Imagerie des ampullomes vatériens : série de 15...

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IMAGERIE DES AMPULLOMES VATÉRIENS : SÉRIE DE 15 CAS R Saouab, Y. Lazguet, B Radouane, S Chaouir, T Amil, A Hanine, J. El fenni Service d’imagerie médicale-HMIMV RABAT En collaboration avec le service de Chirurgie viscérale (Pr Sair)

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IMAGERIE DES

AMPULLOMES VATÉRIENS :

SÉRIE DE 15 CAS

R Saouab, Y. Lazguet, B Radouane, S Chaouir, T Amil, A Hanine, J. El fenni

Service d’imagerie médicale-HMIMV RABAT

En collaboration avec le service de Chirurgie viscérale (Pr Sair)

INTRODUCTION

Les ampullomes vatériens = tumeurs bénignes ou souvent malignes

issues de la zone du carrefour digestif et biliopancréatique délimitée

par l'appareil sphinctérien d‘Oddi (les 2cm derniers de la jonction

bilio-pancréatique)

L’obstruction biliaire est précoce symptomatologie clinique riche

L’imagerie en coupe est d’un grand apport pour le diagnostic, le bilan

d’extension et la surveillance

Diagnostiqués à temps, le pronostic est meilleur que les cancers

pancréatiques

OBJECTIFS

Rapporter les aspects cliniques et épidémiologiques

des ampullomes vatériens dans notre série

Établir la place et les limites de chaque moyen

d’imagerie

Décrire les aspects en imagerie des ampullomes

vatériens

Discuter les diagnostics différentiels

MATERIELS ET METHODES

Etude rétrospective des dossiers d’ampullomes vatériens explorés dans notre

formation

Durant une période de 6 ans [janvier 2005 - décembre 2010].

L’imagerie reposait sur :

Échographie (n : 15)

TDM (n : 11)

IRM (n : 4)

Cholangiographie rétrograde endoscopique (n : 4).

RESULTATS

15 dossiers d’ampullomes vatériens sont repérés soit :

0,2% des hospitalisations dans le service de chirurgie viscérale

3,4% des cancers digestifs (8ème rang )

Age moyen : 68 ans [52ans- 89ans]

9H / 6F

RESULTATS

La clinique était dominée par l’ictère cholestatique

100%

46% 66,60%

40%

13% 26,60%

Ictère choléstatique

Troubles de transit

AEG

Douleurs abdominales

Fièvre

Melaena

RESULTATS

Imagerie

Échographie Tumeur ampullaire 1 cas 6,6%

Dilatation de la VBP et des VBIH (fig 1, 2) 11 cas 91%

Dilatation du Wirsung (fig3) 2 cas 16,6%

Hydrocholecyste (fig 4) 2 cas 16,6%

Lithiase vésiculaire 1 cas 8,3%

Fig 1 Fig 4 Fig 3

Fig 2

RESULTATS

Imagerie

TDM

La tumeur ampullaire a été évoquée dans 6 cas :

Processus hypodense bombant à travers la paroi duodénale : 4 patients (36,3%)

Obstacle de densité tissulaire du bas cholédoque : 2 patients (16,6%).

Envahissement pancréatique : 2 cas

Métastases ganglionnaires : 2 cas

Métastases viscérales : 1 patient

RE

SU

LT

AT

S

Cas n°1

TDM abdominale en coupe axiale (a) avec reconstruction frontale (b), C+ : processus

tissulaire de la papille duodénale, rehaussé de façon homogène, responsable d’une

dilatation de la VBEH

a.

b.

TDM abdominale en coupes axiales, C+ :

Dilatation des voies biliaires intra- et extra-hépatiques en amont d’un processus tissulaire

du bas cholédoque arrivant au contact de la paroi postérieure de D3

RE

SU

LT

AT

S

Cas n°2

Homme de 40 ans; ictère rétentionnel

TDM abdominale en coupes axiales, C- (a,c)/ C+(b, d) :

Masse tissulaire du bloc dudéno-pancréatique, se rehaussant de façon modérée après

injection du Pc et envahissant la tête du pancréas; il s’y associe à une légère dilatation

des voies biliaires (d).

ADK ampullaire peu différencié

RE

SU

LT

AT

S

Cas n°3

a. b.

c.

d.

1an après

Augmentation de la taille du processus ampullaire avec apparition de

métastases hépatiques

RE

SU

LT

AT

S

Cas n°3

Homme de62 ans; ictère rétentionnel

+ hémorragie digestive

TDM abdominale en coupes axiales, C- / C+ :

Volumineuse masse rehaussée après injection, bombant dans la lumière duodénale et

envahissant la jonction bilio-pancréatique (flèche) avec dilatation bicanalaire d’amont

(têtes de flèches)

RE

SU

LT

AT

S

Cas n°4

RESULTATS

Imagerie IRM La tumeur ampullaire a été évoquée dans 3 cas

T1 GADO

T2 Coronale

BILI

Dilatation de la VBP et des VBIH en amont d’un

épaississement circonférentiel avec sténose régulière du bas

cholédoque.

Le canal pancréatique principal est non dilaté

RESULTATS

Endoscopie Aspect normal de la papille 2 cas

Empreinte sur D2 2 cas

Aspect ulcéro-bourgeonnant 4 cas

Aspect bourgeonnant 2 cas

Aspect ulcéré 1 cas

Histologie Adénocarcinome dans tous les cas

DPC : 9 cas

(Duodénopancréatectomie céphalique)

Dérivation

chirurgicale : 5 cas

Dérivation par voie

endoscopique : 1 cas

Évolution •Décès : 2 cas (à J+5 et J+10) •Récidive tumorale : 1 cas (à 15 mois)

•Décès : 3 cas (à 5 mois, 6 mois et 9 mois)

•Décès à 4 mois

DISCUSSION

Rappel anatomique

1. La jonction choledoco-wirsungo-duodenale et

l'appareil sphinctérien d'oddi :

Siège : partie moyenne de D2 à la jonction des faces

postérieure et interne

Variantes : implantation basse, parfois au niveau de D3

La partie inférieure des canaux est entourée par le

sphincter d’Oddi

Ce bloc sphinctérien est situé au niveau d'une véritable

déhiscence de la paroi duodénale : la «fenêtre duodénale ».

La partie postérieure est faible fréquence de diverticule

à ce niveau

RadioGraphics 2002; Volume 22 ● Number 6

RAPPEL ANATOMIQUE

Le système terminal du canal

pancréatique est inférieur et ventral par

rapport à celui du cholédoque

Le mode d'abouchement des 2 canaux est

variable : canal commun (60%); en canon

de fusil au sommet de la papille (38%);

abouchement duodénal séparé des (2% )

1. La jonction choledoco-wirsungo-

duodenale et l'appareil sphinctérien

d'oddi :

Rappel anatomique

2. Le bloc duodéno-pancréatique :

Le Pancréas avec ses rapports (d'après L.

Testut, Anatomie humaine).

•A, pancréas, avec a, sa tête; B, duodénum;

C, jéjunum; D, vésicule biliaire;

•1, canal de Wirsung; 2, conduit

pancréatique accessoire; la flèche indique

son orifice en 2', sur la paroi postéro-

interne du duodénum; 3, ampoule de

Vater; 6, canal hépatique; 7, aorte; 8,

vaisseaux mésentériques supérieurs; 9,

tronc cœliaque avec ses 3 branches.

Épidémiologie

L'ampullome vatérien est une tumeur rare : 0,02 à 5% des tumeurs digestives

Pic d’âge entre 50 et 70 ans avec légère prédominance masculine

Facteurs prédisposant :

La polypose adénomateuse familiale (adénome ampullaire dans 50% des

cas)

Le syndrome de Gardner

La maladie de Van Recklinghausen

L’association à une lithiase biliaire est rencontrée dans 8 à 20% selon les

séries.

Anatomie pathologique

Les tumeurs de la région vatérienne peuvent se

développer à partir de l'ampoule elle-même ou à partir

de la muqueuse duodénale, pancréatique ou biliaire.

Macroscopie: 2 types de développement

Intra-duodénal (2/3 des cas): la tumeur peut être

végétante ou polypoïde (30%); sous-muqueuse (26%)

ou ulcérée

Intra-papillaire (1/3 des cas): strictement

localisée à l’ampoule de vater

Microscopie : les tumeurs ampullaires sont malignes

dans 95% des cas; dominées par les adénocarcinomes

Aspect bourgeonnant de la papille

à la fibroscopie réalisée chez un

malade de notre série.

Anatomie pathologique

T : Tumeur primitive

Tx Tm primaire ne pouvant être démontrée

Tis Tm intra-épithéliale ou chorion

T1 Tm limitée à l’ampoule de Vater ou au sphincter d’Oddi

T2 Tm envahissant la paroi duodénale

T3 Tm envahissant le pancréas sur 2 cm ou moins

T4 Tm envahissant le pancréas sur plus de 2 cm et/ou les organes adjacents

N: Extension ganglionnaire

Nx Ganglions lymphatiques régionaux non démontrés

N1 Absence de métastase dans les ganglions lymphatiques régionaux

N2 ganglions métastatiques régionaux : péri-pancréatiques, pyloriques, mésentériques proximaux,

cystiques, péricholédociens.

M: Métastases à distance

M1 Absence de métastase à distance

M2 Métastases hépatiques, péritonéales, ganglions lymphatiques de la queue du pancréas et/ou

spléniques.

•Classification TNM : UICC 2002

ANATOMIE PATHOLOGIQUE •Classification TNM : UICC 2002

T1

(a)

Tm limitée à l’ampoule de

Vater ou au sphincter d’Oddi

T2

(b)

Tm envahissant la paroi

duodénale

T3

(c)

Tm envahissant le pancréas sur 2

cm ou moins

T4

(d)

Tm envahissant le pancréas sur

plus de 2 cm et/ou les organes

adjacents

Clinique

L'ictère rétentionnel : c’ est le signe le plus fréquemment révélateur et le

plus souvent constant , retrouvé dans 70 à 80% des cas

L’hémorragie digestive : Sx très évocateur mais inconstant (6% des cas)

melaena, anémie

Autres : douleur abdominale, troubles de transit, AEG

Imagerie

Examen de première intention devant un ictère choléstatique

Intérêt :

Confirmer la dilatation des voies biliaires dans 100% des cas avec hydrocholecyste

Préciser le niveau d’obstacle dans 90% des cas

Visualiser la tumeur ampullaire dans 25% des cas surtout si la taille tumorale > 2 cm

Mettre en évidence les métastases hépatiques

Limites :

Les tumeurs < 2 cm

L’extension ganglionnaire

L’interposition gazeuse ou l’obésité +++

1. Échographie :

Imagerie

Technique :

Utilisation d’un transducteur à balayage rotatif de haute

fréquence.

Depuis quelques années, développement de

minis sondes de 2 mm de diamètre et de haute

fréquence (20MHz) Possibilité de

cathétérisme rétrograde des canaux biliaires

et pancréatiques et Distinction possible entre

le sphincter d’oddi et la sous muqueuse

duodénale

NB: le risque d’extension ganglionnaire étant

nul en cas de tumeur limitée au sphincter

Mini sonde intra canalaire

(1 : sphincter d oddi).

2. Échoendoscopie :

Imagerie

Intérêt :

La visualisation de la tumeur vatérienne dans 90 à 100% des cas

Sensibilité supérieure à celle des autres techniques d'imagerie pour l’évaluation de :

L’extension tumorale (T) : caractère malin si franchissement de la 4ème couche

hypoéchogène de la paroi duodénale (la musculeuse )

L’extension ganglionnaire (N) : précision diagnostic de 68 à 76% pour le stade N1

L’envahissement de l'axe veineux mésentérico-porte avec une sensibilité de 91% et une

spécificité de 97%

Indications :

Suspicion de pathologie ampullaire avec une FOGD et une imagerie en coupe non concluantes

Bilan d'extension préopératoire de tumeurs ampullaires prouvées choix de TRT (chirurgical

ou endoscopique)

2. Échoendoscopie :

Imagerie

Intérêt : Sensibilité de 85 à 90% en cas de dilatation biliaire et Spécificité de 90%.

Technique :

Acquisition hélicoïdale, coupes fines

Ingestion d’eau +++

Etude sans puis avec injection du PC en phase artérielle et portale (100cc avec débit de 3cc/sec).

Résultats :

Diagnostic positif :

Aspect turgescent de la papille ou processus hypodense hétérogène bombant dans la lumière duodénale

La dilatation des voies biliaires intra et extra-hépatiques associée à une dilatation du wirsung est très évocatrice

du diagnostic

Extension : au pancréas, ganglionnaire, hépatique ou péritonéale ou thrombose veineuse

3. TDM :

Imagerie

Intérêt : meilleure résolution en contraste et étude multi planaire

Technique :

Séquences morphologiques : acquisitions axiales en SpT1 et T1 FAT-SAT GADO,

acquisition coronale en Sp T2, de 4mm d’épaisseur

Séquence de diffusion et Séquence de Bili-IRM

Résultats :

L’IRM permet de visualiser la tumeur ampullaire dans 93% des cas :

Petite lésion polypoïde , iso ou hypo T1 et T2, faiblement ou modérément rehaussée

après injection faisant saillie dans la lumière duodénale

Parfois, une simple turgescence de la papille

Épaississement irrégulier de la jonction bilio-pancréatique

La bili-IRM apprécie la topographie et la longueur de l’obstacle. Un arrêt franc dit en

« culot d’obus » évoque le diagnostic.

4.IRM :

Imagerie

a. TOGD:

Images évocatrices :

La lacune tumeur en saillie dans la lumière

duodénale.

La classique image en epsilon (signe de Frosberg

ou en « 3 inversé« ) ulcération au sein d'une

prolifération tumorale.

Images peu spécifiques :

La sténose irrégulière du deuxième duodénum

faisant discuter le cancer duodénal ;

L'élargissement du cadre duodénal ;

L'impression post bulbaire d'une dilatation

cholédocienne

5. Autres :

Imagerie

5. Autres :

b. Cholangiographie rétrograde per endoscopique

(CRPE)

Elle permet :

D’objectiver une sténose ou une lacune ampullaire ou cholédocienne dans les

formes intra papillaires qui passent inaperçues à la duodénoscopie.

De compléter l'examen par une wirsungographie éventuelle.

Diagnostic différentiel

Causes néoplasiques :

Cancer de la tête du pancréas

Cholangiocarcinome du bas cholédoque

Cancer duodénal

Causes non néoplasiques :

Lithiase de la VBP ;

Obstacle parasitaire : kyste hydatique, ascaridiose ou distomatose.

Cholangite sclérosante ;

Pancréatite ;

Sténose inflammatoire de la voie biliaire.

Dysfonction du sphincter d’Oddi : environ 5% des patients suspects d’avoir une DSO ont

un ampullome ;

Diverticule juxta-ampullaire : favorise la lithiase et donc les erreurs diagnostiques.

Hypertrophie bénigne de la papille ; papille « forcée » après migration lithiasique

Diagnostic différentiel

1. Cancers péri-ampullaires:

a. Carcinome pancréatique :

Masse pancréatique : hypovasculaire, infiltrante

avec souvent une extension lymphatique.

La dilatation bicanalaire avec qq particularités:

Sx des 4 segments : visualisation des canaux bilio-

pancréatiques en amont et en aval de la tumeur

La dilatation des canaux pancréatiques secondaires

Diagnostic différentiel

1. Cancers péri-ampullaires:

b. Cholangiocarcinome :

Épaississement pariétal irrégulier du

cholédoque ou masse polypoïde intra

luminale

La partie distale du cholédoque est

souvent visible Signe de 3 segments

(les 2 segments du cholédoque +

wirsung non dilaté )

Diagnostic différentiel

1. Cancers péri-ampullaires:

c. Cancers duodénaux :

Tumeur rare

Elle peut être polypoïde, ulcérée ou

infiltrante

Envahissement ganglionnaire dans 22 à

71% des cas

La dilatation des canaux bilio-

pancréatiques est modérée ou absente

Diagnostic différentiel

2. Inflammation papillaire :

Causes multiples : passage de lithiases biliaires+++, cholangite, pancréatite aigue ou

d’origine infectieuse (parasitaire)

Aspect tuméfié de la papille avec rehaussement homogène

3. Tumeur intra ductale papillaire et mucineuse du pancréas (TIPMP):

Prolifération épithéliale papillaire, bénigne ou maligne, produisant de la mucine

dilatation canalaire

Pic d’âge de 60 ans avec nette prédominance masculine

Imagerie : grosse papille (>10 mm) avec dilatation multikystique des canaux

pancréatiques et nodules muraux

Diagnostic différentiel

4. Autres : kyste du cholédoque

Vue opératoire après duodénotomie d’un choledochocèle,

≠ l’ampullome vatérien

Affaissement du kyste du cholédoque après

dilatation de la papille.

(Iconographie du service de chirurgie viscérale I)

Traitement

Le traitement de choix reste l’exérèse

chirurgicale large type DPC (duodéno-

pancréatectomie céphalique) sauf si

contre-indication :

Envahissement vasculaire.

Métastases ganglionnaires à distance

(< 5%)

Métastases hépatiques (5-10%)

Carcinose péritonéale

Pièce de duodenopancretactomie cephalique.

(Iconographie du service de chirurgie viscerale I)

Traitement

Les autres méthodes :

L’ampullectomie endoscopique Tm ampullaires bénignes ou petites

Tm malignes n’envahissant pas la sous-muqueuse duodénale

La sphinctérotomie endoscopique méthode diagnostique,

thérapeutique préopératoire ou thérapeutique palliative

Drainage biliaire +/- des endoprothèses : Tm localement évoluées

Radio- chimiothérapie : TRT adjuvant après résection chirurgicale ou à

titre palliatif

Évolution et pronostic

Le pronostic reste meilleur par rapport aux autres cancers péri-

ampullaires.

Il est principalement lié à l’envahissement ganglionnaire.

Le pronostic est considérablement amélioré par Une attitude

thérapeutique précoce et bien réfléchie.

La survie moyenne à 5ans est directement liée au stade tumoral et

à l’envahissement ganglionnaire.

•L’ampullome vatérien est une tumeur rare, souvent maligne.

•Toujours y penser devant un ictère choléstatique + hémorragie digestive.

•L’échographie est l’examen de 1ère intention confirmer l’obstruction biliaire et

déterminer le niveau d’obstacle.

•La TDM, l’IRM avec Sq de Bili-IRM sont fondamentales pour le diagnostic et le

bilan d’extension.

•L’écho-endoscopie est d’un grand apport si l’imagerie en coupe est non concluante

CONCLUSION