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LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU URBAIN Par Alexandre Ouellet Essai présenté au Centre universitaire de formation en environnement et développement durable en vue de l'obtention du grade de maître en environnement (M. Env.) Sous la direction de Monsieur Jean-Marie Bergeron MAÎTRISE EN ENVIRONNEMENT UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE Février 2014

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LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU URBAIN

Par

Alexandre Ouellet

Essai présenté au Centre universitaire de formation

en environnement et développement durable en vue

de l'obtention du grade de maître en environnement (M. Env.)

Sous la direction de Monsieur Jean-Marie Bergeron

MAÎTRISE EN ENVIRONNEMENT

UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE

Février 2014

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SOMMAIRE

Mots clés : Agrile du frêne, Agrilus planipennis, espèce exotique envahissante, gestion intégrée,

dépistage, abattage, inventaire, insecticide, SLow Ash Mortality, municipalité.

L’agrile du frêne (Agrilus planipennis) est un insecte exotique envahissant d’origine asiatique

s’attaquant à toutes les espèces de frênes jusqu’à en causer la mort en quelques années. Ce

ravageur a été détecté pour la première fois en 2002 dans le sud de l’Ontario et en 2008 dans la

ville de Carignan au Québec. Depuis son introduction en Amérique du Nord, cet insecte a causé

la mort de plusieurs millions de frênes autant en milieu urbain que forestier. Toutefois, c’est en

milieu urbain que les pertes économiques sont les plus importantes, notamment en raison de

l’abondance de frênes retrouvée. Ainsi, pour limiter les dégâts, les municipalités doivent

impérativement élaborer un plan de gestion pour lutter contre cet insecte.

L’objectif principal de cet essai est de mettre au point un outil de gestion régionale de l’agrile du

frêne suffisamment flexible pour être en mesure de s’adapter à l’émergence de nouvelles

connaissances scientifiques et d’initiatives gouvernementales. Cet outil a été développé afin qu’il

puisse être utilisé par une organisation dont le mandat couvre l’ensemble du territoire de la

province de Québec. Plus précisément, il vise à structurer l’approche de sensibilisation et d’aide

technique auprès des municipalités en fonction de leur proximité avec les foyers d’infestation

connus. Pour arriver à développer cette méthode de gestion, il est important de comprendre le

contexte de la gouvernance canadienne et québécoise envers les espèces exotiques envahissantes

et plus spécifiquement celui entourant l’agrile du frêne. Puis, il est nécessaire de connaître les

grandes étapes qu’un plan de gestion de l’agrile en milieu urbain doit contenir : inventaire

d’arbres, activités de dépistage, traitement de frênes à l’insecticide, abattage stratégique et un plan

de communication auprès de la population.

Puisqu’aucun moyen efficace d’éradication de l’agrile du frêne n’a encore été mis au point,

l’approche à préconiser est celle visant à contrôler et ralentir la progression du ravageur. À cet

effet, l’approche Slow Ash Mortality constitue la meilleure alternative de gestion de l’insecte.

L’application de cette approche en milieu urbain consiste à gérer l’agrile par foyer d’infestation et

à traiter un maximum de frênes à l’insecticide. Cependant, le manque d’implication du

Gouvernement du Québec en matière de gestion des espèces exotiques envahissantes et

particulièrement dans le cas de l’agrile du frêne représente un obstacle à la bonne gestion du

ravageur sur le territoire. Ainsi, une meilleure collaboration des différents ministères concernés

faciliterait l’utilisation de l’outil développé dans le présent travail.

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier mon directeur d’essai, M. Jean-Marie Bergeron qui a été pleinement présent à

toutes les étapes de ce long travail. Ses conseils et sa disponibilité ont été essentiels au succès de

cet essai.

J’aimerais également remercier Mme Hélène Godmaire, directrice générale du Conseil québécois

sur les espèces exotiques envahissantes pour son support professionnel et ses conseils. Les

documents et les contacts qu’elle m’a offerts ont contribué à bonifier cet essai.

Un merci à Thierry Tremblay, mon patron qui s’est montré très compréhensif envers ma situation

étudiante.

Un merci tout spécial à ma grand-mère Rose qui a été une source d’inspiration pour moi tout au

long de ce travail.

Merci à ma copine Julie pour son soutien moral constant, même dans les moments les plus

difficiles.

Finalement, il n’existe aucun mot suffisamment fort pour exprimer la reconnaissance que

j’éprouve envers mes parents qui ont contribué au succès de mon long cheminement scolaire.

Leur support inconditionnel et leurs nombreux encouragements m’ont guidé jusqu’à la toute fin.

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TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION ...................................................................................................................... 1

1. MISE EN CONTEXTE ET GOUVERNANCE ................................................................... 4

1.1 Espèces exotiques envahissantes .................................................................................. 4

1.1.1 Définition ............................................................................................................. 4

1.1.2 Voie d’entrée ....................................................................................................... 5

1.1.3 Impacts environnementaux, économiques et sociaux............................................. 7

1.2 Gouvernance fédérale .................................................................................................. 9

1.2.1 Stratégie nationale sur les espèces exotiques envahissantes ................................. 11

1.2.2 Plan d’action pour les plantes terrestres et les phytoravageurs étrangers

envahisseurs ..................................................................................................................... 12

1.2.3 Programme de partenariat sur les espèces exotiques envahissantes ...................... 17

1.3 Gouvernance provinciale............................................................................................ 17

1.3.1 Engagement du Québec ...................................................................................... 18

1.3.2 Cadre réglementaire au Québec .......................................................................... 20

1.3.3 Conseil québécois sur les espèces exotiques envahissantes ................................. 20

1.4 Rôles des municipalités .............................................................................................. 21

2. GESTION DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU URBAIN......................................... 23

2.1 Inventaire de frênes .................................................................................................... 24

2.1.1 Frênes privés et publics ...................................................................................... 25

2.1.2 Approche ascendante d’inventaire ...................................................................... 26

2.1.3 Approche descendante d’inventaire .................................................................... 28

2.1.4 Outils i-Tree ....................................................................................................... 30

2.1.5 Identification des zones à risques ........................................................................ 31

2.1.6 Participation du public ........................................................................................ 32

2.2 Dépistage ................................................................................................................... 32

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2.2.1 Détection visuelle ............................................................................................... 33

2.2.2 Piège dans les arbres .......................................................................................... 35

2.2.3 Écorçage de branches ......................................................................................... 38

2.2.4 Dépistage par annélation de frênes...................................................................... 39

2.2.5 Biosurveillance .................................................................................................. 42

2.2.6 Formation du personnel et sensibilisation de la population .................................. 44

2.3 Plan de gestion de l’agrile du frêne ............................................................................. 45

2.3.1 Outils de gestion ralentissant la progression de l’agrile ....................................... 45

2.3.2 Évaluation économique d’une bonne stratégie de gestion .................................... 46

2.4 Application d’insecticide systémique ......................................................................... 47

2.4.1 Traitement des frênes au biopesticide ................................................................. 47

2.4.2 Compromis entre traitement et abattage .............................................................. 48

2.4.3 Traitement d’arbres privés .................................................................................. 50

2.4.4 Accord de traitement d’arbres publics par un citoyen .......................................... 50

2.5 Plan de coupe des arbres ............................................................................................ 51

2.5.1 Planification de l’abattage .................................................................................. 52

2.5.2 Gestion des boisés urbains .................................................................................. 55

2.5.3 Annélation ......................................................................................................... 55

2.5.4 Disposition des frênes contaminés et réglementation........................................... 57

2.5.5 Plan de remplacement des frênes abattus ............................................................ 58

2.6 Sensibilisation et communication ............................................................................... 59

2.6.1 Communication interne et réglementation ........................................................... 60

2.6.2 Communication externe...................................................................................... 61

2.6.3 Dépisteur bénévole de première ligne ................................................................. 62

2.6.4 Association de voisins ........................................................................................ 63

2.6.5 Réseaux sociaux ................................................................................................. 64

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2.7 Approche de gestion intégrée de l’agrile du frêne ....................................................... 64

2.7.1 Approche Slow Ash Mortality (SLAM) ............................................................... 65

2.7.2 Application du SLAM en milieu urbain .............................................................. 67

2.7.3 Application SLAM à l’échelle régionale ............................................................. 70

3. OUTIL QUÉBÉCOIS DE GESTION ET GOUVERNANCE ............................................ 74

3.1 Limites de propagation de l’agrile .............................................................................. 75

3.2 Pour une meilleure gouvernance provinciale .............................................................. 76

3.2.1 Organisation de la gouvernance .......................................................................... 77

3.2.2 Possibilités d’amélioration.................................................................................. 79

3.2.3 Synergie entre les intervenants ........................................................................... 80

3.3 Outils de gestion régionale ......................................................................................... 81

3.3.1 Établissement des zones d’intervention ............................................................... 82

3.3.2 Outils de gestion par zone d’intervention ............................................................ 83

3.3.3 Modèle de plan de gestion .................................................................................. 87

CONCLUSION ......................................................................................................................... 91

RÉFÉRENCES ......................................................................................................................... 94

ANNEXE 1 - LOIS FÉDÉRALES RÉGISSANT LA GESTION DES ESPÈCES

EXOTIQUES ENVAHISSANTES .......................................................................................... 104

ANNEXE 2 - DÉPISTEURS DE PREMIÈRE LIGNE DANS L’ÉTAT DU VERMONT ......... 106

ANNEXE 3 - ÉTIQUETTE D’IDENTIFICATION DE FRÊNES ............................................ 107

ANNEXE 4 - ÉTABLISSEMENT DES ZONES D’INTERVENTION NIVEAU 1 ................. 108

ANNEXE 5 - ÉTABLISSEMENT DES ZONES D’INTERVENTION NIVEAU 2 ................. 109

ANNEXE 6 - ÉTABLISSEMENT DES ZONES D’INTERVENTION NIVEAU 3 ................. 110

ANNEXE 7 - PLAN D’ACTION MUNICIPALITÉ ................................................................ 111

ANNEXE 8 - PLAN D’ACTION MILIEUX FORESTIERS .................................................... 112

ANNEXE 9 - PLAN D’ACTION FORÊTS PRIVÉES ET INDUSTRIES ................................ 113

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LISTE DES FIGURES ET DES TABLEAUX

Figure 1.1 Zone sans frêne en Ontario .............................................................................. 14

Figure 2.1 Carte interactive de l’emplacement des arbres de rues et de parcs de la ville

d’Oakville ....................................................................................................... 29

Figure 2.2 Prédiction de la mortalité des frênes de la Ville de Toronto .............................. 54

Figure 2.3 Comparaison économique de différentes approches de gestion des frênes en

milieu urbain sur un horizon de 10 ans en fonction de l’âge du foyer

d’infestation .................................................................................................... 69

Figure 2.4 Emplacement des foyers d’infestation et des zones d’intervention dans l’état

de New York .................................................................................................. 72

Figure 3.1 Carte de répartition du frêne noir en pourcentage au Québec ............................ 76

Tableau 1.1 Voies d’entrée principales des espèces exotiques envahissantes ......................... 6

Tableau 2.1 Avantages et désavantages de l’outil d’inventaire proposé par RNCan ............. 27

Tableau 2.2 Zones à risque ................................................................................................. 31

Tableau 2.3 Espèces de frêne indigènes et exotiques présentes dans l’Est du Canada ........... 33

Tableau 2.4 Signes et symptômes ....................................................................................... 34

Tableau 2.5 Avantages et désavantages de la biosurveillance de l’agrile du frêne avec

Cerceris fumipennis ......................................................................................... 43

Tableau 2.6 Avantages et désavantages de l’approche d’abattage préventive et réactive ...... 53

Tableau 2.7 Sujets de sensibilisation et médias de diffusion de l’information ...................... 62

Tableau 2.8 Critères de caractérisation des zones infestées par l’ADF et les niveaux

d’importance associés ...................................................................................... 71

Tableau 3.1 Outils de gestion de l’agrile du frêne en fonction des zones d’intervention ....... 85

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LISTE DES ACRONYMES, DES SYMBOLES, ET DES SIGLES

AAC Agriculture et agroalimentaire Canada

ACIA Agence canadienne d’inspection des aliments

ADF Agrile du frêne

APC Agence des parcs Canada

ASFC Agence des services frontaliers du Canada

BVGC Bureau du vérificateur général du Canada

CBNM Conservatoire Botanique National Méditerranéen

CDB Convention sur la diversité biologique

CIPV Convention internationale pour la protection des végétaux

CQEEE Conseil québécois sur les espèces exotiques envahissantes

DGPV Direction des grands parcs et du verdissement

DHP Diamètre à hauteur de poitrine

EC Environnement Canada

EEE Espèce Exotique Envahissante

FPFD Forest Pest First Detector

IISC Indiana Invasive Species Council

INSPQ Institut national de la santé publique du Québec

MAMROT Ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire

MAPAQ Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec

MDDEFP Ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des

Parcs

MDNR Michigan Department of Natural Resources

MPO Pêches et Océans Canada

MRC Municipalités régionales de comté

MRN Ministère des Ressources naturelles du Québec

MRNO Ministère des Richesses naturelles de l’Ontario

MTQ Ministère des Transports du Québec

MSU Michigan State University

NABB Neighbors Against Bad Bugs

NAPPO Organisation nord-américaine pour la protection des plantes

NYSDEC New York State Department of Environmental Conservation

OBNL Organisme à but non lucratif

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PNUE Programme des Nations Unies pour l’environnement

PPEEE Programme de partenariat sur les espèces exotiques envahissantes

RNCan Ressources naturelles Canada

SCF Service canadien des forêts

SCTC Secrétariat du conseil du trésor du Canada

SNEEE Stratégie nationale sur les espèces exotiques envahissantes

SLAM SLow Ash Mortality

SQDB Stratégie québécoise sur la diversité biologique

TC Transport Canada

USDA United States Department of Agriculture

USDA FS United States Department of Agriculture Forest Services

m Mètre

mm Millimètre

km Kilomètre

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INTRODUCTION

La dispersion naturelle des espèces animales et végétales est limitée par des obstacles physiques

(montagne, océan, désert), ce qui a permis aux espèces d’évoluer et de s’adapter spécifiquement à

leur environnement immédiat. Toutefois, depuis que l’Homme a commencé à voyager d’un

continent à un autre, il déplace avec lui des espèces animales et végétales volontairement ou non

en dehors de leur aire de reproduction normale. Ces espèces délocalisées par le biais des activités

anthropiques sont désignées comme étant des espèces exotiques envahissantes (EEE). Lorsque

celles-ci s’adaptent à leur nouvel environnement, elles peuvent engendrer des impacts

économiques, environnementaux et sociaux considérables.

L’agrile du frêne (ADF) est un bon exemple d’espèces envahissantes ayant profité des échanges

commerciaux entre les pays pour se déplacer de l’Asie (Chine, Japon, Corée, Mongolie, Russie,

Taiwan) vers l’Amérique du Nord (Ministry of Agriculture, s.d.). En effet, la présence de ce

coléoptère appartenant à la famille des Buprestides a été détectée pour la première fois en 2002

dans la région du Michigan aux États-Unis et dans le sud-ouest de l’Ontario (Agence canadienne

d’inspection des aliments (ACIA), 2012). C’est par le biais des emballages de bois (palettes de

bois de frêne) utilisés pour le transport de marchandises que cet insecte est parvenu sur le

continent nord-américain (McDermott et autres, 2012). Depuis son arrivée, l’agrile du frêne s’est

propagé au sud dans plusieurs états américains et vers et le nord-est du Canada jusqu’à la région

métropolitaine de Montréal.

Ce coléoptère de couleur vert-émeraude métallique s’attaque à toutes les espèces de frênes

connues et cause très rapidement la mort de ceux-ci. Le mécanisme destructeur de cet insecte

commence au moment où la femelle pond ses œufs dans des fissures de l’écorce du frêne au

courant de la saison estivale. Des larves émergent ensuite de ces œufs et c’est à ce stade que

l’insecte représente le plus grand danger pour l’arbre. En effet, la larve se nourrit du phloème de

l’arbre en creusant des galeries en forme de « S » sous l’écorce (Ville de Montréal, 2012). Le

phloème correspond au système circulatoire de l’arbre, il permet de faire cheminer les éléments

nutritifs entre les racines et les feuilles (Botanique, 2014). Ainsi, les galeries laissées par les

larves contribuent à faire dépérir progressivement l’arbre jusqu’à sa mort éventuelle en l’espace

de 3 à 5 années à partir du moment de l’infestation initiale. Finalement, l’adulte émerge de

l’écorce entre la mi-mai et la fin juin de l’année suivante pour se reproduire et se nourrir de

feuilles de frêne (Ville de Montréal, 2012). Il est à noter qu’en général, les larves passent un seul

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hiver sous l’écorce avant d’arriver au stade adulte. Toutefois, dans les régions où le climat est

plus froid, les larves peuvent passer deux hivers sous l’écorce (Wei et autres, 2007).

L’agrile du frêne peut se propager de deux façons, soit de manière naturelle par leur capacité à

voler sur une certaine distance et par le biais de vecteurs de déplacement anthropique. En termes

de capacité de dispersion naturelle, l’agrile vole en général sur de courtes distances, mais face à

un manque de ressources, l’agrile peut parcourir en moyenne 1,3 km / jour et jusqu’à un

maximum 7 km / jour (Mercader et autres, 2011). Du côté anthropique, le principal vecteur de

dispersion est le déplacement du bois de chauffage infesté par le ravageur (Ville de Montréal,

2012). Ce dernier mode de dispersion est particulièrement difficile à contrôler étant donné la

variété d’utilisateurs pouvant potentiellement générer des déplacements de bois infesté.

Puisque les frênes attaqués par ce ravageur montrent très peu de signes et symptômes dans les

premières années de l’infestation, il est difficile de détecter de façon précoce la présence de

l’insecte. En effet, des indices évidents apparaissent seulement deux à trois années après le début

de l’œuvre destructrice du ravageur (Ryall et autres, 2010). Or, le frêne a largement été utilisé

pour aménager les milieux urbains du Canada. Environ 10 % des arbres urbains sont des frênes

dans plusieurs villes canadiennes (Ville de Gatineau, 2012). Actuellement, l’agrile du frêne est

considéré comme étant le ravageur forestier le plus destructeur que les États-Unis aient connu

(McCullough et Mercader, 2012). En plus d’engendrer des pertes économiques records, ce sont

les gouvernements municipaux et les propriétaires de maisons qui subissent les plus grandes

contraintes économiques liées au passage de cet insecte (Aukema et autres, 2011).

Ainsi, en raison des difficultés techniques à dépister la présence du ravageur, de la complexité à

bien contrôler les vecteurs de dispersion anthropique et de l’abondance des frênes en milieu

urbain, une attention particulière sera portée à la gestion de cette problématique au sein des

municipalités du Québec. L’objectif de cet essai est de développer un outil québécois de gestion

régionale ayant pour but de préparer adéquatement chaque municipalité à faire face à l’arrivée de

l’agrile du frêne sur leur territoire. Pour atteindre cet objectif, le contexte général de la

gouvernance des espèces exotiques envahissantes au Canada et au Québec sera abordé. Puis, les

outils et les méthodes de gestion de l’agrile qu’une municipalité peut employer seront détaillés.

Ultimement, cet essai apportera un regard critique sur la gestion des espèces exotiques

envahissantes et plus spécifiquement de l’agrile du frêne au Québec. Il présentera également un

outil de gestion régionale de l’agrile du frêne flexible et facilement adaptable à l’évolution des

connaissances scientifiques.

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Depuis la découverte du ravageur en Amérique du Nord, une quantité importante d’informations

sur le sujet a été publiée sur de nombreux sites internet ainsi que sous forme d’articles

scientifiques et de documents gouvernementaux. Or, afin d’assurer la représentativité et la

pertinence des informations véhiculées dans le présent document, un contrôle rigoureux des

sources utilisées a été appliqué. Pour ce faire, les choix de références consultées ont été guidés en

fonction de la crédibilité des auteurs et de l’année de publication. Ainsi, lorsque disponible, les

informations les plus à jour ont été utilisées et la priorisation suivante des documents a été

respectée : article scientifique corrigé par les pairs, article de presse universitaire, documents

gouvernementaux, sites internet d’organisations ou associations reconnues.

Pour aborder la problématique de l’agrile du frêne, l’essai a été divisé en trois chapitres

différents. Le premier chapitre présente le contexte général de la gouvernance des espèces

exotiques envahissantes au Canada. Les rôles des gouvernements fédéraux, provinciaux et

municipaux par rapport aux espèces envahissantes en général et plus spécifiquement à l’agrile du

frêne sont détaillés. Le second chapitre présente les outils et les stratégies de gestion du ravageur

qui peuvent être déployés dans un contexte urbain. Il décrit les différentes étapes à considérer

dans le cadre de l’élaboration d’un plan de gestion de l’agrile. Puis, le dernier chapitre illustre les

lacunes observées et énonce des recommandations en matière de gouvernance des espèces

exotiques envahissantes et de l’agrile du frêne au Québec. Il propose également un outil de

gestion du ravageur applicable à l’échelle régionale.

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1. MISE EN CONTEXTE ET GOUVERNANCE

La problématique des espèces exotiques envahissantes (EEE) sera d’abord abordée dans un

contexte général et sera liée avec le sujet de la présente analyse. Puis, les rôles des différentes

instances gouvernementales dans la gestion des espèces exotiques seront détaillés afin de mieux

comprendre le partage des responsabilités d’intervention. Les responsabilités des ministères

fédéraux, provinciaux ainsi que les autorités municipales seront définies dans une perspective

reliée à l’agrile du frêne (ADF).

1.1 Espèces exotiques envahissantes

Afin de bien situer la problématique soulevée par l’espèce ciblée dans cet essai, il est impératif de

bien comprendre les définitions qui s’appliquent dans de telles circonstances, l’origine des

espèces exotiques envahissantes et les impacts qu’elles provoquent.

1.1.1 Définition

Le terme « espèce exotique » est assez large, car il désigne autant les espèces végétales, animales

et micro-organismes (virus ou bactérie) s’étant introduits hors de leur aire de répartition naturelle.

En effet, selon la définition établie à la Conférence des Parties à la Convention sur la diversité

biologique (CDB), les espèces exotiques incluent :

« toute espèce, sous-espèce, ou taxon inférieur, introduite hors de son aire de

répartition normale, passée ou présente; comprend toutes les parties, gamètes,

graines, œufs ou propagules d'espèces de ce type qui pourraient survivre et se

reproduire.» (CDB, s.d.c., p. 273)

Toutefois, pour avoir le statut d’espèce exotique envahissante (EEE), celle-ci doit constituer une

menace de dommages économiques ou écologiques pour les écosystèmes, les espèces ou les

habitats (ibid.). Donc, une espèce exotique peut avoir été introduite dans un milieu naturel

longtemps avant d’être jugée envahissante. Certaines espèces peuvent prendre une année, une

décennie, voire même un siècle avant d’atteindre des proportions problématiques pour le milieu

naturel et l’économie locale. Par exemple, la renouée du Japon (Fallonia japonica), une plante

ornementale introduite en 1825 en Europe, est devenue envahissante seulement à partir du milieu

du 20e siècle. Les espèces exotiques ont besoin d’un ou plusieurs éléments déclencheurs avant de

devenir invasives, par exemple, un changement des conditions du milieu (climat, perturbation

physique, perturbation anthropique), un changement biologique de l’espèce envahissante

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(hybridation, mutation) ou encore l’atteinte d’un seuil démographique de la population fondatrice

(Conférence française pour la biodiversité, 2010). Lorsqu’un ou plusieurs de ces éléments

déclencheurs surviennent, il en résulte une croissance rapide de la population, atteignant des

proportions qui mettent en danger les espèces indigènes ou les cultures. Les espèces indigènes

sont des espèces originaires de la région où elles se trouvent. En général, ces espèces ont évolué

depuis des milliers d’années en s’adaptant à leurs milieux et constituent un élément important de

l’écosystème (Environnement Canada, 2013). Les espèces exotiques envahissantes qui

s’installent dans un nouvel environnement deviennent des prédateurs, des compétiteurs ou des

parasites pour les espèces indigènes du milieu récepteur (Environnement Canada, 2004). Ainsi,

ces envahisseurs perturbent le fragile équilibre qui règne au sein d’un écosystème naturel.

Les espèces exotiques sont typiquement partagées en trois grandes catégories selon les milieux

qu’elles fréquentent. Il y a les espèces aquatiques envahissantes qui affectent les milieux lacustres

et les milieux côtiers. Les animaux envahissants et ravageurs d’animaux peuvent prendre la forme

d’animaux terrestres ou de maladies affectant la faune et les animaux d’élevage. Finalement, la

dernière catégorie correspond aux végétaux envahissants et aux phytoravageurs qui incluent les

plantes terrestres, les insectes et les maladies affectant les plantes indigènes. L’agrile du frêne est

un phytoravageur se situant dans cette dernière catégorie, une attention particulière sera portée à

cet insecte tout au long des prochaines sections (ibid.).

1.1.2 Voie d’entrée

Toutes les introductions d’espèces exotiques envahissantes sont de nature anthropique

intentionnelle ou non intentionnelle. Dans le cas d’introductions intentionnelles, elles se

produisent lors d’un déplacement d’une espèce pour une utilisation précise et connue par

l’instigateur. Ces introductions peuvent être autorisées ou non autorisées (illégales). Les

introductions autorisées sont souvent réalisées pour des fins commerciales, comme l’échange

d’animaux domestiques (élevage, zoo et animaux de compagnie) et de semences (agriculture et

horticulture), tandis que les introductions non autorisées surviennent par le biais d’activités

touristiques (souvenir de voyage dans les bagages), des ventes de semences par internet et par

correspondance. Les introductions non intentionnelles quant à elles se produisent lorsqu’une

espèce utilise à l’insu de l’homme un de ses systèmes de distribution (échanges commerciaux

aériens, routiers et nautiques). Le tableau 1.1 résume les différentes voies d’entrée en fonction des

trois catégories d’espèces exotiques envahissantes (ibid.).

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Tableau 1.1 Voies d’entrée principales des espèces exotiques envahissantes (compilation

d’après : Environnement Canada, 2004, p.25)

En ce qui concerne les végétaux envahissants, ceux-ci sont souvent introduits intentionnellement

pour des utilisations horticoles ou encore pour leurs qualités appréciées pour des usages agricoles.

Des études menées aux États-Unis et en Australie ont démontré que la majorité des végétaux

envahissants dans ces pays ont été introduits de façon intentionnelle, tandis que les

phytoravageurs sont la plupart du temps introduits de façon non intentionnelle comme

contaminants des cargos de marchandises, des véhicules de transport et des conteneurs

d’expédition (Gouvernement du Canada, 2004). Dans de nombreuses situations, les

phytoravageurs utilisent les marchandises de bois ou les emballages de marchandise faits de bois

comme moyen de transport pour parvenir hors de leur aire de répartition. C’est notamment le cas

de la maladie hollandaise de l’orme, un champignon microscopique se développant dans les

vaisseaux conducteurs de la sève de l’arbre, qui a été introduite au Canada au milieu du 20e siècle

par l’entremise de bois infecté en provenance d’Europe (Ministère des Ressources naturelles du

Québec (MRN), 2013). Pour ce qui est de l’agrile du frêne, celui-ci est parvenu en Amérique du

Nord à la fin des années 1990 en se logeant dans le bois des palettes servant au transport des

marchandises.

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1.1.3 Impacts environnementaux, économiques et sociaux

Bien qu’une faible proportion des espèces exotiques introduites par l’humain dans un nouvel

environnement finisse par être considérée comme envahissante, les effets négatifs d’un seul ou

plusieurs de ces envahisseurs peuvent être considérables au niveau de la sécurité alimentaire, de

la biodiversité, des écosystèmes, de la santé animale et humaine, ainsi que pour le développement

économique. Afin de réaliser l’importance d’agir face à cette réalité dévastatrice, il est nécessaire

de bien comprendre l’ensemble des impacts environnementaux, économiques et sociaux.

Sur le plan environnemental, ces envahisseurs représentent une menace pour la biodiversité.

Selon l’Union internationale pour la conservation de la nature, les espèces exotiques

envahissantes sont placées au deuxième rang parmi les menaces pour la biodiversité, juste

derrière la disparition des habitats. Lorsque ces espèces s’installent dans un nouveau milieu, les

conséquences sur les écosystèmes et les espèces indigènes qui les composent peuvent être très

graves et irréversibles. Plus précisément, dans certains cas, elles sont des vecteurs de transmission

de maladie affectant la faune et la flore locales. Les espèces envahissantes peuvent également

modifier les habitats et les fonctions écosystémiques des milieux naturels, tels que l’hydrologie,

le cycle des matières nutritives et l’absorption des contaminants. Le pouvoir de captation des gaz

à effet de serre par la forêt et la capacité filtrante des milieux humides peuvent en être affectés

(Environnement Canada, 2004). De plus, ces envahisseurs seraient responsables du statut

d’espèces en péril de 44 espèces canadiennes (ACIA, 2008). Par exemple, la maladie hollandaise

de l’orme a décimé au-dessus de 600 000 ormes au Québec depuis son introduction en 1945.

Cette maladie, qui affecte les populations d’ormes, a d’importantes conséquences sur les milieux

urbains. Par exemple, dans le cas de la ville de Toronto, c’est 80 % des 35 000 ormes de la ville

qui ont été décimés par cette maladie (Environnement Canada, 2004). Quant à l’agrile du frêne, il

est estimé que l’insecte a décimé plus de 80 millions de frênes depuis son arrivée en Amérique du

Nord (Gaïa presse, 2013).

En ce qui concerne les impacts économiques, les espèces exotiques envahissantes engendrent des

pertes économiques principalement dans les secteurs primaires, soit au niveau de l’agriculture, la

pêche, la foresterie et l’exploitation des ressources fauniques. Les coûts associés aux pertes de

ressources d’intérêts économiques, à la lutte et au contrôle constituent les principales dépenses.

De surcroit, les espèces envahissantes peuvent menacer les relations commerciales entre

différents pays. Par exemple, la détection du longicorne asiatique, un coléoptère d’origine de

l’Asie qui s’attaque à la majorité des essences de feuillus, a nécessité la fumigation ou le

traitement à la chaleur des matériaux d’emballage de marchandise à base de bois. L’obligation de

Page 17: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

8

requérir à ces mesures a failli mettre un terme à des échanges commerciaux d’une valeur de plus

de 30 milliards de dollars entre le Canada et la Chine. Selon un rapport préliminaire visant à

évaluer les coûts économiques reliés à 16 espèces exotiques envahissantes au Canada, les coûts

annuels estimés pour leur gestion varient entre 13.3 et 34.5 milliards de dollars (Environnement

Canada, 2004). En ce qui a trait aux végétaux envahissants et aux phytoravageurs, l’Agence

canadienne d’inspection des aliments (ACIA) estime que le fardeau financier représente environ

7.5 milliards de dollars par année. Toutefois, il est important de noter que la plupart des analyses

d’incidence économique ne considère pas l’ensemble des impacts et pertes potentielles. Elles se

limitent souvent aux pertes de rendement et aux coûts engendrés pour la lutte et la réhabilitation

des habitats perturbés après l’application des mesures de contrôle. La valeur des services

écologiques perdus par les écosystèmes dégradés ainsi que les pertes économiques liées aux

aspects sociaux ne sont généralement pas reconnues. Pour cette raison, les pertes économiques,

bien qu’élevées, sont probablement sous-estimées (Bureau du vérificateur général du Canada

(BVGC), 2002). Dans le cas de l’agrile du frêne (ADF), les coûts associés à la gestion de ce

ravageur aux États-Unis sont évalués à environ 10 milliards de dollars sur une période de 25 ans.

Il est à noter que ce montant correspond seulement aux frais de gestion de ce ravageur et non aux

pertes économiques substantielles qui seront engendrées par la mort des frênes et aux autres

problèmes soulevés par cet insecte (Conseil québécois sur les espèces exotiques envahissantes

(CQEEE), 2013a).

Les répercussions économiques des espèces exotiques envahissantes sont nombreuses et peuvent

atteindre des sommes considérables. Toutefois, les impacts socio-économiques sont également

abondants. Par exemple, la perte de revenu, la perte de la valeur foncière d’un terrain, les

dommages à la propriété privée, les allergies menaçant la santé publique et l’incertitude sociale

soulevée par l’utilisation massive de produits chimiques pour lutter contre certaines espèces

exotiques représentent différentes formes d’impacts sociaux (Environnement Canada, 2004). En

2002, pour illustrer les inquiétudes soulevées par l’utilisation de produits chimiques dans le cadre

du programme de lutte contre la lamproie marine, qui affecte les Grands Lacs, 28 tonnes de

produits chimiques ont été déversées dans les cours d’eau se jetant dans les Grands Lacs (BVGC,

2002).

Dans le milieu agricole, les pesticides et les insecticides sont largement utilisés afin de protéger

les récoltes contre ces envahisseurs. Les effets à long terme de l’utilisation de ces produits dans

l’environnement et sur la santé humaine sont encore méconnus. De plus, ces envahisseurs

menacent le mode de vie de centaines de communautés rurales et autochtones qui dépendent de

Page 18: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

9

l’agriculture, de l’élevage, de la pêche, des espèces sauvages et de l’intégrité des milieux naturels.

Certaines espèces exotiques menacent également la santé humaine. C’est notamment le cas du

virus du Nil. Dans le cas de l’agrile du frêne, puisque les frênes ont été largement utilisés pour

aménager les milieux urbains, la perte de ces arbres peut également avoir une incidence sur la

formation d’îlots de chaleur. Ces îlots de chaleur se trouvent dans les milieux urbains hautement

artificialisés et se caractérisent par un manque de végétation naturelle procurant de l’ombre et une

température locale plus élevée. La perte de frênes dans les zones urbaines peut ainsi mettre en

danger les populations sensibles lors des périodes de chaleur estivales. Les arbres ont également

un rôle important pour la qualité de l’air en raison de leur capacité à filtrer une partie des

contaminants aériens. De plus, certains frênes constituent un patrimoine d’un quartier ou d’un

parc et possèdent une valeur sentimentale non négligeable.

1.2 Gouvernance fédérale

En 1992, lors du sommet de la Terre, à Rio, une attention particulière a été portée aux menaces

sur la biodiversité et à l’importance de celle-ci pour le bien-être de l’économie et des sociétés. En

guise de préparation pour cet important sommet, le Programme des Nations Unies pour

l’Environnement (PNUE) a convoqué, en 1988, un Groupe de travail spécial d'experts sur la

diversité biologique dans le but de vérifier la nécessité de créer une convention axée sur la

protection des ressources biologiques. Les travaux de ce groupe ont ainsi mené à la création de la

Convention sur la diversité biologique (CDB), qui est centrée autour de trois objectifs généraux,

soit la conservation de la biodiversité, l’utilisation durable des ressources végétales et animales et

le partage juste et équitable des avantages découlant de l’exploitation des ressources génétiques.

Dans ce traité juridiquement contraignant signé par 168 pays, incluant le Canada, les espèces

exotiques envahissantes sont reconnues comme une des principales causes directes de la perte de

biodiversité dans le monde (CDB, s.d.a.). Cette convention internationale stipule que les pays

signataires doivent mettre les efforts nécessaires afin de prévenir l’introduction d’espèces

exotiques et d’éradiquer ou de contrôler les espèces exotiques envahissantes déjà installées (CDB,

s.d.b).

Malheureusement, dix ans après la ratification de ce traité par le Canada, le bilan en termes

d’actions et de résultats n’est guère positif. En effet, en 2002, un rapport de la Commissaire à

l’environnement et au développement durable du Bureau du vérificateur général du Canada

montre que l’engagement pris par le Canada n’a pas été respecté. Ce rapport démontre que ni la

CDB ni la stratégie canadienne de la biodiversité élaborée en 1995 en réponse à la Convention

Page 19: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

10

n’ont engendré de changements concrets dans la gestion des espèces exotiques envahissantes au

Canada. Plus précisément, les constats sont les suivants :

Les espèces envahissantes qui menacent les écosystèmes, ainsi que leur voie d’entrée,

n’ont pas été recensées.

Les ressources financières et humaines nécessaires pour la gestion des envahisseurs

sont mal coordonnées entre les différents ministères et organismes fédéraux.

Il n’existe aucun consensus sur les priorités et les responsabilités entre les différents

ministères fédéraux et les autres administrations responsables.

Le gouvernement fédéral ne s’est doté d’aucune méthode d’évaluation des progrès

accomplis en regard à la gestion des espèces envahissantes.

Les trois ministères interpellés dans le cadre de la vérification générale sont Environnement

Canada (EC), Pêches et Océans Canada (MPO) et Transport Canada (TC). Le rôle

d’Environnement Canada est de coordonner les efforts nationaux nécessaires afin d’atteindre les

objectifs de la CDB. Il est en quelque sorte le maître d’œuvre responsable d’élaborer une stratégie

globale qui assure une cohérence entre les actions des différentes parties prenantes. Or, en 2002,

selon le bilan du Bureau du vérificateur général, aucune mesure concrète n’a été mise en place

pour empêcher les espèces envahissantes de dégrader la biodiversité au Canada. Pour ce qui est

de Transport Canada, il est responsable de réglementer les eaux de ballast des navires de

marchandises qui constituent une des voies d’entrée d’espèces exotiques aquatiques les plus

importantes. La vérification générale a mis en évidence que les eaux de lest ne sont pas

réglementées et qu’aucun registre de conformité de ces eaux n’est tenu, contrairement à ce qui est

fait aux États-Unis. Puis, en ce qui concerne Pêches et Océans Canada, ce ministère est

responsable de la protection des poissons, de leur habitat et de leur nourriture. Dans le dossier de

la gestion des espèces exotiques envahissantes, il est attendu que les menaces à la biodiversité

aquatique, leurs risques, ainsi que les priorités en matière de prévention, de contrôle et

d’éradication soient identifiés, chose qui n’a pas été faite (BVGC, 2002).

Mis à part Environnement Canada, qui affirme avoir débuté la coordination nécessaire pour la

préparation d’une stratégie nationale de gestion des espèces exotiques envahissantes, les autres

ministères ont accepté les recommandations formulées par le Bureau du vérificateur du Canada

sans toutefois préciser le moment où elles seront appliquées. Pour certaines recommandations, les

responsables de ce ministère ont laissé sous-entendre que les mesures seront prises en fonction

des ressources disponibles ou encore des mesures prises par les autres ministères ou

administrations impliquées (BVGC, 2002).

Page 20: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

11

1.2.1 Stratégie nationale sur les espèces exotiques envahissantes

En 2004, une stratégie nationale sur les espèces exotiques envahissantes (SNEEE) a été

développée en collaboration avec les différentes instances fédérales, provinciales et territoriales

concernées. Cette stratégie propose de lutter contre les espèces envahissantes en ayant recours à

une approche hiérarchique basée sur quatre priorités :

1) Prévention des nouvelles invasions

2) Détection précoce des nouveaux envahisseurs

3) Intervention rapide en présence de nouveaux envahisseurs

4) Gestion des espèces exotiques établies par éradication, confinement ou contrôle

Cette stratégie place la prévention au premier rang des priorités, car cette action constitue la

meilleure façon de diminuer les conséquences négatives reliées à l’introduction d’une espèce

exotique. Chaque investissement placé dans la prévention permet à la fois de diminuer les coûts à

long terme reliés à la gestion de ces envahisseurs et d’éviter les impacts environnementaux,

économiques et sociaux potentiels. La stratégie nationale s’attarde à la prévention des

introductions intentionnelles et non intentionnelles ainsi qu’à la prévention préfrontalière, c’est-à-

dire avant que les marchandises quittent le pays d’origine (Environnement Canada, 2004).

Pour ce qui est de la prévention des introductions intentionnelles, la stratégie propose une

approche d’analyse de risques considérant les aspects environnementaux, sociaux, culturels,

économiques et sanitaires. Une analyse de risques correspond à un examen approfondi des risques

basé sur des informations scientifiques permettant une prise de décision éclairée. Pour ce qui est

de la prévention des introductions non intentionnelles, une analyse de risques détaillée devra être

menée pour les différentes voies d’entrée afin de diminuer au minimum les risques d’introduction

par ces voies. Puis, afin de prévenir les introductions d’espèces envahissantes à la source, des

efforts de collaboration avec les autres pays seront favorisés.

Les trois autres objectifs de la stratégie visent à décrire une approche efficace de gestion des

espèces exotiques qui sont parvenues à s’établir dans un écosystème malgré les mesures de

prévention déployées. La détection précoce est importante pour les zones à haut risque comme les

milieux agricoles, les milieux naturels sensibles et les milieux urbains. De plus, la stratégie met

l’accent sur la nécessité d’avoir l’expertise taxonomique nécessaire afin d’accroître l’efficacité

des efforts de détection. Lorsqu’une introduction sera détectée, un plan d’urgence rapide devra

être déployé afin d’établir la meilleure approche de gestion, c’est-à-dire l’éradication, le

confinement ou le contrôle de l’espèce nuisible (Environnement Canada, 2004).

Page 21: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

12

En somme, cette stratégie permet d’énoncer les lignes directrices d’une initiative nationale, mais

elle reste encore plutôt générale. Or, la problématique de gestion des espèces exotiques

envahissantes est très vaste, car elle affecte autant les milieux forestiers et agricoles que les

milieux aquatiques. C’est pour cette raison que trois groupes de travail thématiques ont été mis

sur pied afin de rédiger un plan d’action correspondant à trois secteurs d’intervention prioritaires,

soit :

Les organismes aquatiques

Les plantes terrestres et les phytoravageurs

Les animaux terrestres et les maladies animales

En raison du sujet traité dans le présent document, seul le plan d’action sur les plantes terrestres et

les phytoravageurs retiendra l’attention.

1.2.2 Plan d’action pour les plantes terrestres et les phytoravageurs étrangers

envahisseurs

La même année que la mise en place de la SNEEE, un groupe de travail fédéral-provincial-

territorial spécifique à la thématique des plantes terrestres envahissantes et des phytoravageurs a

entrepris d’élaborer un plan d’action. Ce groupe de travail était constitué de différents ministères

fédéraux (Agriculture et agroalimentaire Canada (AAC), l’Agence canadienne d’inspection des

aliments (ACIA), Environnement Canada (EC) et Ressources naturelles Canada (RNCan),

l’Agence des parcs Canada (APC) et l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC)) et des

ministères provinciaux et territoriaux responsables de l’agriculture, des ressources naturelles et

des forêts (Gouvernement du Canada, 2005). Ce plan d’action a été réalisé en deux phases : la

première résume les objectifs arrimés à la SNEEE et les moyens proposés pour les atteindre

tandis que la deuxième phase énonce la mise en œuvre provisoire proposée par le groupe de

travail. Cette dernière phase définit les rôles, les responsabilités et les échéances pour la

réalisation des principales initiatives. Le plan d’action s’articule autour de six axes, soit :

Leadership et coordination

Législation et réglementation

Science

Analyse de risques

Éducation et sensibilisation du public

Collaboration internationale

Page 22: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

13

Il est à noter que ces six axes impliquent la participation de plusieurs ministères. Toutefois, tel

qu’illustré ci-dessous, l’ACIA détient un rôle central au sein de cette stratégie et relativement à la

gestion de l’agrile du frêne.

En ce qui concerne le leadership et la coordination, le plan d’action met l’accent sur l’importance

d’impliquer tous les niveaux de gouvernance (provinciale et territoriale) afin de coordonner

adéquatement les actions à entreprendre. Bien que la prévention de l’introduction d’espèces

envahissantes relève du mandat de l’ACIA, le contrôle des espèces nuisibles établies constitue

une responsabilité partagée entre les instances fédérales, provinciales, territoriales et locales. Afin

de coordonner une approche structurée et efficace à l’échelle du Canada, le plan d’action propose

de créer un conseil national sur les espèces exotiques envahissantes qui aurait comme

responsabilité d’établir les priorités d’actions à l’échelle nationale, de coordonner les activités des

divers intervenants (industries, gouvernements, organisations environnementales non

gouvernementales, universités) et de favoriser la communication d’informations pertinentes entre

eux (Gouvernement du Canada, 2004). De plus, l’instauration d’un réseau de protection des

végétaux administré par l’ACIA ayant pour fonction d’améliorer la communication et la

coordination entre les chercheurs, les responsables de la réglementation et les différents

intervenants du domaine des espèces exotiques envahissantes est également prévue. Ce réseau

favoriserait l’accès à l’information scientifique tout en évitant le dédoublement des efforts de

recherche. Finalement, il est aussi question dans ce plan d’actions de mettre en place des conseils

sur les plantes envahissantes et les phytoravageurs au niveau régional (provincial et territorial).

Ces conseils seraient intégrés au Conseil national sur les espèces exotiques envahissantes.

Du côté de la législation et de la réglementation, plusieurs lois fédérales couvrent la gestion des

espèces envahissantes à divers niveaux et dans des champs d’application spécifiques (voir annexe

1). Parmi ces lois, la Loi sur la protection des végétaux, administrée par l’ACIA, est certainement

la loi qui possède la plus grande portée en matière de gestion de ces espèces nuisibles. Elle

permet notamment de réglementer l’importation et le déplacement de végétaux à l’intérieur du

pays. Cette loi ainsi que les règlements qui en découlent permet entre autres de placer des zones

géographiques en quarantaine et d’entreprendre toutes actions raisonnables nécessaires pour

contenir et contrôler une espèce envahissante. Cette loi a largement été utilisée pour la gestion de

l’agrile du frêne par la mise en place de zones de quarantaine, par l’interdiction de déplacer le

bois de chauffage dans ces zones et par la mise en place d’une zone sans frêne en Ontario. Cette

zone représente un effort mis en place en 2004 par l’ACIA dans le but de ralentir la propagation

du ravageur. L’aménagement de cette zone consistait à couper tous les frênes dans une bande de

Page 23: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

14

terre d’une longueur de 35 kilomètres et d’une largeur de 10 kilomètres (voir figure 1). C’est

donc appuyé du Règlement sur la création d’une zone sans frêne découlant de la Loi sur la

protection des végétaux que l’ACIA a ordonné la coupe d’environ 85 000 frênes autant sur des

propriétés publiques que privées (Canadian Press, 2004). Malheureusement, cette tentative visant

à ralentir la progression de l’agrile n’a pas empêché l’insecte de se propager au nord de l’Ontario.

Figure 1.1 Zone sans frêne en Ontario (tiré de : Carolinian Canada, 2004, p. 3)

Bien que la Loi sur la protection des végétaux possède une grande portée et un grand pouvoir

d’action, certaines lacunes quant à la couverture de cette loi ainsi que d’autres lois ont été

identifiées lors d’un examen préliminaire du cadre juridique fédéral réalisé par Environnement

Canada. Le plan d’action propose donc de poursuivre cette analyse juridique et de l’étendre aux

cadres législatifs provinciaux et territoriaux dans le but d’harmoniser les lois régissant la gestion

des espèces exotiques envahissantes.

Pour ce qui est du volet science du plan d’action, celui-ci reconnaît l’importance des

connaissances scientifiques entourant la gestion des espèces envahissantes afin d’établir un

processus décisionnel et d’intervention éclairé. Des renseignements scientifiques fiables et

facilement accessibles sont nécessaires pour améliorer l’efficacité des activités de surveillance et

d’identification de potentiels ravageurs. Il est également important de détenir le plus de

renseignements possible sur les espèces indigènes présentes dans les milieux naturels du Canada

afin de faciliter l’identification d’espèces exotiques et l’incidence qu’elles ont sur ces milieux. Le

plan d’action propose la formation de réseaux nationaux de recherche sur les espèces exotiques

envahissantes et l’établissement d’un programme national de surveillance des plantes et des

phytoravageurs étrangers qui seraient dirigés par l’ACIA et appuyés par le Service canadien des

forêts de Ressources naturelles Canada (SCF-RNCan) (Gouvernement du Canada, 2004). Le SCF

est un des principaux acteurs en ce qui a trait aux efforts de recherche et aux gains de

Page 24: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

15

connaissances scientifiques en lien avec les espèces nuisibles. Par exemple, dans le cas de l’agrile

du frêne, le SCF participe activement au développement d’outils de détection de cet insecte et de

moyens de lutte biologique. Pour illustrer son implication, en juin 2013, sous les conseils

scientifiques du SCF, l’ACIA a autorisé l’introduction de deux espèces de guêpes de la Chine (T.

Planipennisi et S. Agrili) qui sont des prédateurs naturels de l’agrile afin de limiter la propagation

de ce ravageur. Ces guêpes s’attaquent aux larves de l’agrile en y déposant leurs œufs à l’intérieur

et en surface de celles-ci (ACIA, 2013). Par ailleurs, le SCF s’attarde présentement à isoler des

souches de champignons pathogènes au ravageur. Après avoir isolé la souche la plus virulente,

ces champignons communs dans les sols canadiens seront utilisés dans des pièges renfermant un

appât qui attire l’agrile. Ainsi, ces pièges infecteront les adultes et favoriseront ensuite la

transmission du pathogène au sein de la population (SCF, 2012). De plus, le SCF a mis au point

un insecticide à base de substances naturelles et qui est administré à un frêne infecté via la sève

de l’arbre. Lorsque les conditions d’application de l’insecticide TreeAzin® sont respectées, le

traitement est efficace pendant une durée de deux années et doit être renouvelé après cette période

(SCF, 2013). L’utilisation de ce pesticide constitue une façon efficace, écologique et non

destructive pouvant ralentir la propagation du ravageur. Plus de détails concernant ce produit

seront présentés à la section 2.4.1.

L’analyse de risques est un mécanisme de prise de décision fondé sur des informations

scientifiques. Ce mécanisme de prise de décision est largement mis de l’avant dans le plan

d’action, car il permet une approche décisionnelle équilibrée et éprouvée pour différentes

situations. Par exemple, le plan prévoit que cette approche sera utilisée pour déterminer les voies

d’entrée critiques, la meilleure gestion des espèces exotiques établies, l’établissement des

initiatives frontalières optimales et l’élaboration des meilleures stratégies d’intervention

d’urgence. En raison de l’expérience de l’ACIA en matière d’analyse de risques phytosanitaires

de marchandises d’importation et de ravageurs d’importance potentiels, cette agence est la

principale responsable de la réalisation des analyses mentionnées ci-dessus (Gouvernement du

Canada, 2005). Dans le cas de l’agrile du frêne, une analyse de risques liée à l’introduction des

deux espèces de guêpes chinoises comme moyen de lutte biologique a été réalisée par l’ACIA.

Dans ce cas, l’analyse a été faite dans le but de s’assurer que les espèces introduites ne s’attaquent

pas aux espèces indigènes du Canada et qu’elles ne deviennent pas à leur tour des envahisseurs

(ACIA, 2013).

L’éducation et la sensibilisation constituent un aspect essentiel et central à toute initiative visant à

prévenir et à contrôler la prolifération des espèces exotiques envahissantes. Le plan d’action

Page 25: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

16

propose une approche plus coordonnée de la communication d’informations entre les organismes

gouvernementaux, non gouvernementaux et le public en général. De plus, il est proposé

d’élaborer en collaboration avec les intervenants du milieu commercial et industriel des lignes

directrices portant sur des bonnes pratiques en matière d’importation et de transport de plantes et

de produits végétaux (Gouvernement du Canada, 2005). Dans le cas de l’agrile du frêne, l’ACIA

et le SCF ont publié de nombreux documents d’information et de sensibilisation, notamment des

guides de dépistage de l’ADF, plusieurs documents sensibilisant la population à ne pas déplacer

le bois de chauffage dans les zones réglementées et des documents sur les nouvelles technologies

de contrôle de l’ADF (lutte biologique et traitement des frênes avec insecticide).

La coopération internationale est essentielle afin de s’attaquer aux problèmes liés aux espèces

exotiques envahissantes dans son ensemble. La Convention internationale pour la protection des

végétaux (CIPV) dont le Canada et 178 autres pays font partie depuis 1951 constitue un des

premiers efforts de collaboration entre les pays. La CIPV vise à élaborer des mesures

phytosanitaires destinées à renforcer la capacité des pays membres à gérer les risques et les

impacts environnementaux, économiques et sociaux liés aux organismes nuisibles étrangers

(CIPV, 2013). À la suite de la ratification de cette convention, l’Organisation nord-américaine

pour la protection des plantes (NAPPO) a été mise en place conjointement avec le Canada, les

États-Unis et le Mexique. Cette organisation possède deux mandats principaux : le premier en est

un global afin d’atteindre les objectifs de la CIPV et coopérer au développement des standards

internationaux, tandis que le second a pour but de protéger l’agriculture, la foresterie et les autres

ressources végétales au sein des trois pays membres tout en ne faisant pas obstacle au libre-

échange des marchandises (NAPPO, s.d.). En ce qui concerne la problématique de l’agrile du

frêne, la NAPPO a mis sur pied un groupe consultatif technique afin d’examiner les différentes

alternatives en termes d'agents de lutte biologique. Plus particulièrement, les tâches du groupe

incluent la synthèse de la littérature scientifique disponible sur les programmes de lutte

biologique et la formulation de recommandations pour une meilleure coordination de la recherche

sur le sujet (Marcotte, 2013). Et enfin, en 1992, la Convention sur la diversité biologique,

également ratifiée par le Canada, met l’accent sur la nécessité de limiter les impacts des espèces

exotiques envahissantes dans le but de préserver la biodiversité pour les générations futures.

Globalement, le but du plan d’action est d’harmoniser les législations canadiennes avec leurs

contreparties internationales afin de mieux prévenir, détecter et contrôler les espèces

envahissantes. Une fois de plus, l’ACIA est au centre des initiatives de coordination

internationale du Canada (Gouvernement du Canada, 2005).

Page 26: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

17

1.2.3 Programme de partenariat sur les espèces exotiques envahissantes

Le programme de partenariat sur les espèces exotiques envahissantes (PPEEE) a été mis sur pied

en réponse à la SNEEE afin de favoriser la collaboration entre les différents intervenants locaux,

régionaux et gouvernementaux (organismes à but non lucratif, organisations gouvernementales,

institutions de recherche et d’éducation, organisations autochtones, industries et citoyens). Ce

programme mis en place en 2005 alloue des subventions aux projets qui partagent les objectifs

priorisés dans la SNEEE, soit la prévention, la détection et la gestion. En plus d’encourager une

variété de projets, le PPEEE cherche à promouvoir la participation et l’amélioration de la

compréhension des citoyens canadiens en lien avec les espèces exotiques.

Ce programme est muni d’un budget de 1 000 000 $ par année mis à la disposition d’une variété

d’intervenants de différents horizons pouvant bénéficier d’un financement annuel maximal de

50 000 $ par projet. Au total, 141 projets ciblant 277 espèces exotiques envahissantes différentes

ont été financés parmi les provinces et territoires du Canada entre 2005 et 2010, et ce, autant pour

les espèces exotiques aquatiques que terrestres. Parmi les bénéficiaires du programme, plusieurs

conseils provinciaux sur les espèces envahissantes ont vu le jour grâce à ces subventions

(Environnement Canada, 2012). Ces conseils provinciaux ont pour objectif de réunir les

intervenants pertinents en matière de gestion des espèces exotiques nuisibles et sera décrit

davantage à la section 1.3.3.

Il est à noter que le financement du PPEEE a été renouvelé pour un mandat de cinq années

supplémentaires, soit pour la période 2010 à 2015 (Secrétariat du conseil du trésor du Canada

(SCTC), 2013). Malheureusement, des diminutions de budget survenues en 2012 ont affecté ce

programme ainsi que d’autres programmes visant la qualité de l’environnement.

1.3 Gouvernance provinciale

Les espèces exotiques envahissantes représentent un problème à l’échelle internationale, car

chaque pays est à la fois affecté par l’introduction de ces espèces et responsable de leur

exportation. Par exemple, l’élodée du Canada, une plante herbacée aquatique indigène au Canada,

figure sur la liste noire des espèces exotiques envahissantes en France (Conservatoire Botanique

National Méditerranéen (CBNM), 2013). Cette réalité met en évidence l’importance du rôle des

gouvernements nationaux et d’une bonne collaboration internationale en ce qui a trait à la

prévention des introductions lors des échanges de marchandises internationales. Toutefois,

lorsqu’une espèce exotique devient envahissante au sein d’un pays, la participation de toutes les

instances gouvernementales pertinentes est nécessaire. Au Canada, à titre de principaux

Page 27: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

18

propriétaires fonciers et de gestionnaires de l’agriculture, des forêts, de la faune et des pêches en

eaux douces, les provinces et les territoires ont un rôle important à jouer en matière de gestion des

espèces exotiques envahissantes (Environnement Canada, 2004). En effet, bien que l’ACIA et ses

partenaires fédéraux coordonnent les efforts de prévention, de détection précoce et de contrôle

des espèces envahissantes, la gestion de celles installées au pays constitue une responsabilité

partagée entre les autorités fédérales, provinciales et locales (Gouvernement du Canada, 2004).

Les provinces et territoires détiennent des capacités législatives relatives à la gestion de ces

espèces exotiques. Ce sont généralement les ministères responsables de l’agriculture, des forêts et

des ressources naturelles qui possèdent ces compétences. Cependant, la portée réglementaire des

instances provinciales est souvent limitée et ne permet pas de couvrir l’ensemble de la

problématique. Les mesures législatives relatives au secteur de l’agriculture portent généralement

sur le contrôle et l’éradication d’espèces ayant un impact sur les rendements agricoles. En ce qui

concerne la gestion de la faune, certaines dispositions législatives provinciales régissent

partiellement les espèces exotiques envahissantes, c’est-à-dire qu’elles se limitent souvent aux

espèces de vertébrés. Puis, les dispositions législatives relatives à la foresterie s’attardent

davantage aux permis de coupe, aux limites de coupe, aux plans de gestion et à la

commercialisation du bois d’œuvre, à l’exception de la Colombie-Britannique et de la

Saskatchewan qui disposent de législation interdisant l’introduction de ravageurs et de maladies

forestières (Gouvernement du Canada, 2004).

1.3.1 Engagement du Québec

Lors du Sommet de la Terre en 1992, le Canada ainsi que ses provinces s’engageaient à préserver

la biodiversité en ratifiant la Convention sur la diversité biologique (CDB). En réponse à cet

engagement international, le Québec a élaboré, en 1996, sa première stratégie sur la diversité

biologique assortie d’un plan d’action en vigueur pour les années 1996 à 2002. Au total, 632

actions ont été citées dans le plan d’action, 141 ont été complétées avant 2002 tandis que la

grande majorité des actions restantes était toujours en cours après 2002. Dans le but de poursuivre

ses efforts, le gouvernement du Québec a réitéré sa volonté à respecter son engagement en

renouvelant la Stratégie québécoise sur la diversité biologique (SQDB) pour les années 2004 à

2007. Une fois de plus, cette stratégie était couplée à un plan d’action pour les mêmes années

(Gouvernement du Québec, 2004a). Bien que très détaillé et bien étoffé, ce plan d’action ne

prévoit que deux actions peu spécifiques en lien avec la gestion des espèces exotiques

envahissantes. Ces deux actions décrivaient l’importance de la participation du Québec dans les

initiatives de prévention et de contrôle des espèces exotiques envahissantes sur la scène

Page 28: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

19

internationale et au niveau fédéral dans le cadre de l’application de la Stratégie nationale

(Gouvernement du Québec, 2004b). Toutefois, un nouvel axe d’intervention spécifique aux

espèces envahissantes a été ajouté au plan d’action au moment de produire le premier rapport

annuel 2004-2005 sur la mise à jour de la SQDB. Deux actions spécifiques concernant des projets

d’étude sur le roseau commun (Phragmites australis) et sur une campagne d’éradication de la

châtaigne d’eau (Trapa natans) ont ainsi été ajoutées aux autres objectifs de collaboration

nationale et internationale (Gouvernement du Québec, 2006). Il s’agit d’un effort peu significatif

alors qu’il est reconnu que les espèces exotiques envahissantes constituent une des plus grandes

menaces pour la biodiversité. De surcroît, selon le deuxième rapport annuel 2005-2006 sur la

SQDB, une diminution du nombre d’espèces envahissantes ayant fait l’objet de travaux récents et

un retard dans la progression des objectifs reliés à ces espèces sont observés (Gouvernement du

Québec, 2008). Depuis 2007, aucune mise à jour de la stratégie ou du plan d’action n’a été faite.

Toutefois, en juin 2013, le gouvernement du Québec a adopté de nouvelles orientations en

matière de diversité biologique. La formulation de ces orientations a commencé à la suite de la

10e Conférence des Parties à Nagoya en 2010 et de l’adoption des 20 objectifs d’Aichi. Ces

orientations constituent une nouvelle approche visant la prise en compte de la biodiversité lors de

la planification et de la mise en œuvre des multiples actions gouvernementales. Aucun plan

d’action n’a été développé à ce jour. Cependant, selon Sabrina Courant, chargée de projet en

biodiversité au Ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des

Parcs (MDDEFP), une des actions immédiates à la suite de la publication de ces orientations est

de mettre en place un comité interministériel ayant pour mandat d’élaborer un nouveau plan

d'action en matière de diversité biologique (Courant, 2013). En ce qui a trait aux espèces

exotiques envahissantes, une seule orientation traite de ce sujet et elle s’adresse davantage à la

prise en compte de la biodiversité par les entreprises. En effet, elle aborde l’importance de réviser

le cadre juridique actuel et d’améliorer la performance des industries afin de mieux lutter contre

les espèces envahissantes (Gouvernement du Québec, 2013). Or, une bonne gestion de ces

envahisseurs demande un engagement encore plus grand que celle de l’industrie. En somme, le

gouvernement du Québec montre une bonne volonté à préserver la biodiversité, mais les efforts

restent encore insuffisants pour faire face à la problématique sans cesse grandissante des espèces

exotiques.

Page 29: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

20

1.3.2 Cadre réglementaire au Québec

En ce qui concerne les capacités législatives du Québec en matière de contrôle des végétaux

étrangers envahissants et des phytoravageurs, plusieurs lois possèdent un champ d’application

intéressant. Notamment, la Loi sur la protection des plantes permet de déterminer les maladies et

les insectes nuisibles et d’exiger à tout propriétaire ou gardien d’un lieu de prendre les actions

nécessaires pour limiter la propagation de celles-ci. Cette loi ressemble beaucoup à la loi

canadienne sur la protection des végétaux. La Loi sur les forêts quant à elle, comporte des

dispositions visant à contrôler les insectes destructeurs et les maladies cryptogamiques et a pour

but la conservation de la diversité biologique. Des mesures de contrôle phytosanitaires habilitent

des inspecteurs à s’assurer que des maladies et des insectes susceptibles de causer une épidémie

soient maîtrisés afin d’en limiter la propagation. Puis, la Loi sur la protection sanitaire des

cultures et les règlements qui en découlent ont pour objet la protection sanitaire des végétaux

cultivés à des fins commerciales. L’article 4 de cette loi habilite le ministère à identifier les

organismes nuisibles et les mesures phytosanitaires (mesures biologiques, chimiques ou

physiques) qui leur sont applicables. En vertu de cette loi, le ministère peut ordonner au

propriétaire d’un terrain de prendre à ses frais les mesures phytosanitaires nécessaires face à une

espèce exotique. Finalement, sans nécessairement cadrer dans une loi particulière, le MDDEFP a

maintenant l’habitude de considérer les espèces exotiques envahissantes dans les études

d’impacts environnementaux. En effet, dans le cadre des évaluations environnementales de

projets, des conditions peuvent être fixées par le ministère afin d’obliger l’entrepreneur à mettre

en place des mesures visant à détecter ces espèces étrangères et à limiter leur propagation.

Les ministères impliqués dans la gestion de ces lois sont le Ministère des Ressources naturelles

(MRN), le Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) et

le MDDEFP. Ces organisations gouvernementales participent également aux activités du Groupe

de travail canadien sur les espèces aquatiques envahissantes ainsi qu’à celui sur les plantes

terrestres et les phytoravageurs (Gouvernement du Québec, 2008).

1.3.3 Conseil québécois sur les espèces exotiques envahissantes

Le Conseil québécois sur les espèces exotiques envahissantes (CQEEE) est un organisme à but

non lucratif (OBNL) qui a été créé en 2012. L’objectif de ce conseil est de favoriser les échanges

d’informations et la coordination des actions entre les différents intervenants concernés. Le

CQEEE cherche donc à réunir et créer des liens entre les experts, les chercheurs, les représentants

du gouvernement, l’industrie et les OBNL pertinents afin d’améliorer la prévention, la détection

Page 30: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

21

et la gestion des espèces exotiques envahissantes (Galvez, 2012). Il est à noter que le Québec est

l’une des dernières provinces à avoir mis en place cette structure essentielle à la gestion des

espèces envahissantes. Malheureusement, en 2012, au moment où le conseil commençait ses

activités, des diminutions de budget fédéral ont empêché cet organisme d’obtenir l’aide financière

attendue de la part du PPEEE. Le conseil est malgré tout parvenu à obtenir du financement de la

part d’autres organisations. Cependant, une précieuse année pour avancer des dossiers urgents a

été perdue, notamment celui de l’agrile du frêne.

Comme premier mandat, le CQEEE travaille présentement à développer une stratégie et des outils

à l’intention d’une variété d’intervenants, dont notamment les municipalités et les municipalités

régionales de comté (MRC) qui doivent s’organiser rapidement pour faire face à ce ravageur en

pleine expansion au Québec. L’objectif de cette stratégie est de mettre en œuvre un programme

de prévention et de préparation ainsi qu’une campagne de sensibilisation intensive destinée aux

municipalités et aux intervenants de la Montérégie (CQEEE, 2013a). Cette stratégie est nommée

« Agrile du frêne : prévenir et s’y préparer! » et est séparée en deux volets différents. Le premier

vise à informer et outiller le plus grand nombre de municipalités et d’intervenants, alors que le

second s’attarde à la diffusion d’un message de prévention invitant les commerçants et les

consommateurs à limiter les déplacements de bois, qui constituent le principal vecteur de

déplacement de l’agrile du frêne. Par rapport à ces deux volets, le conseil a mené des sondages

auprès des intervenants de la région afin de déterminer les besoins immédiats et d’identifier des

pistes d’actions prioritaires à mettre de l’avant. Puis, un travail de concertation par le biais de

formations et d’ateliers de travail auprès d’intervenants de plus de 33 municipalités a permis

d’orienter les besoins de la phase 2 de la stratégie, soit l’ébauche d’un plan d’action régional

(CQEEE, 2013b). De plus, le CQEEE travaille présentement à la mise en place d’un site internet

qui offrira de nombreuses informations sur l’agrile du frêne (Godmaire, 2013).

1.4 Rôles des municipalités

Au Québec, les municipalités ont des compétences d’intervention assez large dans divers

domaines en vertu de la Loi sur les compétences municipales, notamment en ce qui concerne

l’environnement. En effet, selon les articles 4 et 19 de cette même loi, les municipalités peuvent

adopter des mesures relatives à l’environnement en autant que celles-ci ne contreviennent pas aux

lois provinciales et fédérales en vigueur. Par conséquent, comme bien d’autres problématiques

environnementales, les municipalités doivent s’occuper de la gestion des espèces exotiques

Page 31: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

22

envahissantes et des conséquences qui en découlent sans pour autant obtenir de financement

proportionnel aux efforts qu’elles doivent déployer dans de telles circonstances.

Considérant leurs responsabilités et l’étendue de leur territoire, les municipalités sont aux

premières lignes en matière de détection précoce et de gestion de ces espèces problématiques.

Chaque espèce envahissante possède des particularités distinctes et leur gestion demande un bon

niveau de connaissance et d’expérience. Dans le cas des grandes villes ou des grandes

municipalités, celles-ci possèdent les infrastructures, le personnel, le financement et souvent

l’expérience nécessaires pour gérer efficacement ces envahisseurs sur leur territoire. Par exemple,

la ville de Québec est une des seules villes nanties d’un programme de soutien à l’abattage

d’ormes affectés par la maladie hollandaise de l’orme. Le Règlement de l’agglomération sur le

programme de soutien à l’abattage des ormes atteints de façon incurable de la maladie

hollandaise de l’orme prévoit un remboursement de 50 % des frais d’abattage jusqu’à

concurrence de 350 $ par arbre. Dans le dossier de la gestion de l’agrile du frêne par la ville de

Montréal, une stratégie avant-gardiste de gestion de ce ravageur a été déployée et des outils

technologiques avancés ont pu être utilisés. En revanche, les petites municipalités n’ont souvent

pas les moyens d’offrir un tel soutien à leurs citoyens et ne possèdent pas les ressources

nécessaires pour développer une stratégie d’intervention élaborée. C’est pourquoi les prochains

chapitres visent à aider ces municipalités face à une espèce exotique envahissante causant

actuellement de lourdes pertes économiques au Québec, soit l’agrile du frêne.

Page 32: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

23

2. GESTION DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU URBAIN

Actuellement, aucun moyen efficace et économiquement rentable permettant d’éradiquer l’agrile

du frêne n’existe. Pour cette raison, l’approche de gestion du ravageur consiste à contrôler et à

ralentir la progression de celui-ci (United States Department of Agriculture (USDA), 2013).

Ainsi, en attendant que des outils d’éradication efficaces soient mis au point, la meilleure

approche consiste à suivre un plan de gestion intégrée rigoureux visant à ralentir la propagation

de ce ravageur.

Pour une municipalité, il existe typiquement deux façons d’aborder cette problématique; soit par

l’adoption d’une approche « ne rien faire et laisser aller » ou par le biais d’un plan de gestion de

l’agrile du frêne visant à limiter les impacts négatifs et à ralentir la progression de l’insecte. Il est

important de comprendre que dans le cas de la première approche consistant à ne rien faire, les

frênes succomberont tous éventuellement aux attaques du ravageur et chaque municipalité et

propriétaire foncier auront à abattre ceux-ci. En plus de causer la perte de tous les frênes, cette

façon de faire engendra des risques pour la santé publique. En effet, comme l’agrile peut tuer un

frêne en l’espace de 3 à 5 ans, l’inaction obligera rapidement la coupe de ces arbres en perdition

pour des raisons de sécurité (branches ou parties de l’arbre pouvant tomber). De plus, si aucun

travail d’abattage n’a été prévu préalablement, une surcharge de travail pour les entreprises

d’élagage et pour les services de foresterie municipaux pourrait empêcher ceux-ci d’abattre au

même rythme que la peste cause la perte des frênes sur le territoire. Le dépassement de la capacité

d’abattage constitue une situation favorisant la propagation de l’agrile du frêne. Effectivement,

face à l’urgence d’abattre les frênes constituant des dangers pour le public, une mauvaise gestion

du bois contaminé peut survenir et mettre à risques d’autres régions encore non infestées.

Connaissant ces risques, il convient que chaque municipalité se prépare adéquatement en

élaborant un plan gestion intégrée du ravageur prenant en considération l’ensemble des facteurs

environnementaux, économiques et sociaux. À cet effet, le présent chapitre décrira les grandes

étapes à considérer lors de l’élaboration d’un plan de gestion de l’agrile du frêne en milieu urbain.

Pour ce faire, les différents outils permettant de réaliser un inventaire d’arbres et d’organiser une

campagne de dépistage du ravageur seront présentés. Puis, les différentes approches de contrôle

de l’agrile présent sur un territoire urbain seront détaillées, soit le traitement des frênes à

l’insecticide et la planification d’un abattage stratégique. Finalement, une stratégie de gestion

intégrée de lutte contre le ravageur nommée « SLow Ash Mortality » (SLAM) sera présentée dans

un contexte urbain et régional.

Page 33: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

24

2.1 Inventaire de frênes

La connaissance d’un territoire constitue un excellent moyen pour faire face à tout évènement qui

pourrait le menacer, que ce soit une catastrophe naturelle ou une espèce exotique qui ravage les

arbres d’une région. Dans le cas de l’agrile du frêne, la connaissance du territoire commence par

un inventaire des populations de frênes qui y sont présentes. Cette démarche s’applique bien

entendu aux régions du Québec qui sont ou seront touchées incessamment par l’agrile.

Cependant, force est de constater que présentement, la majorité des régions québécoises n’ont pas

entamé ce processus. Dans ces circonstances, la problématique causée par l’agrile peut constituer

une excellente occasion pour réaliser l’inventaire des frênes et des différentes espèces d’arbre

présentes sur le territoire. Les informations recueillies dans le cadre de cette activité permettront

de mieux gérer ce ravageur et d’anticiper d’autres problématiques similaires pouvant émerger

dans le futur. En effet, il est fort probable que d’autres ravageurs spécifiques surgiront dans le

futur. À titre d’exemple, avant l’arrivée de l’agrile du frêne au Canada, la maladie hollandaise de

l’orme (Ophiostoma ulmi), le longicorne asiatique (Anoplophora glabripennis) ravageur de

certaines essences de feuillus dont l’érable ainsi que le longicorne brun de l’épinette (Tetropium

fuscum) ont affecté les milieux forestiers et urbains du Canada (ACIA, 2013b). Dans cette

perspective, il s’avère indispensable de mieux connaître le couvert forestier, en particulier en

milieu urbain, là où les arbres fournissent directement à la population une multitude de services

écologiques (diminue le volume des eaux de ruissellement, favorise la biodiversité, abaisse la

température ambiante en milieu urbain, dépollue l’air). Les avantages d’une bonne connaissance

des ressources en frêne sont nombreux pour se préparer à l’arrivée de l’agrile sur un nouveau

territoire :

Établissement d’un portrait de l’ampleur que la problématique peut atteindre et de

l’importance d’agir.

Estimation des pertes économiques probables reliées au ravageur.

Identification des avantages économiques et sociaux liés à l’établissement d’une stratégie

de gestion intégrée de l’agrile du frêne.

Estimation des besoins en frais d’abattage de frênes anticipés en cas d’infestation.

Localisation des zones d’intervention prioritaires et à risques pour la sécurité publique en

cas d’infestation.

Réaliser un inventaire de frênes sur un territoire permet de mieux anticiper l’arrivée du ravageur

et les besoins que la gestion de celui-ci engendrera. Il permet aux gestionnaires du territoire d’être

Page 34: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

25

proactifs et de limiter les impacts négatifs causés par l’agrile. L’inventaire d’arbres constitue la

première étape avant d’entreprendre les autres actions nécessaires pour l’élaboration d’un plan de

gestion intégrée. Ainsi, si l’insecte est détecté alors qu’aucune connaissance des arbres du

territoire n’a été acquise au préalable, un temps précieux sera conséquemment perdu pour réagir.

Une bonne connaissance des différentes espèces d’arbres sur le territoire apporte d’autres aspects

positifs, tels que :

L’identification des zones potentielles pour planter des arbres en vue d’augmenter la

couverture arborée de la municipalité.

La détermination d’un indice de couverture arborée, ce qui permet de fixer des objectifs

d’augmentation de celui-ci. Par exemple, la ville de Montréal vise à augmenter sa

couverture forestière de 20 % à 25 % (Direction des grands parcs et du verdissement

(DGPV), s.d.a.).

L’estimation de la valeur économique des arbres en fonction des services écologiques

qu’ils rendent tels que le contrôle de l’eau de ruissellement, la séquestration de carbone et

de polluants, la prévention de la création d’îlots de chaleur, les économies d’énergie pour

les maisons, l’augmentation de la biodiversité, la mise en valeur d’un site ou d’un

quartier (Ville de Montréal, 2005).

La capacité d’affronter les maladies ou les espèces exotiques envahissantes menaçant le

patrimoine arboricole.

Dans tous les cas, que ce soit pour les frênes ou d’autres espèces d’arbres, il existe plusieurs

outils d’inventaire pour les milieux urbain et forestier. Deux types d’approche d’inventaire

forestier peuvent être employés, soit les méthodes ascendantes et descendantes qui seront

respectivement décrites en détails dans les sections 2.1.2 et 2.1.3. Toutefois, en raison de

l’importance d’agir immédiatement en milieu urbain dans le cas de l’agrile du frêne, ces sections

seront consacrées davantage aux outils d’inventaire applicables à ces milieux.

2.1.1 Frênes privés et publics

Toute d’abord, il est important de souligner que la réalisation d’un inventaire d’arbres en milieu

urbain présente certaines subtilités par rapport à un inventaire de milieu forestier. Ainsi, en milieu

urbain, il est essentiel de faire la distinction entre un arbre situé sur une propriété publique et un

arbre situé sur une propriété privée, car la gestion de ceux-ci diffère dans une perspective de

gestion intégrée d’une espèce envahissante comme l’agrile du frêne. Les arbres publics sont ceux

retrouvés en bordure de route, dans les parcs, dans les espaces verts et dans les places publiques.

Page 35: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

26

Par opposition, les arbres situés sur terrain privé correspondent à tous les arbres qui ne se trouvent

pas sur des terres publiques et qui appartiennent par conséquent à des citoyens, des commerçants,

des industries ou des institutions. Il est à noter que les arbres privés sont entièrement et

légalement sous la responsabilité des propriétaires. Évidemment, les gestionnaires municipaux

sont davantage intéressés à connaître de façon exhaustive l’emplacement et la quantité des arbres

publics, car ils sont responsables de tout dommage ou tort que pourrait causer ceux-ci. Sachant

que l’agrile peut causer la mort d’un frêne en quelques années, il est de la responsabilité des

municipalités de prévenir toute situation pouvant compromettre la sécurité des voies publiques et

de ses citoyens. Néanmoins, il demeure tout de même nécessaire de bien connaître les arbres

situés sur les terrains privés afin de pouvoir appliquer une stratégie de gestion efficace contre

l’agrile du frêne à l’échelle du territoire.

2.1.2 Approche ascendante d’inventaire

La méthode ascendante, également nommée « Bottom-up approach » s’effectue par des relevés de

terrain afin de comptabiliser les différentes essences d’arbres et de collecter plusieurs

informations spécifiques comme le diamètre à hauteur de poitrine (DHB), la hauteur,

l’emplacement par coordonnées GPS et l’état de santé des arbres. Il existe deux façons distinctes

de procéder à un inventaire de terrain. La première consiste à recenser tous les arbres sans

exception tandis que la deuxième vise à échantillonner des parcelles de terrain déterminées au

hasard au sein d’une zone d’étude (United States Department of Agriculture Forest Services

(USDA FS), s. d.).

Un inventaire de l’entièreté des arbres d’une zone d’étude permet évidemment d’obtenir un

niveau de détail très élevé. Dans ce type d’inventaire, chaque arbre est recensé, ce qui demande

beaucoup de temps et de ressources humaines. De ce fait, cette approche d’inventaire peut

devenir très onéreuse si appliquée à grande échelle. Par conséquent, cet outil s’applique mieux à

des zones d’étude réduites tel que des espaces verts qui revêtent une grande valeur économique,

patrimoniale ou sociale au sein d’une municipalité.

Quant à elle, l’approche d’inventaire par parcelle cherche à établir un portrait général de la

distribution et de l’abondance des arbres à partir de la caractérisation de plusieurs parcelles

représentatives de la zone d’étude. La plupart du temps, les emplacements des parcelles à

inventorier sont déterminés de façon aléatoire. Le type d’information recueillie sur le terrain ainsi

que la façon de déterminer le nombre de parcelles à échantillonner varient en fonction du type

d’information recherchée et de la précision désirée. Il est à noter que plus l’inventaire est précis

Page 36: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

27

(grand nombre de parcelles et d’informations recueillies), plus celui-ci sera dispendieux. Un

compromis doit être réalisé afin d’obtenir un maximum d’informations tout en limitant les efforts

et les dépenses. Certaines dispositions peuvent être prises afin de réduire les coûts reliés aux

travaux de collecte de données sur le terrain, notamment en utilisant des étudiants en formation

ou des bénévoles plutôt que des entrepreneurs ou des professionnels (USDA FS, s. d.).

Donc, en milieu urbain, l’inventaire peut être réalisé en utilisant un mélange des deux techniques

(complète et par parcelle) ou seulement une des celles-ci. Cependant, par souci d’économie de

temps et d’argent, l’inventaire par parcelle est généralement priorisé.

Pour réaliser un inventaire par parcelle en milieu urbain, Ressources naturelles Canada (RNCan)

propose un outil simple permettant d’estimer la proportion des différentes espèces d’arbres

présentes en bordure des voies publiques d’une ville ou d’une agglomération. Cet outil est

accessible gratuitement sur internet et un support technique est également proposé par RNCan

afin d’assister les usagers dans l’élaboration de l’inventaire. La méthode proposée consiste

d’abord à établir aléatoirement un nombre déterminé de parcours de 0.5 km de longueur dans les

rues du centre urbain à l’étude. Le préposé à l’inventaire doit ensuite parcourir ces segments de

0.5 km afin d’y identifier le genre et si possible l’espèce ou l’essence des arbres qu’il voit dans

les 10 premiers mètres des terrains à partir de la rue. Pour assurer une bonne représentativité des

informations collectées sur le terrain, 10 % de la longueur totale des rues du centre urbain doit

être inventorié. Par exemple, si un centre urbain possède au total 60 km de rue, au moins 6 km de

rue doivent être inventoriés. Le protocole d’inventaire à suivre, les formulaires à remplir sur le

terrain, des informations pour identifier les espèces d’arbres et les outils de calcul sont

disponibles sur le site internet (RNCan, 2013). Le tableau 2.1 présente les avantages et

désavantages de cette technique.

Tableau 2.1 Avantages et désavantages de l’outil d’inventaire proposé par RNCan

Avantages Désavantages

Compromis avantageux entre la précision de

l’inventaire obtenu et les coûts (faible coût)

Incertitude moyenne sur la précision des

estimations

Fournit une bonne estimation de la quantité d’arbres situés près des voies publiques, donc

les arbres potentiellement à abattre ou à traiter

pour des raisons de sécurité publique en cas

d’infestation

Se limite aux arbres situés près des voies publiques, ne prend pas en compte les arbres

entre les rues

Ne demande pas de main-d’œuvre spécialisée

et est à la portée d’un inspecteur municipal ou

d’un étudiant

Ne permet pas de localiser les différentes

essences d’arbres sur le territoire étudié

Page 37: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

28

Ce type d’inventaire est idéal pour les petites municipalités ou agglomérations, car les ressources

financières et le personnel y sont généralement limités. Toutefois, pour de plus grandes

municipalités ou villes susceptibles d’être affectées par un ravageur, un inventaire plus exhaustif

et précis peut se révéler essentiel. En effet, dans les grands centres urbains, la valeur économique

des arbres est souvent plus élevée en raison de leur importance comme élément structurant du

paysage et des biens et services écologiques qu’ils procurent. Afin d’assurer le maintien du

patrimoine forestier de ces milieux urbains, une approche ascendante permettant d’avoir un

niveau de détail élevé associée à des outils technologiques issus d’une approche descendante

peuvent s’avérer nécessaire à la gestion intégrée d’un ravageur comme l’agrile.

2.1.3 Approche descendante d’inventaire

La méthode descendante fait appel à des outils informatiques et géomatiques pour évaluer la

couverture arborée d’un territoire à partir d’images satellites et de photos aériennes.

Comparativement à l’approche ascendante, l’approche descendante est plus complexe

(technologie plus élaborée) et demande une main-d’œuvre plus spécialisée. Néanmoins, les deux

approches peuvent être utilisées conjointement ou séparément selon les besoins recherchés par

l’inventaire. Trois méthodes descendantes différentes seront présentées dans la présente section,

chacune possédant des niveaux de résolution, de précision et de coûts variables (USDA FS, s. d.).

Tout d’abord, il est possible d’utiliser les images disponibles auprès des banques de données

nationales afin d’estimer l’abondance générale de la couverture arborée. Ces images ont

l’avantage d’être accessibles gratuitement, toutefois, elles ont une faible résolution ne permettant

pas de distinguer individuellement les arbres. Ainsi, cette approche est davantage utilisée à

l’échelle régionale, car le manque de résolution des images ne convient pas au niveau de détail

recherché en milieu urbain (USDA FS, s. d.).

L’utilisation d’images satellites ou aériennes de haute résolution constitue un autre outil

d’interprétation disponible. Ces images procurent des informations beaucoup plus précises et

permettent une analyse plus détaillée du territoire à l’étude. Par contre, l’acquisition et

l’interprétation de ces images demandent de la main-d’œuvre spécialisée et exigent

conséquemment des investissements financiers importants (USDA FS, s. d.).

Finalement, la photo-interprétation à partir d’images « Google Maps » peut également être

utilisée pour définir la couverture arborée. Il s’agit d’interpréter le type de couverture arborée

pour une série de points aléatoires déterminée et d’estimer de façon statistique la couverture de la

Page 38: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

29

zone d’étude. Bien qu’économique et accessible, la précision de cette méthode varie grandement

en fonction de la qualité des images disponibles (USDA FS, s. d.).

Par exemple, la Oakville en Ontario a utilisé une approche d’analyse d’image de haute résolution

pour localiser les frênes dans le cadre de l’élaboration d’une stratégie de lutte contre l’agrile du

frêne. Plus précisément, cette ville a utilisé des images hyperspectrales du territoire prises à bord

d’un avion. Ce type d’image permet de décortiquer la lumière du visible en de nombreuses

bandes différentes, contrairement à l’œil humain qui ne détecte que trois bandes, soit le rouge, le

vert et le bleu. De cette façon, une abondance d’images représentant différentes régions du

spectre du visible est disponible, ce qui permet d’isoler la signature spectrale correspondant aux

frênes. Par l’identification de cette signature spécifique au frêne, il devient possible de déterminer

la quantité et l’emplacement précis des frênes sur le territoire à partir de ces images. Toutefois,

l’acquisition de données sur le terrain est nécessaire afin de valider la signature spectrale

individuelle du frêne. Cette technique sophistiquée permet de distinguer les frênes par rapport aux

autres espèces d’arbres avec un niveau d’assurance légèrement supérieur à 80 %. De plus, il est

même possible d’estimer le niveau d’infestation des frênes par l’agrile, car ceux-ci possèdent une

signature spectrale légèrement différente en raison de la perte de feuilles engendrée par le

ravageur (AMEC, 2011). Ainsi, cet outil a permis de créer une carte interactive disponible sur le

site internet de d’Oakville et sur laquelle on y retrouve l’emplacement des arbres et des frênes

situés près des voies publiques et dans les parcs (voir figure 2.1).

Figure 2.1 Carte interactive de l’emplacement des arbres de rues et de parcs de la ville

d’Oakville (tiré de : Ville d’Oakville, s. d.a.)

= Frênes

Page 39: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

30

Une autre approche permettant d’atteindre un niveau de précision supplémentaire en matière

d’inventaire de la couverture arborée consiste à utiliser des outils de télédétection par laser

(LiDAR). Au lieu de capter la lumière réfléchie par les surfaces comme c’est le cas avec

l’imagerie hyperspectrale, cette méthode utilise un laser qui émet de l’énergie qui est ensuite

réfléchie par les surfaces et retournée aux capteurs. Les principaux avantages de cette approche

sont les suivants :

Meilleure estimation de la hauteur des arbres

Permet d’identifier individuellement les petits comme les grands arbres avec plus de

précision

Permet de voir au travers des zones ombragées, par exemple, les arbres situés dans

l’ombre des bâtiments (O’Neil-Dunne, s. d.)

Ce niveau de précision n’est évidemment pas nécessaire dans les petites villes pour lesquelles des

approches plus simples pour réaliser un inventaire peuvent convenir. Cependant, pour des villes

comme Montréal, l’utilisation de cet outil peut être justifiée en raison de la grandeur du territoire,

de l’importance des zones ombragées et de la disponibilité de la main-d’œuvre spécialisée.

2.1.4 Outils i-Tree

Que ce soit par la méthode ascendante ou descendante, les informations acquises sur l’abondance

des arbres sur un territoire doivent être interprétées. Puisqu’il est trop long et onéreux de recenser

tous les arbres au sein d’une zone d’étude, il est utile de faire appel à des logiciels spécialisés afin

d’extrapoler et d’estimer les ressources arboricoles. À cet effet, en 2006, le « United States

Department of Agriculture Forest Services » (USDA-FS) a mis au point un logiciel moderne et

gratuit nommé i-Tree permettant d’interpréter les ressources arboricoles présentes sur un territoire

donné. Ce logiciel qui en est à sa 5e édition peut être utilisé autant à l’échelle d’arbres individuels,

de parcelles, d’un quartier, d’une municipalité que d’une région (i-Tree, s. d.). De plus, i-Tree est

également disponible et applicable à d’autres pays que les États-Unis. Une version adaptée pour

le Canada et l’Australie est également disponible afin de faciliter l’utilisation du logiciel par ces

pays. Plusieurs applications i-Tree différentes ont été développées afin de permettre aux usagers

de mieux quantifier les différents services écologiques rendus par les arbres en milieux urbains.

Ainsi, l’utilisation de ces applications aide les dirigeants d’un territoire à évaluer la capacité des

arbres à dépolluer l’air, à gérer les eaux de ruissellement, à séquestrer le carbone et par

conséquent à mieux juger de la valeur réelle de ceux-ci (i-Tree, s. d.). Cet outil est

Page 40: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

31

particulièrement utile afin de conseiller les dirigeants sur une stratégie appropriée pour faire face

à des ravageurs qui menacent de décimer une partie des arbres d’une municipalité.

Il est à noter que des applications spécifiques ont été développées afin de pouvoir utiliser les

informations issues des inventaires d’arbres réalisés avec une approche ascendante et

descendante. Par exemple, l’application « i-Tree Eco » utilise les informations recueillies lors

d’un inventaire de terrain par parcelle ou de l’entièreté des arbres d’une zone. Tandis que les

applications « i-Tree Canopy » et « i-Tree Vue » permettent d’évaluer la couverture arborée

respectivement à partir d’images « Google Maps » et d’images disponibles auprès des banques de

données nationales (i-Tree, s. d.).

La ville d’Oakville en Ontario a notamment utilisé le logiciel i-Tree pour réaliser leur inventaire

d’arbres et pour les aider dans l’élaboration d’une stratégie pour faire face à l’agrile du frêne. Les

résultats obtenus ont permis de statuer que les 177 300 frênes représentent 9.6 % de la canopée

urbaine et qu’ils engendrent des économies annuelles de 108 300 $ et de 67 000 $ respectivement

en frais de services de dépollution et d’économie d’énergie (Ville d’Oakville, s. d.).

2.1.5 Identification des zones à risques

Afin de se préparer à une invasion potentielle de l’agrile du frêne, il est important de connaître

l’abondance et la localisation des ressources en frênes sur un territoire, mas il est tout aussi

important de situer les zones à risques. C'est-à-dire, les zones pouvant facilement être peuplées

par le ravageur et représentant des vecteurs de déplacement efficaces de celui-ci en cas

d’infestation. Puisque le principal vecteur de déplacement de l’agrile du frêne est le transport du

bois de chauffage, les sites présentés dans le tableau 2.2 constituent les zones à risque à surveiller.

Tableau 2.2 Zones à risque (inspiré de : Lyons et autres, 2007, p.43)

Zones à haut risque Zones à risque modéré

Scieries de bois de feuillus Tout site de camping

Distributeurs de bois de chauffage Parcs privés, provinciaux et nationaux

Terrains permanents de caravaning Pépinières

Petites collectivités rurales où les habitants

chauffent principalement au bois

Fermes forestières et jardineries

Lorsqu’une région est déclarée en quarantaine par l’ACIA, les zones à risque devraient

rapidement être repérées sur le territoire, car celles-ci feront l’objet d’une surveillance accrue lors

des efforts de dépistage de l’agrile du frêne. En préparation à une infestation potentielle du

ravageur, les régions en périphérie des zones en quarantaine devraient également procéder à

Page 41: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

32

l’identification de ces sites à risque, car ils représentent une porte d’entré privilégiée pour le

ravageur. Le repérage de ces sites ne constitue pas une tâche très ardue, il s’agit de consulter les

annuaires Pages Jaunes afin de contacter les différentes entreprises citées dans le tableau 2.2

(Lyons et autres, 2007). Cette information constitue un bon point de départ pour organiser les

prochaines mesures à entreprendre dans le cadre d’un plan de gestion intégrée de l’agrile du

frêne.

2.1.6 Participation du public

Les citoyens peuvent être interpellés afin d’aider à la réalisation de l’inventaire d’arbres de leur

communauté. C’est notamment l’approche de la ville de Sainte-Anne-de-Bellevue au Québec qui

invite ses citoyens à communiquer avec le Service des Travaux publics s’ils possèdent un frêne

sur leur terrain ou encore s’ils remarquent des signes d’infestation (Ville de Sainte-Anne-de-

Bellevue, 2010). Puisque la plupart des inventaires d’arbres en milieu urbain s’intéressent

principalement aux arbres de rue, cette contribution de la part des citoyens permet d’apporter un

niveau de connaissance supplémentaire en ce qui a trait aux arbres privés. De plus, cette approche

permet également de sensibiliser les citoyens aux actions qu’ils peuvent prendre afin de protéger

leur frêne contre l’agrile. D’autres moyens visant à encourager la participation du public au

niveau de l’inventaire seront détaillés dans la section 2.6.

2.2 Dépistage

Lorsqu’une municipalité est menacée d’être infestée par l’agrile du frêne d’une année à l’autre et

qu’elle est située hors d’une zone règlementée, des efforts de dépistage peuvent être déployés,

dans certains cas, par l’ACIA sur son territoire. Toutefois, cette agence s’intéresse principalement

à la progression de l’agrile du frêne à la grandeur du Canada. Ses efforts de dépistage sont

réalisés dans le but de mettre à jour les frontières de la zone réglementée de quarantaine (ACIA,

2013c). Ainsi, les municipalités ne peuvent pas compter automatiquement sur l’ACIA pour

détecter la présence du ravageur sur leur territoire Il appartient donc à chaque municipalité de

détecter l’insecte et d’établir une stratégie de gestion de celui-ci. Dans cette perspective, les

municipalités ont tout intérêt à se prémunir d’une stratégie de dépistage efficace afin de pouvoir

réagir promptement quand la présence du ravageur sera confirmée.

La présente section s’attarde à décrire les différentes méthodes couramment utilisées pour

détecter l’agrile au Canada et aux États-Unis. La détection visuelle, les pièges attractifs,

l’écorçage de branches, l’annélation de frênes et la biosurveillance seront présentés.

Page 42: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

33

2.2.1 Détection visuelle

La première méthode de dépistage de l’agrile du frêne consiste simplement à observer l’état des

frênes afin d’y relever des signes et symptômes d’infestation.

Tout d’abord, il est essentiel que le personnel réalisant l’inspection visuelle soit en mesure de

reconnaître toutes les essences de frênes présentes dans la zone d’étude, car l’agrile s’attaque à

toutes les espèces de frêne sans exception. Dépendamment du milieu inspecté, il peut y avoir plus

ou moins d’espèces différentes de frênes à discerner. En milieu forestier ou encore dans les boisés

naturels, seulement cinq espèces de frênes indigènes peuvent être retrouvées dans l’est du

Canada. Tandis qu’en milieu urbain, en plus des cinq espèces indigènes présentes, de nombreuses

espèces de frêne exotiques utilisées en horticulture ornementale sont retrouvées (Lyons et autres,

2007). Le tableau 2.3 résume l’ensemble des espèces de frêne indigènes et exotiques retrouvées

dans l’Est du Canada.

Tableau 2.3 Espèces de frêne indigènes et exotiques présentes dans l’Est du Canada (inspiré

de : Lyons et autres, 2007, p.30-33)

Espèces indigènes Espèces exotiques

Frêne rouge/vert (Fraxinus pennsylvanica) Frêne commun (Fraxinus excelsior)

Frêne blanc (Fraxinus americana) Frêne de Mandchourie (F. mandshurica)

Frêne noir (Fraxinus nigra) Frêne à fleurs (F. ornus)

Frêne anguleux (Fraxinus Quadrangulata) Frêne à feuilles étroites (F. angustifolia)

Frêne pubescent (Fraxinus profunda) F. bungeana

Frêne de Chine (F. chinensis)

Frêne de l’Oregon (F. latifolia)

Il est à noter que les espèces de frêne exotiques présentées dans le tableau 2.3 correspondent aux

espèces les plus communes pouvant être rencontrées lors des inspections visuelles.

Par ailleurs, il est important de connaître et d’identifier aisément les signes et les symptômes d’un

frêne affecté par l’agrile du frêne. Un signe correspond à un dommage physique apparent causé

par le ravageur tandis qu’un symptôme correspond à une réaction physiologique de l’arbre

engendrée par la présence du ravageur. Toutefois, lors d’une inspection sur le terrain, il faut être

très attentif aux petits détails, car il est très difficile de détecter la présence de l’agrile dans les

Page 43: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

34

arbres nouvellement infestés. En effet, lorsque ce ravageur s’attaque à un frêne, les signes et

symptômes sont rares et peu visibles au cours des premières années de l’infestation (Lyons et

autres, 2007). Ils deviennent apparents seulement lorsque l’arbre est gravement infesté, soit 2 à 3

années ou plus après le début de l’infestation (Ryall et autres, 2010). Le tableau 2.4 présente les

signes et symptômes qu’un frêne ravagé par l’agrile peut montrer.

Tableau 2.4 Signes et symptômes (inspiré de : Lyons et autres, 2007, p.12-20)

Signes et

symptômes Aspect biologique Description du signe ou du symptôme

Dépérissement

terminal /

chlorose

Les larves d’agrile présentes sous

l’écorce endommagent le système

vasculaire de l’arbre. Ce qui nuit au

transport d’éléments nutritifs vers la

cime et les branches.

Décoloration (chlorose) et éclaircissement

du feuillage de la cime de l’arbre.

Branches mortes, feuillage jauni et

rameaux dégarnis peuvent être observés.

Pousses

adventives

Des pousses adventives peuvent

apparaître sur le tronc lorsque le

frêne est stressé par la présence de

l’agrile.

Ces pousses correspondent à des petites

branches poussant à la hauteur du tronc de

l’arbre lorsque celui-ci est stressé par un

bris physique ou une maladie.

Alimentation de

pics-bois et

écureuils

Les pics-bois sont des oiseaux

insectivores qui se nourrissent

d’insectes xylophages présents sous

l’écorce comme l’agrile. Tandis que

l’écureuil grignote à l’occasion

l’écorce pour se nourrir de larves de

xylophages.

L’activité accrue des pics -bois dans un

frêne peut démontrer la présence

d’insectes xylophages. Des trous brun

pâle de forme irrégulière laissés par un

pic bois peuvent être un bon signe

d’infestation. L’écureuil laisse quant à lui

des lambeaux d’écorce déchiquetés sur le

tronc.

Production

d’excès de

graines

Les arbres stressés par des insectes

ravageurs ou une maladie produisent

souvent des excès de graines.

Une quantité plus élevée de graines

(samares) est observée dans les frênes.

Dégât de

nutrition

Les adultes d’ADF doivent se nourrir

de feuilles de frênes pendant

plusieurs semaines avant d’être

sexuellement actifs.

L’agrile du frêne découpe des encoches

sur la bordure des feuilles de frêne.

L’observation de l’état des feuilles est un

signe à surveiller.

Trous de sortie L’agrile adulte fore un trou en forme

de « D » dans l’écorce pour sortir de

sa loge nymphale.

La présence de trous en forme de « D »

mesurant entre 3.5 et 4.1 mm est un bon

signe de la présence de l’agrile ou

d’autres Buprestides.

Déformation de

l’écorce

Lorsque la larve d’agrile creuse des

galeries sous l’écorce, l’arbre-hôte

peut réagir en produisant des tissus

de cicatrisation autour de la blessure,

résultant en une décoloration ou un

renflement de l’écorce.

Ce symptôme est souvent le plus facile à

détecter dans les premières années

d’infestation. Des fissures verticales de 5

à 10 cm d’où un suintement, une

coloration ou un renflement peuvent être

observés.

Galeries

larvaires sous

l’écorce

Lorsque les larves se nourrissent des

tissus vasculaires du frêne, elles

laissent des galeries serpentiformes

en forme de « S » sous l’écorce.

Les galeries larvaires sont généralement

pleines de sciures de bois et d’excréments

laissés par la larve. Les galeries

zigzagantes s’élargissent graduellement

jusqu’à atteindre 6 mm de largeur et entre

20 à 30 cm de longueur.

Page 44: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

35

Il faut toutefois être vigilant lors de l’inspection visuelle, car tous ces signes et symptômes ne

sont pas exclusivement causés par l’agrile du frêne. D’autres maladies ou atteintes peuvent

également causer des dommages similaires à l’arbre et par conséquent se manifester selon les

mêmes signes et symptômes (Lyons et autres, 2007).

Ainsi, la détection visuelle de l’agrile consiste principalement à inspecter visuellement l’écorce

(tronc et branches) et le feuillage de la cime des frênes à la recherche de tout signe et symptôme

décrit dans le tableau 2.4. L’inspecteur peut même aller jusqu’à relever l’écorce d’un arbre

suspecté d’être infesté afin de vérifier la présence de galeries laissées par les larves du ravageur.

Une attention particulière doit cependant être portée pour ne pas trop blesser l’arbre. De plus, il

est conseillé d’écorcer celui-ci du côté exposé au soleil, car les larves et les galeries qu’elles

laissent vacantes après leur départ vont davantage se situer du côté le plus chaud de l’arbre.

Les méthodes employées pour réaliser l’enquête varient en fonction des types de milieux que

l’inspecteur doit couvrir (haie, arbres ornementaux, zone riveraine, boisé, parc et forêt). À ce

sujet, le « Guide pour les enquêtes de dépistage de l’agrile du frêne » du Gouvernement du

Canada (Lyons et autres, 2007) fournit toutes les informations nécessaires pour mener une

enquête de dépistage de l’insecte. Il contient notamment des consignes pour mener les enquêtes

dans les différents milieux rencontrés sur le terrain, des formulaires en cas de détection ou de

soupçons de la présence du ravageur, des clés d’identification de frêne, des images explicatives et

bien d’autres informations utiles (Lyons et autres, 2007).

Les efforts de dépistage de l’agrile par le biais de l’inspection visuelle connaissent cependant

certaines limitations. Tout d’abord, tel que mentionné précédemment, cette approche ne permet

pas de détecter de façon précoce la présence de l’agrile, souvent l’insecte est déjà établi depuis

plusieurs années lorsque des indices peuvent finalement être détectés visuellement (Ryall et

autres, 2010). Puis, ce mode de dépistage permet d’avoir une image de la situation aux moments

de l’enquête et sa précision varie selon les budgets et les ressources disponibles. Ainsi, cette

approche ne permet pas de dépister de façon continue la présence de l’envahisseur. C’est

pourquoi il est également nécessaire de faire appel à d’autres outils de dépistage présentés dans

les prochaines sections.

2.2.2 Piège dans les arbres

Le dépistage de l’agrile au moyen de pièges est largement utilisé, car il est abordable, simple à

employer et permet une détection précoce du ravageur. Le fonctionnement de ces pièges est fort

Page 45: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

36

simple, il s’agit d’accrocher un prisme en plastique muni d’un attractif et de surfaces collantes

dans un frêne et de vérifier par la suite si des spécimens du ravageur y ont été attirés. Le prisme

en question est constitué d’une feuille de plastique pliée en trois pour former un prisme

triangulaire (environ 0.5 m de haut par 0.5 m de large) et d’une pochette d’attractif attirant

spécifiquement l’agrile du frêne suspendu au centre de celui-ci. Le principe est que l’agrile est

attiré par le (Z)-3-hexanol contenu dans la pochette et plus il s’en approche, plus il a de chance de

se coller aux surfaces collantes situées à l’intérieur du prisme. Puis, lors d’inspections

subséquentes des pièges, les spécimens prisonniers des surfaces collantes sont récoltés pour être

identifiés par un spécialiste (ACIA, 2013d).

Les pièges doivent être installés à la cime de frênes ayant au moins 20.3 cm (8 pouces) de

diamètre en début de la saison estivale, soit avant le 1e juin. Puisqu’il est connu que les frênes de

grande taille attirent plus d’agriles adultes, il est conseillé de prioriser le choix de ces arbres lors

de l’installation des pièges. En plus de relever les coordonnées GPS de l’arbre accueillant le

piège, il est conseillé de coller une affiche décrivant le but de l’enquête afin d’informer la

population et de sensibiliser celle-ci. Puis, une inspection des pièges doit être faite avant le 15

juillet afin de collecter les spécimens prisonniers du piège et de nettoyer ceux-ci pour leur

utilisation ultérieure, soit pour le reste de la saison estivale. Il est important de bien désobstruer

les pièges de tout débris et d’appliquer une nouvelle couche de colle sur les parois internes du

prisme. Enfin, la collecte finale des pièges doit être réalisée avant le 31 août. À ce moment, une

enquête visuelle doit être faite sur au moins 20 frênes situés dans un rayon de 100 mètres autour

de l’emplacement du piège (ACIA, 2013d). Bien que les enquêtes visuelles puissent être réalisées

tout au long de l’année, la fin de l’été et l’automne représente le meilleur moment pour observer

tous les signes et symptômes. Les résultats obtenus avec les pièges et les enquêtes visuelles

guideront les choix d’emplacements des pièges pour l’année suivante.

L’emplacement du piège dans un arbre est important, car l’efficacité du dispositif varie en

fonction de la hauteur à laquelle il est accroché et de la face nord, sud, est ou ouest de l’arbre sur

laquelle il est disposé. En ce qui a trait à la hauteur des pièges, il a été prouvé que plus le piège est

placé haut dans la canopée de l’arbre, plus celui-ci capturera de spécimens. En effet, une étude de

Francese et collaborateurs a démontré qu’un plus grand succès est observé avec des pièges placés

à une hauteur de 13 mètres par rapport à un piège placé à une hauteur de 6 mètres. Il a aussi été

démontré dans cette étude que les pièges placés à une hauteur de 1.5 mètre connaissent un

moindre succès par rapport à ceux placés à 6 mètres. Cette relation de succès proportionnelle avec

la hauteur s’explique par le fait que les adultes fréquentent davantage les hautes strates de la

Page 46: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

37

canopée pour se nourrir de feuilles avant la période de reproduction. Toutefois, l’installation de

pièges à une hauteur de 13 mètres demande une logistique plus élaborée (camion avec nacelle et

équipement pour grimper dans les arbres). Étant donné le succès de capture de l’agrile 4 fois

supérieur à une hauteur de 13 mètres en comparaison à 6 mètres et de l’importance de détecter

l’insecte rapidement, il peut tout de même être justifié de déployer cette logistique afin

d’augmenter l’efficacité des efforts de dépistage (Francese et autres, 2008).

Selon le « Protocole d’enquête sur l’agrile du frêne - 2013 » de l’ACIA, il est conseillé

d’accrocher les pièges à une hauteur supérieure à 5 mètres et préférablement le plus haut possible

(ACIA, 2013d). Ainsi, un compromis doit être fait entre la complexité logistique d’accrocher un

piège à une grande hauteur et celle à une hauteur moyenne. Dans une perspective d’optimisation

des coûts, la majorité des pièges pourrait être installés à hauteur moyenne tandis qu’une minorité

de pièges seraient placés à une plus grande hauteur dans des frênes situés près de zones à risque.

En ce qui concerne l’emplacement du piège par rapport aux points cardinaux, des études ont

démontré que les galeries de larves d’agrile se trouvent surtout sur le côté sud et ouest de l’arbre,

soit sur les côtés les plus exposés au soleil de l’arbre (Francese et autres, 2008). Connaissant cette

attirance pour ces faces de l’arbre, il est préférable de placer le piège du côté sud ou ouest de

l’arbre pour augmenter ses chances de capture (ACIA, 2013d).

Pour ce qui est du choix des frênes dans la zone d’étude qui accueilleront les pièges, l’étude du

comportement de l’agrile du frêne a permis de prouver que cet insecte est davantage attiré par les

arbres situés en bordure de forêt, dans les zones ouvertes ou dans des peuplements d’arbres

ouverts tels que des parcs. C’est encore une fois l’attirance envers les zones plus chaudes qui

amène l’agrile à fréquenter ces arbres. En plus de prendre en considération le comportement de

l’insecte dans le choix de l’emplacement des pièges, il est important de couvrir toutes les zones à

risques énoncées dans la section 2.1.5 ainsi que les zones suspectes ou connaissant un

dépérissement des frênes (ACIA, 2013d). En ce qui concerne l’espacement des pièges, le comité

scientifique canadien chargé d’étudier l’agrile du frêne conseille d’éloigner les pièges d’une

distance de 3 km (Gagné, 2013). De plus, avant d’installer tout piège, il est important de

communiquer avec l’ACIA pour synchroniser les efforts de dépistage, car cette agence pose

également des pièges dans les milieux urbains et les zones à risques afin de suivre la progression

du ravageur (ACIA, 2013d).

Page 47: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

38

2.2.3 Écorçage de branches

En plus de l’utilisation de pièges attractifs pour dépister la présence de l’agrile, une autre méthode

de dépistage consistant à couper des branches de frêne pour les écorcer peut être utilisée. Cette

approche consiste à écorcer les branches collectées afin d’y distinguer la présence de galeries

laissées par les larves de l’agrile sous l’écorce. Si le but de la campagne de dépistage est de

détecter la présence du ravageur, l’écorçage des branches peut cesser dès la détection d’une

première galerie. Par contre, si l’évaluation de la densité de la population du ravageur est

recherchée, il faut alors écorcer l’ensemble de la branche et comptabiliser le nombre de galeries

distinctes retrouvé. Évidemment, cette dernière activité demande deux à trois fois plus de temps

que le simple relevé de la présence de larves (Ryall et autres, 2010).

En ce qui concerne le choix des frênes à échantillonner et le choix des branches à prélever, les

mêmes principes que pour le positionnement des pièges attractifs s’appliquent. C'est-à-dire que

les arbres de grande taille et positionnés en milieu ouvert sont à prioriser. De surcroît, les

branches situées sur la face sud ou ouest et localisées à une hauteur moyenne par rapport à l’arbre

constituent les meilleurs échantillons (Ryall et autres, 2011).

Cette méthode permet donc de détecter la présence de l’agrile alors que l’infestation en est encore

à ses débuts. En effet, une étude dans laquelle un échantillonnage intensif de branches de

différents frênes ne présentant aucun signe et symptôme d’infestation a démontré qu’environ

75 % des spécimens échantillonnés étaient en fait infestés. Il a également été prouvé que cette

technique permet de détecter trois fois plus efficacement la présence de l’agrile qu’une approche

consistant à prélever l’écorce d’une surface correspondante au quart de la circonférence du tronc

à hauteur de poitrine. En plus d’être moins destructif et dommageable pour l’arbre, le

prélèvement de branches offre une meilleure efficacité de détection de l’agrile du frêne (Ryall et

autres, 2011). Voici d’autres avantages que procure cette approche :

Détecte des populations d’agrile de faible densité.

Les branches à écorcer peuvent être prélevées en même temps que les activités normales

d’entretien des arbres (élagage, abattage).

Procure de l’information directe sur l’état de santé des arbres.

Donne une idée plus précise de l’ampleur de l’infestation dans la zone d’étude.

Méthode assez facile à utiliser.

L’écorçage de branches peut être utilisé en combinaison avec des pièges attractifs.

Page 48: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

39

La détection précoce de l’agrile du frêne procure du temps précieux aux dirigeants du

territoire pour préparer une stratégie de gestion adéquate (Ryall et autres, 2011).

Les branches peuvent être collectées n’importe quand entre septembre et mai (Ryall et

autres, 2010).

Les principales différences entre la pose de pièges attractifs et la collecte de branches sont

l’obtention d’une meilleure information sur l’état de santé des arbres ainsi qu’une plus longue

période d’utilisation de la technique dans le cas de l’écorçage. Toutefois, la collecte de branches

peut s’avérer plus dispendieuse et demander plus de temps au personnel effectuant les travaux.

Une bonne façon de réduire les coûts reliés à la collecte de branches est d’assurer une bonne

coordination avec les élagueurs municipaux et du secteur privé afin de collecter des branches de

frêne coupées lors des opérations normales d’entretien des arbres. Ainsi, l’utilisation d’un

mélange d’écorçage et de pièges peut se révéler judicieuse pour augmenter la justesse de la

campagne de dépistage.

Finalement, il est à noter que l’ACIA n’utilise pas la méthode d’écorçage de branches lors de

leurs opérations de dépistage, néanmoins, l’agence offre des formations pour des intervenants

voulant utiliser cette technique. Le même genre de formation est également offert pour la pose de

pièges attractifs (Gagné, 2013).

2.2.4 Dépistage par annélation de frênes

L’annélation est une technique utilisée dans le domaine de la sylviculture consistant à retirer une

bande d’écorce sur la totalité de la circonférence de l’arbre dans le but de tuer ou d’affaiblir celui-

ci. Cette opération a pour conséquence de détruire les tissus transportant la sève de l’arbre. En

réaction à ces blessures, le frêne émet un composé volatil dans l’air ambiant pour lequel l’agrile

du frêne est sensible. Bien que le mécanisme de sélection des arbres-hôtes pour la reproduction

du ravageur ne soit pas parfaitement connu, il a été démontré que les frênes annelés attirent

davantage l’agrile que les frênes en santé (Michigan State University (MSU), 2008). Cette

technique s’appuie donc sur ce constat pour créer des « arbres-pièges » attirant le ravageur à

choisir ce frêne plutôt qu’un autre pour y pondre ses œufs. De cette façon, au lieu d’installer des

pièges attractifs ou de collecter des branches dans des endroits pouvant être occupés par le

ravageur, un frêne est annelé afin de détecter la présence de l’agrile dans un secteur donné.

Les frênes peuvent être annelés durant l’automne, l’hiver ou au début du printemps. Toutefois,

afin de faciliter l’opération d’écorçage, il est conseillé d’anneler les arbres au début du printemps,

car l’écorce est plus facile à retirer qu’à l’automne ou en hiver. Les arbres doivent

Page 49: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

40

impérativement être annelés avant la fin du mois de mai pour assurer l’efficacité de cette

approche, car il est important que l’arbre soit bien stressé et qu’il soit pleinement attirant au

moment de la reproduction de l’insecte (MSU, 2008).

Dépendamment de la profondeur de l’incision faite pour retirer l’écorce, les vaisseaux

responsables de transporter la sève brute en provenance des racines (xylème) ainsi que les

vaisseaux responsables du transport de la sève élaborée acheminée des feuilles vers les racines

(phloème) peuvent être endommagés. Dans cette dernière situation, l’arbre peut mourir en moins

de quatre mois, ce qui augmente les signaux volatils de stress émis par celui-ci. Tandis que si

l’incision est faite dans le but de couper uniquement le phloème situé entre le xylème et l’écorce

extérieure de l’arbre, ce dernier dépérira plus lentement et survivra probablement pendant deux

années (MSU, 2008). Puisque les arbres annelés sont voués à une mort certaine, il est important

de tenir compte du type d’incision pratiqué, car cela influera le moment où l’arbre devra être

abattu (durant la même année ou l’année suivante). Cependant, il est conseillé d’abattre les

arbres-pièges avant l’été de l’année suivante, sans quoi la prochaine génération de l’insecte

présente dans ces arbres pourra continuer son œuvre destructrice. Au moment de l’abattage de

l’arbre-piège, il faut inspecter visuellement celui-ci afin de détecter des signes et symptômes

(déformation de l’écorce, alimentation de pics bois et d’écureuils et dégâts typiques liés à

l’alimentation de la larve) permettant ainsi de mieux identifier les zones de l’arbre à écorcer.

C’est cette activité d’écorçage du frêne abattu qui permet de confirmer s’il y a bel et bien

présence d’agrile du frêne et d’évaluer au besoin la taille de la population présente dans le secteur

à partir du nombre de galeries retrouvé (MSU, 2008).

En ce qui concerne le choix de frênes à anneler sur le territoire, il est encore une fois préférable

de choisir des individus placés favorablement au soleil et situés dans des milieux ouverts (près

des routes, dans des parcs, en bordure de forêt). Toutefois, comme l’arbre devra être abattu

quelque temps après l’annélation, il importe de considérer la facilité d’accès à l’arbre quand

viendra le temps d’en disposer. La taille du frêne devrait également être considérée, car s’il est

trop petit, les risques qu’il brise sous l’influence de forts vents sont plus grands et s’il est trop

gros, ce dernier sera plus difficile à écorcer et à éliminer. Des spécimens ayant un diamètre à

hauteur de poitrine (DHP) entre 10 et 25.4 cm (4 et 10 pouces) devraient être priorisés. De plus,

puisque l’annélation affaiblit l’arbre jusqu’à le faire mourir, celui-ci peut représenter un danger

pour des infrastructures situées à proximité ou pour des passants. Il est donc préférable d’anneler

des frênes éloignés de tout endroit sensible, soit à une distance équivalente à au moins deux fois

la hauteur de l’arbre-piège (MSU, 2008). Finalement, l’espèce de frêne est à considérer dans le

Page 50: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

41

choix de l’individu à anneler, car l’agrile montre une préférence envers certaines essences de

frêne pour y pondre ses œufs. En effet, des recherches ont montré que lorsque plusieurs essences

de frêne sont présentes dans un même secteur, l’agrile préfère avant tout le frêne rouge/vert

(Fraxinus pennsylvanica), puis le frêne noir (Fraxinus nigra), suivi du frêne blanc (Fraxinus

americana) et finalement du frêne anguleux (Fraxinus quadrangulata). Le choix des arbres-

pièges devrait donc être guidé de façon à prioriser les frênes les plus prisés par l’agrile (MSU,

2008).

Dans une étude récente de Mercader et collaborateurs, il a été démontré que l’utilisation de

l’arbre-piège (annelé) est significativement plus efficace que l’utilisation de pièges attractifs afin

de détecter la présence du ravageur. En effet, dans des sites où la population d’agrile était faible,

la probabilité de détecter celui-ci était supérieure à 50 % avec l’utilisation d’un seul arbre-piège.

Tandis que dans une zone à faible et à forte densité d’agrile du frêne, la probabilité de détecter

l’insecte était tout de même inférieure à 35 % avec l’utilisation d’un piège attractif. De surcroît,

toujours dans des zones de faible densité d’agrile, la probabilité de détection augmentait à 90 %

avec l’utilisation de trois arbres-pièges alors que la probabilité de détection augmentait seulement

à 40 % avec l’utilisation de cinq pièges attractifs (Mercader et autres, 2013). À la lumière des

résultats obtenus, il est préférable d’utiliser au moins trois arbres-pièges ou plus dans un secteur

surveillé afin d’augmenter les probabilités de détecter l’insecte.

Néanmoins, même si cette approche démontre d’excellents résultats en matière de détection et

qu’elle permet d’évaluer la taille des populations du ravageur, il n’en demeure pas moins que

l’application de celle-ci est coûteuse et demande beaucoup de temps (SLAM, 2010). Ce sont

principalement les opérations d’abattage et d’écorçage qui augmentent la facture et qui

demandent beaucoup de temps en main-d’œuvre. Par contre, l’abattage de ces arbres empêche la

prochaine génération de l’insecte de voir le jour, ce qui permet de diminuer significativement la

population du ravageur. L’annélation de frênes est également considérée comme un outil de

gestion permettant de ralentir la progression de l’agrile (voir section 2.5.3). Enfin, cette approche

destructrice s’applique moins bien en milieu urbain ou encore dans des milieux où l’abattage des

arbres-pièges serait compliqué. Néanmoins, si l’abattage de frênes en milieu urbain est déjà

prévu, il peut être intéressant d’anneler ceux-ci avant de les récolter, ce qui permettrait à la fois de

mieux détecter la présence de l’agrile et de ralentir sa progression. C’est notamment ce que la

ville de Kansas City dans l’état du Missouri a décidé de faire avec 700 de ses frênes public prévus

à l’abattage (Kansas City Parks, 2014).

Page 51: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

42

Si le but de la campagne de dépistage est simplement de détecter la présence de l’agrile du frêne,

l’utilisation de pièges attractifs accrochés à des arbres-pièges peut constituer une alternative

intéressante et à la fois économique. Le frêne annelé aurait tout de même besoin d’être abattu, par

contre, une économie de temps et d’argent pourrait être réalisée en évitant l’étape d’écorçage, la

détection de l’agrile étant assurée par le piège attractif. Dans l’éventualité où aucun agrile n’est

détecté dans le piège, qu’aucun signe évident d’infestation dans le secteur n’est décelé et que le

frêne annelé semble suffisamment en santé pour survivre une année de plus, cet arbre pourrait

servir d’appât pour une année supplémentaire. Dans ces circonstances, le frêne serait encore plus

attirant pour l’agrile durant la deuxième année, car l’arbre serait plus stressé et émettrait plus de

signaux volatils. Il est cependant à noter que cette dernière approche n’est pas documentée et

qu’elle devrait être utilisée avec précaution.

2.2.5 Biosurveillance

Cette approche de surveillance de l’agrile du frêne fait appel aux capacités d’un prédateur à

capturer ce ravageur pour s’en nourrir. Le prédateur en question est une guêpe indigène de la

famille des Crabonidés nommée Cerceris fumipennis se nourrissant exclusivement de proies de la

famille des Buprestides (ACIA, 2013d). Cet insecte solitaire se construit des galeries dans le sol

où il y loge ses proies capturées durant la saison estivale afin de nourrir ses descendances. Bien

que solitaire, la guêpe installe son nid à proximité d’autres nids de la même espèce, si bien que

des colonies informelles de C. fumipennis sont retrouvées. Ce prédateur établit son nid

préférentiellement dans des endroits où le sol est compacté, composé principalement de sable et

garni à moitié d’herbacées et de sol à nu. De plus, comme les proies de cette guêpe fréquentent

les arbres, les nids sont rarement situés à plus de 200 mètres d’une zone boisée (Cerceris, 2013).

Ainsi, on retrouve surtout l’insecte dans des zones où le sol est perturbé par les activités

humaines, telles que les :

Terrains de baseball

Stationnements informels sur terre battue

Routes en terre battue peu fréquentées

Bordures de route sableuses

Sentiers piétonniers

Sols autour d’un emplacement de feu de camping ou d’un site de camping (Cerceris,

2013)

Page 52: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

43

Pour détecter l’agrile à l’aide de cette guêpe, il faut tout d’abord trouver un site actif occupé par

la guêpe. Pour ce faire, les emplacements potentiels de colonies peuvent facilement être repérés

en étudiant des images « Google Maps » et en considérant les sites énumérés ci-dessus. Puis, une

fois qu’un site actif a été localisé sur le terrain, il s’agit de surveiller celui-ci pendant un minimum

de trois après-midi ensoleillés du mois de juillet afin de collecter les proies ramenées au nid par la

guêpe. Il est à noter que la surveillance des nids peut se faire durant le mois d’août, mais le mois

de juillet est préférable, car les guêpes sont surtout actives durant les périodes chaudes de ce

dernier mois. Le but de l’exercice est de voler les proies de la guêpe qui retourne à son nid avant

que celle-ci ne puisse les entreposer dans son nid. La guêpe peut capturer entre 15 à 20 proies par

jour. Finalement, les proies volées à la guêpe doivent être recueillies dans une fiole pour ensuite

être envoyées pour identification auprès de spécialistes (Cerceris, 2013). Toutes les informations

nécessaires afin qu’une personne non familière avec les insectes puisse utiliser ce moyen de

détection de l’agrile du frêne sont disponibles sur le site internet :

http://www.cerceris.info/index.html

Cette méthode de dépistage possède plusieurs points forts et points faibles détaillés dans le

tableau 2.5. Néanmoins, la grande force de cette approche est la possibilité d’impliquer

facilement et économiquement les citoyens dans une démarche originale de dépistage de l’agrile

du frêne.

Tableau 2.5 Avantages et désavantages de la biosurveillance de l’agrile du frêne avec

Cerceris fumipennis (inspiré de : Careless, 2009, p. 19)

Avantages Désavantages

Méthode de détection plus sensible que les

pièges attractifs

La disponibilité limitée de la guêpe ne permet

pas de couvrir un grand territoire

Demande peu de matériel, il suffit de

surveiller, le travail est fait par la guêpe

Méthode de détection dépendante de

l’emplacement des nids trouvés

La surveillance peut être assurée par des

bénévoles ou des membres d’une association d’entomologistes amateurs

L’efficacité de la guêpe à capturer l’agrile est

influencée par les conditions météorologiques

Les informations recueillies peuvent guider les

activités de collecte de branches afin d’évaluer

la situation

Le début de la saison de chasse de la guêpe ne

coïncide pas avec l’émergence de l’agrile

La guêpe cherche activement l’agrile et peut

aller à des endroits qui ne peuvent être

couverts par d’autres méthodes de dépistage

Situe approximativement les foyers

d’infestation de l’agrile (la guêpe chasse en

moyenne à 750 mètres de son nid, mais peut aller jusqu’à une distance de 2 km)

Page 53: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

44

Il est à noter qu’une approche consistant à utiliser des nids de Cerceris fumipennis mobiles (tubes

de terre avec nid) a été testée et comparée à l’utilisation de pièges attractifs et il s’est avéré que

bien que cette méthode alternative offre une plus grande précision, elle demeure plus coûteuse et

demande plus de temps à déployer (Careless, 2009). Étant donné la complexité liée à la création

et à l’entretien des nids mobiles, il est préférable pour les dirigeants d’une municipalité de

s’attarder aux nids déjà présents sur le territoire à l’état naturel.

2.2.6 Formation du personnel et sensibilisation de la population

Au Canada, une grande proportion des foyers d’infestation de l’agrile du frêne ont été détectés de

façon visuelle. La plupart du temps, ce sont des personnes qui signalent des frênes en déclin dans

un secteur, après quoi des enquêtes plus approfondies sont menées afin de confirmer la présence

de l’envahisseur (Careless, 2009). La contribution que chaque individu (citoyen ou travailleur)

peut apporter dans les efforts de dépistage de l’agrile est importante.

Du point de vue d’une municipalité, la formation du personnel constitue un atout pour favoriser

une détection précoce de l’agrile du frêne. Plus précisément, le personnel amené à travailler à

l’extérieur devrait recevoir une formation sur l’identification des différentes espèces de frênes et

sur la reconnaissance des signes et symptômes d’un frêne affecté par l’agrile. Les employés

concernés représentent autant ceux directement (élagueurs, employés participant aux activités de

dépistage) en contact avec les frênes qu’indirectement en contact (jardiniers, urbanistes,

inspecteurs et tout autre employé pertinent). Des guides complets ou des aides mémoires visuels

d’identification des frênes et des signes et symptômes à surveiller peuvent également être remis

au personnel concerné. À ce sujet, plusieurs documents complets préparés par le Gouvernement

du Canada peuvent être utilisés. De plus, il est aussi conseillé aux municipalités d’offrir cette

même formation aux entrepreneurs privés (élagueur, jardinier, horticulteur et autres entrepreneurs

pertinents). Cette initiative permet d’augmenter significativement le nombre d’intervenants

pouvant éventuellement repérer la menace. Finalement, pour le personnel dédié aux activités liées

à la gestion du ravageur, des inspections visuelles à chaque sortie ou à chaque emplacement de

travail devraient être systématiquement réalisées.

Étant donné que la majorité des frênes se situe sur des terrains privés, le citoyen est un

intervenant de première ligne à ne pas négliger. En effet, il est important d’informer la population

de la problématique et de lui donner les outils nécessaires afin qu’elle puisse reconnaître les

signes et symptômes d’un frêne affecté par l’agrile.

Page 54: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

45

2.3 Plan de gestion de l’agrile du frêne

Une fois qu’un inventaire des frênes présents sur le territoire a été réalisé et que les efforts de

dépistage ont été organisés, il importe de s’attarder à l’approche de gestion du ravageur à adopter

lorsque celui-ci sera présent sur le territoire. Il existe typiquement deux approches de gestion de

l’agrile du frêne sur un territoire municipal, soit l’abattage et le traitement des frênes avec un

insecticide systémique. Les sections 2.4 et 2.5 présentent de façon détaillée ces deux méthodes de

gestion de l’insecte. La présente section s’attarde à présenter une étude comparant trois outils de

gestion visant à ralentir la progression de l’agrile ainsi qu’un programme permettant de calculer

les impacts économiques liés à différents modes de gestion.

2.3.1 Outils de gestion ralentissant la progression de l’agrile

Dans le cadre d’une étude de Mercader et collaborateurs, la capacité à ralentir l’infestation de

l’agrile du frêne avec trois outils potentiels de lutte a été évaluée à l’aide d’un modèle de

simulation. Il est à noter que la simulation a été réalisée dans un contexte de milieux forestiers

enclavés. Le premier outil considéré consiste à éliminer des frênes afin de réduire les ressources

nécessaires pour la reproduction et l’alimentation de l’agrile, soit le phloème et les feuilles de

frêne (section 2.5). Le deuxième outil de gestion s’appuie sur l’efficacité des frênes annelés à

attirer la femelle durant la période d’oviposition pour ensuite abattre ces arbres-pièges, réduisant

ainsi la population du ravageur de l’année suivante (section 2.5.3). Finalement, la troisième

approche consiste à appliquer un insecticide systémique tuant les larves se trouvant dans l’arbre

traité ainsi que les adultes qui s’en nourrissent (section 2.4). Plus d’informations sur chacune des

trois techniques présentées ci-dessus sont détaillées dans une perspective de gestion des territoires

urbains dans les prochaines sections.

L’étude a démontré que parmi les trois méthodes analysées, l’approche démontrant la meilleure

capacité à ralentir la propagation territoriale de l’insecte correspond à l’application d’insecticide.

Pour chaque outil analysé, l’application de celui-ci a été faite dans un rayon de 300 m à partir

d’un point d’origine de l’infestation par l’agrile. Dans ces conditions, les résultats de la

simulation ont montré une réduction de la propagation radiale du ravageur de 30 % ainsi qu’une

réduction de 40 % de l’alimentation dans le phloème du frêne par les larves d’agrile au-delà de la

zone traitée avec l’application d’insecticide systémique. Dans le cas de frênes annelés, une

diminution de 15 % de la propagation radiale de l’agrile et une réduction de 20 % de

l’alimentation dans le phloème du frêne par les larves ont été remarquées au-delà de la zone

traitée (Mercader et autres, 2011). En ce qui a trait à l’approche visant à éliminer les frênes pour

Page 55: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

46

réduire le phloème disponible, aucune réduction de la propagation radiale, de la taille de la

population et de l’alimentation dans le phloème n’a été constatée au-delà de la zone traitée.

Toutefois, une diminution de la population du ravageur a été observée au sein de la zone traitée

en réponse au manque de disponibilité de la nourriture et des sites de reproduction. Le faible

succès de l’élimination des frênes à ralentir la progression radiale s’explique principalement par

la bonne capacité de l’insecte à se déplacer (moyenne de 1.3 km/jour) lorsque les conditions d’un

milieu ne sont pas favorables (Mercader et autres, 2011).

Bien que cette étude ait été réalisée en milieux forestiers, les conclusions de celle-ci s’appliquent

tout de même au milieu urbain.

2.3.2 Évaluation économique d’une bonne stratégie de gestion

D’un point de vue économique, l’évaluation des coûts qu’une stratégie de gestion de l’agrile du

frêne engendrera pour une municipalité doit être faite avant d’aller de l’avant avec toute action.

Évidemment, l’approche apportant les plus grands bénéfices environnementaux et sociaux pour

un meilleur prix sera priorisée. Le but est donc de choisir l’option permettant de sauver le plus de

frênes possibles tout en optimisant les coûts relatifs par frêne ($ / frêne). Que la municipalité soit

active ou non face à la problématique, ce ravageur engendrera des pertes économiques soit par le

biais de la coupe et le remplacement de frênes dépérissants ou par l’application d’insecticide

systémique. Alors, comment déterminer si une démarche visant à laisser les arbres mourir pour

ensuite les abattre serait plus avantageuse économiquement qu’une approche consistant à

conserver des frênes en les traitant. À ce sujet, l’Université de Purdue propose un outil gratuit,

facile à utiliser et disponible sur internet afin de comparer les coûts annuels et cumulatifs sur un

horizon de 25 ans de n’importe quelle stratégie de gestion de l’agrile incluant un mélange

d’application d’insecticide, d’abattage et de remplacement des frênes (Purdue University, 2008).

Cependant, pour utiliser cet outil, les informations suivantes sont nécessaires :

Inventaire des arbres de la zone d’étude (nombre et taille des frênes).

Estimation des coûts d’abattage et d’application d’insecticide en fonction de la taille

des frênes.

Estimation des coûts de remplacement par frêne abattu (Purdue University, 2008).

Cet outil permet entre autre de comparer les coûts relatifs à trois scénarios de gestion différents,

ce qui permet aux gestionnaires de choisir l’option qui convient au budget et aux valeurs de la

municipalité. Ce calculateur de coûts permet aussi d’évaluer les dépenses relatives à l’application

Page 56: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

47

d’une approche expérimentale de gestion intégrée de l’agrile du frêne nommée SLow Ash

Mortality (SLAM) et présentée à la section 2.7.2 (Purdue University, 2008).

2.4 Application d’insecticide systémique

En plus d’être une excellente approche pour ralentir la progression du ravageur, l’application

d’insecticide systémique constitue également une bonne façon de garder des frênes vivants et en

santé. Par conséquent, cette approche a été reconnue comme étant particulièrement adaptée aux

milieux urbains où les arbres peuvent avoir une grande valeur (Mercader et autres, 2011).

Cette section présente le TreeAzin® comme l’insecticide systémique utilisé au Canada ainsi que

son utilisation pour traiter des frênes publics et privés.

2.4.1 Traitement des frênes au biopesticide

Il existe plusieurs insecticides spécifiques pour lutter contre l’agrile du frêne, mais au Canada, un

seul a été homologué pour cette application. Il s’agit du TreeAzin® qui a été mis au point dans le

cadre d’une collaboration entre le Service canadien des forêts (SCF) et une entreprise ontarienne

nommée BioForest Technologies inc. spécialisée en recherche et développement de solution de

lutte intégrée contre les espèces exotiques envahissantes. Cet insecticide est dérivé d’un composé

organique connu sous le nom d’azadirachtines et retrouvé dans les graines du margousier, un

arbre originaire de l’Inde (Thompson, 2013). Cet arbre est bien connu pour ses nombreuses

propriétés médicales et ses capacités à éloigner une grande variété d’insectes qui affectent les

plantes, les animaux et les humains (Info Naturel, 2014). Après de nombreuses années de

recherche en laboratoire et sur le terrain afin de valider le devenir du produit dans

l’environnement et l’efficacité du produit comme agent de lutte contre l’agrile, le TreeAzin® a

reçu une homologation d’urgence en 2008 pour qu’il puisse être utilisé en Ontario et au Québec

dans le cadre de la lutte contre le ravageur. Et finalement, l’insecticide a reçu la pleine

homologation nationale en octobre 2012 (Thompson, 2013).

L’insecticide s’applique au moyen d’un dispositif de micro-injection perfectionné par BioForest

Technologies inc. permettant d’injecter le TreeAzin® de façon sécuritaire directement dans le

frêne. Il s’agit simplement d’insérer des microbuses temporaires dans l’arbre à la hauteur du tronc

sur lesquelles des cartouches scellées et réutilisables d’insecticide sont fixées. Ce dispositif est

connecté directement au système de transport de la sève de l’arbre, si bien que l’on peut comparer

celui-ci à un système d’injection intraveineuse couramment utilisé en médecine. Pour obtenir un

meilleur rendement en frais de réduction des populations d’agrile du frêne, il est recommandé de

Page 57: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

48

procéder à l’injection de l’insecticide avant le début de l’été, soit avant l’émergence de la

nouvelle génération d’adultes. Ce moment est idéal pour que les ingrédients actifs soient

dispersés dans l’ensemble des tissus de l’arbre (feuille, phloème et xylème). De cette façon, les

adultes se nourrissant des feuilles du frêne seront affectés par le TreeAzin®, ce qui inhibera la

reproduction de ceux-ci et la capacité des larves à croître et à s’alimenter des tissus conducteurs

de l’arbre traité. Le fait que les adultes ayant consommé des feuilles de frênes traités produisent

très peu d’œufs viables contribue à diminuer les populations de l’insecte au sein de l’arbre, mais

aussi dans le secteur environnant celui-ci (Thompson, 2013). C’est d’ailleurs en partie pourquoi

une meilleure réduction de la propagation radiale du ravageur est observée avec le traitement des

frênes à l’insecticide systémique (Mercader et autres, 2011).

La durée de l’injection varie en fonction de l’état de santé, du milieu de croissance et de l’activité

de transpiration de l’arbre. Néanmoins, un temps d’injection évalué à 15 ou 20 minutes par arbre

est requis. Le coût du traitement varie quant à lui entre 150$ et 250$ pour des arbres de grande

taille (30 cm de DHP). Si l’arbre est plus petit et qu’il est facilement accessible, les coûts de

traitement peuvent être moindres. Il est évalué qu’une injection du TreeAzin® protège l’arbre

pour une durée de deux années. Il est donc conseillé de renouveler le traitement pour une période

de 6 à 10 années, ce qui représente des coûts équivalents à l’abattage et au remplacement du

frêne. Cette estimation s’appuie sur le fait que durant cette période, l’infestation sur le territoire

aura significativement diminué et que des moyens de lutte biologique permettant l’éradication de

l’agrile auront été déployés (Thompson, 2013).

Du point de vue environnemental, plusieurs études ont été réalisées et il a été démontré que

l’insecticide est peu toxique pour les mammifères, les oiseaux et les espèces non ciblées par le

composé actif. De plus, les composés d’azadirachtines sont non persistants dans l’environnement,

car ils sont soumis à des mécanismes naturels favorisant leur dégradation. Enfin, des recherches

sont actuellement en cours afin d’évaluer la possibilité d’utiliser le TreeAzin®

pour traiter

d’autres arbres contre d’autres ravageurs exotiques perceurs de bois tel que le longicorne

asiatique. Ce dernier insecte s’attaque à tout arbre à feuilles caduques, y compris l’érable qui

représente une ressource économique importante dans le sud-est du Canada et le nord-est des

États-Unis (Thompson, 2013).

2.4.2 Compromis entre traitement et abattage

Pour les municipalités, l’application d’insecticide demeure une excellente façon de sauver les

frênes publics et de réaliser de bonnes économies. Toutefois, pour qu’une stratégie d’application

Page 58: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

49

d’insecticide systémique soit pleinement efficace et permette de sauver un maximum de frênes, il

est essentiel que l’agrile du frêne ait été détecté à un stade peu avancé de l’infestation, idéalement

au plus tard la quatrième année suite au début de l’infestation (Mercader et autres, 2011). Dans la

situation où un frêne est lourdement infesté, l’application de l’insecticide n’est pas conseillée.

Afin de faciliter l’identification et la sélection des frênes éligibles au traitement, une liste de

critères spécifiques correspondant aux objectifs et cibles de la municipalité devrait être fixée afin

de guider le repérage de ceux-ci par l’inspecteur. Par exemple, la Ville de Toronto a établi une

liste de critères qu’un frêne doit rencontrer afin d’être considéré comme apte à recevoir le

traitement :

L’arbre est localisé sur un territoire public souvent fréquenté

L’arbre doit être situé dans un parc ou un parcours de golf

L’arbre doit avoir une bonne santé générale avec une quantité limitée de branches mortes

(moins de 30 % de branches mortes)

L’arbre doit se trouver dans un endroit où les frênes constituent une portion élevée de la

canopée (Ville de Toronto, s.d.).

Pour l’application de l’insecticide, il est à noter que le personnel doit être formé et doit porter les

équipements de protection individuelle recommandés (Thompson, 2013).

Puisque certains frênes sont trop jeunes, trop endommagés ou encore déjà trop infestés pour qu’il

soit économiquement avantageux de les traiter, les municipalités doivent se préparer à abattre une

certaine quantité de ceux-ci. En général, l’approche conventionnelle de gestion priorisée est de

faire un certain compromis entre l’abattage et le traitement de frênes publics. La plupart du

temps, les municipalités choisissent de traiter une certaine proportion de frênes (ceux ayant le

plus de valeur) et d’abattre la balance restante. Par exemple, Oakville a décidé de traiter 75 % des

frênes publics admissibles à recevoir le traitement, ce qui représente 5450 frênes situés en

bordure de rues et dans les parcs urbains. Pour les années 2012 et 2013, respectivement 3039 et

2400 frênes ont été traités, certains d’entre eux seront traités pour la deuxième fois (insecticide

efficace pendant 2 années). Dans cette ville, le traitement des frênes a débuté en 2009 et depuis ce

temps, 321 frênes traités ont été suivis de près afin de valider l’efficacité du programme de

traitement. En 2012, le suivi de ces arbres a révélé que 99 % des candidats sont encore en bonne

santé et ne démontrent aucun signe et symptôme d’infestation de l’agrile, ce qui prouve

l’efficacité de l’insecticide et encourage du même coup la continuité du programme de traitement.

Page 59: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

50

En ce qui concerne le 25 % des frênes qui n’ont pas été sélectionnés pour la campagne de

traitement, car trop petits ou déjà endommagés, il est prévu de les abattre (Oakville, 2013).

La Ville de Toronto quant à elle a jugé que le traitement de frênes représentait de trop grandes

dépenses, elle n’a donc pas priorisé un traitement des frênes à grande échelle comme la Ville

d’Oakville. Entre 2007 et 2010, la Ville de Toronto a traité seulement 450 frênes de grande

valeur. Tandis que le reste des 32 400 frênes en bordure de rue (sans compter les individus

présents dans les parcs et boisés) devront être abattus au courant des prochaines années (Ville de

Toronto, 2011).

Finalement, en dehors de l’approche conventionnelle de gestion de l’agrile du frêne, il existe une

autre approche de gestion expérimentale que la Ville de Montréal emploie présentement. La

section 2.7.2 s’attarde à présenter cette approche de gestion intégrée.

2.4.3 Traitement d’arbres privés

En général, sur les territoires municipaux, les frênes situés sur des terrains privés représentent une

grande proportion des individus à considérer. En effet, l’inventaire exhaustif des frênes sur le

territoire d’Oakville a permis de déterminer qu’il y a approximativement 44 000 frênes situés sur

des propriétés privées, ce qui représente environ la moitié des frênes de la ville (Oakville, 2013).

Toutefois, comme mentionné à la section 2.1.1, les municipalités n’ont aucun pouvoir sur ces

arbres, car il est de l’entière responsabilité des propriétaires privés de s’occuper de ceux-ci. Les

municipalités peuvent néanmoins sensibiliser les propriétaires à la situation et les orienter vers

des solutions et des outils leur permettant de décider du sort qu’ils veulent réserver à leur frêne,

soit le traitement ou l’abattage. À ce sujet, RNCan propose un outil d’aide à la décision

disponible gratuitement sur internet à l’intention des propriétaires privés de frênes

(http://gmaps.nrcan.gc.ca/apm/index.php?lang=f). Essentiellement, l’outil établit un comparatif

des coûts récurrents du traitement à l’insecticide d’un frêne et de ceux reliés à l’abattage et au

remplacement de celui-ci. Ce programme offre la flexibilité d’inclure divers coûts et bénéfices

additionnels associés aux arbres urbains, tels que la valeur ajoutée à la propriété, les économies

d’énergie réalisées, la réduction du ruissellement et de la pollution et les coûts d’entretien

récurrents de l’arbre. Les propriétaires peuvent ainsi calculer les gains ou les pertes nettes

associés au traitement de leur arbre sur un horizon de 30 ans (RNCan, s.d.).

2.4.4 Accord de traitement d’arbres publics par un citoyen

Selon l’approche conventionnelle de traitement des frênes publics décrite à la section 2.4.2, les

municipalités déterminent les arbres qui seront traités selon différents critères et selon la volonté

Page 60: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

51

politique de conserver ou non les ressources en frênes sur le territoire. Dans cette situation, il est

possible que certains frênes publics situés à proximité d’un terrain privé soient abattus au lieu

d’être traités. Or, les propriétaires peuvent être attachés à ces frênes en raison des services

écologiques qu’ils rendent et de la valeur sentimentale qu’ils représentent. Afin d’offrir la chance

aux citoyens de sauver ces frênes publics qui leur sont chers, les municipalités peuvent autoriser

le traitement de ces arbres aux frais du requérant dans le cadre d’un accord de traitement d’arbres

publics officiel. C’est notamment ce que la Ville de Toronto et d’Oakville proposent à leurs

citoyens.

La procédure mise de l’avant par ces deux villes est sensiblement comparable (Ville de Toronto,

2013). Dans les deux cas, avant de pouvoir procéder au traitement de l’arbre public au TreeAzin®,

il faut d’abord faire la demande au service de foresterie de la ville et qu’un inspecteur évalue si

l’arbre en question respecte les critères de traitement établis par la ville. Puis, un formulaire

d’engagement doit être rempli et soumis aux autorités compétentes de la ville afin que celle-ci

signe l’entente en guise d’approbation pour débuter les travaux de traitement (Oakville, s.d.b.).

La Ville d’Oakville a débuté son programme « Adopt-an-ash program » en 2010 et depuis ce

temps, 37 frênes publics ne satisfaisant pas les critères de traitement de la ville (moins de 20 cm

de DHB) ont été traités aux frais de citoyens impliqués. Cette initiative représente une excellente

façon d’engager la communauté dans la sauvegarde des frênes et de la gestion de l’agrile du

frêne. La gestion de cette problématique est un réel fardeau économique pour les municipalités, si

bien que chaque petit geste permettant de réduire les coûts d’abattage des frênes et d’impliquer la

population dans leur sauvegarde en vaut la chandelle. Cependant, cet accord de traitement

demande du temps aux inspecteurs municipaux pour examiner les arbres sujets à une telle

demande et pour rappeler aux citoyens que leur frêne adopté nécessite un renouvellement de

traitement deux années plus tard. Avant de mettre en place un tel programme, la municipalité doit

s’assurer d’avoir le personnel nécessaire pour administrer celui-ci (MacInnes, 2013).

2.5 Plan de coupe des arbres

Comme mentionné dans la section 2.4.2, face à cette problématique qu’est l’agrile, des frênes

vont inévitablement devoir être abattus, et ce même si l’on désire traiter un maximum d’arbres

avec un insecticide systémique. Ainsi, les municipalités doivent impérativement planifier

l’abattage des frênes infestés et dans certaines situations, anticiper l’abattage préventif de frênes

non infestés. Qui plus est, les municipalités doivent également prévoir une seine gestion des

résidus de frênes publics et privés engendrés par les activités d’abattage de ceux-ci.

Page 61: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

52

2.5.1 Planification de l’abattage

La planification stratégique de l’abattage des frênes constitue une importante partie dans la

gestion de l’agrile et une obligation pour chaque municipalité afin d’assurer la sécurité des voies

publiques et des espaces verts. Un manque de planification de la part d’une municipalité par

rapport à l’arrivée du ravageur et des impacts qu’il engendre peut engendrer des bris ou des torts

pour lesquels la municipalité pourrait être légalement tenue responsable. En effet, si certaines

parties d’un arbre public affecté par l’insecte venaient qu’à tomber et causer des bris physiques de

matériel ou encore des lésions corporelles, la municipalité pourrait en être tenue responsable si

aucune action raisonnable ou minimale n’a été portée au préalable pour éviter une telle situation.

Afin de bien planifier l’abattage des arbres et d’identifier les zones à risques où les frênes sont

plus nombreux, il est encore une fois nécessaire de disposer d’un inventaire des ressources en

frênes sur le territoire.

Puis, avec les informations de l’inventaire en main, les dirigeants de la municipalité doivent

déterminer la proportion de frênes publics qu’elle désire traiter et celle qu’elle devra abattre.

Deux façons distinctes de planifier l’abattage de ces arbres sont à considérer, soit un abattage

préventif ou réactif. L’abattage préventif consiste à récolter les frênes avant que ceux-ci soient

infestés par l’agrile, tandis que l’abattage réactif se réalise à mesure que les frênes montrent des

signes d’infestation (Michigan Department of Natural Resources (MDNR), 2008). Dans le cas de

l’abattage réactif, il est essentiel d’avoir un bon programme de dépistage du ravageur afin de

pouvoir intervenir rapidement. Car il a été démontré qu’un frêne infesté peut produire

approximativement 90 à 100 adultes par mètre carré de surface. Un frêne de 50 cm de diamètre

peut par conséquent produire entre 3600 et 4000 agriles avant de mourir (Poland et McCullough).

Le tableau 2.6 présente les avantages et désavantages liés à chacun des deux modes de

planification des travaux d’abattage présentés ci-dessus.

Page 62: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

53

Tableau 2.6 Avantages et désavantages de l’approche d’abattage préventive et réactive (inspiré de : MDNR, 2008, p. 9)

Abattage préventif Abattage réactif

Avantages Avantages

Possibilité de répartir les coûts d’abattage de

façon régulière sur plusieurs années

Aucune perception négative de la population

en lien avec l’abattage d’arbres seins

Réduction des problèmes engendrés par la

gestion de nombreux frênes dépérissant au même moment

Retarde le moment où les impacts esthétiques

et sur la couverture arborée apparaîtront

Opportunité de commencer les opérations de

plantation d’arbres de remplacement

Retarde le fardeau économique lié à l’abattage

jusqu’au moment où l’agrile du frêne sera

détecté

Meilleure flexibilité pour organiser l’horaire

d’abattage

Procure du temps pour que le fruit des

recherches scientifiques identifie des

alternatives de gestion du ravageur minimisant les besoins d’abattage

Possibilité de valoriser plus facilement le bois

récolté, car non contaminé

Permet de réduire la population d’agrile

Désavantages Désavantages

Impacts esthétiques et sur la couverture

arborée immédiats

De fortes contraintes économiques peuvent

survenir lorsque l’agrile est détecté

Ne prend pas en considération les avancées

scientifiques potentielles qui pourraient aider à

mieux contrôler le ravageur

Les fonds pour replanter les arbres peuvent

être indisponibles en raison des coûts élevés

liés à l’abattage des arbres infestés

L’abattage de frênes en santé peut engendrer des frustrations de la part des citoyens

Le type d’abattage priorisé dépend directement de la quantité de frênes présents sur le territoire

considéré. Pour de grands territoires comme ceux des villes de Toronto et d’Oakville, la quantité

de frênes situés en bordure de voies publiques, dans les parcs et dans les boisés urbains est trop

grande pour adopter un mode de gestion uniquement par abattage réactif. Bien souvent, un

mélange d’abattage réactif avec des activités d’abattage préventives est employé. Dans le cas de

la Ville de Toronto, en 2011, 4 % des 32 400 frênes situés en bordure des voies publiques avaient

succombé suite aux assauts du ravageur. En cette même année, le département de foresterie

urbaine de la ville estimait qu’en raison du fort établissement de l’insecte, le reste des frênes (96

%) connaîtrait le même sort d’ici 2017-2018 (Ville de Toronto, 2011) tel que démontré sur le

graphique de la figure 2.2.

Page 63: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

54

Figure 2.2 Prédiction de la mortalité des frênes de la Ville de Toronto (tiré de : Ville de

Toronto, 2011, p. 7)

Face à ce constat, les autorités de la ville ont adopté une approche d’abattage par zone infestée

au-delà d’une certaine proportion afin de réduire les coûts d’opération. Ainsi, au lieu d’abattre les

frênes individuellement selon leur état de santé apparent, la ville a décidé de procéder à l’abattage

systématique des arbres infestés et non infestés au sein de la zone déterminée, ce qui permet de

réduire les coûts liés à la mobilisation et la démobilisation des équipes d’abattage (Ville de

Toronto, 2011). Malgré cette approche par zone infestée, la Ville de Toronto applique tout de

même un programme d’abattage réactif dans lequel il deviendra de plus en plus difficile de

récolter tous les frênes dépérissants sous l’influence du ravageur. D’autant plus qu’en marge de

l’abattage des nombreux frênes de rues, une quantité encore plus grande de frênes situés dans les

parcs et dans les forêts urbaines auront également besoin d’être récoltés. Cette situation de

rattrapage occasionne de fortes contraintes économiques et logistiques sur les services d’élagage

municipaux et privés en plus de compromettre la capacité de la ville à sécuriser ses espaces

publics.

Dans le cas d’Oakville, une approche d’abattage préventive a été adoptée afin de prendre en

charge les 40 000 frênes situés dans les zones boisées de la ville (Oakville, 2013). Ces zones

correspondent à des milieux forestiers situés en bordure de cours d’eau, à des boisés urbains et à

des grands espaces verts. Le traitement de ces frênes à l’insecticide n’a pas été considéré en

raison de leur trop grande quantité et de la moindre valeur individuelle de ceux-ci par rapport aux

frênes de rues. Ainsi, la ville a évalué qu’il n’était pas opérationnellement faisable d’attendre que

les frênes succombent aux attaques de l’agrile avant de débuter la récolte. Ce plan d’abattage

préventif vise donc à éviter que les capacités d’abattage de la ville et du secteur privé soient

Page 64: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

55

dépassées dans l’éventualité ou un trop grand nombre de frênes dépérissants et dangereux seraient

à récolter durant la même année. Oakville évalue que la récolte des 40 000 frênes situés dans les

quelques 281 terrains boisés de la ville s’étendra sur une période approximative de 10 années

(Oakville, 2013).

2.5.2 Gestion des boisés urbains

Pour une municipalité, la planification de l’abattage des frênes de rue et ceux situés dans les petits

parcs récréatifs (légèrement boisés) est très importante étant donné la proximité de ceux-ci avec

les citoyens. Toutefois, la planification de l’abattage des frênes situés dans les boisés urbains doit

également faire partie d’un plan de gestion pouvant se mettre en route suite à l’arrivée de l’agrile

du frêne. Avant toute chose, il faut vérifier si ces espaces verts possèdent déjà un plan de gestion

forestière. S’il est déjà doté d’un plan de gestion, il peut être utile de le réviser afin d’y inclure les

considérations relatives à l’agrile du frêne. Dans le cas où aucun plan de gestion forestière n’est

disponible pour ces milieux boisés, il est conseillé que la municipalité fasse affaire avec un

consultant forestier afin d’en établir un. De plus, il peut être utile de consulter ces spécialistes

forestiers afin de déterminer les meilleures options de valorisation et de commercialisation de ces

ressources. Évidemment, si les milieux boisés contiennent peu de frênes, aucune modification au

plan de gestion forestière n’est nécessaire pour s’adapter à l’insecte. En présence d’une bonne

abondance de frênes, les plans de gestion forestière devraient inclure des mesures pour limiter les

impacts reliés à l’agrile, des démarches à suivre pour contrôler les risques reliés au déclin des

frênes et un plan de remplacement des frênes perdus (MDNR, 2008).

Il est à noter qu’en 2012, la Ville de Montréal travaillait en collaboration avec l’Université de

Québec à Montréal au développement d’une stratégie d’intervention dans les parcs-nature, les

grands parcs et les boisés urbains. Le projet devrait être effectif en 2014 et pourrait servir

d’exemple pour les autres municipalités (DGPV, s.d.b.).

2.5.3 Annélation

L’annélation de frênes peut représenter une alternative intéressante au simple abattage des frênes

situés dans les boisés urbains ou encore pour ceux situés en bordure de rues et dans les parcs

récréatifs qui n’ont pas satisfaits les critères de sélection pour le traitement à l’insecticide. Au lieu

d’abattre de façon préventive, il est judicieux de prendre avantage de la perte de frênes en les

annelant. De cette façon, l’annélation de ces arbres prévus à l’abattage pourrait contribuer à

détecter la présence de l’agrile et à réduire la propagation radiale de celui-ci (Mercader et autres,

2011). Le fait d’anneler quelques frênes au printemps dans la zone où l’abattage est prévu à

Page 65: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

56

l’automne ou à l’hiver suivant ne compliquerait pas beaucoup les opérations prévues au plan de

gestion. De plus, les arbres-pièges peuvent être utilisés pour d’attirer l’agrile à fréquenter une

zone où les frênes sont prévus au calendrier d’abattage. L’utilisation de cette méthode permet

d’abattre un minimum de frênes par année tout en ralentissant de façon optimale la progression

du ravageur. À long terme, si des outils d’éradication efficace de l’agrile émergent, l’utilisation

de l’annélation dans ces boisés urbains pourrait engendrer des économies d’argent en plus de

sauver une certaine quantité de frênes.

Avant de procéder à l’annélation de frênes dans des milieux forestiers, il est important de

considérer certains aspects afin d’optimiser l’utilisation de cet outil. D’abord, il est à noter que

tous les principes guidant l’annelage d’un arbre pour des fins de dépistage s’appliquent également

lorsque le but est de ralentir la progression de l’agrile (voir section 2.2.4). Toutefois, comme il est

possible que l’annélation s’opère en condition d’infestation confirmée, il faut considérer l’état de

stress des frênes autour de la zone ciblée pour les opérations d’annelage. En effet, l’efficacité des

arbres-pièges pouvant attirer l’insecte diminue si ceux-ci se trouvent dans une zone infestée par le

ravageur. Dans cette situation, les arbres infestés sont déjà stressés par la présence du ravageur et

émettent déjà des composés volatils perçus par l’agrile, ce qui dilue les signaux émis par l’arbre-

piège et diminue conséquemment sa capacité à attirer l’insecte (Mercader et autres, 2011). Ainsi,

il est conseillé de placer ces appâts dans des zones faiblement infestées ou en marge des zones

fortement infestées. Aussi, afin d’augmenter l’efficacité des arbres-pièges à attirer l’insecte, il est

conseillé d’établir des groupements de plusieurs frênes annelés plutôt que de les séparer

individuellement. Des groupements de trois ou quatre frênes annelés sont conseillés afin d’obtenir

un pouvoir attractif supérieur (SLAM, 2010). Finalement, il est important de rappeler qu’il est

essentiel que les arbres-pièges soient récoltés au plus tard au début du printemps suivant

l’annélation des individus afin d’assurer la pleine efficacité de cet outil.

Dans le cas où les frênes sont difficiles d’accès pour les opérations d’abattage, une autre

alternative d’utilisation d’arbres-pièges consiste à traiter ceux-ci avec l’insecticide systématique.

Cette approche créant des pièges attractifs mortels convient particulièrement pour les frênes que

l’on ne veut pas abattre la saison suivante tels que des frênes situés dans des milieux accidentés

ou inaccessibles pour les équipements d’abattage. Pour ce faire, il faut d’abord injecter

l’insecticide au frêne sélectionné avant la fin du mois de mai et ensuite l’anneler trois semaines

plus tard. L’arbre-piège n’a donc pas besoin d’être récolté avant l’été suivant, cependant, l’arbre

doit être situé à un endroit ne posant aucun risque pour la population (SLAM, 2010). La

combinaison de ces deux outils (annélation et insecticide) permet d’attirer l’agrile à consommer

Page 66: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

57

le feuillage d’un frêne qui rendra les adultes stériles et empêchera les œufs pondus dans celui-ci

de donner suite à une nouvelle génération du ravageur.

Même si l’efficacité de l’annélation à attirer le ravageur est reconnue, cette approche est encore

expérimentale à bien des niveaux, il est donc conseillé d’établir des partenariats avec des centres

de recherche afin de raffiner l’utilisation de cet outil.

2.5.4 Disposition des frênes contaminés et réglementation

Lorsqu’un frêne est abattu, il est essentiel que les résidus de celui-ci soient neutralisés et gérés

avec soin, car ces résidus sont les meilleurs vecteurs anthropiques de déplacement de l’agrile (ex :

bois de chauffage). Afin d’éviter toute propagation indésirable du ravageur lors des opérations

d’élagage et d’abattage, il faut tout d’abord s’assurer de ne pas réaliser ces tâches durant la

période active de l’agrile, soit entre le mois d’avril et septembre. Chaque municipalité aux prises

avec l’agrile doit impérativement limiter les travaux d’élagage et d’abattage des frênes au

minimum, soit uniquement pour les arbres dangereux, les projets de construction et l’élagage

cyclique (dégagement des lignes à haute-tension). Une municipalité peut facilement contrôler ses

opérations internes d’élagage et d’abattage, toutefois, pour mieux contrôler les activités du

secteur privé, des réglementations peuvent être mises en place. Par exemple, un règlement

limitant les opérations d’abattage et d’entretien des frênes durant la période active du ravageur

constitue un bon outil (DGPV, s.d.b.). De plus, si la municipalité n’exige pas encore qu’un permis

d’abattage soit obligatoire avant d’éliminer un arbre, il pourrait être judicieux de mettre cette

structure en place. Cette dernière mesure est un excellent outil afin de contrôler les activités

d’élagage et d’abattage de frênes se déroulant sur les terrains privés.

Cependant, puisqu’il faut tout de même abattre des frênes durant la période active de l’agrile, il

est important de mettre en place une structure de gestion permettant de gérer les résidus de frênes

produits autant par le secteur privé que public. Dans un premier temps, il faut s’assurer de limiter

autant que possible le déplacement des résidus de frênes et chercher à neutraliser ceux-ci

directement sur le site des travaux. La méthode priorisée pour neutraliser les résidus consiste à

déchiqueter le bois. Par exemple, la Ville de Montréal exige que les branches soient déchiquetées

directement sur place et pour ce qui est des billes ou des grandes branches de plus 20 cm de

diamètre, la ville demande qu’elles soient acheminées à un site de dépôt temporaire identifié dans

chaque arrondissement (DGPV, s.d.b.). Puis, ces résidus de grande taille sont neutralisés par des

équipements de déchiquetage plus puissants gérés par la ville. Ce site de dépôt temporaire doit

Page 67: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

58

idéalement avoir une position centrale au sein de la communauté et ne pas se trouver à proximité

de ressources en frêne.

Pour la disposition des résidus en dehors de la période active de l’insecte, il est important de

centraliser ceux-ci à un seul endroit afin d’éviter une disposition inadéquate. À ce sujet, la Ville

de Montréal propose à ses citoyens d’accueillir sans frais les billes et les branches de frênes trop

grandes pour être déchiquetées sur place au Complexe environnemental Saint‐Michel. Ainsi, en

2012, ce complexe a accueilli 150 tonnes de bois de frêne qui ont été neutralisées avant le début

de la prochaine période active de l’agrile du frêne. Afin d’assurer qu’aucune autre essence de bois

mise à part celle du frêne soit accueillie gratuitement au complexe, ce dernier exige un certificat

d’autorisation qui est remis par la ville en même temps que le permis d’abattage. De surcroît, la

Ville de Montréal propose à ses citoyens une collecte spéciale afin de séparer les branches

d’arbres laissées à la rue par les citoyens de la collecte des ordures ménagères et des résidus verts

(DGPV, s.d.b.). Bien que cette collecte ne fasse pas de distinction entre les branches de frêne et

les branches d’autres espèces d’arbres, elle assure quand même que les résidus à risque potentiel

soient acheminés au bon endroit.

Tous les moyens proposés ci-dessus consistent à limiter la dispersion de résidus de frênes

contaminés et par le fait même à éliminer toutes dispersions inutiles du ravageur. À cet effet,

toute initiative visant à mieux contrôler les activités d’abattage, d’élagage et de déplacement des

résidus de frêne sont à considérer.

2.5.5 Plan de remplacement des frênes abattus

Puisque des frênes vont inévitablement devoir être abattus, les municipalités affectées par l’agrile

du frêne doivent penser à un plan de remplacement de ces arbres défunts. Pour établir les bases

d’un tel plan, il est important de considérer les différentes proportions des espèces, des genres et

des familles d’arbres présentes sur le territoire. Idéalement, des proportions de 10 % d’espèces, de

20 % de genres et de 30 % de familles d’arbres différents devraient être retrouvées sur un

territoire urbain (Cornell University, 2010). Autant que possible, un plan de remplacement devrait

veiller à respecter ces proportions afin de limiter les dégâts que pourraient causer d’autres

ravageurs ou maladies menaçant l’intégrité des arbres de la municipalité. Cependant, il ne suffit

pas d’équilibrer les proportions des différentes espèces d’arbres retrouvées, il faut aussi prendre le

soin de les répartir également sur le territoire. Plus spécifiquement, il faut éviter de planter une

seule espèce d’arbres le long d’une rue ou encore de retrouver le même genre d’arbres dans un

secteur de la municipalité. Évidemment, pour identifier les espèces d’arbres à prioriser et localiser

Page 68: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

59

ceux-ci sur le territoire, il faut avoir en main un inventaire des ressources arborescentes de la

municipalité.

Un plan de gestion de l’agrile du frêne devrait prévoir le remplacement des frênes abattus et

inclure cette activité dans les considérations budgétaires de la stratégie. Un remplacement rapide

des frênes suite à leur abattage est nécessaire afin de maintenir la couverture arborée de la ville et

les services écologiques qu’elle procure. Par exemple, dans le cadre du « Plan d’action canopée

2012-2021 », la Ville de Montréal vise à augmenter son indice canopée (couverture végétative

déterminée par photographie aérienne) de 20 % à 25 % (DGPV, s.d.a.). La métropole a donc tout

intérêt à se doter d’une stratégie de remplacement rapide des frênes perdus afin de respecter ses

objectifs internes. Bien que le remplacement des frênes puisse représenter un fardeau

administratif supplémentaire pour une municipalité, il existe de nombreuses façons économiques

de réaliser ces opérations essentielles. Des subventions peuvent être obtenues pour acheter des

arbres et pour ce qui est de la main d’œuvre, plusieurs alternatives existent. En effet, une bonne

façon d’économiser sur la main d’œuvre et de sensibiliser la population en même temps est de

faire appel aux bénévoles, voici quelques exemples de sources de bénévolat :

Maison des jeunes

Milieux scolaires

Participation citoyenne

Travaux communautaires

Association à but non lucratif (environnement, biodiversité…)

Travaux compensatoires (réinsertion sociale par le biais du YMCA)

Enfin, il faut voir le remplacement des frênes comme une opportunité d’impliquer la population

afin de construire collectivement un milieu urbain plus diversifié et plus résilient face aux

prochaines attaques de ravageurs ou de maladies menaçant la végétation.

2.6 Sensibilisation et communication

Même si la municipalité possède un excellent plan de gestion de l’agrile du frêne, si la population

n’approuve pas celui-ci ou affiche une certaine indifférence, les retombées positives ne seront pas

aussi importantes. Il est donc essentiel que le plan de gestion soit accompagné d’une solide

stratégie de communication permettant de rejoindre l’ensemble de la population.

Page 69: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

60

Cette section survole les efforts de communication interne et externe à déployer pour assurer le

succès d’une stratégie de gestion de l’agrile du frêne et présente des initiatives d’implication de la

population à promouvoir.

2.6.1 Communication interne et réglementation

En préparation à l’arrivée de l’agrile du frêne sur un territoire municipal, il est primordial qu’une

bonne communication de l’information soit faite auprès des dirigeants. Cette communication peut

prendre la forme de rapports internes sur l’état de la progression de l’insecte et de conseils sur des

avenues de gestion à considérer pour la municipalité. Beaucoup de renseignements peuvent être

obtenus directement auprès de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) afin

d’alimenter ces rapports. De plus, l’expérience d’autres municipalités aux prises avec l’agrile

depuis maintenant plusieurs années peut également contribuer à soutenir ces communiqués

internes. Par exemple, dès le début de l’infestation en 2002, la Ville de Toronto a produit des

rapports annuels à l’intention des dirigeants afin de préparer les autorités compétentes à l’arrivée

de ce ravageur. Le premier rapport sur l’état de la situation contenait notamment de l’information

sur les actions entreprises par l’ACIA, le cycle de vie du ravageur, les impacts économiques

potentiels liés au ravageur ainsi que des recommandations sur des stratégies de communication et

sur la localisation de sites potentiels d’élimination du bois de frêne contaminé (Ville de Toronto,

2003).

Au travers de ces démarches de communication interne, il est important de chercher à stimuler

l’implication des dirigeants de la municipalité envers une stratégie de gestion de l’agrile. Pour ce

faire, l’élaboration de nouveaux règlements permettant de faciliter la gestion du ravageur

constitue une excellente étape préparatrice à son arrivée. Voici quelques exemples d’aspects de la

gestion de l’insecte à réglementer :

Autorisation d’inspection des frênes situés sur des propriétés privées

Autorisation d’abattage de frênes privés (RNCan, 2009)

Interdiction d’élaguer ou d’abattre durant la période active du ravageur afin de mieux

gérer les résidus de frêne (voir la section 2.5.4)

Sanction en cas de mauvaise gestion des résidus de frênes (DGPV, s.d.b.).

Permis d’abattage obligatoire

Le fait d’encadrer de façon réglementaire les activités de gestion de l’agrile du frêne avant son

infestation permet d’économiser du temps et d’améliorer les retombées positives d’un plan de

gestion.

Page 70: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

61

2.6.2 Communication externe

Le support de la part de la population est essentiel au succès de l’application de toute stratégie de

gestion de l’agrile du frêne. Il est donc important que la population soit bien informée de la

stratégie de gestion adoptée par la municipalité et que les rôles que les citoyens ont à jouer soient

clairement identifiés. Pour ce faire, un plan de communication doit avoir des objectifs précis, des

messages clés à transmettre, des outils de diffusion efficaces et permettre d’informer les citoyens

de l’évolution des mesures prises. Une stratégie de communication devrait également avoir la

flexibilité nécessaire pour répondre aux besoins et aux demandes d’informations individuelles des

citoyens. De plus, il ne suffit pas de bien communiquer l’information, il faut aussi chercher des

moyens créatifs d’impliquer la population à participer au plan de gestion de l’agrile. Somme

toute, il faut que la municipalité démontre de la transparence et de l’honnêteté dans ses

communications (RNCan, 2009).

En dehors de la communication avec les citoyens, il faut aussi assurer la sensibilisation d’autres

intervenants clés tels que les propriétaires de lots à bois, les entreprises privées pertinentes et le

milieu associatif. Les propriétaires de lots à bois doivent impérativement être rejoints, car la

majorité des frênes se trouvent en milieux forestiers. Ainsi, la collaboration de ces intervenants

est très importante afin d’éviter que les populations du ravageur croissent dans ces milieux

souvent situés en marge des villes. Même si les options de gestion sont plus limitées, il faut

inviter ces propriétaires à réviser leur plan de gestion forestière pour éviter qu’ils subissent des

pertes économiques au profit de l’agrile. Puis, les entreprises privées constituent un autre

intervenant incontournable à cibler dans un plan de communication. Les entreprises privées à

considérer sont les entreprises d’arboriculture (pépinière, horticulteur) et d’élagage ainsi que les

établissements représentant des milieux à risques pour la propagation de l’insecte (terrains de

camping, scieries, distributeurs de bois de chauffage). Un bon moyen de rejoindre ces

intervenants est d’offrir des formations gratuites sur les techniques de dépistage de ravageur et de

leur expliquer de quelle façon ils peuvent contribuer au plan de gestion de l’agrile. C’est

d’ailleurs ce que la Ville de Montréal a fait auprès de 32 employés d’entreprises d’élagage et

d’arboriculture en plus d’offrir la formation à tous les employés pertinents de la ville (DGPV,

s.d.b.). Enfin, le plan de communication devrait considérer le milieu associatif représenté par des

associations de propriétaires, des associations de quartiers ou toutes autres associations

environnementales ou sociales pertinentes. Ces associations peuvent devenir d’excellents alliés et

de très bonnes sources de main-d’œuvre bénévole pour l’application de certains volets du plan de

Page 71: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

62

gestion de l’insecte. Le tableau 2.7 suggère plusieurs sujets de sensibilisation et différents médias

pour diffuser l’information.

Tableau 2.7 Sujets de sensibilisation et médias de diffusion de l’information (inspiré de :

DGPV, s.d.b., Oakville, 2013 et RNCan, 2009)

Sujets de sensibilisation Média de diffusion de

l’information Intervenants

1. Actions posées par la ville pour

gérer l’agrile du frêne 2. Disposition des résidus de

frêne

3. Déplacement de bois de chauffage

4. Période d’élagage limitée pour

le frêne 5. Collecte de branches par la

ville

6. Nouvelle réglementation en

vigueur permettant de contrôler la problématique

7. Informations générales sur

l’insecte 8. Informations afin de

reconnaître les frênes

9. Info sur comment dépister un frêne affecté par l’agrile

10. Informations sur les

alternatives de traitement des

frênes au TreeAzin®

11. Informations sur les essences à

considérer pour remplacer un

frêne 12. Considération à ajouter à un

plan de gestion forestière

13. Valorisation du bois de frêne

1. Multimédia (Télévision, radio,

journaux) 2. Site internet

3. Capsule vidéo disponible sur

internet 4. Réseaux sociaux Facebook et

Twitter (voir section 2.6.5)

5. Affichage sur les abris d’autobus et dans les autobus

6. Dépliant envoyé par la poste et

disponible dans des lieux publics

7. Fiche d’information délivrée en même temps que les factures

municipales

8. Comité de bénévoles (voir sections 2.6.3 et 2.6.4)

9. Table de concertation

10. Séance d’information publique 11. Séances de formation

(professionnels et forestiers)

12. Application pour téléphone

intelligent 13. Numéro d’assistance information

sans frais

14. Matériel promotionnel (T-shirt, cartes d’affaires, affiches,

brochures)

15. Sensibilisation dans les écoles

1. Citoyens

2. Propriétaires de forêt privée

3. Entreprises

privées 4. Milieu

associatif

2.6.3 Dépisteur bénévole de première ligne

Parmi les activités importantes d’un plan de gestion de l’agrile, l’identification de frênes et le

dépistage de la présence du ravageur tiennent un rôle central. Or, ces activités peuvent facilement

être réalisées en partie par des bénévoles. En effet, la détection visuelle des signes et symptômes

d’un frêne infesté ne demande pas d’outils spécialisés comme ceux utilisés par les municipalités

(pièges attractifs, collectes de branches, annélation), il faut seulement disposer de certaines

connaissances. C’est basé sur ce fait que le programme « Forest Pest First Detectors » (FPFD) a

Page 72: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

63

été mis sur pieds dans l’état du Vermont aux États-Unis. Le but de cette initiative multi-

gouvernementale est de créer des groupes de bénévoles formés pour chaque communauté afin de :

Former des experts locaux en détection de l’agrile du frêne.

Sensibiliser la population sur les menaces liées aux pestes forestières.

Aider à coordonner des activités de bénévoles locaux.

Assister leur municipalité à se préparer et à répondre aux menaces posées par les

ravageurs forestiers (Vermont Invasives, s.d.a).

Essentiellement, n’importe quel citoyen voulant devenir un dépisteur de ravageur forestier de

première ligne (Forest Pest First Detectors) n’a qu’à contacter les gestionnaires du programme et

suivre une formation en ligne et en personne. Le dépisteur bénévole se voit ensuite remettre une

trousse d’équipement de détection (manuel de détection, jumelle, kit d’échantillonnage, guide

d’identification en DVD, montage d’échantillon d’agrile du frêne et une certaine quantité de

matériel de sensibilisation). Comme illustré à l’annexe 2, approximativement la moitié des

municipalités de l’état ont déjà trouvé un ou plusieurs dépisteurs de première ligne, ce qui

témoigne du succès de cette initiative (Vermont Invasives, s.d.a).

2.6.4 Association de voisins

Une autre excellente initiative permettant d’impliquer la population est proposée par l’Université

de Purdue dans l’état d’Indiana aux États-Unis. Cette initiative nommée « Neighbors Against Bad

Bugs » (NABB) vise à encourager la formation d’associations locales de voisins afin de

conscientiser la population à la présence de frênes dans leur environnement immédiat. La plupart

des gens ne savent pas à quoi ressemble un frêne et n’ont par conséquent aucune idée de ce que

leur quartier ou leur municipalité a à perdre suite à l’arrivée du ravageur (Purdue University,

2009).

Une fois qu’une association de propriétaires voisins (NABB) est créée, celle-ci contacte un

représentant du programme NABB de l’Université de Purdue afin que le groupe de bénévoles

reçoive une courte formation sur l’identification de frênes. Puis, la première activité consiste à

identifier tous les frênes présents (publics et privés) dans le quartier au moyen d’étiquettes

apposées aux frênes. Le groupe de bénévoles peut utiliser des étiquettes fournies par le

programme sur lesquelles on retrouve un avertissement comme quoi le frêne identifié est à risque

et des coordonnées internet pour avoir plus d’informations sur les meilleures options de gestion

de l’agrile (voir le modèle d’étiquette en annexe 3).

Page 73: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

64

Après cette activité d’identification, l’association de voisins possède une estimation de la quantité

de frênes présents dans le quartier et peut ensuite négocier des ententes avec des entrepreneurs

certifiés afin de réduire le coût de traitement à l’insecticide ou encore les coûts d’abattage et de

remplacement. Globalement, le programme NABB permet de responsabiliser les citoyens par

rapport aux décisions qu’ils auront à prendre pour gérer leurs frênes tout en sensibilisant la

population en général par le biais des étiquettes posées sur les frênes (Purdue University, 2009).

2.6.5 Réseaux sociaux

Les réseaux sociaux comme « Facebook » et « Twitter » sont d’excellents moyens pour diffuser

de l’information et pour organiser des événements de toutes sortes. En plus d’être gratuits, ces

outils rejoignent une clientèle toujours croissante et différente de celle rejointe par les outils de

communication conventionnels. Il faut cependant que le département des communications de la

ville entretienne ces pages web en y diffusant de l’information de façon régulière et en y

soulignant les bons coups. Oakville a notamment utilisé ces réseaux afin de créer en 2011, le

« Oakville Canopy Club » qui a pour objectif d’encourager la population à sauver les arbres de la

ville. L’idée est simple, pour devenir membre du Canopy Club, il suffit d’aller « aimer » la page

Facebook ou suivre le club sur Twitter. Le but de cette initiative est d’accroître l’engagement

social envers la protection des frênes et des arbres urbains en général (Oakville, 2013).

Depuis la mise en place du Canopy Club par le biais des réseaux sociaux, c’est plus de 174

« j’aime » qui ont été collectés sur Facebook et 260 suivis sur Twitter. Au total, incluant les

membres qui sont inscrits à la liste d’envoi de courriels, le club comptait 657 membres en date du

22 mai 2013 (Oakville, 2013).

2.7 Approche de gestion intégrée de l’agrile du frêne

Les sections 2.3 à 2.5 se sont attardées à décrire une approche de gestion de l’agrile du frêne

conventionnelle visant à faire un compromis entre le traitement d’une proportion de frênes et

l’abattage de la portion restante. Toutefois, la présente section décrit une autre alternative de

gestion intégrée nommée « SLow Ash Mortality » (SLAM) visant à ralentir la progression du

ravageur pour sauver le plus de frênes possible. Ainsi, une description détaillée du SLAM sera

faite, puis un exemple d’application en milieu urbain et à l’échelle régionale de cette approche

sera présenté.

Page 74: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

65

2.7.1 Approche Slow Ash Mortality (SLAM)

Selon l’agence « Animal and Plant Health Inspection Service » des États-Unis, qui est

l’équivalent de l’ACIA au Canada, le programme de gestion de l’agrile est passé d’un programme

d’éradication à un programme de contrôle de gestion intégrée. Actuellement, les outils

technologiques pour éradiquer l’agrile ne sont pas suffisamment performants et économiquement

accessibles pour être appliqués à grande échelle. Alors, l’approche préconisée en attendant de

trouver un moyen d’éradication efficace et rentable est de ralentir le plus possible la propagation

de l’insecte (USDA, 2013). C’est dans cette perspective que la stratégie de gestion intégrée de

l’agrile du frêne « Slow Ash Mortality » (SLAM) a été mise au point dans l’état du Michigan aux

États-Unis. L’objectif de cette initiative est d’intercepter l’agrile du frêne le plus tôt possible,

alors que les colonies sont moins abondantes, afin de mettre en place une suite d’actions

préventives qui aura pour effet de modérer l’expansion du ravageur et ainsi la mortalité des

frênes. Le SLAM est le fruit d’une collaboration exceptionnelle entre plusieurs paliers

gouvernementaux ainsi que le secteur associatif et universitaire. En effet, dans un contexte

d’urgence, des ministères fédéraux responsables des forêts et de l’inspection de la santé des

animaux et des plantes ont collaboré avec les ministères de l’état du Michigan responsables de

l’agriculture et des ressources naturelles pour élaborer et appliquer cette stratégie (SLAM, 2009).

L’approche SLAM vise à utiliser une combinaison d’outils à la fine pointe de la technologie et de

connaissances scientifiques. Toutefois, afin d’appliquer efficacement cette stratégie et de

maximiser les efforts, certains principes doivent être appliqués. Dans un premier temps, le succès

de cette stratégie s’appuie sur une détection précoce de la présence de l’agrile du frêne, car c’est

dans cette situation que l’application de celle-ci aura la meilleure portée. En d’autres mots, si le

ravageur est implanté dans un secteur depuis un certain temps et que sa population est

considérable, la stratégie SLAM connaîtra un moindre succès. Il est donc primordial d’avoir un

programme de dépistage suffisamment performant pour détecter les plus petits foyers

d’infestation du ravageur (SLAM, 2010).

Pour dépister la présence de l’agrile du frêne efficacement, plusieurs outils détaillés à la section

2.2 peuvent être utilisés. Puis, lorsqu’une zone d’infestation a été identifiée, un effort de dépistage

rapide doit être réalisé afin de délimiter l’ampleur de la zone d’infestation, soit la zone sur

laquelle les différents outils de gestion et de suppression de l’envahisseur seront utilisés. Il est

généralement suggéré de quadriller la zone d’étude en plusieurs sections et d’utiliser des outils de

détection simples, tels que la détection visuelle, les pièges et la collecte de branches pour

l’écorçage. Enfin, suite à cette délimitation initiale de la zone d’intervention, un dépistage plus fin

Page 75: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

66

doit être mis en place dans cette zone et en périphérie de celle-ci. L’objectif de cette dernière

activité de dépistage est de s’assurer de l’efficacité des mesures de contrôle entreprises et de

détecter tout débordement du ravageur en dehors de la zone d’intervention (SLAM, 2010).

La détection précoce du ravageur est très importante pour que l’approche SLAM soit pleinement

efficace. Cependant, un autre élément est également essentiel au succès de cette stratégie, soit

celui d’avoir une bonne connaissance des ressources de frênes présentes sur le territoire concerné.

Sans aller jusqu’à connaître tous les arbres de la zone d’étude individuellement, une estimation

avec un degré de certitude raisonnable de l’abondance, de la distribution et de la taille des

populations de frênes est très utile pour l’application du SLAM. Ces informations permettent

d’estimer les quantités de nourriture disponible pour l’agrile du frêne et de mieux orienter les

prochaines actions à entreprendre au sein de cette stratégie. De plus, une bonne connaissance des

frênes sur le territoire combinée à une bonne évaluation des populations du ravageur par

dépistage procurent des informations essentielles pour modéliser la croissance et la progression

de l’infestation. Ces modèles permettent ensuite d’évaluer l’efficacité de l’application de

certaines mesures de gestion ou de suppression de l’agrile comme l’application d’insecticide ou

encore l’annélation (voir section 2.4 et 2.5.3 respectivement) de frênes comparativement à un

scénario de référence sans mesure de contrôle (SLAM, 2010).

Après avoir bien délimité les zones d’infestation, plusieurs outils de gestion peuvent être

appliqués afin de ralentir la propagation de l’agrile du frêne. Voici les principaux outils de gestion

ou de suppression mis de l’avant dans l’approche SLAM:

Application d’insecticide tuant les adultes et les larves d’agrile du frêne

Collecte d’arbres infestés avant que les adultes puissent émerger après l’hiver

Collecte commerciale des ressources en frêne afin de réduire la source de nourriture du

ravageur

Utilisation de frênes annelés afin d’attirer l’agrile à y déposer ses œufs, puis collecter ces

arbres avant que la prochaine génération du ravageur ne puisse émerger (SLAM, 2010).

Toutefois, l’application de la stratégie SLAM et de ses nombreux outils est différente en fonction

du milieu concerné, celle-ci ne sera pas la même en milieu forestier ou en milieu urbain. En zone

forestière, l’abattage préventif et l’annélation seront davantage utilisés afin de réduire les

populations d’agrile. En contrepartie, en raison de la valeur esthétique, économique et

environnementale (dépollution) plus élevée des frênes en milieu urbain, les approches

destructives comme l’annélation sont moins conseillées. Le traitement des frênes avec un

Page 76: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

67

insecticide combiné à un abattage stratégique et sélectif sera davantage priorisé dans ce dernier

milieu (SLAM, 2010).

Finalement, tel que mentionné ci-dessus, il est important de comprendre que l’approche SLAM

ne permet pas d’éradiquer et d’éliminer complètement l’agrile. Cependant, en ralentissant la

croissance des populations de cet insecte, l’application de cette stratégie permet de concéder plus

de temps aux dirigeants des territoires affectés pour se préparer adéquatement à faire face à cet

envahisseur. Globalement, cette stratégie permet également d’offrir plus de temps pour avancer

les recherches et développer des outils plus performants de lutte contre l’agrile du frêne (SLAM,

2009). Voici d’autres bénéfices que cette approche permet de récolter :

Limiter les pertes économiques et permettre à des propriétaires de forêts privées de

garder leurs frênes plus longtemps avant de les récolter;

Garder l’intégrité des frênes le plus longtemps possible, ce qui permet à la communauté

et aux propriétaires de jouir des biens et services écologiques liés à ces arbres plus

longtemps

Retarder les besoins d’utilisation de produits chimiques pour le traitement des frênes de

haute valeur dans les municipalités

Retarder le moment où les frênes seront décimés par la forte présence de l’agrile et

deviendront par le fait même dangereux (branches tombantes)

Permettre de supporter les industries dépendantes du frêne en leur fournissant un

approvisionnement constant de matière, ce qui permet également d’éviter de surcharger

indûment la capacité de marché (New York State Department of Environmental

Conservation (NYSDEC), 2011).

2.7.2 Application du SLAM en milieu urbain

Comme mentionné dans la section 2.7.1, l’application de l’approche SLAM est différente en

milieu urbain et en milieu forestier en raison de la valeur économique et esthétique des arbres

urbains. Ainsi, l’outil de suppression de l’agrile du frêne priorisé est l’application d’un insecticide

systémique combiné à un abattage stratégique des frênes trop infestés ou endommagés pour être

traités. Une étude de McCullough et Mercader a démontré qu’en traitant 20 % de tous les frênes

urbains annuellement, 99 % de ceux-ci seraient encore vivants après 10 années. De plus, cette

même étude a démontré qu’en appliquant cette stratégie de traitement, les frais d’opération étaient

significativement inférieurs en comparaison à une approche visant à abattre les frênes infestés

(McCullough et Mercader, 2012). Selon l’outil de calcul des coûts de la gestion du ravageur

Page 77: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

68

décrit à la section 2.3.2, sur une période de 25 ans, les coûts du traitement de 20 % des frênes

annuellement tel que proposé ci-dessus sont équivalents aux coûts de l’abattage et du

remplacement de tous les frênes d’un territoire donné (Purdue University, 2008).

Concrètement, pour appliquer le SLAM en milieu urbain, il faut d’abord arriver à détecter

l’insecte au plus tard quatre ans après le début de l’infestation, soit au moment où les signes et

symptômes commencent à apparaître. Puis, à partir du centre du foyer d’infestation, il s’agit de

traiter 20 % de tous les frênes retrouvés dans une zone d’intervention équivalente à deux blocs

résidentiels (environ 340 par 640 mètres) la première année après la découverte du foyer, puis un

autre 20 % de tous les frênes durant la deuxième année et ainsi de suite jusqu’à la cinquième

année où 100 % des frênes de la zone auront été traités. L’étude de McCullough et Mercader a

également montré que sur une période de 10 années, le fait de cibler le traitement des frênes

spécifiquement à proximité du foyer d’infestation où le ravageur a été détecté apportait autant

sinon moins de bénéfices que de traiter aléatoirement les frênes dans la zone d’intervention (340

par 640 mètres). Ce qui signifie que du point de vue d’un gestionnaire des forêts urbaines,

l’application aléatoire d’insecticide annuellement à raison de 20 % de tous les frênes se trouvant

dans un rayon variant de 340 à 640 mètres à partir d’un foyer d’infestation conviendrait

parfaitement pour obtenir des résultats optimaux. Toutefois, il est conseillé de cibler les frênes de

grande valeur pour les injections d’insecticide de la première année. La raison pour laquelle cette

approche montre de si bons résultats réside dans le fait que presque 100 % des ravageurs s’étant

nourris minimalement des feuilles d’un frêne traité ne pourront pas engendrer de nouvelles

générations viables (McCullough et Mercader, 2012). Ainsi, même si 100 % des frênes ne sont

pas traités immédiatement après la détection de l’insecte, l’effet de réduction des populations

demeure important.

Il est à noter que malgré les avantages économiques liés à l’approche suggérée dans cette étude,

la simulation n’a pas pris en compte les biens et services écologiques que procurent ces arbres.

L’étude ne prend donc pas en compte le maintien et les pertes des services écologiques engendrés

par ces deux approches (traitement vs abattage systématique). Rappelons que les arbres

contribuent à la diminution des eaux de ruissellement, à rafraîchir les maisons en été et à

l’augmentation de la valeur économique des propriétés. Par ailleurs, l’abattage de 3 000 frênes

publics dans une ville de l’état du Michigan a mené à des augmentations de 33 % de la

consommation d’eau pour des usages extérieurs, ce qui a forcé les autorités de la ville à

augmenter les taxes sur l’eau de 10 %. Il est évident que si la valeur des services écologiques était

incluse dans l’évaluation économique des approches de gestion de l’agrile, l’approche d’abattage

Page 78: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

69

serait encore plus à discréditer. Finalement, pour la gestion d’un budget municipal, l’approche de

traitement des frênes permet de régulariser les dépenses au lieu d’engendrer des dépenses

intensives sur une période de plusieurs années, tel qu’illustré par la figure 2.3 (McCullough et

Mercader, 2012).

Figure 2.3 Comparaison économique de différentes approches de gestion des frênes en

milieu urbain sur un horizon de 10 ans en fonction de l’âge du foyer d’infestation (tiré de :

McCullough et Mercader, 2012, p.17)

La Ville de Montréal est la première ville canadienne à avoir appliqué une approche SLAM dans

le but de ralentir la progression du ravageur. Au lieu de choisir l’approche conventionnelle

consistant à faire un compromis entre les frênes à traiter et les arbres à abattre (section 2.4.2), la

ville a adopté une approche de gestion par foyer d’infestation. La stratégie priorisée par la

métropole consiste à établir un périmètre d’opération variant entre 200 et 500 mètres de rayon

autour de chaque nouveau foyer d’infestation détecté dans lequel tous les arbres publics sont

systématiquement traités à l’insecticide. Le rayon de la zone d’intervention est déterminé en

fonction de l’ampleur de l’infestation et de la densité de frênes retrouvée autour du frêne positif.

Plus l’infestation est jugée importante et la densité de frênes environnante est faible, plus la zone

d’intervention sera grande. En 2011 et 2012, ce sont respectivement six et sept foyers

d’infestation détectés qui ont été gérés avec cette approche pour un total de 1102 frênes de rue

Page 79: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

70

traités (DGPV, s.d.b.). Idéalement, pour garantir un meilleur succès, les frênes situés sur des

propriétés privées devraient également être traités (Daniel, 2014). Toutefois, selon l’étude de

McCullough et Mercader décrite ci-dessus, le traitement de seulement 20 % des frênes

annuellement dans un rayon de 340 à 640 mètres procure une protection optimale des individus

(McCullough et Mercader, 2012). Dans le cadre de la stratégie de la Ville de Montréal, ce sont

100 % des frênes publics qui ont été traités à l’intérieur de la zone d’intervention, ce qui peut

représenter de façon générale plus de 20 % des frênes traités dès la première année. Ainsi, la ville

dispose d’au moins une à deux années afin de sensibiliser les propriétaires concernés à traiter leur

frêne ou à songer à l’abattre.

2.7.3 Application SLAM à l’échelle régionale

En 2010, l’état de New York a décidé de mettre au point une stratégie de gestion de l’agrile du

frêne à l’échelle du territoire basée sur l’approche SLAM. Le but de cette stratégie élaborée par le

Service des terres et des forêts de l’état de New York est de maintenir en vie le plus de frênes

possible tout en confinant l’envahisseur dans les limites du territoire le plus longtemps qu’il est

faisable de le faire. Cet objectif ambitieux nécessite une détection rapide des nouveaux foyers

d’infestation ainsi qu’une réponse rapide suite à la détection de l’insecte. Pour ce faire, des efforts

de dépistage sont organisés à la grandeur de l’état, plus précisément au pourtour des zones

délimitées de la présence du ravageur, dans les zones de quarantaine désignées et près des zones à

haut risque (camping, bordure de boisé, lieux de vente de bois) situées dans les zones non

désignées en quarantaine. De plus, une emphase spéciale est mise sur le dépistage des zones

susceptibles de laisser l’envahisseur atteindre les états voisins (Vermont, Massachusetts,

Connecticut) ou la ville de New York (NYSDEC, 2011).

Il est à noter que ce plan d’action vise principalement les intervenants touchés directement par

l’agrile du frêne, soit les propriétaires de forêts privées, les industries dépendantes du frêne et les

municipalités afin de les préparer à détecter la menace et gérer les impacts économiques,

environnementaux et sociaux associés.

Ce plan d’action présente une approche basée sur trois critères d’évaluation d’une zone infestée

permettant d’orienter les actions à déployer pour faire face à ce ravageur. Ainsi, le premier critère

correspond à la détection initiale de l’agrile, il peut s’agir d’un seul insecte détecté par l’une des

méthodes de dépistage décrites à la section 2.2. Le deuxième critère s’appuie sur la relation

proportionnelle entre le nombre de frênes morts et la taille de la population satellite du ravageur.

Ce critère évalue donc la quantité de frênes tués par l’agrile du frêne, ce qui permet d’apprécier

Page 80: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

71

indirectement l’âge de la population. Finalement, le troisième critère se base sur les informations

obtenues par les efforts de dépistage ayant permis de délimiter la zone d’infestation. Ce critère

mesure donc la taille du foyer d’infestation, soit la plus grande distance séparant la localisation

des endroits les plus éloignés où l’envahisseur a été détecté (NYSDEC, 2011). Le tableau 2.8

présente les trois critères détaillés précédemment en fonction de trois niveaux d’intensité

différents :

Tableau 2.8 Critères de caractérisation des zones infestées par l’ADF et les niveaux

d’importance associés (inspiré de : NYSDEC, 2011, p. 9-10)

Critère 1 – Détection

initiale

Critère 2 – Quantité de

frênes tués

Critère 3 – Taille du foyer

d’infestation

Niveau 1 Détection d’au moins un

agrile du frêne

0 frêne tué par l’ADF dans

la zone d’étude

Entre 0 et 150 mètres (0 à

500 pieds)

Niveau 2 N/A < 25 frênes tués par l’ADF

dans la zone d’étude

Entre 150 mètres et 10 km

(500 pieds à 6 miles)

Niveau 3 N/A > 25 frênes tués par l’ADF

dans la zone d’étude

> 10 km (6 miles)

N/A : Non applicable

Lorsqu’une zone infestée a été délimitée avec précision et que celle-ci a été classée selon les

niveaux d’importance du tableau 2.8, le plan d’action de l’état de New York prévoit

l’établissement de différentes zones d’intervention autour du foyer d’infestation. L’intensité des

mesures d’intervention au sein de ces zones varie afin d’apporter l’information, le support et

l’assistance nécessaires aux différents intervenants (propriétaire forestier, municipalité et

l’industrie). Cette approche de zonage du territoire permet d’organiser une réponse adaptée à

l’envergure de l’infestation. Ainsi, le plan d’action prévoit la mise en place de trois zones

différentes autour d’un foyer d’infestation délimité préalablement. Il s’agit d’une zone rouge,

orange et jaune (décrite ci-dessous) qui délimite les types d’intervention à entreprendre

(NYSDEC, 2011).

Tout d’abord, il est important de comprendre que ces zones de différentes couleurs vont épouser

la zone d’infestation délimitée initialement, il est donc important de connaître précisément ce

noyau et l’évolution temporelle de celui-ci. Pour ce faire, le périmètre du noyau devrait être

redéfini minimalement sur une base annuelle à l’aide d’un système d’acquisition d’informations

géographiques (SIG). S’il s’agit d’une infestation de niveau 1, les actions à entreprendre dans

Page 81: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

72

cette zone correspondraient à des activités de dépistage plus intensives et à l’utilisation de frênes

annelés comme pièges pour l’agrile. Par contre, dans le cas d’une infestation de niveau 2 et 3, des

frênes sont déjà morts et certains lourdement infestés. Des mesures d’abattage de frênes infestés

et pouvant potentiellement constituer un danger pour la sécurité publique doivent être prises, car

ces ravageurs peuvent venir à bout d’un frêne en aussi peu qu’une à trois années. La figure 2.4

illustre bien l’établissement des zones d’intervention en fonction des différents niveaux

d’intensité décrits précédemment. D’autres figures présentées dans les annexes 4, 5 et 6 montrent

plus précisément l’établissement des zones d’intervention en fonction des trois niveaux

d’intensité d’infestation respectifs (1, 2 et 3).

Figure 2.4 Emplacement des foyers d’infestation et des zones d’intervention dans l’état de

New York (tirée de : NYSDEC, 2011, p.30)

La première zone d’intervention de couleur rouge s’étend de 0 à 8 km (0 à 5 miles) autour du

noyau d’infestation délimité. Les frênes dans ce secteur sont considérés comme étant à haut

risque et puisqu’il est difficile de détecter des petites populations de ce ravageur, certains frênes

pourraient déjà être infestés dans cette zone. Des actions immédiates devraient être prises

(NYSDEC, 2011).

Page 82: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

73

La deuxième zone d’intervention de couleur orange s’étend de 8 à 16 km (5 à 10 miles) autour

des limites du noyau d’infestation, soit en périphérie de la zone rouge. Cette zone se situe en

dehors de la portée de vol annuel de l’insecte et aucune présence du ravageur n’a encore été

détectée. Il est peu probable que des frênes soient déjà infestés par l’agrile et il est estimé que la

propagation naturelle de l’envahisseur n’atteindra pas cette zone avant 2 à 5 années. Toutefois,

ces frênes sont considérés comme étant à haut risque et des actions préventives et préparatrices

d’une invasion future doivent être mises en place (NYSDEC, 2011).

La troisième zone d’intervention de couleur jaune s’étend à plus de 16 km (10 miles) autour du

noyau d’infestation, elle s’étend jusqu’à ce qu’elle rencontre les limites d’une autre zone orange

issue d’un autre foyer d’infestation. Donc, cette zone couvre littéralement le reste du territoire de

l’état ne possédant pas un statut de zonage plus sévère et peut même s’étendre au-delà des

frontières de l’état. Étant donné la distance séparant le noyau d’infestation de cette zone, les

forêts et les communautés sont considérées à faible risque d’infestation. Il est estimé que les

communautés et les propriétaires forestiers situés dans cette zone disposent d’environ 5 à 10

années pour se préparer à une invasion potentielle (NYSDEC, 2011).

Une liste d’actions spécifiques pour les différents intervenants concernés est détaillée dans le plan

d’action de l’état de New York en fonction des zones d’intervention de couleur et du niveau

d’intensité du foyer d’infestation. Ainsi, trois approches liées à trois secteurs d’intervenants

distincts sont établies, soit une approche axée sur le secteur municipal, une autre s’attardant

davantage à la gestion des forêts en général et une autre s’adressant aux industries dépendantes

des ressources en frênes. Les annexes 7, 8 et 9 exposent sous forme de tableau les actions à

entreprendre pour les trois différents secteurs d’intervenants identifiés. Ce plan d’action

représente une excellente approche pour faire face à la problématique de l’agrile du frêne dans

son ensemble, soit d’un point de vue régional. Ainsi, l’outil de gestion régional décrit dans les

prochaines sections s’inspire de la méthodologie de gestion de cet état américain.

Page 83: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

74

3. OUTIL QUÉBÉCOIS DE GESTION ET GOUVERNANCE

Depuis sa découverte en 2002, l’agrile du frêne s’est propagé vers le sud des États-Unis et vers le

nord du Canada en passant par Toronto, Ottawa et finalement par la région de Montréal. Ce

patron de propagation semble suggérer une attirance du ravageur à fréquenter les centres urbains

où la température y est favorable et où une source abondante de nourriture y est disponible. En

effet, en raison de l’artificialisation des territoires urbanisés au détriment des espaces verts, les

températures enregistrées dans ces milieux sont plus élevées que dans les milieux naturels

environnants (Lessard et Boulfroy, 2008). D’un autre côté, les frênes sont une essence abondante

dans les milieux urbains du Canada. Il est estimé qu’environ 6 % des arbres situés en bordure de

rues (10 premiers mètres) sont des frênes (SCF, s.d.). Pour certaines grandes villes comme

London, Oakville et Toronto, les frênes représentent environ 10 % des arbres du territoire, donc

pratiquement un arbre sur dix (Ville de Gatineau, 2012). De plus, les vecteurs de déplacement de

l’agrile du frêne entre les centres urbains sont nombreux, ce qui explique en partie la dispersion

du ravageur d’une ville à une autre. Cependant, c’est le déplacement du bois de chauffage qui

représente le plus grand vecteur de déplacement anthropique du ravageur (Godmaire et Galvez,

2013).

Lorsque l’agrile est bien implanté dans une ville ou une municipalité, ce sont ensuite les milieux

forestiers environnants qui sont menacés. En effet, que ce soit par la propagation naturelle de

l’insecte ou par des modes de dissémination anthropique, tôt ou tard, les frênes en milieux

naturels seront affectés par ce ravageur. Toutefois, des études ont démontré que les pertes

économiques engendrées par l’agrile du frêne sont significativement plus élevées pour les

gouvernements municipaux et les propriétaires de maison. Les pertes de ressources en frêne pour

les propriétaires de terre à bois représentent moins de 4 % des pertes économiques totales

engendrées par ce ravageur (Aukema et autres, 2011).

Pour ces raisons, le contexte de la gestion de l’agrile du frêne en milieu urbain sera abordé sous

plusieurs thèmes. Premièrement, les limites nordiques de la propagation du ravageur seront

décrites afin de comprendre la portée que cette problématique peut atteindre. Puis, un regard

critique sur la gouvernance des instances provinciales du Québec en matière de gestion des

espèces exotiques envahissantes en général et de l’agrile du frêne en particulier sera porté dans le

but d’y déceler des pistes d’amélioration. Finalement, un outil de gestion régional de l’agrile sera

présenté.

Page 84: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

75

3.1 Limites de propagation de l’agrile

En raison des hivers rigoureux du Québec, il pourrait être raisonnable de penser que la

propagation de l’agrile serait éventuellement limitée par un obstacle climatique. Présentement, la

limite de propagation nordique de l’insecte n’est pas encore bien connue, c'est-à-dire la latitude à

partir de laquelle le climat devient trop rigoureux en hiver pour permettre la survie des larves de

l’agrile. Bien que les larves soient tolérantes au gel, un taux de mortalité est observé à partir

d’une certaine température hivernale critique. Selon Crosthwaite et collaborateurs, les larves

d’agrile du frêne résistent à des températures allant jusqu’à -30 °C grâce à leur capacité à

accumuler de fortes concentrations de glycérol et à synthétiser des agents antigels (glycoprotéine

et glycolipide) (Crosthwaite et autres, 2010). Toutefois, puisque les larves se trouvent sous

l’écorce des frênes, celles-ci bénéficient d’une certaine protection contre le froid extérieur. Ainsi,

il est difficile d’évaluer précisément à partir de quelle température extérieure les larves ne

peuvent survivre, car de nombreux facteurs peuvent influencer cette réalité. Notamment,

l’exposition du frêne par rapport au soleil, la localisation de celui-ci (milieu urbain, ouvert ou

forestier) et le diamètre à hauteur de poitrine des individus sont autant de facteurs qui affectent la

température ressentie sous l’écorce, soit dans la loge hivernale de la larve d’agrile (Vermunt et

autres, 2012). De plus, des facteurs génétiques propres à l’agrile du frêne peuvent faire varier la

résistance des larves au froid (taux de glycérol et de protéines antigel) (Crosthwaite et autres,

2010). Pour ces raisons, il est estimé que l’aire de répartition de ce ravageur dépendrait davantage

de la disponibilité des arbres-hôtes (frênes) que des températures hivernales d’une région (Sobek-

Swant et autres, 2011).

Cependant, dans le cas d’évènements climatiques extrêmes telle qu’une période de chaleur

hivernale de plusieurs journées suivie d’un épisode de froid intense pourrait désacclimater les

larves et causer une certaine mortalité (Sobek-Swant et autres, 2011). De surcroît, des périodes

prolongées de froid extrême comme celles qui ont frappé l’est du Canada et le nord-est des États-

Unis en janvier 2014 pourraient avoir causé la mortalité d’une certaine proportion de larves. Bien

que le froid puisse avoir contribué à diminuer la population d’adultes pour l’été 2014, il est

certain que l’agrile du frêne n’a pas été exterminé par cet évènement climatique (Mcauliffe,

2014).

Face au constat que la propagation du ravageur ne sera pas limitée par les hivers rigoureux du

Québec, le gouvernement provincial doit donc considérer tous les milieux naturels et urbains

comme étant menacés par l’agrile. Dans cette perspective, même les municipalités et les milieux

naturels de l’est de la province sont à risque. Comme illustrées à la figure 3.1, les régions du

Page 85: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

76

Saguenay-Lac-Saint-Jean et du Bas-Saint-Laurent sont également concernées par la

problématique.

Figure 3.1 Carte de répartition du frêne noir en pourcentage au Québec (tiré de : Noreau,

2014)

3.2 Pour une meilleure gouvernance provinciale

La gestion des espèces exotiques envahissantes établies et la prévention des futures introductions

ne sont pas la responsabilité d’un seul ministère, elle implique de près ou de loin les compétences

de plusieurs ministères fédéraux. Reconnaissant cette responsabilité commune, le Gouvernement

du Canada a mis en place une stratégie nationale et un plan d’action afin de mieux coordonner et

unir les efforts de ces diverses organisations gouvernementales (voir les sections 1.2.1 et 1.2.2).

Ces documents officiels ont donné la structure dont le Canada avait besoin pour répondre

efficacement aux nombreuses menaces économiques, environnementales et sociales que

représentent les arrivées d’espèces exotiques envahissantes. Un des plus gros gains issus de cette

stratégie nationale est l’amélioration de la collaboration entre les différents ministères face à une

problématique complexe. Dans le cas de l’agrile du frêne, c’est l’Agence canadienne d’inspection

des aliments (ACIA) qui coordonne les efforts de détection et de sensibilisation des intervenants

et de la population. Cependant, cette agence a besoin de la collaboration de Ressources naturelles

Canada - Service canadien des forêts (RNCan-SCF) pour le volet scientifique. En effet, les efforts

de recherches déployés par RNCan-SCF afin de perfectionner les outils de dépistage et de lutte

contre l’agrile du frêne sont nécessaires pour appuyer et diriger les interventions de l’ACIA.

Pour assurer une meilleure gestion de l’agrile du frêne, la synergie observée entre plusieurs

ministères fédéraux doit également être retrouvée au sein des ministères provinciaux. Les

Page 86: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

77

responsabilités de l’ACIA consistent principalement à détecter la présence de l’agrile afin d’y

établir les frontières de la zone de quarantaine réglementée. La gestion des problématiques

engendrées par l’insecte (pertes de ressources forestières, pertes économiques, perte de

biodiversité) est donc de la responsabilité des autorités provinciales et municipales.

3.2.1 Organisation de la gouvernance

Au Québec, plusieurs ministères peuvent être interpellés par la gestion de l’agrile du frêne, soit le

Ministère des Ressources naturelles (MRN), le Ministère du Développement durable, de

l’Environnement, de la Faune et des Parcs (MDDEFP), le Ministère des Affaires municipales, des

Régions et de l’Occupation du territoire (MAMROT) ainsi que l’Institut national de la santé

publique du Québec (INSPQ). En raison des menaces pour les milieux forestiers, le MRN est

directement impliqué. De plus, ce ministère possède une grande expertise en matière de gestion

de ravageurs forestiers. Cependant, la perte de frênes dans les milieux urbains et les impacts que

les communautés subissent rejoignent davantage le mandat du MAMROT. Quant à l’INSPQ, il

peut être concerné dans l’éventualité où des enjeux en lien avec la santé publique émergent. La

perte de frênes en milieu urbain peut favoriser la création d’îlots de chaleur susceptibles

d’affecter directement la santé publique. Finalement, le MDDEFP pourrait être appelé à intervenir

à cause des menaces pour la biodiversité québécoise et pour contrer la dégradation des milieux

naturels protégés comme les parcs nationaux.

Présentement, aucun de ces ministères ne s’implique activement pour gérer cette problématique

émergente, très probablement en raison des responsabilités partagées entre plusieurs ministères.

L’inaction et le manque de communication sur le sujet des instances provinciales fait perdre un

temps précieux pour mettre en place des moyens visant à ralentir la progression de l’agrile du

frêne et par le fait même à éviter des pertes économiques substantielles. Depuis la découverte de

l’agrile en 2002 dans le sud-ouest de l’Ontario, le Québec a disposé de six années avant que

l’insecte soit détecté pour la première fois dans la ville de Carignan, soit en 2008 (Godmaire et

Galvez, 2013). Or, en 2014, plusieurs dizaines de villes et municipalités du Québec sont

maintenant aux prises avec ce ravageur sans pour autant bénéficier d’un support économique ou

technique de la part du gouvernement provincial.

Ce manque d’implication ne fait qu’illustrer le manque d’organisation globale du gouvernement

face à la gestion de risques touchant les espèces exotiques envahissantes. Tout comme le

Gouvernement du Canada s’est doté d’une stratégie nationale pour mieux gérer cette

problématique, la province de Québec devrait faire le même exercice. Malheureusement, la

Page 87: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

78

publication des Orientations gouvernementales en matière de diversité biologique en 2013

représente une occasion manquée de mettre sur pieds une telle stratégie. Comme détaillé dans la

section 1.3.1, le sujet du contrôle des espèces exotiques envahissantes n’est que très brièvement

abordé dans ce document. Néanmoins, que ce soit par le biais de nouvelles orientations en

matière de diversité biologique ou par le biais d’une stratégie provinciale spécifique, des efforts

de concertation et de collaboration entre les différents ministères québécois doivent

impérativement être faits afin de faciliter la prise en charge des espèces exotiques envahissantes

affectant les communautés et la survie des espèces indigènes de la province.

Pour mettre en place un mécanisme de réponse rapide, la première étape consisterait à déterminer

les responsabilités individuelles de chaque ministère. Cette étape peut être réalisée par le biais

d’une revue complète des lois et règlements pertinents dans le but de mettre en place un cadre

législatif couvrant toute nouvelle introduction d’espèces exotiques envahissantes, qu’elles soient

végétales ou animales. Cet exercice permettrait d’évaluer la performance actuelle des lois et

règlements du Québec à encadrer la gestion des espèces envahissantes et d’identifier les

modifications à apporter pour accroître leur étendue de responsabilité. L’objectif de cette revue

serait d’assurer que chaque nouvelle espèce exotique entrant au Québec soit couverte par une loi

ou un règlement et que les rôles et responsabilités de chaque ministère soient rapidement désignés

dans de telles circonstances.

Ensuite, étant donné que la gestion des espèces envahissantes fait appel aux compétences de

plusieurs ministères à la fois, un mécanisme de communication efficace entre ceux-ci devrait être

mis en place. Pour éviter qu’une menace économique et environnementale importante comme

l’agrile du frêne ne soit ignorée, des rencontres entre les différents ministères concernés par les

espèces exotiques envahissantes devraient être régulièrement organisées. À cet effet, un des rôles

principaux du Conseil québécois sur les espèces exotiques envahissantes (CQEEE) est de réunir

tous les intervenants pertinents afin de mieux coordonner les efforts de gestion.

Une bonne façon d’assurer la participation de tous les intervenants concernés par les espèces

envahissantes (gouvernement, industrie, organisme à but non lucratif, université) est d’obliger la

présence de ces parties prenantes au conseil par le biais d’une réglementation. C’est notamment

ce qu’a fait l’état d’Indiana pour former son conseil sur les espèces exotiques envahissantes. Dans

cette réglementation, les objectifs, le financement, le nombre de rencontres annuelles obligatoires

ainsi que la provenance des membres qui doivent siéger sur le conseil sont détaillés (Indiana

Invasive Species Council (IISC), 2012). Ainsi, si l’équivalent des membres du conseil de l’état

d’Indiana était réuni au Québec, on retrouverait :

Page 88: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

79

Un membre du MAPAQ

Un vétérinaire en chef du Québec (MAPAQ)

Un membre du Ministère des Transports du Québec (MTQ)

Un membre du MRN

Un membre du MDDEFP

Un membre d’une université québécoise

Un membre d’un institut de recherche sur les espèces exotiques envahissantes

Deux membres de l’industrie forestière, agricole, horticole ou aquacole

Deux membres représentant des organismes publics, parapublics ou communautaires de

conservation des milieux naturels ou de la biodiversité (IISC, 2012)

L’exemple du conseil de l’état d’Indiana est un modèle pour le Québec, car il assure une

coordination adéquate des actions et une communication efficace entre les différents intervenants.

De plus, un conseil comprenant toutes ces parties prenantes pourrait déterminer les priorités et le

financement nécessaire ainsi que les modifications à apporter aux lois et règlements afin d’assurer

une meilleure planification des actions de prévention des introductions et de contrôle des espèces

envahissantes établies.

3.2.2 Possibilités d’amélioration

Dans le contexte de la gestion de l’agrile du frêne, plusieurs actions peuvent être réalisées par les

différentes instances gouvernementales de la province. Premièrement, un plan de préparation à

l’arrivée du ravageur à l’intention des municipalités et des propriétaires forestiers pourrait être

mis au point par ces instances. C’est ce que les ministères responsables des ressources naturelles

et de l’agriculture ont fait dans plusieurs états américains. Par exemple, les états du Michigan et

de New York ont mis au point un modèle de gestion à suivre pour les milieux urbains et les

milieux forestiers (Emerald Ash Borer, s.d.). De plus, un tel plan de préparation détaille

également les actions qui seront réalisées par les instances gouvernementales locales afin de gérer

l’agrile. Ce plan doit avoir pour objectif de réduire les risques de propagation, de minimiser les

impacts et de répondre rapidement et efficacement suite à la première détection du ravageur.

Une autre action prioritaire à déployer au Québec consiste à allouer des subventions aux

municipalités afin qu’elles puissent réaliser un inventaire des arbres présents sur leur territoire.

L’inventaire des frênes représente la base sur laquelle s’appuient toutes les autres étapes de

gestion de l’agrile. Présentement, la majorité des municipalités du Québec n’ont jamais réalisé

d’inventaires d’arbres et n’ont aucune connaissance spécifique concernant la présence de frênes

Page 89: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

80

sur leur territoire. Ainsi, il serait probablement du ressort du MAMROT d’encourager

financièrement les municipalités à réaliser cette activité essentielle en préparation de l’arrivée du

ravageur. Ces subventions montreraient aux municipalités que la problématique est reconnue par

le gouvernement et que ce dernier sera présent pour supporter les communautés du Québec. De

plus, ce message serait encore plus positif en ce sens qu’il sensibiliserait les dirigeants

municipaux sur l’importance de se préparer à faire face à l’agrile du frêne. Finalement, ces

financements aideraient grandement à diminuer les contraintes économiques que les petites

communautés disposant de ressources limitées subiront suite à l’arrivée du ravageur.

En termes de sensibilisation et d’éducation dans le dossier de l’agrile du frêne, le gouvernement

du Québec fait très peu de choses. En effet, bien que chaque ministère concerné dispose d’une

plate-forme internet élaborée, aucune information sur le ravageur n’est diffusée. Or, même si

beaucoup d’information est disponible sur le sujet, la très grande majorité de la documentation est

en anglais. Ainsi, afin de faciliter l’accès à l’information, une plus grande diffusion

d’informations et de documentations francophones sur les sites internet gouvernementaux serait

nécessaire. Par exemple, le Ministère des Richesses naturelles de l’Ontario (MRNO) offre

beaucoup d’informations sur sa plate-forme internet et a produit plusieurs guides et documents en

collaboration avec des ministères fédéraux sur l’agrile du frêne. Notamment, ce ministère a

participé à la rédaction d’un recueil de textes très complets traitant des différentes méthodes de

gestion de l’agrile et des leçons apprises suite à d’autres épidémies de ravageurs forestiers

(RNCan, 2009). De surcroît, le MRNO a également collaboré à l’élaboration d’un guide de

détection visuelle de l’agrile du frêne (SCF, 2006).

3.2.3 Synergie entre les intervenants

Afin de lutter contre l’agrile du frêne, une bonne synergie entre les différents intervenants doit

être entretenue pour permettre le développement de grands projets. L’association des efforts entre

différents paliers gouvernementaux et intervenants (organismes et universités) peut mener à

l’élaboration d’initiatives et à des projets très intéressants. Par exemple, aux États-Unis,

l’approche de gestion intégrée « Slow Ash Mortality » (SLAM) visant à ralentir la progression de

l’agrile du frêne et décrite à la section 2.7.1 a été développée avec la participation de deux

ministères fédéraux, de deux ministères de l’état du Michigan, d’une université et d’un organisme

de conservation. Un autre exemple illustrant la force d’une bonne collaboration multisectorielle

est la mise en place du programme « Forest Pest First Detector » (FPFD) dans l’état du Vermont

(voir section 2.6.3). Une fois de plus, ce programme a vu le jour grâce à la collaboration des

instances fédérales, étatiques ainsi qu’avec la participation de l’Université du Vermont.

Page 90: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

81

En plus de la contribution aux efforts de recherches, les universités peuvent participer au

développement de plusieurs initiatives intéressantes. Par exemple, aux États-Unis, de nombreuses

universités possèdent des « extensions » qui sont en réalité des programmes d’application des

connaissances scientifiques au service de la communauté et des entreprises locales. L’Université

du Vermont possède notamment une extension visant à aider les agriculteurs et les serriculteurs à

détecter et contrôler les ravageurs et les maladies affectant les plantes (University of Vermont,

2014). Le projet d’implication sociale « Neighbors Against Bad Bugs » (NABB) a notamment été

créé par une extension de l’Université de Purdue (voir section 2.6.4) (Purdue University, 2009).

Les extensions de l’Université du Minnesota et de l’état d’Iowa dédient quant à elles une section

de leurs sites internet à la gestion de l’agrile du frêne (Iowa State University, 2012). On y

retrouve de nombreux outils d’aide à la décision, plusieurs documents sur les options de gestion

et une bonne quantité d’informations sur ce ravageur (University of Minnesota, 2013). Ces

extensions représentent une bonne façon pour les universités de s’impliquer au sein de la

communauté et de transmettre leur savoir-faire ainsi que leurs connaissances au travers de

services spécialisés, d’ateliers de formation et de différents moyens de sensibilisation.

Malheureusement, le concept d’extension n’est pas très bien exploité par les universités

québécoises.

Le Conseil québécois sur les espèces exotiques envahissantes (CQEEE) détient un rôle central

dans la mise en place d’une bonne synergie entre les différents intervenants. Présentement, le

CQEEE est en train de développer une stratégie de gestion de l’agrile du frêne en milieu urbain et

fait de son mieux pour rassembler le plus d’intervenants possible. Toutefois, il est certain que

sans la collaboration du Gouvernement du Québec, des organismes de conservation et des

universités, aucun projet d’envergure ne peut être déployé, ce qui est malheureusement le cas.

Actuellement, aucune stratégie québécoise de gestion de l’agrile n’a été développée et très peu

d’initiatives ont été lancées.

3.3 Outils de gestion régionale

En attendant une meilleure prise en charge gouvernementale, le CQEEE s’efforce de combler les

besoins les plus urgents au Québec. Étant donné que les impacts sont significativement plus

importants en milieu urbain, l’attention du conseil est orientée vers les besoins des municipalités.

Ainsi, comme qu’il fut détaillé à la section 1.3.3, cet organisme a consulté plus de 33

municipalités dans le but de mettre sur pied une stratégie de gestion adaptée. Afin d’aider le

conseil dans ses démarches d’assistance auprès des municipalités, un outil de gestion visant à

Page 91: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

82

ralentir la progression de l’agrile du frêne à l’échelle régionale est proposé. L’objectif de cet outil

est d’apporter une vision provinciale de la problématique qui ne tient pas compte des frontières

administratives séparant les territoires municipaux et régionaux.

L’outil développé présente des séquences d’actions que les municipalités doivent idéalement

mettre en place selon la proximité de celle-ci par rapport à un foyer d’infestation de l’agrile du

frêne. De cette façon, ces listes d’actions aideraient le CQEEE à approcher les municipalités

concernées afin de les préparer à l’arrivée du ravageur. Pour préciser la suite d’actions à présenter

aux municipalités, des zones d’intervention de couleurs différentes seraient établies autour des

emplacements où la présence de l’agrile a été confirmée. Évidemment, les interventions seraient

plus urgentes dans les zones situées à proximité des foyers d’infestation. L’approche

d’établissement de zones d’intervention de couleur rouge, orange et jaune autour des foyers

d’infestation est similaire à la stratégie de gestion régionale développée par l’état de New York

(voir section 2.7.3). Toutefois, l’outil proposé est un peu plus simple, car il est impossible de faire

autant d’actions et de couvrir autant d’aspects sans une collaboration exceptionnelle de la part des

ministères provinciaux (MRN, MAMROT et MDDEFP) et fédéraux (ACIA et RNCan-SCF).

Dans cette perspective, l’outil a été développé afin qu’il puisse être aisément modifié et adapté à

tout changement de réalité.

Afin de favoriser la sensibilisation des dirigeants municipaux, une carte disponible en ligne et

mise à jour régulièrement sur le site du CQEEE permettrait d’informer dans quelle zone

d’infestation se situe chacune des municipalités. Puis, les listes d’actions spécifiques pour chaque

zone d’intervention ayant une couleur différente pourraient également figurer sur le site internet

afin que les municipalités puissent consulter ces informations en tout temps.

3.3.1 Établissement des zones d’intervention

Un plan de gestion de l’agrile du frêne permettant de sauver un maximum de frênes et

d’économiser de l’argent nécessite une bonne préparation. Le but de l’établissement des zones

d’invention est justement d’encourager les municipalités à se préparer adéquatement à l’arrivée

du ravageur. Il est à noter que la taille des zones d’intervention est la même que celle déterminée

dans le cadre de la stratégie régionale de l’état de New York. Une description plus détaillée de

chaque zone d’intervention est disponible ci-dessous.

La zone rouge s’étend sur une distance de 8 km autour de la zone infestée. Des actions

immédiates doivent être prises dans cette zone, car il est possible que ces municipalités soient

déjà infestées ou qu’elles le soient dans un futur rapproché. Par exemple, si aucun inventaire

Page 92: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

83

d’arbres n’a été réalisé par une municipalité située dans cette zone, la priorité sera évidemment

d’accomplir cette tâche essentielle. Puis, un dépistage actif de l’agrile devra être mené sur le

territoire de la municipalité situé dans cette zone. Il sera important qu’un plan de gestion de

l’agrile du frêne ait été élaboré au préalable.

La zone orange quant à elle s’étend entre 8 et 16 km en périphérie de la zone rouge. Les

municipalités situées dans cette zone disposent encore de quelques années avant que le ravageur y

parvienne par voie naturelle. Toutefois, puisqu’un des plus importants vecteurs de déplacement

de l’agrile est le déplacement du bois de chauffage entre les régions, ces municipalités ne sont pas

à l’abri de l’arrivée précoce du ravageur. Ainsi, les frênes situés dans la zone orange sont

considérés à haut risque et devraient être surveillés de près par les municipalités concernées. Les

municipalités devraient avoir commencé à mettre en place une structure de gestion du ravageur.

La zone jaune s’étend au-delà d’une distance de 16 km à partir du foyer d’infestation, celle-ci

couvre donc l’ensemble du territoire n’étant pas déjà situé en zone rouge ou orange. En fonction

du contexte et des ressources, cette zone peut correspondre à une municipalité régionale de

compté (MRC), à une région administrative ou encore à la grandeur du Québec où des frênes sont

retrouvés. Les municipalités disposent encore de plusieurs années avant que l’agrile affecte le

territoire. Cependant, ces municipalités ne sont pas à l’abri d’une introduction anthropique (bois

de chauffage) et doivent entreprendre certaines étapes préparatoires à l’arrivée de l’agrile.

3.3.2 Outils de gestion par zone d’intervention

Le tableau 3.1 détaille les actions que les municipalités devraient entreprendre en fonction de la

zone d’intervention dans laquelle elles se trouvent. Il est à noter que les municipalités situées dans

les zones rouges auraient préalablement déjà fait partie d’une zone jaune ou orange. Par

conséquent, les actions à entreprendre en zone jaune et orange et détaillées dans le tableau 3.1

devraient minimalement avoir été réalisées. En effet, plus l’infestation de l’agrile du frêne

progresse, plus les limites de chaque zone d’intervention sont repoussées, ce qui fait également

monter d’un cran de couleur la zone dans laquelle chaque municipalité se retrouve.

Deux lignes différentes sont retrouvées dans le tableau 3.1 : la première correspond aux activités

de formation et de préparation qui peuvent être menées par le CQEEE et la deuxième correspond

aux actions que les municipalités devraient entreprendre afin de se préparer à l’arrivée de l’agrile

du frêne.

Page 93: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

84

Le tableau fait souvent référence aux différentes informations contenues dans le chapitre 2. Donc,

afin de s’y retrouver facilement et de bien comprendre l’outil développé dans la présente section,

il est important que le lecteur ait pris connaissance de toutes les sections concernées.

Page 94: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

85

Tableau 3.1 Outils de gestion de l’agrile du frêne en fonction des zones d’intervention

Zone rouge

0 à 8 km

Zone orange

8 à 16 km

Zone jaune

> 16 km

CQEEE - Assistance technique pour aider les

municipalités dans la préparation et

l’application de leur stratégie de gestion

- Formation sur les outils de dépistage

- Assistance pour faire des demandes

de subventions

- Formations visant à aider les

municipalités à préparer un plan de

gestion de l’agrile

- Assistance pour faire des demandes

de subventions

Milieux

urbains

- Dépistage actif faisant appel à tous les

outils disponibles (section 2.2).

- Communication active auprès des

propriétaires de terrains privés

(citoyens, institutions, entreprises)

(section 2.6.2).

- Communication active auprès de la

population (affiche, dépliant, séance

d’information, site internet, etc.)

(section 2.6.2).

- Identification des frênes à traiter à

l’insecticide (sections 2.4.1 et 2.4.2).

- Identification des frênes à abattre et à

anneler (section 2.4.2).

- Négociation des contrats de travail

pour le traitement et l’abattage des

frênes dans le but d’obtenir des prix

avantageux.

- Réalisation d’un inventaire des frênes

publics et privés dans un futur proche

(section 2.1).

- Formation des employés du secteur

privé à la détection visuelle (élagueurs,

horticulteurs) (sections 2.2.1et 2.2.6).

- Sensibilisation active des propriétaires

privés aux choix de gestion de leurs

frênes s’offrant à eux (section 2.4.3).

- Implication de la population par le

biais d’associations de voisins (section

2.6.3).

- Révision du cadre réglementaire de la

municipalité pour donner la flexibilité

nécessaire pour bien gérer l’agrile

(sections 2.5.4 et 2.6.1).

- Dépistage visuel actif (section 2.2.1).

- Planification d’un inventaire des

frênes publics et privés (section 2.1).

- Formation des employés municipaux

à la détection visuelle (sections 2.2.1et

2.2.6).

- Installation de pièges attractifs à des

endroits stratégiques (section 2.2.2)

- Sensibilisation de la population

(section 2.6.2).

- Implication de la population dans les

activités de dépistage (dépisteur

bénévole de premières lignes, section

2.6.4).

- Communication interne pour tenir les

dirigeants informés de la progression de

l’agrile du frêne (section 2.6.1).

Page 95: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

86

Tableau 3.1 Outils de gestion de l’agrile du frêne en fonction des zones d’intervention (suite)

Zone rouge

0 à 8 km

Zone orange

8 à 16 km

Zone jaune

> 16 km

Milieux

urbains

- Désignation d’un ou des lieux de

disposition du bois contaminé (section

2.5.4).

- Établissement de partenariats avec

l’industrie de transformation du bois

pour obtenir un profit sur la vente des

frênes de rues et de boisés abattus

(options de valorisation).

- Répartition du budget alloué au plan

de gestion sur un horizon de plusieurs

années.

- Prévision budgétaire pour le

remplacement immédiat des frênes

abattus (section 2.5.5).

- Interdiction d’élaguer des frênes

durant la période active de l’agrile

(section 2.5.4).

- Organisation de la collecte des frênes

dans les boisés urbains par abattage et

annélation (sections 2.5.1 à 2.5.3).

- Pause de pièges et écorçage de

branches utilisés stratégiquement sur le

territoire (sections 2.2.2 et 2.2.3).

- Élaboration d’un plan de

communication externe (section 2.6.2).

- Sensibilisation des entreprises

présentes dans les zones à haut risque et

à risque modéré pour les sensibiliser

(section 2.1.5).

- Élaboration d’un plan de gestion de

l’agrile du frêne (sections 2.4, 2.5 et

2.7.2).

- Établissement de critères de sélection

des arbres à traiter et les objectifs de

traitement (section 2.4.2).

- Évaluation de partenariats potentiels

pour valoriser le bois de frêne généré

par les opérations d’abattage.

- Élaboration d’un plan de

remplacement des frênes abattus

(section 2.5.5).

- Élaboration ou mise à jour des plans

de gestion forestière des boisés urbains.

- Identification des voies de

propagation naturelle potentielles de

l’agrile (c.-à-d. corridors de végétation

liant des municipalités ensemble).

-Identification des zones à haut risque

et à risque modéré sur le territoire

(section 2.1.5).

- Évaluation des impacts économiques

potentiels

- Réalisation d’exercices financiers

pour évaluer les coûts des différentes

alternatives de gestion (section 2.3.2).

- Identification des grandes lignes du

plan de gestion de l’agrile du frêne (but

et objectifs).

- Identification des boisés urbains et les

ressources en frênes qu’ils contiennent.

- Vérification de l’existence de plans de

gestion forestière pour les boisés

urbains (section 2.5.2).

Page 96: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

87

3.3.3 Modèle de plan de gestion

Un plan de gestion de l’agrile du frêne en milieu urbain est essentiel pour limiter les pertes

économiques et réduire les dégâts environnementaux. L’expérience de plusieurs villes

américaines a montré que les communautés ne s’étant pas préparées à l’arrivée du ravageur ne

disposent pas des fonds nécessaires pour remplacer les arbres perdus, ce qui augmente

considérablement les impacts environnementaux ressentis (Vermont Invasives, s.d.b.). Cette

réalité s’explique par le fait que lorsque les frênes commencent à mourir en grand nombre, les

dangers pour la population et l’urgence d’abattre ces arbres augmentent parallèlement aux coûts

de disposition. En effet, l’abattage de frênes morts coûte environ deux à trois fois plus cher par

rapport à l’abattage d’arbres vivants. De surcroît, le bois d’arbres mort est plus difficile à

déchiqueter et offre peu d’options de valorisation (Vermont Invasives, s.d.b.).

Il existe plusieurs façons de faire un plan de gestion de l’agrile du frêne, il faut seulement

respecter certains principes de base. Tout d’abord, il faut s’assurer d’avoir les ressources

humaines pour mener à bien les opérations. Puis, les prévisions budgétaires doivent être établies

sur un horizon d’au moins 10 ans. Finalement, le plan doit demeurer suffisamment flexible pour

qu’il puisse être ajusté selon les besoins, les résultats des campagnes de dépistage et les nouvelles

informations scientifiques disponibles (Vermont Invasives, s.d.b.).

À la lumière des informations scientifiques actuelles, l’approche « SLow Ash Mortality » (SLAM)

en milieu urbain représente l’option de gestion la plus économique, environnementale et

socialement responsable. En effet, tel que détaillé dans la section 2.7.2, le traitement d’un

maximum de frênes au pesticide coûte moins cher qu’abattre ceux-ci. En plus d’être

économiquement avantageuse, cette approche permet de sauver une plus grande quantité de

frênes matures et de conserver les services écologiques qu’ils procurent. De plus, le fait de

préserver les frênes donne un bon exemple aux citoyens, car cela montre à la population

l’importance de la place de l’arbre urbain. Ainsi, les paragraphes ci-dessous expliquent

brièvement les grandes étapes à considérer pour appliquer une approche SLAM en milieu urbain.

Tout d’abord, un inventaire des frênes publics situés en bordure de rue, dans les parcs et dans les

boisés urbains doit impérativement être réalisé. L’essence, le diamètre à hauteur de poitrine

(DHP) et la localisation avec les coordonnées GPS de chacun des frênes devraient être collectés

lors de l’inventaire de terrain (méthode ascendante, section 2.1.2). Ces informations sont

indispensables pour identifier le nombre d’arbres publics qui satisferont les critères de sélection

pour le traitement par insecticide. Ensuite, sur la base de ces informations, les municipalités

Page 97: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

88

peuvent évaluer les coûts des différentes alternatives de gestion qui s’offrent à elles, c'est-à-dire

l’abattage et le remplacement de tous les frênes, le traitement d’un maximum de frênes ou encore

un compromis entre ces deux dernières activités. Une bonne connaissance du nombre de frênes

situés sur des propriétés privées (résidentiels, industries, institutions) est également importante

afin d’augmenter l’efficacité d’une stratégie de gestion de l’agrile du frêne. Cette information

permet de guider les interventions qui devront être faites auprès des citoyens.

Ensuite, des activités de dépistage doivent être réalisées en utilisant un mélange de plusieurs

outils de détection présentés à la section 2.2. En effet, il n’existe pas une approche meilleure que

les autres à tous les niveaux, chacune d’elle ayant des particularités spécifiques qui les

distinguent. Ainsi, une bonne stratégie de dépistage fait appel à plusieurs outils à la fois. Par

exemple, l’inspection visuelle peut être faite à chaque sortie du personnel de la ville pour les

opérations d’élagage ou toute autre activité liée à la gestion de l’agrile (pose de pièges attractifs et

collecte de branches pour écorçage). Les pièges attractifs représentent un moyen simple, efficace

et économique de détecter la présence du ravageur. La collecte de branches pour écorçage

possède une meilleure capacité de détection précoce et peut être réalisée en même temps que les

opérations d’élagage normales, ce qui réduit les coûts d’utilisation de cette approche. Pour ce qui

est de l’utilisation de guêpes prédatrices, cette approche est une excellente façon d’impliquer la

population et d’obtenir des résultats à faibles coûts. Finalement, l’annélation de frênes peut être

particulièrement utile lorsque des arbres sont prévus à l’abattage. Le fait d’anneler ces arbres ne

demande pas beaucoup d’efforts supplémentaires et possède une double utilité, soit celle de

détecter et de réduire les populations d’agrile du frêne.

Avant de planifier les opérations d’abattage et de traitement à l’insecticide des frênes, la

municipalité doit déterminer les critères qu’un frêne doit satisfaire afin d’être considéré comme

apte à recevoir le traitement. Si la municipalité désire traiter un maximum de frênes, ses critères

de sélection seront évidemment moins restrictifs.

Puis, lorsque la présence de l’agrile est confirmée dans un secteur de la municipalité, l’approche

SLAM consiste à mettre en place un périmètre d’intervention d’un rayon variant de 300 à 600

mètres autour des lieux où l’agrile a été détecté. La grandeur du périmètre est déterminée en

fonction du nombre de ravageurs estimé dans le foyer d’infestation et de la quantité de frênes

retrouvée autour de celui-ci. Dans le cas où la quantité d’agriles estimée est grande et que la

densité de frênes autour du foyer d’infestation est faible, le périmètre d’intervention sera plus

grand. Dans cette dernière situation, la compétition entre les adultes pour la nourriture et les sites

de reproduction sera plus grande, ce qui forcera inévitablement le ravageur à se disperser plus

Page 98: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

89

rapidement à partir du foyer d’infestation. Au contraire, si le nombre de ravageurs est faible et

que la densité de frêne est élevée, la dispersion de l’agrile devrait être limitée. Ensuite, dès la

première année suivant la détection, la municipalité devrait procéder au traitement aléatoire d’un

nombre de frênes équivalent à au moins 20 % du total des frênes retrouvés au sein de cette zone

d’intervention. Puis, un autre 20 % des frênes devrait être traité l’année suivante et ce jusqu’à

avoir traité 100 % des individus présents dans la zone. Il est à noter que les frênes infestés situés

dans le foyer d’infestation doivent impérativement être abattus et neutralisés avant le début de

l’été suivant afin d’éviter l’émergence d’une nouvelle génération d’adultes. Toutefois, certains

points sont à considérer lors de l’application de ce modèle de gestion. D’abord, une certaine

proportion de frênes du domaine privé sur lesquels la municipalité n’a pas de contrôle se trouve

dans la zone d’intervention. Puis, des boisés urbains et des arbres ne satisfaisant pas les critères

de sélection pour le traitement peuvent se situer dans la zone d’intervention.

Pour ce qui est des frênes privés situés dans la zone d’intervention, la meilleure stratégie pour la

municipalité est de traiter tous les frênes publics de la zone dans les deux à trois années suivant la

détection de façon à réduire la population du ravageur, ce qui laisse plus de temps aux

propriétaires privés pour faire un choix de traitement ou d’intervention. Pendant ces deux à trois

années, la municipalité doit sensibiliser directement les propriétaires situés dans la zone

d’intervention sur les alternatives de gestion qui s’offrent à eux, soit l’abattage ou le traitement de

leurs frênes. Cela peut se faire par le biais d’une lettre explicative remise aux propriétaires

concernés afin de les avertir de l’état de la situation et de les guider vers des ressources

compétentes.

Pour les frênes ne satisfaisant pas les critères de sélection pour le traitement à l’insecticide, un

abattage stratégique doit être prévu. C'est-à-dire qu’au lieu de simplement abattre ces arbres dans

la zone d’intervention, l’annélation de ceux-ci est conseillée afin de réduire du même coup la

population de l’agrile. En effet, puisque les frênes annelés favorisent leur sélection par le

ravageur pour y pondre ses œufs, l’abattage de ceux-ci après la saison de reproduction de

l’insecte contribue à diminuer significativement la population. Pour ce qui est de la gestion des

boisés urbains, une approche d’abattage stratégique avec annélation de certains frênes est à

planifier (voir la section 2.5.3). De plus, les options de commercialisation de ces ressources en

frênes doivent être étudiées afin d’amoindrir les coûts d’intervention.

Finalement, pour des municipalités possédant de petits territoires, l’application de l’approche de

gestion par foyer d’infestation proposée ci-dessus n’est peut-être pas adaptée à leurs réalités. En

général, la quantité de frênes sur un territoire urbain est proportionnelle à la longueur totale des

Page 99: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

90

voies publiques. Ainsi, la méthode de gestion proposée pour ces petites communautés consisterait

à considérer l’entièreté du territoire de la petite municipalité comme une seule zone

d’intervention. De cette façon, lorsque la présence du ravageur serait détectée, l’approche décrite

dans la présente section s’appliquerait tout de même.

Page 100: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

91

CONCLUSION

Les échanges commerciaux entre les pays sont certainement très profitables du point de vue

économique, mais ils amènent aussi d’autres problèmes non négligeables. En effet, l’introduction

d’espèces végétales et animales exotiques par le biais du transport des produits de consommation

ou des matières premières représente une conséquence indirecte de ces échanges. Heureusement,

ce ne sont pas toutes les espèces exotiques déplacées hors de leur zone naturelle de reproduction

qui deviennent envahissantes. Cependant, tel que démontré tout au long du présent document

avec l’exemple de l’agrile du frêne, une seule espèce peut engendrer d’importants impacts

économiques, environnementaux et sociaux. Tant qu’il y aura des échanges commerciaux entre

les pays, il y aura des échanges d’espèces exotiques. Néanmoins, des efforts internationaux visant

à mieux réglementer les échanges de marchandises et à favoriser une meilleure collaboration

entre les dirigeants nationaux peuvent contribuer à réduire le nombre d’introductions.

L’objectif principal du présent essai est de développer un outil de gestion régionale de l’agrile du

frêne permettant de mieux coordonner les efforts de sensibilisation et d’assistance auprès des

municipalités du Québec qui seront éventuellement aux prises avec ce ravageur. Cet objectif a été

atteint en décrivant d’abord le contexte de gouvernance nationale et provinciale des espèces

exotiques envahissantes au Canada. À ce sujet, plusieurs recommandations pour une meilleure

gouvernance globale de ces espèces envahissantes ont été formulées. De plus, d’autres

recommandations à l’intention des instances gouvernementales du Québec spécifiques à l’agrile

du frêne ont été décrites. Puis, une description détaillée des différents outils à considérer dans

l’élaboration d’un plan de gestion de l’insecte en milieu urbain a été faite. Ces dernières

informations ont ensuite servi pour élaborer un outil de gestion sur une base régionale.

La Stratégie nationale sur les espèces exotiques envahissantes est un premier engagement du

Canada envers une meilleure prévention des nouvelles introductions et à l’égard d’une gestion

structurée des espèces exotiques établies. Cette stratégie permet entre autres de coordonner les

actions des différents ministères fédéraux impliqués dans les activités de prévention et de gestion

de ces envahisseurs. Toutefois, face à la grande complexité liée à la gestion des espèces exotiques

envahissantes, l’implication des gouvernements provinciaux est essentielle. Au Québec, force est

de constater que le gouvernement s’occupe très peu de cette problématique. Dans le cas de

l’agrile du frêne, six années après son introduction, les instances gouvernementales de la province

n’ont encore porté aucune action. Ce manque d’implication reflète des lacunes flagrantes en

termes de communication et d’organisation entre les différents ministères provinciaux concernés.

Page 101: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

92

Pour pallier à ce manque, le Gouvernement du Québec devrait mettre au point une stratégie

énonçant des objectifs clairs et les responsabilités des différents ministères en matière de gestion

des espèces envahissantes. Pour ce faire, le Conseil québécois sur les espèces exotiques

envahissantes pourrait réunir les représentants des ministères pertinents pour mettre sur pieds une

telle stratégie.

Face à l’agrile du frêne, ce sont les municipalités et les propriétaires de maison qui subissent les

plus grandes pertes économiques. Afin de limiter ces pertes, les municipalités doivent se préparer

adéquatement en élaborant un plan de gestion de l’agrile. Cependant, préalablement à

l’élaboration d’un plan de gestion, un inventaire des frênes présents sur le territoire concerné doit

impérativement être fait. Les informations recueillies dans le cadre de cet inventaire sont

nécessaires à la conception d’un plan de gestion et aux calculs des prévisions budgétaires

permettant l’application de celui-ci. Un plan de gestion doit prévoir les activités de dépistage du

ravageur, de traitement de frênes à l’insecticide, d’abattage ainsi qu’un bon plan de

communication et de sensibilisation. Cette planification devrait permettre à une municipalité

d’enclencher une suite d’actions structurée dès que la présence du ravageur est détectée sur le

territoire. À cet effet, l’approche « SLow Ash Mortality » en milieu urbain représente la meilleure

stratégie d’intervention disponible à ce jour. Effectivement, cette approche visant à gérer le

ravageur par foyer d’infestation constitue l’option la plus économique tout en limitant les impacts

environnementaux et sociaux.

Puisque la dispersion de l’agrile du frêne ne tient pas compte des frontières administratives, il est

important d’aborder la problématique en considérant cette réalité. C’est dans cette perspective

que l’outil de gestion régionale du ravageur développé dans le présent travail a été élaboré. Cet

outil a été conçu afin qu’il puisse être utilisé par une organisation dont les responsabilités

couvrent l’ensemble du territoire de la province, tel que le Conseil québécois sur les espèces

exotiques envahissantes. Ainsi, il permettra au conseil d’organiser les interventions d’assistance

technique auprès des municipalités selon leur proximité avec les foyers d’infestation connus.

Ultimement, l’application de cet outil permettra de préparer les municipalités à bien gérer l’agrile

sur leur territoire, ce qui contribuera globalement à ralentir la progression du ravageur au sein de

la province.

Cette approche de gestion régionale demeure suffisamment flexible pour intégrer et prendre en

compte des initiatives qui seraient éventuellement mises en place par le Gouvernement du

Québec ou d’autres organisations. Par exemple, l’allocation de subventions provinciales pour

assister les municipalités dans la réalisation de leur inventaire d’arbres et dans l’élaboration d’un

Page 102: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

93

plan de gestion de l’agrile du frêne serait très bénéfique pour appuyer cette méthode. De surcroît,

les recommandations d’un éventuel plan de préparation à l’arrivée du ravageur préparé par les

instances gouvernementales du Québec pourraient aisément être intégrées à l’outil. Ces deux

dernières initiatives gouvernementales seraient autant plus bénéfiques en ce sens qu’elles

souligneraient aux municipalités l’importance d’être proactif face à l’agrile.

En conclusion, le fait que l’agrile du frêne soit le ravageur le plus destructeur que l’Amérique du

Nord ait connu sera peut-être le son de cloche nécessaire pour que les autorités provinciales du

Québec s’impliquent davantage dans la gestion et la prévention des introductions d’espèces

exotiques envahissantes. Certains dossiers non couverts dans le présent essai pourraient faire

l’objet d’études supplémentaires. Notamment, des avenues intéressantes en ce qui a trait à la

valorisation du bois de frênes abattus en milieu urbain seraient à étudier afin de réduire le fardeau

économique vécu par les municipalités infestées. Finalement, bien que la gestion de l’agrile du

frêne en milieu urbain soit primordiale, il est aussi important de prévoir une stratégie adaptée à la

gestion du ravageur en milieu forestier. Car une fois que l’insecte est bien implanté dans une

ville, il s’attaque habituellement après coup aux frênes des milieux forestiers adjacents, ce qui

consolide davantage l’épidémie.

Page 103: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

94

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104

ANNEXE 1 - LOIS FÉDÉRALES RÉGISSANT LA GESTION DES ESPÈCES

EXOTIQUES ENVAHISSANTES (inspiré de : Environnement Canada, 2004, p. 30)

Loi Descriptif

Agence canadienne d’inspection des aliments

Loi sur la protection des

végétaux

Vise la protection de la vie végétale et des secteurs agricoles et

forestiers en empêchant l’importation, l’exportation et la propagation de parasites.

Loi sur les semences Établit et contrôles les semences qui peuvent ou pas être

commercialisées au Canada

Agriculture et Agroalimentaire Canada

Loi sur les stations

agronomiques

Autorise l’établissement de stations agronomiques au Canada dans

lesquelles diverses activités de recherche reliées à la productivité

et la conservation de l’agriculture sont menées.

Loi sur le rétablissement agricole des prairies

Loi mettant en place un comité consultatif chargé de donner au ministre des avis sur les meilleures méthodes à suivre pour assurer

le rétablissement agricole des zones de sécheresse et d’érosion

éolienne des terres dans les provinces du Manitoba, de la Saskatchewan et de l’Alberta.

Ressources naturelles Canada – Service canadien des forêts

Loi sur le ministère des

ressources naturelles

Prévoit l’utilisation des sciences et de la technologie pour

améliorer l’accès aux ressources naturelles et la protection de l’environnement.

Loi sur les forêts Prévoit la réalisation de recherches en lien avec la protection, la

gestion et l’utilisation des ressources forestières (ex : recherche

sur la biologie et le contrôle des parasites).

Environnement Canada

Loi canadienne sur la

protection de

l’environnement

Favorise le développement durable par la protection de

l’environnement et la prévention de la pollution. Cette loi permet

entre autres de réglementer l’importation d’une nouvelle espèce afin qu’une évaluation environnementale et des risques pour la

santé y soit menée au préalable.

Loi sur les espèces en péril

Vise à protéger les espèces en péril. Les plans de redressement des espèces en péril comprennent des mesures d’éradication et de

contrôle d’espèces exotiques envahissantes menaçant leur

rétablissement.

Loi sur la protection d’espèces animales ou

végétales sauvages

Régit l’importation et le transport interprovincial d’animaux sauvages, en particulier les espèces reconnues comme nuisibles à

la faune indigène.

Page 114: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

105

Agence Parcs Canada

Loi sur les parcs

nationaux du Canada

Vise à maintenir l’intégrité écologique des milieux naturels. Pour

y parvenir, des programmes de gestion des espèces exotiques envahissantes sont mis en place dans les parcs.

Agence des services frontaliers du Canada

Loi sur les douanes Régit l’importation de marchandises au Canada et habilite les

agents de douanes à procéder à des inspections. La loi prévoit la communication de renseignements aux autres ministères.

Page 115: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

106

ANNEXE 2 - DÉPISTEURS DE PREMIÈRE LIGNE DANS L’ÉTAT DU VERMONT (tiré

de : Vermont Invasives, s.d)

Page 116: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

107

ANNEXE 3 - ÉTIQUETTE D’IDENTIFICATION DE FRÊNES (tiré de : Purdue University,

2009)

Page 117: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

108

ANNEXE 4 - ÉTABLISSEMENT DES ZONES D’INTERVENTION NIVEAU 1 (tiré de :

NYSDEC, 2011, p.31)

Page 118: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

109

ANNEXE 5 - ÉTABLISSEMENT DES ZONES D’INTERVENTION NIVEAU 2 (tiré de :

NYSDEC, 2011, p.33)

Page 119: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

110

ANNEXE 6 - ÉTABLISSEMENT DES ZONES D’INTERVENTION NIVEAU 3 (tiré de :

NYSDEC, 2011, p.35)

Page 120: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

111

ANNEXE 7 - PLAN D’ACTION MUNICIPALITÉ (traduction libre de : NYSDEC, 2011,

p.20)

Zone rouge

0 à 8 km

Zone orange

8 à 16 km

Zone jaune

> 16 km

Niveau 1 - Sensibilisation et éducation

- Formation de préparation

à l’invasion

-Sensibilisation et éducation

- Formation de préparation

à l’invasion

- Sensibilisation et éducation

Niveau 2 - Même que niveau 1, plus :

- Inventaire de frênes

- Assistance technique

auprès du personnel de la municipalité

- Assistance pour les

demandes de subvention

- Critère pour déterminer si le traitement des frênes est

approprié

- Formation et assistance avec l’utilisation ou la

disposition de bois de frêne

contaminé

Même que zone rouge, niveau 2

- Sensibilisation et éducation

- Formation de préparation

à l’invasion

Niveau 3 Même que niveau 2 Même que zone rouge niveau 3

- Sensibilisation et éducation

- Formation de préparation

à l’invasion

Page 121: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

112

ANNEXE 8 - PLAN D’ACTION MILIEUX FORESTIERS (traduction libre de : NYSDEC,

2011, p.12-14)

Zone rouge

0 à 8 km

Zone orange

8 à 16 km

Zone jaune

> 16 km

Niveau 1 - Augmenter les efforts de dépistage (arbres annelés, pièges en forme de

prisme, bio-surveillance et surveillance

visuelle)

- Cibler 10 à 25 frênes à anneler pour en faire des pièges pour l’ADF

- Séparer les 10 à 25 arbres annelés de

façon équidistante dans une zone tampon de 800 mètres autour de la zone infestée

- Maintenir l’effort de dépistage pendant

au moins 3 ans ou jusqu’à ce que le noyau soit qualifié niveau 2 ou 3

- Dépistage actif à l’aide de pièges en forme de

prisme et d’arbres

annelés.

- Déploiement des pièges dans les endroits à risque

(camping, halte routière,

industrie du bois, etc.)

Mêmes mesures que la

zone orange,

niveau 1

Niveau 2 - Mêmes mesures que la zone rouge,

niveau 1

- Collaborer et participer aux efforts de recherche (bio-contrôle, insecticides, etc.)

- Réduire les populations d’ADF en

abattant les frênes infestés (prioriser les arbres infestés de grande taille)

- Les résultats obtenus avec les arbres

sentinelles serviront à orienter les besoins

d’abattage

- Créer des grappes d’arbres annelés pour

attirer et détruire l’ADF

- Encourager l’abattage des arbres infestés avant le printemps (saison

d’émergence des larves en adultes)

Anneler des arbres afin de

mesurer l’évolution des

populations d’ADF et suivre le mouvement de

ceux-ci.

Mêmes

mesures que

celles de la zone orange,

niveau 2

Niveau 3 Mêmes mesures que dans la zone rouge,

niveau 2

Mêmes mesures que dans

la zone orange, niveau 2

Mêmes

mesures que dans la zone

jaune, niveau 2

Page 122: LA GESTION DURABLE DE L’AGRILE DU FRÊNE EN MILIEU …

113

ANNEXE 9 - PLAN D’ACTION FORÊTS PRIVÉES ET INDUSTRIES (traduction libre de :

NYSDEC, 2011, p.15-16)

Zone rouge

0 à 8 km

Zone orange

8 à 16 km

Zone jaune

> 16 km

Niveau 1 Contacter les propriétaires de forêts

privées et les dirigeants municipaux par

le biais de lettres postales, présentations

publiques ou conférences de presse

pour :

- Sensibiliser à reconnaître les signes et

symptômes d’un frêne infesté

- Encourager la déclaration d’arbres

suspectés d’être infestés aux autorités

désignées

- Sensibiliser par rapport à l’approche

SLAM

- Encourager une inspection annuelle

des frênes dans les forêts

- Expliquer les rôles des lois et

ordonnances locales en matière de

gestion des activités forestières

Diffusion d’informations

via différents médias

orientés vers le public en

général et les dirigeants

municipaux pour :

- Sensibiliser à

reconnaître les signes et

symptômes d’un frêne

infesté

- Véhiculer de

l’information par rapport

à l’approche SLAM

- Fournir des contacts

d’assistance spécialisée

pour les propriétaires de

terrains forestiers

Mêmes mesures que

celles de la zone

orange, niveau 1

Niveau 2 Mêmes mesures que celles de la zone

rouge, niveau 1.

Fournir de l’assistance technique pour

les propriétaires forestiers pour:

- Développer une stratégie de récolte des

frênes de façon à tirer profit de ces

ressources et à réduire la nourriture

disponible pour l’ADF

- Donner accès à des professionnels afin

d’élaborer une stratégie d’abattage des

frênes

- Réaliser des inventaires des arbres sur

des propriétés boisées privées

- Développer un plan d’intendance des

forêts pour chaque propriétaire

- Procurer de l’information sur les

possibilités de commercialiser le bois de

frêne dans les zones en quarantaine

Même mesures que celles

de la zone rouge, niveau

1

Mêmes mesures que

celles de la zone

orange, niveau 1

Niveau 3 Mêmes mesures que celles de la zone

rouge, niveau 2

Mêmes mesures que

celles de la zone rouge,

niveau 2

Mêmes mesures que

celles de la zone

orange, niveau 1