigides.

4. Usages sociaux.

A partir de l'analyse fondée sur les qualités motrices qu'exigent les différents jeux de balle et de ses conséquences sur la construction de l'image de la pratique, on comprend plus facilement qu'ils seront investis par des groupes sociaux nuancés.

En ce sens, le ballon au poing illustre bien le rapport à la force des agriculteurs. Le rapport de force, viril, la symbolique du sport "dur" définit bien cette pratique.

Par opposition, l'élégance, l'esthétisme, le matériel de la longue paume sont inéluctablement liés aux couches sociales qualifiées "de plus élevées". La nature ne doit jamais prendre le dessus sur la culture. Mais, on mesure aussi ce

55Jadis, ces balles étaient en poussière de brique pilée et recouvertes d'une peau cousue main qui les transformait en projectiles dangereux.

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qui sépare les différents jeux de balle entre eux en considérant le poids de la chicane et de l'arbitrage.

a) La chicane et l'arbitrage.

Les histoires de jeux de balle sont jalonnées de disputes.

Le jeu de tamis, par exemple est arbitré par des joueurs en activité ou par d'anciens joueurs, normalement au nombre de trois.

En cas de contestation, les "arbitres" se réunissent pour prendre une décision qui sera sans appel. Mais les contestations que soulèvent les différentes fautes rendent souvent la tâche des arbitres délicate.

La longue paume a un arbitrage formé par un jury composé d'un président, membre de la fédération ou d'une union départementale, assisté de deux commissaires, pris parmi les joueurs expérimentés.

Si auparavant le marqueur suffisait pour régler les litiges, on s'aperçoit que la commission d'arbitrage est d'une part, fédéralisée et de plus beaucoup plus étendue.

Pour la balle au tamis, un seul arbitre prend les décisions sans appel. Il peut s'adjoindre un commissaire qui circule du côté opposé.

b) Les catégories socioprofessionnelles.

Longue paume, ballon au poing, balle à la main sont classés dans la hiérarchie sociale.

La longue paume aura "un plus haut niveau". En effet, "certaines personnalités jouaient à la paume". A Ansauvillers, les châtelains du village s'occupaient de la paume. Le terrain de jeu leur appartenait.56

Ces personnalités étaient les "maîtres sur le terrain" et complétaient leurs parties avec "d'autres gens du village". Ces personnes étaient cooptées d'une part par leur possibilité d'acheter une raquette57 mais aussi par proximité.

î6Ils en avaient fait don à la commune.

37Bien de luxe coûteux en l'occurrence.

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D'autres interlocuteurs évoquent "une certaine élite aisée", riches agriculteurs et enseignants.

A la longue paume, il s'agit de "travailleurs sérieux, de grosses fermes, de "personnalités" et parfois de châtelains".

Apparemment, la longue paume nécessitant instrument et costume58

draine une population en majorité aisée et notamment "de gros propriétaires qui ne se mélangent pas avec les ouvriers". "C'est trop plat", disent certains paumistes.

Pour le ballon au poing : marchand de vaches, artisans, agriculteurs, salariés, ouvriers forment l'essentiel des professions. "Le nombre de petits cultivateurs de 4 à 5 hectares explique la solidarité".

Le ballon au poing est la pratique qui concerne le plus grand nombre d'agriculteurs. Environ 80 % des joueurs sont des agriculteurs mais quelques ouvriers, artisans et commerçants y figurent.

La balle à la main semble être "le sport de l'ouvrier", la balle au tamis est mixte, "cultivateurs et ouvriers d'usine".

Visiblement, les jeux de balle sont investis par de petits et moyens exploitants, ouvriers, artisans et quelques notabilités.

Ce recrutement est bien le reflet du profil de la population picarde. Population largement enracinée où coexistent les propriétaires terriens, les ouvriers des usines implantées dans la ruralité et les artisans pratiquant des activités complémentaires. Chaque pratique a été investie par un savant modelage de catégories sociales et se traduira dans les faits par des nuances subtiles que nous déconstruirons par la suite.

c) Les chasses : du concret à l'abstrait.

Dans ces quatre types de jeux, la balle doit être frappée nettement puis reprise de volée ou avant le deuxième bond.

Les échanges entre les différentes équipes s'effectuent comme au tennis tant qu'une faute n'a pas été commise. La différence fondamentale est qu'au tennis, les deux camps sont égaux alors que pour ces variantes de jeux de balle, la surface du terrain à attaquer ou à défendre varie.

58Les joueurs avaient un costume de flanelle beige, pantalon et veste, chaussures sans talon ou espadrilles.

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La communauté des ballonistes : les spectateurs, courrier picard 16 août 1991.

Nous abordons ici l'originalité de ce jeu qui réside dans la caractéristique du gagne-terrain, originalité qui rend le spectacle de ce jeu incompréhensible et parfaitement hermétique aux non initiés mais qui se manifeste clairement comme la conquête et la défense d'un territoire.

Gagner un point, pour les joueurs de balle, consiste à réaliser un quinze.

"Dans un premier temps, il s'agit pour la première équipe d'envoyer la balle dans l'autre camp le plus loin possible. Au point de sa chute, on pose un repère appelé "chasse " qui, en fait, constitue une ligne imaginaire parallèle aux lignes de fond qui passe par le point où la balle lancée correctement par les joueurs d'un camp a été arrêtée par les joueurs du camp adverse. Cette chasse est le résultat provisoire d'un point qui ne sera acquis définitivement que lorsque les équipes ayant changé de côté, l'auront disputée de nouveau. C'est à dire que dans la deuxième phase, les adversaires changent de côté "ils

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traversent", lancent la balle au-delà ou en deçà de la chasse marquée par l'autre camp. S'ils parviennent à l'envoyer au-delà, ils gagneront leur chasse ou si celle-ci est en deçà ou si l'équipe adverse l'en empêche en reprenant régulièrement la balle, c'est celle-ci qui aura le point.

L'intérêt des chasses montre que si une équipe peut réussir à gagner du terrain dans un premier temps, elle aura un territoire moindre à défendre. Par contre, leurs adversaires, corrélativement auront une tâche plus difficile à exécuter car ils devront défendre un territoire plus important.

La chasse est la plus grande particularité du jeu de paume. Le camp qui attaque doit faire dépasser à la balle la ligne idéale passant par la chasse, tandis que le camp défendant doit l'en empêcher.

Il y a là tout un mécanisme qui ne se comprend guère que par le jeu. "î9

Le jeu se déroule en trois temps.

- 1 e r temps :

Il s'agit de faire reculer l'adversaire le plus loin possible, de faire reculer cette "frontière" qui sépare les deux équipes en essayant de "faire mourir la balle"60 très loin dans le camp adverse. A l'endroit où la balle meurt, on pose sur le côté du jeu, la chasse qui matérialise la limite de séparation entre les équipes.

Ce premier "combat" n'apporte aucun point aux équipes mais donne plus ou moins de chance de remporter la victoire finale.

- 2 e m e temps :

Les équipes changent de côté, traversant le terrain en se croisant.

Ainsi l'équipe qui a réussi à faire mourir la balle très loin dans le camp adverse, à poser "une balle chasse" se retrouve après le changement de côté, à défendre une surface beaucoup plus restreinte que celle de l'adversaire.

L'équipe B qui a réussi à poser une chasse, à faire mourir la balle à un point X aura une surface trois à quatre fois inférieure à défendre tandis que l'adversaire doit couvrir tout le reste du terrain. Mais rien n'est jamais gagné, ni perdu à l'avance.

i9Lazure Marcel. Les Jeux de balle et de ballon picards, CRDP Amiens 1981.

^Contrairement au tennis, cette balle "vit" encore après un, deux ou trois rebonds même si elle roule au sol. Elle meurt à l'endroit où le joueur arrête sa progression.

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- 3 è m e temps :

L'équipe A se retrouve à la place de l'équipe B. Il sera difficile pour l'équipe A de faire mourir la balle au-delà de la frontière délimitée par la pose de la chasse.

Même s'il ne lui reste que 20 % de chance de réussir, l'équipe A va se battre pour remporter les 15 points de la chasse.

En conclusion, le premier temps du combat permet d'acquérir un avantage sur l'adversaire et cette pose de la chasse est symbolique. La fierté des joueurs et les applaudissements du public sont souvent plus importants lorsque l'une des équipes réussit à faire une "très belle chasse".

Il s'agit donc ici de posséder le plus grand territoire pour avoir moins à défendre.

L'analyse de ces différentes pratiques souligne l'idéologie qui les sous-tend. Il s'agit de posséder le plus grand territoire possible et donc par ce biais être amené à une défense moins importante. De plus, la fragilité de la victoire semble être un élément implicite de la pratique.

A quoi ces traits peuvent-ils être reliés, à quoi correspondent-ils aujourd'hui ?

Si l'origine de la "chasse" remonte dans les temps anciens, il est utile de souligner que la persistance de ces jeux de balle ainsi que toute la structure symbolique qui les entoure montre qu'ils répondent encore à une nécessité. Leur maintien a un sens. Qu'en est-il ?

D'où viennent ces notions de territoires conquis, puis rétrocédés ? Dans un pays aux contours difficilement limités que signifie l'esprit de ce gagne-terrain ? Qu'en est-il de la notion de territoire en Picardie ?

Selon l'échelle d'observation, deux pistes s'ouvrent à nous. Les discours des informateurs parlent de leur contexte agricole et des grandes cultures, de leurs classes sociales ouvrières et paysannes et de leur pratique : la chasse, de leurs lieux de vie et d'habitation : le village.

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Pour comprendre le rôle des chasses Particularité importante de tous les jeux dits "de paume".

Les barrières de l'invisible. Deuxième partie. 101

Page 102: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

5. Chasse et jeux de balle.

Les discours des informateurs révèlent que les pratiquants des jeux de balle sont pour la plus grande majorité des chasseurs. Cette autre activité de la nature est complémentaire du jeu. Plusieurs explications à ce rapprochement : tout d'abord, le découpage dans le temps. Les jeux de balle sont une activité d'été, la chasse une activité d'hiver.61 Lorsque l'une se termine, la seconde commence et les chevauchements sont sensibles. Les réunions afférentes aux jeux de balle sont souvent "désertées" lorsque la chasse commence.

De plus, les conditions d'exercice de ces deux activités présentent des similitudes.

Ainsi, outre la complémentarité dans le temps, la relation à l'espace et au territoire établit des traits d'union entre ces deux pratiques.

Les jeux de balle, nous l'avons vu, sont des jeux de déplacement dits de gagne-terrain, l'essence du jeu consistant à s'accorder le plus grand espace d'offensive, le plus petit de défense.

Retrouve-t-on les mêmes éléments symboliques dans la pratique de la chasse ?

La chasse picarde est une chasse nécessitant un déplacement, il s'agit de chasse essentiellement aux lièvres et aux perdreaux. Elle s'effectue sur les terrains offerts par les cultivateurs en contrepartie de services et d'échanges ou même de location. En cas de désaccord ou de chicane, le chasseur se donne le droit de "réserver" ses terres, c'est à dire qu'il les retire des lots communs et interdit aux autres le droit de chasser.

Il faut retenir la relation établie entre le pouvoir et la mise en réserve des terres. Cette interdiction de pénétrer sur ces territoires apparaît comme la constitution de monopoles qui ne sont accordés qu'à une certaine catégorie de personnes. Le droit d'établir des "réserves" est étroitement liée au droit de propriété et au droit de chasse. Il parait nécessaire à certaines personnes de sauvegarder leurs intérêts sur leurs territoires en les soustrayant au système commun.62

61 "La saison paumiste est marquée par le lundi de pâques et le mois de septembre qui clôt l'activité : lesßtes des villages picards qui s'échelonnaient de mai à septembre, soit avant, soit après les travaux champêtres se suivaient à tour de rôle d'une semaine à l'autre. Après l'éloignement des gens l'hiver, reprenaient les contacts directs. La maison était lavée, la pâtisserie était effectuée pour les visiteurs. Les invités, parents ou amis étaient bien reçus, et les joueurs des villages voisins accouraient le dimanche et le lundi. " Cf. Pechón.

62La Chasse au moyen-âge. Actes du colloque de Nice (22-24 juin 1979), publications de la faculté des lettres et des sciences humaines de Nice 20. Centre d'études médiévales de Nice, 1980. Les belles lettres. La nature précise du monopole pose un problème. A défaut de textes ou d'entretiens d'une suffisante

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On retrouve les mêmes principes dans la structure des jeux picards où il s'agit de s'accorder les plus vastes terrains et de les défendre sur sa propre terre et mieux protéger son camp.

Ces jeux désignent donc une expérience particulière où le vécu s'enracine dans un territoire apparemment livré au frivole. Il s'agit pourtant, d'un univers réglé, ordonné qui constitue une sorte de traduction muette, d'envers neutralisé où la culture picarde s'exprime. Mais de plus, la pratique de jeux de balle est une mise en scène.

Lieu fermé, clôturé, quasiment théâtral ou lieu ouvert, incertain, livré aux passages, le jeu de balle constitue une image saisissante de la symbolique de la frontière. Une frontière constamment franchie et pourtant infranchissable, qui constamment peut être remise en question.

Ils révèlent une situation sociale complexe à la fois vécue et jouée, intériorisée et extériorisée.

Cette autre dimension se révèle lorsque nous analysons le contexte local dans lesquelles les pratiques restent implantées.

6. L'importance du contexte : les petites régions.

Nous avons vu que la pratique des jeux de balle s'effectue dans des régions précises. Si les cartes nous ont montré leur rétraction en certains endroits, leur maintien doit nous amener à établir les caractéristiques de ces aires géographiques et tenter d'en expliquer les raisons.

La Picardie forme une association, dans son histoire administrative, de régions naturelles, ayant toutes un aspect spécifique contrairement à son apparente uniformité. Dans cette région, l'idée même de limite est inintelligible. Les larges zones qui séparent la Picardie d'autres unités rendent les transitions insensibles.

Dans l'ouvrage Aux quatre vents de Picardie, Couet établit les nuances sensibles qui séparent la Picardie de l'étranger. La porte d'Angleterre, caractérisée par le détroit maritime est évoquée comme un miroir où l'un des deux rivages se regarde.

précision, l'on peut n'apporter de réponse qu'à partir d'un faisceau de présomptions. Un certain nombre d'indices permettent de penser que le droit de réserve était à l'origine la mise en réserve de certains territoires comprenant des bois, des terres, des rivières et des étangs servant d'asile à toutes sortes d'animaux. Donc l'idée primordiale serait celle de protection.

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La porte d'Artois et des Flandres. Aux abords de Doullens et d'Albert la Picardie devient artésienne, les communications et les marchés poussent la population vers Arras. Mais aussi, il y a une parenté : habitudes de cuisine, agencement de la ferme, manière de commercer. Déjà, il s'agit de "Boyaux rouges".

La porte de Normandie où les versants picards et normands se donnent la réplique dans la distribution des villages, de la végétation, des cultures.

La porte de France, la plus ouverte. Et il arrive qu'entre certaines régions de Picardie, les différences soient mieux marquées qu'entre la Picardie et l'Ile de France. (Passage du Noyonnais au Santerre, de l'Amiénois au Ponthieu).

La Picardie est entraînée de tous côtés par la ressemblance, mais il existe de fausses entrées.

Si nous essayions de caractériser les régions où se pratiquaient plus particulièrement les jeux de balle, nous mettrions en avant quatre régions toutes diverses.

a) Le Santerre.

Le Santerre est la région privilégiée de la longue paume. Parmi les lieux où cette pratique existait, nous pouvons citer les exemples suivants : Belloy-en-Santerre, Berny-en-Santerre, Dampierre-en-Santerre, Faucancourt-en-Santerre, Hangst-en-Santerre etc.

Le Santerre est perçu comme une région rurale aux paysages peu accidentés, tourné essentiellement vers l'agriculture intensive, performante dans le cadre de grandes exploitations : champs ouverts, habitat groupé, espace peu boisé, grandes parcelles. Tous ces éléments nous indiquent une apparente uniformité du paysage. Les cultures dominantes sont le blé et la betterave ainsi que les pommes de terre. S'y ajoutent certaines cultures spéciales comme les endives, les fruits et légumes.

Le Santerre, région de grosses cultures et de terre riche (Sana terra) a cependant été caractérisé par l'ancienne industrie badestamière et les industries textiles, agro-alimentaires et métallurgiques. Ces éléments assemblés engendrent une forme subtile de marginalisation cognitive de cette région picarde. La petite et la moyenne exploitation ont fortement reculé devant la grande. Le fermier a fait place à l'exploitant agricole. Cette région se distingue aussi par l'importance de l'industrie de la conserverie des légumes de plein champ. Le développement et la présence de l'industrie agro-alimentaire ont permis l'accentuation de l'activité féminine et atténué l'intensité de l'exode.

Le Santerre est donc une région aux limites imprécises et lorsque nous interrogeons les informateurs sur ses limites, il semble que seule la

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transformation du paysage peut les marquer. Les champs plats disparaissent au profit de petites collines et de pâtures et permettent insensiblement le passage d'une micro-région à une autre. De plus, la répartition des toponymes "en Santerre" est importante, en particulier entre Rosières, Moreuil et Roye, lieu de pratique de la longue paume.

Par contre, le même toponyme est absent d'une ligne Péronne/Nesle, dans un secteur qui appartenait autrefois au Comté du Vermandois.63

Dans le sud du Pas-de-Calais, le terme Santerre n'est jamais employé. On lui préfère celui de l'Artois. Dans le nord-est de l'Oise, on fait référence au Noyon c'est dire que cette distribution toponymique explique que la partie où subsiste la pratique de la longue paume est bien perçue et qu'elle s'assimile dans ses limites actuelles au Santerre.

Une région riche, de grosses exploitations, ouverte, avec les restes d'une industrie jadis florissante permet la subsistance de pratiques anciennes dans le cœur de son espace.

En effet, on se rend compte, si l'on considère les caractéristiques de la population, que le degré d'éloignement du groupe patronal est particulièrement élevé (64 %). Cet apport extérieur provient des zones ayant les mêmes orientations agricoles. Le Nord Pas-de-Calais a fourni les plus gros contingents d'agriculteurs migrants. A cet effectif, il faut ajouter les étrangers belges. Venus après la première guerre mondiale, ils se sont installés là où les exploitants français renonçaient pour des raisons très variées ; difficultés nées de la remise en culture dans le Santerre dévasté.

De ces courants migratoires plus ou moins marqués, résultent quelques types de formation de la population villageoise, correspondant à une certaine répartition spatiale.

Le type de formation de village se caractérise par une faible autochtonité, un fort degré d'éloignement, une fréquente distorsion entre les groupes patronal et ouvrier, le second à éventail d'origines encore plus ouvert. Ici, face à de rares dynasties locales, riches de terre, existe tout un groupe étranger et mobile qui modernise en s'adaptant solidement aux exigences d'une agriculture industrialisée.

Ce type de formation de la population rurale se rencontre dans toute la partie de l'est de l'Oise, dans le Santerre. Il intéresse les zones les plus marquées par la pratique du jeu de paume.

63André Thibault, Villes et campagnes de l'Oise et de la Somme, CDDP de l'Oise, 1967.

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b) Le Vimeu.

Contrairement au Santerre, le Vimeu est perçu comme l'ouest lointain de la Picardie, à l'écart des grands nœuds routiers. Il donne une image éloignée des vastes plaines ouvertes du Santerre, une infinie palette de paysages qui se modifient sans brusques transitions au contact des régions limitrophes : un Vimeu vert, bocager et boisé ; un Vimeu de plateaux à petite vocation betteravière parsemé de bourgs industriels serti de vergers et voué à la polyculture et à l'élevage.

Le Vimeu tire son nom du Visme, affluent de la Bresle. De nombreux villages en Vimeu aident à le localiser.

Dans ce contexte de pays lointain, s'est implanté un tissu usinier dont la trame de base est la serrurerie et la robinetterie. C'est dire que coexistent un Vimeu rural de polyculture et élevage et un Vimeu industriel appelé "Vimeu rouge" pour ses orientations politiques et idéologiques.

La population du Vimeu est fortement enracinée dans l'autochtonité. Ses caractéristiques révèlent l'importance de petites cellules repliées sur elles-mêmes, industrielles ou agricoles. Les migrations alternantes montrent l'importance de l'origine rurale de l'ouvrier travaillant dans les bourgs nébuleuses. En fait le Vimeu industriel s'est renforcé du Vimeu vert, il s'est renforcé d'une immigration interne qui n'a pas effacé les caractères ruraux mais qui, au contraire, les a accentués.

Le monde ouvrier et le monde rural se sont enchevêtrés mêlant une culture technique à la culture rurale. Culture fondée sur l'indépendance des habitants de ce pays profond : indépendance matérielle, indépendance d'esprit, attachement à la terre et volonté de s'en sortir par un labeur acharné. Les liens que les habitants ont entre eux sont des liens personnels que les relations familiales directes ou par alliance, ou les relations de voisinage ont consolidées.

De la fixité de la population, nous pouvons conclure à une forte autochtonité. En ajoutant les natifs des petites régions, ce sont environ 70 à 80 % des adultes qui sont nés dans un cercle très étroit. De ces villages qui, pour la plupart connurent l'exode, beaucoup sont partis et bien peu sont venus les remplacer. Traduisant cette intimité avec le milieu, quelques familles aux nombreux rejets dominent le village, se partageant l'essentiel des biens fonciers appartenant aux ruraux. Le Vimeu apparaît comme un bout du monde. On en sort sans doute, mais on n'y rentre guère.

Le Vimeu, région repliée sur elle-même, semble une des régions qui a le plus gardé ses traditions linguistiques. On pourrait penser qu'il en va de même pour les pratiques ludiques. Or, on se rend compte justement, dans le cadre des jeux de balle, que la balle au tamis a été un jeu qui a eu de la peine à subsister, malgré des tentatives clairsemées de reprise. Aujourd'hui, la pratique du jeu au tamis est stoppée. Les explications de ce déclin renvoient à l'intensité de la chicane, l'autochtonité et aux problèmes relationnels.

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Ainsi, si nous devions résumer cette région et l'associer à la pratique ludique, on pourrait noter les éléments suivants : une région fermée n'est pas celle qui garde forcément ses traditions.

En la comparant au Santerre,64 nous pouvons relever la différence entre une région repliée sur elle-même à l'écart des grandes routes, cachée dans la verdure et une autre, plate, ouverte au regard de tous.

c) Le plateau picard.

Au centre, sur le plateau picard, la formation de la population rurale apparaît plus variée. Ce n'est ni la forte autochtonité de l'ouest picard, ni le fort degré d'éloignement du Santerre.

C'est dans cette région qu'apparaît le mieux la distinction entre villages forts, solidement tenus par le groupe local et villages faibles conquis par les voisins ou les belges. Aux constantes dans la formation des populations rurales du Vimeu et du Santerre s'oppose le peuplement plus hétérogène du centre du plateau picard.

d) LePonthieu.

Contrairement aux autres petites régions, le Ponthieu a fait partie d'un comté, comme le comté du Hainaut, d'Artois. Cette différenciation est à étudier. Il semble être une raison pertinente pour expliquer l'absence de la pratique des jeux de balle.

Selon R. Fossier, au milieu du Xe siècle, toute la Picardie du Sud, d'Amiens à la Scarpe, est flamande. C'est un épisode de très grande importance qui a contribué à lier pour des siècles les plateaux céréaliers et la plaine de Flandre. Il faudra deux siècles et demi aux capétiens pour retourner la situation à leur profit et faire pénétrer jusqu'en Flandre, à travers la Picardie, l'influence française.

Au regard de la population, nous pouvons émettre les hypothèses suivantes : la faible autochtonité peut être une raison à la subsistance de pratiques anciennes. Lorsqu'une région est ouverte au brassage, il se produit comme une condensation des pratiques culturelles. Le degré d'ouverture et de fermeture est lui aussi à considérer. L'exemple du Vimeu, région fermée, montre à l'encontre des premières suppositions, qu'elle ne peut conserver ses traditions.

64Historiquement, le Santerre et le Vimeu n'ont jamais constitué de circonscription féodale, ni de circonscription ecclésiastique. Le Vimeu a formé très tôt une unité économique.

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Ainsi se dégage une double constatation : si la population est recrutée dans un cercle d'autant plus étroit que ses activités évoluent peu, la diversité des fonctions, le dynamisme des activités a besoin d'un renouvellement dense et constant de la population. La deuxième constatation concerne les jeux : la rétractation des aires de jeu se situe dans des régions à forte autochtonité. Dans le Vimeu, la balle au tamis a disparu. Dans le plateau picard, il y a eu un net rétrécissement ainsi que dans le Santerre. On s'aperçoit que le profil de la population trace une frontière humaine et qu'elle subsiste d'autant plus que la région est ouverte sur l'extérieur.

7. L'autochtonité.

a) Ouvert/fermé : la vie au village.

A travers les entretiens qui ont été effectués, il semble que dans les villages où subsiste la pratique "ballonniste", revient la mention de trois ou quatre familles, "enracinées", "implantées" depuis des générations qui perpétuent la pratique ludique et la "transmettent".

Quelles sont les caractéristiques de ces familles ? Contrairement à ce que l'on pourrait supposer, tous ne sont pas agriculteurs : natifs de la terre, certes, mais occupant des professions variées. Les professions tracent des limites à l'intérieur des jeux ; limites sociales bien entendu. Longue paume, ballon au poing, balle à la main sont classés dans la hiérarchie sociale.

b) Etre du pays.

Mais ce qui les unit tous "c'est d'être du pays". A Hardivillers, tous les joueurs sont "originaires" à l'exception d'un joueur accepté à travers le mariage qu'il a contracté avec une "fille du pays".

Leurs parents et avant eux leurs grands-parents "jouaient déjà". Certains joueurs font partie des "plus vieilles familles du village". "Les X. sont arrivés en 1720."

En fait, on s'aperçoit que les joueurs font partie de familles implantées depuis des générations et qu'elles n'ont jamais quitté les lieux de naissance. Elles possèdent en général, trois ou quatre enfants qui s'attellent à continuer ce sport et souvent les gendres sont vivement sollicités à participer à l'engouement familial s'ils désirent vraiment être intégrés.

c) Les familles ballonnistes.

Ces trois ou quatre familles "dominantes" constituent un réseau qui se ramifie dans le village. Elles en forment l'ossature.

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"Jouer à la balle, c'est dans le sang", c'est dans le ventre. Le "sang", les "tripes" sont clairement désignés comme le vecteur de la passion et cette passion qui se transmet au sein de la famille n'épargne pas les enfants mâles. Ce réseau fondé sur la lignée permet de ressaisir le système de parenté qui régit les joueurs de balle et de ballon au sein de la localité.

De plus, les ancêtres générateurs de cette passion étaient de "bons joueurs" parfois des "extraordinaires fonciers". La qualité ne témoigne pas ici seulement de l'adresse déployée pour jouer mais regroupe dans une structure sous-jacente toutes les connotations afférentes. Enracinés au sol, ces magnifiques joueurs sont les témoins de leur culture.

Les liens de parenté forment la trame des relations locales, associatives, politiques et ludiques.

Dans le cadre des jeux de balle, l'analyse des membres de l'association montre plusieurs groupes domestiques multiples qui comprennent plusieurs unités liées entre elles par des liens de parenté.

Ces groupes sont plus ou moins étendus. De ceux dont le grand-père a suscité la passion du père et aux sœurs de celui-ci et qui l'ont renvoyée eux-mêmes individuellement et simultanément aux fils, aux neveux et enfin aux cousins germains.

C'est le cas de la famille C. à Hérissait qui compte onze membres, joueurs de balle.

D'autres groupes moins étendus regroupent le père et ses trois fils, le père, deux fils et le neveu puis encore d'autres cas de figure un père et deux fils, un beau-frère et trois neveux etc.

La décomposition de ce type d'association montre donc l'ossature formée par quelques familles et regroupant d'autres joueurs isolés. "Mais certaines vieilles familles originaires d'A. pouvaient faire équipe à eux tout seuls.

Dans ces groupes de familles du Santerre, les liens des groupes domestiques sont distendus. Il s'agit de grandes familles qui ont une grande profondeur historique (implantation locale ancienne avec de nombreux enfants qui sont restés au village).65

6îLa tradition voulait que le benjamin demeurât à la maison pour assurer les vieux jours des parents, en retour de quoi, il recevait la maison en héritage. Mais d'autres enfants sont restés au village : ceux dont les ancêtres possédaient un grand terrain. En effet, plus le terrain était grand, plus il était possible de le diviser et plus la famille s'est maintenue au village. Pour les fermiers non-possesseurs de leurs terres, ils ne pouvaient diviser leur exploitation dont l'ainé prenait la succession.

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Hallencourt (Somme) - Sport Tamis Hallencourtois.

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Deuxième partie.

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Equipe d'Excellence A d'Hérissart Championne en 1959. De gauche à droite en haut : ech'sonneu, Babel -

Cauèt Rémy-Gaudefroy Jacques - Denis Georges. En bas : Modeste R • Grigny R - Carton C.

Equipe d'excellence à Hérissait.

Les liens de parenté : qui est parent avec qui ?

Il aurait été long d'établir pour chaque joueur le nombre d'individus parents. Mais il a été possible de repérer dans les discours des informateurs les indices suivants : les liens entre les différents groupes domestiques se resserrent dans les régions à forte autochtonité. Dans les villages du Vimeu, nos interlocuteurs font mention de ces quatre ou cinq familles dominantes, ils ajoutent "nous sommes presque tous parents" ou précisent : "il n'y a pas une famille qui, à la troisième ou quatrième génération, ne fasse pas partie de la même famille".

Ces groupes familiaux qui possèdent un nombre important de parents sont de véritables "nœuds généalogiques" pour reprendre l'expression utilisée par

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Tina Jolas, Yvonne Verdier et Françoise Zonabend66 c'est à dire qu'elles sont à l'entrecroisement de plusieurs grandes familles.

Mais il faut souligner encore que certaines personnes issues de ces groupes cumulent outre la pratique des jeux de balle, la responsabilité de l'association, des responsabilités politiques au sein de la mairie, etc. et de ce fait, se révèlent être "des noeuds" de relations locales.

La persistance de la pratique des jeux de balle est donc fortement liée à des structures familiales sous-jacentes qui "tiennent le village". Combien de discours de nos informateurs évoquent des disputes, des oppositions de certains des membres ballonnistes. Lorsqu'on se "fâche", on ne joue plus.

Ces disputes sont à l'origine évoquées dans le jeu lui-même. Il s'agit de mésentente sur le choix de la place dans l'équipe, soit entre les différentes équipes, soit sur la manière d'attribuer le point à telle ou telle équipe notamment à travers les avantages.

Mais elles peuvent avoir encore d'autres raisons : "le maire avait quatre fils, il n'est pas passé aux élections, les fils sont partis. Pour la chasse, c'est pareil, ils réservent".

Raisons techniques ou politiques "tout cela, c'est des histoires de village" et si nous voulons approfondir, les raisons deviennent plus explicites. Au centre de ces conflits, la propriété. "Ce sont des histoires de terre" ; "les cultivateurs voulaient avoir les petits jardins des ouvriers pour en faire une pâture".

On s'aperçoit donc que la question de la terre et du territoire est au centre du pouvoir. Posséder des terres, c'est aussi posséder les chemins, les bois ; c'est avoir la "main mise sur tout ce qui se passe". La liaison avec la pratique de la chasse "coutume ancestrale des cultivateurs" procède de la même logique. Pour chasser, il faut l'autorisation du propriétaire qui peut "réserver" ses terres en cas de désaccord;

Ces mêmes personnes gèrent la commune, sont aux premières loges dans les commissions concernant le remembrement. "Au premier remembrement, le maire est soupçonné "d'être lié à un gros cultivateur" ou "accusé de s'être servi". A l'élection suivante, il ne sera pas réélu mais le nouveau maire sera accusé des mêmes motifs.

Réserver ses terres ou se retirer de l'association sont les moyens de réactions, de défense, ou d'attaque.

66 Parler famille, l'Homme X., 3 juillet/septembre, 1970.

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Plus grand sera le territoire, plus grand les pouvoirs obtenus ou acquis, plus importante sera la victoire.

Dans ce sens, la similitude avec la structure que l'on a découverte avec les pratiques ludiques semble cohérente.

8. L'endogène et l'exogène.

Dans ces collectivités locales où sont rassemblées ces unités familiales coexistent d'autres individus venus de l'extérieur. Les villages de Picardie, nous l'avons vu, sont soumis à l'attraction des villes qui fournissent le travail et depuis quelques années, ils se sont vus amplifiés de centres périphériques d'HLM ou de lotissements nouveaux. Deux vastes sous-ensembles structurent donc la population : les individus "nés au village", les individus qui ne sont "pas nés au village".

L'appartenance à l'un ou l'autre de ces groupes va impliquer un certain mode de relations spécifiques :

1) La proximité peut faciliter l'échange de services "s'il y a des échanges, c'est plus entre gens du village".

2) L'appartenance au groupe local transcende les différences socioprofessionnelles "je peux aller demander n'importe quoi, je suis sûr de l'avoir, ils ne vont pas me dire non, mais enfin disons queje suis du village".

Echanger dans le groupe local est une composante du mode de vie villageois. L'information circule vite "tout se sait" mais il faut faire partie du groupe local. Car le picard ne fait pas partager sa mémoire collective : "c'est un étranger, il ne comprendra pas". Ainsi, à partir d'un exemple d'une femme picarde mariée avec "un étranger", apparaissent les comportements différents. M 1 ^ X. vit d'une manière recluse, ne sollicite pas les rencontres avec les gens du village mais sera tenue informée de la vie locale, "des histoires". Son mari, étranger au pays, homme actif assurant des fonctions locales restera spectateur de cette vie interne et souterraine. Il devra faire une démarche pour éventuellement recevoir une entraide ponctuelle alors qu'elle sera donnée "naturellement à M m e X." sans qu'elle le signale.

Car celui qui vient de l'extérieur ne sera jamais picard. Mais l'époux ou l'épouse d'un picard peut l'être. Si un picard habitant à 15 kilomètres déménage dans un autre village, il ne sera reconnu qu'à partir d'une dizaine d'années par le salut que l'on va enfin lui accorder.

Ces moitiés de picards sont acceptées, dans le sens où l'on cohabite, que l'on vit à côté, qu'on se côtoie mais les relations ne se font pas dans une intimité proche.

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Des nuances complémentaires sont à ajouter en ce qui concerne des hommes à fonctions particulières : instituteurs, hommes à fonctions municipales qui seront mieux intégrés même s'ils ne sont pas acceptés.

On comprend mieux que les nouveaux habitants des HLM ou des lotissements écartés déjà "du centre du village" soient complètement inconnus. Les nouveaux arrivants qui n'appartiennent à aucun réseau et en particulier qui n'ont pas de parents sur place s'inscrivent toutefois dans les échanges locaux par le biais de l'école et des enfants.

Toutefois le facteur temps favorise l'intégration. Si les étrangers ne sont pas des "ballonnistes", les enfants, eux, peuvent le devenir.

Les rapports d'altérité se révèlent totalement à travers la terminologie dialectale employée à propos des jeux. L'incompréhension sépare les initiés des non initiés.67

67L'emploi du picard et donc la différence linguistique marquera l'altérité et l'exclusion, le rejet. Les jeux de balle et de ballon se sont constitués une langue spéciale : langage énergique et précis, pittoresque souvent. En premier lieu, il s'agit d'un lexique, d'un vocabulaire de l'activité pratiquée mais il comporte aussi tout un système phonétique et des lois concernant la syntaxe et la morphologie. A cet égard, nul ne manque d'être frappé par l'abondance de termes dialectaux. L'étude systématique de ce langage nécessiterait des enquêtes, des dépouillements de grande ampleur. Notre ambition sera ici plus modeste. A partir d'une information limitée à certaines expressions et à certains jeux que nous joignons dans cette étude, nous voudrions mettre l'accent sur la fracture qui sépare ceux d'ici et d'ailleurs (cf. Annexe).

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III.Troisième partie.

A. La réduction et la résistance.

Nous avons vu que les aires géographiques que dessinent les jeux sont soumises à des déterminations concrètes, telles que le degré de fermeture et d'ouverture vis à vis de l'extérieur.

Ces jeux eux-mêmes représentent un univers réglé par des représentations symboliques.

Reste à évoquer une autre série de facteurs liés à l'espace national et départemental et au contexte général. Elle permettra d'analyser l'opposition entre la réduction évidente des pratiques et leur force de résistance.

Cette dernière approche doit nous amener à mieux comprendre comment ces pratiques se maintiennent, quelles forces contraires elles mettent enjeu, comment elles se lient à plusieurs ordres de vérité.

1. Les fractures.

A travers les entretiens, différentes constatations apparaissent pour expliquer le recul des jeux de balle et de ballon.

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Historiquement, la mention de la guerre paraît un élément central. Elle représente un temps de fracture entre une période de jeux aboutie et un renouveau timide.

"La guerre de 1870 apporte une très sensible régression que 1914 et le développement des sports aggrave encore. Enfin cette dernière guerre vient de supprimer sept équipes sur les neuf qui restaient en 1938. "

Le départ des éléments masculins, parfois leur non-retour, les difficultés économiques et la reconstruction d'un pays atteint par les différents conflits engendrent la régression de la pratique.

2. L'évolution des loisirs et des sports.

Mais à l'évocation de ces périodes troublées, s'ajoutent en deuxième argument le changement et l'évolution qui a eu lieu dans le cadre des loisirs, notamment à travers les différents moyens de communication et l'implantation de sports différents. Les commodités de déplacement procurées par la moto, le car, l'auto ont achevé ce qu'avait commencé le chemin de fer, à savoir la faculté d'une plus grande dispersion géographique.

C'est ainsi que les discours des pratiquants rappellent les changements survenus dans les possibilités de divertissement.

"Avant, il n'y avait que le jeu de balle".

"Seuls le bal du samedi soir ou du dimanche, la kermesse du village pouvaient servir de dérivatif. "

C'est ainsi que les jeux prenaient leur véritable caractère avec les réceptions, cortèges, hommages aux morts, concerts de musique qui accompagnaient les rencontres entre villages.

Aujourd'hui, le raccourcissement des journées de travail, la notion de week-end, les vacances bouleversent le contexte temporel dans lequel évoluait le jeu de balle. Les contraintes inhérentes à la pratique du jeu de balle freinent pour une part son maintien. "Les parties sont trop longues : elles occupent toute ¡ajournée. "

Parallèlement, l'implantation des pratiques sportives a supplanté les pratiques traditionnelles.

Le jeu de balle est concurrencé par d'autres sports plus médiatisés.

Il semble présenter en effet, plusieurs obstacles.

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Les jeux de balle et de ballon ne font pas partie des sports spectacles.

"Les règlements sont compliqués". "Les changements de camps entraînent un nombre élevé de temps morts. "

R. Pechón dans son ouvrage Longue paume, amour d'enfance*1 résume les causes de disparition de certaines sociétés.

"C'est en 1954 que nous commençâmes à ressentir le mal qui nous ronge. D'une année à l'autre, on vit disparaître une, parfois deux sociétés. Ici la mort d'un vieux président en était la cause. Là, les effectifs ne permettaient plus la constitution d'une équipe (...). Comment expliquer cette régression ? Causes multiples et diverses (...). Reportons-nous quarante ans en arrière, un dimanche après-midi à la belle saison : le soleil luit, la place du village est fort animée. Despaumistes en costume de flanelle s'exercent sur le terrain dont le pourtour est garni de spectateurs. Assis sur les bancs fixés à demeure entre deux tilleuls, ces derniers ne perdent pas une miette de la rencontre, jugent les coups, apprécient la puissance ou la malice d'un joueur, sourient à la maladresse d'un autre. Les enfants jouent et crient ; de temps à autre, ils se précipitent vers une balle sortie du terrain. Des femmes endimanchées, sortant des vêpres, sont venues qui bavardent à qui mieux mieux, heureuses de se rencontrer. Ainsi chaque dimanche, le village grande famille se réunit autour du jeu et vit d'une même amitié (...).

Sages et modestes dans leurs désirs, nos anciens se contentaient de peu. Et maintenant ? Les progrès de la science ont tout changé, tout bouleversé : motos puissantes, autos rapides et confortables, cars pour excursion, avions, on n'a que l'embarras du choix pour s'évader, pour connaître des pays proches ou lointains. "

3. La place de la femme.

Le changement de mentalité des femmes est lui aussi cité. Généralement, si les adolescents peuvent s'investir dans les jeux de balle et de ballon, on se rend compte que la rupture avec les activités ludiques correspond avec la phase du mariage.

"Il est heureux que les jeunes, par besoin d'activité physique fassent du sport. Quand dans nos villages, il existe encore une société de jeu de paume, c'est tout naturellement vers elle qu'ils se tournent. Ils nous apportent leur

68R_ Pechón, longue paume, amour d'enfance, 1974, Douai, ets. Lefèbvre Lcvèque.

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ardeur juvénile, leur enthousiasme. Mais combien de ceux que nous avons formés, une fois mariés, ont délaissé camarades et terrain. "69

En effet, la communauté des ballonistes est presque essentiellement masculine. Il ne faut pas y voir le résultat d'une interdiction particulière: si les femmes ont des difficultés à s'intégrer, c'est que les qualités demandées (force et adresse) ne correspondent pas à leur mode de fonctionnement.

De fait, si auparavant, et pendant des siècles, la femme restait au logis, vaquait aux soins du ménage, élevait les enfants, de nos jours, elle est devenue plus indépendante et travaille davantage à l'extérieur. Cette mutation a profondément modifié la vie des ménages. La femme entend partager les plaisirs, les joies du mari. L'abandon du sport, pour ce dernier, en est une des conséquences.

"Nous gardons cependant au sein de nos sociétés quelques uns de ceux qui ont compris que sur le plan humain, la paume cimente l'amitié de ses adeptes et contribue au maintien d'éléments nécessaires à la vie du pays. Leurs épouses se rendant à ces raisons, leur laissent toute liberté. Est-il besoin de dire, que chaque fois que l'occasion se présente, nous ne manquons pas, soulignant leur présence parmi nous, de les remercier vivement de leur compréhension et du sacrifice qu'elles s'imposent. Il m'est même arrivé de dire, à la fin d'un banquet où une excellente ambiance régnait de leur dire : tout sacrifice n'est pas toujours inutile ; le vôtre, mesdames, j'en suis persuadé, aura sa récompense quand, ayant quitté cette terre, Saint Pierre vous accueillera ; les portes du paradis vous seront grandes ouvertes puisque votre purgatoire vous l'aurez, femmes de paumistes, vécu ici-bas. Déclaration acceptée avec un sourire quelque peu sceptique. Une de mes voisines, un peu plus tard se penche à mon oreille et discrètement me dit : c'est gentil ce que vous avez dit de notre vie future, mais si vous en avez le pouvoir, intercédez auprès de Saint Pierre pour qu'il nous garde, sur terre, un peu de paradis. La balle était bien éprise. "70

4. L'ossature en défaut.

Certaines des sociétés ont cessé toute activité non pas faute d'effectifs mais faute de dirigeants.

Bien souvent le départ ou la mort du président signe la mort de la société. Car, c'est par son dynamisme, sa disponibilité, sa capacité à régler les problèmes

69R. Pechón, opus cité.

7 0K Pechón, opus cité.

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qui se posent (qu'ils soient d'ordre matériel ou relationnel) que la société peut se perpétuer.

"Pour diverses raisons, notamment après le décès du président Warin, et après un an de répit sous la présidence de M. Demaison, de Worncourt, les joueurs ont à nouveau rangé leurs tambours. 1986/1987 fut la dernière saison : voici trois ans que l'on ne joue plus, en Vimeu au plus original des sports picards de balle : le jeu de balle au tamis. "71

5. L'odeur d'enfance.

L'amour de la paume est très souvent associée à une odeur d'enfance, aux plaisirs ludiques de bandes de garçons surveillés par un maître bienveillant.

Ainsi, pour les anciennes générations, le jeu de balle a conservé le goût des récréations scolaires prolongées et des jeudis de liberté.

Il garde le goût des camarades d'école et s'inscrit dans les souvenirs de famille où les noms des vedettes du jeu deviennent les champions locaux.

De tous ces faits et gestes, marqués par l'influence du maître, de mémorables parties subsistent dans la mémoire.

C'est que la présence de l'instituteur "né au pays" permettait d'assurer la continuité et la relève de ces jeux collectifs par le relais de l'école.

"L'expérience avait montré que dans un village où l'instituteur était gagné à la paume, la cause de la paume était gagnée dans le village. "

"Ici, un instituteur dans un petit bourg de deux cents âmes environ a groupé une quarantaine d'adhérents, anciens et nouveaux. Là dans une ville, un jeune dynamique, en l'espace de quelques mois a formé toute une nuée de paumistes dont il nous présentait lors d'un tournoi fédéral, une dizaine d'équipes. "72

Les jeux de balle et de ballon ont donc été associés à l'école.

Marqués par l'influence du maître, sanctionnés par son autorité, ils ont été de ce fait légitimés.

71La Balle au tamis, c'est fini, le courrier Picard, 29 août 1980.

72R. Pechón, opus cité.

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Ces différents éléments du discours nous font mieux comprendre que l'école a été une pièce maîtresse dans l'édification de ces pratiques et leur pérennisation.

Mais si l'histoire s'enrichit toujours de ces récits qui lui donnent sa subsistance, elle ne saurait se réduire aux souvenirs répétés. Aujourd'hui, l'engagement quasi militant des instituteurs se heurte aux changements actuels, il se trouve confronté à la surenchère des avantages des sports médiatisés. Pour les écoliers et les lycéens, les nouvelles pratiques engendrent de nouveaux gestuels, de nouveaux codes d'exercice et de nouveaux modes d'organisation.

Et seuls quelques instituteurs et enseignants essayeront aujourd'hui de réanimer ces pratiques anciennes, aidés dans leurs efforts par les structures des vieux pour conserver et raviver ces éléments du patrimoine régional.

Mollicns-Vidamc (Somme), place du Marche. Jeu de ballon.

Les barrières de l'invisible. Troisième partie. » 120

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Hallcncourt : Grande-rue. Jeu de tamis.

6. Lieux ouverts / Lieux clos.

Les causes de la disparition sont liées aussi à certaines municipalités qui ont cessé d'autoriser les jeux sur les places publiques et surtout dans les rues pour prévenir les risques corporels ou matériels.73

73Lcs sociétés d'assurance attaquaient les municipalités à l'occasion d'accidents dus à la pratique de ces jeux. Au début du siècle, dans de nombreux villages, la rue était le lieu de pratique. La circulation des voitures a supprimé les possilités de jeux.

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Les poursuites engagées à la suite d'accidents matériels ou corporels ont obligé les responsables à se charger de mettre en place des lieux spécifiques clos. C'est ainsi que bien souvent, les aires de jeux traditionnelles ont été exilées sur le terrain de sport municipal, se plaçant directement en concurrence avec les sports plus modernes.

Les causes de la disparition sont aussi dues aux caractéristiques inhérentes du jeu lui-même.

Les causes sont diverses.

Les terrains qui subsistent au centre du village, doivent correspondre à des règles précises étroitement liées au contexte local.

Une double rangée d'arbres bien feuillus, bien souvent des tilleuls donnent de l'ombre au jeu pendant les chaudes journées d'été. Arbres et arbustes procurent un fond de jeu sur lequel doit bien se détacher la balle.

Le sol doit être assez résistant pour faire rebondir la balle et assez doux pour favoriser la course. Il doit être assez perméable à l'eau pour ne pas rester trop longtemps mouillé.

Le terrain de jeu, selon la composition du sol, sera soumis à diverses préparations. Les terrains argileux se préparent avant l'hiver, on les recouvre de morceaux de craie que la gelée désagrège au printemps, on "herse", on "arrose", on "pilonne", on ajoute au-dessus une couche de gravier fin qu'on lie avec le fond par du thuin, en damant et en roulant.

Pour éviter l'éclat trop blanc et la réverbération fatigante, on mélange à la surface un peu de mâchefer pulvérisé de brique pilée ou de sable jaune.

Les sols marneux ou de sable fin agglutiné avec un liant sont favorables à la qualité de l'aire de jeu. Arrosé, damé et roulé, ils présenteront une surface bien unie.

Le jeu donc est fonction de ces différents facteurs : la nature du sol et la qualité du terrain, son orientation, le degré de lumière et d'ombrage, l'arrivée de la pluie ou du vent, autant d'éléments qui agiront sur le jeu.

Le degré moindre de précision lié à la présence d'éléments naturels, brindilles ou feuilles qui tombent, passage d'un animal etc., ont une répercussion sur le jeu et le décompte des points surtout qu'il est possible de bénéficier des fautes commises par l'adversaire. La nature des jeux de balle est donc d'être soumise pour une part plus importante au hasard.

Elle conserve ce caractère ancien qui, intégré au règlement, ajoute un piment savoureux aux luttes disputées.

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7. L'apprentissage.

L'apprentissage du jeu lui-même est aussi un frein dans la diffusion du jeu.

Enraciné dans la sphère locale, il est empreint des rythmes temporels anciens où les personnes nées au pays développaient une seule pratique ludique. De longues années sont nécessaires pour maîtriser certains gestes techniques "tirer ou servir la balle", "chasser ou rechasser".

Pratiquer une seule activité physique durant toute sa vie est en complète opposition avec la multiplication des activités sportives effectuées par les jeunes aujourd'hui. En effet, il semble plutôt que les individus répètent les phases d'apprentissage et que, lorsqu'ils "se débrouillent", ils passent à une autre activité physique. De plus, les jeunes sont attirés par des sports plus modernes et plus médiatisés.

Il n'est donc pas étonnant que nombre de joueurs qui rencontrent des difficultés à s'initier et à s'adapter aux techniques se tournent vers d'autres sports et délaissent ces premiers. La carrière des athlètes se raccourcit dans toutes les disciplines, le jeu de balle constitue l'exception. Une carrière de joueur de balle peut durer 25 ans.

8. L'arrêt de la pratique : un aspect cumulatif.

La disparition de sociétés a des conséquences immédiates sur la disparition des sociétés voisines. Elle possède un aspect cumulatif. Une société, en effet, ne peut concourir qu'à certaines conditions. D'une part, il faut qu'elle ait un nombre de joueurs suffisant et d'autre part, il faut qu'elle puisse s'opposer à d'autres. Ainsi, si dans une localité, une équipe disparaît faute de joueurs, elle peut entraîner inéluctablement la disparition de la seconde qui n'aura plus d'adversaires.

L'exemple des équipes normandes et picardes est à cet égard révélateur. D'une part, pour illustrer les causes de disparitions et d'autre part, parce qu'il s'agit d'équipes frontalières.

Si les deux types d'équipes pratiquaient le même jeu, la balle au tamis, il faut annoncer d'emblée des différences notables dans le service. Alors que le "livrage" s'effectuait au tamis dans le Vimeu, en Normandie le tambour était utilisé. C'est dire que les deux équipes utilisaient les deux manières déjouer.74

74L'utilisation du matériel semble opposer deux manières déjouer différentes. Le tamis nécessite de "placer les balles pour mieux se défendre", le tambour nécessite de "frapper le plus loin possible". A la fonction défensive qui s'accompagne d'une réflexion tactique s'oppose une fonction offensive où la force joue un rôle prépondérant.

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Mais bientôt, les circonstances contextuelles vont homogénéiser le jeu. "Les jeunes étaient moins motivés", "lorsqu'un village arrête l'activité, il sanctionne les villages voisins et la pratique se dilue". La diminution du nombre des pratiquants réduit parallèlement les possibilités de lutte entraînant la saturation de rencontres avec trop souvent les mêmes adversaires et corrélativement la diminution du nombre des spectateurs.

Dans le cas de cette désaffection progressive, il est à noter que la notion d'ensemble s'élargit. Les nuances techniques locales s'estompent. Il devient nécessaire, pour sauvegarder la pratique, d'établir des règlements communs et des manières déjouer identiques, et de s'élargir à des modèles spatiaux plus grands, sous peine de disparition totale.

9. La résistance.

L'idée d'ensemble s'est donc développée et a entraîné avec elle de profondes modifications dans l'échelle des valeurs.

La structuration en fédération, la codification plus rigoureuse des règles, les aspirations à l'élargissement régional, national et international, deviennent des conditions de survie de ces pratiques localisées à l'échelle de l'homme.

De nouveaux actes régulateurs ont ainsi été créés. C'est ainsi qu'il existe plusieurs ordres de vérité, sur des plans différents et entre eux, une série de réactions réciproques qui font pénétrer d'un degré de plus dans la complexité. En effet, dans le microcosme de la société, de la localité, les volontés individuelles s'affirment davantage.

Elles sont parfois suffisamment fortes pour freiner l'évolution. C'est ainsi que dans les entretiens, revient souvent la mention des querelles et des remises en cause que génèrent une organisation plus rigoureuse.

La fédération n'arrive pas toujours à imposer sa volonté aux joueurs et aux organisateurs. Les parties régulièrement formées en début de saison sont toujours le fruit d'éclats, de marchandages, de discussions. L'arbitrage reste parfois inefficace et rejeté par les joueurs qui décident eux-mêmes, ce qui constitue des sources d'incidents. Le changement de règlement suscite aussi le boycott de certains concours etc.

Malgré cela, de nombreuses nouveautés sont apparues. Le rôle et l'influence des fédérations se précisent.

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Deux générations de joueurs ; si le style a un peu changé, l'amour du ballon du cuir est resté le même.

Courrier picard, 16 août 1991.

En Belgique, la notion de "rémunération" des joueurs apparaît même s'il semble plus être un dédommagement pour l'investissement que représente la pratique du jeu (investissement matériel, frais de déplacement) et humain (temps et énergie). L'arbitrage est remis en cause. Les experts "traditionnels" se font remplacer peu à peu par de véritables arbitres.

Enfin, l'organisation de rencontres internationales entre la Hollande, la France, la Belgique et l'Italie révèle la volonté d'européaniser les jeux de balle. Elle se traduit par la mise en place de tournois triangulaires entre des équipes formées pour la circonstance. Si les jeux ont quelques divergences, il n'est cependant pas rare de voir des équipes belges ou hollandaises s'opposer à des équipes picardes.

Parallèlement, il ne faut pas négliger l'ordre de l'administratif et du politique. Si le fait départemental a contribué à rendre plus ou moins homogène les territoires englobés dans le cadre administratif, il contribue aussi à forger une identité plus large à laquelle participent les traditions et notamment les jeux de

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balle. Pour cela, des actions ont été menées afin de sauvegarder ces pratiques et de mettre en valeur le patrimoine dans le cadre des écoles, les jeunes servent de relais ou de ferment à la continuation de ces pratiques.

Des entraîneurs sont formés pour assurer l'encadrement.

Des subventions permettent de maintenir la vie des sociétés.

C'est ainsi que des interactions apparaissent entre une pratique localisée où le symbolique occupe une place prépondérante et des systèmes organisationnels sportifs et politiques. Entre ces démarches, des hommes, munis de bonne volonté, assurent le lien.

Ces différences d'appréciation participent à un mouvement complexe : celui de la résistance à la désagrégation dans laquelle la part du symbolique prend une place prépondérante et trace les frontières de noyaux résistants, certes, mais fragiles.

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IV. Conclusion.

De toute évidence, les phénomènes que nous avons pu aborder sous l'angle des frontières relèvent de procès divers, de paramètres différents.

En relevant et en cataloguant les manifestations sous lesquelles se présentent les frontières culturelles à travers les jeux de balle et de ballon, apparaissent le cadre naturel et les contraintes de la géographie, le poids de l'histoire et les impératifs du temps présent, l'impact des traditions et le rôle du symbolique.

C'est dire, en fin de compte, que les frontières que tracent les jeux se diluent tant sont multiples les entrecroisements et les niveaux de lecture.

Au terme de cette enquête, il nous faut donc proposer une série de constats qui peuvent être résumés comme suit.

La cartographie a mis en relief l'état donné d'un trait culturel spécifique enserré dans des limites départementales et régionales élaborées par l'homme politique. Elle masquait dans un premier temps l'agrégat culturel dans lequel il s'intégrait. Mais une investigation plus approfondie a pu montrer la persistance du clivage ancestral qui sépare la Flandre franco-belge du Hainaut franco-belge, le Nord flamand et germanique et le Sud Hainueyer et latin.

Cet agrégat culturel souligne le lien qui unit les jeux, la langue et les coutumes.

Les barrières de l'invisible. Conclusion. • 127

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La frontière étatique qui sépare cet ensemble n'engendre que des différences marginales. Elle semble, en fait, accélérer simplement un processus de spécification.

Un exemple de ce processus peut être fourni par l'aspect quantitatif des sociétés que l'on peut trouver en Belgique mais aussi par le professionnalisme qui les distinguent de l'amateurisme de la Picardie administrative.

Cette différence, même si elle apporte un aspect significatif n'est cependant pas suffisante pour y trouver une quelconque rupture. Ainsi, si l'existence de la frontière politique détermine nécessairement des disparités, elle ne joue pas un véritable rôle de fracture.

Cet ensemble culturel se décompose en différentes unités de références. L'exemple des associations de jeux en Picardie (longue paume, ballon au poing, balle au tamis, balle à la main) que nous avons sélectionnées, révèle une organisation de l'espace où prédominent les villages agricoles regroupés en masses homogènes. Ce qui fonde la différence, c'est le particularisme des zones géographiques où ils restent implantés et les nuances de jeux qui lui sont associées. Par contre, ce qui fonde l'unité, c'est le champ réciproque des pratiques et l'interconnaissance qui l'accompagne.

Cette unité synthétise les potentialités d'un monde rural et de ses habitants, déjà rassemblés autrefois. Elle souligne le poids des familles souches, celles dont les ancêtres possédaient suffisamment de terres pour qu'elles puissent être divisées et, ainsi, maintenir la plupart de ses membres au village.

Cette suprématie, liée à la propriété foncière, se caractérise par un principe d'association qui rend tous ses membres solidaires en même temps qu'un principe de séparation qui tend sans cesse à la désunion du faisceau. Cette attitude ambivalente de forces d'agression et de coopération s'exprime particulièrement à travers le canevas des jeux de balle et de ballon où chacun a besoin de l'autre et en même temps s'en détache. Mais à cette stratégie collective et sociale s'ajoute la caractérisation du jeu en lui-même. Jeu de déplacement, il a cette originalité séculaire de posséder le système de chasses que nous avons évoqué, système où les limites sont mouvantes.

C'est ainsi que le jeu révèle une situation symbolique complexe où la frontière apparaît comme trace arbitraire et mouvante d'un espace homogène. A cette structure sous-jacente partagée par des hommes solidaires de traditions collectives s'imbrique un cercle d'appartenance plus vaste aux enjeux différents.

Il s'agit d'autres sensibilités caractérisées par des volontés d'ensemble. Partisans d'une organisation qui dépasse le local, ils sont favorables à l'idée de réunir toutes les variétés de jeux. Depuis longtemps des initiatives sont prises dans ce sens, organisation de colloques, réunions, rencontres, contacts avec leurs homologues régionaux et internationaux. Des concours internationaux sont mis en place et notamment entre la France, la Belgique et la Hollande.

Les barrières de l'invisible. Conclusion. • 128

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Ces efforts d'ouverture qui passent du local au régional, du national à l'international engendrent automatiquement un changement d'échelles et assurent de ce fait, une meilleure reconnaissance institutionnelle.

Parallèlement à cette évolution, s'ajoute la volonté administrative de maintenir et de cultiver les traditions afin de marquer l'expressivité identitaire en défaut. Entre ces deux pôles, des hommes de bonne volonté jouent le rôle de passerelle et réunissent les fils parfois tenus de cette trame sociale.

A travers ce patrimoine immatériel fondé sur le maintien d'un savoir-faire profondément ancien, émerge donc l'expression complexe de réalités communes et contradictoires à la fois.

Pour les uns, la pratique du jeu et les rencontres sportives réajuste le contenu de la mémoire collective, soude la communauté solidaire de ces traditions collectives et les éloigne de l'Autre. Elles permettent de réactiver le sentiment d'être enracinés dans une Picardie séculaire.

Pour les autres, s'exprime la nécessité de conserver ces traces patrimoniales, et de les adapter à la modernité. Entre les deux, l'équilibre reste fragile. C'est bien souvent à sa porte que le picard voit le visage de l'autre et soudain les symboles changent. Il reste ces espaces restreints et ces hommes enserrés par une barrière invisible qui devient effective lorsque la pratique ludique perd sa signification.

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V. Annexes.

A. Le système coutumier flamand/picard-wallon.

B. XIXe siècle : importance approximative des différents jeux selon la région.

C. Le langage du jeu.

D. Règlement du jeu de balle en 1801.

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Le système coutumier flamand/picard-wallon.

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2. Gains de survie sur les immeubles en présence d'enfants (16C-I8° s.)

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4. Le privilège de masculinité ((enures à cens)

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5. Le droit de dévolution

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u. La représentation (avant le 16e s.)

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il. IJioils succcsM>iaii.\ des ascendants (U'-lô" s.)

9. Droits successoraux des ascendants (16"-18c s.) 5|ffe

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Page 136: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

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Annexes.

Page 137: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

12. Droit de disposer d'immeubles par testament <^"^

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13. Le rapport

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Page 138: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

XIX© siècle : importance approximative des différents jeux selon la région.

Les barrières de l'invisible. Annexes. 138

Page 139: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

XIXe s iede = IMPORTANCE APPROXIMATIVE DES DIFFERENTS JEUX SELON LA REGION.

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Les barrières de l'invisible. 139

Annexes. •

Page 140: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

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Page 141: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

Le langage du jeu.

Les barrières de l'invisible. Annexes. • 141

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Page 149: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

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A-balle : se dit d'un« balle qui n'a pas encore effectua son second bond et reste donc jouable

Au ballon : incitation à rechasser le ballon gui, n'ayant pas accompli son second bond, peut être renvoyé valable­ment (ballon au poing)

Basa« : se dit d'une balle qui tombe avant ou sur la corde (synonyme : dessous)

Baaaa-volaa ou deml-volae : joueur dont la place se situe entre le foncier et les cordiers

Baaaa-volaa da 15 : (n'existe qu'au jeu de la balle au tamis) joue le role de la haute-volée du jeu de la balle i la main, M placa normale se situant entre le fort du jeu et le deuxième fort du jeu

Bonn« : se dit d'une balle qui tombe à l'intérieur des limites

Bordure : limite longitudinale

Bourrer : synonyme d'enfoncer (ballon au poing)

- Chaaae : fiche, tige ou béton é poser ou é planter sur le bord de l'aire de jeu, i hauteur du point où la balle ayant

< . effectué plus d'un bond, a été arrêtée ou est sortie des limites longitudinales, en vue de fixer une limite ¿. provisoire et imaginaire entre les deux camps, pour l'attribution d'un seul quinze

[•• Cain da corda :

I". cordier dont la place est située près des limites longitudinales (à l'aile de la ligne formée par les cordiers) -

, on distingue le tcoin de corda de gauche» et \e*coin de corde de droite» Corda: ^ ligne de 3 à 5 cm de large, perpendiculaire aux limites latérales (peinte ou matérialisée par une tressa) et

V t séparant les deux camps lors de la mise en jeu de la balle. La corde est une simple ligne de service ; elle i££, est censée ne plus exister dès que la balle a été mise en jeu valablement, sauf dans les parties enlevées

de longue paume où elle continue i jouer son râle de façon permanente joueur placé près de la corde et dont la mission principale consiste a arrêter les ballet venant de l'équipe adverse soit en roulant soit à faible hauteur, pour établir des chasses ou pour défendre ces chassas en empêchant lesdites balles de pénétrer dans son camp. - on distingue le milieu de corde et les coins de corde

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Les barrières de l'invisible. Annexes. • 150

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Page 152: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

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Page 157: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

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Règlement du jeu de balle en 1801.

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Projet de règlement pour le jeu de balle

24 messidor an IX (13 juillet 1801)

Art. I . Les parties sont composées de cinq joueurs connus et désignes nominative­

ment, domiciliés dans la commune dont la partie portera le nom. constaté par acte

du maire du lieu de leur residence.

Aucune partie d'une ville ou village ne pourra prendre sous aucun prétexte des

joueurs d'une autre commune.

Art. 2 . Chaque ville ou village ne pourra former qu'une seule partie. Excepté la

ville d'Ath qui en formera deux au plus.

Art. 3. Aucun objet ni même les personnes ne porteront volée.

Art. 4 . I l y aura cinq experts nommés pour chaque partie par le maire, ses adjoints

ou des personnes chargées spécialement à cet effet. Le jugement porté par un ou

plusieurs experts qui auroient parié en faveur de l'une ou l'autre partie sera rejeté.

Les experts prononceront irrévocablement, selon la coutume locale, sur les

contestations qui pourroient s'élever entre les parties ou joueurs qui les composent

sauf exception qui précède.

Toute partie ou joueurs qui réclameront contre leur décision seront renvoyés

sur le champ et déchus du droit de jouer.

Art. 5. La plus grande honnêteté régnera entre les joueurs et parties, ceux qui se

permettroient des invectives ou voies de fait envers d'autres seront également

renvoyés sur le champ et déchus du droit de jouer.

La police tiendra la main à l'exécution du présent article, à quel effet

expédition du présent règlement sera transmise au Commissaire de police de cette

ville.

Art. 6. Les jours de jeu sont fixés au trente de ce mois, sept, quatorze, vingt un.

vingt sept. 28 thermidor, cinq fructidor et jours suivans.

Il sera joué trois parties chacun de ces jours jusqu'à la décision.

Chaque partie se jouera sans interruption et aucun joueur ne pourra la retarder

sous prétexte de rafraîchissement ou autre cause.

La première partie jouera à dix heures du matin, la seconde à deux heures, la

troisième ensuivant.

Le payement des marqueurs et des balles à fournir sont au compte des parues

perdantes.

Les barrières de l'invisible. Annexes. • 159

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varie avec les années. Le certificat de domicile est exigé en 1809. Un tirage

au sort détermine les tours de rôle.

b) Les prix

Aucun règlement ne fournit d'indication quant aux prix. Il faut, pour les connaître, se reporter aux procès-verbaux ou aux lettres d'invitation. De 1796 à 1801 ; ils consistent en boucles d'argent: cinq paires de grandes, pour soulier, à la partie gagnante ; cinq paires de petites, pour culotte, à la concurrente. En 1804, la première reçoit cinq paires de chaque sorte; l'autre, cinq de grandes. La balle d'honneur ( " ) . en argent et de 13 pouces de circonférence, «pour celui qui aura fait le dernier coup» apparaît en 1807 seulement, en même temps que dix montres : cinq en or pour la partie première, cinq en argent pour la seconde. La balle aura IS pouces l'année suivante, mais les montres en argent seront remplacées par cinq couverts du même métal. Les prix prévus lors des luttes ultérieures ne sont plus que des services dont le nombre va bientôt décroissant. Si bien que l'on en revient, en 1812. aux boucles avec, exceptionnellement , ure >alle d'honneur.

Une pareille régression, mais moins accentuée, se constate au tir à l'arc. Peut-être faut-il attribuer ce renversement au fai que les prix sont, à partir de 1809, payés par les toiliers qui. de cette anncr_> : S31, affectent á diverses fins d'utilité publique le produit du droit d'étalage qu'ils af­ferment ( " ) .

Tout ceci pour les grands concours qui comprennent éliminatoires et finales. Car à la naissance du roi de Rome, en 1811, les deux équipes em­portent chacune cinq mouchoirs à six francs pièce.

Les seuls frais prévus — paiement des marqueurs et des balles à four­nir — sont à la charge des parties perdantes. Tous les prix dont j'ai parlé sont donc entièrement gratuits.

12)) Il semble bien qu'avant la revolution française IA Mons des la fin du xvi* siècle selon J

OFSFFS. OP cit.. p 51), le prix consistan généralement dans le Hainaul en une balle d'argent que le

vainqueur offrait souvent a t église de sa paroisse IConf , notamment. J DfwFaf . «Jeu de Balle au Pays

d'Ain», m Jadis. Soigm». X I I I I I 9 0 9 1 pp. 131-134 cl I DFSFFS. ce en. p 68) Tournai, ou la ville

organise, de 1786 a 1819. a I occasion de la grande procession annuelle, des concours opposant diverses

communes innove, des 1781. en attribuant outre ce trophée unique, des prix individuels. 5 paires de

grandes boucles en argent et 5 de peines f J DESEFS. OP. cil. pp. 74 et 99)

(24) J t>wERT. op clt. p 134 ei Id. «Les toiliers d'Ain» in Annalts du Cercle orcMnlogtque

dAih. Bundles. V I <I9:0>. pp 13-14

Les barrières de l'invisible^ Annexes. •

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c) Le jeu

Les indications que les règlements fournissent au sujet du jeu lui-même sont rares.

Les luttes n'occupent que l'après-midi de la fête en 1796 et en 1797 . Elles commencent le 14 juillet en 1801. le 12 août en 1804, le 15 á partir de 1806, pour se terminer pendant la dédicace. Trois parties — une le matin, deux l'après-midi — se jouent chaque dimanche et jour de fête. Elles ne peuvent être interrompues sous quelque prétexte que ce soit.

Dés 1801, aucun objet, ni même les personnes ne portent volée (" ) . En 1810. toute balle qui touche la corde, de milieu ou de côté, est mauvaise. Enfin, la même année, toute équipe qui aurait été battue, même par une autre constituée illégalement, ne sera plus admise à concourir, pour quelque motif que ce soit (" ) .

d) Les experts

Cinq experts — nommés par le maire.ses adjoints ou le secrétaire — prononcent irrévocablement, selon la coutume locale, sur les contestations qui s'élèvent entre les parties ou les joueurs qui composent celles-ci. Cepen­dant, le jugement porté par un ou plusieurs experts qui auraient pané en faveur de l'une ou l'autre partie serait rejeté. Toutes ces dispositions datent de 1801. Elles ne seront pas modifiées.

e) Les mesures disciplinaires

Les règlements prévoient également des mesures disciplinaires. Chaque partie est appelée au jour et à l'heure fixés. On l'attendra pendant une demi-heure, délai porté á une heure en 1806, après quoi, on l'appellera trois fois. Celle qui ne répondra pas sera exclue et censée battue. Aucune réclamation ne sera admise pour non-réception des lettres.

Toute partie,' tout joueur qui réclameront contre la décision des experts seront renvoyés sur le champ et déchus du droit déjouer. La même sanction s'applique à ceux qui se permettraient des invectives ou des voies de fait, car la plus grande «honnêteté» doit régner.

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3) Le jeu de balle

Il n'a pas été possible de déterminer s'il s'agit de balle pelote ou de petite balle (").

a) L'organisation

^ Le parties, dont la composition ne pourra être modifiée, sont formées une cinq joueurs connus, domiciliés dans même commune, dont l'équipe portera le nom. Seule la ville d'Ath a la faculté de présenter deux parties — trois exceptionnellement en 1803 — qui, en 1807, pourront prendre un joueur dans une autre partie, même vaincue.

Dés 1801, ces parties doivent s'inscrire à la mairie, à une date qui

ni une lige en acier pointue i une extrémité et terminée à l'autre par un bloc de bois de forme ovoïde. Il y a deui buts formes chacun de trois broques. places à environ 6 m l'un de l'autre- Les joueurs sont deux contre deux, trois contre trois, quatre contre quatre. Le pied pose sur un but. l'on saisit le bngolet par la lance et on le jene de façon que la poime tombe i l'autre but ( . ) Sont gagnants ceux dont les brigolets louchent le but ou en sont les plus rapproches». Joue a Oeudcghien jusqu'en 1948. ce jeu y a ete réin­troduit en 1971 par M J. Vandewauyne. de Wodecq (Cfr Willy THOMAS. «Le bricot» —jeu vieux de plus de cinq siècles en usage i Tournai, jadis — cuit tombe en desuetude. On le rejoue au village d'Oeudeghicn». Le Courrier de I Escaut. Tournai, n* du 24 août 1971)

(21 ) A. V. A. : Q 4 1. Folklore. Programme du jeu d'anguille qui aura lieu le premier vendémiaire an 9 sur l'esplanade à Ath

(22) J DESEES ILes jeux sportifs de fieloie' paume en Belgique du XIV au XIX* siècle. Bruxelles. 1967. pp. 82 et 83) déduit, de l'article 20 d'un règlement type pour lequel il donne la seule reference : Archives d'Ath. qu'il s'agit d'un jeu de pelote On noiera que cet article est inspire de l'article 23 du • Reglement pour le jeu de petite balle» arrête i Ath le 10 août II ] ]» (A V A : 0 4 I . Folklore) Les règlements de la période française que j'ai pu consulter a Ath ne contiennent aucun article de ce genre

^j — Je rappelle que. pour alléger, je ne donne pas la référence lorsque les documents utilises sont classes. • chronologiquement sous le dossier A.V A. : Jeu de balle, début XIX* siècle

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Page 172: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

Vil. Index des illustrations.

1. Les zones de jeux dans la région Nord Pas-de-Calais 9

2. Longue paume, ballon au poing, balle à la main, balle au tamis 10

3. Limites linguistiques et frontières politiques 17

4. Les divisions administratives en Picardie 22

5. Jeux de balle et de ballon en Picardie (1930) 24

6. Jeux de balle et de ballon en Picardie (1991) 25

7. Le jeu de tamis dans l'Oise au XIXe siècle 26

8. La balle au tamis : l'équipe de Fressenneville vers 1910 26

9. Orchies, une lutte de jeu de balle avant 1900 28

10. Jeux de balle en Belgique 34

11. De la Flandre à la Wallonie 35

12. Les pratiques de jeux dans le Nord, la Picardie et la Belgique 37

13. Géographie des coutumes de la Belgique et du nord de la France XVIe - XVIIIe s. 39

14. La France coutumière 40

15. Régimes matrimoniaux 41

16. Segmentation dialectale de la Belgique romane 43

Les barrières de l'invisible. Index des illustrations. •

172

Page 173: LES BARRIERES DE L'INVISIBLE. - Culture

17. Aires géographiques et variantes des jeux 45

18. Jeu de balle à la main, XVe siècle 51

19. Jeu de ballon et tir à la butte 54

20. Raquettes et balles 55

21. Différentes sortes de raquettes et de battoirs 56

22. Le jeu de paume 57

23. La balle à la main 65

24. Le ballon au poing 70

25. La balle au tamis 76

26. La longue paume 83

27. La frappe du ballon 93

28. La communauté des ballonistes : les spectateurs 98

29. Le rôle des chasses 101

30. Sport Tamis Hallencourtois 110

31. Equipe d'excellence à Hérissart 111

32. Molliens-Vidame (Somme), place du Marché 120

33. Hallencourt : Grande-rue. Jeu de tamis 121

34. Deux générations de joueurs 125

Les barrières de l'invisible. Index des illustrations. • 173