Le perfectionnisme : Aspects conceptuels et cliniques

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    commentaire de passage sur le perfectionnisme. Malgrlintroduction de cette notion dans les classifications psychiatriques modernes, aucun manuel de psychiatrie ne luiaccorde la moindre mention. De mme, le terme napparat pas dans les dictionnaires des termes psychopathologiques ou psychiatriques (10,11).

    En consquence, nous croyons que le phnomne du perfectionnisme ncessite une description et une concept-ualisation clinique plus labore.

    Le perfectionnisme : Normal ou pathologique?

    Le perfectionnisme est conu comme une caractristiquede la personnalit, comme un style cognitif spcifique avecson mode de comportement correspondant. La plupart desauteurs qui ont contribu llaboration du concept du perfectionnisme considrent, de manire plus ou moinsexplicite, ce dernier comme un phnomne anormal, pathologique. Pacht (1), par exemple, est trs catgorique

    lorsquil spcifie rserver lemploi de ce terme pour dsigner une forme de psychopathologie : ... the insidious nature of perfectionism leads me to use the label only when describinga kind of psychopathology (p 380). Dans les classifications psychiatriques modernes, le terme perfectionnisme revtgalement une nette connotation pathologique.

    Pourtant, la majorit des auteurs qui partagent ce point devue ont eu le souci didentifier et de souligner certains aspects positifs du perfectionnisme, voire mme de diffrencier un perfectionnisme qui pourrait tre qualifi de normal(7,12,13). De plus, certaines donnes indiquent une prvalence leve du perfectionnisme dans la populationgnrale, ce qui doit conduire une certaine prudence quant

    la qualification facile du perfectionnisme en termes de pathologie. Ainsi, Burns (3) estime quenviron la moiti de la popula ti on am r ic aine man if est era it des tr ait s de perfectionnisme tandis que dans une tude pidmiologique,le perfectionnisme est retrouv des degrs variables desvrit chez 31.8 % de la population de la ville deBaltimore (14).

    Nous croyons quil est ncessaire et possible dun point devue clinique de faire une distinction entre un perfectionnismenormal et un perfectionnisme pathologique et cela pour diverses raisons. La double connotation, positive et ngative,est ressentie dans la faon mme dont il est question du perfectionnisme dans le DSM-IV (15) et la CIM-10 (16) : on

    parle dun perfectionnisme qui entrave lachvement destches (p 672; p 205) et cette formulation suggre lexistencedun autre type de perfectionnisme qui lui ne nuirait pas laccomplissement correct des tches.

    Deuximement, le perfectionnisme nest pas un termeclinique franc au mme titre que les termes hallucinations,dlire ou obsessions. En effet, il est largement utilis dans lelangage courant o il possde une connotation plutt positiveque ngative. Il apparat que le clivage de ces 2 connotationsnest pas arbitraire mais reflte la ralit culturelleimmdiate : le perfectionnisme dans son sens positif est conu

    comme une qualit, voire mme comme une exigenceculturelle. Hamachek (7) souligne avec raison que dtre perfectionniste nest pas forcment un dsavantage : it probably wouldnt bother any of us to know that our surgeon,or lawyer, or plumber, or TV repairman, or our childrensteachers were somewhat perfectionistic (p 27). Dautres ontsoulign les aspects positifs de la qute pour la perfection dansle domaine spirituel, dans la recherche de la vrit scientifiqueou encore pour atteindre une performance sportiveexceptionnelle (12). Les exigences perfectionnistes sontsollicites dans la quasi totalit des activits humaines et ilsemble que le perfectionnisme en plus dtre un attribut positif constitue une condition ncessaire et importante de larussite sociale.

    Finalement, les rsultats dtudes empiriques sur le perfectionnisme supportent lide dune distinction netteentre un perfectionnisme normal ou positif et un perfectionnisme pathologique. Ainsi, Frost et collgues (13)ont utilis 2 chelles de mesures multidimensionnelles du perfectionnisme quils ont administres 553 tudiantsuniversitaires. Lanalyse factorielle des rsultats a permis defaire ressortir 2 facteurs distincts : le premier reflterait unaspect pathologique du perfectionnisme que les auteurs ontappel maladaptif evaluation concerns et le secondcorrespondrait un aspect positif du perfectionnisme appelpositive striving.

    La distinction entre un perfectionnisme normal et un pe rfec tionnisme patho logiqu e nes t pa s seulem en tlexpression dun simple souci de clart conceptuelle. Cettedistinction savre surtout ncessaire dans le but pratiquedtablir les caractristiques cliniques pertinentes quidfinissent le perfectionnisme pathologique et le rendent ainsilobjet lgitime dun intrt psychiatrique.Phnomnologie du perfectionnisme pathologique

    Hollender (9) a donn une premire description cliniquedu perfectionnisme anormal. Ses caractristiques principales pourraient tre rsumes ainsi : 1) le perfectionnisme est unefin en soi. Il a peu voir avec les exigences de la situation. Ilimplique une perturbation du sens de la proportion avec uneattention exagre aux dtails non significatifs;2) inflexibilit, rigidit du comportement perfectionniste qui persiste mme si la situation permet un moindre effort;3) proccupation anxieuse exagre pour les erreurs, lesdfauts possibles; 4) un manque de satisfaction ou de plaisir

    tir du travail effectu. Au contraire, le sentiment frquent enest un doppression sous le fardeau des exigences perfectionnistes et dinsatisfaction permanente quant la performance; 5) productivit diminue et procrastination duesaux impratifs perfectionnistes deffectuer un travailimpeccable; 6) nature idiosyncrasique du perfectionnisme qui peut se manifester dans certaines activits dimportancemineure et tre totalement absent dans dautres domainesimportants.

    Bien que certains auteurs postrieurs ont contribu prciser les caractristiques dj dcrites par Hollender, ils

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    ont apport peu dobservations originales sur la phnomnologie du perfectionnisme. Ainsi, Burns (3)spcifie qu la diffrence du perfectionnisme normal, le perfectionnisme pathologique tablit des standards tellementlevs quils sont high beyond reach or reason (p 34) etdonne lieu la formulation dobjectifs quil savreimpossible datteindre. Il souligne aussi que les individus aux prises avec ce genre de perfectionnisme peroivent leur propre valeur personnelle enti rement en termes de productiv it , performance et rsultats. De son ct,Hamachek (7) parle non seulement de sentimentdinsatisfaction mais aussi danxit, de confusion,dpuisement motionnel, de sentiment de honte et deculpabilit ainsi que de dvalorisation de soi-mme quiseraient tous inhrents au perfectionnisme nvrotique par opposition au perfectionnisme normal.

    Certains auteurs (1,3,17,18) ont identifi des distorsionscognitives en rapport avec le perfectionnisme pathologique :1) pense dichotomique, cest--dire tendance concevoir laralit en termes dentits nettement opposes et polarisesdu type tout ou rien, noir ou blanc, Dieu ou rebut;2) gnralisation excessive qui correspond la tendance considrer la survenue dune erreur ou dun vnementngatif comme une rgle gnrale et qui va forcment serpter et se perptuer; 3) tendance motiver son proprecomportement exclusivement en termes de responsabilits,devoirs, obligations qui finit par une vritable tyrannie des ilfaut. Chaque fois que lobjectif dun il faut nest pasatteint, une autocritique svre est active; 4) contrairement la tendance exagrer les consquences ngatives dun

    comportement moins quimpeccable, la minimisation delessentiel tend sous-estimer limportance dune action oudun vnement. Ainsi, la proccupation pour la finition des petits dtails dun projet peut aller de pair avec uneminimisation de lintrt pour lchance de ce mme projet.

    Un rsum de la phnomnologie du perfectionnisme pathologique par opposit ion aux caractris tiques du perfectionnisme normal est prsent au Tableau I.

    Perfectionnisme pathologique et symptomatologieobsessionnelle-compulsive

    Le perfectionnisme pathologique est souvent considrcomme se rapprochant, et parfois il est mme confondu, avecla symptomatologie obsessionnelle-compulsive tellequobserve dans le TOC. Cela est clairement nonc par Pacht (1) qui identifie le perfectionnisme des ...persistent patterns of obsessive thinking and compulsive behavior... p 389. Dautres auteurs lont aussi reconnu de manire plus

    ou moins explicite en utilisant eux aussi les qualificatifsobsessionnel ou compulsif pour dcrire lescaractristiques du perfectionnisme (2,3,17). De plus, dans leDSM-IV le trouble de personnalit pour lequel le perfectionnisme constitue un critre diagnostique est prcisment celui appel personnalit obsessionnelle-compulsive.

    Plus encore, certains auteurs considrent la sympto-matologie obsessionnelle-compulsive du TOC comme tantune traduction clinique dun perfectionnisme pathologique ouencore le perfectionnisme est vu comme un symptme

    Tableau I

    Critres diffrentiels : Perfectionnisme normal versus pathologique

    Perfectionnisme normal Perfectionnisme pathologiqueStandards dexcellence qui sont personnellement ou humainement possible

    atteindre.Standards dexcellence qui sont personnellement ou humainement impossibles

    atteindre.

    Objectifs qui ont une valeur socioculturelle importante. Objectifs qui conservent une valeur socioculturelle mais qui prsentent dj des lments idiosyncrasiques marqus.

    Sens de la proportion, priorit pour lessentiel sans ngliger limportance des dtails. Sens de la proportion perturb, proccupation excessive pour les dtails audtriment de lessentiel (minimisation de lessentiel).

    Flexibilit (modulation et optimisation) des exigences perfectionnistes selon lecontexte ou limportance de lactivit.

    Inflexibilit, rigidit de la dmarche perfectionniste avec peu ou sans considration pour le contexte ou limportance de lactivit.

    Autocritique et doute raisonnable qui permettent la dtection des erreurs possibleset leur contrle; acceptation de ses propres imperfections.

    Dvaluation svre de soi-mme aux moindres erreurs vcues comme un chec;doute quasi obsessionnel sur la qualit et la finition de la performance; incapacitdaccepter ses limitations.

    Prvalence des motions et des expriences positives (satisfaction, joie, plaisir,estime de soi-mme).

    Prvalence des motions et des expriences ngatives (insatisfaction, anxit, honteet culpabilit, peur excessive de lchec, estime de soi conditionnelle la performance, sensitivit de rejet).

    Pense dialectique rconciliant les antinomies, ouverte lacceptation la fois de

    labsolu et du relatif.

    Pense dichotomique privilgiant les oppositions absolues : tout ou rien, mal ou

    bien, noir ou blanc.Les conventions sociales sont intgres avec la spontanit et le sens du compromis. Les conventions sociales sont vcues comme des impratifs contraignants (tyrann

    des il faut).

    Estimation raliste de la probabilit des vnements ngatifs dans le but de les prvenir.

    Surestimation de la probabilit doccurence des vnements ngatifs et de leur prennit.

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    obsessionnel-compulsif. Ainsi, Straus (19) estime que le perfectionnisme constitue une caractristique fondamentalede lexprience et de la symptomatologie obsessionnelle.Pour sa part, Sorotskin (17) souligne : in classical psychoanalytic theory, perfectionism is viewed as one of thecurrent symptoms of obsessional neurosis (p 565). Destudes rcentes ont amen leurs auteurs des conclusionssemblables. Ainsi, Bouvar et collgues (20) ont administrune liste exhaustive de penses obsdantes un groupe de patients et de sujets normaux. Les rsultats obtenus la suitedune analyse factorielle en composantes principales les ontconduits identifier un premier facteur qui reflterait seloneux la svrit du perfectionnisme (p 352). Dans le mmecourant dides, Jenike (21) estime que certains patientsatteints dun trouble de la personnalit obsessionnelle-compulsive ...may have some obsessions and minor compulsions associated with their perfectionism... (p 341).De manire gnrale, on peut rsumer lopinion des auteurs plus haut cits dans le sens que le perfectionnisme et lasymptomatologie obsessionnelle-compulsive sont des phnomnes cliniques proches voire identiques, lun tantlexpression de lautre ou vice-versa.

    Nous partageons lopinion que la phnomnologie du perfectionnisme pathologique se rapproche de beaucoup de la phnomnologie obsessionnelle-compulsive. Nous ironsmme plus loin en affirmant que les caractristiques du perfectionnisme pathologique non seulement se rapprochentdes symptmes obsessionnels-compulsifs mais peuvent aussitre considrs comme des symptmes mineurs frustes quise manifesteraient plutt au niveau du fonctionnement et ducomportement de la personnalit quau niveau de lasymptomatologie clinique comme telle. Dailleurs, la

    psychiatrie clinique classique et lcole psychanalytique ontlargement soulign la ressemblance et la continuit entresymptmes obsessionnels-compulsifs et traits obsessionnels-compulsifs de la personnalit. De mme, la formulationretenue dans le DSM-IV concernant le perfectionnisme, savoir perfectionnisme qui entrave lachvement des tches(par exemple incapacit dachever un projet due au fait quequelques exigences personnelles trop strictes ne sont pasremplies) fait cho la faon dont les compulsionselles-mmes sont dfinies : comportements rptitifs... performs en rponse dune obsession ou selon des rglesqui doivent tre appliques de faon rigide.

    Cependant, nous insistons sur la ncessit de ne pas

    confondre le perfectionnisme pathologique qui correspond un trait ou une caractristique de la personnalit avec lessymptmes obsessionnels-compulsifs tels que cliniquementretrouvs dans le TOC. Malgr toute la parent, voire lasimilitude clinique, il existe des diffrences fondamentalesentre ces 2 phnomnes cliniques.

    Hollender (9) tait encore le premier trancher net dans cedomaine propice la confusion. En donnant sa descriptionmagistrale des caractristiques du perfectionnisme, il a biensoulign le fait que ...perfectionism and compulsiveness...are distinctly different (p 102). Selon lui, les diffrences

    majeures seraient les suivantes : 1) les symptmesobsessionnels sont inappropris, inadquats et extrmementstyliss tandis que le comportement perfectionniste estgnralement appropri mais port lextrme. Plutt quedtre uniquement ritualis, le rituel tant une fin en soi, le perfectionnisme pathologique est dirig vers un objectif; 2)lobsessionnel en gnral considre ses symptmes commeirrationnels, ce qui nest pas le cas du perfectionniste mmesi parfois celui-ci voudrait tre moins mticuleux; 3) lessymptmes obsessionnels-compulsifs reprsentent uncomportement rptitif tandis que le perfectionnisme a traitsurtout la faon, la qualit avec laquelle les activitsdoivent tre effectues; 4) les symptmes obsessionnels-compulsifs ont rarement ( notre avis jamais) une valeur sociale tandis que le perfectionnisme a souvent une valeur sociale et il peut mme susciter ladmiration.

    Un exemple clinique simple va permettre dillustrer ladistinction entre perfectionnisme pathologique et symptmesobsessionnels-compulsifs. Prenons celui du patient atteintdun TOC dont les symptmes seraient constitus dun douteobsessionnel et de compulsions de vrification. Un tel patient peut bien verrouiller sa porte puis vrifier par un geste de lamain quelle est bien ferme, mais il continue dtre en proie un doute obsessionnel avec des vrifications rptes pouvant durer des heures entires tout en sachant trs bien quela porte est toujours bien ferme et verrouille. un momentdonn, le patient peut se dcider partir, mais une fois dansla rue, toujours en proie au doute obsessionnel, il se voit obligde revenir sur ses pas pour vrifier une fois de plus si la porteest bien ferme tout en sachant quil vient de la verrouiller,quil vient de vrifier plus dune fois lexactitude de son gesteet en tant tout fait conscient quune vrification de plus esttout fait inutile, voire absurde. On ne peut en aucune faoninterprter lexprience subjective et le comportementobservable de ce patient en termes dune qute pour la perfection et cela pour la simple raison quune porte une foisverrouille constitue un fait compltement accompli : il estvident que les vrifications compulsionnelles najoutent rienau degr de perfection du verrouillage dune porte djverrouille.

    Lanalyse phnomnologique du doute obsessionnel par rapport au doute normal permet de saisir encore mieux toutela diffrence entre symptmes obsessionnels-compulsifs et perfectionnisme pathologique. Le doute normal est uneexprience subjective qui a une valeur pistmologique : ilreflte un tat psychologique dincertitude face un manquede connaissances, de savoir sur un sujet quelconque. Par consquent le doute normal suscite une qute pour le savoir,une recherche de la vrit, soit par des moyens intellectuels,soit par un comportement de vrification. En contraste, ledoute obsessionnel est priv de toute valeur pistmologique,car il est prsent et continue tre prsent en parallle et contrelvidence dune connaissance ou dun savoir dj acquis.Cest l toute labsurdit du symptme obsessionnel : le patient continue de douter tout en sachant quil na aucuneraison de le faire, tout en sachant que ses gestes ont t

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    parfaitement corrects, tout en tant capable de se les rappeler et mme de les visualiser. Autrement dit, le doute obses-

    sionnel est essentiellement une contestation de lvidence. Ilsavre impntrable pour toute comprhension empathiqueet cest dans ce sens que Jaspers (22) faisait remarquer que lesymptme obsessionnel-compulsif est un phnomneultime; il nest plus accessible des analyses ou desinterprtations ultrieures comme dailleurs ne le sont pluslide dlirante primaire, lhallucination auditive ou encorelaffaiblissement intellectuel et la perte de la mmoire du patient atteint de dmence.

    Si nous devons rsumer les critres diffrentiels prsentsdans le Tableau II, nous devons souligner que : le perfectionnisme pathologique, mme sil reprsente un

    phnomne psychopathologique net, conserve encore unevaleur socioculturelle en ce qui concerne ses objectifs, malgrle fait que ces derniers revtent une colorationidiosyncrasique ou excessive. Par contre, les symptmesobsessionnels-compulsifs nont aucune valeur socioculturelleet leur caractre fondamental, quil soit ou non reconnu par le patient, est leur absurdit. On ne peut les interprter en termesde perfectionnisme car les symptmes obsessionnels-compulsifs ne visent pas un tat de perfection : ils ne sont quele produit dune contrainte subjective, dun tic mental, etconstituent une fin en soi. Sil fallait leur trouver un objectif,la correcte formulation de celui-ci serait : atteindrelimpossible. Malheureusement, quand ils tentent de formuler

    cette exprience psychopathologique et la rendre compr-hensible et justifie, les patients, et mme certains cliniciens,commettent un abus terminologique en dcrivant lessymptmes obsessionnels-compulsifs en termes de perfectionnisme. En fait, dans le cas de la symptomatologieobsessionnelle-compulsive, il ne sagit pas dune recherchede la perfection ou de lidal mais dune recherche delimpossible qui runit dans labsurdit la fois le grandioseet le ridicule. La dclaration dun patient de Pierre Janet (23)illustre bien ce point : Jaimerais mieux ne pas uriner du toutque de ne pas uriner dans la perfection.

    Facteurs tiologiques

    La majorit des auteurs ont largement soulignlimportance de lducation familiale pour le dveloppementdun perfectionnisme pathologique (1,2,3,7,9). Dans cetteoptique, celui-ci correspondrait un style cognitif etcomportemental appris par lenfant qui se donneraitinlassablement des objectifs perfectionnistes pour satisfaireaux exigences trop svres de ses parents. Hamachek (7) aidentifi 2 types dattitudes parentales susceptiblesdengendrer, son avis, le perfectionnisme nvrotique. Le premier type est labsence dapprobation ou parfo islapprobation inconsistante des performances de lenfant dela part de ses parents. Cela priverait lenfant de lopportunitde comparer ses performances avec les demandes exiges etentranerait un tat de doute et dincertitude en ce quiconcerne le dilemme essentiel de lattitude perfectionniste :combien une chose bien faite est effectivement bien faite. Ledeuxime type dattitude parentale perturbante seraitlapprobation conditionnelle. Dans ce cas, lenfant apprendquil nest pas accept et aim pour lui-mme et tel quil est,mais quil peut tre accept et aim condition davoir des performances impeccables. Par consquent, la performancecomme telle est surinvestie et la personne elle-mme, au lieude se considrer comme ayant une valeur en soi, apprend sevaloriser juste en fonction de ses performances.

    Outre les influences familiales prcoces, dautres facteurstiologiques ont t voqus mais de manire succincte et plutt occasionnelle. Hollender (9) qui estime que le perfectionnisme peut tre appris note aussi que le sujet idal pour le dveloppement du perfectionnisme est lenfantsensitif qui est trs inscure (p 97). Cependant, il ne se prononce pas sur les origines de ce sentiment dinscurit etde sensitivit de base. Bno (24) est plus explicite. Tout ensoulignant limportance de latmosphre familialehypermorale dans laquelle baigne lenfant et les apportsmoraux, religieux et autres de la socit, il soulignelimportance dun lment subjectif dispositionnel, ou dunfacteur traumato-rceptif essentiel de base. Il sagit doncdune vulnrabilit particulire qui fait de sorte que lenfant

    Tableau II

    Critres diffrentiels : TOC (symptmes) versus perfectionnisme pathologique (traite de personnalit )

    Symptmes obsessionnels-compulsifs Perfectionnisme pathologiqueAbsence de valeur socioculturelle : absurdit objective des symptmes qui

    prsentent un caractre idiosyncrasique, magique ou une fin en soi.Prsence dune valeur socioculturelle de lactivit perfectionniste malgr les

    lments idiosyncrasiques ou excessifs des objectifs ou des moyens.

    Exprience de contrainte subjective face aux symtmes, contraire et plus forte que la volont personnelle (go-dystonique).

    Sentiment excessif dobligation, de devoir ou de responsabilit mais sans exprience subjective de contrainte (go-syntonique).

    Autocritique face labsurdit des symptmes, ou tout le moins, prsence la fois dune autocritique qui coexiste avec une adhrence aux ides obsessionnelles.

    La justification que le sujet donne son comportement perfectionniste est nettementsuprieure aux lments autocritiques possibles.

    Incommensurabilit entre la trivialit des tches et lvidence de leur accomplissement dune part et la rptition continuelle du comportement symptomatique.

    Disproportion moins marque entre limportance et la complexit des tches, dune part, et linvestissement perfectionniste; la disproportion observe est la limitede ce qui est encore justifiable.

    Leffort de rsister aux symptmes provoque une nette angoisse souvent intolrable.

    La rsistance aux exigences perfectionnistes est rare. Au contraire, cest lventualit de manquer ces exigences qui suscite une anxit.

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    attribue aux rgles et aux principes qui lui sont enseigns unerigueur extrme que na pas recherch lducateur (p 19).Plus que cela, Bno estime que cette disposition pourrait elleseule tre suffisante pour engendrer des caractristiques perfectionnistes mme en labsence de toute pression en cesens de la part du milieu familial.

    Finalement Burns (3) qui croit galement que le perfectionnisme peut tre appris par lenfant signale quandmme lexistence de 3 composantes tiologiques possibles :1) facteurs gntiques, 2) facteurs dducation familiale,3) facteurs culturels, ces derniers se refltant dans la doctrinereligieuse, la publicit, la littrature, le systme dducationet mme dans les clichs du langage courant.

    Aucune de ces hypothses tiologiques na t teste defaon scientifique. notre avis, le rle des facteurs culturelset familiaux dans le dveloppement du perfectionnisme estincontestable, mais cela serait valable surtout pour ladimension normale du perfectionnisme. En effet, le perfectionnisme normal constitue une exigence culturellevidente. La civilisation humaine et la socit moderne sontdomines par les impratifs du perfectionnisme commencer par les efforts incessants pour atteindre des technologies de plus en plus sophistiques et performantes pour arriver ladevise des Jeux Olympiques : Altius, Citius, Fortius. Danscette optique, le message vanglique Soyez parfaits commevotre Pre cleste est parfait (5:48) semble avoir t comprisnon seulement dans le sens moral mais dans toutes lessignifications possibles.

    Cependant, quelle que soit limportance de la pressionculturelle et des influences familiales, notre avis, elles ne peuven t el les seules expliquer le phnomne du perfectionnisme pathologique. Pour le dveloppement de cedernier, la prsence dun facteur de vulnrabilit de natureneurobiologique parat indispensable. Bien que tous les phnomnes cliniques empruntent, dans une certaine mesure,leur contenu dans la culture humaine, lapprentissage etlenvironnement immdiat, aucun phnomne psych-opathologique ne peut tre le produit dun simpleapprentissage: on ne peut pas apprendre dentendre des voix,davoir des hallucinations visuelles, de devenir maniaque oudment, ou encore de faire des attaques de paniquespontanes. Nos considrations tiologiques sont rsumes la Figure 1.

    Dans le perfectionnisme normal, comme dans tous les phnomnes psychologiques normaux, on retrouverait unecontribution gale des facteurs culturels et des facteursneurobiologiques. En ce qui concerne les phnomnes psychopathologiques, la contribution tiologique des facteursneurobiologiques devient prdominante au fur et mesureque saccentue la gravit de la pathologie considre. De ce point de vue, le modle tiologique biopsychosocial serait concevoir plus justement en termes de gradient biopsych-osocial des divers facteurs impliqus dans le perfectionnismenormal, le perfectionnisme pathologique et le troubleobsessionnel-compulsif.

    Considrations thrapeutiques

    Cest surtout lapproche psychothrapeutiquedorientation cognitivo-comportementale qui a t privilgiedans le traitement du perfectionnisme pathologique.Lintervention vise identifier et confronter les distorsionscognitives sous-jacentes au comportement perfectionniste. Ilsagit en effet de dmystifier le systme des valeurs du sujetatteint dun perfectionnisme pathologique en le contrastantavec celui des valeurs authentiques dun perfectionnismenormal (voir Tableau I).

    En ralit, quelques auteurs seulement ont labor sur lesapproches thrapeutiques possibles. Ainsi, Hamachek (7) propose simplement aux patients de concentrer leur penchant perfectionniste dans seulement 1 ou 2 activits slectionnessur la base de leur importance objective, daccepter leurs propres imperfections, de se proposer des buts qui leur sont possibles datteindre et dinvestir dans des activits quilssont capables de pratiquer sans se critiquer. De son ct,Burns (3) croit utile de sensibiliser les patients auxdsavantages et aux cots associs leur perfectionnisme pathologique et de les amener prendre conscience quune performance excellente nest ni ncessaire ni suffisante pour procurer un sentiment de satisfaction. Dans un deuximetemps, il applique de faon plus systmatique les techniquesde restructuration cognitive et comportementale. Finalement,Barrow et More (25) proposent une modalit dinterventionde groupe en soulignant les avantages inhrents ce type dethrapie et en amenant les participants dvelopper desstandards et des buts possibles atteindre, mieux tolrer lanon-atteinte de ces buts, dissocier leur valeur personnelle de

    Figure 1. tiologie et gradient bio-psycho-social.

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    leurs performances. Il est noter quaucune tude contrlesur lefficacit de ces approches na t publie.

    Une deuxime approche thrapeutique possible pourraittre dordre psychopharmacologique. Rcemment on aconstat que le traitement mdicamenteux efficace des

    symptmes obsessionnels-compulsifs amne galement uneattnuation significative de certains traits de personnalit ycompris le perfectionnisme (Mavissakalian et collgues (26),Ricciardi et collgues (27). De son ct, Kramer (28) rapportedes observations anecdotiques de patients qui ont vu leur perfectionnisme excessif et handicapant se temprer la suitedun traitement au Prozac (le cas de Julia, en partie celui deTess). Par contre, dautres auteurs ont dmontr que le perfectionnisme excessif des patientes atteintes danorexienerveuse tait une caractristique constante qui ne changeait pas avec le traitement et le regain du poids normal (29).

    Notre exprience clinique avec les antidpresseurssrotoninergiques doses petites ou moyennes (Prozac 20

    40 mg die, Luvox 50 100 mg die, Anafranil 50 150 mgdie) dmontre aussi une certaine efficacit de ce traitementchez des patients atteints dun perfectionnisme pathologique.Tout comme chez les patients souffrant dun TOC, cetraitement enlve le sentiment de contrainte subjective dagir sous la tyrannie des il faut et de ce fait diminue la rigiditde leurs cognitions et de leur comportement. Par consquent,ces patients deviennent plus accessibles un travail derestructuration cognitive et comportementale.

    Conclusion

    Lexprience clinique quotidienne et des tudesempiriques montrent que le perfectionnisme est reli unlarge ventail de troubles psychiatriques et physiques, des problmes majeurs au niveau des relations interpersonnellesainsi qu une baisse du potentiel de ralisation et de productivit individuelle. Limportance clinique du perfectionnisme fut reconnue par lintroduction de ce dernier dans le discours et les classifications psychiatriquesmodernes. Cependant, la phnomnologie et le concept mmedu perfectionnisme ont suscit trs peu lattention des psychiatres.

    Nous insistons sur la distinction entre un perfectionnismenormal et un perfectionnisme pathologique. Nous avonsrsum les critres diffrentiels entre ces 2 types de perfectionnisme en montrant que les caractristiquesinappropries et handicapantes de ce dernier le rendent sujetlgitime de lintrt psychiatrique. Nous insistons aussi sur ladistinction clinique entre un perfectionnisme pathologiquedune part et la symptomatologie obsessionnelle-compulsivetelle que retrouve dans le TOC dautre part. Lessentiel descritres diffrentiels proposs se rsume dans labsence detoute valeur socioculturelle des symptmes obsessionnels-compulsifs tandis que cette valeur serait encore percevabledans le comportement perfectionniste. En mme temps, noussommes conscients quon peut facilement conceptualiser les3 phnomnes en question, savoir le perfectionnismenormal, le perfectionnisme pathologique et la symptom-

    atologie obsessionnelle-compulsive comme situs sur uncontinuum de svrit avec toutes sortes dtats intermd-iaires ou de formes de passage possibles.

    Tout comme dans nimporte quel autre domaine de la psychopathologie, les 2 approches appliques----catgorielleet dimensionnelle----loin dtre antagonistes sont tout faitcomplmentaires. Cette double vision de la phnomnologie psychopathologique en termes la fois de catgoriesdistinctes et de continuum dimensionnel peut seulementcontribuer enrichir et raffiner le jugement clinique.

    En ce qui concerne les facteurs tiologiques impliqusdans la formation du perfectionnisme, il est clair que lacivilisation et la culture humaine exercent une forte pression perfectionniste sur tous les membres de la socit et entranentla formation dun perfectionnisme dintensit variable chezune proportion importante de la population, surtout celle quivise la russite sociale. Cependant, nous estimons que cette pression culturelle, elle seule, ne peut expliquer la survenuedun perfectionnisme pathologique. Pour le dveloppementde ce dernier, la prsence dune vulnrabilit neurobiologiqueapparente ou identique celle responsable pour ledveloppement du TOC nous parat indispensable. Cettevulnrabilit se traduirait par une rceptivit excessive ouidiosyncrasique aux influences culturelles susceptiblesdengendrer des attitudes et des comportements perfection-nistes. Sur le plan thrapeutique, les approches cognitives etcomportementales ainsi que le traitement avec desantidpresseurs srotoninergiques doses modres peuventsavrer efficaces mais aucune tude contrle nest encoredisponible ce sujet.

    Il demeure que si la phnomnologie du perfectionnismedans ses manifestations normales et pathologiques semble pouvoir tre bien cerne, les considrations dordretiologique et thrapeutique restent de nature hypothtique.Pourtant, le phnomne intriguant du perfectionnisme qui sesitue au carrefour du culturel et du biologique, du normal etdu pathologique, du positif et du ngatif au point de vue valeur sociale, ncessite pleinement une investigation systmatiqueet rigoureuse.

    Implications cliniques

    Clarifier le concept et la phnomnologie du perfectionnisme.

    tablir une distinction entre le perfectionnisme normale et pathologique. Distinguer le perfectionnisme pathologique des symptmes

    obsessionnels-compulsifs.

    Limitations

    La conceptualisation du perfectionnisme telle que propose doittre valide.

    Les approches thrapeutiques discutes demeurent empiriques. La relation entre le perfectionnisme et la dpression na pas t

    aborde.

    juin 1996 Le perfectionnisme 297

  • 8/12/2019 Le perfectionnisme : Aspects conceptuels et cliniques

    8/8

    Remerciements

    Nous remercions Dr Franois Borgeat et Dr Rjean Fontaine quiont pris connaissance dune version antrieure de cet article et dontles suggestions et le support nous ont t trs utiles.

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    Abstract

    Objective: Study of the concept of perfectionism and its phenomenology, etiology, and treatment.

    M ethods: Review of the literature, phenomenological, and clinical analyses.

    Results: The International Classification of Diseases introduced the notion of perfectionism into psychiatricdiscourse in 1977. In DSM-III, DSM-III-R, and DSM-IV, perfectionism is a diagnostic criterion of obsessive-com-

    pulsive disorder, but has never been defined in the psychiatric literature. We differentiate normal perfectionismand pathological perfectionism, which is of some psychiatric interest: normal perfectionism is manifested according to the aptness of the target and its sociocultural value, and is therefore selective and flexible, whereas pathological perfectionism is the compulsive pursuit of a performance level not required by the circumstances and idiosyncratic in nature. Its symptomatology may resemble that of obsessive-compulsive disorder, but is actuallyquite different: whereas obsessive-compulsive symptoms are absurd and the product of ego-dystonic compulsion, pathological perfectionism is experienced as a personal obligation, and retain an identifiable cultural objective.

    Conclusions: The phenomenology of the normal and abnormal manifestations of perfectionism is well defined.While pathological perfectionism and obsessive-compulsive disorder are similar and may even share a commonetiology, they should be considered 2 distinct clinical entities. The therapeutic approaches to pathological perfectionism remain empirical.

    298 La Revue canadienne de psychiatrie vol 41, no 5