Comment Favoriser la bonne prise de parole chez les enfants...

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COMMENT FAVORISER LA BONNE PRISE DE PAROLE CHEZ LES ENFANTS ALLOPHONES EN CLASSE MATERNELLE ? Spécialisation en Français Langue d’Enseignement et Diversité culturelle Professeurs référents de l’option : Mme GOIES I. et Mme MARICHAL E. Travail de fin d’études présenté par Christelle Vendé en vue de l’obtention du titre « bachelier d’institutrice préscolaire » LOUVAIN-LA-NEUVE ANNEE ACADEMIQUE 2015-2016

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COMMENT FAVORISER LA BONNE PRISE DE PAROLE CHEZ LES ENFANTS ALLOPHONES EN CLASSE

MATERNELLE ?

Spécialisation en Français Langue d’Enseignement et Diversité culturelle

Professeurs référents de l’option : Mme GOIES I. et Mme MARICHAL E.

Travail de fin d’études présenté par Christelle Vendé en vue de l’obtention du titre

« bachelier d’institutrice préscolaire »

LOUVAIN-LA-NEUVE

ANNEE ACADEMIQUE 2015-2016

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Comment Favoriser la bonne prise de parole chez les enfants allophones en classe maternelle ?

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Remerciements

_____________________________________________________________

Je tiens à exprimer mes sincères remerciements aux personnes qui m’ont suivie pendant ces trois années de

formation à l’Ecole Normale Catholique du Brabant Wallon (Louvain-la-Neuve) et tous celles qui ont

contribué d’une façon ou d’une autre à la réalisation de ce travail de fin d’étude :

- Les professeurs de l’ENCBW qui m’ont outillée et m’ont transmis leurs nombreuses connaissances,

- Les Maîtres de formation professionnelle qui ont partagé leurs expériences et ont su me communiquer leur

passion,

- Les professeurs superviseurs de mes stages qui m’ont suivie et qui m’ont aidée à évoluer,

- Les institutrices préscolaire et primaire ainsi que les maîtres en psychomotricité qui ont pris leur rôle de

maître de stage très à cœur et qui ont contribué grandement à la formation de la future enseignante que

je suis,

- Les professeurs référents de l’option FLE et Diversité culturelle qui m’ont suivie et conseillée lors de cette

dernière étape,

- Mes proches qui m’ont toujours soutenue et aidée,

Christelle Vendé

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Table des matières

Introduction ................................................................................................................................................ 3

Partie 1 : Récit de mon cheminement personnel professionnalisant ............................................... 5

1. Introduction au travail ...................................................................................................................... 10

1.1. Contexte de stage : .................................................................................................................... 10

Partie 2 : L’objet central de mon travail ........................................................................................... 11

2.1. Profils des enfants ....................................................................................................................... 11

2.2 Questionnement ............................................................................................................................ 14

2.3. Définitions. .................................................................................................................................... 15

2.3.1. Termes et définitions. ........................................................................................................... 15

2.3.1. Prise de position.................................................................................................................... 16

2.4 Parler une autre langue à la maison, quel impact ? ............................................................. 17

2.4.1. Le passage d’une langue à l’autre ................................................................................... 17

2.4.2. L’impact du bilinguisme........................................................................................................ 18

2.4.3. Les obstacles à la bonne acquisition de la langue. ....................................................... 18

2.4.4. Constat. ................................................................................................................................... 20

2.5. Les conditions pour aider la prise de parole dans la langue d’enseignement. .............. 20

2.5.1. Sécurité affective .................................................................................................................. 20

2.5.2 Etayage de l’enseignant ...................................................................................................... 20

2.6. Déroulement et objectifs de deux activités mises en place en stage ............................... 21

J’aime/ Je n’aime pas ........................................................................................................... 21

Discussion autour de l’album de Mimi ................................................................................. 22

2.6 Activités à réaliser pour aller plus loin. ................................................................................... 23

Les albums pour apprendre à parler (et l’Oralbum): ....................................................... 23

L’album imagier........................................................................................................................ 24

Les comptines ............................................................................................................................ 24

Présentation d’un objet aux enfants de la classe. ............................................................. 25

Partie 3: Conclusion ............................................................................................................................... 26

Bibliographie........................................................................................................................................ 29

Annexes: ................................................................................................................................................ 30

Annexe 1 : Modèle de WHEELER et roue de PAQUAY ............................................................ 30

Annexe 2: Préparation de l’activité J’aime/ Je n’aime pas .................................................... 31

Annexe 3: Préparation de l’activité de la discussion autour de l’album de la mascotte ... 33

Annexe 4: Exemples de comptines pour travailler le lexique et la syntaxe ........................ 35

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Introduction

Ce travail de fin d’étude représente un aboutissement de trois année de formation vécues à

L’Ecole normale catholique du Brabant wallon. Une formation que j’ai suivie dans le but de devenir

enseignante préscolaire.

Tout d’abord, je vous parlerai en bref du parcours réalisé en trois ans, de ce qu’il m’a apporté et

comment il a forgé professionnellement et personnellement la future enseignante que je suis devenue

aujourd’hui. J’ai voulu expliquer ce cheminement personnel comme un voyage à sac à dos. Je compare

l’ENCBW à un pays. En effet, il y a trois ans, cette Haute Ecole représentait pour moi une destination

complètement inconnue par rapport à ce que j’avais vécu auparavant. J’ai voulu que ce sentiment

d’appréhension mêlée à de l’enthousiasme soit perçu à travers cette métaphore. Je souhaitais aussi faire

le lien avec ce que peuvent ressentir les enfants allophones, sujet central de mon TFE, lorsqu’ils font leur

entrée dans une école avec une culture et une langue différentes, univers qu’ils doivent apprivoiser.

Dans la courte introduction qui suit le récit de mon cheminement personnel, vous pourrez comprendre

dans quel contexte de stage je me trouvais pour réaliser ce dernier moment d’expérimentation en lien

direct avec l’option FLE (Français langue d’enseignement) et Diversité culturelle, option que j’ai choisie

de suivre lors cette dernière année. Je vous expliquerai quelle direction j’ai voulu donner à ce travail

après des moments d’observation en classe de stage. Je détaillerai les observations réalisées sur quatre

enfants dont les particularités linguistiques m’ont intriguée. A la suite des profils de ces enfants, je vous

ferai part de mon questionnement.

Je ferai ensuite le lien entre ces observations et les informations récoltées avec l’aide des parents des

enfants ainsi et celle de ma maître de stage et des recherches théoriques effectuées lors de la période

d’écriture du TFE. Je définirai certains termes qui, selon moi, doivent être bien compris pour définir au

mieux les différentes situations linguistiques de ces quatre enfants. Je développerai ensuite le sujet de

l’impact de la langue maternelle sur la prise de parole dans la langue d’enseignement en classe

maternelle. Je dégagerai ensuite les conditions qui me semblent importantes ainsi que l’étayage de

l’enseignant, c’est-à-dire les interventions qu’il peut mettre en place pour encourager la bonne acquisition

de la langue d’enseignement tout en tenant compte de la langue maternelle des enfants allophones. Je

présenterai alors deux activités que j’ai eu l’occasion d’expérimenter en stage : le jeu du J’aime/Je

n’aime pas et la discussion autour de l’album de la mascotte de la classe. J’expliquerai les objectifs qui

s’y rapportent et les résultats que j’ai pu observer. J’expliquerai enfin des activités que j’aurais voulu

développer plus en profondeur ou réaliser en stage si j’avais eu l’occasion ou davantage de temps.

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Je finirai ce travail par une conclusion. Je tenterai de résumer les liens que je peux faire entre les

différents concepts théoriques et mon vécu de stage avant de vous faire part de ma mise en projet

professionnelle.

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Par tie 1 : Récit de mon cheminement personnel professionnalisant

J’avançais encore et encore sur cette route. Les paysages, je les connaissais, les personnes qui

marchaient autour de moi aussi. Ce pays, je le connaissais bien : le pays de mon enfance et de mon

adolescence… J’avais amassé au fil du temps de nombreuses choses dans mon sac à dos : de mauvaises

comme de bonnes expériences. Pourtant, à l’aube de mes dix-huit ans, le paysage avait quelque peu changé,

mon regard sur celui-ci également. Certaines personnes autour de moi commençaient à s’éloigner de moi. En

effet, ce chemin sur lequel je marchais et qui avait été tracé plus au moins par mes parents, et sur lequel je

me contentais d’avancer sans trop me poser de questions allait prendre fin. Ce n’était pas vraiment la fin…

Simplement, je devais continuer de marcher sur un chemin que je devais tracer moi-même, sans savoir

vraiment dans quelle direction je devais aller. J’ai ralenti. Je me suis arrêtée un instant, j’ai déposé mon sac

à dos à mes pieds et je l’ai ouvert. J’en ai tiré de nombreux souvenirs : une image de moi enfant apprenant

à lire à mon petit frère lorsqu’il avait cinq ans, une image de ma cousine que j’enguirlandais car elle ne

faisait pas correctement son cumulet, de nombreuses autres images, de souvenirs. J’ai remis ces souvenirs

dans mon sac à dos. Je me suis mise à penser : j’étais sur le point de vivre une nouvelle étape de ma vie, un

nouveau chemin dans un nouveau pays s’offrait à moi. Je devais tracer ma route : celle de mon choix. Mais

quel choix ? Je me suis décidée à regarder un peu autour de moi : il y avait des salons de l’étudiant, des

portes-ouvertes dans des Hautes écoles et dans des universités. Je me suis arrêtée plusieurs fois. J’ai pris de

nombreuses informations que j’ai rangées dans mon sac à dos. Plus je m’arrêtais, plus la direction que je

devais prendre se concrétisait. La frontière de ce pays était visible. Avant de la franchir, j’ai pris le temps,

une dernière fois, de m’arrêter pour réfléchir. Les souvenirs, les expériences me rassuraient dans le choix que

je m’apprêtais à faire. Tout était clair pour moi, je n’avais plus vraiment de doutes. J’irai dans cet étrange

pays qui s’appelait L’Ecole Normale Catholique du Brabant Wallon (ENCBW)…

Quel changement… Je ne l’avais pas vu venir. De nouveaux paysages, de nouvelles personnes.

Beaucoup de nouveautés ! Je me sentais perdue dans ce nouveau pays dans lequel j’étais débutante. Tout

m’impressionnait, les arbres étaient plus grands, les paysages plus chargés. Quel choc ! J’ai voulu faire un

pas en arrière. Je doutais, je n’avais plus aucun repère. Puis je me suis ressaisie. L’inconnu fait peur mais il est

plein de surprises aussi. Peu à peu je m’y suis habituée et sous mes pieds, mon chemin continuait de se tracer.

Je me sentais mentalement changée. J’étais dans ce nouveau pays par choix. Je l’avais choisi un peu par

intuition et je m’y plaisais. Chaque jour était une nouvelle découverte pour moi et je me sentais grandir à

chaque pas. Certaines des personnes que j’avais l’occasion de rencontrer sur mon chemin étaient des

personnes expertes de ce pays qu’est l’ENCBW. Leur rôle était de nous guider sur leurs terres ainsi que de

nous outiller pour le jour où mes camarades et moi devrions quitter ce pays pour un autre. Ils parlaient une

langue légèrement différente de celle du pays d’où je venais. En effet, ils employaient de drôles de mots :

métacognition, feedback correctif, béhaviorisme, socioconstructivisme, zone proximale de développement et

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d’autres mots bien plus étranges que je ne comprenais pas. Mais peu à peu, je m’habituais à ce nouveau

langage, j’apprenais la signification de ces nouveaux mots et termes et en voyais le sens.

C’est avec une de ces personnes, experte de l’ENCBW, que j’ai appris à me servir d’une guitare, un instrument

dont j’ai apprécié l’apprentissage. J’ai eu la chance de rencontrer des personnes qui venaient tout

spécialement d’autres pays proches de l’ENCBW pour nous raconter leurs expériences lors de journées peu

ordinaires appelées Ateliers de Formation Professionnelle. Nous avons eu le privilège de passer quelques

heures dans un petit pays tout proche. C’est un pays similaire à celui dans lequel je souhaite travailler plus

tard. Là-bas, nous avons rencontré des experts appelés institutrices/-teurs maternelles. De plus, nous avons

eu l’occasion de présenter et d’expérimenter une activité scientifique aux élèves de ce petit pays. Une belle

manière pour moi de travailler mon aspect praticien artisan (Paquay, 20011) car je mettais en pratique la

théorie scientifique acquise à l’ENCBW. Ces petites expériences que je rangeais soigneusement dans mon

sac en fin de journées me confortaient dans mon choix de direction.

Je voyais les paysages différemment, je m’efforçais de mettre en mémoire tout ce que je voyais autour de

moi pour ensuite placer ces nouvelles rencontres et expériences dans mon sac de voyage. Etrangement, plus

mon sac comportait de nouveaux éléments, plus je me sentais légère. Arriva le moment où sur le bord de

mon chemin, je passai à côté d’une pancarte qui annonçait le passage dans une zone appelée session

d’examen de Noël. Il était temps de montrer ma part de maître instruit (Paquay, 2001). J’allais devoir

prouver la bonne assimilation des cours donnés par les personnes expertes de l’ENCBW. N’ayant jamais

traversé cette zone dans ce nouveau pays, je m’y lançais avec un peu de crainte. Pour être certaine que ce

passage dans cette zone n’ait pas de mauvaises répercussions sur le reste de mon voyage, je préparai cette

session au mieux et en travaillant beaucoup. Je sortis de cette zone sans difficultés pour la suite de mon

chemin.

J’ai ensuite passé plusieurs jours avec une camarade dans un autre petit pays dans une classe d’enfants

d’accueil-première maternelle. Malheureusement, la tâche n’a pas été aussi aisée que ce à quoi je

m’attendais. J’y suis restée deux semaines. Je ne me sentais pas entièrement à ma place pourtant je me suis

interdite de baisser les bras. Après tout, j’étais bien là pour apprendre de mes erreurs. Après ces deux

semaines, mon regard sur le métier que j’apprenais a changé. Eh oui, je me suis rendue compte que je devais

acquérir de nombreuses compétences qui ne me servaient que très peu dans mon ancien pays : la gestion

de groupe, l’expressivité, la gestion des apprentissages et de nombreuses autres qualités. Ces compétences,

j’allais devoir les développer pendant le reste de l’année et tout le long des deux années qui viendraient.

Un défi qui ne me paraissait pas insurmontable, loin de là. Par ce stage, j’ai évolué en tant que personne

(Paquay, 2001), j’ai su me mettre en projet professionnel et l’image de moi-même (mes forces et mes

faiblesses) a évolué. Mon sac à dos était bien rempli à ce stade. Une nouvelle pancarte sur le chemin

1 Voir annexe 1

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m’indiquait que j’allais de nouveau passer par une zone appelée sessions d’examen. Ayant déjà une petite

idée de quoi était faite cette zone, je n’appréhendais pas tellement ce passage. Il y a pourtant eu ce moment

où je devais présenter une activité réalisée à la Providence de Wavre lors de l’examen d’AFP. Les professeurs

experts me demandaient d’argumenter pédagogiquement le choix de cette activité. Malgré mon anxiété,

je la défendis du mieux que je pouvais. Finalement, j’ai vécu cet examen comme une belle expérience puisque

j’avais l’occasion de prouver que j’avais progressé dans la compétence gestion des apprentissages et que je

devenais une praticienne artisan (Paquay, 2001) en faisant le lien entre mes acquis théoriques et ma pratique

en stage. Tous les examens ayant été réussis, je sortis de cette nouvelle zone d’examens sereine. Une grande

pancarte au loin m’annonçait que j’allais vers le bachelier 2.

En ce début de bac 2, je connaissais bien ce pays qu’est l’ENCBW. Je connaissais les personnes qui

marchaient autour de moi dans la même direction. Je connaissais les paysages et les décors. J’étais encore

fortement dans le stade de consolidation (Wheeler, 19922) de mon sentiment de compétence en tant que

future enseignante. Je marchais avec plus de confiance mais aussi avec l’espoir d’être confortée dans mon

choix de direction. Je m’apprêtais à vivre deux nouveaux stages, cette fois seule, dans un nouveau petit pays

proche de celui de mon enfance et de mon adolescence. Là-bas, je fis la connaissance d’une experte, une

institutrice maternelle. Sa façon de voir le métier m’a impressionnée. J’ai vu en elle un modèle à suivre.

Pendant deux périodes, une d’une semaine et demi et une autre de deux semaines et demi, j’ai pu m’essayer

à ce métier qu’est institutrice préscolaire avec l’aide et les conseils très précieux de cette experte. J’ai pris

confiance en moi, j’ai appris à me libérer un peu plus, je me sentais investie et à ma place dans ce chouette

petit pays. Ce fut le premier stage que j’appréciais vraiment et la première rencontre qui me paraît

déterminante dans la construction de l’enseignante et de la personne que je deviens. Je sentais que j’évoluais

bien en tant que praticienne réflexive (Paquay, 2001), j’étais en effet plus attentive aux effets des activités

que je présentais aux enfants. Je voyais plus clairement mes points forts et les domaines dans lesquels je

devais m’améliorer. L’institutrice experte, par sa franchise et sa bienveillance, m’a beaucoup aidée dans cette

prise de conscience de l’évolution de ma personne.

Avec des personnes expertes de l’ENCBW, mes camarades et moi sommes allés dans un petit pays :

le pays de la pataphonie. Dans ce petit pays, des experts nous montraient comment faire de la musique

avec presque tout (ou presque rien, finalement). Mes sens en éveil, je pris le maximum d’idées et de souvenirs

que j’enfouis avec entrain dans mon sac à dos. Des idées et des souvenirs que je ressortirai certainement tout

au long de mon chemin.

Mon parcours dans le bloc 2 touchait à sa fin. Il ne restait que la zone de session d’examens à passer. Un

examen me faisait particulièrement peur : celui de l’épreuve intégrée lors duquel je devais me présenter

dans la peau d’une enseignante réalisant une réunion pour les parents des enfants de sa classe. Malgré le

2 Voir annexe 1

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stress que je pouvais ressentir tout au long de cette présentation, cette épreuve m’a poussée à me surpasser

dans l’argumentation de mes choix pédagogiques mais aussi dans ma position de future enseignante. Je me

suis rendue compte que j’étais capable de défendre mes idées. C’est une expérience que je garde avec soin

dans mon sac de voyage.

Quelques temps avant de passer le panneau bloc 3, certains experts de l’ENCBW nous parlaient d’un projet :

aller chercher des nouvelles expériences dans un autre pays, beaucoup plus éloignés et différents de ceux

déjà visités. Je m’arrêtais sur mon chemin pour les entendre nous présenter ce projet. Après maintes réflexions,

je me suis rendue à l’évidence qu’il était préférable pour moi de continuer à récolter de nouvelles expériences

dans des pays qui m’étaient familiers, similaires à ceux que j’avais déjà connus. C’est dans cet état d’esprit

que je me décidais à passer devant le panneau qui indiquait le bloc 3.

Après avoir dépassé ce panneau, je pris conscience de tout le chemin parcouru pendant les deux

années précédentes. J’avais fait les deux tiers de mon voyage à l’ENCBW. Je me sentais plus forte et pleine

d’énergie pour commencer cette dernière étape de mon parcours. Pourtant alors que je marchais avec

empressement, quelque chose me taraudait… Je me posais mille questions sur l’après ENCBW. Etais-je

vraiment prête à changer de pays ? Avais-je l’impression d’avoir rassemblé assez d’expériences à l’ENCBW

pour continuer mon chemin dans d’autres pays en tant qu’experte ? En y réfléchissant, je pris conscience que

j’allais encore apprendre, et cela toute ma vie même en étant considérée comme experte. Je voyais presque

le bout de l’ENCBW mais il y avait ce panneau qui indiquait un petit détour (toujours dans l’ENCBW) et qui

attirait fortement mon attention. Ce détour était appelé la passerelle primaire. Ce n’était pas le genre de

détour qui ne servirait à rien, qui me retarderait et allongerait mon chemin. Non, c’était un détour qui

permettait de connaître de nouvelles expériences avec de nouvelles personnes, des experts différents de

ceux que nous avions connus et qui venaient d’autres pays. La passerelle primaire me permettrait de

travailler dans davantage de pays plus tard. Si j’arrivais à la fin de cette passerelle, je pourrais travailler

avec des enfants plus âgés, des apprentissages bien différents que ceux que je donnais dans les petits pays

dans lesquels j’avais eu l’occasion d’aller lors de mes stages. Je gardais la possibilité de faire ce petit détour

d’un an dans le coin de la tête.

Les personnes chargées de nous outiller lors de cette dernière étape, les experts de l’ENCBW, étaient des

personnes que j’avais déjà eu l’occasion de croiser depuis le début de mon chemin dans ce pays. Ils

renforçaient principalement les connaissances acquises lors de ces deux étapes du séjour à l’ENCBW. Je

m’arrêtais exactement comme les étapes précédentes pour prendre le maximum d’informations que je

plaçais ensuite dans mon sac de voyage. Mais cette fois, j’avais vraiment l’impression que je devais être

attentive à tous les détails, à tous les conseils. Comme si je prenais réellement conscience qu’ils me serviront

très prochainement, lorsque je quitterai le pays.

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Les experts de l’ENCBW nous ont alors donné l’occasion d’aller dans un des petits pays où l’on pouvait

s’exercer à enseigner à des enfants plus âgés dans des classes de primaire. L’idée m’intéressait. De plus j’y

voyais la chance d’avoir un aperçu de ce à quoi pouvait me servir le détour passerelle. J’ai vécu cette

expérience de manière positive même si je me trouvais dans une classe plutôt difficile. J’ai fait la rencontre

de l’institutrice experte qui ne me donnait pas seulement des conseils, mais m’écoutait et me racontait toutes

les expériences (les bonnes comme les plus mauvaises) qui remplissaient son sac de voyage. J’ai réunis nos

expériences partagées et je les ai rangées soigneusement dans mon sac. En prenant du recul, ce stage ne

m’a pas aidée à prendre une décision pour l’après bloc 3. Je n’avais eu qu’un bref aperçu de ce que ça

représentait. J’avais pris pourtant la décision de continuer mon chemin à l’ENCBW et de passer par ce petit

détour.

Je continuais à avancer sur mon chemin. La zone session d’examens de Noël passée, il ne restait qu’à réaliser

des stages dans plusieurs petits pays. Le premier, bien que long et fatigant, m’apporta beaucoup. Je me

sentais différente, vue différemment par les experts enseignants et les parents des petits enfants. Pour eux,

j’étais presque une experte et on me considérait comme telle. Je ressentais réellement leur confiance en moi

et leur envie de partage d’expériences avec moi. Il m’est arrivé, davantage lors de ce dernier stage, de

m’arrêter sur mon chemin pour partager les expériences accumulées dans mon sac de voyages avec celles

de parents ou d’enseignants. Je me sentais évoluer en tant qu’actrice sociale (Paquay, 2001), notamment

pour la négociation d’un projet de classe avec les enfants mais aussi avec l’institutrice maternelle. J’avais

encore plusieurs lacunes mais j’étais prête à en découdre et à progresser. J’avançais encore et encore,

croisant la route de nombreuses personnes, partageant mes expériences avec certaines. J’ai eu l’occasion

d’expérimenter la psychomotricité relationnelle qui m’a donné une autre vision de la psychomotricité. Une

façon de travailler plus proche de la psychologie tout en restant dans la motricité. Ce stage m’a permis

d’envisager la relation à l’enfant différemment : en essayant d’identifier les émotions et les angoisses

derrière les comportements relationnels et moteurs. Je me sentais de plus en plus dans le stade de maturité

(Wheller, 1992), j’étais davantage attentive aux problèmes d’apprentissages des enfants et à leurs

caractéristiques individuelles. Voilà une expérience qui prenait de la place dans mon sac !

Je continuais sur mon chemin pleine de confiance. Les experts de l’ENBCW nous demandaient de choisir

chacun une direction légèrement différente. En effet, nous devions choisir une option. Je choisis de m’orienter

vers l’option Français langue d’enseignement et Diversité culturelle. Cette option m’intéressait particulièrement

parce que je la trouvais très ancrée dans la réalité de l’école d’aujourd’hui. J’ai pu bien prendre conscience

de cette diversité culturelle et de ce que cela implique lors du stage optionnel dans un autre petit pays.

Après ce stage riche en expériences et conseils, je me sentais prête pour cette nouvelle zone à franchir qui

s’appelle Ecriture du TFE…

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1. Introduction au travail

1.1. Contexte de stage :

Mon choix d’option s’est porté sur l’option FLE (Français Langue d’Enseignement) et Diversité

culturelle. Ce choix a été encouragé par la vision que j’ai de l’école d’aujourd’hui : une école multiculturelle.

Ayant fait des stages avec des classes riches en cultures et langues différentes, je voulais en savoir un peu

plus et avoir l’occasion de me centrer sur ce sujet. De plus, je me suis toujours posée beaucoup de questions

sur la gestion des langues par les enfants allophones, bilingues, plurilingues.

Je devais donc trouver un lieu de stage qui correspondait à cette option et sur lequel je m’appuierai

pour l’écriture de mon travail de fin d’étude. Nous avions la possibilité de réaliser ce stage en binôme pour

nous permettre de travailler avec de petits groupes d’enfants et de porter un regard davantage individuel

que si nous avions le grand groupe-classe.

Mon binôme et moi sommes arrivés dans une classe d’enfants en accueil et en 1ère année maternelle.

Ce qui m’a frappée lors des premiers jours d’observation est la très grande palette de niveaux des enfants.

J’ai centré mon observation sur le niveau de langage, la façon dont ils entraient en contact avec les autres

enfants et l’adulte référent ainsi que leur place dans le groupe-classe. J’ai pu également observer une

grande diversité culturelle. En effet, lors du temps d’accueil, certains parents qui restaient un moment en

classe avec leur enfant, ne leur parlaient pas dans la langue d’enseignement, le français donc, mais dans

leur langue maternelle. Cette situation m’a tout de suite intéressée. Tout en ayant un regard global pour

l’ensemble du groupe-classe, je m’intéressais particulièrement à ces enfants. Ils étaient quatre à parler une

langue différente du français avec leurs parents.

J’ai pu tirer un premier profil pour ces quatre enfants avec l’aide de ma maître de stage qui a partagé avec

moi ses observations et ses connaissances sur ces enfants. De plus, j’ai eu la chance de discuter une quinzaine

de minutes avec chacun des parents qui ont très gentiment répondu à quelques-unes de mes questions. Tout

au long du stage, j’ai observé les enfants lors des moments en grand groupe-classe mais aussi en petits

groupes de six. J’avais soit un groupe constitué d’un ou deux enfants que je souhaitais observer avec d’autres

enfants de la classe, soit le groupe avec ces quatre enfants seulement. J’ai ainsi pu ajouter mes observations

personnelles aux premières informations que l’on m’a données.

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Comment Favoriser la bonne prise de parole chez les enfants allophones en classe maternelle ?

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Par tie 2 : L’objet central de mon travail

2.1. Profils des enfants

Après une semaine de stage, j’ai rassemblé toutes les informations que j’avais pu accumuler sur les quatre

enfants sur lesquels je m’étais fixée. Ces profils regroupent les observations que j’ai pu réaliser, des

informations données par ma maître de stage et des informations que j’ai pu récolter grâce aux parents qui

m’ont gentiment consacré un peu de leur temps.

Em (3 ans, née en Belgique d’un papa belge et d’une maman slovaque)

Informations issues d’une discussion avec sa maman :

Em est l’enfant d’une maman slovaque et d’un papa belge, elle nage dans deux langues depuis sa

naissance : le slovaque et le français. Elle associe une langue à chaque parent. Lorsqu’elle est uniquement

avec sa maman et sa famille du côté maternel, elle parle slovaque. Mais lorsqu’une personne francophone

est présente, elle parle français avec sa maman. Elle a tout de même des difficultés à comprendre sa mère

quand celle-ci lui parle en français. Il lui arrive quelques fois de mélanger les deux langues, mais cela reste

très rare. Après un long séjour en Slovaquie, cette langue s’est développée davantage que le français. Mais

à son retour, Em s’est vite réhabituée au français. Avec sa scolarité qui a commencé depuis cette année, elle

a un bon niveau en français même s’il est moins développé que le slovaque. Elle est très bavarde chez elle,

en particulier en slovaque.

Mes observations et informations données par ma maître de stage :

D’après mes observations, Em a les capacités de s’exprimer et de se faire comprendre des autres : enfants

comme adultes. Elle semble cependant avoir du mal à prendre la parole alors que d’après sa maman, elle

parle beaucoup à la maison (en slovaque). J’ai pu remarquer qu’elle se faisait extrêmement discrète en

grand groupe. Mais lorsqu’elle a la possibilité de se retrouver dans un petit groupe avec des enfants qui

parlent peu, la langue se délie plus facilement et elle ose parler même si c’est encore très timide. Cela se

repère par son attitude : épaule rentrées, regard un peu fuyant. Selon moi, elle a de bonnes bases au niveau

du langage mais n’ose pas parler lorsqu’elle ne se sent pas en confiance. Elle connaît relativement bien le

lexique lié à l’école. Je remarque aussi qu’elle prend un petit temps avant de répondre ou de commencer à

parler. Cela me laisse penser qu’elle s’accorde un moment de réflexion ou peut-être fait-elle la transition

entre le slovaque et le français. Je pense que cela prouve qu’elle se rend bien compte de ce qu’est une

langue et qu’elle dissocie bien la langue d’enseignement de sa langue maternelle.

Exemple d’un dialogue :

Em (montrant une photo dans l’album) : Ça c’est Nolan

Moi : C’est qui Nolan ?

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Em : Mon petit frère. Ça c’est chez Ikea. J’ai été avec maman au Ikea. (…) Là, j’étais malade.

Xi (3 ans, née en Belgique de parents chinois partis de Chine depuis une dizaine d’années)

Informations tirées d’une discussion avec son papa :

Xi est une petite fille de parents chinois. Ils parlent donc la langue chinoise avec leur fille. Bien ancrée dans

sa culture à la maison, sa famille est tout de même très ouverte à la culture belge. Xi n’a pas eu beaucoup

de difficultés à s’intégrer socialement dans le système scolaire même si elle est restée mutique durant les

premiers mois de sa scolarité. Elle sait bien différencier le chinois et le français puisqu’elle associe chacune

des langues à un environnement (la maison pour le chinois, l’école et l’extérieur de la maison pour le français)

mais elle les associe aussi aux personnes (ses parents et sa famille pour le chinois, les autres personnes pour

le français). Cependant, elle a l’occasion de parler chez elle en français avec sa grande sœur qui a une

connaissance presque parfaite du français.

Mes observations et informations données par ma maître de stage :

Les premiers jours du stage optionnel, elle gardait une certaine distance avec moi et n’osait pas me parler.

J’ai cependant remarqué qu’elle allait facilement vers les autres enfants et entrait naturellement en contact

par le langage avec eux. Particulièrement lors des jeux libres. Ce fait m’a moins frappé lors des activités

dirigées en classe. A partir du moment où elle se sentait un peu plus en confiance avec moi, j’ai pu

communiquer avec elle lors du moment d’accueil le matin mais aussi pendant les activités. Elle s’est avérée

être une petite fille, bien que discrète, curieuse et appréciant le contact. En l’écoutant plus particulièrement,

j’ai eu du mal à comprendre ce qu’elle me disait. Ma maître de stage ne sait pas si c’est un souci d’articulation

ou si elle mélange les deux langues et parle un peu en chinois en classe. De plus, j’ai l’impression qu’elle se

rend compte qu’elle n’est pas toujours comprise car lorsqu’elle fait des demandes, elle ne fait que des mots-

phrases.

Exemple de dialogues avec XI :

1. Moi : Qu’est-ce que tu fais avec les baguettes ? Comment tu les utilises ?

Xi : Manger.

2. Xi : Ça ! (en montrant une marionnette)

Moi : Qu’est-ce que tu veux faire avec la marionnette ?

Xi : Ça !

Moi : Tu veux que je la mette ?

Xi : Oui.

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Mi (3 ans, née en Belgique, ses parents sont turcs)

Informations tirées de la rencontre avec sa maman :

Elle parle uniquement la langue turque avec ses parents. Mi est la plupart du temps, plongée dans un

environnement turcophone. D’après ses parents, elle est très en mouvements à la maison et parle sans arrêt.

Mes observations et informations données par ma maître de stage :

Elle est très discrète en classe mais attentive. Au début de sa scolarité, elle a eu du mal à entrer en contact

avec les autres. Mais petit à petit sans forcément communiquer par la parole avec les autres enfants, elle a

fini par bien s’intégrer au groupe. Elle fait peu de phrases complètes ou oublie certains mots comme des

déterminants ou des verbes. Elle ose prendre la parole en groupe mais pas assez fort pour qu’on l’entende.

Elle a un comportement très différent à l’école par rapport à celui qui est décrit par sa maman, chez elle.

J’ai remarqué qu’elle a des difficultés à prononcer certains mots et que les mots de certaines de ses phrases

n’étaient pas dans le bon ordre. J’avais souvent des difficultés à la comprendre, ne sachant pas si elle avait

des problèmes d’articulation ou parlait dans la langue turque. Cependant, elle a l’air de bien comprendre

ce qu’on lui dit.

Exemple d’un dialogue ave Mi :

Moi : Tu étais triste quand ?

Mi : Maman y est méchante

Moi : Et qu’est-ce que tu as fait ?

Mi : J’ai pleuré et ya maman est méchante

Moi : Et tu te sentais comment ?

Mi : A soir, j’ai pleuré sur le sable

Am (3 ans, née en Belgique de parents marocains)

Informations récoltées auprès de son papa :

Ses parents sont d’origine marocaine mais ont vécu une partie de leur vie en Espagne avant de s’installer en

Belgique où Am est née. Ses parents ont l’habitude de parler les deux langues ainsi que le français à la

maison même si la langue arabe est prédominante. Il leur arrive souvent de faire une phrase composée de

mots issus des trois langues. Ils disent le mot dans la langue qui leur vient en premier à l’esprit et qui

correspond le plus au sens qu’ils veulent donner à ce mot. Au départ, Am ne parlait seulement qu’en français

et en espagnol. Un peu avant ses trois ans, elle ne voulait plus parler en arabe jusqu’au jour où elle et sa

famille se sont rendus au Maroc pendant les vacances. D’après son père « elle connaît un petit peu dans

chaque langue ».

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Observations et informations données par ma maître de stage :

Am n’a pas de difficultés à entrer en contact avec les enfants, particulièrement lors des jeux ou des activités

libres. Cependant, on l’entend très peu prendre la parole en grand groupe dans des activités plus formelles.

Lors des activités de langage par petit groupe, elle parlait, même si elle restait assez timide. Elle se trompe

souvent de genre, les mots de certaines de ses phrases ne sont pas dans le bon ordre et elle oublie des mots.

A certains moments, lorsque je lui pose des questions, elle me répond positivement d’un « Sé ». Ma maître

de stage (et j’ai pu le constater par moi-même) pense qu’elle mélange très souvent les trois langues qui lui

sont parlées à la maison.

Dialogue avec Am :

Moi : Qu’est-ce que tu vois sur l’image ?

(Am montre une poule sur le toit d’une niche)

Moi : Qu’est-ce que c’est ?

Mi : Elle est sortie de son maison.

Moi : Et comment on appelle cet animal ?

Mi : Un poule

Moi : Qu’est-ce que tu vois d’autre ?

Am : Partir. Est parti le camion.

Moi : Le camion est parti ?

Am : Et j’ai vu chat.

Moi : Qu’est-ce qu’il fait ?

Am : Il a sorti de sa maison.

2.2 Questionnement

Toutes ces informations m’ont amenée à me poser de nombreuses questions :

- Dans quelle langue pensent-ils ?

- Quel travail font-ils pour passer d’une langue à une autre ?

- Partent-ils de leur langue maternelle pour apprendre le français, langue d’enseignement ?

- La langue maternelle peut-elle gêner la bonne acquisition du langage ?

Pour éviter de me disperser, j’ai dû faire un choix de questionnement sur lequel je devais centrer mes

recherches. Les questions auxquelles j’aimerais pouvoir répondre sont :

- Quel impact a la langue maternelle sur l’acquisition de la langue d’enseignement

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- Comment aider l’enfant ayant une autre langue d’enseignement que le français à prendre la

parole ?

2.3. Définitions.

2.3.1. TERMES ET DEFINITIONS.

Avant toute recherche et hypothèses par rapport aux questions que je me pose, il me semblait très important

d’être au clair avec certains termes et définitions. La théorie insérée dans ce travail est en lien avec la

problématique travaillée et me semble indispensable.

Je me suis tout d’abord intéressée au terme Allophone. Terme que j’ai beaucoup entendu lors du Module FLE

et Diversité culturelle mais aussi lors de mes stages. Mais ne sachant pas exactement quels enfants étaient

concernés par celui-ci, voici des définitions tirées de différentes sources :

Allophone se dit d’une « personne dont la langue maternelle n’est pas celle de la communauté dans

laquelle elle se trouve. » (Larousse, 2004, p.55)

D’après le Larousse « élève allophone est un enfant dont la langue maternelle, pratiquée dans son

quotidien familial, n’est pas la langue française. » (224, p.55)

Par ces définitions, je comprends donc que les enfants auxquels je m’intéresse sont appelés allophones

puisqu’ils ont tous une langue maternelle différente du français, langue d’enseignement. Mais qu’appelle-t-

on langue maternelle ?

Selon le Larousse, la langue maternelle est « la première langue apprise par l’enfant. » (2004,

p.586)

La maîtrise de la langue maternelle est la maîtrise des normes d’usage cette langue et de la culture

correspondant à la communauté.

Si je prends le cas de Em, qui vit en contact avec la langue maternelle de sa maman (le slovaque) et la

langue maternelle de son papa (le français) depuis sa naissance, on peut dire qu’elle se trouve entre deux

langues même si sa première langue, sa langue maternelle donc, est le slovaque. Ne sachant pas si je devais

la considérer comme allophone, je me suis renseignée sur le terme bilinguisme. Voici les définitions que j’ai

trouvées :

Bilinguisme : Selon Le Larousse, le bilinguisme est une pratique de deux langues par un individu ou

une collectivité. Il définit le terme bilingue comme un individu qui est entre deux langues. (2004,

p.135)

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Selon Barbara Abdelilah-Bauer, le bilinguisme (et plurilinguisme) « c’est grandir en parlant plus d’une

langue. » C’est aussi « posséder deux langues à des niveaux de compétences différents. » (2006,

p.24) Le bilinguisme équilibré est rare.

La situation de Xi et de Mi qui n’ont connu qu’une seule langue avant leur entrée en milieu scolaire doit être

nuancée vis-à-vis du terme bilinguisme. Je les qualifierais, d’après la signification que je donne au terme

bilinguisme, de bilingues en devenir. En effet, malgré leurs contacts avec une langue unique avant trois ans,

elles sont confrontées presque autant de temps au français qu’à leur langue maternelle même si, bien

entendu, les situations langagières sont très différentes.

Dans le cas de Em, je la considérerais comme bilingue précoce car ce terme est défini comme suit :

Comme le laisse entendre Barbara Adelilah-Bauer si le contact avec une seconde langue se fait avant 6 ans,

alors l’enfant est bilingue précoce. Sinon, il est bilingue tardif. (2006, p.27)

Si je prends le cas de Am, je peux la considérer comme plurilingue puisqu’elle entend et parle trois langues

en tout.

Enfin, je me suis demandée si, au sujet de ces quatre enfants de ma classe de stage, je devais parler

d’apprentissage ou d’acquisition de la langue scolaire.

L’acquisition, d’après Jean-Michel Robert va se faire par la communication quotidienne de la façon dont

l’individu perçoit comme la plus efficace. C’est-à-dire qu’il peut utiliser un langage simplifié s’il considère qu’il

est bien entré en contact et compris par l’autre. Il a le choix de stopper cette acquisition s’il ne ressent pas le

besoin d’en connaître plus. L’acquisition se fait de manière inconsciente : en écoutant et en entrant en contact

oralement avec les autres. L’apprentissage du langage se fait par l’intermédiaire d’outils linguistiques

spécifiques lors de temps formels (moments, activités dont l’objectif principal est d’observer et travailler le

langage des enfants) et dont l’enseignant vise des objectifs en accord à la norme de la langue, et ne servant

pas seulement à communiquer. L’acquisition de la parole est avant tout le désir de communiquer avec les

autres êtres humains. (2009, p.11-12)

2.3.1. PRISE DE POSITION

Les quatre enfants que j’ai observés et avec qui j’ai réalisé des activités ont tous une histoire différente et

ont tous des particularités culturelles et linguistiques différentes.

Si je reprends le cas de Xi et de Mi, je peux dire qu’elles nageaient principalement dans une seule langue

avant leur scolarisation. Même si pour la première, la langue maternelle est le chinois et l’arabe pour la

seconde.

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En revanche, Em, elle, était déjà en contact avec la langue d’enseignement transmisse par son papa même

si sa langue maternelle reste le slovaque. Je peux dire d’elle, avec certitude, qu’elle est bilingue et plus

précisément bilingue précoce puisqu’elle en contact et parle les deux langues depuis sa naissance.

En ce qui concerne Am, elle parle trois langues depuis sa naissance même si l’arabe reste sa langue

maternelle. Je ne suis pas certaine que le terme plurilingue lui corresponde. En effet, d’après son papa, elle

parle un peu dans chaque langue. D’après mes informations et observations, elle semble mélanger les trois

langues sans faire clairement de distinction. Je pense alors que le terme plurilingue, pour elle, doit être

nuancé.

Sans en être certaine, il y a un risque qu’Am devienne plurilingue soustractif. Selon Agnès Florin, c’est « la

maîtrise insuffisante dans chaque langue ». Mais les résultats sont à observer sur du long terme. Là aussi, je

tiens à nuancer ce terme vis-à-vis de sa situation. (Florin, 2011, p.54)

Pour pouvoir parler de ces quatre enfants en utilisant le même terme, même si je suis consciente des

différences de leur situation linguistique, j’ai décidé d’utiliser l’adjectif allophone. En effet, j’ai fait ce choix

parce que ces quatre enfants ont tous une langue maternelle différente de la langue d’enseignement, ce qui

correspond à la définition d’allophone.

Je situerais la situation que vivent Am, Mi, Xi et Em entre l’acquisition et l’apprentissage de la langue scolaire.

Même si l’apprentissage se fait davantage par acquisition.

2.4 Parler une autre langue à la maison, quel impact ?

Je me suis alors posé les questions :

- Quel réel impact a la langue maternelle sur la manière de communiquer en classe, dans la langue

d’enseignement.

- Quel travail supplémentaire y a-t-il à réaliser par rapport aux monolingues ?

- Y a-t-il plus d’avantages ou plus d’inconvénients à avoir deux (ou plusieurs langues) dans deux

environnements distincts (maison et école) ?

2.4.1. LE PASSAGE D’UNE LANGUE A L’AUTRE .

Une langue, ce n’est pas seulement une façon de parler. Elle caractérise une manière de vivre, d’établir des

relations. Elle est liée au social et à une histoire. Une langue représente tout un monde, a son identité propre.

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Lors de l’entrée à l’école, l’enfant allophone doit réaliser tout un travail. Il doit passer d’un monde à un autre.

Si l’enfant est bien accueilli et ses particularités liées à sa langue et à sa culture également, il n’y a pas de

soucis et l’enfant réalise ce passage facilement. En effet, l’enfant de l’âge maternelle, grâce à la plasticité

de son cerveau, à ses capacités linguistiques qui ne sont pas encore inhibées, va assimiler le code de la

langue d’enseignement sans trop de difficultés.

Je peux mettre en parallèle la situation de Em qui n’a pas beaucoup de difficultés à passer du slovaque au

français (et l’inverse). Le fait de parler le français avec son papa joue, bien entendu, un grand rôle.

D’après une hypothèse du professeur Jim Cummins qui semble aujourd’hui avoir été vérifiée, les compétences

de la langue seconde sont en partie déterminées par les compétences déjà atteintes en langue maternelle.

L’enfant s’appuie donc sur sa langue maternelle pour acquérir et progresser dans cette seconde langue qui

est celle de l’enseignement. (citée par A. Florin, 2011, p. 54)

2.4.2. L’IMPACT DU BILINGUISME .

Un enfant qui se situe entre deux langues, un bilingue donc, a conscience de ce qu’est une langue : alors que

les monolingues associent un signifié à un seul signifiant l’enfant bilingue, lui, sait qu’un signifiant peut être

représenté par plusieurs signifiés.

Exemple : Pour un enfant bilingue français-espagnol, le signifiant (image mentale de l’animal) « chat » est

associé non seulement au mot français « chat » (un signifié) mais aussi au mot espagnol « gato » (l’autre

signifié).

Cependant, outre le fait que l’enfant fasse facilement le passage entre les deux langues, il aura du mal à

s’exprimer dans la langue d’enseignement au début de la scolarisation. L’enseignant se doit de faire un

travail avec lui. L’assimilation se verra davantage sur le long terme.

2.4.3. LES OBSTACLES A LA BONNE ACQUISITION DE LA LANGUE.

Si l’enfant ne fait pas bien la distinction entre les langues, cela peut poser problème dans le sens où il risque

de les mélanger souvent. Il n’arrivera pas à se faire comprendre sans réellement avoir conscience du

pourquoi. Cela peut arriver si les parents parlent deux langues et les mélangent eux-mêmes. L’enfant n’a

pas de repères sur lesquels s’appuyer pour associer chacune des langues car il y a confusion de celles-ci. La

bonne acquisition de la langue d’enseignement sera donc plus laborieuse.

Je peux ici faire le lien avec la situation d’Am dont les parents lui parlent dans trois langues différentes.

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Là où l’enfant peut encore rencontrer des difficultés est la situation où il y aura une hiérarchie des langues.

C’est-à-dire que la langue maternelle qui peut paraître « moins prestigieuse » aux yeux de la

famille/communauté ou de l’école est reniée au profit de la langue d’enseignement (et la langue officielle

du pays dans lequel la famille se trouve). Il y a conflit des deux langues. Cette situation peut avoir de lourdes

conséquences au niveau linguistique, affectif et cognitif. Tout cela posera certainement problème dans

l’acquisition de la langue d’enseignement car l’enfant s’appuie sur sa langue maternelle pour assimiler la

langue d’enseignement.

D’un point de vue purement linguistique, l’enfant peut rencontrer des difficultés au niveau du lexique auquel

il n’a pas été confronté autant que les autres enfants. Cela dépend aussi de sa communauté, du mode de

vie de sa famille avant et pendant sa scolarisation : sa famille peut être ancrée dans la culture de la langue

et l’enfant a peu été en contact avec la langue d’enseignement. A l’inverse, une famille très ouverte à la

culture du pays de la langue d’enseignement permet à l’enfant de connaître un lexique plus complet à

l’entrée en classe maternelle. L’enseignant doit lui permette de rattraper ce léger retard en le mettant face

au lexique qu’il emploiera surtout en classe. Il est important que celui-ci soit bien assimilé pour qu’il puisse

bien se faire comprendre.

Pour communiquer oralement l’enfant doit disposer :

D’un code, système de symboles ou signes qui transmettent une information.

D’un message, ce qu’il va communiquer.

Et d’un canal, qui est ici l’oral (sera aussi l’écrit, plus tard).

Or, avant d’être scolarisés, les enfants allophones de ma classe nagent dans une autre langue. Et cette autre

langue a un code différent et le message est peut-être transmis d’une autre manière. La prononciation, les

sons émis et les intonations ne sont pas les mêmes, la musicalité de la langue est différente.

Selon Barbara Abdelilah-Bauer, les stades de développement langagier de la langue française sont

similaires à ceux d’une autre langue. Les notions comme le temps, l’espace, la relation agent-action, la

causalité sont présentes aussi bien en français que dans les autres langues. Pourtant chacune des langues

va transmettre cette notion dans des structures qui ne sont pas les mêmes. L’ordre des mots ne sera donc

pas identique selon la langue parlée. Les enfants bilingues peuvent donc se tromper dans la structure

de la phrase dans une langue car ils sont influencés par la structure de phrase de l’autre langue.

(Abdelilah-Bauer, 2006)

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2.4.4. CONSTAT.

Je peux donc constater qu’à priori la langue maternelle ne va pas avoir de conséquences négatives sur

l’apprentissage de la langue d’enseignement même si au départ l’enfant peut accuser un petit retard.

Au contraire, l’enfant développe de grandes connaissances métalinguistiques. Cependant, il faut que

l’entourage reste vigilant à des repères linguistiques clairs à l’enfant et à valoriser chacune des langues

apprises à l’enfant s’il veut garantir la bonne acquisition de ces langues par l’enfant.

2.5. Les conditions pour aider la prise de parole dans la langue d’enseignement.

2.5.1. SECURITE AFFECTIVE

Pour que les enfants osent parler et que leur langage se développe il leur faut posséder des moyens

d’expression et de communication comme du vocabulaire ainsi que la syntaxe (Mettoudi, 2008). Mais

avant toute chose, l’enfant doit se sentir en sécurité et avoir une bonne image de lui-même. Les parents

des enfants observés ont une autre langue mais aussi une autre culture qu’ils perpétuent à la maison

avec leur enfant. Ne pas les couper entièrement de cette culture qui leur est propre est primordial. Il

leur est déjà difficile de se construire une identité à partir de deux langues et de deux cultures. En effet,

l’enfant ne pourra pas s’appuyer sur sa première langue et donc ressentira l’apprentissage de la langue

d’enseignement comme s’il devait ré-apprendre à parler. Ce qui est très difficile face à des enfants qui

ont le niveau langagier correspondant à celui d’un enfant de trois-quatre ans.

L’enseignant doit pouvoir montrer aux enfants, mais aussi aux parents, qu’ils sont acceptés avec leur

langue et leur culture. L’enseignant doit particulièrement les encourager à parler dans la langue

maternelle avec leur enfant à la maison pour que celui-ci puisse s’appuyer dessus.

Je peux donner l’exemple ici de ma maître de stage qui permet aux parents de parler dans leur langue

maternelle à leur enfant en clase et qui les encourage à leur parler dans cette langue chez eux.

2.5.2 ETAYAGE DE L’ENSEIGNANT

En ayant observé les enfants allophones dans les activités de langage que j’ai réalisées en stage3, j’ai

constaté réellement que la syntaxe devait être travaillée. L’enseignant doit aussi veiller à nourrir le

lexique des enfants. Même s’il doit garder un œil sur l’articulation et la prononciation, ceux-ci se

développeront à force d’écoute.

3 Voir préparations en annexes 2 et 3.

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Pour aider l’enfant à développer son langage et à le structurer, l’enseignant doit réaliser de multiples

interventions. Bien sûr, il doit tout d’abord encourager l’enfant à parler et valoriser sa prise de parole

même si elle n’est pas très grande. Par des relances, il va pousser l’enfant à expliciter. Par des feedbacks

correctionnels, il va à la fois prouver à l’enfant qu’il a compris ce qu’il lui a dit et l’encourager à continuer

à s’exprimer, mais il va aussi donner une meilleure structure à son message.

Exemple : -Enfant : Yé a mangé chez maman.

-Enseignante : Super ! Tu as mangé chez maman.

Parce que les enfants ne savent ou n’osent pas parler, l’enseignant doit savoir attendre que la parole

vienne sans brusquer les enfants. C’est pourquoi, encore une fois, les petits groupes de parole sont à

privilégier. En effet, en grand groupe, il est très difficile pour l’enseignant d’offrir un moment de parole

de qualité aux enfants bilingues qui en ont particulièrement besoin. De plus, ils sont souvent brusqués et

interrompus par les enfants leaders qui ont du mal à prendre leur mal en patience.

2.6. Déroulement et objectifs de deux activités mises en place en stage

En prenant en compte les premières observations et les informations recueillies lors des premiers jours

d’observation, j’ai réalisé des activités qui, je l’espérais, toucheraient à leur affect et déclencheraient la

parole. L’organisation des groupements ne m’a pas permis d’exploiter au mieux des moments en petits

groupes car je n’avais pas avec moi seulement les enfants allophones. J’en avais souvent qu’un seul ou

deux par groupe, mélangés à des enfants francophones et parfois certains avec un caractère de leader.

J’AIME/ JE N’AIME PAS 4

Pourquoi ? Objectif ?

Les enfants devaient choisir une image et m’expliquer pourquoi ils aimaient ou pourquoi ils n’aimaient

pas celle-ci. Les thèmes représentés sur les images (animaux, personnages et nourriture) sont les thèmes

qui ont le plus de succès chez les enfants de trois-quatre ans. Ces thèmes sont souvent déclencheur de

paroles pour cette tranche d’âge. N’ayant eu que très peu de temps pour les observer individuellement

et pour noter les situations propices à la discussion pour chacun d’entre eux, j’espérais qu’au moins un

des thèmes représentés sur les images les ferait réagir. De plus, je me demandais si certaines images

4 Voir déroulement en annexe 2

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pouvaient faire écho à leur culture ou à celle de leurs parents. Le choix de l’objet autour duquel l’enfant

va parler a un impact et va jouer sur sa motivation à prendre la parole.

Résultats :

Lorsqu’ils se retrouvaient parmi des enfants leaders, les enfants allophones étaient discrets mais

observaient et restaient très attentifs à ce que disaient les autres enfants.

Mi a choisi une image de gâteau au chocolat. Quand vient son tour de parole, elle explique qu’elle

aime bien les gâteaux au chocolat parce que sa maman aime en manger. Elle dit : « Maman i aime bien

manger, moi aussi aime bien manger ». Elle essaie de m’expliquer comment on fait un gâteau mais je

ne comprends pas tout ce qu’elle me dit. Elle me raconte ensuite à propos de l’image d’une

araignée : « Moi i aime araignée, maman i adore les araignées ». Elle veut m’expliquer quelque chose

en commençant une phrase par « parce que » mais je n’arrive à comprendre la suite.

DISCUSSION AUTOUR DE L’ALBUM DE MIMI 5

Mimi est la mascotte de la classe. Depuis le début de l’année scolaire, les enfants, chacun à leur tour,

amènent la mascotte chez eux pendant un week-end, Les parents prennent des photos de leur enfant en

compagnie de Mimi lors des moments vécus pendant ces deux jours. Les photos sont collées dans l’album

et accompagnées de commentaires des parents qui décrivent ces moments.

Pourquoi ? Objectif ?

J’ai voulu me servir de cet album comme objet de discussion et mon objectif était de faire parler les

enfants autour de quelque chose qu’ils connaissaient bien et qui partait de leur vécu. De plus le fait

d’avoir un appui supplémentaire pouvait m’aider à comprendre ce qu’ils me disaient. Cela travaille le

langage d’évocation, les temps du passé, les pronoms, le lexique et la syntaxe.

(voir déroulement dans prépa en annexe)

Résultats sur Em :

Elle parle de son vécu : son petit frère, une journée passée au Ikea avec sa maman, une journée à la

piscine : « Là, j’avais mal à la tête. » « Là, j’ai sauté » « Là, j’ai joué » « Là, j’étais mis en étoile »

5 Voir déroulement en annexe 3

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Sachant que c’est une petite fille qui a du mal à s’exprimer, qui n’ose pas, je pense que partir de son

vécu l’a encouragée à la prise de parole. De plus, le fait de devoir expliquer aux autres enfants des

situations qu’ils n’ont pas connues a du sens pour elle. Le fait de regarder les photos lui permet de fixer

son regard sur quelque chose et d’échapper en quelque sorte au regard des autres. Je remarque

également qu’elle sait très bien utiliser le passé composé.

2.6 Activités à réaliser pour aller plus loin.

Parmi l’étendue d’activités qui existe pour faire travailler la langue d’enseignement chez les enfants

allophones (et les autres), j’en ai relevé trois que je n’ai pas eu le temps ou l’occasion de travailler

comme je le souhaitais en classe.

LES ALBUMS POUR APPRENDRE A PARLER (ET L’ORALBUM) :

Pourquoi Les albums pour apprendre à parler ? La lecture d’album est très bénéfique pour l’enfant en

maternelle. Il a de nombreuses qualités que je ne vais pas développer dans ce travail. Cependant, pour

l’émergence du langage chez l’enfant, le « parler écrit » n’est pas le plus efficace. En effet, celui-ci ne

reflète pas le langage oral et donc le langage de communication.

J’ai découvert le livre « La maîtresse, elle est gentille, mais… » de R. Brissiaud 6

C’est un livre avec de grandes images très explicites. Le texte se rapproche plus

du langage oral que du langage écrit. Il permet aux enfants d’intégrer ce

langage oral. Malheureusement, je n’ai pas pu l’exploiter sur le long terme. Je

leur ai lu une fois en grand groupe et une deuxième fois en petit groupe parmi

lesquels il y avait des enfants leaders. Lors du moment en petit groupe, après

leur avoir lu l’histoire, je leur ai demandé de me la raconter comme ils l’avaient

comprise. J’ai remarqué que les enfants avaient plus de facilités avec cet album

que dans un même exercice mais avec un album jeunesse traditionnelle. En effet, ils avaient assimilé le

texte « oral » et s’en servait pour raconter l’histoire. De plus, les images claires facilitent la narration.

L’album « La maîtresse, elle est gentille, mais… » permet aux enfants de réfléchir sur les règles et les

comportements en classe. Cela peut être important pour certains enfants qui ont une culture à la maison

très différente de celle de l’école. De plus, le vocabulaire employé est celui de l’école. Un bon moyen

pour les enfants allophones de l’assimiler.

6 Référence complète dans la bibliographie.

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Comment Favoriser la bonne prise de parole chez les enfants allophones en classe maternelle ?

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Je pense que l’album pour apprendre à parler peut servir à Mi, pour aider au développement de sa syntaxe.

Après avoir écouté plusieurs fois le texte orale, elle pourra s’entraîner à raconter l’histoire et avec le temps

développera sa syntaxe.

Bien que je n’ai pas eu l’occasion de l’utiliser en stage, l’Oralbum est un outil qui me parait aussi très

intéressant pour faire émerger le langage chez les enfants. Il est construit comme l’album précédent au

niveau du texte. Il comporte même trois versions de texte permettant à l’enseignant de choisir celle qui

convient le mieux au niveau des enfants.

L’ALBUM IMAGIER :

Dans un premier lieu, l’imagier est très efficace pour développer le

lexique des enfants. Mais il permet aussi de perfectionner

l’articulation et la prononciation mais aussi la syntaxe car les

illustrations permettent et encouragent la création de phrases pour

expliquer les différentes situations observées. Bien sûr, rien ne se

fait sans l’étayage de l’enseignant, c’est-à-dire l’intervention de

l’enseignant pour le bon apprentissage de l’enfant.

Je pense que l’imagier peut être un bon support pour nourrir le lexique

d’un enfant allophone comme Am qui a du mal avec les genres des mots et dans la prononciation de certains

mots.

LES COMPTINES7:

Tout d’abord, d’un point de vue affectif, les comptines représentent le plaisir collectif, le plaisir d’être

ensemble et d’appartenir à un groupe. Elles apportent une sécurité communicative. Elles aident les

enfants dans l’articulation et la prononciation des mots. Mon expérience en stage m’a prouvé l’efficacité

des comptines. En les observant pendant un moment de chant collectif autour de comptines bien connues

de tous, j’ai pu remarquer que les enfants allophones plutôt silencieux, chantaient sans hésitation. Le fait

d’entendre les mêmes mots et les mêmes phrases à chaque fois qu’ils chantent les mêmes comptines

enrichit leur bagage linguistique. De plus, ils s’approprient la musicalité de la langue propre au français.

7 Voir exemples de comptines en annexe 4

MON PREMIER GRAND LIVRE DE MOTS (CF REF. EN

DANS BIBLIOGRAPHIE

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Il me semble que les comptines jouent un grand rôle dans l’imprégnation d’une seconde langue de

manière ludique.

Je peux faire le lien ici avec Xi, qui d’après son père, chante sans cesse des comptines en français chez elle.

Si j’avais eu l’occasion ou plus de temps en stage, j’aurais expérimenté l’apprentissage d’une comptine

dans la langue maternelle d’un enfant allophone. Je pense que cela aurait amené de la motivation tant

à l’enfant dont la langue de la comptine est sa langue maternelle qu’aux enfants qui n’ont aucune notion

dans cette langue. En effet, cela aurait permis au premier de renforcer son sentiment d’intégration et

d’appartenance au groupe. Les seconds auraient apprécié apprendre à chanter dans une autre langue

mais aussi entrer dans une sorte de partage de culture avec leur camarade.

PRESENTATION D’UN OBJET AUX ENFANTS DE LA CLASSE.

Je n’ai pas eu le temps de réaliser cette activité comme je l’aurais voulu en stage. Les enfants allophones

ont seulement apporté un objet auquel ils tenaient, pour certains propre à leur culture. Ils ont pu présenter

au grand groupe cet objet et expliquer en quoi il consistait ou quelle fonction il avait pour eux. Comme

je pouvais m’y attendre, les enfants n’ont pas présenté spontanément, je devais leur poser des questions

auxquelles ils répondaient d’un simple « oui » ou « non » ou bien à l’aide de mots très courts. Mais j’ai

pu voir leur fierté et leur plaisir à faire passer l’objet aux autres enfants, qui parfois été un peu insolite

(Xi a apporté des baguettes chinoises avec des petits anneaux pour faciliter la prise en main). J’ai tout

de suite pris conscience de l’intérêt de ce genre d’activité. Celle-ci permet à l’enfant de se sentir lui et

sa culture valorisés, le mettre de cette façon en confiance. Elle permet aussi aux autres enfants de faire

de nouvelles découvertes et apprendre beaucoup sur des objets qu’ils n’ont pas l’habitude de côtoyer.

Je pense qu’il y a moyen de faire tout un travail autour de l’apport d’un objet propre à sa culture, à

son histoire (ou seulement un objet auquel on tient). Ce genre d’activité pourrait déboucher sur une

présentation travaillée, sous forme d’un journal TV, d’une exposition pour une autre classe, …

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Comment Favoriser la bonne prise de parole chez les enfants allophones en classe maternelle ?

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Par tie 3: Conclusion

A l’aube de la fin de cette troisième année à l’Ecole Normale du Brabant Wallon, je vais vous

faire part des constats que je peux faire par rapport à ce travail de fin d’études en faisant le lien avec

ma formation. Je vais commencer par faire le point sur ma formation. Je vous expliquerai ensuite ce que

j’ai retenu de ce travail sur la thématique de la prise de parole des enfants. Je vous développerai

ensuite ma mise en projet en tant que future professionnelle de l’enseignement préscolaire, toujours en

lien avec ce que j’ai développé dans ce travail.

Chacune de ces trois années de formation à l’ENCBW m’ont beaucoup apporté. Je pourrais résumer la

première comme l’année de la découverte, l’année des nouvelles expériences. Une année semblable à

l’arrivée dans un pays inconnu avec son langage propre, son fonctionnement et cette nouveauté pour

moi que représentaient les stages. Une année qui était pour moi, le premier aperçu du métier

d’enseignant. Le bac 2 a été l’année où j’ai renforcé les connaissances acquises en première tout en

découvrant de nouvelles manières d’envisager les apprentissages comme la pédagogie du projet. Mais

aussi celle où j’ai vécu une vraie collaboration avec ma maître de stage. La dernière année a représenté

le renforcement des connaissances acquises mais aussi de nouveaux apprentissages comme la

pédagogie du cycle. C’est aussi lors de cette dernière année où j’ai amassé le plus d’expériences dans

des stages très différents les uns des autres.

Arrivée à la fin de cette dernière année, j’ai dû faire le choix d’une question pour la réalisation de ce

travail de fin d’étude en lien avec mon option FLE et Diversité culturelle et mon stage optionnel. Ce stage

se déroulait dans une classe avec des profils linguistiquement et culturellement différents.

J’ai pris conscience de cette multitude de cultures, de langues, d’identités, de niveaux cognitifs et de

langage des enfants durant ce stage optionnel mais aussi lors des nombreux stages que j’ai effectués

pendant ces trois années de formation. Le multilinguisme et la diversité culturelle sont une réalité. Lorsque

je me suis rendue sur le terrain, j’ai été quelques fois déconcertée par ces situations toutes plus différentes

les unes des autres. Ce travail représente pour moi l’occasion de développer une thématique que je

trouve intéressante et cohérente vis-à-vis de la réalité du terrain d’aujourd’hui.

Je suis donc partie de la question « Comment favoriser la prise des paroles des enfants allophones ? »

pour développer ce travail en faisant le lien entre ma pratique et des recherches théoriques que j’ai

réalisées.

Je me suis rendue compte au fil de mon stage que la langue maternelle des enfants allophones et

bilingues pouvait avoir un réel impact sur leur prise de parole en petite classe maternelle. En effet, j’ai

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Comment Favoriser la bonne prise de parole chez les enfants allophones en classe maternelle ?

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remarqué que les enfants avaient souvent des difficultés au niveau de la syntaxe et du lexique mais

avaient aussi des difficultés à prendre la parole, en particulier en grand groupe.

Mais j’ai aussi pris conscience que les enfants allophones n’ont pas de réelles difficultés à apprendre la

langue d’enseignement. Ils développent de bonnes connaissances métalinguistiques, connaissance qui

vont au-delà des caractéristiques linguistiques de chacune des langues. Je pense également qu’ils

acquièrent une réelle ouverture d’esprit vis-à-vis des différences en sens large. Il est vrai qu’on accuse

un certain retard chez les enfants allophones, bilingues comparés aux monolingues, vers deux ans et

demi et trois ans. Mais ce retard, principalement au niveau de la richesse du lexique, sera finalement

vite comblé. Sur le long terme, les enfants assimilent le français, langue d’enseignement. Bien entendu,

il faut qu’il y ait des conditions propices à cette bonne acquisition. C’est pour cela que j’ai relevé les

conditions qui me semblent très importantes au niveau de la sécurité affective et de l’étayage de

l’enseignant. J’ai, par exemple, retenu que l’entourage joue un grand rôle dans cet apprentissage dans

la mesure où il donne des repères linguistiques, une valeur aux deux langues ainsi que de la sécurité à

l’enfant. J’ai également compris qu’il était indispensable que l’enseignante encourage ses essais-erreurs

et valorise cet aspect culturel pour la bonne estime de soi, facteur essentiel au bon développement du

langage. J’ai aussi retenu que la famille joue un rôle primordial non seulement sur la bonne acquisition

de la langue maternelle mais aussi sur la bonne acquisition de la langue d’enseignement.

J’ai tenté de mettre en lien les connaissances que j’avais acquises sur cette thématique par mes

recherches et mes observations, avec des activités que j’ai eu l’occasion de tester en stage et des

activités que j’aurais souhaité tester. Ce ne sont pas des activités spécialement réservées uniquement

aux enfants allophones. Elles conviennent également aux enfants francophones chez qui les enseignants

ont comme but de combler certaines difficultés ou seulement travailler la bonne acquisition de la langue.

Les trois dernières années m’ont apporté de nombreuses expériences. A la fin de cette dernière, J’ai

cette impression d’avoir appris beaucoup en peu de temps. Tout ce que j’ai traversé, toutes les rencontres

que j’ai pu faire m’ont fait grandir autant professionnellement que personnellement. Je me sens plus sûre

de moi et capable d’appliquer ce que j’ai appris. Je retiens particulièrement les cours de didactique,

les stages et les ateliers professionnels de développement. Je suis persuadée qu’ils me reviendront

rapidement à l’esprit lorsque je serai enfin sur le terrain en tant qu’enseignante.

Cette dernière étape de ma formation qu’est le travail de fin d’études m’a donné l’occasion de m’outiller

d’avantage et de me sentir mieux préparée à la réalité du terrain comme je la conçois : pleine de

différences. Je vois cette diversité comme une richesse et j’ai le souhait de promouvoir les valeurs qui me

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Comment Favoriser la bonne prise de parole chez les enfants allophones en classe maternelle ?

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semblent liées tout au long de mon futur parcours d’enseignante : le respect, la découverte, la tolérance,

le partage, la différence.

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Bibliographie:

Abdelilah-Bauer, B. (2006). Le défi des enfants bilingues. Paris : La Découverte.

Boisseau, P. (2005). Enseigner la langue orale en maternelle. Paris : Retz.

Brissiaud, R. (2006). La maîtresse, elle est gentille, mais… . Paris : Retz.

Florin, A. (1991). Pratiques du langage à l’école maternelle et prédiction de la réussite scolaire. Paris :

Presses Universitaires de France.

Florin, A. (1999) Le développement du langage. Paris : Dunod

Florin, A. (2011). D’une langue à l’autre. Journal des professionnels de l’enfance, n°70, pp. 54-55.

Florin, A. (2014). Le développement du langage. Journal des professionnels de l’enfance, n°89, pp.

79-81.

Goies, I. (2015). Français et didactique, le développement du langage de 0 à 3 ans 1NPS. Syllabus,

Ecole Normale du Brabant wallon, Louvain-la-Neuve.

Huette, O. (2009). Mon premier grand livre de mots. Paris : Fleurus.

Mettoudi, C. (2008). Comment enseigner la maîtrise de la langue en maternelle. Paris : Hachette.

Moro M-R.(2011) En ligne : http://www.yapaka.be/video/les-enfants-de-migrants-passer-dune-

langue-a-lautre, consulté le 03/06/16.

Moro, M-R. (2015). La violence envers les enfants, approche transculturelle. Bruxelles : Yapaka.

Rober, J-M. (2009). Manière d’apprendre pour des stratégies d’apprentissage différenciées. Paris :

Hachette.

Petit Larousse 2004 (2003). Paris : Larousse.

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Annexes:

ANNEXE 1 : MODELE DE WHEELER ET ROUE DE PAQUAY

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ANNEXE 2 : PREPARATION DE L’ACTIVITE J’AIME/ JE N’AIME PAS

Objectif : amener à parler d'eux et de leurs goûts dans le respect de soi-même et des

autres.

Axe : développement personnel

Compétence ciblée :

Se connaître, avoir confiance en soi : Reconnaître et exprimer ses besoins, ses goûts, ses

sensations,...

Compétence(s) sollicitée(s) :

- PAR4.1. Orienter sa parole en fonction de la situation de communication

- PAR4.2. Élaborer des significations/contenus

- Connaître l'autre et ses différences: S'intéresser aux autres

Matériel :

-images de sports, d'animaux, d'aliments, de personnages

Organisation :

Les enfants sont assis à table avec l'enseignante. 6 enfants à table.

Timing :

15 min.

Situation mobilisatrice :

L’enseignante dit aux enfants qu’ils vont faire un petit jeu avec des images et qu'ils vont

pouvoir parler de ce qu'ils aiment et de ce qu'ils n'aiment pas.

Activité :

2 I

1 1. Des images (d’animaux, d’objets, de sports…) sont posées sur la table. Demander aux

enfants de choisir une image, « un ami » (ou deux).

2. 2. Demander aux enfants de nommer ce qui est représenté sur l’image et d’expliquer pourquoi

ils ont choisi cette (ces) image(s) comme « ami(s) ».

3. 3. Après le tour de table, demander aux enfants s’ils auraient voulu avoir la même image qu’un

copain et pourquoi.

4. 4. Demander aux enfants de choisir une image qui représente quelque chose qu’ils n’aiment

pas.

Accueil-M1

J'aime/Je n'aime pas

Fiche de préparation n°

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Comment Favoriser la bonne prise de parole chez les enfants allophones en classe maternelle ?

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5. 5. Demander aux enfants de nommer ce qui est représenté sur l’image et d’expliquer pourquoi

ils ne l’aiment pas.

Retour :

Elle demande aux enfants s'ils ont aimé faire cette activité et s'ils auraient voulu dire autre

chose sur les images ou parler de leurs goûts sans les images (mise en projet pour une autre

séance?).

Anticipation :

1. Certains enfants vont peut-être se disputer pour la même image.

2. Certains enfants vont peut-être avoir des difficultés à expliquer la raison ou les

raisons pour lesquelles ils ont choisi une image.

3. Certains enfants vont peut-être vouloir beaucoup parler, ce qui pourrait limiter le

temps de paroles des autres.

Solutions :

1. L'enseignante laisse l'image au milieu de la table et dit aux enfants qu'elle leur

donnera à chacun lorsque ce sera leur tour de parler.

Par exemple : ce qu'ils préfèrent faire à l'école, le moment où ils se sentent le mieux,...

2. L'enseignante leur pose des questions, leur demande si c'est quelque chose qu'il

connaît bien, leur demande ce qui leur a plu sur l'image,...

3. L'enseignante rappelle bien qu'il est important que chacun ait un temps de parole

comme les autres et que si un enfant a beaucoup de choses à dire, il garde ses idées

en tête et aura l'occasion d'en parler à la fin du tour de table ou à un autre moment.

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ANNEXE 3 : PREPARATION DE L’ACTIVITE DE LA DISCUSSION AUTOUR DE L’ALBUM DE LA

MASCOTTE

Explo

Objectif : Amener les enfants à parler, expliquer discuter de situations connues.

Axe : implication dans le milieu

Compétences: - PAR4.1. Orienter sa parole en fonction de la situation de communication

- PAR4.2. Elaborer des significations/contenus

- Se connaitre avoir confiance en soi : Reconnaitre et exprimer ses besoins, ses gouts, ses sensations,

ses émotions...

Matériel :

-Album de Mimi

Organisation :

Groupe de 5-6 enfants maximum autour d’une table.

Timing :

10-15 min.

Situation mobilisatrice :

L’enseignante montre l’album de Mimi et demande aux enfants ce que c’est et s’ils savent ce qu’ils font

faire avec.

Activité :

1. L’enseignante demande aux enfants de trouver les pages de l’album de Mimi qui les concernent.

2. Elle leur demande d’expliquer chacun leur tour ce qu’ils ont fait avec Mimi en s’aidant des

images. Elle les laisse parler sans les interrompre. Si les enfants sont à l’aise, elle leur pose

des questions pour aller plus loin.

Ex : Qu’est-ce que tu as fait après ça ? Tu t’en souviens ? Où es-tu allé ?...

3. L’enseignante pose éventuellement des questions sur la vie de l’enfant, ou par rapport à des

moments vécus qui n’apparaissent pas sur les photos.

4. L’enseignante encourage les interactions : elle demande, par exemple, si les autres enfants

font la même chose que ce qui a été décrit par l’enfant qui parle.

Retour :

L’enseignante demande aux enfants s’ils ont aimé parler de ce qu’ils avaient fait avec Mimi.

Classe d'accueil-M1

Exploitation de l’album de Mimi

Fiche de préparation n°

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Comment Favoriser la bonne prise de parole chez les enfants allophones en classe maternelle ?

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Anticipation :

-Certains enfants vont peut-être avoir plus de mal à parler.

-> L’enseignante les encourage à parler en leur posant des questions ou en amenant les autres enfants

à poser des questions.

-Certains enfants vont peut-être ne rien dire du tout.

-> L’enseignante passe à un autre enfant avant de revenir vers celui qui ne parle pas. S’il ne veut

toujours pas parler, l’enseignante n’insiste pas. Elle observe si l’enfant fait des commentaires lorsque

c’est à un autre enfant de parler, sinon elle l’encourage sans le forcer.

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ANNEXE 4: EXEMPLES DE COMPTINES POUR TRAVAILLER LE LEXIQUE ET LA SYNTAXE .