LE RENFORCEMENT DE LA MARQUE PAR L ......la FCA (Fédération du Commerce coopératif et Associé)....
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LE RENFORCEMENT DE LA MARQUE PAR L’ENCULTURATION
AU SEIN DES RESEAUX DE COMMERCE COOPERATIF ET ASSOCIE
Fabrice Cassou
Université de Bordeaux, IRGO
Gérard Cliquet
Université de Rennes 1, CREM UMR 6211
Rozenn Perrigot
Université de Rennes 1, CREM UMR 6211
* IUT de Bordeaux (site de Périgueux) - Université de Bordeaux, Campus Périgord - CS
21201, 24019 Périgueux Cedex, téléphone : 06.63.03.88.27
Résumé :
L’enculturation contribue à renforcer la marque-enseigne d’un réseau de commerce coopératif
et associé. Ce concept permet d’examiner la culture organisationnelle de réseaux
d’indépendants ayant bénéficié de liens de socialisation. Une étude de cas a permis d’étudier
quatre réseaux de commerce coopératif et associé. Les résultats attestent de trois dimensions.
Celles-ci ont été testées empiriquement avec un échantillon de 245 commerçants coopérateurs
ou associés, issus de 53 réseaux différents, représentant tous les secteurs d'activité définis par
la FCA (Fédération du Commerce coopératif et Associé). Une analyse quantitative, selon la
méthodologie PLS, confirme l’impact de deux dimensions du concept d’enculturation sur la
marque de l’organisation : le comportement lié au langage ainsi que la fierté et les liens au
sein du groupe culturel.
Mots clef : Enculturation ; culture organisationnelle ; commerce coopératif ; commerce
associé ; marque
REINFORCEMENT OF THE BAND NAME BY ENCULTURATION
WITHIN RETAIL COOPERATIVES AND INDEPENDENT ASSOCIATED RETAIL NETWORKS
Abstract : Enculturation contributes to reinforce a retail cooperative or independent associated retail
network’s brand name. Enculturation can be used to examine organizational culture of
independent retail networks benefiting socialization process. A four-case study has been
conducted within retail cooperatives and independent associated retail networks. The findings
of our qualitative research highlight three dimensions of enculturation. All of these were
tested empirically with a sample of 245 cooperators or independent associated retailers from
53 different networks, representing all the sectors of activity defined by the FCA (French
Federation of Retail Cooperatives and Retail Independent Associations). A quantitative
analysis, based on PLS structural equation modeling, confirms the impact of two dimensions
on the brand name: Language-related Behavior and Pride and Cultural Group Association.
Keywords : Enculturation; organizational culture; retail cooperative; independent associated
retail; band name
1
LE RENFORCEMENT DE LA MARQUE PAR L’ENCULTURATION
AU SEIN DES RESEAUX DE COMMERCE COOPERATIF ET ASSOCIE
Introduction
La culture organisationnelle est un partage de significations communes (Schein, 1994) à
travers les croyances, normes, valeurs et pratiques qui s’ancrent dans les interactions et la
perception des membres d’une organisation (Robbins et al., 2014a). Elle génère un sentiment
d’identification et d’appartenance sociale (Meier, 2013) qui permet de se distinguer des
concurrents, d’impliquer ses membres, d’établir des normes comportementales, de donner des
objectifs et d’assurer l’unité au sein de l’organisation (Robbins et al., 2014b). Ce besoin
d’unité peut s’avérer particulièrement nécessaire lorsque l’organisation est détenue par un
ensemble de copropriétaires égalitaires comme cela est le cas au sein des réseaux de
commerce coopératif et associé. Ceux-ci peuvent être définis comme des réseaux regroupant
des commerçants, propriétaires de point(s) de vente et copropriétaires des structures centrales
(tête de réseau ou coopérative), qui mettent en commun leurs moyens (achat, marketing,
communication, financement, logistique, etc.) et développent des politiques communes (FCA,
2016).
La notion d’enculturation est un concept peu connu à l’inverse de la notion
d’acculturation. Selon Redfield et al. (1936), l’acculturation correspond aux contacts entre
deux groupes d’individus différents qui vont conduire à des changements comportementaux.
La notion d’acculturation implique la pénétration d’une culture par une autre, contrairement
au concept d’enculturation. En raison de la présence d’un processus de socialisation (Bradach,
1997 ; 1998), il n’y a pas de confrontation entre deux cultures. Ainsi, la culture de
l’organisation n’est pas totalement extérieure à ces individus lorsqu’ils deviennent eux-mêmes
coopérateurs. Selon Herskovits (1948, p. 35), « [D]ans le processus d'enculturation, l'individu
apprend les formes de comportement admises par son groupe. Généralement, cette
assimilation est si parfaite que les pensées, le système de valeurs, les actes d'un individu sont
rarement en contradiction avec ceux des autres membres de son groupe ».
L’objectif de ce travail est de prédire l’impact des mécanismes d’enculturation sur la
marque-enseigne de réseaux de commerce coopératif et associé. Ceci est d’autant plus
nécessaire que la marque-enseigne exige de la cohérence (Diaz-Bernardo, 2012), voire de
l’uniformité (Bradach, 1997). Le concept d’enculturation n’a jamais été étudié au sein des
réseaux de points de vente alors qu’il leur semble bien adapté. Les questions de recherche
sont les suivantes : Qu’est-ce qui fait l’objet d’une transmission à travers l’enculturation
organisationnelle ? Comment ces normes d’enculturation sont-elles transmises ? En quoi
l’enculturation permet de renforcer la marque d’un réseau de points de vente ? La recherche a
été menée de manière séquentielle avec une étude de quatre cas, dans une perspective
qualitative, puis une approche quantitative afin de tester les hypothèses formulées.
Revue de littérature
Culture organisationnelle et sélection des membres de l’organisation. La culture
organisationnelle permet de générer de l’intégration et de l’homogénéité quand les normes,
valeurs et méthodes d’actions sont partagées et stables (Martin, 1992). La culture de
l’organisation a donc pour vocation d’être transmise aux nouveaux membres comme une sorte
de code de conduite (Schein, 1994). La culture est nécessaire au sein des organisations pour
générer une cohésion interne permettant d’atteindre leurs objectifs à court ou long terme
(Pascale et Athos, 1981). La sélection des candidats pour intégrer un réseau (reprise ou
2
expansion du nombre de points de vente) est particulièrement stratégique sur le plan humain
(Rubin, 1978). Pour Papon-Vidal (2000), « [l]e statut d’associé-coopérateur se trouve renforcé
par un fort intuitu personae occultant le traditionnel intuitu pecuniae qui figure dans toute
autre typologie de société ». Bradach (1997 ; 1998) décrit les mouvements de salariés de
réseaux mixtes qui deviennent franchisés à travers le processus de socialisation. Cela permet
ainsi une meilleure diffusion des valeurs et des pratiques de l’enseigne en question.
Globalement, les enseignes du commerce coopératif et associé cherchent à s’appuyer sur leurs
ressources internes telles que leurs salariés ou des membres de la famille de coopérateurs
(Cassou, 2014).
Enculturation organisationnelle. Selon Weinreich (2009), l’enculturation correspond à
l’intégration continue des éléments significatifs d’une culture, qu’il s’agisse de celle
dominante, d’origine ou d’une autre à condition qu’elle soit significative pour l’individu. La
notion d’enculturation est donc à privilégier car celle-ci comprend l’intégration d’éléments
culturels au cours de la socialisation de l’individu (Weinreich, 2009). Selon Herskovits (1948,
p. 185), l’enculturation est un processus « par lequel l’individu assimile durant toute sa vie les
traditions de son groupe et agit en fonction de ces traditions ». Plus les individus ont le
sentiment d’appartenir au même groupe social, plus ils vont avoir tendance à tendre vers une
conformité sociale (Khalbous, 2000). L’organisation réticulaire permet de faire rentrer les
nouveaux coopérateurs dans le « moule » et d’engendrer les modifications comportementales
nécessaires à la culture organisationnelle (Van Maanen et Schein, 1977).
Nécessité d’une marque-enseigne. Selon Benghozi (2007), un réseau « ne s’institue
donc pas par une injonction de l’extérieur, mais se fonde à partir d’effets de correspondances
entre des particularités, des affinités, des besoins partagés, des complémentarités autour d’un
projet commun ». Ce lien entre les membres d’un réseau peut être caractérisé par une marque
(Bonnin et Odou, 2010). Avant d’être considéré comme une enseigne, un réseau doit
nécessairement atteindre une taille critique. L’association de commerçants en groupements est
motivée, dans un premier temps, par les fonctions de centrales d’achat et de référencement
pour bénéficier d’une enseigne, dans un second temps (Moinier, 2009). La gestion de l’image
de marque d’un réseau de points de vente relève de chaque membre du groupement qui peut
influer sur cette image (Brousseau et Glachant, 2000).
Méthodologie qualitative
Une étude de quatre cas (Biocoop, E.Leclerc, Intermarché et Système U) a été menée
selon la méthodologie développée par Eisenhardt (1989). Les huit étapes proposées par celle-
ci ont été suivies avec le renforcement des notions de fiabilité et de validité (Flyvbjerg, 2006).
Vingt-huit entretiens semi-directifs ont été conduits pour collecter les données jusqu’à
l’atteinte de la saturation théorique (Glaser et Strauss, 1967). Chaque entretien a été retranscrit
intégralement et a été analysé à l’aide du logiciel NVivo 10. Par souci de confidentialité, les
enseignes ont été anonymées et sont désignées par des lettres, sans lien avec l’ordre
alphabétique des réseaux. Des sources complémentaires, telles que les statuts des réseaux,
documentaires, livres et documents internes, ont été utilisées afin d’établir une « chaîne de
preuves » (Yin, 2009). L’analyse a été réalisée intra-cas et inter-cas. Des extraits de verbatim
sont utilisés afin d’ancrer les résultats de la recherche (Stake, 2005).
Résultats qualitatifs
Élaboration d’un langage spécifique. Le langage revêt un caractère important au sein
des réseaux de commerce coopératif et associé. Selon le sociétaire A1, « [il y]’a effectivement
un vocabulaire qui est propre au réseau A, des néologismes qui d’ailleurs ont été repris par
3
d’autres enseignes ». Pour l’adhérent B4, « il y a tout un langage, d’ailleurs il y a tout un
lexique. [Le coopérateur montre un annuaire du réseau B]. Ça, c’est notre devise […]. Là
vous avez toutes les régions, tous les magasins, c’est un trombinoscope […] et alors “ parlons
le même langage ˮ ». Pour l’associé B1, « un langage, oui, on a nos termes à nous » et ajoute
« moi quand je fais un courrier en interne, alors bien ou pas bien, à la fin, comme c’est à un
collègue qu’on écrit, moi je mets tout le temps “ [nom du groupement]-ment vôtre ˮ, voilà ».
Appartenance culturelle et sociale. Des modèles peuvent personnaliser les valeurs et
jouer un rôle d'identification pour les membres de l’organisation. Il peut s’agir des fondateurs
de l’organisation, première source de culture organisationnelle. À propos du fondateur de son
groupement, l’adhérent B4 témoigne, « c’est un sacré bonhomme. Il a écrit un livre
d’ailleurs. C’est intéressant à lire. Je pense qu’on l’a tous. […] Moi je l’ai lu et après je l’ai
donné à mon fils qui est [nom du groupement] aussi, enfin qui va le devenir ». Deux autres
présidents des réseaux étudiés ont publié plusieurs livres, communiquent par des blogs ou sur
les réseaux sociaux, et interviennent régulièrement dans les médias généralistes et spécialisés.
Certains membres qui n’ont pas été élus dans les plus hautes fonctions peuvent aussi avoir de
l’influence. Selon l’adhérent B1, « la culture d’entreprise, […] il y a des fondamentaux du
groupement, l’appartenance, le respect des anciens [..]. On a pu rentrer dans le groupement
parce que des anciens ont fait telle, et telle, et telle chose, ils nous ont amené ça. Et bien
aujourd’hui on est nouveau, mais demain on sera un ancien et comment on transmet aux
nouveaux qui arrivent ? Et c’est [important] de garder cette culture-là ».
Groupe culturel. Lors de la validation de leur statut de coopérateur, une cérémonie peut
être organisée selon les groupements avec la remise d’artefacts. Au sein du groupement B,
une épée est remise au regard de la symbolique du nom de leur groupement d’appartenance.
L’adhérent B4 explique que l’utilisation de ce symbole peut même se retrouver au sein de la
vie personnelle : « quand je me suis marié, ça fait huit ans maintenant, tous les collègues à la
sortie de la mairie, parce que c’est un deuxième mariage, donc pas l’église, ils m’avaient fait
une haie d’épées [du groupement]. Je ne savais rien, ils ont fait comme ça. Je n’avais rien
demandé. J’ai dit “ ah ouais d’accord ˮ. C’est la culture ». Il est courant de voir ces épées au-
dessus du bureau des membres de ce réseau. Au sein du réseau D, il y a une remise d’une
« coupe en forme de [symbole lié au nom de l’enseigne] » note l’associé D4. Les réunions,
conventions et assemblées générales sont de véritables occasions pour les membres du réseau
de partager des idées, des pratiques et des informations. Pour le président du réseau D, « on a
des réunions, des congrès, des conventions, des [nom de l’instance locale], c’est dans toutes
ces instances-là où on exprime les choses et à ce moment ça recadre un peu à chaque fois ».
C’est aussi l’occasion pour les coopérateurs de se rencontrer et de renforcer les liens entre
pairs. Le président du groupement C déclare que « c’est la réunion permanente […], ce qui
est un moyen extraordinaire pour ne pas déliter le lien. On l’entretient par le lien personnel.
C’est à la fois travailler et manger ensemble ». Cette vie intense du réseau permet de mieux
diffuser les valeurs et savoirs d’organisation au sein de réseaux à forte tradition orale.
Méthodologie quantitative
Au regard de la conception séquentielle exploratoire (Creswell et Clark, 2010), il
convient de faire succéder à la phase qualitative ayant établi les dimensions de l’enculturation,
une phase quantitative destinée à les tester. Les hypothèses suivantes sont formulées : H1 :
Plus le comportement lié au langage du réseau d’appartenance est perçu comme important
par le commerçant coopérateur ou associé, plus la marque est renforcée ; H2 : Plus la
connaissance culturelle et sociopolitique du réseau d’appartenance est perçue comme
importante par le commerçant coopérateur ou associé, plus la marque est renforcée ; H3 :
4
Plus la fierté et les liens au sein du groupe culturel du réseau d’appartenance sont perçus
comme importants par le commerçant coopérateur ou associé, plus la marque est renforcée.
L’enculturation peut être testée en se référant aux construits développés par Zhang et
Moradi (2013). La mesure du renforcement de la marque est effectuée à partir de l’échelle
« Brand name » développée par Gorovaia et Windsperger (2013). Certains éléments de ces
construits ont été adaptés (voir annexes 1 à 4). Ces construits sont mesurés par des échelles de
type Likert, harmonisées en 7 points allant de « pas du tout d’accord » à « tout à fait
d’accord ». Le choix de sept échelons est un nombre consensuel au sein de la littérature, « the
magical number seven », en particulier pour des professionnels (Miller, 1956).
La méthodologie Partial Least Square (PLS) a été sélectionnée pour l’analyse du fait
d’être « particulièrement adaptée au développement théorique et aux approches prédictives »
(Fernandes, 2012, p. 103), de permettre d’utiliser des échelles de mesure sans qu’elles aient
été largement éprouvées (Sosik et al., 2009) et sans nécessiter de grands échantillons
(Lacroux, 2011). Le questionnaire a été administré à l’ensemble des enseignes de commerce
coopératif et associé, organisées sous forme de réseaux de points de vente, sans restriction
sectorielle. La population ciblée est donc composée de professionnels ayant la qualité de
commerçants coopérateurs ou associés. Le nombre de réponses valides obtenue est de 245
dont les répondants sont issus de 53 réseaux différents et des 16 secteurs d’activité identifiés
par la Fédération du Commerce coopératif et Associé (FCA). L’analyse a été réalisée à l’aide
du logiciel SmartPLS (Ringle et al., 2016).
Résultats quantitatifs
L’analyse des construits, de nature réflexive, a conduit à épurer certains d’entre eux
(voir annexe 5) à partir des tests de fiabilité de la cohérence interne (fiabilité composite), de
validité convergente (poids factoriels des indicateurs et variance moyenne extraite) et de
mesure de la validité discriminante (contributions croisées, critère de Fornell-Larcker et
l’approche HTMT). La phase d’épuration a consisté à supprimer trois indicateurs des
construits de valeur inférieure à 0,70 (2) et supérieure à 0,95 (1). Le tableau 1 présente les
résultats de l’analyse.
Poids
original
Erreur
standard Valeur t Valeur p
Intervalle de
confiance Caractère
significatif 5.0% 95.0%
PMTUCOLA ->
MARQUE 0,118 0,069 1,710 0,044 0,002 0,226 Oui
PMTUCUSO ->
MARQUE 0,025 0,074 0,333 0,370 -0,079 0,164 Non
PMTUFACG ->
MARQUE 0,265 0,072 3,681 0,000 0,154 0,390 Oui
Tableau 1 : Examen du caractère significatif des chemins du modèle structurel après épuration (risque
α = 5 %, t>1.65 et p<0,05)
Le modèle épuré est analysé avec les données agrégées. L’impact du comportement lié
au langage et l’impact de la fierté et les liens au sein du groupe culturel sur la marque sont
significatifs. Cela n’est pas le cas sur le plan de l’impact de la connaissance culturelle et
sociopolitique sur la marque. Ainsi, seules les hypothèses H1 et H3 peuvent être validées.
5
Discussion
Le processus d’enculturation a été mesuré à l’aide de trois échelles mesurant le
comportement lié au langage, la connaissance culturelle-sociopolitique ainsi que la fierté et
les liens au sein du groupe culturel (composé de coopérateurs). Deux de ces trois dimensions
ont une influence significative sur la marque. Cela confirme donc partiellement les
dimensions de l’enculturation telles que proposées par Zhang et Moradi (2013). L’impact de
la connaissance culturelle et sociopolitique ne s’est toutefois pas révélé significatif sur la
marque. Il est probable que les construits mesurant le concept d’enculturation souffrent de
l’éloignement géographique entre commerçants, ce qui n’est pas le cas dans les travaux en
psychosociologie majoritairement consacrés à l’étude des populations immigrées ou issues de
l’immigration aux Etats-Unis (Bauman, 2005 ; Kumar et Nevid, 2010). Pour permettre la
diffusion de la culture d’une organisation, les outils de communication apparaissent
nécessaires surtout lorsque les coopérateurs sont très éloignés les uns des autres. Comme
l’exprime le président du réseau D, « c’est très difficile parce qu’il y a beaucoup de dilution.
On s’aperçoit que pour faire passer un message, […], ce n’est pas aussi simple que ça dans
un groupe d’indépendants ». De manière complémentaire, le sociétaire A5 note, « [o]n sait
que notre président intervient beaucoup dans la presse mais […] on ne va pas le savoir ».
La culture organisationnelle est prioritaire pour certains présidents de réseaux
coopératifs. Ainsi, Serge Papin (2014, p. 91), président de Système U, écrit : « [p]lus la
culture d’une entreprise est forte, claire et définie, plus ses salariés sont motivés. Et mieux
l’entreprise peut réussir. Il existe une corrélation entre la force d’une culture d’entreprise et
ses résultats mis en partage ». Comme l’exprime le président du réseau D, « on s’aperçoit
souvent que ceux qui ont la meilleure politique sociale, la meilleure politique tarifaire, ceux
qui ont le magasin le plus moderne, ceux, en gros, qui font bien les choses globalement, ce
sont aussi les magasins qui gagnent le plus d’argent ». L’enculturation représente donc un
enjeu majeur à prendre en considération pour mettre en place une stratégie de différenciation
organisationnelle difficilement imitable et contribuant au renforcement de la marque.
Différentes recommandations peuvent être proposées aux réseaux : 1) développer plus
d’outils de communication interne et travailler sur la question de l’engagement des membres
de l’organisation vis-à-vis de ceux-ci (Beauvois et Joule, 2010) ; 2) renforcer les rencontres
entre commerçants de manière plus festive telle que les inaugurations de magasins afin qu’ils
se rencontrent dans un contexte moins formel ; 3) développer des outils à intégrer/afficher en
points de vente. Comme le note le coopérateur A5, « [o]n manque de symboles
d’appartenance ou de fierté du réseau ». Ces axes devraient ainsi contribuer à renforcer la
marque de du réseau de points de vente de manière significative.
Différentes limites sont à noter : 1) les quatre cas de l’étude qualitative ne sont pas
représentatifs des autres réseaux de commerce coopératif et associé (chiffre d’affaires et
nombre de membre) ; 2) les données quantitatives ne sont pas assez nombreuses et le nombre
de secteurs d’activité trop important pour effectuer une analyse segmentée ; 3) les construits
sélectionnés ne prennent pas en compte la notion de valeurs et leur internalisation (O'Reilly et
Chatman, 1986) ; 4) la méthodologie PLS maximise le pouvoir explicatif des variables
exogènes sans tenir compte des erreurs de mesure (Lacroux, 2011).
À partir de la phase qualitative, il a pu être constaté que de nombreux coopérateurs
entretenaient des liens interpersonnels par téléphone et E-mail. Dans les sources de multi-
angulation, il a pu être observé que de nombreux points de vente de mêmes enseignes
développaient une communication sur les réseaux sociaux. Aussi, il serait intéressant
d’examiner les interactions entre les membres d’une même enseigne sur les réseaux sociaux,
qu’ils s’agissent de coopérateurs ou de salariés des points de vente ou du groupement.
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Annexes
Échelle originale Échelle retenue
Language-related Behavior Comportement lié au langage
I enjoy reading in the language of my
heritage culture (e.g., books).
J’aime lire des informations liées à mon enseigne
(livres ou interviews des fondateurs, présidents ou
coopérateurs, journaux internes, newsletters, etc.)
I often write in the language of my
heritage culture (e.g., letters).
J’écris souvent avec du vocabulaire spécifique à
mon enseigne (par exemple dans des lettres ou
courriels)
I speak the language of my heritage
culture well.
J’utilise facilement du vocabulaire ou des
expressions liées à mon enseigne (abréviations,
jeux de mots avec le nom de mon enseigne, termes
spécifiques, nom d’opérations stratégiques, etc.)
My thinking is often done in the
language of my heritage culture.
Je raisonne souvent avec un vocabulaire lié à mon
enseigne
I read and write well in the language
of my heritage culture.
Je comprends parfaitement et j’écris avec un
vocabulaire lié à mon enseigne
Annexe 1 - Construit « Language-related Behavior » développé par Zhang et Moradi (2013)
Échelle originale Échelle retenue
Cultural and Sociopolitical
Knowledge
Connaissance culturelle et sociopolitique
I know history of my heritage
cultural group well
Je connais bien l’histoire de mon enseigne
I am knowledgeable about the
culture and traditions of my heritage
culture.
Je connais bien la culture et les traditions de mon
enseigne
I know current affairs of my heritage
cultural group well. Je me tiens au courant de l’actualité de mon
enseigne
I know national heroes from my
heritage cultural group well
Je connais (au moins de renommée) les fondateurs
et les anciens coopérateurs qui ont contribué à
construire cette enseigne
I know political leaders from my
heritage cultural group well.
Je connais les dirigeants de mon enseigne
Annexe 2 - Construit « Cultural and Sociopolitical Knowledge » développé par Zhang et
Moradi (2013)
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Échelle originale Échelle retenue
Pride and Cultural Group
Association
Fierté et liens au sein du groupe culturel
I like to interact and associate with
people from the same heritage
culture as myself.
J’aime interagir et fréquenter des personnes ayant la
même culture d’enseigne que moi
I am proud to be a part of my
heritage cultural group.
Je suis fier(ère) de faire partie de cette enseigne
I often interact and associate with
people from the same heritage
culture as myself.
J’interagis et je fréquente souvent des coopérateurs
de mon enseigne
I feel I have a lot in common with
people from the same heritage
culture as myself.
Je ressens de nombreux points communs avec les
autres coopérateurs de mon enseigne
I go to places where people are from
the same heritage culture as myself
Je rencontre des coopérateurs en dehors des temps
obligatoires ou formalisés par le réseau (réunions
locales, régionales, assemblées générales, etc.)
I associate with my heritage cultural
group. Je fréquente les membres de mon enseigne
I identify with my heritage cultural
group.
Je m’identifie aux membres de mon enseigne
Annexe 3 - Construit « Pride and Cultural Group Association » développé par Zhang et
Moradi (2013)
Échelle originale Échelle retenue
Our brand name is very strong
compared with that of our competitors.
Notre marque est très forte par rapport à celle de
nos concurrents
The quality of our franchise system has
a very good reputation.
La qualité de notre réseau de points de vente a
une très bonne réputation
Our franchise system is well recognized
compared with that of our competitors.
Notre réseau de points de vente est bien reconnu
par rapport à ceux de nos concurrents
Our brand name is very important to
achieve a competitive advantage.
Notre marque est très importante pour bénéficier
d’un avantage concurrentiel
Annexe 4 - Construit « Brand name » développé par Gorovaia et Windsperger (2013)
11
Variable latente Indicateurs
Validité convergente
Fiabilité de
la cohérence
interne
Validité
discriminante
Poids factoriel AVE Fiabilité
composite
L'intervalle
de confiance
HTMT est
inférieur à
0,85
Comportement
lié au Langage
PMTUCOLA2 0,89
0,866 0,951 Oui PMTUCOLA3 0,95
PMTUCOLA5 0,95
Connaissance
culturelle et
sociopolitique
PMTUCUSO1 0,86
0,675 0,892 Oui PMTUCUSO2 0,88
PMTUCUSO3 0,81
PMTUCUSO4 0,73
Fierté et liens
au sein du
groupe culturel
PMTUFACG1 0,73
0,613 0,917 Oui
PMTUFACG2 0,76
PMTUFACG3 0,83
PMTUFACG4 0,81
PMTUFACG5 0,78
PMTUFACG6 0,77
PMTUFACG7 0,79
Marque
UNIFMAR1 0,88
0,706 0,905 Oui UNIFMAR2 0,84
UNIFMAR3 0,80
UNIFMAR4 0,85
Annexe 5 - Résultats des indicateurs à la suite de l’épuration