Construire en bois : Un changement culturel Ivan Le Garrec...

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  • Construire en bois : Un changement culturel Ivan Le Garrec, Daufresne, Le Garrec et Associs

    Dans le quotidien de notre pratique darchitectes, dingnieurs et de constructeurs, nous sommes constamment confronts des rticences ds lors que nous proposons une solution technique ou un matriau qui sort du cadre habituel des usages. La rticence ou lhostilit se prsente gnralement sous forme de questions (comment a vieillit ? o a a dj t ralis ? qui va savoir assurer la ralisation ? quel est mon intrt de prendre un risque ?) ou daffirmations premptoires (a ne marchera pas ! pourquoi je me lancerais dans une innovation alors quon peut faire comme dhabitude ! a va couter plus cher !). Si lon peut sattendre une certaine mfiance lorsquil sagit dexprimenter une innovation radicale, comment se fait-il que, sous nos latitudes, nous rencontrions souvent les mmes questions et affirmations lorsquil sagit dutiliser un matriau comme le bois auquel lhumanit a universellement recours et cela depuis des millnaires ? En aucun cas la construction en bois ne constitue une innovation radicale et elle a fait depuis longtemps ses preuves.

    Dans un premier temps, je me propose de creuser, au-del de lignorance technique et de la pesanteur des habitudes, le mlange de traditions techniques, de concepts philosophiques, denjeux esthtiques et dhistoires accumules qui se sont dposs dans une sorte dinconscient collectif et qui forme un substrat culturel sous-jacent, largement non vu, et avec lequel nous devons faire dans notre mtier de tous les jours : cette histoire des techniques de constructions est aussi une histoire culturelle et cest souvent celle-ci qui est dterminante dans la difficult promouvoir une autre manire de faire .

    Ensuite, jvoquerai le vacillement qui sest opr, dans la culture architecturale et technique, lorsque ce que lon appelle communment la modernit a bouscul les socits humaines et a rvolutionn la culture de la construction selon deux modalits : transformation radicale des manires de construire (industrialisation et innovation technique) et ouverture vers dautres cultures qui ont fait des choix diffrents quant la philosophie de la construction (pays scandinaves, Japon et USA).

    Enfin je voudrais replacer la question de lutilisation du bois dans les enjeux actuels de crise civilisationnelle et cologique en montrant comment larchitecture contemporaine rpond cette situation selon deux ples expressifs et techniques qui ne sont pas antagonistes, qui peuvent se recouper mais qui tmoignent cependant dune forte dualit culturelle : larchitecture comme surnature artificielle prenant symboliquement le relais dune nature dvaste dun ct (larchitecture disruptive)larchitecture comme nouvelle alliance cratrice avec la nature prserver de lautre (larchitecture organique).

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    1. Le temps long de la pierre

    Un dsir dternit

    Tout commence avec les gyptiens et les grecs. Quelque chose de larchitecture occidentale, de son rapport la matire et au temps, prend racine dans les premiers complexes religieux et politiques que les gyptiens puis leur suite les grecs vont difier : pour les gyptiens, le complexe de Saqqarah, pour les grecs les premiers temples. Dans les deux cas, il y a transposition dune construction originellement en bois dans la pierre.

    A Saqqarah cest une colonnade de 80 lments qui imite les faisceaux de tiges de palmiers, ce sont les colonnes avec chapiteaux papyriformes, ce sont les plafonds en pierre qui imitent la forme de rondins de bois. Le temple funraire transpose dans lternit de la pierre les formes de la nature et les techniques de construction antrieures associes.

    Les temples grecs archaques tel lHraion de Samos transposent eux aussi dans la pierre des btiments originellement largement construits en bois : sur un socle en pierre, des murs non porteurs en briques crues taient entours dune colonnade en bois portant la charpente bois couverte de chaume. Des plaques dargile cuite et vernisse couvraient la construction, plaques que lon retrouve transposes dans les lments dcoratifs comme les mtopes et les triglyphes.

    Dans les deux cas, cest lexprience originelle de la transposition monumentale dans la pierre dune architecture initialement en bois, ddie la vie quotidienne, dans le but den assurer une prennit espre ternelle. Une dualit de sens prend ici son essor qui va traverser le temps et structurer toute la conception occidentale de la construction et ceci jusqu nos jours.

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    Cest une srie doppositions en cascade qui vont traverser une succession de registres smantiques lis la question de la construction et de sa matire: architecture de la vie quotidienne/ architecture du pouvoir, construction phmre/construction ternelle, richesse/pauvret, civilisation /barbarie, ruralit/ville, riche/pauvre, culture/nature.

    Un autre exemple : le colise de Rome. Celui-ci est le successeur damphithtres en bois, leur remplacement par une monumentale construction en pierre signe lexpansion de la puissance romaine et impriale : ds quon en a les moyens on investit dans la pierre, signe tangible de russite militaire, conomique et politique.

    Il y a de plus un lien entre construction et philosophie telle quelle prend son essor en Grce et qui vient renforcer cette succession de dualits issues de la construction : la distinction entre lide et la chose, dun ct lide ternelle, le concept dune chose, de lautre le corps prissable et fluctuant de cette mme chose. Cette fondamentale opposition sera prolonge dans la distinction me ternelle/corps prissable.

    Plus prosaquement on retrouve sdimente dans le langage cette dualit dvalorisante pour le bois : langue de bois, chque en bois, dmnager la cloche de bois, manger avec les chevaux de bois, avoir la gueule de bois, etc. Autant dexpressions qui crent un champ smantique trs vaste qui diffuse largement dans le langage une dvalorisation du bois.

    Nous sommes donc les hritiers dun choix culturel trs ancien qui a conduit prfrer lternit de labstraction limpermanence des processus issus de la nature. Ce choix est venu se superposer ou se mler en lamplifiant un abandon dans larchitecture de prestige de techniques de construction en bois qui taient pourtant premires.

    Ajoutons que dans la reprsentation du monde qui prend alors naissance et qui guide encore largement la ntre, lhumanit se pense dans les limites de ce qui constitue son espace propre et son champ de responsabilit : lespace artificiel de la cit avec ses lois et ses institutions qui constitue une enclave hors de la sphre globale de la nature.

    Cette vision du monde humain vient encore surdterminer le choix constructif, valorisant la matire qui semble la seule mme de traverser le temps, dassurer la stabilit dune institution ou dune reprsentation du monde et dchapper aux fluctuations et dgradations propres au monde la nature : la pierre.

    Cest dire sil y a toute une thmatique culturelle trs ancienne, un long fleuve de temps qui charrie des jugements de valeurs si lointains quon en oublie quils ne sont que des choix qui auraient pu tre autres, choix initiaux qui ne sont pas favorables au bois.

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    Les villes de bois : le feu marche avec elles

    A ct de cette thmatique culturelle il y a aussi, dans lapprciation du matriau bois, une mmoire sdimente de catastrophes, dincendies dvastateurs qui ont ponctu lhistoire de la ville europenne et sont responsables dune longue dfiance envers la construction en bois en site dense. Parmi la longue litanie des incendies qui ont ravag les villes depuis lantiquit, je voudrais en citer particulirement deux : le grand incendie de Rome de 64 avant JC et lincendie de Londres de 1666.

    Le premier parce quil touche une ville capitale dans lhistoire de lOccident et surtout une ville finalement trs proche de ce que sont encore les villes europennes actuelles : une ville dense (1,2 millions dhabitants sur 2 000 ha soit 60 000 habitants au km soit 3 fois plus qu Paris !), mlange de btiments de prestige en pierre, despaces publics et dimmeubles de rapports denviron 6 tages logeant les plus modestes dans des appartements superposs. Lincendie qui ravageant plus de la moiti de la ville tait dorigine accidentelle et sest propag trs vite sans que les pompiers de la ville (trs bien organiss mais qui ne disposaient pas de la technique des lances incendies pression) ne puisse le contenir, jusqu tre obligs de dtruire des immeubles entiers pour stopper sa propagation, technique brutale mais qui fut efficace dite faire la part du feu . La technique de construction des insulae romaines tait videmment la cause principale de la vulnrabilit de la ville lincendie : des immeubles levs, serrs les uns contre les autres, le long de rues troites et raliss souvent dans les tages suprieurs en mauvaise construction de bois (murs de clayonnage ou de torchis) pour minimiser les couts et maximiser les profits.

    Nron et les empereurs qui lui succdrent tentrent sans grands rsultats de limiter la hauteur des constructions et dimposer des techniques de construction plus fiable comme la brique et la pierre pour les immeubles de rapport.

    Il se cra donc une forte corrlation entre la vulnrabilit au feu et ce qui devait avoir aussi une longue postrit : lorsque les constructions en bois flambent, on peut toujours trouver refuge dans les difices publics ou religieux en pierre !

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    Lancienne dualit maisons de bois/temples de pierre se dploie maintenant dans la dualit : maisons des hommes en bois -dangereuses/maisons des dieux en pierre- protectrices. Plus lgrement on se souviendra que cette vision sest inscrite durablement dans la culture populaire sous la forme de lhistoire des trois petits cochons qui pour rsister la menace du loup choisissent chacun un matriau pour construire leurs abris : la paille, le bois et la pierre, seule rponse probante face au danger.

    Une longue srie dincendies se succdrent au cour des sicles (grand incendie de Tours en 585, Bourges en 1252 ; St Gall en 1314, Strasbourg en 1397, Bernes en 1405, Toulouse en 1463, Bourges de nouveau en 1487), tous ravageant des villes trs majoritairement en bois.

    Lincendie de Londres de 1666 marqua durablement les esprits (une maquette gante de 120m de long a t rcemment brule sur la Tamise afin de commmorer le 350me anniversaire de cette catastrophe) et eut une importance dcisive dans la transformation des villes europennes.

    Cet incendie accidentel dtruisit 80% de la ville qui tait presque totalement ( lexception du cur de la cit) construite en bois. 13200 maisons, 87 glises dtruites en 3 jours. La ville tait presque totalement compose dimmeubles de 6 ou 7 tages en bois toit de chaume largis dencorbellements sur la rue.

    Un incendie prcdent en 1632 avait conduit interdire les constructions en bois, mais, comme Rome 7 sicles plus tt, cette interdiction fut ignore. Ce ne fut quaprs ce terrible incendie de 1666 que les voies furent largies et les nouvelles constructions ralises progressivement en pierre et brique.

    Lincendie neut pas que des consquences uniquement pour Londres. Lanne suivante en 1167 les saillies sur rue furent interdites par Henri IV et les premiers dcrets limitant la hauteur des constructions et instaurant un rapport entre hauteur et largeur des voies furent dicts. Un dcret suivant interdit les constructions en pans de bois et colombages et obligea recouvrir les maisons colombages existantes par du pltre pour viter la propagation du feu.

    Les villes europennes prirent progressivement le visage que nous leurs connaissons. Le modle romain (immeubles collectifs de R+1 avec commerces au RDC comme typologie dominante en zone dense) avait atteint sa maturit technique et urbaine et il durera jusqu la fin du 19me sicle : rglementation des hauteurs et largeurs de voie, exclusion quasi-totale (sauf dans les quartiers priphriques et hors les murs) des constructions en bois. Ce qui tait lapanage des constructions prives de luxe et des difices publics devenait progressivement la base matrielle de lensemble des constructions mme les plus modestes.

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    Si les incendies navaient pas disparu, leur frquence et leur importance se rduisaient au moyen (outre le perfectionnement des outils de lutte) la fois de rgles urbaines imposes (chelle globale de R+6, rglementation liant largeur des voies et hauteur des constructions) et de lexclusion du matriau qui avait t jusque-l dominant dans lespace urbain. Cest dans le cadre de cet espace normalis et dans cette conjoncture entre scurit et viction du bois en zone dense que nous vivons, travaillons et pensons encore.

    2. Louverture au monde

    Cette configuration culturelle et technique qui la fois exclut le bois des villes et le rejette dans un pass rural quasiment aux marges de la civilisation va se fissurer trs lentement au cours du sicle dernier. Dans un premier temps pourtant, la rvolution industrielle va renforcer lexclusion du bois par le recours dans des proportions plantaires un matriau dj connu des romains : le bton. Le bton incarne le triomphe de la pierre sous forme liquide par la conjonction entre armature et matire solidifie par schage. Cest un rve de construction minrale, rapide et conomique, qui va dferler sur le monde. Cest une sorte duniversel constructif qui va unifier toutes les constructions de la plus modeste (les logements sociaux de la reconstruction) jusqu la plus extravagante : car le bton permet non seulement la rationalisation jusqu labsurde de la construction mais il offre une souplesse constructive et formelle qui ouvre toutes les audaces techniques et plastiques. Lhumanit semble avoir trouv son matriau rv depuis toujours. Dans cette nouvelle configuration technique conomique et esthtique le bois semble disparaitre jamais des radars de la culture architecturale.

    Seul lacier, outre son alliance avec le bton sous forme de ferraillage, semble devoir continuer sa carrire inaugure au 19me sicle, gardant sa capacit dinnovation technique, son efficacit constructive (en particulier pour les immeubles de grande hauteur qui constituent au fond la seule vritable innovation typologique depuis la ville antique) par sa rapidit de mise en place et sa possible standardisation.

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    Et pourtant, au sein de cette domination crasante de la pierre moderne des tremblements priphriques se firent sentir.

    La mondialisation progressive de la culture va faire merger au sein de notre univers de certitudes des figures alternatives. Parmi la multitude dunivers qui vont venir peupler la culture architecturale europenne, certaines figures me semblent dcisives sur des plans diffrents.

    Dabord le Japon. Pendant longtemps il fera figure dtranget proche, depuis les premires incursions des missionnaires jsuites du 18me sicle. Il incarne une figure radicalement autre, mais une figure dun raffinement tel que larrogance dvalorisante de lOccident ny trouve pas sy exercer. Vont apparaitre aux yeux de lOccident, les difices de prestige en bois les plus anciens du monde comme le temple Horyu-Ji Nara qui date du 7me sicle.

    Le Japon va faire dcouvrir lalliance inattendue du pouvoir, du luxe et dune certaine fragilit constructive. Contempler la villa Katsura cest renter au contact dun univers o lincarnation du pouvoir trouve son corps dans une construction de bois dun absolu raffinement, mlant llgance des charpentes recouvertes de chaume ou de tuile des parois vanescentes de papier, le tout se nichant dans une nature artistiquement compose o lintervention humaine semble avoir pour but deffacer la distinction entre lartificiel et le naturel dans une composition o la main humaine est omniprsente et en mme temps se fait oublier.

    Plus encore, cest la rencontre avec une autre philosophie du temps : la recherche dternit de lOccident qui confie la pierre le soin de traverser un temps quil voudrait immobile, le Japon offre lalternative dune acceptation de limpermanence des constructions humaines qui mnagent par leur fragilit assume leur alternance de disparition et de renaissance successives. Ainsi le sanctuaire Shinto dIse est tous les 20 ans rituellement dtruit et reconstruit lidentique : lternit ne se joue plus dans la permanence dune matire indestructible mais dans la continuit dune tradition et dune technique indfiniment reconduite dans une matire volontairement assume comme prissable : le bois.

    Immersion au sein dun continuum o lartificiel et le naturel se confondent, acceptation de limpermanence des ralisations humaines, acceptation du temps comme alternance de destructions/reconstructions, omniprsence de bois dans les constructions des plus humbles aux plus somptueuses, raffinement dun principe de dlicatesse qui semble imprgner lensemble de la culture japonaise traditionnelle et vouloir allger le poids des actes humains sur la nature - autant dlments profondment nouveaux qui vont se diffuser dans la culture occidentale malgr la conversion du Japon une modernit acclimate son histoire.

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    La culture architecturale amricaine dautre part va, ct de son utilisation exponentielle de la modernit technique universelle (bton et mtal) largement diffuser une culture toujours vivante de la construction en bois, que ce soit des maisons modestes ou des maisons ou des difices de prestige. Conformment la loi de lhistoire qui semble montrer que les socits laube de leur dveloppement utilise prfrentiellement un matriau abondant et facile dutilisation, lAmrique, socit rcemment apparue, sous sa forme occidentalise du moins, sur la scne de lhistoire, va faire coexister ainsi techniques constructives gnralement chelonnes au fil du temps. Ainsi la culture de la construction en bois napparait pas comme un moment primitif du dveloppement technique mais comme une possibilit part entire ct des techniques classiques de la modernit comme le bton ou lacier et dote du mme potentiel dinnovation formelle ou typologique que celles-ci. On retiendra ici simplement luvre de Frank Lloyd Wright qui associe gnralement plusieurs techniques constructives dans un mme btiment mais qui fait entrer la construction en bois dans lavant-garde dune modernit trs spcifique et porteuse de valeurs trs diffrentes de la modernit rationaliste dominante : fusion entre la construction et la nature, modestie de lacte humain qui vise perturber le moins possible lenvironnement dans lequel il sinsre, utilisation prfrentielle des ressources naturelles du terrain, laboration dune utilisation du bois la fois standardise et riche de libert crative. Il synthtisera cette dmarche sous la dnomination assez floue darchitecture organique , dnomination qui me semble trangement prmonitoire du champ smantique qui unifie les interrogations qui traversent notre prsent : agriculture biologique, matriau bio-sourcs, organic food, etc. Pour la premire fois peut tre au sein de la modernit, lacte de btir est pens comme un lment au sein dun tout, une part active et vivante dans une nature active et vivante et non plus comme un pur ilot dartificialit humaine au sein dune nature soumise : bref presque un retour une vision pr moderne dans une culture constructive et esthtique davant-garde.

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    Ajoutons enfin la progressive monte en puissance de larchitecture des pays scandinaves qui, fort de leur tradition multisculaire jamais teinte de constructions en bois, vont faire merger au sein de la culture europenne une vision alternative de la modernit architecturale, plus soucieuse de la prservation du cadre naturel, moins arrogante, plus attentive aux performances thermiques et dune utilisation du bois renouvele par lnergie cratrice esthtiques des temps prsents.

    3. Construire au sein dun monde menac : les deux visages dun tremblement de terre

    La prise de conscience de plus en plus dramatique que la plante qui nous accueille est gravement menace par les agissements inconsidrs de lhumanit et que nous ne vivons pas une crise cologique mais bel et bien un nouvel ge de la terre, lanthropocne, a donn la recherche de solutions alternatives au main Stream de la modernit technicienne le caractre dune urgence absolue. A laune de notre responsabilit et des consquences pour la vie terrestre que laction humaine est en train de programmer pour les gnrations futures, nous sommes conduits reprendre les fondamentaux de la culture architecturale et technique pour les orienter dans une nouvelle direction : ce quIsabelle Stengers et Ilya Prigogine ont thoris sous la dnomination de la Nouvelle Alliance entre lhomme et la nature . Au sein de cet immense bouleversement il est nanmoins possible de distinguer au moins deux courants trs diffrents : un courant que lon pourrait appeler disruptif et un courant qu la suite de Wright on pourrait appeler organique .

    Lesthtique du chaos cratif dans un monde convuls: larchitecture disruptive

    On pourrait appeler disruptif un courant architectural qui prend acte du tremblement de terre qui a mis bas tout ldifice de la culture humaine et dessine un futur imprvisible pouvant tre indfiniment recompos par la puissance des technologies. Disruptif : apparition brutales dinstabilits dans un systme. Je pense de multiples exemples comme le Muse des Confluences, luvre de Zaha Hadid, de Liebeskin entre autres. Cest un courant qui articule la prouesse technique au service dun travail sur une forme dlivre de toute contrainte gomtrique. Il semble que tous les lments de composition et dordre qui rgulaient la culture architecturale aient vols en clat au profit dun biomorphisme exubrant. On assiste la gnration dorganismes architecturaux totalement nouveaux, une fabrique spontane de monstres formels, lmergence dun nouveau rgne biologique au milieu dune nature secoue par un cataclysme. Comment interprter cette soudaine floraison darchitectures qui semblent dlivres de toutes contraintes gomtriques et constructives ? Comment rendre compte dun btiment comme le Muse des Confluences ?

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    Comment comprendre quun btiment qui sinscrit dans la ligne des btiments publiques qui jusqu prsent incarnaient la stabilit dune reprsentation du monde et de linstitution puisse se prsenter sous la forme dun organisme totalement dsarticul ? Certes il y a un courant baroque qui, partir de la contre-rforme, a introduit dans la culture architecturale toute une rhtorique du flux, du pli, de la torsion, mais qui restait dans les limites dune composition globale finalement assez conventionnelle : il sagissait plus dun assouplissement de surface dans un cadre qui prservait les grands thmes de larchitecture classique- axes, symtrie, registres verticaux, etc.- Larchitecture transgnique ou paramtrique fait vraiment exploser tous les repres qui structuraient depuis des millnaires les compositions architecturales et urbaines considres comme un corps intelligible. Je voudrais proposer une interprtation au-del du formalisme de ce courant architectural : il constituerait rien de moins que la rponse symbolique extraordinairement cratrice et lyrique ce qui est annonc comme la 6me extinction massive du vivant, cette fois non pas par la rencontre avec un astrode gant mais par la rencontre entre la terre et la technologie humaine. Cette mergence de nouveaux organismes architecturaux chappant toutes les rgles qui structuraient le rgne de larchitecture depuis des millnaires a donc une porte symbolique trs forte : la relve de lcosystme naturel par un nouvel cosystme dsign par la puissance humaine dans un feu dartifice cratif sans limite. Cest une incarnation trs forte dans le corps de larchitecture dune vision du monde aussi puissante que celle qui sincarnait dans lorganisation spatiale et symbolique des cathdrales : lmergence dun monde nouveau dans un monde convuls porteur dune nouvelle poque du vivant, poque qui voit la prolifration exubrante de possibilits de rponses improvises sans hirarchie et parmi lesquelles la vie fera le tri. Il y a quelque chose de trs fascinant dans cette abandon aux forces cratrices de lapocalypse.

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    Autre exemple, la philharmonie de Paris qui ressemble un immense organisme mutant lorganisation morphologique nigmatique, aspirant par ses tentacules/escalators les minuscules organismes humains quelle absorbe derrire les plis de sa carapace. Il suffit de comparer la salle de concert de Lucerne du mme Jean Nouvel ou le centre de congrs Le Vinci de Tours pour comprendre le changement dunivers architectural : Lucerne et Tours nous avons un organisme

    architectural intelligible qui sinscrit comme une variation sur un fond typologique continu depuis la nuit des temps (toiture, porte faux, pilotis, axialit, symtrie). A Paris, cest lapparition saisissante dun mutant, qui semble tre n de lespace dvast du priphrique. Dune certaine manire toutes les architectures que je viens dvoquer pourraient se ranger sous la bannire du surralisme et de de sa recherche de la beaut convulsive : formidable rencontre a posteriori entre une avant-garde littraire et picturale et une lointaine descendance architecturale !

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    Lthique de la construction dans un monde prserver : larchitecture organique

    A ct de ce courant disruptif se dveloppe un courant organique qui recherche une nouvelle alliance entre lhomme et la nature et dans laquelle la construction en bois joue un rle central. Il faut cependant se souvenir que ce courant architectural dj ancien a pu utiliser toutes la palette des matriaux et des techniques : le bton (la maison sur la cascade), le mtal (les maisons de Glen Murcutt), la pierre (Gilles Prraudin), la terre etc. . Cest un courant au dpart assez marginal, voire provincial (voir comment le petit land du Vorarlberg avec ses Baukuntsler est devenu un centre mondial de larchitecture cologique) qui se structure autour dune recomposition des mtiers de la construction. Le maitre mot de cette thique constructive est collaboration : entre la nature qui fournit la matire et lhumanit qui doit en prserver lexistence, entre les diffrents intervenant dans la conception du projet qui travaillent horizontalement entre eux, entre ceux qui conoivent et ceux qui construisent, entre enfin lartificialit de ldifice et la terre qui laccueille.

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    La question de la matire Larchitecture organique commence simplement, par la question initiale de la matire avec laquelle le btiment va tre difi : il sagit dune thique de la matire o il faut mesurer limpact de lacte de construire sur la terre : quelle matire, quels dgts irrmdiables ou non la prise de possession de cette matire engendre-t-elle ? Comment est achemine cette matire ? Comment volue-t-elle dans le temps ? Peut-on la recycler ? Est-elle rare ou abondante ? Evidemment le bois, avec son caractre renouvelable (quand il est inscrit dans une filire de contrle de sa provenance), sa captation naturelle de CO2 et sa faible missivit du mme CO2 est le matriau qui incarne le mieux actuellement cette thique de la matire. La question du partage du savoir Larchitecture organique sappuie sur tout une mmoire et un rseau de comptences techniques associes ds le dpart lacte de concevoir un btiment : il sagit de prserver des gisements de savoir-faire sculaires ou plus qui peuvent facilement se combiner avec les technologies les plus pointues. Il sagit de recrer le rseau de solidarit et de coopration humaine qui fait de lacte de construire un travail collectif destin crer un monde pour tous. Construire en bois, cest exprimenter la coopration entre tous les acteurs de lacte de btir : du producteur de la matire premire en passant par lentreprise qui faonne, lingnieur qui calcule, il y a tout un partage du savoir initial : on ne dessine pas simplement une forme, cest tout le processus de dimensionnement et dassemblage qui est immdiatement prsent ds les premires esquisses. Jajouterai que pour un architecte il y a un formidable plaisir quitter labstraction constructive du bton qui fait du dessin de la forme et du calcul des ferraillages des actes trangers pour retrouver un univers constructif finalement beaucoup plus familier et le plaisir dune coopration horizontale entre toutes les comptences . Il y a actuellement autour du bois une effervescence technique et crative aussi enthousiasmante que celle qui a eu lieu au dbut du sicle prcdent avec le mtal et le bton : des horizons souvrent, des solutions techniques innovantes apparaissent, un monde de formes et dusages surgit.

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    La question de la mise en uvre Lthique qui sous-tend la dmarche de larchitecture organique en gnrale et de la construction en bois en particulier stend jusqu la condition de mise en uvre de btiment : comment le construit-on ? Dans quelles conditions ? Je me rappelle la construction de lcole que lagence a ralise Cit Champagne Paris : lensemble des classes sont en structure bois pose sur le socle des espaces communs en maonnerie : le moment ddification de la structure et des planchers a t un moment inoubliable de calme, de prcision et pourrait-on dire de dlicatesse qui a fait alors basculer le chantier dans une autre dimension du travail : lassemblage prcis dun ensemble dlments prdfinis. Il y a donc une thique du travail humain luvre qui prserve tout un savoir artisanal et intuitif et donne toute sa valeur lintervention de chaque compagnon sur le chantier et qui utilise toutes les ressources de la technologie pour en allger la peine. Le partage du monde Cest donc une dmarche qui possde une forte composante thique. Pour autant, la dimension esthtique nest videmment pas absente loin de l mais cest une esthtique de llgance et de la juste utilisation de la matire, de lassemblage raffin, de lconomie des moyens. A une extrmit du spectre des possibles on pourrait dire que le pavillon de th en bois et torchis tel quil fut codifi au 17me sicle reprsente dans son chelle miniature la quintessence de cet esprit : peu despace, peu de matire, humilit dune esthtique proche de la quotidiennet mais rayonnement de la spiritualit et de lcoute de la nature qui accueille lacte humain le plus lger et le moins invasif qui puisse se concevoir.

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    A lautre extrmit on trouve des btiments de grande ampleur qui tmoignent dune effervescence crative aussi puissante que celle qui sincarne dans larchitecture disruptive. En tmoignent des btiments comme le pavillon de Chine lexposition de Milan 2015 ou la fondation Path de Renzo Piano mais aussi des tours en mtal comme la Hearst Tower de Norman Foster (30% de matire en moins quune tour classique). Un point commun toutes ces constructions : aussi libres et varies quen soit le travail de leurs formes, celui-ci prserve lintelligibilit de la construction : il ny a pas une enveloppe ou un volume travers de structures invisibles noyes dans la matire mais structure en pleine lumire ( ce titre le premier btiment organique de cette nouvelle gnration de btiment serait le centre Pompidou avec lexpression transparente de sa structure et de ses organes de fonctionnement). On reste donc dans une logique dun monde intelligible, qui fait sens, qui donne voir un travail responsable : il ne sagit plus simplement dune surnature nigmatique prenant le relai dun monde dvast mais dun cosystme humanis qui quilibre la libert crative affirme et le respect de lenvironnement dont il prolonger la logique et la vitalit volutive, rendant compatible lhritage offert par la nature, les savoirs constructifs accumuls par lhistoire ou la ville et les nouveaux organismes architecturaux que le prsent dans son exubrance innovante y fait surgir.

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    4. Retour vers la ville Larchitecture de bois et plus gnralement larchitecture organique semble trs bien adapte larchitecture de pleine nature ou priurbaine. Faible hauteur, volume fragment, autant dlments qui rendent facile lintgration dun

    ensemble en bois mme dans un environnement trs diffrent. La modnature induite par lchelle du parement bois et latmosphre plus naturelle quapporte un immeuble en bois ouvre le contexte une nouvelle dimension de lespace bti qui est bien reu et qui peut constituer une rupture inaugurale positive dans un contexte difficile. Mais on le sait, la grande question du futur de lhabitat humain est lextension du domaine de la ville dun ct et la prservation des terrains agricoles de lautre : bref, la question de la densit. La question de larchitecture organique dans le cadre de la ville dense voire hyperdense se pose la croise de multiples thmatiques : mobilit, place de la voiture, agriculture urbaine, nergie, typologie des logements etc. La question du bois fait retour dans cette problmatique de la grande densit. Nous sommes donc dans un mouvement de retour et de dpassement du rejet du bois dans les villes dont nous avons vu quil sinscrivait dans un long processus de catastrophes et de rgulations. Le progrs scientifique sur le comportement des matriaux, linvention de matriaux comme le lamell coll, les associations de

    matriaux prvenant lincendie, les rgles durbanismes issues du 19me sicle rgulant hauteur et largeur des voies, lefficacit des moyens de lutte contre lincendie - autant dlments pour reprendre positivement la construction en bois l o les romains lavaient laisse, cest--dire R+6 : il aura fallu peu prs 21 sicles pour que lhypothse dune ville dense majoritairement construite en bois devienne un projet qui ne soit pas au rabais mais qui tmoigne au contraire des ambitions les plus exigeantes en terme de qualit dhabitat et de scurit. Reste la prochaine tape en cours dlaboration : des immeubles entre R+10 et R+20 en bois. Cette recherche de la hauteur nest pas un acte gratuit et doit tre vue dans loptique de la densit et uniquement dans celle-ci : ce nest que pour crer une densit plus forte et plus agrable vivre et moins impactant cologiquement que le recours au bois prend son sens. L aussi il faut compter avec la dimension thique de larchitecture organique, qui au-del de lexploit technique videment bien tentant, cherche avant tout la composition dun cosystme global cohrent bien plus que la cration dobjets solitaires aussi beau soient-ils.

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    5. Final : Corps glorieux-corps fragiles Pour conclure, je reviens sur le rapport entre larchitecture et les corps quelle est cens protger. Pendant longtemps, trs longtemps, ce qui tait mis en scne ctait le corps glorieux du pouvoir, le corps glorieux du roi, du hros ou du dieu, que ce soit sous forme de statues, de cariatides ou mme de lensemble du btiment qui exprimait comme un organisme cohrent lordre du monde cr par le dieu et garanti dans son existence par le roi ou le prtre. Pour ce corps glorieux, la pierre tait le matriau qui convient, accorde la stabilit ternelle du corps souverain. Les autres corps, les corps roturiers et mortels, renvoyaient aux matriaux plus humbles comme la terre cuite, le bois ou la brique. Ce nest que trs tardivement que les corps roturiers ont eu accs la pierre des rois et des dieux. Nous sommes entrs dans un moment de lhistoire o coexistent deux corps trs opposs : le corps glorieux de la science, du rajeunissement indfini, du souci de soi travers des soins de plus en plus raffins, de la prothse biomcanique et de la promesse dimmortalit et de lautre le corps qui fut pendant longtemps le marginal absolu : le corps du handicap. Soit le corps glorieux versus le corps fragile. Dune certaine manire il y a dans lhrosme transgressif de larchitecture disruptive, dans son surralisme assume, une connivence trs forte avec cette annonce dun corps glorieux promis par la science. Une autre approche, pas moins ambitieuse, est possible en considrant que nous entrons dans lre du monde fragile, dans le temps des corps fragiles aux prises avec un monde incertain. Il y a dans lapparence de fragilit de larchitecture en bois, dans son travail de superposition de peaux pour constituer ses parois, dans le sentiment de continuit organique quintroduisent les membrures de sa charpente avec les corps quelles abritent, dans la prsence brute et odorante des forts qui se sont mtamorphoses en btiment, comme un rappel salutaire de la vulnrabilit du monde et des vivants, de notre statut dinvit de passage sur la terre. Lthique de larchitecture organique sinscrit dans cette dimension de fragilit surmonte et ce nest pas hasard que la construction en bois convient particulirement bien ces institutions trs nouvelles dans lhistoire des hommes que sont les tablissements pour polyhandicaps. Ltablissement que nous avons construit Franois rpond

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    dans la modestie de son programme, et au-del de celui-ci, de multiples thmes qui sont au cur de la dmarche thique de larchitecture en bois et de sa capacit proposer une alternative pour ldification dun monde plus doux : cration dun espace ddi au bien tre, prsence dune matire sensible crant un vritable sentiment de douceur tactile et dpanouissement, vibration dune mise en jeu du bois qui met en scne une architecture-monde, une architecture- fort, une architecture clairire, permabilit entre le lieu construit et le monde extrieur grce des parois qui ne se vivent pas comme des surfaces inertes, continuit entre la vgtation des jardins et la matire qui enveloppe lespace bti, prsence dune structure intelligible qui produit un monde o lon se repre. Et de mettre ainsi laccent sur le caractre hdoniste qui devait imprativement imprgner latmosphre de cette institution, on retrouve finalement un traitement de lespace et des matires trs proche de celui des lieux de luxe ddis au bien tre : spa, thalassothrapie, centre de remise en forme. Ainsi au bout de cette dmarche les corps glorieux retrouvent les corps fragiles dans un mme traitement architectural sensible.

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    Illustrations :

    p.2 1,2 Saqqarah,

    3 Temple Hphaisteion (Athnes)

    4 Temple Hraion (Samos)

    p.3 1 Colise

    2 Carthage

    p.4 1,2,3 Reprsentations : Incendie de Rome,

    rue de Rome, Insulae

    p.5 1,2,3 Maquette de lincendie de Londres et

    vues des rues de Londres en 1666

    4 14 rue Nicolas Flamel, Paris

    p.6 1 rue haussmannienne

    2 CNIT Pier-Luigi Nervi

    3 Hotel de ville du Havre -

    Auguste Perret

    4 Unit dhabitation de Firminy -

    Le Corbusier

    5 Assemble du Bengladesh -

    Frank Lloyd Wright

    p.7 1 Horyu-Ji Nara 7me sicle

    2 Villa Katsura

    3 Temple shinto dIse

    p.8 1 Maison de pionnier

    2 Maison contemporaine USA

    3 Maison Bachmann et Wilson -

    Frank Lloyd Wright

    4 Maison Hanna Frank Lloyd Wright

    p.9 1 Maison traditionnelle Scandinavie

    2 Maison contemporaine sur catalogue

    (Polar Life Haus)

    3 Intrieur maison Mairea - Alvar Aalto

    4 Muse des confluences -

    Coop Himmelb(l)au

    p.10 1 Royal Ontario musum -

    Daniel Libeskind

    2 Quartier gnral du port dAnvers -

    Zaha Hadid

    3 Centre culturel Heydar-Aliyev,

    Azerbadjan - Zaha Hadid

    4 Abu Dhabi Performing Arts Centre -

    Zaha Hadid

    p.11 1 Centre des congrs de Tours -

    Jean Nouvel

    2 Centre culturel de Lucerne -

    Jean Nouvel

    3 Philharmonie de Paris - Jean Nouvel

    4 Lenfant gopolitique observant la

    naissance de lhomme nouveau -

    Salvador Dali

    p.12 1 Maison sur la cascade -

    Frank Lloyd Wright

    2 Maison Marie Short - Glenn Murcutt,

    3 Chaix - Gilles Prraudin

    4 Centre communal de Ludesch -

    Hermann Kaufmann

    p.13 1 Fort

    2 Mediums au travail

    p.14 1,2 Ecole Champagne - DLA

    3 Pavillon de th

    4,5 Pavillon de th itinrant - Pierre Sernet

    p.15 1,2 Pavillon de la Chine, Milan 2015 -

    Studio Link-Arc et Universit de

    Tsinghua Pkin

    3 Hearst Tower - Foster + Partners,

    4 Fondation Jrme Seydoux-Path -

    Renzo Piano

    5,6 Eglise de Jyvskyl, Finlande -

    Lassila Hirilanimi

    7 Fondation LVMH - Frank Gerhy

    p.16 1,2 Logements Montreuil - DLA

    3 Immeuble Stadthaus, Londres -

    Waugh Tristleton,

    4 immeuble Haut, Amsterdam-

    Team Architectur

    5 Vasterbroplan, Stockholm -

    Berg et Moller

    p.17 1 Villa Aurea,

    2,3,4,5 Centre pour polyhandicaps Franois -

    DLA

    p.18 1 Centre de vacances Vietnam - AW2

    2 Centre pour polyhandicaps Franois -

    DLA

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Foster_%2B_Partners