La Russie d'Aujourd'hui

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Ce supplément de huit pages est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta (Russie), qui assume l’entière responsabilité de son contenu Distribué avec Publié en coordination avec The Daily Telegraph, The New York Times, The Economic Times et d’autres grands quotidiens internationaux Vendredi 24 mai 2013 Le prochain numéro Le Mariinsky nouvelle formule Le célèbre théâtre lyrique de St-Pétersbourg s’est doté d’un nouvel espace culturel digne des ambitions de la ville. P. 8 Produit de Russia Beyond the Headlines Bacchus au bord de la mer Noire SUITE EN PAGE 4 SUITE EN PAGE 3 PAUL DUVERNET LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI Un nouveau cosmodrome, un nouveau lanceur super lourd, des missions vers la Lune et Mars, le renouveau de l’explora- tion interstellaire : tout un pro- gramme jusqu’en 2030 et plus. Le cosmos remet les ambitions en orbite Espace L’agence spatiale russe dévoile un nouveau calendrier et de grands projets L’agence spatiale russe (Roscos- mos) se frotte les mains devant sa nouvelle manne budgétaire. Le Kremlin parle de nouveau de conquête spatiale, pour faire rêver des Russes nostalgiques des épopées gagariniennes. Le dé- coupage des ambitions spatiales s’articule autour de quatre échéances : 2015, 2020, 2030 et au-delà. Impossible de bâtir une stra- tégie spatiale indépendante sans disposer de ses propres lanceurs. Il s’agit du sacro-saint « accès à l’espace ». C’est pourquoi la Rus- sie ambitionne de mettre au point une nouvelle famille de lanceurs sous le nom générique d’Angara. Mais ce n’est pas pour demain. La conception d’un véhicule pour l’espace requiert des moyens technologiques et financiers très lourds. C’est pourquoi les fameux lanceurs Proton, Soyouz et Zenit, qui ont fait preuve de leur ro- bustesse pour un coût raison- nable, continueront à décoller depuis Baïkonour. La dernière feuille de route publiée par Ros- cosmos le 29 avril dernier sti- pule que d’ici à 2015, le futur lanceur lourd Angara aura son pas de tir au cosmodrome mili- taire de Plessetsk, dans le Grand Nord russe. Un pas de tir doit aussi être construit sur le tout nouveau cosmodrome de Vos- totchny, dans l’Extrême-Orient russe. La communauté des ex- perts reste très sceptique sur ce calendrier, jugé trop serré. À l’horizon 2020, Vostotchny sera élargi pour accueillir à son tour le lanceur lourd Angara 5, ainsi que des vols habités. PAGE 5 Arkhanguelsk, l’une des villes les plus septen- trionales de la Russie, mise sur l’Arctique pour attirer les touristes. La première année du troi- sième mandat a vu le pré- sident, hostile aux conces- sions, mobiliser les forces conservatrices en province. Poutine, un an après PAGE 2 Porte du Nord BENJAMIN HUTTER LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI Aux heures de pointe, 300 km de bouchons paralysent la ca- pitale et le métro est bondé. Pistes cyclables, zones piéton- nes et réorganisation des trans- ports publics sont à l’étude. Désengorger Moscou : grands et petits remèdes Transports Défi pour les pouvoirs publics sidentiels n’arrangent pas la situation (lors d’un entretien ac- cordé à la chaîne NTV après son investiture en mai 2012) : « Je regrette et présente mes excuses à ceux à qui nous causons des inconvénients. À vrai dire, ça me chagrine mais je dois tra- vailler », avait indiqué le pré- sident avant d’ajouter que les rues de la capitale russe n’étaient pas prévues pour un si gros vo- lume de véhicules. Moscou et son oblast comptent près de 20 millions d’habitants - soit deux fois plus que l’agglo- mération parisienne. Cette po- pulation se déplace : chaque jour, le métro moscovite ac- cueille neuf millions de passa- gers, selon le site officiel du ré- seau. Certaines stations, comme Vykhino ou Kitai-Gorod, voient passer quotidiennement jusqu’à 150 000 personnes. C’est le taux de fréquentation le plus élevé du monde. En ce qui concerne le réseau routier, le ministère du Trans- port régional a recensé 53 zones d’engorgement pendant les heures de pointe, qui forment à chaque fois près de 300 km de bouchons et des embouteillages à n’en plus finir. Vladimir Pou- tine lui-même a cru bon de s’ex- cuser du fait que ses convois pré- Sans jambes, avec le cœur Syrie : Moscou bouge-t-il ? PAGE 3 PAGE 6 SOCIÉTÉ Comment le photographe de Saint-Pétersbourg Sergueï Alexandrov, amputé des deux jambes suite à un accident de montagne, a remporté le bronze aux championnats de Russie de ski paralympique. Le politologue Andreï Ilyashen- ko se penche sur la prochaine conférence à Genève et s’inter- roge sur l’évolution possible de la position du Kremlin. OPINIONS SUITE EN PAGE 7 Le pays de la vodka peut aussi produire du bon vin. Les terres bordant la mer Noire pos- sèdent les vertus nécessaires, notamment à la production de très bons vins blancs mous- seux, et le climat s’y prête. Le savoir-faire est limité, mais des viticulteurs importent les bonnes techniques, et des in- vestisseurs étrangers prennent le risque. Reste à convaincre le consommateur, mais aus- si les pouvoirs publics, qui tardent à prendre des mesures incitatives. Dans notre dos- sier sur la viticulture en Rus- sie, nous traçons un état des lieux de la production actuelle et revenons un peu en arrière sur l’évolution du goût et l’in- troduction du vin auprès des masses prolétariennes, un breuvage jusqu’alors réservé à une élite. Aujourd’hui, le vin produit en Russie a mauvaise presse par rapport aux crus d’importation. Mais une expé- rience réussie de viticulture à la française prouve que le po- tentiel russe existe. ITAR-TASS MIKHAIL MORDASOV AP SERVICE DE PRESSE 10 juillet LORI/LEGION MEDIA REUTERS AP

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La Russie d'Aujourd'hui est une source d'informations politiques, économiques et culturelles internationalement reconnue. Elle propose une couverture médiatique réalisée sur le terrain par des journalistes possédant une connaissance en profondeur du pays, ainsi que des analystes et un vaste éventail d'opinions sur les événements actuels.

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Page 1: La Russie d'Aujourd'hui

Ce supplément de huit pages est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta (Russie), qui assume l’entière responsabilité de son contenu

Distribué avec

Publié en coordination avec The Daily Telegraph, The New York Times, The Economic Times et d’autres grands quotidiens internationaux

Vendredi 24 mai 2013

Le prochain numéro

Le Mariinsky nouvelle formule

Le célèbre théâtre lyrique de St-Pétersbourg s’est doté d’un nouvel espace culturel digne des ambitions de la ville.P. 8

Produit de Russia Beyond the Headlines

Bacchus au bord de la mer Noire

SUITE EN PAGE 4

SUITE EN PAGE 3

PAUL DUVERNETLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Un nouveau cosmodrome, un

nouveau lanceur super lourd,

des missions vers la Lune et

Mars, le renouveau de l’explora-

tion interstellaire : tout un pro-

gramme jusqu’en 2030 et plus.

Le cosmos remet les ambitions en orbite

Espace L’agence spatiale russe dévoile un nouveau calendrier et de grands projets

L’agence spatiale russe (Roscos-mos) se frotte les mains devant sa nouvelle manne budgétaire. Le Kremlin parle de nouveau de conquête spatiale, pour faire rêver des Russes nostalgiques des épopées gagariniennes. Le dé-coupage des ambitions spatiales s’articule autour de quatre échéances : 2015, 2020, 2030 et au-delà.

Impossible de bâtir une stra-tégie spatiale indépendante sans disposer de ses propres lanceurs. Il s’agit du sacro-saint « accès à

l’espace ». C’est pourquoi la Rus-sie ambitionne de mettre au point une nouvelle famille de lanceurs sous le nom générique d’Angara. Mais ce n’est pas pour demain. La conception d’un véhicule pour l’espace requiert des moyens technologiques et fi nanciers très lourds. C’est pourquoi les fameux lanceurs Proton, Soyouz et Zenit, qui ont fait preuve de leur ro-bustesse pour un coût raison-nable, continueront à décoller depuis Baïkonour. La dernière feuille de route publiée par Ros-cosmos le 29 avril dernier sti-pule que d’ici à 2015, le futur lanceur lourd Angara aura son pas de tir au cosmodrome mili-taire de Plessetsk, dans le Grand Nord russe. Un pas de tir doit aussi être construit sur le tout nouveau cosmodrome de Vos-totchny, dans l’Extrême-Orient russe. La communauté des ex-perts reste très sceptique sur ce calendrier, jugé trop serré.

À l’horizon 2020, Vostotchny sera élargi pour accueillir à son tour le lanceur lourd Angara 5, ainsi que des vols habités.

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Arkhanguelsk, l’une des villes les plus septen-trionales de la Russie, mise sur l’Arctique pour attirer les touristes.

La première année du troi-sième mandat a vu le pré-sident, hostile aux conces-sions, mobiliser les forces conservatrices en province.

Poutine, un an après

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Porte du Nord

BENJAMIN HUTTERLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Aux heures de pointe, 300 km

de bouchons paralysent la ca-

pitale et le métro est bondé.

Pistes cyclables, zones piéton-

nes et réorganisation des trans-

ports publics sont à l’étude.

Désengorger Moscou : grands et petits remèdes

Transports Défi pour les pouvoirs publics

sidentiels n’arrangent pas la situation (lors d’un entretien ac-cordé à la chaîne NTV après son investiture en mai 2012) : « Je regrette et présente mes excuses à ceux à qui nous causons des inconvénients. À vrai dire, ça me chagrine mais je dois tra-vailler », avait indiqué le pré-sident avant d’ajouter que les rues de la capitale russe n’étaient pas prévues pour un si gros vo-lume de véhicules.

Moscou et son oblast comptent près de 20 millions d’habitants - soit deux fois plus que l’agglo-mération parisienne. Cette po-pulation se déplace : chaque jour, le métro moscovite ac-cueille neuf millions de passa-gers, selon le site officiel du ré-seau. Certaines stations, comme Vykhino ou Kitai-Gorod, voient passer quotidiennement jusqu’à 150 000 personnes. C’est le taux de fréquentation le plus élevé du monde.

En ce qui concerne le réseau routier, le ministère du Trans-port régional a recensé 53 zones d’engorgement pendant les heures de pointe, qui forment à chaque fois près de 300 km de bouchons et des embouteillages à n’en plus fi nir. Vladimir Pou-tine lui-même a cru bon de s’ex-cuser du fait que ses convois pré-

Sans jambes, avec le cœur

Syrie : Moscou bouge-t-il ?

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SOCIÉTÉ

Comment le photographe de Saint-Pétersbourg Sergueï Alexandrov, amputé des deux jambes suite à un accident de montagne, a remporté le bronze aux championnats de Russie de ski paralympique.

Le politologue Andreï Ilyashen-ko se penche sur la prochaine conférence à Genève et s’inter-roge sur l’évolution possible de la position du Kremlin.

OPINIONS

SUITE EN PAGE 7

Le pays de la vodka peut aussi produire du bon vin. Les terres bordant la mer Noire pos-sèdent les vertus nécessaires, notamment à la production de très bons vins blancs mous-seux, et le climat s’y prête. Le savoir-faire est limité, mais des viticulteurs importent les bonnes techniques, et des in-vestisseurs étrangers prennent le risque. Reste à convaincre le consommateur, mais aus-si les pouvoirs publics, qui tardent à prendre des mesures incitatives. Dans notre dos-sier sur la viticulture en Rus-sie, nous traçons un état des lieux de la production actuelle et revenons un peu en arrière sur l’évolution du goût et l’in-troduction du vin auprès des masses prolétariennes, un breuvage jusqu’alors réservé à une élite. Aujourd’hui, le vin produit en Russie a mauvaise presse par rapport aux crus d’importation. Mais une expé-rience réussie de viticulture à la française prouve que le po-tentiel russe existe.

ITAR-TASS

MIKHAIL MORDASOV

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EDITION DE ROSSIYSKAYA GAZETA

DISTRIBUÉE AVEC LE FIGARO Politique

LES SUPPLÉMENTS SPÉCIAUX ET SECTIONS SUR LA RUSSIE SONT PRODUITS ET PUBLIÉS PAR RUSSIA BEYOND THE HEADLINES, UNE FILLIALE DE ROSSIYSKAYA GAZETA (RUSSIE), DANS LES QUOTIDIENS INTERNATIONAUX: • LE FIGARO, FRANCE • LE SOIR, BELGIQUE• THE DAILY TELEGRAPH, GRANDE BRETAGNE • SÜDDEUTSCHE ZEITUNG, ALLEMAGNE • EL PAÍS, ESPAGNE • LA REPUBBLICA, ITALIE • DUMA, BULGARIE • POLITIKA, GEOPOLITIKA, SERBIE • THE WASHINGTON POST, THE NEW YORK TIMES ET THE WALL STREET JOURNAL, ÉTATS-UNIS • ECONOMIC TIMES, NAVBHARAT TIMES, INDE • MAINICHI SHIMBUN, JAPON • GLOBAL TIMES, CHINE • SOUTH CHINA MORNING POST, CHINE (HONG KONG) • LA NATION, ARGENTINE • FOLHA DE SAO PAOLO, BRÉSIL • EL OBSERVADOR, URUGUAY • SYDNEY MORNING HERALD, THE AGE, AUSTRALIE • ELEUTHEROS TYPOS, GRÈCE • JOONGANG ILBO, CORÉE DU SUD • GULF

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IOULIA PONOMAREVALA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

La cote du président reste posi-

tive malgré une baisse de 8

points sur un an. Vladimir

Poutine a privilégié la fermeté

et les valeurs conservatrices.

Poutine a résolument tourné le dos aux concessions

Bilan Au cours de la première année de son troisième mandat présidentiel, le chef de l’État a consolidé sa base électorale en province

Vladimir Poutine reste l’homme politique le plus populaire du pays, mais les sondages montrent une érosion de son image : son indice de confi ance a diminué de 60% à 52% du-rant la première année de son troisième mandat.

L’année dernière, M. Poutine a mené sa campagne électorale pour la présidentielle dans le contexte de manifestations an-tigouvernementales sans précé-dent. Durant l’année qui a suivi le scrutin, la contestation s’est affaiblie.

Avant la présidentielle, de nombreux analystes prédisaient qu’afin d’amadouer la classe moyenne, Poutine serait contraint d’évoluer et d’adou-cir singulièrement son style de gouvernement. C’est l’inverse qui s’est produit. Les mesures prises par les autorités au cours de l’année passée, sont de plus en plus souvent qualifi ées de ré-pressives par l’opposition.

« Poutine estime que si l’on change, on peut devenir vulné-rable », note Alexeï Makarkine, vice-président du Centre des

Poutine » dans la cathédrale du Christ-Sauveur de Moscou.

Fin 2012, les autorités russes ont fait passer une loi interdisant l’adoption des enfants russes par les Américains. Elles ont en outre durci les lois sur les manifesta-tions et lancé une campagne contre la « propagande de l’ho-mosexualité auprès des mineurs ».

Ce n’est pas tout. Des mani-festations anti-gouvernementales organisées le 6 mai 2012, juste avant l’investiture de Poutine, ont dégénéré en émeutes ; 27 per-sonnes, arrêtées par la police ce jour-là et soupçonnées d’avoir participé aux affrontements avec les policiers, comparaissent ac-tuellement devant la justice. Alexeï Navalny, un des leaders de l’opposition anti-Poutine, a quant à lui été accusé de détour-nement de fonds et risque plu-sieurs années de prison. Son pro-cès très médiatisé défraye actuellement la chronique et une manifestation de soutien à son égard a réuni des milliers de per-sonnes dans le centre de Moscou le 6 mai dernier. Toutes les Orga-nisations non gouvernementales russes qui interviennent dans la sphère politique et bénéficient d’un fi nancement étranger ont été obligées par le gouvernement de se déclarer « agents de l’étran-ger », expression synonyme d’« es-pion » en russe.

Parallèlement, M. Poutine a dé-ployé sa nouvelle arme électorale : le Front populaire russe. Fondé en mai 2011 avec la participation du parti au pouvoir Russie unie, cette organisation réunit actuel-lement plus de 1 800 organisa-tions communautaires. Sur 238 sièges obtenus par Russie unie aux élections à la Douma (Chambre basse du parlement) en 2011, 80 ont été octroyés à ses

membres. « Le Front populaire réunit des « personnalités de ter-rain » : des médecins, des ensei-gnants, des ouvriers mineurs », analyse la sociologue Olga Krych-tanovskaïa. « Poutine a décidé de consolider l’ensemble des forces qui lui sont alliées », souligne pour sa part Alexeï Makarkine.

D’après les sociologues, les « al-liés » de Poutine, son électorat de base, sont essentiellement consti-tués des résidents des petites villes et villages russes, ayant une édu-cation secondaire et n’utilisant pas Internet.

Dans le contexte des nombreux scandales où trempent des membres du parti au pouvoir Rus-sie unie, dont des actifs secrets à l’étranger ont été récemment ré-vélés par les médias, M. Poutine a décidé de lancer une « patrio-tisation de l’élite ». Ainsi, les res-ponsables russes ont été obligés de se débarrasser de comptes ban-caires à l’étranger avant le 1er juillet. Pourtant, les fonctionnaires sont encore autorisés à détenir de l’immobilier hors la Russie.

« Les mesures adoptées actuel-lement par Poutine ont pour ob-jectif de forcer les fonctionnaires à rapatrier leurs actifs », dit Olga Krychtanovskaïa. « On leur pro-pose de choisir : soit tu sers ton pays, soit tu quittes ton poste ».

L’année passée, le président Poutine a signé une loi obligeant les fonctionnaires à dévoiler leurs dépenses et les dépenses de leurs familles. « Quant aux tentatives des autorités de lutter contre la corruption, rien n’a réellement changé, estime Elena Panfi lova, directrice du Centre des initia-tives et recherches anti-corrup-tion de Transparency Internatio-nal Russia : au niveau local, nous pouvons agir, mais pas contre la grande corruption ».

ANDREÏ KOLESNIKOVKOMMERSANT

Le 14 mai, le président russe a

reçu le Premier ministre

israélien. Au centre des pourpar-

lers : les systèmes de missiles

antiaériens S-300 que Moscou

doit fournir à Bassar el-Assad.

Des missiles pour Damas : Moscou insiste malgré Israël

International Vladimir Poutine et Benjamin Netanyahu évoquent la livraison des S-300

chose entre les lignes des propos de son interlocuteur. M.Netanya-hu a attiré l’attention sur la paix et la tranquillité qui règnent à Sotchi (en effet, l’itinéraire em-prunté par le cortège du chef du gouvernement israélien avait été fermé à la circulation bien avant son arrivée) et a suggéré une pro-chaine rencontre dans la station balnéaire israélienne d’Eilat, où l’on a découvert de façon inat-tendue que Vladimir Poutine s’était déjà rendu - un détail bio-graphique jusqu’alors inconnu.

Les négociations ont duré plus de deux heures. MM. Poutine et Netanyahu n’ont pas répondu aux questions des journalistes, se limitant à des déclarations convenues. Le premier a déclaré que la Russie et Israël « avaient une compréhension commune : la poursuite du confl it en Syrie est lourde de conséquences dé-sastreuses ». Cependant, à en juger par le visage de Benjamin Netanyahu, le président russe aurait pu se passer de le souli-gner : c’était clair.

Fait intéressant, cependant, Vladimir Poutine a essayé de pro-

Benjamin Netanyahu s’est rendu à Sotchi pour un court séjour à l’invitation de Vladimir Poutine. On ne pouvait donc aucunement affirmer que le Premier ministre israélien était venu persuader Vladimir Poutine de renoncer à fournir à la Syrie les quatre sys-tèmes de missiles antiaériens S-300 au titre d’un contrat signé en 2010. Tout se passait plutôt comme si M. Poutine avait invi-té Benjamin Netanyahu pour le persuader de se réconcilier avec l’idée de ces livraisons. Il avait peu de chances d’y parvenir.

Le Premier ministre israélien a dès le début de la rencontre accueilli avec une tension visible chaque mot protocolaire pronon-cé par le président russe, sans en comprendre un seul. Il sem-blait qu’il voulait lire quelque

poser une position commune de la Russie et d’Israël sur la Syrie selon la ligne suivante : si la poursuite du confl it est lourde de conséquences, il faut y mettre fi n, et un cessez-le-feu dans la situation actuelle est favorable

au président syrien en exercice (avec plus ou moins de succès), Bachar el-Assad. Benjamin Ne-tanyahu semblait bien plus pré-occupé par la question des S-300 (équivalent des « Patriots » amé-ricains). L’adjoint du président russe Youri Ouchakov a reconnu que le sujet des S-300 avait « ef-fectivement été discuté ». Selon les informations dont on dispose, la position de M. Poutine n’a pas changé : la livraison des systèmes

V. Poutine (de dos) et B. Netanyahu à Sotchi.

Une cote en légère baisseLA COTE DE POPULARITÉ DE VLADIMIR

POUTINE A RECULÉ SUR UN AN, MAIS

RESTE À UN NIVEAU QU’ENVIERAIT

FRANÇOIS HOLLANDE EN FRANCE.

SONDAGE

technologies politiques. « Il ne veut pas faire de concessions par crainte d’être contraint d’en faire de nouvelles ».

La première année du troisième mandat de Poutine a été riche en

événements médiatisés. Pour preuve, le procès du groupe Pussy Riot, dont trois participantes ont été condamnées à deux ans de prison pour avoir interprété leur chanson « Vierge Marie, chasse

Cœur de l’électorat poutinien : les provin-ciaux qui n’ont pas fré-quenté l’université et n’utilisent pas Internet

S-300 à la Syrie est en quelque sorte une chose acquise.

« Israël, a dit Benjamin Neta-nyahu, est parvenue à un accord de paix avec deux de ses voisins. Que Dieu nous aide à en obte-nir avec les autres. Mais, mal-heureusement, on ne fait la paix qu’avec les forts - avec ceux qui sont en mesure de se défendre ».

Avec les missiles S-300, la Syrie sera visiblement en mesure de se défendre. Cependant, si l’on y regarde de plus près, la posi-tion hostile d’Israël sur le dos-sier des S-300 devrait profi ter à la Russie, même si c’est une pro-position encore mal comprise.Après tout, dès que les S-300 fe-ront leur apparition sur la fron-tière israélienne, ils seront dé-truits par les forces que l’on devine. Cela ne fait aucun doute. Puis la Russie signera un nou-veau contrat pour la livraison de nouveaux systèmes.

Et ainsi de suite.Article publié dans

Kommersant

L’hostilité d’Israël aux S-300 devrait profiter à la Russie : il faudrait remplacer les missiles qui seraient détruits

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ALENA REPKINA

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EDITION DE ROSSIYSKAYA GAZETA

DISTRIBUÉE AVEC LE FIGARO Société03

Transport : par tous les moyens« Pour rentrer du travail en voi-ture depuis le métro Park Koul-toury jusqu’à la station Beloruss-kaïa (8 km), le trajet me prend entre 25 minutes… et sept heures ! », témoigne Natalia, 29 ans, journaliste. « Quand je rentre chez moi par Dmitrovskoe chaus-sée, pas un jour ne passe sans qu’au moins un ou deux accidents ponctuent mon trajet », ajoute Anton, 27 ans, chimiste.

Les 620 millions de passagers annuels du bus sont un peu mieux lotis mais leur nombre étant en constante augmentation, la me-nace de l’engorgement plane éga-lement sur ce moyen de transport très utilisé. Les voies de bus spé-ciales sont peu respectées par les automobilistes, en dehors des zones où sont installées des ca-méras de surveillance.

Que faire ? Marier tous les modes de déplacement pour que le transport des Moscovites soit plus fl uide, répond Gamid Bou-galov, chef du département Trans-port de Moscou. À ce sujet, le plan d’action des institutions compé-tentes est aussi ambitieux que le problème est important.

D’ici à la fin de l’année, 190 nœuds de transport « de ni-veau 1 » (ou « hubs ») devraient être créés à Moscou. Il s’agirait d’abord de dégager l’accès des métros et des gares, aujourd’hui obstrué par des boutiques sou-vent illégales, pour aménager des parkings et des espaces verts. La transition entre voiture et trans-port en commun serait ainsi fa-cilitée.

Certaines stations, où plusieurs modes de transport cohabitent, seront également aménagées pour que le transfert s’effectue dans un seul et même bâtiment. Car au-jourd’hui, si l’on veut prendre le train dans l’une des gares desser-vies par le métro Komsomolskaïa par exemple, il faut impérative-ment sortir dans la rue… et re-faire la queue. L’objectif, à l’hori-zon 2020, est de créer 150 à 160 hubs à Moscou. Une ligne de che-min de fer située entre les deux périphériques de Moscou devrait voir le jour en 2015 et faciliter la transition.

SUITE DE LA PREMIÈRE PAGE

Coût de cette première étape : 65 millions de dollars par hub selon Gamid Bougalov ; 325 mil-lions selon Sergueï Pak, directeur du développement des stations ferroviaires.

L’année dernière, plus de 620 millions de passagers ont pris le bus. les autorités ont promis de mettre prochainement en service un millier d’autobus améliorés.

En 2012, les trains régionaux ont convoyé plus de 500 millions

de passagers. Le ministère du Transport annonce que d’ici à 2020, ce chiffre pourrait doubler. De nouvelles voies ferrées sont prévues, sans parler du projet Rex - des trains régionaux directs des-servant les villes les plus impor-tantes de la région.

D’ici à 2030, la construction de 600 km de voies pour tram-ways devrait améliorer la des-serte des banlieues. Le tramway rapide, qui peut transporter 30 000 passagers par heure, permet-tra de désengorger les routes. La première ligne, dont le chantier débutera cette année, reliera la station de métro Krasnog-vardeïskaïa et l’aéroport de Do-modedovo. Le métro, enfi n, conti-nue de s’étendre au-delà du périphérique.

Le vélo-politain  

Les endroits où les cyclistes peuvent rouler confortable-ment restent rares, mais des pro-jets existent de marquage des routes, de règles de circulation et de législation relatives aux cyclistes. Les autorités de Mos-cou comptent avant tout dessi-ner trois pistes cyclables reliant différents quartiers, ainsi que des zones de stationnement pouvant accueillir 2 000 vélos. En 2012, une piste cyclable de 7,5 kilo-mètres a été tracée sur l’avenue Vernadskovo, dans le sud-ouest de Moscou. Cette piste est munie de 12 parkings.

PAULINE NARYCHKINALA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Quatre ans après son accident

de montagne, il remporte le

bronze aux championnats de

Russie de ski paralympique

grâce à des prothèses en

carbone et à une volonté de fer.

La force de caractère supplée celle des jambes perdues

Portrait Après une double amputation, Sergueï Alexandrov remporte une médaille paralympique et offre une belle leçon de vie

Sergueï Alexandrov, 31 ans, est photographe de profession et amateur d’alpinisme. En 2009, il part avec ses amis à la conquête du mont Elbrouz dans le Cau-case du Nord. La piste n’est pas particulièrement dangereuse mais dans un moment d’inatten-tion, il glisse et tombe dans une crevasse sur près de deux km.

À l’arrivée : triple fracture ou-verte des deux jambes. Il attend les secours durant 32 heures in-terminables, s’abandonnant à la douleur pour mieux s’agripper à la vie. Verdict : amputation ti-biale des deux jambes.

Difficile pourtant d’employer le mot handicapé pour décrire ce jeune homme athlétique et charismatique à la démarche as-

La photographie l’a aidé à se re-

construire après le drame.

surée et à la poignée de main ferme. Grand, blond, les yeux clairs et le sourire à pleines dents, il apparaît tel un dieu auréolé d’un halo de lumière.

Il ne se départit pas de son sourire, même pour raconter son drame : « Je savais qu’avec une fracture ouverte, une personne peut tenir pendant une heure et demie-deux heures ; après, au-cune garantie de survie. Moi, j’ai tenu 32 heures. Alors, lorsqu’on m’a annoncé l’amputation, je l’ai pris assez calmement ».

Une fois sorti de l’hôpital, en vrai sportif, il se découvre un se-cond souffle. Cette renaissance lui donne conscience d’un pou-voir, d’une force hors du com-mun, celles de générer l’espoir et de transmettre le positif.

À partir de là, tout s’est passé « comme dans un rêve » et en grande partie grâce aux per-sonnes rencontrées qu’il compare à des anges gardiens. « Je n’avais même pas le temps de formuler ce dont j’avais besoin. Tout se passait si vite ». Comme cet in-

connu venu une première fois faire sa connaissance à l’hôpital et une deuxième fois lui appor-ter la totalité de la somme pour l’achat des prothèses en fi bre de carbone (environ 5 000 euros pour chaque jambe) qui lui ont permis de remarcher.

Ou bien le directeur de la Fé-dération du sport pour les han-

dicapés de Saint-Pétersbourg qui l’a pris sous son aile, qui l’a mo-tivé et a financé ses entraîne-ments et son équipement de ski, sport très coûteux, grâce à quoi il s’est hissé à la 3ème place au championnat paralympique de ski alpin en mars 2013.

Au départ, la rééducation fut une terrible épreuve. « Pour me

déplacer du lit à la cuisine, je suais à grosses gouttes. La dou-leur était extrêmement intense mais le sentiment de bonheur était plus fort. Je suis en vie ! ». Son prothésiste lui répétait constamment : « Supporte tant que tu peux ». Il n’a pas le choix et cela le pousse au dépassement. Au bout de deux semaines, il dé-

cide d’attaquer le travail et part photographier un mariage. Pris par l’action, il en oublie ses bé-quilles. Un mois après, il s’en-traîne déjà à la course. Puis, par le biais de la Fédération de sport pour handicapés, il se tourne vers le ski. Un an plus tard, à force d’entraînements acharnés, il de-vient numéro 6 en Russie.

Aujourd’hui, c’est avec une mé-daille de bronze qu’il revient du championnat de Russie paralym-pique de combiné alpin. Il est ainsi l’un des premiers skieurs à tester les pistes des JO de 2014 à Sotchi. S’il n’est pas dans la sélection olympique officielle, il ne désespère pas de faire partie des quotas supplémentaires et de tenter sa chance aux Jeux pa-ralympiques d’hiver de 2014.

Sergueï est un photographe reconnu qui vit de sa profession. Marié, il est père d’une petite fi lle de 9 mois. Depuis sa chute, et malgré son handicap, il a réussi à gravir les montagnes de Nor-vège, les volcans de la Kamtchat-ka, où il a marché plus de 10 heures avec un sac à dos de plus de 30 kg. Pourquoi courir après la première place ? « Pour pou-voir la partager  », rayonne Alexandre. Actuellement, il suit une formation d’entraîneur pour pouvoir transmettre sa convic-tion : on peut vivre normalement avec n’importe quel handicap et, plus encore, être heureux !

Les efforts porteront sur les infrastructures et chaque mode de transport : train, bus, métro et tramway

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PAUL DUVERNETLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Les constructeurs russes vont

présenter trois avions au salon,

dont deux appareils militaires

jamais montrés en Occident.

Mais le consortium vise aussi le

marché civil des avions de ligne.

Nouvelles perspectives au Salon du Bourget Aéronautique Le consortium russe OAK déploie des moyens inédits pour promouvoir ses avions sur les marchés occidentaux

d’entraînement subsonique est l’un des derniers nés de l’indus-trie militaire russe. Sa silhouette ramassée le rend reconnaissable de très loin. L’appareil se décline dans des versions de chasse lé-gère, d’appui feu et de reconnais-sance. Son coût modeste [autour de 15 millions de dollars, ndlr] le rend accessible à plusieurs armées

deux grands constructeurs déjà bien implantés sur le segment des avions régionaux de 100 places, à savoir le canadien Bom-bardier et le brésilien Embraer.

Une nouvelle maquette du moyen courrier MS-21 élaborée par OAK sera également présen-tée au public du salon. Le gou-vernement russe a en effet confi é au consortium la tâche d’investir le marché civil des avions de ligne aujourd’hui dominé par Boeing et Airbus. OAK est l’acronyme russe pour « Compagnie aéronau-tique unifi ée », qui regroupe les grands noms de l’industrie comme MiG, Iliouchine, Tupolev, Yako-vlev, Beriev, Irkut et Sukhoi. Le consortium appartient en majo-rité au gouvernement et, pour une petite partie, à des actionnaires privés. Pratiquement tous les avi-ons russes actuels, civils ou mili-taires, sont conçus et produits par OAK. Le consortium a produit une centaine d’appareils en 2012 et va porter sa production à 130 cette année, avec une forte crois-sance de la part des avions civils.

La nouvelle fi erté de l’armée de l’air russe, le Su-35, va exécuter un vol de démonstration cette année au Bourget. Ce sera une première mondiale pour cet ap-pareil, qui n’a jamais volé publi-quement à l’étranger. Onze exem-plaires de ce chasseur de quatrième génération équipent déjà l’armée russe, douze sup-plémentaires lui seront livrés cette année et une série distincte de 48 appareils entrera en ser-vice à partir de 2015.

L’autre grande nouveauté russe du Bourget sera le Yak-130. Net-tement moins connu que ses cou-sins venant de chez Sukhoi, le Yak-130 va néanmoins susciter beaucoup d’intérêt parmi les spé-cialistes. Ce biréacteur biplace

veaux contrats pour les avions russes.

Sur le versant civil, le Super-jet 100 de Sukhoi reste l’appa-reil phare sur lequel sont concen-trés l’essentiel des efforts commerciaux d’OAK. Un nou-vel exemplaire effectuera un vol de démonstration au salon. Il s’agit d’un appareil de la série livrée à la compagnie mexicaine Interjet. Le constructeur souligne que l’intérieur a été conçu par la célèbre fi rme italienne Pinin-farina. Une source chez OAK in-dique que le consortium attend beaucoup de la présentation qui sera faite par Interjet de la nou-velle série : « Ils vont expliquer au public du Bourget pourquoi ils ont acheté cet appareil et com-mandé cet intérieur de Pininfa-rina a été réalisé spécialement pour leurs besoins ». Interjet, qui a commandé 20 exemplaires plus 10 en option, est la première grosse compagnie occidentale à avoir opté pour l’avion régional russe. Le Superjet 100 doit faire face à la concurrence féroce de

Le chasseur Su-35 (à gauche) et le biplace d’entraînement Yak-130 (à droite).

OAK place beaucoup d’espoirs dans la pré-sentation du Superjet 100 par son principal client étranger, Interjet

régulières du monde et il est d’ores et déjà opéré par les ar-mées de l’air russe et algérienne, tandis que les négotiations avec plusieurs pays sont en cours.

Ces deux appareils militaires guettent des contrats à l’étran-ger. Andrei Mouraviev, porte-parole d’OAK, laisse entendre que Le Bourget verra de nou-

La conquête spatiale redevient une priorité pour le Kremlin

Au-delà de l’horizon 2030, la Russie table sur l’introduction d’un lanceur dont le premier étage sera réutilisable. Des vols habités seront effectués dans l’or-bite lunaire et la construction d’une base sur la Lune sera en-tamée. Il est aussi question d’éla-borer un lanceur (Angara-100 ou Yenisseï-5) capable d’envoyer entre 130 et 180 tonnes dans l’es-pace pour rendre possible une mission habitée vers mars.

Selon Anatoli Zak, l’élément positif de la nouvelle feuille de route, c’est que « les dirigeants fixent désormais des objectifs pragmatiques et non pas de pres-tige comme ceux hérités de la

Mais l’expert Anatoli Zak note avec malice que la formulation de Roscosmos dans sa feuille de route est volontairement très fl oue et suggère que ces deux der-niers projets ne seront prêts qu’à partir de 2020.

Le développement de la fa-mille Angara, avec un véhicule capable de placer 50 tonnes en orbite basse, va pousser le lan-ceur lourd Proton vers la sortie autour de 2030. À cet horizon également, un véhicule à propul-sion électrique fera la navette entre l’orbite basse terrestre et la future base lunaire.

Les Russes sont en effet associés

au projet européen ExoMars.

SUITE DE LA PREMIÈRE PAGE

EN CHIFFRES

4,5 milliards d’euros, tel est le budget consacré à Roscos-

mos pour 2013. Soit trois fois plus qu’en 2008.

période soviétique ». Ainsi, les vols habités, qui représentaient 58% du fi nancement total, vont être réduits. La hiérarchie donne désormais la priorité aux appli-cations pratiques ; viennent en-suite les missions scientifi ques et en dernier, les vols habités. Toutefois, la décision de se lan-cer dans la construction extrê-

mement onéreuse d’un nouveau cosmodrome (Vostotchny) appa-raît comme politique, « ce qui risque d’être un douloureux et inutile sacrifi ce supplémentaire vu l’absence de fi nancement pour le développement d’un lanceur lourd et vu le passage au second plan des vols habités », remarque Zak.

L’exploration interplanétaire reste un domaine négligé par la Russie, ou du moins repoussé à un lointain futur. L’échec du lan-cement de la sonde Phobos-Grunt en 2011 a jeté un froid durable. La coopération inter-nationale pourrait, si elle s’in-tensifi e, permettre à Roscosmos de revenir plus tôt dans l’explo-ration interplanétaire. Les Russes sont en effet associés au projet européen ExoMars, dont les lan-cements sont prévus en 2016 et 2018. Roscosmos devrait en par-tie prendre le relais de la NASA, qui a renoncé récemment à Exo-Mars.

Sur le versant commercial, la coopération internationale porte déjà ses fruits, comme en té-moignent les lancements de Soyouz depuis le cosmodrome de Kourou en Guyane française. « Européens et Russes sont très complémentaires dans l’espace, affirme un industriel français basé à Moscou. C’est à mon avis dans le segment des satellites que la coopération a le plus de po-tentiel. Les Russes ont une véri-table offre compétitive en la ma-tière », précise cet homme d’affaires qui n’est pas autorisé à être nommément cité. Thales Alenia Space et ISS Reshetnev ont fondé une coentreprise le 28 février 2013 pour concevoir et fabriquer des équipements des-tinés aux satellites de commu-nication russes dans un premier temps, et au marché internatio-nal dans une deuxième étape.

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CLÉMENCE LAROQUELA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Cité pré-polaire située à près de

mille kilomètres à l’est de

Moscou, Arkhanguelsk est

pourtant sur le même fuseau

horaire. Il n’empêche : c’est la

porte d’un autre monde.

Arkhanguelsk, porte du Grand Nord

Voyage Suivez-nous sur les bords de la mer Blanche, dans une ambiance à la fois maritime, polaire et profondément russe

Là-bas, au-delà des bois caré-liens, la vie s’écoule lentement. Fondée en 1584, Arkhanguelsk, qui doit son nom au monastère de l’Archange Michel non loin de là, est restée une ville tradi-tionnelle et historique qui vit ce-pendant avec son temps et cultive un goût pour la musique de jazz. Avant de partir à la découverte du cœur d’Arkhanguelsk, com-mencez par un petit tour dans le marché couvert local. Il se situe derrière le Palais des Sports. En matinée, vous pourrez ressentir le pouls commercial de la ville. C’est l’heure où les étals sont re-couverts de légumes frais, pois-sons et viandes dans une harmo-nie très russe. Poursuivez en arpentant la rue Tchoumbaroya-Loutchinskovo, d’est en ouest. Dans cette rue piétonne, vous pourrez admirer une enfi lade de maisons traditionnelles en bois à

Où se loger L‘hôtel Stolitsa Pomo-ria offre sa suite prési-dentielle pour 226 euros.

Pour les routards, l’auberge de jeunesse "Lomonosov" propose ses lits à partir de 11 euros.

Pour s’y rendreLe vol Paris-Arkhan-guelsk (via Saint-Péters-bourg) dure 8 heures.

Prix moyen du billet : 600 euros. C’est 21 heures de train de Mos-cou à Arkhanguelsk, pour un bil-let entre 65 euros et 160 euros.

INFO

Une économiediversifiéeArkhanguelsk est la plus grande ville et le centre administratif de l’Oblast d’Arkhanguelsk ainsi que du district municipal de Primorsk. Son emplacement privilégié - sur les deux rives de la Dvina septen-trionale et les îles du delta à 30-35 km de l’embouchure du fleuve dans la mer Blanche - lui vaut un climat maritime doux.Aujourd’hui, Arkhanguelsk est un important centre scientifique et industriel du nord-ouest de la Russie. On y trouve des entre-prises forestières, de traitement du bois, de production de cellu-lose et de papier, des sociétés de pêche, des industries microbiolo-giques et des usines de fabrica-tion de machines-outils. C’est aus-si un grand port pétrolier et une zone clé pour le complexe énergé-tique russe. Sa population atteint 355 800 personnes, installées sur un territoire de 300 000 km2.

Une université tournée vers l’Arctique

Restructurée en 2010, l’Univer-sité fédérale (Arctique) du Nord, ou NArFU, a été construite sur les bases de l’Université d’État Tech-nique d’Arkhanguelsk (ASTU). En-viron 17 millions d’euros y ont été investis en 2010 pour défendre les intérêts arctiques de la Rus-sie et créer un campus innovant. « L’objectif clé de NArFU est de protéger les intérêts géopoli-tiques de la Russie en Arctique », indique le recteur Elena Kudrya-shova. Organisé à Arkhanguelsk depuis trois ans, le Forum inter-

national de l’Arctique est un évé-nement majeur qui rassemble des scientifiques du monde entier pour débattre des thématiques actuelles en rapport avec le Grand Nord. NArFU propose à 20 000 étudiants des programmes variés, avec un accent sur l’ingénierie re-lative au gaz et au pétrole, mais aussi sur l’environnement, la bio-technologie et l’ingénierie fores-tière. La région d’Arkhanguelsk est très prometteuse en matière de ressources naturelles : minéraux, pétrole, gaz et bois.

plusieurs étages, typiques de cette région nordique. À mi-chemin, une statue loufoque représentant un homme chevauchant une truite vous interpellera sûrement. Elle représente en réalité Nalim Ma-linytch, un personnage de contes fantastiques russes dont l’auteur est originaire d’Arkhanguelsk. En poursuivant votre chemin, vous arriverez à la Place Lénine. Aux côtés de sa statue qui trône au centre de la place, on se sent par-ticulièrement insignifi ant.

Vous arrivez enfi n sur les quais très bien aménagés de la Dvina. Une belle et agréable promenade s’impose, été comme hiver. En face de vous se trouve alors le port d’Arkhanguelsk, qui fut la seule place maritime russe pour le commerce avec l’Occident, jusqu’à la fondation de Saint-Pétersbourg en 1703.

En plus d’être agréable, la ba-lade sur les quais sera instruc-tive. Plusieurs statues érigées ici et là racontent l’histoire de la ville. Un phoque en marbre rap-pelle la période de la famine du-rant la Grande Guerre patrio-tique (1941-45) où les habitants avaient dû se nourrir de viande de phoque. Un peu plus loin,

Ne manquez pas un long bâ-timent surmonté de deux cou-poles. Il s’agit des plus anciens murs de la ville, ceux du musée Gostiny Dvor qui était à l’ori-gine un centre pour négociants. Il abrite aujourd’hui des expo-sitions très documentées sur l’histoire d’Arkhanguelsk et de la région. Le bâtiment, qui a ré-cemment été rénové, accueille également des concerts et des festivals de jazz. Un peu plus loin,

sur le chemin Teatralny, la ma-gnifique église Nikolski aux bulbes dorés et murs multico-lores mérite qu’on s’y attarde.

S’il est un sport local popu-laire à Arkhanguelsk, c’est bien le bandy, dérivé du hockey mais qui se joue sur des terrains de football gelés. L’équipe de la ville, Vodnik, a été neuf fois championne de Russie, d’où l’en-gouement que lui voue la popu-lation.

l’Amiral Nikolaï Kouznetsov scrute l’horizon comme il le fi t pendant la période soviétique.

Si, après cela, votre estomac crie famine, arrêtez-vous au res-taurant Bobroff qui se trouve le long des quais, au 2 rue Popov. Il propose des plats tradition-nels de la région ainsi que des fruits de mer à un bon rapport qualité-prix. Testez également une des bières locales qui sont excellentes.

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LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

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Préparé parVeronika Dorman

LU DANS LA PRESSEESPIONNAGE : BONS BAISERS DE RUSSIE

Les services secrets russes ont démasqué très médiatiquement un agent de la CIA qui occupait le poste de troisième secrétaire à l’ambassade américaine de Mos-cou. Ryan Fogle a été arrêté en flagrant délit tandis qu’il tentait de recruter un officier russe spé-cialisé dans la lutte anti-terroriste dans le Caucase du Nord. Il était affublé d’une perruque, en pos-session d’une importante somme d’argent et d’un « arsenal clas-sique d’espion ».

ESPIONNAGE PÉRIMÉ

Ioulia KalininaMOSKOVSKI KOMSOMOLETS/ 16.05

À QUI PROFITE L’ESPION?

ÉditorialVEDOMOSTI/ 16.05

LE BON VIEUX TEMPS

Alexeï MelnikovGAZETA.RU/ 16.05

Le voilà, le James Bond d’au-jourd’hui. Il part en mission avec une fiche imprimée pour ne rien oublier et un atlas de Moscou pour ne pas se perdre. Perruques, lunettes noires et autre attirail d’espion sont passés de mode. Mais les gouvernements conti-nuent à les financer par inertie, tandis que les vétérans enseignent aux jeunes en prenant pour exemple les opérations secrètes du siècle dernier. L’argent public sert toujours pour qu’une foule de gens continue à faire des choses absurdes (porter des perruques, prendre des suspects en filature, à pied, en voiture), en pensant qu’ils accomplissent quelque chose d’important pour la patrie.

La médiatisation de l’événement confirme son caractère politique. Poutine et Obama doivent se ren-contrer en juin au G8 et en sep-tembre au G20. Peut-être les faucons russes ont-ils manigancé le scandale pour enrayer la dé-tente ? Mais l’affaire vaut surtout pour la politique intérieure. Pour lutter contre les dissidents, on fait appel à la rhétorique de l’espion-nage : défendant les valeurs amé-ricaines, financés par les États-Unis, ce sont des ennemis. Il faut entretenir l’anti-américanisme des masses. L’arrestation médiatisée sied bien au système « médiacra-tique » de Poutine, qui ne semble compter que sur la propagande pour conserver le pouvoir.

L’esprit de l’époque brejnévienne et sa lutte incessante contre la CIA ennemie du peuple soviétique semble revivre aujourd’hui. Pa-rades et décorations sur la Place rouge, réarmement massif, chasse aux « agents étrangers », exploits sportifs à la gloire de la Patrie... Dans une telle atmosphère, il ne manquait plus que les espions américains. Il y a une nostalgie pour ce temps où le peuple so-viétique uni cherchait et démas-quait les agents, émerveillé par l’adresse de l’ennemi et la sagacité du contre-espionnage national. On continue à cultiver l’amour popu-laire pour les services secrets, on entretient le patriotisme en insis-tant sur l’unicité de la Patrie.

LA RUSSIE DANS LE CLUB DES GRANDS ?

Fedor

LoukianovPOLITOLOGUE

En mai 1998, la Russie fai-sait ses débuts en tant que membre à part en-tière du G8. Elle est en-

trée ces 15 dernières années dans presque toutes les organisations internationales qui l’intéres-saient. Avec quels résultats ?

Il y a 15 ans, à la mi-mai 1998, Birmingham accueillait la pre-mière réunion du G8 – c’est ainsi que s’appellerait à partir de ce moment le forum informel des principaux pays industrialisés – intégrant la Russie, qui est depuis devenue non seulement membre de presque tous les clubs inter-nationaux, mais a aussi l’expé-rience d’avoir exercé la présidence de la plupart d’entre eux. A-t-elle pour autant obtenu une place dans le groupe des leaders inter-nationaux qui décident du sort du monde ?

Birmingham-98 a marqué un tournant majeur pour la nouvelle Russie. Depuis l’effondrement de l’Union soviétique, le président Boris Eltsine cherchait à ce que le pays retrouve son statut sym-bolique de grande puissance. Mais trois mois après Birmingham, Moscou faisait défaut sur ses dettes et plongeait dans une grave crise économique et politique. L’il-lusion d’égalité de statut avec les autres grandes puissances s’est évaporée quand le gouvernement russe a dû mendier d’urgence un

soutien fi nancier aux pays occi-dentaux, essuyant au final un refus.

La situation a bien changé. De débiteur, la Russie s’est depuis longtemps convertie en pays cré-diteur proposant ses services, aux États auxquels elle quémandait auparavant des prêts, pour sou-tenir aujourd’hui la monnaie unique européenne ou les pays de la zone euro. Cependant, le chan-gement qui s’est opéré depuis la fi n des années 1990 n’a pas tour-né à l’avantage du G8.

Au milieu des années 1970, lors de la création d’un mécanisme de consultations informelles des principales économies de l’Ouest, le but était, dans un format le plus fermé possible, de mener des dis-cussions professionnelles et franches sur l’état réel des choses. Au fur et à mesure de l’expansion (à partir du G5) et de la média-tisation du club, les rencontres au sommet se sont peu à peu trans-formées en spectacle politique pour le public.

Plus l’environnement est trans-parent, plus la franchise est dan-gereuse dans les déclarations, même lors des rencontres privées, mais multilatérales : les fuites sont inévitables. Et sans franche dis-cussion, la réunion perd tout sens, du moins celui fi xé par les créa-teurs du format.

D’autre part, un changement fondamental dans l’équilibre mondial des forces a fait que les réunions en petit comité ne dé-bouchaient sur rien. Comment

évoquer les perspectives de l’éco-nomie mondiale sans la Chine ? Mais accepter Pékin dans le G8 était gênant, s’agissant d’une com-munauté de démocraties.

L’apparition au milieu de la crise de 2008 du G20 a résolu le

problème. Cependant, le G20 ne s’est pas converti en gouverne-ment mondial. Après avoir joué un rôle utile dans la première phase de la crise, le simple fait que des représentants des 20 prin-cipales économies se réunissent ayant un effet apaisant, le forum est devenu une manifestation très protocolaire.

Toutefois, chaque pays prenant la tête du G20 s’efforce d’utiliser sa présidence pour se présenter en puissance mondiale respon-

sable. Cette fois, c’est le tour de Moscou.

Au cours des dernières années, la Russie a formulé à maintes re-prises des initiatives sur les ques-tions mondiales, qui n’ont toute-fois pas eu de suite. La raison en est double. D’une part, elle n’a pas encore su faire preuve de lea-dership dans un monde nouveau en raison de la persistance jusqu’à présent de sentiments d’infério-rité liés à l’effondrement de l’Union soviétique. En outre, les hommes politiques russes n’ont pas encore acquis l’art que leurs homologues occidentaux maî-trisent à la perfection : enrober leurs propres intérêts égoïstes dans une parure très altruiste.

Mais il y a un autre aspect. Dans le monde actuel, les initiatives mondiales ne fonctionnent tout simplement pas. La réalisation des projets se heurte à l’absence de structure – formelle ou infor-melle. Les décisions qui marchent le moins bien sont précisément celles adoptées au niveau mon-dial. L’exemple le plus frappant est l’échec des efforts de l’ONU pour lutter contre le changement climatique.

La Russie a fait ce qu’il fallait pour obtenir un statut interna-tional, objectif fi xé par les diri-geants de l’époque. Mais ce que sera son véritable rôle dans les années à venir, on l’ignore tou-jours. Comme en 1998 quand Elt-sine participait au G8, c’est la qualité du développement in-terne du pays, et pas sa capaci-té à être représenté dans les fo-rums internationaux, qui déterminera la place de la Rus-sie dans le monde.

Fedor Loukianov est un chef du Présidium du Conseil pour la politique étrangère et de défense.

Article publié dans Ogoniok

SYRIE : AU-DELÀ DES DIVERGENCES

Andreï

IlyachenkoPOLITOLOGUE

Le 7 mai, durant la visite du chef de la diplomatie américaine John Kerry en R u s s i e , M o s c o u e t

Washington ont décidé d’orga-niser une conférence internatio-nale sur la Syrie à Genève. Si-tuation sans précédent : John Kerry et son homologue russe Sergueï Lavrov ont fait une dé-claration conjointe afi n d’inciter les autorités syriennes et l’oppo-sition à prendre part à la réu-nion. Une semaine plus tard, Moscou a déclaré qu’il était né-cessaire d’attirer à la réunion les principales puissances régio-nales, l’Iran et l’Arabie saoudite.

Il s’agit au fond d’une « Genève 2 », c’est-à-dire, d’une reproduc-tion d’une réunion similaire qui a eu lieu dans cette ville il y a un an. À l’époque, tous les partici-pants se sont prononcés pour le lancement d’un dialogue politique entre les parties belligérantes. Un dialogue qui n’a toujours pas dé-marré.

La raison principale de cet im-passe est la divergence entre Mos-cou et l’Occident. Les pays occi-dentaux et leurs alliés insistent sur le retrait du président syrien Bachar el-Assad comme condi-tion sine qua non du règlement de la crise dans le pays. Moscou, pour sa part, prône une résolu-tion du confl it sans pression ex-térieure. En d’autres termes, la Russie essaie de contrer la stra-tégie du changement de régime à l’aide d’une intervention militaire, comme on l’a vu au cours des 25 dernières années en Yougoslavie, en Irak et en Libye.

Moscou et Washington ont tou-jours affiché des divergences ex-trêmes sur cette question. Mais cela n’empêche pas les dirigeants mondiaux d’effectuer des ma-nœuvres diplomatiques : le Pre-mier ministre britannique James Cameron s’est récemment rendu

L’apprentissage du leadership a souffert du sentiment d’infériorité lié à l’effondrement de l’Union soviétique

C’est le développement interne du pays qui déterminera la place de la Russie dans le monde

en Russie et aux États-Unis ; le chef du gouvernement israélien Benyamin Netanyahou est allé à Moscou et à Pékin ; le Premier ministre turc a effectué une visite à Washington. Mais reste le pro-blème essentiel d’el-Assad.

Le ministre syrien de l’Infor-mation Omran al-Zoubi a récem-ment déclaré que les autorités sy-riennes ne prendraient pas part à la conférence de Genève si les participants évoquent la destitu-tion de Bachar el-Assad ou la mo-difi cation de la Constitution.

Cependant, les États-Unis exigent la présence du chef de l’État syrien à « Genève 2 » sous peine de « fournir davantage d’aide à l’opposition ». Il s’agit d’augmenter l’aide fi nancière et de lever l’embargo de l’Union eu-ropéenne sur les armes. Le 16 mai, l’Assemblée générale de l’ONU a déjà adopté une résolution pro-posée par le Qatar et l’Arabie saoudite condamnant le régime.

Tout aussi importante est la me-nace d’une invasion. Les preuves de l’usage d’armes chimiques par Damas pourraient servir de pré-texte à une intervention militaire. Mais les preuves ne sont pas tou-jours nécessaires : il suffit de se rappeler les « armes de destruc-tion massive » en Irak.

Une véritable épée de Damo-clès pèse ainsi sur el-Assad. Et ce danger peut sans doute le frap-per sans résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU. C’est deve-nu évident après les raids israé-liens des 3 et 5 mai. La Turquie, elle aussi, menace la Syrie, ayant accusé les services secrets syriens d’avoir organisé l’attentat du 11 mai dans la ville de Reyhanli.

Si les participants de la confé-rence de Genève ne proposent que d’augmenter la pression sur le lea-der syrien, on peut faire une croix sur un règlement rapide de la crise dans le pays.

Andreï Ilyachenko est un spécia-liste des relations internatio-nales.

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NATALIA MIKHAYLENKO

NIYAZ KARIM

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DENIS POUZYREVLA RUSSIE D’AUJPURD’HUI

« Vin russe » : en voilà une

appellation exotique ! Un peu

comme si l’on imaginait une

« vodka champenoise ».

Pourtant, il existe, le vin russe.

Nous l’avons rencontré.

Bacchus revit sur la mer NoireViticulture La production russe reste dominée par des vins de médiocre qualité, mais de vrais professionnels veulent changer la donne

Il est peu probable que vous trou-viez du vin russe sur une table française. Si c’était le cas, il s’agi-rait probablement d’un vin doux ou semi-doux, catégorie repré-sentant 80% de la production russe. Vous allez sourire, mais c’est encore la faute à Staline.

À la fi n des années 1950, selon l’Office international du vin, l’URSS occupait la cinquième place mondiale en superfi cie de vignes et la septième en volume de production vinicole. Dès les années 1930, la jeune viticulture soviétique a été soutenue par les hautes autorités du pays. C’est que le dictateur soviétique Jo-seph Staline était géorgien, et le ministre de l’industrie alimen-taire, Anastase Mikoyan, était arménien. Géorgiens et Armé-niens sont culturellement portés sur le vin. Des fouilles archéo-logiques montrent même que la viticulture du Caucase est anté-rieure à celle de la Grèce antique.

Pendant l’industrialisation de l’Union soviétique, un pro-gramme de ravitaillement avait été élaboré pour satisfaire les be-soins des masses en produits ali-mentaires, y compris en vin, qui, jusqu’à la révolution de 1917, n’était accessible qu’à l’aristo-cratie. Il fallait faire du vin une boisson accessible à tous.

Des savants ont été sollicités pour régler le problème. Des cé-pages résistant au gel et à haut rendement ont été créés. Tout cela n’a pas servi la qualité de la pro-duction : les vins issus de ces pro-cessus étaient difficiles à boire car très acides et totalement dé-pourvus de corpulence. Pour pal-lier le problème, on a commencé à y ajouter du sucre de raisin, et souvent de l’alcool éthylique. Cette technologie est encore lar-gement utilisée à ce jour.

« Avec du mauvais raisin ou les déchets des usines de jus de fruit en Iran ou en Italie, on fa-brique du concentré, qui est en fait du sucre de raisin non raf-fi né », explique Elena Denisova, directrice du conseil des direc-teurs de Château le Grand Vos-tok, l’un des rares producteurs de vin russe de qualité. « C’est un camoufl age idéal pour du vin imbuvable. On ajoute ce concen-tré au mauvais vin à l’étape de la fermentation ou alors on le mélange à un produit vineux trop fermenté, en essayant d’en rec-tifi er le goût horrible. Avec cela, on ajoute des aromatisants et des colorants artifi ciels ».

Dans les années 1930, la culture du vin n’existait pas en URSS, et le prolétariat triom-phant a accueilli avec enthou-siasme le nouveau produit qu’on lui servait. L’agence de statis-tiques Rosstat a calculé qu’en 2012, le marché du vin en Rus-sie représentait 485,1 millions de bouteilles, dont 63,2% de pro-duction russe.

En voyant la liste des plus grands producteurs de vin russes, le plus invétéré des optimistes risque de désespérer. Sept des dix leaders, en volumes produits, sont des usines de vin bon mar-ché en cartons Tetrapack de 1 litre. Le prix d’un tel breuvage ne dépasse pas 2 euros le litre.

Il y a un mois, le régulateur des boissons alcoolisées en Rus-sie, Rosalkogol, a suspendu les licences de trois des cinq prin-cipales usines de vin de la région de Krasnodar. La cause  : les études ont montré que leur pro-

Les importations de vin

" En France, Italie, Espagne, dans chacun de ces pays, il y a plus de 10 000 produc-

teurs de vin, et en Russie, environ 150. En termes de superficie, nos vignobles ne sont que deux fois moindres que ceux de la France. Notre sol permet de cultiver du raisin. La viticulture à l’étranger est le fait de petites exploitations. Ce sont elles qui produisent les meilleurs vins. Nos agriculteurs devraient bénéficier d’incitations pour améliorer leur production".

" La tâche la plus difficile du viticulteur russe est de produire des vins de

qualité correcte et compétitifs dans le segment des vins de table. Pour y arriver, toutes les solutions techniques et les matières pre-mières sont déjà disponibles. Nous n’avons besoin que d’un environ-nement commercial favorable".

ILS L’ONT DIT

Vadim Drobiz

Leonid Popovitch

CHEF DU CENTRE DE RECHERCHE DU MARCHÉ DES VINS SPIRITUEUX FÉDÉRAL ET RÉGIONAL

PRÉSIDENT DE L’UNION DES VIGNERONS ET DES VITICULTEURS DE RUSSIE

Bonnes adresses

pour bons vins

Gavroche. Ambiance sombre et intime, divans larges et profonds, service idoine. Et surtout, un très large choix de vins français et ita-liens, à un prix somme toute as-sez élevé dans les blancs comme dans les rouges. Gavroche pré-sente l’avantage d’une situation géographique en plein centre de Moscou.

Grand Cru. Cette enseigne compte deux adresses. L’une d’elles se si-tue rue Malaïa Bronnaïa, juste der-rière l’étang des Patriarches. Créé par Maxime Kachirine, ce bar à vin vend au détail les produits de son entreprise Simple Wine, qui pro-pose un catalogue impressionnant de vins et de spiritueux.

Vintage. C’est l’adresse offrant les prix les plus démocratiques. Le Vintage Bar, situé rue Krassina affiche une décoration modeste et une première bouteille à seu-lement 10 euros. En raison de son grand succès, le Vintage Bar est plein à craquer tous les soirs et il est conseillé de réserver.

Dissident. Ce bar est très chic mais paradoxalement parfois vide le vendredi soir, a une longue his-toire. Les prix attirent surtout une clientèle prête à dépenser au moins 15 euros pour un verre de vin rouge argentin. L’intérieur douillet et l’agréable musique de fond sont ses points forts.

Bontempi. Situé en face de la cé-lèbre maison des journalistes sur le boulevard Nikisty, Bontempi donne l’impression de toujours être prix d’assaut, notamment en raison de ses prix modestes. Le décor est peu conventionnel et le bar est en sous-sol. Les doses sont généreuses et la présentation soignée. La carte propose des vins à tous les prix.

DENIS POUZYREVLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

En moins d’une décennie,

Château le Grand Vostok, un

vignoble dirigé par des Français

sur la mer Noire, a démontré

qu’il pouvait produire des vins

de grande qualité en Russie.

Un vignoble de qualité en quête de débouchés

Le vignoble a adopté les tech-nologies européennes de vinicul-ture : la plantation et la qualité du raisin étaient supervisées par ses premiers vignerons français, Franck Duseigneur et Gaëlle Brulon, comme elles le sont par le chef vigneron actuel, Laurent Dubreuil. Les étés chauds et les hivers doux dans les hauts pla-teaux de Krasnodar rassemblent les conditions idéales pour pro-duire du vin.

Le Château Le Grand Vostok, basé dans le village de Sadovy, à 75 km du rivage de la mer Noire, possède plus de 1 600 hectares de terre, vignes com-prises, et peut utiliser une grande étendue supplémentaire de forêt, de champs et de lacs.

Afi n de passer à l’étape sui-vante, vitale, l’entreprise

cherche un investisseur étran-ger à Londres fournissant les capitaux pour aider à dévelop-per de nouvelles fi lières com-merciales et ainsi augmenter la production.

Arthur Sarkisian, chef du syndicat des sommeliers russes, est convaincu que les vins russes de qualité prendront bientôt une place importante sur les rayons des magasins et la carte des vins des restaurants. « Maintenant que la Russie se met à produire du bon vin, il est naturel qu’il soit représenté dans les restau-rants et dans les magasins, dé-clare M.Sarkisian. Mais pour que cela ait lieu, l’ Êtat doit sou-tenir la production nationale ».

C’est ce que fait déjà la ré-gion de Krasnodar qui demande aux restaurants de mettre d’of-frir au moins 50% de vins russes sur leurs cartes. « Pour la Rus-sie dans son ensemble, ce seuil pourrait être mis à 20 % en pre-nant la même mesure vis-à-vis des magasins de détail », ex-plique M. Sarkisian, qui ajoute qu’un jury d’experts devrait cer-tifi er les vins méritants.

Franck Duseigneur, le directeur général du Château.

duction n’avait de vin que le nom, et qu’elle ne correspondait pas aux standards russes, encore moins aux normes internatio-nales. Les producteurs de vin russe de qualité se battent de-puis longtemps pour l’adoption d’un prix minimal du vin sur les étalages en Russie, à au moins 3 euros la bouteille, car ils n’ar-rivent pas à concurrencer les seg-ments bon marché. Les viticul-teurs les plus radicaux luttent pour que l’État censure les pro-ducteurs de mauvais vin, car leur existence même discrédite toute l’industrie vinicole. « Pourquoi conserver l’emploi du mauvais vigneron et du producteur de préservateurs iranien ? », s’in-digne Elena Denisova. « Ne se-rait-il pas plus judicieux d’aider à se développer les bons vigne-rons du sud de la Russie ? ».

La vente du vin a chuté en Russie l’année dernière, sous la pression des producteurs d’alco-ols forts et des brasseurs trans-nationaux. Selon Rosstat, la pro-duction de vin a baissé de 9,2% en 2012, tandis que celle de

vodka a augmenté de 13,2%. Il est vrai que l’importation de vin s’est accrue de 4,5%, mais la li-vraison de grands vins a dégrin-golé (60,5 millions de bouteilles). Tout n’est pas si noir. Depuis 2006, sont apparus des domaines viticoles dont la production peut être présentée sans honte aux connaisseurs les plus exigeants. Le leader est le domaine Abrau-Durso, dans les collines situées derrière le port de Novorossiisk, sur la mer Noire.

Parmi les entreprises orientées sur la production de qualité et qui ont les moyens financiers d’obtenir les licences d’État, se distinguent Château le Grand Vostok, Lefkadia, Vedernikov, et quelques autres. En 2012, un Guide des vins russes a été pu-blié pour la première fois, regrou-pant 55 nominations de 13 pro-ducteurs russes. L’ouvrage a été compilé par les meilleurs som-meliers russes, qui ont exprimé l’espoir que les « grands vins russes  » ne soient pas une chimère. Levons notre verre à leur succès.

Nouveau vin, racines anciennes

Créée par décret du tsar Alexandre II en 1870, l’entreprise vinicole Abrau-Durso, près de la mer Noire, produisait les meilleurs vins mousseux pour l’élite du Parti communiste à l’époque soviétique. Elle est tombée en décadence au début des années 2000, jusqu’à ce que Boris Titov la rachète et y investisse 20 millions de dollars (15 M euros). En nommant l’expert

français Hervé Justin directeur de production et en investissant des sommes conséquentes dans le marketing, M. Titov a fait d’Abrau-Durso un leader de la production de vins mousseux, même s’ils ne sont pas chers par rapport au ni-veau russe. Son fils Pavel dirige actuellement la société et la pré-pare à son introduction en bourse sur le London Stock Exchange.

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Page 8: La Russie d'Aujourd'hui

08LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

EDITION DE ROSSIYSKAYA GAZETA

DISTRIBUÉE AVEC LE FIGARO Culture & Loisirs

PAULINE NARYCHKINALA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Saint-Pétersbourg a inauguré

début mai le complément du

théâtre historique Mariinsky.

C’était l’événement de l’année

pour une ville qui se veut « ca-

pitale culturelle mondiale ».

Mariinsky 2 : un espace culturel digne du nom et d’une fière mission

Architecture Hormis un extérieur contesté, le nouvel « outil » artistique de Saint-Pétersbourg fait l’unanimité

C’est devant un public chamar-ré en robe et smoking, composé de célébrités du monde artistique et politique, que le président Pou-tine est venu en personne cou-per le ruban et souhaiter un bon anniversaire au « Maestro Guer-guiev » en le félicitant pour sa persévérance dans l’entreprise de créer un nouvel outil artis-tique et culturel à la hauteur de son aîné, Mariinsky 2. Les tra-vaux étalés sur une dizaine d’an-nées ont coûté environ 550 mil-lions d’euros au contribuable. Un premier projet abandonné pour raisons techniques, celui du Français Dominique Perrault, a fait place à celui des architectes canadiens du bureau Diamond Schmitt.

L’espace gigantesque de près de 80 000 m2 répartis sur sept niveaux peut accueillir 2 000 personnes. Avec une scène cen-trale, un auditorium pour les re-présentations plus intimistes et les ateliers artistiques, un am-phithéâtre sur le toit, il vient compléter le théâtre historique Mariinsky, qui date de 1860, et le nouvel auditorium, inauguré en 2006. Valéry Guerguiev, qui règne en maître absolu depuis maintenant 25 ans (encore une célébration) sur cette triple ins-titution culturelle célébrant l’art lyrique et le ballet a démontré

À L’AFFICHE

LES GRANDES VOIX

2013-2014

DU 24 MAI AU 18 DÉCEMBRETHÉÂTRE DES CHAMPS-ELYSÉES ET SALLE PLEYEL, PARIS

LE SACRE DU PRINTEMPS

DU 29 AU 31 MAITHEÂTRE DES CHAMPS-ELYSÉES, PARIS

1ER FESTIVAL DU CINÉMA

RUSSE À NICE : « LES

ROMANOV ET LA RUSSIE »

DU 14 AU 17 JUINPALAIS DES CONGRÈS “ACROPOLIS” ET CINÉMATHÈQUE DE NICE

ORCHESTRE

PHILHARMONIQUE DE

SAINT-PÉTERSBOURG

LE 17 JUINTHÉÂTRE DES CHAMPS-ELYSÉES, PARIS

TOUS LES DÉTAILS SUR NOTRE SITELARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

" La scène historique ne pouvait tout simplement plus accueillir le nombreux

public, ni tous les projets que je souhaite réaliser".

" On dirait que Guerguiev a pris toutes les contraintes classiques des salles d’opé-

ra et de théâtre pour les résoudre au mieux".

ILS L’ONT DIT

Valery Guergiev

Isabelle Partiot-Péri

DIRECTEUR ARTISTIQUE DU THÉÂTRE MARIINSKY DE ST-PÉTERSBOURG

ARCHITECTE FRANÇAISE ET METTEUR EN SCÈNE AU MARIINSKY

une nette volonté de porter Saint-Pétersbourg au rang de capitale culturelle mondiale. Cer-tains riverains sont pourtant scandalisés. Le jour du gala, ils brandissent des pancartes « Bon anniversaire au PDG du « Centre commercial » Mariinsky ». « Re-gardez-ça. Ajoutez des affiches publicitaires sur la façade et vous avez là une très belle galerie com-merciale. Cet édifi ce est une in-sulte à l’architecture du quartier

et de la ville entière. C’est du vandalisme et il mérite d’être rasé », s’indigne Kirill Volkov, membre de l’association de dé-fense des monuments historiques et culturels de Saint-Pétersbourg et habitant du quartier. De l’ex-térieur en effet le bâtiment res-semble un bloc monolithe mini-maliste et manque de charme.

Pour le foyer, les architectes ont misé sur la lumière et la trans-parence. De larges baies vitrées offrent une balle perspective sur le canal et, depuis les étages su-périeurs, sur les toits et les cou-

poles de la ville. « Le mur d’onyx illuminé de l’intérieur donne la chaleur indispensable dans cette ville du Nord. L’escalier monu-mental en verre de 33 mètres de haut monte en volute sans alour-dir l’espace. Les pendants en cris-tal Swarovski évoquent la légè-reté d’une envolée de libellules », explique Joshua Dachs, directeur du bureau new-yorkais respon-sable du design.

La salle de concert devrait ré-concilier. Selon Isabelle Partiot-Péri, architecte française et met-teur en scène ayant travaillé en 2006 et 2009 sur des spectacles du Mariinsky, « la visibilité est assurée de partout même des balcons latéraux et sans se tordre le cou. Le tracé des balcons al-lant jusqu’au cadre de scène crée une ligne de fuite qui porte le public vers la scène. Le sol est posé non sur du béton mais sur une structure en bois qui crée un effet de résonance ». Bref, l’inté-rieur rachète l’extérieur.

Guerguiev répète que l’essen-tiel est de créer un lieu d’échange, accessible au plus grand nombre. Cependant, le service de presse affirme que le prix des tickets restera identique à celui du Ma-riinsky historique (de 12 à 30 euros généralement) afi n de gar-der son public.

C’est comme si ce lieu avait pour vocation de donner un nou-vel élan à la force créatrice et de porter la ville à un niveau cultu-rel mondial. « Les mécontents n’ont qu’à venir à un spectacle, on en reparlera ensuite », tranche l’architecte canadien Jack Dia-mond pour mettre fi n à la polé-mique.

La série Les Grandes Voix ac-cueille plusieurs artistes russes cette année : Anna Netrebko, Ildar Abdrazakov, Dmitri Khvo-rostovsky et Julia Novikova. Elle poursuit également l’expé-rience des opéras en version de concert. › www.lesgrandesvoix.fr

Le Ballet du Mariinsky présente Le Sacre du printemps dans la choréographie originale de Vas-lav Nijinski. Cette année marque l’anniversaire de la première représentation de cette œuvre d’Igor Stravinsky. Chorégraphie de Sasha Waltz. › www.theatrechampselysees.fr

Pour la première fois en France, projection de films originaux issus des archives du Fonds d’État des Films de la Russie – Gosfilmofond. Les projections seront accompagnées de la par-ticipation d’artistes russes et français. › www.larussiedaujourdhui.fr/23711

Cette nouvelle saison qui fête les 100 ans du Théâtre des Champs-Elysées met la Rus-sie à l’honneur et, à l’affiche, l’Orchestre Philharmonique de Saint-Pétersbourg et Iouri Te-mirkanov, son directeur musi-cal et maestro depuis 1988. Au programme : L’Oiseau de feu d’Igor Stravinsky, Danses polov-tsiennes d’Alexandre Borodine, Shéhérazade de Nikolaï Rimsky-Korsakov. › www.theatrechampselysees.fr

Valery Guergiev à l’ouverture de Mariinsky 2.

Vu de l’extérieur : un bloc monolithe minimaliste qui manque de charme... et révolte les riverains

L’intérieur rachète l’extérieur d’un lieu d’échange qui se veut accessible au plus grand nombre

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