Dénervation rénale pour HTA réfractaire sans anesthésie générale : intérêt d’un protocole...

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Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 62 (2013) 283–286 Article original Dénervation rénale pour HTA réfractaire sans anesthésie générale : intérêt d’un protocole MEOPA Morphine. Expérience préliminaire Renal denervation for resistant hypertension without general anesthesia: Advantage of a MEOPA Morphin protocol. Preliminary experience M. Pansieri a,, P. Barnay a , E. Larderet a , G. Krebs b , F. Aboukhoudir a , S. Andrieu a , S. Cheggour a , J.-P. Faugier a , M. Metge a , J.-L. Hirsch a a Service de cardiologie, centre hospitalier, 305, rue Raoul-Follereau, 84902 Avignon cedex 9, France b Service d’anesthésie, centre hospitalier, 305, rue Raoul-Follereau, 84902 Avignon cedex 9, France Rec ¸u le 13 aoˆ ut 2013 ; accepté le 14 ao ˆ ut 2013 Disponible sur Internet le 2 septembre 2013 Résumé La dénervation rénale par radiofréquence est une technique utilisée depuis peu dans le traitement de l’HTA réfractaire. Elle est en principe réalisée sous anesthésie générale car l’application des points d’ablation sur les artères rénales est douloureuse. Nous proposons une alternative à l’anesthésie générale consistant en l’association de morphine 0,1 mg/kg IV au MEOPA, mélange gazeux d’oxygène et de protoxyde d’azote délivré au masque. Dans notre série de 12 patients consécutifs traités par dénervation rénale entre octobre 2011 et juin 2013, les 5 premiers patients (groupe 1) ont rec ¸u une simple sédation hydroxyzine morphine. Tous les 5 ont ressenti la procédure comme douloureuse, à 2 reprises une douleur supportable (EVA < 5), à 3 reprises une douleur intense (EVA > 5) nécessitant d’augmenter dans 2 cas de fac ¸on importante la dose de morphine (dose totale 0,25 mg/kg) dans 1 cas de fac ¸on modérée (dose totale : 0,15 mg/kg). Les 7 patients suivants (groupe 2) ont bénéficié d’un protocole hydoxyzine morphine MEOPA au masque. Un seul patient a ressenti une douleur EVA 5ayant nécessité l’adjonction d’une dose de morphine (dose totale : 0,17 mg/kg). Les 6 autres patients du groupe 2 n’ont ressenti aucune douleur per procédure. La dose moyenne de morphine dans le groupe 1 est de 0,17 mg/kg, dans le groupe 2 de 0,11 mg/kg. Cette étude préliminaire, si elle est confirmée, permettrait à de nombreux centres hospitaliers ne disposant pas d’équipe d’anesthésie de réaliser les procédures de dénervation rénale avec ce protocole. Conclusion : le protocole MEOPA Morphine a permis de réaliser dans des conditions d’analgésie confortables pour 6 des 7 patients les procédures de dénervation rénale, contrairement au groupe de 5 patients sous morphine seule et ce malgré des doses plus importantes de morphine dans ce dernier groupe. © 2013 Publi´ e par Elsevier Masson SAS. Mots clés : HTA réfractaire ; Dénervation rénale ; Ablation par radiofréquence ; Anesthésie générale ; Analgésie ; Morphine ; MEOPA ; Épargne morphinique ; Analgésie multimodale ; Procédure courte Abstract Renal denervation using the technique of radiofrequency is used only recently for the treatment of resistant hypertension. Normally, it is done under general anesthesia because the ablation point technique is painful. We suggest an alternative to general anesthesia comprising an association of morphin 0.1mg/kg IV to MEOPA (gas combining oxygen and azot protoxyd) delivered through an oxygen mask. Our series includes 12 consecutive patients treated between October 2011 and June 2013, the first five patients (group 1) have received only an hydroxizin and morphin sedation. Every five have felt the ablation painful, in two cases bearable pain (EVA < 5), in three cases intense (EVA > 5) pain leading to increasing doses of morphin, (total dose of 0.25 mg/kg in two cases, 0.17 mg in one case). For the seven following patients, a protocol including hydroxyzin, morphin and MEOPA given through a mask has been set up. Only one patient has felt a mild pain (EVA 5) leading to an increasing dose of morphin (total dose 0.17 mg/kg). None of the six other patients has felt any pain during the procedure. The average dose of morphin is 0.17 mg/kg in group 1, 0.11 mg/kg in group 2. This is a preliminary study; if confirmed, it will allow a lot of hospitals without on-site possibilities of general anesthesia, Auteur correspondant. Adresses e-mail : [email protected], [email protected] (M. Pansieri). 0003-3928/$ – see front matter © 2013 Publi´ e par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.ancard.2013.08.020

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Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 62 (2013) 283–286

Article original

Dénervation rénale pour HTA réfractaire sans anesthésie générale : intérêtd’un protocole MEOPA Morphine. Expérience préliminaire

Renal denervation for resistant hypertension without general anesthesia: Advantage of a MEOPAMorphin protocol. Preliminary experience

M. Pansieri a,∗, P. Barnay a, E. Larderet a, G. Krebs b, F. Aboukhoudir a, S. Andrieu a, S. Cheggour a,J.-P. Faugier a, M. Metge a, J.-L. Hirsch a

a Service de cardiologie, centre hospitalier, 305, rue Raoul-Follereau, 84902 Avignon cedex 9, Franceb Service d’anesthésie, centre hospitalier, 305, rue Raoul-Follereau, 84902 Avignon cedex 9, France

Recu le 13 aout 2013 ; accepté le 14 aout 2013Disponible sur Internet le 2 septembre 2013

Résumé

La dénervation rénale par radiofréquence est une technique utilisée depuis peu dans le traitement de l’HTA réfractaire. Elle est en principeréalisée sous anesthésie générale car l’application des points d’ablation sur les artères rénales est douloureuse. Nous proposons une alternativeà l’anesthésie générale consistant en l’association de morphine 0,1 mg/kg IV au MEOPA, mélange gazeux d’oxygène et de protoxyde d’azotedélivré au masque. Dans notre série de 12 patients consécutifs traités par dénervation rénale entre octobre 2011 et juin 2013, les 5 premiers patients(groupe 1) ont recu une simple sédation hydroxyzine morphine. Tous les 5 ont ressenti la procédure comme douloureuse, à 2 reprises une douleursupportable (EVA < 5), à 3 reprises une douleur intense (EVA > 5) nécessitant d’augmenter dans 2 cas de facon importante la dose de morphine(dose totale 0,25 mg/kg) dans 1 cas de facon modérée (dose totale : 0,15 mg/kg). Les 7 patients suivants (groupe 2) ont bénéficié d’un protocolehydoxyzine morphine MEOPA au masque. Un seul patient a ressenti une douleur EVA 5 ayant nécessité l’adjonction d’une dose de morphine(dose totale : 0,17 mg/kg). Les 6 autres patients du groupe 2 n’ont ressenti aucune douleur per procédure. La dose moyenne de morphine dans legroupe 1 est de 0,17 mg/kg, dans le groupe 2 de 0,11 mg/kg. Cette étude préliminaire, si elle est confirmée, permettrait à de nombreux centreshospitaliers ne disposant pas d’équipe d’anesthésie de réaliser les procédures de dénervation rénale avec ce protocole. Conclusion : le protocoleMEOPA Morphine a permis de réaliser dans des conditions d’analgésie confortables pour 6 des 7 patients les procédures de dénervation rénale,contrairement au groupe de 5 patients sous morphine seule et ce malgré des doses plus importantes de morphine dans ce dernier groupe.© 2013 Publie par Elsevier Masson SAS.

Mots clés : HTA réfractaire ; Dénervation rénale ; Ablation par radiofréquence ; Anesthésie générale ; Analgésie ; Morphine ; MEOPA ; Épargne morphinique ;Analgésie multimodale ; Procédure courte

Abstract

Renal denervation using the technique of radiofrequency is used only recently for the treatment of resistant hypertension. Normally, it is doneunder general anesthesia because the ablation point technique is painful. We suggest an alternative to general anesthesia comprising an associationof morphin 0.1 mg/kg IV to MEOPA (gas combining oxygen and azot protoxyd) delivered through an oxygen mask. Our series includes 12consecutive patients treated between October 2011 and June 2013, the first five patients (group 1) have received only an hydroxizin and morphinsedation. Every five have felt the ablation painful, in two cases bearable pain (EVA < 5), in three cases intense (EVA > 5) pain leading to increasingdoses of morphin, (total dose of 0.25 mg/kg in two cases, 0.17 mg in one case). For the seven following patients, a protocol including hydroxyzin,morphin and MEOPA given through a mask has been set up. Only one patient has felt a mild pain (EVA 5) leading to an increasing dose of morphin(total dose 0.17 mg/kg). None of the six other patients has felt any pain during the procedure. The average dose of morphin is 0.17 mg/kg in group1, 0.11 mg/kg in group 2. This is a preliminary study; if confirmed, it will allow a lot of hospitals without on-site possibilities of general anesthesia,

∗ Auteur correspondant.Adresses e-mail : [email protected], [email protected] (M. Pansieri).

0003-3928/$ – see front matter © 2013 Publie par Elsevier Masson SAS.http://dx.doi.org/10.1016/j.ancard.2013.08.020

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to realize such procedures. Conclusion: regarding pain, the procedure of renal ablation was well tolerated for six among seven patients receivingthe association MEOPA and IV morphin. In contrast, in the five patients treated only with IV morphin, we observed a less good tolerance to painand the need to increase the doses of IV morphin.© 2013 Published by Elsevier Masson SAS.

Keywords: Resistant hypertension; Renal denervation; Radiofrequency ablation; General anesthesia; Analgesia; Morphin; MEOPA; Morphin saving; Mutimodalanalgesia; Short procedure

1. Introduction

La dénervation rénale est une technique interventionnellepercutanée apparue il y a quelques années pour le traite-ment de l’HTA réfractaire [1], consistant en une ablationpar radiofréquence des filets nerveux sympathiques cheminantdans l’adventice des artères rénales. Elle s’applique, après unbilan étiologique minimal biologique et radiologique et en casde conditions anatomiques favorables, aux patients présentantune HTA systolique ou systolodiastolique (PAS > 160 mmHget/ou PAD > 100 mmHg en consultation et PAS > 135 mmHg etPAD > 85 mmHg en automesure ou en MAPA diurne) persistantmalgré au moins quatre traitements antihypertenseurs majeursincluant au moins un diurétique [2].

Cette technique, dont le taux de succès est de plus de 80 %(baisse de la TAS moyenne sur la MAPA > 10 mmHg dans les6 mois suivant la procédure) [3], doit être en principe réaliséesous anesthésie générale [2], car les points d’ablation réali-sés durant 90 à 120 secondes (4 à 6 points par artère) sont trèsdouloureux pour les patients.

La difficulté dans les hôpitaux d’obtenir des équipesd’anesthésie pour l’activité interventionnelle hors bloc opéra-toire nous a conduit à essayer de réaliser cette nouvelle techniquesous protocole MEOPA Morphine.

Nous rapportons ici notre expérience préliminaire portantsur 12 patients ayant bénéficié d’une dénervation rénale, les7 dernières procédures ayant été réalisées avec ce protocole.

2. Patients et méthodes

Entre octobre 2011 et juin 2013, 12 procédures de dénerva-tion par radiofréquence des artères rénales, 9 avec le systèmeSymplicity® (Medtronic), 3 avec le système Enlightn® (St JudeMedical) ont été réalisées dans le secteur de cardiologie inter-ventionnelle du CH Avignon. Les 5 premières procédures ont étéréalisées sous prémédication et morphine 0,1 mg/kg IV en miniflac (octobre 2011 à mai 2012), les 7 dernières sous prémédica-tion, morphine 0,1 mg/kg IV en mini flac et MEOPA au masqueocclusif (2 premiers patients) puis masque à haute concentration(5 derniers patients) 9 à 12 L/min.

Les infirmières du bloc interventionnel ont recu une forma-tion adaptée à l’utilisation du MEOPA en salle par une IADE,référente douleur (CLUD) à l’hôpital d’Avignon en juin 2012.

Les protocoles de prémédication et de morphine nous ont étéfournis par le service d’anesthésie du CH d’Avignon.

Tous les patients ont été hospitalisés la veille del’intervention, un bilan biologique complet est réalisé, unehydratation (sérum physiologique isotonique) 1 L/24 h est mise

en place si nécessaire (clairance MDRD < 60 mL/min, diabé-tiques sous biguanides). Le traitement antihypertenseur per osest administré le matin de l’examen.

Après la procédure, les patients sont gardés 24 à 48 heuresen unité de surveillance continue avec monitoring de la douleuréventuelle, du pouls, de la TA et de la diurèse.

La fonction rénale (créatinine) est systématiquement contrô-lée le lendemain ou le surlendemain de la procédure.

Sélection des patients : ne disposant pas dans l’hôpital deservice spécialisé en HTA, nous avons organisé la sélection despatients sous la forme d’un staff pluridisciplinaire réunissant les2 cardiologues interventionnels référents, le cardiologue clini-cien du patient, un néphrologue compétent en hypertension etune endocrinologue. Les patients ont été sélectionnés confor-mément aux critères de l’étude Symplicity® [1], puis à partir demai 2012 en se basant sur le consensus d’experts francais [2].

Trente-cinq patients avaient été référés pour dénervationrénale au départ, 23 ont été récusés soit pour des causes secon-daires, soit pour des conditions anatomiques défavorables, soitpour un traitement non optimisé.

Les 12 patients retenus présentaient donc tous une HTArésistant à une quadri (5 patients) voire une pentathérapieantihypertensive (6 patients) sauf 1 patient qui présentait uneintolérance à de nombreux médicaments et était simplementtraité par association thiazidique aldostérone ARA 2. Tous lespatients avaient un débit de filtration glomérulaire > 45 mL/min.

3. Résultats

3.1. La procédure

La série comporte 7 femmes et 5 hommes, d’âge moyen55 ans (46–72 ans).

Toutes les procédures sont réalisées par voie fémorale en utili-sant un cathéter guide rénal 6F (Symplicity®) ou 8F (Enlightn®).

Un bolus d’héparine 0,5 mg/kg et d’aspégic 250 mg est admi-nistré en début de procédure.

Compte tenu des injections de morphine, une surveillance dela SaO2 par saturomètre a été systématiquement instituée.

Une injection de contraste est réalisée systématiquementen début de procédure dans chaque artère rénale : Visipaque®

(Iodixanol GE Healthcare) 8 cas, Hexabrix® (acide ioxagliqueGuerbet) 4 cas.

Un guide d’angioplastie 0,0014 pouces a été utilisé dans 4 caspour stabiliser la position du cathéter guide avant la dénervation.

4,2 points d’ablation sont réalisés en moyenne sur chaqueartère rénale pendant 120 secondes avec le système Symplicity®

avec un succès technique déterminé par la console en termes de

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température et d’impédance, 8 points d’ablation sont réalisés enmoyenne sur chaque artère rénale pendant 90 secondes avec lesystème Enlightn® avec un succès technique dans tous les cas.

Toutes les procédures se terminent par une injection deRisordan® (isosorbide dinitrate), 1 mg dans chaque artère rénaleet par une injection de produit de contraste pour vérifier notam-ment l’absence de spasme, de thrombus, de dissection, desténose.

La durée de la procédure est en moyenne de 45 minutes avecle système Symplicity®, 40 minutes avec le système Enlightn®

dans tous les cas moins d’une heure.Le point de ponction a été fermé par système de fermeture

percutanée Angioseal® 6F ou 8F.Il n’y a eu aucune complication per procédurale.Une patiente a ressenti une douleur du flanc gauche persis-

tant après la procédure qui a disparu en quelques heures sousantalgiques banaux, l’échographie rénale s’avérant normale.

3.2. L’analgésie

La prémédication comporte de l’Atarax® (hydroxyzinedichlorhydrate) 100 mg en perfusion rapide 15 à 30 minutesavant l’admission au bloc interventionnel associé à Lexomil®

(bromazepam) 4,5 mg en cas d’anxiété importante.Les 5 premiers patients (groupe 1) ont recu en plus 1 mg/kg

de morphine IV en miniflac en début de procédure.Ces 5 patients ont tous ressenti la procédure comme dou-

loureuse au moment des impacts d’ablation ; cette douleur aété modérée chez 2 patients (EVA < 5), chez 2 patientes il a éténécessaire de refaire 2 bolus IV de morphine de 5 mg comptetenu de l’intensité des douleurs (EVA = 8), la dose totale chezces 2 patients atteignant 0,25 mg/kg. Chez une patiente, la per-sistance d’une douleur EVA 6 nous a conduit à refaire un bolusde morphine de 5 mg (dose totale 0,17 mg/kg).

Compte tenu de ces éléments, la dose moyenne de morphinedans le groupe 1 est de 0,17 mg/kg.

Les 7 derniers patients (groupe 2) ont recu le même protocoleque le groupe 1 plus une ventilation au masque par mélangeoxygène protoxyde d’azote (MEOPA) 9 à 12 L/min démarrée3 à 5 minutes avant la réalisation du premier point d’ablation etstoppée à la fin du dernier point d’ablation. La durée moyennede ventilation au MEOPA a été de 47 minutes.

Les 2 premiers patients ont été traités au masque occlusif,celui-ci a été abandonné par la suite au profit du masque àhaute concentration (MHC) compte tenu d’une mauvaise tolé-rance du premier (sensation d’oppression). Il n’a pas été constatéd’efficacité moindre avec le MHC mais simplement la nécessitédans quelques cas d’augmenter le débit de 9 à 12 L/min.

Une seule patiente a ressenti une douleur EVA 5 pendant laprocédure, mais quand on l’a interrogé après la procédure, ellen’en avait gardé aucun souvenir. Chez cette patiente il a éténécessaire de refaire un bolus de morphine de 0,75 mg/kg encours de procédure.

En outre, la plupart des patients traités par l’associationMEOPA Morphine ont « dormi » pendant la procédure et se sontréveillés à la fin de celle-ci.

La dose moyenne de morphine dans le groupe 2 a été de1,1 mg/kg, soit sensiblement moins que dans le groupe 1.

4. Discussion

Classiquement, la procédure de dénervation rénale par radio-fréquence, très douloureuse, doit être réalisée sous anesthésiegénérale (AG). Cependant, dans les hôpitaux, l’accès à l’AGpour les blocs interventionnels devient très difficile. Il faut donctrouver des alternatives rendant possible la réalisation de procé-dures « douloureuses » malgré l’absence d’AG et d’anesthésiste.

Le MEOPA est un mélange gazeux équimolaire comportant50 % d’oxygène et 50 % de protoxyde d’azote. La substanceactive de ce médicament est le protoxyde d’azote, gaz non irri-tant, d’odeur faible. Peu soluble dans le sang, il procure un effetrapide après trois minutes d’inhalation, cet effet est rapidementréversible en 5 minutes après l’arrêt de l’administration Celle-cine doit pas dépasser 60 minutes en continu.

Il possède une action anxiolytique, analgésique et amné-siante. Il procure un état de « sédation consciente » (maintien ducontact verbal). De plus, il potentialise l’action des médicamentsantalgiques et anxiolytiques [6].

En France, l’autorisation de mise sur le marché (AMM) denovembre 2001 établit que l’administration du MEOPA ne rentrepas dans le cadre d’une anesthésie générale réalisée au blocopératoire par un anesthésiste. Il n’est pas indispensable quece produit soit administré par un médecin anesthésiste, maismédecins, dentistes et professionnels paramédicaux après for-mation obligatoire sont habilités à le mettre en œuvre. Toutrécemment, l’Agence francaise de sécurité sanitaire des produitsde santé (Afssaps) a autorisé l’utilisation du mélange équimo-laire d’oxygène et de protoxyde d’azote (MEOPA) en sédationconsciente au cabinet de ville.

Les effets secondaires sont rares et comportent principale-ment sensation d’euphorie, nausées, voire céphalées.

L’association MEOPA Morphine permet de diminuer lesdoses de morphine en optimisant l’efficacité analgésique : ils’agit d’une analgésie multimodale, technique associant plu-sieurs médicaments antalgiques, permet d’obtenir une épargnemorphinique, donc moins d’effets indésirables chez des patientsfragiles, et surtout d’agir à efficacité antalgique équivalente voiresupérieure en toute sécurité dans nos secteurs de soins sans anes-thésiste. En France, le CHU de Toulouse fait figure de précurseurdans le domaine en cardiologie interventionnelle [4,5].

Nous avons pu vérifier en effet sur notre petite série à la foisla plus grande efficacité de l’association MEOPA Morphine etl’épargne morphinique comparée au groupe sans MEOPA.

Il nous est apparu que cette association était particulière-ment adaptée à la dénervation rénale technique à la fois trèsdouloureuse et dont la durée n’excède pas 1 heure.

Depuis juin 2012, nous avons réalisé également des angio-plasties coronariennes sous MEOPA notamment chez despatients algiques (SCA ST+) ou en électrophysiologie interven-tionnelle (ablation de flutter) sur des procédures de courte duréeavec une efficacité certaine. Néanmoins, nous avons pu consta-ter de facon ponctuelle, un caractère partiellement efficace du

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MEOPA ou une mauvaise tolérance (nausées, céphalées) nouscontraignant à stopper cette sédation au masque.

5. Limites de l’étude

La petite taille de la série ne permet pas de tirer des conclu-sions définitives concernant l’utilisation du protocole MEOPAMorphine comme alternative à l’AG dans la dénervation rénale.Il serait souhaitable pour conforter cette hypothèse de réaliserune étude prospective multicentrique comparant notre protocoleà l’AG dans des centres réalisant ces procédures sous AG avecun objectif de non-infériorité.

6. Conclusions

Sur une petite série de 12 patients ayant bénéficié d’unedénervation rénale, il apparaît que l’association MEOPA Mor-phine permet d’obtenir une analgésie satisfaisante chez la quasitotalité des patients comparée à la morphine seule tout en uti-lisant des doses de morphine plus faibles que dans le groupesans MEOPA (épargne morphinique). Ce protocole permet des’affranchir d’une anesthésie générale et de la présence d’uneéquipe d’anesthésie (anesthésiste, IADE), il s’agit donc à la foisd’une économie en termes de moyens et de la possibilité pourdes équipes notamment hospitalières de réaliser des procéduresalgiques de courte durée (< 1 h) sans AG.

Ce travail préliminaire pourrait être complété par un travailprospectif multicentrique permettant de conforter l’hypothèse

de réaliser des procédures de dénervation rénale sans anesthésiegénérale.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.

Références

[1] Krum H, Schlaich M, Whitbourn R, et al. Catheter-based renal sym-pathetic denervation for resistant hypertension: a multicentre safety andproof-of-principle cohort study. Simplicity 1. Lancet 2009;373(9671):1275–81.

[2] Consensus d’experts : Pathak A, Girerd X, Azizi M, Benamer H, Halimi JM,Lantelme P, et al., Au nom de la Société francaise d’hypertension artérielle,de la Société francaise de cardiologie, du Groupe athérome coronaire etinterventionnel et de la Société francaise de radiologie, 2012 www.sfcardio.fr

[3] Esler MD, Krum H, Sobotka PA, Schlaich MP, Schmieder RE, Bohm M.Renal sympathetic denervation in patients with treatment-resistant hyper-tension (The Symplicity HTN-2 Trial) a randomised controlled trial. Lancet2010;376(9756):1903–9.

[4] Bergia JM, Cantagrel N, Galinier M. Prise en charge de la douleur par utili-sation du MEOPA en cardiologie aux hôpitaux de Toulouse Cardinale; 2007.p. 30–3 [Tome XIX, mai].

[5] Bergia JM, Galinier M. Analgésie-sédation sans anesthésiste : intérêtdu protoxyde d’azote-oxygène en cardiologie. Réalités Cardiologiques;10/02/2010.

[6] Boulland P, Favier JC, Villevieille T, Allanic L, Plancade D, Nadaud J,et al. Mélange équimolaire oxygène protoxyde d’azote (MEOPA). Rap-pels théoriques et modalités pratiques d’utilisation. Ann Fr Anesth Reanim2005;24:1305–12.