Évaluation du contenu gastrique par échographie : intérêt en anesthésie

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Le Praticien en anesthésie réanimation (2012) 16, 141—145 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com MISE AU POINT Évaluation du contenu gastrique par échographie : intérêt en anesthésie Ultrasonographic gastric content assessment: Practical interest in anesthesia Julien Rousset Département d’anesthésie-réanimation, hôpital Tenon, AP—HP, 4, rue de la Chine, 75020 Paris, France MOTS CLÉS Échographie ; Inhalation ; Induction anesthésique ; Contenu gastrique Résumé L’inhalation du contenu de l’estomac, bien que rare, est une des principales causes de mortalité en anesthésie. Ces dernières années, l’utilisation de l’échographie a connu un large essor en anesthésie-réanimation. Récemment, des équipes se sont intéressées à l’échographie de l’estomac afin d’évaluer le volume gastrique. Ces travaux ouvrent la perspective d’une mesure simple, rapide et non invasive, disponible dans l’environnement des urgences et du bloc opératoire et permettant de repérer les patients à risque d’inhalation. © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Ultrasonography; Inhalation; Anaesthetic induction; Gastric content Summary Gastric content inhalation, although rare, is still one of the leading causes of anaesthesia-related death. Over the past few years, the use of ultrasonography has been deve- loped in anaesthesia. Recently, studies have pointed out that ultrasonography could be used to evaluate gastric content. Ultrasonography is a rapid, simple, validated, and non-invasive diagnostic tool available at bedside in the settings of emergency and perioperative care. Gas- tric content evaluation through ultrasonography could be soon, included in a chart flow guiding induction of anaesthesia in patients at risk of inhalation. © 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Adresse e-mail : [email protected] 1279-7960/$ see front matter © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2012.04.003

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Le Praticien en anesthésie réanimation (2012) 16, 141—145

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

MISE AU POINT

Évaluation du contenu gastrique par échographie :intérêt en anesthésie

Ultrasonographic gastric content assessment: Practical interest in anesthesia

Julien Rousset

Département d’anesthésie-réanimation, hôpital Tenon, AP—HP, 4, rue de la Chine,75020 Paris, France

MOTS CLÉSÉchographie ;Inhalation ;Inductionanesthésique ;Contenu gastrique

Résumé L’inhalation du contenu de l’estomac, bien que rare, est une des principales causesde mortalité en anesthésie. Ces dernières années, l’utilisation de l’échographie a connu un largeessor en anesthésie-réanimation. Récemment, des équipes se sont intéressées à l’échographiede l’estomac afin d’évaluer le volume gastrique. Ces travaux ouvrent la perspective d’unemesure simple, rapide et non invasive, disponible dans l’environnement des urgences et dubloc opératoire et permettant de repérer les patients à risque d’inhalation.© 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDSUltrasonography;Inhalation;

Summary Gastric content inhalation, although rare, is still one of the leading causes ofanaesthesia-related death. Over the past few years, the use of ultrasonography has been deve-loped in anaesthesia. Recently, studies have pointed out that ultrasonography could be used

Anaestheticinduction;

to evaluate gastric content. Ultrasonography is a rapid, simple, validated, and non-invasivediagnostic tool available at bedside in the settings of emergency and perioperative care. Gas-

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Adresse e-mail : [email protected]

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ntroduction

epuis la description en 1946 de l’inhalation du contenuastrique par Mendelson chez de jeunes parturientesnesthésiées, la vacuité de l’estomac est devenue uneréoccupation constante en anesthésie. À ce titre, desecommandations sont fréquemment mises à jour afin deéfinir la durée de jeûne préopératoire. Il est ainsi recom-andé d’interdire la prise orale d’aliments solides et de

iquides clairs respectivement six heures et deux heuresvant une anesthésie générale pour une intervention pro-rammée. Toutefois, ces recommandations sont basées sures études de faibles niveaux de preuves. Même si ellesemblent adaptées pour la plupart des patients bénéficiant’une chirurgie réglée, il est difficile d’évaluer le risque réel’inhalation, d’une part, chez des malades dont la vidangeastrique peut être ralentie (sujets diabétiques ou obèsesar exemple) et, d’autre part, chez les patients devant subirne intervention en urgence.

Ces dernières années, l’utilisation de l’échographie pares médecins anesthésistes-réanimateurs a connu un largessor. Elle a permis de faire évoluer les pratiques tant dansa réalisation de gestes techniques, comme les abords vei-eux centraux ou l’anesthésie locorégionale, que dans lesrocédures de monitorage ou les actes diagnostiques au blocpératoire. C’est ainsi que des équipes se sont récemmentntéressées à l’échographie de l’estomac afin d’en précisere volume avant une anesthésie. Ces travaux encore limitésn nombre offrent toutefois la perspective d’une mesureon invasive jusqu’ici inexistante.

Cette mise au point a donc pour but d’expliquer laéalisation pratique de l’évaluation du contenu gastriquear l’échographie, de tenter de définir les modalités deeconnaissance d’un estomac plein au bloc opératoire et’envisager les avantages et les limites d’un tel examen ennesthésie-réanimation.

chographie de l’estomac

hoix de la région à explorer

’estomac est composé de trois régions anatomiques : le fun-us (grosse tubérosité), le corps et l’antre (Fig. 1). L’examenchographique ne peut pas explorer ces trois régions simul-anément. De ces trois régions, l’examen sonographiquee l’antre semble le plus intéressant. Il présente en effetes avantages d’être simple et reproductible. Ainsi, dans’étude de Perlas et al., une échographie de l’antre, du corpst du fundus a été pratiquée chez 18 volontaires sains [1].ette évaluation était réalisée à jeun, après l’ingestion de

iquide et d’un repas solide. Les résultats montraient qu’uneoupe complète de l’antre gastrique était obtenue dans00 % des cas lors du jeûne ou après l’ingestion de liquide.n comparaison, une coupe complète du corps n’était visua-isée que dans 77 à 89 % des cas et une coupe du funduseulement dans 44 à 67 % des cas. En plus de la facilité avecaquelle l’antre était visualisée, la mesure de sa surface

tait dans ce travail bien corrélée au volume de l’estomac etugmentait proportionnellement à la quantité des ingestas.

D’autres études ont comparé la mesure de la surfacentrale aux méthodes de références pour évaluer la vidange

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igure 1. Schéma de l’estomac. 1 : cardia ; 2 : fundus ; 3 : corps ; : grande courbe ; 5 : antre ; 6 : pylore ; 7 : petite courbure.

astrique et le volume de l’estomac. Dans le travail de Dar-iche et al., le temps de vidange gastrique mesuré chez1 patients à l’aide de l’échographie était bien corrélé auxesures réalisées grâce à la scintigraphie [2]. Dans une

tude en cross-over menée par Wong et al. et portant sureuf parturientes, les mesures échographiques de la surfacentrale étaient comparées au temps de vidange gastriquebtenu par la décroissance d’un biomarqueur, le paracéta-ol, dont l’absorption se fait dans le duodénum [3]. Les

ourbes d’absorption du paracétamol et les mesures de sur-ace antrale étaient superposables après l’ingestion de 50 et00 mL d’eau. Enfin, Bouvet et al. ont montré que la mesuree la surface antrale présentait une corrélation linéairevec le volume de l’estomac mesuré à l’aide d’une sonde’aspiration gastrique [4].

éalisation pratique de l’examen

’examen échographique utilise une sonde curvilinéaire de à 5 MHz (sonde abdominale). Pour visualiser l’antre, laonde est placée dans un plan sagittal au niveau de l’airepigastrique chez un patient en décubitus dorsal ou en décu-itus latéral droit (Fig. 2). La position en décubitus latéralroit permet de sensibiliser l’examen, rendant plus simplea visualisation de l’antre. Compte tenu des variations ana-omiques interindividuelles, la sonde doit être déplacée deauche à droite afin de repérer le lobe gauche du foie, laeine cave inférieure et la veine mésentérique supérieureui constituent les principaux repères anatomiques (Fig. 3).ne fois les vaisseaux identifiés, la sonde est déplacée dans

e sens horaire ou antihoraire en vue d’obtenir la coupe de’antre la plus petite possible. Dans l’étude de Perlas et al.,es mesures de surface antrale, à partir des diamètres cra-

iocaudal et antéropostérieur, étaient réalisées à partir deette coupe [1].

À jeun, l’antre est plate et de forme elliptique. Lesifférents tissus composant l’estomac, représentés par la

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Figure 3. A. Image échographique de l’antre après ingestion desolide. B. Antre vide apparaissant plat et hyperéchogène. F : foie ;a : antre ; D1 : diamètre antéropostérieur ; D2 : diamètre craniocau-d

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Figure 2. Position de la sonde pour réaliser une échographie del’antre.

muqueuse, la musculeuse et la séreuse apparaissent res-pectivement échogène, hypoéchogène et échogène. Aprèsingestion de liquide, l’antre se distend et prend une formeronde avec un contenu hypoéchogène. Après un repas solide,le contenu de l’estomac est hétérogène, la présence de gazresponsable d’artefacts peut rendre difficile la vision de laparoi postérieure de l’antre.

Le calcul de la surface antrale (CSA) utilise la formuledécrite par Bolondi et al. [5] :

CSA = AP × CC × �/4AP = diamètre antéropostérieurCC = diamètre craniocaudalSelon Perlas et al., le volume de l’estomac peut être

déduit du CSA d’après les formules suivantes [1] :Volume (mL) = 1199,99 + 483,09 × log(CSA décubitus dor-

sal) − 5,84 × âge − 9,94 × taille (cm)Volume (mL) = −372,54 + 282,49 × log(CSA décubitus

latéral) − 1,68 × poids (kg)

Reconnaissance d’un estomac plein

Évaluation quantitative

Après les descriptions initiales de cas d’inhalation gastriquese compliquant de pneumopathies graves, de nombreux tra-

vaux ont tenté de déterminer le volume minimal responsablede lésions du parenchyme pulmonaire. Dans une revue dela littérature datant de 1999, Engelhardt et Webster ont

dtp

al ; VCI : veine cave inférieure.

ien montré la difficulté d’une telle définition [6]. D’uneart, les modèles animaux étudiés sont d’extrapolation dif-cile à l’homme. D’autre part, le volume responsable de

ésions pulmonaires est variable en fonction du pH de la solu-ion inhalée. Toutefois, un consensus semble s’établir pouréfinir l’estomac plein par un volume compris entre 0,4 et,8 mL/kg ou la présence de particules solides [6].

C’est la définition retenue par Bouvet et al. dans leurtude évaluant le CSA comme méthode diagnostique d’unstomac plein au bloc opératoire [4]. Ce travail portaitur 183 patients ayant subi une anesthésie générale danse cadre d’une chirurgie programmée ou en urgence. Laétermination du CSA était réalisée immédiatement avant’anesthésie générale. Après l’induction, une sonde nasogas-rique était mise en place afin d’évaluer le volume gastriqueésiduel et de le comparer à la mesure obtenue par échogra-hie. Les résultats montraient que le calcul du CSA réalisableans 98,4 % des cas, était bien corrélé au volume aspiréar la sonde nasogastrique. Les valeurs seuil du CSA éva-uée pour la reconnaissance d’un estomac à risque étaiente 340 et 410 mm2. Un CSA supérieur à 340 mm2 permettaita reconnaissance d’un estomac plein (défini par un volumeupérieur à 0,8 mL/kg ou la présence de particules solides)vec une sensibilité de 91 %, une valeur prédictive négative

e 94 %, une spécificité de 71 % et une valeur prédictive posi-ive de 63 %. De plus, l’aire sous la courbe ROC était de 90 %our le diagnostic d’estomac plein.

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Tableau 1 Classification en grades selon l’aspect del’échographie antrale et correspondance de la classifica-tion par grade avec les volumes prévisibles selon Perlaset al. [1].

Grade Apparence Volumemoyen ± DS (mL)

0 Antre apparaissant vide endécubitus dorsal

0

1 Liquide uniquement vu endécubitus latéral droit

16 ± 36

2 Liquide visible au niveau del’antre en décubitus dorsal etlatéral et/ou présence departicules solides

180 ± 83

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Crldccsgqlar2ajddgastrique. Elle pourrait ainsi permettre de mieux discrimi-

DS : déviation standard.

Une étude a évalué l’intérêt de la mesure du CSA afin deéterminer le volume gastrique dans la population pédia-rique [7]. Ce travail portait sur 16 enfants âgés de six à2 ans et comparait les mesures de CSA aux volumes gas-riques obtenus après la réalisation d’une IRM. Les volumesstimés par l’examen échographique étaient trop imprécisour recommander cet examen en pédiatrie.

valuation qualitative

erlas et al. ont proposé une évaluation qualitativeu contenu gastrique [8]. Dans ce travail portant sur00 patients en chirurgie réglée, l’aspect de l’antre étaitlassé en trois catégories de 0 à 2 (Tableau 1). Àhaque grade correspondait un volume gastrique prévi-ible. Ainsi, une antre gradée 0 était totalement vide, unrade 1 correspondait à un volume de 16 ± 36 mL et unrade 2 à un volume gastrique de 180 ± 80 mL. Alors quee risque de régurgitation apparaissait nul pour les antresrades 0 et 1, il semblait au contraire très important en case grade 2.

L’avantage évident de ce type d’évaluation était de’affranchir des calculs afin de proposer un outil diagnos-ique plus intuitif au clinicien. De plus, la stratificationu risque, portant sur les trois grades, apparaissait extrê-ement pertinente dans cette étude. Toutefois, aucuneéthode alternative n’était utilisée afin de vérifier que les

olumes prédits étaient bien les volumes réels. De plus, leodèle mathématique sur lequel reposait l’estimation des

olumes gastriques avait été élaboré à partir d’une étudeomportant seulement 18 patients [1].

énéfices escomptés de la mesurechographique du contenu gastrique

n situation d’urgence

ien que l’inhalation du contenu gastrique soit un événe-ent rare en anesthésie, l’enquête de la Société francaise’anesthésie-réanimation (Sfar) publiée en 2006 a montréu’elle restait l’une des principales causes de mortalité

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J. Rousset

iée à l’anesthésie en France [9]. Les études montrent quea survenue de cette complication est plus fréquente lauit et lors des procédures en urgence [10]. Dans l’étude’Olsson et al. qui portait sur plus de 185 000 procédures’anesthésie, 67 % des cas d’inhalation se produisaient lorse difficultés d’intubation ou de gestion des voies aériennesupérieures [10]. Les urgences représentent bien la diffi-ulté pour le praticien d’évaluer le contenu de l’estomac,’une part, parce que la situation ne permet pas le plusouvent d’attendre que le patient soit à jeun, d’autre part,arce que la pathologie en cause peut être responsable’un retard de la vidange gastrique. Dans ce contexte,’échographie de l’estomac peut aider le clinicien à stra-ifier le risque d’inhalation et le cas échéant proposer unetratégie afin de le diminuer. Ainsi, Koenig et al. ont évalué’impact de l’échographie de l’estomac lors de procédures’intubation en séquence rapide [11]. Cette étude étaitenée en réanimation et portait sur 80 patients. Avant’intuber les patients, une échographie de l’antre étaitéalisée afin de déterminer le volume de l’estomac. Parmies 80 patients, 19 (24 %) avaient un estomac contenant duiquide. Chez cinq patients (6 %), la quantité était jugéeinime. Chez 14 patients (17 %), la quantité semblait abon-ante et une sonde nasogastrique était mise en place pourider le contenu de l’estomac avant l’induction. L’aspirationu contenu de l’estomac a permis de ramener 553 ± 290 mLn moyenne (de 200 mL à 1100 mL). Aucun patient n’arésenté de syndrome d’inhalation. Aucune complicationiée à la mise en place d’une sonde nasogastrique n’a étéapportée. L’examen échographique durait moins de deuxinutes.Outre la mise en place d’une sonde nasogastrique avant

a réalisation d’une séquence rapide, on peut penser que laonstatation d’un estomac plein fera préférer les techniques’anesthésie locorégionale dès lors que la nature de l’actepératoire le permettra.

etard à la vidange gastrique

ertaines pathologies ou état physiologique peuvent alté-er la vidange gastrique. C’est le cas par exemple de’obésité, du diabète et d’autres pathologies à l’originee neuropathie dysautonomique ou de la grossesse. Sur unollectif de 200 patients évalués en préopératoire d’unehirurgie réglée, l’étude de Perlas et al. retrouvait queept patients (3,5 %) présentaient un estomac plein mal-ré le respect des procédures classiques de jeûne [8]. Alorsue cette constatation n’a pas eu d’impact sur le dérou-ement de l’anesthésie chez six d’entre eux, un patient

présenté un syndrome d’inhalation lors de la phase deéveil. Bouvet et al. retrouvaient quant à eux un taux de,9 % de patients présentant un estomac à risque, pour uncte programmé, malgré la mise en place des consignes deeûne préopératoire [4]. L’échographie de l’estomac sembleonc intéressante pour stratifier le risque d’inhalation chezes patients pouvant présenter un retard à la vidange

er les malades pour lesquels une induction en séquenceapide est indiquée malgré le respect des procédures deeûne.

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Limites de l’échographie de l’estomac

Même si l’échographie de l’estomac semble être uneméthode fiable, un certain nombre de limites doivent luiêtre opposées. Tout d’abord, la définition de l’estomacplein en échographie est variable d’une étude à l’autre etmême si les valeurs seuil utilisées dans l’étude de Bouvetet al. semblent pertinentes, d’autres études doivent venirconfirmer ces résultats. Ensuite, l’échographie de l’estomacest un outil intéressant dans le diagnostic d’estomac pleinmais son utilisation en vue d’affirmer la vacuité gastriquen’a jamais été évaluée. On ne peut pas encore imaginers’affranchir d’une induction en séquence rapide sur lesseules constatations de l’échographie antrale. Enfin, en casd’antécédent de chirurgie de l’estomac ou de grossesse encours, les modifications anatomiques peuvent rendre la réa-lisation de l’examen et son interprétation beaucoup plusdifficile.

Conclusion

L’échographie de l’estomac offre la perspective d’un moni-torage simple, non invasif et rapidement disponible ducontenu de l’estomac en anesthésie. Même si le nombrede travaux évaluant son intérêt dans la pratique cliniqueest encore limité, la détermination du CSA afin de porter lediagnostic d’estomac plein semble être indiquée dans deuxsituations. D’une part, en urgence où la constatation d’unvolume gastrique important peut faire envisager la vidangede l’estomac afin de diminuer le risque d’inhalation avantde réaliser la séquence d’induction. D’autre part, en chirur-gie réglée où cet examen peut permettre de discriminer lespatients qui présentent un retard à la vidange gastrique. Lesétudes de Perlas et al. et Bouvet et al. suggèrent qu’environ3 % des patients pourraient présenter un risque d’inhalationmalgré la mise en place des recommandations concernantle jeûne préopératoire [4,8]. Il paraît donc indiqué dans cescas de proposer une induction en séquence rapide.

Même si, au vu des études, la constatation d’un estomacvide en échographie ne permet pas de raccourcir la durée de

jeûne recommandée ou de s’affranchir d’une induction enséquence rapide dans les situations à risque (durée de jeûneinférieure à six heures, urgences abdominales, grossesseaprès 20 SA. . .), il est évident que cet examen est d’ores

[

esthésie 145

t déjà d’une grande utilité au bloc opératoire. Il permetu praticien d’affiner son jugement clinique et d’analyseru mieux la balance bénéfice risque afin de proposer la pro-édure la plus adaptée à son patient et à la situation.

éclaration d’intérêts

’auteur n’a pas transmis de déclaration de conflits’intérêts.

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