Introduction 1. La datation par la dendrochronologie

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425 DENDROCHRONOLOGIE ET DENDROMORPHOLOGIE Introduction Tissu composé d’éléments anatomiques divers (WILSON, WHITE 1986), présent dans les branches, le tronc et les racines des arbres, chargé d’assurer des fonctions aussi diverses que la circulation ascendante de la sève brute depuis les racines jusqu’aux feuilles, le soutien mécanique de l’organisme et le stockage de substances de réserve, le bois peut être riche d’enseignements sur les conditions dans lesquelles l’arbre dont il provient a poussé. Lorsque le bois est considéré en tant qu’objet résultant d’une activité humaine, l’exa- men de la forme générale et de l’anatomie des différents plans contribue à apporter une série d’informations sur la réalisation de la pièce qui enrichit l’étude seule de la plus-value apportée par le geste humain au matériau. L’étude des caractéristiques morphologiques des pièces et leur étude anatomique s’affirment aujourd’hui fondamentales pour les recherches sur la charpenterie de marine développées dans le cadre des études d’archéologie navale et pour mieux comprendre les critères de sélection et les modes d’uti- lisation des bois en architecture navale, depuis le choix des essences en fonc- tion des pièces jusqu’à leur mise en place. Avant de présenter des résultats relatifs à un programme ayant pour thème l’étude dendrochronologique et dendromorphologique des épaves antiques de Méditerranée, la suite du texte rappellera d’abord les notions fondamentales et les contraintes propres à la dendrochronologie. 1. La datation par la dendrochronologie Lorsque le climat impose à la végétation une période d’activité et une période de repos au cours d’une même année calendaire, les arbres élaborent chaque année, à la périphérie de leur tronc, sous l’écorce, un cerne de crois- sance dont les principales caractéristiques physiques sont la largeur et la den- sité du bois. Les valeurs prises par la largeur du cerne et la densité du bois varient au © 1998 Edizioni all’Insegna del Giglio s.a.s., vietata la riproduzione e qualsiasi utilizzo a scopo commerciale

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DENDROCHRONOLOGIE ET DENDROMORPHOLOGIE

Introduction

Tissu composé d’éléments anatomiques divers (WILSON, WHITE 1986),présent dans les branches, le tronc et les racines des arbres, chargé d’assurerdes fonctions aussi diverses que la circulation ascendante de la sève brutedepuis les racines jusqu’aux feuilles, le soutien mécanique de l’organisme etle stockage de substances de réserve, le bois peut être riche d’enseignementssur les conditions dans lesquelles l’arbre dont il provient a poussé. Lorsque lebois est considéré en tant qu’objet résultant d’une activité humaine, l’exa-men de la forme générale et de l’anatomie des différents plans contribue àapporter une série d’informations sur la réalisation de la pièce qui enrichitl’étude seule de la plus-value apportée par le geste humain au matériau.

L’étude des caractéristiques morphologiques des pièces et leur étudeanatomique s’affirment aujourd’hui fondamentales pour les recherches sur lacharpenterie de marine développées dans le cadre des études d’archéologienavale et pour mieux comprendre les critères de sélection et les modes d’uti-lisation des bois en architecture navale, depuis le choix des essences en fonc-tion des pièces jusqu’à leur mise en place.

Avant de présenter des résultats relatifs à un programme ayant pourthème l’étude dendrochronologique et dendromorphologique des épavesantiques de Méditerranée, la suite du texte rappellera d’abord les notionsfondamentales et les contraintes propres à la dendrochronologie.

1. La datation par la dendrochronologie

Lorsque le climat impose à la végétation une période d’activité et unepériode de repos au cours d’une même année calendaire, les arbres élaborentchaque année, à la périphérie de leur tronc, sous l’écorce, un cerne de crois-sance dont les principales caractéristiques physiques sont la largeur et la den-sité du bois.

Les valeurs prises par la largeur du cerne et la densité du bois varient au

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cours de la vie de l’arbre, en fonction de facteurs internes (génotype, âge) etde facteurs externes (climat, sol, altitude, exposition, topographie, concur-rence, attaque de ravageurs, interventions humaines).

Les variations interannuelles de largeur, presque parallèlement repro-duites sur tous les sujets d’une même espèce qui se développent sous les mê-mes conditions climatiques sont liées aux variations interannuelles du climat(précipitations, températures, hygrométrie ...). Il en résulte que des séquen-ces de cernes particulièrement minces ou affectés de caractères anatomiquesoriginaux, communes à plusieurs arbres, constituent des repères chronologi-ques capables de synchroniser des séries de cernes, donc de dater de façonrelative différentes pièces de bois et de construire des chronologies moyen-nes de séries contemporaines dans lesquelles les particularités propres auxindividus sont atténuées (SCHWEINGRUBER 1988).

La synchronisation d’échantillons différents repose sur la recherche d’uneconcordance visuelle entre les courbes représentatives des différentes chro-nologies et sur l’utilisation de tests statistiques, paramétriques ou nonparamétriques, appliqués aux séries numériques.

L’identification des mêmes repères sur des échantillons dont la date demise en place des cernes est inconnue et sur des échantillons dont la date demise en place des cernes est connue aboutit à la datation absolue des pre-miers (BAILLIE 1995). L’année de mise en place des cernes n’est connue quepour les échantillons recueillis sur des arbres sur pied: le millésime de forma-tion du dernier cerne, situé immédiatement sous l’écorce, correspond à l’an-née du prélèvement si ce dernier est réalisé postérieurement au printemps(période au cours de laquelle se produit généralement la réactivation du tissucambial générateur du bois localisé sous l’écorce) ou bien à l’année anté-rieure au prélèvement si celui-ci est effectué en hiver.

Bien que datées de façon absolue, les chronologies représentatives d’ar-bres vivants n’offrent que des possibilités de datation réduites du fait de leurlongévité limitée. L’addition aux chronologies représentatives d’arbres vi-vants de séries issues d’échantillons de plus en plus anciens qui, du fait de laprésence de séquences de cernes caractéristiques communes avec les sériespostérieures, peuvent être partiellement synchronisées avec la séquence de lachronologie déjà datée permet de construire une chronologie de référence,aussi appelée étalon. L’opération nécessite des données provenant d’arbresvivants et de pièces de bois plus ou moins anciennes, manufacturées ou non:éléments de charpentes et de mobilier, épaves de bateaux, pieux, tableaux,statues, arbres subfossiles convenablement conservés dans des sédiments ré-ducteurs. La construction de la référence pour une essence et une régiondonnées constitue donc un préalable indispensable à toute tentative de data-tion par la dendrochronologie. La représentativité de la chronologie de réfé-rence est liée au nombre d’échantillons inclus dans celle-ci, certaines pério-

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des pouvant être plus ou moins bien représentées que d’autres en raison d’unfaible nombre de vestiges bien conservés.

Lorsque l’écorce est demeurée en place sur la pièce ou lorsque l’élimi-nation de l’écorce par le charpentier n’a entraîné aucune perte de cernesparmi ceux localisés à la périphérie du tronc, l’année d’abattage de l’arbrepeut être précisée. Dans les cas où l’équarrissage de la bille a éliminé descernes périphériques, parmi les derniers mis en place par le tissu générateurdu bois (cambium), un intervalle d’abattage peut toutefois être avancé (LAM-BERT et al. 1988).

La comparaison des séries de cernes provenant de l’échantillon avecplusieurs chronologies de référence établies pour des régions différentes peutaussi éventuellement mettre en évidence un gradient de corrélation et préci-ser la provenance géographique des arbres utilisés. Au fur et à mesure quedes échantillons sont datés, les chronologies correspondantes sont intégréesdans la chronologie de référence, l’allongent et améliorent sa représentati-vité. L’élaboration d’une référence valide sur une longue durée – par exem-ple, les vingt derniers siècles – peut prendre plusieurs années. Des séries decernes non datées peuvent cependant intéresser l’historien ou l’archéologuedans la mesure où elles peuvent apporter des renseignements sur le nombreet l’âge des arbres utilisés pour le site étudié, sur leur type de débit et éven-tuellement sur certains caractères de la formation forestière exploitée (modede traitement sylvicole, accidents divers ...). En l’absence de datation absolue(lorsqu’aucune corrélation significative n’est obtenue avec une chronologiede référence), une datation relative peut être avancée selon les années termi-nales des différentes pièces de bois présentes dans une même structure; àdéfaut de révéler le millésime d’abattage des arbres, cela peut mettre au jourdes remplois ou des restaurations.

Pour déterminer l’année d’abattage des arbres et tirer des séries de cer-nes les interprétations les plus fiables possibles, il est indispensable de s’ap-puyer sur un échantillonnage représentatif, répondant à de nombreuses exi-gences. Tandis que la datation du bois par le radiocarbone, basée sur un phé-nomène physique (radioactivité) dont la variation est formulable mathémati-quement et qui assure, par la méthode dite classique, un résultat sous formed’un intervalle chronologique – plus ou moins large – à partir d’un échan-tillon de 15 g de bois sec représentatif d’une position stratigraphique définie(LANGOUET, GIOT 1992), la dendrochronologie peut, elle, parvenir à fixer l’an-née voire la saison d’abattage de l’arbre, mais sous plusieurs conditions:– l’analyse doit porter sur, au moins, une quinzaine d’échantillons afin depouvoir surmonter plus facilement d’éventuelles anomalies anatomiques, lesdater de façon relative (interdatation) et construire une chronologie moyennedans laquelle les particularités propres à chaque arbre seront amoindries;– chaque pièce doit offrir au moins 60 cernes afin de fournir une information

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climatique interannuelle suffisamment riche et originale pour éviter toutereproductibilité dans le temps;– le plus grand soin doit être apporté vis-à-vis de la préservation de la partieextérieure des échantillons garante de la précision de la date d’abattage et,chez les essences dont l’aubier est distinct du duramen (ex: chêne), les piècespourvues d’aubier seront soigneusement recherchées;– une chronologie de référence représentative de la même essence et de lamême région climatique doit être disponible car, du fait des exigences écolo-giques propres à chaque espèce, les tentatives de comparaison entre deuxessences se soldent le plus souvent par des échecs. De fait, rares sont lesessences dont les séries de cernes offrent suffisamment de cernes caractéristi-ques communs au point de pouvoir permettre des corrélations interspécifiques:c’est le cas du chêne et de l’orme (LAMBERT, LAVIER 1991), du sapin et dutilleul (LAMBERT et LAVIER 1990), du pin d’Alep, du pin mésogéen et du pinpignon (GUIBAL 1992a).

Un autre facteur contre-indicatif à la pratique de la dendrochronologietient à l’originalité de certaines essences dans leurs réactions aux variationsdes facteurs environnementaux lorsqu’elles présentent une croissance en dia-mètre plus influencée par les conditions édaphiques que par les conditionsclimatiques (ex: peuplier, aulne, saule, noyer et fruitiers divers) ou lorsqu’el-les produisent fréquemment des cernes surnuméraires ou à la concentricitéaltérée (ex: cyprès, olivier). Toutes ces irrégularités entraînent les plus gran-des difficultés pour synchroniser plusieurs échantillons de bois et bâtir desréférences; au mieux peut-on synchroniser des pièces appartenant à un mêmeensemble architectural ou artistique, ce qui n’est déjà pas dépourvu d’intérêt(TRENARD 1992).

2. Dendrochronologie et dendromorphologie des épaves de naviresantiques

C’est dans les régions soumises au climat océanique, pour lesquelles denombreuses chronologies de référence sont disponibles pour le chêne – es-sence de tous temps très employée pour la construction et sur laquelle lespremiers résultats européens significatifs ont été obtenus (BAILLIE 1995;SCHWEINGRUBER 1988) – que les premières analyses dendrochronologiquesd’embarcations ont été réalisées. Et, du fait de la disponibilité d’un réseau dechronologies de référence bien étoffé pour les chênes pédonculé et rouvre enEurope du nord-ouest, les difficultés causées par l’ignorance du lieu de cons-truction des navires et a fortiori de l’origine géographique des arbres utiliséspour leur construction ont été bien surmontées.

Sur le littoral méditerranéen français, la richesse du patrimoine sous-

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marin constitue un terrain d’étude privilégié pour la dendrochronologie.Capable de répondre aux questions chronologiques posées par les épaves, ladendrochronologie peut aussi tirer parti des données offertes par les piècesde charpentes de nombreux gisements sous-marins dont beaucoup consti-tuent des ensembles chronologiquement homogènes pour contribuer à bâtirles références; en effet, la mise en place des références spécifiques des prin-cipales essences utilisées pour la construction dans cette région n’a commencéque près de trente années plus tard qu’en Europe médiotempérée (CORONA

1983; SERRE-BACHET 1985; GUIBAL 1996).Cependant, si l’abondance des épaves sur les côtes méditerranéennes

françaises présente un avantage réel, l’ignorance du lieu de construction desnavires et de l’origine géographique des arbres utilisés pour leur réalisationne va pas sans compliquer la démarche et freiner l’avancement des synchro-nisations. De fait, si les études de la cargaison et du matériel de bord permet-tent de préciser le lieu d’embarquement de la cargaison de l’ultime voyage etla date du naufrage, elles n’apportent aucun renseignement sur le lieu ni surla date de construction du navire (GIANFROTTA, POMEY 1980). Seul un réseaude chronologies de référence suffisamment dense sur le plan spatial peutdater, localiser la provenance des arbres utilisés et définir une région danslaquelle le bateau a pu être construit.

Précieuses pour l’établissement de chronologies de référence spécifi-ques, les épaves peuvent en retour beaucoup en attendre pour leur propreétude. Au-delà de l’intérêt chronologique de l’analyse des séries de cernes,l’étude anatomique et morphologique des pièces s’affirme aujourd’hui toutaussi fondamentale pour les recherches sur la charpenterie de marine déve-loppées dans le cadre des études d’archéologie navale et pour mieux com-prendre les critères de sélection et les modes d’utilisation des bois en archi-tecture navale, depuis le choix des essences en fonction des pièces jusqu’àleur mise en place, en passant par leur débitage, leur façonnage et leur assem-blage (RIVAL 1991).

Pour répondre à ces questions a été engagé depuis 1991 par le CentreCamille Jullian (CNRS - Université de Provence) et le Laboratoire de Chrono-Ecologie (CNRS - Université de Franche-Comté) et, depuis 1994, l’InstitutMéditerranéen d’Ecologie et de Paléoécologie (CNRS - Université d’Aix-Mar-seille III) avec le concours du Ministère de la Culture et du Département desRecherches Archéologiques Sous-Marines le programme de recherche Den-drochronologie et dendromorphologie des épaves antiques de Méditerranée.

Le programme vise à constituer un échantillonnage de référence pourl’analyse dendrochronologique des bois utilisés pour la construction en ré-gion méditerranéenne afin de répondre aux problèmes chronologiques aux-quels doivent faire face les recherches archéologiques et de développer, àpartir des mêmes échantillons, les analyses dendromorphologiques des bois

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utilisés dans la construction navale antique. Le programme repose sur desséries de prélèvements systématiques d’échantillons de bois sur les vestigesde coques d’épaves connues et sélectionnées selon des critères d’ordre géo-graphique (zone à forte densité d’épaves), archéologique (qualité et repré-sentativité des vestiges) et chronologique (possibilité de corrélation entre leschronologies stationnelles).

Six campagnes de prélèvements ont été réalisées jusqu’à présent sur 26épaves localisées, d’ouest vers l’est, dans le golfe de Fos, la rade de Marseille,les îles d’Hyères et les corniches des Maures Occidentales et de l’Estérel aucours des années 1991-92-93-94-95-96 (Fig. 1).

Compte tenu de la quasi-disparition de deux d’entre elles, Laurons 5 et6, alors que quatre autres, Grand Congloué IA et IB, Laurons 3 et 4, en voiede disparition, n’étaient plus représentées que par des fragments épars nepouvant être individualisés, seuls ont été pris en considération les résultatspropres aux épaves qui ont livré des vestiges homogènes et bien individuali-sés ayant permis d’effectuer des prélèvements représentatifs pour les analy-

Fig. 1 – Localisation géographique des épaves analysées.

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ses xylologique, dendrochronologique et dendromorphologique. Soit au to-tal dix-huit épaves, réparties du point de vue chronologique comme suit:

– fin 2ème s. - première moitié du 1er s. av. J.-C.: Baie de Briande, Chré-tienne C, Pointe du Brouil, Chrétienne A, Cavalière, Caveaux I, Jeaume-Garde B, Madrague de Giens, Pointe de Pomègues, Cap de l’Estérel, PlanierIII, Plane I, Roche-Fouras.– 2ème s. ap. J.-C.: Pointe de la Luque A, Saint-Gervais III.– fin 3ème s. - 4ème s. ap. J.-C.: Laurons 2, Pointe de la Luque B, Laurons 1.Du fait du très faible nombre de pièces provenant des épaves Chré-

tienne A et Chrétienne C (échantillonnées en septembre et octobre 1996)déjà analysées lors de la tenue du Cours d’Archéologie Sous-Marine de l’Uni-versité de Sienne en décembre 1996, les résultats exposés dans la suite dutexte ne portent que sur les seize autres épaves. Pour chaque épave, l’étudecomprend l’observation macroscopique des pièces (étude des formes),l’identification anatomique du bois (analyse xylologique) et l’analysedendrochronologique des sections transversales recueillies par sciage.

2.1 ANALYSE XYLOLOGIQUE: CHOIX ET UTILISATION DES ESSENCES

A l’issue d’observations effectuées au microscope optique sur des cou-pes minces obtenues manuellement selon les plans transversal, radial et tan-gentiel, vingt-deux essences, représentatives de trois milieux biogéographiquesdifférents ont été identifiées.

Six espèces (olivier, pin d’Alep, pin pignon, pin maritime, chêne àfeuillage caduc, chêne-vert) sont distribuées à basse altitude dans l’étage devégétation méditerranéen et sont donc présentes à proximité des côtes; dix(érable, aulne, hêtre, frêne, noyer, peuplier, saule, orme, tilleul, cornouiller)sont caractérisées par une distribution géographique très large, couvrant l’Eu-rope médio-tempérée et la région méditerranéenne où elles occupent desstations de plaine et notamment des stations de ripisylve qui peuvent êtreproches de la côte; six (pin type sylvestre, pin de Bosnie, pin noir, sapin,épicéa, mélèze) sont des espèces résineuses des étages de végétation monta-gnard et subalpin.

Le nombre d’essences varie considérablement d’une épave à l’autre ets’échelonne de deux à trois espèces pour trois d’entre elles (Pointe du Brouil,Pointe de la Luque A et B), de quatre à sept pour onze autres (Baie de Briande,Cavalière, Caveaux I, Jeaume-Garde B, Madrague de Giens, Pointe dePomègues, Cap de l’Estérel, Planier III, Plane I, Roche-Fouras, Laurons 1) etatteint dix aux Laurons 2 et douze à Saint-Gervais III. Compte tenu de lavariabilité des fréquences au sein d’un même navire, certaines essences pou-vant être dominantes alors que d’autres sont au contraire peu représentées

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Olea europaea OOOGrand-Congloué Pinus halepensis HHHBaie de Briande Pinus maritima MMPointe du Brouil Pinus pinea *****

Cavalière Quercus ilex Caveaux I Quercus sp.

Jeaume-Garde BMadrague de Giens JJJJ Acer campestre <>

Pointe de Pomègues <> Alnus glutinosa TTTCap de l'Esterel HHH Fagus silvatica FFF

Planier III Fraxinus sp.Plane I Juglans sp. JJJJ

Roche-Fouras Populus sp. IIIIILuque A Salix sp. SSS

Saint-Gervais III HHH HHH HHH Ulmus campestrisLaurons 2 HHHLuque B XXX XXX XXX XXX Abies alba

Laurons 1 Larix decidua XXXPicea abies PPP

Pinus leucodermisPinus nigra """"""

Pinus type silvestris

Tab. I – Essences identifiées selon la pièce (charpente axiale) et selon l’épave.

ou seulement représentées par des pièces de très faible dimension (piècesd’assemblage, par exemple), la distribution des essences sera décrite en fonc-tion des différentes pièces de structure des navires.

Charpente axiale: quille, fausse-quille, étrave, brion, étambot (Tab. I).Une utilisation préférentielle de trois types d’essences apparaît: des

feuillus nobles, tels le chêne et l’orme (Madrague de Giens, Pointe de Pomègues,Laurons 1 et 2); des résineux nobles de montagne tel le mélèze (Pointe de laLuque B) ou, à un degré de qualité mécanique moindre, le pin de Bosnie(Cavalière); des essences facilement disponibles tel le pin d’Alep (Cap de l’Es-térel, Saint-Gervais III, Laurons 2). A l’exception de ces dernières, pour les-quelles les exigences d’approvisionnement l’emportent, les essences noblessont préférées pour leur qualité mécanique et leur durabilité. Pour la réalisa-tion des massifs d’emplanture où, à l’exception du médiocre – pour une tellefonction – sapin de l’épave de Saint-Gervais III qui traduit probablement desdifficultés d’approvisionnement, des espèces nobles, feuillues (chêne) ou ré-sineuses (mélèze, pin de Bosnie) sont utilisées en raison de leur dureté et leurrésistance à la compression.

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Bordé (Tab. II)

Les essences résineuses sont ici largement employées sans doute en rai-son de leur élasticité élevée qui offre la souplesse nécessaire à la mise enforme des coques selon les procédés de construction bordé premier en usagedans l’Antiquité méditerranéenne (POMEY 1988). A côté d’essences nobles demontagne tel le mélèze ou le pin type sylvestre, tous deux dotés d’une bonnesouplesse et durabilité ainsi que d’une résistance aux chocs et à la compres-sion élevée, une large utilisation du pin d’Alep, essence facile d’approvision-nement, est faite.

Huit épaves (Baie de Briande, Caveaux I, Cap de l’Estérel, Planier III,Plane I, Roche-Fouras, Pointe de la Luque A et B) présentent une grande ho-mogénéité en ne faisant intervenir qu’une seule essence (sapin, mélèze, pintype sylvestre, pin de Bosnie, pin noir) pour la réalisation du bordé. Six autres(Pointe du Brouil, Cavalière, Jeaume-Garde B, Pointe de Pomègues, Saint-Gervais III, Laurons 1) offrent une bonne homogénéité en associant deuxessences (mélèze et pin d’Alep, pin type sylvestre et pin d’Alep ou pin deBosnie ou sapin). L’épave des Laurons 2 avec quatre essences différentes (sa-pin, pin d’Alep, pin pignon, mélèze) pour le bordé se distingue par son hété-

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Grand-Congloué ***** HHH

Baie de Briande

Pointe du Brouil

Cavalière Caveaux I

Jeaume-Garde B HHH HHH

Madrague de Giens

Pointe de Pomègues

Cap de l'Esterel

Planier III """""" """""" """""" """"""Plane I TTT TTT TTT TTT

Roche-FourasLuque A XXX XXX XXX XXX

Saint-Gervais III HHH HHH HHH

Laurons 2 ***** HHH XXX

Luque B XXX XXX XXX XXX

Laurons 1 XXX XXX HHH HHH

Tab. II – Essences identifiées selon la pièce (bordé) et selon l’épave.

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rogénéité. A côté de cet ensemble, la Madrague de Giens avec son bordéprincipal en orme, dans lequel le pin noir et le sapin n’apparaissent que lorsde réparations, témoigne d’un souci de qualité, attesté aussi par la présenced’un bordé de doublage. Comme celui de l’épave de la Pointe de Pomègues,celui-ci est réalisé en sapin, bois dont l’élasticité et la souplesse répondentbien à la fonction recherchée.

Enfin, il est à noter qu’à Cavalière, la Madrague de Giens et la Pointe dela Luque B, la même essence (pin de Bosnie, orme et mélèze) est employéepour la quille et les bordés de fond, vraisemblablement pour obtenir lameilleure homogénéité possible des assemblages de ces parties fondamenta-les de la carène.

Membrure (Tab. III)

A la différence de la charpente axiale et des bordés, la réalisation de lamembrure montre une diversité considérable. L’homogénéité n’est rencon-trée que sur quatre épaves avec l’emploi d’une seule essence, noble, littoraleou de montagne: Pointe de Pomègues (chêne), Pointe de la Luque A et B (mé-lèze), Cavalière (pin de Bosnie). Six autres possèdent encore une membrure

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Grand-Congloué HHH HHH *****

Baie de Briande <>

Pointe du Brouil

Cavalière Caveaux I

Jeaume-Garde B HHH HHH HHH HHH HHH HHH

Madrague de Giens JJJJ JJJJ

Pointe de Pomègues

Cap de l'Esterel JJJJ

Planier III JJJJ """""" JJJJ JJJJ JJJJ JJJJ """"""Plane I TTT TTT TTT TTT TTT IIIII TTT TTT TTT IIIII

Roche-Fouras SSS

Luque A XXX XXX XXX XXX

Saint-Gervais III HHH ***** <> FFF JJJJ MM

Laurons 2 ***** HHH FFF HHH HHH HHH

Luque B XXX XXX XXX XXX XXX XXX XXX

Laurons 1 HHH JJJJ HHH HHH JJJJ

Tab. III – Essences identifiées selon la pièce (membrure) et selon l’épave.

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relativement homogène dans laquelle interviennent deux ou trois essences:Baie de Briande (chêne, érable - présent seulement en un exemplaire), Ca-veaux I (chêne, orme), Jeaume-Garde B (orme, pin d’Alep), Plane I (aulne,peuplier), Cap de l’Estérel (chêne caducifolié, chêne-vert, noyer), Roche-Fouras(chêne, orme, saule – présent seulement en un exemplaire). Ce n’est plus lecas des cinq autres épaves dont quatre révèlent quatre à cinq espèces alorsque l’épave de Saint-Gervais III fait intervenir pas moins de dix essences. Apart le premier groupe particulièrement homogène, tous les autres font in-tervenir indifféremment des essences nobles aux caractéristiques mécaniquesappropriées, des essences facilement disponibles ou encore des essences n’ayantpas de propriété mécanique ou d’avantages particuliers, voire même des es-sences de qualité médiocre. C’est le cas notamment de l’aulne et du peuplier(Plane I), du saule (Roche-Fouras), bois médiocres et fragiles aux chocs quin’ont pour intérêt que leur légèreté, leur disponibilité et, pour l’aulne, unebonne tenue à l’humidité. Dans la plupart des cas, l’homogénéité ne semblepas être un critère dominant et les considérations de disponibilité semblentl’emporter. Sur l’épave de Saint-Gervais III, le choix semble même aléatoireet répondre à des disponibilité sur place variées n’excluant pas des remplois.

Charpente longitudinale (Tab. IV)

Pour les préceintes, des espèces nobles (épicéa, mélèze, orme) identi-ques ou voisines de celles utilisées pour le bordé sont utilisées. Les serres et

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Grand-ConglouéBaie de BriandePointe du Brouil

Cavalière Caveaux I

Jeaume-Garde BMadrague de Giens """"""

Pointe de PomèguesCap de l'Esterel

Planier III PPP PPPPlane I HHH HHH HHH HHH HHH

Roche-FourasLuque A XXX XXX XXX

Saint-Gervais IIILaurons 2 HHHLuque B XXX XXX

Laurons 1

Tab. IV – Essences identifiées selon la pièce (èièce longitudinale) et selon l’épave.

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les vaigres font appel aux mêmes essences que le bordé, à l’exception toute-fois de la Madrague de Giens où les vaigres sont taillées, en plus de l’orme,dans du chêne, du pin noir ou du pin type sylvestre.

Eléments d’assemblage: languettes et chevilles de bordé, gournables demembrure (Tab. V)

Très homogènes, ils sont débités dans des bois durs, de préférence dansdu chêne-vert. Cependant, on trouve parfois (Baie de Briande, Cavalière, PlanierIII, Plane I, Roche-Fouras) des résineux tel le sapin pour la confection desgournables. Mais il est à noter que sur les épaves de Baie de Briande, Planier IIIet Plane I, les gournables sont traversées par des clous et que sur les épaves deCavalière et Roche-Fouras, elles sont associées à des ligatures. Il est vraisembla-ble, dans ces deux cas, que l’usage d’un bois tendre pour les gournables est icilié à leur fonction secondaire dans ces assemblages mixtes. Enfin, la Madraguede Giens se distingue par une plus grande diversité d’essences utilisées car, àcôté du chêne-vert, figurent aussi des feuillus (chêne caducifolié, frêne, orme,noyer, cornouiller) et des résineux (pin noir) sans doute tirés – exception faitedu cornouiller – des chutes des débits des pièces de structure.

clés

clés

chev

illes

chev

illes

chev

illes

gour

nabl

es

gour

nabl

es

Grand-Congloué

Baie de Briande

Pointe du Brouil

Cavalière Caveaux I OOO

Jeaume-Garde B

Madrague de Giens

Pointe de Pomègues

Cap de l'Esterel

Planier III

Plane I

Roche-FourasLuque A

Saint-Gervais III OOO

Laurons 2 OOO

Luque B

Laurons 1

Tab. V – Essences identifiées selon la pièce (éléments d’assemblage) et selon l’épave.

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De cette série d’analyses, peuvent être tirées quelques remarques

Un contraste net se dégage entre l’homogénéité de la charpente axialeet des bordés et l’hétérogénéité de la membrure. Manifestement, un moindresoin préside à la constitution de la membrure dont le rôle apparaît secon-daire par rapport aux bordés qui sont l’objet d’un souci de qualité plus mar-qué. Ceci reflète bien le principe-même de la construction navale antiquefondé sur une conception structurale sur bordé dans laquelle ce dernier jouele rôle essentiel à la différence de la membrure qui n’intervient que commeélément de renfort secondaire (POMEY 1988).

Mais si un faible nombre d’espèces employées à la construction d’unmême navire apparaît comme un facteur d’homogénéité et souvent, lorsqu’ils’agit d’essences nobles, comme un critère de qualité, la diversité des essen-ces peut traduire aussi bien la complexité des structures, des problèmes d’ap-provisionnement ou d’utilisation rationnelle des bois disponibles que des ré-parations sans que l’homogénéité des parties essentielles de la structure soitcompromise. A cet égard, l’épave de la Madrague de Giens, dont la qualité etle soin de la construction sont évidents est exemplaire (TCHERNIA et al. 1978;RIVAL 1991); en revanche, il est certain que sur d’autres épaves comme lesLaurons 2 et Saint-Gervais III, cette diversité exprime une réelle hétérogé-néité de la structure, et sans doute un moindre souci de qualité, dû certaine-ment à des problèmes de disponibilité de bois d’œuvre.

Pour répondre aux impératifs mécaniques d’une pièce d’architecturedonnée, les charpentiers antiques sélectionnaient non seulement les essencesles mieux adaptées en fonction des caractères propres de leur plan ligneux(VENET 1986) mais utilisaient aussi pertinemment les caractères anatomiquesconférés par les conditions stationnelles (altitude, exposition, édaphisme,compétition) auxquelles les arbres avaient été exposés dans la mesure oùelles communiquent au matériau des propriétés physiques variables (GUIBAL

et POMEY, à paraître).De fait, chez les essences feuillues dites à zone initiale poreuse différen-

ciée (ex. chêne à feuillage caduc, orme, frêne) dont le cerne est principale-ment composé d’une zone initiale de faible densité occupée par de gros vais-seaux chargés d’assurer la circulation de la sève brute, mis en place au débutde la saison de croissance, localisés dans la partie du cerne la plus proche dela moelle, et d’une zone finale de forte densité surtout constituée de fibreschargées d’assurer le soutien, mises en place plus tardivement et localiséesdans la partie proche de l’écorce, l’épaisseur moyenne des cernes et la régu-larité de celle-ci entraînent des qualités technologiques très différentes.

La finesse des cernes constitue un facteur de qualité qui se traduit parun débitage plus facile et des propriétés mécaniques élevées (meilleure apti-tude au tranchage, faible retrait). La régularité dans la largeur des cernes

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confère au bois une forte homogénéité, une facilité d’usinage et unedéformabilité moindre au séchage. La finesse des cernes est aussi un facteurde qualité pour les résineux des étages montagnard et subalpin (résistancemécanique élevée, facilité d’usinage) bien que des nuances sensibles puissentsurvenir selon les essences et les provenances; elle induit une texture (rap-port de la zone de bois final du cerne à la largeur totale du cerne) faible chezles essences feuillues à zone initiale poreuse différenciée et forte chez beau-coup de résineux.

En charpenterie navale antique, l’emploi de jeunes tiges de chêne àfeuillage caduc ou d’orme aux cernes annuels témoins d’une croissance ra-pide, épais d’au moins 5/10 mm, donc pourvus d’une zone de bois final richeen fibres particulièrement large (texture forte), permet d’assurer aux piècesde renfort transversal l’élasticité demandée par ce type de pièce. Un tel typeanatomique a été rencontré sur les épaves Jeaume-Garde B, Cap de l’Estérelet Laurons 1.

Inversement, la densité élevée procurée par les billes de chêne caducifoliéde forte texture a été appréciée par les charpentiers antiques pour obtenirdes pièces dures, capables de bien résister à la compression. Sur le navire dela Madrague de Giens, la largeur importante des cernes annuels, aux rapportsbois final/bois initial et fibres/vaisseaux élevés, sur le massif d’emplanture dumât résulte d’un choix délibéré afin de disposer d’une pièce de masse élevéeen mesure de bien résister à la force verticale exercée par le mât. Cette ré-flexion n’a toutefois pas présidé au choix fait par les constructeurs du navirede Saint-Gervais III où l’essence (sapin) et la largeur importante des accrois-sements annuels aux rapports bois final/bois initial et fibres/vaisseaux faibleschez les bois d’essences résineuses a abouti à une pièce peu adaptée à safonction.

Pour les essences résineuses, la finesse des cernes s’accompagne d’unetexture forte; consécutivement, il en résulte un retrait moindre et une meilleureaptitude au tranchage. Jeaume-Garde B, Madrague de Giens, Pointe dePomègues, Cap de l’Estérel, Laurons 2, Laurons 1 offrent des séries de viruresde forte texture; en revanche, Plane I et Saint-Gervais III n’ont révélé quedes virures issues de sujets jeunes ayant poussé très rapidement, à la texturefaible.

A côté des propriétés conférées par les caractères anatomiques, la di-versité des formes des arbres a conduit les charpentiers à tirer aussi parti descaractères morphologiques.

2.2 OBSERVATIONS MACROSCOPIQUES DU BOIS: MORPHOLOGIE ET DÉBITAGE DES PIÈCES

L’emploi de bois préformés pour parer au mieux à la forme de la piècearchitecturale est fréquent pour les pièces de membrure. C’est notamment le

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cas des varangues pour lesquelles les embranchements principaux des troncs,comme en témoignent la forme de la pièce et la dissymétrie des cernes dansla partie médiane des pièces, semblent avoir eu la préférence des charpen-tiers: Caveaux I, Jeaume-Garde B, Madrague de Giens, Pointe de Pomègues,Cap de l’Estérel, Planier III, Plane I, Saint-Gervais III, Laurons 2, Pointe de laLuque B.

Des bois tors, issus de sujets de médiocre venue, ont été utilisés pour laconfection de plusieurs pièces de membrure sur les épaves Plane I, Saint-Gervais III, Laurons 2, Laurons 1. Visiblement, ceci reflète le soin moindreapporté à la réalisation de ce type d’éléments par rapport à celui avec lequelles virures de bordé sont délignées et mises en place et renforce l’idée selonlaquelle les pièces de renfort transversal ne jouent pas, dans l’architecturenavale antique, un rôle structural important (POMEY 1988).

La présence fréquente de l’écorce et de l’aubier sur les éléments demembrure va dans le même sens. Très souvent, les pièces résultent de billessoit débitées à cœur, soit fendues ou refendues à la scie, qui ont ensuite subiun parage de la face inférieure soit à l’herminette, soit à la hache à équarrir etun équarrissage des faces latérales à la scie. Il n’est pas rare cependant derelever l’absence de cette dernière opération: soit la seule face supérieure(Caveaux I, Jeaume-Garde B, Madrague de Giens, Plane I, Luque A, Luque B),soit la face supérieure et l’une des faces latérales ne présentent alors aucunetrace d’équarrissage (Saint-Gervais III, Laurons 2, Laurons 1), révélant ainsiune utilisation optimisée de toute la section de la bille au prix d’unedégradabilité accrue de la pièce. De fait, l’écorce et l’aubier, bois périphéri-que fonctionnel distinct du duramen par la couleur et/ou la présence de thyllesqui obstruent la lumière des vaisseaux chez le mélèze, le chêne, l’orme ou lenoyer, sont, en raison de leur richesse en matières nutritives, facilement vul-nérables aux micro-organismes, vers et insectes lignivores; aussi est-il fré-quent en charpenterie d’éliminer l’écorce et l’aubier de la bille.

La présence de l’écorce a été relevée sur un demi-couple en aulne dePlane I, une membrure en pin d’Alep de Jeaume-Garde B, des demi-couplesen pin d’Alep aux Laurons 2 et des membrures en pin d’Alep aux Laurons 1.Sur ces deux dernières embarcations, la présence d’écorce sur des pièces demembrure débitées dans du pin d’Alep et l’absence d’écorce sur toutes lesautres membrures débitées dans des essences feuillues amènent à ne pas ex-clure un remploi massif de ces dernières et un regarni de la membrure à basede pin d’Alep, essence largement distribuée sur le littoral méditerranéen oc-cidental et donc disponible à proximité des chantiers de construction. Laprésence d’écorce fut aussi notée sur plusieurs membrures de la Madrague deGiens lors de la campagne initiale de fouille; ce détail qui, à première vue,irait à l’encontre du soin avec lequel les constructeurs de ce navire ont mas-sivement utilisé des essences nobles aux bonnes caractéristiques mécaniques

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(i.e. chêne et orme) témoignerait plutôt du rôle structural secondaire jouépar ce type de pièce dans ce mode de construction. La présence de l’écorce,témoignage de l’emploi de bois vert, donc d’une utilisation rapide du maté-riau, souligne l’optimisation de l’utilisation du matériau-bois pratiquée parles charpentiers antiques.

L’emploi de bois vert est aussi probablement liée à une plus grandefacilité de débitage et de travail ou à des délais de construction brefs, voireles deux; de fait, le débitage rapide des grumes après l’abattage des arbres apour avantage de moins émousser le tranchant des outils, d’éviter la forma-tion de fentes de dessication à la suite de retraits du bois et de faciliter lapratique du ployage lors de l’assemblage des pièces de bordé (RIVAL 1991).L’examen visuel des virures de bordé ne laisse apparaître aucune trace d’écorce,ce qui n’est pas surprenant, ni d’aubier, vraisemblablement du fait de l’im-possibilité de distinguer celui-ci chez la plupart des essences résineuses iden-tifiées parmi les pièces de bordé.

Ce souci manifesté dans la gestion du matériau apparaît aussi lors del’analyse macroscopique des débitages des séries de virures d’un même bordéet au cours de leur analyse dendrochronologique. L’observation macroscopi-que des types de débits de la série de virures recueillies sur le bordé de Baiede Briande laisse apparaître qu’une bille de sapin semble avoir été entière-ment sciée sur dosse pour la confection des virures au vu de la présence detous les débits issus d’une telle découpe, à l’exception des flaches, soit, de-puis le centre anatomique de la bille vers l’écorce: quartier, faux-quartier,fausse dosse, contre-dosse, dosse (Fig. 2).

Lorsque le nombre de cernes présents sur les pièces permet leur analysedendrochronologique, celle-ci a souvent mis en évidence qu’elles résultentdu débitage optimisé d’une même bille. Ceci est illustré par la Fig. 3 quiatteste que les varangues 617 et 619 du navire de la Madrague de Giens, dontles courbes de la variation interannuelle de la largeur des cernes sont presqueparallèles, résultent du débitage de la même bille de chêne.

Deux raisons peuvent expliquer cette utilisation optimisée du maté-riau-bois:1) le plus souvent, des raisons économiques liées à des problèmes de disponi-bilité du matériau, de délai d’acheminement et, vraisemblablement, de coûtde celui-ci;2) dans certains cas, des raisons mécaniques; de fait pour les virures, lesdifférences de retrait et de variation dimensionnelle d’un type de débit àl’autre peuvent avoir une incidence sur la bonne tenue des liaisons. Ainsinote-t-on un souci permanent d’alterner la disposition des virures sur pare-ment et sur contre-parement pour éviter d’éventuelles déformations par tuilageet assurer une bonne étanchéité des liaisons.

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Cependant, si un usage optimisé du bois semble être fait, l’emploi dejeunes billes d’essences résineuses locales, comme par exemple à Saint-GervaisIII (pin d’Alep), ou importées des régions de montagne comme c’est le cas àla Pointe de la Luque B (mélèze), témoignerait d’une ressource en bois d’oeuvrelimitée, n’offrant pas de latitude dans le choix des abattages du fait d’unereprésentation inégale des différentes classes d’âge et conduisant à terme àune lourde hypothèque du capital forestier.

2.3 ANALYSE DENDROCHRONOLOGIQUE

Après avoir sélectionné sur chaque pièce un (ex: virure) à trois (ex:pièce longitudinale axiale) rayon(s) dépourvu(s) de toute déformation sus-ceptible d’altérer la concentricité des cernes, les rayons sont rafraîchis à lalame de rasoir pour rendre les cernes plus lisibles et les séries d’épaisseurs decernes sont mesurées au 1/100 mm. Les séries d’une même pièce sont compa-rées deux à deux sur la base de leur corrélation mathématique et du degré deconcordance visuelle des courbes de la variation de l’épaisseur des cernes enfonction du temps. Une fois les séries synchronisées, la moyenne de la pièceest calculée et les différentes moyennes d’une même essence sont comparéespour bâtir une moyenne propre à l’épave. Cette moyenne stationnelle estensuite confrontée à d’autres, représentatives de la même essence, stationnellesou de référence. Il est important de ne tenter des synchronisations qu’entre

Fig. 2 – Type de débitage des virures de épave Baie de Briande.

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des séries d’épaisseurs de cernes de la même essence en raison des exigencesécologiques propres à chaque espèce, manifestées par le fait que deux essen-ces ne traduisent pas nécessairement de la même façon un même événementclimatique (GUIBAL 1996).

La Fig. 4 traduit l’état actuel des chronologies stationnelles construites

Fig. 3 – Madrague de Giens. Synchronisation des courbes de la variation de l’épaisseur descernes de trois varangues de chêne.

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dans le cadre du programme de recherche décrit plus haut. Sur l’axe desabscisses sont reportés des rectangles dont la longueur correspond à la chro-nologie couverte par la chronologie moyenne pour une essence et pour uneépave donnée; la hauteur des rectangles est proportionnelle au nombre deséries individuelles (échantillons) prises en compte dans le calcul de lamoyenne. Etant donné qu’aucune des chronologies n’a pour l’instant étécorrélée à un référentiel, toutes demeurent flottantes, c’est-à-dire qu’elles nesont pas datées de façon absolue, à l’année près. Seule a été datée, sur desréférentiels du nord-est de la France ainsi que sur des référentiels suisse etallemand (GUIBAL 1992b), la chronologie de l’épave Arles 2 qui n’a pas étéacquise dans le cadre du programme Dendrochronologie et dendromorphologiedes épaves antiques de Méditerranée. Les chronologies sont positionnées surl’axe chronologique en fonction des informations chronologiques procuréespar la cargaison, le matériel de bord et les monnaies.

Seules sont figurées les chronologies représentatives des essences ex-ploitables par la dendrochronologie. Les séries issues de pièces débitées dans

Fig. 4 – Bloc-diagramme des chronologies représentatives d’épaves antiques sur la côteméditerranéenne française (Programme Dendrochronologie et Dendromorphologie des épavesantiques de Méditerranée).

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du peuplier, du saule, du noyer ou de l’aulne n’ont ici pas retenu notre atten-tion car les sujets dépendent davantage des conditions stationnelles(édaphisme) que des conditions climatiques qui prévalent à l’échelle régio-nale (TRENARD 1992). L’examen de la figure 4 révèle des chronologies repré-sentatives de huit essences différentes ; seules figurent des essences résineu-ses montagnardes et alpines (mélèze, épicéa, pin noir, pin type sylvestre, pinde Bosnie, sapin) et des essences nobles (chêne, orme).

Les chronologies sont distribuées entre la fin du IVème s. av. J.-C. et la1ère moitié du IVème s. ap. J.-C. Lorsque deux chronologies représentativesde la même essence semblaient contemporaines, les synchronismes ont ététraqués avec la plus grande attention. Mais, pour l’instant, seules les chrono-logies de pin type sylvestre des épaves Cap de l’Estérel et Jeaume-Garde Bsynchronisent (Guibal, à paraître); aucune synchronisation n’a été, en re-vanche, dégagée entre ces deux moyennes et celle de pin de type sylvestre dePointe de Pomègues. La synchronisation des chronologies d’orme ou de chênecaducifolié de Pointe de Pomègues et Madrague de Giens ou les chronologiesde sapin de Plane I, Pointe de Pomègues et Madrague de Giens n’a pour l’ins-tant pas mieux réussi.

Trois raisons peuvent expliquer cette absence de corrélation:a) la longueur du chevauchement chronologique entre les moyennes compa-rées est insuffisante;b) du fait d’un nombre trop faible d’échantillons pris en compte dans lesprocessus de sommation, certaines moyennes ne sont pas représentatives d’unenvironnement climatique régional;c) bien que contemporaines, les chronologies proviennent de sujets qui ontpoussé soit dans des conditions stationnelles, soit sous des conditions clima-tiques trop différentes pour offrir des séquences de cernes caractéristiquescommunes.

Conclusion

La fréquence faible de bois d’oeuvre locaux de qualité parmi tous leséléments identifiés et la mise en évidence de l’importation de bois provenantdes régions de montagnes riveraines témoignent de la rareté locale de boisd’oeuvre à laquelle furent confrontés les charpentiers de marine au cours dela période antique. Visiblement conscients du caractère très limité des res-sources locales en bois utilisable pour la construction, ils semblent avoir ac-cordé une large part aux disponibilités occasionnelles d’approvisionnement,aux remplois, à l’utilisation de bois tors et, éventuellement de bois préfor-més, lorsque la forme des pièces le demandait. Quelle que soit l’essence,l’utilisation des billes semble avoir été optimisée afin de tirer le meilleur parti

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de toute la ressource ligneuse, même si des lacunes dans la gestion des forma-tions forestières semble transparaître au vu de l’utilisation de billes corres-pondant à des sujets âgés au plus d’une quarantaine d’années qui peuventaussi traduire des impératifs économiques liés à des délais de réalisation etlivraison très rapides. Au stade actuel du programme, il n’est toutefois paspossible de dégager des différences notables dans la gestion du matériau-boisentre la période de la fin de la République (fin 2ème et 1er s. av. J.-C.) et celledu Bas-Empire (4ème s.).

La longueur, la représentativité statistique et les différentes conditionsclimatiques auxquelles les arbres ont été exposés sont autant de facteurs im-pliqués dans les problèmes rencontrés lors de la synchronisation des chrono-logies stationnelles. Le soin apporté lors de l’échantillonnage (recherche despièces les plus riches en cernes ; prélèvement du plus grand nombre possibled’échantillons) ne peuvent qu’améliorer la qualité des chronologies obtenuesau sein du programme de recherche Dendrochronologie et dendromorphologiedes épaves antiques de Méditerranée. En revanche, les problèmes liés à l’hété-rogénéité des bioclimats susceptibles d’être transcrits dans les différentes chro-nologies peuvent être difficilement résolus dans le cadre de ce seul programmeet demandent la coordination des efforts engagés par les dendrochronologueset les archéologues sous-marins à l’échelle de la Méditerranée occidentale.

F. GUIBAL (*), P. POMEY (**)

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(*) I.M.E.P. - E.R.S. 6100 C.N.R.S. - Faculté des Sciences et Techniques de Saint-Jérôme.

(**) Centre Camille Jullian - U.M.R. 9968 C.N.R.S. - Université de Provence.

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