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(e t) AVANT-PROPOS Nous n'avons pas l'intention d'écrire une histoire complète de l'abbaye de Luxeuil; nous ne nous proposons pas non plus d'étudier d'une façon nouvelle les origines de l'abbaye et sa fondation par saint Colomban: de nombreux ouvrages ont vu le jour, surtout en Allemagne et en Angleterre, consacrés au g r a nd Irlandais( , ). L'histoire des rapports de l'abbaye avec la papauté au moyen âge, l'administration municipale de lit de Luxeuil et les démêlés des bourgeois avec les abbés, la con- dition des ,nainmortahles dans la terre de Luxeuil sont égale- nient - des questions d'un grand intérêt qui mériteraient des études spéciales ci: que nous n'avons pas la prétention de traiter à fond dans ce petit livre. - En 1761, l'Académie des Sdiences, Belles-Lettres et Arts de Besançon mettait au concours le sujet suivant: « Dans quel temps les abbayes de Saint-Claude, de Luxeuil et de Lure jouirent-elles des droits régaliens et jusqu'où s'étendaient ces droits ? Le sujet, ainsi que l'a remarqué M. Dey ('), était certainement mal posé « Grammaticalement l'article des suppose que l'Aca- démie a entendu parler de tous les droits régaliens quelconques. Si telle a été sa pensée, on peut lui reprocher, d'une part, d'avoir réduit à l'état de question un fait admis par elle comme (i) Voir aussi la thèse de M. l'abbé Mal nory r Quid Luvov,ense, rnonac/,i ducepu li .Saueii columbani ad regulaon monasteriorum algue ad commuvem ecclesiac profeclum contulerint, Paris, 1894, in-80. (2) 5° Mémoire tour servir à l'histoire rie la ville de Luxeuil, dans les Mémoires de la comminiou 4'archéologie etc. de la haute-Saine, complément du t. 1\', Vesotil, 196 7,11 - $ Document 1111111! 11111 MII! 1101111 1H 0000005430710

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AVANT-PROPOS

Nous n'avons pas l'intention d'écrire une histoire complètede l'abbaye de Luxeuil; nous ne nous proposons pas non plusd'étudier d'une façon nouvelle les origines de l'abbaye et safondation par saint Colomban: de nombreux ouvrages ont vule jour, surtout en Allemagne et en Angleterre, consacrés aug rand Irlandais( ,). L'histoire des rapports de l'abbaye avec lapapauté au moyen âge, l'administration municipale de lit

de Luxeuil et les démêlés des bourgeois avec les abbés, la con-dition des ,nainmortahles dans la terre de Luxeuil sont égale-nient - des questions d'un grand intérêt qui mériteraient desétudes spéciales ci: que nous n'avons pas la prétention de traiterà fond dans ce petit livre.-

En 1761, l'Académie des Sdiences, Belles-Lettres et Arts deBesançon mettait au concours le sujet suivant: « Dans quel tempsles abbayes de Saint-Claude, de Luxeuil et de Lure jouirent-ellesdes droits régaliens et jusqu'où s'étendaient ces droits ?

Le sujet, ainsi que l'a remarqué M. Dey ('), était certainementmal posé « Grammaticalement l'article des suppose que l'Aca-démie a entendu parler de tous les droits régaliens quelconques.Si telle a été sa pensée, on peut lui reprocher, d'une part,d'avoir réduit à l'état de question un fait admis par elle comme

(i) Voir aussi la thèse de M. l'abbé Mal nory r Quid Luvov,ense, rnonac/,i ducepu li.Saueii columbani ad regulaon monasteriorum algue ad commuvem ecclesiac profeclumcontulerint, Paris, 1894, in-80.

(2) 5° Mémoire tour servir à l'histoire rie la ville de Luxeuil, dans les Mémoires de lacomminiou 4'archéologie etc. de la haute-Saine, complément du t. 1\', Vesotil, 1967,11 - $

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certain, et, d'autre part, d'avoir demandé jusqu'où s'étendaientles droits régaliens en général, c'est-à-dire la souveraineté elle-même, ce qui est une question du droit des gens et non unequestion d'histoire locale. Il flint sans doute, suivant l'intentionprésumée du programme, traduire la proposition de l'Académieen ces termes: « Quelle était l'étendue des droits régaliens dontont joui les abbayes de Saint-Claude, de Luxeuil et de Lure, etdans quel temps les ont-elles exercés ? »

Dom Berthod, dans une dissertation couronnée par l'Académie,chercha à faire triompher l'opinion des historiens les plus accré-dités de l'abbaye— dom Guillo et dom Grappin - et à prouverque les abbés de Luxeuil, ainsi que ceux de Saint-Claude et deLure, avaient possédé les régales de premier et de second ordre,qu'il définissait ainsi : c Les régales de premier ordre sont cellesdans lesquélles la majesté et la puissance du prince consistentprincipalement, telles par exemple que le pouvoir de faire deslois, le dernier ressort en justice, le droit de créer des magistrats etde faire la guerre, quelques-uns ajoutent encore le droit de leverdes impôts. - Les régales de second ordre consistent plus enémoluments qu'en autorité. Elles peuvent être séparées de lasouveraineté, parce qu'elles n'y , sont pas attachées essentielle-ment Q) »

Nous nous proposons de montrer, par l'exposé des faits eux-mêmes, de quelle puissance les abbés de Luxeuil ont joui dans lecours des siècles, depuis la fondation du monastère jusqu'à la finde l'ancien régime ; - comment la terre de Luxeuil, quasi sou-veraine endant la plus grande partie du moyen âge, fut ensuiteréunie au comté de Bourgogne, mais conserva jusqu'à la Révo-lution ses coutumes particulières et sa physionomie propre.

(i) Dissertation sur l'origine et l'étendue des droits régaliens clans les abbayes de Saint -Claude, de Luxeuil et del tire (1762), da ris [es Mémoires et documents inédits pour servirà l'histoire de le Franclte-Gomié, publiés par FAcadérnie de Besançon, t. Vit, p. 5Q. -

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CHAPITRE I

Les origines de l'abbaye.

La petite ville de Luxeuil ('), située sur le versant méridional desVosges, est très ancienne bien que son nom ne figure ni dans lesitinéraires romains, ni dans la carte de Peutinger, ni dans les écritsque l'antiquité nous a laissés, il est certain qu'elle existait antérieure-ment à la conquête des Gaules par Jules César. D'après une.inscrip-tion (2) trouvée le 23 juillet 17b5,-César aurait ordonné lui-nième laréparation des Thermes de Luxeuil.

Cette inscription, il est vrai, ne nous parait pas authentique, maisla découverte, au XVIII' siècle et à notre époque, de médailles consu-laires, de monnaies, de poteries, de statues, de tombeaux de pierre ('),

(I) Dans les chartes du moyen âge Luxeuil s'écrit indifféremment Lixoviun,,Luxoviuni. Lissoviuni, Lussedium, Losodium à partir du XV' siêcle, on trouveLixui, Lixel, Lisser], Lixeu, Luxeu, Luxeul in terminaison cuit est récente et nedate que de la seconde moitié du XVIII' siècle. Tous ces mots dérivent du radicalli ou lis, en celtique eau. Ci. Du Cange, Glosa,iun,, art. Lixe. - « Luxovium, id estlux ovizon . disaient les hagiographes du moyeu âge. Cf. Feria, Mouainenta Ger-manioc historiea. Scriptores, III, 220, ci XV. (376 (Chrouicon Luxo pieuse bre pe etEx pila S. Dsicoli).

(2) -LIXtJVII. T1-IERM.REPAR - LAI3IENVS

IVSS.C.IVL.CAES.IMI'.

L'authenticité de cette inscription, attaquée par de Caylus (Recueil d'anllquieés.III, 3134) et I3ourquelot (Mémoires de la Société des antiquaires de F,-ance, Xxvr.1-44), a été faiblement défendue parIYlM. Longchamp (Mémoires de là con,missio,,d'archéologie de la Haute-Saône, III, 37) et Dey (4' Mémoire pour servir à l'histoirede la p ille de Luxeuil). - D'autres inscriptions, qui paraissent moins suspectesque la précédente, nous apprennent que les Gaulois avaient divinisé les sourcesthermales de Luxeuil, les unes sous un nom correspondant à Lixovium, qu'aretenu la ville, les autres sous le nom de l3ricia.

(3) Cl. Delacroix. Eludes sur Luxeuil (Mémoires de la Société d'émulation duDoubs, 1838); Notice sur les fouilles faites cet et 1858 aux sources ferrugi-neuses de Luxeuil (ibid., 1062); Découverte dç léies sculptées en bois de cliéne portantau cou le torques celtique (Ibid., 1686); - de Fabert, Notice historique et descriptivesur divers ,nonu,,,euls antiques trouvés à Luxeuil eu 1845 tilecueil agronomique,industriel et scientifique, publié par la Société d'agriculture de la Haute-Saône,t. V); - l3oisselet, Les Collections numismatiques de Luxeuil (Annales franc-

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atteste d'une façon indiscutable que, pendant la période romaine,Luxeuil était une des plus importantes bourgades de la Séquanie.Détruite par les Fions au milieu du V' siècle, elle ne s'était pas relevéede ses ruines lorsque Agnoald, l'un des seigneurs de Burgondie,accueillit, vers 590, une colonie de moines irlandais conduite parColomban (').

Colomban s'établit d'abord à Annegray (5), puis â Luxeuil où, audire de son premier biographe, Jonas de Bobbio, il trouva « les ves-tiges d'une ville fortifiée avec beaucoup de soin, les ruines de bainsédifiés avec infiniment d'art, et au milieu , des bois qui avaient cru soi-ces décombres et que n'habitaient que des bêtes sauvages, de nom-breuses statues attestant l'ancienne splendeur de la ville détruite » (

3),

Le biographe de saint Germain .de Grandval assure que Colombans'installa dans les édifices mêmes élevés par les Gallo-Romains (').Toutefois, il ne faut pas prendre à la lettre une expression chère ànos hagiographes, et croire que la nouvelle abbaye se dressaau milieud'un véritable désert. La vallée 'du l3reuchin () n'était pas inhabitéeà la fin du VI' siècle, et Jonas nous raconte lui-mème que Colombany vit un prêtre, du nom de Winioc, qui avait fondé une paroisse dansles environs ('). DLI l'nOiflS il est certain que les compagnons de Co-lomban exécutèrent dans les forêts du pays des défrichements con-sidérables et mirent en culture beaucoup de terrains improductifs ('J.

Il n'entre pas dans notre plan d'exposer en détail les prescriptionsde la règle de saint Colomban il nous suffira de rappeler qu'elleétait très dure et châtiait les plus petites fautes des peines les plushumiliantes: elle prodiguait les coups de bâton et les châtiments

comtoises , juillet 1865) - ' Clerc, F,'auche_ro,nté à l'époque romaine. Besançon,

1853, 1 vol. in-8°, p' 127 et suiv.(1) Mabillon, Acta sa,Ictoru,', ordinis sancti Ijencdicti, 11, 5 (édit. de Paris) Pcrtz,

Script., LII, 220.(2) l'iarncau de la commune de la Voivre, canton de Faucogney (ldautc-SaOnC).

(3) VitaColuiibaili. Mabillon, Acta 55., 11, 13.

(4) 'frite s. Germa ni. Trou j Ilat, Monuments de l'ancien é séché de Bdlc, 1, 48.

(5) Le Breuchin, qui baigne Luxeuit, a une longueur de 4) kilomètres environil finit clans la Lanterne, affluent de la Saône.

() Mabillon, ActaSS,, il. 15.— Il s'agit pcut.tre de la paroisse etc Saint-Sau-veur, reconnue par arrêt du parlement de Besançon (du 29 mars 1692) comme,nère.église de Luxeuil.

(7) Cf. gigo t, Alérnoires sur l'état de la population et de la culture dans les Vosges

an corn,ne,mce,nellt du Vif' siècle (Annales de la Société d'émulation du départe-ment des Vosges, 4848). '.,.

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corpôrels et obligeait les religieux t donner chaque jour douze heureau travail des mains (9.

Cette vie austère et active des Colombanistes fit une grande impres-sion sur les habitants de la l3urgondie et de l'Austrasie, et les novicesse présentèrent en foule, à ce point que Colomban dut bâtir unnouveau monastère à Fontaine (2),

Une foule pieuse, qui accourait souvent de fort loin, assiégeaitpresque continuellement les portes des trois monastères colomba-nistes et venait se recommander aux prières de leur fondateur. Aunombre de ces suppliants la légende mentionne un certain Waldalènequi gouvernait avec le titre de duc une partie de la Burgondie. Ceseigneur avait épousé une gallo-romaine nommée Flavia, dont iln'avait pas d'enfants mais ayant obtenu de Dieu, par l'intercessionde Colomban, deux fils, dont l'un, appelé Donatus, devint fliétropo-litain de Besançon, il céda au monastère de Luxeuil d'immensesdomaines.

Le roi d'Austrasie, Childebert, émerveillé, comme ses sujets, desspectacles qu'offraient les communautés colombanistes, combla dedons les abbayes ('). Brunehaut, et son petit-fils Thierry, auraienttenu la même conduite que Childebert, si Colomban avait ccnscnti âfermer les yeux sur tes désordres de la cour de Bourgogne, désordresautorisés et provoqués par la vieille reine. On sait comment, vingtans après son arrivée dans les Vosges, le grand apôtre fut arrachéaux siens par ordre de Thierry il se retira d'abord en Neustrie,puis en Austrasie, où il fut bien accueilli par le roi Théodebert il serendit ensuite dans l'Helvétie orientale, et, après un séjour peu pro-longé à Bregenz, alla en Italie fonderie monastère de 13obbio (1).

Mais l'oeuvre de Colomban ne devait pas disparaitre avec lui, et lemonastère de Luxeuil joua un rôle important dans ta période d'igno-rance et d'anarchie qui signale le règne des derniers Mérovingiens.Eustaise, successeur de Colomban, secondé par Walaric, l'un de sesdisciples, changea les dispositions de Thierry à l'égard du cnônas-tère, et obtint même la restitution des domaines que le roi avait ad-

(I) Mabillon, Annales ordinis S. fle',edicti. t. E, P. 212 et suiv. ; fligot, Histoire duroyau;;le d'A ustrasie, 1\',33-39 et 309. 312; de Montalenihert, Les Moines d'Occident,t. 1 1, p. i47 et suiv.

(2) Fontaine-les-Luxeuil, canton de Saint-Loup (Haute-Saône).(3) l'ita S•Salabei'gae. Acta £5.. lE, 423.(4) Cf. de Montalembert. t. JE, p. rso et suiv. ; Digot, histoire du royaume

d'Austrasie, t. 1F, p. 134, 1313 et suiv. Colomban mourut aie del3obbio, en 615.

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jugés au fisc ('). Des biens considérables furent en outre donnés aumonastère par de nouveaux disciples, et particulièrement par Roma-rie, fils de 'un des seigneurs les plus riches et les plus puissantsd'Austrasie Romaric ne se réserva qu'une seule terre, qu'il destinaità quelque bonne oeuvre, et où Eustaise lui -permit de fonder un

monastère (2)Sous te gouvernement de Valbert, troisième abbé, le monastère 'de

Luxeuil arriva au plus haut point de gloire et de puissance qu'il aitjamais atteint. Bien qu'il fât lui-mème peu versé dans les lettres, etqu'il eût été dans sa jeunesse destiné au métier des armes, Valbertsongea surtout à agrandir la renommée littéraire de Luxeuit afin

• que les moines pussent peu à peu abandonner les travaux de la terrepour ceux de l'esprit, la règle de saint Colomban fut remplacée parcelle de saint Benoît.

Au milieu du VII? siècle, l'abbaye de Luxeuil comptait six centsreligieux (8) elle passait avec raison pour l'une des plus riches et desplus célèbres de la Gaule mérovingienne. Dé nombreux monastèress élevèrent sous les auspices de Valbert citons entre autres celui queSalaberge fonda d'abord à Langres, puis, comme cette ville était tropexposée aux malheurs des guerres, à Laon, et celui de Grandval, dansle diocèse de Bâte (4)'Sous l'abbatiat d'lngofroy, le cloître de Luxeuil servit de prison à

deux hommes d'Etat célèbres, Ebroïn, maire du palais de Neustrie,et Léger, évêque d'Autun, son rival.

A cette époque, bien des monastères eurent à souffrir des guerresqui désolaient l'empire mérovingien celui de Luxeuil, au contraire,vit ses richesses s'accroître grâce aux libéralités de Bathilde — épousede Clovis II - et de son fils Clotaire III

Mais le temps était proché où il allait avoir Li supporter de grandesépreuves. Après la mort du maire du palais, Pépin, dit de Héristal,

(t) Vita S. Walarici, abbatis Leuconaô'tSis. Mabillon, Acta .SS., II, 80 Chronico'tluxoi'ieuse breve, Pcrtz, iii, 220 ; de Nontalembert, 11, 563 et p. suiV.

(2) 11 s'agit du monasthre fondé en 620 par saint Ron,aric à Jjabendi.Castruifl

(aujourd'hui te,nirernoflt). Cf. Vila S. Eustasii, Mabillon, Acta SS. Il, 121 ; Vite

S. Roniariei inserpolata, ibid., lE, 417; D. Calmet, Histo,re de Lorraine, 1,3913; de

Montalembert, 11, 2.640 et suiv.(3) D. Bouquet, Recueil des historiens des Gaules et de la Frauce. IX, 124; Pertz,

S5., 111, 220. - Cf. AbbèClere, Un souvenir ou ('ennitaqe desaint_l'albert, Luxeufl

et Besançon, 1850, in .8' ; Vie dc Sai,,t_Valbert, troisième abbé de Luxeuil, Paris,

iaa, in-8'.(4) Vila S. Salabergae, Mabillon, 11, 425 ; de Montalembert, t. 11, P. 579 et suiv.Q5) D. Bouquet, 111,573; }Jauréau, Gotha Christiana, XV, 146.

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-5-la Bourgogne refusa d'obéir à son fils Charles le Martel, et, abîméedans l'anarchie; démembrée entre un grand nombre de chefs clercs etlaïques, elle fut incapable d'arrêter les musulmans qui, venus d'Es-pagne, remontèrent Ja vallée du Rhône, enlevèrent et saccagèrentAutun, et pénétrèrent jusqu'aux Vosges pour aller piller Luxeuil(731).L'abbé Mellin et la plupart de ses religieux furent mis à mortl'abbaye resta quinze ans sans abbé ) -

Pépin le Bref permit aux moines échappés au fer des Sarrasins dereconstruire l'abbaye et leur fit rendre les terres dont quelques sei-gneurs voisins s'étaient emparés; Charlemagne continua à l'abbayela protection de Pépin et lui fit don de biens et d'immunités toute-fois, la charte connue dans l'histoire de l'abbaye sous le nom dediplôme de Charlemagne, et dont l'abbaye s'est maintes fois prévalue,est une pièce apocryphe ('). Pour s'en convaincre, il suffit d'observerqu'elle , mentionne l'usurpation de Hugues le Noir( ') — qui est ducommencement du X' siècle — et qu'elle parle des invasions desNormands qui n'eurent lieu dans le bassin de la Saône qu'à la fin du1X0 siècle. De plus, les dates essentielles sont mal concertées et nerépondent point à l'année-815 Charlemagne était mort dès l'annéeprécédente k pape Etienne V ne monta qu'en 816 sur la chaire pon-tificale et Anségise ne devint abbé de Luxeuil qu'en 817. Cette piècefut sans doute écrite à la fin du X e siècle dans le but de suppléer àquelque charte originale perdue dans un désastre. Peut-être aussil'auteur, à une époque où l'abbaye avait à souffrir des violencesdes seigneurs voisins, voulut toucher le coeur des coupableset les ramener à leurs devoirs en mettant sous leurs seux,une preuvemanifeste de la protection que lui avait accordée le grand empereurd'Occident (4),

On ne peut douter en effet que Charlemagne n'ait été l'un desbienfaiteurs de l'abbaye ses donations sont rappelées dans d'autresdiplômes authentiques, et particulièrement dans celui de l'empereurHenri V (5), On croit même que Charlemagne confia à plusieurs abbés

(t) D. Bouquet, lii, 701 Mabillon, Annales, 11, 89,' Epoques concernant l'abhaïede Luxeu, Archives de la Haute-Saône, l-F. 690.

(2j Cette pièce est à la Bibliothèque nationale (Collection Moreau, 1369) et h laBibliothèque publique de Besançon Cartulaire de l'abbaye de Luxeuil. fo]. 87-91).

(3) Le diplôme le désigne ainsi quidamsz perversus Ilugo Chapes. Sur Hugites leNoir, voir p. 7, note 5.

(4) CI. Berthod, Dissert., p' 60 Dey, 5e Mémoire pour servir â l'histoire de laville de Luxeuil Finot, Les Sires de Faucogney, p' 17 Sickel, Regesicu der Ur-hunden der ersten Kai'oli;mger, Wien. 1867, Il, 419.

(5) Ce diplôme est analysé plus loin, p. 14,

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de Luxeuil des missions importantes André fut, dit-on, député it

Rome pour annoncer au pape la conversion de Witikind (1) ;le suc-cesseur d'André, Doctoo, auraitété chargé de juger un différend quis'était élevé entre l'abbé de Saint-Glande et l'évêque de Besançon.

Louis le Débonnaire fut également plein de sollicitude pourl'abbaye de Luxeuil; il plaça à sa tête, la quatrième année de son règne,le célèbre Anségise (2), à qui la faveur impériale avait valu, du vivantde Charlemagne, l'intendance des bâtiments impériaux et l'abbaye deSt-Germer. Anségise mourut en 834, et donna par testament ses biensaux abbayes, particulièrement i celle de Luxeuil (').-

Anségise est le premier abbé choisi par l'empereur; jusque-là lesmoines avaient élu leurs chefs (l), Drogon (5), l'un des successeursd'Ànsègise, était fils naturel de Charlemagne; en même temps évêquede Metz, il avait pour le monastère de Luxeuil une affection touteparticulière grâce à sa bonne administration et à sa générosité, lesbiens de l'abbaye s'élevèrent à quinze mille mcix (e).

Les richesses du monastère excitèrent alors la cupidité d'Hubert,fils de Boson, comte de Bourgogne. Hubert se croyait tout permis àcause du mariage de sa soeur Teutberge avec Lothaire 11 qui, depuisla mort de son père, l'empereur Lothaire, régnait sur la Lorraine etla Bourgogne ; quoique prêtre, il ne marchait qu'entouré de gens demauvaise vie et de femmes perdues, et ne respectait point la saintetédu cloître où il entra avec une pareille suite. Le pape .Benoît iII lecita à comparaître à Borne devant lui dans le délai de trente jours ();on ne sait si le pape fut obéi, mais Hubert quitta Luxeuil, sans doute

-(1) Gaula C/i rLqlaiza, X V, •1.51.(2) Clzrouicou Luxorieuse bren Pertz. III, 221.(3) Anségise devint abbé de F'ontenellc en 823, à la mort d'Eginhard. Adson

semble assurer qu'il mourut à Luxeuil, mais il faut plutôt en croire la chroniquede Fontenelle, dont l'auteur était contemporain d'Anségisc, laquelle le fait mourirà Fontenelle. Cf. E). Bouquet, Vi, 177, 234, 369; D. Grappin, Jlfstoire de l'abbayeroyale de Luxe,, tManuscrit de la Bibliothèque de Besançon), liv. 111, eh. 10. -Anségise chargea Madaluiphe de Cambrai de décorer les réfectoires et les dor-toirs des abbayes de Luxeuil et de Saint-Germain-dc-Flaix. Lenoir, Architecturemonastique, Paris, 11356, Il, 352 et 360.

(1) I). Grappin, liv. III, ch. 10.(5) D. Cal,net, Histoire de Lorraine (édition de 1728), I, 1362; Histoire générale de

3fetç par des Religieux bénédictins ; J, 5139 et P. suiv. - D'après la légende, l)ro-gon se noya en poursuivant dans PO-non un poisson monstrueux.

(6) Mcix ou "anse, terme d'ancienne coutume désignant 'habitation d'un culti-vateur et la terje nécessaire pour le faire vivre.

(7) D. Bouquet, VI, 364; Mabillon, Annales, III, 52; JalTé, Re.-esta pontiticumRo,,,anoru,n, éd. Lcewenfeld, 1, 340 (no 2666).

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lorsqu'il vit qu'il ne pouvait plus comptef sur la protection deLothaire. Celui-ci en effet ne tarda pas t répudier Teutberge et à obéit-aux caprices de sa maîtresse Vaidrade, qui chassa de l'abbaye deLure les religieux pour y tenir elle-même une cour scandaleuse.

A la mort de Lothaire II, le roi de Fiance, Charles de Chauve, mitla main sur le royaume de Lorraine, au préjudice de l'empereurLouis II, frère du défunt. Charles fut contraint toutefois d'en retro-céder un morceau à son propre frère, Louis le Germanique la Bour-gogne tomba presque tout entière dans la part de ce dernier; il n'enfut distrait, au profit de Charles le Chauve, que le territoire de Besan-çon et l'abbaye de Saint- Claude (870). lJabbaye de Luxeuil est com-prise nominativement dans ce partage, au nombre des cités et desabbayes entrées dans le lot de Louis (1).

A la fin du 1X 0 siècle, de nouveaux malheurs fondent sur l'abbaye.Les Normands la pillent et cherchent à l'incendier ; les reiigieiix sedispersent, et l'abbé Gibard, qui avait pu prendre b fuite, est atteintet percé de flèches près de Martinvelle ('. Du moins les bâtiments dumonastère subsistèrent dans leur entier malgré les tentatives desbarbares, et le petit nombre de moines qui avaient évité la persécu-tion vinrent y reprendre place quand ils n'eurent plus rien â craindre,et vécurent quelque temps sans abbé.

Les seigneurs du voisinage profitèrent des malheurs de l'abbayepour s'agrandir é ses dépens ; presque toutes s'es terres furent enva-hies, sans que personne parût s'y opposer. L'abba ye de Luxeiiit étaitalors de si peu d'importance que le roi deGermanie Arnoul, qui venaitde disputer victorieusement le nord de la Bourgogne à Rodolphede Stratiingen, la donna à l'église de Metz pour dédommager celle--cide la perte de l'abbaye de Saint-Sauveur (') cédée à l'archevêque deSalzbourg (29 mai 891) (4).

Un usurpateur puissant rendit vaines toutes les mesures que l'évê-que de Metz aurait pu prendre pour relever l'abbaye de Luxeuil:HugLies (5) le Noir, qui est appelé dans les documents contemporains

(t) Annales liertiniani, I). Bouquet, VII, 109; Hincniari RC,nen.çis Annales, Pcrlz.1,188:

(2) Canton de Monthureux-sur-Saône (Vosges).3) Près du lac Chiem (Bavière).(4) D. Grappin, iii, 19 Mabillon. Annales, III, 979 D. Calmet, J. 821.(t» Rogues le Noir, duc et comte de Bourgogne dans la première moitié du )'

siecli. était fils de Richard le Justicier, il fit iQeonnaitti. ',on autorité clins toute

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« archicotnes » ou « gloriosus cornes » - l'un des neveux de Rodol-phe de Stratlingen - envahit les terres de Luxeuil, y édifia deschâteaux et se mit en possession d'autres déjà construits. L'abbayeétait presque déserte ; le cloître silencieux ne 'rententissait plus dubruit des psaumes et des prières.

On ne peut dire à quelle date elle fut rendue â ses membres. Eudes,le premier abbé que la chronique mentionne après le ravage desNormands, fit de grands efforts pour rentrer dans les possessionsancienns de 'abbaye, mais ses tentatives n'eurent pas grand succès (D.En 948, Luxeuil n'avait encore que seize religieux ; à cette époquel'abbé Guy 1cr fit un échange avec ymard, abbé de Cluny, deF biensque l'abbaye possédait dans le Mâconnais (2). Puis Aalongue, succes-seur de Guy, se servit habilement du prestige que le nom de Valbertavait conservé dans toute la Gaule pour recouvrer les domainesusurpés; il fit conduire en pompeux appareil le corps du grand sainten Picardie, et ce pieux stratagème lui permit de rentrer en posses-sion d'Herly (s). De nouvelles processions à Provenchéres (i), a Héri-court, et à Montbéliard eurent le même résultat.

Adson, qui nous raconte ces fai t s( , ) , fut lui-même moine de Luxeuil

à la fin du Xc siècle; il s'était acquis dans les lettres (6) une réputationtelle que Gauzelin, évêque de Toul, qui désirait faire revivre le goûtdes études dans son diocése, l'appela pour avoir soin des écoles de sa'ville épiscopale, qui se tenaient alors dans l'abbaye de Saint-Epvre,prés de Toul. En récompense de ses services Gauzelin lui donnal'abbaye de Montiérender (q).

- L'école de Luxeuil, pour quelque temps du moins, allait reluire deson ancienne splendeur; elle fut dirigée, sous l'abbatial: de Milon,

la Bourgogne, tellement que Flodoard l'appelle 14ugo Cisalpinus e; il mouruten 95e. I). Bouquet, Viii, 194; Gollut, Mémoires historiques de la République Sé-quanoise, éci-Duvernay, p. 1788 Castan, La Franche-Comté, P. 33; Finot, Les Sires

de Faucogney. p. 27 et 28.(]) 1). Grappin, 111, 21 et 22.(2) Archives de la Haute-Saône, M. 090; Gallia Christiaiza, XV, 152,

(3) Arrondissement de Montreuil (Pus.de.Calais).(4) Provenchèrcs.les-Darfley (Vosges).(15) D. Bouquet, IX, 124.(6) Sur les ouvrages d'Adson, voir Histoire littéraire de la France, L. VI, p. 477

'et suiv.(7) Histoire de Afclç, 1, 597 ; Gaula christiana, XV, 152.

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par le moine Constance que Gudin, son disciple, célèbre dans l'élégiesuivante:

PlangitOriens et Auster, Occidens et AquiloPlangunt urbes et castella pro pio Constantio;Instat passim cenobitis flebilis comliasslo.Moeret plebs Luxoviensis lacrymis continuis,Plangit Mua pius abbas planctibus piissimis (1).

(I) D. Bouquet, X., 323; Cartulaire de Lveuil, 113. - Ce Constance, écolâtrede Luxeuil, mourut en 1014 ou en 1022 ;on lui attribue le de 'zatu:-isliq!idorum. Cf.Histoire littéraire de la France, VU. f° lxxxiij ; Suchet, Les Pofles latins à Lnxeuidu Vie au X siècle (Académie des sciences, belles-lettres et arts de Besançon.année I886.

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CHAPITRE II

Rapports des abbés avec les papes et lesempereurs.

Presque depuis sa fondation, l'abbaye de Ldxcuil ne reconnaissaitd'autre juridiction spirituelle que celle du souverain pontife : nulévêque ne pouvait franchir l'enclos du monastère, s'il ny était pasmandè: aussitôt son ministère accompli, il était obligé de se retirersans rien réclamer. Au Vil- siècle, au moment où écrivait Marcuif ('),les privilèges de l'abbaye de Luxeuil étaient déjà des modèles surlesquels on calquait les actes semblables faits en faveur d'autresmonastères (').

On u tout lieu de reporter la date rie ces privilèges vers 'an 640,et de les attribuer à une bulle du pape Jean IV. On a mis en doute (')il est vrai, l'aQthenticilè de cette bulle dont Mabillon dit avoir décou-vert un fragment dans les archives du monastère de Montièrender (i):mais en admettant même q[i'elle ait été inventée de toutes piècespar les moines, - de même que la bulle (5, jugée également fausse,par laquelle 1e pape Benoît VIII aurait renouvelé les privilèges dumonastère de Saint-Pierre-de-Luxeuil, - il nous parait impossiblede prétendre que l'abbaye ne jouit pas de bonne heure de faveursconsidérables: il faudrait pour cela nier le témoignage si clair deMarculf. D'ailleurs on sait que ces mêmes papes, Jean IV et BenoîtVIII, ont accordé des immunités à bien d'autres abbayes (t) moins

(I) Cf. [, lister, Noie sur iefonnulaire de illaicztlf(Revue historique, 1892, t. L, p. 43).

(2) Marcuifi monachi fonniclae, D. Bouquet, J V, 467 - Pfister, Les légendes do

saint Dié et de saint iliduiphe (Annales de l'Est, 18h9, P. 3901.(3i Jaffé, J, 228 ( nob).(4) Annales, T, 689.— Voir aussi Pardessus. Diplomata, 11,67; de Montalejubert,

II, 576; GaIlia christihua, XV (J,,st'unenta, p. I et suiv.).

(5) Jaffé, 1, 510 (n' 4023). - Voir sur cette bulle Mabillon, Annales, 1V, 2u6;Galba christiana, XV, 152.

(6) Benoît Villa confirmé les privilèges des abbayes dc Saint-Bènigne de Dijon,de Saint.Sauvcur-en-Ptiisaye (Yonne), de 5aint_13cnoit-sir-Loir (Loiret), rie Saint-Hilaire (Aude), de Saint-Savin (Vienne), de $aint-W'aast d'Arras, etc. - .laffé, I,

50€, 510, ,(o, 514.

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célèbres que celle de Luxeuil. Enfin les deux bulles en question ontété conservées dans les papiers et les cartulaires ( 1) de l'abbaye, àcôté de pièces dont personne jusqu'ici n'a suspecté l'authenticité.

Le 18 novembre 1049, le pape Léon IX accordait des lettres deprotection et d'immunité à l'abbé de Luxeuil, et défendait même âtout seigneur laïque d'arrèter, à une demi-journée de Luxeuil, lespersonnes ou lus choses appartenant ô l'abbaye (')

Plus tard, le pape Honorius Il intervenait dans une discussionentre l'abba ye de Luxeuil et celle de Saint—Bénigne de Dijon au sujetdes prieurés de Vignory, de Clermont et de Serqueux (') occupésinjustement, disaient les religieux de Luxeuil, par les moines deSaint-Bénigne ('). Le pape délégua, pour examiner J'affaire, Etienne,archevêque de Vienne, et quelques autres ecclésiastiques. La sentencerendit à Luxeuil Clermont, et h Saint' Bénigne le prieuré de Vignoryil n'était point parlé de Serqueux que Saint-Bénigne conserva (1)

Saint Bernard, abbé de Clairvaux, était intervenu en faveur deSaint-Bénigne et avait écrit trois lettres à Rome contre l'abbaye deLuxeuil, - l'une au pape Honorius (t). Mais ces lettres n'eurent pasplus d'effet que celles que Pierre le Vénérable, abbé de Cluny,adressa un peu plus tard à Innocent il: Pierre voulait obliger lesreligieux de Luxeuil à prendre Li Cluny leur abbé et les officiers dumonastère, comptai5t ainsi placer un jour l'abbaye de Luxeuil soussa dépendance il obtint d'abord que plusieurs moines de Clunyfussent reçus à Luxeuil, mais, Li la mort de l'abbé Hugues, les reli-gieux de .Luxeuil élurent un des leurs, Joceran. Pierre, déçu dans sesespérances, dépeignit sous les couleurs les plus sombres le monastèrefondé pàr saint Colomban(')- Mais innocent 11 n'interposa pas sonautorité, et nous le voyons même, quelques années après, prendresous sa protection l'abbaye de Luxeuil et confirmer ses biens et sesprivilèges (8)

(I) Ca,'lu)aire de l'abba ye de L,exeail, Col, 101 et 109; Bibliothèque nationale,collection Moreau, 869. fol. 323 et 329.

(2) Jafi'é, 1, 53Z (n' 11202) Clerc, Essai sur l'histoire de la Franche-Conté, 1, 279;GaiNa christiana, XV, 152.

(3) Vignory et Serqucux, communes du département de la Haute-Marne,(4) Cf. Péra,'d, Recueil de plusieurs pièces cu"ieuses servant â l'histoire d. Bou"gogue.

Paris, 1664, in-fol", p. 224.(5) D. Grappin, III, M.(6) B. Bouquet, XV. 266, b@i; Mabillon. Annales VI, 141.(7) Ibid., VI, 272; Gallia cliristiana, XV, 153.(8)2! novembre 1136. ioceran était alors abbé de Luxcuil. - Gaula christianq,

XV inslr,, P. 80; Jaffé, I, 872 (no 7797j,

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Sous les sucéesseurs d'innocent la protection pontificale ne fit pasdéfaut à l'abbaye. Le pape Eugène 111 renouvela (1), en 1147, la bulled'Innocent, et intervinten faveur de l'abbé Gérard III dans les démêlésque celui-ci eut avec les moines de Fontaine (2), .Alexandre III con-damna le prieur de Monthureux, relevant de Luxeuil, à s'acquittercomme par le passé de ses redevances envers l'abbaye (').

Les abbés de Luxeuil conservèrent longtemps leurs privilègesspirituels et ne reconnurent que le pape pour leur supérieur; au XIV,et au XV e siècle nous voyons encore les archevêques de Besançon,lorsqu'ils venaient au monastère ppurycélébrer la messe ou poury con-férer les ordres, déclarer avant tout qu'ils avaient le consentement ab-solu de l'abbé. Cette déclaration fut faite pa l'archevêque Vitalis (1326et 1328), par Jean III de Vienne (1357), par Gécard Il d'Athies (1405).par Thiébaud de Rougemont (1408); en 1452, l'abbé Jouffroy lexigeade Quentin Flavigny qui consacra dans l'église abbatiale de Luxeuil

LÀJeanne de Cbauvirey, abbesse de Remiremont (1.La condition temporelle de l'abbaye de Luxeuil n'était guère moins

privilégiée que sa condition spirituelle c'était une abbaye royale. Onse rappelle que les Carolingiens disposèrent d'elle comme d'un fietet ne reconnurent pas aux moines le droit d'élection. Mais, malgrétout, c'était un grand avantage de n'avoir d'autre seigneur que le roi.Les abbayes royales recevaient, de préférence aux autres, le privilègede l'immunité (») qui interdisait aux fonctionnaires de l'Etat de pénétrersur leur territoire, d'y lever des impôts, d'y rendre la justice; ce qui,par une conséquence logique, leur livrait ces impôts et ce droit dejustice, l'autorité du souverain étant seule réservée. Elles jouissaientaussi, par cela même qu'elles dépendaient directement du roi, d'unautre privilège elles étaient placées sous le mundeburdiu;n-du prince(').

(1) Jaffé, 11,48 (n-9142).- -(2) Cette bulle est datée de Lausanne, le 16 mai 1148. Gallia christiana. XV, 154

Archives de la Haute-Saône, H. 690. -. Les moines de Fontaine ne refusaientpas l'obéissance à l'abbé de Luxeuil, mais ils prétendaient avoir le droit de choisireux-mêmes leur prieur.

(3 GaUla Christiana, XV, 154 Archives de la Haute-Saône, H. 690.(4) Archives de la Haute-Saône, H, 690; Bibliothèque nationale, collection I'lo-

reau, 8439, fol. 366, 367, 3139, 375, 376, 396--() Cf. Fustel de Coulanges, Les origines du systè m e feodal, eh. XVI.-(8) « Est-ce la mainhour qui a entraîné limmunité? Est-ce l'immunité qui a

entraîné la mainbour ? On ne saurait dire laquelle a précédé et a provoquél'autre. Ce qui est certain, c'est qu'elles sont à peu près inséparables. La main.tour royale soustrait la personne du concessionnaire à l'autorité des agentsroyaux. Limmunité soustrait les terres du concessionnaire à l'autorité rie cesmêmes agents...» Fustel de Coulanges, Ibid., p. 404.

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Clovis et ses fils ont accordé quelques diplômes d'immunité: Dago-bert et ses successeurs en donnèrent un plus grand nombre ). L'ab-.baye de Luxeuil dut avoir de bonne heure une charte de ce genreà quelle époque ? Nous l'ignorons. Mais nul doute que si elle ne lapossédait pas encore à l'avènement de Dagobert, saint Eloi - qui vintsouvent h Luxeuil et affectionnait ce monastère - dut ne rien négli-ger pour la lui faire obtenir.

C'est grâce à l'immunité que l'abbé de Luxeuil va devenir au moyenâge un petit souverain. On a même prétendu qu'il l'était déjà sousles rois de la première et de la seconde race, et que, dès l'époquemérovingienne, il jouissait du droit régalien de battre monnaie (2).Mais d'abord il n'est pas démontré que ce droit lui ait appartenudeux petites pièces d'or trouvées l'une ii Riez (3), l'autre à Luxeuil (4),paraissent être plutôt des médailles que des pièces de monnaie ellesauraient pu d'ailleurs être frappées à Luxeuil par les ateliers moné-taires qui longtemps suivirent les rois francs dans leurs voyages (r).L'abbaye eût-elle battu monnaie, il ne s'en suivrait nullement qu'elleeût été indépendante, le droit de battre monnaie ne constituant pas àlui seul la souveraineté.

Au X' et au XI e siècle, ni les ducs de Lorraine ni les princes de lamaison de Bourgogne ne réussirent à étendre leur domination surl'abbaye, qui ne reconnut, du moins à partir du règne d'Othon leGrand, que la souveraineté des empereurs (e).

On sait d'ailleurs qu'en 1032 toute la Bourgogne fut incorporée àl'empire germanique, en vertu du testament de Rodolphe III, der-nier roi d'Arles (7), Toutefois la domination imposée aux terresbourguignonnes fut des plus indirectes et les empereurs accor-dèrent surtout aux églises et aux abbayes, avec une libéralité éton-

(1) Ibid., p. 342 et suiv.(2) D. Grappin, Histoire de l'abbaye de Luxcu, clisc. pré!, f' 5D. J3erthod,

Dissert. (loc, cit.), p' 10 Clerc, Essai sur l'histoire de la Franche-Comté, 1, 150.(3) Chef-lieu de canton (Haute-Saône).(4) Calmet (Histoire de Lorraine, 2' édition, t. VIF. p. lxxvi j). décrit ainsi la pièce

de monnaie trouvée à Luxcuil ' Elle représente d'un côté une espèce de caliceà deux anses et une croix au-dessus avec cette inscription Lossovio ; les deux Ssont renversées et formées ainsi , et les O sont cariés sur le revers est unetour surmontée d'une croix avec ces mots fifoiiasterio après la syllabe Âio,ta, ilest écrit A A plus gros que les autres lettres, ce qui désigne apparemment lapremière lettre du nom du Monétaire

(J Ou encore pendant un séjour de saint Eloi à Luxeuil. Clerc, Essai sur l'his-toire de la Franche-Comté, t, 1.51,

(6) Castan, La Franche-Comté et le Pays de Moulbéliard, p. &3.(7) Ibid., p' W. -

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nante, des chartes et des privilèges. En 1123, l'abbé de Luxeuil,Hugues. obtint de Henri V, son parent, la confirmation de tous lesdroits et franchises dont l'abbaye avait joui jusqu'alors l'empereurdéfendait toutes sortes d'impositions sur les terres qui appartenaientau monastère, et dispensait de tout péage ceux qui voyageaient pourl'abbaye, leur donnant libre entrée dans les villes, châteaux et ports,pour y acheter ou pour y vendre (D

A la fin du XTP siècle, l'empereur Henri VI, venant d'Alsace et serendant â Besançon, s'arrêta à Luxeuil (2), Si l'abbaye n'obtint pasune nouvelle charte, c'est qu'elle ne la sollicita pas, sère quelle étaitque la protection impériale suffisait à calmer la convoitise des sei-gneurs du voisinage, tout disposés à empiéter sur ses terres et surses droits. Malheureusement la mort de Henri VI (1197) allait mettreaux prises les deux prétendants à la couronne impériale, Philippe deSouabe et Othon, et déchaîner dans le pays la guerre civile..Un desprinces les plus puissants de la Bourgogne supérieure, Etienne,comte dAuxonne, s'allia au duc de Bourgogne et au comte de Mont-béliard, et tous trois, assistés de leurs vassaux, ravagèrent les do-maines de labbaye de Luxeuil et des églises de Besançon ) Lesbâtiments du monastère furent brûlés (1201).

Un des incendiaires, René d'Aigremont, k plus acharné des enne-mis de l'abbaye, ne tarda pas à se repentir de sa criminelle entrepriseet consentit à en faire l'aveu public (4). Frédéric, alors abbé deLuxeuil, écrivit lui-nième un acte par lequel Régnier cédait en dédom-magement t l'abbaye les corvées que les habitants des Thons (t) de-vaient au château d'Aigrement (4). C'est aussi pour indemniser le

(t) Cette charte fut donnée â Strasbourg, le 28 juin 1123. Cartulaire de Luxeuilf' 117 ç Bibliothèque nationale, Collection 3iorcau, 869. fol. 37i7 et suiv.

(2) 1-lenri \'l avait confirmé, le H juin tWa, de SeIz, en Alsace, les possessionsdes monastères cisterciens de l3ellevaux. de la Charité (non loin de Vesoul). dela Grâce-Dieu (près de Besançon) le lU juin il était à 1-laguenau, le 24, à Oher-nay, le 28 à Bruyères puis il vint à Luxeuil. à Vesoul, et le 9juillet il arrivait àF3esançon, où il confirma les privilèges du chapitre de Saint-Paul et le prit soussa protection, ainsi que le monastère tic Saint-Vincent Fournier, Le royaume

d'Arles et de Vienne, P. 134, note 3.c3 L'archevêque de Besançon, Amédée, comblé, dès 1099, des laveurs de

Philippe de Souabe, avait pris parti pour lui et souscrit un document adressé aupape à l'appui des prétentions de la maison de Staulen, Fournier, p- 90.

(.4) Archives de la Flaute-Saàne, 11690.(iii Les Thons, commune du canton de Lamarche (Vosges). - Les Thons dépen-

daient déjà de Luxcuil au temps de Charlemagne il est fort possible queRégnier, pour réparer sa faute, se soit contenté de restituer un bien usurpé.

(C) Aigremont, commune du canton de Bourbonne-les-Bains (Haute-Marne).

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monastère d'une partie de ses pertes que le comte Etienne lui donnapresque à la même époque une chaudière de sa saline de Sce y-sur-Saône, avec privilège d'y cuire librement 'eau salée aux frais duprince (1).

Mais ces réparations étaient bien insuffisantes. L'abbaye avait beau-coup perdu ; la plupart de ses chartes étaient devenues la proie desflammes. Dans une position si critique, l'abbé ne vit de ressourcesque dans l'autorité de Philippe de Souabe, qui accourait défendre sespartisans et châtier ses ennemis il alla au-devant de lui pour l'api-toyer sur les souffrances de son église. Philippe l'accueillit favora-ment et lui accorda un diplôme qui rappelle et confirme ceux quil'avaient précédé. Défense était faite par Philippe, à tous ceux quiavaient quelque autorité dans l'empire, d'exercer leurs fonctions surles terres que l'abbaye possédait avant son désastre ou qu'elle pourraitposséder dans la suite. Toutes les taxes que le fisc impérial était endroit de lever sur ces terres, seraient pour toujours perçues au profitde l'abbàye. L'empereur confirmait le monastère dans la possessionde ses revenus et privilèges, et reconnaissait aux religieux le droitd'élire leur abbé enfin il déclarait formellement qu# le présent di-plôme tiendrait lieu des titres perclus dans tous les procès intentés àl'abbaye (1

Aussi le XlII c siècle fut-il pour le monastère de Luxeuil une alter-native continuelle de puissance et de faiblesse, de malheùi-s et de.prospérités. Non-seulement il se releva sans peine, grâce â la protec-tien de Philippe de Souabe, de l'incendie de 1201, mais nouslevoyons, dans les années qui suivent, rentrer en possession des domai-nes usurpés et même recevoir des legs importants.

En 1204, l'abbé Hervé termina avec les Prémontrés de Flabémont ()une contestation depuis longtemps pendante au sujet des djmés d'Ail-levillers (4) et de Saint-Julien (') les Prémontrés s'engagèrent à payer

(I) Cette charte est très probablement de l'année 1201 elle a été publiée dansle t. .r.r r (p. 48l3) des Mémoires et documents inédits pour sertir d l'histoire de laFranche-Comté. -

e2 Cette charte lut donnée à Haguenau, le 15 décembre 1201, en présence del'archevêque de Besançon - Amédée de 'l'ramclay - de Bertrand, évêque deMctz, de Ludolphe, évêque de l3àle, de Conrad, évêque de Strasbourg, de Conrad.évêque de Spire, de Mathieu, évêque de Toul, et des comtes Albert de l)agshourget Sibert de \-Verdd elle a été imprimée tout nu long dans le t, \'[l (p' 432-64)des Mémoires et documents inédits poli,' servir à t'histoi,'e de la Pra,,che.Co,,mte.

(3) Hameau de la commune de 'rinécourt, caiitoa de Lamarche (Vosges).(4) Commune du canton de Saint-Loup (l'Iaute-Saône).(5) Commune du canton de Lamarehe (Vosges).

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annuellement aux abbés de Luxeuil deux muids, l'un de blé et ['autred'avoine. Puis l'abbé Hugues, de la célèbre maison de Faucogney,reçut de son parent, Aimon ., partant pour la terre sainte, la donationdes dîmes de la C.bàte[lenie de Faucogney, et des territoires de Reco-logne (I), Metisey, Servance et Ternuay (') (1209) ;.deux ans après,Penaud, père d'Aimon, restitua au monastère l'église de Rennefon-laine, qu'il avouait avoir retenue injustement ('). -

Mais tout â coup de nouveaux malheurs fondent sur l'abbaye quiest brûlée, en 1214, par la malice de quelques seigneurs ennemis(') .,- Robert de l-lautbourg et autres, - lors •de la guerre que firentnaitre les démêlés entre Othon de Méranie d'une part et, d'autre part,les seigneurs comtois et larchevêque de Besançon.

Robert de Hautbourg touché, lui aussi, de repentir, donna peu demois pprés dix sols de cens annuel au monastère pour le dédommagerdes pertes dont il avait été la principale cause, et, l'année suivante(1215), l'empereur Frédéric 11 accordait aux abbés le droit dédilierdes fours banaux dans tous les villages de la terre de Luxeui[ C)

Presque à la même époque le monastère obtenait de la maison deFaucogney la chapelle de Saint-Urbain de Saulx (e) avec les revenusqui en dépendaient - et d'un certain Pierre d'Achey les dimes qu'ilavait à Rovillars (-').

Enfin l'empereur Frédéric, qui avait entrepris, â l'exemple de songrand-père, Barberousse, l'œuvre de protection des églises ('),déclara prendre sous sa garde spéciale l'abbaye de Luxeuil (février1218) ( 1 ). Le diplôme délivré à cette occasion est doublement remar

(I) Hameau de la commune de Ronchamp (Haute-Saône).(2) Servance et Ternnay, communes du canton de Mclisey (Haute-Saône). Cf.

Fiant, Les Sires de Faucognej, p. U!. Al. Finot a publid l'attestation par Amédée,archevêque de Besançon, de la donation faite à l'abbaye de Luxeuil des diniesde la Châtellenie de Faucogney par Aimon de Faucogney. (Ibid., p. 226, piècejustificative XV, tirée des Archives de la Haute-Saône, H. 236).

(3) Ga?ha Christiana, XV.; D. Grappin, I. IV, ch. 3 et 4.(4) Epoques concernant l'abbaïe de Luxe,,. Archives de la Haute-Saône, 11.6.90.(:j ) Nous n'avons trouvé nulle part cc diplôme dont il est fait mention dans les

Epoqucs concernant l'abbaïe de Luxet.(G) Saulx, chef-lieu de canton(Ha u te- Sa6nc). - Cette chapelle fut détruite en

1766. I). Grappin, IV, 4. -(7) Dépendance de la commune de Saint-Bresson, canton de taucogney (Hau te-

Saône).8) Sur le rôle de Frédéric li et la -protection qu'il accorda aux églises, voir

Fournier, Le royaume d'Arles et de Vienne, P. 105 et suiv.(9) Bibliothèque nationale, collection Moreau, 869, fol. 346 et 347 Mémoires e

documents i,,édits pour servir à l'histoire de la Franche-Comté, VII, 77.

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uable d'abord parce qu'il montre que Frédéric considérait l'abbayecomme un fief de Cempire, et aussi parce qu'il nomme les régalesparmi les privilèges concédés à l'abbaye. Et ceci prouve jusqu'à l'évi-dence que, dans l'intention des intéressés comme suivant le droit.le mot regalia (t), dont se sont prévalus les Benédictins, désignait desémoluments réservés habituellement aux souverains et non la souve-raineté elle-même. A quelles parties du domaine s'appliquaient cesémoluments Il serait difficile de le préciser, dune part parce queles empiètements fort divers de la fédoalité n'ont pas été reconquisen masse par la puissance souveraine, mais successivement, et d'au-tre part parce que les droits régaliens ne sont pas d'une nature telle-ment caractéristique et absolue qu'ils n'aient varié selon , les temps etles nationalités. Mais on peut se faire une idée exacte des droits réga-liens qui ont pu être détachés de la souveraineté sans dénaturer celle-ci, en considérant comme régales tout les produits du domaine publicactuel ). »

Henri, roi des Romains, fils de Frédéric H, inféoda la gardiennetéde l'abbaye à Othon, duc de Méranie, lui octroyant tous les revenusdont il jouissait lui-même ( s ). Mais Othon voulut se comporter enmaître et empêcher les religieux d'entourer leur ville de murs et defossés. L'abbaye, alarmée de ce que son nouveau protecteur blessaitainsi ses franchises, porta plainte au roi des Romains, qui révoquacette concession, et, dans une lettre à l'abbé, au couvent et aux« citoyens», leur permit de fortifier la ville comme ils lentendraient(29 décembre 1228) (I)

A cette époque les discordes civiles ne cessaient d'agiter la Franche-Comté jamais l'abbaye n'avait eu plus besoin d'être mise à l'abri d'uncoup de main. Othon de Méranie, épuisé par une guerre àvec EtienneII, comte dAuxonne, et avec Jean le Sage, comte de Chalon - quitous deux prenaient comme lui le titre de comte de Bourgogne -Othon avait, en 1227, abandonné la jouissance de son comté à Thi-baut 1V, comte de Champagne, jusqu'au complet remboursement

(t) Du Cange définit ainsi les régaks: « Regalia vocant nostri praelia quae adecelesias pertinent. Usa Regibus ohm concessa, unde regahia dicuntur >,.

(2) Dey, ' Àféo,oirc pour sertir ci V histoire de la ville de Luxeuil. (complément

3Zi).du t. 1V des Mémoires de la commission 'd'archéologie, etc., de la Haute-Saône,p.

(3) Ces lettres forent données â Nuremberg, le 28 juillet 18. Dunod, Histoirecomté de fiourrjogne, 11, 187: Archives du Doubs, B. 508.

(4) Cette charte est datée de Haguenau. Bibliothèque nationale, collection Âforeau,869, fo 318; Mémoires et documents inédits pour servir â l'htçtoi,-c de la Franche-Comté, VII, 78.

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dune somme de 15,000 livres qu'il avait dù lui emprunter. Lesmonastères sentaient tellement la nécessité de s'unir contre leursennemis qu'il formaient fréquemment entre eux des associations deprières » on a conservé le texte de lune d'elles conclue entre Mur-bach et Luxeuil, au mois de mai 1234 C)

L'abbaye de Luxeuil était accablée sous le poids des dettes exces-sives qu'il avait fallu contracter pour se rédimer des violences dansces temps difficiles. Le pape Innocent TV s'attendrit au simple por-trait de la désolation de Luxeuil ; il lui accorda cette faveur singuliérequ'on ne pourrait l'obliger à payer ses dettes, à moins que l'argentemprunté n'eût été employé au profit de l'abbaye (') Six ans après,l'abbé Thiébaud profitait du séjour à Besançon du cardinal Huguesde Saint-Cher, légat . apostolique; pour obtenir des lettres engageantles fidèles à secourir l'abbaye. Jean de Chalon, sire de Salins, répon-dit un des premiers à cette invitation, et donna au monastère quinzecharges de gros sel à prendre tous tes ans, la veille de Pâques, dansla saLinerie de Salins (Y)-

(i) Besson, Mémoires historiques sur l'abbaye et la ville de Lare, l3esançon, 1846,p.201. - L'abbaye de Nu' bach, fondée par saint Firmin au pied du ballon deGuebwiller, dans les premières années du VIII' siècle, devint 1unc des plusriches et des plus illustres abbayes de l'Alsace. Le pape Clément Xlii la sécula-

risa en 17€4. l)igot, Histoire d'Austrasie, IV, 231-234 ; D. Bouquet, 111,330; Gaflia

Christiana, 1V, p. 1532 et suiv.(2) Cette bulle, si l'on en croit 1). Grappin (IV, 9), fut donnée û Lyon 1e28 avril

1217, Potthast n'en fait pas mention, bien qu'il cite une bulle Sc rapportant aumôme objet, mais accordée à l'abbaye de Murbach (Regesta po;,tificum ,ou,aHor/(m,

p. 1054. n° 12,491). Voir Schoepflin, Alsatia diploinatica. 1, 392, n° 515

(3) Mai 1251$. I). Grappin, 1V, 9.

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CHAPITRE 111

L'abbaye se place sous le patronage des comtesde Champagne.

En somme la protection des papes et des empereurs avait été fortprofitable aux religieux de Luxeuil c'est parce qu'elle ne leur fitjamais défaut qu'ils n'avaient point songé jusqu'à ce jour à suivrel'exemple des autres monastères et à prendre un avoué. Mais lesbrouilleries de Frédéric II avec la papauté, la déposition de l'empe-reur au concile de Lyon (1245), devaient nécessairement les amener,afin de mieux pourvoir à leur sûreté personnelle, à préposer à leurgarde tin prince voisin. En 1248, Mathieu, duc de Lorraine, avaitaccepté cet office ('), nous ne savons à quelles conditions.

Trois ans après, les moines de Luxeuil ne se firent aucun scrupulede révoquer l'avoué qu'ils avaient eux-mêmes choisi et de le remplâcerpar Thiébaud, comte de Bar, à qui ils attribuèrent, pour l'indemniserdes frais de garde, une somme annuelle de cent livres () peu aprésils se mettaient sous la sauvegarde d'un souverain plus puissant quele comte de Bar.

Le comte de Champagne. Thibaut V, arrêté du côté de l'ouest parle développement croissant de l'autorité et du domaine des rois deFrance, travaillait à augmenter vers l'est l'influence et le territoire dela Champagne ('). Son père, Thibaut IV, lui avait préparé la voienous l'avons vu intervenir, en' 1227, dans les démêlés entre Othon deMéranie et ses ennemis, et, au dire de Gollut, « audict an 1227, ilpensat enjamber par acquisitions sur le conté de Bourgongne, et vou-lut acquérir ]a terre de Luxeuil et autres proches, et dedans lesmontagnes de Vosge (i)».

Thibaut IV ne réussit pas dans ce dessein, mais, en 1258, les moinesde Luxeuil, - mal protégés par Thiebaud de Bar pendant la guerre

(1)D. Grappin, IV, 10.(2) Ibid. Derthod, Dissert., p. 76.(3) D'Arbois de Jubai,wi]le, If Lçloire des ducs et comtes de Champagne, IV, 388.(4) GolIut, Mémoires historiques de la République séquanaise, p. 533.

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que de 1251 à 1256 Jean le Sage ( 1 ) fit contre son fils Hugues, -tournèrent vers Thibaut V, et lui offrirent l'établissement entre euxet lui de cette sorte d'association qu'on appelait pariage Thibaut V,alors en Champagne pour ]a seconde fois depuis sa majorité, acceptacette offre le 26 juillet de la même année.

La terre de l'abbaye de Luxeuil compre nait alors, outre la petite

ville de Luxeuil, les quarante-cinq villages suivants Abelcourt, Ail-loncourt, Ainvelle, Aniage, Amblans, Anjeux Bassigney, Baudon-court, Betoncourt_Saint-Pancras Breuches, l3réuchotte, l3riaucourt,Brotte- . les-Luxeuil, la Bruyè re ,: i3ulgnévil!e, la Chapelle, Citers,Corbenay, Ehuns, Esboz-Brest, Ferrières (% Fessey, Fontaine-les-Luxeuil, Froideconche, MailIeroncourt_Saint-Pancra, Monthureuxsur-Saône, Neurey-en-Vaux, Ormoiche, la Pisseure, Pomoy, Pro-venchères - les- DarOeY, Quers, Raddon, Rovillers, Saint-Bresson,Saint-Sauveur, Saint-Valbert, Sai rite- Ma rie- en-Chanois, Soyers,Varogne, Vaudoncourt, Vellerninfro, Velol.te ('), Villers-les-Luxeuil,Visoncourt (4) .- --

D'après le traité de pariage, l'abbé et les, religieux cédaient à -Thibaut et à ses succusseurs la moitié des tailles de la terre deLuxeuil, la moitié du produit du minage ) et des revenus des eauxet forêts la justice devait être exercée par un représentant du comteet un représentant de labbé les dîmes, le cens des moulins, les foursdéjà construits, les granges et leurs dépendances, en somme tout cequi appartenait à l'Eglise au moment de la signature du traité luidemeurait en entier, sans que le comte où ses successeurs pussent yprétendre à l'avenir: quant aux fours et aux moulins qui seraient•construits dans la suite, l'abbé et les religieux en auraient la moitié, -et le comte lautre moitié. Le comte se réservait pour lui ou pour sessuccesseurs'le droit d'établir sur le territoire de Luxeuil un ou deuxchàteaux, et même quatre, s'il le jugeait nécessaire. En retour, le

(t) Jean de Chalon, surnommé le Sage o it Son fils ainé, Hugues, avaitépousé Aux, comtesse de Bourgogne.

(2) Hameau de la commune d'Amonf.(3) Aujourd'hui commune dAmblans -(l Ces villages sont situés dans les environs de Luxcuil ou du moins à une

faible distance; ils dépendent tous du département de la Haute-Saône, sauf Soyers,qui appartient à la Haute.Marnc . (canlon du la Ferté.sur-Arnance), l3ulgnéville,Monthuredx-sur-Saône. Provench&res_les-DarneY et \ Taudoneourt qui sont dudépartement des Vosges. Si l'on en croit le diplôme de Charlemagne, rabbayeaurait possédé à l'origine des domaines,à Marsal et à Moyenvic, à Nanteuil-les-Meaux, à Solutré (Saéne-et-Loire), à Ambournay (Ainj, etc.

(. ;)Droit levé parle seigneur sur chaque mine de grain pour le mesurage.

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comte de Champagne s'engageait à protéger l'abbé et les religieux,à prendre envers et contre tous la défense de leurs personnes et deleurs intérêts il devait, dans les six mois, jurer sui les saints évan-giles, en présence de l'abbé ou de son mandataire, qu'il tiendraittoujours fidèlement ses promesses (').

Ce traité fut un signal de guerre. Le comte de Bourgogne, [uues.revendiqua la garde de l'abbaye et appuya ses prétentions sur deuxraisons principales la terre de :Luxeuil, disait-il, est enclavée dansle comté de Bourgogne, puisque les ducs de Lorraine et les comtes deBourgogné, lorsqu'ils ont quelque affaire à débattre, plaidient aurupt de Druge (2) qui est lieue et demie oultre Luxeu » il ajoutaitque les comtes de Bourgogne avaient toujours joui de la garde del'abbaye de Luxeuil,et présentait à l'appui de son dire une attestationsignée de Guy, prieur des Dominicains de Besançon: de Pierre, abbéde Faveràey, de Guillaume, seigneurde Pesmes('), et dejean, seigneurde Choiseul.

Dom Grappin, qui nous rapporte les prétentions de 1-lugues, n'apas de peine à les réfuter la terre de Luxeuil pouvait toucher à laFranche-Comté, elle pouvait même en être une enclave, sans que pont-cela le comte eùt le droit de protection qu'il demandait ; d'autre part1e témoignage complaisant de quelques religieux et dé quelques sei-gneurs ne pouvait avoir la même autorité que les chartes des empe-reurs Henri V et Frédéric II.

D'ailleurs aux affirmations de l'abbé de Faucogney et des autrespersonnages favoràbles aux comtes de Bourgogne, les religieux deLuxeuil opposèrent la parole des abbés de Saint-Vincent et de'Saint-Paul de Besançon. Ces derniers déclarèrent avoir vu de leurs propresyeux une charte par laquelle le comte de Bourgogne, Renaud, recon-naissait la complète indépendance de l'abbaye (').

(J) L'original de cc traité n disparu, mais il en existe plusieurs copies. Archivesnationales Q' 998 Bibliothèque nationale, collection Moreau, 8i39, col. 352 et suiv.Archives de

la Côte-d'or, B. 1062 Archives de la Haute-Saône, Snppt. U. 6. -Nous en avons publié le texte complet dans notre thèse latine présentée à laFaculté des lettres de Nancy (de Luxovicnsjum abbatu,n protestate. Nancy, Berger-Levroult, 1891. Appendix J). -

(2) Le rupt de Druge (aujourd'hui Roge, affluent de rive droite de la Lanterne)séparait la terre de Luxeuil de celle de Fougerolles.

(3) Pesnie-', chef-lieu de canton (Haute-Saône). - Sur les seigneurs de Pesines.voir Sochaux, La !qa,tc-Saône, 11, 145.

(4) Vidimus fait par les abbés de Saint-Vincent et de Saint-Paul de l3esançnn"n 1258. Mémoires et documents inédits pour servir à l'histoire de ta Franche-Comté,VIII, 71. - Oit peut assigner à la charte en question une date certaine, mais

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Les religieux pouvaient encore citer une pièce de La plus hauteimportance; c'est- l'acte par lequel Etienne, comte de Bourgogne,reconnaissait (') lui-même, en 1235, qu'il n'avait aucun droit sur lapersonne et les biens des habitants de Mailley (s), village cédé à l'ab-baye de Luxeuil par l'un de ses prédécesseurs. Si Etienne n'avaitplus rien à prétendre sur une ancienne terre bourguignonne, à plusforte raison Hugues devait-il reconnaître l'indépendance de la sei-gneurie de Luxeuil, qui n'avait jamais fait partie du domaine de sesancêtres.

Quoiqu'il en soit, la guerre s'alluma entre Hugues de Bourgogne etThibaut de Champagne. Le premier trouva pour alliés Jean le Sage,son père, et aussi Thiébaud de Bar, qui, dépossédé brusquement deson droit de protection, regardait le comte de Champagne comme unusurpateur. Le comte de Bar entraîna dans cette lutte Jean P, sei-gneur de Choiseul, le sire dAigremont, et tous ses vassaux (8). Dèsle 20 août 1258 la guerre était commencée(, ). Nous n'avons aucunrenseignement sur les opérations militaires qui eurent lieu des deuxcôtés, mais il est permis de supposer qu'elles ne furent pas longues,car saint Louis intervint et envoya pour servir de médiateur Gervais,son maître-queux. Celui-ci obtint sinon une paix définitive, au moinsla cessation des hostilités et la rupture de la ligue formée contre leroi de Navarre (n ) .-

Thibaut V et le comte de Bar étaient évidemment en paix en 1260,puisque le 27 loin de cette année Thibaut V faisait partie d'un tribu-nal arbitral qui jugeait un procès entre le duc de Lorraine et le comtede Bar (°). Dom Grappin prétend que l'abbaye de Luxeuil aima mieuxcontinuer au comte de Bar le paiement des cents livres attachées pré-

clic a été probablement donnée par ]e comte Renaud J!) qui vint à Luxcuil pourobliger le seigneur de Jonvclle à restituer ce qu'il avait pris ù l'abbé de Faverncy.Les religieux de Luxcuil pr filèrent sans doute de cette occasion pour demandernu comte une pièce qui pouvait âtre pour l'avenir un sûr garant de leurs fran-chises.

(t) Cf. l3erthocl. DisRert., p. 79; Bibliothèque nationale, collection Moreau, 889,D 349; Cartulaire de l'abbaye de Luxeuil, foi. 153.

2) Canton de Scey-sur-Saône (llautC-Saûne).(3) Le traité conclu entre Jean, seigneur de Choiseul, et Thiébaut II, comte de

Bar, n été publié dans dom Calmet, Histoire de Lorraine, Il, pr., 4l324t33.(4) On doit rapporter à cette guerre le passage suivant du compte de 1238 pu-

blié par M. l3ourquelot dans la Bibliothèque des Chartes, 5 série, 1V, 73: « Pro-vectura et expcnsa corun, qui conductum quadrigarum fccerunt in exereitu : XXs. » Cf. d'Arbois rie Jubainvilie, IV. 923.

('6) Joinville (D. Bouquet, XX, 292).(6) D'Arbois de Jubainville, IV, 391.

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cédemment au droit de garde, plutôt que de se voir exposée à desincursions et aux malheurs que la guerre entraîne après elle([).

Mais les droits dit de Champagne et du comte de Bourgo-gne sur l'abbaye de Luxeuil ne furent pas réglés par le maître-queuxGervais d'une manière assez sérieuse pour empêcher toute contesta-tion ultérieure ; en effet, en 1265, pendant le troisième séjour etcThibaut en Champagne (3), des difficultés nouvelles apparaissententre lui et Hugues de Bourgogne sur ces difficultés, deux sen-tences arbitrales sont rendues, et cependant la discorde continue.Dans le courant de l'année 1266. tandis que Thibaut était retenu enNavarre par sa guerre avec le roi d'Angleterre, Rogues mourut, et saveuve, Aux, voulut contraindre les moines de Luxeuil à renoncer à laprotection du comte de Champagne et à tenir pour non avenu le traitéde l'année 1238. Elle fit occuper militairement le monastère, attiradans son parti le prévôt du couvent en lui faisant espérer qu'elle leferait monter sur le siège abbatial alors vacant Guillaume, grand-prieur, et les moines firent à Thibaut le récit des maux qu'ils endu-rèrent et lui demandèrent sa protection ). Nous avons aussi uneseconde lettre que les religieux de Luxeuil écrivirent au commence-ment de l'année 1267 à Thibaut V, alors revenu de Navarre ils par-lent avec désespoir des dégradations qu'a subies leur monastère, despalissades abattues, d'une partie des bâtiments brûlée, de leur pêchedévastée, de leurs sergents battus par les gens d'Alix, de leurs biensmis au pillage par leur prévôt qui touche leurs rentes et qui ne payerien, qui les force â emprunter pour vivre, et qui, s'il est nomméabbé par le légat grâce â la protection de la comtesse de Bourgogne,continuera tant qu'il vivra sa tyrannique administration M.

Toutefois aucun texte ne nous apprend que ,Thibaut ait repris lesarmes. Une trêve, quatre fois renouvelée, la dernière fois pour unepériode indéfinie, conserva la paix en laissant indécise la validité del'association conclue en 1258 entre le comte de Champagne et l'abbaye,et par conséquent cette association fut, de fait, maintenue (n).

(1) Histoire de l'abbaye royale de Luxe,,, 1V, 41.(2) Thibaut, comte de Champagne, en môme temps roi de Navarre. ne venait

que rarement en Champagne.(3) Lettre datée du mois de mars 1266, Cartulaire de Luxez,!!, f' 197; Bibliothè-

que nationale, collection 3'!oreau, fol, 3137 et ,suiv.(4) Bibliothèque nationale, 'collection Moreau, l'aI, 375 et suivants GaUla Cl,rtç-

tiana, XV, 156; d'Arbois de Jubainville, W, 372,(5) D'Arbois de Jubainville, VI, 20, 24, 28, 31.

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Le roi de Navarre avait apporté un remède efficace à l'incursiondes Comtois, mais l'abba ye ne garda pas longtemps ce puissant pro-tecteur. Thibaud mourut à Trapani (4 décembre 1270), au retourde la croisade qu'avait dirigée saint Louis sur Tunis, laissant sa cou-ronne et tous ses domaines à son frère Henri, qui fut bientôt lui-même enlevé Dar une attaque d'apoplexie (22 juillet 1274).

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CHAPITRE IV

Les rois de France héritent des droits des comtesde Champagne.

Le comte Henri de Champagne ne laissait qu'une fille, nomméeJeanne, âgée de trois ans, que sa mère emmena à Paris. Le roi deFrance, Philippe III, occupa aussitàt, comme bail et tuteur de Jeanne,les comtés de Champagne et de Brie, et fiança la jeune princesse àson fils Philippe qu'elle épousa en 1284. Et c'est ainsi que PhilippeIV, devenu l'année suivante roi de France par la mort de son Père,hérita des droits de garde cédés jadis par labbè et les religieux deLuxeuil au comte Thibaut de Champagne. Philippe IV ne songeapas seulement à faire valoirces droits, mais aussi à acquérirle domainedirect de la Franché-Comté tout entière.

L'empereur Rodolphe de Habsbourg voulant à tout prix empêcherla France de saisir cette proie, sut associer à ses intérêts un puissantseigneur bourguignon, Jean de Chalon-Arlay (O, qu'il fit suzerain ducomté de Neuchâtel en Helvétie. Le roi de France de son côté avaitréussi à se concilier le comte de Bourgogne, Othon IV. qui avait suiviRobert d'Artois en Italie et PhilippelI[ en Aragon, et épousé ensecondes noces (2) Mahaut, la fille de Robert.

De même qu'Othon passait sa vie à la cour de France, Jean deChalon-Arlay s'attachait en quelque sorte à la suite de l'empereur(').Aussi, en 1289, Rodolphe et Jean unirent-ils leurs bannières â cellede l'évêque de Bâle dans une campagne en Franche-Comté contre lescomtes des Bourgogne, de Ferrette et de Montbéliard. Ils vinrent

(I) L'un des fils de Jean de Chalon l'Antique. - Arlay, canton du Blette-fans (Jura).

(2) Sa prdnhi&e femme hit Philippe. fille clii comte de Bai-. Goilut, 5f13.(3) CC Funck-]3reniano, Philippe telle! et la ?:oblessefra,ic-co,,ztois .e (Bibliothèque

de l'Eeole des Chartes, t. XLIX, IBUEI, p. 9) Fleury-l3crgier, Philippe le 8e! etOthon IV (Mémoires de )'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Besançon,11)89, p. 10 et suiv.) de Pidpape, Histoire de la réunion de la l-'ranclze-Comté â laFrance, I, 39.

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assiéger Besançon U) dont les bourgeois, à la voix du parti français,s'étaient mis en armes contre l'empereur. Rodolphe se retira avantque la ville eût ouvert ses portes et nomma Jean sort luiconfiant la direction des opérations jusqu'à la fi n de la guerre. Ce futencore Jean qui régla les conditions de la paix arrêtée, le 5 mai 1290,entre Rodolphe et les Bisontins (').

L'abbaye de Luxeuil avait toujours vécu en bonne intelligence avecOthon, et ce prince, reconnaissant de quelques services rendus parl'abbé Charles à des sujets de la comtesse Philippe, sa premièrefemme, lui restitua, en 1280, des domaines depuis longtemps usurpés;deux ans après, la comtesse Mahaut donnait elle-même à l'abbaye unbois ( 3), situé dans le voisinage de Luxeuil. Enfin, en 1287, sous l'admi-nistration de l'abbé Thiébaud (4), de la maison de Faucogney, les reli-gieux traitèrent avec Othon touchant les villages de Bouhans, d'Arn-blans et de Velotte le comte et ses héritiers devaient avoir à perpétuité le tiers de tout ce que l'abbaye de Luxeuil possédait, àcondition qu'ils défendraient celle-ci, si besoin était, contre touteattaque (').

Aussi, au moment où éclata la guerre dont nous venons de parler,l'abbé Thiébaud n'hésita pas à entrer dans le parti des comtes deBourgogne, de Montbéliard et de Ferrette ('), et renforça l'armée com-toise des troupes dont il pouvait disposer; mais: afin de bien montrer

(I) Voir Castan, Le siège et le blocus de Besancou par Rodolphe de !Jabsbowrg etJean de Chalou'A rlay en I 28g et (290 (Mémoires de la Société d'émulation duDoubs, 4' série. IV' volume, Besançon, 1669).

(2) Fonck-Brentano. lac. cit., p. 10. — Quelques semaines avant de mourir,Rodolphe accordait à Jean l'avoueric de l'abbaye de Saint-Claude (29 mai 1291).— Sur la politique de Rodolphe en Bourgogne, voir Fournier, Le Royaume d'Arleset de Vienne, chapitre VII.

(31 li s'agit du bois de Vaucluse, près d'Ailloncourt. I). Grappin, IV, 16.(4) Thiébaud iII, abbé de Luxcuil (1287-1307), était fils de Jean I" de Faucogney

et d'Hcluysc de Joinville, dont le frère est Scande Joinville, le célèbre sénéchal deChampagne. Il ne faut pas confoàdre ce Thiébaud de Faueogncy, abbé de Luxeuil,avec Thiébaud de Faucogncy, trésorier, puis doyen du chapitre métropolitain deBesançon, qui a vécu à , peu près dans le même temps, niais appartenait à labranche de Villersexel. Cf. Pinot, Les sires de Faucogney, p' 1W, et i3ulletiu de la.Société d'agriculture, sciences et arts di département de la Haute-Saône, 1877, p.164 et suiv. -

(I» Cartulaire de Luxeicil, f' 228; Bibliothèque nationale, collection Moreau,869, fa 339.

(6) Othon, comte de Bourgogne, prévoyant l'orage qui le menaçait, amassa leplus de troupes qu'il put et engagea malheureusement dans sa queclle Thibaad,abbé tIc Luxeuil. » D. Guil!o. Histoire de l'illustre abbaye de Luxeu (Ma. de laBibliothèque de Vesoul), p957. - Cf. Finot. Les Sires de Faucogney, p. 116 et suiv,

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qu'il leur accordait librement ce secours, il demanda et obtintd'Othon des lettres(') par lesquelles le comte de Bourgogne dé-clarait qu'il n'avait aucun droit sur la terre de Luxeuil, et quel'abbé lui avait simplement rendu service en cette circonstance.D'ailleurs Rodolphe ne tarda pas à faire subir à l'abbé la peine de saconduite en laissant commettre de grands dégâts sur le territoire deLuxeuil (u).

Mais les abbés de Luxeuil n'avaientpas seulement à se défendrecontre les seigneurs voisins ils devaient en même temps contenirl'esprit d'indépendance des bourgeois de leur ville. De bonne heure,en effet, les habitants groupés autour du monastère jouirent delibertés municipales en-952. ils avaient déjà leur cloche ('). Dans lespremières années du X.lt siècle Gudin, que nous avons cité plus haut,parle du plebs luxoviensis. Le préambule d'une charte de 1119 nousmontre que non-seulement les bourgeois de Luxeuil jouissaient duplein exercice de leurs droits municipaux, mais qu'ils étaient associésen quelqUe sorte aux affaires temporelles de l'abbaye (4). Enfin on napas oublié que le diplôme de l'année 1228 mentionne les « citoyens'>de Luxeuil ( s ) . Au lendemain de sa guerre contre Rodolphe, le 3décembre 1291, l'abbé Thiébaud de Faucogney octroya aux bourgeoisune charte de franchise dont l'original a disparu, mais dont unecopie du XVIe siècle est conservée aux archives municipales de

t) « Nos, Othcs, cuens Palatin de Dourgoingne et sires de Salins, façons sçavoir àtous ceux qui verront et errent ces présentes lectres, que comme rostre amé cousinThielbaut, par la grâce de Dieu abbey de Lixui, nous ait amené ses gens à piedet à cheval, toz de sa terre, en nostre service, nos tenans è grâce non pas à ser-vitude pour cc que ]cd. abbé et sa gleyse en soient sans péril, nez ly avons donnéces lectres scetées de notre seel pendant, que furent faites en l'an de grâce mildons cens quatre vint et neuf; le lendemain de In Saint-Benhnlemieu à Belevans. »I). Bcrthod, Disse-t., p. 47; Carlulaire de Luxeuil, (b 233; Bibliothèque nationale,collection Moreau, 869, f 360.

(2) D. Grappin, I\, 17.(3) On lisait sur la petite cloche de L'hôtel de ville, refondue en t760 « Condita

anno 952, restituta lOBS, iterum lissam me restitui jussit magistratus Luxoviensis,1760. » Archives de Luxeuil, B13. 6 (délibération du 26 décembre 1760).

(4) Ce préambule est ainsi conçu: * Parclevant frères Jchans, sceretains de Lixuiet Renaud Urbelans,' Borjois de Luxuy, gardaour clou sacl de la court de Luxuy,salut: Saiche tait que la personne de Joiquat clerc tabellion dc luxuy, et deColinat, borgeois de Luxuy, jurés etestaubliz ace en la terre de Luxui.... Archivesde la Haute-Saône. 11. 716. Cf. Dey, Premier Mémoire pour servir à l'histoire de lapille de Luxenil, P. 12.

(5) Voir plus haut, p. 17,

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Luxeuil Q. Cette charte affranchit les bourgeois de la mainmorte,leur donne Je droit de vendre, d'acheter ou d'échanger, leurconcède le, privilège de n'être ajournés en justice que par ledoyen ('), enfin permet à trois où quatre élus de répartir les impôts etles taxes municipales; de crainte que les habitants des villages voisins,attirés par de tels avantages, n'abandonnent leurs champs, la charteétablit que les étrangers, pour être admis dans la bourgeoisie, devrontêtre présentés par trois bourgeois et agréés par l'abbé ou son prévôt.

Dom Grappin attribue cette charte à la u bienfaisance naturelle » del'abbé ; mais cette explication ne peut nous suffire. Ou l'abbé espérait,grâce à l'accroissement du bien-être des classes inférieures, que saville deviendrait plus prospère, et partant sa domination plus lucra-tive ( 1 ) ; ou bien son but était de régler à l'amiable, par voie de tran-saction, des prétentions contraires antérieurement débattues et defortifier son autorité par des concessions libérales (1). Peut-être aussicomptait-il, en octroyant une charte qui avait le caraclère d'un actesouverain, consacrer d'une façon officielle son indépendance il estremarquable, en effet que tout s'est passé au nom de l'abbé et desreligieux, et que le prince associé et co-propriétaire ne paraît pointdans l'acte.

Il est vrai que le succès de Rodolphe avait fortement entamé enFranche-Comté le prestige de Philippe, à qui l'on pouvait reprocherd'avoir mal soutenu Othon et ses alliés. D'autre part les seigneurscomtois apprirent avec une douloureuse surprise que, par les traitésd'Evreux et d'Asnières (12 juin et 9 juillet 1291), le roi de France

(I) Archives de Luxeuil, AA. 1. —Cette charte se trouve aussi à la Bibliothèquenationale, collection Moreau, 869, fo 361 elle a été Pub liée plusieurs fois: voirnotamment Mémoires et documents inédits pour servir â l'histoire de la Franche-Comté, VII, 83-86, et Fiant, Les Sires de Faucogney, p. 277.

(2) M. Dey voit dans ce magistrat, dont l'existence à Luxeuil parait remonterfoi loin, la transfiguration du defensor ci pitatis. I Mémoire. P. Vi.

(3) C'est cette raison qui déterminait l'archevêque de Besançon, Hugues deVienne, à donner une charte d'affranchissement à sa terre de Gy, en 138. Cf.Castan, Charte d'affranchissement de la ville et de la seigneurie de Gy (Mèmoiresde ]a société d'émulation du Doubs, iUeG).

(4) Presque à la même époque, la plupart des villes de Franche-Comté obtinrentdes chartes de franchise: L)éle. en 1274 et en 1281 ; Faueogney, cri ; Nozeroy.Cil 128.5 l3letterans, en 1285-; Arbdis, en 1288 ; Polign y , en 1 1289 ; Lons-le-Saunier, en 1293 et en 1295. etc. Cf. Perreciot, Dissertation sur l'origine, la formeet les pouvoirs des EIat.ç de Franche-Comté (Mémoires et documents inédits pourservir à Mistoirc de la Franche-Comté, VII, 119). - Voir aussi la Charte daffran-chtçse,nent du bourg d'Oiselay, dans les Mémoires de lu Société d'Einulation duDoubs, 1867. .-

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avait acquis le domaine direct de la Franche-Comté en assurant à l'unde ses fils la main de la fine d'Qtlion et de Mahaut d'Artois (1).

Othon, perdu de dettes, ne souscrivait pas seulement aux cond 'i-tions que lui dictait Philippe, son principal créancier : il céda à sonfrère Hugues les droits que l'abba ye lui avait accordés -en 1287 clansles villages de Bouhans, Amblans et Velotte. MaisHugues ne se con-tenta pas du tiers des revenus que l'abbaye percevait sur ces terresil prétendit t la moitié, et cette entreprise fut le prélude de beaucoupd'autres. A la tète de ses gens d'armes, il fit des courses sur le terri-toire dépendant du monastère, brûla trente-six maisons à Annegray,enleva un butin considérable t Quers, Froideconche, Saint-Sauveur,Àilloncourt, La Bru y ère et Velleminfroy: Baudoncourt et La Chapellefurent encore moins ménagés : les-soldats de Hugues incendièrentdix maisons à Baudoncourt, quarante-six à La Chapelle partout ilsprirent de nombreux otages. Hugues, ne trouvant nulle part de résistance, s'enhardit jusqu'à venir mettre lç siège devant Luxetulundes faubourgs (2) de la ville fut saccagé et déjà les torches des assail--]ants atteignaient les greniers du monastère, lorsque les religieuxfirent porter à Hugues des propositions de paix qu'il accepta vo-lontiers il se contenta d'une somme de trois cents' francs qu'on luipromit et emmena comme otages dans son château de Montjustin (')onze religieux qu'il garda pendant huit semaines, jusqu'au con:pletPaiement de cette contribution v),

Et, chose étrange, au milieu de ses malheurs, l'abbé de Luxeuilparaissait beàucoup moins s'inquiéter des courses de Hugues quedes projets du roi de France il négociait activement avec les enne-mis de Philippe et cherchait, dans la mesure de ses moyens, à sauve-garder l'indépendance de la . Franche - Comté. Le dernier jour delévrier 1294, vingt-huit barons comtois se rencont'aient à Besançonet formaient avec l'abbé de Luxeuil, por bien du pais et leurcommun profit, une ligue défensive confirmée par leurs e sairemensdonnés sur saintes Evangiles s ils se promettaient mutuel appui,s'engageaient à s'aidergrande force et à petite s,s'ouvrir réci-proquement leurs châteaux ; ils établissaient six (5) d'entre eux pour

(1) De Piépape, t. 43, - Le second fils de Philippe le Bel. Philippe le Long,épousa en 1306 Jeanne de Bourgogne, héritière de la Franche_comté,

(2) Le faubourg méridional alors appelé La D'ire.(3) Commune du canton de Nor,'o y (Ille-Saône).(4) 1). Crappiiï, 1V, 21: D. Guillo. P. 239.(5) Les sires de Voles. de Joux, de Faucogney, de Villeneuve, de Raye et Pool-

cart, sire deRans. Funck-Brentano, op. cit., p. 15.

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former un conseil dirigeant chaque cénfédéré était tenu d'y obéit etde se mettre en armes à la première réquisition. Et, dans la crainteque les divisions ne vinssent affaiblirleur union, tous consentaient àremettre le jugement de leurs différends entre les mains de ce conseil.La ligue disposait d'un trésor commun alimenté par des cotisationsproportionnées à la fortune de chacun l'abbé de Luxeuil avait à ver-ser annuellehient vingt livres, tandis que le chevalier Jean de Vaite (1)ne servait que quarante sols. La ligue avait également à son serviceune petite armée de quarante et quelques hommes armés de fer »,fournis et entretenus par les confédérés. Argent et soldats étaient misà la disposition des six commissaires pour répondre à l'appel de ceuxdes alliés qui réclameraient leur secours. La durée de la ligue était

fixée , dix ans (g).Mais cette confédération ne réussit pas à retarder les projets de

Philippe 1V. Le 2 mars 1295, était arrêté à Vincennes le contrat demariage de Jeanne de Bourgogne avec l'un des fils du roi de France V)Jeanne apportait en dot toutes les possessions de son père et Phi-lippe 1V en était nommé dés lors administrateur en lieu et place dufutur époux. Pour plus de sûreté, Othon confiait sa fille au roi deFrance qui se chargeait de son éducation jusqu'à ce qu'elle fût en âgede se marier. Le comte palatin recevait en échange de ses domainescent mille livres tournois, plus une rente viagère de dix mille livres.

La nouvelle de ce traité souleva là noblesse franc-contoise contre leroi de France. Un nouvel acte de cotïfédération fut scellé à Besançon

le 29 mars 1295, pendant que le roi des Romains déclarait, de soncôté, la Franche-Comté réunie au domaine impérial par les lettres du

28 février 1296 (4'),La guerre entre les deux couronnes était devenue inévitable ).

Philippe le Bel fit aussitôt occuper ks principales villes de la provinceet combattit non moins avec son or qu'avec ses armes. La lutte pritfin par les traités d'avril et mai 1301 ( 1) Dés le mois de mars del'année précédente, Philippe avait renouvelé avec les religieux deLuxeuit le traité de pariage. Tous les articles furent les mêmesqu'en 1258, sauf en ce qui concernait la prestation de serment, que

(1) Vaite, canton de Dampierre (Hautc-Saône).(2) Funck-Brentano, P. fi).(3) De Piépape, I, 44 Durnont, Corps diplomatique, charte n' DXXIX, p. 793

Boutaric, La Fiance sous Phi lippe le 13e?, p. 7 et 8.(4) Funck-Brentano, p. 19 et 20.(5) De Fiépape, t. 1, P. 48 et suiv.(G) Funck-Brentano, p. 32.

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— 1, —

Philippe et ses successeurs ne devaient point faire en personne maisil était convenu que si le comté de Champagne venait à être démembréde la couronne, ses souverains particuliers observeraient le traité de1258, tel qu'il avait été négocié avec Thibaut de Navarre, et prête-raient le serment qu'il stipule('). La reine approuva ce traité, et yfit même apposer son sceau afin de le rendre plus valide l'annéesuivante (130f), l'abbé et les religieux donnèrent à leur tour deslettres de consentement et d'approbaton (2).

Philippe le Bel se montra un vigilant gardien de l'abbaye. Il char-gea d'abord Guillaume de Nogaret et Simon de Marchey de désignereux-mêmes un puissant seigneur qui pourrait protéger efficacementle monastère, ses gens et ses domaines (") Et, sur ces entrefaites.Lingues ayant recommencé ses courses et ses déprédations dans laterre de Luxeuil, Guillaume de 'Nogaret et Simon de J'Ylarchey reçu-rent l'ordre d'intervenir; il envoyèrent à Luxeuil deux officiersqui, le lundi après la Saint-Martin de l'an 1301, entendirent lesgriefs de l'abbé et ceux du comte Hugues accusait les religieuxd'avoir détourné le cours de la Lanterne près de Sainte-Marie-en-Chaux ('). Les juges ne se prononcèrent pas, faute d'éclaircissementssuffisants, et ajournèrent les parties nu premier samedi de l'année1302. Nous ignorons si cette seconde conférence eut heu, mais cequi est certain, c'est que le lendemain de l'Octave de Pâques de cettemême année, le différend était réglé à l'amiable: Hugues reconnut àl'abbaye la propriété des dîmes d'Amblans, l3ouhans et Velotte, seréservant seulement l'usufruit de la part qui lui appartenait légiti-mement ; en retour, les religieux lui abandonnèrent jusqu'à sa mortles revenus dont ils jouissaient â Pomoy et à Moffans ('). Philippeapprouva cet arrangement, et le comte de Bourgogne, Othon, ratifialui-même ce que son frère avait conclu (e).

(I) Cartulaire de l'abbaye de Luxcuil, f 251 Archives nationales, J. LOtI; Biblio-thèque nationale, collection Moreau. 889, f 365.-

(2) D. Grappin, [V, 20.(3) Commission du roi Philippe le Bel (26 niai 1301). Archives nationales, 3.208(4) Commune du canton de Luxeuil. Bien qu'englobé dans la terre abbatiale de

Luxeuil, le village de Sainte-Marie-en-Chaux n'en faisait point partie. Le vieuxchâteau de Sainte-Marie était dès le XII- siècle aux comtes de Bourgogne qui enfaisaient leur poste avancé contre l'abbaye de Luxeuil, et qui l'ont conservé jus-qu'au XV . siècle Cl'. Suchaux, La 1-Iaute-Saôue, 11, 48.

(5) Moffons, aujourd' hifi commune du canton de Lure, fut tenu en fief du XIV"au XVI' siècle par des seigneurs de la maison des comtes de Montbéliard, puisfit partie de la terre de Granges jusqu'à la Révolution. Ibid. 11, 70,

(6) Archives du Doubs, B, 508; I). Grappin, 1V, 93 Finot, Les Sires de Fauco-gney, p. 138.

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Philippe eut également ii s'occuper d'Hugues de Saint-Loup, quiavait pillé, dans le courant de l'année 1300, le village d'Anjeuxdépendant de la terre de Luxeuil il donna au bailli de Lamarchel'ordre de l'informer rigoureusement de la vérité, d'élargir les pri-sonniers, de faire restituer les biens usurpés, d'obliger le sire deSaint-Loup à la réparation de tous les dommages causés, et de faireune punition éclatante des coupables. Pareil mandement fut expé-dié au bailli de Chaumont (').

Mais les ballis exécutèrent mal les ordres du roi et ne çhatièrentpas avec une grande énergie le sire de Saint-Loup, puisque peud'années après, le frère de celui-ci, Othon, chancelier de Remit-e-ront, sous prétexte qu'il avait la garde de Fontaine. s'emparâ dèsterres, métairies et châteaux du prieuré, chassa les habitants et saisitleurs effets, Le connétable de France, Gauttiier de Châtillon, comtede iPortieux, prit en main les intérêts de l'abbaye, et, par son entre-mise, Othon' rendit tout ce qu'il avait dérobé et renonça publiquementà ses prétentions afin de donner plus de poids à la promesse qu'ilfit de ne plus rien entreprendre de semblable, Othon consentit àpayer, s'il violait sa parole, une amende de cinq cents francs donttrois chevaliers furent garants (2),

Cependant Philippe le Bel, informé de la conduite d'Othon, se rap-pela celle de Bogues, dont le' châtiment n'avait pas été proportionnéà la faute, et renouvela à Guillaume de Nogaret les ordres qu'il avaitprécédemment donnés au bailli de Lamarche ('). Nogaret-ajourna lespat-tics à Coifly ('), où le monastère de Luxeuil comparut dans la per-sonne de .frère Thiébaud, abbé, de fi-ère Etienne, sacristain, et defrère Pierre, prieur de Fontaine. Othon de Saint-Loup s'y trouvapcur répondre tant en son nom qu'en celui de Rogues son frère,dont il avait procuration ils furent condamnés tous cieux à restituerleurs rapines, et Othon , dut en outre verser sept cents livres pourindemniser ses victimes: une amende de mille marcs d'argent -partager également entre le roi et l'église de Luxeuilserait infligéeà celui qui ne se soumettrait pas à ce jugement.

(I) Pou,- montrer tout l'intérêt qu'il portait aux reli gieux de Luxeuil. Philippeleur permit d'acheter clans son royaume les livres et autres choses nécessaires àleur abbaye, et de les v conduire sans aucun obstacle (mandement daté du ven-dredi après la translal ion de saint i3enoit, 1303). I). Grappin. W, 24.

(2) Ibid.- --(3) Mandement daté de Paris, le 27 septembre 1307.(4) Coilîy-lc-Haut, ou Coiffy-lè-Ghâteau', commune du canton de Bourbonne

(l-iaute-Marnc). -

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Philippe rendit encore un autre service à l'abbaye. Jean de F'aucô-gney, frère de l'abbé Thiébaud, s'était emparé du château de Brdttequ'un seigneur des environs, Renaud de Mollans, tenait en fief desreligieux de Luxeuil. Le roi de Franc; à qui l'on porta plainte, envoyades instructions précises à Guillaume de Nogaret (27 novembre1307): Jean de Faucogney abandonna sa conquête et le seigneur deMollans fut rétabli dans son fief ().

Aussi, en retour de la protection que lui assurait le roi de France,l'abbé Thiébaud n'hésita pas i se ranger de son côté et à le soutenirdans sa lutte contre le pape Boniface VIII: le 9juillet 1303, il adhé-rait à la convocation d'un concile général et déclarait que si le papeprocédait contre le roide France, il était prêt à s'unir au roi et auxbarons, jurant de ne les abandonner jamais (2).

L'abbé Thiébaud, mort en 1308, eut pour successeur Etienne Il1308-1315) et le siège abbatial resta ensuite vacant pendant cinq ans.Le sire de Saint-Loup profita de ce que le monastère était sans chefpour ravager les terres du prieuré de Fontaine, mais le roi de France,Philippe V, intervint et chargea le bailli de Cbau m'ont de mettre à laraison le seigneur pillard (5).

Le gouvernement de l'abbé Eudes de Charenton (1319-1345) ne futpas troublé par la guerre. Les religieux profitèrent de ce momentd'accalmie pour construire une fort belle église() qui est venue jusqu'ànous. Mais l'avenir leur paraissait si peu sûr qu'ils songèrent alorsû prévenir par des travaux de défense les incursions des petits baronsdu voisinage ; le village de Briaucourt (5) fut entouré de murailles;l'on construisit à Baudoncourt (') un château, et, dans l'enceintemême de l'abbaye, une tour à neuf étages (7),

Si Eudes eut des démêlés avec la cour d'Avignon, du moins il vécuten excellents termes avec les rois de Francé Charles 1V et PhilippeVi; ce dernier eut pour l'abbé de Luxeuil une telle condescendance

(1) D. Grappin, IV, 27; Suchaux. La l-Iaute-Saône, I, 91.(2) Cf. de Bréquigny, Histoire du diff'e'rend entre Boniface VU! et Philippe le Bel,

preuves, p. 122.(3) Lettres datées de Joinville, 8 novembre 1319. D. Grappin, 1V, 29(4) Sur cette église, voir de Ilauséjour, L'Église abbatiale de Luxent!, Besançon,

1091. - L'architecte, Renaud de Fresnc-Saint-Mammès, fut anobli par l'abbéEudes. Cf. Suchaux La Haute.Sadne, 11, 17.

(U) Ji reste encore des traces de ces vieilles fortifications. Suchaux, Ibid., 1, 90(G) Le château de flaudoncourt était déjà en ruine à la (in du X\'jI' siècle et

avait complètement disparu en 1733. Archives du Doubs. Visites d'abbayes (abbayede Luxeuil).

(7) Cette tour a subsisté, dit Grappin, jusqu'aux premières années du XVI]Josiâcle. Histoire de l'abbaye royale de Luxeu, 1V. 30.

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qu'il exigea de ses officiers préposés à la garde du monastère le ser-ment qu'ils ne porteraient pas atteinte aux droits de l'abbaye (').

Sous l'administration de Fromond de Corcondray, successeurd'Eudes, Philippe VI intervint encore pour protéger l'abbaye contreun adversaire redoutable, Jacques de I3audoncourt (2), l'un des plusimplacables ennemis d6 l'influence française en Franche-Comté.Assiégé par les troupes françaises dans son château de Baudoncourt,Jacques parvint à s'échapper, et, associé avec quelques autres rou-tiers, continua à mener une vie d'aventures () pour prévenir toutretour offensif, Philippe laissa à Luxeuil trente gens d'armes à sa solde.Il est vrai que ces hommes furent plus à charge à la ville qu'utiles àsa sécurité mal payés, ils vécurent.de pillage. Des plaintes arrivè-rent au roi qui enjoignit au bailli de Chaumont de leur donner ce quileur était dû, et de les faire sortir de la ville (4).

Il est à remarquer d'ailleurs que l'autorité du roi de France n'étaitpas toujours respectée par ses officiers, et que souvent ceux-ci outre- -passaient leurs instructions et opprimaient ceux qu'il devaient dé-fendre, avec d'autant moins de scrupule qu'ils pouvaient le faire plusimpunément. Ainsi, lors de cette prise d'arrhes de Jacques de Bau-toncourt, le bailli de Chaumont .- qui était alors un certain Geoffroyde Nancey - venu à Luxeuil pour veiller lui-même à la défense de laville. commença par enlever les clefs de la porte du Chêne à l'hommede confiance des religieux et les remit de son propre chef à qui il luiplut. Les religieux adressèrent leurs protestations au roi, qui . con-damna cet abus de pouvoir de son agent, niais dut plusieurs foisfaire connaitre sa volonté avant d'être obéi. Deux mandements furentenvoyés à cet effet, le 18 janvier et le 30 juin 1347. Geoffroy répondit,le 14 août suivant, que les troupes du roi occupant Luxeuil, il luiparaissait nécessaire que les clefs de la ville fussent entre ses mainsil ajouta qu'il ne songeait pas à empiéter sur les droits de l'abbé, et

(1) L'ordre du loi, daté de 1536, fut notifié par Jean de Dinteville, chevalier-réformateur, député pour la province de Chamnagne et de Brie. D. Grappin, 1V, 33.

(2) Jacques, seigneur de Saint-Remy, est appelé dans les documents de l'époqueJacques de l3audoncourt,du nom de son meilleur château. Dans une lettre auParlement de Paris, du 18 janvier 1347, le roi de France le déclare son « ennemimortel . D. Grappin, IV, 35. -

(3) Jacqués de Baudoncourt tomba en 1359 entre les mains des Bourguignonsqui le jetèrent dans les cachots du château de Semur, où il fut exécuté l'annéesuivante. Cf. .r-' inot Recherches sur les incursions des Anglais et des Grandes Compa-gnies dans je duché et le comté de Bourgogne. (Bulletin de la Société d'agriculture,sciences et arts du département de la Haute-Saône, 1874, p. 112).

(4) Lettres dît 21 aoat 1349. D. Grappin, 1V, W.

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que, la guerre finie, les clefs lui seraient rendues. Irrité que lotidifférât ainsi l'exécution de ses ordres, Philippe adressa à Geoffro y devives réprimandes et fit entendre des menaces: « Ramenes au premierestat sans dèlay, ècriyait-il au bailli le 2 . octobre, non obstant laréponse ou excusation dessus dicte he aultres quelconques... Que lesdits religieux n'aient cause de recommencer surce plainctes parcleversnous, quar il vous en deppleurait et en vostre deffaut le ferions fairepar aultre à vos deppens » ('). C'est aloi-s seulement que le baillisedécida à rendre-les clefs. Peu de temps après, il fallait encore l'inter-vention du roi pour maintenir, contre les prétentions du même bailli,l'abbé et les religieux dans le droit de recueillir l'héritage des bâtardsà Luxeuil et dans tous les villagés de la terre (').

Si, sous le règne de Philippe de Valois, au lendemain dé Crécy etdes premiers revers de la guerre de Cent ans, la volonté royale •sefaisait si faiblement sentir aux extrémités du ro yaume, de fut pisencore sous le règne de Jean le 'Bon, après le désastre de Poitiers.Jean de Bourgogne('), seigneur de Montaigu (5, de Fontenoy etd'Amance, fut pendant qéelques années le véritable protecteur, le

sous-gardien » () de l'abbaye, ainsi que l'appelle dom Grappin c'estgrâce à l'énergie de son lieutenant Henry de Demongeville, et aussi àl'activité de l'abbé Guillaume de Saint-Germain (5, que l'abbaye futà l'abri des incursions d'un seigneur lorrain, Jean de Rambervillers.Battu et pris, Jean dut réparer tous les dégâts qu'il avait commisdans les villages de la terre de Luxeuil, et ne recouvra sa libertéqu'avec la promesse de ne plus inquiéter les sujets de l'abbaye (7),

(I) D. Grappin, IV, 37.(2) Mandement du rai, du. 6août 1349. 0. Grappin, IV, 38.; Ca,lulai,'e de

Luxeuil, (o 317.(3) Jean de Bourgogne, derpier représentant mâle de lignée des comtes de

Bourgogne, mourut en 1374 et fut inhumé, le 12 mars, à l'abbaye de .Paverney.Cf. Petit, lijudra ires de Philippe le Hardi et de Jean sans Peu'-, p - 499.

(4) Le château de Montaigu fut détruit tu XVi siècle; il en reste des vestigesconsidérables sur le territoire de la commune de (:olombier, prés de Vesoul. Cf.Suehaux, La !Jaute-Saône, 1, 16,

(5) D. Grappin le nomme aussi « capitaine et gardien de Luxeu pour le roi.Histoire de l'abbaye royale de Luxcu, V, 3.

«) L'abbé Guillaume de Saint-Germain, successeur de Fromonci, avait été nommépar le pape Clément VI, et non pas élu par les religieux.

(7) D. Grappin, V, 2,

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CHAPITRE V

L'abbaye obéit aux ducs de Bourgognele traité d'Arras.

Après la mort de Philippe de Rouvre (1361), dernier duc de Bour-gogne de la branche capétienne, les Etats de ce prince avaient étédémembrés le duché de Bourgogne fit retour à la couronne deFrance, tandis que l'Artois, la Franche-Comté et la seigneurie deSalins advenaient à une grand'tantedu défunt, Marguerite, fille de lacomtesse-reine Jeanne et du roi de France Philippe le Long.

Jean de Bourgogne tenta d'évincer Marguerite, mais un grandnombre de seigneurs comtois s'allièrent à cette princesse pour dé-fendre ses droits. Sur ces entrefaites le roi Jean donna le duché deBourgogne en apanage à Philippe le Hardi, son quatrième fils, qui,par son mariage avec la petite-fille(') de la comtesse Marguerite,allait bientôt unir sous sa domination le duché et le comté de Bour-gogne.

Dés 1373, Philippe achetait à Henri de Longwy ('), pour le prix devingt mille florins et l'acquittement de certaines dettes hypothé-caires, les terres et les châteaux de Faucogney et de Chàteau-Lambert (3); grâce à cette habile acquisition, il étendait son influencepolitique dans toute la partie septentrionale du bailliage d'Amont,entre la terre de Lure, « qui tient de la duchié d'Autriche », - ainsique dit un document du temps, - et les terres de Luxeuil et deBaudoncourt e qui se tiennent du roi de France (9) ».

(I) Philippe le Hardi épousa, en 13439, Marguerite de Flandre, veuve de Philippede Rouvre, et fille de Louis de Male, mais il ne devait régner sur la Franche-Comté qu'après la mort de la comtesse Marguerite (138) et de Louis de Male(1384). - En 1364, l'abbé de Luxeuil céda à la comtesse Marguerite, moyennantquinze livres de rente sur la sauterie de Salins, tous ses droits sur Amblans,l3ouhans et Velotte. - Archives du Doubs, B. 508.

(2) Henri de Longwy; sire de Rahon, avait épousé Jeanne, dernière héritière dela branche aînée de la maison de Faucogney.

(3) Commune du canton de Melisey (Haute-Saône).(4) Cf. Finot, La Jacquerie et l'aJ/ranchissenieut des paysans de la terre de Fauco'

gney, dans la Nouvelle Revue historique de droit français et étranger. 1883, etpart, br. in-3', p. 8 et 543.

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Nais Philippe le Hardi ne chercha pas à attenter aux droits du roide France il reconnut même officiellement que l'abbaye de Luxeuilne faisait point partie de ses domaines, en la choisissant (t) comme unlieu neutre et indépendant pour régler avec Léopold III, duc d'Au-triche, les derniers arrangements relatifs au mariage de sa filleCatherine de Bourgogne avec un fils de Léopold (6 septembre 1387) (').

En revanche les officiers du duc de Bourgogne, imitant en cela lesofficiers du roi ('), se comportaient dans la terre de Luxeuil comme sielle eût été du domaine de kur maître ce n'était qu'usurpations dedroits, concussions, pillages. Ils y tenaient des assises au nom du ducqui l'ignorait ils y percevaient les tailles, les aides, les amendes, aupréjudice de l'Église et du souverain qui en avait la garde. Ces nou-veautés irritèrent le roi Charles V, qui ordonna aux baillis de Chau-mont et de Bar-sur-Aube d'informer secrètement contre les officiersbourguignons et de traduire les plus coupables aux grands jours deSens et de Champagne pour y recevoir la peine due à leur audacieusetémérité (4),

Mais, soit que le roi eût perdu de vue cette résolution, soit que lesofficiers du duc de Bourgogne.eussent été encouragés sous main parleur souverain, de nouvelles vexations ne tardèrent pas à être impo-sées à l'abbaye. En 1396, une aide extraordinaire ayant été levée pour

(1) D. Grappin, V, 8, Petit, Itinéraires, P. 189. - Philippe avait visité Luxeuilune première fois en 1379 et une seconde lois en 1,304 ; lors de ce second voyage,il devait déjà voir le duc d'Autriche, qui n'y vint pas. Petit, p. 143 et 171.

(2) Cc mariage avait été arrêté à Remiremont, en 1377, parties envoyés des ducsde Bourgogne et d'Autriche Catherine n'avait encore û cette époque que cinqans. Cf. de ]3arante, Histoire (les ducs de Bourgogne (Paris 1839). I. 152.

(3) A l'occasion de l'avènement de Charles VI, les officiers du roi exigèrent dessujets de Luxcuil double taille en forme de subside: te roi y mit ordre par lettresdu 5 juillet 1384, et défendit qu'à l'avenir on troublât l'abbaye. Le 7 juillet de lamême année, Charles fit remise aux religieux de la somme qu'ils lui devaientcomme droit de garde, en raison des charges extraordinaires que leur avait Valuesl'invasion des Anglais. Peu de temps après, le bailli de Chaumont voulut leverune taxe sur la terre de Luxeuil l'abbé forma opposition à l'exécution du rôle,le 21 février 1389, et établit que la terre de Luxeuil ne ,,faisait partie ni de laterre de France ni du comté de Bourgogne. Plus tard le même bailli voulut priverles religieux de la moitié des amende; il cherchas même, en ,1391, à les exclurede l'administration de la justice au dernier ressort. Mais le roi, par ses lettres du18 mai 1301 et du 3mai 1392, ordonna au bailli de Chaumont de se conformer àl'ancien usage et de ne connaître de l'appel qu'avec l'abbé de Luxeuil ou sondélégué. Cartulaire de Luxeuil. fol. 333 et 337; Archives de la Haute-Saône, sup.H. L D. Berthod, Dissert. p. 2; 44 Dey, 5 0 Mémoire pour servir à l'histoire dela ville de Luxeuil, p. 332.

(4) Lettres du 31 octobre 1395, Cgrtiiiaire de Luxeuil. fo 3/5,

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]a croisade à la , tète de laquelle s'était mis Jean, comte de Nevers, filsdu duc de Bourgogne, l'abbaye de Luxeuil fut taxée à trente francspour les terres qu'elle possédait à Milley, Vaivre, Echenoz et Velle-faux en 1399, une semblable somme lui fut réclamée pour sa quote-part de la rançon de Jean, devenu prisonnier des Turcs, - ét aôssi. en1401, à l'occasiod du mariage du comte de Rethel, autre fltsdu ducdeBourgogne. Enfin. , en 1402 l'abbaye fut imposée à vingt francs lorsde la contribution levée par le duc pour- l'aidei' à supporter les fraisde son voyage en Bretagne. Lets religieux de Luxeuil portèrent plainteau duc de Bourgogne, qti, par suite de la démence. de CharlesV1exerçait l'autorité eaFran .ce ils exposèrent que leurs sujets n'avaientjamais acquitté de pareilles taxes et qu'ils avaient « de tout le tempspassé estéfians, quictes et exemps de tous dons, aides et subven-cions... fais et octroiés aux ccintes de Bourgoigne par les gens d'icelluiconté » ils rappelaient en outre que leurs revenus étdient tellementdiminués par suite des 'guerres et de la mortalité qui les avaientsuivies, qu'il leur restait à peine de quoi vivre. Le duc ordonna , desurseoir au recouvrement de ces taxes ('), et chargea le bailli d'Amont -et quelques autres officiers de vérifier les affirmations des religieux.L'enquête fut favorable à l'abbay, qui n'eut à payer que l'aide levéepour la rançon du comte de Nevers, « laquelle ayde estoit si privilégiéeque nulz n'en devoient estre francs (2) ,.-

Après la mort de Philippe Le Hardi, Jean sans Peur, le nouveauduc de l3ourgogue, semble avoir été disposé à profiter des malheursde laFrance, et de l'invasion anglaise, pour étendre sa domination surla terre abbatiale.

Assurément le roi de France est toujours, de droit, le gardien del'abbaye, et nous le voyons encore intervenir, en 1410, dans les diffi-cultés qui surgirent entre les religieux de Luxeuil et tes seigneurs deLa Ferté-sur-Arnance, et déclarer que le village de Soyers était de lajuridiction de Luxeuit (3), Mais, de fait, le piestige royal s'était effacéet les religieux se trouvaient réduits à la nécessité de chercher un

(t) Lettre de Philippe au bailli d'Amont, datée de Paris le 21 juin 1402. Le dueordonna au bailli de rendre justice S à l'abbé de Luxeuil et aux religieux telle-ment qu'ils n'aient cause de plus retourner plaintifs par devers luy. • Cartulairede Luxeuil, P' 3E33.

(2) Lettre du duc, du 21 novembre 1403, en faveur de l'abbaye de Luxcuil aucomté de Bourgogne. Archives de ta Côte-d'Or, B. 10, 62. Cf. I). Plancher,Histoire générale et pai-ticulière de Bourgogne, 111, 193.

(3) Lettre du roi de Franco de l'an 1410 déclarative que le lieu de Soydres est dela juridiction de Luxcuil et fait partie dudit pariage, Archives de la Côte-d'Or,2,240.

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nouveau protecteur c'est au duc de Lorraine, en même temps qu'auroi, que l'abbé Guillaume de Bussul se plaint des violences de Huguesde Mandre, qui ravagea les terres de l'abbaye sous ]e prétexte qu'unde ses domestiques portant en Allemagne une somme considérableavait été tué et volé par un des sujets du monastère ('). Et lorsque, àla même époque, Thiébaud de Crosey, dont lefrère avait été assassinéet dépouillé dans un village dépendant de l'abbaye, demanda Li mainarmée réparation et fit des courses dans la seigneurie de Luxeuil,l'abbé n'eut pas recours au roi de France, dont l'appui lui semblaitpeu efficace il aima mieux sacrifier une partie de ses ressources, afinde rétablir plus sûrement ses sujets dans leurs biens, et donna àThiébaud cinq cents écus d'or, le rendant « quiet- .; de tous meffaicts,tant de feu coulé que d'hommes tués et aultres domaiges (2) . »

Si l'abbé ne s'adressa pas, dans cette occurence, au duc de Bour-gogne, c'est qu'il redoutait sans doute ce voisin puissant et craignaitde lui fournir l'occasion de mettre la main sur la petite terre deLuxeuil. Mais les officiers bourguignons s'habituaient de plus en plusà empiéter sur les droits souverains de l'abbé. La duchesse Margue-rite se croyait sur ses propres terres lorsqu'elle vint attendre àLuxeuil, le li mai t4t I, avec une suite nombreuse, la duchesse «Au-triche accompagnée elle-même d'un grand nombre de chevaliers,d'écuyers et de dames on séjourna à Luxeuil jusquau 16 mai auxdespens de madame la duchesse de Bourgongne (S) ».

Aussi lorsque; à la mort de Guillaume (le Bussul (1416). des désor-dres éclatèrent dans la terre abbatiale, la duchesse Marguerite, enl'absence du duc de Bourgogne, n'hésita pas à intervenir.

Les religieux, privés depuis longtemps du droit d'élection, vou-laient donner pour successeur à Guillaume de Bussul un des leurs,Pierre de Lugney; mais Pierrecy de l'Isle, ancien moine de Luxeuil,alors évêque de Verdun, avait obtenu déjà des bulles de l'anti-papeBenoît XIII. Les seigneurs du voisinage prirent parti pour l'un oupour l'autre des compétiteurs et préparèrent -la guerre. Des hommesd'armes se rassemblèrent sur les terres de Luxeuil et sur celles deJussey et de Faucogney. Jean de Saint-Loup, Jean de Neuchâtel,seigneur de Montaigu, Jean de Vergy et leurs gens occupaient la

(1) Hugues ne fit aucune réparation du vivant de l'abbé Guillaume c'est en1423 seulement que, l'affaire ayant été mise en arbitrage, ce seigneur se décida àdédommager (eux des bourgeois de -Luxeuil qui avaient été victimes de cesbrigandages, D. Grappin, V, 10.

(2) D. Grappin, \7, 10.t3) Petit, Itinéraires de Philippe le Hardi et de Jean sans Peur, p. 598,

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maison forte de Baudoncourt pendant que des « estrangiers desduchiés de Bar et de Lorraine, des marches cl'Allemaigne et d'aultrepart » étaient à Luxeuil. Marguerite chargea Erard Dufour('),bailli d'Amont, et Jean Sardon, lieutenant-général dudit bailliage, deleur nbtifier r que incontinent ils se départissent et sen allassentchacun en son hostel sans plus avant procéder à quelconque voye defait (2)». Jean Sardon se rendit en personne à Luxeuil et réussit àrétablir l'ordre après avoirobtenu un accord entre les deux parties(').On convint que le différend serait soumis au concile de Constance,qui ne s'occupa pas de Luxeuil plus tard. en 1418, le pape Martin Vdécida en faveur de Pierrecy de l'Isle parce que l'élection de Pierre deLugney lui paraissait attentatoire aux droits de la papauté.

Le duc de Bourgogne était donc en réalité, dés 1416, le véritablesouverain de la terre abbatiale de Luxeuil, bien que le roi continuâtà percevoir les revenus attachés à la gardienneté ). Les officiersbourguignons de Vesoul, de Faucogney et de Montjustin s'enten-daient entre eux pour enlever aux sujets de l'abbaye leurs privilègeset les frapper d'impôts. Au lendemain de l'assassinat de Jean sansPeur (1419). Philippe le Bon, le nouveau duc de Bourgogne, défenditlui-même l'abbaye contre ses gens, et, par une lettre datée de Troyes,le S avril 1420, interdit au capitaine et au prévôt de Faucogney« toutes voies de fait et autres » qui tendraient à rendre plus difficilesles rappotts commerciaux entre la terre de Luxeuil et celle de Fau-

• cogney; les habitants de Luxeuil, disait-il, endureraient de grandessouffrances si qn les empêchait d'acheter hors de chez eux les mar-chandises qui leur sont nécessaires, et, d'autre part, si l'abbayeusait de représailles, les marchés et les foires de Faucogney perdraientleur importance e Pourquoi nous, les choses considérées, eu regardà la contiguité et proximité desdits pays et que la terre de Luxeu estenclavée en notre dite Comté,... voulons et vous mandons que au casdessus dit vous laissiez lesdits de Luxeu doresnavant.. vendre etacheteren notre dite Comté de Bourgogne et mener et ramener de notre dite

(I) Erard Dufour. seigneur d'Aisenvillc, de Colombier-la-Fosse, ancien conseil-ler et chambellan de Philippe le Hardi, bailli d'Amont au comté de Bourgogne;Petit, Ibid., p. 6.53.

(2) Lettre de la duchesse Marguerite donnant l'ordre à Erard Dufour, bailliclAment, de mettre fin aux troubles qui désolent la Comté et Luxeuil; 22 février1416. Archives de la Côte-d'or B. 1062.

(3) Accord du 2 mars 1416. Ibid.(4) Copie non signée d'un compte des revenus que te Roy avait perçus à

Luxeuil en l'année 1416. Archives de la Côte-d'Or, B. 251

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Comté en ladite terre de Luxeu tous vivres et autres marchandisesquelconques, selon qu'ils ont accostumé au temps passé )

Mais les vexations des officiers du duc de Bourgogne n'en continuê-,-ent pas moins. En vain, le 11 novembre 1420, un huissier du par-lement de Paris requérait, en vertu des lettres du roi, le chancelierdu duc « de ne plus molester les moines de Luxeu par des impôts »,et déclarait l'abbé et les religieux « exempts et bien fondés dans leursdroits et immunités )de nouvelles impositions furent laites sur laterre de Luxeuil, deux fois en 1421 et une fois en 1423 (1.

Les religieux implorèrent encore le duc de Bourgogne qui ordonnaau bailli d'Amont de procéder à un diligent examen de tout ce quiavait occasionné les plaintes de l'abbaye. et de lui envoyer sans retardle résultat de son enquête afin qu'il pût lirendre une décision. Nouspouvons croire que Philippe le Bon modéra l'ardeur de ses officiers,puisque, dans sa lettre au bailli d'Amont, il reconnaissait déjà lesdroits incontestable des religieux, et disait qu'ils ont plusieurs villes,forteresses, terres et seigneuries « admorties, tellement qu'aprèsDieu ils ne recognoissent point de souverain (')

La mort de l'abbé Pierrecy (1424) fut le signal de nouveaux désor-dres, à Luxeuil et dans les environs, Guy Pierrecy, neveu de l'abbédéfunt, mit la main sur tout le numéraire qui se trouvait à l'abbaye,le distribua aux moines et se fit élire abbé; le duc de Bourgogne luiobtint la protection du gottvernement anglais de Paris c05tre Jeand'Llogelles, nommé abbé par le pape Martin V et jeté en prison parles partisans de Gui'. Le pape frappa Guy d'excommunication, etnomma Gauthier de Savoncourt, abbé de Moutier-Ramé (4), admi-nistrateur de l'abbaye en attendant l'élargissement de Jean d'Un-gelles. Guy, au reçu des bulles d'excommunication, s'était réfugié auchâteau de Baudoncourt, accompagné des religieux dévoués à sa per-sonne, et protégé par des soldats bourguignons; quelques-uns deses partisans l'ayant engagé à se soumettre à.Rome, il les fit massa-crer par ses hommes d'armes. Mais bientôt les assassins, effrayés duchâtiment qui les attendait, n'hésitèrent pas, pour se faire pardonnerleur crime, à jeter Guy en prison et à donner à Jean d'[Jngelles saliberté.

(1) Cartulaire de Luxeuil. f 369.(2) Les officiers bourguignons exigèrent soixante écus pour la prmière levée,

cent-vingt francs à la seconde, et cent-quarante à la troisième. D. Grappin, V, 13,(3) Cartulaire de Luxeuil, fo 371. -(4) Monastère dont on voit encore les ruines sur le territoire de la cQrnnlune dç

Moutiers-Saint-Jean, canton de Moutbar (Côte-d'or),.

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Dom Grappin (') prétend que Jean ne dut pas prendre possessionde l'abbaye. Quoiqu'il en soit, la crosse abbatiale ne tarda pas àappartenir â Guy Briffaut, qui s'efforça de réparer les maux causéspar les dissensions de ses prédécesseurs et d'affermir son autoritédans la terre de Luxeuil. Le seigneur d'Ormoiche, Outhenin Brisar-det, avait profité des derniers troubles pour faire enlever de la portede son château les armes de l'abbaye (1 qu'il remplaça par celles duduc de Bourgogne, dont il se déclarait le vassal immédiat. GuyBriffant députa son cellerier et un huissier pour sommer Brisardetd'ôter les armes de Bourgogne et de remettre en leur lieu et placecelles de Luxeuil Brisardet obéit C)•

Guy .Briffaut eut aussi des démêlés avec un seigneur du voisinage, dunom d'Erard, qui réclamait de l'argent prêté à Pierre de Lugney.Comme le pape n'avait pas sanctionné l'élection de cet abbé, les reli-gieux ne se croyaient pas responsables cle ses dettes et refusèrent deles acquitter. Sans discuter davantage, Erard et ses gens entrèrentsur la terre de Luxeuil et s'emparèrent de quelques bourgeois qu'ilsemmenèrent comme otages. L'abbé implora le secours du duc deLorraine, qui consentit à jouer le rôle d'arbitre et termina le différendpar une transaction les religieux payèrent quatre cents livres àÉrard, qui relâcha les prisonniers (12 novembre 1433).

Mais le moment était proche où le duc de Bourgogne allait êtresolenneflement autorisé à accorder à l'abbaye la protection que lesrois de France ne pouvaient plus lui assurer depuis un long temps.

Le concile de Bàle, réuni dans le courant de l'année 1431, s'étaitoLcupe déjà des moyens de mettre fin à la guerre de Cent ans.Les conférences d'Arras (4) s'ouvrirent dans le même but le 3 août14S5; on sait comment elles aboutirent à détacher la Bourgogne de.l'alliance anglaise et à ramener la bonne intelligence entre le ducPhilippe le Bon et le roi de France Charles VII, divisés depuis l'assas-sinat de Jean sans Peur,. Un article dn traité d'Arras abandonnait aPhilippe la garde de l'abbaye de Luxeuil: « Item et aussi de la partdu Roy sera transporté et baillé à mondit seigneur de Bourgoigne,pour lui et ses hoirs, contes de Bourgoigne, à toujours et en héritage

(1) Histoire de l'abbaye royale de Luxcié, V, 113.2) Les armes du monastère étaient d'azur à un saint.Benoit d'or. Les armoiries

des vingt et un derniers abbés ont été exécutées en 1880 sur les vitraux de l'égliseactuelle de Luxeuil (lancettes et rose du pignon septentrional du transept). Cf.de l3eauséiour. L'Eglise abbatiale, p. 46 et 47.() I). Berthod. Disse, t., p. 72.(4) Sur les conférences d'Arras, voir de Barante, Histoire des ducs de Bourgogne,

t. VI, p. 11 et suiv,

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perpetuel, la garde de l'église et abbaye de Luxeu, ensemble tous lesdroiz, proufiiz et emL'Iulnens que]zconques appartenans à la dictegarde, laquelle le Roy, comme conte et à cause de la conté de Cham-paigne, dit et maintient à lui appartenir, combien que les contes deBourgoigne 'predecesseurs de mondit seigneur, avent par ci-devantpretendu et querelé au contraire, disans et niaintenans icelle eglise etabbaye de Luxeu qui est hors du Royaume et ès mectes de la contéde ]3ourgoigne, devoir estre de leur garde: et, pour ce, pour bien depaix et obvier à tous diibaz, sera delaissée par le Roy et demourraladicte garde entièrement à mord i t seigneur pour lui et ses succes-seurs, contes de Bourgoigne ( 1) ».

Le 10 décembre 1435, le roi de Fiance donnait, à Tours, les lettrespar lesquelles il déclarait mettre le duc de Bourgogne en possessionde la garde de l'abbaye (') ; Philippe de son côté annonçait, peu dejours aprés,.son intention de consacrer les revenus de cette garde à tafondation de l'ordre de la Toison d'or(').

La prise de possession du nouveau gardien eut lieu avec une grandesolennité. Le duc de Bourgogne se fit représenter à Luxeuil parGuy d'Amangés, bailli d'Amont, - son conseilleret son chambellan, -Jean Thomassin, trésorier de Vesoul, et Jean Parisot, procureurgénéral du balliage d'Amont (4). Guy d'Amanges présenta à l'abbél'objet de sa commission, le requérant de donner la garde de l'abbayeau duc son maître, avec tous les émoluments dont jouissaient jadisles comtes de Champagne. Péris de Montreuil, curé de Faucogney,prit alors la parole au nom des religieux, et retraça toute l'histoire del'abbaye, depuis ses origines jusqu'au traité d'association conclu avecle comte de Champagne en 125B; il montra que ce traité ayant accordé« pour toujours » aux comtes de Champagne et à leurs successeurs lagarde de l'abbaye, nul n'avait le droit de la transférer à d'autres sansl'agrément du monastère; il ajouta que les religieux, tout èn étantdécidés â affirmer'hautement leurs droits, n'avaient pas l'intentionde protester contre le traité d'Arras, mais qu'ils désiraient savoir sice traité accordait réellement la garde de Luxeuil au duc de Bour-gogne, si le roi très-chrétien consentait à cette cession, enfin si Guy

(1) Article 19 du traité d'Arras. Cosncau. Les grands traités de ta guerre de Centans, Paris, 1889, p. 136.

(2) Archives de la Côte-d'Or, B. 11909.(3) Lettres du 15 décembre J43. Ibid. - Sur l'ordrc de la Toison d'or, institué

à Bruges en 14), voit dede Barante, Histoire des ducs de Bourgogne, t. \7, p. 2,31et suiv.

(4)Arçhjvçs du Doubs, B. 2663,

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d'Amangcs, Thomassin et Poinsot avaient reçu de leur maître lespouvoirs nécessaires pour agir en son nom. Péris termina en disantque, quels que fussent d'ailleurs ces pouvoirs, le duc de Bourgognedevait prêter en personne serment de défendre les franchises et leslibertés de l'église de Luxeuil, et d'observer dans son intégrité le traitéde 1258.

Guy d'Amanges fit à ce discours une réponse qui contenta tout lemonde, et, accompagné des deux autres officiers bourguignons, il serendit avec l'abbé et Henry de Vellefaux, l'un des religieux, sur laplace(') contiguë au palais abbatial. Là, en présence de nombreuxtémoins, l'abbé se plaça à la droite de Guy, et monta sur un siègeplus élevé que ceux qu'on avait préparés pour les officiers du duc deBourgogne: Je suis ici, leur dit-il, au plus haut lieu auquel je suiset dois estre, tant à cause de ]'Église comme de souveraineté, et vousrequiers, Messire Guy, que vous dites commis à la garde de l'églisede céans et de la terre, de par Monseigneur de Bourgone, et estesson bailly, que vous, comme commis et comme bailly, fassiez le ser-ment à moy et à l'Église, et vousjean Thomassin pareillement commecommis et trésorier, et vous, Jean Poinsot, procureur et commisdessus dit, en protestant toutes fois que par ce je n'entends ne veuxmoy départir de mes protestations premières, ains les veux avoir pourréitérées en adherens à icelles tant comme je puis »

Les officiers bourguignons prêtèrent aussitôt le serment requis,sans s'élever contre les protestations de l'abbé Briffaut, sans mêmeréclamer contre le ton impérieux de sa déclaration (').

Philippe le Bon se hâta de prendre l'abbaye sous sa sauvegarde etde prévenir, par de sages mesures, tout ce que ses officiers avaientjusque là toléré au détriment des religieux et de leurs sujets. Seslettres du 24 septembre 1440 ordonnent aux baillis d'Amont,d'Aval et de Dôle, et à tons les gens de justice du comté de Bourgogned'empêcher les soldats de se loger dans les villages de l'abbaye, d'yprendre blé, -vin, avoine ou fourrage, afin que les sujets de l'abbayesoient tranquilles, à l'abri de toute violence, et qu'ils puissent jouiren paix du fruit de leurs travaux (').

Le 3 juin 1441, Philippe prêta lui-même, à Bruxelles, le serment

(i) La place de la Baille, ai' nord de l'abbaye.2).D. Grappin, V, 19.

(3) Cartulaire de !.uxeuil, f' 381 ; Bibliothèque nationale, collection MoreanBSÇ,f' 387.

(4) D. Grappin, V, 19.

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qui lui avait été demandé; il jura(') suries saints Evangiles qu'il seraitfidèle à l'église, â l'abbé et aux religieux de Luxeuil, qu'il défendraitleurs droits, leurs libertés, leurs coutumes et leurs biens avec lemême zèle qu'il défendait ses propres biens, et qu'il observeraitexactement toutes les conventions faites entre les précédents gar-diens et le monastère. Jean de Jouffroy ('), prieur de Saint-Vincent.et depuis abbé de Luxeuil, avait été délégué par les religieux pour lesreprésenter à cette cérémonie ; quelques mois après (') Jouffroy prê-tait entre les mains du prince, au nom du monastère de Luxeuil,le serment d'observer avec une scrupuleuse exactitude tous les arti-cles du traité de 1258.

Désormais les ducs de Bourgogne eurent, comme jadis les comtesde Champagne et les rois de France, la moitié des revenus de l'abbaye;ces revenus s'élevèrent, en 1460, pour la part afférente au duc deBourgogne, â 3u0 livres 18 solB deniers (4) Le duc et l'abbé parta-geaient entre eux les droits d'éminage, de rouage, de saunerie, deboucherie, de boulangerie, d'aunage, la taxe pour vente du bétail etdes cuirs, les droits de tabellionage et de banvin, les amendes et lestailles payées par les habitants de la terre de Luxeuil. L'abbé possé-dait en propre la souveraineté de six petits villages - Esboz, Brest,Brotte, Visoncourt, Ormoiche et La Pisseure ; il percevait seul lesdroits de mainmorte et la taxe sur les fours et les moulins, ainsi queles grosses et menues dîmes.

(I) Cartulaire de Luxeuil, fo 391Bibliothèque nationale, collection Moreau,8439 f 347.

(2) Jean de Jouffroy, né à Luxeuit vers 1412, fit ses études à Ode, puis à Colo'gne et à Paris, et embrassa à Luxeuil ]a vie monastique il professa ensuite pen-dant trois ans la théologie et le droit canon à Paris. Chargé de négociations im-portantes par le duc de Bourgogne, il fut récompensé de ses services par le titred'abbé de Luxeuil et par l'évêché d'Arras. Puis Louis XI se l'attacha; il lui fitdonner le chapeau de cardinal et l'évêché d'Alby, le nomma son aumônier, joignitl'abbaye de Saint-Denis à tous les bénéfices qu'il possédait, l'envoya à Madridpour conclure le mariage du duc de Guyenne avcc.unc infante, enfin le chargead'assiéger dans Lectoure • le comte d'Armagnac qui fut tué par trahison. SurJouffoy, qui mourut en 1473, voir Gallia christiana, XV. 159; Biographie MichandGrappin, Eloge historique de J. Jouffroy, cardinal d'AIby, Besançon, 17U5, in-8°;D. Cellier, Journal de Verdun, mars 1738.

(3) Le 14 octobre 1441. Archives de la Côte-d'Or, B. 11904.(4) • Des rentes et revenus appartenans à la garde de lEglise. ville et terre de

Luxeul... • Bibliothèque nationale, Mss., 182 Colbert. n° 2. - Cette pièce n étépubliée in extenso dans notre de Luxoviensiu,n abbatu,n protestate (appendix 11,P. 99-11Oi.

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CHAPITRE VI

La terre de l'abbaye est réunie à la Franche-Comté.

Le traité d'Arras ne devait pas donner à l'abbaye la sécurité quiqui lui faisait défaut depuis des siècles('). Les garnisons licenciéesapi-ès la conclusion de ce traité ne tardèrent pas en effet à devenir lenoyau des compagnies d'aventuriers si tristement célèbres sous le nomd'Écorcheurs c Et chevauchaient et allaient de pays en pays, demarche en marche, qucrant victuailles et aventures pour vivre et pourgagner, sans regarder ne épargner les pays du roi de France, du ducde Bourgogne, ne d'autres princes du royaume (?).

Au printemps de l'année 1439, Antoine de Chabannes, Blanchefortet Chapelle, à la tac de cinq ou six mille routiers, passèrent parlaterre de Luxeuil lorsqu'ils se rendaient en Bourgogne après avoirdévasté le pays de Montbéliard ils logèrent à Saint-Loup, Corbenay,Anjeux, et s'y arrêtèrent plus de quinze jours, saccageant tout commed'habitude () -

C'est en vain que la noblesse comtoise leva des soldats pour donnerla chasse à ces brigands les protecteurs ne valaient souvent pasmieux que leurs adversaires. On sait comment le Dauphin de France,

- le futur Louis XI, pour occuper ces bandes, en composa une arméequ'il mena guerroyer, au profit de la maison d'Autriche, contre lesSuisses. L'armée entière était réunie à Langres, le 28 juillet 1444, etelle se mit presque aussitôt en mouvement. Le Dauphin traversa lui-même Luxeuil (4), du B au 10 août, venant de ionvelle, et se dirigeantsur Lure et Montbéliard.

(I) Dans les années qui suivirent le traité d'Arras, les officiers du duc de Bour-gogne eurent de grands ménagements pour les habitants de la terre de Luxeuil,et conservèrent à l'abbé lapparence dc la souveraineté: ainsi nous trouvons en145 un « mandement de Jean Tarrcvcicl, lieutenant du bailli d'Amont, ordonnantau prévôt de Luxeuil d'exécuter une sentence contre des particuliers de sâ terre,sur lesquels les sergents dit n'avaient pas osé instrumenter, crahi(e que lachose ne feufl au desplaisrr de l'abbd. . Archives du Doubs, B. 508.

(2) Olivier de la Marche, Chroniques, liv. I, eh. CCXLIII.(3) Tuetey, Les Écorcheurs sous Charles VII, Montbéliard, 1874,2 vol. in-8 (t. I,

p. 117).(4) 11 s'y arrêta au moins une journée et y passa la nuit. Tuetey, I. 175 et 372.

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Peu de jours après, le lundi 31 août, les gens de Regnault dAr-genay, seigneur du Plessis, lieutenant du sénéchal d'Anjou, senvinrent courir devant Luxeuil et dans les villages environnants -Froideconche, Saint-Sauveur, Breuches, Briaucourt - où ils enle-vèrent tout le bétail (I). Pierre de V erre y , capitaine de Luxeuil, leurayant fait demander le motif de semblables déprédations que rien nepouvait justifier, ils répondirent « qu'ils ne vouloient point faire demal et que ce n'estoit que pour avoir des vivres tant seulement».Cela ne les empêcha pas de s'emparer de plusieurs habitants qu'ilslièrent sur des chevaux et emmenèrent avec eux jusqu'au pont deCorre('). Là, les honnêtes routiers offrirent la liberté à leurs prison-niers moyennant une rançon de sept cents florins cette propositionayant été acceptée avec empressement, ils renvoyèrent aussitôt genset bêtes, gardant en guise de nantissement treize tètes de chaqueespèce, savoir treize individus et treize des mêilleurs chevaux quel-ques-uns de ces otages parvinrent à s'échapper pendant la nuit, lereste fut conduit à Daroey et jeté dans une basse tosse.

Sur ces entrefaites, Guillaume dOiselay, seigneur de La Ville-neuve (3), préposé par le duc de Bourgogne à la garde de Luxeuil,dénonça au roide France la conduite des routiers, et demanda la déli-vrance pure et simple des malheureux paysans. Charles VII fit aussitôtdéfendre à ses troupes de lever aucun « appatis » sur les terres deLuxeuil, mais cette défense resta lettre morte, et il fallut implorer denouveau l'intervention royale. Cette fois le roi de France adressa aumaréchal d'Anjou ou à son lieutenant un mandement ordonnant lamise en liberté immédiate des prisonniers avec tous leurs biens.Quand ces lettres parvinrent au sénéchal, il les prit, les « dépeça et lesgecta contre terre en jurant très fort que les villains y mourroientou paieroient ladicte somme de sept cents florins». On eut beau pro-tester, négocier, faire parler au sénéchal par le duc de Bourgogne enpersonne, tout fut inutile, et il fallut absolument, pour ravoir les pri-sonniers, payer la rançon exigée.

Les faubourgs de Luxeuil et les villages voisins souffrirent plusencore que la ville elle-même. M. Tuetey a publié les principalespièces de l'enquête que le duc de Bourgogne fit faire, après le passagedes Écorcheurs, Par Huguenin .Belverne, tabellion de Luxeuil, Gau-thieçourbenay, lieutenant du prévôt de Faucogney, Nicolas Hugot,Gauthier Heni'ion et Jean du Moulin, substituts du procureur général

(t) Tuetey, 1, 170 cL 171..(2) Commune du canton de Jusscy (Haute-Saône).(3) Commune du canton de Vesoul.

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de Bourgogne. Les dépositions () des nombreux témoins interrogéspar ces magistrats se ressemblent toutes ; nous n'en citerons quequelques-unes.

Un bourgeois de Luxeuil, Regnault Bellebos dAmblans, habitantle faubourg du Chêne, dit « qu'il échut au faubourg du Chesne cinqlogis de gens d'armes de mondit le seigneur le Daulphin et ne sait lesnoms des capitaines, car l'on ne s'osoit trouver devant eulx, pour cequ'ils battoient et rançonnoient tous ceulx qu'ils povaient avoir etatteindre ». Une femme de Saint-Sauveur, « Catherine, femmeEtienne le Jay devillers, admodiateur de la grange de Saint-Salveur,appartenant à reverend père en Dieu monseigneur l'abbé de Luxeu,dit et despose que audit temps les gens de monditseigneur le Daulphin,ont esté logiés en ladicte grange et lui ont mengié douze brebis, et luiont dommaigié et gastè environ deux mille gerbes de soigle, luituèrent deux veaux, une vache,.., lui ont dépeciS une table, une vouge,les fenestres, huissières, cuveaux, vaisselle et plusieurs autres menusedifices de bois estans en ladicte grange et en la maison d'icelle, ontdescouvert ladicte grange en plusieurs lieux, tellement qu'elle esttoute détruite et déserte, lui ont gasté environ vingt-quatre journauxd'avoine et soixante charretés de foin.. .

A Baudoncourt, à La Chapelle, ,à Ail loncoùrt, à Breuches, les Écor-cheurs brûlent des maisons et coupent les arbres des vergers; à Sainte-Marie-en-Chaux, ils démolissent le four banal,, incendient le moulinou en brisent les meules ; à Fontaine, ils pillent l'église et le prieuré,et mettent à mort deux hommes. A Anjeux, un enfant de trois ansmeurt « des grans maux qu'ifs lui firent ». A Urecourt, « ilstuèrent ung nomme Symonot des plus notables, item emmenèrenttrois femmes, lesquelles ils menèrent à Montdoré et le lendemainqu'ils se deslogèrent les laissèrent aller». Un malheureux habitantde Mailleroncourt_Saint-Pancra s fut conduit à Ormoy on lui lia lespieds et les mains et on le plaça devant un grand feu « pour le rostir »« lequel quand il sentit le feu et q u'il commença à bruller, cria etbrailla, et l'ardirent tellement que les pièces de son corps. de son doset de ses naiges chureht par grans pièces devant lesdits gens d'armes.Et lorsqu'ils virent qu'il se mouroit, ils le délièrent et le mirent krançon de quatre saluts d'or qui leur furent paiés comptant».

Jean Lambert, . sort Saint-Sauveur, dépose que les compagnons duDauphin prirent son fi ls âgé dâ trente-deux ans, « et après ce qu'ilsl'eurent battu très vilainement pour ce qu'il se rançonna à certaine

(t) Tuetey, II, p. 809 et suiv.(2) Ibid., 11, .329. '

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grosse somme d'argent, et le hmenèrent en leurs logis ès faubourgdudit Luxeu et pour ce qu'il ne put avoir cedit jour ladite rançon, leloièrent les bras derrière le dos et le firent monter sur la tour de laporte de l'entrée dudit faubourg dudit Luxeu, de dès le haut de ladicte tour le firent saillir à terre, dont il fut incontinent mort ('J».

Ainsi rançonnements, incendies, vols et pillages, meurtres et tor-tures, tels sont les exploits qui signalent partout. le passage desÉcorcheurs.

Mais heureusement, sous l'administration du célèbre Jouffroy , abbéde 1449 à 1468, la terre de Luxeuil jouit dune parfaite tranquillité, etput réparer, du moins en partie, les maux passés. Jouffro y avait sugagner les bonnes grâces du duc de Bourgogne, dont il fut l'un desconseillers intimes avant de devenir le confident de Louis XI aussi,de son vivant, les officiers bourguignons montrèrent-ils la plus grandesollicitude pour les intérêts de l'abbaye. Mais le successeur deJouffroy.Antoine de Neuchâtel (2), évêque et comte de Toul, eut à soutenir unprocès à la Chambre des comptes de Dijon contre les États de Bour-gogne. L'abbé de Luxeuil refusait de payer sa quote-part des six dentmille livres de subsides votêsen 1474 parles États en faveur deCharlesle Téméraire. La Chambre des comptes approuva les raisons del'abbé et reconnut ses privilèges; mais n'osant pas contredire ouverte-ment les Etats, elle décida que la terre de Luxeuil payerait pendantsix ans « par manière de gracieux et de libéral don » une somme dedeux cents livres, combien que par cy devant ils (l'abbé, les reli-gieux et les habitants de la seigneurie) n'aient esté contribuables neaccoustumé payer aucune portion des aydes accordées à mondit sei-gneur ne à messeigneurs ses prédécesseurs en ses duché et comté del3ourgoigne (') D.

() Tuetcy, n, 329.(2) Antoine de Neuchâtel, fils de Th jébaut de Neuchûtel, maréchal *Bourgogne,

et d'Anne de Ohâteau-Villain, avait été élu évêque de Toul par les chanoinesfrançais et bourguignons (1460); on outre parti, composé de 'Foulais, de Lorrainset d'Allemands, avait donné ses suffrages à Frécléric de Clisentènes, mais le paperatifia l'éjection d'Antoine. - CI: Dom Calmer, Histoire de Lorraine, 11,970;'rhiéry, Histoire de la juPe de Toul et de ses éniqtcs, 11, 23. - M. J. Pinot a publié(Vesoul, Sochaux, 1876) l'interrogatoire du barbier d'Antoine de 'Neuchâtel,aeusé en 1493 d'une tentative d'empoisonnement sur ]a personne de son maitrcdont la riche succession excitait la convoitise d'un certain Jean Jouffroy, prieurde Val-de-Liepvrc, et de M. de Voisey, abbé de (ions. Voir aussi J. Finot, Unprocôs criminel au X V' siècle (Bulletin de la Société d'agriculture, sciences et artsdu département de la Haute-Saône, 1877). -

(3) Ca, hilaire de Luxcnil, fo 93,

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Les religieux implorèrent alors l'intervention de Charles le Témé-raire qui, touché par leurs prières, leur fit remise de cette impositiononéreuse ('j.

Quelques années après, le duc Charles mourait au siège de Nancy(6 janvier 1477), ne laissant qu'une fille, du nom de Marie. Le roi deFrance Louis XI fit occuper aussitôt le duché de Bourgogne, etréclama la garde de la Franche-Comté (2) « pour le bien du pays etde Mademoiselle de Bourgogne, et en faveur du mariage indubitable-ment espéré de monseigneur le dauphin et de la dite damoiselle ».Les États de la Comté acceptèrent la protection du roi et les villesouvrirent leurs portes è ses soldais. Marie éperdue se jeta dans lesbras de l'Autriche et donna librement sa main fl l'archiduc Maximi-lien, fils et héritier de l'Empereur. A cette nouvelle la noblesse desdeux Bourgognes se souleva ; les troupes du roi furent battues âVesoul et chassées de Gray. Mais, au printemps de 1479, Louis XIreprit l'offensive avec de puissants moyens: Dôle, livrée par trahison,fut mise au pillage et ensuite dévorée par les flammes ; les autresplaces comtoises se rendirent presque sans résistance; la cité archi-épiscopale de Besançon reconnut te roi pour gardien et protecteur.

L'abbé de Luxeuil, qui avait embrassé lui aussi la cause de Mariede Bourgogne, négocia un acconimodemerit; le 26 juin 1479, sesreprésentants ('),assistés de deux bourgeois ( , )de Luxeuit signèrentà Faucogney avec le gouverneur de la Champagne un traité pour laréduction de la terre abbatiale en L'obéissance du roi: le gouverneurpromettait au nom de Louis XI de protéger contre tous l'abbé, lesreligieux et leurs hommes, et en revanche ceux-ci faisaient le ser-ment « d'estre bons et ]oyaulx au Roy, et tenir son pary envers etcontre tous et mesmement contre le duc Maximilien d'Autriche et laduchèsse sa femme, et d'estre, deinonrer envers luy tous ainsi qu'ilsont accoustumé d'estre et demourer envers les prédécesseurs Roys deFrance ( 1 ) »

Antoine de Neuchâtel ne tarda pas â recourir è Louis XI pour for-cer la saunerie de Salins à acquitter la rente qu'elle n'avait pas payée

(1) Ibid., •C' 94 (Lettres datées de Bruges et adressées par le duc de Bourgogne àson parlement séant à Dôlc).

(2) Cf. Clerc. Conquéte de la Franche-Comté par Louis XI (Académie de Besan-çon, lU3, p. 124).

3) Messire Estienne Bevresolz, prévôt du monastère de Luxeuil, messireJacques de Champoillon, prieur de Saint-\Talbert, noble homme - Jacques deGraehant, et messire Pierre de la Cusine.

(4) Jehan Garnier et Symon Soyarli.(5) Archives de la Côte-d'Or, B, 11889.

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ù l'abbaye de Luxeuil depuis le fr octobre 1460. Le roi de Prancaccueillit favorablement cette requête et donna des ordres en consé-quence (I)

A la mort de Louis XI, Charles vin, son successeur, chargea lebailli d'Amont de prêter le serment qu'il devait cômnie gardien del'abbaye ('). Les États de Franche-Comté, réunis à Besançon, avaientreconnu comme souverain de la province le nouveau roi, qui étaitfiancé à la fille de Marie de Bourgogne mais, dès que Charles VIIIeut épousé Anne de Bretagne, les Comtois se regardèrent commedéliés envers la France. Maximilien d'Autriche, père et tuteur, desenfants de Marie de Bourgogne, morte en 1485, vint reccnquérir laFranche-Comté: Besançon lui ouvrit ses portes, ainsi que Faucogney,Vesoul et Amance, et Maximilien fit rendre la justice cri son nom àLuxeuil dont il prétendait être le gardien légitime. Antoine de Neu-chàtel s'adressa nu roi de France qui déclara nuls tous les jugementsprononcés it Luxeuil par les gens de Maximilien, et somma celui-ci defaire restituer aux religieux et à leurs sujets tous les impôts quiavaient été perçus par les officiers bourguignons. Le prince d'Orange,lieutenant du roi en Franche-Comté, fut chargé de signifier à l'Em-pereur les volontés de Charles VIII ; plein d'égards pour l'abbaye, ildéfendit en même temps aux officiers du roi et à tous les gens d'ar-mes français de prendre leurs quartiers dans les villages de la terrede Luxeuil ou même de s'y approvisionner de ce qui leur était néces-saire ('). -

Mais bientôt Charles VIII, qui rêvait de grandes conquêtes enItalie et en Orient, renonça de gaieté de coeur à la Franche-Comté.qu'il abandonna à Maximilien par le traité de Senlis (23 mai 1493);du même coup les princes de la maison d'Autriche restaient définiti-vement les gardiens de l'abbaye de Luxeuil.

Aussi, à la mort d'Antoine de Neuchâtel, Maximilien voulut avoirun abbé de son choix: il fit élire Jean dè la Palud de Varambon ('),protonotaire apostolique, tandis que le pape Alexandre VI nommait

(1) Lettres du 9 août lInO. Cartulaire de Luxeuil, f 40h.(2, Lettres du 11, mars 111%. Ibid., f 107.(3) D. Grappin, V. 31L

(4) ... Cognoissant que pour le bien, repos et scureté de notre pays et Comtéde Bourgonc, ès limites duquel la dite abbaye est assise, et aussi pour la garde,tuicion et deffense des deux fortes places appartenans à icelle situées sur lesfrontières et advenues de notre pays, il est très nécessaire de pourvoir la diteabbaye de personne aiant puissance et parens en nostre dit pats, nous eseripvonsà nostre S. Père en faveur et recommendalion de rostre aimé et féal cousin MaJehan de la Palud... , Cartulaire de Luxeuil. fo4 19.

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le cardinal de Grolay. Le fils de Maximilien, Philippe le Beau, quigouvernait alors la Franche-Comté, êcrivitp même de Bruxelles auxbourgeois de Luxeuil pour les engager à soutenir l'élection de Jeande la Palud et à

'combattre son compétiteur ( 1 ) . Le pape céda et

laissa Jean de la Palud prendre paisiblement possession de la crosseabbatiale.

On voit par là que .Maximilien n'entendait pas se comporter àl'égard de l'abbaye comme un protecteur et un gardien, mais commeun maître. L'abbé de Luxeuil n'avait plus en effet que peu de tempsà jouir de sa prétendue souveraineté ) dés l'année 1503, le procu-reur général du parlement de Dôle lui intentait un procès, et deman-dait qu'indépendamment de la redevance ancienne due pour droit degarde, les religieux prissent l'engagement d'abandonner à son maître -tous les droits régaliens qu'ils s'attribuaient injustement. Au lieu des'élever contre de telles préténtions, ou' de demander la constitutiond'un tribunal d'arbitres, l'abbé reconnut la compétence du parlementde Dôle et se fit représenter à sa barre: c'était agir en sujet, non ensouverain.

Le procès duraitencore au moment où éclata la rivalité de Fran-çois jer et de Charles-Quint. La fille de Maximilien, Marguerite,chargée du gouvernement de la Fi-anche-Comté, prit de sages pré-cautions pour préserver le pays des horreurs de la guerre, et réussit,grâce à la médiation des Suisses, à faire reconnaitre la neutralité deses États par le traité de Saint-Jean-de-Losne (1522). Un des pléni-potentiaires de Marguerite était précisément l'abbé de Luxeuil, Jeande la Palud, qui fit insérer dans le traité que la neutralité promise con-cernait non-seulement'la Franche-Comté, mais la cité de Besançon,citoyens et habitants d'icelle, l'abbé. couvent et habitans de Luxeujet subjectz de la seigneurie du dit Luxeul enclavé audict Comté (')

Jean de la Palud avait habilement racheté sa première faute; enfaisant constater dans Un aète officiel, et par Marguerite elle-même,l'autonomie de la terre de Luxeuil, il mettait le parlement de Dôledans l'impossibilité de terminer le procès entamé.

(l) Lettres du 3 novembre 1195. - D. Guillo. p. 349; Dey i' Mémoire pourservir à l'histoire de la tille de Luxcuil, P. 21

(2) Jean de la - Palud fit acte de souverain en grâciant un certain Robin, de)3nsigney, coupable 'd'avoir tué sa femme qui le trompait. Lettres du lb octobre11102. Car tulai,'e de Luxe',il, fo 421.

(3) Lettres patentes de Marguerite, archiduchesse d'Autriche, concernant laneutralité conclue en 1522 entre les duché et comté de Bourgogne. Recueil deschartes et autres documents pour servir à l'histoire de la Franche-Comté 50t1$ les prin-ces de la maison d'A nt,'iel,e. Vesoul, 1869, p. 20-27.

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Charles-Quint reprit après sa tante Marguerite ( 1 ) le gouverne-ment de la Franche-Comté (1530); il profita des bonnes dispositionsde Français, neveu et successeur de Jean de la .Palud - mort le 20novembre 1533 pour terminer par une transaction le différend sou-levé en 1503: l'empereur et l'abbé avaient choisi pour arbitres le chan-celier Perrenot de Crandvelle, Marc de :Rye, seigneur de Dicey, etJacques Perrot, chanoine de l'église collégiale de Dôle. Voici les prin-cipales clauses de l'arrangement signé le 20 octobre 1534:

r ... Doiresnavant toutes tailles, censes, rentes, redebvances, bois,rivières et aultres biens et droits quelconques clehus èsdits ville,villages de Luxeu, terre et seigneurie par les bahitans d'illec, meuvantet dépendant de ladite abbaye, et dont ladite Majesté jouyssoit etprétencloit luy competer et appartenir en vertu de ladite associationet garde; et aussy l'entière justice, haulte, moyenne et basse, èsditsville, villages, terre et seigneurie meuvant et dépendant comme dit esteFicelle abbaye, terre et seigneurie dudit Luxeul, seront et demeure-ront entièrement et perpétuellement audit sieur Révérend et à sessuccesseurs futurs abbés d'icelle abbaye, lesquels pour l'exerciceet l'administration d'icelle justice, haijlte, moyenne et - bassepourront instituer et establir bailly, advocat, procureur, prevost etaultres officiers que bon leur semblera

« Lequel baill y pourra, en administration de justice, cognoistreet décider de toutes causes et cas civils et criminels tant présentementpendans et indecis audit Luxeuil, que à mouvoir pour l'advenir, enmeénies auctorités et prerogative que en congnoissent et on accous-tumé congnoistre, décider et exécuter les bailliz d'Amont, d'Aval etde Dôle

u-Avec ce pourra ledit Révérend abbé de Luxeul, présent et advenir,instituer tabellion en sa terre et faire par iceluy recepvoir tous con-traux soubs son scel que sera privilégié pour tenir main garnie et pro-céder en vertu d'ieelluy jusques è provision inclusivement, et icellefaire exécuter selon les dites ordonnances -

«Et ce moyennant ladite abbaye, ensemble ladite ville et villages,terre et seigneurie en dependans coniprins tant en ladite associationque aultres villages estaus de la chambre abbatiale seront et demeure-ront perpétuellement de l'entière souveraineté de ladite Majesté de['Empereur à caLise de sa dite Franche-Comté de Bourgongne et seronticelle abbaye, ville, villages, fins, finaiges, territoires en dépendans,unis, joincts et incorporés en ladite Franche-Comté, en telle auctorité,

(I) Marguerite mourut le 1- décoinbée 11530.

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qualité et prérogative que sont tous aultres villages, terres et seigneu-ries de ladite Franche-Comté, et tous bourgeois et habitans èsditsville, villages, terre et seigneurie, subjectz à Sadite Majesté et à sessuccesseurs comtes et comtesses de ladite Franche-Comté de Bour-gongne, comme sont tous aultres manans et habitans en icelle Franche-Comté.

« Et observeront iceux abbé, religieux et couvent, bourgeois, habi-tans et subjects de ladite abbaye les ordonnances de ladite court de par-lement faictes et à faire useront des coutumes rédigées par escriptaudit comté de l3ourgongne, comme font aultres subjects dudit comté.excepté quant aux mainmortes et furmariages dont l'on usera cy aprèsen ladite terre de Luxent ainsi que du passé l'on a accoustumé jouyret user, si desdites mainmortes et furmariages n'en étoit aultrementtraicté entre lesdits sieur abbé et subjccts, et généralement quant à cequi n'est cy devant spécifiez vivotent et se régleront lesdits abbé, reli-gieux, bourgeois et habitans de ladite seigneurie de Luxeul commesont et ont accoustumé vivre tous aultres habitans de ladite Franche-Comté de Bourgongne

« En oultre sera tenu ledit sieur abbé et ses successeurs abbés deladite abbaye perpétuellement bailler et délivrer chacun an au tréso-rier de Vesoul pour et au proufiit de Sadite Majesté et de ses succes-seurs comtes de Bourgongue la somme de cinq cens francs à deuxtermes, assavoir la moitié au jour de la teste Nativité Sainct Jean-Baptiste, l'autre moitié au jour de la feste Annonciation Notre-Dame,et commencera le premier terme au jour de ladite teste- Sainct Jean-Baptiste que sera au mois de jung prochain venant .....

« Et demeurera l'auctorité audit sieur commendataire de la garde,fortification, conduieteet police desdits ville et villages de Luxcu pourluy et ses successeurs abbés comme sont les aultres sieurs mediazriére ledit Comté en leursvilles etplaces soubs ladite soit veraineté....Q)

Charles-Quint confirma ce traité par lettres patentes du l novembre154 ('), et fit ensuite prendre possession de la terre de Luxeuil pardeux de ses officiers Claude de la Baume, baron et seigneur de

(I) .Bibliothèque nationale, collection ?iforeau. (369, fol. 404 et suiv.; Archives deLuxeuil, FF. 31. - Cc traité n été publié in extenso dans le Recueil de chartes etautres documents pour servi,- à l'histoire de la F,-anche-Co,nté sous les princes de ta,natçon d'A ,,triche, p 52-61.

(2) Lettres patentes de 1ernpercur Charles-Quint portant ratification du traitéCuit entre Nicolas Perrenot, sieur de Grandvelle, Marc de Ryc, sieur de Dicey,ses procureurs spéciaux, et le seigneur abbé de Luxeuil, au sujet de la souverai-neté de la (ci-ra dudit Luxcuil. lUhI. nat., collection Morçau, 869, t' 434; Recueilde chartes ... p. 62,

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Saint-Soi-lin, maréchal de Bourgogne, chevalier de la Toison d'Or etchambellan de l'empereur, - et Hugues Marmier, président du par-lement de liMe.

On convoqua un matin sur la place publique de Luxeuil les éche-vins, maires et principaux habitants de la ville et des villages relevantde l'abbaye (I) lecture fut d'abord faite des lettres de l'empereur etde la convention dit octobre. Puis les envoyés impériaux requirentles assistants de reconnaître Charles-Quint pour leur souverain et delui prêter serment de fidélité. Quelques-uns des bourgeois présentsayant manifesté le désir de pouvoir, avant de répondre, se concerteravec les absents, l'assemblée se sépara jusqu'au soir. Lorsqu'on fut denouveau réuni sur la place publique, les officiers de l'empereur firentprocéder à une seconde lecture du traité d'union de la terre deLuxeuil ait de Bourgogne Quentin Leveau, docteur en droit,prit ensuitc.la parole; il déclara au nom des bourgeois de lit etdes habitants de la seigneurie, qu'ils étaient tous heureux de vivredésormais sous la domination d'un aussi grand prince, et qu'ils allaientprêter le serment prescrit pourvu que leur seigneur voulût bien les yautoriser. L'abbé les délia aussitôt de leur serment de fidélité, et jurale premier qu'il serait bon et Mêle sujet de Sa Majesté et de ses suc-cesseurs comtes de Bourgogne les échevins et bourgeois de Luxeuil,les maires et habitants des villages de la seigneurie le jurêrent.à leurtour. Après quoi les échevins présentèrent au maréchal de la Baumeles clefs des portes de la ville; le maréchal les prit et les donna àl'abbé, qui les rendit aussitôt aux échevins.

Dom Grappin (i), qui nous a raconté en détail cette cérémonie, aénuméré les personnages qui en furent 'témoins: Jean d'Anglare, sei-gneur de Saint-Loup, Oudot Mai-tin, lieutenant général ditd'Amont, Jean Poinsot, procureur général du même bailliage, Huguesde Falletans, seigneur de Genevrey, Guyot de Melisey, capitaine deMontjustin, etc.

C'est ainsi que la souveraineté de Luxeuil fut cédée aux comtes deBourgogne. Et comme cette souveraineté avait toujours été illusoire,il nous semble injuste de faire des reproches à l'abbé qui l'a transmise,et de l'accuser de faiblesse pour la défense de ses droits ou d'une scan-daleuse reconnaissance pour l'empereur à qui il devait son abbaye.Loin de détériorer son bénéfice. François de la Palud le privait d'unsimple droit honorifique pour rentrer clans la moitié des revenus alié-

(I) Les religieux avaient été déjà appelés à ratifier eux-mômes le traité du 29octobrc. Bibi. nat., Ibid., fol. 416 et suiv.

(2) Histoire de l'abbaye royale de Luxea, liv. VI, ch, 8,

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nés depuis plusieurs siècles ( 1 ); il restait seigneur de la terre deLuxeuil et s'assurait l'appui direct d'un prince puissant à une époqueoù son autorité était vivement attaquée par ses propres sujdts.

(I) La somme de 500 francs que l'abbé de Luxeui] s'engageait à payer annuel-leinent aux connes de Bourgogne réprésentair à peine le revenu dont jouissaientdepuis 12158 les gardiens de l'abbaye. Pour les années 1497, 1499et ISIS ce revenus'éleva à 437 livres, 5155 1. et 531 1. Archives du Doubs, B. 1555, ISSOE 1553.

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CHAPITRE Vil

Démêlés des abbés et des bourgeois de Luxeuil.

Pendant que les abbés de Luxeuii ne songeaient qu'à défendre leursdroits contre les comtes de Bourgogne, les bourgeois de la ville ten-taient en mille manières de secouer le joug des religieux et d'ac-croitre leurs privilèges. En 185, ils obtenaient de l'abbé, Antoine deNeufchûtel, la promesse formelle qu'il n'accorderait désormais le droitde bourgeoisie aux étrangers établis à Luxeuil, que si ceux-ci étaienteux-mêmes présentés par trois bourgeois('). Quelques années après,ils étaient autorisés ; pour augmenter les revenus de la ville, à établirsous le 'nom de langal ou langual, un impôt sur tous les débitants devin ils jouissaient déjà du droit de percevoir une amende de troisgros pour toutes les contraventions aux ordonnances réglant la policedes bains, la garde des portes et le service du guet (2).

La municipalité de Luxeuil comprenait, à la fin du XV0 siècle, lesquatre échevins - vulgairement appelés coquaire - et le conseil destreize ('). Les coquatre se renouvelaient, après deux ans d'exercice,par moitié chaque année, au mois de décembre, et les treize tous lesans à la même époque l'élection de ces magistrats était faite au suf-frage universel, à la majorité dés voix (4).1--

Les coquatre exerçaient dans la ville et sur son territoire, air etau criminel, la justice haute, moyenne et basse ( 1 )• Mais les abbés leur

(1) Archives de Luxeuil, JEU), 17.(2) Ibid.. AA, 1.(3) Le doyen, dont irons avons parlé plus haut (p. 28), existait encore, mais

Plutôt par souvenir que par nécessité c'était un personnage tout d'apparat, etqui parait avoir joué, à Luxeuil comme dans les autres villes de la Vranche.Comté, le rôle de médiateur entre les bourgeois et leur seigneur. CI'. Dey. Etudesur la coijditio,, des personnes. des biens et des communes au comté de Bourgogne, Paris,1870-1872, 1 vol. in-W, p. 210.

(4) Dey, i' Mémoire..., P. 18.(15) Nous en avons une preuve certaine dans le jugement de Dèle la Mausende

condamnée le 18 décembre 1529 par les bourgeois . et euquatre de Luxeuil -comme ' genoiche, sorcière et hérétique. - . à estre monde entre les deux pontsde Saint-Sauvour et 111cc çstre publiquement brusWe et arec tant que mort s'en

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contestaient ce droit ; ils reprochaient aussi aux coquatre de prendre letitre de gouverneurs de la ville, et de réunir sans leur permission lecorps, municipal et même l'assemblée plénière des bourgeois.

Aussi, en 1516. Gérard Marchand, procureur général de l'abbaye,et Thiébaud Poinsot, chargé par Marguerite d'Autriche de la gardede l'abbaye, jugèrent qu'il était de la dernière importance de mettreun terme aux prétentions des coquatre. D'un commun accord, onchoisit quatre arbitres Antoine de Salives, conseiller au parlementde Dôle et bailli de Luxeuil. Hugues Marinier, maitre ordinaire desrequêtes, lieutenant général du bailliage d'Amont ( 1 ) Léonard Mon-genet, avocat fiscal au bailliage d'Amont, et Guillaume Basin, licenciéen droit. De part et d'autre, on produisit des parchemins et des nié-moires mais les arbitres, nous ignorons pour quelle raison, ne ju-gèrent pas le différend ils attendaient sans doute, avant de se pro-noncer, la fin du grand procès engagé entre l'abbaye et l'autoritéséculière.

Peut-être aussi l'abbé François de la Palud avait-il réussi il désarmerpar des concessions libérales l'opposition des bourgeois et à régler àl'amiable les difficultés pendantes. Mais François Bonvalot, sort

était décidé à tout mettre en oeuvre pour faire triompher sesdroits.

Français Bonvalot dont la soeur avait épousé le chancelier Perrenot,père du cardinal de Granvelle, descendait d'une vieille famille deBesançon. Après avoir fait ses études à l'université de IJôle, il em-brassa la carrière ecclésiastique, devint, en 1528, conseiller et maîtredes requêtes de l'empereur Charles-Quint, et fut chargé dans lesannées suivantes de diverses missions, à Home et à Genève. Nomméen 1530 à l'ambassade de France, il remplit ce poste avec distinctionet fut pourvu, en 1537, de l'abbaye de Saint-Vincent de Besançon, puis,quelques années plus tard, de l'abbaye de Luxeuil (.

suive .. Archives de Luxent], FF. 8 Dey, Histoire de la sorcellerie au comté deBourgogne, P. H - Nous trouvons aussi dans les registres du comptable, à ladate de ISIS « Frais d'exécution de Simonette, veuve de Perrin, de Quers, con-damnée à être décapitée par les échevins et gouverneurs de Luxcuil et sa tèteâtre mise sur un pivot de bois sur le grand chemin près de l'église de Saint-Sauveur... 505015. • Archives du Doubs, B. iiSSS.

(1) Hugues Marmier fut nominé l'année suivante (1517) président du parlementde Dôle.

(2) François Bonvalot fut aussi élu par le chapitre archevêque de Besançonmais cette élection devint ta source de longs débats. Le dernier archevêque,Pierre de la Bannie, s'était donné pour coadjuteur son neveu Claude, alors âgéde six à sept ans, et la cour dc Rome avait confirmé cet enfant dans la posses-

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C'est le 34 mars 1542 que le nouvel abbé fit son entrée solennelle àLuxeuil, et prêta serment aux habitants de la ville de respecter leursdroits et leurs privilèges-

« À.ujourd'huy, il , jour du mois de mars, environ g heures dumatin, l'an de la résurrection Nostre Seigneur 1542...., devant laporte de la ville dudit Luxeul que l'on appelle la porte du Chasneest arrivé illec en personne Révérend père en Dieu, monseigneurmessire François Bonvalot, conseiller et maistre aux requestes deSa Nalesté, abbé de Saint-Vincent de Besançon avec les révérendset vénérables prieur, enfermier, refectorier, sacristain et autresreligieux de l'église et monastère Saint - Pierre, dudit Luxeul...Lequel monseigneur messire Bonvalot a illec trouvez la dite portekrmée et devant icelle grand nombre et multitude de gens entre les-quels estoient honorables hommes Nicolas Massin, Jacob Bon, Guil-laume Hutenel, Jehan Bolengier, eulx clisans les quatre et gouverneursdudit Luxeul, et plusieurs autres tant dudit Lux cul que d'autreslieux, auxquels..., ledit révérend seigneur messire François Bonvalota dit et déclaré qu'il estoit canoniquement pourveu par le saint-siègeapostolique de l'abbaïe et monastère Saint-Pierre de Luxeul, commedesjà avoient fait apparoir les bulles et provision apostoliques. alleguantestre illec venu, en intencion et en vertu de ccsdites bulles et provision,apprehender la réelle possession desdites abbaïe, ville terre et sei-gneurie dudit Luxeul, soy ouffrant faire et presterseirement de entre-tenir, garder et observer à son pouvoir les droictures, libertez, fran-chises, auctoritez, privileges quelconques de la dicte ville, et faire telsemblable seirement qu'ont fait ses prédécesseurs abbés administra-teurs et seigneurs des dites abbaïe, ville, terre et seigneurie duditLuxeul, requerant par effet des choses susdites ouverture lui estre faitede ladite porte et entrée d'icelle ville pour en appréhender la reelle etactuelle possession. Auquel monseigneur messire François Bonvalot,abbé dudit Saint-Vincent, a esté répondu par noble homme messireThomas Lenet de Vesoul. docteur ès droits, advocat et conseil pour lecorps de la dite ville de Luxeul, aprè plusieurs entrepropos, que les-dits habitans dudit Luxeul estoient très joieux de sa provision et bullesapostoliques, et pour la réception duquel ils s'estoientpreparez et misen debvoir à délibérez propos d'estre et demeurer ses humbles etloyaulx francs bourgeois... requcrant audit seigneur abbé de Saint-

sion de l'archevêché. Un accord fut signé le 211 septembre I5 on convint qu'enattendant que Claude de la Baume eût atteint l'âge prescrit par les canons., • Bon-valot resterait l'administrateur du diocèse, avec le tiers des revenus. l3onvalotse démit de ses fonctions en 11556; il mourut à Besançon le 18 décembre 1560CLweiss, Papiers Wtat du cardinal de Granvelle, paris, 1841, t. J, ,:otiçe préliminaire,

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Vincent vouloir prester solennel seirement de garder et entretenir âsa possibilité leurs droitures et auctoritez susdictes et selon que leshabitans et bourgeois ont joui et usà du passé et que leur competentet appartiennent tant par titres que autrement dehuenient. quovmoiennant ouverture et entrée se feroit en-ladicte ville, permettantaudit monseigneur et messire François joir et user, comme abbé etseigneur de ladite ville, des fruictz, prouffltz et auctoritez en dépen-dans et selon qu'ont fait ses prédécesseurs.-

« Et ce dit, ledit révérend abbé a juré sur ung missel ouvert à usaige -pour dift et célébrer les messes et divins services, de garder, entre-tenir et observer à sa possibilité lesdites franchises... pourveu quereciproqi)ement lesdits bourgeois et habitaos aient â prester seire-ment estre audit seigneur révérend abbé de Saint-Vincent bons etloyaulx bourgeois...

« Et ce fait lesdits quatre et gouverneurs, pour et en nom que dessLis,ont delivrez les cleiz de ladite porte audit seigneur reverend abbé,qui les a recues disant qu'il leur rendroit pour en user selon qu'ilsont fait du passé. Ensuite ladite porte a esté ouverte et ainsy quelesdits quatre et gou,verneurs entendoient mettre le poele sur leditseigneur reverend abbé et entrer en ladite ville, ledit seigneur reve-rend a proloquié et remonstré haultement tant auxdits quatre etgouverneurs que autres en grand nombre assistans audit acte quela superimposition dudit poele et gestacion sur son chief qt"enten-doient faire lesdits quatre et'gouverneurs de ladite ville lui sembloitdenoter souveraineté et actd competant à prince souverain, déclairantestre bien certioré ladite ville et terre de Luxeuil estre et apparteniren souverainete de invictissimus et tousiours Auguste Charles cin-quième empereur des Romains, conteste i3ourgongne, nostre trèsreboubté et très honoré seigneur et souverain prince, refusant rece-voir sur son chief ledit poele. A quoy tant par ledit messire ThomasLenet... que par lesdits coquatre... a esté dit et déclairé par après.qu'ils n'entendoient faire acte aucun en contumèlie ou injure de lasusdite souverainete, ni attentera icelle tant par ladite gestacion depoele que tous autres actes faictz en la présente assistance ains quece qu'il * s faisoiept et entendoient faire estoit pour l'honneur et amourqu'ils ont audit seigneurrévérend abbé de Saioct-Vincent... Surquoyledit seigneur abbé de Saint-Vincent a accepté humIement la re-queste des dessus dits...

« Et incontinent tels et semblables prpos finis, ledit seigneur abbé-de Saint-Vincent, en ladite devote procession desdits reli gieux etchapelains, chantans te De.wn, laudainus, le poele mis sur son. chief,

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- ôi

est entré en ladite ville et receu comme abbé et seigneur duditLuxeul, terre et seigneurie, et en tel ordre a esté conduit en l'égliseet monastère Saint-Pierre jusques au grant autel d'icelle pour et ensigne de appréhension de reelle possession.. . (')

Mais la bonne entente ne devait pas régner longtemps entre lesbourgeois de Luxeuil et leur abbé. Dès le 12 mars 1543, les coquatres'adressaient au parlement de Dôle pour être maintenus dans le droit-- contesté par leur seigneur.. - d'instruire et de juger les procèscriminels â l'exclusion des officiers abbatiaux, i_e parlement se déclaracompétent, et ordonna une enquête qui c5tablit que de temps immé-morial les bourgeois de Luxeuit avaient exercé dans la ville et surson territoire, au civil et au criminel, la justice haute, moyenne etbisse('); l'abbé de son côté prétendait que le droit de justice avaitété usurpé par les bourgeois, et en réclamait la propriété pleine etentière. Le procès menaçant de tramer en longueur, les coquatre -qui redoutaient d'ailleurs lecrédit de leur adversaire déférèrent laquestion à Charles-Quint lui-même, comme si les influences qui au-raient ruiné leur cause devant le parlement ne pouvaient pas arriverjusqu'au prince.

L'empereur saisit du litige (9 trois commissaires dont les nomslaissèrent peu d'espoir aux bourgeois de Luxeuil ('); ceux-ci accep-tèrent alors une transaction qui fut arrêtée à Besançon, le 13 avril1547, en présence de Nicolas Perrenot ('), chevalier, seigneur deGranclvelle, Guy ' du Mouchet, écuye', seigneur de Chàteau-Villainet lieutenant de la saunerie de Salins, Jacques Perrot, docteur en droit,chanoine de la métropole de Besançon, Jacques Sachet, prêtre, cha-noine de la même église, Nicolas Courcier, prêtre, prieur de Ville-Orbe, Jean dé Mesmay, notaire, et Jean Roy, citoyen de Besançon ).Voici les principaux articles de cet accord

(1) Archives de Luxeuil, AA. 1, BH. 1.2 Tl fut procédé à cette enquéte les 12, 13 et 1!3 juillet 1343. « Enquête faite

par M. Jehan l3onvnlot, commissaire député par la cour du Parlement touchantle droit qu'avaient les sieurs coquatre et bourgeois de Lu xeuil d'assister à l'ins-truction des procès criminels et de les juger à J'cxclflsion-des officiers, de l'abbéet du gardien. » Archives de Luxeuil, FF. 12.

(3) Lettres (lit septembre 1h43.(4) Dey, 3° Mémoire, p- 58 et 59. --(5) Nicolas Pcrrenot de Gram clic. né en 1486 à Ornons, mort en 1550; il fut

successivement avocat au bailliage dOrnans, conseiller nu 'parlement de DÔle,maître des requêtes de l'hôtel de l'empereur, qui lui accorda en 1530 toute saconfiance et en fit son principal ministre. C'est le père du cardinal de Granvelic.

(6) D. Grappin VI, 11.

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1° La haute justice appartient sans aucune restriction à l'abbé et àses officiers, et personne d'autre na le droit de s'y immiscer

2 0 Les échevins de Luxeuil ne prendront plus désormais le titre degouverneurs de la ville, mais simplement celui de coquatre qui leurest donné d'ordinaire

r Lorsque les bourgeois de Luxeuil voudront se réunir et délibérersur les impôts communs, ils demanderont au doyen de les convoquer;Je doyen pourra toujours assister, s'il veut, à ces assemblées;

° Les bourgeois ne pourront lever de nouvelles taxes que dans kscas d'absolue nécessité ; les répartiteurs nommés à cet effet devrontprêter serment entre les mains du révérend abbé ou de son déléguéceux—ci assisteront, s'il leur plaît, à cette répartition

5 0 Tout accord, toute convention prévue par l'article précédent nepeut être faite qu'en présence du révérend abbé ou de son délégué

6° Les coquatre ne peuvent dans aucun cas octroyer les lettres debourgeoisie: pour devenir bourgeois,il faut avoir maison à Luxeuil ouavoir épousé une fille de bourgeois, et être présenté par les coquatreà l'abbé, qui confère le titre de bourgeois tout en faisant ses réservess'il s'agit de mainmortables

Il est permis auxdits coquatre de veiller à l'entretien des ponts,des pavés, des fossés, des murailles, des fontaines, etc.; la police de laville leur appartient également, sans préjudice toutefois des droits duseigneur

8° Les coquatre élus ne peuvent exercer leurs charges que s'ils ontprêté serment entre-les mains de l'abbé; l'abbé est tenu de recevoirce serment, à moins qu'une raison sérieuse ne s'y oppose

' Sont exempts du service de la milice et de la garde des portestous les officiers du bailliage, le doyen, et tous les gens du révérendabbé

b' Les habitants de Luxeuil nommeront l'administrateur des ther-mes, lequel prêtera serment entre les mains du révérend abbé ou deson délégué ; l'abbé conserve toutefois le droit d'user desdits thermescomme il l'entend, et d'en concéder l'usage à qui bon lui plaît;

i io Les marchés et les foires resteront, suivant l'usage, sous la juri-diction du révérend abbé

12° En ce qui concerne les clefs de la ville, on suivra l'ancienne cou-tume le révérend abbé pourra toutefois, s'il craint quelque danger,conserver les clefs de l'une des portes pour qu'il puisse librementsortir et entrer ; ' le danger passé, il rendra lesdites clefs

13 0 La chasse est libre pour tous les bourgeois de Luxe-ail sur leterritoire de la ville, mais non dans les forêts appartenant à l'abbaye

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14° Et comme le révérend abbé veut que le monastère soit bienfermé et que les religieux n'aient pas l'occasion de sortir, il est abso-lument interdit au guet d'y pénétrer ; un chemin de ronde sera établipour donner accès de la ville aux murailles et des murailles à la villesans qu'il soit nécessaire de traverser le monastère (1).

François Bonvalot n'était pas moins ardent ù maintenir les immu-nités religieuses de l'abbaye que ses droits politiques il empêchal'archevêque de Besançon d'administrer les sacrements dans l'égliseSaint-Martin, qui servait depuis longtemps d'église paroissiale auxtI11ï' ntsde la ville (2)

D'ailleurs l'abbé Bonvalot jouissait de la confiance absolue deCharles-Quint; aussi, rien d'important ne se faisait dans la pro-vince sans sa participation. Le gouverneur, M. de Vergy, avait reçul'ordre de le consulter dans tous les cas extraordinaires et de prendretoujours son avis en grande considération (i). Bonvalot, jaloux de sesprivilèges, n'était pas disposé à en rien céder.

En 1552, il refusa de reconnaître Li M. de Vergy lui-même le droitde mettre en réquisition les habitants de Luxeuil pour travailler auxfortifications de Gray « Le• bailliage de Luxeu - écrivait-il à M. deVergy - n'a rien de commun avec celui d'Amont. Le traité de la sou-veraineté lui a donné le même rang qu'à ceux d'Amont, d'Aval et deDôle, et comme la fortification de Gray touche uniquement le bailliage

(1) Histoire ,naijnscritc de Luxeuil par dom Placide Dcvilliers fragment conservéaux archives de la Haute-Saône, Supp. H. 1); Bibliothèque nationale, collectionMoreau, 869, fol. 425 et suiv.

(2) A l'origine l'église de Saint-Sauveur était l'église paroissiale de Luxeuil ; en1221, les bourgeois de la ville craignant de ne pouvoir conserver le droit d'élireleur curé, firent hommage de ce droit à l'archevêque de Besançon, Théodoric. Undes successeurs de Théodoric, Gérard, donna lui-même la présentation de la curede Saint-Sauveur aux chanoines de l'église cathédrale de Saint-Jean (1315) afinqu'il ne pût arriver qu'un prélat dévoué à l'abbé ou abbé lui-même ne transmitce droit de collation à l'abbaye. L'abbé, sciMneur temporel de la grande paroissede Saint-Sauveur, avait vu avec peine la juridiction curiale lui échapper: des815, l'église Saint-Martin qui dépendait de l'abbaye et s'y reliait par une galeriecouverte, était mise pour différents offices à la disposition des habitants deLuxeuil; en 1229, la ville ayant été entourée de murs, une partie des sacrementsput y être administrée par les moines, et, pour attacher de plus en plus la popu-lation à cette église, l'abbé y établit une familiarité sous la direction d'un moinequi prit le nom de recteur. En 1452, l'abbé Jouffroy obtint une bulle par laquellele pape Nicolas V prenait cette chapelle sous sa protection, l'exemptait de lajuridiction de l'archevêque diocésain et la déclarait immédiatement sujette dusaint-siège. Un autre bulle de 1514 unit cette église à la mense monacale. Cf. Dey,Etude sur la condition des personnes au comte de Bourgogne, p. 214; 2' Mémoire,P. 38-42.

(3) Cf. Weiss, Papiers d'Etat du cardinal de Granvelle, t. I, p. VIII,

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d'Amont, serait-il raisonnable d'y faire contribuer ceux de LuxeuIls ne demanderont du secours de personne quand il plaira à Sa Ma-jesté de leur donner semblables ordres pour leur bailliage ( 1 ) » Le gou-verneur insista, mais l'abbé fut inflexible et, afin qu'on ne l'accusâtpas de manquer de zèle pour le service de l'empereur et de la province,il offrit mille écus et deux cents marcs de vaisselle d'argent doré. M.de Vergy ne tint pas rigueur h l'abbé de sa résistance quand; cinqans plus tard, il reçut l'ordre de l'empereur deréparertouteslespacesfrontières, il ne foula point le bailliage de Luxeuil en l'obligeant à tra-vai I ter seul aux fortifications de la ville (').

Bonvalot laissa ses principaux bénéfices à son neveu. Antoine Per-renot('), le célèbre cardinal de Granvelle, qui ne vint que rarement àLuxeuil, et dont la haute protection ne réussit pas toujours à garantirla terre abbatiale des maux de la guerre. En 1574, six mille Suissesqui allaient aux Pays-Bas pour le service de l'Espagne, restèrent huitjoLirs b Luxeuil et dans les enviions; en 1575 et en 1578. cette ville eutà supporter d'autres passages de Suisses ou d'Allemands. Sur la lin del'année 1579 une armée fr'ançaièe arriva inopinément aux portes deLuxeuil ; les bourgeois piirent l'alarme le comte de \ïergr leur en-voya une petite garnison de trois cent cinquante hommes jour les se-conder en cas de surprise. Mais les troupes levées dans le pays n'é-taient guère moins é charge à la Franche-Comté que les soldatsétrangers qui la traversaient (').

Accablés de réquisitions, les bourgeois avaient contracté de lourdesdettes, qu'ils répartirent entre eux sans oublier les gens de l'abbayeceux-ci protestèrent, et les bourgeois durent reconnaître que les gensde l'abbaye et les chapelains de l'église Saint-Martih étaient exemptsnon-seulement du guet et de la garde des portes, mais aussi de toutesles impositions extraoi'dinaires pour faits de guerre (b),

(I) Lettre du 29 janvier 15b9. D. Grappin, VI. 22.(2) Lettre du 28 juillet 157. Ibid.(5) Anto.ne I'errenot de Granvelle, né en 1517 à Besançon, succéda en 1550 à

son père clans la confiance de l'empereur. Après l'abdication de Charles-Quint.Philippe Il le chargea de négocier avec la France le traité de Cûteau-Canb,-ésis.Ministre dans les Pays-Bas jusqiien 156, sous les ordres de Mrgncrite dePanne, il lut nominé archevêque de Malines et cardinal, 'nais dut se retirer de-vant la haine des FIa naands il passa cinq - années à Besançon, cultivant leslettres et encourageant les arts Appelé en Espagne en 155, i] obtint le titre deprésident du conseil supérieur d'italie et de Castille. Lit il fut élu arche.vèqcio de Besançon, et mourut û Madrid, en 155(1.

(4) CL Grappin, 11k,,mirc's historiques sur les guerres du XVI' siècle, p. 95' et su iv.() Archives de Luxeuil. FF. SI (transaction du 21 mai 1585, approuvée par

l'abbé le 10 octobre suivant). - Plus tard le parlement de Dblc jugea que les

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Cette querelle n'était pas la première que les bourgeois eussentsuscitée au cardinal de Granvelle depuis qu'il était abbé de Luxeuil.Le 3 octobre 1574, ils avaient arrêté dans une réunion secrète que lescoquatre et les treize s'assembleraient le premier dimanche de chaquemois, à cinq heures du matin, pour prendre les mesures nécessaires àl'administration et à la police de la cité une amende de vingt sols,au profit de la ville, était prononcée contre les officiers municipauxqui s'abstiendraient sans motif sérieux d'assister à ces séances mati-nales, - et aussi contre les bourgeois qui refuseraient d'obéir aux dé-cisions qui y seraient arrêtées. Le cardinal de Granvelle se plaignit auparlement de Dôle de cet excès de pouvoir et de la violation de l'accordintervenu en 1547. Les bourgeois, redoutant l'issue de ée procès,consentirent à annuler leur délibération du 3 octobre 1574; de soncôté l'abbé, e pour bonnes considérations, désirant û l'advenir tantmieulx pourvoir à la police de ladite ville de Luxcu , ordonnait queles règlements rendus par les coquatre et les treize dûment assem-blés seraient observés par les manants et habitants de Luxeuil à peinede cinquante sols d'amende « et au-dessous selon l'exigence duas » pareille amende serait infligée aux coquatre et aux treize qui,

régulièrement convoqués, ne se trouveraient pas à la réunion. Ladouzième partie de ces amendes était « au prouffit dudit illustrissimeseigneur, ... en signe de l'autorité et juridiction qui luy compère etappartient à l'exclusion desdits habitans », mais l'abbé consentait àce que les onze autres parties fussent appliquées à la réparation et àl'entretien des murailles, des ponts et des fontaines (').

Sous l'abbatiat du cardinal Madruce, évêque de Trente, - le suc-cesseur de Granvelle, — la terre de Luxeuil subit, le contre-coup dela guerre qu'Henri IV déclara à l'Espagne. En février 1597, la Fran-che-Comté fut envahie par 6,0 soldats lorrains placés sous lesordres de Louis de Beauveau-Tremblécourt etd'Haussonville aussi,écrivait un contemporain, les habitants de Jonvelle (2), « ceulx deVesoul, Luxeul et les alentours, se réfugient-ils, avec ce qu'ils peu- -vent de leurs biens, à Montbéliard, terre hérétique. il y a un tel

officiers de l'abbaye étaient tenus au guet et à ]a garde des portes, mais • entemps d'éminent péril tant seulement, lorsqu'il sera déclairé par le gouverneurde de pays et ladite cour. Ibid., FF, 46.

(1) Archives de Luxcuil, FI', 51. -(2) Jonvelle — aujourd'hui. commune du canton de Jussey - était la première

petite place forte que les Lorrains trouvaient devant eux au sortir de la régionboisée et accidentée connue sous le nom de chaîne des Faucilles.

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effroi clans tout le bailliage d'Amont, que cela seul est un appel à l'en-nerni... Q)».

Madruce ne visita pas une seule fois son abbaye, mais du moins ileut à coeur d'en conserver intacts les revenus. Les Jésuites, que lecardinal de Granvelle avait combattus de son vivant, venaient defonder de somptueux collèges en Franche-Comté, et intriguaientpour que l'abbaye de Luxeuil fût tenue de faire une rente de millefrancs à leur collège de Besançon. Madruce s'opposa avec énergie àleurs prétentions, mais, après sa mort, André d'Autriche, évêque deConstance, ne fut pourvu de l'abbaye de Luxeuil qu'à la condition deprendre l'engagement d'acquitter cette subvention (2).

Andrè d'Autriche ne gouverna - de loin - l'abbaye que pendantquelques mois. Les religieux essayèrent sa mort de faire revivreleur droit d'élection, et demandèrent par postulation Léopold d'Au-triche, dans l'espoir qu'ils ne seraient pas traversés parle souverainMais le parlement de Franche-Comté annula cette demande sous pré-texte que les archiducs Albert et Isabelle avaient par lettres du papele privilège de nommer directement à l'abbaye de Luxeuil et c'est ainsiqu'Antoine de la Baume recueillit la succession de l'évêque deConstance (9 juin 1601)(').

Les religieux, qui n'avaient pas connu leurs derniers abbés, furentnéanmoins heureux de recevoir Antoine de la Baume, mais leur joiefut de courte durée. Le 23 novembre 1605, deux chefs cal4inistes, lescomtes d'Amboise et de Beaujeu, qui couraient le pays à la tête dequelques partisans, vinrent tondre sur le château de Baudoncourt,où l'abbé se trouvait alors, et s'emparèrent de sa personne mené àDammartin et menacé d'être conduit en Hollande, Antoine se 'vitobligé de promettre cinq mille écus (') pour sa rançon. Les moinesdurent engager l'argenterie de l'église pour fournir la moitié seule-ment de cette somme le reste fut avancé par les habitants de laseigneurie, sous la caution de dom Etienne Martin, grand prieur del'abbaye (5).

(1) Lettre de Champagncy à du Faing. Cf. de Piépape, Histoire de la réunion dela Franche-Comté â la France, r, 247 ; Çoudrict et Chatelet, Histoire de Jon pelle,P. 202.

(2) Cette condition lui fut imposée par les archiducs . Albert et Isabelle à quiPhillipe II avait accordé la souveraineté des Pays-Bas et de ta Franche-Comté.Gallia Christiaua, XV, tGO.

(3) Antoine de la Baume prit possession de son abbaye en septembre iGOiS. Cf.Duaod, Histoire de l'Église, ville et diocèse de Besançon, 1, 127.

(1) Environ cent mille francs en monnaie moderne.(5) D. Grappin, VI, 24. - M. Finot a publié (Bulletin de la Société d'Agriculture,

sciences et arts du département de la Haute-Saône, 3' série, n' 7. Vesoul, 1377, p. 73

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Sous l'abbatial: de Français de la Baume, neveu et succeseuPd'Antoine ( 1 ), l'abbaye perdit toutes ses terres d'Héricourt, qui lui fu-rent enlevées par un seigneur protestant, Louis-Frédéric de Wur-temberg, prince de Montbéliard. Les religieux réclamèrent et plai-dèrent à plusieurs reprises, mais ils durent se contenter d'une indem-nité de douze mille francs, somme bien inférieure à la valeur desterresen litige (') (1622).

Mais plus les ressources de l'abbaye diminuaient, plus ses chargesdevenaient lourdes. Lors de la nomination de dom Jèrôme Coquelin.l'archiduchesse Isabelle voulait charger l'abbaye de trois mille cinqcents écus de pensions nouvelles. Coquelin fit remarquer que son bé-néfice lui rapportait annuellement quinze mille francs environ, maisqu'il avait déjà à payer chaque année mille francs aux Jésuites deBesançon, cinq cents francs au prieur de Lons-le—Saulnier, cinqcents francs au souverain et plus de trois mille francs pour les gagesde ses officiers de justice il réussit ainsi à échapper à toute contri-bution nouvelle (A) -

Ancien moine de l'abbaye de Saint-Mansuy de Toul, Coquelin étaitchargé de raviver les vertus qui s'éteignaient dans le vieux cloitreet de le réformer suivant la régie de Saint-Vannes et de Saint-Hidul-phe (s). Mais la guerre, déchainée par Richelieu, allait le surprendreau milieu de ses soins et amener les plus grands malheurs dans lepays. Le nord de la Franche-Comté fut dévasté par les armées deBernard de Saxe-Weimar et du comte de Grancey,du duc de Lorraineet de Gallas ('). Les contributions de guerre, les violences des soldats

et suiv.) l'acte notarié établissant dans quelle proportion les habitants de la terrede Luxeuil ont contribué à payer lu rançon de l'abbé cet acte est conservé auxarchives de Luxeuil (JJ. 2).

(I) C'est à Antoine de la Baume que l'on doit, au moins en 'partie, le buffet del'orgue de l'église abbatiale. Cf. de .13eauséjour. L'Église abbatiale de Luxeuil. p. 63.

(2) Besson, Mémoires historiques sur l'abbaye et la tille de Lare, p. 105 ; Suchaux.La Ilaute-Sadue, I, 353. — Le pape ne ratifia pas l'arrangement conclu entre lesreligieux de Luxeuil et le prince de Montbéliard ; et comme celui-ci n'avait paslivré les 12,000 francs, tout en gardant les biens et droits cédés en 1622 lesreligieux réclamèrent lorsque la seigneurie d'Fléricourt fut occupée par les Fran-çais le parlement de Franche-Comté leur vint en aide et, par son arrét du 9février 4702, leur adjugea là propriété de tous les biens et revenus de l'ancienprieuré de Saint-Valbertd'Héricourt. -

(5) D. Grappin, VII, 4.(4) Coquelin aimera avec lui dix-neuf moines soumis à la nouvelle règle.(5) CF. Piépape, Histoire de ta réunion de la Franche-Comté à ta Fronce L. I, p. 363

et suiv. r r, p. 170; des Roberts, Campagnes de Charles I V, duc de Lorraine et deBar, en Franche-Comté. €t.. 7. 415 11. 93.

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hiinèrent les habitants de la ville (9 et des villages de la terre, en mû-me temps que ta peste (1 décimait la population. Enfin en 1644 Lu-xeuil ouvrait ses portes à Turenne r.

A mesure que le malheur.des temps réduisait la puissance de l'abbé,les bourgeois cherchaient à s'émanciper davantage c'est ainsi qu'ilsrefusèrent, en 1643 1 de donner à l'abbé les clefs de l'une des portes dela ville. En vain l'abbé somme les coquatre de se conformer au con-cordat de 147 ; ceux-ci répondent que du passé ne s'est pratiquéde mémoire des vivants que lesdits coquatre ayent porté en l'abbayedudit Luxeu la moytié des clefs des portes de ladite ville (1). » Plustard, il s'agit d'une chapelle que les bourgeois avaient, sans l'autori-sation de l'abbé, fait construire à l'hôtel de ville la chapelle fut dé-molie par ordre du parlement de Dôle Mais le parlement avaitmaintenu, contrairement aux prétentions de l'abbé, les coquatre etles treize dans le droit de pourvoir aux affaires de la ville et de faireles règlements de police (t).

Enfin, lorsque l'abbé Jean--Baptiste Clerc, successeur de JérômeCoquelin, revint de Besançon où il était allé recevoir des mains del'archevêque la mitre et la crosse, il trouva à son arrivée à Luxduil

• les portes de la ville fermées les bourgeois ne consentirent à les luiouvrir qu'autant qu'il prêterait entre les mains des coquant le ser-ment de ne rien entreprendre sur les privilèges des bourgeois (').

(1) De 1636 à 1644, la ville u contracté une dette de 260,0 livres ses habi-tants ont payé en contributions de guerre une somme à peu près égale. Unarrêt du parlement de Dôle du 17 novembre 1645 avait défendu à leurs créanciersde les molester pendant un an. Un semblable arrêt de surséance fut rendu en1680, après la conquête. CE. Dey, 6e Mémoire pour servir à l'histoire de la ville deLuxeuil Archives de Luxeuil. CC. 9.

(2) En 1636, les religieux donnèrent 40 fr. à un certain Nicolas Desté pour en-terrer un domestique de l'abbaye mort de la peste. D, Grappin, I. VII, eh. 8.

(3) Articles accordeç à la ville de Luxeuil par M. le Maréchal de Turenne, le 4avril 1544. Archives de Luxeuil, EE, 8, et Musée des archives départementales,Paris, 1878, n° 158. -

(4) Délibération du 18 janvier 1643. Archives de Luxeuil, Bl3, 2.— Déjà le 18 fé-vrier 1633, après avoir pris avis de deux avocats de Vesoul, le corps de villeavait refusé de confier les clefs à labbé. ibid.

(5) Arrêt du 17 janvier 1617. Archives de Luxeuil (pièce non classée).(6)Arrêt du 21 iuillet 1645. ibid. Vi'. 27.(7) Bibliothèque nationale, collection More,,,,, 869, f" 444 et suiv. Cartulaire de

Luxeuit, f' 4.69. - L'abbé Clerc fut reçu à Luxeuil, le 30 novembre 1652, avec lemême cérémonial que l'abbé Bonvalot.

T

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CHAPITRE VIII

Les derniers jours de l'abbaye.

Nous ne rappellerons pas -dans quelles circonstances la Franche-Comté, conquise une première fois par Louis XIV, en 1668, fut denouveau occupée par les troupes françaises en 1674. Le marquis deRenel, chargé de soumettre le bailliage d'Amont, s'empara sans coupférir de Luxeuil, le 26 juin 1674 (').

Sous la domination du roi de France, l'abbaye devait avoir àlutter plus que jamais pour la défense de ses droits seigneuriaux. Lesidées d'opposition germaient de plus en plus dans l'esprit des bour-geois, qui refusèrent, en 1681, de payer à Charles de l3eauffremont (ïun léger impôt que les abbés levaient sur les habitants de la terre deLuxeuil lorsqu'ils avaient fait ]e voyage de Rome (ï.

Bientôt d'ailleurs, la suppression de l'antique magistrature des co-quatre allait menacer directement l'autorité abbatiale. L'édit du moisd'août 1692 avait créé des offices de maire et assesseurs dans toutesles villes du royaume les bourgeois de Luxeuil furent autorisés, parl'arrêt du conseil du 28 avril 1693, à acheter ces offices moyennant lasomme de 6,000 francs, et ils nommèrent aussitôt un maire, troiséchevins et treize conseillers.

Les religieux, à qui désormais il n'était plus permis de se mêlerdes affaires de la ville, jetèrent les hauts cris, et s'unirent à l'arche-vêque de Besançon qui voyait avec peine lui échapper l'administrationmunicipale de sa ville de Gy. Leurs démarches eurent un plein succès

(1) cf. Dey, 5c Mémoire pour servir à l'histoire de la ville de Luxezeil p. 540 ccsuiv.; de Piôpapc, Il, 138.

(2) Charles de l3eauffrcmoat gourvcrna l'abbaye de 1680 à 17331 il succéda &son frère, Jean-Baptiste de Bcauffreniont (1671-1680), qui avait démissionné ensa faveur.

(3) Archives de Luxeuil, FL". It. - Il faut reconnaître que les Bénédictins deleur côté prenaient souvent à tâche de vexer 1er échevins et les bourgeois: deuxfois, dans le cours de l'année 1682, ils avaient levé la vanne de leur étang voisindes thermes; en 1694 et en 1717, la même opération inondait endore l'établissementthermal, Delà colères et procès, jusqu'à ce qu'enfla l'étang fût converti enprairie. cL Delacroix, Luxeuil, p. 67.

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larrét du conseil du 10 novembre 1693 révoqua celui du 28 avril,et déclara supprimés les offices créés à Luxeuil, à charge par l'abbé:en sa qualité de seigneur, d'en payer la finance; soit 6,000 livres, plus2 sols par livre, - en tout 6,600 livres(').

Les religieux s'entendirent alors avec l'abbé, et s'engagèrent, le 20mai 1694, à acquitter pour leur copte personnel le tiers de cettesomme, et les deux autres tiers pour le compte de l'abbé, à la condi-tion que ce dernier céderait à la mense conventuelle des biens de lamense abbatiale représentant en revenu l'intérêt des 4,400 livres lais-sées à la charge de l'abbé. Le 351 décembre suivant on procédait â l'élec-tion des coquatre et des treize.

Mais M. de Beauffremont regretta bientôt de sacrifier un revenu de220 liv. pour se garantir d'une perte qu'il jugeait insignifiante. D'autrepart les bourgeois de Luxeuil offraient à l'abbé, pour entrer en pos-session de la mairie, 1000 francs et l'abandon de la partie des trin-railles et des fossés de la ville contigus aux jardins du couvent. Parlettre du 25octobre 1700, l'abbé manifesta aux religieux son intentionde négocier avec la ville. Les religieux firent tout ce qui dépendaitd'eux pour parer à ce coup: le 18décembre . 1700, ils formèrent oppo-sition à tout ce que l'abbé pouvait faire clavait déjà fait contre l'arrêtroyal qui avait supprimé la mairie; ils ILli signifièrent qu'il ne pouvaitpas traiter sans leur consentement puisqu'ils avaient payé de leursdeniers le tiers des offices éteints, lui déclarant même quils étaientprêts à Lui restituer les biens détachés de la mense abbatiale. Mêmesignification fut faite aux coquatre. Mais l'abbé passa outre, car il sesentait soutenu par M. de l3ernage, intendant de la province. Lesreligieux se virent alors contraints d'entrer en composition avec l'abbéet les bourgeois, et de signer le traité du 23 mai 1703(2).

Le magistrat, élu pour un an, était composé d'un maire, de deuxéchevins, de neuf conseillers, d'un syndic-receveur et d'un secrétaire-greffier (1. L'abbé et les religieux accordaient au maire et aux officiersmunicipaux le jugement en première instance de tous les délits et detous les crimes commis sur le territoire de la ville, mais l'appel enétait porté au bailli nommé par l'abbé. Les officiers municipaux ne

(I) Archives de Luxeuil, Fi'. i.(2) Cc traité fut signé, au nom de l'abbé de I3canffremont, par le sieur Jacques

Ponccot les religieux de Luxeuil se rirent représenter par l'abbé de Faverney etpar un religieux; Jean-George Putel était le mandataire de la ville. Arch. rieLuxcrti!, 1313. US. - Un arrêt du conseil du 21 aot 1703 sanctionna cet arrafl-ge ni e n t.

(3) Dey, jre Mémoire, p . 26,

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pouvaient toutefois pas con naitre des délits et des crimes commis dansle couvent et ses dépendances, ainsi que dans les bois et sur les do-maines de l'abbaye et des religieux. La ville avait le tiers des amendesprononcées par les officiers municipaux le reste appartenait à l'abbé.

Il n'était pas question dans ce traité du droit de juridiction pourles délits ruraux, lequel appartenait de temps immémorial à l'abbaye,et était exercé par un religieux qui prenait le titre de prév6t. La villel'acheta quelques années après (21 mai 1713) et l'attacha à la mairie (D•

Désormais l'action du pouvoir central se fait de plus en plus sentir,et c'est l'intendant qui intervient en maitre dans l'administration dela ville: « N'ayant reçu aucune plainte de la conduite de ceux quicomposent votre magistrat - écrit le 21 décembre 1719 M. de laNeuville - je crois ne pouvoir rien faire de mieux que de vous laisserlibres pour choisir les sujets que vous jugerez dignes de remplir lescharges de maire, échevins, et autres dont l'usage autorise le change-ment à la fin de chaque année. Je vous recommande seulement defaire en sorte qu'il n'y ait pas la moindre cabale dans ces élections etque vous nommiez des personnes qui aient l'approbation du public,afin que je puisse aussi, avec fondement, donner la mienne au choixque vous en ferez(2).

En 1723, M. de la Neuville rappelle aux officiers municipaux quelorsqu'ils auront à convoquer les assemblées de notables, ils ne de-vront inviter que les « ecclésiastique-s, nobles, avocats, médecins,chirurgiens, procureurs, marchands, apothicaires, et autres qui parleur état et par les charges auxquelles ils ont été ci-devant admispeuvent passer pour notables (') . t Puis le nombre des officiers muni-cipaux lui paraissant trop considérable, il les réduiCà neuf, comme àQuingey et à Faucogney, savoir le maire, deux échevins et six con-

seillers (I) -

Le maire et les échevins ne restaient toujours qu'une année en charge.Mais, sous prétexte que l'expérience acquise par ces magistrats nepouvait être que profitable aux intérêts de la ville, l'intendant ne

(t) Dey, 3° Mémoire, l• 60.(2) Archives de Luxeuil, 1313. 14.(3) Lettre du 26 novembre 172.3- Ibid. - Dans la même lettre l'intendant repro-

chait au magistrat de Luxeuil d'appeler à l'assemblée des notables • des gensde métier et de simples artisans- qui, par leur nombre et par le tumulte et ledésordre qu'ils y causent ordinairement, 'ion seulement en écartent les personnesqui peuvent vdrjtablement passer pour notables, mais encore par la pluralité deleurs suffrages font tourner la délibération au gré de CCCX qui les y appellent, leplus souvent au préjudice du véritable intérêt et du bien publie de leur ville,

(4) Lçttrc du 19 décembre 1726. Ib(d,

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tardait pas à ordonner aux officiers municipaux de continuer dans lesfonctions de maire le sieur Breton d'Amblans, et dans celles de pre-mier échevin, le sieur Pigeot ; il désignait mênie à leurs suffrages lenom du second échevin, montrant par là combien il entendait tenirsous sa tutelle l'administration de la ville (').

Il n'était pas question, dans les lettres de.l'intendant, des rapportsqui devaient exister entre les officiers municipaux et l'abbé. Celui-civoulant s'en tenir à la transaction de 1703, et ceux-là rêvant des'affranchir complètement de l'autorité abbatiale, de nombreusesdifficultés surgirent dans le courant du siècle. C'est ainsi que nousvoyons, en 1749, le bailli de l'abbé refuser de recevoir le serment dusieur Pigeot, nommé maire par l'ordonnance du 21 janvier, et installéle 27 janvier par M. de Vault, subdélégué de l'intendant (9).

L'abbaye était alors administrée par Jean-Louis Aynard de Cler-mont-Tonnerre (S), qui avait été pourvu de ce bénéfice à l'âge de dix-neuf ans, en 1743 (4), Appartenant à l'une des illustres familles duroyaume, M. de Clermont-Tonnerre n'eut peut-être pas pour lesbourgeois de Luxeuit tous les égards désirables; en tout cas, il se lesaliéna complètement, soit par sa morgue de grand seigneur, s'oit parses exigences, et presque chaque jour des procès s'engagèrentsouvent pour des motifs futiles - entre l'abbaye et la municipalitétantôt on plaide, pendant des années, pour un puits ou pour un fourbanal ; tantôt les officiers municipaux demandent pour les bourgeoisle droit de chasse, que l'abbé leur refuse, et contestent à celui-ci lesdroits de four, déminage, et autres, dont l'abbé a joui de tout temps;la construction du palais abbatial devient aussi la source de nom-

(I) Lettre du 26 décembre 1727. Ibid. - L'intendant disait encore dans cettelettre à MM. du magistrat de Luxeuit « Au surplus je vous recommande plusd'union que pat' le passé; vous devez vivre ensemble en bons confrères et en gensqui doivent agir de concert pour le bien public..: »

(2) Archives de Luxcuil, DB, 14.(3) lI avait succédé à Rend de Rohan-Soubise (1741-1743), qui lui-même avait

remplacé Charles-Emmanuel de Beauffremont, mort en 173\ après une vacancede huit ans durant laquelle l'abbaye fut administrée par le chapitre métropoli-tain de Besançon.

() Son père Gaspard de Clermont.Toonerre, duc et pair de France, chevalierdes ordres du roi et de celui de la Toison, d'or, né en 16&, entré au service en1703, lieutenant général en 173, reçut le bâton de maréchal en 1747. Il était ledoyen des maréchaux à l'époque du sacre de Louis Xyl, en 1774, et à ce titre ilreprésenta le connétable dans la cérémonie,

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breuses contestations ( 1 ) . Des mémoires, des pamphlets sont écrits depart et d'autre, quelques-uns d'une grande violence (a).

Mal soutenu par le gouverneur de la province et par le parlement,N. de Clermont-Tonnerre dut renoncer à la plupart de ses préten-tions. Le 29 septembre 1766, il reconnaissait aux officiers municipauxle droit de s'occuper de l'aménagement des bois communaux et dejuger les délits et contraventions qui y seraient commis, - de fairetous les règlements de police et de veiller à leur exécution, sauf s'ils'agissait des gens du monastère, dont les privilèges étaient garantis;les notables, les nobles et « gens vivant noblement bpouvaient libre-mént chasser et pécher sur le territoire de Luxeuil, En retour de cesconcessions, le maire de la ville devait prêter serment, après son élec-tion, entre les mains du bailli.

Le 25 mars 1774, une nouvelle transaction fut signée: moyennantune redevance annuelle de mille francs, l'abbé abandonnait aux offi-ciers municipaux les droits de four, déminage, de rouage, de banvin,d'aunage, etc., qui seraient dorénavant perçus au profit de la ville (4)•

Dans les villages composant la terre de l'abbaye de Luxeuil, M. deClermont-Tonnerre n'avait guère moins de peine â conserver intactsses droits seigneuriaux. Une partie notable de la population y restaitsoumise à la condition servile et la mainmorte y pesait même d'unpoids beaucoup plus lourd que dans le reste de la province (5). D'aprèsles coutumes particulières de la terre de Luxeuil, le sujet ne pouvaitpas s'affranchir par désaveu et ne devenait libre que de la volonté del'abbé ; celui-ci refusait ou accordait, selon son bon plaisir, l'affran-chissement demandé et en fixait lui-même le prix. Le mainmortablene pouvait non plus quitter la seigneurie sans l'exprès consente-

(I) Archives de Luxeuil, FE. 3.3 et 34 1313. 12, fo, 29 et 80.421 Dans un mémoire daté du 28 juillet 1760, les officiers municipaux accusent

l'abbé et les religieux d'être • des possesseurs qui n'ont d'autres Litres que lamisère et la crédulité des temps passés, desquels il ont su profiter sans avoir misjusqu'à présent un frein à leur insatiable cupidité. ' Archives de Luxeuil, C-3.

(3) Transaction passée le 29 septembre 1766, entre l'abbé de Clermont-Tonnerreet les offi

ciers municipaux de Luxeuil, par devant Al- Lambouley, tabellion géné-rai dé la terre et seigneurie de Luxeuil. Ibid., FF. 28.

(4) Cet arrangement, auquel les Bénédictins firent opposition le 5mai 1774, futhomologué par arrêt du conseil du 10 octobre 1777, mais le parlement de 13esan-çon refusa d'enregistrer cet arrêt (14 novembre 1777. Archives de Luxeuil, FF, 34.

() Cf. Pinot, Éludes sur la mainmorte dans le bailliage d'Amont aux XIllt, XiVcl XV siècles (Bulletin de la Société d'agriculture de la Haute-Saflne, 18131), et La;nainnorte dans ta terre de l'abbaye de Luxent! (Nouvelle Bevuc historique dçdroit français et étranger, 11380, et h part, Paris, 11380, br.

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ment de l'abbé. Le droit successoral des ascendants n'était pas reconnu,c'est-à-dire que les parents et les grands-parents ne pouvaient pré-tendre à l'héritage de leùrs enfants et petits-enfants morts sans pos-térité: cet héritage S faisait échute à l'abbaye. Enfin le formariage (')existait dans la terre de Luxeuil ; les filles ne pouvaient la quittersans le consentement de l'abbé: le prix de ce consentement n'étaitpas fixé d'une manière uniforme et variait suivant la valeur des biensde la sujette mainmortable..

M. Finot fait honneur à M. de Clermont-Tonnerre d'avoir conçu legénéreuxdessein d'affranchir de la mainmorte tous les habitants de laterre abbatiale soumis à cette dégradante servitude (2). Avant demontrer tant de sollicitude pour ses sujets, M. de Clermont-Ton-nerre, pour accroître les revenus de son. bénéfice, avait cherché àmettre en vigueur, même en les aggravant, quelques coutumes tom-bées en désuétude sous ses prédécesseurs. C'est ainsi qu'il voulaitprélever le droit de formariage non-seulement sur les femmes serves,mais sur les hommes de sa terre prenant femme du dehors pourl'amener dans sa seigneurie; il refusait aussi de reconnaître à sessujets le droit de vendre leurs fonds et leurs maisons, môme lorsqu'ilsavaient des enfants vivants.

Les mainmortables de la terre de Luxeuil protestèrent énergique-ment contre les prétentions de leur seigneur; ils lui contestaient ledroit de succéder: à l'exclusion des ascendants, aux enfants morts sanspostérité, et n'admettaient même pas que la mainmorte de la terre deLuxeuil différât de celle du reste de la province. En 1763 un procèsétait pendant à la grand'chambre du parlement de Besançon qui,par arrêt du 14 décembre de cette année, chargea le lieutenant gé-néral du bailliage d'Amont de faire une enquête et d'entendre lesdoléances des sujets de l'abbaye.

Le 31 mars 1764, les habitants de Briaucourt - qui paraissentavoir pris l'initiative du mouvement d'opposition qui allait bientôt segénéraliser dans la seigneurie - réunis sur la place publique de leurvillage, déclaraient, en présence d'un notaire, que, de mémoired'homme, ils n'avaient jamais eu à payer certaines taxes dont on les

(1) . Les filles mainmortables qui se marient et suivent leurs maris ne peuventretourner gésir le jour de leurs noces au mcix de leurs pères et mères pour avoirpart à leurs .succesrions. niais elles en seront exclues pour toujours, à moins quele seigneur abbé n'y donne son exprès contentement. • Art. 5 des coutumes parti-culières de la seigneurie de Luxeuil (Finot, P. 7).

La mainmorte dans lq terre 4e l'abbaye 4e Luxeuil, p. 6.

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accablait, et chargeaient un des leurs de ! es représenter à la pro-chaine assemblée générale qui devait se tenir au Four-Rouge, àBreuches, où avaient coutume de se réunir les habitants des villagesde la terre de Luxcuil pour délibérer sur leurs intérêts communs C).Soit indifférence des manants des autres villages, soit timidité (2),cette assemblée ne devait se tenir que six ans plus tard (°), le 22février 1770.

Ce jour-là, les députés de la terre de Luxeuil exposèrent dans unlong réquisitoire lesgriefs de leurs commettants et prirent la fermerésolution de lutter jusqu'au bout contre les exigences de leur sei-gneur « . . . Lesdits députés ... ont dit, représenté, discuté et agitéque depuis plusieurs années on leur suscite en général et en particu-lier de la part de Messire Jean-Louis Aynard; comte de Clermont-Tonnerre, abbé commendataire de l'abbaye Saint-Pierre de Luxeuil,différents procès et difficultés sur plusieurs objets, droits et préten-tions bizarres, extraordinaires, hors du droit commun, insolites, telsque le droit de guet et garde. une prestation d'oeufs vis-à-vis certai-nes communautés, et aussi le droit de formariage, en vertu duquel onprétendrait les conti aindre non seulement à ne pouvoir se marier etaller résider hors de la terre, mais encore à ne pouvoir aller prendrehomme et femme hors de la terre pour l'y amener résider; tel encoreque la généralité de mainmorte que prétend mondit sieur l'abbé, sui-vant laquelle leurs communaux ainsi que les vignes et les étangs quiont toujours été de franchise, se trouveraient mainmortables, telenfin que la restriction â leur liberté de -vendre leurs fonds; que der-nièrement encore par une conséquence de ces prétentions plusieursparticuliers tant résidants que non résidants avaient été assignés encommise de franchise soit d'autres fonds pour les posséder sur leconsentement, soit enfin de tous leurs biens pour avoir été prendredes maris ou des femmes dehors, quoiqu'ils les aient ramenés résideravec eux dés le même jour du mariage, comme plusieurs des cocu-munautés avaient été assignées pour prestation du droit de guet etgarde, d'oeufs, de corvées, de poules et d'autres droits insolites etinconnus jusqu'alors ; que ces habitants ayant réfléchi et considéré

(1) Archives de Luxeuil. FF, 28.2) Il est probable que les bourgeois de Luxeuil secouèrent la torpeur des n,a-

nants et les encouragèrent dans leur résistance. Il existe cn e ffet, aux archivesde la ville, un mémoire, redigé sans doute sous les auspices des offic iers munici-paux, et dans lequel un aionyme réfute les prétentions de l'abbé. Ibid.

(3) Les villages de la terre de Luxeuil désignèrent Içurs représentants du ujanvier au 21 fvrier 1770, Ibid,

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que ces prétentions prenaient principalement leur source d'un côtédans les prétendus cinq (') cas particuliers de mainmorte que mes-sieurs les abbés s'efforçaient d'établir dans leurs terres, soit anciennes,soit modernes, à la différence de la coutume générale de la province,- et d'un autre côté dans de prétendues reconnaissances reçues d'unnommé Vuillod en 1672 ; que ces coutumes particulières telles quemonsieur l'abbé et ses prédécesseurs les ont fait compiler et distribueren cinq cas particuliers, loin d'être établies et d'avoir force de loi dansla terre de Luxeuil y ont toujours été contestées..., que toutes les pré-tentions et droits que l'on cherchait à établir soit vis-à-vis quelquescommunautés, soit vis-à-vis des particuliers, ne pouvaient que leurêtre infiniment préjudiciables et rendre beaucoup onéreuse la condi-tion des habitants de ladite terre.

« Pour ce et autres considérations déduites et à déduire qu'il seraittrop long de motivir ici ... lesdits habitants cy comparant , comme ilest dit, ont délibéré, statué et arrêté d'intervenir pour et au nom deLa généralité desdits habitants dans les procès intentés de la part demondit sieur l'abbé ou de son procureur fiscal . ,, y combattre sur-tout la généralité de mainmorte, soutenir la franchise des commu-naux ainsi que des vignes, des étangs et de plusieurs autres fonds quisont dans ladite terre, défendre leur liberté de vendre lorsqu'ils ontenfants vivants . .,, enfin faire déterminer une fois pour toutes quelssont les droits et fixer en quoi consiste la mainmorte particulière dela terre de Luxeuil, s'il y en a de particulière ...

Cinq ans plus tard, M. de Clermont-Tonnerre proposait au roil'extinction et l'abolition de la servitude de mainmorte dans tous lesvillages dépendant de l'abbaye: c , , - Depuis trente années que lesuppliant est pourvu de cette abbaye, il n'y a vu que des hommeslourds, indolents, découragés et abattus, des terres incultes, une cul-ture absolument négligée, nul commerce, point d'émulation et uneapathie générale; tandis que les habitants des villages libres, leurs

(I) D'après le manuel général de la Mense conventuelle (Archives de la Haute-Satine, H. G7R) ces cinq cas peuvent se résumer ainsi J° Les gens de mainmortede la terre de l'abbaye de Luxeuil ne peuvcnt s'affranchir par désaveu. 2' Us sontobligés de résider dans la terre et ne peuvent s'établir ailleurs sans le consente-ment de l'abbé. 3' S'ils ont enfaiit vivant et légitime, ils peuvent vendre leurshéritages, mais à des gens de mainmorte, 4° Les ascendants ne succèdent pas àleurs enfants Ou petits-enfants. 5' Les filles mainmortables qui se marient sontexclues de la succession de leurs parents, à moins'de l'exprès consentement del'abbé. Cf. Pinot, P.

(2) Archives de Luxeuil, FF, 2t3,

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voisins, sont vifs, actifs, laborieuï ; leurs terres sont bien cultivées etrendent d'abondantes récoltes... Ce contraste entre les habitants dumême pays ne provient que de ce que les uns, réduits à une espèced'esclavage et n'ayant qu'une jouissance précaire, un simple usufruitde leurs fonds, bornent tous leurs travaux à leurs besoins présents...;au lieu que les autres, vrais propriétaires avec la libre disposition deleurs fortunes, travaillant non-seulement pour eux, mais pour leursfamilles, ne mettent d'autres bornes leurs travaux que celles qu'exigele repos du corps ; la mainmorte est donc dès lors tout à la fois des-tructive de l'agriculture, de la main-d'oeuvre et du commerce; elleest révoltante pour l'humanité elle anéantit en quelque sorte l'exis-tence humaine... (1)

Il est regrettable pour sa mémoire que le dernier abbé de Luxeuiln'ait fait entendre ce noble et hardi langage qu'au moment où sesmainmortables supportaient avec impatience le poids de leur servitudeet travaillaient à s'en affranchir. D'ailleurs M. de Clermont-Tonnerreentendait conserver les biens de son bénéfice et n'offrait de renonceraux revenus provenant des échutes, réversions et autres droits atta-chés à la main morte, qu'à la condition qu'il pourraitcommuer ces taxescasuelles et difficiles à percevoir, en rentes et redevances imposéessur les héritages, les ventes ou les personnes. TI proposait aussi d'auto-riser les communautés mainmortables à se - libérer avec le produitde la vente de leurs bois de réserve. Enfin une autre combi-naison lui agréait davantage: pour soulager ses sujets et indemniseren même temps la mense abbatiale, il demandait au roi de déciderque le prieuré de Fontaine, qui jadis dépendait de l'abbaye de Luxeuil,y fût et demeurât réuni à perpétuité (s).

La requête de l'abbé de Luxeuil fut appuyée de l'avis le plus favo-rable par le subdélégué de Vesoul, M. de Saint-Ferjeux, et par l'in-tendant du comté de Bourgogne, M. de Lacoré. Elle parvint àM. de Saint-Germain, ministre de la guerre (3), qui la transmit

(1)Cette requétc adressée au roi en son conseil fut rédigée par un avocat auparlement de Paris, le sieur Parent. Il faut admettre que 14. de Clermont-Tonnerre approuva tout au moins la rédaction de cette pièce, s'il n'y coopérapoint, Cf. Finot, p. 15 et suiv.

(2)Finot. P. 18 et suiv. - Le monastère de Fontaine s'ôtait détaché de l'abbayede Luxeuil vers le xnr siècle pour former un prieuré conventuel â la nomina-tion du roi. Ses revenus s'élevaient à environ 6,0 livres.

(3)Le ministre de la guerre avait la Franche-Comté parmi les provinces deson département.

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au contrôleur général, Turgot; mais elle ne devait pas aboutir, soità cause de la chute du grand ministre, soit par suite des réclama-tions du prieur de Fontaine (') et des religieux ,

même de l'abbaye de

Luxeuil (u).

Sur ces entrefaites parut l'édit du mois d'août 1779 portant sup-pression du droit de mainmorte dans les domaines du roi et dans lesseigneuries tenues par engagement, et abolition du droit de suite surles serfs et mainmortabics dans toutes les seigneuries. L'abbé deLuxeuil fit alors de nouveaux efforts pour affranchir lessujets desa terre. Mais l'édit publié ne devint pas exécutoire en Franche-Comté,par suite du défaut d'enregistrement au parlement de Besançon, etM. de Clermont_TolineTre perdant tout espoir de parvenir à unaffranchissement général, chercha à conclure avec les commu--hautês désireuses de se libérer de la mainmorte des traités parti-culiers

Dés le 5 octobre 1782, il s'entendait à cet effet avec les habitants deSaint-Valbert et d'Ainvelle, qui s'engagèrent, en échange de leuraffranchissement, ii lui verser, les premiers6,00 () livres, et les seconds5,500 provenant de la vente de leurs qarts de réserve. Deux traitésdu même genre furent passés avec les habitants de Froideconche, le15 septembre 1788, et avec ceux d'Esboz-Brest, le 28 septembre sui-vant. Le 18 février 1789, l'intendant de la province, Caumartin deSaint-Ange, transmettait ces conventions au ministre, et décla-rait qu'elles ne pouvaient être valables qu'avec le consentementdu roi.

Mais une ère nouvelle allait commencer pour les mainmortables dela terre abbatiale. On sait quelle commotion produisit, dans la partieseptentrionale de la Franche-Comté, la nouvelle de la prise de laBastille. Du 19 au 22 juillet 1789, les paysans se soulevtreot toutautour de Luxeuil, brûlèrent les granges et les fours des déci-mateurs, firent irruption en ville, envahirent l'abbaye, pillèrent les

(I) M. Franchet de Rans, àvûque in partibus de Rhosy.

(2) Un religieux de Luxeuil, dom Grappin, l'auteur de l'Histoire de l'abbaye

royale de Luxe,, et de nombreux travaux historiques, fit l'apologie de la main-morte dans une dissertation couronnée par l'Académie des Sciences,Belles_Lcttreset Arts de Besançon. le 24 août 1778. La question mise au concours par l'Académieétait ainsi posée Quelle est l'origine des droits de mainmorte dans les pro-vinces qui ont composé le premier royaume de Bourgogne s. Finot, p. 26.

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archives, et forcèrent Fabbé à signer l'abandon de ces droits sei-gneuriaux .

La nuit du 4 août sanctionna ces violences, et, Te 7juillet 1790, M.de Clermont-Tonnerre quittait pour toujours l'abbaye de Luxeuil (2),

(1) CL Taine, La Révolution, 1. l; de Beauséjour, Le.ç dernie'R jours de Pab-baye de Luxent! (Académie des Sciences. Belles-Lettres et Arts de Besançon, 1889)Ecrement, Essai htvtorique sur la ville et l'abba ye de Luxeuil. p. 135.— \Toir aussi dansLe Chevalier de Boufflers et la comtesse de Sabran de Pierre de Croze (Paris, 11394, p.169-171), une lettre de la comtesse de Sabrai. du 24 juillet 1789.

(2) M. de Clermont-Tonnerre se reti la à liamotn-ille, non loin de Toitl ilmourut CLI 1804.

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b

CONCLUSION

Ainsi l'abbaye de Luxeuil occupe une place importante clansl'histoire de la Franche-Comté.

La renommée et les vertus de Son fondateur et de ses premierschefs avaient attiré de bonne heure sur elle l'attention des papes etdes souverains. Comblée de faveurs par les Mérovingiens et lesCarolingiens, dotée, au temporel, des avantages accordés aux abbayesroyales et particulièrement de l'immunité, elle jouit, au spirituel, deprivilèges remarquables. Au Xc et au Xc siècle, au moment du mor-cellement féodal, les abbés de Luxeuil devinrent tout naturellementles représentants de 'autorité pour les habitants des terres où laroyauté avait cessé, depuis de longues années. d'avoir des agents. Cettetransformation du pouvoir abbatial s'op&'a avec d'autant moins depeine que le monastère s'élevait dans un pays montueux et boisé,dun accès difficile, et si5r les confins de la Lorraine et de la Bourgo-gne, loin par conséquent de la résidence de puissants princes laïques.Aussi, du Xle au Xlil e siècle, l'abbaye de Luxeuil ne releva que deempereurs, trop éloignés pour que leur joug pesât lourdement surelle, et fut indépendante de fait sinon de droit: Mais la jalousie despetits seigneurs du voisinage, les querelles qu'ils ne cessaient de luisusciter, l'obligèrent bientôt à rechercher, au' milieu de l'anarchieféodale, l'appui du bras séculier. Elle eut tour à tour pour gardiensle duc de Lorraine, le comte de Bar, le comte de Champagne et le roide France, jusqu'au jour où le traité d'Arras la plaça sous la protec-tion des ducs de Bourgogne. Après la mort de Charles le Téméraire,e roi de France recouvra ce droit de garde, abandonné bientôt sans

conteste aux empereurs devenus comtes de Bourgogne, et, sous lerègne de Charles-Quint, la terre de l'abbaye de Luxeuil fut incorporéeà la Franche-Comté,

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Mais les abbés conservèrent la totalité de leurs droits seigneuriaux.Seuls les bourgeois de la petite ville de Luxeuil avaient conquis dèsle moyen âge des franchises qu'ils surent conserver et même étendre.Les habitants des villages de la terre abbatiale restèrent, jusqu'en1789, assujettis à la condition la plus dure, et l'abbaye devait finir tris-tement ses jours au milieu des cris de colère et de haine de ces mal-heureux serfs, opprimés depuis tant de siècles.

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APPENDICE

IListe des abbés de Luxeuil (5.

1. Saint Colomban2. Saint Eustaise3, Saint Valbert4. Vindologe5. Bertoald ....6. Saint Ingofroy7. Cunctan .S. Rustique .9. Sayfroce .

10. Adon .....11, Arulfe .....12. Rendin .13. Regnebert14. Gérard leT

15. Ratton .....16. Vinlincrane17. Saint MeIlin18. Frudoald .19. Gaylembe.20. Ayribrancl.21. Boson .....22. Grimoald .23. André Jcr

590-610610-625625-

vers 665vers 682

vers 700

77)0-7,31vers 746

vers 764

vers 785

24. Docton.....vers 78625. Silierne . .26. Dadérne .....27. Saint Anségise.817-83428. Léotric .29. Dragon .834.-85530. Fulbert 856-31. Saint Gibarci-88832. Eudes I......33. Guy Jcr 'ers 94834. Aalongue.vers 98335. Milon ..... vers 101836. Guillaume37. Gérard II.vers 104938. Roger .....SQ Robert40. Guy Il .....-41. Thiébaud Ir. . . 1090-112342. Hugues l e' .. 1123-113643. Joceran . . - . 1136-113944. Etienne 1° ... 1139-114745. Gérard III ... 1147-46. Pierre .....-

(t) D. Grappin, Histoire de Iabbaye royale de L,,xets D. Guillo, Histoire del'illustre abbaye de Luxeul ; Bibliothèque de l'Arsenal, ais, n° 3805 (Mémoire con-cernant l'ancien état de la p ille de Luxe,l, avant la fondation de l'abba)'e de cetteville, et un abrégé chronologique des abbés de Luxeuil, depuis la fondation decette abbaye jusqu'à Àfgr l'abbé de Clermont-Tonnerre, et de cc qui s'est passé de plusremarquable du temps de chac qu'un de ces abbés) Hauréau, Gallia christiana, t. XVDelacroix. Luxeuil ville, abbaye, thermes, p. 47-50.

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47. Sayfride. . . . 1165-117848. J3ochard. . . . 1178-118649. Gérard IV ... 1186-118950. Olivier d'Abbans 1189-120151. Frédéric . . . 1201-120452. Hervé , . . •. 1204-120953. Hugues II . . . 1209-121954. Simon . . . . 1219-123455. Thiébaud JE . . 1234-126556. Régnier. . . . 1265-.57. Hugues 111.M. Charles 1er - . . 1271-128759. Thiébaud Ill de

Faucogney . . 1287-130860. Etienne II de Lu-

xeuil . . . . 1308-131461. Eudes II de Cha-

renton . . . . 1319-134562. Froniond de Cor- -

condra... 1349-135163. Guillaume II de

Saint-Germain. 1357-136364. Aimon de Bour-

bonne ou deMollain - . ., 13É5-1382

65. Guillaume III deBussul. . . . 1382-1416

66. Etienne I11 Pier-recy de l'Isle . 1422-1424

67. Guy HI Pierreeyde l'Isle.. 1424-1427

68. jean Ter d'tJngelles 1427-1431

69.boy IVBriffaut 141-144970. Jean II Jouffroy 1459-146871. Antoine de Neu-

chàtel - . .1468-149572. Jean III de la Pa-

lud de Varam-bon .....1495-1533

73. François pr de laPalud . . . - 1534-1541

74. François II Bon-valot - . . - 1542-1560

75. Antoine Il Perre-not de Granvelle 1560-1586

76. LouisdcMadruce .1587-160077. André II d'Au-

triche - . . - 16008. Antoine III de la

Baume - . - 1601-162270. Philippe de la

Baume. . . . 1622-163180. Jérôme Coquelin 1633-163981. jean-Baptiste le,

Clerc ......42-167182. Jean-Baptiste 11

debeauffrernont. 1671-168083. Charles II de

Beauffrernont - 1680-173384. René de Rohan-

Soubise ....174j-174385. Jean 1V Louis-

Aynard cleCler-mont-Tonnerre 1743-1790

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.1 1

La mense abbatiale en 1789 (1),

Déclaration des droits fonds, revenus et charges de la mense abba-tiale de l'abbaye royale de Saint-Pierre (1.

LUXEUIL.

Un quartier abbatial qui consiste en deux pavillons dont l'un étaittrès ancien et a été rétabli à la moderne par M. l'abbé de Clermont-Tonnerre, possesseur actuel de cette abbaye il a fait construirel'autre pavillon depuis quelques années, ainsi que des écuries, remi-ses, cuvetie et bûcher qui entourent une cour spacieuse. À l'empla-cement du nouveau pavillon M. l'abbé actuel a joint une maison quimasquait le quartier abbatial et qu'il a achetée du sieur Thiébaud etde son épouse pour une somme de 2,400 livres par contrat reçu deLamboley, tabellion général, pour le recouvrement de laquellesomme M. l'abbé de Clermont-Tonnerre fait icy toutes réserves dedroit, a$'ant payé de ses deniers cette maison.

Tous les bâtiments cy-devant désignés sont situés sur la rue prin-cipale et place de la Baille de Luxeuil ; â côté est un terrain d'environun boissel, moitié de la quarte, mesure de Luxeuil, qui est de iOSperches, la perche de 9 pieds 10 pouces, pieds de roi ; ce terrain estcontigû i l'abbaye et sans valeur,

Au levant du terrain sont placées les halles dépendantes del'abbaye, et sous lesquelles se vendent tous les grains que l'on amèneaux marchés et foires dudit Luxeuil.

M. l'abbé a perçu jusqu'en 1775 le droit déminage qui était la 24'partie de tous les grains 'qui se vendaient sous ces halles; depuiscette époque il y a procès au conseil dEtat entre M. l'abbé de

(I) La mense abbatiale Fut séparée de la mense conventuelle Ic 26 janvier II3,sous l'ahhatiat de Jérôme Coquelin. Le traité de division des deux menses estaux archives de la Haute-Saône, H. 702.

(2) Archives de Luxeuil, L. iCi, et Registre des délibérations du corps municipal1tt t e, mars 1790 au 5 brumaire ait fo 2 et suivant,

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Luxeuil et ]es officiers municipaux de la ville pour le droit et la per-ception d'icelui, par conséquent cet objet est pour mémoire

Près des halles sont des prisons qui contiennent en même tempsun logement pour le geôlier, des chambres pour placer les minutesdu greffe et du tabellionage, et des greniers. M. l'abbé u fait cons-truire le tout il y n quelques années.

A ce bâtiment est contigU l'hôtel où se tiennent les audiences du

bailliage, qu'il a , èchangé avec les pères Bénédictins de son abbayecontre une portion de vignes qu'il avait à Vaivre, et depuis cet échangeil a fait construire cet hôtel d'audience.

De cette abbaye de Luxeuil dépendait un jardin assez vaste situé àl'extrémité du faubourg de la Corvée de Luxeuil, que M. l'abbé actuela échangé il y a quelques années contre une maison appartenaflt àdemoiselle Gauthier, de laquelle maison une partie de l'emplacementa servi à élargir la rue commune de Luxeuil, et a donné un passageplus commode à l'entrée de la place où se tiennent les foires et

marchés.M. l'abbé jouissait autrefois de plusieurs petits cens sur des niai-

sons qui ont été pareillement démolies pour Futilité publique.Le bailliage de cette abbaye est à l'instar des royaux ; ses appels

ressortissent au parlement de la province.M. l'abbé a le droit d'instituer tous officiers de justice, bailli, lieu-

tenant de bailliage, procureur fiscal, greffiers, procureurs, notaire5,tabellion généra], garde-marteaux, maires, huissiers et gardes.

Par transaction faite avec MM. les officiers municipaux de Luxeuil,M. l'abbé a cédé deux fours dépendants de son abbaye, ainsi que ledroit de percevoir un pâton moyennant une somme de 300 livres quela ville lui paye annuellement, cy........... 300 I.

Par autre transaction faite par les dits sieurs officiers municipauxde Luxeuil M. l'abbé n cédé un droit qu'il avait sur les boucheries, lerouage et autres petits objets, moyennant une somme de 40 liv, quela ville lui paye annuellemeat, cy ........... 401.

•Le greffe du bailliage et de la gruerie établie à l'instar des mMtrisesdes eaux et forêts, qui dépend également de l'abbaye, rapporteannuellement une somme de 400 liv., cy ....... . 4001.

Le tabellionage rapporte annuellement 400 1. 1 cy . - . . 400 1.

M. l'abbé possède sur le territoire de la ville de Luxeuil un préappelé le pré de la Bourgeline, de la contenance d'environ 130 voitu-res ou quartes, mesure de Luxeuil, du produit annuel d'environ1600 liv., c...................'.16001.

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De la mense abbatiale dépendaient autrefois deux étangs, deuxmoulins, et une ferme dite la Grange-Barreau, le tout situé sur leterritoire de Luxeuil, et que M. l'abbé a cédés aux pères Bénédictinsde son abbaye pal' transaction faite avec eux, en 1771, lesquels objetspour mémoire.

ABELCOURT.

- La communauté dudit lieu doit à la mense abbatiale pour taillespayables chaque année au LB décembre une somme de 24 I.14s.6d.,cy...............24L14s.6d.

Elle jouit d'une dîme sur la Grange de Ivleul située sur le territoiredudit lieu, du produit annuel de 9 quartes de seigle et autantd'avoine, mesure de Luxeuil, qui pèse en froment environ 70 à 72livres. Elle jouit aussi de la dime sur les champs du territoire, duproduit annuel de 90 quartes de blé et 36 quartes d'avoine.

Plus, un droit abonné avec les habitants pour la banalité du fourmoyennant un boissel de fi-ornent par chaque feu et ménage, ce quiproduit annuellement environ 24 quartes de blé.

Plus, d'un cens de 9 quartes d'avoine sur un pré dit La Prêle.Plus, d'un autre cens de 2 quartes rases d'avoine sur un autre pré

dit La Ménochière.Plus, d'un cens, payable parla communauté, de 2011v. chaque année

pour l'abonnement des corvées de meules, cy ......201.

ADELANS.

A la mense abbatiale de Luxeuil appartiennent 12 quartes de terrelabourables par chaque pied ou sol, qui produisent annuellement 10quartes et demie de blé et autant d'avoine.

A1LLONC0URT.

La communauté dudit lieu doit annuellement à la mense abbatialepour tailles 241. 13s., cy............24 1. 13s.

Le moulin dudit lieu est accusé pour une somme de 1001. annuelle-ment, cy .............

Cette mense abbatiale jouit d'un pré dit led'un produit annuel de 300 J., cy .

Plus, de 48 quartes de terres labourableset de deux prés d'environ 6 voitures, duderniers de6Ol.,cy ..........et pour les champs de 67 quartes çje blé,

Breuil sur ledit territoire,3001.

par chaque sol ou pied,produit annuel pour ces

-,,•-60!.

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$8

Plus, d'un champ de 30 quartes cédé par la communauté, du pro-duit annuel de 12 quartes de blé et autant d'avoine.

Plus, d'une redevance réglée pour ]a banalité des fours à un boisselde froment et un boissel d'orge par feu et ménage, qui produit environ26 quartes de blé et autant d'orge.

Plus, des dîmes sur les champs dudit territoire, du produit annuelde 30 quartes de blé et autant d'avoine.

AINVEL.LE.

La communauté dudit lieu doit annuellement pour tailles 13 liv. 2 s.2d.,cy ...................i.2s.2ci.

Plus, pour l'acensement des foursdoit annuellement, à raison de 50sols par chaque feu et ménage, une somme de 154 liv., cy. . 1541.

Plus, une autre somme de 2211v, 7s.6 d. payable chaque année parla dite communauté pour les cens imposés sur les bois, cy 221. 7 s.6d.

AMBLANS ET VELOTTE

Par transaction sur procès faite entre N. l'abbé de Luxeuil et M.Breton d'Amb]ans, ce derhier doit à la mense abbatiale annuellementune somme de 60 liv. pour la portion de la justice, des tailles et despoules qu'elle répétait, cy ..............liv.

ANJ EUX.

La communauté dudit lieu doit annuellement à la mense abbatialepour tailles une somme de 32 1.7s.3 d., cy ....321.7 s. 3d.

Plus, il lui est dû pour l'acensement du moulin une somme de100 I., cy...................1001.

Plus, pour la pêche de la rivière du Planey qui produit annuelle-ment une somme de 24 I., cy .............24 1.

Plus, d'un acensement perpétuel de la grange des dimes, du produitannuel de 15 l. cy ......... -........15 L

Plus, des dîmes surtout le territoire dudit Anjeux,du produit annueld'environ 288 quartes de blé et 22 quartes d'avoine, pour mémoire.

BA SST G N EY

La pêche de la rivière fluente surie territoire produit annuellement721,cy....................721.

Plus, les autres droits dus à l'abbaye dans cette communauté tantça cens qu'en tailles, qui produisent annuellement 605 1., cy 6W I.

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BA U DON COU RT

La communauté dudit lieu doit annuellement pour tailles unesomme de2sl. 18s.9d., cy .........25!. 18s.9d.

Plus, ladite abbaye perçoit annuellement des fours banaux t3 I.,cy

531.Plus, pour l'acensenient du moulin, une autre somme annuelle de

6501.,cy......................01.

-Plus, la pêche de la rivière produit annuellement 100 1., cy. 1001.Plus, ]'acensemcnt de 27 ans d'un vieux chàteau, des droits, champs

et prés qui en dépendent, est du produit annuel de 3(20-l., cy 300 1.Nota. L'on portera les dîmes de ce village â l'article de Saint-

Sauveur, ne faisant qu'un même bail.

BRE U CI-1 ES.

Même observation pour les dîmes qui sont également portées àl'article de Saint-Sauveur.

La communauté dudit lieu-de l3reuches doit annuellement à l'ab-baye pour tailles 401.9s., cy ...........401.9 s.

Plus, il lui est dû par chaque année pour l'acensement de la vieilletuilerie 12 1., cy..................12 I.

I3REUC[IOTTE. - -

La communauté dudit lieu doit annuellement àl'abbaye pour tailleset les chauveaux de moutelles, 11 I. 8 s.........11 1. 8 s.

BRIA[JCOURT.

• La communauté dudit lieu doit pour tailles une somme annuellede 25!. 115.3 d , cy ............25h lls.3d.

Plus, elle doit pour Laqueux, de Mailley, pour l'abonnement unesomme de6L,cy ..................61.

Plus, les deux fours banaux dudit lieu produisent annuellement901.,cy .....................901.

Plus, la pèche cela rivière; d'un produit annuel dè 84 I.,cy . 841.Plus la pêche de la rivière, on perçoit annuellement pour la dîme

des vignes, le pont, un pré appartenant à la mense abbatiale, unesomme delo8l.,cy ................1081.

Plus, la dite communauté doit annuellement pour un cens la qpan-lité de 40 quartes d'avoine,-

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BROTTE.La communauté dudit lieu doit annuellement pour tailles 15k

15s. 2d.,cy...............15I. 15s. 2d.Plus, il lui est dû par chaque feu et ménage pour abonnement des

fours un boissel de froment et un boissel «orge, les grains portablesavec Mine de Mailley, et pour la pai't de M. l'abbé on perçoit chaqueannée 10 quartes de blé et autant d'orge, cet objet pour mémoire.

Plus, la grange dite les Corvées d'Allier produit annuellement 66quartes de blé et autant d'avoine cetobjet est pour mémoire.

Plus, la pèche du ruisseau de Brotte amodiée chaque année 12 I.,121.

Plus, la mense abbatiale possède sur le territoire une vigne d'environ100 ouvrées du produit annuel de 300 liv., cy ...... 300 I.

Plus, elle possède une nouvelle vigne de la contenance d'environ 20ouvrées, du produit annuel de LOI., cy ........4821.

Plus, elle jouit de la dîme sur les vignes sur le territoire de l3rotteet d'Ailloncourt, du produit annuel de tOO I., cy .....100 I.

CUVE

M. l'abbé perçoit chaque année pour les tailles, cens sur le moulinet dîmes une somme de 482 1., cy...........482 1.

ECHENOZ, (') près de Vesoul.

M. l'abbé jouit d'un cens sur un moulin appelé le moulin Costet,du produit annuel de 261. 13s. 4 d. cy ......261. 13s.4 d.

Plus, de 8 fauchées de prés situés sur le territoire de Vaivre et deMontoille ( I'l ainsi que d'une portion de rivière fluente sur le dernierlieu, le tout d'un produit annuel de 264 L, cy .......41.

On observe que les objets cy-désignés dans cet article ont été cédéspar M. de Rosière, président au parlement, à M. l'abbé de Luxeuil e"échange des droits de justice, mainmorte, patronage, que ce dernieravait au lieu de Vellefaux, par arrangement et transaction faitsavce lui.

EIrIUNS.La communauté dudit lieu doit annuellement pour tailles 9 L 19s.

6d.,cy..................9l.19s.6CI.

(1) Echenoz1a-1MeJinC.Ç2) Montoilte, aujourd'hui dépendance de la çomçnue de Vaivre.

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Plus, il est dû par chaque feu et ménage un boisseau de fromentpour les fours, qui produit annuellement 16 quartes de blé; cet objetest pour mémoire.

Plus; ladite communauté doit annuellement un cens de 12 quartesd'avoine cet objet est pour mémoire.

Plus, il est dû un autre cens annuel de 2 quartes de froment et de2 quartes de méteil alternativement ; pour mémoire.

Plus, il est dû un autre cens de même nature d'un tiers de quartede blé et autant de méteil ey pour mémoire.-

Plus, la mense abbatiale jouit du moulin dit de Villers, d'un produitde 3001. annuellement, cy ............ 3001.

ESEOZ ET BREST

La communauté dudit lieu doit à M. l'abbé annuellement pourtailles 161. 13s. 6 d., c y .........161. 13s. 6 d.

Plus, un cens annuel de 61. affecté sur un moulin et sur un étang,cy....................6].

Plus, une dîme sur le territoire du produit annuel de 100 quartesde seigle et autant d'avoine, pour mémoire.

FROIDECONCHELa communauté dudit lieu doit annuellement pour tailles 34 1.

18s.,cy .................341. iBs.Plus, pour un acensement d'un terrain dudit territoire une somme

annuelle de 24 1., cy................241.Plus, on perçoit sur une chénevière sise audit lieu une somme anttu-

elle de4l., cy..................4],Plus, il est dû un cens d'avoine sur plusieurs pièces de terre, du

produit annuel de 36 quartes d'avoine cy pour mémoire.Plus, on perçoit annuellement pour l'acensement d'un terrain

appelé les Traverses, du bois des Grandes Coupes à la route deFaucogney, 9 quartes de seigle et 9 quartes de sarrasin pourmémoire.

Ji y a un autre accnscment perpétuel fait de ces objets par M.l'abbé actuel pour somme 40 1. 1 cy. ...........401.

LA CHAPELLELa communauté dudit lieu doit annuellement 17 I. 1 s. 6 d

cy....................17 I. 1 s. 6 d.Appartient à l'abbaye un moulin situé sur ledit territoire, du pro-

duit annuel de 801., cy,.,.,,,.,,..,.SOI.

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Plus, la rivière dudit lieu, du produit annuel de 48 1. 1 cy . . 481.Plus, un pré appelé le Conayé du produit annuel de200 I., cy 2001.Plus, un autre pré appelé 1a Grande-Lie-au-Moine, du produit

annuel dei56l.cy ................1561,Plus, un autre pré appelé la Petite-Lie-au-Moinedu produit annue

de144!.,cy..................1441.

LA PISSETIRE

La mense abbatiale perçoit en ce lieu une somme annuelle de 4501.pour les tailles, le cens sur les bois, et ]es fonds qu'elle y possède,cy .......................4501.

MAILLEY

Tous les droits et fonds dus en ce villageà la mense abbatiale de Lu-xeuil, y compris les produits des assiettes du bois rapportent annuel-lement 1750 1., et ces objets sont un cens sur le bois de la Bouloye,de 100 1., un autre cens sur une maison, de 6 I., une dime sur unterrain dit Les Bertins, deux vignes situées au vignoble dudit Mailleyd'environ 200 ouvrées, et les droits seigneuriaux joints, cy - 1750 I.

MELINCOURT

Les dîmes dudit lieu appartenant à la mense abbatiale rapportentannuellement, la portion congrue du curé y comprise, 350 L,cy ......................350 I.

MONTHURE[JX (j).

Le prieuré dudit lieu de Monthureux situé en Lorraine fait partiede la mense abbatiale de Luxeuil. Il consiste savoir en un droitd'mi-nage, plusieurs droits seigneuriaux, des champs et des prés dont onne peut ici donner le détail à raison du pillage qui a été fait le moisde juillet dernier d'une partie des titres des archives de l'abbaye deLuxeuil tous ces objets situés au village de Monthureux produisentannuellement 1394 1., cy . . .. ..... . .. ..1394 1.

Plus, les dines et droits seigneuriaux de Godoncourt, village dé-pendant du prieuré de Monthureux rapportant annuellement lasomme del000L,cy ..............10001.

Plus, les dîmes et droits seigneuriaux de Vaudoncourt du produitannuel de 1000 1., cy ...............1000 L

(t) Mouthureux-sur-Saône, chef-lieu de canton (Vosges).

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Plus les dîmes et droits seigneuriaux de Provenchêres, du produitannuel de 550 1................. 1.

Plus, les dîmes et droits seigneuriaux de Lironcourt, du produitannuel de 380 1., cy................3801.

OR M OTCHE.La communauté dudit lieu d'Ormoiche située en Franche-Comt é et

dépendant de l'abbaye de Luxeuil lui doit annuellement pour tailles131., 6s, cy..................131. 6s.

Plus, pour cens du vieux château annuellement 2 I., cy. . . 21.Plus, les champs et prés appartenant à laditeabbaye sur le territoire

produisent 72 1., cy ................721.

POMOY et VELLEMINFROyTous les droits de ces deux villages appartenant û la menseabbati'ale

qui consistent en un boissel de blé et un de pois dus par chaque feuet ménage de Pomoy et Vellerninfroy pour les fours, et un cens surle moulin de Velleminfroy de 12 quartes de blé, CO quartes de terreslabourables situées sur le territoire de Pomoy, une dîme sur tout leterritoire de Velleminfroy au feu de IOgerbes l'une, etquelquesdroitsseigneuriaux, tous ces objets d'un produit annuel de350 I., cy. 3501.

RADDON ET HAPENDU (')Les droits seigneuriaux et les tailles dus par les deux communau-

tés à la mense abbatiale de Luxeuil, du produit annuel de250 I.,cy......................OL

On observe que le bailliage de Raddon( 2) et Chapendu, commecelui de Luxeuil, est à l'instar des royaux, qui ressortit nuement auparlement et dont M. l'abbé de Luxeuil institue tous les officiers.

SAINT-I3RESSON.La communauté dudit lieu doit annuellement 14 I., c y... 141.Plus, un droit de cens en avoine par chaque année 'de 51 quartes

d'avoine et un petit cens en seigle du produit de I., cy ... S Ll'avoine pour mémoire.-

Plus,deux près sur le territoire amodiés annuellement 1591. cy 159 I.

(t) Chapendu, hameau de la commune de Raddon.(2) Raddon, qui dépendait au XIIle siècle de la terreabbatiale de Luxeuil, passa

plus tard à la maison de Faucogncy et fut jusqu'à la Révolution une terre doina-niale sur laquelle était établi un bailliage à l'instar des royaux. Cl. Suchaux,. La/Iaute--Saône, 11, 191.

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SAINT-SAUVEUR..La communauté dudit lieu doit annuellement pour tailles 26!. 1 s.

4d.,cy .................. .... . L13s.4d.274Plus, le four banal dudit lieu est amodié pourI., cy .. 274 1

Plus, d'un cens sur la tranchée du Bois du Ban, du produit annuelde 12!., cy.................. 121

Plus, la pêche du ruisseau dudit territoire, du produit annuel de 81.,

cy................81.

Plus, d'un cens en avoine assis sur plusieurs pièces d'héritage duterritoire, du produit annuel de 300 quartes de seigle, 40 quartes desarrasin, 1200 gerbes de paille, — le seigle, le sarrasin pour mémoire,- et la paille estimée 60!., cy ............ 60 I.

Plus, pour un four permis àun particulierduditSaiût .Sau\'etfl' pour

301.,cy.............. 30L

SAINT-VALI3ERT

La communauté doit annuellement pour tes tailles 11 ]. 7 s.,cy ..........................1i1.7s.

Plus, un cens annuel de 30 1. sur le moulin... de Saint-Valbert, près

la route de Fougerolles, cy ............. 301.

VA! VREL'acenscment des fours banaux dudit lieu produit annuellement

2921.,cy.........•... . 2921.

Plus, la dime sur quelques vignes dudit lieu produit annuellement

24 1., cy...................24 I.

Plus, t'acensement de deux petites maisons moyennant 301. parchaque année, cy .............. .ne

....vigne

...i30 I.

On observe qu'il appartenait à la mense abbatiale usituéeaudit lieu de Vaivre d'environ 30 ouvrées appelée les Grivelles, cédéepar M. l'abbé aux Bénédictins de Luxeuil par transaction de 1771 faite

avec eux.VANNE

Le chapitre dudit lieu doit annuellement 15 l.,cy.... . 15!.

V ESO U L

La ville de Vesoul doit un cens de 60 I. par chaque année pourl'emplacement d'un ancien moulin dit d'Entre_les_Portes qui luiappartenait et qui a été supprimé pour l'utilité publique, cy . . 60I.

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- 95 =

Plus, l'acensement du moulin des Prés dudit lieu produit annuelle-ment 1200 1., cy ................12001.

Plus, un pré de 3 fauchées, dit le pré de Breuil, produit annuelle-ment 8lL, cy ..................Ail.

VILLERS.

Tous les objets dus à l'abbaye dans ce lieu, consistant en tailles de381. et un cens de 31. pour le vieux château, et en 96 quartes dechamps et 18 chariots et demi de prés produisent annuellement à ladite abbaye 900 1., cy ...............900 I.

VISONCOURT.

La communauté dudit lieu doit annuellement pour tailles 41.,cy.........................41.

Plus, ladite communauté doit un cens annuel pour les terres quisont au pré du Millery, 4 quartes 4 coupes de blé et autant d'avoine,ce grain pour mémoire.

POULES.

M. l'abbé fait lever annuellement 500 poules dans les villages de laterre deLuxeuil à raison d'une poule par chaque feu et ménage, les-quelles à 9 sols pièce forment un revenu annuel de 225 1., cy. 225 I.

GRAINS.

En récapitulant les grains que l'on a portés dans la présente décla-ration pour mémoire, on trouve un total de 722 quartes de blé, qui à61. la quarte font un produit de 43321.

De808 quartes et demie d'avoine, qui à 40 sols la quarte donnentun produit de 16371.

De 409 quartes de seigle, qui à 3 I. la quarte donnent un produit -de 12271.;

De 36 quartes d'orge, qui à 3 I. la quarte donnent un produit de1081.;

De 40 quartes de sarrasin, qui à 30 sols la quarte donnent unproduit de 60 1.

Toutes lesquelles sommes réunies pour le produit forment untotal de revenus annuels de 7.364 1. 1 cy........641.

Total .........29.8321. 10s. 8d.

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- -

BOIS.e,

La mense abbatiale, en suivant les plans et les aménagements, faitsauf correction la quantité de 60t arpents 30 perches en réserves etcelle de 1715 arpents 6 perches 5 pieds en assiettes ordinaires, les-quelles auraient été diviséesà la révolution de 25 ans; chacune donneà la coupe par chaque année la quantité de68arpents etdemi. Chaqueassiette peut produire annuellement à la mense abbatiale environ20001.,cy .................20001.

Et la tondaison du quart en réserve et des modernes donneront unautre revenu annuel de 1200 1., cy . . . . . . ... . . 12001.

Le tout, déduction faite des frais d'apposition, d'assiette, de récole-ment et d'exploitation.

MAINMORTE, ÉCHUTES, LODS, CONSENTEMENT, COMMISEET MAINMISE.

M. l'abbé de Luxeuil jouissait avant les décrets de l'Assemblée na-tionale de la généralité de mainmorte sur tous les habitans, nanans,finages et territoires des villages situés en Franche-Comté et désignésen la présente délibération Li l'exception des meix, maisons dépendantde la baronnie de Faucogney au lieu de Saint-Sauveur, de celles dé-pendant de l'abbaye de Bithanie à Pomoy, de celles dépendant de laseigneurie d'Ainvelle en celui d'Ainvelle, de celles dépendantdes coseigneurs de la Pisseure, de Saint-Brésson, de Baudoncourt,de Brotte dans les dits villages, etc., et enfin des francs deBreuches. Tous les dits dI'oits de mainmorte, échutes, consentementproduisaient annuellement, une année comprenant l'autredans le nom-bre de 20 ans, cy ................80001.

Plusieurs de ces villages devaient aussi à M. l'abbé des corvées etdes lignées de voitures de bois, vendanges et autres, que l'on ne peutévaluer et qui demeurent supprimées pas ces décrets.

M. l'abbé jouissait aussi du droit de distribuer le sel aux habitantsde sa terre, qu'il faisait lever aux sauneries de Salins ce droit rap-portait ordinairement 400 1., mais il n'est plus pe' çu.

DROITS DE COLLATION

M. l'abbé de Luxeuil a le droit de nommer aux bénéfices cy-aprèsdétaillés lorsqu'ils vaquent, savoir;

Le prieuré de la Ferté ou de Soyers situé en Champagne, diocèsede Besançon

Celui de 'Saint-Thiébaud, situé à Jussey, diocèse de Besançon

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Les cures dAilloncourt, Anjeux, Betoncourt, Godoncourt, F'ro-'tey-les-Vesoul, Mailley, Melincourt, Ponioy, Saulnot, Saint-Sulpice,Saint-Bressonet Villers, - toutes les dites cures situées en Franche-Comté, diocèse de Besançon; et en Lorraine il nomme à celtes de Con-flans, Monthureux, Provenchéres et Les Thons.

BIENS ET FONDS CÉDÉS PAR M. L'ABBÉ PAR LA TRAN-SACTION DE 1771.

Le moulin de la Poche, moulin Cocquerot, la Grange-Barreau avecles près et champs qui en dépendent, les dîmes et autres droits qu'ilavait à Neurey, tous ses étangs au nombre de 9 ou de 10, et en contre-échange les Bénédictins lui ont cédé plusieurs petits cens d'un revenuannuel de 590 livres et la dîme en vin des vignes d'Allier.

CHARGES FONCIÈRES DE L'ABBAYEM. l'abbé doit annuellement pour don gratuit20381. 12s.Pour les Oblats ................. 130 LPour le droit de gardienneté ....... . 353 L 3s. 8 d.Pour la pension du collège de Besançon .... . 656 I. 13s. 4 d.Pour portion congrue.à M. le curé de Saint-Sauveur ... 9001.Pour celle de M. le curé d'Ailloncourt....... . 3501.Pour celle de M. le curé d'Anjeux ........- 3501.

PENSIONNAIRES DE L'ABBAYEII est dû annuellement à M. l'abbé de Riz. ...• M. l'abbé Grioverot . . . . . . . . . . .• M. l'abbé Mazelin ............• M. Deponchaise ............

- 800 1.- 6001.

640 I.- 640].

RÉPARATIONS ET CONSTRUCTION DES BATIMENTS,CHOEURS DES ÉGLISES ET ENTRETIEN DES SACRISTIES.

Il est compté annuellement pour ces objets à M. l'abbé une sommed'environ 400 1., une année comprenant l'autre, cy ... 4000].

Je soussigné certifie la présente déclaration en tout son contenusincère et véritable. - Signé à l'original de la déclaration Jean-LouisAynard de Clermont-Tonnerre, abbé de Luxeuil, vicaire général deBesançon.

Enregistré conformément à l'original présenté par mondit seigneurde Clermodt-Tonnerre ensuite de ]a dèlibératiou des sieurs officiersmunicipaux de la ville de Luxeuil tenue en la chambre , du conseil le26 février 1790.

7

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M

La mense conventuelle (') en 1789.

Déclaration des biens-fonds, droits et revenus qui forment la menseconventuelle des religieux de l'abbaye de Luxeuil, ordre de Saintl3enoist, de la congrégation de Saint-Vannes et (le Saint-Hidulphe,dans ic bailliage d'Amont, diocèse de Besançon.

LUX EU IL

Les bâtiments claustraux et réguliers consistent dans une courprécédée des écuries et dans deux grands corps de logis contigus si-tués au levant et au midy, un jardin entre deux vergers, tout ceterrain d'environ 4 arpents qui peut produire annuellement 300 I.cy.....................3001.

Le recteur nommé par la communauté pour présider à la familia-rité, faire des fonctions paroissiales clans l'église Saint-Martin, peutse monter avec le casuel à .............2001.

Le droit de faire lever une pièce de porc frais sur chaque débitantsur la place, chaque année amodié ...........3 I.

Le droit de chasse et de pêche dans la rivière de Luxeuil et autreslieux, amodiés pour cy ..............150 1.

Les cens fonciers de 10 L sur les boucheries de Luxeuil, cy - 101.Un cens de 61. sur une maison située sur la place St-Jacques . 61.Un cens de 401. sur une maison située à la rue des Ramasses et

sur une petite chènevière près des Bains .........40 I.Un cens de 27 L sur le jardin dit de l'Hôpital où étaient les maisons

Chapelle ; pour ce jardin, cy . . . . . . . . . . . . . . 271.1.Une chènevièresituée auprésdes Bains contenant 2 coupes un quart

dont le produit est de.................31.Une ferme composée de 70 quartes de terres, 19 voitures de prés,

y compris lepré Bizot de 13 voitures sur le territoire de Froideconche,amodiée pour 3061. cy ...............3061.

(I) Archives de Luxeuil, Registre des délibérations du corps municipal du 1 Cr ,na,-51790 au 5 brumaire an 111, fea 5 et suiv.

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.166

La dîme de 25 l'une de toutes graines qui se sèment, excepté lanavette, qui produit annuellement 100 quartes de seigle, 20 quartes.d'avoine estimées 4401. cy..............4401.

L'étang de Saint-Valbert réduit en pré de 46 voitures 15 coupes, àraison du terrain maigre amodié pour 1201. cy ......1201.

Le pré dit l'étang des Bains contenant 45 voitures 2 coupes, acensépour 3SOl.,cy ..................3501.avec droit de lods au 12e.

La dîme. .......sur les étangs 'des villages qui sontobligés de conduire....., pourquoi il leur est dû une michede pain par l'abbaye pour chaque étang; le produit est de 400 livresde poisson, à 20 I. le cent, déduction faite des frais, cy....801.

La Grange-Barreau consistant en une maison et 400 quartes deterre tant champs que prés, qui doivent être cultivés par les habitantsde Saint-Sauveur, Breuches, Sairt-Valbert et Froideconche, amo-diéeà ces conditions pour ... ... .........2000!.

Le droit de lever les regains au ban des Quatre pour ....601.Une maison située sur le territoire de la Neuve-Grange, de 2

quartes de terres, amodiée pour 29 ans annuellement . . . - 251.Les moulins de la Poche et Tocquerôt avec environ 10 voitures de

foin dans les étangs de la Poche et 20 quartes de seigle, avec leproduit, cy ...................2080 I.

La Grange de l'Hôpital ainsi appelée parce qu'elle dépendait del'office claustral de l'hospitalier, amodiée pour 440 1. et réduite àraison de l'hiver dernier à..............370 1.Ledit bâtiment tombe en ruine.

Le cours d'eau acensé à longue année sur le territoire de cettegrange, cy....................30 I.

Il est dû sur cette grange au curé de Saint-Sauveur 4 I. pour diiresnovales, mais cette somme est compensée par une semblable qu'ildoit par arrêt pour abonnement d'un dîner lorsque les religieux vontcélébrer la messe paroissiale dans son église le lundi des Rogations.

Le pré Bernard comprenant 19 voitures amodié pour 168 I.,cy.......................168!.

Le pré dit au bas de la Côte contenant 9 voitures 16 perches comprisdans le bail du moulin de Froideconche.

Le pré Pouilleux contenant 32 voitures et une dernière coupe,compris dans la ferme de Saint-Sauveur.

Le cours d'eau sur le ruisseau des Cuirs aceùsè pour . 301Une tuilerie amodiée pour ............350 I.La grange deNeuvelle, contenant environ 20 quartes, tant le jardin,

verger et pré, qui peut produire ...........1201.

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- 10! -

Le pré dit le Vieil-Etang contenant .58 voitures deux coupes, cul-tivé par la maison, peut produire ...........5501.

L'étang de la Poche, nouvellement réduit en prés; contient 71 voi-tures 18 coupes et un quart, déduction faite de la partie comprisedans le bail du moulin. Déduction faite des frais, cy. . . . 3001.

Les forêts dépendant de ]a mense conventuelle contenant 1244arpents 5 perches, savoir sur le territoire de Luxeuil, le petit SeptChevaux, cy 584 arp. 55 p., une partie du Banney, 309 arp.; - sur leterritoire de Froideconche, une partie de la forêt dite la Grande-Coupecontenant 190 arp., le bois de l'Hôpital contenant 28 arpe ps; - surle territoire de la Chapelle et d'Aillonèourt le bois de Vaucluse conte-nant 113 arp. 3/4 - enfin dans la terre de Faucogney le bois desArmonts(') contenant 17 arpents.

De ces 1244 arpents, 316 sont en réserve, le restant en 28 assiettesles trois dernières apposées dans le bois de Vaucluse (32 arp., 37 arp..91 perches) ne produisent que quelques vernes et broussailles ; les25 autres assiettes sont de 31 ou 32 arp., sauf la 25e qui en contient 45dans la forêt de l'Hôpital et des Ârrnonts.

Lorsque l'on ne coupe que les taillis, chacune de ces assiettes an-nuelles produit environ 1000 1., déduction laite des frais, cy. 1000 I.

La tondaison du quart en réserve ferait un produit annuel de6001,cy ............- L .....6001.

La ville de Luxeuil doit en trois capitaux de rentes 5187 1. 13 s.4 d., dont les intérêts forment ........1031. 14 s. 6 d.

Les héritiers de la Vve Baffard doivent la rente de.. 3 I. 6s.6 d.Les héritiers d'Henry Petitcollin doivent pour rente . . . . 21.

ABELCOLJRT.

Le moulin banal aux habitans, un champ de 6 quartes et un préde 6 voitures sur les territoires de Breuches et Villers-, amodiés pour800!., cy .....................8001.

ANJEUX.Deux granges desquelles dépendent environ 380 quartes de terre

et 58 faux de prés relaissées pour 1110 1., cy ......11101.Une autre grange dite la grange du Petit-Couvent de laquelle dé-

pendent 40 quartes de terres et 7 faux de prés.Une directe de 1a4uelle dépendent trois ou quatre maisons chargées

de poules, de lods au 50 , etc.

(t) Les Armonts, dépendance de la commune de la Lanterne, canton de Luxeuil.

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- 102 -

Un contrat de rente en principal de 200 I. aux intérêts de 10 I.payables au 9septembre par les héritiers de Jacque Boileau dAnjeux.

Un autre de 354 I. portant 17 1. 10 s. d'intérêt sur les héritiersHacquard de la Pisseure.

Et un autre en capital de 150!. portant 71. lOs. d'intérêt sui-JosephGérard de Saint-Loup comme ayant-droit de Pierre Cabosse!, le toutamodié moyennant 17 paires de rentes en grains formant.

ANNEGRAY.

Les revenus, droits de possession du prieuré régulier ou placementlocal d'Annegray consistent:

1° En une petite église, cloche, une petite cloche, une maison avecses aisances entièrement dévastée depuis le mois de juillet dernierpar des brigands qui ont enlevé les titres, carnets et manuels trouvéschez les officiers de la justice du prieuré et chez les fermiers

2° Dépend de cette prébende le droit de moyenne et basse justicesur plusieurs hameaux dépendantde Faucogney, où il est dû plusieursredevances tant en seigle, chanvre, avoine, poules

3° Et un étang au bas du rupt dit l'etang Bondé acensé à perpétuitépour 401.;

4 Environ 140 quartes de terres, tant en culture, bois et brous-sailles, 50 voitures de prés, 7 petits étangs;

Toutes les redevances attachées audit prieuré suivant le carnet indépendant amodiées pour une somme annuelle de ......50 I.

Tous les prés et les champs sont amodiés, cy . . . . . . 5501.La moitié des émoluments de la mainmorte pourrait se porter à

3001.. cy ................... 300k.Un contrat portant principal de 200 I., intérêts 12 L payables le

21 mars par Jean et Renaud Thaon du Parfonrupt ('), cy... 121.Un autre capital de 140 L, intérêt le 27 octobre, par les héritiers

Rolet, Lirot et sa femme, du Magny-devant-Lure, cy . 6I.6s.6d.Un troisième contrat de 400 1, de principal et de 90 I. de rente

payable au 27 mars par les héritiers Jean Claude Hinzelin, de Lure,cy......................201.

BASSIGNEY.

Le moulin banal acensé à perpétuité aux habitants moyennant 32quartes de froment estimées à 192 1., cy ........1921-

(1) Hameau de la commune de la Voivre.

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- 103

Le four accusé à la communauté pour 28 quartes de blé-fromentestimées à 168 I., cy ................1681.

Un cens dù par les habitants de .........40 I. 15 s.Une grange consistant eu 150 quartes de terres et environ 30 faux

de prés, et un autre pré dit le pré Isabelle contenant environ 40voitures, amodiés lesdits près pour 500 1., cy .......001.;et les quartes de blé €t avoine pour 440 I., cy......4401.

BAU.DONCOURT.Une directe avec droit de justice, de lods au 12e , et quelques terres

qui en dépendaient, 80 quartes de terres, 22 voitures de prés et plu-sieurs dîmes, le tout amodié pour -'00 1., cy.......3001.

L'étang Saint-Benoît portant 500 à 600 alevins, ce qui fait un pro-duit par an de 75 1,, cy .................I.

Une rente en principal de 266 I. 13 s.4 d., à l'intérêt annuel de 13 1.,payable par Sébastien et François Simard et"DéIe Cretenot, cy 13 I.

Une rente de 6 I. 13 s. 3d. sur Déle Burgey et Claucle-FrançoisValot, - le capital de 133 I. Os. 8 d., - cy ....61. 13s. 3d.

Une rente en principal de 100 francs payable par Jean Bourgogne.cy....................3l.6s.6cl.

BJTHÂINE.Le cens annuel et perpétuel d'une livie d'encens par ladite abbaye,

estimé Il., cy ...................Il.-BREUCHES.

27 quartesde terresamodiées pour cy et une piécede toile, cy 50].Pour four banal aux• habitans du Magny-d'Aval détruit et brûlé par

les habitans dudit lieu dans les temps de la bagarre.Un champ d'environ 3 quartes amodié pour cy .....481.Et une pièce de toile, 2 quartes de raves, I quarte de seigle, t quarte

de millet pour grains, denrées, cy ...........291.Un cens d'un boissel comble de seigle sur un champ de 4 quartes

possédé par Joseph Morigeot, estimé ..........2 1.Une rente de il I. 3 s. 3 d.. sur les héritiers Gofinel - principal

2111.2s.—,cy ..............11h3s.3cl.Une rente de 4 1. sur les héritiers Guyot, - principal 66 I. 13 s.

4 d., - cy ......................4h

BRIAUCOURTLe moulin banal acensé pour 29 ans avec un pré de 2 voitures et un

champ de 2 quartes aux habitans de Briaucourt et d'Ainvelle, amodiépour ......................10201.

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- .104 -

Les deux tiers des dimes de grains sur ledit territoire amodiéspour 100 paires de 75 quartes de conseigle.

2 granges composées d'environ 4 .00 quartes de terres et de 100voitures de foin, - auxquelles il était dû des corvées et la dîme de 26l'une sur un étang d'alevins, - pour 120 quartes de blé et autantd'avoine, CV..................2100 I.

-

Une rente de 11]. d'intérêts due par les héritiers Cordier et La–prevote, - en principal de 1971. 6s.9 d. - cy ....11 I. 16s.

BROTTE.60 ouvrées de vignes.cultivées en argent à raion. de 4 I. l'ouvrée;revenus .....................1201.

Un cens de 3s. et une poule sur une maison avec les lods au 12e,cy.......................lOs.

Un champ de 4 quartes pour 2 paires avec des rentes, estimé 28 1.J.-B. Jacquet doit 61. d'intérêt par acte reçu de Thiadot le 4 juin

177. - pour principal 100!., -........6 I.

CHARMES (') ET CE'IARENTENAY (2).

41 journaux tant en champs qu'en prés et un cens de 14 s. 3d.amodiés pour cy.................540 1.

COLOMBE (B)

Antoine Jacquot doit une rente de 7 L en principal de 150 1., . 7 1.

EHUNS.Une vigne de 38 ouvrées, du produit d'environ .....601.

ESBOZ ET BREST.

Les étangs Bernard, des Tasniéres, etc., produisent annuellementpour la pêche 80!., cy ...............801.

L'étang dit Bularetin réduit en prés produit chaque année 15 1.,cy........................801.

Un champ d'environ '3 quartes aec une partie de l'étang Bernard,C3.......................... 181.

Une rente de 11.1. 3s.3 d. due par les héritiers de Jean Corberand,— principal 233l.6 s.8d.—cy .........il L s.3d.

(1) Charmes.Saint .Valbcrt, canton de Vitrcy (Haute-Saône).(2) Canton de Fresnc-Saint-Mainès (Haute-Saône).(3) CoIombc-les-ithaine, canton de Satilx (Haute-Saône).

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- 10$ -

Les étangs dit le Grand-Etang, de la Grande-Voye, le bateau et l'étangdu Banney, le quart de l'étang des Puits et celui de ta Noye qui est in-divis avec le sieur Dechambenoist rapportent annuellement 43 t.C .........................431.

FROIDECONCHE

Le moulin, un pré au bas de la côte, dit le pré du Rullet, un autrepré de 4 voitures 20 coupe, acensés pour 29 ans pour... 3001.

Le champ dit la Combe amodié au même pôur 20 I., c y . . 201.38 quartes de terres labourables, environ 12 voitures de prés et

autres terres amodiées pour 20 quartes de seigle estimées .. BOLLe cens en foin et en regain cédépar le traité de mense dans le

canton des Fouillis produit tant eh seigle, millet, sarrasin, avoine et6 mille de foin, le tout pour ..............3O I.

Un pré dit la Noye-la-Dame contenant environ 12 voitures,amodié pour.............. .........I.

Le pré de la sacristie contenant 40 voitures, amodié pour . 216 I.La Rape acenséeà perpétuité pour5 quartes de blé avec droitde lods,

retenue, etc. lesdites quartes estimées cy ........30 1.La dîme à volonté dépendant des chapelles Saint-Jean-Baptiste et

de Saint-Nicolas en un cens annuel de 30 s., cy .....1 1. lOs.Les étangs Saint-Colomban, Saint-Eustache et des Noiselées pro-

duisent ordinairement 1200 à 1500 pàissons, par conséquent unrevenu annuel de 150 1., cy .............1501.

GÉMON VAL( ,) ET LA CHAPELLE (2)

Dans ces deux villages, l'un de la paroisse d'Onans ( 85 et le secondde celle de Granges (4) dépendant du prieuré de Saint-Valbert-les-1-1.éricourt, qui consistent en toute justice sur meix, maisons, etc. ladîme et cens amodiés sur ces territoires pour 216 1., cy ... 2161.

GODONCOURT

Le droit de percevoir sur les dîmesde ce lieu une lYrémice de 30quartes de blé et 50 q. d'avoine, un pré de 4 faux amodié pour 200 I.,cy.......................2001.

(1) Doubs, arr. de Baumc-]es-I)amcs, catit. de I'Isle-sur-Ic-Doubs.(2) La ChapcIIc-lez-Crangcs hameau de la commune de Crevqns, canton dç

\'illarscxel.(3) l)oubs, catit. de l'Isle-sur-Ie-Doubs. -(4) Grangela-ViIIe, canton de \rj;lersexel . -

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- ioô -

1-IÉRICOURTLe prieuré de Saint-Valbert-les-Héricourt uni depuis plusieurs

siècles à la mense conventuelle, dont les revenus consistant en touscens, fonds, droits et revenus sont amodiés avec la moitié des émo-luments de la mainmorte et de lods mo yennant la somme annuellede 300 1., mais ils sont contestés par M. le prince de Montbéliard,par les révolutions occasionnées en Allemagne, par les erreurs duluthéranisme, ce qui fait l'objet d'un procès très important qui parattribution est depuis longtemps pendant à la grand'chambre du par-lement de Besançon.

JASNEY ET GIREFONTAINE (').Le prieuré de Jasney uni depuis plusieurs siècles au petit couvent (2)

est un cens de 20 q- de blé, autant d'avoine et 5 1. d'argent; ces re-devances amodiées pour 112 L, cy ----------112 I.

La moité des dîmes de Jasney et la 4° partie de celles de Girefon-taine, y compris la dîme de retour; ces dîmes sont amodiées pour90quartes de blé et 74 q- d'avoine, le tout estimé annuellement à (681,,le quart des dîmes de Girefontaine est accordé pour ISpaires estimées144 I.. cy--------------------144 I.

Le patronage de l'église de Jasney, pour lequel M. le curé doit Il.6s8d.,cy

Ce pasteur est à la portion congrue de 700 1., qui doit être payéesavoir par l'abbaye de Luxeuil 379 1., par celle de Clairfontaine )206 I., et par le titulaire d'une chapelle érigée dans l'église de Jasney,1141. 13s.

LA CHAPELLE (4).Les fours banaux amodiés avec une partie de deux étangs peut-

120 I. et une pièce de toile, cy ------------140 I.Deux étangs, dits les étangs Bardot, amodiés pour 1001.: cy 1001.

LA NEUVELLE-SUR-L'OGNON (t).Une redevance de 2 gerbes de seigle par feu des moissons situées

dans la rue basse de ce village.

(1) Girefontainc, commune du canton de.Vauvillers, est aujourd'hui encore unedes sections de la paroisse de .Jasney.

(2) lI s'agit de l'abbaye de Faverney qui possédait depuis le X1H° siècle leprieuré de Jasney, d'abord à l'abbaye de Luxeuil.

(3) Ulairfontaine, aujourd'hui dépendance de la commune de Polaincourt. LesCisterciens y avaient fondé au X1I° siècle une abbaye qui subsista jusqu'à laRévolution.

(4) La Chapelle-les-Luxeuil.(5) Commune du canton de Lute.

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— 107 —

LA PROISELIÈRE (').Une rente de 4 1. sur François Corberand, — en principal de 66 J.,

— en date du 24 may 1671, cy............, 'j I.

LE PARFONRUPT.Une rente de 301. payable le 16 may par Claude et Joseph Toillon,

- principal 5001.— cy ..............301.

MAT LLEY.8 ouvrées de vignes cultivées à moitié produisant, année lune por-

tant lautre, cy ..................24 1.

MELISEY.Trois étangs dits les étangs du Bois, dont deux réduits en prés,

amodiés pour ..................90 I.

NEUREY.Le village de Neurey-en -Vaux avec tout son territoire a été vendu

en 1695 à trois particuliers pour le cultiver aux conditions rapportéesdans le terrier du village de Neure y ; tous les droits des Bénédictinsamodiés pour cy, 24 poules et un mille de foin, ce qui fait autotal .....................10721.

La dîme du vin de 15 l'une, une vigile de 127 ouvrées dont 58 cul-tivées àmoitié; le produit avec celui de la dîme peut être estimé annéecommune à 30 pièces devin, qui à 201. forment une somme annuellede 600 1., cy ..................6001.;l'autre partie de la vigne consiste en 69 ouvrées, presque actuellementtoute en leri'es labourables ; 28 quartes d'autres terres éparses danstout le territoire et 4 fauchées de prés, une maison qui consiste endeux manoirs comprenant cave, cuverie, jardin, une petite chènevièreet trois chambres réservées aux religieux, tout, cette partie de vignerappelée, est amodié annuellement 240 L, cy.......240 I.

Une rente de 151. 13s.3d. sur Pierre-François Petitcolin et MichelRollin, - en principal de 3131. 6s.6 d., — cy... 151. 13s.6 d.

Une autre rente de 12 I. 16 s. 6 d., - principal 256 1. 13 s. 6 d.— cy...................12). 16s.6d.

Une rente en principal de 190 1., intérêt, cy ......1. 10s.Les habitants de Villers et Abelcourt, Ehuns et Visoncourt étaient

tenus de conduire dans les caves des religieux les vins ou vendangesde Neurey, ce qui valait un revenu de .........60 U

(1) Canton de Faucogncy.

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ORM0ICHELe moulin banal aux habitants avec obligation de contribuer aux

réparations par des charrois, à eux amodiées 73 q. de terres et 9 voi-tures de prés dépendant du moulin, •et 28 q. de seigle et autantd'avoine, ce qui fait pour la totalité de tout cy-dessus. . . . 6681.

P0 MOYLa généralité de la dîme de vin et grains dont le curé prélève

dans celle des religieux 45 quartes de froment et autant d'avoine, unequarte de pois, une quarte de fèves, de la paille et 300 gerbes defroment indépendamment de ces prémices cette dîme est amodiéepour 255 q. de blé, 40 q. de seigle, 60 q. d'avoine, 2 q. de lentilles etde 2 q. de pois, toutes ces denrées estimées â .....1830 I.

Un cens de 6 s. 8 d. sur la maison de Jacques Martin, cy. 6s. 6 d.Une rente en principal de 2001. sur J.-B. Gentilhomme et Charles

Godi net, intérêt annuel ...............10 LLes habitans de Pomoy convenus entre eux de ne plus payer de

dîmes ont détruit avant le 20 juillet la grange de l'abbaye qui servaità héberger et ne l'ont pas encore rétablie. --

SAINT-BRESSONUn cens de 88 quartes d'avoine, de 22 poules et environ 4 ].en

argent.Un cens d'une mache de chanvre pour chaque feu.Plusieurs capitaux portant intérêt tant â Saint-Bres'son qu'à

Fougerolles.Tous ces cens, redevances et rentes, dont les capitaux sont icy pour

la somme de 4441 I. et les intérêts de 2281. 13s. 3d., â raison desinsolvences et des frais qui sont nécessaires pour les lever sont amo-diés depuis plusieurs années pour ..........2801.

SAINT-GERMAINLe cens de 4 sols, 2 chapons et 100 oeufs à peine de 3s. d'amende sur

l'ancien meixdes maires, qui consiste en maison, clos, jardin conte-nant 6 quartes ou 5 fauchées de prs, un étang et environ 4 quartesde terres labourables, char'es de lods, mainmorte et commise.

SAINT-SAUVEUR'Le moulin dépendant de l'office claustral de sacristain, une partie

du pré Bernard lDeloye, la Magdeleine, et prés, jardins contigus,annuellement ..................2400 1

67 quartes 23 coupes de terre, environ 63 voitures de prés en par-tie sur le territoire de Luxeuil, une partie de l'étang Benoist - 336 L

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- 109

Le pré Chapuis contenant 60 voitures, et le pré Vaux environ 6voitures, dit au ban des Quatre, amodié ........600 I.

La maison de Pierre Amiot et 1-lanville, dont ils doivent environune rente de 5 I., cy...............-.51.

Une portion de dime prélevée de 12 l'une de toutes graines au lieudit Derrière-les-Maisons cette dîme amodiée . .......200 L

La dîme annuelle de l'étang Boulot par pêche de deux ans . 30 I.La 5e partie de l'étang dit là Noye, pâturage cet étang peut

valoir annuellement ................81.

SAINT-VALI3ERTUn cens de 4 I. 12 quartes de terre dit le ban de Saint-Valberi,

charge de lods ...................4 i.Un pré dit la Virule compris dans la grange l'Hôpital.Une rente de4 I. sur Etienne Ogier,'-- en principal 601. 6 s.,-- cy 41.L'hermitage de Saint-Valbert, où les religieux placent un hermite

amovible à volonté, consiste en une grande cour entre deux vergerssoutenus par des murs qui forment des terrasses, trois petits bâti-ments, chapelle, bûchers, un grand jardin, une cloche et une petitecloche ; dans le milieu de Saint-Valbert est une église avec unclocher et une cloche du poids de 200 livres. - On pourrait mettreun revenu de...................40 t.

SALINSL'abbaye perçoit annuellement 1000 charges de sel, M. l'abbé 5, et

les religieux 10 ou 480 paires .........263 I. 16 s. 3d.

SAULX33 quartes de terre et une faux et demie de pré â la Villedicu, for-

mant l'ancien prieuré de Saint-Urbain, amodiées 14 paires estimées1121.

VAl VRE120 ouvrées de vigne cultivées â moitié et dont les vignerons payent

les impositions â raison de 3 J.; amodiées ........360 I.Une maison louée et jardin amodié ..........60 I.3 faux de pré en échange d'une rente payée seulement 41.Et les prés annuellement .............95 J.

. VILLERSFour banal amodié ..............260 I.Les babitans de ce .lieu ont détruit le four dans la bagarre.Une maison avec un jardin et un pré de 2 voitures acensée perpé-

tuellement pour 4 quartes de froment estimées ......24 I.

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jj

Une rente en principal de 400 1. sur Humbert Michaux, et Ôamu,et Claude Viney, intérêt ..............201.

La généralité de la dîme en grains de dix l'une sur le territoiredeVillers, et les deux tiers à Ehuns et Visoncourt, les deux pre-mières dîmes amodiées pour 82 quartes de froment, 75 q. d'avoine,400 gerbes de paille celle de Visoncourt 48 q. de froment, 45 q.d'avoine et une piécè de toile total pour les trois villages de toutesles denrées estimées, paille et toile .........3,068 I.

La généralité de la dîme devin de quinze l'un sur le territoire deVillers, les deux tiers sur Ehuns et Visoncourt, le produit 4 pièces devinà25l., cy ..................801.

VISONCOURT.Les deux tiers des dîmes viennent d'être rapportées.Une rente en principal de 120 I. sur Sébastien Renaudin dudit

lieu, intérêt...................6 I.

REVENUS CASUELS.Les revends provenant des lods, des échutes, et consentements et

autres émoluments de la mainmorte, déduction faite de ce qui reve-nait au fermier, forment la somme de 5 ,156 I. pendant 60 années, cequi donne un revenu annuel de 565 I. 12, cy .....5651. 12s.

DROIT DE PATRONAGE.Sur les prieurés d'Herly et de Clermont, lorsqu'ils ont été suppri-

més pour être unis, le ter au séminaire de Boulogne-sur-Mer, et lesecond à l'hôpital de Langres.

LES ARCHIVES.La légitimité de ces droits, fonds et revenus est prouvée par des

titres, qui sont conservés dans 517 boites sous 2424 cotes dont lesanalyses et inventaires forment 4 volumes in-folio> qui sont aux ar-chives ainsi que les plans de tous les bois de l'abbaye, tels qu'ils ontété dressés lors des aménagements qui en furent faits et renouvelésen 1736 et 1738.

On trouve encore un gros volume des reconnaissances générales etparticulières d'Annegray passées par devant Guillaume Lanoir deFaucogney, depuis 1749 jusqu'à 17Ç9.

Le total des revenus est de 38,672 I. $ S. 3 d., en y comprenant6761. 1 d. pour les intérêts de plusieurs capitaux de rentes au 3,et 5, etc. qui sont remboursables et qui forment une somme dc15.849 1.4 s. 6d.

r

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iii -

CHARGES DE LA MAISON.Les religieux sont chargés d'acquitter pendant l'année 725 niesse

basses et 40 grandes, comprises les 2 qui sont fondées à Annegray, etde donner tant aux premiers dimanches de chaque mois qu'à cer-taines fêtes solennelles 23 bénédictions du Saint-Sacrement.

PENSIONS DUES A MM. LES CURÉSLa mense conventuelle est chargée de payer 1529 I. 7 s. pour

portions congrues, savoir 300 I. au curé de Saint-Sauveur, roo 1. àcelui deMailleroncourt-Charrette, et 1791.75. à M. le curé deJasney,déduction faite du produit des anciens fonds et revenus curiaux quisont amodiés au profit de tous les décimateurs, cy. . . 55291. 7 S.

DON GRATUIT, IMPOSITIONS ET AUTRES CHARGESLes religieux payent annuellement 1800 1. pour don gratuit, décimes,

vingtième et capitation ; ils payent i 1. ios. à la chambre épiscopalepour droit d'union des chapelles Saint-Nicolas et Saint-Jean-Baptiste.Indépendamment des canons de leur baux les fernicrs sont tenusde payer les impositions et charges royales et les religieux ne payen tque la capitation de leurs domestiques et les impositions des fondsqui ne sont pas d'anciennes dotations; Cette charge forme une sommed'environ...................2001.

Les gages des domestiques forment un total de.....i800 I.La maison était obligée d'entretenir 3gardes pour laconservation des

fonds, rivières et domaines, dont les gages se montent à. . . 400 1La dépense pour entretien des bâtiments de l'église et lieux claus-

traux, fours, granges, usuines, biens de campagne, pour la fournituredes ornements et pour réparation des choeurs des égiisesdans les lieuxoù les religieux perçoivent les dîmes, une somme annuelle d'environ6201.

De toutes les sommes nécessaires Ô. L'acquit des charges il résulteun total de ................10930 I. 17S.

Le revenu, charges déduites, est de .....27691 1. ii 5. 3 d.En quoy la mense conventuelle entretient vingt-cinq religieux, dont

dix-sept prêtres, cieux jeunes profès et un novice étudiant, et cinqfrères convers dont quatre anciens.

BIBLIOTHÈQUE (I)La bibliothèque occupe les deux étages du bâtiment qui est exposé

au midy sur la cour.

(I) La bibliothèque de l'abbaye avait ddjà-beaucoup perdu du son importanceà ta fin du XVIII' siécle elle fut dévastée, en juillet 1789, par les paysans des

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C'est une grande salle boisée, ornée de pilastres et garnie detablettes dans sa hauteur et dans toute son étendue. Elle est éclairée•par douze croisées, six dans le bas et autant sur la tribune qui forme ledernier étage du bâtiment.

Cette tribune garnie d'une grille de fer règne tout autour de la salleÊt laquelle elle communique par un petit escalier construit dans l'enl-brasure des fenêtres.

La bibliothèque est fournie de 4460 volumes, dont 850 in-folio,732 in-quarto et 2878 tant in-octavo qu'in-douze, non compris unegrande multitude de brochures et d'ouvrages en feuilles qui n'ontjamais été portés sur le catalogue_--

Les manuscrits au nombre de 33 sont conservés sous clef.Le l e, est un lectionnaire ( 1 ) éctit au Je siècle en caractères méro-

vingiens, ouvrage précieux.Le 2 est un sacramentaire du temps de Charlemagne.Le & est un ouvrage ascétique du 1X0 siècle.-Le 4e , écrit environ le IX e siècle, contient les homélies sur les saints

évangélistes.Le 5e, en caractères du iX' siècle, est une explication des épitres et

des évangiles des dimanches et des festes.

villages voisins et, pendant les années suivantes, ' pillée par les soldats que reçutla maison des ci-devant Bénédictins • transformée en hospice militaire. Pour

mieux utiliser les locaux, la grande salle de la bibliothèque avait été divisée endeux pièces superposées. L'enquéte faite le 28 thermidor an V (45 août 1797) parl'agent municipal de Luxeuil - assisté d'un administrateur du département et ducommissaire des guerres - nous apprend que la pièce inférieure était alors occu-pée par des lits d'officiers malades et ne renfern*it plus que des rayons vides.Dans la pièce supérieure, les magistrats trouvent • des livres épars, jetés partoutet sans ordre a il leur parait évident • qu'on en a enlevé un grand nombreils ajoutent que l'année précédente la porte de cette pièce n'était pas fermée etque plusieurs malades en ont • distrait des livres.., vendus au citoyen X... • Pour• prévenir de nouvelles déprédations •, ils mettent les scellés sur les portes.Archives de Lu,veuil, L. 15. - Cf. Grégoi-re, Rappo'-t inédit, publié par M. UlysseRobert (Cabinet historiqre, t. XXII, et à part, br. de 96 p. in-8°, p. 22) Delisle,Le cabinet des manuscrits de la Bibliothèque nationale, t. Il, p. 380.

(I) C'est cet ouvrage qui a fourni à Mabillon l'idée et la matière de son livresur In liturgie gallicane. Il a été acquis par la Bibliothèque nationale en févrieriO37 (n- 9427 du Fonds latin). • 11 est bien incomplet au lieu de 35Î feuillets,plus ceux qui manquent à la fin et dont le nombre ne saurait être apprécié, iln'en reste plus que 248. lI est en mérovingienne cursive, avec des majusculesornithomorphes ou ictyomorphes et des peintures représentant des animaux, desfleurs et des ornements divers ». Ulysse Robert, Catalogue des manuscrits relatifsà la Franche-Comté qui sont conservés dans les bibliothèques publiques de Paris,Paris, 1878, p.53. - Vbir dans le même ouvrage (p. 274-283) une notice de M.Bordier sur ce précieux manuscrit. -

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Le 6° parait être du i» siècle et contient les vies des saints.Le 7° est un commentaire du vénérable Bède sur l'évangile de

Saint-Marc.Le 81 , que Ion croit être du VIlle siècle, contient les livres déjà

dessusdits des épîtres de saint Pierre et de saint Jacques avec uncommentaire sur les épîtres.

Le 9° passe pour être du IX' siècle et contient une histoire ecclésias-tique de Capidore, divisée en douze livres.

Le 10°, qui date environ le IX , siècle, contient les hôméljes et descommentaires sur les psaumes.

La lic renferme les vies des saints écrites par Adso, abbé de Luxeuil.environ l'an 990.

Le 12° contient des commentaires de Raban Maur.Le 13e contient des exhortations à la vertu.Le 14 est un commentaire sur les psaumes.Le 15° contient des instructions morales.Le 16° est la partie... d'un bréviaire ancien dont les antiennes sont

en notes.Le 17e contient la vie de saint Augustin.Le 18° est un fort bel ouvrage in-folio qui contient les quatre Evan-

giles avec des vignettes et des lettres initiales encore, et qui paraitavoir été écrit au milieu du XI' siècle.

Le 19° contient les psaumes, les cantiques et les hymnes et les leçonspour les morts.

Le 20a est un lectionnaire que l'on croit être du XII- siècle.Le 21r, écrit environ le Xlli e siècle, contient les vies des saints et

des discours de piété.Le 22°, qui est du XI1l° siècle, contient les décisions ou les décré-

tales par Bernard de Compostelle.Le 23° contient des vies des saints par un frère Jacques qui vivait

l'an 1245.Le 24° paraît du XIIlc siècle il contient des éomtnentaires sur

quelques chapitres de droit.Le 25° renferme les fables dEsope avec des réflexions morales écri-

tes clans le XIT]° siècle.Le 26° contient des explications de .l'Ecriture, une manière de se

confesser.Le 27° est un mémoir sur le grand schisme d'Occident composé en

1394 par Clémengis.Le 28° est un missel de l'an 1411.

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- ['4 -

Le 29 date du XIV C oLi (lu xv siècle et contientu il commentairesur le canon de la messe.

Le oe contient les homélies de saint Grégoire le Grand sur les évan-giles.

Le 3" est une mappemonde spirituelle.Le 32' renferme plusieurs opuscules de doctrine écrits au XVC

siècle.Le 33 en lin, écrit Cl' 1453, contient des commentaires, des notes et

apostilles sur les épîtres de saint Paul par Nicolas de Lyre.

11 y a encore quelques autres manuscrits qui ne sont que de vieuxlivres, quelques notes ou copies, qui nont jamais étê inscrites et qui neparaissent d'aucun prix.

Je certifie le tout cy-dessus véritable, et déclare que je n'ai aucuneconnaissance qu'il y ait été enlevé ou soustrait aucun titre et papier,livre, manuscrit ou bien mobilier appartenant au monastêre, en iby dequoy je me suis signé.-

A Luxeuil. le 25 février 1790.

Signé: D. VAUTHEROT,prieur et visiteur.

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TABLE DES MATIÈRES

Pages

AvÀNT-I'rw p os.................. 1CHAPITRE J. - Les origines dei'abbaye .........r

Rapports des abbés avec les papes et les empe-reurs ...............

- UI. - L'abbaye se place sous le patronage des comtesde Champagne ........... 19

- IV. - Les rois de France héritent les droits des comtesde Champagne .............5

V. - L'abbaye obéit aux ducs de Bourgogne le traitéd'Arras ..............36

- VI. - Lu terre de l'abbaye est réunie tt la Franche-Comté..............

- VII - Démêlés des abbés et (les bourgeois de Luxeuil57-- VIII - Les derniers jours de l'abbaye .......69

CoNcLusioN ...................81AP paNnJcT 1 - Liste des abbés de Lùxeuii ........83

La mense abbatiale en 189........85La mense conventuelle en r789 .......99

Luxeuil. - I rnp. i\latcel l'attegay.

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