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A Anne-Valérie Gasc – vernissage samedi 24 mars 2018 – exposition jusqu’au 19 mai DOSSIER PÉDAGOGIQUE

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A Anne-Valérie Gasc – vernissage samedi 24 mars 2018 – exposition jusqu’au 19 mai

DOSSIER PÉDAGOGIQUE

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1. Le lieu

L’URDLA est un centre d’art contemporain dédié à l’estampe, qui réunit dans un même lieu des ateliers et une galerie. L’estampe désigne toute impression à l’encre sur un support souple à partir d’une matrice qui peut être traitée en relief (taille d’épargne), en creux (taille-douce) ou à plat (lithographie). L’association URDLA, qui fêtera ses quarante ans en 2018, propose tout au long de l’année une programmation culturelle, ouverte à tous, avec possibilité de visites et d’ateliers notamment pour les scolaires, autour de la linogravure, la taille-douce et la lithographie. L’URDLA permet également, à travers des résidences, à des artistes d’expérimenter une ou plusieurs techniques d’estampes pratiquées dans ce lieu.

Et c’est dans cette logique que s’inscrit l’exposition de la plasticienne Anne-Valérie Gasc autour de 26 empreintes de pierres, titrées chacune de A à Z, de 5 pierres lithographiques dont l’encrage noire a été pérennisé par polymérisation et de son livre d’artiste, Twenty-six Blank Rocks. Ces empreintes ont été créées lors de la résidence d’Anne-Valérie Gasc à l’URDLA en 2017. Elles ont été imprimées sur un papier très fin qui semble s’opposer à la masse d’encre noire brillante qui les recouvre, laquelle est pleinement visible sur certaines empreintes.

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2. L’artisteAnne-Valérie Gasc est née à Marseille en 1975, elle vit et travaille à Marseille.

Sa pratique artistique est fondée autour de notions-clés, comme la dévastation, la démolition, la disparition, le compte-rendu de cette destruction, les traces, quelles qu’elles soient, qui en restent : « Depuis le milieu des années 2000, son travail ne cesse de penser le geste de destruction comme une œuvre en soi en mettant en place des situations et stratégies cherchant à bouleverser notre appréhension de la réalité. »1 . Il s’agit donc pour elle, à travers ce principe d’œuvres, de réalisations, d’installations de l’ordre de la destruction, d’interroger politiquement notre époque et notre réalité.

À ce titre, depuis 2010, Anne-Valérie Gasc s’est lancée dans le projet Crash box, (au sein de l’entreprise artistique Gasc Démolition), dont l’objectif est de restituer en images le foudroyage général d’un bâtiment de l’intérieur, et cela, à l’aide de « crash boxes », des dispositifs qui permettent de protéger les caméras de l’explosion, de retrouver intactes les images obtenues et d’en faire des films expérimentaux. C’est, d’après elle, un « projet qui tente de saisir une démolition à l’explosif au cœur de bâtiments que l’on détruit et de faire éprouver cet instant insaisissable par le biais d’une installation vidéo »2 .

« Sa démarche tente de vérifier en quoi ce sont dans les moments où plus rien n’est certain, où tout est possible, que l’art advient. Ce sont ces interstices de doute profond, ces instants fugaces, de quelques secondes parfois, où le réel est profondément ébranlé, qu’elle tente de produire ou de commémorer selon ses projets.Son travail se structure sous la forme d’une entreprise artistique : Gasc Démolition a pour vocation d’étudier et organiser ses propres stratégies de bouleversement du réel. Elle établit et expérimente les protocoles nécessaires à l’apparition de l’art par une tactique préalable de dévastation, démolition ou disparition. Ses propositions interrogent l’utopie de la table rase comme modalité de création »3 .

Anne-Valérie Gasc associe son travail d’artiste à une démarche universitaire : elle a enseigné à l’UFR d’Arts Plastiques de l’Université Paris 1 de 2001 à 2006, où elle a fait sa thèse après être passée par l’ENS Cachan et elle enseigne actuellement l’art contemporain à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Marseille Luminy. Ce triple statut d’artiste, de chercheuse et d’enseignante confère à son travail une réelle cohérence.

1 Sur le site de l’Institut d’Art Contemporain de Villeurbanne qui a accueilli plusieurs de ses œuvres dès 2008.2 www.documentsdartistes.org/artistes.gasc.3 (http://www.lafriche.org/fr/les-residents/gasc-demolition-anne-valerie-gasc), site de La friche de la Belle de Mai où Anne- Valérie Gasc a son atelier.

Crash Box 2011-2013Pneus, peinture de chantier, acier, caméras Go-Pro, enregistreurs son, dimensions variables

Crash Box - Démolition de la grande barre des Perrières, Macon 2013DVD Bluray, son 5.1, 12’10’’Vues de l’exposition Crash Box, Panorama, Friche belle de mai, Marseille, 2014Photographies Pascale Triol

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3. L’exposition A

Plusieurs éléments peuvent expliquer la démarche d’Anne-Valérie Gasc pour cette exposition : un travail de relevés et de dessins qu’elle a mené dans les carrières de marbre aux Baux-de-Provence et en Italie ; le désir de travailler avec des pierres lithographiques, le support l’intéressant plastiquement, architecturalement (la pierre lithographique comme un matériau de construction), voire politiquement (la pierre comme un pavé que l’on jette) ; et surtout les trois premiers livres d’artistes d’Ed Ruscha.

En 1963, Ed Ruscha a publié Twenty-six Gazoline Stations, à savoir vingt-six photographies de stations-services qui suivent un trajet de Los Angeles à Oklahoma City, ville où l’artiste a grandi. Chaque image est légendée par le nom de la chaîne et le lieu. En 1964, il publie Various Small Fires and milk qui assemble, de manière rigoureuse, un nombre très sélectif d’images qui pourraient être liées au fait de jouer avec le feu et un an plus tard, Some Los Angeles Apartements, qui recense des architectures liées au logement collectif lequel sera le décor de la révolte des banlieues de Los Angeles en 1965. Ce qui a alors intéressé Anne-Valérie Gasc, qui parle pour ces trois livres de « trilogie artificière et révolutionnaire », c’est le lien logique entre le combustible (Twenty-six gazoline Stations), le détonateur qui assure la mise à feu (Various Small Fires and milk) et ce qui va effectivement exploser, les banlieues avec Some Los Angeles Apartements.

À priori, le livre d’artiste est un livre rare, précieux, cher, que l’on manipule avec précaution. L’URDLA en a publié certains qui sont protégés par des coffrets de bois et que l’on ne feuillette qu’avec des gants. Leur tirage dépasse rarement 40 exemplaires, ils sont imprimés par typographie ou par clichés photopolymères. Ils contiennent souvent des estampes originales. Leur prix est conséquent puisque ce genre de publication s’adresse à des bibliophiles.

Twenty-six gazoline Stations, Ed Ruscha

Some Los Angeles Apartements, Ed Ruscha

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La publication des trois livres d’Ed Ruscha au début des années 60 a bouleversé les codes en la matière puisque le premier d’entre eux, Twenty-six Gazoline Stations a été imprimé tout d’abord à 400 exemplaires numérotés et signés1 par l’artiste, puis retiré à 500 exemplaires en 1967, avant d’être de nouveau réimprimé à 3000 exemplaires en 1969. À l’époque le livre était vendu 3,50 $.

Anne-Valérie Gasc reprend ce principe d’un livre d’artiste accessible financièrement : Twentysix Blank Rocks a été imprimé à 400 exemplaires pour un prix de 14 € et ses deux précédents livres, Some Belsunce Apartments en 2008 et Various Small Sparks en 2014 ont été tirés respectivement à 700 et 500 exemplaires dont 100 ont été détruits le 25 janvier 2015. Ce dernier ouvrage rejoue la série des impulsions électriques qui ont déclenché, le 11 octobre 1994, les charges explosives du foudroyage intégral des 10 Tours Démocratie du quartier des Minguettes à Vénissieux. Et il rejoue également la relecture artificière de la trilogie d’Ed Ruscha en la poussant jusqu’à une forme de fulgurance, à savoir le moment, très court, où le réel nous échappe et fissure, fait vaciller, notre rapport au monde : la destruction de 100 exemplaires de cet ouvrage rejoue artistiquement alors celle des Tours Démocratie du quartier des Minguettes.

Mais plus fondamentalement, en s’inspirant des livres d’Ed Ruscha (« À l’aune de cette lecture personnelle » dit-elle), Anne-Valérie Gasc va elle aussi publier sa « trilogie artificière », dont le dernier opus, Twenty-six Blank Rocks, figure dans l’exposition A, pour « rejouer cette trilogie terroriste » : « Some Belsunce Apartments (2008) dénonce les démolitions et reconstructions architecturales comme stratégie de gentrification au sein du quartier de Belsunce à Marseille. Various Small Sparks (2014) incarne, par le séquençage des détonations électriques de la démolition architecturale par explosif des dix tours Démocratie à Vénissieux en 1994, l’échec de l’utopie démocratique. Twenty-six Blanks Rocks (…) est un livre-bombe : vingt-six pierres lithographiques marquent la surface de chaque page d’une empreinte de pétrole brut prêt à s’enflammer. L’origine du livre est une pierre (à imprimer comme à construire), la surface noire est à la fois une feuille vierge et une page palimpseste saturée d’écritures où tout et rien ne sont possibles à lire, chaque page du livre est un étendard anarchiste où l’encre noire devient l’essence, l’énergie d’une révolution de la pensée comme du regard. »2

Ces trois livres d’artistes existent donc dans la logique de ceux d’Ed Ruscha avec la même volonté de reproduire leur condition de parution (tirages importants, prix modique). D’autant plus qu’elle établit une continuité très forte entre Twenty-six Gazoline Stations et Twenty-six Blank Rocks : l’essence du premier fournira symboliquement le combustible pour les bombes du second, partant alors d’une citation de Stéphane Mallarmé « Je ne sais d’autre bombe, qu’un livre »3 mise en

1 Ce que l’artiste a regretté par la suite puisque les exemplaires signés ont acquis par cela une plus grande valeur que ceux qui ne l’étaient pas.2 Anne-Valérie Gasc, https://www.double-v-gallery.com/coraline-de-chiara-1/3 Cette citation date du 9 décembre 1893, elle a été rapportée par un journaliste au lendemain de l’attentat anarchiste d’Auguste Vaillant à la Chambre des députés de Paris.

exergue : Anne-Valérie Gasc imagine un livre qui soit une bombe et comprend que c’est l’encre noire, grasse, qui évoque le pétrole brut, qui en sera l’essence, d’où les empreintes de pierres et les pierres lithographiques recouvertes d’une encre noire épaisse, brillante, presque visuellement visqueuse comme peut l’être un pétrole brut.

Pour résumer, la filiation entre les livres d’artistes d’Ed Ruscha et Anne-Valérie Gasc s’établit ainsi : les deux artistes, à deux époques différentes, ont évoqué artistiquement la même équation politique, les banlieues dont les projets d’architecture collective porteurs d’utopie ont été abandonnés sont des bombes potentielles.

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La lithographie

La lithographie est une technique d’impression rapide, bon marché, mise au point par Aloys Senefelder à la fin du XVIIIe siècle. Plus rapide et économique que la gravure, la lithographie a été très souvent utilisée pour la reproduction de documents à caractère commercial, mais de nombreux artistes s’en sont emparé et elle est actuellement entièrement dédiée à l’art contemporain. La première étape de l’impression de la lithographie est le grainage. La surface de la pierre — généralement du calcaire — destinée à recevoir le dessin, est poncée à l’aide de sable et d’eau. Cette étape permet d’obtenir une surface plane et homogène, deux facteurs fondamentaux pour une lithographie réussie. Lorsque l’on graine une pierre, on en supprime une épaisseur infime, suffisante pour éliminer le dessin précédent. Ainsi, les pierres sont réutilisables de nombreuses fois. Les pierres employées actuellement à l’URDLA datent du XIXe siècle.Après que la pierre a été grainée, elle est ensuite peinte par l’artiste avec des crayons gras ou bien avec une encre liquide appliquée au pinceau, au doigt… Lorsque la pierre est terminée, le lithographe traite la pierre en appliquant à l’éponge une solution de gomme arabique et d’acide qui va faciliter l’absorption par la pierre de l’encre. Le principe d’une lithographie repose sur le principe chimique de répulsion du gras et de l’eau : pendant le tirage, la pierre est constamment mouillée si bien que les parties dessinées, qui sont grasses, refusent l’eau mais acceptent l’encre, elle-même grasse, des rouleaux encreurs tandis que les parties non dessinées acceptent l’eau et donc refusent ensuite l’encre grasse.L’impression lithographique repose sur des effets « naturels », dont voici les trois principaux : • l’eau pénètre avec facilité les corps calcaires sans pour autant être en adhérence forte ; • les corps gras ou résineux ont en revanche une adhérence forte sur les pierres calcaires ; • les corps gras ont entre eux de l’affinité et de la répulsion pour l’eau. Pour une lithographie en couleurs, l’opération est plus complexe car on utilise une pierre par couleur : l’artiste dessine chaque couleur sur une pierre différente qui sera encrée dans la teinte choisie. Une image en quatre couleurs s’obtient par quatre dessins sur quatre pierres différentes, la superposition de l’ensemble sur la feuille de papier donne naissance au motif dans son intégralité.Comme pour une xylogravure ou une linogravure, les images imprimées sont mises à sécher dans une claie pendant toute une nuit.

4. Les techniques d’impression mises en place dans cette expositionPour aborder l’exposition et la démarche créatrice de ces empreintes, il paraît intéressant de comprendre les principes de la lithographie et du monotype, puisqu’Anne-Valérie Gasc s’en est inspirée.

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Le monotype

On peut également rapprocher ces empreintes de pierres du monotype : c’est un procédé d’impression sans gravure qui produit un tirage unique. Il s’agit de peindre à l’encre typographique, à la peinture à l’huile ou à la gouache, sur un support non poreux comme du verre, du métal, de la pierre ou du plexiglas.

La peinture est ensuite passée sous presse avec un papier qui reçoit l’épreuve. Il est possible également d’enduire la totalité du support et d’appliquer la feuille de papier par-dessus. En exerçant une pression à certains endroits avec une pointe ou les doigts, on obtient différentes valeurs de noir et on peut ainsi réaliser un dessin plus précis, et donc différent de la méthode précédente (impression sous presse).

Le support n’étant pas gravé, il peut resservir pour d’autres monotypes après nettoyage. Le monotype n’est pas une « gravure » au sens strict, mais une estampe (œuvre obtenue après un pressage manuel ou mécanique).

Le monotype ne peut être numéroté car, comme son nom l’indique, son tirage est unique. Il arrive cependant que l’artiste tire une seconde épreuve, plus faible, avec le résidu d’encre demeurant sur la matrice. Il est également possible d’obtenir une contre-épreuve en pressant le tirage obtenu, encore humide d’encre, contre une feuille vierge.

Grâce à la simplicité de cette technique et du fait que le tirage unique soit exécuté par l’artiste lui-même, le caractère d’œuvre originale est accentué. Et l’artiste peut revenir sur les épreuves après tirage en les rehaussant de couleurs (encres, aquarelles, gouaches…).

Techniquement, comme chaque empreinte de pierres d’Anne-Valérie Gasc a été tirée à trois exemplaires, ce ne sont donc pas des monotypes, mais la démarche de création et de fabrication s’en rapproche.

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Les empreintes de pierre

Les œuvres d’Anne-Valérie Gasc sont des empreintes de pierre : l’artiste a encré des pierres lithographiques, souvent le dos de ces pierres lesquelles avaient déjà été dessinées par d’autres artistes, pour mettre en valeur leur côté granuleux et elle a imprimé pour chacune d’entre elles trois tirages sur un papier très fin.

Ce papier a été posé sur les pierres de telle manière à ce qu’il y adhère parfaitement à l’aide des mains et d’un rouleau à peinture propre. Les empreintes obtenues ont été par la suite mises à sécher sur une claie.

Le principe s’apparente donc, même de loin, à celui mis en œuvre pour la lithographie, mais a été réinterprété par l’artiste.

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Avant

Pour des élèves, notamment les élèves de lycée, la visite de l’exposition peut être préparée en amont par une recherche sur le travail d’Anne-Valérie Gasc, notamment sur son projet Crash box, sous la forme d’exposés de la part des élèves, en incluant les vidéos dans lesquelles l’artiste parle de ses différents projets. Le site « Documents d’artistes.org » recense ses différentes œuvres et celui de l’IAC de Villeurbanne permet de se familiariser avec sa démarche.

Il peut être intéressant également de parler des livres d’artistes d’Ed Ruscha, d’autant plus que l’exposition Los Angeles, une fiction, présentée au printemps 2017 au MAC de Lyon, avait présenté Twenty-six gazoline Stations et que certaines classes peuvent l’avoir vu et s’en souvenir.

L’enseignant pourra aussi présenter la technique de la lithographie, d’autant plus que durant la visite de cette exposition, grâce à la médiation, les élèves pourront voir des pierres lithographiques, les presses sur lesquelles sont imprimées des lithographies et appréhender concrètement les différents types d’estampes.

5. La visite de l’exposition

L’exposition A présente 26 empreintes de pierre, lesquelles sont placées sur des étagères et disposées dans des cadres en métal sans verre et sans fond. Chaque image est aimantée sur le cadre métal et peut, avec le jeu de la lumière et des courants d’air, être amenée à flotter. L’absence de verre permettra aussi de voir, tactilement presque, la matérialité de l’encre lithographique.

Seront également présentées sur des socles de 1,22 m de hauteur cinq pierres lithographiques recouvertes d’une encre noire, brillante et dense.

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Pendant

On peut imaginer de partir des réactions des élèves devant cette exposition qui peut les surprendre par sa radicalité et son apparente répétition. Par un échange, on peut alors faire les réfléchir sur l’art conceptuel et les amener à déconstruire des aprioris sur l’art contemporain.

L’art conceptuel est un mouvement de l’art contemporain, né dans les années 1960, mais dont les origines remontent aux ready-made de Marcel Duchamp. Ce n’est pas un mouvement nettement structuré, organisé autour de principes clairement définis. Il concerne plutôt des artistes qui ont pour première exigence d’analyser ce qui permet à l’art d’être art. L’art conceptuel peut se définir comme l’affirmation de la primauté de l’idée sur la réalisation effective, l’objet artistique en tant que tel. Pour un artiste comme Sol LeWitt1 , tout le cheminement intellectuel du projet (gribouillis, esquisses, dessins, modèles, études, pensées, conversation, etc.) a plus de valeur que l’objet présenté : selon lui, « l’œuvre n’est que l’illustration d’une idée ». En ceci, la démarche d’Anne-Valérie Gasc s’inscrit dans la logique de l’art conceptuel.

On peut aussi montrer que la démarche de création d’Anne-Valérie Gasc s’inscrit dans le champ du politique et interroger les élèves sur le choix de la couleur noire pour ces empreintes de pierres, en tenant compte de leur accrochage.

Ces empreintes de pierres peuvent évoquer des drapeaux anarchistes2 , des étendards brandis et qui flottent au vent. Elles peuvent aussi évoquer, de par la finesse du papier choisi par Anne-Valérie Gasc et leur suspension, des cendres qui flottent dans l’air après un incendie, une destruction, un anéantissement : elles sont comme des empreintes laissées après l’effondrement d’un bâtiment (ce que l’on retrouve dans la logique du projet « Crash box » ou de Various Small Sparks), des vestiges, des souvenirs. Chaque empreinte de pierre peut alors être lue et vue comme la trace incertaine, éphémère, fragile, dansante d’un processus de chaos. Dès lors, les pierres lithographiques noires, par leur matérialité, sont aussi des traces tangibles de l’existence d’un bâtiment, des morceaux d’une réalité qui n’existe plus (comme une pierre lithographique est le morceau d’un plus vaste ensemble minéral qui n’existe plus puisque ces pierres en ont été extraites et taillées). Le principe de l’exposition A rejoint alors celui de ces trois livres d’artistes, de Ruscha comme d’Anne-Valérie Gasc : on est du côté de ce qui reste après que cela a été détruit. Et c’est ici que d’une certaine façon « advient l’art », dans l’ébranlement, dans l’effondrement du réel.

On pourra également parler de la dimension esthétique des œuvres, en partant de l’approche sensible que les élèves ont de l’exposition, dans sa disposition, dans le jeu entre la finesse des empreintes, leur fluidité dans l’accrochage et la belle matérialité des pierres lithographiques et leur montrer qu’une œuvre d’art existe aussi dans l’œil du regardeur, parfois indépendamment de ses conditions de production et de ses principes de création : s’il est utile de connaître le projet préalable de création de l’artiste, on peut aussi ne pas en tenir compte, se laisser porter par sa propre sensibilité et proposer alors sa propre lecture des œuvres.

1 Artiste et sculpteur américain, 1928-2007.2 La citation de Mallarmé placée en exergue de Twenty-six Blank Rocks « Je ne connais d’autre bombe, qu’un livre » va dans ce sens.

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6. Exploitation pédagogiques de l’exposition Cycle 3 (CM1, CM2, 6ème)

Compétences Exploitation de l’exposition et pistes pédagogiques

Arts plastiques : apprendre à identifier et à savoir nommer les notions relevant des qualités physiques des matériaux des objets.

• Le principe de la matrice et du résultat obtenu peut être facilement abordé à partir de cette exposition et de la visite des ateliers de l’URDLA.

Arts plastiques : approche technique de la linogravure.

• À partir de l’exposition et de la possibilité offerte par l’URDLA de bâtir des ateliers de pratique artistique autour de la linogravure, il est possible de faire réaliser à une classe un alphabet (chaque plaque de linoléum gravée par un élève à partir d’une typographie préalablement définie).

Histoire de arts : compétences atten-dues en lien avec d’autres disciplines.

• Donner son avis argumenté sur ce que représente ou exprime une œuvre d’art en rapport avec le domaine 1 « Sensibilisé aux démarches artistiques, l’élève apprend à s’exprimer et communiquer par les arts [...] en concevant et réalisant des productions, visuelles, plastiques, sonores ou verbales », domaine 3 « L’élève exprime ses sentiments et ses émotions en utilisant un vocabulaire précis » et domaine 5 « L’élève exprime à l’écrit et à l’oral ce qu’il ressent face à une œuvre littéraire ou artistique » du socle commun de connaissances, de compétences et de culture.• Se repérer dans un lieu d’art, un site patrimonial, en rapport avec le domaine 5 « Il s’approprie, de façon directe ou indirecte, notamment dans le cadre de sorties scolaires culturelles, des œuvres littéraires et artistiques appartenant au patrimoine national et mondial comme à la création contemporaine » du socle commun.

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Cycle 4 (5ème, 4ème, 3ème)

Compétences Exploitation de l’exposition et pistes pédagogiques

Arts plastiques : la pluralité des démarches et la diversité des œuvres, les pratiques bidimensionnelles et tridimensionnelles.

• Découverte de différentes techniques propres à l’estampe à partir d’œuvres exposées (clichés métal, clichés photopolymères, typographie, xylogravure, linogravure, lithographie) en lien avec les presses que les élèves pourront également découvrir lors de la visite de la partie atelier de l’URDLA.

Arts plastiques : les notions présentes dans la création en arts plastiques (forme, espace, lumière, couleur, matière, geste, support, outil, temps).

• L’exposition peut permettre de mettre en valeur deux dé-marches artistiques semblables sur des supports différents avec des effets et des interprétations différentes.

Français : le travail sur la prise de notes. • Exploitation d’une prise de notes faite durant l’exposition afin de la finaliser en un texte plus abouti : un article de presse dans le journal du collège, un compte rendu de la visite sur le site du collège.

Français : l’entrée « Regarder le monde, inventer des mondes » ; « imaginer des univers nouveaux » en classe de 5ème ; « la fiction pour interroger le réel » en classe de 4ème ; « visions poétiques du monde » en classe de 3ème.

• En fonction du niveau de la classe, on peut imaginer de partir des empreintes de pierres pour mettre en place des démarches d’écriture, personnelle ou collective :o classe de 5ème : les différentes œuvres comme des indices d’un univers nouveau et différent du nôtre, des traces à interpréter ;o classe de 4ème : invention d’une fiction à partir des empreintes de pierres ou des pierres elles-mêmes (autour du genre de la science-fiction par exemple, en exploitant le monolithe noir de 2001, Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick) ;o classe de 3ème : partant de la réalité des empreintes de pierres et des pierres elles-mêmes et de leur apparente logique répétitive, écriture de tautogrammes1 (texte dont tous les mots commencent par la même lettre) ; de terine homophonique2 (permutation de trois mots-clés à des places préalablement définies) en jouant sur le mot « noir » et des mots qui riment ou des mots de la même famille ou des mots synonymes ; de sonnet monorime (sonnet dont tous les vers se terminent par la même rime, en alternant rimes masculines et féminines3 ) [ce sont des exercices oulipiens].

Français : l’entrée « visions poétiques du monde » en classe de 3ème (en lien avec les Arts plastiques)

• Fabrication d’un livre d’artiste sur le modèle de celui d’Anne-Valérie Gasc qui reposerait sur le principe de l’alphabet : une image censée représenter une lettre ; un texte en rapport avec l’image ou avec la lettre, etc. Les possibilités sont alors multiples et peuvent facilement intégrer des collages, des montages de lettres de tailles et de polices différentes, des détournements d’images, des photographies, etc

1 http://oulipo.net/fr/contraintes/tautogramme.2 http://oulipo.net/fr/contraintes/terine-homophonique.3 http://oulipo.net/fr/contraintes/sonnet-monorime-0.

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Classes de lycée (Arts plastiques, Arts visuels, Français)

Compétences Exploitation de l’exposition et pistes pédagogiques

Arts plastiques, Arts visuels : développer sa culture personnelle en s’ouvrant à des créations dans le domaine des arts visuels ; situer sa pratique, ses intérêts et ses goûts personnels ; développer des compétences critiques pour renouveler et aiguiser le plaisir esthétique ; accroître l’aptitude à formuler — à l’oral comme à l’écrit — des jugements esthétiques et des interprétations fondées sur la réalité du travail artistique observé.

• Découverte de différentes techniques propres à l’estampe à partir d’œuvres exposées, en lien avec l’atelier de l’URDLA que les élèves pourront également visiter.

Arts plastiques, Arts visuels : développer sa pratique artistique ; développer, concevoir et réaliser un travail personnel lié à la production des images ; choisir ses moyens d’expression ; mettre en relation divers aspects des formes visuelles et artistiques.

• Production d’œuvres plastiques personnelles en s’inspirant des techniques des œuvres présentées : possibilité d’organiser avec l’URDLA un atelier de pratique artistique autour de la lithographie.

Arts plastiques, classe de 2nde : compétences techniques et artistiques, qui peuvent être mises en place à partir de la visite de l’exposition d’Anne-Valérie Gasc dans le cadre du cours d’Arts plastiques.

• Concevoir, projeter, réaliser en deux dimensions et en volume.• Choisir ses propres moyens d’expression en fonction d’un projet.• Comprendre, dans la pratique, le rôle joué par les divers constituants plastiques et matériels (médium, geste, outils) et savoir les utiliser.• Prendre en compte des éléments susceptibles de transformer sa démarche.• Argumenter sa démarche à l’oral et à l’écrit.

Français, classe de 2nde : objet d’étude, le texte théâtral et sa représentation.

• En parallèle de la visite de l’exposition d’Anne-Valérie Gasc, travail autour de la pièce « Art » de Yasmina Reza et débat autour de l’art contemporain en partant du tableau d’Antrios dans la pièce et en l’élargissant à des œuvres emblématiques de l’art moderne (Malevitch, Warhol, Pollock, Klein, Soulages, etc.) afin de déconstruire des aprioris sur l’art contemporain.• Exploitation d’installations contemporaines qui s’inscrivent dans le champ politique ; quelques propositions exploitables autour de l’installation La Loi normale des erreurs de Raphaël Denis1 , de celles d’Adel Abdessemed, de Christian Boltanski, de Kader Attia, etc.

1 http://www.without-link.com/works/la-loi-normale-des-erreurs/

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URDLA207, rue Francis-de-Pressensé69100 Villeurbanneurdla.com

Ouvert du mardi au vendredi de 10 h à 18 h,le samedi de 14 h à 18 hentrée libre et [email protected] / 04 72 65 33 34Métro Flachet

À venir

Samedi 31 mars de 16 h 45 à 18 h - LES SAMEDIS D’ADÈLEgratuit, réservation à [email protected]

Samedi 7 et dimanche 8 avril, de 14 h à 18 h - JOURNÉE EUROPÉENNES DES MÉTIERS D’ARTSvisites commentées, démonstrations, atelier d’impression de linogravuresentrée libre

Jeudi 12 avril, de 10 h à 12 h - ATELIERS DE PRATIQUES POUR LE JEUNE PUBLICvisite de l’exposition et atelier d’empreintes pour les 5/7 ansatelier linogravure pour les 8/15 ans, 10.– € / enfant, nombre de places limitéréservation indispensable

Jeudi 19 avril, de 10 h à 12 h - ATELIERS DE PRATIQUES POUR LE JEUNE PUBLICvisite de l’exposition et atelier de typographie pour les 5/7 ansatelier taille-douce pour les 8/15 ans, 10.– € / enfant, nombre de places limitéréservation indispensable

Samedi 28 avril, de 15 h à 16 h - COMMENTAIRES DE L’EXPOSITION Aentrée libre, réservation conseillée

Samedi 5 Mai de 15 h à 17 h - VISITE COMPLÈTEprésentation des techniques de l’estampe, visite des ateliers,visite de l’exposition A5.– € / personne, réservation indispensable à [email protected] ou au 04.72.65.33.34

Accueil des groupes scolaires sur réservation

Tarifs des visites (durée : 1 h 30) :90.– € jusqu’à 20 élèves130.– € jusqu’à 40 élèves.

Tarifs des ateliers de pratiques artistiques :55.– € / heure / de 10 à 15 élèves110.– € / heure / de 10 élèves à 15 élèves en présence d’un artiste.

L’URDLA est partenaire du Pass Région.

Contact : Blandine Devers, chargée de médiation [email protected]

Conception et rédaction du présent dossier : Franck Belpois, professeur relais

Atelier d’expérimentation de la lithographieSamedi 28 avril - de 9 h 30 à 12 h 30

réservé aux enseignants,dans la perspective de programmation d’ateliers avec les élèves à l’URDLA

Gratuit, nombre de places limité, sur inscription : [email protected]