GRONDIJS L. H., Sur La Terminologie Dionysienne

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  • 7/25/2019 GRONDIJS L. H., Sur La Terminologie Dionysienne

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    Bulletin de l'AssociationGuillaume Bud : Lettres

    d'humanit

    Sur la terminologie dionysienneL. H. Grondijs

    Citer ce document Cite this document :

    Grondijs L. H. Sur la terminologie dionysienne. In: Bulletin de l'Association Guillaume Bud : Lettres d'humanit, n18,

    dcembre 1959. pp. 438-447.

    doi : 10.3406/bude.1959.4181

    http://www.persee.fr/doc/bude_1247-6862_1959_num_18_4_4181

    Document gnr le 18/09/2015

    http://www.persee.fr/collection/budehttp://www.persee.fr/collection/budehttp://www.persee.fr/collection/budehttp://www.persee.fr/doc/bude_1247-6862_1959_num_18_4_4181http://www.persee.fr/author/auteur_bude_812http://dx.doi.org/10.3406/bude.1959.4181http://www.persee.fr/doc/bude_1247-6862_1959_num_18_4_4181http://www.persee.fr/doc/bude_1247-6862_1959_num_18_4_4181http://dx.doi.org/10.3406/bude.1959.4181http://www.persee.fr/author/auteur_bude_812http://www.persee.fr/doc/bude_1247-6862_1959_num_18_4_4181http://www.persee.fr/collection/budehttp://www.persee.fr/collection/budehttp://www.persee.fr/collection/budehttp://www.persee.fr/
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    Sur

    la terminologie dionysienne

    Dans la

    premire

    doctrine mystique chrtienne

    vraiment

    approfondie, qui

    a

    t celle

    du Pseudo-Denys,

    le concept de

    Dieu, emprunt aux

    no-platoniciens,

    se prsente sous

    sa forme

    la plus aride, qui est

    celle d une notion intellectuelle

    (logique

    et

    mtalogique)

    dduite d un raisonnement

    nettement

    philosophique.

    L esprit exgtique

    et commentateur

    qui,

    dans

    l ancienne

    Eglise

    sitt le thorme

    de l unit

    et

    de

    la

    concordance des

    deux

    Testaments

    jamais

    fix dans

    son enseignement

    a

    prsid

    aux

    efforts

    de

    faire la

    synthse

    d un

    Pre

    divin

    et

    d une

    substance mtaphysique

    inaccessible

    la comprhension

    humaine, lait presque entirement dfaut

    dans la

    pseudo thologie

    du

    pseudo-Aropagite.

    Il

    serait difficile d attribuer saint Denys une autre place

    dans la longue et

    laborieuse

    volution des

    doctrines chrtiennes,

    que

    celle

    d un

    no-platonicien

    incompltement

    converti.

    Sa

    symbolique sacramentelle et

    sa

    prudente

    exaltation de

    la

    condescendance (cruyxaToco-i) de

    Dieu vers

    l homme,

    recouvrent

    imparfaitement la

    construction

    par

    les deux derniers

    diadoques

    de

    l cole d Athnes

    (Proclus

    et

    Damascius)

    d une

    notion de

    Dieu,

    non

    seulement d ordre mtaphysique,

    mais

    au

    del

    de

    n importe quelle mtaphysique qui ft

    encore

    affirmation ou

    conscience.

    Depuis

    Koch

    on

    s est

    accoutum considrer

    la

    construction

    dionysienne comme une drive

    clu

    systme proclien. On peut,

    en

    effet,

    convenir

    que toutes les

    ides fondamentales du

    noplatonisme sont arrives leur pleine maturit dans

    les traits

    et commentaires

    de

    Proclus.

    Mais sa

    terminologie s est

    attarde-

    dans

    les

    catgories logiques

    de

    la

    sagesse

    classique. Dsirant

    continuer

    se rclamer du

    prestige

    de

    la pense platonicienne

    pour

    justifier

    les

    carts

    dans

    ses

    propres

    doctrines,

    Proclus n a

    voulu

    que

    trs rarement

    recourir

    des termes

    nouveaux.

    Il

    s est

    born

    citer et

    expliquer

    sa faon

    certains

    textes

    dans

    les

    dialogues

    platoniciens, qui

    ne

    pouvaient

    y faire figure que

    d inconsquences auxquelles l enthousiasme des rhteurs

    socratiques s tait laiss sduire.

    Dans

    les

    crits

    de

    Proclus

    la

    conviction

    que

    l ultime

    objet de

    ses recherches philosophiques n admet

    dans

    sa dfinition aucun

    des termes dont

    s taient

    servis

    Platon ou

    Aristote,

    s est souvent

    fait jour. Ce n est qu au dclin

    de

    l cole

    d Athnes qu on

    trouve

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    SUR LA

    TERMINOLOGIE

    DIONYS1ENNE

    439

    chez Damascius nettement formul le problme

    que

    malgr

    les

    rticences

    sculaires des

    diadoques prcdents

    avait pos

    le besoin d une rdaction plus prcise des thses nouvelles

    et

    vraiment

    rvolutionnaires,

    auxquelles

    avait

    abouti

    l enseignement no

    -platonicien.

    Le no-platonisme

    aboutissement

    des systmes classiques

    ?

    On a eu tort

    de

    considrer

    parfois

    le

    no

    -platonisme

    comme

    l aboutissement

    et la

    conclusion de

    la

    philosophie antique.

    Il en

    sort,

    mais comme

    une raction

    contre ses

    procds et

    une

    dngation

    de son

    enseignement. Le no-platonisme

    s est

    fond

    sur les recherches

    logiques

    de Platon

    et

    d Aristote, mais pour

    en

    renverser

    l ordre

    et

    en

    annuler

    les

    conclusions.

    J ai essay

    de

    me faire une ide plus nette

    de

    cette vritable

    rvolution dans la pense

    grecque,

    en rsumant

    sous

    une autre

    forme, plus

    rapproche de

    la

    pense moderne,

    ce principe

    qui

    revient

    sans cesse dans

    les

    raisonnements d Aristote, savoir

    le

    caractre rpulsif

    de

    I'a7t,pov et ce qu on

    pourrait appeler

    le

    horror indefinitionis

    Qu on appelle l Objet suprme des recherches mtaphysiques,

    le Souverain

    Bien, ou la Suprme

    Intelligence,

    ou le Premier

    Principe, ou

    la Cause Premire,

    ou

    simplement,

    avec Damascius,

    Ex.vo, ce

    concept

    ne

    saurait

    tre

    approch

    sous

    une

    forme

    purement logique autrement dfinie

    que

    comme

    id

    quo majus

    (ou melius ou superius etc.) cogitari nequit. Ceci revient

    construire des sries prenant leur origine dans notre savoir

    rel

    mais limit,

    et

    leur

    extrapoler

    des termes selon une

    chelle

    progressive

    de qualits, attributs, facults,

    remontant vers la

    limite d une

    perfection

    insurpassable.

    Plusieurs raisonnements d Aristote

    nous

    conduisent tout

    naturellement vers des aperus d ordre arithmtique et

    gomtrique, auxquels les mathmaticiens nous avaient

    habitus,

    et

    qui

    prsentent pour la rsolution

    de

    nos

    problmes

    philosophiques cet avantage :

    notre

    imagination peut ainsi

    nous

    faciliter

    l accs

    des questions

    qu on

    aurait

    plus

    de

    difficults

    rsoudre,

    si l on recourait tout simplement au

    jeu

    de nos

    catgories

    logiques.

    On constate une analogie

    parfaite

    entre la course vers id quo

    majus cogitari nequit

    et

    celle vers le point l infini

    d une ligne

    droite, le

    nombre

    Infini de

    la

    srie

    des nombres entiers,

    le point

    d intersection

    de deux

    lignes parallles, le

    cercle-limite

    du

    polygone

    rgulier

    inscrit,

    quand on en augmente indfiniment le

    nombre des

    cts. On voit aisment,

    que ces objets

    relgus

    l'infini, sont contradictoires in

    adjecto,

    c est--dire qu ils sont

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    440

    SUR

    LA

    TERMINOLOGIE DIONYSIENNE

    inexistants, ds qu on admet

    la

    rgle

    du

    tiers

    exelu,

    dont

    la

    validit

    sans

    exceptions possibles est

    la

    base de tout

    raisonnement scientifique.

    Ds que Platon et Aristote

    aperoivent

    donc comme

    aboutissement

    d un

    raisonnement

    ce

    But

    final,

    cette

    Cause

    premire,

    ce

    purement

    Un, l'infini,

    ils rebroussent chemin.

    C est ainsi

    qu

    Aristote,

    pour

    arriver

    un concept rationne] de

    Dieu , a

    introduit trois ptitions de principe,

    que

    plus tard les

    no-platoniciens rejetteront intgralement,

    savoir

    : 1-0 l exclusion de

    tout ce qui est impensable comme inexistant, 2-0

    la

    thse

    prconue de

    l intelligibilit

    de

    Dieu , 3-0

    de

    son unit.

    Chaque fois

    que

    la limite d une

    srie

    progressive

    se rvle

    comme

    tant

    indfinie,

    Aristote se

    voit

    oblig de

    clore

    la srie

    en

    y posant

    un

    jalon. C est ainsi que chaque srie compose

    de

    qualits,

    d attributs, de

    facults,

    alignes selon une chelle

    progressive,

    montant

    vers

    l Infini, est rtrcie

    conformment un

    aperu-prjug

    qui suppose

    un

    tre

    ternel, Souverainement

    intelligent,

    Acte pur, Substance imniatrielle, fa plus auguste et.

    divine

    imaginable,

    Penser ne pensant

    que

    soi-mme, etc. L o,

    plus

    tard,

    dans une

    nouvelle religion,

    quelque

    Rvlation

    ax-

    tugto interviendra, on

    a donc

    pu,

    en suivant

    les procds

    aristotliciens, interpoler

    par analogie,

    des qualits humaines

    portes

    un

    maximum rest comprhensible.

    Voici donc le

    procd

    :

    Aristote

    expose une distinction

    quelconque,

    entrevue

    une

    fois

    dans la

    ligne,

    la

    dure,

    la

    matire,

    une

    autre

    fois dans le Mieux-et-le-Pire, le But

    final, la Dfinition

    premire, la

    Perfection

    totale, Y

    Intelligence suprme, etc. Ces

    concepts variables

    donnent lieu

    invitablement au dveloppement de

    sries progressives, fondes

    sur

    la

    constitution

    de

    notre

    puissance

    imaginative, qui, pour la

    ligne,

    la dure, la matire, peut en

    suivre

    la course

    sur

    une

    longueur

    illimite, ou l interprter par

    un

    chiffre

    infiniment

    extensible,

    tandis que,

    s il s agit

    de

    fixer

    qualits,

    attributs,

    buts,

    principes,

    motifs,

    degrs

    d intelligence

    et

    de connaissance, etc., on doit se contenter d un

    nombre

    restreint d talons,

    qui

    peuvent

    nous

    servir

    choisir

    quelque

    terme

    ultime, dont le seul mrite consiste en ce que notre imagination,

    plus pauvre que

    notre

    raison,

    ne

    puisse pas

    le

    dpasser.

    Transformation d oppositions

    de

    contradictoires

    en

    oppositions

    de

    contraires

    Pour Platon l'.tre et le Noiirtre qui,

    chacun pris

    dans son

    abstraite puret,

    se

    contredisent nettement,

    se rencontrent,

    transforms

    en

    contraires,

    dans

    le Circonscrit,

    dans

    ce qui Est,

    et,

    en

    tant, est Autre

    que chaque

    chose

    qui

    n est pas.

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    SUR

    LA

    TERMINOLOGIE DIONYSIENNE

    44I

    L

    Un

    et

    le Multiple forment un

    autre doublet

    de

    contradictoires, qui, pousss par liminations

    successives

    vers de striles

    abstractions,

    savoir :

    l Un

    dans

    sa

    nudit et dans

    son

    impensable

    indivisibilit,

    et

    le

    Multiple

    comme

    un

    morcellement

    sans

    lment

    constitutif, se

    rejoignent

    chez

    Platon aprs avoir fait

    le

    sacrifice de

    leurs isolements,

    dans

    le concept rel

    du

    Tout

    (t

    oXgv),

    compos mais envisag comme

    unit.

    L

    nfini

    et la Limite

    se

    contredisent in

    terminis

    . En

    introduisant

    l image d une Srie progressant

    indfiniment, on

    y

    retrouve

    les

    deux catgories

    : la Limite l Infini, et

    un

    nombre indfini

    de

    termes admettant

    le Plus

    et le Moins.

    Platon

    a trouv

    la solution

    de

    cette aporie dans le concept

    du

    Rel,

    de

    la

    chose dtermine,

    mlam.e de l Illimit

    et

    de

    la

    Limite (to aTCipov, to Trpa).

    Proclus

    En

    posant

    l Un au dbut mme

    de sa

    recherche, Platon avait

    dj admis l rsipov comme la

    forme

    dfinitive du divin. La

    contradictio in

    terminis, a laquelle

    aboutissent

    les raisonnements

    du

    Parmnide,

    et dont

    (en

    opposant dialectique

    ristique,

    to

    St,aXsxT(.xto xal to

    picmxco

    r^ix TcoiecOa . Tipb XXrjXou tou

    Xoyou) les solutions seront

    donnes dans

    le Sophiste

    et

    le

    Phi/be, est accepte dornavant comme relle par tous les

    noplatoniciens.

    Qu on

    se rappelle

    le

    texte

    fameux du

    Parmnide :

    Qu il soit donc

    dit

    : il

    semble

    bien que, l Un

    tant

    ou n tant

    pas, lui et

    le Multiple, pris

    en

    eux-mmes,

    ou en

    leurs

    rapports

    mutuels,

    tout

    cela, sous tous

    les rapports,

    est et n est pas, parat

    et

    ne

    parat pas a.

    Platon

    avait mis

    la Cause comme principe

    rgulateur

    et

    ordonnateur

    dans ce monde

    de choses

    dtermines,

    qui

    seraient

    chacune un mlange de l Illimit

    et

    de

    la Limite,

    de

    l Un et du

    Multiple, etc.

    Chez

    les no-platoniciens

    le Principe ordonnateur

    et

    crateur

    est le Terme mme

    V

    infini, ou l'unit, dans laquelle tous

    les

    termes-limites

    se

    rejoignent.

    Ici il ne

    s agit donc plus

    d une

    Intelligence ordonnatrice,

    soumettant sa

    lgislation

    tous les tres capables d exister,

    mais

    d un

    Premier principe,

    au

    del du

    NoC, de l Ordre, de

    l tre,

    mais dont

    manent

    le

    No, l tre,

    et

    tous

    les

    tres, qui,

    en

    dcoulant

    du

    Nous

    et

    de l tre, sont

    imbus d ordre, sitt

    mans.

    1.

    Elf7]a0o>

    ...

    xal

    ti,

    'oixsv,

    sv eh

    'cmv

    ete

    (jlt) 'cmv, ar

    te

    xal TaXXa xal

    izpbc, aTa

    xal izpb

    aXXr,Xa

    Trvra Tcvrco ia'zi ts xal

    ox

    gzi

    xal

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    6/11

    442

    sur la terminologie pionysienne

    Universalit des contradictions in tekminis

    Source surabondante :

    simultanment une

    manation infinie

    dans

    le temps

    et

    l espace,

    et

    le

    maintien

    de son inaltrable unit.

    Ce

    caractre

    nettement

    contradictoire

    de

    l Un

    surabondant

    est

    transmis

    toutes ses

    drives. Pour chaque membre d une

    chane d tres

    mans la

    contradiction

    se

    perptue :

    uniformment

    la

    cause

    ne

    subit aucune altration de par l manation de

    l tre caus qui, de

    son

    ct,

    quoique

    caus,

    diffre

    de sa

    cause

    et

    aspir% y retourner.

    Mouvement cyclique.

    Apokatastasis

    : Inversement

    doit-on

    noter

    une

    Srie

    progressive des

    tres

    les

    plus

    compliqus

    vers

    les

    tres

    plus simples

    et

    vers l Un. L UN est le terme-limite

    de

    cette srie,

    c est--dire,

    il en fait partie comme le but vers lequel tous les

    tres

    tendent, mais

    il

    existe

    le

    mme

    abme

    entre

    Lui

    et

    le

    chanon

    le plus

    proche,

    qu entre Lui et

    celui qui

    en

    est le plus loign.

    Dsirant continuer se rclamer de l immense prestige de

    la

    pense platonicienne, Proclus

    en

    a frquemment et

    systmatiquement adopt certaines inconsquences, et s est refus

    en

    rejeter

    ou complter la terminologie. Il a

    mis

    toutefois en jeu

    tous les

    procds et artifices logiques et rhtoriques possibles pour faire

    ressortir

    les

    inconciliables contradictions entre l tre connais-

    sable

    et

    le

    Non-tre

    rel

    , mais

    inconnaissable.

    En se fondant sur un

    principe logique

    que Jamblique avait

    dj

    dfini

    il

    a, comme

    lui,

    dcompos

    en

    un

    doublet,

    dont

    le

    terme infrieur est considr

    tre,

    ce

    que

    l on ne pourrait pas

    dire de

    l Un

    qui est le Premier. Il est

    vident que

    l Un premier

    est

    spar

    de

    l Un-qui-est

    par le mme gouffre qui

    le

    spare du

    reste

    de

    l univers.

    L interpolation

    plus

    tardive de l'

    Un-Tout et

    du Tout-Un

    (Damascius)

    ne saurait

    non

    plus apporter une

    solution

    de l aporie.

    Le no-platonisme

    se

    dtache du platonisme

    Syrianus avait dj

    reconnu

    que

    la

    rgle

    du tiers exclu ne peut

    pas

    tre

    applique

    aux concepts

    de

    ce

    qui

    est

    situ

    au

    del

    de

    l tre. Damascius

    en

    a tir

    la consquence invitable

    : parmi les

    objets dont

    notre

    esprit

    cherche

    dfinir les

    concepts, il

    y a

    un

    groupe, auquel

    les

    catgories classiques

    ne

    sont nullement

    applicables. De ce groupe d objets

    il

    a

    longuement

    prcis le

    caractre embarrassant et absurde, sans

    toutefois

    procder

    nettement

    la cration d une

    nouvelle

    terminologie

    approprie

    L>.

    2.

    rt\j.zQ Se TOfroijTov

    7Tt(7'/)[jiry.ivf'j[/E()a fin

    x'j [izv Se'jT-pov

    xrz.

    r/n'ko)^

    X'/jb, to Se

    7TpTepov

    [J.ZTCH

    7Tporr5(,opt.

  • 7/25/2019 GRONDIJS L. H., Sur La Terminologie Dionysienne

    7/11

    SUR

    LA TERMINOLOGIE DIONYSIENNE

    443

    Denys l' Aropagite

    ce

    no-platonicien converti,

    a

    t

    le premier

    introduire des termes techniques adapts

    la

    majest des

    concepts mta-gnostiques, vers

    lesquels

    s lve

    la recherche du

    Principe souverain.

    La doctrine damascienne se

    dtache

    nettement

    de

    la pense

    platonicienne. Le Principe suprme n est plus

    quelque

    chose

    (to

    t).

    En effet, en le

    posant

    comme

    tel,

    on

    s empcherait

    d apprendre s en approcher.

    L UN est

    prcisment

    le

    Non-

    quelque chose (to [l'fi ti)

    et

    le

    Sans-qualit 3.

    Ici

    Damascius a

    introduit

    la

    dnomination de

    la

    dignit d un

    objet

    philosophique. Si nous

    trouvons

    ,

    dit-il,

    au-dessus du connaissable

    quelque chose,

    celle-ci

    en

    sera d autant

    plus digne

    (Tt,fi.itoTpov

    4).

    Si

    nous pouvions trouver ce qui

    serait tout

    fait au

    del

    du

    connaissable,

    ce serait ce

    qu il

    y

    a

    de

    plus

    prcieux

    (ocuto

    ti[lka)-

    toctov). Ce n est donc

    que

    dans un complet obscurcissement de

    notre

    esprit

    que

    nous pourrions

    nous

    approcher de cet Ineffable.

    Si parfois, retournant vers les procds de ses prdcesseurs

    pour remonter vers le Principe suprme,

    il

    se

    sert

    des catgories

    du penser classique, comme l Un, le Noi, l Ouata, le Premier

    Principe,

    etc.,

    il leur prfre

    cependant,

    pour le caractriser,

    des

    dnominations comme to ppyjTov, Exsvo,

    termes

    toutefois

    encore

    quivoques et

    provisoires,

    puisqu ils continuent

    signifier

    une

    locution de notre

    Penser, et

    un

    acte

    dtermin,

    savoir une

    -KrpcLmc,

    caractrise.

    Rcapitulons : chaque concept que nous

    admettons

    avoir

    compris, nomm, entrevu,

    pos problmatiquement

    ou

    ngativement, cesse immdiatement d tre

    l Objet que nous

    recherchons.

    En effet, si nous

    attachons

    ce nouveau terme, mme pos

    comme

    non-connaissable,

    quelque valeur

    notique que

    ce soit,

    nous serons forcs

    de

    supposer

    un

    autre

    terme, dont

    son tour

    nous

    devrons admettre l impossibilit

    de lui attribuer

    dfinitivement connaissabilit ou

    non-connaissabilit. Et ainsi ad infinitum.

    Le terme auquel nous pourrons

    nous arrter,

    ne peut

    tre que

    xal [t/]te

    6voy.

  • 7/25/2019 GRONDIJS L. H., Sur La Terminologie Dionysienne

    8/11

    444

    SUR LA TERMINOLOGIE DIONYSIENNE

    quelque chose

    dont

    nous ne savons pas s il est non-connaissable.

    Nous devons donc le poser comme une

    contradiction

    in terminis.

    Ce tout dernier terme, le

    terme-limite

    de

    la

    srie

    que

    notre

    Penser

    parcourt dans sa recherche du plus digne

    et

    par consquent

    du

    moins

    connaissable,

    sera

    donc

    ni

    connaissable,

    ni

    non-connaissable totit

    en

    tant tous les deux

    la

    fois. Damascius a

    ainsi

    dcouvert le vritable

    caractre logique du Divin ;

    le hyper-

    non-connaissable , c est--dire ce

    que

    nous pensons comme non-

    connaissable,

    tout

    en en niant la non-connaissabilit.

    Est-ce que

    l

    UN

    , dit Damascius,

    est inconnaissable par sa

    nature

    mme,

    malgr

    le fait

    que l Inconnaissable

    est

    autre chose

    que

    l UN

    ?

    L

    UN

    veut tre par-soi,

    et

    avec aucune autre

    chose,

    savoir

    ni avec le Connaissable, ni avec le

    Non connaissable 5.

    Plus

    digne

    encore sera

    la

    dngation

    du dernier lien

    qui

    le

    relie

    notre

    esprit.

    JNous

    arrivons

    ainsi

    au

    terme-limite

    de

    cette srie,

    dont

    le modulus est une augmentation progressive

    de

    la

    dignit,

    proportionne

    au

    progressif

    effacement

    de

    toute

    pensabilit.

    Ce terme-limite , ajoute Damascius,

    que

    nous

    reconnaissons

    ni

    connatre,

    ni ne pas connatre, nous nous sentons

    vis--vis

    de

    lui dans

    un

    tat

    de

    hyper-non-connaissance (7ipyvoia)

    par le voisinage

    duquel mme l UN

    est obscurci.

    Car,

    tant le

    plus

    rapproch

    de ce Principe inaccessible,

    il demeure,

    s il est

    licite de

    s exprimer ainsi,

    dans

    l abme

    de

    son

    silence infini0. .

    Le pensable, le connaissable, le non-connaissable,

    l hyper-non-connaissable.

    Il faut donc distinguer entre

    pensabilit,

    qui est

    le

    reliement

    d un objet l ensemble

    de

    nos catgories logiques,

    et

    connais-

    sabilit, qui

    est sa pose

    comme objet,

    aussi

    vide et

    dnu de

    ralit qu il

    puisse

    paratre. La

    non-cemnaissabilit

    d un

    objet

    signifie

    l assertion de

    notre

    impuissance

    relier un

    objet

    l ensemble ou

    une quelconque

    de

    nos catgories logiques, sauf

    sous

    l unique

    forme

    d une

    proportion

    apophatique.

    JHyper-

    non-connaissabilit

    retire

    un objet cependant reconnu

    vident, tout

    moyen

    de se relier

    l esprit

    humain, et lui

    dnie

    par consquent aussi bien toute attribution

    que

    toute dngation

    5.

    ~Apa

    oOv

    to

    cyvcorov rfj

    obcsa

    (pcsi to

    sv, el xal to

    yvtocnrov

    Trap to

    'v;

    to Se

    xocO'

    aio PoXstocl

    evoa,

    av aXXco Se oSevi

    6. ..

    TO

    TUXSlVa

    TOU

    VO

    TTOCVTV]

    TCppTJTOV,

    OTSp OUTS yiyvWCTXElV OUT

    yvoev fxoXoyou^sv, cOCa'

    z~/zvj

    rrpo

    aTO

    xal TCpyvoiav,

    ou

    tt] yet-

    Trjasi TciXuy^eTai xo to 'v yyuTdcTO)

    yp

    ov ttj ^rjxavou

    py

    ei B\Liq outco z'ntev, canep

    v STco

    [xvzi

    tj Sty^

    xeiv/;.

    (ib).

  • 7/25/2019 GRONDIJS L. H., Sur La Terminologie Dionysienne

    9/11

    SUE LA TERMINOLOGIE DIONYSIENNE 44.5

    de ralit, tout

    en lui

    reconnaissant un

    rel alogique

    (donc

    absurde) et purement

    mtalogique.

    La rgle

    du tiers

    exclu.

    La maxime mtalogique fondamentale.

    On ne

    saurait

    approcher

    n importe

    quel

    objet

    d ordre

    divin, qu en lui appliquant d abord

    successivement

    tous les

    procds

    et

    la terminologie entire

    de

    la ratiocination humaine,

    puis

    en niant pertinemment la

    nature

    approprie

    de

    ces

    oprations mtalogiques. Puisque toute approche

    notique

    du Divin

    est futile

    moins

    d avoir suivi pralablement

    la voie

    de nos

    raisonnements habituels,

    il

    sera

    impossible,

    en

    dfinissant

    les

    choses

    divines, d en retrancher compltement, mme en lui

    dniant l applicabilit, l appareil catgoriel

    de

    la philosophie

    rationnelle. Et puisque, pour pouvoir discourir des choses

    divines ou mme les mentionner,

    on

    ne peut en

    dnier

    sans en

    mme temps en admettre la connaissance, il ne nous

    reste

    que

    d une

    certaine faon convenable d en exprimer

    simultanment

    l affirmation

    et la ngation.

    Nous rcapitulons

    donc

    d aprs

    Damascius

    que

    ce ne

    saurait tre la

    nature

    divine qui

    est divise

    et contradictoire.

    Division

    et

    contradiction sont inhrentes notre esprit

    humain,

    au

    fonctionnement de

    notre

    Penser.

    Chaque

    proposition

    relative

    au Divin en

    sera

    donc, ds que l on avance

    en

    quelque sorte

    une

    projection

    au beau milieu

    de

    nos

    raisonnements

    habituels,

    mais

    de

    faon

    qu elle

    obisse

    un

    maxime

    mtalogique,

    et

    nullement

    la

    rgle

    rigide du

    tiers

    exclu.

    Cette

    rgle fondamentale

    relie la

    ralit

    possible

    de

    l objet

    d un

    concept

    la

    condition qu il est impossible de lui

    attribuer

    simultanment

    et

    sous le mme rapport A

    et Non-A.

    Le maxime

    fondamental

    hyperagnostique qui rsume

    l'aboutissement final et dfinitif

    de

    la Pense no-platonicienne,

    prononce

    :

    que chaque

    objet hypergnostique

    attribue

    son

    objet

    de

    pouvoir

    tre en mme temps A et Non-A, et galement

    d tre

    ni A ni Non-A. Il est vident

    que

    ne pas tre A

    n est

    pas

    identique : Non-A

    7.

    7.

    ... al'xiov

    Se,

    xi

    r^zl 8iTip-/;(i.s0a xal

    el SiTjp'/^sva Sixr(xa

    .Tzofi'knoiisv, yXiy^6[ivoi

    Se

    jaco xt) sxsvou yvcoacco

    'jcmvo ov aofi.-

    tvTa xP^f^xa

    fjiou,

    si ttco 0101 x slVjjjLev xal ouxw ruXa-

    xr] (ZyXr, cpaEco, eXa(3o'jfxsvo(, Se jjigi xt;v Ttvxcov 7iXr,6v

    pj tj tou vo

    TrsaxevMfiivov

    iSiaa;jLv t aTrXw xal

    rcpcorco

    Xp l

    tov

    px7j

    Xoyov

    x^' Tcpsafuxxr^ ....

    Kal

    xi Oaupiaaxov ei

    uspl

    xEivo

    xauxa

    izayo[iz\>,

    ou

    xal

    r\

    Siaxexpi^vr,

    yvcoai

    viaia

    laxlv,

    r( ox alCT0av6[X0a

    ( 28).

  • 7/25/2019 GRONDIJS L. H., Sur La Terminologie Dionysienne

    10/11

    ,j.j()

    sur i.a

    tkkminoi.ocjl dion y^u-nint

    Saint

    Denys l ropagite

    Les termes nouveaux uTcepyvcocnro,

    xjnzpfx.ppr^oic,,

    couronnent

    la

    dcouverte,

    l isolation

    et l adoption

    par les

    coles

    no-platoniciennes

    d un

    groupe

    de

    concepts, avec

    lesquels

    de

    nombreuses

    croyances mystiques avaient depuis longtemps familiaris le

    monde antique, mais que, comme nous l avons fait entrevoir, la

    philosophie classique,

    les jugeant absurdes ou de douteux

    aloi,

    avait

    rejets.

    A l poque

    mme

    o l cole

    d Atnnes

    dprissait

    et

    allait

    disparatre, ce

    fut

    le pseudo-Aropagite qui en recueillit l hritage

    et en

    transmit les dcouvertes

    l glise

    byzantine. Ce n est

    que

    par cette voie que certaines pratiques et visions d asctes

    chrtiens ont

    pu

    tre

    adoptes

    par

    l enseignement

    de

    l Orthodoxie.

    On

    retrouve chez saint

    Denys maintes fois

    le

    terme

    UTCpyvoiC-

    to dont Proclus

    ne

    s tait

    pas

    encore

    servi.

    Mais tandis que

    Damascius

    avait

    encore indistinctement

    employ

    l ancienne ct

    de la nouvelle terminologie, saint Denys avait entirement rompu

    avec

    les

    doctrines

    et

    traditions platoniciennes tombes en

    dsutude

    et

    dcries par les factions monacales comme tant

    purement paennes. Il a complt tout

    l appareil logique

    des anciens

    systmes philosophiques, en

    lui

    extrapolant

    ds qu il

    discourait de

    choses divines

    un

    nouveau

    langage technique,

    dont la structure tait identique

    l ancienne,

    sauf

    l apposition

    chaque

    catgorie

    du

    prfixe oTp.

    On

    retrouve

    donc dans son

    uvre toute

    la

    nomenclature de

    la

    sagesse grecque, mais reporte,

    par ce prolongement, vers un domaine tout

    nouveau

    de

    la

    pense

    philosophique et

    de

    la

    spculation thologique. Chaque terme

    nouveau comporte donc une transformation

    du

    sens

    du

    radical

    allong (ooa[a, yvcooi, etc.)

    de

    faon

    que les deux

    significations

    en

    restent indissolublement

    relies :

    dans

    chaque cas le

    terme

    avec

    la prposition U7rp se rapporte

    son

    radical

    exactement

    comme

    les termes

    orcsppp^To,

    uTcspyvcoaTo leurs

    radicaux

    pvjTo,

    yvoor

    etc.

    Ainsi s explique chez saint Denys ja frquence des termes

    en

    ousp : UTOppyj.o, u-njep^voj^vo, TOpu7rapt, uTOpocuo,

    uTOpyvcociTo, etc.

    dont de nombreux

    auteurs, en mentionnant son

    style

    ampoul,

    lui ont

    erronment

    reproch

    l emploi

    abondant.

    Saint

    Denys a,

    chez les

    derniers Diadoques

    de

    la philosophie

    grecque, trouv toute

    prte

    cette

    terminologie

    en UTcp, dont,

    n tant

    pas magister en dialectique,

    il

    a rarement

    dvelopp la

    gense.

    Cependant,

    si

    un

    grand

    nombre d endroits

    la

    signification

    en

    est

    identique

    celle

    que

    Damascius,

    son

    prdcesseur en

  • 7/25/2019 GRONDIJS L. H., Sur La Terminologie Dionysienne

    11/11

    SUR

    LA TERMINOLOGIE DIONYSIENNE

    447

    nco -platonisme, avait expose,

    il

    semble

    presque

    partout

    ailleurs

    vident,

    que

    les

    catgories

    en

    uup,

    ramenes

    la syntaxe

    habituelle de

    nos

    raisonnements, se

    dsagrgent comme suit :

    le terme

    Hyper-A

    se rsume

    en

    quatre propositions

    vraies

    simultanment

    :

    Hyper-A A, Non-A, 7^ A, = Non-A 8.

    Dr

    L.

    H.

    Grondijs.

    8. En rsumant comme

    suit sa critique des systmes

    noplatoniciens

    : Denken

    knnen wir nur

    bestimmtes,

    hier

    aber

    soll das absolut bestimmungslose gedacht

    werden ; dies ist ein Widerspruch und

    an

    diesem Widerspruch ist der Ncopla-

    tonismus gescheitert

    E.

    Zeller {Die Phil. der Griechen, III, 2, 1881, p.

    842)

    prend

    l'gard de

    cette

    cole,

    qui

    a dcouvert et

    dfini

    la notion inaccessible et

    invitablement contradictoire en soi, une attitude

    injustifiable.