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Tendances Le leadership au féminin a la cote Leadership Comment diriger l’entreprise de demain Ressources humaines Quand augmenter ne rime pas avec motiver Success story Van Hoecke : succès en équipe dans la quincaillerie pour meubles Cosucra Jacques Crahay, CEO Du sucre aux fibres, révolution managériale en prime ING Entreprise # 223 juillet septembre 2018

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TendancesLe leadership au féminin a la cote

LeadershipComment diriger l’entreprise de demain

Ressources humainesQuand augmenter ne rime pas avec motiver

Success storyVan Hoecke : succès en équipe dans la quincaillerie pour meubles

Cosucra

Jacques Crahay, CEO

Du sucre aux fibres, révolution managériale en prime

INGEntreprise# 223 juillet septembre 2018

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Sommaire

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News04 En bref

L’actualité du trimestreDes nouvelles intéressantes ou insolites.

Success story06 Cosucra

Du sucre aux fibres, une révolution managériale réussieEn 15 ans, ce producteur de sucre a su se réinventer, se créer une place de leader sur le marché de la nutrition et transformer son style de management.

10 Van HoeckeLe spécialiste de la quincaillerie fonctionnelle pour meubles ouvre de nouvelles portesRetour sur le parcours remarquable accompli ces 20 dernières années par l’entreprise de Saint-Nicolas.

Focus09 ING Employee benefits

Vos collaborateurs méritent la crème de leurs bonus !ING aide les entreprises à développer une politique de bonus salarial avantageuse, aussi bien pour l’employeur que pour ses collaborateurs.

Trends watch13 Leadership

Les femmes au sommet : réalité ou illusion ? Le leadership au féminin a la cote. Mais derrière l’effet de mode, les choses changent-elles réellement ? Le plafond de verre va-t-il disparaître ?

Tips & Tricks18 Motivation

Donner du sens : indispensable au travail ?Les incitants financiers ne sont plus la source unique de motivation des travailleurs. Désormais, les employeurs doivent aussi créer du sens, des valeurs et du bien-être.

People & Management15 Management 3.0

De l’autorité imposée au leadership naturel Les nouvelles structures d’entreprise impliquent aussi la nécessité de changer en profondeur le style de leadership à tous les niveaux de la hiérarchie.

21 DigitalisationRecherche leaders inspirants pour équipes virtuellesGérer des équipes dans un environnement digital relève du défi permanent. Pour le relever, privilégier l’aspect humain est primordial.

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Édito

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Faire face aux défis de demain

Chers entrepreneurs,

Le calme – parfois tout relatif – des vacances annuelles constitue un moment propice pour se retourner sur cette première moitié de l’année 2018 et examiner les perspectives pour les mois à venir.

Jusqu’ici, la conjoncture économique s’est avérée plutôt favorable, et l’économie a pu poursuivre le rattrapage amorcé l’an dernier. Toutefois, de nouvelles incertitudes sont venues peser sur les économies européennes. Parmi celles-ci, les modalités du Brexit. Moins d’un an avant que la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne ne se concrétise, nous n’avons encore que peu de détails sur les conditions de cette sortie, par exemple sur la manière dont se poursuivront les relations commerciales entre les entreprises britanniques et leurs homologues belges et européennes. Parallèlement, les tensions croissantes entre États-Unis, Union européenne et Chine font craindre l’émergence d’une guerre des tarifs dont les entreprises seraient les premières victimes.

Tout n’est cependant pas négatif, fort heureusement. Ainsi, les taux d’intérêt sont toujours historiquement bas, et aucun changement notable ne devrait intervenir avant la mi-2019. Nos entreprises peuvent donc poursuivre leurs investissements, et nous serons naturellement à leurs côtés pour les aider à trouver les solutions de financement les mieux adaptées à leurs projets. Pour concrétiser ces projets, les entreprises doivent naturellement investir dans l’engagement de nouveaux collaborateurs. Dans un contexte de chômage historiquement bas et de guerre des talents, la politique de ressources humaines devient un élément décisif : bien conçue et mise en œuvre, elle permettra d’attirer, d’engager et de conserver des collaborateurs compétents et motivés.

Pour rester attractives, les entreprises doivent souvent d’ailleurs procéder à une remise à plat de leurs méthodes et de la manière dont elles sont dirigées, ainsi que le démontrent les deux entrepreneurs qui témoignent dans ce numéro, de même que les spécialistes que nous avons interrogés. Une piste qui passe parfois par un leadership conjugué au féminin.

À l’heure d’écrire ces lignes, la Coupe du Monde de football bat toujours son plein, et je ne peux m’empêcher de tirer un parallèle entre le monde du football et celui de l’entreprise. Dans les deux cas, il s’agit de faire face, ensemble, à un environnement changeant, de mettre au point de nouvelles stratégies pour surprendre la compétition et parvenir à l’étape suivante. Gageons que nos Diables rouges, comme les entrepreneurs belges, sauront une fois de plus démontrer qu’un petit pays peut aussi être une grande nation.

Comité de rédactionC. Bernadou, M. Callier, V. Vanderstraeten, C. Vinkenborg, L. Violon, F. Wauters

CoordinationF. Wauters

Rédacteur en chef C. Bernadou, C. Vinkenborg

RédactionC. De Kock, N. Garcia-Sequeira, S. Gasten, M. Klepp, P. Segaert, C. Vinkenborg, F. Wauters

ÉditionC. Vinkenborg

PhotosL. Bazzoni, Thinkstock, A. Vervueren/Utopiix

Maquette et mise en pageM. Bourgois, C. Harmignies

RéalisationElixis sprl Rue Rodenbach 70, B-1190 Bruxelles E-mail : [email protected]

©ING EntrepriseReproduction autorisée à condition de mentionner la source. Tous droits réservés pour la reproduction des photos, de la mise en page et des illustrations, qui sont la propriété d’Elixis. Van ING Entreprise bestaat ook een Nederlandstalige versie. ISSN n°1379-714K

Contact ING C. Vinkenborg Cours Saint-Michel 60 B-1040 Bruxelles E-mail : christiaan.vinkenborg @ing.com Internet : ing.be

Éditeur responsableMarie-Noëlle De Greef, Cours Saint-Michel 60, B-1040 Bruxelles

ING Belgique SASiège social : Avenue Marnix 24, B-1000 BruxellesRPM BruxellesTVA : BE 0403.200.393Tél. : 02 547 21 11 E-mail : [email protected] Internet : ing.beBIC : BBRUBEBB IBAN : BE45 3109 1560 2789Courtier d’assurances inscrit à la FSMA sous le n° 12381A

* Les produits et services ING mentionnés dans ce magazine sont offerts sous réserve d’accepta-tion par ING Belgique (ou, le cas échéant, l’assureur concerné) et d’accord mutuel. Les conditions et modalités des produits et services ING (conditions générales ou règlements, documents d’infor-mation clés pour l’investisseur ou pour l’épargnant, fiches-produits, tarifs et toutes autres informations complémentaires) sont disponibles auprès de votre agence ING ou sur ing.be.

Jean-Pierre VerbekenGeneral manager midcorp, SME & institutionalsING Belgique

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INGEntreprise04

News

C’est la croissance du PIB mondial attendue par les experts de l’OCDE pour 2018. Ce chiffre est particuliè-rement symbolique, car il représente un retour au niveau de la moyenne histo-rique des dernières décennies. Pour les écono-mistes de l’OCDE, cette nouvelle est d’autant meilleure que le rebond de la croissance est dû à un redémarrage des investissements et des échanges mondiaux. Elle s’accompagne aussi d’une baisse du chômage dans la zone OCDE, qui devrait bientôt atteindre son niveau le plus bas depuis 1980. Un bémol toutefois : ce redémarrage provient en grande partie de la politique d’assou-plissement budgétaire menée par les dif-férents États pour soutenir la croissance. Un élément que les experts de l’OCDE estiment néanmoins positif, car il indique un relâchement de la poli-tique budgétaire trop stricte menée depuis la crise financière de 2008.

4 %Nouvelle économie

Les drones, un secteur d’avenir en Belgique ? D’après une étude récemment publiée par Agoria, la fédération des entreprises technologiques, en collaboration avec le consultant PwC, le secteur des drones pourrait créer plus de 1.000 emplois supplémentaires en Belgique, et générer un chiffre d’affaires de 400 millions d’euros d’ici 2020.

Une directive européenne pour 2019À l’origine de cette initiative, l’entrée en vigueur, prévue pour 2019, d’une directive européenne sur les drones. Pour PwC et Agoria, une trans-position rapide des nouvelles règles dans la législation belge permettra de clarifier les règles pour le secteur et de favoriser l’innovation. Les deux organi-sations insistent d’ailleurs sur l’importance de ne pas rajouter de spécificités belges à la législation afin de créer un « cadre opérationnel souple pour les drones commerciaux ».

Plus que de simples photosLe rapport insiste sur les multiples opportunités commerciales que recèle ce marché, notamment pour les entreprises qui combineront la technologie des drones avec d’autres technologies émergentes, comme l’intelligence artificielle. Des drones pourraient

ainsi permettre de réaliser plus rapidement des inspections de sécurité dans les environnements industriels. Le rapport pointe aussi l’utilisation des drones en agriculture, et note que l’industrie des drones en est encore à ses débuts et recèle énormément de potentiel. D’où

l’importance, concluent les deux acteurs, d’octroyer rapidement aux entreprises belges un cadre législatif favorable afin qu’elles puissent faire partie du peloton de tête dans le développement de nouvelles applications commerciales.

Info : https://goo.gl/9bSQsw (lien raccourci)

Les entreprises belges en forme Au premier trimestre 2018, les entreprises belges – à l’exception des secteurs agricole et financier – ont enregistré un chiffre d’affaires de 322 milliards d’euros, soit 2 % de plus qu’au premier trimestre 2017. Les secteurs les plus en forme sont l’Horeca (+7,2 %), la construction (+3,8 %) et les services (+3,5 %).

Crédits en hausse Les banques belges ont alloué 8,4 % de crédits en plus aux entreprises non financières par rapport à avril 2017. L’observatoire des crédits aux entreprise attribue notamment cette hausse au financement des versements anti-cipés d’impôts (VAI), suite à l’augmentation des pénalités pour les entreprises. Toutefois, l’observatoire relève que la hausse des crédits est la plus forte pour les échéances comprises

entre 1 et 5 ans, avec une hausse de 11,9 % en avril 2018 par rapport à avril 2017, contre 7,9 % en mars 2018 comparé à mars 2017.

Le principe de Peter, une réalité ?Le fameux principe de Peter, qui veut que « toute personne est promue jusqu’à atteindre son niveau d’incompétence » serait une réalité dans le monde de l’entreprise. C’est en tout cas ce qu’affirme une étude publiée en mars 2018 dans le Harvard Business Review. L’étude portait sur les promotions de vendeurs à des fonctions managériales dans 214 entreprises. En général, les entreprises promeuvent les meilleurs ven-deurs, mais cette promotion résulte dans une baisse de 7,5 % du niveau des ventes de leurs nouveaux subordonnés. La solution, d’après les auteurs ? Porter plus d’attention aux compé-tences managériales qu’aux compétences techniques dans le processus de décision.

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Buzz

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Moderniser le management

Publié en 2014, " Reinventing Organizations " est devenu en quelques années un véritable phénomène. Livre de chevet de tous les dirigeants qui cherchent à adapter leur entreprise aux défis de demain, il offre une vision radicalement différente du leadership et des tech-niques de gestion.Info : Reinventing Organizations: A Guide to Creating Organizations Inspired by the Next Stage in Human Consciousness, par Frédéric Laloux. Frédéric Laloux, février 2014 (ISBN : 978-2960133554)

Pas de managers, juste des rôles

Complément naturel du livre cité ci-dessus, Holacracy décrit une méthode de mana-gement basée… sur l’absence de mana-gers. Une manière de déléguer plus de responsabili-tés et de booster la motivation des travailleurs, mais surtout un mode d’organisation en phase avec un monde éco-nomique en bouleversement perpétuel. Info : Holacracy, par Brian J. Robertson. Holt Adult, juin 2015 (ISBN : 978-1627794879)

L’organisation libéréeIllustré par des exemples célèbres d’entreprises " différentes " qui ont connu le succès, ce livre inspirant propose une nouvelle manière de réinsuffler de la vie dans le quotidien de l’entreprise et de la transformer pour faire face aux défis de demain. Info : Freedom, Inc. : How Corporate Liberation Unleashes Employee Potential and Business Performance, par Brian McCarney et Isaac Getz. Somme Valley House, 2e édition, janvier 2016 (ISBN : 978-0998074306)

Éthique et business

Fraude et corruption dans les entreprises ? Malgré le durcissement de la législation dans de nombreux pays depuis 2012, le niveau de fraude et de corruption reste constant. C’est en tout cas ce qui ressort de la dernière édition du Global Fraud Survey du consultant EY. Au niveau mondial, 38 % des managers interrogés estiment que les pratiques de corruption existent encore à grande échelle dans la vie des entreprises. Dans les pays en développement, ce pourcentage atteint 52 %, tandis qu’il est de 21 % en Europe de l’Ouest et de 20 % en Belgique.

La Belgique, mauvaise élève ?Si ce chiffre peut sembler encourageant, le rapport mentionne par contre que 20 % des managers interrogés en Belgique ont connu un cas significatif de fraude dans leur entreprise au cours des deux dernières années, alors que la moyenne mondiale est de 11 %. Plus pré-occupant encore, 12 % des managers belges trouvent que proposer du cash pour faciliter les négociations n’est pas contraire à l’éthique. C’est le double de la moyenne d’Europe de l’Ouest.

Des millennials " corrompus " ?Autre conclusion de l’étude : les moins de 35 ans semblent plus tolérants vis-à-vis du paiement de pots-de-vin. Ils sont 20 % à trouver normal d’y avoir recours pour conserver ou obtenir un marché, alors que la moyenne tous âges confondus est de 13 %.

Info : https://goo.gl/hbXGxW (lien raccourci)

INGsiderL’application itsme fête son premier anniversaire Lancée par ING en collaboration avec plusieurs banques belges, l’application itsme vient de fêter son premier anniversaire. Au cours de cette première année d’existence, la victoire la plus importante est certainement la reconnaissance de l’appli par le gouvernement belge, qui permet désormais aux citoyens d’y recourir pour s’identifier sur ses différents portails. Avec 350.000 utilisateurs et plus de 1,2 million de connexions par mois, itsme se prépare à une croissance encore plus importante en 2019. La quasi-totalité du secteur bancaire devrait y adhérer d’ici le printemps 2019, et plusieurs entreprises issues d’autres secteurs, comme les télécoms et les assurances, s’apprêtent à les rejoindre.

Info : www.itsme.be

L’ING Art Center bientôt converti au Flower PowerÀ l’automne prochain, l’ING Art Center accueillera l’exposition " Revolutions - Records & Rebels 1966-1970 ". Cette plongée dans une période de révolutions culturelles, sociales, artistiques et technologiques, a été créée par le Victoria and Albert Museum de Londres, et adaptée et complétée pour y présenter quelques sujets spécifiquement belges.

Info : https://goo.gl/YBjb7J (lien raccourci)

Droit des sociétés

L’adieu à la sprl La réforme du Code des sociétés, portée par le ministre de la Justice Koen Geens, poursuit son parcours législatif : l’avant-projet du ministre a été approuvé et pourra être déposé à la Chambre des représentants. L’idée maîtresse de cette réforme est de simplifier le système : - Le nouveau système ne fera plus de

différences entre actes civils et actes commerciaux, et entre sociétés civiles et sociétés commerciales ;

- le droit des sociétés et le droit des associations seront intégrés dans un seul code ;

- le nombre de types de société devrait passer de 17 à seulement 4. La sprl deviendra à cette occasion une " société privée " ;

- il suffira désormais d’un seul associé pour créer une société privée ou une société anonyme ;

- l’exigence de capital minimum pour la société privée passera également à la trappe. En revanche, la responsabilité du fondateur et les exigences en matière de plan financier seront accrues ;

- la responsabilité des administrateurs sera restreinte, afin de permettre aux sociétés d’attirer plus facilement des administrateurs compétents.

Ce dossier vaut certainement la peine d’être suivi de près, car il modifiera en profondeur les règles du jeu pour les entreprises dans notre pays.

Reading tips

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INGEntreprise06

Success story

Cosucra

Du sucre aux fibres, une révolution managériale réussie

Malgré ses 165 ans, Cosucra a connu, en l’espace de 15 ans, plusieurs révolutions successives qui l’ont amenée à revoir en profondeur non seulement son business model mais aussi son fonctionnement.

Création1852 Activités Production de fibres végétales pour l’industrie alimentaire, notamment à base de protéines de pois LieuWarcoing

www.cosucra.com

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Les débuts de la transformation de Cosucra, aujourd’hui leader mondial dans son secteur, datent de 2003. « À l’époque, l’entreprise s’est divisée en deux : une partie des actionnaires a continué dans la filière sucre, tandis que nous reprenions l’activité de production de sirop de fructose à base de chicorée, et l’usine de protéine de pois que j’avais dirigée (voir encadré " Qui est Jacques Crahay ") », se remémore notre interlocuteur, alors administrateur délégué depuis à peine trois ans. « Trois ans plus tard, en 2006, notre activité chicorée a été prise dans la tourmente de la restructuration sucrière. »

La chicorée sous pression« Le 20 novembre 2005, en pleine cam-

pagne de production, nous avons appris que la Commission européenne supprimait tout le quota de production de sirop de fructose », se souvient Jacques Crahay. « Nous perdions d’un coup deux tiers de notre chiffre d’affaires ! Nous avons été à deux doigts de faire la culbute, malgré le revenu de reconversion mis en place par la Commission ! » Heureusement, la chicorée recelait un trésor jusque-là inexploité : l’inuline. « Cette substance prenait pas mal d’ampleur dans l’industrie alimentaire comme fibre natu-relle, car plusieurs études démontraient ses bienfaits pour la santé de la flore intestinale. Ce fut un de nos premiers pas dans le domaine de la nutrition. »

Vers la nutrition humaineHélas, un nouveau coup de tonnerre

attendait Cosucra : un nouveau règlement européen contraignant en matière d’allégations de nutrition et de santé. « Pour pouvoir affir-mer un bienfait quelconque, il fallait désormais produire un dossier scientifique et des essais cliniques. En clair, prouver, sur des gens sains, qu’un produit les rendait encore plus sains. La quadrature du cercle ! Près de 85 % des alléga-tions alimentaires ont ainsi disparu du jour au lendemain. » Cette nouvelle péripétie a stoppé net le développement de la fibre de chicorée en Europe. « Heureusement, Cosucra a trouvé un relais de croissance en Asie, notamment dans la production de lait pour bébés. »

Le boom du " Healthy Food "Parallèlement, l’entreprise poursuit le

développement d’un nouveau marché dans la nutrition, basé sur les pois. « L’histoire commence avec la protéine de pois, à la fin des années 1980 (voir encradré " Qui est Jacques Crahay ") », se souvient Jacques Crahay. « Après un long travail de développement, la protéine de pois est devenue une alternative aux protéines végétales comme le soja et le blé dans la nutrition sportive, et dans les produits diététiques et de régime. »

Par ailleurs, un des sous-produits du fractionnement du pois a su capter les faveurs d’un nouveau marché : celui de l’alimentation végétarienne et " vegan ". Or, ce marché connaît aujourd’hui une croissance explosive aux USA. « Pour capitaliser sur cette tendance, nous venons de rénover entièrement notre usine de fibre de pois pour augmenter sa capacité de production. Actuellement, nous sommes les leaders mondiaux, mais nous savons qu’il y a trois initiatives de construction de capacité de production en cours aux USA ; nous avons donc deux ou trois ans pour prendre des parts de marché. Après, il faudra nous défendre. »

Révolution managérialeParallèlement, Jacques Crahay a lancé

une refonte totale de l’organisation au sein de Cosucra. « En 2014, j’ai commencé à consta-ter de petits ratés dans le fonctionnement de l’entreprise. Typiquement, le comité de direction se retrouvait à devoir prendre des décisions complexes, pour lesquelles il ne disposait pas des compétences techniques nécessaires », explique-t-il. « Mais lorsque ses membres se tournaient vers nos spécialistes pour obtenir plus d’informations, ils n’arrivaient pas à obtenir un avis clair de leur part. Et pour cause : si ces derniers disposaient de l’expertise requise, ils ne connaissaient pas suffi-samment la situation de l’entreprise et du marché pour pouvoir recommander la décision la mieux alignée avec l’intérêt de l’entreprise. En d’autres termes, l’organisation pyramidale traditionnelle, qui avait bien fonctionné jusque-là, ne remplissait plus son rôle. Pire, elle commençait à nous empê-cher de prendre les bonnes décisions. Il fallait un changement. »

Conseils d’entrepreneur

Engagez des personnes, pas des compétencesAujourd’hui, notre critère numéro un pour le recrutement est la personnalité. Bien s’intégrer dans l’équipe, être vecteur de changement, c’est le plus important.

Impliquez vos équipes dans le recrutementCe sont nos équipes qui expliquent aux RH ce dont elles ont besoin. Les RH font une présélection des candidats, et l’équipe les rencontre pour décider qui est le meilleur candidat.

Faites un travail sur vous-mêmeLes actionnaires et le CEO sont les vecteurs de changement. Ils doivent apprendre à relâcher le contrôle et à faire confiance à leurs équipes.

Qui est Jacques Crahay ?Après avoir obtenu son diplôme d’ingénieur civil à l’UCL en 1982, Jacques Crahay se lance dans la recherche au sein du département de biologie moléculaire. « Après un premier contrat de recherche financé par Petrofina, j’ai eu l’occasion de travailler sur des recherches cofinancées par Cosucra sur l’exploitation de la protéine de pois. »

De l’usine pilote à la directionCette recherche a débouché sur la création d’une usine pilote, que Jacques Crahay a dirigée pendant plus de dix ans. À la retraite de son frère, de 20 ans son aîné, il reprend la direction de l’entreprise familiale.

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Réinventer Cosucra ?« Nous devions trouver une nouvelle manière

de nous organiser afin de nous assurer à la fois que les décisions soient prises rapidement au niveau le plus proche de la réalité de terrain, mais aussi qu’elles tiennent compte de l’inté-rêt de l’entreprise. Je me suis mis à faire mes recherches, et notamment à me plonger dans le livre de Frédéric Laloux , " Reinventing organiza-tions " (voir dans nos news en page 4). En 2015, j’ai rassemblé tout le personnel dans un cinéma à Tournai. Je les ai mis à contribution en leur disant " nous devons changer nos méthodes de travail, mais je ne sais pas comment faire. J’ai besoin de volontaires pour m’aider à y réfléchir ". Le lendemain, à ma grande surprise, de nombreux collaborateurs, issus de tous les niveaux hiérarchiques, sont arrivés dans la salle de réunion où nous avions convié les personnes intéressées par ce projet. Nous avons travaillé avec l’aide d’un consultant pour voir ce qu’il était possible de mettre en œuvre. »

Finie la confidentialité !Depuis lors, Jacques Crahay et son équipe

s’attellent à remodeler les relations humaines dans l’entreprise. L’idée maîtresse de cette transformation : créer une structure hiérarchique basée non sur les relations de pouvoir, mais sur la compétence. « C’est plus facile à dire qu’à mettre en œuvre », relève notre interlocuteur. « Cela crée beaucoup d’incertitude au niveau du mana-gement, mais nous avons aussi constaté des réticences du côté des ouvriers, qui étaient tout aussi décontenancés devant ce changement. »

Un des principes directeurs de la trans-formation de Cosucra est de favoriser la prise d’initiatives à tous les niveaux de la hiérarchie. « Mais pour que les initiatives aient du sens, il faut naturellement que tous nos travailleurs comprennent mieux comment nous gérons l’en-treprise, et aient une idée claire de nos priorités », détaille Jacques Crahay. « Pour y parvenir, nous avons introduit un principe radical : en interne, nous avons supprimé toute confidentialité. Les

informations communiquées lors des conseils d’administration sont par exemple diffusées dans toute l’entreprise. Ça rend les choses plus transparentes et ça permet à chacun de mieux comprendre où est l’intérêt de l’entreprise, et donc de prendre de meilleures décisions à son niveau. »

Quelles perspectives ?Pour Jacques Crahay, il est encore difficile

de tirer un bilan de cette transformation. « Nous sommes en chemin depuis trois ans. Les choses avancent bien, mais il est difficile de plaquer des chiffres sur les changements », estime-t-il. « Cela dit, je constate que ce mode de fonctionnement nous rend plus agiles, mieux adaptés au chan-gement. Et ça, dans un univers de marché en constante évolution, c’est une grande force. »

Un fleuron de la Wallonie picardePour Frédéric Mahieu, Relationship Manager chez ING Belgique, Cosucra est une entreprise exceptionnelle à plus d’un titre. « Pour commencer, elle a parfaitement réussi sa reconversion de producteur de sucre et de sirop de fructose en producteur de fibres et de protéines d’origine végétale », précise-t-il. « Ensuite, Cosucra dispose d’un équipement high-tech souvent conçu au sein même de l’entreprise, ce qui lui permet d’obtenir un meilleur rapport rendement/prix. »

Compétences à tous les niveaux« Un des facteurs de succès de l’entreprise, à mon sens, est aussi la qualité du management, qui se remet constamment en question », poursuit notre interlocuteur. « De plus, l’entreprise a beaucoup investi dans son capital humain : les compétences sont présentes à tous les niveaux, ce qui augmente encore son efficacité et sa réactivité. Enfin, nous avons avec Cosucra un partenariat bancaire solide, en pool avec d’autres banques, comme souvent pour les entreprises de cette taille. Pour nous, c’est une grande fierté de pouvoir accompagner ce fleuron de la Wallonie picarde. »

Frédéric MahieuRelationship ManagerING Belgique

Les recherches ont permis à Cosucra de développer de nouveaux marchés.

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Focus

ING Employee Benefits

Vos collaborateurs méritent la crème de leurs bonus !Les entreprises peuvent aujourd’hui intégrer dans leur politique de bonus salarial des formules basées sur des warrants ou des options pour motiver et fidéliser leur personnel. Une offre globale, sécurisée et facile à mettre en place qui séduit de plus en plus de sociétés !

Au moment d’octroyer un bonus à leurs salariés méritants, bon nombre de dirigeants s’interrogent sur la meilleure manière de maximaliser cette rémunération variable. « Que ce soit pour les grandes entreprises ou les PME, le Warrant Plan et le Fund Option Plan, des solutions proposées par ING, constituent des pistes intéressantes », explique Christophe Delbecque, Team Head Employee Benefits chez ING Belgique.

Des primes win-winLe principal avantage des warrants ? Une

optimalisation parafiscale attractive, grâce à l’exonération de cotisations ONSS. « Un bonus brut de 100 euros coûte près de 145 euros à l’employeur et génère un net d’environ 47 euros pour le travailleur, soit un rapport net employé/coût employeur de 30 % », explique Evelyne Fremault, Consultant Employee Benefits chez ING Belgique. « Avec le Warrant Plan, l’entre-prise offre à la place du cash des warrants qui suivent l’évolution des marchés boursiers européens. Dès le jour de l’offre, le bénéficiaire peut revendre ces warrants et espérer empo-cher environ 43 % du coût employeur à bourse constante. »

Fiscalement avantageuxAvec le Fund Option Plan, le bénéfice se

traduit par un gain d’impôt additionnel. « Un atout fiscal très intéressant, mais qui est lié à une prise de risque supplémentaire pour le bénéficiaire, puisque celui-ci ne peut vendre l’option qu’après un an. Il est donc soumis aux fluctuations du marché », explique Christophe Delbecque. « En contrepartie, il peut escompter

un rendement net d’environ 54 % des sommes octroyées par l’employeur, à bourse constante. »

Une offre complèteDepuis 2017, ING propose aux employés de

ses clients de gérer directement leurs warrants/options via une plateforme électronique. « C’est un outil efficace qui soulage nos clients de toute charge administrative. Cela cadre parfaitement avec notre approche globale qui inclut une série de services complémentaires. » En effet, l’équipe Employee Benefits accompagne l’employeur tout au long du processus. Elle l’aide notam-ment à communiquer sur le sujet à travers des présentations dans les trois langues destinées aux bénéficiaires. « Nous mettons aussi en place un suivi, entre autres pour la perception de l’impôt. Cela s’avère très utile, par exemple, pour aider nos clients à préparer leurs fiches de paie. » Enfin, les bénéficiaires peuvent à tout moment s’adresser à un helpdesk mis à leur disposition par ING.

La sécurité avant toutEn Belgique, l’octroi de bonus via des

warrants/options est réglementé par une loi de 1999. Pionnier et leader sur ce marché, ING fait évoluer sans cesse ses instruments pour répondre pleinement aux besoins des entre-prises. Ces deux plans bonus tirent le meilleur parti des possibilités d’optimalisation offertes par la réglementation. « Sans jamais remettre en cause la sécurité juridique, puisqu’ING a obtenu la validation de l’administration fiscale et de l’ONSS. Pour ING, c’est impératif, et c’est un facteur de tranquillité important pour les entre-prises », conclut Christophe Delbecque.

Christophe DelbecqueTeam Head Employee BenefitsING Belgique

Evelyne FremaultConsultant Employee BenefitsING Belgique

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INGEntreprise

Création1967 Activités Distribution, assemblage et production de quincaillerie fonctionnelle pour meubles LieuSint-Niklaas Chiffre d’affaires70 millions d’euros

Personnel250 collaborateurs

www.vanhoecke.be

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Success story

Van Hoecke

Le spécialiste de la quincaillerie fonctionnelle pour meubles ouvre de nouvelles portes

De la distribution à l’assemblage et à la production, le spécialiste de la quincaillerie fonctionnelle pour meubles de Sint-Niklaas a accompli ces vingt dernières années un parcours remarquable. « Chaque année, nous remettons en cause notre business model », déclare Peter Van Hoecke, CEO. Management compris !

Imaginez qu’en une bonne quinzaine d’années vous avez propulsé l’entreprise familiale dans une nouvelle dimension : de 20 collaborateurs à 250 et de 19 millions d’euros de chiffre d’affaires à 70 millions d’euros. La tentation n’est-elle alors pas grande de succomber à l’autosatisfaction ? « Si Dieu ne vous aime pas, il vous accorde dix ans de

succès. Vous finissez par vous endormir, vous ne remettez plus en question votre business model et vous perdez la faveur des nouveaux venus sur le marché. Il suffit de voir ce qui s’est passé avec l’industrie de la bonneterie à Sint-Niklaas. Elle employait jadis des milliers de personnes et aujourd’hui ce secteur s’est complètement volatilisé ! »

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Conseils d’entrepreneur

Veillez à ce que cela reste un plaisirComparez la fatigue après une tâche mono-tone à celle après une belle balade avec votre vélo de course.

Faites confiance à vos collaborateursAyez confiance dans les connaissances et le savoir-faire de vos col-laborateurs. Vous devez déléguer.

Laissez les personnes s’épanouirLaissez chacun de vos collaborateurs se déve-lopper de façon durable au sein de l’entreprise. Cela demande parfois pas mal d’énergie, mais cela ne rend votre entre-prise que plus solide.

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Se diversifier pour croîtrePour ne pas en arriver là, le CEO n’a de cesse

de diversifier les activités de l’entreprise fami-liale. Depuis 1973, Van Hoecke est le distributeur exclusif dans le Benelux de Blum, le spécialiste autrichien de la quincaillerie fonctionnelle pour meubles : charnières pour portes tournantes, systèmes de tiroir pour armoires basses et fer-rures de portes relevables pour armoires hautes. Blum et Van Hoecke sont les leaders absolus du marché dans le Benelux, avec une part de marché de près de 80 %. Il y a de fortes chances que vous ayez du Blum dans votre salle de bain ou votre cuisine !

Cette suprématie sur le marché s’est construite depuis les années 90. « Les vingt derniers pour cent du marché auraient été parti-culièrement difficiles à conquérir. C’est pourquoi nous nous sommes mis en quête d’une activité complémentaire, sans remettre en cause les accords avec Blum », explique Peter Van Hoecke. En 2000, l’entreprise lance donc, avec Halux, sa propre ligne d’assemblage pour portes à cadre en aluminium. Avec l’assemblage des tiroirs Blum, Van Hoecke est aussi en mesure d’offrir un service supplémentaire à ses clients. L’assemblage est en fait un travail simple, mais chronophage. Depuis, l’entreprise familiale du pays de Waes assemble chaque semaine plus de 10.000 tiroirs Blum, choisis parmi 48.000 milliards de variantes ! « C’est le nombre de combinaisons possibles. Sur les près de 500.000 tiroirs que nous produisons par an, plus de 300.000 sont différents. »

(R)Évolution permanenteGrâce à cette diversification, le chiffre

d’affaires a grimpé de 17 à 41 millions d’euros et le nombre de collaborateurs s’est envolé de 25 à 100 entre 2000 et 2010. Une progression qui n’a pas empêché Van Hoecke de remettre à nouveau son business model en question, cette fois avec la production d’un tiroir maison en bois. Ta’or Box, un tiroir en bois de placage, qui s’assemble en une minute grâce à un système breveté, est le résultat d’une vaste étude de marché menée en 2012. D’ici 2020, l’usine entièrement robotisée devra tourner à plein ren-dement, soit un investissement total de près de 8 millions d’euros. L’entreprise de Saint-Nicolas espère d’ici quelques années vendre 300.000 exemplaires par an du Ta’or Box, aussi en dehors du Benelux.

À noter que l’entreprise familiale finance sa nouvelle usine entièrement avec ses moyens propres, conformément à sa vision de l’indépen-dance financière. Pour des projets moins risqués, Van Hoecke s’adresse à la banque. L’entreprise a ainsi installé cette année un incinérateur pour traiter les restes de bois. Aujourd’hui, les déchets sont encore collectés deux fois par jour. « ING a consenti un effort particulier pour ce finance-ment de 1,2 million d’euros. Le four doit être en service au printemps 2019. »

Prête à affronter AmazonDepuis 2010, le chiffre d’affaires de Van

Hoecke a pratiquement à nouveau doublé. Pour 2018, Peter Van Hoecke se base sur 70 mil-lions d’euros, réalisés avec 250 collaborateurs. Un petit 50 % de ce chiffre d’affaires provient actuellement de l’assemblage et de la pro-duction, le reste du centre de distribution de 11.000 m². Qu’est-ce qui pourrait bien, dans ce cas, constituer une menace pour Van Hoecke dans les prochaines années ? « Un des principaux défis est l’entrée d’Amazon sur le marché B2B. Ce sera un tsunami numérique ! », affirme Peter Van Hoecke en termes non équivoques. « Fin 2017, nous avons dans ce but lancé le projet Diablo, afin d’encore renforcer les deux atouts dont nous disposons face à Amazon : notre relation personnelle avec les clients et notre réponse à leurs besoins complexes. » En ce qui concerne ce dernier point, Van Hoecke va se lancer d’ici fin 2018 sur le marché des particu-liers. Depuis peu, un code à scanner est apposé sur chaque tiroir Blum assemblé, permettant aux clients finaux d’activer une garantie à vie pour leur tiroir. En même temps, ils pourront visualiser des propositions personnalisées en fonction de leur tiroir pour mieux y organiser leurs épices ou leurs couverts. « Si vous pouvez commander d’un seul clic une solution ergono-mique livrée chez vous à la maison, cela peut être intéressant », prévoit Peter Van Hoecke.

La révolution du leadershipSi Peter Van Hoecke ne cesse d’ajuster la

stratégie de son entreprise, il travaille aussi à une approche progressiste de l’organisation interne. Depuis quelques années, le personnel travaille selon les principes " agile " en équipes auto-gérées. Concrètement, les

Qui est Peter Van Hoecke ?Peter Van Hoecke (55 ans) a étudié l’économie à l’Universiteit Antwerpen. En 1986, il entre chez Van Hoecke NV, la société fondée par son père, Luc. Peter devient CEO en 2002. Il est aussi administrateur chez Voka Antwerpen-Waasland, Bepasin (parcs d’affaires Sint-Niklaas) et LMC Benelux (distributeur de quincailleries pour meubles) ; et propriétaire d’Imanis bvba (société de management).

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collaborateurs sont entourés par des chefs d’équipe, des coordinateurs, des experts et des points de contact pour les problèmes spéci-fiques. Les coordinateurs veillent aux deadlines et établissent le planning, et les chefs d’équipe fournissent l’encadrement idéal en matière d’outils de travail et de formation.

« Ces équipes décident le plus possible elles-mêmes », explique Peter Van Hoecke. « En tant que CEO, je veille surtout à ce qu’elles puissent effectuer leurs tâches du mieux possible. Avec cette forme de servant leadership je protège les gens contre la critique, j’essaie de leur assurer les meilleures conditions de travail, et je garde la vue d’ensemble pour voir si tout se passe bien. Mes collaborateurs doivent pouvoir arriver au travail le matin avec le sourire et retourner chez eux le soir toujours avec le sourire. »

Stratégie et culture d’entreprisePourquoi ce sourire est-il aussi important?

« Le professeur américain Peter Drucker l’a formulé de la manière suivante : " Culture eats strategy for breakfast ". Vous pouvez établir des stratégies et des plans autant que vous voulez,

si votre culture d’entreprise n’est pas adaptée au monde actuel, vous ne construirez rien. Plus fort encore, si je devais diriger l’entreprise en mode leadership directif comme mon père l’a fait, Van Hoecke sombrerait inévitablement ! »

« Combien de personnes voudraient encore travailler ici si nous devions les contrôler minu-tieusement, ne pas leur donner la liberté d’être créatifs et de faire le travail comme elles veulent ? Tant les clients que les collaborateurs ne sont plus loyaux, mais radicaux. C’est aussi la raison pour laquelle nous pratiquons la rotation du travail. Les collaborateurs de la production accomplissent la même tâche pendant maximum deux heures par jour. Nous les protégeons ainsi des surcharges musculaires et intellectuelles monotones. »

Plus de chefs d’équipe…Cet automne, Van Hoecke va franchir encore

un pas dans l’élimination de la hiérarchie inutile. Le 1er septembre, la fonction de chef d’équipe sera supprimée. Les coordinateurs, les experts et les points de contact resteront toutefois en place. Les rôles des chefs d’équipe seront répartis sur le reste des membres de l’équipe. « En tant que chef d’équipe, vous devez non seulement connaître bien le travail vous-même, mais vous devez aussi conclure des accords avec les autres équipes, suivre des formations… C’est beaucoup, et cer-tains chefs d’équipe ne possèdent pas les bonnes compétences pour toutes ces tâches. Cela crée de la frustration, et ce n’est pas efficace. »

… mais bien des " moodwatchers "La tâche de veiller à une bonne ambiance

d’équipe par exemple, nous allons la confier au " moodwatcher ". Plusieurs fois par an, tous les moodwatchers de l’entreprise vont se réunir pour échanger leurs expériences et poursuivre leur évolution. Ce type de conventions donne aux collaborateurs liberté et énergie, parce qu’ils font ce qu’ils aiment faire. Pendant la courte période de notre passage sur terre, nous travail-lons dans le primetime de notre vie, entre 20 et 70 ans, dans le primetime de notre journée, de 8 à 17h. S’il vous plaît, laissez-moi espérer que nous rentrons le soir chez nous fatigués pour de bonnes raisons ! »

« La perle du pays de Waes »« Van Hoecke est appelée à juste titre la perle du pays de Waes », estime Geoffrey De Baets, Relationship Manager d’ING auprès de Van Hoecke depuis janvier 2015. « Luc, le père, et Peter, le fils, ont construit ces cinquante dernières années une entreprise particulièrement saine financièrement et florissante, avec laquelle ING collabore depuis de nombreuses années avec succès. » Peoplemanager« Ce qui me frappe à chaque fois que je me rends chez Van Hoecke, c’est que les collaborateurs sont véritablement au centre de l’entreprise. Peter Van Hoecke est un peoplemanager qui fait beaucoup pour le bien-être de ses collaborateurs, et veille à ce que tout le monde se sente impliqué. On entend souvent le terme " agile ", mais l’entreprise familiale travaille depuis de nombreuses années de cette manière. Les gens se voient confier des responsabilités et travaillent parfaitement en groupes qui communiquent entre eux, sans silos hiérarchiques. »

Geoffrey De BaetsRelationship ManagerING Belgique

La nouvelle culture d’entreprise repose sur la réduction des niveaux hiérarchiques et l’encouragement des initiatives individuelles.

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Trends watch

Leadership

Les femmes au sommet : réalité ou illusion ?

Pour la première fois, tant le Manager que le Manager public de l’Année en Flandre est une femme. Les femmes ont-elles trouvé la voie du sommet ? Le plafond de verre a-t-il été brisé ? Le leadership féminin a-t-il pris la main ?

Le plafond de verre, Grete Remen, maman de cinq enfants, ne s’y est jamais heurtée. Elle est à la tête de l’entreprise d’alimentation natu-relle Damhert à Heusden-Zolder, une entreprise familiale qu’elle gère avec son mari et son frère. Elle a, semble-t-il, naturellement endossé son rôle de CEO. « Je suis diplômée en droit, mais il s’est avéré que j’étais quand même la candidate adéquate pour succéder à mes parents dans l’entreprise », raconte-t-elle. « Ce leadership s’exprimait déjà quand j’étais plus jeune et le reste de la famille approuvait aussi ce choix. Je n’ai donc jamais rencontré de résistance ou eu de mauvaises expériences. »

Pour Murielle Machiels, la route vers le sommet s’est traduite par une quête du juste équilibre. Elle possède depuis sa propre entreprise, QiLi, une agence de consultance

spécialisée dans les transformations numé-riques installée à Bruxelles, et elle est directrice académique à la Solvay Brussels School. « J’y ai développé un cours de leadership authen-tique à l’ère numérique », explique-t-elle. « Cette approche n’est pas masculine ou féminine, elle est différente de l’approche qui est aujourd’hui souvent adoptée. Néanmoins, les femmes CEO choisissent plus souvent ce leadership authen-tique, une approche qui s’intéresse plus aux personnes qu’au ratio. »

Une approche féminineMurielle Machiels était auparavant CEO de

Plantyn, une maison d’édition de titres éducatifs qu’elle devait mener à l’ère numérique. Pour ce faire, elle a inversé la culture de l’entre-prise. « J’ai au départ essayé de réaliser cette

Le plafond de verre existe encore, mais se fissure de plus en plus. Certaines entreprises cotées en Bourse dont le CEO est une femme ont même plus de valeur. Avec l’arrivée de l’intel-ligence artificielle, les traits de caractère " plus doux ", comme l’empathie et la compréhension, vont gagner en importance.

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transformation de façon traditionnelle, comme on nous l’apprend dans les manuels, mais j’ai remarqué que cette approche ne fonctionnait pas et générait du stress et des burn-outs. Y compris chez moi ! J’ai dès lors cherché une autre façon de faire et je suis allée suivre un cours de coaching ontologique aux États-Unis. J’y ai appris que nous nous préoccupons trop du rationnel, alors que c’est l’attention portée aux personnes qui est importante. J’ai donc instauré chez Plantyn un programme Happiness incluant des massages, de la réflexologie plantaire, une alimentation saine et moins d’heures de travail. J’ai appris à diriger l’entreprise pas seulement avec ma tête, mais surtout avec mon cœur. »

Cette approche est-elle une conséquence d’un leadership " plus doux " ou d’un trait de caractère féminin ? « Probablement les deux. Une femme a par nature certains traits de caractère en plus qu’un homme, comme la capacité à écouter, ressentir, comprendre et tenir compte du contexte. Et c’est plutôt à l’avantage des dirigeantes. D’autant plus dans le contexte de l’arrivée de l’intelligence artificielle, où certains aspects comme l’empathie et la créativité vont gagner en importance. »

Grete Remen affirme aussi que ses traits de caractère " féminins " jouent en sa faveur. « J’ai véritablement un sixième sens. Je ressens fortement les sentiments et les problèmes des employés. Mais cela ne veut pas dire que je ne peux pas être rigoureuse. Je combine mes antennes " plus douces " à la rigueur nécessaire pour que les choses continuent de tourner. Par exemple, je ressens mieux ce qui se passe, si bien que je peux intervenir de façon proactive dans certaines choses. »

Un plafond de verre ?Les deux CEO s’accordent à dire que le

plafond de verre n’a pas complètement disparu, même si elles constatent une évolution positive. « Dans certains secteurs, ce plafond est encore bel et bien là ! », souligne Murielle Machiels. « Récemment, j’ai voulu poser ma candidature à un siège dans un comité de direction. Le CEO de cette entreprise m’a alors confié officieusement

que je n’avais aucune chance et qu’il ne servait à rien de postuler. Le président voulait unique-ment des hommes dans le comité de direction, parce que les femmes distraient les hommes. Tout dépend donc souvent de la culture d’en-treprise et des personnes qui sont à sa tête. Si celles-ci ont encore un regard traditionnel, il n’y a pas place pour le changement ou la parité. »

Grete Remen : « Je remarque aussi que dans certains secteurs le sexisme a la vie dure. Je rencontre plus souvent des CEO hommes que des CEO femmes, mais je constate quand même que le nombre de patronnes augmente dans mon réseau. Mon secteur n’est plus vraiment un bastion masculin, même si beaucoup de per-sonnes m’avaient mise en garde à ce propos. Je pense que ce plafond de verre va complètement disparaître à l’avenir. »

« Actuellement, certaines entreprises cotées en Bourse ont même plus de valeur quand c’est une femme qui est à leur tête », ajoute Murielle Machiels. « Énormément de futurs clients sont d’ailleurs des femmes. Une bonne représenta-tion des femmes dans une entreprise est dès lors très importante. D’autant plus si vous tenez compte du fait qu’à l’avenir encore plus d’aspects féminins, comme les émotions et les sentiments, vont occuper le devant de la scène. »

Quels sont les besoins des femmes sur la voie du sommet ?Adaptez votre approcheMurielle Machiels : « Gardez bien en tête votre public et adaptez votre approche. C’est ainsi que chez Plantyn j’ai approché autrement les actionnaires, qui étaient des hommes plus âgés. J’ai présenté le programme Happiness comme un programme antistress qui offrait une solution au grand nombre de burn‑outs et abaissait dès lors les coûts. Le fait de mettre l’accent sur la stratégie a augmenté la compréhension. »

Restez fidèle à vos valeursN’adaptez pas votre approche du leadership. « Beaucoup de femmes pensent qu’elles doivent se comporter comme les CEO hommes. Si vous essayez d’être une personne que vous n’êtes pas, vous ne serez pas authentique », explique Murielle Machiels. « Je crois en des valeurs. Si vous agissez selon ces valeurs, les autres vous respectent. Choisissez les entreprises qui ont ces mêmes valeurs. Si vous sentez que l’entreprise ne vous convient pas ou vous empêche de vous développer, quittez‑la ! »

Ne doutez pas« Croyez en vos propres forces et n’ayez pas le vertige ! », pointe Grete Remen. « Ne doutez pas de vos décisions, même si à terme elles ne donnent pas toujours le résultat escompté. Regardez vers l’avant. Regarder en arrière n’a pas beaucoup de sens. Finalement, c’est à chaque femme de décider si elle est ambitieuse et veut prendre davantage de responsabilités, tout comme font les hommes. Certaines femmes ne le veulent pas et c’est bien aussi. Par contre, nous devons stimuler les femmes qui le veulent, mais hésitent. Pour les femmes aussi, tout est possible ! »

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Tout dépend donc souvent de la culture d’entreprise et des personnes qui sont à sa tête. Si celles-ci ont encore

un regard traditionnel, il n’y a pas place pour le changement

ou la parité

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People & Management

Management 3.0

De l’autorité imposée au leadership naturel Davantage d’innovation, plus de flexibilité et de responsabilités pour les employés : autant d’exigences pour qu’une entreprise reste aujourd’hui attractive et performante. Autant d’opportunités pour le leader de se réinventer.

En 1958, l’américain Bill Gore crée son entre-prise spécialisée dans la science des matériaux. Comme son employeur précédent n’a guère soutenu ses initiatives, il décide de prendre le contrepied et de donner à ses employés la possibilité d’innover et de décider de la manière de mener à bien leur mission. Ses mesures sont radicales : il met fin aux supérieurs hiérar-chiques, en remplaçant la notion de " chef " par celle de " leader naturel " validé par l’équipe. Soixante ans plus tard, Gore & Associates, à l’origine du fameux matériau Gore-Tex, est une multinationale extrêmement innovante, présente dans plus de 45 pays et avec un chiffre d’affaires de 3,2 milliards de dollars.  

Rester sexyL’histoire de Gore & Associates n’est pas

un cas isolé. « Face au besoin constant d’inno-vation, à un marché de plus en plus complexe et rapide, à de nouvelles générations en quête de sens dans leur travail, les organisations sont incitées à se transformer », observe Lionel Frankfort, conseiller en transformation d’entre-prises et professeur invité à la IE Business School de Madrid. « Celles qui résistent au changement risquent fort de perdre des parts de marché et de ne plus attirer les talents. »

Mais ce n’est pas tout d’attirer les talents, encore faut-il savoir les garder. Notre inter-locuteur soulève un paradoxe présent dans

Libérer le plein potentiel humain permet de rendre les entreprises plus attractives, innovantes et performantes. Le rôle du leader passe d’un " command and control " à un " coach and empower ". Les valeurs sont la base de la culture d’entreprise qui doit être incarnée par le leader.

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People & Management

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Lionel FrankfortProfesseur invitéIE Business SchoolMadrid

beaucoup d’entreprises aujourd’hui : « Les entreprises engagent des personnes ultracom-pétentes et motivées, pour ensuite les placer dans des fonctions et des tâches prédéfinies qui ne leur permettent pas de déployer leur poten-tiel, et peuvent même devenir infantilisantes. »

L’humain à l’avant-plan Dans son livre " La dimension humaine de

l’entreprise ", Douglas McGregor, alors professeur en management au Massachusetts Institute of Technology (MIT) et docteur en psycholo-gie, identifie deux extrêmes dans les pratiques managériales. Côté X, il y a le taylorisme, avec le micromanagement et le postulat que les travailleurs ne sont motivés que par l’argent. Côté Y, par lequel Bill Gore s’est dit influencé, il y a Maslow et la pyramide des besoins, menant à la conviction que les êtres humains savent s’automotiver et s’épanouir dans leur travail si on leur en donne l’occasion.

70 ans après Gore & Associates, de plus en plus d’organisations repensent leur style mana-gérial vers un modèle dit plus " libéré ", terme notamment popularisé par Frédéric Laloux dans son best-seller " Reinventing organizations " (voir encadré). « De Chrono Flex et des biscuits Poult en France au SPF Sécurité Sociale, chacune de ces organisations opère une transformation humaine qui donne une plus grande place à l’in-dividu et non à la fonction, qui valorise l’écoute, l’empathie, la collaboration, et permet à chacun de s’épanouir et de déployer tout son potentiel pour l’amélioration de la performance générale de l’entreprise », observe Lionel Frankfort.

Responsabilité partagée « Valoriser le plein potentiel humain requiert

des réformes structurelles vers un management plus inclusif et participatif. » Lionel Frankfort cite quelques réformes possibles :

- des descriptifs de poste en termes de mandat clair à atteindre plutôt que de listes de tâches et processus,

- des prises de décisions collectives,- des modes d’évaluation entre collaborateurs

(« par les pairs plutôt que par le père »). En France, par exemple, l’entreprise Sogilis,

active dans le développement de logiciels pour l’aéronautique, donne à ses salariés la possibi-lité de choisir leurs projets, voire de refuser un client qui n’intéresse personne. Résultat ? Des employés épanouis et un chiffre d’affaires qui croît de 30 % par an depuis 2012. Chez Gore & Associates, les titres ont tout bonnement disparu : les presque 10.000 salariés sont aussi actionnaires de l’entreprise, et les équipes s’autogèrent et s’autoévaluent. Enfin, au sein d’ING, la dimension peer-to-peer est appliquée dans le recrutement : ce sont les collaborateurs, et non le supérieur, qui choisissent leur prochain collègue.

En Inde, 50.000 salariés consultés pour une gestion de crise Vineet Nayar, ex-PDG d’HCLT, une multinationale indienne de services informatiques, considère que l’entreprise doit avant tout s’appuyer sur ses collaborateurs. En 2008, quand survient la crise économique, il décide de rester fidèle à sa vision : plutôt que de reprendre les rênes en main, l’équipe dirigeante met en place la plateforme " Smart Response " qui consulte l’ensemble des employés sur la manière de réagir à la crise. Les suggestions d’actions concrètes abondent pour augmenter le chiffre d’affaires, au lieu de réduire les coûts. Se sentant valorisés et rassurés, les salariés redoublent d’énergie pour rendre l’interface " clients " plus performante et accroître les parts de marché. En quatre ans, alors que l’industrie IT est en crise, HCLT triple presque son chiffre d’affaires, est élu meilleur employeur d’Asie et devient un cas d’étude à la Harvard Business School.

Vincent GiolitoChercheurChaire Baillet-LatourSolvay Brussels School

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Un leadership naturel Si la pyramide tend à s’aplatir, que les

responsabilités sont partagées et que chaque équipe s’autogère, quel rôle reste-t-il pour le dirigeant d’entreprise ? « La place du leader est essentielle dans une structure d’entreprise plus horizontale ou organique », insiste Lionel Frankfort. « Mais elle change radicalement : d’un " command and control " on passe à un " coach and empower ". » Au centre et non plus au sommet, le leader incarne la vision de l’entreprise, détient la vue d’ensemble, valorise le potentiel de chaque équipe, met en lien, favorise le partage d’informations et permet à chaque collaborateur d’exceller. « L’autorité imposée se transforme en un leadership naturel que chacun suit spontanément. »

Là aussi, Bill Gore a une longueur d’avance : en 2005, la nouvelle PDG de Gore & Associates, Terri Kelly, est nommée à la tête du groupe par l’ensemble des employés, sans même s’être déclarée candidate. Un choix avisé, semble-t-il, puisqu’en 2018, Kelly est nommée " Executive of the year " par la W. P. Carey School of Business.

Culture de l’erreur« Transformer une entreprise alors que les

employés sont habitués à un ancien système de règles peut susciter des blocages et augmenter le risque d’erreurs », reconnaissent de concert Vincent Giolito et Irene Ingardi, chercheurs au sein de la Chaire Baillet-Latour en " Error Management " à la Solvay Brussels School (ULB). « Ce qui importe n’est pas d’éviter les erreurs, qui font partie de la vie de toute entreprise, mais de savoir les repérer en temps réel afin de rectifier le tir et d’éviter les conséquences stratégiques négatives. Elles deviennent alors une opportu-nité d’amélioration. »

Selon Vincent Giolito, la clé pour toute entre-prise qui se veut performante est de penser en termes de responsabilité collective, même, et surtout, quand ça va mal : « Une erreur est très rarement le fait d’une seule personne : chercher un coupable pour le punir n’est donc générale-ment pas la solution. Il faut instaurer un climat de confiance, encourager les collaborateurs à signaler ce qui pourrait être perçu comme un manquement de leur part, afin d’assurer un partage fluide d’informations. En cela, le leader joue un rôle clé : c’est lui qui, le premier, doit pouvoir reconnaître ses erreurs afin de montrer l’exemple ».

Défi adaptatif« Le leader est un " role model ": chacune

de ses actions et décisions doit être alignée avec les valeurs à la base de la culture d’entre-prise », conclut Irène Ingardi. « S’il veut initier des réformes qui stimulent la prise de risques et la collaboration, à lui d’en faire preuve dès le départ, en impliquant dans la réflexion tous ceux qui seront impactés par un changement de règles. »

Lionel Frankfort confirme : transformer son entreprise nécessite un leadership fort, mais, paradoxalement, ne peut être imposé par le haut. « La transformation d’une organisation vers un modèle plus ou moins libéré est avant tout un défi adaptatif propre à toute organisa-tion ; la structure choisie doit rester un moyen de réaliser au mieux sa mission et non une fin en soi. »

Irene IngardiChercheurChaire Baillet-LatourSolvay Brussels School

Chez Gore & Associates, les presque 10.000 travailleurs sont tous actionnaires

de l'entreprise

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Tips & Tricks

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Motivation

Donner du sens : indispensable au travail ?

Voiture de société, augmentation de salaire, plan de pension complémentaire..., ces avantages ne suffisent plus pour engager, motiver ou garder des collaborateurs. D’autres facteurs entrent désormais en ligne de compte.

Le constat est de plus en plus fréquent dans les entreprises : des collaborateurs quittent un job bien payé pour une nouvelle fonction avec davantage de sens, un travail épanouissant qui comporte un certain engagement. « Cette évolu-tion n’est pas neuve, mais était moins prononcée auparavant », note Lieselot Steenbeke, senior manager chez BDO Human Capital, un bureau de conseil. Elle voit plusieurs raisons à cette évolution. « Sur le plan professionnel, elle est la conséquence d’une évolution sociétale plus vaste. Nous vivons de façon plus responsable, nous sommes de plus en plus conscients de valeurs comme une vie saine et sans stress, et nous voulons donner du sens sur différents plans. Et cela transpa-raît sur le plan professionnel. Plus qu’avant, les

collaborateurs se posent des questions du genre " Quel contenu suis-je prêt à accepter ? ", " Mon job correspond-il à ce qui est important pour moi et me donne vraiment du plaisir ? ", " Qu’est-ce que je trouve intéressant ? " ou " Comment puis-je trouver un bon équilibre avec ma vie de famille ? ". Dans de nombreux cas, l’idée de motiver les employés par le biais notamment d’une augmentation de salaire ou d’un véhicule de société ne fonctionne plus. Des études se sont déjà penchées par le passé sur les effets d’une augmentation de salaire pour garder dans l’entreprise des collaborateurs qui avaient démissionné. Le résultat ? Ces per-sonnes restent, mais provisoirement : 75 % d’entre elles partent quand même dans l’année qui suit, malgré le stimulant financier. »

Un package salarial attra-yant ne suffit plus à motiver les employés. Les collaborateurs ont besoin d’une organisation du travail flexible assortie d’avantages qui sont tout bénéfice pour leur qualité de vie. Les personnes qui choi-sissent une organisation ayant une mission qui s’inscrit dans leurs valeurs personnelles ont aussi de meilleures prestations.

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Pas une question d’âge« Dans le temps, les collaborateurs

n’avaient aucune latitude dans leur entre-prise », déclare Bruno Vanneste, associé chez Beanmachine, une société spécialisée dans le développement organisationnel. « Ce que refuse la génération actuelle, qui est en quête de dialogue, de confiance et d’autonomie. Ils savent qu’ils doivent travailler plus longtemps et font donc le choix d’un meilleur équilibre vie professionnelle-vie privée. Travailler doit rester supportable. » Cette quête d’un autre mode de travail ne semble pas être liée à un âge déterminé. On suppose générale-ment que ce sont surtout les plus jeunes générations, les millennials, qui s’attellent à trouver un sens, mais ce n’est pas tout à fait exact. « Les autres générations, comme les trentenaires et les quadragénaires, accordent aussi de l’importance à certaines valeurs et à l’augmentation des moments de qualité avec leur famille », indique Bruno Vanneste. « C’est la raison pour laquelle les futurs collaborateurs cherchent au préalable à savoir quelle est la culture d’une entreprise ou d’une organisation. Ils le font en ligne ou via des témoignages de collaborateurs. Le slogan de l’entreprise correspond-il à ce qui se passe entre ses murs? Et quand il apparaît que l’ambiance en interne ne correspond pas à l’image donnée à l’extérieur, les personnes vont plus fréquemment qu’avant se mettre en quête d’une alternative. Dans le temps, les employés faisaient toute leur carrière dans la même entreprise, aujourd’hui ils changent beaucoup plus. »

Plus que le salairePour Lieselot Steenbeke, cela doit bien évi-

demment être bon pour toutes les générations. « Il faut donner un bon salaire. Mais il est un fait que les jeunes, plus que la génération plus âgée, réfléchissent de façon plus responsable à la vie qu’ils veulent véritablement mener et choisissent par exemple de ne pas être prison-niers des embouteillages. Un véhicule de société cher n’est pas un cadeau dans ce cas. Ces choix délibérés sont des facteurs qui comptent lors de la sélection d’un employeur et d’un job. »

Un package salarial élevé avec un véhi-cule de société sera donc encore attirant pour certains employés, mais aura un intérêt secon-daire pour d’autres. « Les futurs collaborateurs examinent plus souvent la cohérence au sein de l’organisation: ce que l’entreprise raconte au monde extérieur correspond-il à ce qui se passe à l’intérieur ? Et les rôles et les respon-sabilités correspondent-ils bien à la culture de l’organisation ? Pour les futurs collaborateurs, cette cohérence est beaucoup plus importante que l’obtention de gros avantages. Un luxe que peut se permettre la génération plus jeune, car la génération précédente n’avait souvent pas ce choix. À l’époque, les collaborateurs étaient surtout contents d’avoir un bon travail. »

Des avantages flexiblesLe fait que les employés accordent moins

de valeur aux avantages classiques, mais plus au sens et à un meilleur équilibre vie pro-fessionnelle-vie privée, signifie aussi que les employeurs doivent s’adapter afin d’attirer du personnel motivé. Et cette transformation n’est pas aussi évidente qu’il n’y paraît. « La plupart des entreprises vont se profiler dans leur employer branding comme des sociétés flexibles, axées sur la valeur. Elles le font sur leur site internet où vous pouvez retrouver leur story et leur purpose », explique Bruno Vanneste. « Mais vous avez deux sortes d’entreprises : celles qui le font uniquement via un démarchage sur le site web et celles qui modifient véritablement leur culture d’entreprise. Les entreprises qui s’attellent à cette transition sont actuellement encore une minorité. »

Néanmoins, les employeurs sont de plus en plus contraints de répondre à cette demande. « C’est ainsi que, par exemple, de plus en plus d’entreprises donnent à leurs employés une responsabilité sur le contenu et/ou la planifica-tion de leurs heures de travail, et les jugent plutôt sur leurs résultats », déclare Lieselot Steenbeke. « De très nombreuses organisations fonctionnent selon ce qu’on appelle le " plan cafétéria ", où l’employé peut lui-même composer son package salarial. Mais de plus en plus d’entreprises évo-luent vers une organisation du travail flexible où l’employé peut faire son choix parmi les types d’avantages qui sont tout bénéfice pour sa qualité de vie. Il peut, par exemple, opter pour un salaire plus bas au profit de davantage de jours de congé. Ou thésauriser des bonus qu’il peut

Bruno VannesteAssociéBeanmachine

Lieselot SteenbekeSenior managerBDO Human Capital

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Tips & Tricks

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échanger contre une formation. Les employés peuvent travailler en 4/5es quand ils ont des enfants ou à l’approche de leur pension. Les colla-borateurs accordent toujours plus d’importance à cette flexibilité. Dans certains cas, les employeurs offrent aussi des services à leur personnel. C’est ainsi que certaines entreprises organisent une garderie, un service de repassage ou même des camps de vacances pour les enfants. Le télétra-vail est déjà aussi fortement implanté dans de nombreuses entreprises. »

Une profonde mutationMais, pour adopter de nouvelles valeurs, la

mutation doit être profonde. « Il ne s’agit pas uniquement d’une déco avec de jolis fauteuils qui inviteraient à dialoguer, mais aussi de la modification du leadership. Si aucune démarche n’est entreprise en interne pour stimuler ce changement, il n’y a aucune chance qu’il se produise. Les entreprises doivent y travailler activement. Si vous prêchez la flexibilité, vous

devez l’implémenter. Permettez le télétravail, accordez à vos collaborateurs plus d’autonomie et de confiance et privilégiez des avantages de valeur. Si vous optez pour ce changement, vous allez engager des personnes qui peuvent s’inscrire dans le purpose et la story de votre entreprise. Et pour améliorer une culture d’en-treprise il n’y a rien de mieux que d’accueillir du sang frais », constate Bruno Vanneste.

De meilleurs résultats ?Le choix de privilégier au sein de l’en-

treprise cette culture ouverte et de valeurs s’accompagne aussi dans de nombreux cas de meilleurs résultats. « Des études indiquent que les personnes qui choisissent une organisation avec une mission qui cadre avec leurs valeurs personnelles ont aussi de meilleures prestations. Elles se sentent bien et travaillent de façon plus durable. Mais elles ne restent pas d’office plus longtemps dans l’entreprise. Cela dépend aussi d’autres facteurs, comme le contenu de la fonc-tion », affirme Lieselot Steenbeke.

Bruno Vanneste : « Les collaborateurs qui viennent travailler avec passion sont prêts à faire ce petit extra et sont de bons ambassa-deurs dans le monde extérieur, tant auprès des nouveaux clients que des nouveaux collabo-rateurs. Si vous êtes engagé dans une société et que vous sentez que la culture d’entreprise sonne faux, vous n’y resterez pas longtemps. Des études soulignent par exemple aussi l’effet positif sur le nombre de burn-outs. Quand les employés peuvent être authentiques et montrer une certaine fragilité, le nombre de burn-outs diminue automatiquement. Si vous vous retrou-vez dans une structure qui correspond et vous correspond, vous ferez preuve de plus d’" appro-priation ". Ce qui générera de meilleures idées et aussi plus innovantes ».

Le bonheur au travail est un leurre !Afin d’améliorer la rétention de leur collaborateurs, de nombreuses entreprises ont adopté ces dernières années une politique basée sur le " bonheur au travai ". Aurélien Herquel, fondateur du label d’humanisation des relations de travail Hu-Man et auteur de " Human : promesse d’une croissance réussie ", ne mâche pas ses mots. « À mon sens, la notion même de bonheur au travail est un leurre. Le bonheur d’un travailleur dépend de facteurs internes qui sont totalement hors de la sphère de contrôle de l’entreprise », détaille-t-il. « De plus, ça n’a jamais été la vocation première d’une entreprise de rendre ses travailleurs heureux. Son premier objectif est de créer de la richesse afin de pouvoir croître et prospérer. Sans pour autant rendre les salariés malheureux, bien sûr. » Pour Aurélien Herquel, mieux vaut parler d’épanouissement au travail. « Par exemple, créer un environnement où chacun se sent écouté peut participer à la création de nouveaux projets, contribue à la croissance de l’entreprise mais également à la sienne, et s’engage dans des relations humaines au sein de l’organisation. »

Du sprint au marathonMais pour notre expert, créer de la qualité de vie au travail requiert un changement culturel profond. « Il s’agit de remettre à plat la manière dont se nouent et se jouent les relations entre le management et les salariés. L’exemple typique de l’attitude managériale néfaste, c’est la vision à court terme qui caractérise de nombreuses entreprises cotées, dont l’actionnariat se soucie avant tout des dividendes. Résultat : les salariés enchaînent les sprints pour atteindre des objectifs à très court terme. C’est épuisant et peu motivant, et à terme destructeur pour l’image de l’organisation. Mieux vaut se recentrer sur le long terme pour définir des objectifs communs et avancer ensemble vers leur réalisation. Bref, courir un marathon ensemble plutôt qu’enchaîner les sprints individuels ! »

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Les collaborateurs qui travaillent pour une organisation dont la mission cadre avec leurs valeurs personnelles ont de meilleures prestations.

Aurélien HerquelFondateurHu-Man

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People & Management

Digitalisation

Recherche leaders inspirants pour équipes virtuelles

Coworking, télétravail, équipes multisite et multipays, nouvelles méthodes de gestion, accès permanent aux messages professionnels… Pour les managers, gérer, protéger et motiver leurs équipes devient un défi quotidien. Comment le relever avec succès ? Derrière les solutions techniques se profile, comme toujours, l’élément humain.

La multiplication des outils numériques de collaboration et la nécessité de réagir de plus en plus vite aux changements des conditions de marché ont augmenté la vitesse de réaction des équipes. Elles ont aussi entraîné la multiplication des " collaborations virtuelles ", qu’il s’agisse de " simple " télétravail ou de collaboration à distance entre différents sièges de l’entreprise, parfois situés dans des zones horaires très différentes. Ces mutations s’accompagnent souvent de difficultés pour les managers et leurs collaborateurs.

Les cinq défis du managementPour Murielle Machiels, CEO de QiLi, l’entre-

prise de conseil en transformation digitale qu’elle a fondée, et directrice académique du programme " Leading authentically in digital times " de la Solvay Brussels School of Economics & Management, les gestionnaires sont aujourd’hui confrontés à cinq défis majeurs. Ces défis sont indépendants de la technologie, même s’ils en découlent : - les managers et leurs collaborateurs ont trop

de choses à faire, et n’arrivent plus à établir des priorités ;

Avant de changer les modes de management, il est important de se focaliser sur la culture d’entreprise et d’impliquer le top management. Une équipe virtuelle peut s’avérer plus performante qu’une équipe classique si son leader parvient à construire une confiance réciproque entre ses membres. La confiance au sein de l’équipe virtuelle est le facteur de réussite le plus important.

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People & Management

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- les processus de décision au sein de l’entreprise sont devenus trop lents, ou trop inefficaces, en particulier en comparaison avec la vitesse à laquelle les conditions de marché évoluent ;

- les sacro-saints " plans à long terme " établis sur 1 à 3 ans ne fonctionnent plus ;

- le besoin de collaborer entre départements est devenu tellement important qu’il transcende la structure fonctionnelle de l’entreprise.

« Mais le challenge le plus important découle de ces quatre premiers défis », poursuit la consultante. « L’incertitude et le sentiment d’impuissance grandissants entraînent une augmentation du stress à tous les niveaux hiérarchiques, et plus particulièrement dans le middle management. Le drame est que ce phénomène touche d’abord les collaborateurs les plus motivés, ceux qui veulent changer les choses et faire avancer leur entreprise. »

Désengagement et burn-outPour Murielle Machiels, les collaborateurs et

leurs managers ont deux façons de réagir à cet accroissement du stress. « Soit ils ont un réflexe de protection : ils se résignent, se détachent de plus en plus de leur travail, et entrent dans une mentalité de silo qui leur permet de diminuer leur niveau d’inconfort en leur donnant l’im-pression de reprendre le contrôle de la situation. Soit ils se démènent pour essayer de rattraper le temps perdu, subissent un stress encore plus important et finissent par faire un burn-out. »

Face à ces défis, la tentation est grande d’appliquer dans l’entreprises les dernières techniques de management à la mode : agile,

empowerment, self-management, teams mul-tifonctionnels… « Bien souvent, au moment de l’implémentation, les gestionnaires de l’entre-prise réalisent que la culture interne n’est pas adaptée à un tel changement dans la façon de travailler », constate la consultante. « En réalité, le management de l’entreprise doit commencer par changer sa manière de voir le monde, l’en-treprise, et la manière de diriger. Et c’est une des choses les plus difficiles à faire, car notre modèle traditionnel est encore celui du XIXe siècle : le manager donne des instructions, et contrôle leur exécution. Quand on y pense, c’est d’ail-leurs encore la manière dont l’école fonctionne aujourd’hui. Pas étonnant, donc, que cette manière de voir le monde ait encore tant d’in-fluence dans le monde de l’entreprise. À l’école, nous avons appris à faire tout ce qu’on attend de nous. Et beaucoup de leaders sont parvenus à leur position actuelle parce qu’ils pouvaient " délivrer ". Or, ce n’est tout simplement plus pos-sible dans un certain nombre de cas. »

Lâcher prise« Un dirigeant doit aujourd’hui apprendre

à établir des priorités et à dire non. Pas tant aux gens, il s’agit plutôt de refuser certaines opportunités ou de ne pas réagir à certaines menaces qui surgissent. Bref, il doit apprendre à lâcher prise », poursuit Murielle Machiels. « Tout ce qu’il ne gère pas va forcément générer du chaos. Le manager d’aujourd’hui doit donc pouvoir accepter une certaine dose de chaos, et se faire à l’idée que certaines choses ne vont pas fonctionner. Il doit apprendre à gérer ses

Erica DhawanFondatrice et CEOCotential

Murielle MachielsFondatrice et CEO QiLi

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peurs. C’est ce qui arrive souvent lors de la mise en place de systèmes " agile " ou basés sur l’empowerment. Les managers veulent déléguer, mais au moindre incident, ils reviennent au mode dominant. Ils doivent accepter de voir des choses échouer sans intervenir pour les régler. » Et accepter une nouvelle incertitude : les équipes cross-fonctionnelles rendent superflues les fonc-tions de management plus " classiques ". « C’est au sommet de la hiérarchie que l’incertitude professionnelle est la plus grande. Or, c’est aussi à ce niveau de management que la transfor-mation doit commencer : l’équipe dirigeante doit donner l’exemple, et donc se transformer plus rapidement que le reste de la structure. Le rôle du CEO est de l’aider à réussir cette trans-formation, mais aussi, hélas, de remplacer les dirigeants qui n’y parviennent pas. La rapidité de transformation au sommet est cruciale ! »

Communiquer autrementSimultanément, la révolution dans les outils

de travail et la multiplication des équipes " vir-tuelles ", multisite et multipays entraînent une profonde mutation des modes de communica-tion. Avec, cependant, une très bonne nouvelle. Erica Dhawan, fondatrice et CEO de Cotential et auteur de " Get Big Things Done: The Power of Connectional Intelligence " indique que les der-nières recherches en management ont prouvé que les équipes virtuelles peuvent s’avérer plus performantes que les équipes situées dans un même espace de travail. « La capacité à se ren-contrer régulièrement en face à face n’est pas le facteur de succès principal, c’est juste notre mode de management par défaut. Le succès dépend en réalité du niveau de confiance entre les membres de l’équipe, et des valeurs qu’ils partagent », pointe cette spécialiste. « Si une équipe ne peut pas se réunir au quotidien, son

manager peut utiliser des " normes sociales " pour construire plus rapidement cette confiance mutuelle. Je connais un leader qui commence toutes les réunions, virtuelles ou réelles, par une séance de remerciements, pour amener de la compassion et rendre la vulnérabilité accep-table au sein de l’équipe. Un autre organise des sparring sessions pour encourager ses colla-borateurs à se montrer critiques et à soulever les questions difficiles dans un environnement sécurisé. »

Mentalité de fondateurMais comment parvenir à unifier des

équipes multisite autour d’une même vision de l’entreprise et de ses objectifs ? « Chris Zook, associé chez Bain & Company, parle de " Mentalité du fondateur " : il s’agit de culti-ver une attitude qui amène les employés à penser comme s’ils étaient eux-mêmes les fondateurs de l’entreprise. Cela les pousse à prendre plus d’initiatives, à avoir une tendance naturelle à l’action », explique la consultante. « Parallèlement, il faut mettre en place des indicateurs de succès clairs, qui permettent à vos collaborateurs de mesurer s’ils progressent vers la réalisation de la vision de l’entreprise, et mettre en avant des modèles inspirants et un storytelling qui permettent à chacun de comprendre et de faire sienne la vision de l’entreprise. » Une vision qui rejoint donc celle de Murielle Machiels, qui insiste elle aussi sur la confiance : « Lâcher prise, c’est apprendre à faire confiance à ses collaborateurs, y compris et avant tout quand les choses ne se passent pas comme prévu. Avoir confiance dans la capacité de chacun à rectifier le tir dans l’intérêt de l’entreprise, ne pas intervenir d’office, mais rester disponible pour apporter de l’aide si vos collaborateurs en font la demande ».

Bien communiquer à l’ère virtuelleCo-auteure d’un article publié récemment dans la Harvard Business Review et intitulé " How to Collaborate Effectively If Your Team Is Remote ", Erica Dhawan revient pour ING Entreprise sur quelques règles de base de la communication virtuelle.

Communiquer plusTrop souvent, l’e-mail et le chat d’équipe amènent les managers à se montrer brefs. Or, l’absence de langage corporel affaiblit déjà beaucoup la communication. Prendre du temps pour s’expliquer et s’assurer d’être bien compris est crucial.

Réduire la " distance d’affinité "La collaboration virtuelle implique trois sortes de distance : la distance physique (lieu et temps), la distance opérationnelle (taille de l’équipe, bande passante et connaissances) et la distance d’affinité (valeurs, confiance et interdépendance). C’est cette troisième distance que le manager doit réduire, par exemple en utilisant régulièrement la vidéoconférence pour créer de l’empathie. Il peut aussi créer des " rituels " à distance qui auront pour fonction de renforcer la cohésion de l’équipe.

Ajouter du contexteEn cas de difficulté ou de conflit, la première chose à faire est de passer à un mode de communication qui ajoute du contexte : un appel vocal ou vidéo permet, par la voix ou le langage corporel, d’aplanir les malentendus et les incompréhensions.

Privilégier les modes de communication à distance comme la voix ou l'image permet d'ajouter du contexte, et d'éviter ou de résoudre les conflits.

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