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CRÉATION THÉÂTRE 2013 Le Ciel dans la peau d’Edgar Chias par la Compagnie Les Montures du Temps / La pièce éditée au Miroir qui fume à été sélectionnée au palmarès 2010 du Centre National du Théâtre La Compagnie les Montures du Temps est subventionnée par la ville de Villeurbanne 21 jan. — 5 fév. 2013 TNP (Villeurbanne) 26 oct. — 6 nov. 2013 Théâtre de Poche (Grenoble) 7 / 8 / 9 nov. 2013 théâtre de Poche (Grenoble) 13 — 23 nov. 2013 théâtre des Ateliers (Lyon) 6 & 7 fév. 2014 Chok Théâtre (St-Étienne)

description

Théâtre LE CIEL DANS LA PEAU d'Edgar Chías Trad. Boris Schoemann, Pièce éditée au Miroir qui fume mise en scène Anaïs Cintas- Cie Les Montures du Temps (en étroite collaboration avec Odille Lauría) « Il faut que tu dises la vérité. Parler. Tout raconter » Deux femmes, une d’aujourd’hui : Esther, une jeune qui lutte contre la mort dans un hôpital et une du temps du roi Salomon. Leur histoire n’est pas très différente. Les deux font l’objet d’abus et de violences. Les deux souffrent de ne pas appartenir aux privilégiés qui correspondent aux canons dominants de la beauté. Leur lien est le rapport au livre. Chacune lit l’histoire de l’autre. Le ciel, dénonce le phénomène du féminicide au Mexique. L’auteur, Edgar Chías, dans ce texte poétique et puissant, nous interroge sur la condition féminine qui change peu et mal. Il nous parle de l’admirable capacité de résistance des femmes et des hommes évoluant dans l’enfer quotidien des règlements de compte des cartels de la drogue.

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CRÉATION THÉÂTRE 2013

Le Ciel dans la peaud’Edgar Chias par la Compagnie Les Montures du Temps

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La pièce éditée au Miroir qui fume à été sélectionnée au palmarès 2010 du Centre

National du Théâtre

La Compagnie les Montures du Temps est subventionnée par la ville de Villeurbanne

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21 jan. — 5 fév. 2013 TNP (Villeurbanne)

26 oct. — 6 nov. 2013 Théâtre de Poche (Grenoble)

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7 / 8 / 9 nov. 2013 théâtre de Poche (Grenoble)

13 — 23 nov. 2013 théâtre des Ateliers (Lyon)

6 & 7 fév. 2014 Chok Théâtre (St-Étienne)

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2 LE CIEL DANS LA PEAUEl Cielo en la piel, Edgar Chias

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#!%#$)!"&*&'(")— dans le cadre du festival

« Hecho en Mexico » au Théâtre de l’Elysée à Lyon le 10 mai 2011 ;

— 30 novembre 2012 à l’espace Schoelcher à4Seyssins (38) ;

— 14 / 15 février 2013 au Lavoir Moderne Parisien (75) ;

— 22 février 2013 à la Maison du Mexique à Paris (75) ;

— 29 / 30 / 31 mai 2013 dans le cadre du festival Europe et compagnies au théâtre des Marronniers à Lyon (69).

— 7 / 8 / 9 novembre 2013 au théâtre de Poche à Grenoble.

— 13 — 23 novembre 2013 au théâtre des Ateliers, Lyon

— 6 & 7 février 2014 au Chok Théâtre à Saint-Étienne

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3 « AU COMMENCEMENTIl faut que tu dises la vérité. Parler. Tout raconter. Tu ne peux pas. C’est difficile. Tu respires et tu retiens ton souffle qui s’estompe, qui s’échappe par cette blessure stupide qu’est la bouche ouverte. Poum. Poum. Poum. Le pouls. Lent et éteint. Plus exactement poum-poum, poum-poum, poum-poum, à contretemps, obstinément. Tu espères qu’on note ta présence. Que ce soit ton tour. Ce n’est pas ton tour. Tu respires et crac dans la poitrine. Douleur. Tu exhales et fff »

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Edgar ChiasNé à Mexico en 1973, Edgar Chias est acteur, dra-maturge et professeur de littérature dramatique à l’Université Nationale Autonome de Mexico. Figure de proue parmi les jeunes auteurs mexi-cains Edgar Chias est membre du système natio-nal de créateurs au Mexique (fonca conaculta) et a été directeur académique du premier diplôme études en dramaturgie de l’instituto nacional de bellas artes.

La pièceLe ciel dans la peau est éditée en France aux Éditions du Miroir qui fume. Elle a été sélec-tionnée au palmarès 2010 du Centre National du Théâtre. Elle a été écrite sur le modèle d’une Rhapsodie, une composition musicale basée sur une thématique populaire, très poétique.

L’histoireDeux femmes, une d’aujourd’hui et une du temps du roi Salomon. Leur histoire n’est pas très dif-férente. Les deux font l’objet d’abus et de vio-lences. Les deux souffrent de ne pas appartenir aux privilégiées qui correspondent au canon dominants de la beauté. Leurs liens est le rap-port au livre. Chacune lit l’histoire de l’autre. Il s’agit d’un parcours tragi-comique dans la vie de deux femmes qui nous dévoile que la condition féminine change peu et mal.

Concrètement, il s’agit de l’histoire d’Esther, une jeune mexicaine qui lutte contre la mort dans un hôpital, après avoir été massacrée par son violeur. Le ciel dans la peau dénonce le phénomène du féminicide au Mexique et en Amérique centrale.

Parti pris de mise en scèneC’est le collectif « l’Organisation » qui m’ a pro-posé de travailler sur une mise en espace lecture du texte d’Edgar Chias dans le cadre du festival 2011 « Hecho en Mexico ».

Le concept était le suivant, diriger une comé-dienne avec qui je n’avais jamais travaillé, sur un texte d’un auteur que je ne connaissais pas. Le4sujet m’emballa immédiatement, il s’agissait de dénoncer à travers ce conte mexicain les fémi-nicides perpétués par les groupes de narco tra5-quants. Edgar Chias travaille son texte comme un poème musical à plusieurs voix. Le ciel dans la peau c’est le Mexique, c’est l’admirable capa-cité de résistance des femmes et des hommes évoluant dans l’enfer quotidien des règlements de compte des cartels de la drogue. Le travail avec Odille Lauria, comédienne mexicaine a dépassé le simple cadre d’une lecture classique. Odille est seule sur scène et incarne toute cette vio-lence, tous ces espoirs déçus d’un peuple livré à lui-même face à la corruption du pouvoir. Elle interprète avec beaucoup de talent de multiples personnages et utilise aussi la technique du conte pour raconter cette « histoire dans l’histoire » imaginée par le maestro Edgar Chias.

La mise en scène mobilise le travail cor-porel, le conte, une scénographie épurée, la vidéo, tandis que la musique illustre la vio-lence des gangs et4 l’aliénation sexiste qui règne dans la culture « main stream » actuelle.

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Synthèse du travail de résidence au TNPEdgar Chias utilise la narration scénique ou plus exactement la rhapsodie pour la scène, cette tradition de transmission orale des histoires depuis la nuit des temps pour éclairer l’histoire contemporaine, comme un miroir du passé qui éclaire le vivant. Dans le ciel dans la peau, l’in-terprète n’est pas seulement une jeune femme en train de mourir, ses agresseurs ou le person-nage principal de l’histoire qu’elle lisait dans le bus mais incarne aussi le rhapsode, ce chanteur de poèmes populaires, LE conteur dramatique. Lorsque l’on a compris cela on comprend alors les multiples références à Shéhérazade dans les mille et une nuits4: la jeune 5lle mourante doit, c’est vital, nous raconter son histoire, c’est la seule façon pour elle de rester en vie, de se rac-crocher au réel. Les multiples allers et retours dans le passé prennent sens et pose la thèse du Ciel dans la peau4: rien ne change, rien n’a changé ; les femmes du temps du roi Salomon jusqu’à aujourd’hui au Mexique et partout dans bien des endroits du monde sont dominées, uti-lisées (petit clin d’œil à Franca Rame) chosi5ées.

Notre résidence au TNP nous a permis de découvrir cela et d’aller plus loin que la lecture que nous avions donné à l’Élysée un an aupara-vant. Au plateau nous avons du répondre aux dé5s que pose la pièce. Il4y a non seulement urgence à raconter l’histoire de cette femme qui lutte contre la mort mais il y a ce lien constant avec le public grâce au travail du conteur. Le quatrième mur apparaît et disparaît et le public n’est pas passif mais témoin concerné de ce dont parle en sous texte Edgar Chias4: la violence, le machisme et la misogynie de la société qui perdure au XIXe siècle. L’importance du choix des mots est primordiale, la pièce est écrite à la deuxième personne. Jamais le « je » n’apparaît. L’identi5cation, la mimésis aris-totélicienne est donc impossible.

Notre parti pris ? Qu’une interprète seule au pla-teau joue tous les personnages, invente tous les lieux et fasse sans cesse le lien entre 5ction et réalité, entre narration dramaturgique et adresse directe au public. Pour nous Le ciel dans la peau ne peux se jouer que dans la tête de la jeune 5lle qui meurt des suites de son agression et la scéno-graphie est son espace mental « où se découpent, brillants et nets les objets qu’inventent le délire de ta mémoire cassée ». C’est pourquoi nous avons voulu nous appuyer sur quelques petits acces-soires et axer le travail sur le symbole, le sug-géré et la performance physique. D’un tas de terre sortent les ordures du quotidien4: c’est l’espace de l’agression, de l’agresseur. Encore une fois la terre, rapport organique à l’écrit lorsque la jeune femme « se regarde regarder sa mort ». Un pupitre référence musicale fait le lien entre le public et la comédienne. Le bus est seulement suggéré tandis qu’à la télé passe un énième télénovelas fatigué de dire les même lieux communs. On est au théâtre.

La compagnieLa compagnie de théâtre les Montures du Temps existe depuis 2003 et4est implantée sur la com-mune de Villeurbanne dans le Rhône.

Depuis, six spectacles ont été créés : Hamlet Machine de Heiner Müller en 2005, Le Roi sur la Place d’Alexandre Blok en 2008 Une!Femme Seule de Franca Rame et Dario Fo en 2009, Cerises et Grenades – Tribune pour trois femmes révolutionnaires en 2011–12, Le ciel dans la peau d’Edgar Chias en créa-tion ainsi que Sept roses plus tard, de Paul Celan.

La compagnie intervient et anime des ate-liers d’improvisations théâtrales dans des centre sociaux, des collèges et écoles du département.

Tous les vendredis sur Radio Canut, les Montures du Temps vous invite à découvrir des artistes et des textes dans son émission en direct, le Théâtre de la Gamelle.

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Définition…

Les Montures du Temps.

Comme des montures de lunettes, d’épée, de bijou.

Qui rassemble. Qui maintien. Qui 5xe.

Le théâtre comme envie de 5xer l’Idée de son temps. L’Histoire.

Les Montures du Temps est une compagnie de théâtre témoin du 21e siècle.

Témoin critique qui interroge le monde, les Hommes et leurs actes.

Ancré dans le réel, le vivant, le concret.

Un théâtre en prise avec les questions actuelles, sociétales, morales, politiques.

Une po-éthique du combat.

Combat contre les évidences, le sens commun, les préjugés.

Une recherche constante de l’Humanité.

Une croyance en la communauté humaine.

Une compagnie qui place au centre de sa ré6exion et de ses créations les4notions d’Histoire, de théâtre et de politique.

L’équipeOdille Lauria débute sa formation à l’École Nationale d’Art Théâtral du Centre National des Arts, au Mexique. En France, elle fait des études à l’ERAC, Ecole Régionale d’Acteurs à Cannes, grâce au soutien de la metteuse en scène Catherine Marnas et d’une bourse du Fond national pour la culture et les arts (FONCA). En 1999 Alors-Entonces, atelier franco-mexicain dirigé par Catherine Marnas joué au Mexique et au Conservatoire d’Art Dramatique à Paris.

En France, elle joue au Festival In d’Avignon en 1999 – Graciasa Dios dirigée par Boeglin, Calvo, Marnas. Puis en 2004 Les Bonnes, de Jean Genet, mise en scène de Bruno Boëglin au Théâtre de la Croix Rousse, à Lyon, à Nanterre au Théâtre des Amandiers et à Lausanne au Théâtre de Vidy. Avec la Compagnie Parnas elle joue Sainte-Jeanne des Abattoirs, de Bertolt Brecht et Le Banquet Fabulateur mise en scène de Catherine Marnas. Avec la Cie franco-mexi-caine Le Miroir qui Fume, Toxique Azteca Songe de Fabrice Melquiot mise en scène de Manuel Ulloa-Colonia.

Anaïs Cintas crée la compagnie les Montures du Temps en 2003, elle met en scène Hamlet Machine de Heiner Muller joué en 2010 au Centre Culturel Théo Argence à Saint Priest dans le cadre des « temps forts » du4théâtre. « Le roi sur la place » d’Alexandre Blok, sa deuxième création, est sélectionné coup de coeur 2008 du théâtre le Cabestan-Grand Pavois au festival off d’Avignon. « Une femme seule » de Dario Fo et Franca Rame est acheté et au programme de la journée du 8 Mars des mairies de Lyon et Villeurbanne. Après « le Ciel dans la peau » joué à l’Elysée dans le cadre du festival « hecho en Mexico » elle crée « Cerises et grenades, tribune pour trois femmes révolutionnaires ».

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7 LIAISONS – le journal de la manifestationInterview d’Odille Lauria et Anaïs Cintas par Cédric Bonfis.

Anaïs Cintas, metteuse en scène, et Odille Lauria, comédienne mexicaine vivant en France, sont arrivées au théâtre, ce matin, une demi-heure plus tôt pour une interview. Elles évoquent la pièce qu’elles présentent le soir même. Elles ont peu de temps. Plutôt que répondre aux questions, elles préfèrent nous dire ce qui leur semble essentiel pour comprendre la pièce.

Odille Lauria Le texte est cru, dur. Il4faut savoir pourquoi. Pour comprendre ce qui est en4jeu.

Anaïs Cintas Ce n’est pas la langue qui heurte, c’est l’approche de l’auteur, sa manière d’aborder la réalité qu’ il veut montrer. De la donner telle quelle. Quelque chose que j’ap-pellerais spontanément ironie mais le4mot ne convient pas. Et puis c’est un homme qui parle du viol, ce n’est pas commun.

Odille Lauria Au delà des féminicides, Edgar Chías donne à voir toutes la violence quotidienne que subissent les femmes. À commencer par les images de ces corps longi-lignes, de ces femmes blondes, qu’on voit par-tout en ville et dans les telenovelas, alors que mes compatriotes sont plutôt rondes, métis-sées.Pour une femme, même les compliments peuvent être des coups portés. Sur le marché, on ne te dira pas que tu es belle, on te dira

que tu es blonde. Comment se respecter, se trouver beau, quand on n’a pas de critères pour se reconnaître ainsi ? C’est comme si on n’avait pas le droit de se sentir beau quand on est mexicain, c’est-à-dire métissé. La pièce le montre sans détour. Dans les familles, on cherche toujours un ailleul espagnol. Ça fait chic. L’ indien est celui qu’on exploite, qu’on tue à la tâche. Son corps ne peut pas être beau. Le peuple mexicain n’existe que depuis cinq siècles. C’est très compliqué de dire ce que c’est qu’être mexicain.

Anaïs Cintas Le trouble que peut provo-quer la pièce est accentué par les personnages qui disent « tu » au lieu de dire « je ». C’est très intéressant ce trouble dans la langue. C’est pour-quoi, j’ai voulu privilégier l’adresse directe au public. Ça permet de travailler ce rapport au conte, très fort dans la pièce, de faire entendre ce trouble dans la langue.

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8 « Dans la mise en espace du Ciel dans la peau, je voulais qu’Odille puisse lâcher le texte, qu’elle soit un médium de ce qui est écrit, avec un attachement aux sons, au!sens et au silence. »

— Anaïs Cintas

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9 PHILIPPE LABAUNE, directeur artistiquedu Théâtre du Verseau écrit à propos de notre spectacle dans le journal « liaisons nº3 ».« Elle est 8 000 : retours sur la mise en espace du Ciel dans la peau »

Elle s’habille. Boit. Nous regarde. Attend. Nous regarde.

Elle va parler. Mais pas sûr.

Sourcils bien levés au-dessus du regard.

Maquillage.

Poum poum.

À contretemps.

Il y a une tâche sur la jupe.

Se maquiller sans miroir. Et se défaire.

Presque dans le même mouvement.

Se démonter. Beauté du glissement d’un état à l’autre. Vite et lent à la fois.

Ça dure cinq minutes et il y a déjà tout le texte dedans.

Elle me dit tu. Me montre son ciel, les yeux dans les yeux. Qui t’es, tu ?

C’est la question. Centrale. De regard à regard. De tu à tu.

La langue bouge et fait des phrases qui glissent et dansent.

Parfois si vite que ça chavire presque. Baroque.

Suspence du retour à la ligne.

Grâce de l’hésitation. C’est fragile dessous, ça tremble.

Le 6anc hésite à se dire front.

Frontal, oui.

Tu respire. Tu est toujours là. Regarde-moi dans les yeux. Et danse.

C’est pas joyeux, hein ? Tenu, tendu, lâché.

Tu nous cause, je lui réponds avec les yeux. Elle est morte et vivante.

Le corps se dessine sur le sol. Tu efface.

Tu et tu baignés, éclaboussés de regards. Vifs.

Elle est là.

Morte et présente.

Elles sont toutes là, les 8000. Mortes.

Plus de tâche sur la jupe. Sec. Noir.

Ça fait boum.

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10 « Le ciel dans la peau a été intelligemment mis en scène par une jeune française Anaïs Cintas et joué par Odille Lauria. »

— Nova Book Box,20 février 2013

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11 NOUVELLES RÉPLIQUES[18 juin 2013]Visibilité de Troupes théâtrales émergentes et articles de presse sur l’actualité théâtrale

Monter un spectacle sur le féminicide au Mexique. Mettre en scène un texte d’Edgar Chias, auteur contemporain mexicain exigeant. Diriger une actrice seule en scène. Voici le projet d’Anais Cintas, metteuse en scène de la Compagnie Les Montures du temps.

Montrer l’horreur est tenté chaque jour par les artistes, et c’est une chose dif5cile.

Ici, c’est en plus montrer l’horreur dite par des mots brûlants, ceux d’Edgar Chias, dans une langue franche, revolver, qui captive immédiatement.

L’actrice laisse sa place au texte dès le début du spectacle, sa résonance, sa rondeur et ses cris.

Elle n’en rajoute pas, elle transmet la matière du récit : le sang, l’urine, la merde et la salive : les 6uides de la violée, le Styx de toutes les jeunes 5lles retrouvées mortes à la frontière nord, dans le désert mexicain.

Odille Lauria prend parfaitement sa place d’actrice : elle ne prétend pas, ne se substitue pas aux victimes. Elle donne à voir, à imaginer et à douter de cette atroce réalité tant elle est exprimée avec étrange profondeur, vérité. C’est ainsi que le propos est le plus poignant : quand il est sincèrement con5é au public, sincère et mat.

Où nous trouvons nous ? Entre la chambre d’hôpital et la ville vibrante mexicaine, entre l’autobus et le désert.

La mise en scène suggère ses décors, on les ressent plus qu’on ne les voit, mais ils sont bien plus puissants ainsi, que dans un réalisme qui

serait journalistique, documentaire, insuppor-table alors.

Au sol, une télévision diffuse une telenovela, elle est recouverte d’une bâche transparente, elle accompagne le déroulement des scènes, mélodie populaire pathétique, intrigue sucrée et drames de pacotilles.

En contraste, à 1 mètre de l’écran, on suit les pas d’une jeune 5lle mexicaine, de sa vie à la mort, avec la porte aux enfers au milieu, le viol.

Avant, il y a l’errance des plaies, le corps qui 6otte au dessus du lit d’hôpital, se regardant lui même, observant les chirurgiens recomposer le puzzle de son propre corps, là, juste en dessous.

Quelle jeunesse, quelle fraîcheur dans ce jeu d’actrice, quelle générosité dans cette mise en scène pourtant sobre, quelle maîtrise dans ce texte parfaitement bien compris, parfaitement bien ressenti et partagé.

À aucun moment on est guidés dans un sen-timent à avoir, ou une sensation de dégout qu’on devrait ressentir : nous sommes libres, face à la scène, d’imaginer le désert nord et ses tortures sous le sable.

C’est là la réussite de ce spectacle : lais-ser maître l’auteur de son texte, l’actrice de son impulsive expression et l’horreur de son serpen-tement vicieux.

Le tout dans une orchestration précise, et fort bien pensée.

— Iris Gamme

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12 « Ta ville, ce panorama intense, ouvert, vaste, cette blague burlesque, c’est chez toi. Ta ville c’est la maison de la peur, l’endroit où tu dors et où ils ont tué l’autre, toutes les autres, tellement d’autres qu’on ne les compte plus. Ça sert à rien de compter. »

— Odille Lauria,extrait de la pièce

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Compagnie Les Montures du Temps

-')! !" )./"!Anaïs [email protected]

3'77,)'(", .(--,"'.*&'("Chloé [email protected]

%2(&()Lise Eneau-Brun

1#*%2')-!Clovis Girard